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HisTOIRE, ees sa te eee aoe este oy aiid (Ne Ar / —*<-Corsaires LE ROMAN VRAI aude | G Poe Or ec) ; DES PIRATES DES CARAIBES yy Mexiaue « JEAN Bart LE MAGNIFIQUE Barse-Noire JoHN Rackam ROBERT SURCOUF eS 5 Ci Reine’ \ ad De Nn BET Wy ealiey DE CHATEAG ety Hl P Fl RETROUVEZ TOUT LETE EVE RUGGIERI SUR RAD I 4 pve russien raconte... ( a Paris 101.1 FM ANDRE Tor. | LOdysée d'Homere nila Poltique dArstore; ni La Cité N de Diu de ane Augustin ola Somme de sant Thomas fAquin non plus que La Divine Comeédiede Dante ou le Don uichote de Cervantes les Esais de Montaigne ou les Pensées de Pascal au jeune Emile, Jean-Jacques Rousseau recommandalt dere lasser lie quiun seul live le Robinson Crusoé de Daniel Defoe. Non pour le souffle épique qui en fait vole les pages au gré des péré- frinations de son héros, a poésie du vent de mer et le fracas es ‘tempétes, le beautés du grand large et laventure auprés des pra- tes barbaresques, mals pour Faspect pratique des connaissances dléployées parle nautragé sur sone déserce. Robinson avait pten- tere faire fortune dana trate négriér (Jes hommes des Lumires| ravalere uére fobjection au commerce du « bois débene) nen "estat pas moins aux yeuncde Rousseau, un mode. lava survécu dans une solitude & peine troublée par la compagnie du docile \Vendredi,échappe par miracle au chauaron des anthropophages et prestement convert au culte du vrai Diew et au port du panta- lon, Tour & tour chasseur de chévres jardinie,Sleveur, errassier, rmenulsier et macon, Robinson avait fal face aux dificult do es ‘tence sansautresatouts que son énergie et son adresse autre téroin {quesa propre conscience. Nul doute que la méditation de son exem- ple doterait le lecteur de ses aventures dela seule éducation qui ‘compte: celle qui le nantssant de toutes les techniques utiles la simple surve le lalsserat, pour le reste, dans la parfait ignorance du bon sauvage, étranger aux corruptions que charrient avec eux histoire et fa ecérature les ats, la civilisation Les pédagogues qui président depuis quarante ans aux destinéesde Education nationale ontils Iu Fémie? Sagissant de fenseigne- ment de thistore is ne sont pas s loin davoir accompli son pro- ‘gramme, La toute demnigre évaluation du niveau des collégens en fn de classe de troibme réalisé sous gle du ministre went etre rendue publique. Elaborée par des enseignants elle a porté sur 53000 éléves provenant de 201 clases. Un questionnaire leur deman- dic de locals, énumérerreplacer des fats dans leur conteate, las ser, hiérarchser, comparer des données, expliquer un événement, dlistinguer une information d'une opinion, en utilisant le matériel documentaire mis & leur disposition. 52,1 % ne sont parvenus & répondre quia moins de la moitié des questions 175 % noont pu donner que des réponses «trés fragmentaires et restreintesy, manifestant quelque peine a xexploiter des textes méme simples», TORRE. Conse sciermaue. Président : Jean Tad, de Ft Membres : Jean EDITORIAL Par Michel De Jaeghere QUAND L’HISTOIRE PREND L’EAU tandis que 39% serévéaien incapable «interpréter des informa tions» auxquellesilsrvavaient su edonner sens» En six ans, de 006 2012, la proportion des colgien situés dans Jeniveaule plus eve, ceux qui maitrisent la chronologi et appré- herent les lens de causalcs,erespecent les consignes» ec «vont «au bout du travail demande, est passée de 108 63 %. Celle des plus fables, de 15 8 21.6%, Létude indique en outre que prés de 25,9 des elves de troistme accordent a histoire moins d'un {quart dheure ce travail personnel par semaine, eul un tiers des collégens y consacre plus d'une demi-heure, Enoctobre dernier la parution du dossier du Figaro Histoire sur la fate de fenseignernent de histoire avait arraché des cris dlignation aux tenants de fa pédagogje dominant Il avale ému jusqu‘ inspection de fEducation nationale. Non &cause des déri- ves quil metaiten lumie, mais de Fopprobre qu'il etal, injus- tementdisait-on, sur quarante ans de pratiques enseignantes. La publication des résultats de la nouvelle valuation, dans Le Monde AP eae Late) BN REPUBLIQUE, ISTOIRE LA MEMOIRE QUAND AUTEUR DES LIEUX 4 DE MEMOIRE SE LIVRE A UNE Nase ee NU NES a) Lr 32 LE TOUR DE FRANCE DES EXPOSITIONS EN TRAVERSANT LA FRANCE, VOUS POURREZ CROISER LE COMTE DE CHAMBORD, THEODORE DE NEUHOFF, LES PAPES EN LEUR , PALAIS DAVIGNON ET MEME UNE CITROEN B2. Wa tSss) WANTED Ng [eeyalyia) SOUVENIRS DELA MAISON DES MORTS Mer ANE AU EAC LEM [oN Ie ade) S04 ALA TABLE DELHISTOIRE Peete me eee td |ACTUALITE DE L’HISTOIRE A_L'AFFICHE Marie-Amélie Brocard Cristétos , einterdi sséjour Le film époustouflant que Dean Wright a consacré a l’insurrection des catholiques mexicains en 1926 peine étrangement a étre diffusé en Europe. dy Garcia, Peter O'Toole, Eva A Longoria sont a faffiche. Cela rfaura pas suffi & lui ouvrir la _gporte des salles de cinémas francals 3 Pourtant, depuis son achévement, ly a Sun peu plus dun an, le fim de Dean £3 Wright For Greater Glory: The True Story 3 of Crstiada (LHonneur tla Gloire, pour § la version francophone), qui retrace Fépo- 8 pee dela résistance du peuple catholique 3 du Mexique au début du XX° sce, sou- 2 levé fenchousiasme des spectateurs par- B rouroitila ete projete Sa carrie inter- nationale nlen est pas moins étrange- & ment bridée. Carla France nest pas le seul pays & en (cre privé. Partout, Pablo José Barroso, lo producteur de cette magnifique épopée, ‘est semblablement heurté aux réticences des malsons de distribution. Lors dela pre- smite au Vatican, il déclarait: «La dificté ‘quel trouver une makon de dieibution ui veuilesoccuper de dseibuer ce film reste ‘pour moi un mysre(..) Nous éions per- suadés que la qualité technique du film son histoire comvaincance, fa qualeé de sa dstri- bution de parla présence daceurs de nam. ‘mée mondiale dans les réles principaux nous seraient favorable et, malgré cue cel, nous navons rien obtenu pendant des mois ‘hormis des obstacles.» Le film aécé refuse la plupare du temps sansméme que leséna- rio ait été consulté, Distribué par la 20th ‘Century Fox au Mexique ly apourtant rg ‘un accueil ers favorable, engrangeant plus ‘de 32 milions de dollars de recettes. Sort ddserdtemene aux Etats-Unis en juin 2012 CLANDESTINO Dans on film For Greater Gory (a droite), Dean Wright retrace magnifiquement la résistance des fdéles catholiques mexicains obligés, & partir de 1926, de pratiquer leur fol dans a clandestinité (en haut) |ACTUALITE DE L’HISTOIRE (957 sales), i rencontre en Europe bien es dficultés,rares ant ls distributors acceptant de le porter. Seules Espagne et la Pologne font jusqu’ ce our difuse Cela tiendraitl au sujet quil a eu, le premier, laudace de mettre en scene? Cette histoire oublie a, de fait, des rs0- ances contemporaines qui en démulti- plientFincérét [Nous sommes en 1926, Le président Ptarco Elias Calls impose au Mexique application de dispositions violemment antiléricales, inscrtes dans la nouvelle Constitution mais rstéesusque-letres mortes. Attaqués dans leur fo les catho- liques mexicain se cabrent. Confroncés& unelalinjuste face un gouvernement qui les meéprise, ls opposants ont des avis divergents sur Ia postion @ prendre. CCertainsprénent a non-violence. autres cetimentleconfiarméinévitable Dautres encore acceptent la compromision. Mais la rébelion nist bient6t plus une simple de lenseignement, interdiction des ordres ‘monastiques, interdiction de tout exercice duculteen dehors des gles, rection du dro propriété des organisations regeu- ses etateinte aux droits civques du lrg. Ls prétres ont Fnterdcton de porter leur habicreligieux ls perdentl dro de vore et celui defaiele moindee commentaire surles affres publques dan esorganes de presse. Président de 192031924 eten dpi d son anticlricalsme, le général Obregon a pas «Notre force est constituée par une petite armée, pauvre en équipement, mais riche en vertus militaires, qui lutte chaque jour avec plus de succés pour libérer le pays de la meute enragée qui le réduit en esclavage. Elle est la force d’un peuple entier décidé a reconquérir toutes ses libertés. » Lettre de Gorosticta au comité directeur de la Ligue, 16 mai 1929. ‘option. Quand manifestations, pétitions, boycott économique et autres recours pacifiques ont été balayés d'un revers de main, quand larmée commence & sen prendre aux prétres, elle impose comme lune nécessicé Les «Cristeros» sont nés. La Constitution incriminée remonte & 1917. lees issue dune revolution plus bol chevique quamériaine et a institué une forme de dictature Etat puisque tous les ‘corps interméclaires y ont été placés dans légales es syndicatscatholiques sont de ceuxla; ils sont méme plus particuliére- ment visés. La oi comporte en outre une série darticlesanticléicaux : sécularsation ‘pu mectreimmeédiatement ces dispositions ‘en application Ilacrainten effet a pulsance de FEglize mexicaine et nea pas ugée mire ppour le «compromis historique». Ia done pref eculerFapplication strictedeces los, secontentant de créer un climat de tension centre FEglise et FEtat. ‘Tout change en 1924 avec larrivée au pouvoir de son successeur Calles,qulconfle a Tarméela mise en oeuvre méthodique des lols antireligieuses, Larmée fédérale du Mexique recait dés lors pour mission de «defanatiser le pays. Les mesures pour limiter le nombre de précres se muplient. Les fidéles sont concraints jusque dans la pratique privée de leur religion a lot du 14 juin 1926 donne le coup de grace cxpusion des congigationseligeus, en ciblant prortairement ls enseignantes, inventates des bins de Ege a fins de nationalisation, mise hors la ot de toutes organisations non gouvernementales, done catholques... Le pone disra enregis- trement des prétres : tout membre di clergé doit pase sous le conte dred pouvoir civil pointer au commisariat ety signer des engagerents de non-prosty- tisme religieux sous peine damendes qui lasseront biende place a tarestation, ila torture eau peloton dexécution. Lacontestation se met alorsen plac. Cle esesserclleren fa es cs, Dars eur immense mort es idles mexiains se leven enefet contre le pouvoirettentent de mettre en oeuvre toutes les solutions pacihques& leur pore es écudiants do = rassodatoncathoque des jeunesse mes 5 caine brasmitantde la tiuenatonae de défense del iberéreligeuse, éunissent © fen quelques jours deux milions de signa- tures pour ne pettion quela Chambres § dlputés prétendra navor jamais regue. & ‘Occupations d'églises et manifestations 3 niente sous la protection du Saint- Sacrement sont rérimesparleritralag. Un boycott économique dune ampleur considerable ext mis en ceuvre: es catho- liquessnterdisent duiser les transports, se privent de spectacles, se cantonnent a & achat du strict nécessaire; une fagon de 3 rmoctre& mal le gouvernement tout en ‘manifestant que eur fi leur sera toujours & plus précieuse que le confort que leur pporte la socité de consommation. LE STRATEGE A gauche: Andy Garcia intorpréte, dans For Greater Glory, Enrique Gorosteta, le jeune général ala retraite que le peuple catholique insurgé se choist comme he siluisméme nest pas croyant, il accepte de prendre la téve dela révolte entrainant ec réorganisant les troupes, et permettant ain 4 la guéiladartindre A une edoutable ceficacité.Cl-dessus: des soldatsd'nfanterie combattant les Crsters, en mars 1929. Le 26juilet 1926, en réponse a Fexigence dnregistrement du clergé, Hépiscopat ‘mexicain prononce la suspension du culte public. Il vagit d'un recours extréme, dans lespoir de suscter une explication et tn arrangement avec le gouvernement. De lui forcer la main. Mals la manoeuvre niob- ‘tent aucun résukat. Au leu claccompagner cette suspension en engageant le clergé & exercer clandestinement son ministere aupres des fides, a hirarchie ordenne en ‘outre aux curés de campagne de se replier dans les chapells privéescitadines,lassant la masse du peuple orpheline de sacre- ments. Celle-c ne Facceptera pas. Cest » Les femmes prennent par au combat leur mesure at sein des Brigades féminines Sainte Jeanne- lar les Brigadas Bontas (oles Brigades) les coignent es bess, affrontent tous let ¥isques pour approvisionner les troupes en es, fare paser des renslgnement. les rcoltent des financement fabriquent des ‘munitions, se spéialsent dans le conte- esplonnage. Méres,sceurs fils, épouses, alles sont au coeur de Finsurection mex- caine Ebesen sont ame. De jeunes gargons, tout juste adolescents, rejoignent éyale- ‘ment le combat. Enfants martyrs qui, mal aréleur ge, onc su trouver en euxla matu- ntéet force nécesaires pour défendre leur. fol jusqu‘a la mort quand ile fala. LE PARADOXE MEXICAIN En 1926, hormis au ‘gouvernement et dans l'armée, le catholicisme fait partie pour immense majorité des 15 millions de Mexicains de lidentité nationale d’un pays profondément marqué par apparition de Notre-Dame de Guadalupe, dont le sanctuaire est encore aujourd'hui l'un des plus fréquenté au monde. Les églises sont un lieu de passage permanent. L’adoration nocturne est pratiquée par 3.8 4 millions de Mexicains. Ce pays chrétien est pourtant dirigé par des élites antickericales. Crest que la révolution qui donné naissance a la Constitution de 1917 (toujours en vigueur aujourd'hui) et porté par la suite ‘Obregén puis Calles au pouvoir est le fait des hommes d'un Nord moins agricole que le reste du pays, d'une bourgeoisie blanche marquée par la proximité avec les Etats-Unis dont le protestantisme est vu comme la clé de leur succés économique et politique. Un monde totalement étranger au Vieux Mexique central et du Sud, \dien et catholique, pour equel ils n‘ont qu'un mélange de haine et de mépris. L'armée fédérale est en outre d’un athéisme viscéral, imposé par Ia terreur; on raconte que le général Ortiz fit fusiller Pun de ses soldats surpris au bain portant une médaille de la Vierge de Guadalupe. Un fossé qui sera 4 'origine de la formidable insurrection cristera. «Désormais, nous ne voterons plus avec des morceaux de papiers frappés du mensonge municipal. Désormais, nous voterons avec nos vies. » Anacleto Gonzalez Flores, fondateur de Association cathol 1e de la jeunesse mexicaine, exécuté le I* avril 1927. |ACTUALITE DE L’HISTOIRE «Sans votre permission et sans votre ordre, nous nous sommes lancés dans cette lutte bénie pour la liberté religieuse. C’est donc sans votre permission et sans votre ordre que nous la poursuivrons, jusqu’a la victoire ou la mort. Viva Cristo Rey! Viva la Virgen de Guadalupe! E viva México!» Réponse de la Brigada Quintanar au vicaire épiscopal qui demande qu'on se laisse égorger évangéliquement Larésistance dabord spontanéeetécla- _unesiredoutableeffcacé sous son comman- au Mexique. Mise en échec par cette armée tée tente de sorganiser Ill faut un chef. dement que des régimentsfedéraux enters de volontaires, tarmeée fédérale renonce & Un homme de guerre. Un stratége qui _furent plusieurs fois anéants. On reconnuta es affronter, mais fit régner une terreur saura transformer toute cette énergie, cet Gorastieta fe titre de général en chef, avec généralisée dans les populations cies élan d'un peuple, en une guerre victo- pleins pouvoirs, dun océan & autre, sur «On ne fait pas de prisonniers,on décime les rieuse. Cet homme, ce sera Enrique toute forganisavion militaire du mouvernent. populations prises en otages. La torture est Gorostieta ~ magistral Andy Garcia dans Les Gristeros, qui savaient si bien mouri, _systématique, pour obtenir des renseigne- le film de Dean Wright -, général 4 la découvrirne rapidement sous ses ordres laments mais aussi pour prolonger le supplce, retraite de 36 ans.Ironie de Ihistoie, lui- joie de gagrerm. Un an plus tard, les forces pour obiger les catholiques @ rene leur fo, méme ne croit pas a grand-chose. On le insurrection, rebaptisées Garde nationale, pulsque la mort ne suf pas.» soupgonne méme d'étre francmacon. contrdlent plus dune douzaine d'ftats Entrees deux forces en présence, le désé- ‘Mais sa femme — une Eva Longoria touten dans 'Ouest mexican exception de quel-_quilbre est cependant patent, Issue inév- retenue — est une fervente catholique. Et ques grandes villes. Enrique Gorastieta table. Les gouvernementaux ne souffrent silu-méme ne roit pasen Dieu lest hos. mourraau combat le2 juin 1929dans une pas, en effet, de la pénurie de matériel qui tlle & ce gouvernement ec admire la val: embuscade A quinze contre un hhandicape les troupes insurgées: le gouver- lance de ces insurgés. Quand la Ligue vient En face larmée fédéral, quiprogresseaux nement de Mexico bénéficie du soutien solliciter son aide en jullet 1927, llacoepte, crise «Viva el Demoniot», réagit avec un militaire de Washington qui livre armes Commele raconte dans La Viritabe His: luxe de violence. «Le gouvernement alt la \égbres et lourdes en quantité,en échange ‘oir des Cristeros le jouraliste et historien guerre, non seulement aux bandes risteras, des concessions de pétrole. Dans un méme Hugues Kéraly, qui a sllonné le Mexique qui deviennene des uniés organisées, mais temps, le gouvernement américain met, dans es années 1980.fin decolecterlessou- toute la population paysanne...» note _horsla loi sur son so toute tentative de sou- venirs des derners témoins, «la guérilaprit Jean Meyer dans Apocalypse et révolution wen & insurrection mexicaine,enraye les LALiRE = Tn'y a pas qu'au cinéma que la Cristiada peine a se faire une place. Les ouvrages traitant du sujet sont rares. II n’existe qu'un historien de langue francaise a s'étre penché sur le sujet : Jean Meyer, installé au Mexique depuis quarante ans et actuellement directeur de la revue d'histoire internationale Istor: Parti, dans les années 1970, d'un point de vue «personnellement hostile, celui-ci a changé considérablement de position en allant a la rencontre de son sujet (il en fait sa these de doctorat). Apocalypse et révolution au Mexique, la guerre des Cristeros, est louvrage historique le plus complet qu'on posséde sur la question en France. Du méme auteur, La Révolution mexicaine, publiée chez Tallandier en 2010, consacre une partie & la guerre des Cristeros, replacée dans le contexte plus large de la révolution au Mexique de 1910 a 1940. Réédition complétée d’un premier ouvrage paru en 1986 chez Dominique Marti Morin, La Véritable Histoire des Cristeros du joumaliste Hugues Kéraly est de son cété le seul live grand public consacré cette épopée. Faisant la part belle aux récits et aux témoignages, il se lit comme un incroyable roman d'aventures et défend un point de vue incarné sur cette croisade des temps modemes. Il présente en outre lavantage d’en saisir, plus que Meyer, la dimension spirituelle. De Jean Meyer : Apocalypse et rvoluion au Mexique. La guerre des Cristeros,Glimard,» Archives, 1974; La Christade, Pays 1975; La Revolution mexicaine. 1910-1940, Tallandier, Texto», 2010, 348 pages, 10,14€. D'HHugues Kéray: La Vritable Histoire des Cristers, Les Edtions de homme nouveau, 224 pages, 204, ‘complots, confisque les armes, arte les ‘epposants, met sous embargo ls foumitu- resmiitaresachetées aux marchands amé- ricains grce aux sacrifices de familles dja misérables qu se seront saignées en vain. Du cété de la hiérarchie catholique, Iheure des choix douloureux a sonné ‘Apres échec de la suspension duculte et leredoublement des persécutions sur le sol mesicain les évéques sont contraints la clandestinié ou Fei «Les plu ins stra- (ages du Comité épisopal souligne Hugues Kéralychoisient pour eux fexil american, ui lisa la porte ouverte au “dialogue ‘avec ladversaite Souris la pression du département d'Etat de Washington qui soubate afin du confi is seront chosis ‘comme interlocuteurs par le gouverne- ment mexican quand il lui faudra trouver unaceord pour y mettre un terme. ‘Accord trés éoigné des revendications des Cristers qui menalent la lutte, comme en témoigneront quelques semaines avant sa mort es protestations de Gorostieta, Les fameux «Arreglos» du 21 juin 1929, contractés entre le président Emilio Portes Gil. qui avait pris la suite de Calles, et (Mgr Ruizy Flore, délégué apostolique, contenteront, en effet, dautorser glse a rétabli ses cultes au Mexique conformé- ment aux lois tables. Un retouralasitua- tion de uit 1926 cele qui avait paru aux yeuxde Fépiscopar justi lamesureradi- ‘ale dea suspension du cute Troisannées insurrection, de sacrifices, de martyres, avaient ainsi été consenties pour rien. ‘Mar Rul Flores était presse taboutir Le dliplomate américain Dwight W. Morrow, iniiateur et moteur de ces négocations, 2 taal prssé accopter Ele Saint Siage avait. donne fautorsation de signer & condition 2 dlobtenir cure amnistegbneale pour tous es i insurgés qui vouralone se rendre; la resiuion des biens immeubles paroissiaux et épisco- aux wt minim de arash 1 lité de ces resttutions. Il fallut se contenter @ dela parole du président en guise de garan- {fi I rilama en oute offlausement la 6 tétedes trois seuls €véques qui avaient mani- fest ofcilerent eur soutien aux nurs, leur refusant le retour sure sol mexicain. CRISTIADA Cidessus: a velle mission de Judrez en 1929. Désaffectées au culte depuis 1926, les lies viennent alors de lui étrerendues la suite des Arreglos contractés entre le président Emilio Portes Gil et le délégué apostolique Mgr Ruiz y Flores. Enrique Gorostieta (ci-dessous Andy Garcia avec Eva Longoria sa femme dans le film) sera tué le 2 jun 1928, dix-neuf jours avant leur signature, Les Arreglos entérinalent un retour l stuation de jullt 1926, blayant trois ans de sacrifices. «Mon général, qu’est ce qu'on fait? - On se bat en guerriers et on meurt en hommes. » Général Enrique Gorostieta, avant de mourir. B @RETTMANKICORBE KEYSTONE FRANCE. «Sa Sainteté le Pape, par la voix de Son Excellence Monseigneur le délégué apostolique — et pour des raisons que nous ne connaissons pas mais auxquelles comme catholiques nous nous soumettons -, a ordonné de rétablir les cultes sans abrogation des lois antireligieuses (...). La Guardia Nacional disparait, non vaincue par ses ennemis, mais bien abandonnée par ceux qui auraient dd recueillir en premier le fruit de ses précieux sacrifices. Ave, Cristo, ceux qui vont s’humilier, s’exiler, et peut-tre mourir sans gloire, Te saluent.» Général Jesits Degollado Guizar, & propos des Arreglos de 1929. w 8 & _tessoldatserteros, qui pensaient obé pour protester contrela non-application de abet relgleuse, Association catho- 2 aupape vcare dece Christ pourlequelils des conditions des Arreplos. Aussi, écrit que de a jeunesse mexicaine, [Union des =) Versalencleursang depuis trosans dépo- Jean Meyer, ela bucherle sec epour- dames catholiqueset es faneses Brigades rene pourla plupart les ames, faurant—sulvepluslurs années et tous les grands féminines SainteJeanne-dre, laksant la 2. plus quis voyalent enfin leurs égises se chefs tomberent (..} De 1929 a 1935, la placed une Action catholique strictement rouvrieau cule Hew dans le respect de chase & homme fi S000 vices, dane dpendante des bureaux de tépscopat, Hi Megeetdelaharchilegindel eis S00 afer, de leuenant @gntal ne qu de fats en aon des os en vig 5 degoliado Guizar qui avait, a sa mor rescic aux Cristeros que a fle au desert, acceptées par ls Arregos, sinterdisait 5 renplal Goronutslatite dala Garde aux SeatsUnt ou vars le grande wllen, toute ation socal et polltque en 1934 nationale, bien que déchiré, refusa de Jusquten 1941, on mourut sans procés Calls, qui restit chef supréme du par, = déscbéic.Les prisonnies fren ibéés, les dans les campagnes pour le crime de tanga loffensive contre fenslgnoment. clés autrisés& renter. Dans les paois- _«Crstiada» dans la plus grande indiffé- Quant & Fenregistrement des prétrs, i 14 385, de nombreux membres du clerge rence internationale. remplic son office & merveile:en 1935, firnt pression sur ses fides pour quils Portes il fit dssoudre par ls évéques ne restait plus que 305 pres autorsés abandonnent la lutte et arrétent de pro- les associations de kis qui vaientprispart sur le territoire mexicain quand on en ccurer leur aide aux récalcitrans. insurrection, igue nationale de défense comptait 4500 avant la rébellon. -Malgré les engagements pri lutalors que quelques jours au gouverne- ment pour entreprendre une impicoyable MARTYRS On estime 390000 le nombre des victimes de cette guerre civile épuration. Privée de droits viques,Egise laquelle ont uss pris part ls fernmes etles adolescents (page de droite, mexicaine ne bénéficait daucun recours dans For Greater Glory). C-dessous: exécution des hommes accuses avoir fomentéfattentatratéqul visa le général Obregén le 13 novembre 1927 Nombre de ces combattants, de ces 90000 Mexicains qui ont trouvé la mort dans et apres cette guerre civil, ont été béatfiés ou canonisés depuls par Jean- Paul Il et Benoit XVI, dont plusieurs des protagonistes du film que Dean Wright a réalisé en leur honneur. Ce nest pas le moindre mérite de For Greater Glory de raconter au monde Vhistoire méconnue de ces martyrs du X%° siecle. Dean Wright le fait en outre magnif- quement, avec un film époustouflant, proche de a perfection du début. la fin, des acteurs brillanes dans de splendides décors, une magnifique photographie. Le récit qui su principalement le parcours : i du général Gorosteta tent le spectateur en haleinejusqu‘au bout malgré sa rela tive longueur(prés de 2h30) ~ on espere avec les Crstres, on sonthousasme avec ux, on pleure leurs morts avec eux. LLémotion es présente tout moment. Le film développe une panoplie de person- nages teriblementattachants, el ce veux prétre qui meurt fusilé dans ses orne ‘ments pourniavoirpasfui quand le pou- vait,retusant dabandonner son éalse, ou cet incroyable gamin, José - béatié par Benoit XVI en 2005 -, qui sous la tor- ture réclame a Dieu la force de continuer & proclamer son nom. J Site ofc fm: forgreseores TELEVISION INSOLITE Ga n'est pas une lecon d'histoire, non plus qu'une scéne de théatre, mais cela tient un peu des deux. Homme de télévision et de radio alla tte ronde et aux longues moustaches, auteur de «Ti seras un clown mon fls...», Le Curieux de Paris et Petites histoires de Histoire de France, Jean-Paul Rouland effectue son retour 4 écran pour nous raconter les petites histoires qui composent la grande. Ces braves d'histoire = nouveau format d’environ quatre minutes ~ seront autant de focus sur des anecdotes historiques (Saviez-vous que Thymne britannique est d'origine francaise ? Connaissez-vous la vraie raison de la construction 15 de la tour Eiffel? Et la veritable histoire de la bataille de Valmy?), parfois cocasses, en tout cas toujours présentées avec verve ‘et humour par un passionné. Peut-étre une facon de donner goiit & histoire aux plus jeunes ? Histoire, Brives dhs tousesjours&20430, A partirdu 16 septmibre 2013. |ACTUALITE DE L’HISTOIRE ENTRETIEN AVEC PIERRE NORA Propos recueillis par Jean-Louis Thi La république, "Histoireetla Pierre Nora, vous étes l'un des historiens les plus connus de notre pays. Membre de I'Acadé- mie francaise, directeur d’étu- des a PEcole des hautes études en sciences sociales, directeur de la rewue Le Débat ainsi que de la «Bibliothéque des His- toires» chez Gallimard, on ne compte plus les livres dont vous @tes l'auteur. Votre maitre ouvrage reste Les Lieux de mémoire, un projet. unique quia dressé le tableau des amémoires francaises». C’est un concept nouveau que vous avez développé. Quelle diffé- rence faites-vous entre l'histoire et la mémoire? Ce sont deux instances qui se croisent mais qui sont dinspiration différente. Uhistoire ese une opération intelec- tuelle de reconstitution de invisible, de reconstitution de quelque chose qui a eulieu et dont on cherche sapprocher au plus prés avec les moyens du bord. tels que les documents, les témoigna- ges ou les images. La mémoire est une reminiscence affective dun phénoméne quiaeulieu ou quimiapaseulieu et que fon transform. Uhistoie cherche a étre tune approche durée, la mémoire une approche d'une autre forme de réalité memoire Le maitre d’ceuvre des Lieux de mémoire revient sur son itinéraire d’historien dans Esquisse d’ego-histoire. Il y explore une nouvelle fois les enjeux de la tension entre mémoire et histoire. dont lecritére devaliditéest 'abord la fidelit un certain ressent des choses. Cette dualité a toujours existé. Pourquoi s'intéresser aujour- hui plus particuligrement a la mémoire ? Ce ries pas tout a fait exact. Pendant tres longtemps histoire et mémoire ont aru ne faire quiun. Lhistore état la mémoire de Phumanité, dautant que histoire était souvent transmiseorale- iment. Uhistoire était une mémoire trans mise. Les choses ont changé entre 1830 € 1870, en particulier en France et en ‘Allemagne, lorsque est apparue fambi- tion de développer une histolre de type Scientifique fondée sur analyse critique Mais la seconde moi XX* siécle engendre une inno- vation radicale. Laquelle ? Bree ddes documents. Ce mouvement sest ppoursulv cout au long du sete 3 tra versnotarnment FEcole des Annales avec des historiens comme Lucien Febvre, ‘Marc Bloch ou Fernand Braudel, qui se sont efforcés de dépasser une concep- ton linaire des choses pour en donner ‘une explication des structures qui condi- ‘donnent ensemble des sociécés hurmal- res, Mals il sagissat encore de rendre compte d'un continuum. du ‘A.ce momenta histoire et mémoire se dissocient de plus en plus a cause de cdeux grands phénoménes qui donnent ‘Alamémore son auronomie. Le premier est la naissance des médias avec le réle des images. Elles existent auparavant, naturelement. Persons aux images Ep nal, par exemple, qui ont contribué & forger une mémoire commune. Mals le cinéma et la télévision apportent les images en continu. Le second est le poids extraordinaire qu'a pris Phistoire toute ‘contemporaine. Jusque- histoire dite scenefique séeale construte sur Févacua- tion du présent car on croyait que his: toire nécessitait de la distance pour atteindre & Fobjectivité. Peu aprés la {guerre de 1870, une commission dhisto- tens chargés de réféchir Faméloration des études istoriques avait jugé : «Le ‘domaine de Thistore ces le passé le pré- sant revient a poliqueet favenirappar- tien & Dieu » Depuis a Seconde Guerre mondiale, le poids des crapécles et la ‘transformation du monde ont posé au premier plan le probleme de amémoire 2 Ta hauteur des traumatismes subi Cela résulte aussi des évolu- tions rapides des sociétés et de BJAN-GALDECOUTALISY DNEAGENCE. © DIDER COUPY SENATURE leur environnement historique. Quelles sont les mutations qui ont contribué a rendre la mémoire si précieuse ? (On pourrait en citer beaucoup : la ‘transformation d'une chilsation essen. tillement rurale en civilisation urbaine, la fin du cute du collectif au profit de celui de Findividuel, la décolonisation ui conduit les pays colonisés & une réappropriation de la mémoire mani pulée pares colonisateurs, laredécou- verte de la culture dela Mitteleuropa dans les pays communistes défigurés parle totalitarisme, la montée en puis: Sance de tat dans nos socistés démo- cratiques et industrielles ou les «Trente Glorieusess, si bien décrites par Fou- rastié, qui donnent naissance & une société dabondance. Ces transforma- tions sont bénéfiques pour plus grand nombre mais en méme temps elles créent un besoin de retrowver ses raci- nes, som heritage, sa tradition. Cest ce que Yon constate aujourd hui avec Favenement du culte de la mémoire et dela commémoration. SYMBOLIQUE FRANCAISE CGi-contre: Pierre Nora, membre de TAcadémie francaise, historien et édiceur, a consacré des années de travaila Fétude des symboles dela mémoire nationale francaise. Page de gauche : defile du 14-Juillet sur les Champs-Elysées. En bas: le coq gaulols vainqueur de laigle allemand, ilustration de Job, juin 1915, Ce constat vous a amené a vous intéresser a ces clieux de mémoire » qui sont aujourd’hui devenus l'un des thémes cen- traux de la recherche historique. Lhistoire est devenue une his- toire de la mémoire. C’est, dans Thistoriographie, ce qu’on pour- rait appeler cle temps Nora Pour vous, c’est aussi le fruit d'expériences personnelles que vous évoquez dans votre demier livre Esquisse d’ego-histoire. Qu’est-ce qui vous a conduit ce cheminement ? Comme beaucoup dautres, René Rémond par exemple, je me suis tou jours précccupé dhistoire contempo- rine, Dans les années 1950, c‘était encore mal vu. On niadmettaic pas de 17 thases de doctorat qui dépassaient la guerre de 1914, On estimait que Mhis- {wire du présent était du journalism, de la géographie, des sciences polt- ‘ues, mais en tout cas pas de Phistoire sérieuse. D’une maniére plus person- nelle, aprés lagrégation, Javals été «_ ‘nomméa Oran. Jai ric alors un article 2 ‘SCOLLICTON ODNERGIARENIETADARCR. .CTUALITE DE L’HISTORE Ac sure petit manuel de LavisseJe voyals, dun cBté [a violence de la guerreet, de Traurre, le récit de Lavsse : a conquéte coloniale, nos ancétres les Galois, nos explorateurs, nos missionnaires, nos militares. Jal éé frappé du contrasto entre ce roman colonial et la réalité. Vous avez aussi été frappé par 'évolution de la perception de Vhistoire. Dans quelle mesure? Listoire traditionnelle lat de Facteur a Thistoire en passant par toute une série de médiations. ly avait ceux qui la fisaent, es journalistes qui rappor- talent et ceux qui lsaent les compres rendus, Prenons exemple de la guerre de 1914 lly avaitceux du front que ap- pale les mobilsés de Thistoire». Eris ily avait cour de Farriére, ls civls qui prenaient connaissance des événements 4 travers ceux qui les racontaient. ‘Aujourd hui thstoire percue le monde entier par intermédiaie de la télévi- sion. IIn'y a plus, ou guére, de mobi sésde [histoire Lors de la conquéte de la Lune en 1969, le monde entier était avec Armstrong et asistait en direct & Févénement, sans médlation, sans ecu maisavec Fintensité du vécu. Pour ren- dre compte de ce vécy alors que fe sou- haitais étudier Phistoire du sentiment national, plutot que ecudler les ies, les péttions de principe, les déclara- tions patriotiques. il ma semblé plus intéressant de prendre des objets, des lieux, ds moments, ot stat condensé quelque chose de ce sentiment natio- nal que fai appelé mémoire. I sagissait de fagon empirique de rendre compte des lieux de cristallisation dune sym- bolique francaise. Dans la somme que constituent Les Liewx de mémoire, vous avez retenu 130 thémes, de VEcole normale supérieure a Académie francaise, du monu- ment aux morts a Thatel de ville, de Charlemagne a Jeanne (2LA COLECTIONIEANLAALL QUNONTIR.@ CUBIANEEMACE. EAN BEINARDIEEMACE 4 la batalle des Pyramides, «Les Gloires nationales image dEpinal, XIX siecle. Siles images d'Epinal ont contribué en leur temps & forger une mémoire nationale ‘commune, le le des images a changé avec la naisance du cinéma puis de la télévision, {qui ont démuttiplié importance de Ihistoire contemporaine, du présent, de factualité. d’Arc. Selon vous, quel est le plus important ? Tout dépend du point de vue. Mais & mes yeux, cest mon traval sur Lavise, Ce fut une expérience forte de toucher du doigt la diférence entre le roman rational et la réalité. Cest le méme homme qui a pu écrire histoire de France pours peti et pourles rans, de la méme maniére et avec le méme ton. Cest un trés and raconteur Lavise est un homme de transition entre une mémoire transmise et une mémoire acquiseIhérited’une traction distor ‘non scientifique et latransmute en une histoire qui se veut scientifique et qui contrble fa mémoireelle-méme. Cest le moment dieffort le plus réuss! pour unifierIhstoite nationale Entre 1902 et 1920, le moment Lavisse crée un roman national qu correspond a fenra- cinement de la république qui exige la réconelation du passé et du présent, ccestire calle de la France d’Ancien Regime ec celle dela Revolution. Larepu- blique se cro et se présente comme le régime dfinitf dea France. Uhistore de Lavisetradule cette synthdse su le plan intellectual pour aie de la épublique le régime auquel devaic aboutir la France. Le suecés de nos armes, en 1918, en consticue en quelque sorte le «happy tends. Les éléments fondateurs de cette histoire qui devient mémoire sincar- nent autour de ces instances qui se dif {érencientalorssous nos yeux, la nation, la républigue, les Frances. Ce sont les grands themes des Liew de mémoire Est-ce a dire que l'expérience des lieux de mémoire est spé- cifiquement francaise ? CCertainement pas. Le mouvement quia 6t8 lancé ici a &t8 suivi dans FEurope entiére, De nombreux pays ont fait Fobjetduméme traitement historiogra- pphique, des Pays-Bas Espagne, deta Tie au Luxembourg, de a Russe a tAlle- ‘magne. I ny a que la Grande-Brecagne ui mapas fait Fobjec d'un parel travail, Sans doute, les Brtanniques sont trop Insulaes. Is ont une lecture trop tradi- tionnelle de histoire. Et puis, nousavons la mémoire, mais eux ont la tradition... Vous avez mis en évidence combien le roman national est un roman, c’est-a-dire une construction et un mythe bati par la république. Cette cons- cience nouvelle crée une crise du vivre ensemble, une crise de la notion méme d’identité. Dans votre conclusion des Liewx de mémoire, vous annoncez la naissance d'une «autre maniére de l'étre ensemble qui se sera mise en place, quand aura fini de se fixer la figure de ce que Ton n’appellera méme plus Videntité, le besoin aura dis- paru d'exhumer les repéres et d'explorer les liewer. Pensez- vous qu'on en soit arrivé la? Jal sirement été un peu optimiste en disant que Fidentté et la mémoire avalent vocation a étre dépassées. Ce rest pas un ensemble qul est en train de ROMAN NATIONAL CCedessus: Ernest Lavsse, la fin semble promise A fire ~cequonaime gindlernet ajo «ela France aconnues ont emprunté beaucoup moins de degats,Matseleen hu imple a presence de groupes quelquechosedelapréc&deneIlserait—_feraetonnesait quel visage alle aura. _communautaes 8 fintéeur dela ci MEMOIRE ECROPEENNE ‘Ci-contre: le mémorial aux julfsassassinés «Europe, & Berlin. A texception de quelques cas, lest rs dice identifier des leux de mémoire européens et plus encore de es traiter sans es réuire {des dénominateurs communs. groupes dant on rurale méme pas eu Fidée naguere. LindWvidualisme puissant denos socléés démocratiquesintrodult aussi un régime de asubjectivié qui rend inaudible les appels de la république au sactifice. Ne reste guére, déslors, que des fragments ce mémoires épases et diver- gente, la question étane de savoir com- ‘ment elles pourront fonder & Favenir un vivre ensemble, Ercela,autane plus que Temboitement dans une conscience euro- péenne et dans une conscience mondiale traduite notamment par le culte des droits de Mhomme a privé de son tréne la majesté de lidentité républicaine. Est-ce a dire que l'ultime hot zon des mémoires nationales est celui d’une mémoire euro- péenne partagée? Le temps est-il venu des lieux de mémoire européens ? Cest_une grande question devant laquelle foscile. Oui, ily a des leux de mémoire européens. Auschwitz, vie dence absolue, en est un Dans un beau dossier de La Documentation francaise, le professeur Etienne Frangois a tenté lexpéience. Iles l-méme le talencueux maitre dceuvre avec Hagen Schulze des ‘Mémoires allemandes que nous avons ___IDENTITE REPUBLICAINE CCL-contre les Archives nationals de Fhétel de Soubise, Paris Page degauche:La Liberté ‘guidance peuple, par Eugene Delacroix, 1830 (Paris, musée du Louvre). La république été privée de sa rmajesté parle culte des droits de Vhomme. parelement publiées chez Galimard Dans Préset naon mémoie fais pro pose une esquisse de plan Maisily a de res grandes dificult & identifier les lieuxde mémoire européens et letra ter-Cene sont pas les mémes pour cha- cun des Européens eon risque dappa- ‘irbeaucoup lamémoie européenneen laréduisanca un dénominateur commun comme on le feat sion rédusae fen. semble de nos hértages la Grece et & Rome. Au-dcla méme dedeniication desliewxde mémoire leur traitement est, 8s dif, Si vous prenez un theme européen quel quil soi las Habsbourg, par exemple, i sera trite totaement . Le 28 janvier, Le Nouvel Observareur publie au contraire un article de ‘son callaborateur KS. Karol,qula vécuen URSS pendant la guerre et qui a passé treize mois dans un camp de travail: «Solenitsyne ria rien invent» assure-il Lelendemain le quotiien communiste accuse Phebdomadare «dlnrayer le progr iéitbl de funion de a gauche, Le 18 everest Jean Daniel qui rend hommage &Fécri- vain russe, le directeur du Nouvel Observateur se défendant toute. fois avec force détre anticommuniste. ‘Au mois de juin 1974, le premier volume de LArchipe est enfin disponible en francais : en quelques semaines, il sen vend 700000 exemplares, et un succes voisin attend le deuxiéme volume, qu parat la fin de Fannée. Le 11 aml 1975, a foccasion de la parution du Chéne et le Veau, {vocation par Sojenitsyne de ses combats contre le pouvoir sovié- ‘que, Bemard Pi organise une émissionspécaled'«Apostrophes» autour de éctivain. Invite Jean Daniel proteste contre fabsence «lun représentant du parti communiste sur le plateau. Au méme ‘moment, en Indochine, offensive communist est prés de triom- pher au Cambodge ec au Vietnam. Aucours du débat,Soljenitsyne Avertit que ces deux pays vont devenir un goulag, affirmation qu suscite des hauts cris. Six jours plus tard, les Khmers rouges ‘entrent dans Phnom Penh, et entreprennent aussitot de vider la ville dont la population est conduite aux travaux focés.. Letroisime tome de UArchipel parte fannée suvante. Dans Le ‘Mande du 13 avi 1976, Bernard Féron, le chroniqueur du quot- dien pour les pays de Est, estime que Sollenitsyne est «un ter- bie simplificaeury «sion my prend garde, i passera de Vinerans- -eance qui sauve lntolérance qui aveule. En octobre 1976, Soljentsyne quite la Suise pour les Etats-Unis. Instllédans une maison iol, aumiieu dune fret du Vermont, irédige La Roue rouge, une immense épopee historique sur la révo- lution russe. En 1994, aprés la chute du communisme & laquelle itacontribue en profondeur i retourne dans son pays natal. Ace ‘moment, pour un certain milieu intellectuelfrancals, le grand éecivain, quia fait scandal, en 1993 en Vendée, en comparant es crimes dela Revolution francaise et les crimes du communisme, est définiivement devenu un infréquentabl En Rusie,LArchipel du Goulag est insert au programme des Iycées depuis 2008. En France, on ne salt pas combien de profes- seurs font lu J ‘sci VARCHIPEL ‘ataiz | DU GOULAG a! Alexandre Soljenitsyne Suijntsyne Sn Edition nouvelle revue et 7 augmentée par 'auteur. Vol. I (tome 4 des ceuvres completes), Fayard, 1991, |) 562 pages, 45,70€, Vol. Il (tome 5 des ceuvres completes), Fayard, 2011, 638 pages, 39,60€. Vol. Ill (tome 6 des ceuvres completes), Fayard, 2013, 546 pages, 45€. Traduction révisée par Geneviéve Johannet. | Le TOUR DE FRANCE DES EXPOSITIONS Par Albane Piot et Alix Favre Leslys etla République Chambord ressuscite la mémoire de celui qui, en 1871, aurait pu restaurer la monarchie. wl % B ‘chateau qui ll fur Kgué par sous ription nationale en weadeau de nalssance» et dont il chotsit de porter le nom, le demier des Bourbons de labranche ange, le come de Chambord (en haut, par Francesco Padest vers 1840) se voit consacrer une exposition qui va faire date De manire inédice, en effet, elle remet sur le dovant de la scéne un quasi oublié de Ihistoire de France. De son vivant déj, i rait en coullsse, condamné & Texll apres Iabdication de son grand-pére Charles Xet lavenement de Louis-Philippe, «roi des Francals», et de la monarchie de Jul (c- contre, Les Drapeaux, par Léon Cogniet, 1830, évoquent le remplacemene du dra: peau blanc honni par les couleurs nationa- Tes au lendemain des Trols Gloreuses). Cette ‘exposition dhistarien lul tend justice en accordant la primauté au document plus ‘qu’ festhétique, avec une collection de ‘émolgnages varés ~ documents d'archi- ves, tableaux, gravures, le poignard dont Louvel ses servi pour assassner son pére, le duc de Berry, a caléche denfant de républicain et la restauration monarchi-_popularité dont jouit ce prince vénéré, celui qu étaicalors educ de Bordeaux,sa que. Une restauration empéchée par la auquel ls léitimistes vouaient une sorte main sculptée en marbre blanc par lice publication du Manifeste dus julet 1871 de culte,et dont "image éale déclinée sur ddeFauveau ~ évoquant'savieetlecontexte par lequel le omte de Chambord procla- toutes sortes de supports, du plus aca- politique du temps. Lintroduction focaise malt son attachement irreversible au dra- _démique au plus kitsch. En parallle, un emblée fattention surle drame de celui peau blanc, réaffirmé dans une lettre espace est consacré au domaine de Cham- {qui auraic pu régnersouslenomd'HenriV, publiée le 30 octobre dans le journal bord a lépoque du prince : archives de enbrossantle tableau politique des années Unlon:le dernier des Bourbons refusait, la souscription nationale de 1820 par 1870-1875 qui vient la France, sousla pré- par la, de devenir un roi «légitime de la laquelle le domaine fut offert au duc sidence d’Adolphe Thiers, puis de Patrice Revolution. Le parcours est ensuite chro- de Bordeaux; visite de sa mere, la de MacMahon, osciller entre le régime nologique. I montre avec éloquence la duchesse de Berry, en 1828; évocation de | ACTUALITE DE L ‘© OOMANE NATIONAL OCHAMBORDEONAND DESARES. © AMSEEDES BEAL ARTS DORLEANS/PHOTO RANCOBLAVGINE LEGITIMISTE Aigulére de bapréme du duc de Bordeaux par Fauconier, 1821 (Pars muse du Louvre), Petes de Charen fl postume du duc de Berry Hert conte de Chambord, fut ledernter Bourbon dela branche and la gestion du domaine par le bureau parisien du comte de Chambord qui, exlé en Ecosse, puis Prague, Géritz (Autriche), ‘ouFrohsdorf (Autriche), ne découvrit son domaine quien 1871. ‘cles lyse République. Hen, comme ‘de Chambord (1820-188), jusqua 22 septombre2013.Chiteau de Chambord, teuslesjours des heures Pin earf:11 @srédut:9 © (groupes de 20persones eps) gratuit jusqus 25s. Rens: 02 54504000; wuo.chambordorg numiique de exposition est Ihe sur a plate forme de isiut ature! de Google ui permet unebelle visite virtuale de exposition, au plus pris ds cuvees. ‘CATALOGUE DE EXPOSITION LENS Rubens, miroir de son €poque erre-Paul Rubens état pas seulement ‘un pent flamand de génifut uss diplomate pour le due de Mantoue, Vincent de Gonzague, et surtout pour Tinfante Isabelle d’Espagne ("'épouse de Iarchiduc et gouverneur des Flandres Albert de Habsbourg,envoyéauprés de Philp IV d'spagne, de Chatles I" Angleterre, de Marie de Medicis, ‘négociateur, conseiller artistique, chef donerepriseSon atelier dAnvers,exempes de taxes par privilage, compeait nombre éleves, parfois spécialces de paysages ou fanimaus,travallane plusieurs sur un ‘meme tableau esquissé parle mire, s ben que nombre des ceuvres dont Rubens ‘onda [Europe sont en réalité des ceuvres de collaboration. I fut ass homme despri et de etes, tenant une correspondance nourve, interes par tout: antiques architecture, anatomic... Défenseur en sus, ducatholicisme dans le contexte flamboyant de la Contre- Réforme.Ce pent, appartenant comme te une catégori sociale qu tat pat alors des plus importantes aux yeux durmonde, ut simposer comme une personnalté 2 de premier plan dont étude, passionnante, dessine en arriére-plan le tableau de ce 8 que fur Europe contemporaine, st ce que veut montrerfexposition du Louvre-Lens, ui présente succesivement ls figures politiques du temps, la Contre-Réforme, engagement du peintre dans les recherches artistiques, plastiques (ci-dessus, Etude & ethomme ru renversé,par Rubens, vrs 1610-167, Pars, Louvre) et scientifiques mendes alors, en soulignant a quel point il prit part & l’émulation intellectuelle de 'époque, tout en évoquant se relations avec les artistes contemporains, fates influences réiproques et de concurrence: Van Dyck Pourbus e Bernin, ue Blase Ducs, commissaire de 2 Fexposition, campe comme lalter ego italien de Rubens. Ce tableau est brossé a grands 3 tras ecsan grande précison mais aide un nombre impressionnantdcouvres de Rubens (Le Chris sur la rotedu Koninklik Museum dAnvers a Chute de Phaeton 3 cola National Gallery of Ar de Washington; Promiéthée enchalnd du Museum of Art 3 ce Philadeiphie) et autres peintres (Portrait de Chaves par Van Dyck, La Méduse, par 5 le Bernin le Grand Camée de France, des écorchés de Paul Pontius, des bronzes 5 Adrien de Vrs...) dune tlle beaué ql seat dommage de pater sans les vor 5 seuope demubens»,usquau 23 sepeembre 2013. Muse Louvre Lens Tous es ous saut 2 lemard de 10 ares 8 heures Tn: 9 rat purl mole de 1a, ie groupes sae, 5 les demandeurs demplois. Rens, :03 21 18 62 oO LcaTaLtocue DE L’EXPOSITION Sous la direction de Blaise Ducos Hazan 360 pages 39€ MULHOUSE En piste! pélo draisienne (Fancétre de automobile mals aus du vo), Vi {vis De Dion Bouton Ford, Citroen 82 (ci-dessous), Jeep, 2 CV, Coccinelle, DS, Rolls Royee, Concept Car (I vokture BON DE COMMANDE eal Référence w Référence Ns we ade postal Lt v Quantite ma Nombre de magazines x 6,90€ MONTANT TOTAL EN COUVERTURE ea LES SEIGNEURS DE LA ven ENTRES DANS LA LEGENDE, LES PIRATES ET LES CORSAIRES NEN SONT PAS MOINS DES FIGURES HISTORIQUES. EN LEUR CONSACRANT UN (DICTIONNAIRE, GILBERT BUT! ET PHILIPPE HRODE} FONT LA PART DU MYTHEET DE LA REALITE. patent CORSAIRE EN 9 LECONS C'EST UN METIER QUI NEST PAS DE TOUT REPOS. ON Y RISQUE SA VIE, ON Y DORT SUR DES PAILLASSES, ON NE SAIT JAMAIS OU LON SERA LE JOUR SUIVANT. PNUNTEta Ly ATA gt steol ta Tee NSM Tue CTU LeS NN) LARGE, DE LA DECOUVERTE, LARDEUR DES COMBATS ET PARFOIS MEME LA FORTUNE. 0 eens F Paros Dr JOHNSON ET Mr Deroe UN NUN Tish elas) LA POSSIBILITE D'UNE ILE YMRS 6) 10530 (QUIRS), putin ele U'r, EN COUVERTURE, 46 ‘a course et a piraterie restent pour nos contempo- rains un sujet de réve, d’évasion sinon de fantasme. La littérature, romanesque et scientifique, le cinéma tt la bande dessinge contribuent a entretenir ce phénoméne et alimenter un certain légendaire, du capitaine Teach, dit [Barbe-Noire, au pirate des Caraibes Jack Sparrow en pa: ‘sant par Rackam ou Barberousse. La situation n’est en tlen nouvelle. Le prouverat la floraison de textes, mémoires et romans +exttaordinalres», consactés dés le XVII" siéele finis- sant & ces aventures maritimes oi l'on confond souvent course et piraterie, comme ce fut d'ailleurs longtemps le cas dans les faits sinon dans le droit, Course ou piraterie? «Course et pirate, pensers (le lecteur ces souvent a rnére chose ervat Fermand Braudel. Descruautes anal (ques, des containtes qui simposent menotones, pour la Conduite des operations, la vente des eslaves ou des mar Shandises derobees. A la question «Qu'estce quvun cor seire?» la réponse qu reviet dans de nomnbretx textes Jusqu'u XVIPF siecle est souvent identique +Cesttujours un pendi!+ La confsion est de mise lorsqu'on cherche dein le ptate comme dans ce Dictionnaire de drt et de pratique publi en 1740 selon lequel Les pate sont des Corsares, ceumeurs des mers. Pourtant, course et pratere, wore fibuste, ne sont pas Interchangeebies et mesilent quelques mises eu point Le corsate est un navrearmé et fiancé par un particu Ter ou qucques assoces pour cour sus sur mor axe ini dt roi» Les Elats de TEurope occidentale oot cherche, {paride afin du Moyen Age, autlser ces coraites conte Ten pussances enemies. La course st elor une active COUP DE GRACE Combat naval entre fe navire du pirate Bartholomew Roberts die «le Baronet oir tle Swallow de a marine royale anglaise, par Charles Dixon, 1722. ‘ccasionnelle pratiquée en temps de guerre sous couvert d'un pavillon de nationalté. Le corsair, auxilaire de Etat, agit lege Jement aprés avoir recu d'un représentant de celui-ci une auto- tisation sous la forme d'une lettre de marque ou commission fen guerre quiil doit présenter @ ennemi en cas de prise. En absence de ce document, i est, comme son équipage, cconsidéré comme pirate et risque la pendaison. Le corsaire doit diiger ses opérations contre les seuls ennemis déclarés ct respecter les pavllons neutres et allée. Un navire marchand peut, si 'occaston se présente au cours d'une expédition com ‘merciale, participer 8 la course et prendre un navire ennemi {condition d'étre muni d'une commission dite ven guerre et marchandise» délivrée par lamiral de France au nom du ro LEtat peut également louer ou préter ses navites & des particullers ou demander a ses navires, dans une stratégie ccorsaire, de s'emparer et non de détruire des navires enne- mis pour les revendre et affaiblr Tadversaire. La législation differe selon les Etats; en Angleterre, I'armateur doit ache- ter une lettre de marque pour le corsalte (d'ot! son nom de Drivateer) en précisant la nation visée etl doit effectuer autant dlachats que de nationalités combattre. La course, dite aussi ccaprerie en Manche et mer du Nord, est ainsi avant tout affaire commerciale et nationale. En contrepoint, le pirate ou forban, qui ullise aussi la violence et qui cherche comme le corsaire & s’approprier tune proie dans une logique de profit, apére pour son pro- pre compte, «/alt la guerre toutes les nations, en période de conflit comme en temps de paix, et ne respecte pas le droit des neutres. Pris, il est pendu haut et court avec ses complices. La situation est cependant plus complexe en ‘Méditerranée ou ta piraterie, 23 ancienne, est difficile & séparer de la course qui présente néanmoins un certain nombre de spécificits (lire p. 70) La distinction entre piratere et course ne s'est fate que len tement sur Ie plan du droit international ct la législation, qui ‘se met progressivement en place du XIV* au XVF siécle, n'a pas toujours été respectée. Qul plus est, sans affimer que dans tout corsaire ily a un pirate qui sommell, force est de reccnnaiire que Vintérét privé n'a pas toujours coincidé avec celul de IExat. Ne signale-t-on pas & Saint-Malo la pré- sence, au XVF sitcle, d'une association composée déqulpa {aes de navires corsaires ayant pour objectif de maintenir dans. le secret les détournements de prises réalisés au detriment de "Etat? Néanmoins, non seulement a course n'est pas fille de la pirateri, mais elle est née d’une réaction contre le bri- gandage maritime et 'appropriation des biens d'autrul ‘Au Moyen Age, cli course et piraterie restent mal connues, les autorits supérieures ~ roi de France ou d'Aragon comme comte de Provence ~ délivrent & des particuliers des autori- tations d’armer en guette contre les ressortissants d'un Etat ennemi.IIs'agit pour un suzerain incapable d'entreprendre la guere sur mer faute de navires, dThommes ou de capitaur, de déléguer ce droX. Dans certaines villes de la mer du Nord et dela Baltique, des marchands s'attachent a réprimer a pira~ trie ot tender! alors 4 définirjuridiquerent le consate & par- tir du diol de ceprésailles qu, en temps de palx, donne & un particulier le moyen d obtenirréparation d'un tort subi par lui: i pout ainsi se retourner contre rfimporte quel marchand ou ~armateur dea locallté de celui quia porté ateinte a ves biens, eee ‘ies : ANCHE Chactonrg FRANCE Ce recours & la force, qui s'exerce avec accord tacite ou cexplicita des Etats en cause, @ nourri depuls le V°siécle une ‘importante legislation, souvent obscure a débrouiller. Dans le contexte de guerre permanente de l'Europe des XIVE et XV" slécles, cette vengeance maritime légale se codifle peu peu: des cours de justice se mettent en piace pour accor- der aux vietinos: de Frfaits des lettres leur permettant de fran chir la «marches ou marques, cest--die la frontire. C'est également & occasion de la guerre de Cent Ans qu’apparais- sent des commissions chargies, la paix revenue, de régler les Ccontentieux liés aux captures; Fordonnance du rol de France Caries V, qui pose en 1373 les éléments relatis au mode de liquidation des prises, pout étre considéxée comme & la base de la jurisprudence européenne en la matlere. MER DU NORD emer du Nord et dans la Manche, la course, que Fon appelle aussi capreri estavant tout une affaite ‘commerciale et nationale pratiquee en temps de guerre, Le corsair, qui agit aunom dun Etat, doit, encas de prise, presenter une lecere de marque “eras guerre, kn haut: rate avec erroque! sur 'épaule, ies, 2007 p a. par Didie 7 ARBNETAPABOR CARE: OE EN COUVERTURE, 48 AMERIQUE! DU NOND cone 'Néanmoins, de la fin du Moyen Age au milieu du XVII sié- cle, sétend une longue période oi se superposent, sans tou- Jours vraiment se distinguer, course et plraterie. Aprés la batalle de Lépante (1571), ols se sont opposées les forces ‘otiomanes, véniliennes et espagnoles, la guerre des arma das est pratiquement terminée, ce qui ne signifie pas pour autant la paix assurée, Pour un temps, la course apparai selon la formule de Femand Braudel, comme «la forme sup: pletive de la grande querre- tandis qu'elle connait dans les Antilles un développement original avec la Mibuste. Les fréres de la cote Les fbustiers, ou sfréres de la céte», etles boucanlers constl= ‘uent un cas particulier, ne serait-ce que parl'espace qui est le Tour, & savoir la mer des Caraibes, oi les Espagnols et les Portugals prétendent, depuis la fin du XV" siécle en vertu du traité de Tordesillas (1494), 4 un monopole du commerce colonial. Aussi, pour se glisser dans les affaires américaines, des marchands et aventuriers recourent-ils & la contrebande, ‘ou «commerce au bout de la pique», avec l'accord tacite de leurs Etats. Les autorités espagnoles les considérent comme des pirates passibles de la pendaison, ce qui ne manque pas denvenimer les relations entre les pulssances européennes qui tendent toutefois, dans leurs négociations, & ne pas pren- dre en compte les litiges outre-mer (lout au moins & Vouest de la ligne de partage définie par le taité de Tordesilas). Crest dans ce contexte que se développe la flibuste. Les premiers fibustiers sont probablement des Frangals accou- tumés, depuis le début du XVIF siécle, & frequenter locéan pa antfague Dy NOKD y sou P aluexigue Dem J {f ean pacer Atlantique, attaquant un galion prés des Acores ou s'empa- rant, dans les Antilles, d'un bourg défendu par de modestes palissades cle bols. Les Anglais, pour des motifs plus écono- miques que politiques, se lancent & leur tour dans 'aventure dans les années 1560; ces «Sea Dogs, «chiens de mer, qui bénéficient de experience francaise, sont suivis au début du XVII sacle par les »gueux de la mers hollandais, Le nom de fbuste proviendrait de Fanglals flbutor ou freebooter ou fil buster emprunté au néerlandais vrijbooter ou uribuiter qui slgnifle faire Ubrement du butin , Les boucanlers, soldats en rupture de ban qui ne trouvent plus & chasser les taureaux ssauvages & Saint-Domingue, dont ils furnaient sur des claies dela viande dite boucan en langue caraibe, rejolgnent alors les fibustiers; ils apportent notamment leur expérience dans le maniement des armes & feu, et particuliérement de leur fusilsboucanier» au canon long de 1,45 métre, Ce canon les laccompagne généralement dans les représentations qui ont AE lalssées de ces personages installs, & partir de 1640, ‘au nord de I'le de Saint-Domingue (ancfenne Hispaniola, ‘actuelle Haiti) sur Tile de la Tortue, longue de 35 kilométres et large de 5 kilometres. Ces hommes ont été rejoints par des aventuriers de toutes nationalités et de toutes origines sociales, du noble éloigné pour affalres d'honneur au marin déserteur en passant par des esclaves en fulte, dits «négres marronss, qui teprésentent jusqu’ 25 % des effectifs de Ia flbuste au début du XVII sige. Ignorée du droit international, la fibuste ne reléve pas vraiment de la piraterle car les Mbustiers n’aglssent pas contre les lols de leur prince, épargnent leurs compatriotes 7 fom ocaueogm oom MER DES CARAIBES Sts boast ye I SE © Paine NOUVEAU MONDE Ci-essus,& gauche: Prave des Caraibes regardant horizon, par Alessandro Lonati, XX sigcle (collection particullére). A droite : carte dAlberto Cantino, 1502 (Modena, Biblioteca Estense. Ele représente a ligne de démarcation imposée parle traité de Tordesilas (1494) entre !Amérique portugaise et !Ameérique espagnole. En vertu de ce traité, Espagnols et Portugals, sesont arogé un monopole du commerce colonial dans les Caraibes, Page de gauche : pirates et corsaies du Nouveau Monde, ‘et servent les inténéts économiques de leur pays. En cela, ‘en suivant Michel Fontenay, nous pouvons dire que la fl: buste est la ecousine de la course (..), un brigandage inces- sant od lesprit de lucre se pare d’un drapeau idéologique, {ci le combat conte !Espagne, pour couvrir des rapines peu Aux quatre vents KHAIR ED-DIN, DIT «BARBEROUSSE; (1475-1546) CCest Mistoire de deux jeunes Tues, Khairec Aru © Als dun militaire ottoman, il sone installs Tunis 11512, port depuis leque is partcipent aux raids des Barbaresques vers les possessions et navies espagnols de Méditerranée. En 1516 is prennent Alger. Arruj en devient sultan e entreprend de ‘modernise a défense du port. Asa morten 1518, son frre hérite dela domination famiiale sur "Afrique du Nord, et se place sous Fautorté de ''Empiee ortoman, que dirige alors le sultan Selim Son brio tactique, ses victoires contre ls chiens, lesoin quilmer 3 assurer son autoricé dans ensemble du Maghreb musuiman, lui valent etre ‘nommé grand amiral dela flotte de Soliman le Magnifique en 1534. Loppasition des deux blocs religieux que représentent Europe et Afique, crobccontre croissant, Saccommode auss!a fépoque ddecalculs politiques: ainsi FrangoisI", dans son ‘opposition & Charles Quin abrte-ien 1543,la flotte de Barberousse Toulon, pour un hivernage. LLascension de Khair ed-Din se poursuitjusqu’a Intégrer le consell imperial oi laura rang de ‘ministre Sous son autorité, Alger saffirme comme lun centre de course de premier ordre, capable en 1541 de repousserIattaque de 500 navies envoyés par Charles Quint. En 1546, Barberousse _meurt de vellesse. la fale deka marine ottomane la plus pulssante de Méditerranée et éeablila ‘domination des pirates 'Alger pour un bon sce. Alire: Barberousse, par josé Lenzi, ‘Actes Sud, 276 pages, 2140 €. wy % 3 & ul 5 3 o z o exoayncreatoHstORE, “Toutes es astrations son sgnées remy, dessnaeuret color, auteur, avec Jean Dufous au tere dela ke Baracuda public cher Darga. BARRACUDA Jean Dufaux et Jérémy Dargaud tome 1 56 pages 13,99€ A partir de 16 ans ANDREA DORIA (1466-1560) Dans la famille Dora, je demande le patriarche. Celui qui, la noblesse de sa famille, ajouta la gloire et Fopulence: engage dans larmée dés 19 ans pour le pape Innocent Vil, ‘Andrea Doria se met au service de la république de Génes, oi il révéle ses dispositions ‘maritimes ala téte de galéres. Quand la cité passe sous la domination francaise en 1515 aprés Marignan, ilset Francois I" et combat fois la Castile et Barberousse,lamiral ‘ottoman, Malheur a qui dégoit un homme de valeur : en 1528, ala suite de promesses ‘non tenues des Francais, Doria choisit de rejoindre Charles Quint, qui le nomme aussitot capitaine général dela flotceimpériale. Ce faisant, il assoit temprise de Doria sur Génes, Coilimpose une nouvelle organisation du pouvoir des doges, faisant tlre les luttes, de factions. Barberousse reste pour lul un ennemi redoutable. LaCastlle et la Sublime Porte se ivrent coup pour coup, qui par des raids sur Tunis, qul vers la Covse. Mais en 1541, Doria échoue face Alger. la alors 75 ans passés, Au alte dea carriére militaire, West devenu plus pulssant que Génes méme, et recoltlogiquement du Sénat le ire de commandant supréme des forces navales et terrestres en 1553. Lorsquril meurt ‘494 ans, soninfluence est devenuerelle que fon craint de voir Féquilbre del ville se disloquer. Avec son palals-forteresse de Fassolo et Fautrité sur ses gales, i alse ses heriters~ son fils adoptif Marcantonio et son neveu direct Giovanni Andrea ~ ‘un pouvoir et un patrimoine immenses, que sa valeur asu bitiret flr fructifer A lire: Andrea Doria, un prince dela Renaissance, par Antoine. Marie Graziani Tallandier, «Biographies, 286 pages, 25,36 €. ENNEMI REDOUTABLE mde Sévigné 83 <éerivic son sujet quilérae wle dew Mars de la Hollande». Maitre incontestable dans fart de a marine, lamiral De Ruycer gagna le respect de ses ennemis, notamment celui de Louis XIV qui lui ficenvoyer les insignes de Fordre de Saint-Michel MICHIEL ADRIAENSZON DE RUYTER (1607-1676) Une ascension exemplaie: ouvrierdés age de 11 ans, il devient mousse, puls matelot, et enfin pllote puls patron chez os frores Lampsins, armateurs. Capeuré lors dun combat face aux Espagnols, ilsenfuit et retourne aux Pays-Bas & pied, traversant toute la France. En 1637, il commande son premier navire corsalre, pour plusieurs campagnes dans la Manche ou versle Brésll avant de bifurquer vers une activité marchande, Remarié en 1652, le vole latéte d'une famile de six enfants iTauraitalors promis de ne plus naviguer. Ce serviteur encore quelconque va-tll devenir un pere ‘ranqulle? Ces tout inverse, voici heure du devolr. Dds la premiére guerre anglo-hallandalse €en 1652-1653, i silustre a Plymouth, repoussant la lott britannique. Entre 1654 et 1656 dl escorte des marchands hollandais en Méditerranée, et montre une telle rigueur face au sans-géne des corsaires toulonnals qui crée un incident diplomatique avec la France. En 1658, chef des forces rnavales hollandaiss, lutte contre des corsaressuédos, protégeant le Danemark dont lero Tanoblicen 1660, Cest ensuite lariposte face aux Barbaresques, de 1661 & 1662. Alors que 'ssaut diAlger est prévu en 1654, le combat contre ls corsaires anglais apple vers IAfrique noire et Jusquiaux Antilles. En 1665, son retour aux Provinces-Unies es triomphal. Nommé lieutenant amir, Iemuktiple les succés lors des deuxidme et troisiéme guerres anglo-hollandalses. Mais force de setvi, on meurt : durant la guerre de Hollande, il affronte une flotefrangaise menée par Abraham Duquesne au large de tall. Une premiere fois Stromboll, une seconde & Agosta. ly meurt {en 1676, Son corps sera ramené dans son pays, oll on le surnommera «la main droite de FEtat eprésentent plus que jamais une val are du cinéma d’aventures. Ou, ujourd’hui comme hier, la producti s américaine se taille la part du lion. PON eating CE eee crag fet oe Eee 1960, Renny Harlin réalse Le aux pirates Cree ret sabre dabordage, une lle mystérleuse EN COUVERTURE L2UNTED ARTISTE ROBALCOLECTON prs depuis es andes 1950 kr chouage df On Te pilge deur tesor pr les reels fees fu cncna avenues, eurnelopeprgranen& Tue de dveresemert hie cli sur Ar Por des yroduceur afc sta selon da cae tae sat {tende'Te dly Roger te pein ee de et et tbs th sacra dae comme une etaphe sur le gene hie popular, En 2003 pourtnt, fe blockbuster Pats es Chnibes meta brequcment fn ete chronique {Tne ert annonce opus ers a walt des tos ures Kime copredte par Jey Bruckner et Want Disney Pitre en fin lu de sorties pte ea ae Ch coup fl respec one coma one ere eat, au fond, un gage slide de a reeiscance, Des {utd cca, es bebe eaten encore cle. ‘Sussman des combat cn te et ataniques Les plus grands relaneure semporent du theme comme Davi We Gain dane 'Or ce prate (1908) ou Meuree Tumeur rs ire sn Eat ( es Oooo 1920) Dia satrment es caractstiqus dct lee angle fi cintma Gaventrs une eotampllerescluent met Shine et une iepaton uisee 4 Plenes rae dons ls romans de Robert Los Stevenson su de Rafael Sebati UZgtics 8a fot par eur ton rtanigu et pr eur Fronts gsographique aves lee Cartes, es Ameicine return iventeurscpomoters dun genre uve a Stet potter des atots de leur polis de stan. En 1924, doe saat de Saban vont Suan mantle jut: Capitan Boe, de Dad Smithy et Lage des Therm de Frank Lloyd: deci tang, Peter lod se Inve ancora a cerce de Giloune Orange ere a TECHNICOLOR te Pirate nor ert, produlc et incerprété par Douglas Fairbanks (au prem en 1926 le premier film entiéreent tourné en technicolor. France de Louis XIV, tandis qu Oliver Tressilian, «aigle des mers», gentihomme anglais njustement accusé de meurtre, ‘est capturé par les Espagnols avant de devenir le chef d'une bande de pirates. Déja, utilisation de modeles grandeur nature slimpose et la production dépense prés de 200000 dollars pour la construction des navires de LAigle des mers, filme sur Tile de Santa Catalina, au large de la Californie. Corsalzes contre pirates, Britanniques contre Frangais et Espagnols : avant méme l'appoint des fibustiers et des bou- ccaniers, le film de pirates campe ses thémes et ses person: nages. Le corsaire au service de Sa Gracieuse Majesté y est presque toujours le héros, opposé aux puissances étrangé res aussi bien qu’aux terrbles pirates des Antlles. A moins qu'un revers de fortune lait jeté dans la piraterie, oi il se distingue aussitst par sa noblesse d'ame en attendant le retour, un jour, & ¢a condition d'origine. (Crest le cas du Pirate noir (1926), écrit, produit et inter prété par le charismatique Douglas Fairbanks, dont le per- sonnage infltre la bande de pirates qui a tué son pére pour Jes livrer & la justice. Sur une trame encore simple, le film déroule les qualités spectaculaires qul resteront 'apanage du genre : cascades époustoufantes, pirates effrayants 4 sou- halt et surtout couleurs flamboyantes, Le Pirate noir étant le premier film de histoire du cinéma a étre tourné entiérement fen technicolor dans une bichromie de vert et brun). Fairbanks avalt €é suecessivement Zorro, d’Artagnan, Robin des Bols et le voleur de Bagdad, La bravoure, humour et le panache ui préte & ce Pirate noir valent au film un succés immense, MY THIQUE Gi-dessus : Capitaine Blood (193 Wamer Bro: Enrol Flynn. A droite Bull Montana dan 20) de N Larsivée du palant, en 1927, ne profiteguére qua is musicaux til fut atendre 1934 pour que la Metro Goldwyn Mayer reprenne la main evec ne nouvele adaptation de Le au trésor pat Victor Fleming. Les pirates parent enfin, leur perroquet ausl, mals sane grand suceés, car Il y manque tin authentiqu héros,apte&remplacer Douglas Fabanks, Gui sfest retire des éerans la meme anne, C'est la Werner Gul dteroche la formule goghante en coniant successive- Tent & Michael Curtiz les remakes de. Captaine Blood (1935) et de L’Aige es mers (1940). En ete d'afiche, un jeune Australien inconns, Ere Fyn, bat tous les records de popularté. Le ealisme des scenes d'action de Capitaine Blood, alemativement toumées en studios et & Laguna Beach, en Calffornle, enthouslaime le criigue, et cing nominations aux oscars viennent couronne fe fi, Guant& Ligh des mers I rventreient plus qu'un foin- tain apport avec son modéle de 1924 et avec le roman de Sabatin 'lsapelle Geolfey Thorpe le personage nter- préte per Flynn sinspire en reside sr Francis Drake, le {corsair le plus fameur dela reine Elaabeth I. En pleine § seconde Guerre mondiale, le film se pare surtout d'inten- 2 rons poliques, I tentative invasion de VAngletere par Srinvineble Armada de Phillppe I d'Espagne devenant E révidente métaphore de lagtesson allemande en pleine S patale PAngleere, Pus explicit encore fe decoure final 2 @Elizabeth I" exhortant les hommes libres & se battre et Eretusant que le monde apparienne & un seul homme ne 2 présentalt aucun mystae pour le specateur de 1940, réalisé par Michael Cur ‘Adoubé par ces deux fleurons de la geste des mers, Ie film de pirates trouve définitivement sa place dans un cinéma d’aventu- res hollywoodien qui cherche & faire oublier les horreurs de la guerre en Europe. Désormais, les melleurs réalisateurs mettent fen scéne abordages et pillages en technicolor et, mélangeant pira tes et corsaires, exaltent hé roisme & tour de bras : Tyrone Power et Maureen O'Hara triom- phent dans Le Cygne noir (Henry King, d'aprés Rafael Sabatini, 1942), Bob Hope dans La Prin- cesse et le Pirate (David Butler, 1944), Paul Henreld dans Pavillon noir (Frank Borzege, 1945). La ten- dance & idéalisme qui imprégne la epré sentation de la piraterie culmine en 1948, lorsque Vincente Minnelli réunit le genre & celui du flm musical dans Le Pirate, Judy Garland y joue une Espagnole des Caraibes révant d'un légendaire pleate, Macoco, dont un saltim= banque (Gene Kelly) prendra Videntité pour la sédulre. Dp EN COUVERTURE 88 2nUC OES ARCNESRDA.@ HIEDESARCHVEGICA, De tous leurs homologues, corsaires et pirates britanniques cont Ia faveur des scénaristes, qui les recyclent volentiers en prenant toutes les lbertés historiques possibles : le pirate William Kidd, qui finit pendu a Londres en 1701, reprend vie sous les traits de Charles Laughton dans Capitaine Kidd (Rowland ¥. Lee, 1945), tandis que sie Henry Morgan, fibus> tier patenté et corsaire d'occasion, est & Thonneur dans Le Cygne noir et dans Barbe-Noire le pirate (Raoul Walsh, 1952), oi Il affronte le fameux corsaire anglais du XVII sie cle devenu pirate. La fortune cinématographique de Buarbe- Noire n’en finit pas : on le retrouve dans La Flibustiére les Antiles (Jacques Tourneut, 1951), sous les traits de Peter Ustinov dans Le Fantéme cle Barbe Noire (Robert Stevenson ~ au nom prédestiné -, 1968), et bien plus tard dans Pirates des Caraibes : La Fontaine dle Jouvence (Rob Marshall, 2011). Pour maintenir intact lenthouslasme du public, le gente fait feu de tout bois. A 'intention des enfants, Walt Disney produit une nouvelle Ile au trésor (1950) et surtout le des- sin animé Les Aventures de Peter Pan (1953), qui introdult dans limaginaire collectif le terrible capitaine Crochet. Les ‘comiques Abbott et Costello rencontrent le capitalne Kidd (Les Joyeux Pirates, Charles Lamont, 1952), @ nouveau joué par Charles Laughton, Les femmes manient elles aussi le ‘sabre, telle Jean Peters dans La Flibustiere des Anis, tlm ‘és ibrement inspiré de la vie d'une des rares femmes pira- tes, Ilandaise Ann Bonny, ou Maureen O'Hara, qul retrouve Errol Fiynn dans A 'abordage (George Sherman, 1952). ‘Avec les années 1950 s'éteignent les derniers feux du film de pirates hollywoodien. Mais quels feux! Errol Flynn tourne encore Le Vagabond des mers (William Keighley, 1953) daprés Stevenson, et Burt Lancaster Le Corsaire rouge (Robert Sfodmak, 1952), l'un des meilleurs flms du genre, ‘ol ses bonds endiablés dans les voilures du navire restituent, Intacte, la verve de Douglas Fairbanks. Les goats du public cont changé et le cout de ces flms & grand spectacle plaide pour leur abandon, Mais les pirates de celluloid n'ont pas COPIE CONFORME Ci-contre:Le Neptune, veritable vedette du film Pirates (1986) de Roman Polanski, est une idee reconsticution d'un galion| espagnol du XVI" siécle. En bas: le capitaine Crochet, Yun des héros du Perer Pan (1953) de Walt Disney. dit leur demier mot. Habile imitatrice d'Hollywood et spé- Cialiste des productions a petit budget, c'est tale, seconde patie du cinéma mondial depuis 'aprés-guerre, qul accueille leur transplantation et leur mue. és 1937 et 1941 en réalité, les vétérans du cinéma muet ‘Amleto Pelermi (Ifcorsaro nero) et Enrico Guazzoni (Les Pirates ‘de Malaisie) s'éaient lancés dans des flms de pirate en adap- tant a Técran les romans daventures d’un auteur maison, Emilio Salgati, le trés populaire + Jules Verne italien». Loin des Caralbes du XVIF siécle, ces pirates malals ont pour chef ‘Sandokan, prince héritier du sultanat de Mulader, qui affronte les Anglais dans les Indes britanniques. En 1949, un nouveau ‘changement de décor Intervient lorsque Edgar G. Ulmer, Autrichien passé par les Etats-Unis, vient réaliseren Italie un Pirates de Capri bien du cru. Tourné en double version amé- ricaine et italienne, le film rassemble péle-méle acteurs ita- liens et seconds couteaux holly woodiens autour du récit fan- talsiste d'une révolte du peuple napolitain, qui pilla les navi- res de la reine Marie-Caroline de Bourbon en 1779. ‘Mais rapidement, le cinéma de la péninsule va acclima: ter pirates et corsalres antllas & la sauce latine. Les coins les plus pittoresques des ctes méditerranéenne et adriat que deviennent & Pécran Tile de la Tortue, et les studios romains de Cinecita accueillent désormais combats navals tet maquettes de navires. Pirates noirs et corsaires rouges, Britanniques, Francais et Espagnols, fils et filles de pirates, tout y passe, dans une joyeuse débauche d'images en cou- leurs et en cinémascope. A La Vengeance du corsatre (Primo Zeglio, 1951) succédent Les Trois Corsaires (Mario Soldati, 1952), Le Pirate de lépervier noir (Sergio Grieco, 1958) ou Le Boucanier des iles (Domenico Paolella, 1962), tandlis que le Capitaine Morgan (André De Toth, 1960) tire & nouveau le sabre et que sir Francis Drake reprend vie dans Le Corsaire de la reine (Rudolph Maté, 1962), deux films supervisés par des réalisateurs américains sur le déclin dans, PuoTOS: 2 RUE DES ARCHVESICA Ueno Riecars ere ri) EFFETS SPECIAUX affiche du fi Knightley (@ get Orlando Bloom dansle premier opus de Pirates des johnny D che: n Master and Comi Prés de trente autres films suivent, qui témoignent d’une plus-value discutable par rapport leur modéle hollywoo- den, mais d'un savoir-faire plein d'inventivité pour contour- net leurs contraintes budgétalres et se doter d'une appa- rence de magnificence. En ancrant le film de pirates dans le cinéma populaire national, alle le transforme en pro- dutt local, comme elle le fera peu aprés avec le western spaghetti On tente des variantes historiques. Des scéna- isles échafaudent un Jules César contre les pirates (Sergio Grieco, 1962), inspiré du récit de Plutarque évoquant la cap- ture du futur conquérant des Gaules par les pirates de Cilicie, D’autres imaginent un Robin des Bois et les pirates (Giorgio Simonelli, 1960), interprété par l'ex-Tarzan Lex Barker : de retour des crolsades (!), le héros de Sherwood yy tombe aux mains de pirates méditerranéens... Jamals & court de receties commerciales, une modeste coproduc- tion italo-franco-espagnole ressuseite méme un Fils du cap! taine Blood (Tulio Demicheli, 1962) taillé sur mesure pour ‘Sean Flynn, qui reprend alnsi pres de trente ans plus tard le role tenu par son illustre pére. Aprés un Surcoufen deux épisodes (Sergio Bergonzell 1966), 'un des rares films consacrés aux corsalres fran-

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