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COMMUNICATION No 8 LES DIFFERENTS TYPES DE CROOTES : LEURS CARACTERES PRINCIPAUX, LEUR SIGNIFICATION CLIMATIQUE JH. DURAND (Algérie) Le terme « croiite » est, en général, employé pour désigner toute formation caleifére de couleur claire, enfouie peu profondément dans les sédiments, L'étude systémalique d’un certain nombre de profils a cradle m’a montré qu'il existait plusiours types de croiites procédant chacun ’un mode de formation particulier ayant chacun, par conséquent, une signification climatique différente, Ces différents types de crofites sont les suivants 1 LA cROUTE ZONAIRE : formation travertineuse calcaire & structure zonée, tres dure, de couleur allant du blanc gris au saumon et qui masque de nombrenses roches calciféres En lame mince elle se présente sous aspect dune pate caleaire & microstructure gru- meleuse, cryptocristalline (a inverse des dépots dinterface et. des travertins bien cristallisés), pauvre en débris clastiques, parmi lesquels peuvent. figurer des foraminiféres (Pl. 1, 11, ILL) Cette erie ses forméo a Pair libre (pauvreté en débris clastiques) parle depot rapide de caleaire (structure cryptocristalline) au sein d’une eau chargée de bicarbonate ce calcium ruis- selant en nappe (struct.re zonée), sous un climat chaud & alternance de périodes séches et humides permettant aux feuillets déja déposés de durcir par exposition a Yair et correspondant a un cli- mat a allure tropicale & pluies d’orage suivies de bréves périodes séches et & température élevée. La mise en mouvement du caleaire se ferait, soit par l'eau de pluie chargse de CO, soit, par Vintervention d’acides organiques produits par la décomposition des végstaux, dissous par l'eau s‘infiltrant, dans le sol Ce premier type de crofte serait done sous la dominance d'un facteur climatique, ee qui expliquerait sa grande extension en Afrique du Nord. Le D? Gonenr qui a trouvé pris de Sfax un racloir moustérien sous cette erode pense qu'elle est contemporaine, en Tunisie, de la derniére période glaciaire d'Europe. Comme d'autre part les escargotiéres des hauts plateaux constantinois contiennent, des débris de crotite zonai ‘ayant servi de pierres de foyer, ne sont, pas recouverles de crodte alors que le paysage voisi est, et sont souvent posées sur la crofte (St-Donat), elles ont été constituées aprés la croate zonaire qui leur est donc antérieure. D'aprés les conditions nécessaires & leur formation, leur fige semble done étre Villafranchien. Au Maroc, Cuounent attribue a la crofite um age Rissien. Il résulte de ces observations que cette crofite semble s'étre formée des époques diffé- rentes en Tunisie, en Algérie et, au Maroe, et quelle ne se forme plus de nos jours. 2° VeNcrotreNeNt : formation dure d’allure plus ou moins scoriacée se_présentant sous l'aspect dun grés a ciment caleaire ou gypseux ou méme salin suivant la nature du matériau encroitant. Des lames minces confirment la nature gréseuse de celte crotte (PI. IV-V} et Pétude des minéraux lourds que les sédiments en place subissent, ce phénoméne quelle que soit leur origine. L'élude des encrodtements in situa montré qu'ils étaient toujours en relation avec tune nappe superficielle riche en matiére encrodtante, Les encrotiements prennent, naissance par dépot de caleaire, de gypse ou de sel dans Ia frange capillaire des nappes superficielles. La nature de l'encrotitement dépendra des sels con- tenus dans la nape dont le dépot se fera suivant deux processus différents : a) encrotitement gypseux ou salin, & la saturation de la solution ; b) encroitement calcaire, a la suite dune diminution de teneur en CO* d’équilibre dans les eaux de la nappe par diminution de pression de ee gaz dans l'atmosphére ambiante, ou par élévation de température. Les conditions nécessaires & la formation des encrotitements sont donc 4a) encroitements salins ou gypseux. — Forte évaporation alimentée par une nappe per- 277 manente et pluviométrie suffisamment faible pour qu’elle ne suffise pas & remettre en mouvement les sels déposés ; b) encroftements calcaires. — Présonce d'une nappe permanente chargée de bicarbo- nate de chaux et température extérieure suffisante pour provoquer l’échauffement du sol et Vévasion du gaz carbonique d’équilibre, ‘Les conditions climatiques sont réunies & peu prés partout en Algérie ol les enerootements continuent a se former de nos jours, mais la présence d'une nappe superficielle, condition essen- tielle de lo formation des encroatements, dépend de Phydrologie locale, il s’ensuit que la pré- sence d'un encradtement daté n’est pas sulflisante pour indiquer, a 'époque de sa formation, un climat désertique. Des enctodtements calcaires et gypseux on peut rapprocher les racines pétrifiges qui ne sont, a Porigine, qu’une variante de encrottement. Be LE CALCAIRE PULVERULENT : formation calvaire, tendre, crayeuse, blanchatre, trés riche en carbonate de chaux et pauvre en autres éléments, Ce sont des boues lacustres comme le montre leur aspect en lames minces (PI. VI) et étude de la morphoscopie des quartz qu'on y trouve. “is sont & rapprocher des calcaires lacustres qu'on rencontre un peu partout en Algérie el. mame dans le Sahara. ‘Leur ‘ge est variable et ils pourraient bion terminer les calcaires lacustres dont Ph. THO- Mas a signalé Pextension a la fin du tertiaire. Certains calcaires noirs ou gris noirdtres qu'on peut trouver dans le Sahara sont aussi des calzaires lacustres qu'il ne faut pas confondre avec des croftes, Crest ainsi que la fameuse crodte de Tihodaine présente tous les caractéres d'un caleaire laeustre : petites coquilles voisines des amnicola et, en lame mince microstructure grumeleuse avec nombreux vides vermiculés caractéristiques, d'aprés Caveux, des caleaires lacustres. ‘A cole du ealeaire pulvérulent, il faut. signaler Vexistence de couches pulvérulentes de sulfate de calcium plus ou moins hydraté que j’appelle pour la commodité du langage gypse pulvérulent. Ces dépots sont dus 4 la précipitation du sulfate de calcium & saturation au sein Oeaux chargées de chlorure de sodium, Vhydratation du sulfate de calcium dépendant de la teneur en chlorure de sodium et de la température de l'eau. 49 Les NODULES CONCRETIONNES ET LES PATINES. — Les nodules se rencontrent. dans les roches argileuses calciféres. Ils se forment par entrainement en profondeur du calcaire dissout par les eaux de percolation dans les horizons superficiels avec intervention probable de la matiére Srganique el depot au sommeL de la roche mere inaltérée, Les patines se rencontrent au sommel es roehes méres calcaires inaltérées sous des horizons meubles & texture grossiére provenant de leur évolution. Elles se forment dans les mémes conditions que les nodules concrétionnés mais la ségrégation du calcaire se fait en lame au liew de se faire en nodule. (Ces deux formations sont dues 'évolution pédologique de roches sous V'influence d'un climat humide, mais elles ne peuvent étre qualifiées de crodte car elles ne forment jamais de dane continu 5° Les NODULES FARINEUX. — Ce sont des amas de caleaire crayeux, qui se renoontrent dans certaines argiles disposées plus ou moins suivant des verticales. Ils prennent naissance par depot du calcaire, en dissolution dans eau qui imprégne largile, dans les vides qui se produisent sous V'influence de son retrait par dessication. Ils seraient a rapprocher des nodules concré- tionnés plutot que des crodtes, eau de dissolution étant généralement d'origine externe et dbja chargée en calcaire au moment de sa percolation, La formation de ces nodules peut se poursuivre de nos jours si les conditions s'y prétent. De ces considerations, il résulte quill est difficile d’attribuer A Ia crodte un role d‘indi- cateur de climat déserlique comme on a Vhabitude de le faire. En effet, la eroOte zonaire exige pour se former beaucoup d'eau et une température élevée ; elle caractériserait donc un elimat Wallure tropicale. Les encrofitements calcaires, zypseux ou salins ont besoin d'une nappe super~ cielle soumise aux effets d'un climat chaud tel que le climat méditerranéen mais pas foreé- ment désertique. Les autres formations, caleaires ou gypses pulvérulents et, calcaires lacustres étant des formations de milieu aqueux ne sont pas caractéristiques d’un desséchement du elimat pas plus d'ailleurs que les nodules concrétionnés et les patines, dus & des processus de lessivage Ges sols, ni méme les nodules pulvérulents qui exigent une humidité du sol incompatible avec un elimat, sec. Seuls des encrodtements gypseux ou salins peuvent, & la rigueur, faire présumer de la possibilité de existence d’un climat- désertique, mais de rien de plus. 278

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