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Analyse

Publié 04/07
le /2016
Hot dog !
HISTOIRE - SOCIOLOGIE
Dictionnaire d'une icône américaine Tags
"Dis-moi ce que tu manges, je te dirai ce que tu es". Le gastronome : A propos de l'auteur
Jean Anthelme Brillat-Savarin (1755-1826) aurait-il savouré la Amérique du Nord
justesse de son aphorisme appliqué aux Etats-Unis ? En aurait-il fait -
une saucisse plutôt qu'un fromage ? consommation
Aymeric
Produit de grande consommation dès son apparition à la fin du 19e Bôle-Richard
siècle, le hot dog est une icône majeure de la culture populaire états-
unienne. Selon le National Hot Dog and Sausage Council, les
Américains en consomment chaque année 20 milliards, dont 155
milllions lors de la Fête nationale du 4 juillet. L'histoire de
cette saucisse enveloppée d'un petit pain et réhaussée de
condiments témoigne des valeurs constitutives de la société
américaine : melting pot, esprit d'entreprise individuelle, mobilité
urbaine, abondance... Le hot dog alimente la fantastique fabrique à
images que sont les Etats-Unis, toujours enclins à se mettre en
scène. Cinéma, musique, art contemporain, mais aussi publicité,
storytelling politique et pornographie : tous manipulent cet objet culte
de l'américanité.

Nourri des cultural et food studies anglo-saxonnes, ce dictionnaire


propose ainsi une lecture de la culture populaire nord-américaine
contemporaine. Enjoy your meal !

Tel un hot dog, composé selon l'envie du moment, ce dictionnaire ne


nécessite pas une lecture linéaire. Cliquez sur les lettres de l'
alphabet selon votre appétit !

A;B;C;D;E;F;G;H;I;J;K;L;M
;N;O;P;R;S;V;W
ART CONTEMPORAIN

(Contemporary art)

Symbole de l' American way of life basé sur le consumérisme et le


patriotisme, le hot dog fascine de nombreux artistes. Apparu dans
l'opulente décennie des années 1950, le mouvement Pop Art
joue avec le graphisme immédiat et l'ironie de cet objet standardisé.
En 1961, Claes Oldenburg est l'un des premiers à en faire un sujet à
part entière avec la peinture Store Poster, Torn Out Letters, Newspaper.
Pie, Cup Cakes and Hot Dog, exposé aujourd'hui au Moma . Roy
Lichtenstein crée en 1964 l'oeuvre Hot Dog (Food and Drinks), laquelle
est exposée au Centre Pompidou . Un an plus tôt, le français Alain
Jacquet lui rend hommage avec Camouflage hot dog Lichtenstein. En
1965, la monumentale Hot Dog Sculpture de Colin Self, aujourd'hui
exposée à la Tate Modern , donne à voir un inquiétant hot dog
géant noir. En 1969, fort du succès de sa série de sérigraphies
Campbell's Soup Cans, Andy Warhol compose la série Hot Dog Bean,
Campbell's Soup II (F. & S. II 59), vendue par la maison d'enchères
Christie's . Quant au peintre, sculpteur et affichiste Mel Ramos, il
dénonce la réification du corps de la femme dans la publicité de
produits d'usage courant avec la peinture Doggie Dinah (1995).

L'intérêt du Pop pour le hot dog en tant que symbole ambigu de la


culture populaire américaine nourrit d'autres sensibilités artistiques.
En 1968, Edward Kienholz expose son installation The Portable War
Memorial. Cette œuvre dénonce la Guerre du Viet-Nam et l'ingérence
des Etats-Unis. Elle est actuellement exposée au musée Ludwig
de Cologne. En 1974, le sulfureux Paul McCarthy propose la
performance Hot Dog au Moca de la Geffen Contemporary, au cours
de laquelle il se couvre de ketchup, mayonnaise et sauce brune. Ces
sauces symbolisent respectivement le sang, le sperme et les selles.
La performance provoque vite l'écœurement des spectateurs, à
l'image des excès de la surconsommation de la société nord-
américaine.

Plus récemment, des œuvres tendant vers l'abstraction comme la


photogravure Hot Dog (1996) de Laurie Simmons exposée au
Brooklyn Museum et la série Kiss (Abstract Scuptures) de Ervin
Wurm (2013) témoignent de l'inépuisable inspiration suscitée par le
hot dog. Le mouvement Lowbrow, parfois qualifié d'art brut et
notamment impulsé en France par la revue Hey !, redéfinit les codes
de représentation du hot dog : les peintures de Susann Brown Nixon
et de Elisa Vegliante, telles Frankie's Hot Dog Stand et Hot Dog
Zombie réinterrogent la simplicité et la face violente substantielles
du hot dog.

Voir aussi : Cinéma, Comics, Légende urbaine, Photographie,


Pornographie, Pin-up

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BASEBALL
Voir : Sport

BIBLIOTHÈQUE
(Public library)

Les collections numérisées de photographies de la New York Public


Library et de la Library of Congress comprennent des images
où le hot dog fait la part belle aux scènes de rue. Andy Warhol avait
même l'habitude de consulter des tirages papier dans la première.
Aujourd'hui, les fichiers numériques sont souvent téléchargeables
gratuitement en haute définition et libres de droits. A l'instar des
musées et institutions, les grandes bibliothèques publiques états-
uniennes ont très tôt accompagné le développement de la
photographie dans le pays.

Faut-il le préciser, beaucoup d'entre elles sont cernées de stands à


hot dogs, quand elles-mêmes n'en vendent pas dans leur cafétaria
respective. A ce propos, à l'intérieur de la Bpi, vous n'avez pas le
droit de manger de hot dog, sauf à la cafeteria, laquelle par ailleurs
en vend.

Voir aussi : Cultural studies, Food studies

BIÈRE
(Beer)

La bière est LA
boisson alcoolisée
populaire des Etats-
Unis. S'en "glisser une
fraîche entre les
oreilles" au stand hot
dog du corner (coin de
la rue) n'est pourtant
pas si simple.

Dès l'époque coloniale,


la société américaine
tend à un discours
dominant puritain, sous
l'effet des ligues
conservatrices Wasp
(White Anglo-Saxon

Protestant). L'encyclopédie
The Oxford Companion
to American Food and Drink nous apprend que la première brasserie
est recensée en 1630 à Charleston, dans les environs de Boston. En
1873, au sortir de la Guerre de Sécession, soit quelques vingt ans
avant l'apparition du hot dog, le pays compte 4131 brasseries. Les
immigrés allemands et d'Europe de l'Est popularisent les bières blondes
légères de type lager et les Beer garden, ces lieux de sociabilité de la
plèbe qui s'attirent régulièrement les fourches caudines des leaders
puritains, enfin, surtout de leurs femmes.
La Prohibition commence quelques mois après la signature du 18e
amendement du 16 janvier 1919, interdisant la fabrication, la vente et
la consommation d'alcool. De 1920 à 1933, les effets de la
Prohibition, aggravés par la Grande dépression suite au krach boursier
de 1929, deviennent catastrophiques à l'échelle du sous-continent
nord-américain : contre-bande, crime organisé endémique, santé
publique préoccupante, corruption généralisée. Les pays limitrophes
— Canada, Mexique et France (avec Saint Pierre et Miquelon) —
deviennent des bases arrière de production d'alcools — souvent
frelatés.

Sortis vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale, les Etats-Unis


relancent leur industrie. C'est l'avènement de la bière industrielle, l es
brasseurs locaux déclinent. Produisant des lager peu gazeuses et peu
alcoolisées, les marques Anheuser-Busch, Miller, Schlitz, Pabst
produisent pour les marchés national et continental. Largement
présente dans le cinéma, la Budweiser est sans doute la bière
américaine la plus connue au monde.

Aujourd'hui, la vente et la consommation d'alcool dans l'espace


public américain dépend de la législation de chaque Etat, comté ou
ville. Les régions les plus conservatrices sont celles du Sud. On parle
ainsi de dry county (alcool 0), moist county (vente et consommation
bridées) et wet county (libéral). Ainsi, selon l'endroit où l'on se trouve,
on enveloppera ou non sa bouteille de bière d'un sac de papier kraft
de manière à dissimuler le breuvage alcoolisé de la vue des forces
de l'ordre. Le discours dominant puritain n'empêche aucunement la
filouterie.

Voir aussi : Industrie agroalimentaire, Rue


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CINÉMA
(Movies, Series)

Le cinéma et les séries télévisées diffusent les images, valeurs et


symboles de l'américanité du coin de la rue à l'échelle planétaire. La
scène du hot dog est un classique des scenarii made in USA, au
même titre que celle du café.
Entre autres scènes d'anthologie, on peut citer celle, dans Inspecteur
Harry ( Dirty Harry, 1971, de et avec Clint Eastwood) où le justicier
solitaire avoue détester par dessus tout quiconque met du ketchup
dans son hot dog. Dans la série Hot in Cleveland (2010-2015) de
Suzanne Martin, l'héroïne Betty White attribue sa longévité tonique
au fait de manger un hot dog et des frites chaque matin.

En 1984, SOS Fantômes ( Ghostbusters, 1984) de Ivan Reitman


connaît un succès mondial. Slimer, le fantôme glouton vert, y est
repéré dans une usine à saucisses avant d'être neutralisé par le
positroneur désintégrant de Bill Murray. Cette scène n'est pas fortuite
: elle joue avec un imaginaire populaire né à la fin du 19e siècle au
sujet des abattoirs et renforcé par le roman La Jungle de Upton
Sinclair (1904). Tenus par une mafia sanguinaire et des syndicats
verreux, les abattoirs chicagoans — et par extension tous les
abattoirs — auraient des normes sanitaires déplorables et
exploiteraient sans vergogne les travailleurs étrangers.
Jusqu'au bout du rêve ( Field of dreams, 1989) de Phil Aldon Robinson,
inspiré du roman Shoeless Joe de William Patrick Kinsella, joue lui
aussi avec une légende urbaine tenace. Le film comporte une scène
dans laquelle une petite fille s'étouffe avec un hot dog, avant d'être
sauvée par le héros.

C'est la violence de l'industrie de la viande qui sert de prétexte au


film culte Massacre à la tronçonneuse ( The Texas Chainsaw Massacre,
1974), de Tobe Hooper. Un groupe de jeunes gens part en vadrouille
dans le Texas profond. Tout bascule quand ils tombent aux mains d'une
famille de bouchers cannibales. Commence alors la descente aux
confins de l'horreur. Le personnage phare, Leatherface (face de cuir),
a.k.a Thomas Hewitt, devient l'un des plus célèbres tueurs en série
de fiction de l'histoire du cinéma. Leatherface nourrissait sa famille
d'humains qu'ils chassaient. Ce chef d'œuvre du cinéma d'horreur
permet une lecture politique : en pleine guerre du Viet-Nam, les
américains découvrent que le mal est sur leur sol, dans l'état de
nature prédateur tapi au fond de chacun. Le film permet également
un second degré de lecture, en sapant les symboles du Texas
bastion patriote, riche de ses ressources naturelles et de son élevage
bovin, berceau de la culture virile du cowboy dominant la nature.
Massacre à la tronçonneuse montre au contraire la régression à l'état de
nature d'une famille dont la pureté du sang est souillée par le
cannibalisme et la crise économique.

Enfin, le film se nourrit des images d'un autre traumatisme américain,


celles de l' assassinat filmé de John Kennedy . Comme l'analyse
avec brio Jean-Baptiste Thoret dans 26 secondes : l'Amérique
éclaboussée : l'assassinat de JFK et le cinéma américain, le film tourné par
le citoyen Abraham Zapruder, et tout particulièrement le
photogramme 313 montrant le crâne éclaté du président, autorisent
l'industrie cinématographique à repousser les limites de l'horreur
montrable sur grand écran. Les morceaux organiques du président
hantent autant les images de chair à saucisse que de celles des
étudiants dépecés par Leatherface...

Plus récemment, le film d'animation Sausage Party (sortie en


novembre 2016) de Greg Tiernan et Conrad Vernon, narre les
pérégrinations d'une saucisse à hot dog en quête de ses origines,
mêlant film d'aventure et philosophie :

Sausage Party : bande-annonce #1 VO non censurée par


inthefame

Voir aussi : Art contemporain, Gif, Pornographie

COMICS
Le hot dog n'a eu de cesse de
suivre la naissance et l'évolution de
la bande dessinée américaine.
Cette dernière doit son nom aux
comic strips - scénettes dessinées
et humoristiques, publiés dans les
journaux à partir de la seconde
moitié du 19e siècle. Selon
l'historien Bruce Kraig et le
lexicographe Leonard Cohen, le
terme hot dog a probablement été
popularisé au début du 20e siècle
par Thomas A. Dorgan dit TAD,
dessinateur des pages sportives du
New York's Evening Journal. Les
unes des numéros des 12 et 13
décembre 1906 montrent un
panorama d'une course cycliste de
six jours au Madison Square Garden de New York. Un dog wagon
(stand à roulettes) y apparaît.

Dans les années 1930, le comics commence à s'affranchir du


support journal pour devenir une publication à part entière : le comic
book, souvent mensuel, dont la périodicité permet autant des
histoires à feuilletons que la fidélisation d'un lectorat. Les enfants
deviennent les lecteurs cibles. Les éditeurs EC Comics, DC Comics
et Marvel Comics mettent en scène des super héros bienfaisants
pour la nation et la bonne moralité des familles blanches de la classe
moyenne : Batman, Spiderman, Captain America... C'est le
mainstream comics. Les personnages de comics deviennent
notamment ceux des cartoons (dessins animés). En 1929, Walt
Disney diffuse le très psychédélique, the Karnival Kid (1929) où
l'on voit Mickey Mouse danser avec des hot dogs. Conscient de ces
nouvelles formes de divertissement de masse, le business man du
hot dog, Oscar Mayer, invente le personnage de comics Little Oscar
pour vanter les mérites de sa saucisse auprès des familles. Le
succès est au rendez-vous, à tel point que les enfants croient en
l'existence du personnage. Mayer invente ainsi la Wienermobile,
conduite par un acteur déguisé en Little Oscar à travers tout le pays.

L'après-guerre et la décade contestataire des années


1970 renforcent la popularité et la créativité des comics. Le hot dog y
est souvent présent au détour d'une action se situant le plus souvent
au milieu urbain. On voit ainsi Zippy the pinhead de Bill Griffith
converser avec un muffler man (statue géante portant un hot dog), le
Docteur Strange manger un hot dog dans Marvel Premier #4. La
parodie des classiques du mainstream comics permettent ainsi de
détourner le Surfeur d'argent en mangeur invétéré de hot dogs ou,
via un roman photo paru dans Arts Paper Magazine de septembre-
octobre 2010, de se moquer de la mauvaise qualité de la saucisse.

Voir aussi : Oscar Mayer, Pin-up, Wienermobile

CONCOURS DU PLUS GROS


MANGEUR DE HOT DOG
(Hot dog eating contest)

Tout puritain et patriote que soit son discours politically correct, la


société américaine est friande de grands spectacles. Le Nathan's
hot dog eating contest est l'un eux.

Il semblerait que le 4 juillet 1916, jour de la fête de l'Indépendance,


quatre immigrés appelèrent devant le restaurant Nathan's Famous de
Brooklyn (New York), à un concours d'ingestion de hot dogs. L'enjeu
: déterminer qui est le plus patriote des mangeurs, au vu du nombre
de dogs avalés. Organisé par ledit restaurant chaque 4 juillet depuis
1993, ce concours finit par être retransmis à la télévision nationale
chaque année depuis 2004.

Le principe est simple : manger un maximum de dogs en dix minutes.


Une catégorie hommes et une catégorie femmes. Les vainqueurs
gagnent la Yellow mustard belt (ceinture de moutarde jaune), une
somme d'argent et des cadeaux des sponsors. Le concours connaît
un certain retentissement au Japon puisque dans les décennies 1990
et 2000, les Japonais ont souvent remporté le trophée de catégorie
hommes. Takeru Kobayashi est ainsi le vainqueur consécutif des
éditions 2001 à 2006. En 2001, ayant développé des techniques
d'ingestion rapide, il pulvérise le record établi à 25 hot dogs : il en
mange 50. En 2015, Matt Stonie écrase ce record en ingurgitant 62
dogs. La même année, dans la catégorie femmes, Miki Sudo obtient
le trophée avec un palmarès de 38 hot dogs.

Avilissant pour les uns, morbide pour les autres, ce concours érige la
prise de risques inutiles en ressort fondamental de l' entertainment
(divertissement) et du patriotisme. Tout se passe comme si ce
spectacle potache tendait à rendre fun (amusant) les excès de
consommation et leurs troubles alimentaires collatéraux.
Qu'importe... Comme on dit dans le milieu, "the show must go on" (le
spectacle doit continuer)... Voir aussi : Junk food, Nains, Nathan's

Famous

CORN DOG
Variante du hot dog consistant à le panner dans de la semoule de maïs,
et à le planter sur un pic. Il est servi froid.

Voir aussi : Fast food, Junk food

CULTURAL STUDIES
Apparue au tournant des années 1960 dans les universités anglo-
saxonnes, cette mouvance intellectuelle étudie les relations entre
pouvoir et pratiques culturelles populaires en décloisonnant les
disciplines. Anthropologie, sociologie, histoire, linguistique, théorie
littéraire et des medias, entre autres, sont convoquées pour
interroger les cultures de masse dans une perspective critique. Nées
en contexte de décolonisation, de développement des industries
culturelles et des revendications socio-politiques de populations
subalternes, les cultural studies privilégient les recherches sur
l'ethnicité, le post-colonialisme, le genre, le féminisme et les diverses
formes de cultures populaires.

Au début des sixties, Richard Hoggart, auteur de l'important La culture


du pauvre : étude sur le style de vie des classes populaires en Angleterre
(1970) fonde le Center for Contemporary Cultural Studies (CCCS) à
Birmingham. Il est rejoint par des penseurs de premier plan tels
Stuart Hall, Charlotte Brundson, Angela Mc Robbie et Edward
Thompson (auteur de The Making of the English Working Class,1963).
Souvent issus des minorités étudiées et/ou socialement engagés,
ces chercheurs refusent une lecture simpliste de la société de type
dominants-dominés. Ils l'analysent au contraire en termes de contre-
pouvoirs, de relations mouvantes entre production, réception et
interprétation d'une norme.
Les cultural studies arrivent dans les universités américaines dans
les années 1970, alors influencées par la French theory. Celle-ci
désigne les travaux de Jacques Derrida, Michel Foucault et Gilles
Deleuze. Fortes de ces derniers (tout en s'en méfiant quelque peu),
pétries d'universalisme (surtout quand celui-ci vient de
l'Hexagone), les écoles de sciences humaines et sociales françaises
bouderont les cultural studies jusqu'aux années 1990. Cette
décennie marque un renouveau. Des chercheurs issus de la diaspora
indienne, tels Homi Bhabha (auteur de Les lieux de la culture : une
théorie postcoloniale,1998), Spivak Gayatri, Arjun Appadurai (à qui l'on
doit Après le colonialisme : les conséquences culturelles de la
mondialisation,1996), contribuent à renouveler les postcolonial studies
en analysant les logiques de diaspora et de la supposée
mondialisation.

De nouvelles thématiques émergent, telles les porn studies, LGBT


studies, visual studies, gender studies (Judith Butler...), et même les
Madonna ou Beatles studies. Et les food studies...
Le très accessible Introducing Cultural Studies : A Graphic Guide et les
conférences organisées par la Bibliothèque publique d'information
permettent d'approcher ce passionnant bouillonnement intellectuel au
service du pop.

Voir aussi : Food studies, Melting pot


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DIPLOMATIE
(Soft power)

Du fait de sa popularité, le hot dog est un classique de la diplomatie


et de la communication politique des plus hauts représentants de
l'Etat avec leurs homologues nationaux et étrangers.

En 1939, alors qu’Hitler menace l'Europe et que l'Amérique se


proclame isolationniste, le président Franklin D. Roosevelt invite le roi
George VI et son épouse Elizabeth à passer le week-end dans sa
propriété de Hyde Park on Hudson. L’invitation est historique : c'est
la première fois qu'un monarque britannique se rend aux Etats-Unis
depuis la Déclaration d'indépendance de 1776. Le couple
présidentiel entend recevoir le couple royal dans la pure tradition
américaine, autour d’un pique-nique composé de hot dogs, de salade
de pommes de terre et de bière. Si certains s’inquiètent et s’
offusquent de ce déjeuner jugé trop rustique, l’opération de
communication est un succès total. Dès le lendemain, le 12 juin
1939, le New York Time titre en une “Le roi a essayé un hot dog et en
a redemandé”. George VI sort triomphant de ce voyage, s’assurant le
soutien à la fois du peuple britannique et des Etats-Unis dans un
contexte de guerre imminente.

En 2013, le film Week-end royal de Roger Michell revient sur ce


célèbre épisode de la diplomatie du hot dog. En avril 1959, en pleine
Guerre
froide
et quelques mois avant l'invasion râtée américaine de la Baie des
Cochons, Fidel Castro, figure majeure de l'anti-américanisme (mais
néanmoins très apprécié de la presse américaine), se laisse
photographier hot dog en bouche à New York, dans le zoo du
Bronx, par le NY Daily News. Au cours de ce voyage très médiatisé,
il parvient également à rencontrer le vice-président Richard Nixon à
la Maison-Blanche.

Quelques mois plus tard, en septembre 1959, alors que les relations
entre les Etats-Unis et l’URSS se dégradent, le premier secrétaire du
Parti communiste de l'Union Soviétique, Nikita Khroutchev, effectue
un roadshow à haute teneur médiatique aux Etats-Unis. Dans
l'espoir d'une détente entre les deux pays, il multiplie les signes
d'ouverture. Devant un parterre de journalistes du monde entier et de
citoyens américains, il déguste un hot dog en déclarant que si les
Russes sont capables de conquérir l'espace avant les Américains,
ceux-ci sont davantage à la pointe en matière de saucisses.

Aujourd’hui, la puissante chaîne de télévision CNN consacre une


galerie sur la thématique Politicians & hot dogs . On y voit
notamment le président Barack Obama et le premier ministre
britannique David Cameron dégustant ensemble un hot dog lors d'un
match de basket-ball à l'université de Dayton en mars 2012.

Voir aussi : Liberté, Melting pot


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ÉPICES
(Spices)

Voir aussi : Mayonnaise, Moutarde, Relish et Saucisse

ENTREPRENARIAT
(Entrepreneurship)

Le commerce du hot dog est très lié au mythe américain du self-


made man, qui ne doit sa réussite sociale et professionnelle qu'à lui-
même.

Vecteur d’intégration, la nourriture constitue historiquement aux Etats-


Unis l’un des principaux accès pour un migrant au circuit économique
et le moyen de sortir de l'anonymat. A ce titre, le hot dog a produit d’
éclatantes réussites : la célèbre enseigne Nathan’s Famous , créée
en 1916 à Coney Island par Nathan Handwerker, immigrant juif
polonais, et l’entreprise lucrative Oscar Mayer , créée à la fin du
19e siècle à Chicago par les frères Mayer, tous deux immigrants
allemands.

Si l’on peut voir ces modèles économiques mondialisés comme les


héritiers urbains des commerces familiaux ruraux des migrants du
19e siècle, l’économie que génère le hot-dog reste essentiellement
une économie dite de penny, basée sur la vente au détail, à l'échelon
local et régional. En revanche, les matières premières (saucisses,
pains, condiments) sont fabriqués par les industriels. Il s’agit donc
d'un produit peu coûteux et simple à fabriquer, qui, vendu en masse,
génère de gros profits. Parallèlement, selon les données du très
sérieux Conseil national du hot dog et de la saucisse , les
Américains dépenseraient chaque année plus de 2,5 milliards de
dollars dans les supermarchés pour acheter des hot dogs.

Voir aussi : Ethnic food, Fast-food, Industrie agroalimentaire, Liberté,


Roadside food, Rue

ETHNIC FOOD
Le hot dog n'a pas toujours été l'aliment phare du pays : il a d'abord
été l'aliment des populations européennes anglo-saxonnes.
Dans son ouvrage We Are What We Eat : Ethnic Food and The Making of
Americans, l'historienne Donna Gabaccia souligne que le m elting pot,
s'il fut le creuset multiculturel de la nation américaine, n'empêchait
nullement qu'un aliment donné soit un marqueur ethnoculturel fort,
autant pour s'identifier à un groupe que pour se démarquer d'un
autre. Les pâtes pour les Chinois et les Italiens, le poulet pour les
Noirs... Le melting pot ne fait pas l'économie de discours
essentialisants dans un pays pensant sa diversité culturelle en termes
de race.

Tout au long du 20e siècle, le hot dog évoluera selon deux


dynamiques apparemment incompatibles. L'industrialisation des
aliments, à commencer par sa saucisse, en fera le symbole du
produit standardisé de grande consommation. Dans le même temps,
de nombreuses communities (communautés ethnoculturelles, ou
d'intérêts communs) se l'approprieront selon leurs traditions
culinaires respectives. Si la fabrication de la saucisse allemande du
19e siècle est fortement influencée par le rituel juif casher, elle sera
vite adaptée et laïcisée autant par des bouchers juifs non pratiquants
que par des bouchers non juifs. Les bouchers musulmans
s'inspireront de certains des procédés de fabrication tout en rendant
halal leurs saucisses en excluant la viande de porc. De nombreuses
communautés afro-américaines s'approprient le hot dog, notamment
en rajoutant des épices et en privilégiant la viande de poulet,
introduisant ainsi le hot dog dans la soul food. La diaspora
mexicaine, notamment à Chicago, s'approprie le hot dog en y
ajoutant chili et piments. Les Italiens composent leur hot dog,
constitué d'une saucisse pur bœuf frite, servie froide dans un demi pain
à pizza et agrémentée de pommes de terre, d'oignons et de piments.

L'appropriation communautaire du hot dog se voit également dans la


décoration des dog wagons (stands mobiles de rue) et des gargottes
de quartier : les espoirs, rêves, aspirations, voire revendications y
sont souvent exprimés. Emerge ainsi une sorte d'art " outsider". Un
stand mobile peut ainsi témoigner de la culture d'origine du vendeur,
avec force couleurs vives — à l'image à la charte graphique du géant
du hot dog Oscar Mayer, logos personnalisés, et autres éléments de
décor issus de sa culture.

Voir
aussi
: Cultural studies, Entreprenariat, Food studies, Humour, Inuits,
Melting pot, Rue

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FAST-FOOD
(Fast food)
Symbole de la société de consommation pour les uns,
d'enrichissement pour les autres, gain de temps pour les plus
pressés, le fast-food est un paradoxe américain. Dans son truculent
Fast Food : The Good, The Bad and The Hungry, l'historien Andrew
Smith le définit en tant que nourriture bon marché préparée lors de
sa commande et servie quelques instants après, afin d'être
consommée rapidement sur place ou à emporter. Ce mode de
préparation et de consommation englobe une grande variété de plats
: burgers, hot dogs, pizza, tacos, tortillas, pâtes, viandes et poissons
frits. Le fast-food englobe autant des plats issus des traditions
culinaires européennes que des plats de cuisine dite ethnique - soit
tout le reste. Le terme ethnic food n'est donc pas neutre.

Le fast-food repose sur deux fondements idéologiques : le droit à la


mobilité et l'égalité d'accès à l'abondance. Il prend son essor à la fin
du 19e, au moment où l'Amérique s'urbanise. De nombreux
américains doivent parcourir de grandes distances dans les
mégapoles naissantes ou sur les routes traversant les immensités
naturelles du pays-continent. L'industrie automobile se développe,
les modèles urbains sont pensés en fonction. Detroit , Michigan,
surnommée Motor City, sera typiquement le p rototype de la grande
ville du 20e siècle. Dès cette époque, esprit libéral aidant, il devient
courant de se déplacer et de déménager à la recherche d'une activité
mieux rémunérée. Il convient alors de pouvoir s'alimenter sur le
pouce.

Ce mode d'alimentation s'ancre dans un autre imaginaire fort, celui


de l'éternelle abondance. Dans la vision coloniale du monde, la
Nature s'offre généreusement à l'Homme, qui s'en rend maître et
possesseur. Le fast-food n'a jamais été envisagé comme une
manière de se nourrir avec des aliments sains préparés avec soin.
Ce qui prime, autant pour les producteurs que bien souvent pour les
consommateurs, c'est le fait de disposer, à moindre budget, de
nourriture à profusion.

Industrie de premier plan, le fast-food génère 160 milliards de dollars


par an provenant des ventes de rue et des grandes enseignes telles
Burger King, KFC ou McDonald's, et 620 milliards de dollars de
bénéfices issus des surfaces de grande distribution telles Kmart,
Walmart ou 7-Eleven.

Voir aussi : Entreprenariat, Ethnic food, Industrie agroalimentaire,


Junk food, Obésité, Roadside food

FOOD STUDIES
Issu des cultural studies anglo-saxonnes, ce champ d'études
interdisciplinaires apparaît au début des années 2000. Convoquant
des disciplines aussi diverses que la sociologie, la nutrition,
l'économie et les savoirs populaires ou le journalisme, il propose une
critique de l'alimentation en tenant compte des contextes socio-
économique, politique et religieux. Axé autour du concept de
foodscape, il offre plusieurs lectures des mœurs alimentaires et
permet de comprendre les rapports de pouvoir entre production et
consommation, mais aussi l'impact de l'alimentation sur
l'environnement et la construction de l'ethnicité.

Les food studies s'intéressent par exemple à l'industrie


agroalimentaire contemporaine, à la financiarisation du marché des
matières premières ainsi qu'aux stratégies de communication des
mouvances bio et vegan. De la première dinde de Thanksgiving
cuisinée à l'automne 1621 par les religieux anglais en plein territoire
indien Wampanoag, aux fermes urbaines de Detroit en passant par la
soul food, l'étude de la nourriture permet une autre histoire de la
société états-unienne.

Le journaliste et activiste Michael Pollan, auteur de In Defense of Food


: An Eater's Manifesto (2008), l'historien Warren Belasco et
l'anthropologue Sydney Mintz sont quelques unes des figures
marquantes de cette mouvance intellectuelle. Le hot dog a ses
spécialistes, tels l'historien Bruce Kraig, auteur de Hot Dog : a Global
History (2009) et Andrew Smith à qui l'on doit notamment Fast Food,
Junk Food : An Encyclopedia of What We Love to Eat (2012). De
grandes universités proposent des cursus spécialisés, parmi lesquels
le Boston University gastronomy masters program ou le New York's
University's program in nutrition, food studies and public health.

Voir aussi : Cultural studies, Ethnic food

FRANKFURTER
Voir : Industrie agroalimentaire et Saucisse

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GIF (Graphic Interchange Format)


Depuis quelques années, les gifs ont la cote sur internet. Ces courtes
séquences d’images rigolotes ou insolites, issues de l’imagerie
populaire, sont essentiellement relayées sur les réseaux sociaux, où
elles sont partagées, détournées, parodiées… parfois de façon virale.
Elément emblématique de la culture populaire américaine, le hot dog
se devait d’inspirer des gifs à son effigie. C’est chose faite,
notamment grâce au site Giphy pour le hotdog , qui répertorie et
diffuse en boucle une sélection d’images consacrées au célèbre
sandwich. Du plus ridicule au plus sexuellement explicite, on y trouve
entre autres une Beyoncé giflée par une volée de saucisses ou
encore l’animateur Stephen Colbert croquant un hot dog en faisant
un doigt d'honneur face caméra, lors du très populaire Late
Show with David Letterman. Vous avez dit subtil ?

via GIPHY

Voir aussi : Cinéma, Cartoons, Humour, Pornographie


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HEINZ
HEINZ
Voir : Ketchup

HIP HOP
Hot dog et hip hop viennent tous deux de la rue et visent, quoiqu'à
des degrés divers, à acquérir une visibilité sociale. Pétris de
ségrégations socioéconomiques, spatiales voire raciales, les Etats-
Unis sont le pays où la volonté de se construire une situation sociale
et/ou financière en partant de rien fait consensus dans toutes les
communities (groupes ethnico-culturels). Industrie du fun mâtinée
d'activités gangsta (trafic de drogue, prostitution, racket...) pour l'un,
agrobusiness mâtiné de junk food pour l'autre. De nombreux jeunes
et vendeurs ambulants des quartiers populaires attachent une grande
importance à la street credibility, réputation acquise dans le
quartier. Le titre d'un album du célèbre rappeur 50 Cent témoigne de
ces logiques : Get rich or die tryin' (Fais-toi du fric ou meurs en
essayant d'en faire, 2003). Par ailleurs, le food truck (restaurant
ambulant) est l'un des éléments classiques de nombreux clips de hip
hop. A seule valeur d'exemple, on peut citer celui de la chanson Ice
Cream (1995) du mythique Raekwon.

Parallèlement, les chaînes de fast-food recrutent souvent des


employés jeunes et peu qualifiés avec des contrats guère motivants.
En ce sens, en février 2016, Burger King diffuse en interne un tutoriel
de préparation de son hot dog, animé par l'un des grands noms de
l'entertainment hip hop : Snoop Dogg. Bien connu des services de
police, des milieux gangsta et de l'industrie du disque, le rappeur
West Coast se présente en tant que Grilled dogs training ambassador
. Le spot vidéo fait ainsi entrer la sulfureuse star afro-américaine
dans la galerie des immigrés blancs du 19e siècle ayant fait fortune
en vendant des hot dogs dans la rue : Nathan Handswerker de la
chaîne Nathan's, ou encore le roi du ketchup Henry John Heinz. La
vidéo prend soin d'y faire figurer une jeune latino — groupe culturel le
plus important du pays — et des white trash (blancs pauvres). Ready
?

Voir aussi : Entreprenariat, Rock n'roll, Rue

HOT DOG DAY


Décrété par le lobby industriel National Hot-Dog and Sausage Council
, le jour officiel du hot dog est le 23 juillet.

Il existe depuis l'été 1971, à l'initiative des étudiants — en vacances


— du Alfred State College de New York. Le Hot Dog Day consiste
principalement en de grands pique-niques informels ou mondains
dans tout le pays. Ainsi, l'Annual Hot Dog Lunch de Washington DC
est l'occasion de rassembler le gotha des personnalités politiques,
des lobbies industriels et des médias. Lancé dans les années 1990,
le Boston Hot Dog Safari est un pique-nique de charité où il fait
bon être vu en bienfaiteur des causes sociales. Le Hot Dog Day est
finalement devenu un marronnier des médias états-uniens à la
période estivale, au même titre que l'appel des Restos du cœur lors
des premiers froids en France. Depuis une dizaine d'années, il donne
de plus en plus la parole aux mouvements végétariens et végans.
Qu'on ne s'y trompe pourtant pas, le principal évènement annuel du
hot dog a lieu le 4 juillet. Le jour de la Fête nationale (Independance
day), la célèbre chaîne Nathan's Famous organise son célèbre
concours du plus gros mangeur de hot dog en son siège historique
de Coney Island, à New York.

Voir aussi : Concours du plus gros mangeur de hot dogs, Coney


Island, Végétariens

HUMOUR
(Humor)

Le terme hot dog est issu de l'humour populaire de la fin des années
1890.
Comme le note l'historien Bruce Kraig dans Hot Dog : A Global History
, l'humour américain se base sur la dureté des réalités sociales et le
goût pour les récits fondateurs. A la fin du 19e, alors que le pays
connaît une vague d'immigration sans précédent, la nourriture de
chaque communauté devient une source d'inspiration pour les
humoristes et les caricaturistes. Les musiciens afro-américains sont
représentés avec un banjo, de la pastèque et du poulet grillé. Les
Chinois sont caricaturés avec leur bol de riz. Les Italiens avec leur
spaghetti et leur verre de de vin rouge. La diète kasher est plus
moquée encore, de même que les Allemands avec leur chope de
bière et leurs saucisses. En pleine construction du sentiment
national, ces clichés contribuent autant à rendre acceptable chaque
community aux yeux des autres qu'à instiller un imaginaire plus ou
moins raciste.

L'orgine du mot hot dog est suffisamment sérieuse pour qu'une


équipe de lexicographes planche sur la question et publie, en 2004
chez Rolla, l'étude Origin of The Term "hot dog", imprimée à une
soixantaine d'exemplaires. Selon les auteurs Leonard Cohen, Barry
Popik et David Schultamn, le terme hot dog apparaît pour la première
fois dans le journal estudiantin Yale Record du 19 octobre 1895.
L'article fait mention d'étudiants aboyant à chaque apparition du
Kennel Club Lunch Wagon (kennel, chien en anglais), stand itinérant
vendant notamment des saucisses chaudes. Dans le contexte,
kennel renvoie autant au nom du stand chahuté qu'à l'argot
désignant un athlète universitaire fanfaron. Sans doute par esprit de
corporation, les magazines des universités de Cornell, Harvard et
Berkeley reprennent le terme.

Une autre origine possible du terme viendrait de la mention, en 1892,


dans le Daily Press de Paterson (New Jersey), d'un stand mobile de
hot dogs tenu par un ancien artiste circassien jamaïcain ayant vécu
plusieurs années en Allemagne. Ce dernier, Thomas Francis Xavier
Morris de son vrai nom, est surnommé Hot Dog Morris.
Une troisième hypothèse renvoie à l'argot du Chicago de la fin du
19e siècle. Le terme hot y est littéralement employé à toutes les
sauces. Le hot est l'apanage sulfureux des lieux d'encanaillement
des quartiers populaires de cette ville alors en plein boom. La
chanteuse Sophie Tucker, sorte d'Arletty vaudevillesque du Midwest,
l'utilise dans ses chansons paillardes. Tout devient hot : hot cars, hot
jazz, hot corner (troisième base au baseball). Le hot dog est hot,
parce que sa saucisse est aussi rouge qu'un pénis et parce que la
rumeur souffle que sa viande est celle de canidés capturés dans les
bas-fonds de la ville. Le poème satirique imitant l'accent allemand de
Henry De Marsan s'en fait l'écho :

Oh ! Where, oh ! Where ish mine little dog gone ? (Oh !


Où est passsssé mon petit chien ?)
Oh ! Where, oh ! Where can he be ? (Oh ! Où peut-il
être pien êtrrrre ?)
His ear's cut short, and his tail cut long : (son oreille
coupée court et sa queue coupée longue)
Oh ! Where, oh ! where ish be ? (Oh ! Où peut-il être
pien êtrrrre ?
(...)
Und sausage is goot : Baloney, of course, (cette
saucisse est ponne)
Oh ! Where, oh ! where can he be ? (Oh ! Où peut-il
être pien êtrrrre ?)
Dey makes 'em mit dog, und dey makes 'em mit horse
(Ils font des saucisses avec du chien et avec du ch'val)
I guess dey makes 'em mit he."(je crois que mon petit
chien est devenu de la chair à saucisse)

De nos jours, une hot dog girl est la lointaine cousine de la cagole
marseillaise. L' Urban dictionary la définit comme "une femme dont
la peau est trop bronzée et similaire à la couleur d'une saucisse de
hot dog très cuite. Elle est souvent vêtue de manière vulgaire. Ses
autres traits distinctifs sont les larges lunettes de soleil blanches, la
voix rauque et les cheveux multicolores. MTV et les émissions de
téléréalité en regorgent. Exemple de locution : that snooty hot-dog
girl annoyed us at the beach (cette hot dog girl bêcheuse nous a
importuné à la plage)".

Voir aussi : Gif, Légende urbaine, Melting pot

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INDIVIDU
Voir : Liberté

INDUSTRIE AGROALIMENTAIRE
(food-processing industry)

Aux Etats-Unis, l'alimentation a toujours été un pilier des révolutions


industrielles successives. Dans son ouvrage Hot dog : A Global
History, l'historien Bruce Kraig nous aprend que les saucisses
cessent d'être fabriquées de manière artisanale avec l'arrivée de la
chaîne de production Armour, dans les année 1870. Signe des
temps, la firme sous-traite sa fabrication aux usines automobiles Ford
de Detroit. Armour ne détient pas longtemps le monopole du marché.
Les firmes concurrentes Morris, Hammond, Cudahy et Morrel raflent
des parts en vendant non seulement des machines équivalentes aux
professionnels, mais aussi des hot dogs aux particuliers.

Le modèle économique de la saucisse à hot dog repose sur son


faible coût de production et sa vente de masse. Les élevages de
batterie sont privilégiés, de même que les morceaux de viande les
moins nobles : chutes, abats, graisse, cartilage, muqueuses... Ces
morceaux sont séparés mécaniquement ( MSM : mechanically
separated meat) et joints à d'autres ingrédients de piètre qualité
: sirop de céréales, amidon modifié, sel, lactate de potassium et de
sodium, dextrose, protéine de soja hydrolysé, sucres, sorbitol, agents
artificiels de saveur, colorants divers et variés... Les chaînes de
production les plus économes surdosent les épaississants tels le lait,
les céréales et pommes de terre en poudre. Les saucisses de bœuf
sont les plus chères (compter 4 dollars la douzaine) tandis que celles
à la volaille et au porc sont les meilleures marché (1 dollar la
douzaine).

L'opinion publique américaine nourrit un rapport paradoxal à son


industrie alimentaire. Attachée aux "droits" à l'enrichissement et à
l'opulence, elle ne s'émeut guère - en tout cas jusqu'au tournant des
années 1990 — de la basse qualité de la matière première. Quitte à
en payer le prix fort en termes de santé publique. En revanche, elle
entretient un imaginaire particulier autour des notions d'hygiène et de
pureté que l'anthropologue Mary Douglas a pu formaliser dans son
ouvrage De la souillure. Essai sur les notions de pollution et de tabou
(1966). Les chaînes de production aseptisées excluant tout contact
avec la main humaine sont perçues comme pures, tandis que
l'alimentation de meilleure qualité mais préparée artisanalement est
l'objet de toutes les méfiances. Ces appréhensions puisent sans
doute leurs origines autant dans la honte du corps héritée du
protestantisme conservateur qu'aux scandales des abattoirs
insalubres du Chicago de la fin du 19e siècle. Cette foi en la pureté
des machines est par ailleurs renforcée par la foi dans le progrès :
sans cesse modernisées et contraintes par des normes sanitaires
toujours plus draconiennes, les chaînes de production ne peuvent
que rendre le produit meilleur. Tout se passe donc comme si le
(socialement) pur n'était pas synonyme de (diététiquement) sain.

La recherche du profit maxium se donne aussi à voir dans les


perpétuels rachats de firmes entre elles. Les marques phares du
début du 20e siècle telles Ballpark, Best Kosher, Nathan's, Armour
se font racheter par des marques locales dès les années 1940. Plus
tard, les géants mondiaux de l'agrobusiness tels Kraft Foods
et Specialty Foods Group rachètent ces firmes nationales, qui
passent sous contrôle de la spéculation boursière des matières
premières et la financiarisation du secteur.

Depuis le milieu des années 1990, de nouvelles demandes


émergent. Des firmes indépendantes investissent dans des marchés
dits de niche : Vienna Beef Company of Chicago propose ainsi des
saucisses "diététiques". Best Kosher, Sinai 48 et Hebrew
National proposent, à l'échelle nationale, des saucisses 100% bœuf
préparée selon le rite kasher. Quant aux boulangers
industriels Ballpark, Pepperidge Farm, Nature's Own, Mrs Baird's,
Sunbeam, ils offrent de plus en plus de pains biologiques ou
fantaisie.

Voir aussi : Entreprenariat, Fast-food, Junk food, Législation,


Obésité, Saucisse

INUITS
Les Inuits sont un peuple autochtone vivant dans les provinces du
Nunavik et du Nunavut au Canada et au Groenland. Quel rapport
avec le hot dog ? Que ce soit aux Etats-Unis, au Canada et plus
globalement dans les Amériques, les populations autochtones ont
été méthodiquement persécutées et déculturées, des temps
coloniaux jusqu'aux années 1960. Par la suite, elles n'ont obtenu que
peu de droits — et bien souvent le pire de la société coloniale,
notamment en termes d'alimentation, à commencer par la junk food
et le mauvais alcool. Comme le retrace We Are Still Here : A
Photographic History of the American Indian Movement de Laura
Waterman Wittstock, les mouvements de revendications de droits
civiques amérindiens ne cessent de prendre davantage de poids sur
la scène socio-politique. Malgré des conditions socio-économiques
modestes, les Inuits contemporains ont accès à la société de
consommation : internet, sneakers de marque, alimentation...

D'après l'historien Bruce Kraig, il semblerait que l'idée du hot dog,


laquelle consiste à envelopper un bout de viande dans un pain,
vienne des Inuits. Depuis les temps anciens, ils préparent le kiviak,
morceau de pingouin enroulé dans de la peau de phoque. Enterré
pendant sept mois jusqu'à moisissure complète, il est ensuite déterré
pour servir d'alimentation lors des trajets dans le Grand Nord. On dit
que cet aliment a un goût délicat...

Voir aussi : Cultural studies, Ethnic food, Food studies

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JUNK FOOD
La junk food (littéralement : bouffe à deux balles) est un phénomène
majeur de la société états-unienne : plus d'un adolescent sur trois et
deux adultes sur trois sont atteints de surcharge pondérale ou
d'obésité. Selon l' Encyclopedia of Junk Food and Fast Food d'Andrew
Smith, elle englobe les aliments prêts à consommer issus de
l'industrie agroalimentaire américaine et plus globalement, tout
régime alimentaire à très faible valeur nutritionnelle mais riche en
graisses saturées, sel, sucre et additifs issus de la chimie. On la tient
responsable de graves problèmes de santé, notamment la surcharge
pondérale et l'obésité, le diabète, les maladies cardiovasculaires, les
cancers et les troubles neurologiques. Aux premiers rangs de la junk
food : hot dogs, hamburgers, sodas, crèmes glacées et beignets
frits...

Terme péjoratif, la junk food renvoie au système productiviste des


lobbies de l'agrobusiness, tels Hostess Twinkies, Fritos Corn Chips,
ou encore McDonald's et KFC. Mœurs politiques obligent, tous ont
du réseau au sein des plus hautes instances fédérales, des médias
et dans l'organisation des grands événements sportifs. La junk food
est à ce point répandue qu'elle a son National Day , le 21 juillet de
chaque année. Le hot dog a le sien deux jours plus tard, le 23 juillet.
Le terme renvoie aussi, quoique de manière plus touchy, aux plats
dits "ethniques". Relève de l' ethnic food tout ce qui s'éloigne des
traditions culinaires blanches et protestantes. Dans cette logique
ethnocentrée, le terme junk food peut contenir une intention
stigmatisante ou être perçu comme telle. Dans un pays se pensant
en termes de race et de community, parler de junk food peut être
d'autant plus délicat qu'elle est souvent produite à l'échelle locale et
consommée par les populations les plus défavorisées, african-
americans et latinos en tête... Pourtant, d'un point de vue strictement
nutritionnel, y a-t-il grande différence entre un falafel, un tacos, un
beignet frit à l'huile de palme et un cornet de frites industrielles ?
Quelque soit sa provenance, la junk food est l'un des effets de la
violente injustice socio-économique du pays.

Une critique de la junk food émerge cependant des milieux


intellectuels et libéraux au début des années 2000. Ainsi, le
documentaire Super Size Me de Morgan Spurlock (2004)
dénonce les effets morbides de la junk food. Le réalisateur se donne
pour mission de manger exclusivement chez McDonald's pendant un
mois tout en réduisant son activité physique. Il prend onze kilos, son
foie se dégrade et sa petite copine se plaint de la libido chancelante
de son homme.

En 2006, le très sérieux journal Time publie son "Top 10 iconic junk
foods". La chaîne Twinkie arrive en tête de peloton. Concernant le
hot dog, l'ONG PETA (People for the Ethical Treatment of Animals)
multiplie les actions médiatiques à grands renforts de starlettes
dénudées pour alerter l'opinion publique sur la composition malsaine
des saucisses : nitrates, morceaux (groin et anus de porc, lèvres
de vache), dioxyne, sans parler de la maltraitance des animaux
élevés en batterie . Qu'elle soit vantée ou critiquée, la junk food est
indissociable du sens de la mise en scène de soi ou de sa
communauté d'appartenance.

Voir
aussi
: Concours du plus gros mangeur de hot dogs, Fast-food, Food
studies, Industrie agroalimentaire, Législation, Obésité, Valeur
nutritionnelle

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KETCHUP
Le ketchup est le condiment le plus utilisé aux Etats-Unis. On estime
que les Américains en consomment environ 280 000 tonnes par an,
soit trois bouteilles par personne. Tout foyer, café ou restaurant
américain en propose aux côtés du sel et du poivre.

Selon l'encyclopédie The Oxford Companion to American Food and Drink


, le ketchup a été inventé par les Chinois : le k-tsiap, sauce
fermentée à base de fèves de soja, a été ramenée en Europe par
des commerçants britanniques. Ces derniers tentent alors de l'imiter
avec des produits locaux : anchoix, noix, champignons, pommes.
Cette sauce est ensuite préparée à base de tomates, vinaigre et
épices aux Etats-Unis, avant d’être commercialisée vers 1850.
Pendant la Guerre de Sécession, la recette de la sauce Tomato
Catsup (abréviation de Tomato Cat-soup : soupe aux chats) est
massivement publiée dans les Etats sudistes, afin de faire face aux
disettes.

C’est au sortir de la Guerre de Sécession que les ventes explosent.


A la fin du 19e siècle, l’entrepreneur Henry John Heinz fonde la
Henry John Heinz Company . En ajoutant du sucre à la recette
initiale, il ne tarde pas à devenir le leader du marché national. A l’
époque, Heinz se distingue des centaines d'autres marques en
industrialisant la fabrication de la sauce et en étant le premier à
forger une identité visuelle immédiatement reconnaissable. Sa
bouteille en verre à la silhouette effilée devient ainsi l'une des
premières icônes de la consommation de masse. En 1896, le New
York Tribune sacre même le ketchup “America's national condiment”.
Il faut attendre la première moitié du 20e siècle pour qu’apparaissent
deux firmes capables de rivaliser avec Heinz : Del Monte Corporation
of San Francisco (1915) et Hunt’s (1930). La concurrence est
rude. En 1970, Heinz mise à nouveau sur l'innovation du packaging
en lançant la Vol-pak, bouteille en plastique rigide destinée aux
tables de restaurants. Dans les années 1980, la firme lance les
dosettes individuelles et une bouteille en plastique mou destinée aux
foyers américains.

Le succès du ketchup s'explique en grande partie par le


développement, tout au long du 20e siècle, des chaînes de fast-food,
dont le hamburger, le hot dog et les french fries (frites) sont le trio
gagnant. Au fil des années, le ketchup est ainsi devenu autant une
icône culinaire que le symbole de la malbouffe de tout un pays.

Voir aussi : Junk food, Mayonnaise, Moutarde, Relish


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LÉGENDE URBAINE
(Urban myth)

Dans les faubourgs sous-alimentés du New York de la fin du 19e


siècle, on raconte que des bouchers allemands, voire juifs, auraient
contracté des tueurs de chiens errants pour leur fournir la matière
première des saucisses à hot dog. Pendant la Grande Dépression,
alors que la misère frappe tout le pays, on dit que les conditions
sanitaires des abattoirs de Chicago, tenus par la pègre toute
puissante, sont déplorables. Le traitement des carcasses, confiés à
des immigrés récents et inexpérimentés, serait mal fait. A la fin de la
Seconde Guerre Mondiale, la rubrique faits-divers de plusieurs
journaux du Midwest fait état d'un héros anonyme qui aurait sauvé
une fillette de l'étouffement par saucisse. Mais ses parents
souhaitant garder l'anonymat, impossible de vérifier les faits.

Empruntant à l'anecdote, à l'horreur ou à la bonne blague, la légende


urbaine est invérifiable dans la mesure où le récit est toujours
rapporté par l'ami du concierge du fils de l'amante du beau-frère
urgentiste (ou l'inverse). Elle peut autant salir la réputation d'un
individu ou d'un groupe que créer le buzz. Peu importe qu'elle se
base sur des faits réels, déformés ou purement fictifs : elle exprime
surtout les peurs et les fixations d'une population dans un contexte
particulier. Outre leur propagation par le bouche à oreille, les rumeurs
sont également relayées par les médias, tels les réseaux sociaux, la
presse ou le cinéma. La légende de la petite fille sauvée de
l'étouffement est ainsi reprise par le romancier William P. Kinsella
dans Shoeless Joe, oeuvre ensuite adaptée au cinéma par Phil Aldon
Robinson dans Jusqu'au bout du rêve ( Field of Dreams, 1989).

Ce récit semble trouver une actualité à teneur moralisatrice : en


2016, le site humoristique Darwin Awards signale qu'un certain
Robert Puelo aurait succombé à l'étouffement par hot dog. Détail
gore faisant le récit, les secouristes lui auraient retiré de la gorge une
saucisse de 15 centimètres.

En tant que littérature orale, si elle parvient à résister au temps et à


l'oubli, la légende urbaine intègre l'imaginaire et l'histoire des lieux.
Elle peut aussi nourrir la littérature écrite. Le roman La jungle
(1904) d'Upton Sinclair aborde les conditions sanitaires déplorables
des abattoirs de Chicago, l'exploitation éhontée des migrants et
la maltraitance des animaux. Les poèmes Ham et Red Meat de
Herbert Scott parlent de viande verreuse. Faut-il par ailleurs
s'étonner que Ignatius J. Reillly, le héros du roman La Conjuration des
imbéciles de John Kennedy Toole, soit un vendeur de hot dog dans la
populeuse New Orleans ? Sorte de Don Quichotte moderne, bien
que personnage de fiction, il fait désormais partie de l'imaginaire de
la ville.

Contrairement à l'enveloppe de la saucisse, les légendes urbaines


ont la peau dure...

Voir aussi : Argot, Cinéma, Gif, Humour

LÉGISLATION
L'appelation "hot dog" est contrôlée par le gouvernement américain.
C'est une saucisse cuite et/ou fumée, préparée à partir de muscle de
viande rouge ou de volaille. Ce que cette définition ne dit pas, c'est
qu'il s'agit des parties les moins nobles. Tout fabricant, artisan ou
industriel, doit ainsi respecter certaines normes de fabrication et
d'hygiène. Une saucisse végane fabriquée à base de soja ne peut
pas porter le nom de hot dog. Selon le United States Department of
Agriculture , un hot dog doit contenir au maximum 30% de matière
grasse et 10% d'eau ; entre 1,75 et 2,25% de nitrite de sodium. Pour
autant, la législation autorise le recours aux liants, épaississants et
autres dérivés de basse extraction à hauteur de 3,5%, tels la poudre
de lait, de céréales ou de la cendre d'os. Tout fabricant est tenu
d'indiquer sur l'emballage les mentions "with variety meats"
("assemblage de viandes") ou "with meat by-products" ("à base de
dérivés de viande") et de lister la totalité des ingrédients utilisés.

Ces normes ne définissent cependant que la saucisse, laissant une


zone de flou concernant le petit pain et les condiments.

Voir aussi : Industrie agroalimentaire, Fast-food

LIBERTÉ
(Liberty and Freedom)
C'est LA valeur américaine. C'est pour elle que des dizaines de
millions d'individus et de familles ont migré massivement vers les
Etats-Unis. En transitant par Liberty Island, New York, ils y vont vu
dès 1886, la Statue de la Liberté, offerte par la France en gage
d'amitié.

Le hot dog est une parfaite illustration de la sacro-sainte liberté


individuelle. Comme le souligne l'historien David H. Fischer dans
Liberty and Freedom: A Visual History of America's Founding Ideas, la
langue anglaise a deux mots pour signifier le concept : liberty et
freedom. Si l'usage courant ne fait guère de distinction entre les
deux, le terme liberty renvoie aux libertés qu'octroie une autorité à un
peuple. Dans le cas des Etats-Unis, l'individu jouit de droits
individuels reconnus et défendus par l'Etat, comme monter une
affaire ou défendre sa propriété privée. En revanche, freedom pointe
la légitimité qu'a l'individu d'agir au sein et pour sa communauté.
Cette notion de community est fondamentale : contrairement à l'Etat
Providence français, les Etats-Unis n'ont jamais eu pour projet
d'assurer des élargis dans les domaines économiques, sociaux et
réglementaires dans l'intérêt du citoyen, tels que la santé, l'éducation,
la culture et le droit du travail. C'est à l'individu et à sa community
(ethnique, affective, voisinage, d'intérêts divers...) de le faire. La
freedom d'un individu ou d'une communauté peut ainsi entrer en
tension, voire en conflit, avec la liberty octroyée ou non par l'Etat. En
témoigne la sanglante lutte pour les droits civiques des Afro-
américains au cours du 20e siècle.

L'individu n'est rien sans sa communauté. Pour autant, les


Américains raffolent de la figure du héros solitaire et du self-made
man, celui qui, parti de rien et ne connaissant personne, a acquis
fortune, pouvoir et célébrité. Les arts américains, à commencer par le
cinéma, en regorgent : la figure du cowboy Texan - ce garçon vacher
gardant le cheptel et les terres conquises ; Henri Ford et son empire
automobile ; Tony Montana du Scarface (1983) de Brian De Palma...

Le hot dog s'inscrit dans ce mythe de l'individu libre, amassant argent


et réputation à la force du poignet et grâce à sa capacité à s'appuyer
sur ses relations, notamment son corner (coin de rue).

Voir aussi : Entreprenariat, Ethnic food, Diplomatie, Hip hop,


Melting pot, Rue

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MAYER, Oscar
Comme le note non sans ironie l'historien Andrew Smith dans Fast
Food and Junk Food : An Encyclopedia of What We Love to Eat, aux Etats-
Unis, tout se doit d'être une marque, à la fois unique et standardisée.
Oscar Mayer est au hot dog ce que Michael Jordan sera au street
wear un siècle plus tard : la référence.

Avec Henry John Heinz, il est l'un des premiers à comprendre


l'importance du graphisme pour l'emballage et la publicité. En 1873,
ce jeune Bavarois émigre à Detroit où il devient garçon boucher. En
1883, il ouvre une boucherie avec son frère Gottfried à Chicago. En
1904, il a l'idée de faire de ses saucisses une marque, Edelweiss -
fleur alpine évoquant la pureté. Le succès est au rendez-vous : les
ventes décollent et le monde des affaires l'acclame. Vingt ans plus
tard, Mayer investit sur le packaging. Il dépose un brevet pour son
emballage de bacon en tranches, à destination des premiers
supermarchés en libre service. En 1929, soucieux de donner
l'impression que ses saucisses industrielles sont fabriquées de
manière artisanale, Mayer les vend sous vide en emballage
individuel.

Surtout, il prend soin de se créer une identité graphique : emballage


jaune canari rappelant la couleur du petit pain et typographie rouge
évoquant la couleur des saucisses. Outre les panneaux publicitaires,
sa marque se diffuse dans tout le pays au moyen des fameuses
Wienermobile, voitures burlesques en formes de hot dog. Maintes
fois copiées par d'autres, elles font aujourd'hui partie de l'imaginaire
populaire.

Voir aussi : Art contemporain, Ketchup, Nains, Petit pain,


Wienermobile, Saucisse

MAYONNAISE
(Mayonese)

Invariablement servie avec du ketchup et du relish, cette épaisse


sauce froide à base d'huile et du vinaigre, est probablement d'origine
française. Elle aurait été importée par des chefs français dans les
années 1830, notamment par celui du Delmonico's de New York. Elle
ne devient populaire qu'à la fin du 19e siècle. Importée d'Europe ou
produite en Floride, l'huile d'olive reste longtemps un produit de luxe.
De plus, se conservant mal, la mayonnaise n'est commercialisée que
tardivement. Pourtant, au même titre que le ketchup et la saucisse,
elle devient vite un business lucratif, à grands renforts de brevets et
de marketing.

En 1911, la firme Schlorer dépose un brevet industriel sur sa recette.


Il s'agit d'écraser la concurrence de quatre marques mieux
implantées : Hellmann's, Best Foods, Kraft et Blue Plate. Un an plus
tard, pris de court, Hellmann's riposte en misant sur le packaging et
se positionne leader du marché de gros avec ses barils en bois et
ses jarres en verre réhaussée de ce qui va devenir le logo de la firme
: deux rubans bleus. Ceux-ci sont déposés au registre des marques
en 1926. En 1932, Hellmann's se fait racheter par un empire
agroalimentaire naissant, Kraft.

Selon The Oxford Companion to American Food and Drink, 745 millions
de bouteilles de mayonnaise sont vendues chaque année aux Etats-
Unis.

Voir aussi : Ketchup, Moutarde, Relish

MELTING POT
Le hot dog est un pur produit issu du creuset culturel de la société
américaine. Le melting pot est le résultat de l'immigration massive, à
partir de la fin du 19e siècle, de populations arrivant du Royaume-Uni
et des aires européennes non anglophones : Allemagne, Pologne,
Mexique, Chine et dans une moindre mesure, France. Ces vagues
successives ont vu naître la grande ville américaine et un fort
sentiment national.
Ce patriotisme fondé sur la liberté et le multiculturalisme oublie les
populations afro-américaines issues de l'esclavage et les
amérindiens. Le melting pot rappelle ainsi que les Amériques n'ont
pas été découvertes, mais colonisées par des populations tantôt
fuyant persécutions et pauvreté, tantôt attirées par la richesse
supposée facile. Le melting pot n'est pas une fusion harmonieuse
des différences culturelles, mais plutôt une cohabitation plus ou
moins fluide entre diverses communautés ethniques ou
socioculturelles.

Aux Etats-Unis, la nourriture a souvent été le moyen pour un immigré


anonyme de s'inclure dans le circuit économique et social. S'inspirant
des méthodes de préparation kasher, les bouchers allemands et
d'Europe de l'Est, juifs ou non, vendent leurs saucisses dans les Beer
garten et dans la rue. Dans le New York des années 1890, le hot dog
est un aliment culturellement marqué : un aliment d'européen blanc.
Plus encore, et ce n'est pas un détail, un aliment d'européen blanc
montrant qu"il a accès aux loisirs que prodigue la ville, moyennant
finances. Le hot dog est, dès son apparition, vendu dans les grandes
artères de la ville, les parcs municipaux et aux abords des stades,
c'est-à-dire dans la ville officielle, visible et désirée.

Très vite, les bouchers grecs, macédoniens, bulgares, italiens et


mexicains investissent le champ de la production et de la vente des
saucisses hot dogs. C'est le début de la diffusion du hot dog dans la
culture populaire commune de la jeune nation. Aujourd'hui, comme
en témoigne la pléthore de recettes de The Great American Hot Dog
Book de Becky Mercuri, il existe de nombreuses variantes du hot
dog, empreintes d'apports culinaires différents. Si le Coney de New
York est constitué d'une saucisse et de moutarde allemandes, de
relish méditeranéen et de sel au céleri, le Chicago dog est une
variante mexicaine avec sa sauce chilli... laquelle n'est pas originaire
du Mexique mais de Detroit, Michigan, l'un des bastions de la culture
African-American.

Voir aussi : Diplomatie, Entreprenariat, Ethnic food, Inuits, Liberté,


Rue

MOUTARDE
(Mustard)

De la famille des Cruciferae, la plante de moutarde est l'une des


épices les plus cultivées au monde, depuis les temps anciens. On
recense trois grands types de graines de moutarde : la blanche (
sinapis alba), la brune ( brassica juncea) et la noire ( brassica negra).
Un petit côté melting pot, non ? Mélangées à du vinaigre et à une
infinité de combinaisons d'épices, les graines broyées donnent la
moutarde.

Aux Etats-Unis, la moutarde est préparée et vendue depuis les


temps coloniaux. La première fabrique d'envergure est celle du
marchand d'épices Robert Timothy French. Comme son nom ne
l'indique pas, French est né aux Etats-Unis, près de New Oyrok. En
1883, Il fonde la R.T. Company avec son fils. Dans un premier
temps, ils vendent la moutarde en verrines. Ce mode de
conditionnement permet une meilleure diffusion dans tout le pays.
Surfant sur la popularité naissante du produit, French père et fils
créent une sauce pouvant être utilisée dans les salades, hot dogs,
corn dogs et hamburgers, et ciblent les stades de baseball. En 1915,
alors que la firme est le leader du marché national, les couleurs de la
R.T. French sont sur les fanions brandis dans ces stades. Quelques
années plus tard, la firme lance des campagnes de publicité
nationales et édite des livres de cuisine, tels Made Dishes : Salads and
Savories with French's Cream Salad Mustard (1925). En 1926, French et
fils vendent à prix d'or leur entreprise aux Britanniques Reckitt &
Colman. Les affaires continuent de plus belle. En 1974, la bouteille
PVC pressable est introduite sur le marché. En 1982 sont lancées
sur le marché la French's bold n' spicy et la Moutarde de Dijon.

Aujourd'hui, les grandes marques de moutarde américaines


sont French's, Grey Poupon, Gulden's, Heinz, Plochman's et Stadium
Mustard.

On estime que 80% des ménages américains achètent de la


moutarde, générant un marché estimé à 280 millions de dollars.

Voir aussi : Ketchup, Mayonnaise, Relish

MSM (Mecanically Separated Meat)


Ne pas confondre avec MSN, célèbre messagerie instantanée
numérique.
Viande séparée mécaniquement.

Voir aussi : Industrie agroalimentaire

MUFFLER MAN
Quand vous êtes aux Etats-Unis, vous ne pouvez pas le rater.
Sculpture de sept mètres à l'effigie d'homme tenant gaillardement un
hot dog, cette icône publicitaire est le plus souvent postée devant les
restaurants de roadfood. En 1963, le fabricant de bateaux Steve
Dashew s'inspire des statues géantes de bûcheron en fibre de verre
pour créer le Muffler man. Celui-ci fait partie de l'imaginaire de la
route, au même titre que le biker, le truck (gros camion) et les bars.
Saurez-vous retrouver le Muffler man dans Easy rider (1969) de
Dennis Hopper ?

Voir aussi :
Roadside food

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Nains
(Dwarf)

Le recours au nain,
personnage du
folklore allemand
(traditionnellement
artificier ou
magicien) et des
spectacles de
freaks américains,
est l’une des
stratégies
marketing du géant
du hot dog Oscar
Mayer.

Au milieu des
années 1930,
Mayer se crée une
sorte de double
enfantin, Little
Oscar. Petit chef de
cuisine en tablier et
toque blancs, il est
incarné par
plusieurs
comédiens nains,
les hot doggers. Le
premier est
Meinhardt Raabe,
avant d'être
remplacé, 36 ans
durant, par George
Molchan.

Little Oscar parcourt les Etats-Unis au volant de la célèbre


Wienermobile, laquelle a aujourd'hui son propre compte Twitter . Il
séduit l’Amérique à grands renforts de divertissements, de saucisses
et de goodies. Sous la houlette des marketeurs, le hot dog devient
une icône enfantine et délicieusement régressive. C'est que Oscar
Mayer, le vrai, a déjà compris le potentiel offert par le baby boom d’
un pays continental en plein essor : séduire les enfants, c'est s'allier
les parents et construire une clientèle fidèle tout au long de la vie.
Quelques soixante ans plus tard, la chanteuse polémique Miley
Cyrus saura ce souvenir de Little Oscar pour son Bangerz Tour.
Dans sa scénographie composée notamment d'une scène où elle
chevauche un hot dog géant, Miley Cyrus fait appel à des danseuses
naines. Le freak show a, semble t-il, encore de beaux jours devant
lui...

Voir aussi : Oscar Mayer, Muffler Man, Wienermobile

NATHAN'S FAMOUS
Le parc de Coney Island, dans le district de Bowery à New York City,
est l'un des berceaux supposés du hot dog.

La légende veut que celui-ci y ait été inventé en 1871 par le


boulanger Charles Feltman, émigré allemand. Conscient que les
produits simples sont les plus lucratifs, il comprend que les saucisses
de son pays natal ( Wiener, Frankfurter...) sont bonnes, bon marché
à l'achat et à forte plus value une fois revendues chaudes. Il place la
saucisse dans un petit pain qu'il arrose de moutarde et vend le tout
aux couples et familles en goguette. Le succès est au rendez-vous.
Feltman délaisse son petit stand mobile et ouvre un petit restaurant.
Succès confirmé. En 1916, Feltman revend l'affaire à l'un de ses
serveurs, Nathan Handswerker, immigré juif Polonais. Celui-ci met
les bouchées doubles en y installant un grill géant et sert les hot
dogs avec des frites.

L'affaire de Handswerker est un modèle de réussite individuelle à


l'américaine : le restaurant devient très vite LE spot branché et bon
marché de New York pour manger ce nouvel aliment qu'est le hot
dog. Il s'agrandit et est rebaptisé Nathan's Famous en raison de sa
renommée. Handswerker y ajoute le slogan jamais démenti depuis :
Nathan's : from a hot-dog... to a national habit ! (Nathan's : d'un
simple hot dog... à une tradition nationale !)

Aujourdhui, le restaurant Nathan's Famous existe toujours et fait


partie des passages obligés des touristes visitant la mégapole. C'est
à la fois une chaîne constituée de six marques et 400 franchises, et
le fournisseur de produits pour 18 000 enseignes à travers tout le
pays. Depuis 1993, le Nathan's Famous de Coney Island organise
chaque année le principal concours du plus gros mangeur de hot
dogs. lors de la Fête nationale. Il est retransmis à la télévision
nationale. Réussite individuelle, renommée mainstream et
patriotisme : c'est ça le mythe du self made man et le rêve américain
!
Voir
aussi
: Concours du plus gros mangeur de hot dog, Entreprenariat, Hip hop
, Rue, Saucisse, Sport
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OBÉSITÉ
(Obesity)

C'est l'un des principaux problèmes de santé publique aux Etats-


Unis. L'obésité, ou l'autre face de la société de l'opulence.

Selon les chiffres de 2010 du Centers for Disease Control and


Prevention (CDC), deux Américains sur trois sont considérés en
surpoids, quand 35,7% des adultes et 17% des enfants sont atteints
d'obésité. Les études successives sur le sujet ne cessent d'établir le
lien entre niveau de vie et race - notion éminemment anglosaxonne.
Les deux principales minorités, afro-américaine et latino y sont les
plus sujettes. "Minorités" comptant tout de même respectivement
48,4 et 42 millions d'individus parmi une population nationale de 320
millions d'habitants (United States Census Bureau, 2010).
La junk food, les modes de vie trop sédentaires associés au manque
d'éducation diététique, mais aussi la génétique, sont les principaux
facteurs de cette maladie. L'obésité génère de nombreuses maladies
lourdes : diabète de type 2, tension artérielle et maladies cardio-
vasculaires, handicaps multiples, sans parler des complications lors
de grossesse et de l'impuissance. Le CDC estime qu'elle est la cause
de 100 000 à 400 000 décès par an et coûterait 117 milliards de
dollars aux contribuables en soins (prévention, diagnostics, soins
ambulatoires). Coût d'autant plus lourd que l'actuel projet Obama
care (garantie d'une couvertue sociale universelle) est loin de faire
l'unanimité. Aux Etats-Unis, on estime que l'accès aux soins de
qualité incombe au choix individuel, et non à un Etat Providence.

L'obésité a également un coût... pour les compagnies


aériennes américaines. En 2000, celles-ci affirmaient avoir déboursé
275 millions de carburant pour compenser le surpoids de certains
passagers.

Face à ce mal de société, les lobbies agroalimentaires tarderont à


prendre des mesures. Ce n'est qu'au milieu des années 1990
qu'elles lancent des campagnes éducatives, notamment dans les
écoles publiques, le plus souvent par voie télévisée, ressemblant
parfois davantage à des campagnes de communication. Des ONG
privées non lucratives telles Healthcorps et des programmes
nationaux de prévention à destination des enfants dont Let's move !
de Michelle Obama proposent des jalons permettant à chacun de
connaître, choisir voire cultiver des aliments sains.

Voir aussi : Fast food, Industrie agroalimentaire, Junk food, Valeur


nutritionnelle
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PETA (People for Ethical Treatments of


Animals)
Voir : Junk food, Végétarien

PETIT PAIN
(Bun)

On ne badine pas avec cette douceur de la vie. Il ne doit être ni trop


mou, ni trop dur à mâcher. La différence entre le bon et le mauvais
petit pain, c'est que le bon est cuit à la vapeur et très chaud lorsqu'il
est servi.

Le bun est la version américanisée du Weissbrot allemand, petit pain


blanc au lait. Selon Hot Dog : a Global History de Bruce Kraig, il
semblerait que la méthode de cuisson soit due à une heureuse
erreur. Les saucisses germaniques se mangent chaudes, voire
brûlantes. Lors d'une exposition, un vendeur de saucisses se
trouvant à cours de gants aurait saisi un petit pain pour les servir
sans se brûler.
La recette américaine aurait été mise en point par le boulanger
allemand Charles Feltman et immédiatement adaptée pour la
production à la chaîne. La première commercialisation date de1871,
au Brooklyn's Cone Island. D'autres sources historiques accréditent
l'invention à Billy Ingram, qui fondera la puissante White Castle
Hamburger en 1921, aujoud'hui l'un des leaders du marché.

Certes, le petit pain industriel du hot dog regorge souvent de graisses


et de sucres. La vie étant parfois mal faite, une saucisse chaude
croquante allié au pain moelleux est une sensation délicatement
régressive à chaque coup de dents. Les Japonais ont Totoro. Les
Etats-Uniens ont le bun. A moins de participer au concours du plus
gros mangeur de hot dog, difficile de s'en dégoûter.

Voir aussi : Concours du plus gros mangeur de hot dogs, Industrie


agroalimentaire, Nathan's Famous, Saucisse

PIN-UP
(Pin-up girl)

La jeune femme peu vêtue posant dans des situations tantôt


cocasses, tantôt aguicheuses, est une autre icône populaire
américaine.
Elle naît à la même époque, dans les années 1880, et dans les
mêmes grands pôles urbains que le hot dog. Tous deux sont les
produits des progrès fulgurants de l'industrialisation et de la demande
croissante d' entertainement (loisirs).

Souvent photographiée ou dessinée par des hommes, la pin-up en


dit long sur le lolitisme — néologisme issu du roman Lolita de
Vladimir Nabokov — de la société américaine. Jeunesse et beauté
éternelles.

Qu'elle soit sur le calendrier du garagiste du coin, peinte sur l'Enola


Gay (bombardier qui lâcha la bombe A sur Hiroshima), dans les
magazines cachés sous le lit d'un adolescent ou en porte-clés, la pin-
up se consomme à toutes les sauces et à peu de frais. Les progrès
de l'imprimerie développent la presse et encouragent l'essor d'une
imagerie érotique, voire pornographique. La pin-up de la fin du 19e
siècle nourrit autant le désir essentiellement masculin qu'elle (im)
pose les codes esthétiques de la femme désirable, nécessairement
blanche. La Gibson girl du dessinateur Charles Dana Gibson et la
Christy girl de Howard Chandler Christy deviennent le patron de la
femme sophistiquée, libérée et aguicheuse.

Le thème de la saucisse-phallus sur le barbecue incandescent est un


grand classique de l'imagerie pin-up. Le barbecue est un moment de
convivialité familiale et de voisinage fort aux Etats-Unis. Dans les
années 1930, pulps (romans de mauvaise qualité) et comics (bande
dessinée américaine) publient les Vargas girls d'Alberto Vargas et les
filles dessinées par Enoch Bolles, pour ne citer que les plus connues,
en prise avec de grosses saucisses jûteuses. En 1952, Hebrew's
National Frankfurter organise le concours de Miss
Frankfurter. Considéré comme le roi du genre, Gil Elvgren dessine en
1957 la scénette Your Hot Dog Sets Me on Fire (ton hot dog me met
le feu) pour la marque de saucisses Ball Park.

La reine incontestée des pin-ups, Bettie Page se prêtera également à


l'exercice, en mangeant son hot dog de manière burlesque.
D'autre pin-ups anonymes poseront de manière tout aussi ridicule
.

Dans les années 1970, les magazines masculins Playboy et


Penthouse regorgeront de pin-ups utilisées pour les publicités de hot
dogs, sodas, montres... Au début des années 2000, des artistes tels
le plasticien Mel Ramos et le photographe David Lachapelle
revisitent le genre, non sans ambiguité.
Voir aussi : Art contemporain, Comics, Pornographie

PHOTOGRAPHIE
(Photography)

Voir : Bibliothèque (si ce mot vous est anxiogène, cliquez ici )

PORNOGRAPHIE
(Porn)

Empreints de puritanisme nourri par les puissants lobbies Wasp


(White Anglo Protestant), les Etats-Unis sont pourtant la première
industrie pornographique de la planète. Celle-ci n'a pas manqué
d'inclure le hot dog dans sa boîte à sex toys.

Le développement d'internet démocratise la consommation et la


production d'images et de films. Les grands noms de l'industrie du X
doivent faire face au porno amateur, souvent disponible gratuitement
sur des portails web spécialisés. Ces derniers proposent des outils
d'indexation basés sur des mots-clés spécifiques à la culture
pornographique que le linguiste François Perea propose d'appeller
des pornotypes. Il suffit de taper "hot dog" sur le moteur de recherche
d'un site pour accéder à la pléthore de films mettant en scène, au
propre ou au figuré, des appendices phalliques de toutes sortes,
nappés ou non de ketchup, mayonnaise, moutarde ou relish...

La pornographie est indissociable de la censure ou, tout au moins,


d'une autorité définissant, à un moment donné, pour le collectif, ce
qui relève de l'obscénité et de l'immoralité, et ce qui relève de
l'érotisme. Sorte d'ayatollah du Surréalisme, André Breton disait que
"la pornographie, c'est l'érotisme des autres". C'est que
contrairement à l'érotisme, la pornographie ne cherche généralement
pas à raconter une histoire avec des aspirations artistiques, mais à
exciter immédiatement le spectateur.

L'imagerie pornographique ne saurait se limiter aux strictes


productions du genre. Lorsqu'en 1998, David Lachapelle
photographie l'actrice grand public Milla Jovovich en string et talons
aiguilles chevauchant un hot dog pour le magazine Detour, puis
Wendy Hal enlaçant un hot dog géant dans un quartier pavillonnaire
de la classe moyenne pour la série Inflatables, et enfin la chanteuse
Britney Spears avec un hot dog en 2000, il signifie, comme
d'autres artistes et publicitaires, que les codes de l'imagerie
pornographique sont désormais un élément normalisé de la culture
pop américaine. D'ailleurs, lors de sa tournée Bangerz Tour 2013
/2014, devant un public essentiellement adolescent, la chanteuse
pop thrash Miley Cyrus chevauche un énorme hot dog en
scandant "I'm going to miss riding this big fucking Wiener !" ("cette
putain de grosse saucisse me manque déjà !").

via GIPHY

L'impact sociétal de la pornographie est tel qu'au début des années


2000, des universitaires américains créent, en héritage direct des
cultural studies, les porn studies. Elles proposent notamment de
montrer en quoi l'imagerie X peut être interprétée comme un
asservissement du corps et du désir féminins ou au contraire, comme
une marque extrême d'émancipation vis-à-vis des codes de
domination masculine, qu'ils soient économiques ou symboliques.
Dans une démarche comparative, on lira le très anti-porno Ce ne sont
que des mots de Catharine Mc Kinnon, le pro-sexe Hardcore from The
Heart : The Pleasures, Profits and Politic of Sex Performances de Annie
Sprinkle et le très complet Porn Studies de Linda Williams.
En mars 2014, le très sérieux éditeur universitaire Taylor & Francis
lance la revue éponyme (ISSN 2326-8743).

Voir aussi : Art contemporain, Cinéma, Cultural studies,


Photographie, Pin-up girl
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RELISH
L'une des têtes de la trinité mayonnaise-ketchup-relish. Ce
condiment d'origine méditerranéenne consiste en une préparation
cuite ou marinée de légumes coupés plus ou moins finement. D'un
goût plus ou moins délicatement sucré et épicé, il a l'avantage de
relever les plats les moins savoureux. Ses principaux fabricants
industriels sont les grandes marques de mayonnaise et de ketchup :
Coronation, Heinz, Vlasic Pickles et Claussen. De même que pour
ces deux condiments, c'est souvent au client d'assaisonner à
convenance, grâce aux pots et cuillères mis à disposition sur toute
table ou stand.

Voir aussi : Ethnic Food, Ketchup, Mayonnaise, Moutarde

ROADSIDE FOOD
C'est la cousine du fast-food (cuisine sur le pouce), version routière.
On doit pouvoir la manger d'une seule main, l'autre étant sur le
volant. La culture américaine est aussi celle de la route, symbole de
liberté. Le hot dog est à ce titre une image aussi forte que le biker de
la Road 66, le camionneur et son big truck ou les road movies à la
Bagdad Café de Percy Adlon (1987). En 1975, le géant de l'automobile
Chevrolet lance la publicité en choisissant des symboles forts de la
culture populaire : "hot dog, baseball, apple pie and Chevrolet".

Comme le fast-food, la roadside food est constituée d'aliments


basiques et nutritivement peu équilibrés, mais se conservant
longtemps quelles que soient les conditions climatiques. D'où
l'importance du packaging (polystyrènes, cartons, papiers...), lequel a
par ailleurs un impact non négligeable sur l'environnement. La
roadside food est préparée en quelques minutes de manière à
réduire le temps d'attente du client au comptoir ou dans sa
voiture. Le hot dog en est l'un des aliments phares, dans un pays
devant son développement au chemin de fer puis, et plus
massivement encore, à l'automobile. Cette dernière, couplée à la
construction de gigantesques routes et autoroutes (les highways), a
littéralement fendu les immensités naturelles et les mégapoles de ce
pays-continent. Le VRP, la famille en voyage ou en déménagement,
les policiers en planque ou en filature, les bandes de jeunes en
goguette le samedi soir sont autant de profils de consommateurs.

La roadside food est également une véritable industrie, avec ses


nombreuses chaînes : Harvey Houses, White Castle, White Tower et
plus récemment McDonald's Drive et KFC. Plusieurs d'entre elles
érigent des muffler men, sorte de totems laïcs à l'effigie d'un homme
brandissant un hot dog.

Voir aussi : Entreprenariat, Fast-food, Muffler man, Rue

ROCK N'ROLL
Si le hot dog est abondamment vendu aux abords des salles et
festivals de rock, il a aussi nourri son répertoire. Petit tour d'horizon
non exhaustif.

Bill Haley, grand nom du rock n'roll, se frotte à l'exercice avec le titre
Hot Dog Buddy Holly en 1956 pour la bande originale de la comédie
musciale — genre on-ne-peut plus "ricain" — Don't Knock The Rock
de Fred F. Sears. Un an plus tard, le King, Elvis Presley, riposte
avec le single Hot Dog : ce titre aux accents country vaut son pesant
pour son clip : un parterre d'adolescentes criant leurs premiers émois
dans une société puritaine. Quelques peu oubliés par la postérité,
The Archies publient un single du même nom en 1969. En 1979, les
rois du hard rock Led Zeppelin enregistrent Hot dog pour l'album In
through The Out Door. Le groupe n'est pas au mieux de sa forme. Ce
titre aux tonalités rockabilly est un clin d'oeil moqueur aux gens
rencontrés lors d'un voyage dans le Texas conservateur. En 2000, la
pochette de l'album Chocolate Starfish and The Hot Dog Flavored Water
du groupe de neo metal Limp Bizkit montre des personnages
fantomatiques assis sur un parterre peu ragoûtant de saucisses, aux
fortes allusions sexuelles.

Du divertissement pour adolescents à la provocation salace, en


passant par la moquerie d'une certaine Amérique, le hot dog s'inscrit
dans l'esprit souvent paradoxal du rock n'roll : la remise en question
de l'ordre établi, quitte, malgré lui, à le régénérer. Les adolescentes
hurlant leur émoi face au King ne préfigurent-elles pas, soixante ans
plus tard, une Miley Cyrus chantant le sexe cru et chevauchant un
hot dog géant ?

Voir aussi : Art contemporain, Cinéma, Hip hop

RUE
(Street)

Que ce soit au corner (coin de rue), au stade ou au parc


municipal, manger un hot dog dans la rue, c'est, d'une manière
consciente ou non, célébrer l'appartenance à l'Amérique. Dès son
apparition à la fin du 19e siècle, le hot dog est un produit urbain,
vendu aux dog wagons, stands à roulettes ou modestes gargottes.

Dans un pays de 320 millions d'habitants (United States Census


Bureau, 2010) où les villes — devenues mégapoles pour nombre
d'entre elles — se sont toujours davantage construites en fonction
des intérêts privés plus que de l'intérêt commun, le constraste des
inégalités sur un même trottoir est immense. L'Etat américain est une
démocratie à dominante urbaine qui ne materne pas ses citadins.
Base commune de sociabilité, la cordialité est empreinte du fameux
keep your cool (reste cool).

Qu'il soit au coin de la rue, aux abords d'un campus universitaire,


près d'un stade ou d'un parc, le stand de hot dog est l'un des rares
lieux publics où toutes les classes sociales et situations de vie,
riverains et gens de passage, se croisent et cohabitent de manière
pacifique. C'est le lieu de neutralisation temporaire des contrastes
socio-économiques. Comme le notent les historiens Lisa K. Boehm et
Steven H. Corey dans leur America's Urban History, la rue états-
unienne est le lieu du danger et de la (mauvaise) surprise, mais aussi
celui où, notamment dans les quartiers populaires, les réputations et
les réseaux informels se font et se défont.

L'esthétique des stands ou des petites échoppes se caractérise


souvent par des couleurs flashy et un graphisme tout en rondeurs. Y
abondent les représentations de hot dogs heureux d'être mangés,
dansant, volant ou faisant un clin d'œil jovial. Cette esthétique
renvoie davantage à celle du carnaval et du sucré qu'à celle de
la dure réalité de la rue américaine.

Voir aussi : Entreprenariat, Ethnic Food, Hip hop, Melting Pot,


Roadside food
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SAUCISSE
(Sausage)

Dès la fin du 18e siècle, les bouchers allemands et d'Europe de


l'Est migrent aux Etats-Unis avec leurs saucisses : Frankfurters
(américanisées en franks), Wieners (devenant des weenies) et
Thuringer. Héritère de ces trois variétés, la saucisse du hot dog est
composée de viande précuite finement hachée, émincée ou
reconstituée, et farcie dans un boyau animal ou artificiel.

Fabriquée de manière artisanale depuis des centaines d'années en


Europe puis industrialisée dès le début du 19e siècle, la Wiener à hot
dog est constituée des parties animales les moins nobles : muscle,
tendon, graisse. Tout est bon dans le cochon, on ne jette rien,
d'autant que les saucisses sont faciles à produire et à stocker.
Aliment informe rendant difficile l'identification des ingrédients, elle
est facilement frelatable avec tout et n'importe quoi. Cela lui vaudra
d'être sujette aux plus folles rumeurs : on murmure dans les
faubourgs New-Yorkais que des chiens errants sont tués pour leur
viande...

La tradition bouchère kasher influence beaucoup les bouchers


européens migrants, juifs ou non. Ainsi, les viandes utilisées sont
surtout le porc, le bœuf et le veau, autant pour des raisons
religieuses que gustatives. Afin de faire baisser les coûts de
production, profitant du développement de l'élevage intensif, la
viande de volaille est ensuite de plus en plus utilisée. La base
d'assaisonnement traditionnelle est constituée de coriandre, d'ail, de
graine de moutarde, de noix de muscade, d'oignon blanc, du sel et
du sucre.

Les bouchers français apportent le savoir-faire du boudin, notamment


au Québec et à la Nouvelle-Orléans, mais la Wiener germanique
reste la plus populaire.

A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, l'industrie agroalimentaire


connaît un regain de vitalité. La saucisse du hot dog devient dès lors
l'un des produits phare de l' american way of life.
Voir aussi : Ethnic food, Humour, Industrie agroalimentaire; Légende
urbaine, Législation, Melting pot, Petit pain, Valeur nutritionnelle,
Végétarien

SELF-MADE MAN
Voir : Entreprenariat, Liberté

SPORT
Comme le note The Dickson Baseball Dictionary, le hot dog est vendu
dès les années 1890 lors d'évènements sportifs, à commencer par
l'un des socles communs de la culture populaire : le match de
baseball.

En 2013, le National Hot Dog and Sausage Council estime que les
Etats-Uniens ont consommé plus de 20 millions de hot dogs pendant
les matchs.

Selon les éxégètes du hot dog Leonard Cohen, Barry Popik et David
Schultamn dans leur ultra underground Origin of The Term "hot dog"
(publié à 50 exemplaires), le dog serait né de l'initiative du boucher
allemand Chris Von der Ahe en 1893. Ce dernier, diversifiant ses
activités en homme d'affaires avisé, est le propriétaire de la St. Louis
Browns baseball team et du stade Sportman's Park. Conscient que
les populations sont toujours plus friandes d' entertainement
(divertissement) sans nécessairement s'intéresser au sport ou même
le pratiquer, il lance les soirées wine-and-cheese aux abords de son
stade : sorte d'apéros mondains où l'on mange du fromage en buvant
du vin d'importation. Histoire d'écouler son stock, il y propose aussi
force saucisses.

Le journaliste Quentin Reynolds propose un autre mythe fondateur,


relaté dans le Collier's magazine de 1935. Hiver 1901, dans le stade
de Polo Grounds, le match de baseball des New York Giants est
annulé en raison des intempéries : les 50 000 spectateurs sont en
train de geler sur leur siège. Un marchand de glaces, Harry M.
Stevens, a soudain une idée. Il va trouver les bouchers allemands du
coin, leur achète leurs stocks de saucisses, qu'il revend, chaudes,
dans un pain, aux spectateurs frigorifiés. Marché captif, demande
supérieure à l'offre. Beaucoup d'argent en peu de temps. Le premier
concerné aura beau démentir cette version, qu'importe, le mythe est
né.

En 1906, Thomas A. Dorgan, chroniqueur des pages sportives du


New York's Evening Journal, dessine les Unes des numéros des 12
et 13 décembre. Il couvre une course cycliste de six jours au
Madison Square Garden de New York. Ses deux dessins sont un
panorama de la course, avec, quelque part dans un coin, un dog
wagon (vendeur ambulant). Ces deux Unes sont les premiers
documents représentant le hot dog dans un contexte sportif.

Aujourd'hui, le hot dog demeure l'aliment des matchs de baseball,


football américain et autres. Au début des années 2012, surfant sur
la mode bio, les White Sox de Chicago lancent leur saucisse
végétarienne officielle, vendue aux abords du stade U.S Cellular
Field.

Voir aussi : Comics, Moutarde, Rue

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VALEUR NUTRITIONNELLE
(Nutrition facts, Nutritious)

Pour peu que vous ayez lu au préalable l'article Junk food de ce


dictionnaire, sans doute penserez-vous que le hot dog est hostile à
l'Homme. Il est pourtant aussi source de protéines. Les normes
établies par l'US Department of Agriculture stipulent qu'une saucisse
de 45 grammes doit contenir 150 calories, 5 grammes de graisse et
au maximum 13 grammes de lipides. Il existe des saucisses dites light
, allégés en graisses et sodium, qui contiennent environ 45 calories.

Pour autant, il convient de distinguer valeur nutritionnelle et qualité


intrinsèque des aliments... Les valeurs recensées ici ne concernent
que la saucisse, et non l'ensemble du hot dog, qui, on le rappelle,
inclut mayonnaise grasse, ketchup sucré, relish et petit pain tout
aussi sucrés.

Pour la version dark side of the dog, voir aussi : Junk food, Industrie
agroalimentaire, Saucisse

VÉGÉTARIEN
(Vegetarian, Vegan, Veggie)

Le régime végétarien est tendance depuis une quinzaine d'années. Il


existe désormais des hot dogs constitués d'une saucisse d'origine
strictement végétale. Mais un hot dog sans viande est-il encore un
hot dog ?

Du point de vue réglementaire, l'US Department of Agriculture est


clair : le hot dog a pour aliment principal une saucisse d' origine
animale , fut-elle constituée de muscles, muqueuses, graisses et
autres basses extractions de porc, bœuf ou volaille. Toute autre
saucisse ne peut prétendre à l'appellation hot dog.

Le hot dog n'est pas qu'un aliment. Il est peut-être surtout un


symbole majeur de l'américanité. En ce sens, il permet de
comprendre la prise de conscience civique à l'égard de la junk food à
partir des années 1990, ainsi que le recours à la nourriture en tant
marqueur identitaire. En l'occurrence ici, celui d'une certaine culture
urbaine branchée.
Trendy (à la mode) aujourd'hui, la saucisse végétarienne n'est
pourtant pas nouvelle. La firme Worthington Foods en commercialise
une dès 1949, à base de protéine de soja. Aujourd'hui, plusieurs
marques, telle Morning star, investissent dans ce secteur de
niche. La très médiatique ONG de défense des animaux PETA
propose même son top 5 des hot dogs végétariens . En 2012 et
2015, elle lance sa Campagne Go Veg ! en envoyant ses Sexy
Lettuce ladies, bimbos en bikini , offrir des hot dogs veggie dans
les grandes villes du pays.
Le hot dog végétarien est plutôt consommé par les populations
jeunes des classes moyennes urbaines. De ces dernières émergent
les figures du bobo et du hipster. Le premier, aujourd"hui
quadragénaire, allie souvent discours libéral pour tout ce qui relève
de l'accès à la culture et du droit à la différence, et pratiques
conservatrices pour ce qui concerne notamment le logement et la
scolarisation des enfants. Le second, plus jeune mais ayant lui aussi
bénéficié de l'éducation formelle à un niveau significatif, est la
version 2010 du métrosexuel urbain. Grand consommateur de
tendance, il fait valoir un côté créatif et décalé (barbe et chemise à
carreaux de bûcheron, casquette américaine d'équipementier
agricole ou pétrolier...). Dans ces conditions, le veggie dog relève
sans doute d'une posture paradoxale visant à refuser une industrie
agroalimentaire mercantiliste basée sur les mauvais traitements des
animaux, des aliments de piètre qualité et un mauvais impact
environnemental, tout en continuant à consommer un aliment phare
née de cette industrie.

Pourtant, il semble que le ver était dans le fruit — ou plutôt dans la


saucisse. En 2015, CNN affirme que selon l' étude de Clear Labs ,
10% des saucisses végétariennes contiendraient de la viande.

Voir aussi : Ethnic food. Industrie agroalimentaire, Junk food,


Législation, Obésité
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WIENER
Voir : Saucisse

WIENERMOBILE
Si Batman a sa Batmobile et Green Hornet sa Black Beauty, la
saucisse a sa Wienermobile . Digne héritière des dog wagons
(stands mobiles à roulettes) de la fin du 19e siècle, cette icône
majeure de la publicité américaine ne dépareillerait pas dans un
comics de la Marvel. En 1936, les restaurants thématiques et les
food
trucks
fleurissent dans l'Amérique citadine. Le magnat du hot dog Oscar
Mayer comprend très tôt le pouvoir de l'image publicitaire : les beige,
jaune et rouge saturés de l'emballage de ses saucisses sont en
passe de devenir un classique. Il demande alors à son neveu, Carl
G. Mayer, de concevoir une voiture respectant la charte graphique de
la firme. Mayer veut aller chercher sa clientèle là où elle se trouve :
parmi les enfants des écoles, orphelinats, hôpitaux, parades et
festivals de tout le pays. Une sorte de road trip commercial du hot
dog. Carl G. va au-delà de la vision de son oncle en construisant une
voiture en forme de hot dog sur un châssis de Dodge et un moteur
General Motors. L'habitacle, en fibre de verre, a la forme d'une
Wiener.

Les Mayer poussent le souci du détail jusqu'à recruter des chauffeurs


nains pour mieux jouer la carte du divertissement bon enfant : ce
sont les hotdoggers. Mais, les temps changent et ce spectacle n'est
plus de mise. A partir de 1988, l'entreprise, entre-temps rachetée par
le géant mondial Kraft Foods, lance le Hotdoggers program pour
recruter les quatre binômes de conducteurs qui sillonneront le pays
dans les huit Wienermobile. Les critères de recrutement changent du
tout au tout : seuil de 2 000 candidats américains devant justifier
d'études supérieures et de la nationalité américaine, contrat fixe du
1er juin au 1er juin de l'année suivante.

La Wienermobile se déclinera en huit modèles successifs de 1936 à


2008. La dernière version est équipée d'un GPS, d'un système son
sans fil permettant de diffuser son jingle en 21 styles musicaux
différents — du cajun au hip hop en passant par la bossa-nova.

Malgré le nombre très restreint de véhicules en service, la


Wienermobile est célèbre dans tous les Etats-Unis. Objet culte, elle
est aujourd'hui collectionnée par les geeks : les modélistes Hot
Wheels et Matchbox en ont réalisé sa maquette, de même que
des fans de Lego .

Voir aussi : Oscar Mayer, Nains, Roadside food, Rue


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CC BY-SA 3.0 FR
Sélection de références

Dictionnaire des Etats-Unis


Daniel Royot (dir.)
Larousse, 2010

A la Bpi, niveau 3, 973(03) DIC

Fast food and junk food : an


encyclopedia of what we love to eat
Andrew F. Smith
Greenwood, 2011

A la Bpi, niveau 3, 973-1 SMI

Food studies : an introduction to


research methods
Jeff Miller et Jonathan Deutsch
Bloomsbury Publishing, 2009

A la Bpi, niveau 3, 93.0 FOO


Histoire des Etats-Unis
François Durpaire
PUF, 2016

A la Bpi, niveau 3, 973 DUR

Hot dog: a global history


Bruce Kraig
Reaktion Books, 2012

A la Bpi, niveau 3, 973-1 KRA

Introducing cultural studies : a


graphic guide
Ziauddin Sardar et Borin Van Loon
Icon Books, 2010

A la Bpi, niveau 3, 93.0 INT


La conjuration des imbéciles
John Kennedy Toole
Robert Laffont, 2009

Prochainement à la Bpi

La culture du pauvre
Richard Hoggart
Les Editions de minuit, 1970

A la Bpi, niveau 2, 301.4 HOG

L'Amériques des images : histoire et


culture visuelles des Etats-Unis
François Brunet (direction)
Hazan/ Université Paris Diderot, 2013

A la Bpi, niveau 3, 973-1 AME


Man bites dog : hot dog culture in
America
Bruce Kraig & Patty Carroll
AltaMira Press, 2012

Prochainement à la Bpi

Regards sur les Etats-Unis


Cynthia Ghorra-Gobin, Guillaume Poiret, Jacques Portes
et Marie-Jeanne Rossignol
La Documentation française, 2016

A la Bpi, niveau 2, 309(73) REG

The Oxford companion to american


foood and drink
Andrew F. Smith
Oxford University Press, 2009

A la Bpi, niveau 3, 973-1 AME


Cultural studies : Genèse, objets et
traductions
Retrouvez les conférences de cet important
colloque organisé par la Bibliothèque publique
d'information en mars 2009.
National Hot Dog and
Sausage Council
Portail grand public du
National Hot Dog and
Sausage Council.

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