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NOUVELLES TECHNOLOGIES

Puces à ADN
© Courtesy of

La génomique pour
Affymetrix

faire parler les plantes


Les puces à centimètres carrés une grande situation donnée, la plante
ADN accélèrent quantité d’informations géné- connaît ou non un stress.
tiques, afin d’identifier les ca- « Les puces à ADN nous
les recherches ractères propres d’une variété. permettent de faire par-
en génomique Son principe de fonctionne- ler la plante : elles nous
végétale. ment repose sur un prélève- renseignent sur son état
ment de tissus végétaux. de santé, sa nutrition, son
Les travaux Broyé et préparé, cet échan- bien-être », résume Laurent
entrepris sur tillon est alors appliqué sur Guerreiro.
blé tendre ont une membrane de nylon ou
Deux situations
une plaque de verre.
permis d’identifier Le recours à des techniques extrêmes
Un
des gènes qui optiques et à des logiciels Le concept de départ tient robot dépose
renseignent sur le spécialisés permet ensuite presque de l’évidence : un plusieurs milliers de
de lire l’intégralité des gènes stress environnemental a des fragments d’ADN sur une surface
statut azoté des d’une plante et de mesurer conséquences sur le fonc- de quelques centimètres carrés :
plantes. leur niveau de fonctionne- tionnement de la plante. Ces c’est la puce à ADN.
Si la méthode reste ment. Un vrai livre ouvert : conséquences sont logique- © Courtesy of Affymetrix

le blé contient par exemple ment perceptibles au niveau


encore confinée 30 000 gènes. moléculaire, bien avant la
en laboratoire, traduction visible du stress. plante dans une situation don-
l’hypothèse d’une Identifier la fonction d’un L’analyse des informations gé- née, pour dresser ensuite un
gène nétiques visait donc à mesurer diagnostic de la situation de
application n’est « La puce à ADN exploite les réactions des gènes de la la plante.
pas illusoire. Et les l’information contenue dans
déclinaisons sont l’ARN messager », explique Du gène à la protéine (fig. 1)
Laurent Guerreiro, respon-
multiples. 3OURCE'.)3
sable génomique à ARVALIS !$.
!$.
- Institut du végétal (figure 1). UNIQUE
5NALPHABET # ! ' 4 4
4 ! ' ! 4 # 4
« Son rôle consiste notam- ¸LETTRES ' ' 4
! #
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LESBASES # ' # # '
es puces à ADN révo- ment à transporter l’informa- ! 4 ' #
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L
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lutionnent les connais- tion génétique du noyau vers


4RANSCRIPTION
sances sur la généti- le cytoplasme, ou cette infor- $ICTIONNAIRE
que des espèces cultivées. mation sera utilisée. Il illus- 5NIVERSEL !2.MESSAGER
DESÂTRES
Cette technologie, utilisée de- tre le niveau d’activation des VIVANTS # ' 5 5 # # # ' ! ' ' 5 ! 5 # # ' # ' 5 # ' ! ! ' # 5 ! 5

puis une dizaine d’années dans gènes. Il y a donc une forte


4RADUCTION
la recherche médicale, suscite corrélation entre une grande
un véritable engouement dans quantité d’ARN messager et 0ROTÁINE
02/4%).%
la communauté scientifique. un symptôme visualisé de la 5NENCHAÆNEM
ENT
Appliquée aux plantes, elle plante », précise-t-il. ¸PARTIRDE
NÁS
ACIDESAMI 0HÁNYLALANINE !RGININE 0ROLINE !RGININE
permet de mettre sur quelques Dès lors, en identifiant la 0ROLINE 4YROSINE !RGININE 3ÁRINE
fonction potentielle de tel ou

Charles Baudart
tel gène et son niveau d’acti-
vation, on peut, par compa- S imilaire à de l’ADN d’un point de vue moléculaire, l’ARN
messager (ARNm) transporte l’information génétique entre
l’ADN et les structures cellulaires.
c.baudart@perspectives-agricoles.com
raison, montrer si dans une

44 PERSPECTIVES AGRICOLES • N° 324 • JUIN 2006


NOUVELLES TECHNOLOGIES

« Les premières expéri- Mais déjà, une trentaine de


mentations sur blé tendre ont gènes sont identifiés, rendant
porté sur un sujet que nous possible l’utilisation de tech-
connaissions bien : la nutri- niques moins coûteuses et
tion azotée sur blé tendre », plus simples, comme la PCR
rappelle Laurent Guerreiro. (Polymerase Chain Reaction ;
« Nous avons fait subir deux technique de réplication
situations extrêmes à du d’ADN qui facilite la mise en
blé tendre, l’un en situation évidence de la présence d’un
d’excès d’azote et un autre en gène ou d’un ARNm). La tech-
carence, avant de comparer nique est suffisamment pro-
le comportement des 30 000 bante pour être utilisée dans
gènes dans ces deux situa- d’autres axes de recherche
tions ». (lire encadré).
« Nous avons effectivement « Et si nous parvenons à
trouvé des gènes qui étaient identifier un seul gène fiable
en relation avec la satisfac- sur toutes les variétés d’une
tion azotée de plante », se féli- même espèce, nous pourrons
cite Laurent Guerreiro. « Plus imaginer des tests au champ,
la dose d’azote augmente, pourquoi pas à l’aide d’un kit
plus l’expression de ces gènes de type bandelette », imagine
s’accroît (figure 2). Moins Laurent Guerreiro. Il suffirait
l’apport d’azote est impor- de réaliser un jus de feuilles et
tant, moins l’expression des de le tester avec une bandelet- L’ADN au service de la
gènes est forte. Nous avons te, qui selon la coloration, indi- protection fongicide
montré qu’il existait des gè- querait l’état azoté de la plan-
nes qui réagissaient à la dose
d’azote. »
te, ou le niveau de résistance
d’une plante à une maladie.
E n 2006, les puces à ADN
sont mises au service de
la protection vis-à-vis de la
« Cette démarche est ra- Mais ça c’est encore du rêve ? septoriose, au travers de 3
À la base de la lecture des
dicalement différente des Une question qui fait sursauter essais conduits par ARVALIS
informations génétiques, le
– Institut du végétal. L’enjeu
méthodes actuelles, qui in- le chercheur « Vous ne direz prélèvement de tissus végétaux au
est de taille, car aujourd’hui,
terprètent un statut azoté en plus ça dans cinq ans ». „ champ.
il n’existe pas d’outil fiable
fonction d’un dosage d’azote. permettant d’estimer la
Ici, on se sert du raisonne- nuisibilité d’une attaque de
Les stress biotiques ou abiotiques entraînent des
ment de la plante ». septoriose. La génomique
modifications moléculaires chez la plante avant la
pourrait permettre de
Des techniques plus visualisation du phénotype notamment au niveau de réaliser un traitement ciblé
simples l’expression des gènes (fig. 2) et de mieux respecter
l’environnement.
Si le concept fonctionne,
« On peut parfaitement
ARVALIS – Institut du végé- imaginer que l’on se fiera à
tal souhaite encore confirmer l’information transmise par
la robustesse de l’outil. « En la plante pour savoir si un
2006, 17 sites ARVALIS- traitement s’impose ».
Institut du végétal répartis La logique de recherche reste
sur l’ensemble du territoire la même que la première
expérimentation : différents
français participent à ce tra- Plantes carencées Plantes fertilisées échantillons de plantes sont
vail. Chaque ingénieur impli- en azote passés au crible, les uns
qué devra bientôt donner son indemnes de septoriose,
avis sur cette technique. » #HROMOSOME #HROMOSOME
les autres avec des situations
« Nous avons sélectionné croissantes de la maladie.
des gènes totalement corré- Les puces à ADN permettent
lés aux besoins de la plante. de rechercher un gène qui
Quels que soient la variété,
4
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indique que la plante est
'ÀNE8 ! 4 ' ' # #
'ÀNE8 ! 4 ' ' # #

attaquée ou non.
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l’environnement et le stade
D’autres domaines
de développement, ils rensei- pourraient profiter d’une telle
gnent sur la satisfaction azo- !!!!! innovation : l’irrigation par
tée de la plante », développe !!!!!
!!!!! exemple. En identifiant des
4RANSCRIPT !!!!! 4RANSCRIPT gènes qui indiquent un stress
Laurent Guerreiro. « Nous DUGÀNE8 DUGÀNE8
!!!!!
!!!!!
travaillons aujourd’hui pour !!!!! hydrique, il sera possible
n’avoir qu’un seul gène indi-
!!!!! de sélectionner les variétés
qui supportent le mieux le
cateur et ainsi simplifier la
Gène x exprimé plus fortement dans la plante fertilisée. manque d’eau.
méthode ».

PERSPECTIVES AGRICOLES • N° 324 • JUIN 2 006 45

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