Article original

Reçu le :
6 octobre 2016
Accepté le :



Évaluation du stress : remplacer le

11 mars 2017


MSP 25 par une échelle visuelle analogique


 informatisée (EVA) ? Expérimentation en




milieu industriel. Étude transversale



multicentrique réalisée sur un échantillon de


 1986 salariés d’une entreprise automobile
 er



entre le 1 avril 2016 et le 30 juillet 2016


 Stress evaluation: To replace the PSM25 test by a


 computerized Visual Analogue Scale (VAS)? Experimentation

 in an industrial environment. Multicenter transversal study


 performed on a 1986 sample of employees of an automotive

 company between 1st April and 30th July 2016



 P. Laurenta,*, S. Fofanab, H. Leloixa, N. Brosseta, I. Grotzingera
Disponible en ligne sur 

 a Service médical du groupe PSA, 75, avenue de la Grande-Armée, 75000 Paris, France
ScienceDirect b
 Département MIASHS, université de Lille 3, domaine universitaire du Pont-de-Bois, 59650
www.sciencedirect.com Villeneuve d’Ascq, France
Summary
Purpose of study. Through a study of 1986 employees of the PSA
Group, our objective is to evaluate the possibility of replacing the
questionnaire MSP25 by a visual analogue scale (VAS) in Occupa-
tional Health.
Materials and methods. Both MSP25 and VAS scores for each
employee were collected between 1st April and 30th July 2016, by 23
physicians in 20 occupational health services. The study focuses on
the assessment of the predictive performance of VAS compared to the
results of the MSP25 (sensitivity and specificity). Statistical analyses
were performed using Excel 2013, SAS Enterprise Guide 7.11 and
Gretl 1.9.4.
Results. The study of learning sample led to the use of an optimal
threshold value of 61; applying this value to the validation sample
permit us to obtain a good couple sensitivity, specificity (79.7%,
83.7%). There is also a very strong Negative Predictive Value 97.9%,
* Auteur correspondant.
e-mail : pascal.laurent3@mpsa.com (P. Laurent).
http://dx.doi.org/10.1016/j.admp.2017.03.012 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2017;78:437-441
1775-8785X/ß 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Résumé
Objectifs. Au travers d’une étude sur 1986 salariés du groupe PSA
notre objectif est d’évaluer la possibilité de remplacer le question-
naire MSP25 par une échelle visuelle analogique (EVA) en santé au
travail.
Matériels et méthodes. Les scores au MSP25 et à l’EVA de chaque
salarié sont recueillis entre le 1er avril et le 30 juillet 2016, par
23 médecins dans 20 centres. L’étude porte sur l’évaluation de la
performance prédictive de L’EVA par rapport aux résultats du MSP25
(Sensibilité et spécificité). Les analyses statistiques ont été effectuées
en utilisant Excel 2013, SAS Enterprise guide 7.11 et Gretl 1.9.4.
Résultats. L’étude de l’échantillon d’apprentissage conduit à l’uti-
lisation d’un seuil optimal à 61. En appliquant ce seuil à l’échantillon
de validation on obtient un bon couple sensibilité, spécificité
(79,7 %, 83,7 %). On note également une très forte Valeur Prédictive
Négative à 97,9 %, cependant la Valeur Prédictive Positive est assez
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P. Laurent et al. Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2017;78:437-441
however, the Positive Predictive Value is quite low at 29.9%. Overall
83% of employees are correctly classified by VAS.
Discussion. An analysis, by logistic regression, of employees who
are incorrectly classified highlights an age effect, a physician effect
and a socio-professional category effect. Protocol compliance by
physicians and employees then appears as essential to avoid varia-
bility. Furthermore, biases can be caused by the computer interface
used to measure the VAS score, problem linked to the use of the
computer mouse or the scale and cursor width. Finally, the question
on interpretation that each employee has of the word ‘‘stress’’ cannot
be ruled out.
Conclusion. The VAS has many advantages to be a stress assess-
ment tool adapted to occupational physicians practice. However, in
front of difficulties highlighted, it might not, for now, be used instead
of MSP25 questionnaire but used as a complementary tool for
screening.
ß 2017 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Keywords: Stress, Psychosocial risk factors, Visual analogue scale
(VAS), MSP25, Screening
Introduction
Depuis 2009, dans le cadre du suivi médical des salariés, les
médecins du travail du groupe PSA proposent systématique-
ment d’évaluer le niveau de stress au travail au cours des
visites médicales périodiques. Ils utilisent le questionnaire
MSP25 pour mesurer ce niveau de stress. Ce questionnaire
permet de définir un « modèle bio-psycho-social du stress »
qui intègre les paramètres de l’environnement et les proces-
sus individuels de perception et de gestion du stress [1].
Afin de simplifier le recueil des données, et répondre aux
critiques formulées sur le MSP25 :
 le libellé des items (propositions multiples dans le même
item) ;
 des items portant sur des manifestations somatiques
digestives ou sudatoires, et des items relevant plus de la
pathologie que du stress psychologique conduisant à
formuler de nombreuses réserves sur le MSP25 [1] ;
 les équipes médicales souhaitent explorer la possibilité de
remplacer le MSP25 par une échelle visuelle analogique
(EVA) de mesure du stress utilisée dans de nombreuses
études de terrain ou dans un cadre expérimental [2,3].
Matériel et méthode
Population
Nous avons réalisé une enquête transversale multicentrique
sur 1986 salariés volontaires vus en visite périodique, entre le
1er avril 2016 et le 30 juillet 2016. Chaque participant évaluait
438
faible à 29,9 %. Globalement 83 % des salariés sont biens classés par
l’EVA.
Discussion. Une analyse, par régression logistique, des salariés qui
sont mal classés met en évidence un effet âge, médecin et catégorie
socioprofessionnelle. Le respect du protocole par les médecins et les
salariés apparaı̂t alors comme un élément essentiel pour éviter les
variabilités. À cela s’ajoute des biais occasionnés par l’interface
informatique utilisée pour mesurer le score EVA. Enfin la question
sur l’interprétation même que chaque salarié a du mot « stress » n’est
pas à écarter.
Conclusion. L’EVA présente de nombreux atouts pour être un outil
d’évaluation du stress adapté à la pratique des médecins du travail.
Cependant face aux difficultés rencontrées pour sa mise en œuvre,
elle ne pourrait être utilisée en remplacement du questionnaire
MSP25 dans la pratique actuelle, mais constitue un outil de veille
performant de dépistage utilisé en complément du MSP25.
ß 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Stress, Risques psychosociaux, Échelle visuelle analogique
(EVA), MSP25, Dépistage
son niveau de stress en répondant simultanément au ques-
tionnaire MSP 25 et à l’EVA. Vingt-trois médecins du travail,
répartis dans 20 centres de santé au travail en France ont
assuré la collecte des réponses.
Les outils de mesure
Le MSP 25 est un questionnaire comportant 25 questions. Les
modalités de réponse sont échelonnées de 1 à 8 (de « Pas du
tout » à « Énormément »). La version utilisée est la version
informatique. Il est interprété sous forme d’un score obtenu
en totalisant les réponses, au-dessous de 85, le salarié est
considéré comme étant peu stressé, entre 85 et 109, il est
considéré comme moyennement stressé et à partir de
110 comme étant en excès de stress. On s’intéresse dans notre
étude aux salariés diagnostiqués en excès de stress par le
MSP25. L’EVA est une échelle d’auto-évaluation. On utilise la
version informatisée incluse dans le dossier médical des
salariés. Le répondant doit positionner un curseur entre
2 émoticônes : « absence totale de stress » et « stress maximal
imaginable » en réponse à la question : « Ceci est une échelle
qui sert à évaluer le stress, entre les deux extrêmes, où vous
situez-vous ? ». Le logiciel informatique enregistre la mesure
équivalente sous forme d’un score qui peut prendre toutes les
valeurs entre 0 et 100.
Méthodes statistiques
La première étape de l’analyse consistera à vérifier que les
2 scores (MSP25 et EVA) sont liés par une relation monotone
positive, linéaire, en utilisant le coefficient de corrélation de

Pearson [11] ou non linéaire en utilisant le coefficient Rho de
Spearman [11]. Une fois ces relations établies, nous voulons
évaluer la performance prédictive de l’EVA par rapport aux
résultats du MSP25. Cependant, en l’absence de consensus
concernant le seuil de positivité de l’EVA à utiliser pour définir
les niveaux de stress, nous devons le déterminer. Ce seuil
devrait nous permettre de nous rapprocher le plus possible
des résultats obtenus par le MSP25. Il est obtenu en maxi-
misant simultanément la sensibilité et la spécificité de l’EVA
grâce à la courbe ROC [4] et à l’indice de Youden [5,6]
(sensibilité + spécificité) 1. Pratiquement, nous avons extrait
aléatoirement un échantillon des deux tiers de la population
totale (1311 salariés) qui constitue l’échantillon d’apprentis-
sage sur lequel nous avons déterminé le seuil optimal de
positivité de l’EVA. Ce seuil a été ensuite testé en l’appliquant
sur la population restante (675 salariés) qui constitue l’échan-
tillon de validation.
Logiciels statistiques
L’analyse des données a été effectuée sur les logiciels :
 SAS Enterprise guide (version 7.11);
 Gretl (version 1.9.4) ;
 Excel (version 2013).
Résultats
Données descriptives générales
Deux mille dix questionnaires ont été colligés dont 1986 exploi-
tables parce que complets. Il s’agit d’une population essentiel-
lement masculine avec 84 % d’hommes et 16 % de femmes,
d’âge moyen 45 ans (+ ou 8 ans). Il n’y a pas de différence d’âge
entre hommes et femmes. Nous enregistrons 43 % d’ingénieurs
et cadres, 36 % d’ouvriers et 21 % d’employés.
[(Figure_1)TD$IG]
Figure 1. Histogramme de comparaison entre les résultats des deux échantillons.
Évaluation du stress
Résultats des analyses
La vérification des corrélations est comme suit :
 le coefficient de corrélation de Pearson est égal
à + 0,6530045, ce coefficient est significatif, donc, pour
un risque de 5 %, il existe une relation linéaire entre le score
EVA et le score MSP25 ;
 le Rho de Spearman est égal à + 0,6654176, ce coefficient
est significatif, donc, pour un niveau de risque de 5 %, il
existe une relation non linéaire entre le score EVA et le
score MSP25.
Nous avons besoin de définir qui est stressé et qui ne l’est pas
avec l’EVA, puisque cette donnée est validée pour le score
MSP25. Le seuil optimal de l’EVA stress obtenu à partir de
l’échantillon d’apprentissage est de 61 (Fig. 1).
Appliqué à l’échantillon de validation, nous observons une
bonne stabilité de la sensibilité, de la spécificité et des valeurs
prédictives positives et négatives (Fig. 1). Considérer le seuil de
l’EVA à 61 apparaı̂t comme un choix idéal.
L’étude des rapports de vraisemblance nous montre que le
rapport de vraisemblance positif (RV+) est à 4,7 et le rapport
de vraisemblance négatif (RV ) est à 0,27. Or, pour que le
diagnostic d’un test soit confirmé, il est demandé que le RV+
soit supérieur à 5 et le RV soit inférieur à 0,1. L’utilisation de
l’EVA en lieu et place du MSP25 ne nous permettra pas de
confirmer le diagnostic. Le taux de salariés mal classés par
l’EVA s’élève à 17 %. Nous nous sommes intéressés aux
facteurs favorisants les erreurs de classification.
Le risque d’être mal ou bien classé a été étudié par régression
logistique en intégrant le sexe, l’âge, la CSP et le médecin
ayant fait passer le questionnaire comme variables explica-
tives (Tableau 1). On note un effet âge, médecin et CSP. En
effet, les salariés qui ont entre 35 et 44 ans ont plus de
résultats incohérents que les autres. Les médecins 4, 5 et
13 enregistrent des taux de mal classées plus élevés que les
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P. Laurent et al. Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2017;78:437-441

Tableau 1
Facteurs de mauvais classement par l’EVA (régression logistique).
Variables Effectifs OR (IC OR) p
Âge
Autres 439 1
***
Entre 35 ans et 44 ans 236 2,11 (1,4–3,2)
Médecin
Autres 537 1
**
Médecin 4 40 2,43 (1,16–5)
***
Médecin 5 38 3 (1,37–6,8)
***
Médecin 13 60 2,9 (1,45–5,7)
CSP
Autres 424 1
***
Ouvrier 251 1,97 (1,23–3,16)

Age : tranches d’âges; médecin : médecins participants au recueil de données ; CSP: catégories socio-professionnelles.

autres médecins. Enfin, les ouvriers sont ceux qui ont ten-
dance à produire un plus fort taux de réponses discordantes.
On peut supposer que la question posée n’est pas comprise de
la même façon par tous les répondants.
Discussion
Discussion sur la performance prédictive de l’EVA
sur l’échantillon de validation : facteurs techniques
et facteurs liés à l’interface
Les facteurs liés à l’utilisation de l’interface informatique sont
comme suit :
 sur l’interface actuelle, l’EVA est présentée de la façon
suivante au salarié (Fig. 2) ;
 la largeur de l’échelle sur l’interface est inférieure à
100 mm et varie en fonction de la taille de l’écran
d’ordinateur utilisée. La largeur du curseur est trop
importante et varie également en fonction de la taille de
l’écran utilisé. Ceci entraı̂ne une incertitude de la valeur du
stress mesurée ;
 de plus, on constate plusieurs facteurs techniques
(utilisation de la souris, déplacement du curseur) et des
facteurs liés au mode de validation (possibilité de valider la
question sans bouger le curseur ou déplacement inappro-
prié du curseur) qui entraı̂nent des biais de mesure.
Comparaison avec la littérature
Très peu d’études ont été menées sur l’utilisation de l’EVA
dans le cadre de l’évaluation du stress en milieu professionnel.
Toutes les études présentes dans la littérature utilisent une
échelle d’EVA graduée de 0 à 100 mm. Nous avons donc
comparé nos résultats à ceux de la littérature. Une majorité
d’études [8–10] fixe le seuil EVA à 60 mm. Seule l’étude [7] de
F. X. Lesage et S. Berjot conseille l’utilisation d’un seuil à
70 mm. Nos résultats sont donc proches de ceux retrouvés
dans la littérature.
Critiques et perspectives de l’EVA
Il ressort des différents travaux menés sur l’utilisation de
l’EVA que le choix du seuil varie d’une étude à une autre.
Plusieurs d’entre elles font mention du seuil à 60 mm, mais ce
seuil n’est pas consensuellement fixé. Il n’y aucune donnée
dans la littérature concernant la reproductibilité de l’EVA dans
le cadre de l’évaluation du stress sur des populations diffé-
rentes.
La performance de l’EVA pourrait être améliorée en prenant
en compte les facteurs de biais que nous venons de citer :
 en considérant une échelle de taille uniforme de 100 mm,
un curseur de largeur fixe et le plus fin possible, privilégier
l’échelle physique ?
 en veillant au respect strict du protocole par tous les
professionnels de santé ;
 en veillant à ce que le curseur soit obligatoirement déplacé
avant de pouvoir passer à l’étape suivante ;
 en formulant la question de telle façon qu’elle ne
puisse donner lieu qu’à un minimum d’interprétation
personnelle.

[(Figure_2)TD$IG]

Figure 2. Présentation de l’EVA stress sur l’interface utilisée.

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 Évaluation du stress

Conclusion Déclaration de liens d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
L’EVA présente tous les atouts pour être un outil d’évaluation
du stress particulièrement adapté à la pratique des médecins
Références
du travail. En effet, elle est simple, facile et rapide à utiliser.
Cependant, les difficultés techniques, les possibles difficultés [1]
de compréhension de la question posée, les possibles diffi-
cultés de respect du protocole par les services médicaux, les
[2]
difficultés à définir un seuil de positivité applicable à toutes
les populations (absence de consensus), le faible niveau de [3]
valeur prédictive positive font que nous pensons qu’elle ne
saurait se substituer à notre outil actuel. [4]
Toutefois, le MSP25 étant considéré dans notre étude comme
la référence comparée à l’EVA, celle-ci ne pouvait, au mieux, que
[5]
se rapprocher du MSP25. Or, la nature même des items du
MSP25 [1] rend discutable la fiabilité de la mesure obtenue [6]
(mesure-t-on vraiment le stress ?). Tout au plus pouvons-nous
conclure que les mesures sont proches mais avec un taux de
[7]
discordance non négligeable (en partie lié à la nature des
dimensions mesurées et en partie lié aux outils utilisés : ques- [8]
tionnaire avec questions multiples versus question unique).
L’EVA pourrait être utilisée, dans notre pratique, comme un
outil de dépistage en complément du MSP25, celui-ci étant
systématiquement proposé en cas de dépassement du seuil
[9]
de l’EVA, permettant ainsi d’optimiser notre stratégie de suivi
du niveau de stress, d’obtenir un meilleur taux de participa-
tion et de gagner du temps.
[10]
Remerciements
Les auteurs remercient les médecins de PSA ayant participé à ce
travail : M. Schosger, F. Lindas, I. Kryvenac, R. Boivin, S. Lacassagne, [11]
P. Morel, N. Lecomte, U. Gross, A.M. Trillo, J.F. Aubart, W. Demarini, I.
Marechalle, G. Aubree, E. Neveu, A. Poirier, C. Devere, R. Lesage, C.
Habert, L. Le Freche.
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