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O profonde douleur !
MARIA JACOBI.
Nous avons perdu le Fils de Marie, Jésus, notre consolateur, notre conseil. O
profonde douleur !
n- 231, publié par Luzarches, puis par Cousseinaker dans ses Drames liturgiques.
1. Mss.
La meilleure édition est celle de Milchsack, Die Osier uncl Passionsspiele (Volfenbuttel, 1880). p. 97
et suiv.
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MARIA SALOME.
Mais allons : il faut acheter des aromates pour embaumer son corps et le défendre
contre la morsure des vers. O profonde douleur!
UN MARCHAND.
Si vous voulez acheter des parfums, approchez, j'en ai à vendre. Si vous embau ¬
mez avec ces parfums-là le corps sacré de votre Maître, il ne redoutera ni la décom ¬
position, ni les vers.
LES TROIS MARIES.
O profonde douleur !
S'adressantau marchand :
Dis-nous, jeune marchand, combien veux-tu vendre ces parfums ? O profonde
douleur !
LE MARCIIAND.
Mesdames, écoutez-moi. Les aromates que je vous propose sont d'une qualité
supérieure.
LES MARIES.
O profonde douleur !
LE MARCHAND.
Si vous choisissez ces aromates, j'en demande un talent d'or, c'est le plus juste
prix,
LES INFLUENCES DU DRAME LITURGIQUE
LES MARIES.
O profonde douleur !
UN SECOND MARCHAND.
Qu'y a-t-il pour votre service ?
LES MARIES.
Marchand, nous voulons des aromates, as-tu ce qu'il nous faut?
LE SECOND MARCHAND.
Vous n'avez qu'à parler.
LES MARIES.
Nous voulons du baume, de l'encens, de la myrrhe, de l'aloès.
LE SECOND MARCHAND.
Tout cela est devant vous. Combien vous en faut-il ?
LES MARIES.
Il nous en faut cent livres à peu près. Ce sera combien, marchand ?
LE SECOND MARCHAND.
Ce sera mille sous.
LES MARIES.
C'est convenu.
Alors les Maries donnent l'argent et reçoivent les aromates, puis elles vont au
sépulcre ,
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«
Malheureuse que je suis
O tristesse !
O douleur ! »
Qu'ensuite vienne Maria Jacobi, qu'elle lui prenne le bras droit, que Maria
Salomé la relève de terre en lui prenant le bras gauche, et qu'elle lui dise :
«
Chère soeur, il y a trop d'affliction dans ton âme... »
Fig. 7. — LA CÈNE.
A. Fragn ent de la frise de Notre-Dame de Beaucaire. — B. Bas-relief du Dôme de Modène
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sculpteur de Parme, était un élève des Français. On voit que tout concourt
à fortifier cette hypothèse. Il paraît de plus en plus évident que c'est, de:
la Provence que les sculpteurs italiens ont reçu, au XIIe siècle, leur pre ¬
mière éducation artistique.
disciples devaient avoir des bâtons et des besaces , comme en ont les pèle-
rins , et qu'ils devaient porter
toute la barbe 1.
Le doute n'est donc pas pos ¬
sible. Les trois statues d'Arles
représentent bien le Christ et les
pèlerins, et elles les représentent
avec le costume que portaient les
prêtres quand ils jouaient, dans
l'église, le drame liturgique d'Em ¬
maüs 2.
Il y a une preuve encore. Le
manuscrit d'Orléans, après l'épi ¬
sode d'Emmaüs , met en scène
deux autres apparitions du Christ.
On le voit apparaissant aux apôtres
d'abord , à saint Thomas ensuite.
Or, le troisième pilier du cloître
Saint-Trophime est décoré de trois
statues. Au milieu, on voit Jésus -
Christ montrant ses plaies. D'un
côté, il y a un apôtre qui repré ¬
sente le collège apostolique et, de
l'autre, il y a saint Thomas. Ainsi
les deux apparitions qui, dans le
drame liturgique, font suite à l'his ¬
toire des pèlerins d'Emmaüs, sont
représentées ici.
J. Gazelle des Beaux-Arts, 1904, t. XXXI, le Renouvellement de l'art par les Mystères.
2. M. G. Cohen , dans un livre récent (Histoire de la mise en scène dans le théâtre religieux
français du moyen âge, 1906) , a apporté de son côté une preuve qui a de la valeur.
3. On n'a pas encore étudié ce qu'il reste de byzantin dans l'iconographie française du XIIe siècle :
c'est là pourtant un très intéressant problème.
4. Ainsi on voit, pour la première fois, Jésus-Christ ressuscitant en enjambant le bord de son
sarcophage. M. Meyer, de Spire, a très bien montré que cette formule nouvelle de la Résurrection
était due au drame liturgique (dans les Mémoires de la Société royale de Goettingen , 1903).