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Review

Author(s): Edmond Goblot


Review by: Edmond Goblot
Source: Revue Philosophique de la France et de l'Étranger, T. 96 (JUILLET A DÉCEMBRE 1923), pp
. 458-459
Published by: Presses Universitaires de France
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41083572
Accessed: 27-11-2015 21:20 UTC

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458 REVUE PHILOSOPHIQUE

IV. - Philosophie contemporaine.


José Ingenieros : Emilio Boutrouxy la filosofiauniversitariaen
Francia. - Buenos-Aires, Agencia generalde librería,1923, 1 vol.
163 p.
Il est certainque l'enseignementphilosophiquen'a pas toujours
joui dans l'Universitéde France de la libertéintellectuellequi lui
est aujourd'huireconnueet assurée. En étudiantla vie et les écrits
d'E. Boutroux,l'auteur d'El porvenirde la filosofiafait l'historique
de l'orthodoxiephilosophiquenaguèreimposée à nos enseignements
secondaireet supérieurpour des motifsd'ordre politique. Depuis
la « chute » de V. Cousinen 1863 et la finde ce que l'auteur appelle
sa « dictature», les maîtresde la doctrineofficielle,
qui furentsucces-
sivementRavaisson, Lachelier et Boutroux,n'ont laissé après eux
qu'un petit nombre de pages impriméescontenant des doctrines
inoffensives. On trouve,au contraire,des idées hardieset une pro-
duction aussi brillantequ'abondante chez des philosophesqui ont
quitté l'Université pour reprendreleur liberté, comme Taine et
Fouillée, ou ne lui ont jamais appartenu, comme Auguste Comte
et Renouvier.
M. Ingenierosdistinguetrois époques dans la vie d'E. Boutroux.
C'est d'abord l'ingénieuxet subtil dialecticien(l'auteur dit même
« ergoteur», ergotista)de la Contingence des Lois de la Nature,puis
l'excellenthistoriende la philosophiedes cours de l'Ecole normale
et de la Sorbonne,enfinle « mystiquemoral» de Scienceet Religion.
On ne peut qu'admirerles pages magistralesdans lesquellesM. Inge-
nieros condense l'argumentationdéjà si serrée de la thèse sur la
Contingence. Toute la documentationdu livre est abondante, cir-
constanciée,précise. On s'étonne qu'un étrangerpuisse parler avec
une connaissancesi parfaite,une pénétrationsi juste, des livres,des
hommeset des choses de chez nous. On lui sait gré de le faireavec
tant de sympathie,mêmedans la critique.
Ce qui lui a échappé,c'est que les troishommesen qui il voit les
représentants de la philosophieofficielle
furenten réalitéles espritsles
plus libéraux, les véritables ouvrierset les championsvictorieux
de la libertéintellectuelledont nousjouissonsaujourd'hui.Boutroux,
dans les dernièresannéesde sa vie, a été considéréà l'étrangercomme
le plus eminent des philosophesfrançais vivants. M. Ingenieros
semble déçu de trouver,après sa mort,son œuvre si maigre.Cette
déceptionest assez pénible pour ses élèves, qui ont gardé de leur
maîtreun souvenirsi affectueux,respectueuxet reconnaissant.La
véritéest qu'il fut avant tout un incomparableprofesseur.Il avait
une aptitude extraordinaireà entrerdans la pensée de ses élèves
pour la clarifier,l'animer,la féconder;jamais il ne cherchaità y

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ANALYSES. - JOSÉINGENÍENOS.
Emilio BoutVOUX... 459

substituerla sienne. L'élève n'était pas obligé d'être disciple : il


sentaitnaîtreen lui des forcesnouvelles,il ne se sentaitpas remorqué,
dominéni mêmedirigépar un autre esprit.C'est au point qu'on se
demandaitquelles étaient les opinionspersonnellesde Boutrouxet
que chacun faisait à cette question une réponse différente. Nous
n'avons reçu de lui, nous ses élèves, aucune doctrine,mais nous lui
devons beaucoup mieux qu'une doctrine. Cette même faculté de
s'insérerà volontédans les attitudesphilosophiquesles plus diverses
faisaitde lui un merveilleuxhistorien ; il s'identifiaitavec le penseur
doncil étudiaitl'œuvreet se transformait en passantde l'un à l'autre.
On comprendqu'un tel espritprotéene laisse pas après lui un sys-
tème; on ne comprendraitpas qu'il eût été le gardiend'unephilo-
sophie officielle.
Lachelier disposa absolumentseul, pendant une longue période,
de tout le personneldes professeurs de philosophiede l'enseignement
secondaire,avec un tel espritde justice,une tellesûretéde jugement,
un tel respect de toute liberté intellectuelleque personnen'éleva
jamais une plainte.Il prenaitvolontiersla défensede ceux qui étaient
inquiétésà cause des hardiessesde leur enseignement. Je le sais, car
je fus du nombre.
A partirde 1882 et pendantlongtemps,le programmede la classe
de philosophiefutaccompagnéd'une note avertissantqu'une entière
libertéétait laissée aux professeursquant aux solutionsadoptées et
à l'ordredes questionstraitées.Ayantcrureconnaître dans cettenote
la marque du libéralismede M. Lachelier,je l'en remerciai.Cette
note,me répondit-il,a été rédigéepar M. Paul Janet et inséréesur
sa demande.Elle aurait pu êtrede Lachelier.
La libertéintellectuelledans l'enseignementuniversitaire, est une
conquête de la Troisième République, conquête tardive et assez
pénible.Elle futsurtoutl'œuvre de ces philosophesqui n'en avaient
guèrebesoinpoureux-mêmes,car leursdoctrinesn'inspiraientaucune
inquiétude aux pouvoirs politiques,mais qui étaient foncièrement
libéraux: JulesSimon,ErnestBersot,Paul Janet,Ravaisson,Lache-
lier,Boutroux.
Il n'est pas surprenantque de telles choses, qui sont, même en
France,à peu près ignoréesen dehorsde l'Université,aient échappé
à un étranger.
Edmond Goblot

Louis Trial,. Pasteur de l'Église réforméede Nîmes : Jean-


Jacques Gourd(1850-1909).1 vol. in-8°de 416 pages. Nîmes,Lavagne-
Peyrotet Paris, Fischbacher,1920.

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