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Les régimes de détention des personnes condamnées pour des actes de terrorisme
Ce sujet est d’une actualité certaine et si la question n’est pas nouvelle, elle a vocation à
devenir plus importante. L’intérêt de ce sujet pris en sa globalité se situe d’abord dans le milieu
carcéral qui est le reflet amplifié de la société dans laquelle nous vivons. Tout d’abord, parce que
la prison est un lieu de cristallisation des enjeux sociaux, politiques et juridiques qui est souvent
laissée pour compte dans le débat public. Et ensuite, parce que la prison, si elle est régie par la
législation est extrêmement marquée par le poids de l’administration. Ce sujet a ainsi pour objet
de constater les écarts existants entre les prescriptions législatives concernant le régime de
détention des terroristes et la pratique des conditions de détention de ce groupe disparate.
La question des terroristes en détention est singulière dès lors que la loi intervient dans
l’organisation de leur détention en les identifiant expressément et en faisant ainsi d’eux des
détenus à part. En effet, si la loi organise certaines distinctions entre les personnes détenues, elle
le fait généralement sur la base du quantum de la peine prononcée ou à partir de critères propres à
l’individu et à son comportement en détention. Pour ce qui est des terroristes, elle les « marque »
sans prendre en compte leur individualité mais l’infraction pour laquelle ils ont été condamnés.
Plus largement, chacune des trois questions posées par ce sujet entraine plusieurs
problématiques qu’il conviendra d’appréhender en mobilisant différents outils méthodologiques.
La première question consistant à identifier en quoi le régime des terroristes tel qu’il est établi par
la loi est dérogatoire au droit commun de la détention et amène à s’interroger sur les
particularismes des infractions terroristes. En effet, dans la plupart des dispositions relatives à la
détention des personnes terroristes et à l’exécution de leur peine, le législateur exclut certaines
infractions terroristes (notamment l’apologie et le financement). A travers ces exclusions il sera
plus facile de dégager une définition légale du terrorisme (le Code pénal dans la section traitant
de ces infractions défini le groupement terroriste comme un but et y rattache plusieurs
infractions). L’idée est d’essayer de saisir, à travers les infractions dont découle un régime
particulier, ce qui est considéré comme assez grave par le législateur pour en faire découler un
régime dérogatoire.
L’idée est que cette définition légale, et en tout cas les critères déterminant la dérogation,
puissent être identifiés à travers l’identification des infractions comprises par les dispositions
prévoyant une dérogation au droit commun au stade de l’exécution de la peine.
D’un point de vue plus technique, cette question cherche à identifier quelles sont les
dérogations au droit commun de l’exécution des peines. A partir de cette identification il faudra
déterminer quels sont les droits auxquels il fait dérogation (droits civils, ou encore droit
fondamentaux) et ainsi de comprendre mieux le statut de la personne condamnée pour des actes
terroristes aux yeux de la société.
Pour ce faire il faudra s’interroger sur les dynamiques juridiques, sociales et politiques au
cœur de la distinction faite entre les terroristes et les autres personnes condamnées détenues. Mais
aussi sur la fonction du droit d’appréhension du réel à travers la catégorisation.
Le propos de cette question est d’observer comment en pratique le groupe appréhendé par la
loi comme formant la catégorie des terroristes est en réalité hétérogène et renvoie à des profils
hétéroclites qui entrainent des problématiques et des enjeux en détention extrêmement différents.
Cette question s’organise ainsi autours de l’observation, dans un premier temps, des différences
qui existent entre les régimes de détentions des personnes condamnées pour des actes de
terrorisme en fonction de l’appartenance au groupement terroriste, et ensuite de la confrontation
de ces régimes particuliers au régime dérogatoire mis en place par la législation.
Ainsi nous identifierons des dérogations aux dérogations établies par la loi comme c’est le cas
pour le rapprochement familial. Le principe étant que toute personne détenue a droit au maintien
de ses liens familiaux et à ce titre à être détenue dans un établissement proche du domicile de sa
famille. A ce principe la loi pose l’exception des personnes condamnées pour des actes de
terrorismes. Pourtant actuellement les 68 prisonniers Basques, jusqu’à présent majoritairement
détenus en Ile de France, sont transférés à Mont de Marsan.
Pour ce qui est de la méthodologie relative à cette question, il s’agira d’une recherche
documentaire à partir de matériaux de presse et particulièrement la presse Corse, Basque et
française (notamment pour ce qui est des conditions de détention de Salam Abdeslam). Ces
recherches documentaires seront accompagnées d’un travail de terrain : des entretiens avec des
ex-détenus et en fonction des possibilités pratiques des questionnaires ou entretiens avec des
personnes détenues pour des actes de terrorisme.
Enfin, pour la troisième question l’idée est, qu’à travers les confrontations faites au titre de la
deuxième question, de se demander si la pratique de la détention des personnes condamnées pour
des actes de terrorisme ne révèle pas une certaine reconnaissance du statut de prisonnier politique
que revendiquent notamment les terroristes Basques et Corses.
Pour ce faire, il faudra préalablement interroger les différentes définitions du terroriste, non
plus du point de vue juridique (cela relève de la première question) mais plus sociologue en
confrontant les différentes définitions et notamment celles données par les personnes condamnées
pour des faits terroristes elles-mêmes.
Il faudra aussi se pencher sur différentes notions telles que la détention politique et détention
de conscience et l’évolution historique de l’approche du terrorisme. Ainsi cette partie reposera
sur une recherche documentaire plus scientifique et reprendra également les ressources et
entretiens mobilisés pour la deuxième question du sujet. Pour ce qui est des problématiques plus
politiques posées par cette dernière question, je pense interroger des professionnels du droit
(principalement des magistrats et des avocats) ainsi que des députés dans la mesure du possible.