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HENRI BOULAD, S.J.

(Egypte)

Homélie prononcée en français à Munich (Allemagne)


en l’Eglise des Bénédictines Saint Boniface
le 16 Mai 2004

DOUZE PORTES OUVERTES AUX QUATRE


HORIZONS

Mes chers amis,

Saint Jean, dans l’Apocalypse, nous montre la Jérusalem céleste ouverte aux quatre
vents, aux quatre dimensions du monde, avec des portes de tous les côtés. Cette
image doit certainement nous indiquer ce que sera l’Eglise de demain et l’humanité
future. La lecture d’aujourd’hui ne nous dit pas si ces portes étaient ouvertes ou
fermées. Mais, deux versets plus loin, on dit que ces portes sont ouvertes jour et
nuit. Qu’est-ce que cela peut signifier pour nous aujourd’hui ? Cela signifie que
l’Eglise, si elle demeure close sur elle-même, exclusive du reste du monde, des
autres cultures, des autres religions, des autres confessions, n’est plus l’Eglise.
L’Eglise n’est l’Eglise que si elle est catholique, c'est-à-dire universelle.

Le mot catholique en est arrivé à désigner une Eglise parmi les Eglises. Nous
sommes catholiques, donc nous ne sommes pas orthodoxes. Nous sommes
catholiques, donc nous ne sommes pas protestants. On est catholique ! C’est-à-dire
que cela évoque l’idée d’exclusivité. Or est-ce bien cela l’Eglise que Jésus a voulue ?
Le mot catholique peut suggérer deux choses absolument contradictoires : Le
catholicisme qui est cette magnifique institution que nous connaissons, qui nous
vient du fond des siècles, bien construite avec sa hiérarchie, avec ses dogmes, avec
ses structures, avec son histoire, ce que nous avons appris de l’histoire et de la
société dans laquelle nous sommes. Le catholicisme, cette vénérable construction
qui nous vient du passé.

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Et il y a la catholicité, qui n’est pas le catholicisme. La catholicité est un mouvement
dynamique d’ouverture continuelle à un horizon universel. Il est temps de nous
demander si l’Eglise catholique s’est réduite au catholicisme, ou bien est entraînée
dans un mouvement dynamique d’ouverture continuelle à la planète entière, à
l’humanité dans sa totalité. Etant donné la connotation que le mot catholique a prise,
je serais pour changer ce mot dans le Credo. En arabe, nous disons : « Je crois en
l’Eglise, une, sainte, universelle et apostolique ». Le mot catholique n’existe pas. On
emploie le mot « Jamâ » qui signifie « œcuménique, universel, planétaire ». Je pose
la question : L’Eglise catholique est-elle catholique ? Ou bien est-elle, étroitement,
européenne, occidentale, avec tout ce que cela comporte d’exclusion ? C’est une
question que je pose.

En fait, elle l’a été jusqu’à Vatican II, jusqu’à ce Concile prophétique, béni de Dieu,
qui a ouvert cette Eglise avec ses douze portes dont il est question dans
l’Apocalypse. Dialogue avec l’islam, dialogue avec l’Asie, dialogue avec l’époque
moderne, dialogue avec l’athéisme. Ouf, enfin ! On se sent de nouveau dans une
atmosphère universelle, œcuménique. Donc l’Eglise, dans cette dynamique
d’ouverture, est en train de réaliser son essence, ce que Jésus a voulu qu’elle soit.
Et nous ne sommes encore qu’au début de ce mouvement. Vatican II je dirais n’a
pas encore commencé, nous sommes encore sur le seuil. Et quand je vois que
certains sont en train d’hésiter pour savoir s’ils vont avancer sur ce chemin ou bien
regarder vers Vatican I, je me tire les cheveux.

La chance de l’Eglise, c’est l’ouverture. L’avenir de l’Eglise, c’est l’ouverture. L’Eglise


ne doit pas regarder vers le passé. Elle doit se tourner vers l’avenir, vers cette
Jérusalem céleste aux douze portes ouvertes aux quatre horizons, qui est pour nous
le modèle vers lequel nous devons regarder.

Puisque nous sommes à la veille de la Pentecôte, je voudrais, pour terminer, montrer


que cette Pentecôte était précisément marquée du signe de l’universel. Quand vous
écouterez la lecture des Actes des Apôtres, le récit extraordinaire de cette foule
venant des quatre coins de la planète, parlant toutes les langues, vous comprendrez
que l’Eglise est née sous le signe de l’universel, et c’est dans cette perspective
qu’elle deviendra elle-même.
Amen
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