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L A S U F F I X AT I O N

DE S A N T H ROP ON Y M E S G R E C S
A NTIQU ES
À l’occasion du centenaire de l’ouvrage de Friedrich Bechtel,
Die historischen Personennamen des Griechischen
bis zur Kaiserzeit (Halle, 1917)

www.droz.org
ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES
SCIENCES HISTORIQUES ET PHILOLOGIQUES – III

HAUTES ÉTUDES DU MONDE GRÉCO-ROMAIN


55

La suffixation des anthroponymes


grecs antiques
(Saga)
Actes du colloque international de Lyon,
17-19 septembre 2015
Université Jean-Moulin–Lyon 3

Édités par Alcorac Alonso Déniz, Laurent Dubois,


Claire Le Feuvre et Sophie Minon,
avec la collaboration d’Édouard Chiricat

DROZ
Pour les Inuit, les noms ne sont pas des étiquettes.
Ils ont une âme, ils sont des âmes. Ils contiennent en eux
l’identité et l’expérience de la vie de ceux qui les ont déjà portés.
À la différence de l’âme intérieure qui anime le corps et grandit avec lui,
l’âme-nom donnée à un enfant vient l’envelopper tout entier
et fait passer en lui les identités de tous ceux qui ont porté ce nom avant lui.
M. Godelier, Au fondement des sociétés humaines.
Ce que nous apprend l’anthropologie, Paris, 2007, p. 131.

Ouvrage publié avec le concours de l’Institut universitaire de France

Illustration de couverture :
IG II 959 = IG II2 1951, l. 230-375. D’après Benjamin D. Meritt, « An Athenian naval
catalogue », AJA 31, 4, 1927, p. 462, fig. 1 (http://www.jstor.org/stable/497867).

ISBN : 978-2-600-05735-6
ISBN PDF : 978-2-600-15735-3
ISSN : 1016-7005
Copyright 2017 by Librairie Droz S.A., 11, rue Massot, Genève
All rights reserved. No part of this book may be reproduced or translated in any form, by print, pho-
toprint, microfilm, microfiche or any other means without written permission.
Sommaire

Laurent Dubois
Avant-propos .................................................................................................................... xi
Abréviations communes et remerciements ................................................... xiii 
Sophie Minon, Laurent Dubois et Claire Le Feuvre
Introduction. — Entre composition et dérivation : le jeu
de construction anthroponymique .........................................................................  1 
Vues antiques sur le nom propre (notamment la notion d’hypocoristique) . ...1
I. Suffixation vs suffixes ou « la vie des suffixes » .............................................  11
II. Le jeu de construction anthroponymique : l’assemblage ...........................  18
III. Caractéristiques saillantes de la suffixation anthroponymique ............... 25

Première partie

PRÉHISTOIRE ET HISTOIRE CONTRASTIVES


DE L’AFFIXATION ANTHROPONYMIQUE

Jose Luis García Ramón


La suffixation des anthroponymes : du mycénien aux dialectes
du premier millénaire ................................................................................................. 33 
Nicole Guilleux
Les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος : réflexions
complémentaires ........................................................................................................... 67 
Alain Blanc
Les composés du type de Σθεν-έ-λαος : affixation à la jonction
et interprétation sémantique .................................................................................. 99
Gilles van Heems
Les Grecs d’Étrurie : l’adaptation des anthroponymes grecs
à l’étrusque ...................................................................................................................  125
viii saga

Paolo Poccetti
La morphologie des anthroponymes grecs en contexte de contact :
Grande Grèce et Sicile ...........................................................................................  163
Dan Dana
Hellénisation par suffixation : noms non grecs et suffixes grecs .....  201

Deuxième partie

SUFFIXATION ET SUFFIXES : MODALITÉS ET SPÉCIFICITÉS

Éric Dieu 
Accentuation, suffixes et loi des appellatifs dans les anthroponymes
grecs antiques ..............................................................................................................  227
Jaime Curbera
Words, names and suffixes. Four notes .........................................................  267
Nathalie Rousseau
Remarques sur la suffixation des anthroponymes composés
à premier terme prépositionnel du grec ancien .......................................  279
Laurent Dubois
Des noms en -ᾶς .........................................................................................................  299
Audrey Mathys
Anthroponymes et morphologie dérivationnelle : les anthroponymes
en -λος, -ιλ(λ)ος et -υλ(λ)ος et la gémination expressive ....................  333
Florian Réveilhac 
Les anthroponymes grecs en -ιον : étude morphologique
et sémantique ...............................................................................................................  379
Alcorac Alonso Déniz 
La diffusion du suffixe -(ι)άδ- dans le système dérivationnel
des anthroponymes féminins ...............................................................................  419
Araceli Striano
Étude comparative et diachronique des suffixes des anthroponymes
grecs féminins ..............................................................................................................  447
sommaire ix

Troisième partie

MODES DE SUFFIXATION ARÉAUX ET DIALECTAUX


OU PHÉNOMÈNES DE MODE ?

Catherine Dobias-Lalou
La suffixation des anthroponymes en Cyrénaïque pré-romaine ......  469
Claire Le Feuvre
Un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- dans l’anthroponymie ......  493
Marina Veksina 
Ionic element in Coan Onomastics? ...............................................................  517
Violeta Gomis García
Interactions analogiques dans les flexions des anthroponymes
masculins en ‑ā‑ et en ‑s‑ à Thasos .................................................................  535
Richard Bouchon et Bruno Helly
Sémantique des suffixes : connotations patronymiques, le cas
de la Thessalie ............................................................................................................  559
María Luisa del Barrio Vega
Remarques sur le suffixe -ωνδας ......................................................................  579
Guy Vottéro
Suffixes caractéristiques dans l’onomastique personnelle
de Béotie .........................................................................................................................  591
Enrique Nieto Izquierdo
Étude sur la suffixation des anthroponymes en grec ancien : le cas
des hypocoristiques et des sobriquets en Argolide .................................  625
Résumés ..........................................................................................................................  649
Abstracts .........................................................................................................................  660
Bibliographie sélective ...........................................................................................  671
Préfixes, suffixes et chaînes suffixales identifiés
dans les anthroponymes ........................................................................................ 687
x saga

a) Éléments préfixaux ..................................................................................................  687


b) Suffixes en emploi dérivationnel .......................................................................  688
α. Niveau 4, 688 — β. Niveau 3, 689 — γ. Niveau 2, 689
c) Suffixes « désinentiels » simples et complexes
(tête suffixale, niveau 1) .............................................................................................  690
d) Chaînes suffixales et conglomérats désinentiels ..........................................  693

Index analytique .........................................................................................................  705


Index des anthroponymes et mots cités .........................................................  715
a) Grec ...............................................................................................................................  715
b) Autres langues ..........................................................................................................  764
Avant-propos

L
e hasard a voulu que ces actes d’un colloque consacré à la suf-
fixation dans les anthroponymes grecs paraissent pour le cente-
naire des Historische Personennamen des Griechischen bis zur
Kaiserzeit de Friedrich Bechtel : les éditeurs et les contributeurs de la
présente publication se réjouissent qu’elle offre ainsi l’occasion de célé-
brer un tel anniversaire. On sait que les HPN avaient été précédés par
le livre que Bechtel avait publié avec son maître A. Fick, en 1894, les
Griechische Personennamen, précédés aussi par le mémoire que Bechtel
avait en 1898 consacré aux Spitznamen dans les Abhandlungen de la
société royale des sciences de Göttingen, mais il est certain que la publi-
cation de 1917, par la clarté et la maturité scientifique dont elle témoigne,
est le point de départ et la référence incontournable de toutes les études
onomastiques postérieures. En outre, si le livre est si novateur, c’est
que le matériel onomastique dont disposait Bechtel à la veille de la pre-
mière Guerre s’était considérablement accru après la parution de maints
volumes des Inscriptiones Graecae et d’autres séries épigraphiques ;
c’est aussi parce qu’il s’agit du livre d’un linguiste dialectologue, au fait
des derniers apports de la grammaire comparée.
L’auteur des HPN a eu de brillants et féconds émules au cours du
xxe siècle. La seconde partie consacrée à tous les noms qui ne procèdent
pas d’une abréviation de composé a été remarquablement amplifiée et
complétée chronologiquement par Louis Robert qui, dans ses Noms indi-
gènes de 1963, s’est fondé sur sa connaissance intime des documents
épigraphiques d’Asie Mineure pour mettre en évidence la pérennité de
l’onomastique grecque à l’époque impériale, période dont les anthropo-
nymes n’avaient pas été, comme l’indique la fin du titre, pris en compte
par Bechtel. Cette somme sur l’onomastique d’Asie Mineure a expliqué
et sorti de l’oubli de nombreux sobriquets bâtis sur des termes rares du
lexique familier, de la nature ou des métiers qui, à la faveur de la recherche
onomastique, retrouvent toute leur place dans le riche vocabulaire grec.
xii saga

Peu de temps après la parution de cet ouvrage important, Olivier


Masson, le maître de plusieurs d’entre nous, a commencé ses recherches
onomastiques en partant de noms rares qui apparaissent aussi bien chez le
poète ionien Hipponax que dans les inscriptions chypriotes syllabiques.
Ses préoccupations se sont toujours situées aux confins de la dialecto-
logie et de l’histoire du vocabulaire : son goût pour les corpus régionaux,
qu’ils soient épigraphiques ou monétaires, le conduisait à s’intéresser
aux noms locaux et rares qu’il qualifiait justement d’épichoriques. En
linguiste averti, Olivier Masson aimait à isoler les noms des langues limi-
trophes du grec, comme le libyque, le thrace, l’illyrien, le carien qui ne
nous sont guère connues que par la présence d’anthroponymes dans des
inscriptions grecques.
Ces actes montreront que l’enseignement de ces trois grands ono-
matologues du xxe siècle n’est pas voué à l’oubli et que les prudentes
leçons de méthode dont ils ont émaillé leurs écrits constituent toujours, à
l’époque des lexiques électroniques, de très stimulantes références.

Laurent Dubois,
Paris, 14 février 2016
Abréviations communes

Actes Pont-à-Mousson Actes de la première rencontre internationale de


dialectologie grecque. Colloque organisé par le
C.N.R.S. Nancy - Pont-à-Mousson, 1er-3 juillet 1986,
Nancy, 1987 (Verbum 10).
Balles, NWIG 1 I. Balles, Nominale Wortbildung des Indogerma-
nischen in Grundzügen : Die Wortbildungsmuster
ausgewählter indogermanischer Einzelsprachen,
1. Latein. Altgriechisch, Hambourg, 2008.
Bechtel, AF F. Bechtel, Die Attischen Frauennamen nach ihrer
Systeme dargestellt, Göttingen, 1902.
Bechtel, EMP F. Bechtel, Die einstämmigen männlichen Personen-
namen des Griechischen, die aus Spitznamen hervor-
gegangen sind, Berlin, 1898.
Bechtel, HPN F. Bechtel, Die historischen Personennamen des
Griechischen bis zur Kaiserzeit, Halle, 1917.
Bechtel, KOS F. Bechtel, Kleine onomastische Studien. Aufsätze zur
griechischen Eigennamenforschung (réimpression
avec introduction d‘O. Masson), Königstein, 1981.
Bechtel, NS F. Bechtel, Namenstudien, Halle, 1917.
CEG Chronique d’étymologie grecque de la Revue de phi-
lologie, de littérature et d’histoire ancienne (depuis
1996. Dix premières années réunies dans la réédition
2009 du DELG.).
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Paris, 1933.
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et morphologie ; II. Syntaxe, nouvelle édition revue et
corrigée par M. Casevitz, Paris, 2013-2015.
Chantraine, Morphologie P. Chantraine, Morphologie historique du grec,
2e édition, Paris, 1961.
xiv saga

Dana, OnomThrac D. Dana, Onomasticon Thracicum. Répertoire des


noms indigènes de Thrace, Macédoine orientale,
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PB W. Pape et G. Benseler, Wörterbuch der griechischen
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abréviations xvii

PNAA R. Parker (éd.), Personal Names in Ancient Anatolia,


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Preisigke, Namenbuch F. Preisigke, Namenbuch, enthaltend alle grie-
chischen, lateinischen, ägyptischen, hebräischen,
arabischen und sonstigen semitischen und nicht semi-
tischen Menschennamen, soweit sie in griechischen
Urkunden (Papyri, Ostraka, Inschriften, Mumien-
schildern usw.) Ägyptens sich vorfinden, Heidelberg,
1922.
Risch, Wortbildung E. Risch, Wortbildung der homerischen Sprache,
Berlin - New York, 1974 (2e édition).
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Sittig, GNT E. Sittig, De Graecorum Nominibus Theophoris,
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Solin, GPNR H. Solin, Die griechischen Personennamen in Rom.
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Solin, GRSN Die stadtrömischen Sklavennamen. Ein Namenbuch,
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Actes du Ve congrès international de dialectologie
grecque (Athènes 28-30 septembre 2006), Athènes -
Paris, 2007.

Remerciements

Nos plus vifs remerciements vont à Laurent Dubois et à Nicolas Vatin, qui
ont accepté cet ouvrage dans la collection de l’École pratique, à Laurent
Garrigues, pour son habituel professionnalisme souriant, et la patience
exemplaire et la grande diligence dont il a fait preuve au long de ce lourd
travail d’édition, à tous nos collègues contributeurs, qui ont notamment
permis que les délais de publication soient respectés, et à notre collègue
Gérard Genevrois, qui a relu l’ensemble du manuscrit et a participé à
l’indexation avec l’acribie et la générosité qui lui sont coutumières.
I N T RODUC T ION

Entre composition et dérivation :


le jeu de construction anthroponymique

Sophie Minon
École pratique des hautes études,
Institut universitaire de France

Laurent Dubois
École pratique des hautes études

Claire Le Feuvre
Université Paris-Sorbonne 

Vues antiques sur le nom propre dans la langue

Ce sont les Stoïciens qui ont inventé


la catégorie grammaticale de nom propre (…).
Leur logique, à la différence de celle d’Aristote,
donne à la proposition singulière une place fondamentale ;
leur ontologie attribue à tout existant une individualité
qui le rend, en principe, discernable de tout autre.
J. Brunschwig, « Remarques sur la théorie stoïcienne du nom propre »,
Histoire. Épistémologie. Langage, VI / I, 1984, p. 1.

(Dé)nommer : nom propre et nom commun


Οὐκοῦν τοῦ λέγειν μόριον τὸ ὀνομάζειν 1 : aux fondements de toute
prédication, il s’agit d’énoncer « ce dont on parle » (τὸ περὶ οὗ 2), en
appelant par son nom (ὀνομάζειν) ce qui porte un nom (τὰ ὀνομαζόμενα),
notamment un nom propre. C’est dans cet emploi restrictif que le terme
se rencontre chez le grammairien Apollonius Dyscole, qui en donnait
1. Platon, Cratyle 387c6 : Nommer serait donc une partie de l’action de parler (trad.
L. Méridier modifiée) ?
2. Démétrios, Du style, 199.
2 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

la définition suivante : ἐνυπάρχει τοῖς μὲν ὀνομαζομένοις τὸ οὐσιῶδες


porter un nom propre implique une existence substantielle 3. Denys le
Thrace, pour sa part, distinguait, parmi les noms, nom « commun »,
ou « appellatif » (gr. προσηγορικόν 4), et nom « propre » (gr. κύριον) 5.
Il caractérisait alors ce dernier comme « signifiant la substance parti-
culière » : Κύριον μὲν οὖν ἐστι τὸ τὴν ἰδίαν οὐσίαν σημαῖνον, οἷον
Ὅμηρος, Σώκρατης. Comme l’explique Jean Lallot, l’emploi de l’ad-
jectif κύριον définit le nom d’individu comme, non un nom « propre »
(on aurait ἴδιον « particulier »), mais « proprement » un nom, c’est-à-
dire le nom par excellence, ce qui est une part essentielle de l’héritage
stoïcien, comme y insistait, de son côté, J. Brunschwig 6. Dans la défi-
nition transmise par Diogène Laërce, le Stoïcien Diogène de Babylone
caractérisait en effet le nom propre de personne comme « partie du dis-
cours mettant en évidence une qualité propre à un individu » : ὄνομα δέ
ἐστι μέρος λόγου δηλοῦν ἰδίαν ποιότητα, οἷον Διογένης, Σωκράτης 7. La
notion de qualité est ici essentielle. Nous sommes du côté du ποῖος, du
« qualifié » – à la fois, du reste, aristotélicien et stoïcien 8 – de la subs-
tance, οὐσία, selon la nomenclature des grammairiens 9.
3. J. Lallot, Apollonius Dyscole, De la construction (Syntaxe), Paris, 1997, I, § 138, 11
(113 Uhlig).
4. Voir J. Lallot, La grammaire de Denys le Thrace2, Paris, 1998, ch. 12, l. 57-60.
5. J. Lallot, « L’invention du nom propre dans la tradition grecque antique », Lalies 27,
2007, p. 239 (repris dans Études sur la grammaire alexandrine, Paris, 2012, p. 333),
constate qu’à partir de Platon et d’Aristote, ὄνομα « a cessé de désigner par excel-
lence le NP ». La distinction entre appellatif et nom propre remonte aux Stoïciens
Chrysippe et Diogène de Babylone, cf. J. Brunschwig, « Remarques sur la théorie
stoïcienne du nom propre », Histoire. Épistémologie. Langage, VI/I, 1984, p. 2. La
même bipartition se retrouve chez le grammairien Aelius Donat, au début du De
partibus orationis ars minor, 1.2.1.1 (éd. A. Schönberger, Valence, 2008) : Qualitas
nominum in quo est ? Bipertita est : aut enim unius nomen est, et proprium dicitur,
aut multorum et appellativum. Pour l’histoire des noms propres en général, voir
J.-L. Vaxelaire, Les noms propres. Une analyse lexicologique et historique, Paris,
2005, notamment p. 412-422 et 432-444.
6. J. Lallot, La grammaire de Denys le Thrace, loc. cit., et commentaire, p. 150 ; A.D.,
Pron. §  10, l.  11 (K.  G. Saur, Beiträge zur Altertumskunde 222, Munich, 2005,
p. 240) ; Hdn I 5, l. 2, p. 108 (Lentz).
7. D. L. VII 58, Vie de Zénon (éd. Marcovich, Leipzig, 1999).
8. Voir Aristote, Catégories, 1b25 (éd. Ildefonse-Lallot, 2002) et La grammaire de
Denys le Thrace (éd. J. Lallot, 1998), 38.
9. Voir J. Brunschwig, art. cit., p. 5. Comparer avec Priscien, Grammaire, livre XVII.
Syntaxe (éd. Ars grammatica, Paris, 2010), 117, l. 14, où les nomina sont présentés
introduction 3

À nos yeux de linguistes modernes, le nom propre de personne paraît


alors avoir le double statut de nom-adjectif, comme participant aussi de
la catégorie de l’adjectif : à la fois morphologiquement, en tant que sus-
ceptible de varier comme lui en genre (Ἀγάθ-η existe au même titre que
Ἄγαθ-ος), et fonctionnellement, en tant que donné comme épithète vouée
à se substantiver 10. Nous sommes en effet, pragmatiquement, face à un
attribut conféré à la naissance (voire à un autre moment déterminant 11) à
un individu, de l’essence duquel il devient dès lors l’extension concep-
tuelle (parfois matérialisée par écrit), une part de l’identité 12. Le paradoxe
est que celle-ci est initialement motivée par autrui, pour qui elle signifie
presque autant qu’elle contribue à l’identification du récipiendaire 13. Elle
constitue à ce double titre, en termes linguistiques, son appellation, ou de
façon plus exclusive à l’onomastique, sa dénomination.

comme substantiam et qualitatem uel generalem uel propriam significantia, avec la


note 45, p. 87, qui explique la qualitas comme « ce qui détermine la substance, c’est-
à-dire l’ensemble des propriétés qui la caractérisent ».
10. Voir J. Kuryłowicz, Esquisses linguistiques, I, « La position linguistique du nom
propre », Munich, 1956, p. 186 : « par l’intermédiaire de l’adjectif substantivé on
arrive à bâtir des noms propres sur des adjectifs, ainsi γλαυκός, Γλαῦκος ».
11. Cf. J. Lallot, La grammaire de Denys le Thrace, 12, 8, l. 72, s.v. φερώνυμον : Φερώ-
νυμον δέ ἐστι τὸ ἀπό τινος συμβεβηκότος τεθέν, ὡς Τισαμενός καὶ Μεγαπένθης
Le juste-nom est celui qui est institué à la suite de quelque événement, comme
Tisamenόs [« Vengeur »] et Megapénthes [ «Grand-Chagrin »], et n.  32, p.  154 :
« juste-nom » est traduit au sens étymologique de « qui porte (bien) son nom » ;
l’auteur rappelle qu’Homère parlait pour sa part d’ ’ἐπώνυμον’, cf. e.g. à propos
d’Ulysse Od. 19, 409.
12. Sur la sémantique du nom de personne, « désignateur rigide » invariant, plus chargé
de sens cependant que le nom commun et plus que lui connoté, voir J. Molino, « Le
nom propre dans la langue », Langages 66 (1982), p. 12-20.
13. Pour l’anthropologue Claude Lévi-Strauss, La pensée sauvage, ch. 6. Universali-
sation et particularisation, 1962, le nom propre sert de même à identifier, classer,
signifier : il distingue ainsi « la marque d’identification » et la « libre création de
l’individu qui nomme et qui exprime, au moyen de celui qu’il nomme, un état transi-
toire de sa propre subjectivité (…) en l’assignant à une classe ou [en] s’identifi[ant]
soi-même à travers lui (…). Et le plus souvent, on fait les deux choses à la fois » (éd.
V. Debaene et al., Bibliothèque de la Pléiade, 2008, p. 710-711). Voici d’une certaine
manière réunis les trois axes principaux de l’analyse onomastique : morphologie,
sémantique et pragmatique. Voir aussi la notion « d’âme-nom donnée à un enfant »
chez les Inuit, d’après Maurice Godelier, supra, verso de la page de titre.
4 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

« Paranomination », gr. παρωνυμία, παρονομασία,


vs « appellation », gr. προσηγορία
En français, héritier ici du latin, le mot « dénomination » est un délo-
cutif composé par hypostase : en dé-nommant, on crée un nom propre, à
référent individuel, à partir d’un nom (commun). Le linguiste Kuryłowicz
faisait ainsi de l’appellatif la forme-base, le nom propre représentant la
forme fondée 14, nonobstant l’ontologie stoïcienne qui fait, chez Denys le
Thrace, accorder un primat d’ordre sémiologique au nom propre.
En grec, la nomination se dit ὀνομασία, tandis que la dé-nomination
se dit παρ-ονομασία ou παρ-ωνυμία : le préfixe παρ- n’indiquant pas au
sens premier que l’on dérive, ni même que l’on détourne 15, mais bien
plutôt que l’on crée un « à côté », un « presque », un « parallèle » ou
alias, dans un rapport moins proche avec le nom, cependant, qu’avec
ἐπί « à, attenant », qui fait de ἐπ-ώνυμος un « surnom » mais plus
précis qu’avec le πρός simplement additionnel qui exprime l’adjonc-
tion de -ιππος pour former le nom Φειδ-ιππ-ίδης du fils de Strepsiade
dans les Nuées d’Aristophane 16. Chez Denys le Thrace encore : παρώ-
νυμον δέ ἐστι τὸ παρ’ ὄνομα ποιηθέν, οἷον Θέων. Jean Lallot parle de
« dénominal » ou « dérivé fait sur un nom » 17. Peut-être gagnerait-on à
rendre παρώνυμον par « nom parallèle » ou « paranom », et à parler de
« paranomination ».
La définition était plus précise chez Aristote : παρώνυμα δὲ λέγεται
ὅσα ἀπό τινος διαφέροντα τῇ πτώσει τὴν κατὰ τοὔνομα προσηγορίαν
ἔχει, οἷον ἀπὸ τῆς γραμματικῆς ὁ γραμματικός καὶ ἀπὸ τῆς ἀνδρείας ὁ
ἀνδρεῖος On dit paronymes les items qui tirent d’un [autre], par diffé-
renciation flexionnelle, une appellation en rapport avec son nom, par

14. J. Kuryłowicz, op. cit., p. 185.


15. J. Lallot, op. cit., p.  132, parle de « détournement », de « déformation créative ».
Voir aussi V. Bécares Botas, Diccionario de terminologia gramatical griega, Sala-
manque, 1985, s.v. παρονομάζω, p. 305. Cette acception de παρα- s’est développée
à partir d’un exemple comme celui de παρ-άγωγον, dont Denys le Thrace, 12, fait
un dérivé nominal lexical : παράγωγον δὲ τὸ ἀφ’ ἑτέρου τὴν γένεσιν ἐσχηκός, οἷον
Γαιήιος (sur γῆ) le dérivé est celui qui tient son origine d’un autre, comme Gaiḗios
[« né de la Terre », Od. 7.324]. Chez Priscien, op. cit., 182, l. 8 et 11, la formation
par suffixation est dite deriuatio, et son produit, deriuata.
16. Cf. infra, note 45.
17. Denys le Thrace, 12, 6, l. 43. 
introduction 5

exemple, à partir de grammaire, grammairien et, à partir de courage,


courageux 18 ; elle dépasse en effet la paraphrase qui, au moyen de κατά
cette fois, établit le simple rapport entre noms, en évoquant le procédé
morphologique de dérivation (ἀπό τινος) qui remédie à la polysémie d’un
même radical (τοὔνομα), en (re)distribuant les signifiés entre autant de
signifiants flexionnellement différenciés (παρώνυμα… ὅσα). Se retrouve
chez Hérodien (τὸ θοῦρις παρὰ τὸ θοῦρος γίνεται) 19, la notion de formes
« parallèles » : c’est à nouveau de noms communs qu’il s’agit, comme si
la dérivation était, chez l’un et chez l’autre, conçue de préférence dans
ce cadre.
Peuvent cependant être dits de la même manière « paronymes »
aussi bien des lexèmes qu’un anthroponyme et un lexème ou plusieurs
anthroponymes parallèles, tels qu’ils ne se distinguent formellement et
sémantiquement que par leurs suffixes. Le concept est synchronique et
bivalent, pour le signifié comme pour le signifiant, alors que le paro-
nyme ne se définit plus aujourd’hui que formellement, comme une proxi-
mité graphique et phonétique relative, qui trouve son achèvement dans
l’homonymie 20. C’est cette constellation qu’ils forment, aujourd’hui dite
Sippe ou famille lexicale 21, et on parlera de même de « famille anthro-
ponymique », que l’on trouve réunie sous une même entrée dans les
Historischen Personennamen de F.  Bechtel comme dans le Diction-
naire étymologique de la langue grecque de P.  Chantraine ; un grand
nombre des entrées de ce dernier ouvrage rassemblent d’ailleurs les deux
familles : mots et noms. Onomastique et lexique étaient déjà présentés
par les anciens comme constituant un même ensemble d’ ὀνόματα.

18. Aristote, Catégories, 1a13-15, p. 59-60 (trad. J. Lallot), et cf. Topiques, § 109. 
19. Hérodien, Περὶ παρωνύμων « Des dérivés nominaux ou paranoms » (Lentz 2, 2,
p. 852, transmis par l’E.M. 476, 46). 
20. Sur la notion d’homonymie confrontée à celles de synonymie et de paronymie
chez les anciens, en commençant par Aristote, Catégories, 1a1, voir dans l’édition
Ildefonse-Lallot la partie consacrée aux composés grecs en -ônumos (notamment
p. 248-251) et F. Desbordes, « Homonymie et synonymie d’après les textes théo-
riques latins », dans I. Rosier (éd.), L’ambiguïté. Cinq études historiques, Lille,
1988, p. 51-102 (repris dans Idées grecques et romaines sur le langage, G. Clerico,
B. Colombat et J. Soubiran [éd.] Paris, 2007, p. 307-357), notamment le début de
l’article.
21. Nous devons la métaphore de la « constellation lexicale » à G. Serbat, « La déri-
vation nominale », Linguistique latine et linguistique générale, Louvain-la-Neuve,
1988, p. 68.
6 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

La notion de dérivation « hypocoristique » (L. Dubois)


Il va souvent, dans cet ouvrage, être question d’« hypocoristique ».
Le terme qui n’est que la transcription du mot grec ὑποκοριστικόν mérite
une brève analyse qui mettra en évidence les difficultés de sa traduction.
Nous commencerons par prendre en compte l’avis des Anciens.
a) Denys le Thrace : une analyse morpho-sémantique
des hypocoristiques
Denys le Thrace classe l’hypocoristique parmi les sept types de
dérivés 22: Εἴδη δὲ παραγώγων  ἐστὶν  ἐπτά  ·  πατρωνυμικόν, κτητικόν,
συγκριτικόν, ὑπερθετικόν, ὑποκοριστικόν, παρώνυμον, ῥηματικόν « Il
y a sept types de dérivés : le patronymique, le possessif, le compa-
ratif, le superlatif, le diminutif, le dénominal, le verbal ». Plus loin il
définit l’hypocoristique : ὑποκοριστικὸν δέ ἐστι τὸ μείωσιν τοῦ πρωτο-
τύπου ἀσυγκρίτως δηλοῦν οἷον ἀνθρωπίσκος, λίθαξ, μειρακύλλιον « le
diminutif est le dérivé qui indique une réduction du primaire sans com-
paraison, par exemple anthropiskos [hommelet], lithax [petite pierre],
meirakullion [petit jeune-homme] » 23. L’idée de μείωσις τοῦ πρωτο-
τύπου se retrouve naturellement dans les scholies à Denys le Thrace :
Gr. Gr. III p. 226 ὁ ὑποκορισμὸς (variante très rare de ὑποκοριστικόν)
ὄνομά ἐστι μικρότητος ἐμφατικόν « l’hypocorisme est un nom qui met
en évidence la petitesse » ; et p. 227 τὸ ὑποκοριστικὸν ἐλάττωσίν τινα
σημαίνει « l’hypocoristique désigne une minoration ». Or Denys ne fait
là que reprendre un passage de la Rhétorique d’Aristote, 1405 b, 28-29,
dans lequel est défini l’acte d’utiliser un hupokoristikon : ἔστιν δὲ ὁ ὑπο-
κορισμὸς ὃ ἔλαττον ποιεῖ καὶ τὸ κακὸν καὶ τὸ ἀγαθόν, ὥσπερ Ἀριστο-
φάνης σκώπτει ἐν τοῖς Βαβυλωνίοις ἀντὶ τοῦ χρυσίου χρυσιδάριον, ἀντὶ
τοῦ ἱματίου ἱματιδάριον, ἀντὶ δὲ λοιδορίας λοιδορημάτιον καὶ ἀντὶ νοσή-
ματος νοσημάτιον. L’expression de la minoration du « primaire » se fait
donc par l’adjonction d’un suffixe à valeur diminutive, -αξ, -ύλλιον,
-ίσκος, (-ιδ-)άριον ou (-μάτ)-ιον pour obtenir un diminutif plus long et
plus ample phonétiquement que le « primaire ». Il en va de même pour
certains noms dans lesquels nous constatons le même usage d’un suffixe

22. Voir J. Lallot, La grammaire de Denys le Thrace, 2e éd. 1998, p. 50 et p. 52 (T 12).


23. Traduction de J. Lallot que nous remercions pour ses conseils d’éminent spécialiste
des grammairiens anciens.
introduction 7

à valeur familière ou mignarde : ainsi chez Plutarque, Contre Côlôtès


1107, Κωλώτης ὃν Ἐπίκουρος εἰώθει Κωλωταρᾶν ὑποκορίζεσθαι καὶ
Κωλωτάριον « Côlôtès qu’Épicure avait l’habitude d’appeler par les
petits noms de Côlôtaras et de Côlôtarion ».
Dans la grammaire de Denys le Thrace 24, on trouve un passage essen-
tiel pour la création de ces noms : τῶν ὑποκοριστικῶν τύποι εἰσὶν…. ἕξ·
-ων, -ίων, -αξ, -ᾶς, -σκος et -λος 25. Il s’agit là des suffixes fondamen-
taux qui peuvent pour certains présenter des variantes élargies, comme
-λ-ίων, -λ-ίς, -ακ-ίων. Mais il ne s’agit que d’un échantillon restreint qui
peut être amplement complété par les nombreux noms suffixés attestés
dans les inscriptions, comme l’indique la liste présentée infra, pour les
36 dérivés formés à partir du radical Ἀγαθ- ou celle, plus longue encore,
des dérivés formés sur Φιλ-, p. 455.
Cependant chez Denys le Thrace l’emploi du terme ὑποκοριστικόν,
dérivé de ὑποκορίζομαι que l’on pourrait traduire le plus génériquement
par « appeler d’un petit nom, d’un nom doux » 26, concerne également
des formes familières généralement raccourcies comme ῾Υψώ pour Ὑψι-
πύλη, Δηώ pour Δημήτηρ parmi les héronymes et les théonymes mais
aussi comme Λυσίας pour Λύσιππος parmi les anthroponymes courants.
Un « petit nom » peut donc être soit plus long soit plus court que le « pro-
totype » ou « primaire » selon qu’il procède d’un abrègement ou d’une
suffixation spécifique à valeur diminutive 27. Ce phénomène se retrouve
dans beaucoup de langues : on trouve en français aussi bien Jeanbat pour
Jean-Baptiste que Jeannot pour Jean.

24. Commentaria in Dionysii Thracis Artem Grammaticam, publié par A. Hilgard,


Gr. Gr. III, 1901, p. 227 pour les scholia vaticana et p. 375-376 pour sa variante
marciana.
25. Cette indication se retrouve quasiment à l’identique dans le Περὶ παρωνύμων d’Hé-
rodien, Lentz II / 2, p. 859.
26. Je me calque en partie sur la traduction de J. Lallot, op. cit., p. 135, n. 14 au § 12 :
« appeler par un petit nom ».
27. Dans le domaine du lexique un primaire peut également être remplacé par un autre
mot qui est aussi qualifié d’hypocoristique : cf. l’Etymologicum Magnum 84, 24, qui
glose ἀμμά· ἡ τροφός, ἡ μήτηρ κατὰ ὑποκόρισμα.
8 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

b) Hérodien : une analyse purement sémantique


À l’époque impériale Hérodien donnait une définition sémantique
plus élaborée du terme ὑποκοριστικόν. Dans le Περὶ παρωνύμων, Lentz
II / 2, p. 858-859 28, la raison du recours à l’hypocoristique est triple :
Νενόηται τὸ ὑποκοριστικὸν ἢ διὰ παιδιὰν ἢ διὰ κολακείαν ἢ διὰ τὸ
πρέπον ὡς παρ’ Ἀλκμᾶνι εὕρομεν τὰς παρθένους ὑποκοριστικοῖς χρω-
μένας· πρέπον γὰρ τοῦτο παρθένοις. Εἴρηται δὲ ὑποκοριστικὸν παρὰ τοὺς
κόρους ἤγουν τοὺς μικρούς νεοὺς ἤ τὰς κόρας· τούτους γὰρ ὑποθωπεύο-
ντες τοιούτοις κεχρήμεθα ὀνόμασι ὡς παρὰ Μενάνδρῳ (652, CPG K.-A)
νηττάριον 29 ἢ ὅταν τὸν Πρίαμον Πριαμύλλιον εἴπωμεν καὶ τὸ μικρὸν
παιδίον παιδάριον
« La désignation par un petit nom, un nom doux, procède soit d’un souci
d’amusement enfantin, soit d’un souci de flatterie soit d’un souci d’adé-
quation (entre la langue du locuteur et son objet), tout comme chez
Alcman nous trouvons les jeunes filles qui utilisent de petits noms : ceci
en effet s’adapte bien à des jeunes filles. Le terme hupokoristikon vient de
koroi c’est à dire “les petits jeunes” ou de korai. C’est en effet pour être
gentils avec eux, que nous nous trouvons utiliser de tels mots, de la même
façon que chez Ménandre ‹on a› “petit canard”, ou quand nous appelons
Priam “Priamounet” ou un petit garçon “garçonnet” » 30.
Le passage est intéressant à plusieurs titres. D’abord, en dévelop-
pant la notion de παιδιά qui est liée à celle de πρέπον « ce qui est en
adéquation », il nous fournit l’étymologie du verbe ὑποκορίζομαι qu’il
met en rapport avec κόρος (et κόρη) 31 au sens d’« enfant » attesté depuis
Homère (Il. 6, 59). C’est de ce mot qu’a été tiré dès Aristophane le simple
κορίζομαι attesté dans les Nuées, v. 68, au sens de « tenir à un enfant des
propos câlins ». C’est dans le même contexte que le préfixé ὑποκορί-
28. No 41, p. 336 de E. Dickey, « A catalogue of works attributed to the grammarian
Herodian », Class. Phil. 109 (2014), p. 325-345.
29. En fait le passage le plus ancien et le plus intéressant remonte à Aristophane, voir
infra.
30. Cf. les scholies à la grammaire de Denys le Thrace, éd. A. Hilgard, Gr. Gr. I, 3. 1901
Commentaria in Dionysii Thracis Artem Grammaticam, Scholia Vaticana, p. 227 ;
scholia Marciana, p. 375 (avec la légère variante : ὡς ἂν εἴπωμεν περὶ θηλειῶν παρὰ
Μενάνδρῳ νηττάριον, ἀπφάριον) et Scholia Londiniensia, p. 539.
31. Les Anciens, qui raisonnaient en synchronie, exprimaient une étymologie en rap-
prochant du mot à expliquer le lexème le plus proche et cette « proximité » était
exprimée par le syntagme εἴρηται παρά suivie de l’accusatif : ainsi dans les scholies
à la grammaire de Denys le Thrace, on lit, p. 192, στοιχεῖα εἴρηται παρὰ τὸ ἔχειν
στοῖχόν τινα ; p. 229, σχῆμα εἴρηται παρὰ τὴν σχέσιν ; p. 282, θετικὰ παρὰ τὸ θεῖναι.
introduction 9

ζεσθαι apparaît au ive siècle chez Théophraste, Ἀηδία 20, §  5, avec le


sens de « parler en s’adressant à un bébé avec des petits mots cajolants »
comme le fait le fâcheux qui s’empresse auprès du bébé de la maison en
lui débitant force mamours et en le couvrant de bisous (ὑποκορίζεσθαι
ποππύζων). Le préfixe ὑπο- peut ici se justifier comme la marque de la
μείωσις τοῦ πρωτοτύπου mentionnée ci-dessus et qui est si banale dans
le vocabulaire de la mignardise, de la cajolerie bêtifiante ou simplement
affectueuse aussi bien à l’égard de petits enfants, de parents (cf. « mon
petit Papa, Papounet ») que d’amis : les compagnes de la mariée chez
Pindare, Pyth. 3, 19, aiment à chanter en son honneur, au soir de la fête,
des chants nuptiaux remplis d’affection : ὑμεναίων ἅλικες οἵα παρθένοι
φιλέοισιν ἑταῖραι ἑσπερίαις ὑποκουρίζεσθ’ ἀοιδαῖς.
Mais Hérodien a très bien pu prendre aussi le terme παιδιά au sens de
« plaisanterie » qui est issu du sens premier de « jeu d’enfants » : il avait
peut-être à l’esprit les passages d’Aristophane dans lesquels le Dèmos
est raillé par les surnoms dépréciatifs de Δημίδιον (Cav. 724, 1199) et de
Δημακίδιον (Cav. 823), ou ceux dans lesquels Socrate est appelé Σωκρα-
τίδιον (Nuées 746), Euripide Εὐριπίδιον (Ach. 475).
C’est bien évidemment à ces deux acceptions possibles qu’est lié le
terme ὑποκοριστικόν dans le domaine de l’anthroponymie. Comme dans
les langues modernes, l’intonation devait permettre de déterminer la
valeur contextuelle attachée à l’emploi de tels suffixes.
Le second intérêt de ce passage d’Hérodien est l’allusion à la κολα-
κεία « la flatterie » : cette seconde justification de l’hupokoristikon est
vraisemblablement, à partir du ive siècle, une spécialisation perverse de
la première et ce sont des exemples empruntés à la vie politique athé-
nienne ou aux philosophes, ainsi qu’à la Comédie, qu’Hérodien avait en
tête pour mentionner la κολακεία. Pour ce qui est de la sphère privée,
l’exemple le meilleur figure, non tant dans le fragment décharné de
Ménandre, que dans ce passage d’Aristophane, Ploutos 1010-1011, dans
lequel la vieille évoque les propos de son gigolo cupide : Καὶ, νὴ Δί’, εἰ
λυπουμένην γ’ αἴσθοιτό με, / νηττάριον ὑπεκορίζετ’ ἂν καὶ φάττιον « Et
par Zeus, s’il me voyait chagrinée, il me cajolait en m’appelant son petit
canard, sa petite colombe » 32. Dans la sphère politique, le verbe figure
32. Selon la scholie ancienne à ce passage, c’est Didyme qui aurait qualifié le passage
d’ ὑποκορίσματα πρὸς γυναῖκας : voir M. Chantry, Scholia in Aristophanem III 4, 3,
p. 162-163.
10 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

chez Démosthène, Sur l’ambassade 259, avec le sens de « employer


des termes flatteurs et faux pour faire plaisir à quelqu’un » ou « pour le
dauber » : ainsi les notables des cités grecques qui veulent faire plaisir
à Philippe ou ne point avoir affaire à sa vindicte attirent-ils sur eux une
servitude volontaire Φιλίππῳ ξενίαν καὶ ἑταιρίαν καὶ φιλίαν καὶ τοιαῦθ’
ὑποκοριζόμενοι « en utilisant à l’égard de Philippe les mots doux d’hos-
pitalité, de camaraderie, d’amitié et d’autres mots de ce genre ». Ceci
se retrouve exactement chez Platon, Rep. 400e : (la simplicité) οὐχ ἣν
ἄνοιαν οὖσαν ὑποκοριζόμενοι καλοῦμεν ὡς εὐήθειαν « non pas celle
que, pour se montrer flatteurs, nous appelons comme étant la simplicité
alors qu’elle est sottise » ; Rép. 474e : l’expression au « teint de miel »
(μελιχλώρους) appliquée à un enfant ne peut être que l’invention d’un
amant flatteur (ἐραστοῦ ὑποκοριζομένου) ; Rép. 560e : les fausses opi-
nions ont une terrible influence sur le jeune homme pur, ὑποκοριζόμενοι,
ὕβριν μὲν εὐπαιδευσίαν καλοῦντες « en employant des termes fallacieux,
en appelant belles manières l’insolence » 33. On constate donc une exten-
sion du concept d’hypocoristique qui consiste, dans un discours destiné
à dauber ou à circonvenir quelqu’un, en la substitution complète à un
terme péjoratif et dévalorisant d’un terme flatteur, que ce soit un abstrait
de sens opposé, ou un diminutif suffixé du lexique qui imite le langage
propre au vocabulaire des mamours faits aux bébés.
Le spectre d’emplois du verbe ὑποκορίζομαι tel que nous le montrent
les Anciens est donc très large, et ce d’autant qu’il touche aussi bien la
morphologie que la sémantique. Le verbe ou son dérivé en -ικόν réfère
à la fois à des formes abrégées de noms composés et à des formes déri-
vées de termes du lexique : j’en veux pour preuve le nom d’une dame de
Béotie du iiie siècle, Φάττιον « Petite colombe », qui n’est autre que le
terme du lexique employé par Aristophane.
Le distinguo génétique judicieux que fait Bechtel entre les deux par-
ties des HPN ne reflète donc en rien le schéma des Anciens qui, en ayant
recours à un seul terme, ὑποκοριστικόν, imputaient à la seule affecti-
vité la minoration formelle des composés de la première partie en noms
courts et la création de dérivés suffixés à valeur diminutive de certains
noms de la seconde partie (type Μοσχάριον). À la suite de Bechtel, on
33. Plutarque fera un grand usage du verbe ὑποκορίζομαι dans ce sens : voir aussi Solon
15, 2 ; Aratos 38, 7 ; de virtuti morali 449A ; de recta ratione audiendi 45 ; quomodo
adulator ab amico internoscatur 56 E et F.
introduction 11

préfèrera distinguer la catégorie des noms courts résultant de l’abrévia-


tion d’un composé, ceux de la première partie des HPN, et celle des noms
qui sont, grâce à la créativité infinie et très libre qu’avaient les Grecs en
matière de recours à la métonymie, soit des termes du lexique au sens
large (y compris les théonymes, les ethniques, les potamonymes, les héro-
nymes) directement utilisés comme anthroponymes (type Ἀστήρ, Δόναξ,
Χοῖρος), soit des dérivés de ces derniers (type Δρύων, Ἀμπελίων) : au
sein de cette seconde catégorie, on pourrait appeler les premiers « pri-
maires » et les seconds « dérivés de primaires », qu’ils soient bâtis avec
un suffixe à valeur diminutive, à valeur railleuse ou même avec un suffixe
de valeur assez neutre comme -ων dans les quasi-ethniques. On devra
donc se méfier d’un usage inconsidéré du terme hypocoristique et être
plus précis dans la caractérisation des noms à classer dans les übrigen
Namen de la seconde partie des HPN.

I. Suffixation vs suffixes ou « la vie des suffixes »

Pour qu’un suffixe soit vivant, capable de créer des mots nouveaux,
il faut et il suffit qu’il présente, ainsi que son radical, une idée nette à l’esprit.
A. Darmesteter, Cours de Grammaire historique de la langue française,
éd. L. Sudre, révis. P. Laurent, Paris, 1934, 61.

Ces actes sont ainsi centrés sur la « par-onomastique », c’est-à-dire


sur la créativité anthroponymique telle qu’elle s’affiche dans l’usage de
l’affixation, notamment de la suffixation, puisque presque tous les noms,
qu’ils soient simples ou composés, sont au moins pourvus du suffixe qui
sert à les fléchir ; Nathalie Rousseau signale l’exception que représente
le cas des composés à second élément -ήνωρ, du type myc. a-ta-no, alph.
Ἀντ-ήνωρ, dont c’est le radical même qui est fléchi 34, et le sobriquet
Βοῦς appelle, de son côté, le même commentaire. À l’inverse, à partir du
radical très répandu dans l’onomastique personnelle de l’adjectif ἀγαθός,
on ne dénombre pas moins de 36 dérivés aujourd’hui attestés :

34. Pour les composés du type de l’hypostase Ἀντ-ήνωρ, sur lequel a été fait l’adjectif
déanthroponymique ἀντήνωρ, attesté chez Esch., Ag. 442, pour désigner la cendre
« en guise d’homme », voir le livre de Nathalie Rousseau, Du syntagme au lexique :
les composés par dérivation en grec ancien, Paris, 2016, et sa contribution ici même.
12 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

Ἀγαθ-α / η, -αῖος, -άρι(ο)ν, -ᾶς, -έᾱς, -ε(ι)ᾰ, -ῆς, -ίᾱ / η, -ιάδᾱς, -ιανός,
-ίᾱς, -ίδᾱς, -ικός, -ίνᾱ, -ῖνος, -ι(ο)ν, -ιος, -ις, -ίς, -ίων, -ον, -ος, -ούᾱς,
-ουν, -οῦς, -υλλα, -υλλος, -ώ(ι), -ων, -ων-ιανός, -ων-ίδᾱ / ης, -ων-ίς,
-ών-ιχος.

L’innommé, morphème lié et intraduisible


Ni le mot affixe, ni le mot suffixe ne paraissent explicités chez les
grammairiens antiques 35 : si, en français, le premier terme est emprunté
au latin de la Renaissance, il n’est employé grammaticalement qu’à partir
du xixe siècle, où le second est à son tour analogiquement constitué 36.
Chez Hérodien, dans l’ouvrage dédié aux παρώνυμα, se rencontre tou-
jours l’article au neutre pluriel τὰ + εἰς + suffixe (+ λήγοντα), pour ren-
voyer aux listes de noms en série dans lesquels ces entités sont identifiées
et isolées en tant que « terminaisons », dans le cadre d’une description
strictement synchronique 37. L’édition d’Hérodien présente indistincte-
ment suffixes simples comme -ος et chaînes suffixales, comme -εῖος ou
-ίδης, en isolant toujours des entités flexionnelles.
Nous avons donc affaire à des entités grammaticalisées et non à des
segments abstraits envisagés indépendamment de leur usage dans la
langue, comme ces morphèmes, ou « mots vides » selon la terminologie
chinoise, à propos desquels Joseph Vendryes écrivait : « il est impossible
dans un dictionnaire de traduire ces mots ; ils n’ont aucun sens concret,
ce sont des coefficients, des exposants, des valeurs algébriques plutôt que
des mots. Aussi bien n’existent-ils pas isolément ; ils ne prennent leur
sens que lorsqu’ils sont en contact d’un autre élément linguistique, avec
lequel il constituent un ensemble, senti comme unité par l’esprit. Comme
ἄν, qui tout seul ne signifie rien (…). Ce qui caractérise en général le mot

35. C. Kircher, « Le paramètre sémantique dans l’analyse des dérivés chez Priscien »,
dans M. Baratin, C. Moussy (éd.), Conceptions latines du sens et de la signification,
Paris, 1999, p. 158, signale que Priscien ne possède ni le concept ni le terme « pour
désigner cet élément fondamental de la dérivation », même s’il réfléchit à la fonction
sémantique du suffixe dans les pages consacrées aux dérivés du livre II des Institu-
tiones Grammaticales.
36. Voir A. Rey, Le Robert. Dictionnaire historique de la langue française, Paris, 1992,
s.v. Affixe et Suffixe.
37. Cf. e.g. Hérodien, II, 2, 851, l. 34 (Lentz) : τὰ εἰς ης κύρια.
introduction 13

indo-européen comme le mot sémitique, c’est son unité : morphèmes et


sémantèmes y sont liés d’une façon indissoluble » 38.
G. Serbat renchérit sur la question de la « vacuité sémantique du suf-
fixe », en concluant que le sème « relation », sous-jacent à tous les types
de suffixation, « n’a pas d’autre signifiant que le mot, en tant que forme
de synthèse contraignante » 39, même s’il reconnaît l’existence parfois
de relations de type hiérarchique entre suffixe et radical, lorsqu’il pose
qu’un suffixe comme -tor, « est bien la tête du mot construit », à l’in-
verse de -cula dans auricula, « où la tête est bien “oreille” » 40. Il est du
reste reconnu que certains suffixes du moins sont porteurs de valeurs
sémantiques, qu’ils procèdent de la grammaticalisation d’éléments radi-
caux, comme, dans le lexique, -ώδης (de ὄζω) dénote à l’origine la per-
ception olfactive, ou qu’une valeur sémantique leur ait été affectée par
l’usage, comme dans l’onomastique, où -ίδας se voit longtemps asso-
cier sa valeur ancienne de suffixe patronymique 41. Il serait par consé-
quent hâtif de considérer les suffixes en synchronie comme généralement
immotivés 42 ; nous aurons l’occasion d’y revenir, à propos de -υβ-.

Suffixation : dynamique et logique de la prolifération


onomastique
Mais le sujet qui nous réunit est moins le suffixe, en tant que figé,
pétrifié et enfermé dans le volume d’Hérodien, que l’usage qui en est
fait. C’est la démarche de Chantraine que nous revendiquons, qui donne
à voir la dynamique linguistique à l’œuvre dans la Formation des noms
et ne se contente pas de dresser un bilan sous la forme d’un dictionnaire
38. J. Vendryes, Le langage. Introduction linguistique à l’histoire, Paris, 1923, p. 103. 
39. G. Serbat, « Quel est le signifiant du concept de “relation” dans les dérivés », dans
M. Lavency, D. Longrée (éd.), Actes du Ve colloque de linguistique latine, Louvain-
la-Neuve, 1989, p. 406.
40. Id., « La dérivation nominale », Linguistique latine et linguistique générale,
Louvain-la-Neuve, 1988, p. 63-72.
41. Sur l’origine de -ίδας, forme élargie et masculinisée du suffixe -ιδ- dénotant apparte-
nance et dépendance et spécialisé au féminin, voir A. Leukart, Die frühgriechischen
Nomina auf -tās und -ās. Untersuchungen zu ihrer Herkunft und Ausbreitung (unter
Vergleich mit den Nomina auf -eús), Vienne, 1994, p. 254-256, § 165a-b.
42. Pierre Chantraine écrivait plus justement dans l’Avant-propos de sa Formation
(1933) : « Le système de la dérivation nominale n’est pas rigoureusement (nos ita-
liques) motivé ».
14 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

des suffixes nominaux, comme ont pu le faire Wilhelm Pape et Gustav


Benseler, dans leur Wörterbuch der griechischen Eigennamen de 1884 43.
L’anthroponyme, nom de l’individu, tend à cristalliser un tel intérêt 44,
en tant que double enjeu (on dirait aujourd’hui « narcissique »), à la fois
pour l’auteur et pour le récipiendaire, qui s’y projettent chacun à son tour
et à sa manière, et se trouve ainsi chargé d’un contenu sémantique, per-
formatif et fantasmatique – nomen omen 45 –, à ce point multiple, tout en
étant unifié 46, que l’on conçoit la répugnance, dans l’onomastique plus
encore que dans le lexique, à l’homonymie et l’importance de ce fait
de la désambiguïsation du nom propre (en témoignent nos 36 dérivés),
nécessaire à l’individualisation 47.

43. W. Pape et G. Benseler, Wörterbuch der griechischen Eigennamen, Grasse, 1884,


p. xvii-xxii.
44. Voir R. Barthes, « Proust et les noms », dans To Honor Roman Jakobson, 1967,
p. 152-154 : « Le Nom propre est en quelque sorte la forme linguistique de la rémi-
niscence (…). Comme signe, le Nom propre s’offre à une exploration, à un déchif-
frement : il est à la fois un “milieu” (au sens biologique du terme), dans lequel il faut
se plonger, baignant indéfiniment dans toutes les rêveries qu’il porte, et un objet pré-
cieux, comprimé, embaumé, qu’il faut ouvrir comme une fleur (…). Le Nom est en
effet catalysable ; on peut le remplir, le dilater, combler les interstices de son arma-
ture sémique d’une infinité de rajouts ».
45. Cf. Plaute, Persa, 625. La querelle des parents autour du nom à donner à leur fils
nouveau-né que rapporte le père Strepsiade des Nuées (60-80) rend compte du fan-
tasme aristocratique de la mère en ces termes, qui offrent le double intérêt de montrer
la désémantisation de l’élément -ιππος, dont il ressort du contexte que la connotation
l’emporte sur la dénotation, et de présenter, chez notre homme de théâtre, la forma-
tion du nom simplement énoncée en termes d’addition, comme si -ιππος faisait fonc-
tion de suffixe (cf. L. Dubois, dans GPN, p. 42) : ἡ μὲν γὰρ ἵππον προσετίθει πρὸς
τοὔνομα Elle ajoutait à son nom « hippos ».
46. Sur le caractère multiple mais unifié de la charge sémantique du nom propre, voir la
définition proposée par M.-N. Gary-Prieur, Grammaire du nom propre, Paris, 1994,
p. 51 et 52 : « Le contenu d’un nom propre est un ensemble de propriétés attribuées
au référent initial de ce nom propre (son présupposé, p.  30) dans un univers de
croyance (notion qui fait intervenir la subjectivité du locuteur) ».
47. Pour J.-C. Pariente, Le langage et l’individuel, Paris, 1973, ch. 3, p. 59-84, le nom
propre peut être conçu comme un « opérateur d’individualisation », voir aussi, du
même auteur, « Le nom propre et la prédication dans les langues naturelles », Lan-
gages 16 (1982), p. 39. Précisons que la majuscule ne sert pas de marque d’indivi-
duation dans l’écriture grecque, puisque, comme le rappelle J. Lallot (« L’invention
du nom propre dans la tradition grecque ancienne », Lalies 27 (2007), p. 233, repris
dans Études sur la grammaire alexandrine, p. 327), l’opposition majuscule-minus-
cule ne remonte pas plus haut que le ixe siècle de notre ère.
introduction 15

Cela explique l’usage ancien qui consistait à transmettre le nom du


grand-père à l’aîné des petits-fils, avec l’écart prophylactique d’une
génération, avant le ive siècle où la transmission s’observe parfois aussi
du père au fils. Les deux pratiques se concurrençaient encore majori-
tairement dans les milieux bourgeois des pays d’Europe et d’ailleurs,
jusqu’au milieu du xxe siècle 48.
Par exemple, comme le rappelle Heikki Solin, Périclès était le fils et
le père de deux Ξάνθιππος, et Miltiade, de deux Κίμων ; en revanche,
Démosthène et son père étaient homonymes 49.
♦ D’où l’usage d’une suffixation différentielle, lorsqu’étaient formés
sur la même base les noms de plusieurs membres d’une même famille ou
d’une même fratrie :
par exemple, Εὀκτι-μενὸς Εὀκτί-τō (LGPN  5a, Milet  I, 122, l.  25,
390 / 389), Δάμ-ων Δαμ-έω (nom. Δαμῆς, LGPN  5a, Milet  I, 123,
l. 13, 304 / 303) ou les trois frères Πολλ-ι(ά)δας, Πουλύ-ας et Πολυ-
χάρης, fils d’ Ἀπολλοδώρου (LGPN 3b, IG IV 12 71, l. 36 et 87 ; 59 et
56, Mégare, iiie s.) ou encore Νηδυμ-ιανός Νηδύμου (Ferrary, Mémo-
riaux, Laodicée, 40, 15 50).
♦ D’où l’usage d’une suffixation diminutive à connotation éventuel-
lement hypocoristique, notamment lorsque la transmission du nom paraît
se faire du père au fils, par exemple :
— Sophocle est le père d’un Σόφ-ιλλος, formation diminutive sur le
seul premier élément ;
— de même pour Ἀγάθ-αρχος, au fils du nom de Ἀγαθ-ών-ι‹χ›-ος
(LGPN 1, IG XII 249A10, Erétrie, ive s.), avec cette fois une triple
48. Voir dans E. Eichler, G. Hilty, H. Löffler, H. Steger et L. Zgusta (éd.), Namen for-
schung – Name Studies – Les noms propres. Manuel international d’onomastique,
2 vol. et vol. d’index (coll. HSK = Handbücher zur Sprach- und Kommunikations
wissenschaft), Berlin - New York, 1995-1996, e.g. W. Seibicke, « Traditionen der
Vornamengebung. Motivationen, Vorbilder, Moden: Germanisch », p.  1209, et
M. Knappova, « Traditionen der Vornamengebung. Motivationen, Vorbilder, Moden:
Slavisch », p. 1216-1217.
49. H. Solin, « Name », dans Reallexikon für Antike und Christentum. Sachwörterbuch
zur Auseinandersetzung des Christentums mit der antiken Welt, Stuttgart, 2013,
p. 740.
50. J.-L. Ferrary, Les mémoriaux de délégations du sanctuaire oraculaire de Claros,
d’après la documentation conservée dans le fonds Louis-Robert, vol. 1, Mémoires
de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 49, Paris, 2014, p. 45 et n. 27.
16 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

suffixation : un premier suffixe, non propre aux diminutifs puisqu’il


affecte aussi des composés, tels arg. Ἀμφαρί-ōν 51, puis la chaîne
formée par les deux suffixes suivants, qui est, quant à elle, à la fois
diminutive et hypocoristique, et fait par conséquent de l’ensemble
-ώνιχος une suffixation pourvue de cette même double valeur 52 ;
— Χαρί-νικος Νικία (LGPN 1, IG XII 3 306I, Anaphè, iie s.) illustre
la formation de diminutifs à partir du seul second élément.
En France, Maurice, le prénom du père, pouvait ainsi devenir pour
le fils aîné, par aphérèse haplologique (maintien de la consonne initiale
et de la finale accentuée), Mice / Miss, éventuellement lui-même à son
tour transformé par redoublement de la première syllabe en Mimi ; mais
il était plus souvent réduit à sa première syllabe, redoublée : Mau-mau
simplifié graphiquement en Momo. Antoine était raccourci en sa finale
accentuée, d’où Toine, mignardisé en Toinou, voire anglicisé en Tony.
Dans les pays anglo-saxons, à l’inverse, le monosyllabique John était
allongé et édulcoré en Johnny. Et les Américains font suivre à l’écrit de Jr
(Junior) la nomenclature onomastique du fils lorsqu’elle est homonyme
de celle du père, comme pour le cas célèbre de Georges W.  Bush, Jr.
Dans les mémoriaux de délégations de Claros, quand ce ne sont pas les
indications chiffrées β’ ou δίς qui signalent l’homonymie, se rencontre de
même l’abréviation νε(ώτερος) 53.
Les quelques exemples grecs cités ci-dessus invitent d’entrée de jeu
à voir dans cette catégorie de dérivés des formes certes tronquées par
rapport aux composés d’origine, mais non nécessairement courtes pour
autant, puisqu’elles peuvent être rallongées à l’aide de suffixes, dont
l’enchaînement sert principalement à traduire le débordement d’affec-
tivité, comme, en espagnol, chiqu-it-ito, chiqu-it-ico, chiqu-it-ín, sur
chico  « petit », et en français encore, le mot tendre « chou », féminisé
en « chou-te », amplifié le cas échéant par gémination expressive en
« choutte », diminutivé en « chou-pet(te) » (passé dans l’onomastique

51. Voir S. Minon, « Anthroponymes en Ἀμφ(ι)- et en -αρ(ι)- : de Ἀμφιάρης à


Ἀμφαρίōν », RPh 84 (2010), p. 309-352, en particulier p. 289-310.
52. Pour -Vχ- comme suffixation formatrice de diminutifs « expressifs » ou affectifs, cf.
Chantraine, Formation, p. 403-404, à propos de πύρρ-ιχ-ος « rouquin », dérivé de
πυρρός, ou de νηπί-αχ-ος « tout petit enfant », fait sur νήπιον.
53. Voir J.-L. Ferrary, op. cit., p. 42 et n. 16.
introduction 17

féline de haute-couture 54 !), – où « pet » procède de la grammaticalisa-


tion du radical de l’adjectif petit –, lui-même surdiminutivé par infixation
en « choup-in-et(te) », et l’inventivité dans le domaine de l’expressivité
ne s’arrêterait pas là…
L’exemple à quatre suffixes de l’hapax Φιλ-ων-ιχ-ίδ-ης à Athènes,
fin ve siècle 55, aurait ainsi été classé par Bechtel parmi les diminutifs de
composés formés sur le radical de l’adjectif φίλος, à côté de Φιλώνιχος,
fils de Φιλό-στρατος (HPN 452). Nous nous contenterons ici de signaler
cependant que son interprétation comme un nom simple, une forme de
sobriquet, est tout aussi pertinente : la sursuffixation proprement hypo-
coristique, c’est-à-dire connotée comme affective, n’est pas nécessaire-
ment l’apanage des noms courts formés à partir de composés, comme en
témoignent de façon indiscutable les 5 attestations du sobriquet Ὀρνι-
χίδας à Delphes (LGPN 3b, cf. HPN 585, ive s.).
La suffixation anthroponymique est ainsi moins souvent dérivation
par rapport à un nom-souche, comme l’analysaient les Anciens, que
variation par changement d’affixe ou combinaison de plusieurs d’entre
eux. Son développement trouve de ce fait dans la différenciation indi-
vidualisante et dans la dénomination familière ses deux premières
motivations. S’y adjoint dans une moindre mesure, pour les composés
diminutivés, dont le suffixe se substitue à l’un des éléments, voire s’ad-
joint à une forme tronquée du second,  la loi linguistique du moindre
effort, qui consiste alors à réduire le nombre de syllabes d’un nom que
le cercle des proches prononce de façon récurrente, au vocatif notam-
ment. Dans le diminutif, l’accent le plus souvent récessif du nom propre,
dans lequel Kuryłowicz voyait précisément le continuateur indirect de
celui du vocatif hérité 56, pouvait rester inchangé. Il pourrait aussi avoir
non seulement facilité la troncation des syllabes non accentuées, mais
même prédisposé à la conservation de l’élément accentué, son carac-
tère récessif favorisant celle du premier élément. Cela reste, bien sûr, à

54. Voir https://instagram.com/choupettesdiary/


55. IG I3 1032, l. 271 : notre image de couverture.
56. J. Kuryłowicz, Esquisses linguistiques, I, « La position linguistique du nom propre »,
Munich, 1956, p. 186 ; mais voir ici même la contribution d’É. Dieu sur cette ques-
tion de l’origine de la très fréquente récessivité de l’accent anthroponymique, avant
la période d’expansion aux marges du monde grec des suffixés périspomènes en -ᾶς
et en -οῦς.
18 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

démontrer, mais la combinaison dans l’accent de la hauteur et de l’inten-


sité, qu’évoquent Devine et Stephens en termes de « pitch differentiated
stress » 57, ne le rend pas impossible.

II. Le jeu de construction anthroponymique :


l’assemblage

Génétique anthroponymique : liaisons radicales


et dérivations suffixales

Génétique anthroponymique : liaisons radicales et dérivations suffixales


(http://dailygeekshow.com/2013/06/03). — Retouches © Annelise Poulet
(université Jean-Moulin - Lyon III)

La métaphore des liaisons moléculaires de l’affiche du colloque avait


pour visée de transposer sur le plan génétique celle du jeu de construc-
tion. Elle envisage, certes, plus largement, la création anthroponymique
que la seule suffixation. L’intérêt cependant de cette modélisation est
de faire apparaître une hiérarchisation entre modules de deux volumes
différents (radicaux et suffixes) et l’existence aussi de deux modes de
57. A. M. Devine et L. D. Stephens, The Prosody of Greek Speech, Oxford, 1994, p. 206,
et plus récemment, P.  Probert, Ancient Greek Accentuation. Synchronic Patterns,
Frequency Effects and Prehistory, Oxford, 2006, p. 55-56.
introduction 19

raccordement : liaisons apparentes et amas ou conglomérats insécables :


ainsi en va-t-il des suffixes plus ou moins directement rattachés au
radical, plus ou moins sécables ; ainsi en va-t-il tout autant des radicaux
entre eux. Le jeu de construction de la petite enfance fournirait un autre
modèle de représentation, l’un et l’autre offrant l’intérêt de concilier part
d’aléa et choix raisonné, τύχη et πρόνοια.
Nous visualisons ainsi dans cette image l’une des principales difficultés
auxquelles se trouvent confrontés l’onomatologue et plus largement le lin-
guiste : le fait que la liaison puisse devenir inapparente, comme masquée
par l’évolution phonétique, à l’issue de laquelle l’affixe se trouve comme
ingéré par le radical auquel il s’adjoignait. L’ad-fixation est devenue fixa-
tion indissoluble. Le nom propre est désormais insécable. C’est au point
qu’un ancien composé peut être analysé en synchronie comme un nom
simple ou un dérivé ; le phénomène est d’ordre morphologique, induit par
la phonétique, et non limité, comme on sait, au domaine du nom propre.
Claire Le Feuvre l’a récemment montré à partir d’exemples tels : lat.
nīdus, de *ni-sd-o- « assise », skr. nīḍá-, avec au premier élément le pré-
verbe ni- de l’indo-iranien et de l’arménien indiquant un mouvement de
haut en bas, ou antīquus « ancien », de *h2enti-h3ku-o- « qui regarde vers
avant », réanalysé comme antī-quus, un dérivé de ante « devant, avant » 58.

Αἰσχρυβίων
Il pourrait en être allé ainsi pour un anthroponyme rare comme
Αἰσχρυβίων (3 ex., LGPN 1, Eubée, ive-iiie s.), à moins que l’ambiguïté
ne ressortisse en fait à notre synchronie.
α) -υβ- suffixe expressif ?
Bechtel (HPN  488) invitait à le comparer à Γοργυπ- (contempo-
rain Γόργυψ, HPN 112, Erétrie), avec le même échange entre sonore
et sourde que dans le nom ὄρτυξ de la « caille », au génitif susceptible
de prendre la forme ὄρτυγος (Aristote), mais aussi ὄρτυκος chez le
Comique contemporain Philémon 59 : son analyse faisait donc restituer la
séquence suffixale -υβ-ίων. Du reste, les dérivés parallèles, tous attestés

58. C. Le Feuvre, « Suffixation et composition : composés et dérivés de la racine *Heu̯ -


“voir” dans les langues indo-européennes », BSL 105 (2010), p. 126.
59. Philémon, Comicorum Atticorum Fragmenta, vol. 2, frag. 245 (T. Kock).
20 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

durant la même période, Αἰσχρύβης, -ου, représenté également en Eubée,


Αἰσχρυβᾶς (sic Bechtel ; -ύβας : LGPN 2) pour un Athénien et Αἰσχρύβα
à Larissa (LGPN 3b), ne paraissent pas contredire cette interprétation 60.
Olivier Masson avait, à son tour, rapproché les uns et les autres dévelop-
pements de Κορδύβη, à côté de Κορδύπη, de Κόρδυπος et de Κορδυπίων
(LGPN 4, 2 et 5a, ive au iie s. a. C.), famille de sobriquets dont la glose
d’Hésychius κορδύς· πανοῦργος « industrieux » et, au sens péjoratif,
« fourbe, méchant », pourrait éclairer le sens 61. Il voyait dans ces noms
en -υβ- « des dérivations expressives rares » 62. Alcorac Alonso Déniz
signale aussi des doublets en -υθ-, comme dans Γόργ-υθ-ος, Ψακ-ύθ-ε̄ ou
Μίκυθος lui-même parallèle à Μικύλος, probablement refait à partir du
doublet dialectal μικκός de μικρός plutôt que témoignant de l’existence
ancienne d’un adjectif en -ύς 63.
β) *-ύ- muni de l’élargissement dépréciatif -β- ?
C. de Lamberterie proposait quant à lui de voir dans Αἰσχρυ- la com-
binaison des deux suffixes *-ύ- et -ρό- caractérisant l’ancienne alter-
nance paradigmatique, inversée dans Αἴσχυρος (2 ex., LGPN  1 et 5a,
Samos et Troade, ive s.), en renvoyant à Bechtel pour le reste 64. Il est
vrai que vu l’existence de l’adjectif κορδύς, la comparaison du rare et
poétique κορδ-ύλη « bosse, enflure », avec selon Chantraine la suffixa-
tion « familière en -ύλη » 65 – d’où le sobriquet Κορδυλ-ίων 66  –, et de

60. Voir déjà le regroupement des différents suffixés dans Bechtel, KOS 163 (= Ἐφ. Ἀρχ
1911, p. 16).
61. Ο. Masson, « Noms de femmes rares en Attique », Onomata  9 (1984), p.  33-35
(= OGS II, p. 421-423) ; pour l’adjectif κορδύς au sens d’« adroit », voir C. de Lam-
berterie, Les adjectifs grecs en -υς. Sémantique et comparaison, Louvain-la-Neuve,
1990, t. II, § 289-292. En ce qui concerne le nom thessalien difficile Κοχρύβα seule-
ment connu par une inscription de Krannon (SEG 29, 522, datation incertaine), qui
ne me paraît pas nécessairement devoir être rattaché à la même série, je me réserve
de l’étudier ailleurs, et tout d’abord dans la base de données en ligne du LGPN-Ling.
62. O. Masson, sur la famille de Αἰσχ-, « Quelques anthroponymes grecs et leur mor-
phologie : noms composés et noms simples », Verbum 18 (1995-1996), p. 281-288
(= OGS III, p. 318).
63. Voir la contribution d’A. Alonso Déniz ici même, p. 427, n. 29, et C. de Lamberterie,
Les adjectifs grecs en -υς. Sémantique et comparaison, Louvain-la-Neuve, 1990,
p. 195-196, pour Μίκυθος, Γόργυθος.
64. C. de Lamberterie, op. cit., § 278, p. 831-832.
65. DELG, s.v.
66. L. Robert, loc. cit.
introduction 21

Κορδύβη ci-dessus pourrait orienter vers deux élargissements parallèles


du suffixe -υ-, en -λ- et en -β- qui paraît, quant à lui, cantonné dans des
lexèmes et des sobriquets connotés péjorativement parce qu’ils sont en
rapport avec infirmité et difformité 67.
Cependant, la combinaison de *-ύ- et -ρό- en -ρύ- ne s’observerait que
pour les quatre noms en question, tous en Αἰσχρυβ- ; aucun Αἰσχρυπ-,
Αἰσχρυφ- ni Αἰσχυπ-, Αἰσχυφ- n’est attesté, alors que de telles variations
de la forme de l’affixe consonantique, notamment labial, se rencontrent
en particulier à la suite de u, comme en témoignent dans le lexique, à côté
de καλύπτω et Καλυψώ, καλύβη « cabane, hutte » et καλυφή « inonda-
tion », ou κρύπτω, ἐκρύβην, ἐκρύφην 68, et κύπτω « courber », auquel
est rattaché l’adjectif κῡφός « courbé en avant, voûté », κύβδα « en se
voûtant », à rapprocher peut-être aussi de κύπελλον et κύμβη « coupe,
vase », voire κύβος « cube » 69. Il faut aussi reconnaître que la lourdeur
de la séquence suffixale qui aurait enchaîné -ρ-υ-β-ί-ων, soit cinq suf-
fixes, serait sans parallèle : seule l’adjonction du suffixe patronymique
-ίδης a pu produire une séquence presque aussi complexe, à travers
l’exemple unique de Φιλ-ων-ιχ-ίδ-ης, déjà mentionné. Les autres noms à
premier élément formés sur Αἰσχ- sont soit en Αἰσχρ- (béot. Ἠσχρ-), soit
en Αἰσχυ- : l’hypothèse que puisse figurer -βίων au second élément doit
de ce fait être aussi écartée.
γ) ὑβ- « bosse, voussure »
Une autre possibilité pourrait alors s’offrir à nous : reconnaître le
radical ὑβ- très rarement attesté (essentiellement chez Hippocrate, Aris-
tote et Galien : lexique anatomique 70) de l’adjectif ὑβός « bossu » et du

67. Chantraine, Formation, p. 261, classe ainsi l'adjectif ὑβός parmi les « mots popu-
laires (mes italiques), qui échappent à l’analyse », mais l’étude de J. Curbera,
« Simple Names in Ionia », dans PNAA, p.  107-143, qui montre qu’en Ionie, les
noms simples les plus hauts en couleur peuvent être portés dans tous les milieux, y
compris parmi les magistrats et au sein de l’aristocratie (p. 110-111), invite à subs-
tituer à cette axiologie de type sociolinguistique, une caractérisation sémantique
d’ordre psychologique, en termes de valorisation vs dévalorisation.
68. Voir DELG, s.v. καλύπτω et κρύπτω, où l’étymologie proposée fait abstraction de la
labiale finale.
69. Voir EDG I-II, s.v. κύπτω.
70. Voir Aristote, HA 499a14 : Αἱ δὲ κάμηλοι ἴδιον ἔχουσι παρὰ τἆλλα τετράποδα τὸν
καλούμενον ὕβον ἐπὶ τῷ νώτῳ. Διαφέρουσι δ’ αἱ Βάκτριαι τῶν Ἀραβίων· αἱ μὲν
γὰρ δύο ἔχουσιν ὕβους, αἱ δ’ ἕνα μόνον. Les chameaux ont comme particularité par
22 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

nom masculin ὕβος (ou ὗβος) « bosse, voussure » au second élément


d’un composé Αἰσχρ-υβ- (diffusé à partir de l’Eubée ?), alors suffixé en
-ᾱ, -ης, -ᾶς et -ίων. On aurait donc affaire, pour le sens, à un sobriquet,
mais de forme composée, qui pourrait être :
1o suivant les schémas hérités
a) de type possessif ou bahuvrihi comme l’hapax Αἰσχρό-δωρος en
a du moins l’apparence (LGPN 4, Olynthe, ive s.) 71, au sens ici d’« à la
laide bosse » ;
b) à rapprocher de dvandvas comme Ἀρκο-λέων (HPN  74) ou
plutôt, à partir de deux radicaux adjectivaux, comme chypr. so-to-zo-wo
(ICS 223), génitif de /Sōtodzōwos/ « sain et sauf » 72 ; le sens quasi pléo-
nastique serait alors : « Laid-bossu ».
2o secondairement déterminatif, au sens de « Laidement-bossu », en
face du très fréquent oxymore Κάλλ-αισχρος « Joliment-laid » à côté
de Εὔ-αισϙρος « Bien-laid » (HPN 30, Théra, arch.) avec, pour Αἰσχρ-
comme pour son antonyme Καλλ-, l’emploi de lexèmes avec la même
valeur intensive que le préfixe Εὐ-, mais l’expressivité de leur séman-
tisme en plus.
Thersite voit en effet imputer sa laideur à ses épaules voûtées entre
autres : αἴσχιστος δὲ ἀνὴρ (…) τὼ δέ οἱ ὤμω κυρτώ, ἐπὶ στῆθος συνο-
χωκότε 73. Le radical ὑβ- aurait certes été peu prolifique dans l’anthropo-
nymie, sauf si l’hapax Ὕβ-αιθος à Corcyre fournissait l’exemple d’un
composé inverse des nôtres ; mais il pourrait s’agir aussi bien d’une
variante pour Ὕπαιθος 74. Il ne paraît pas, du reste, avoir été plus vivant

rapport aux autres animaux ce que l’on appelle bosse et qu’ils ont sur le dos. Ceux
de Bactriane diffèrent des Arabes : les premiers ont deux bosses, quand les seconds
n’en ont qu’une.
71. Un composé possessif laisse attendre une interprétation du type : « au don honteux »,
mais un anthroponyme au sens de « don honteux » pour un « enfant de la honte », né
hors mariage ou autre, ferait plus sens. Le composé serait alors de type déterminatif,
comme le sont, par exemple Θεό-δωρος et le composé inverse Δωρό-θεος.
72. M. Egetmeyer, Le dialecte grec ancien de Chypre, I. Grammaire, Berlin - New York,
2010, p. 306.
73. Iliade 2, v. 116-118.
74. Pour Ὕβαιθος, Céphallénie, époque hell., voir IG IX2 1 1532, à corriger peut-être en
Ὕπαιθος selon J. Curbera, dans Θέρμη καὶ φῶς. Licht und Wärme. Αφιερωματικός
τόμος στη μνήμη του Α.-Φ. Χρηστίδη, Thessalonique, 2008, p. 266.
introduction 23

dans le lexique, où les adjectifs au radical plus étoffé, hom. κυρτός 75 et


κῡφός, référant respectivement à la convexité et à l’inclinaison en avant,
paraissent l’avoir tôt supplanté 76. Il n’est pas impossible que ce soit pré-
cisément la forme courte de ce radical qui ait menacé son intégrité et
ait été source d’ambiguïté, au point de conduire à son évincement. La
rareté de ses emplois pourrait cependant inviter aussi à y voir un régio-
nalisme lexical, et le flottement en Grèce centrale et septentrionale entre
occlusives sourdes aspirées, sonores et sourdes pourrait faire interpréter
ὑβ- comme une variante d’origine thessalo-macédonienne de ὑπ- (mieux
que ὑφ-, qui nous mènerait du côté du « tissage », pace Orion) 77 ; ainsi
s’expliquerait la présentation métalinguistique (τὸν καλούμενον ὕβον,
note supra) du nom de la « bosse » chez le philosophe qui fut le maître
d’Alexandre de Macédoine. C’est en grec moderne κυφός qui désigne
couramment le « bossu », ύβος restant la désignation anatomique de la
« bosse »  78. Si le radical ὑβ- avait un rapport étymologique avec ὑπό, lat.
sub, l’orientation vers le bas inscrite dans son sémantisme expliquerait
qu’il ait pu être spécialisé dans la désignation de la difformité corporelle
qui correspond à l’incurvation du dos 79.

75. Sur la conservation de l’adjectif κυρτός en grec moderne et son emploi pour former
des sobriquets jusqu’à l’époque byzantine, voir Robert, Noms indigènes, p.  252.
Hésychius glose du reste ὑβώματα par κυρτώματα.
76. Voir Galien, In Hippocratis aphorismous commentarii VII, 18a, p. 74, 12 : Ὑβοὺς
καὶ κυφοὺς εἴωθεν ὀνομάζειν Ἱπποκράτης οὓς ἅπαντες οἱ νῦν ἄνθρωποι προσαγο-
ρεύουσι κυρτούς Hippocrate avait coutume de désigner par « huboi » et « kuphoi »
ceux que tous aujourd’hui appellent « kurtoi » (voûtés, bossus).
77. Voir Orion, Etym. υ 154, 5, dont seule la partie phonétique de la notice est intéres-
sante : Ὑβόν. κυφὸν ἐστὶν ἀποβολῇ τοῦ κ, καὶ τροπῇ τοῦ φ εἰς β. Sur les flottements
entre φ et β, voire π en macédonien, voir M. Hatzopoulos, La Macédoine. Géogra-
phie historique. Langue. Cultes et croyances. Institutions, Paris, 2006, p. 42 : nom-
breux exemples de β macédonien pour φ, comme Βερενίκη ; pour le cas plus rare de
β pour π, voir Βορδῖνος vs thess. Πορτῖνος, sur πόρτις « veau » (cf. Masson, OGS III,
p.  293). Sur la présence de flottements analogues en thessalien, voir J.  L.  García
Ramón, « Thessalian Personal Names and the Greek Lexicon », dans ONW, p. 32,
qui cite entre autres le nom de femme Τολόβα (Atrax, ive a. C.), variante régionale
plausible de τολύπη « pelote de laine ».
78. Voir, par exemple, le dictionnaire de G. Babiniôtis, Λεξικὸ τῆς νέας Ἑλληνικῆς
γλώσσας2, Athènes, 2002, s.v.
79. L’Etymologicon Magnum, s.v. ὑβός (774, 8), précise la nature de la difformité, en
distinguant entre ὕβωσις et κύρτωσις, la première correspondant à τὸ κατὰ τὴν
κεφαλὴν πρὸ τῆς ῥάχεως πάθος, la seconde affectant τὸ μέσον τῆς ῥάχεως.
24 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

Entre liaison affixale et complexe suffixal


Mais la difficulté à laquelle nous sommes encore plus couramment
confrontés est celle, plus largement, de la segmentation entre radical et
affixes ou entre affixes de différents types. L’une des questions essen-
tielles est alors celle de la synchronie de référence. Pour un nom d’ap-
parence monothématique comme Ἀλεξίων, la segmentation ne sera pas
la même suivant que sera adoptée la perspective historique de Bechtel,
qui l’analyse comme la forme courte d’un composé à premier élément
Ἀλεξι-, du type courant Ἀλεξί-μαχος (patronyme éclairant du Thessalien
Ἀλεξί-ουν, HPN 34), ou la perspective synchronique, plus conforme à
l’amplitude chronologique et aréale d’emploi du nom propre telle que
ses attestations nous la donnent à voir : 118 attestations LGPN, panhell.,
ive a. C.-iiie p. C. 80. Dans le second cas, les 9 509 noms différents présen-
tant la finale -ίων dans la recherche en ligne Database Search du LGPN,
parmi lesquels figurent relativement peu de composés, comme cela avait
été mis en évidence dans l’étude du nom argien Ἀμφαρίο̄ν, invitent à
penser que sa productivité ne pouvait manquer de le faire passer pour
suffixe aux yeux des hellénophones. Sa large diffusion en fait dans cette
perspective l’un des suffixes les plus répandus, après le simple -ων,
devant -ίᾱς / -ίης, mais loin derrière le simple -ᾱς. Il sera alors pertinent,
comme le fait ici Jaime Curbera à propos de Καισαρίων, de distinguer
le suffixe complexe -ίων du simple -ων, dont il apparaît comme une
variante légèrement amplifiée. Il n’empêche qu’il n’est guère d’anthro-
ponymes en -ίων, hormis le cas flagrant du peu fréquent Ἀγαθ-ίων, en
face du très répandu Ἀγάθ-ων, dont on ne puisse démontrer que la for-
mation repose sur l’adjonction du suffixe -ων à une base déjà munie de
l’affixe -ι- 81.
C’est pourquoi nous avons pris le parti, dans les Indices de préfixes,
suffixes et chaînes suffixales fournis à la fin du volume, d’adopter un
point de vue résolument synchronique, celui du locuteur grec, non sans
fournir néanmoins toute indication historique nécessaire.

80. LGPN d’Oxford, consultable à l’adresse : http://clas-LGPN2.classics.ox.ac.uk.


81. Voir S. Minon, art. cit., p. 309.
introduction 25

III. Caractéristiques saillantes de la suffixation


anthroponymique (C. Le Feuvre)

La variété des exposés permet, sinon de couvrir toutes les régions, du


moins d’aborder à peu près tous les problèmes liés à l’anthroponymie et
à sa suffixation.
La définition des types d’anthroponymes, d’abord, qui est le sujet de
l'exposé de L. Dubois plus haut dans notre introduction : qu’est-ce qu’un
hypocoristique, un sobriquet ? Si à l’origine ce dernier peut être défini
comme un adjectif ou un nom existant comme appellatif, qui est employé
comme nom propre, comme « surnom » parlant, ces noms ont pu donner
naissance à une catégorie productive dans laquelle un suffixe de sobri-
quet suffit à dériver un anthroponyme avec cette valeur, quelle que soit
la base nominale autre : tous les noms en -αξ, suffixe fréquent dans les
sobriquets, ne correspondent évidemment pas à un appellatif.
La difficulté d’analyse de certains types ensuite : on le voit dans plu-
sieurs contributions notamment pour les noms en -ᾶς / -ᾱς, pour lesquels
les questions du type accentuel, du type morphologique et de l’origine,
indissociables, restent parfois sans réponse. Les Grecs ont d’ailleurs été
aussi ennuyés que nous par ce problème : en témoigne le caractère récur-
rent dans les contributions de la question du changement de type mor-
phologique à partir d’une forme du paradigme qui sert de pivot, qui est
en général le nominatif singulier (V. Gomis García) mais qui, dans un cas
au moins (celui de -εύς / -ήν) est l’accusatif (N. Guilleux). À cet égard,
on voit clairement les limites de l’outil LGPN, notamment de la base de
données en ligne – c’est moins criant pour les volumes imprimés : les
auteurs du LGPN sont évidemment amenés à faire des choix qui sont par-
fois contestables, sur le type flexionnel ou le genre de tel ou tel nom – par
exemple Μῦς, donné comme féminin par le LGPN alors qu’il est mas-
culin, ou encore un Χάραττα féminin qui est en fait un Χαράττης mas-
culin, qui ne doivent sans doute pas être les seuls mots transgenre de la
base. Ces choix éditoriaux affectent aussi la datation, puisqu’il n’est pas
rare que soit indiquée une date là où les éditeurs de l’inscription ne se
sont pas prononcés sur la question.
La relative perméabilité des types flexionnels qu’on vient d’évo-
quer est la conséquence de l’absence de caractérisation sémantique nette
des suffixes concernés. Beaucoup sont largement désémantisés, à part
26 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

quelques exceptions comme -εύς, ou le suffixe d’hypocoristique -ιον


(F. Réveilhac) : qu’à l’absence de distinction fonctionnelle corresponde
un brouillage de la distinction morphologique est un fait qui ne saurait
surprendre. Cet état de fait explique l’interchangeabilité de ces suffixes,
qui se combinent avec les mêmes bases sans qu’on puisse voir de diffé-
rence entre les différents dérivés (comme il ressort de plusieurs contri-
butions), ce qui permet l’extension d’un suffixe aux dépens d’un autre
à l’intérieur d’une même communauté linguistique, comme on le voit
avec le cas de -ᾱς et -εύς en Argolide (E. Nieto Izquierdo), mais c’est
un fait qui se retrouve dans toutes les régions (A. Alonso Déniz). Ces
suffixes étant plus ou moins isofonctionnels, les phénomènes sociolin-
guistiques tels qu’effets de mode, influence d’un dialecte sur le dialecte
voisin (M. Veksina), effets de la koinéisation sur la régression, puis la
disparition de suffixes locaux, sont d’autant plus visibles qu’aucun élé-
ment signifiant, c’est-à-dire sémantiquement pertinent, ne vient inter-
férer. La situation des anthroponymes tranche de ce point de vue avec
celle des noms communs pourvus du même suffixe : ainsi, le passage de
noms propres en -εύς au type en -ην n’a pas d’équivalent dans les noms
communs, où -εύς reste un suffixe sémantiquement non vide, ce qui pro-
tège le type morphologique dans une certaine mesure – et même en arca-
dien et en chypriote, où le type ἱερης, Acc. -ην est attesté, cette altération
du suffixe n’a pas abouti à un passage aux thèmes en -ην, type, il est vrai,
fort isolé. Même un suffixe avec une valeur sémantique nette à l’origine,
comme le suffixe patronymique ίδας, peut finir par perdre sa valeur patro-
nymique et servir à former des anthroponymes « premiers », par opposi-
tion à des noms « relationnels », la fonction patronymique ancienne étant
préservée plus longtemps dans les zones périphériques comme la Thes-
salie (R. Bouchon et B. Helly). Cette vacuité sémantique de la plupart
des suffixes anthroponymiques, qui se combinent avec tous les types de
base ou presque, rend d’autant plus remarquable leur absence constante
dans certains types d’anthroponymes, en l’occurrence ceux qui sont issus
de la conversion de composés hypostatiques (N. Rousseau), qui ne sont
jamais resuffixés.
Ces suffixes, en plus d’être sémantiquement peu différenciés, sont sou-
vent même morphologiquement peu marqués. Cela peut rendre compte
de l’élimination de certains, absorbés par d’autres suffixes dont ils ne se
distinguaient que peu ou pas du tout (C. Le Feuvre). Cela explique aussi
introduction 27

des particularités intéressantes : par exemple, la féminisation des anthro-


ponymes masculins se fait parfois, dans certains dialectes, en contradic-
tion avec ce que la morphologie nominale régulière ferait attendre, et
les couples nom propre masculin / nom propre féminin ne sont pas tou-
jours superposables dans les dialectes. Cela se constate dès le mycénien,
comme le montre A. Striano avec l’absence totale de PN fém. en -ώ à
Pylos alors que cette formation est bien représentée à Cnossos, ce qui
implique que la féminisation d’un même anthroponyme masculin n’uti-
lise pas les mêmes outils morphologiques dans les deux endroits. Le pro-
cessus symétrique et plus rare de masculinisation, abordé par L. Dubois,
rend compte aussi de couples morphologiquement aberrants en syn-
chronie, du type féminin en -ᾱ / masculin en -ᾱς, sans équivalent hors de
l’anthroponymie. De tels flottements sont la contrepartie d’une carac-
térisation morphologique faible pour la forme de fondation du couple.
Les anthroponymes suivent ainsi des règles qui leur sont spécifiques et
constituent un sous-système qui n’est pas toujours explicable selon les
règles applicables aux noms communs constitués avec les mêmes élé-
ments morphologiques.
Ce caractère morphologiquement peu marqué des suffixes d’anthro-
ponymes explique aussi d’après P. Probert la tendance à la récessivité
de l’accent sauf quand le suffixe était clairement identifiable et pouvait
conserver ses propriétés accentuelles. La loi des appellatifs, qui a pu
sembler menacée par cette hypothèse, peut tout de même être sauvée
(É. Dieu propose une bonne explication qui permet de lever la critique
essentielle faite par P. Probert à cette loi). Reste qu’il ne faut pas oublier
que les grammairiens par lesquels ces types accentuels nous sont connus
ont aussi tendance à plaquer le système accentuel du grec de leur époque
sur des faits plus anciens qui relèvent peut-être d’un système différent,
ce qui est encore plus vrai pour les données qu’ils nous transmettent sur
l’accentuation des autres dialectes. La question de la nature de l’accent,
de hauteur ou d’intensité, est un élément crucial (M. del Barrio, G. Vot-
téro), et il est certain que le passage d’un type accentuel à un autre ne
s’est pas fait au même rythme suivant les régions du monde grec.
La productivité des types suffixaux repose essentiellement sur les
métanalyses et la création de suffixes complexes intégrant un ou plu-
sieurs éléments du radical, ainsi que sur la resuffixation. On va donc dans
le sens d’un accroissement matériel du suffixe. Le cas inverse, et rare,
28 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

de constitution d’un suffixe secondaire par perte d’un élément à gauche,


alors que le processus usuel est l’accrétion d’un élément à gauche, est
représenté par le béotien -δας, issu de -ιδας, et qui entrerait ensuite à
son tour dans la composition de suffixes complexes comme le fameux
-ωνδας (G. Vottéro).
Ce phénomène de renouvellement suffixal est amplifié par le principe
de transmission d’un nom d’une génération à l’autre de la même famille,
où la variation nécessaire à l’individuation des personnes se fait souvent
via un jeu sur le suffixe (voir la description de S. Minon dans cette Intro-
duction). On assiste ainsi à la création de chaînes suffixales avec deux
ou trois suffixes successifs, et à des variations allomorphiques du type
de -ίδας / -ιάδας (A. Alonso Déniz), dont on peut étudier la diffusion en
fonction de faits sociolinguistiques. Les différentes combinaisons pos-
sibles sont recensées dans l’annexe constituée par S. Minon et consacrée
à la concaténation de ces morphèmes. Ce récapitulatif permet de voir
quels suffixes s’associent de manière privilégiée (il y a des combinaisons
fréquemment attestées, d’autres peu ou pas du tout), quelle est leur place
relative dans la chaîne, si cette place est variable, c’est-à-dire s’il y a des
permutations possibles, et lesquelles de ces concaténations sont propres
à l’anthroponymie : la concaténation -ιδαιος mentionnée par B. Helly en
Thessalie a ainsi peu de chances de connaître une permutation de ses suf-
fixes, et pourrait être analysée comme une recaractérisation d’une forma-
tion patronymique -ιδας en perte de vitesse.
Ces phénomènes ne peuvent être mis en évidence qu’au cours d’une
analyse qui retrace l’évolution diachronique, qui permet d’éclairer la
genèse de certains anthroponymes. Les contributions présentent des ana-
lyses de détail avec plusieurs propositions nouvelles pour l’analyse de
plusieurs anthroponymes (A. Alonso Déniz, J. Curbera), qui montrent au
moins que nous autres linguistes jouons avec les blocs de formation (je
n’ose dire avec les boules de formation, pour reprendre le schéma molé-
culaire qui figure plus haut) avec autant de dextérité que les Grecs.
Malgré ces micro-changements, le système grec apparaît tout de même
très stable sur la durée. L’empan chronologique des contributions est très
large, allant du second millénaire à l’époque impériale, et malgré la dis-
proportion criante entre le nombre d’attestations suivant les périodes,
l’homogénéité du système ressort assez bien. Les études axées sur un
corpus géographiquement délimité (Cyrène, Argolide, Béotie), en offrant
introduction 29

une vue de la situation dans une zone donnée, complètent les contribu-
tions axées sur une formation, étudiée de manière transversale, et l’on
constate, ce qui n’est certes pas une surprise, que le système fonctionne
globalement partout de la même manière. J.  L. García Ramón montre
ainsi la continuité entre les types mycéniens et ceux du grec du premier
millénaire, et souligne une fois de plus l’importance des seconds pour la
compréhension des premiers en ce qui concerne l’analyse des suffixes, de
même qu’A. Striano. La question de la continuation de types mycéniens
se retrouve dans d’autres communications (E. Nieto Izquierdo et N. Guil-
leux). Même un phénomène comme la gémination dite « expressive » est
déjà attesté en mycénien, bien que la graphie le rende difficilement détec-
table, et l’on pourrait même se demander si parmi les anthroponymes en
-i-jo du mycénien il n’y aurait pas quelques diminutifs neutres en -ion.
Pour la gémination, qui caractérise avant tout les hypocoristiques,
le caractère expressif du procédé n’est pas contestable, mais quelques
contributions ont proposé de lui trouver des fondements moins impres-
sionnistes : l’hypothèse d’A. Mathys sur une distribution des formes avec
ou sans géminée en fonction de la structure syllabique du mot, dans une
sorte de « loi des comparatifs » consonantique (-ότερος / -ώτερος), est
certainement une piste à explorer, d’autant qu’elle ne la formule que sur
un corpus précis, les exemples d’Athènes aux ve et ive s., et qu’il fau-
drait la tester sur d’autres corpus dialectaux. C. Le Feuvre propose pour
certaines formes qui présentent cette gémination alors qu’a priori elles
ne le devraient pas – les noms propres issus de la conversion de parti-
cipes féminins, qui n’ont rien de formations hypocoristiques –, une expli-
cation reposant sur un modèle analogique à partir d’un schéma existant
par ailleurs dans la langue. Si le terrain est glissant, comme l’est tout ce
qui touche à l’expressivité, il est probable que ce phénomène a plusieurs
sources. La gémination n’étant pas systématiquement notée dans les ins-
criptions anciennes, le phénomène n’est appréhendable que quand il est
déjà mûr et productif, ce qui rend difficile l’identification de ses causes.
Reste enfin la question de l’intégration des emprunts, de l’hellénisation
des noms étrangers ou, à l’inverse, de l’adaptation des noms grecs dans
les langues voisines (D. Dana, G. van Heems, P. Poccetti). Pour l’hellé-
nisation des noms étrangers, à peu près tous les suffixes sont employés.
L’hellénisation se fait sur le seul critère morpho-phonologique, et l’ab-
sence de contenu sémantique net des suffixes leur permet de s’adapter
30 sophie minon, laurent dubois, claire le feuvre

à toutes les configurations. Ce critère est parfois dévoyé par un autre


comme pour le Δομέστιχος hyper-béotien mentionné par G. Vottéro, qui
repose sur une mise en correspondance erronée d’un suffixe étranger
avec un suffixe local. Si l’étude de ces noms ne peut guère nous donner
de renseignements morphologiques sur le fonctionnement des anthropo-
nymes en grec, elle met en évidence de manière criante les phénomènes
de mécoupure et de productivité suffixale, et surtout elle constitue un
terrain de choix pour une étude sociolinguistique. Ce qui est tout aussi
vrai pour l’adaptation des anthroponymes grecs dans une autre langue,
comme a commencé à le montrer G. van Heems pour l’étrusque.
Il reste du travail, et des pistes à creuser. C’est aussi la fonction d’un
colloque, que de faire ressortir les zones d’ombre. Mais en l’état, nous
espérons pouvoir donner avec ce volume un premier tableau d’une partie
de la morphologie grecque qui est rarement prise comme objet d’étude
en soi tant, il est vrai, elle est complexe.
PR EM I ÈR E PA RT I E

PR ÉH ISTOI R E
ET H ISTOI R E CON T R AST I V ES
D E L’A F F I X AT I O N
A N T H ROP ON Y M IQU E
La suffixation des anthroponymes :
du mycénien aux dialectes du premier millénaire

José Luis García Ramón


Center for Hellenic Studies,
Harvard University

§ 1.  L’existence d’une continuité entre le mycénien et le grec du premier


millénaire est bien établie dans maints aspects linguistiques, malgré les
difficultés d’interprétation inhérentes à la translittération des mots écrits
en linéaire B*. Dans le cas concret de la suffixation des anthroponymes,
la comparaison entre le mycénien et le grec alphabétique se heurte à
des difficultés spécifiques. D’une part, la notation des géminées, qui
jouent un rôle si important dans l’onomastique, est souvent impossible
en mycénien, sauf dans des mots se terminant en -ro2 (pas d’exemples en
-ra2, cf. § 3). D’autre part, les noms reconnaissables comme des dérivés
à suffixe onomastique sont bien moins nombreux en mycénien qu’en
grec alphabétique. L’onomastique mycénienne permet, par conséquent,
de constater sur la base des formes assurées une variété de suffixes fort
réduite, et la comparaison avec celle du grec alphabétique (et du chy-
priote) permet de constater une différence quantitative substantielle :
qu’elle soit réelle ou qu’elle relève de la minceur du dossier, la ques-
tion demeure ouverte. En tout cas, dans une série de suffixes les coïn-
cidences sont frappantes : tout ce qui est attesté en mycénien se trouve
aussi, pour l’essentiel, au premier millénaire. Cela fait penser que si les

* Ce travail s’insère dans le projet de recherche « Estudio diacrónico de las institu-


ciones religiosas de la Grecia antigua y de sus manifestaciones míticas », FFI2013-
41251-P, MEC Universidad Autónoma de Barcelona, España. Je tiens à remercier
vivement Alcorac Alonso Déniz (Lyon), Catherine Dobias-Lalou, Laurent Dubois
(Paris), Laura Massetti (Cologne) et José L. Melena (Vitoria) pour leurs remarques
et critiques, qui ont enrichi le manuscrit. Pour le matériel onomastique on renverra
pour chaque cas au LGPN.
34 josé luis garcía ramón

données mycéniennes étaient plus nombreuses, les différences seraient


encore plus ténues : c’est pourtant bien un argument ex silentio qui évi-
demment ne peut pas être concluant, mais paraît bien assurer l’existence
d’une large continuité mycénienne. Il n’en est pas moins vrai, inverse-
ment, que bien des suffixes attestés, à des degrés divers, au premier mil-
lénaire ne se laissent pas reconnaître dans la langue des tablettes, soit
parce que la graphie demeure obscure, soit parce qu’ils relèvent de créa-
tions d’époque postmycénienne.
La présente contribution essaiera de suivre, à l’aide de formes signi-
ficatives, la présence et continuité de la dérivation onomastique mycé-
nienne en grec du premier millénaire. D’autre part, en partant de la
conviction de l’existence d’une continuité malgré les divergences, et de
microsystèmes intégrant divers dérivés (§  2-3), on soulignera les pos-
sibilités qu’offrent (et les limitations que posent) pour la translittéra-
tion et l’interprétation des dérivés onomastiques mycéniens les formes
attestées en grec alphabétique dans des cas concrets : les sobriquets en
/-ās/ et en /-ōn/ et ceux en /-ēus/ et /-ēwās/ (§ 4), les noms propres en
-(C)a-ko (§ 5), les formes « courtes » de composés « tronqués » n’ayant
ni composé parallèle (§ 7) ni continuateur reconnaissable au premier mil-
lénaire (cas de e-ne-ke-se-u § 8-9) et les composés qui présentent dans
leur second membre un suffixe inattendu -σος qui relève de l’interversion
des membres dans des composés du type τερψίμβροτος (type Χάραξος
§ 10).
Une série de questions ne seront pas traitées dans ce travail malgré
leur intérêt évident pour le contexte historique dans les différentes
régions : c’est le cas de la distribution sociale des suffixes (et, en rapport
avec elle, les aspects prosopographiques) et des lexèmes dans les diffé-
rentes régions, ainsi que les différences de productivité à l’intérieur de
chaque corpus, par ex. les rapport quantitatifs entre myc. e-u /-ēus/ et gr.
alph. -εύς d’une part, et myc. /-ēwās/ de l’autre, ou ceux entre myc. -se-u
/-sēus/ et gr. alph. -σεύς (-σέᾱς, -σος, etc.) d’une part et myc. /-ēwās/ de
l’autre.

§ 2.  On rappellera succinctement quelques points et concepts bien


connus pour une meilleure compréhension de ce qui suit.
Des suffixes spécifiquement onomastiques se trouvent attestés tant
a) dans des composés que b) dans des composés « tronqués » à forme
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 35

« courte » (ainsi dans ce qui suit), et c) dans des noms comportant un seul
lexème (sobriquets), et ceci tant en mycénien qu’au premier millénaire :
a) Avec des composés, cf. la variante /-ā-s/ (: -ᾱς) de /-o-/ (: -oς), dont
la coexistence est déjà mycénienne, y compris pour les mêmes noms,
cf. ka-ta-wa /Katarwās/ : ka-ta-wo /Katarwos/ (: Arc. καταρϝoς
« maudit »), cf. aussi myc. a-ka-to-wa /Alkathowās/ vs hom.
Ἀλκάθooς, ou Thess. Ἐρραίνᾱς* (Patron. Ἐρραίναιος) présupposant
*Ἐρί-αινος « qui a (reçoit) une haute (ἐρι°) louange » 1 ;
b) avec des hypocoristiques ou composés « tronqués » avec conserva-
tion partielle du second membre (type Πάτρo-κλ-oς : Πατρo-κλέης,
Κλέομμ-ι-ς : Kλεο-μένης), cf. myc. pe-ri-mo /Perimos/ (cf. pe-ri-
me-de : Περιμήδης), pe-ri-to /Perithos/ (cf. pe-ri-to-wo /Perithowos/ :
Hom. Πειρίθooς), to-wa /Thowā(n)s/ avec /-ā-/ élargi par -nt- ? : Hom.
Θόα(ν)ς) (cf. to-wa-no /Thowānōr/, θοός, ἀνήρ) 2 ;
b’) avec des hypocoristiques ou composés « tronqués » avec substitution
totale du second membre par une série de suffixes : myc. /-ā-/, /-ako-/,
/-ēu-/, /-ewā-/, /-i-/, /-id-/, /-iko-/, /-ikho-/, /-il(l)o-/, /-īno-/, /-(i)ōn-/,
/-ο-/, fém. /-ōi/, /-ōn-/, /-ul(l)o-/, /-won-/ correspondant à gr. alph. -ᾱς,
-ᾶς, -ακο-, -εύς, -έᾱς, -ις, -ιδ-, -ικος, -ιχος, -ιλ(λ)ος, -ῑνος, -[ι]ων, -ος,
fém. -ώι, -ων, -υλ(λ)ο-, -(ϝ)ων, aussi avec des conglomérats, par ex.
-ᾱ ́ -ων, -ᾱ́-τᾱς, -ών-δας. Les suffixes, dont la plupart sont exclusive-
ment onomastiques, ne laissent pas reconnaître de nuances précises ni
de différences de sens et sont interchangeables, ainsi pour de-ke-se-u :
Δεξεύς, parallèle avec Δέξις, Δεξίας, Δεξώ, cf. Δεξί-χαρις : δέχoμαι
« recevoir » ;

1. Avec <ερρ> dialectal pour <ερι> : Ἐρι°, synonyme de μεγα°, ἀγα°, ὑψι°. Le nom
reflète le phrasème [μέγας – αἶνος], cf. Pind. Nem. 1. 4-6 Δάλου κασιγνήτα, σέθεν
ἁδυεπής | ὕμνος ὁρμᾶται θέμεν | αἶνον ἀελλοπόδων | μέγαν ἵππων, Ζηνὸς Αἰτναίου
χάριν (J.  L.  García Ramón, « Zwei neue Namen auf der Stele der Menandridai
(Krannon): Χειραίνετος und Ἐρραίνας (: Ἐρι-αίνας) und die griechische dichte-
rische Phraseologie », ZPE 159 [2007], p. 179-188).
2. Le nom est l’hypostase d’un *θοὸς ἀνήρ. Le NP Πρoθoήνωρ (Hom.) reflète le croi-
sement de °θόoς et *Θoάνωρ, favorisé par des passages comme Il. 22, 458-9 […]
ἐπεὶ οὔ ποτ’ ἐνὶ πληθυῖ μένεν ἀνδρῶν, || ἀλλὰ πολὺ προθέεσκε, Od. 11, 514 οὔ
ποτ’ ἐνὶ πληθυῖ μένεν ἀνδρῶν οὐδ’ ἐν ὁμίλῳ, || ἀλλὰ πολὺ προθέεσκε (J. L. García
Ramón, « Anthroponymica Mycenaea: 3. Mykenisch to-wa-no /Thowānōr/, home-
risch Πρόθοος und Προθοήνωρ », ŽAnt 50 (2000), p. 205-212).
36 josé luis garcía ramón

c) avec des sobriquets (avec ou sans gémination) on trouve aussi les suf-
fixes onomastiques, par ex. e-ru-to-ro /Eruthros/ : e-ru-ta-ra /Eruthrās/
(: ἐρυϑρός), ko-pe-re-u (: Κoπρεύς, cf. κόπρoς « excrément », wo-ne-
wa (: Οἰνέας, Οἰνεύς, cf. oἶvoς « vin »).
Très souvent une forme « courte » peut être reconnue comme telle
grâce à l’existence d’un composé. C’est, par exemple, le cas de e-ke-si-jo
/Enkhesios/ (KN Cn 4.8) ou /Enkhesiōn/ (: ἐγχεσι° cf. hοm. ἐγχεσίμωροι)
ou de e-ke-a /Enkheh-ās/ (KN V (6) 831.1), cf. hom. ἐγχέσ-παλος : le com-
posé explicite le second membre (ou, au moins, un des seconds membres
possibles) du composé « tronqué ». Il se peut, naturellement, que le com-
posé ou le syntagme sous-jacent ne soit pas attesté : dans ce cas, l’in-
terprétation ne peut être que plausible, par ex. we-we-si-jo /Werwes-ios/
(KN Da 1156.A et al.), probablement une forme « courte » de */werwes-
pokos/, */werwes-komos/ 3, ou le théonyme di-ri-mi-jo /Drīmio-/ (fils de
Zeus dans PY Tn 316 v.10) qui fait pendant avec l’anthroponyme du gr.
alph. Δρίμ-ων, Δριμ-ύλος, Δρίμ-ακος, fém. Δριμώ, qui contiennent hom.
δριμύς « penétrant, piquant » : il peuvent reposer sur un composé non
attesté *δριμυβελής, *δριμύ-τοξος 4 : βέλος ὀξὺ… δριμύ (Il. 11, 269). On
peut donc bien dire que dans chaque anthroponyme à suffixe onomastique
on peut voir ou imaginer l’ombre d’un composé, mais il n’est pas moins
vrai qu’une distinction claire n’est souvent guère possible. Ainsi, po-ro-te-
u : Πρωτεύς, Πρωτέας et po-ro-u-te-u /Ploutēus/ (: Πλoυτεύς, Πλoυτᾶς)
peuvent être des « formes courtes » (par exemple de Πρώτ-αρχoς ou de
Πλoύτ-αρχoς) aussi bien que des noms simples bâtis sur πρῶτoς, πλoῦτoς).

§ 3.  La présente contribution s’occupera des suffixes spécifiquement


onomastiques, c’est-à-dire qui n’ont pas d’autre fonction reconnaissable
– ou seulement dans des cas sporadiques, constituant des archaïsmes
lexicalisés et souvent résiduels : c’est bien le cas du suffixe */-won-/
(indo-ir. *-u̯ an-) attesté dans ὀπάων (Hom.+) ou κοινεών (Hdt.), κοινών
(Xen.+), qui sont pourtant essentiellement onomastiques déjà à l’époque
mycénienne.
3. Sur e-ke-si-jo, e-ke-a cf. C. J.  Ruijgh, Études sur la grammaire et le vocabulaire
du grec mycénien, Amsterdam, 1967, p. 153, 269 ; sur we-we-si-jo /Werwes-ios/,
cf. M. S.  Ruipérez, « Mycenaean we-we-si-jo, Alphabetical Greek εἰρεσιώvη and
Τειρεσίας », Floreant Studia Mycenaea, Vienne, 1999, p. 537-542.
4. C. J. Ruijgh, op. cit., p. 105 ; J. L. García Ramón « En travaillant à une grammaire
du mycénien », Études mycéniennes, Rome, 2012, p. 433-454.
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 37

On laissera donc de côté les suffixes qui, pouvant apparaître dans des
noms propres, ne sont pas exclusivement onomastiques, puisqu’ils appa-
raissent aussi dans des appellatifs communs, avec une forme reconnais-
sable qui évoque leur fonction (ou, au moins, l’une de ces fonctions).
C’est, par exemple, le cas de /-tor-/ qui, bien attesté comme nom d’agent,
apparaît dans des anthroponymes où il peut être analysé comme tel aussi
bien que comme forme « courte » d’un composé : ainsi, myc. ke-to
*/Kens-tōr/ (*k̂ éns-tor-) « qui parle emphatiquement, avec autorité », qui
peut refléter un nom d’agent i.-e. *k̂ éns-tor- (: véd. śáṃstar-, cf. i.-e.
*k̂ ens-, lat. cēnsēt, véd. śáṃsati : v.-aν. sǝ̄nghaitī, aν.réc. saŋhaiti) ou
forme « courte » d’un composé avec */Kens-ti°/ (NP ke-sa-do-ro /Kess-
andros/ [PY, KN], ke-sa-da-ra /Kessandrā/ [PY] : <Κεσανδρα> sur des
vases corinthiens), ou ka-to /Kastōr/ (KN), gén. to-ro /toros/ : Kάσ-τωρ,
nom d’agent de κέκασμαι « se distinguer, exceller » ou forme « courte »
(comme ka-te-u /Kas-tēus/ [KN] de */Kn̥ d-ti-/, cf. Καστι-άνειρα et
Κασσ-άνδρα). C’est aussi le cas du diminutif en -i-ko / -i(s)ko-/ : -ισκος
dans ti-ri-po-di-ko /tripodisko-/ : τριπόδισκος (tardif, Gramm.), wa-ni-
ko : Ἀρνίσκος (Paus.) 5. On rappellera pourtant que certains suffixes, qui
sont attestés dans des appellatifs communs avec une fréquence plus ou
moins élevée, sont extraordinairement fréquents comme suffixes ono-
mastiques, sans que leur fonction originelle soit toujours reconnaissable.
C’est le cas, par exemple, du suffixe individualisant */-ōn-/, e.g. στράβων
(Com.), NP Στράβων (: στραβός « qui louche »), et du suffixe possessif
*/-ōn-/ (*h3on-), e.g. γάστρων « ventru » (Alcée, Ar.), NP Γάστρων.
Dans une première approche il est intéressant de souligner que,
malgré les difficultés de translittération que présentent les mots écrits
en linéaire B, on peut constater l’existence d’une continuité des suffixes
onomastiques attestés en mycénien, que ce soit celle de composés « tron-
qués » ou de sobriquets bâtis sur un seul lexème. Il est le plus souvent
difficile de trancher entre les deux types sauf si l’on a des idées précon-
çues : pratiquement tous les suffixes reconnus en mycénien (ce qui ne
veut nullement dire qu’ils sont spécifiquement mycéniens) sont attestés
en grec depuis l’âge archaïque jusqu’à l’époque impériale. La présen-
tation fort schématique qui suit opère seulement avec des noms qui

5. Po-ri-ko cf. po-ro (KN, avec idéogramme EQU) peut bien recouvrir πωλικός
(Soph.+), cf. πῶλος « poulain ».
38 josé luis garcía ramón

peuvent être considérés comme grecs, c’est-à-dire bâtis à l’aide de suf-


fixes grecs et sur des mots grecs, au sens où ils appartiennent au lexique
grec, qu’ils soient d’origine indo-européenne ou non. On évitera d’opérer
avec des mots non grecs et de plus non intégrés dans le lexique grec,
donc non compréhensibles, dont l’opacité totale ne permet pas l’analyse,
même du point de vue formel. Ceci est, on le sait, fréquent dans le cas
des tablettes de Crète, où la composante non grecque et pré-grecque est
toujours présente.
Rappelons les correspondances entre suffixes onomastiques en mycé-
nien et en grec du premier millénaire sans souci d’exhaustivité (puisqu’il
ne s’agit que d’en constater la continuité) et, conventionnellement, par
ordre alphabétique latin). Outre /-ā-/ (et /-ā-tā-/, type ma-ka-ta /Makhātās/),
/-ēu-/, /-isko-/ on a :
/-ako-/ : re-wa-ko /Leiwako-/ (TH Fq 130.3 et al.) cf. λείαξ « jeune
homme imberbe », dérivé à son tour de λεῖος « lisse » (§ 5) ;
/-ēwā-/ : au-ke-wa /Augēwās/  (PY An 192.4) : Αὐγέας, Αὐγείας,
forme « courte » d’un composé du type Τηλ-αύγης (cf. αὐγή « lumière
du soleil, rayon »), ke-re-wa /Klewās/ (KN Od 666v et al.) : Thess.
Κλεύας ? (cf. Κλε-άνωρ / -ανδρος), wo-ne-wa /Woinēwās/ (PY An
654.2) : Οἰνέας à côté de Οἰνεύς 6 ;
/-i-/ : (dat.) ma-di-je /-iei/ (TH Aν 101.5 et al.), peut-être nom. ma-di
KN As (1) 603.2. Il peut s’agir d’un nom en rapport avec la Perse (cf.
alph. Μήδιος, Μῆδος, Μήδειος), coexistant, de plus, avec /ulo-/ (ma-
du-ro PY Cn 655.19). Dans des cas où /-i-/ coexiste avec d’autres
suffixes du système pour une même base, il peut s’agir d’un suffixe
onomastique. Moins claire est la situation des nombreux noms en
-i à Cnossos, où la composante pré-grecque est toujours présente 7 :
d’après ce critère, une analyse comme hypocoristique grec n’est

6. Sur la base des données tirées du LGPN pour l’Arcadie, A. Morpurgo Davies, « The
Morphology of Personal Names in Mycenaean and Greek: Some Observations »,
dans Floreant Studia Mycenaea, Vienne, 1999, p. 402, se demande si dans la région
les hypocoristiques en -σεύς n’auraient pas remplacé ceux en σέας ainsi que d’autres,
comme paraissent le suggérer les dates de Δρομέας (ve a. C.) et Δρομεύς (ca 402,
Paus. 6, 11, 4).
7. On renverra pour le détail à la discussion d’A. Morpurgo Davies, art. cit.
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 39

possible –  et sous toute réserve 8  – que pour mi-ti (Dl (1) 463.B) /
Milti-/ ? (cf. μίλτος « teinture rouge », « vermillon », myc. mi-to-
we-sa /miltowessa-/) ou bien /Misthis/ (cf. μισθός « salaire », cf. NP
mi-ṣị-ṭọ-se /Misthos/ à Chypre, Μισθόδικος) 9, pa-ti As (2) 1516.17
/Panti-/ ?: Πάντις (Trézène, 146) 10, pu-ri (B (5)799.7 et al.) /Pūri-/ ? :
Πύρις (Thasos ve a. C., cf. πῦρ « feu ») 11, qe-ri /Kwhēris/ (Df 1360b) :
Θῆρις vs qe-re-wa /Kwhērēwās/ (passim ΚΝ, PY) et ru-si[ Ak (1) 364
/Lūsis/ ? : Λῦσις (Cyrène, depuis le ve a. C.) 12 ;
/-id-/ : ke-ki /Kerkid-/ (PY Jn 692 et al.), à côté de plur. ke-ki-de /Ker-
kides/ (groupe d’hommes dans les tablettes o-ka), cf. κερκίς « navette
pour tisser », « baguette » (Hom.+) 13 ;
/-ik(h)o-/ : mo-ni-ko (KN 1988.B) qui peut correspondre au gr. alph.
Μόνικος ou Μόνιχος s’il ne contient pas *monṷo- ;
/-il(l)o-/ : a-ti-ro /Antil(l)os/ (KN Dv 1272.B) : Ἀντίλος (Styra,
ve a. C.), qui présupposent un composé à second membre °λᾱος. Cf.
aussi na-wi-ro /Nāwilos/ ou /Nāwillos/ (KN Db 1507.B) sans corres-
pondant en grec du premier millénaire ;
/-īno-/ : pi-ri-no /Philīnos/  (KN As 1516.6): Φιλῖνος, to-ro-ki-no
/Trokhīnos/ (KN V (6) 831.6) cf. τροχός « roue », ΝP Τρόχεις (Béotie) ;
/-iōn-/ : po-so-ri-jo /Psoliōn/ ou /Psōliōn/ (PY Jo 438, Jn 601.12), avec
gén. -jo-no (Aq 64.7, cf. po-so-ro /Psō̆los/ (An 1281.6 et al.), plutôt
que /Psolō̆n/). Le féminin po-so-re-ja /-eiā/ (PY Eb 173.2 et al.), nom
d’une te-o-jo do-e-ra, parle en faveur d’un sobriquet bâti sur ψόλος

8. Le NP da-wi KN Db 1212 peut recouvrir Δαίς (Athènes, ive a. C.), mais le rapport
avec da-wa-no /°ānōr/ est fort douteux.
9. Cf. NP Μιλτιάδης, et Μιλτο-κύθης (Thrace) et Μισθό-δικος (Athènes), ainsi que le
parallèle formel de Ἄκανθις (: ἄκανθα « épine »), aussi Ἄκανθος.
10. Cf. une série de dérivés Παντ-εύς, -έᾱς, -ίᾱς, -ιχος, -ινος / -ίνᾱς, -ιμος, -ων ; fém.
Παντ-ώι, Πάντ-υλλα, aussi Παντι°, avec °σθένης, °στρατος.
11. Cf. les dérivés Πύριλλος, Πυριλίων (Athènes, 490-480+) et les composés Πυρ-
αίχμης, Πυρι-λάμπης, Πυρι-κλῆς (Athènes, depuis le ve a. C.), Πύρ-ιππος (Stiris
ive-iiie a. C.), Πυρι-βάτης (Lycie).
12. Cf. les nombreux composés avec Λυσ(ι)° et toute sorte de dérivés avec Λυσ-.
13. Les thèmes en /-id-/ sont, comme on le sait, normalement féminins, cf. pi-we-ri-di /
Pīweridi/, pl. pi-we-ri-si /Pīwerisi/ (femmes recevant la laine) : Πιερίς « femme de
Piérie », Πιέριον, cf. masc. pi-we-ri-ja-ta /Pīweriātā-/.
40 josé luis garcía ramón

« fumée » ou ψωλός « déprépucé » 14. Une partie des noms à suffixe


/-ion-/ se sont formés sur la base de dérivés en /-alo-/, ainsi de-u-ka-
ri-jo (PY An 654.12) qui recouvre un Δευκαλίων (cf. Δεύκαλος 15)
ou ka-pa-ri-jo (KN U 4478.14 et al.), dat. -jo-ne : Καρπαλίων, cf.
καρπάλιμος « rapide » 16, du type Πυγμαλίων 17 ;
/-ōi-/ : i-ta-mo (KN Ap 618.1) 18 équivalent du fém. Ἰτάμη (Athènes,
ive a. C.) 19, cf. ἰταμός « hardi, impudent », « vif » (Aesch.). Les noms
féminins en -ώι, qui sont bien attestés à côté des thèmes en -o- et
en -ā- (Ἀργώ nom de vaisseau : ἀργός ; Τυρώ Hom.+ : τυρός « fro-
mage », myc. tu-ro2 ; aussi Πηρώ [Od.]) : πήρα « besace, sac de cuir »
ou bien πηρός « estropié, infirme »), alternent avec des variantes en
-ᾱ-. Ainsi, Φιλώ, Φιλλώ à côté de Φίλη, Θεώ (Attique, Égine depuis
le ve-ive a. C.) à côté de Θεά (Attique, iiie a. C.) ;
/-ōn-/ : a3-to (KN Da 6061) : Αἴθων (cf. αἴθων Hom.+ , αἰθός Pind.),
dat. ma-ro-ne (KN Fh 347.1 et al.) /Maronei/, de /Marōn/* 20 : Μάρων
(Od.), Εὐμάρων, cf. Εὐμάρης (cf. μάρη « main » (Pind.), ko-tu-ro2
/Kotullōn/ ou /Kotull´ōn/ (de */Kotuljōn/), ou pa-ku-ro2 /Pakhullos/,
ou /Pakhull´ōn/ ;
/-ul(l)o-/ : ke-ku-ṛọ /Kerkul(l)os/ (PY Mn 162.3) cf. κέρκος « queue »
« pénis » ou κερκίς « navette » et alph. Κερκύλας 21. La géminée est
notée explicitement dans ko-tu-ro2 (PY Cn 436.6, TH Of 34.1 et al.),
14. Or, pour po-so-ra-ko, personnage différent aussi à Pylos, on peut opérer avec /Psōl-/
(cf. § 5).
15. De *leukalo-, ou bien bâti sur *deu̯ k- (°δεύκης, δευκής ?) cf. J.-L. Perpillou, « Pygma-
lion et Karpalion », dans Mykenaïka. Actes du IXe colloque international sur les textes
mycéniens et égéens, Athènes, 2-6 octobre 1990, Athènes - Paris, 1992, p. 527-532.
16. De *kalp-alimo-, κάλπη « trot » ou bien de καρπός « poignet » (J.-L.  Perpillou,
art. cit., p. 531). Cf. aussi mi-ka-ri-jo (mais gén. mi-ka-ri-jo-jo) : cf. Μικαλλίων,
Μικκαλίων (Dem.), Μίκκαλος, Μικκίων (: μικκός équivalant de μικρός en dorien et
béotien), aussi fém. Μίκα (Aristoph.), Μίκκα (Plut.).
17. Cf. Πυγμαλίων (: πυγμή « poing »), Ποσθαλίων (: πόσθη), Σιμαλίων (: σιμός
« camard »).
18. D’autres formes de Cnossos (a-nu-wa-to, tu-ka-to) demeurent douteuses et peuvent
être non grecques.
19. J. L. García Ramón dans G. Neumann 1994, p. 156. Le masc. Ἴταμος n’est attesté
qu’au iie p. C.
20. Deux attestations de ]ma-ro (KN) ne permettent pas d’assurer qu’il s’agit du nom.
/Marōn/.
21. Cf. aussi nom. NP ke-ki-jo /-kios/ (/Kerko-/ ?), gén. ke-ko-jo (cf. Κέρκων, Κερκίδας),
ainsi que le masculin ke-ki vis-à-vis du fém. Κερκίς.
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 41

qui recouvre /Kotullōn/ ou /Kotull´ōn/ (de */Kotuljōn/) à en juger par


dat. ko-ṭụ-ro2-ne (PY Eb 1347.1), cf. Κοτύλων, Κότυλος, Κοτυλᾶς
bâtis sur κοτύλη « jatte, coupe », κότυλος « coupe », « espace creux,
cavité » et dans pa-ku-ro2 (PY Aq 218.10, Jn 750.8) /Pakhullos/, cf.
παχύς « gros, grossier », παχυλῶς (Arist.). Un suffixe à géminée
/-ullo-/ est donc aussi possible dans ka-pu-ro /Karpul(l)o-/ (KN V (6)
832.2), cf. καρπός et NP Καρπυλλίδης, Καρπᾶς (Paros, iie a. C.) et
dans ma-du-ro (PY Cn 655.19) qui récouvre /Mādul(l)os/ : Μαδύλος
(Cos, ca 200), Μήδυλλος (Rhodes, ier a. C.), cf. Μήδιος, -ικός? ou
bien /Mădul(l)os/, cf. Μαδύης (roi scythe, Hdt.) ou μαδ-αρός « lisse »,
« chauve », « flasque » (μαδάω « être humide », « tomber » [dit des
cheveux]).
/-won-/ : o-pa-wo-* /hOpāwon-/, assuré par fém. o-pa-wo-ne-ja (KN
Fh 339) « femme de l’équipe de /hOpā-wōn/ » (cf. o-pa /hopā/ « tra-
vail », hom. ἕπω « se soucier de »), ainsi que dat. o-qa-wo-ni /hOkwā-
woni/ (nom. o-qa-wo* /hOkwāwōn/ « qui suit / accompagne », cf.
*/soku̯ ā-/, ἕπομαι). Le nom Ὀπάων et le substantif ὁπάων « com-
pagnon, camarade » (Hom.) 22 reflètent la confusion phonétique de
deux termes qui étaient différents en mycénien 23. Cf. aussi ma-ka-wo
/Makhāwōn/ (PY Jn 658.3) : hom. Μαχάων 24.
On constate donc que les dérivés onomastiques attestés en mycénien
se continuent aussi en grec du premier millénaire, ce qui ne doit pas trop
étonner si l’on prend en compte le degré de continuité entre les deux mil-
lénaires dans bien des domaines. L’absence en mycénien de quelques-uns
22. Cf. aussi ion. κοινεών, att. κοινών (Xén.+), κοινάν « camarade, compagnon » (Pind.,
dialectes) qui relèvent de *koi̯ nā-u̯ōn-.
23. Cf. aussi NP a-mu-ta-wo /hAm-huthāwōn/ « Mitkämpfer » (Α.  Heubeck, « Zwei
weitere griechische Belege für idg. * i̯eudh-? », Glotta 63 [1985], p. 2-7), u-ta-jo
/hUthāios/ (H.  Mühlestein « a-mu-ta-wo und u-ta-jo », Glotta 64 [1986], p. 127),
bâtis sur /*huthā-/ « lutte » (i.-e. *Hi̯ udh- « s’agiter », véd. yodh « lutter », avec nom-
racine yúdh-), cf. aussi ὑσμίνη « lutte », qui présuppose *Hi̯ udh-mó- « id. » (: véd.
yudhmá-).
24. Le NP Ἀρετά(ϝ)ων* (: acc. Ἀρετάονα Il. 6, 31, dor. Ἀρετάν) reflète un terme hérité,
qui en indo-iranien était un appellatif commun, notamment véd. r̥ tā́ van- « en accord
avec la justice », av. aṣ̌auuan-, v.-p. a-ra-ta-a-va-a /ərtāwan-/ (*-ā́-u̯an- : i.-e. *-eh2-
u̯ on-), dont la base est véd. r̥ tá-, av. aṣ̌a- (*h2 r̥ -tó-, *h2ár-to- respectivement) qui
forme un aequabile avec gr. ἀρετή « l’eccellenza come ordine aggiustato », comme
l’a démontré L. Μassetti, « Gr. ἀρετή, ved. r̥ tá-, av. aṣ̌a- e l’eccellenza come ordine
aggiustato », MSS 67 / 2 (2013), p. 123-148.
42 josé luis garcía ramón

des suffixes onomastiques attestés au premier millénaire s’explique bien


dans le cadre de l’évolution habituelle d’une langue, mais il n’est pas
moins vrai que quelques-uns d’entre eux doivent avoir existé déjà en
mycénien mais n’ont pas encore été reconnus à cause des déficiences du
matériel en linéaire B.
On ne saurait finir ce paragraphe sans rappeler que la correspon-
dance entre le mycénien et le grec du premier millénaire est totale en
ce qui concerne l’existence de la motion féminine dans certains noms
composés qui, comme on le sait, n’ont pas de forme spécifique fémi-
nine dans les appellatifs communs. C’est le cas de a-ti-ke-ne-ja /Antige-
neia/ (: Ἀντιγένεια) ou celui de l’obscur théonyme i-pe-me-de-ja (PY)
dont seul le second membre /°mē ̆ deia-/ : °μήδεια, °μέδεια est clair, ou
du contraste entre Εὐγένεια et Εὐγένης, tandis que l’épithète commune
εὐγενής n’a pas de forme marquée pour le masculin. Il en va de même
avec le toponyme me-to-re-ja */Metōreia-/ (*metōres-i̯ ă-), attesté dans
le directif me-to-re-ja-de TH 433 (X), qui présente la même structure
que ὑπώρεια « pied d’une montagne » (Hdt. +) « pays qui s’y étend »
(Il. +) et παρώρεια « région au long d’une chaîne de montagnes » (Plb.,
aussi top. Παρώρεια), adj. παρώρειος (Str.) 25 : il s’agit évidemment de
la forme avec motion féminine de me-to-re /Metōrēs/ (KN, PY), dat. me-
to-re-i (TH Fq passim), cf. aussi /Opōrēs/ (dat. o-po-re-i /Opōrehi/ TH
Fq passim). L’existence de la motion dans les noms propres féminins n’a
jamais été mise en doute, sauf, sous grandes réserves, pour le nom, cer-
tainement féminin, écrit o-to-wo-wi-je (o-to-wo-wi-je, tu-ka-te-qe MY V
659.5), dans lequel A. Heubeck prit en considération la possibilité de lire
/Orthwo-wies-/ « aufrecht einherstürmend » (au lieu de *o-to-wo-wi-je-ja
/Orthwo-wieia/) pour terminer en admettant qu’il peut s’agir d’une erreur
du scribe, à savoir l’emploi de la forme masculine (attestée dans les nom.
o-tu-wo-we, dat. o-to-wo-we-i et gén. o-two-we-o / o-to-wo-<we‑>o PY
An, Jn, Vn +) pour la forme féminine correspondante 26.
25. C.  de Lamberterie, « ὀπώρεια : arrière-saison », « ὄρος : montagne », Chronique
d’étymologie grecque 8 (= RPh 77), p. 129-131 ; C. de Lamberterie, « L’apport du
mycénien à l’étymologie grecque », Études mycéniennes, Rome, 2012, p. 489-509 ;
J. L.  García Ramón, « Two personal names (dat. me-to-re-i and o-po-re-i) and a
place name (direct. me-to-re-ja-de) in Mycenaean Thebes », dans I. Gulizio et al.
(éd.), Ke-ra-me-ja (Studies Cynthia Shelmerdine), Philadelphie, 2014, p. 283-292
(envoyé 2010).
26. A. Heubeck, « Mykenisch otowowije », SMEA (1967), p. 35-39. L’interprétation ne
va pas sans difficultés, même pour les noms d’homme : outre le fait que les noms
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 43

On a proposé récemment de voir des noms féminins à suffixe non


féminin dans (dat.) o-po-re-i (le prétendu Zeus des tablettes thébaines
d’après leurs éditeurs) et dans ru-ta2-no, nom de femme dans KN Ap
639. Pour le o-po-re-i /Opōrehi/ thébain, nom d’un destinataire masculin
/Op-ōrēs/* (ὀπί [: ἐπί], ὄρoς « montagne », donc « qui est / habite sur le(s)
montagne(s) », cf. Hom. ἐπ᾽ ἀκροπόλοισιν ὄρεσσι Il. 5, 523), A.  Ber-
nabé 27 propose de voir une divinité féminine (« no debemos descartar otra
posibilidad que sólo el prejuicio triádico o un machismo recalcitrante ha
impedido ver hasta la fecha, … : la de que se trate de un nombre de diosa
de la montaña… ») : c’est plutôt au common wisdom de la motion des
noms propres qu’il faut attribuer le fait que personne n’avait prétendu
voir un féminin dans le dat. o-po-re-i. Il en est de même pour l’interpréta-
tion de ru-ta2-no KN Ap 639.12 comme nom féminin */Lū ̆ tiā ̆ nōr/, forme
de laquelle est issu le NP masculin Λυσάνωρ 28 : imaginer un féminin en
/°ānōr/ c’est ignorer l’existence de /°andrā-/ en mycénien a-re-ka-sa-da-
ra /Aleksandrā/ (: Ἀλεξάνδρα), ke-sa-da-ra /Ke(n)s-andrā-/, et ceci sans
compter que la tablette en question ne contient que des noms de femme
non grecs, ce qui fait penser que ru-ta2-no est aussi non grec. On ne s’at-
tardera pas à réfuter en détail des explications gratuites qui s’écartent de
la grammaire élémentaire du grec et rendent toute discussion impossible.

§ 4.  En partant de la cohérence dans l’essentiel des procédés de déri-


vation dans l’onomastique en mycénien et en grec du premier millénaire,
l’interprétation de certains noms de personne mycéniens (ou chypriotes)
peut être clarifiée dans le cadre d’un système, ou micro-système, de suf-
fixes dans lequel l’attestation de l’un ou l’autre suffixe dans le nom qui
forme la base de dérivation peut justifier la présence d’autres suffixes
même si la forme n’est pas attestée en grec alphabétique.
C’est, par exemple, le cas des noms o-ki-ra (PY Cn 285.13) et o-ko
(PY Cn 436.4), auxquels on peut ajouter o-ke-u (PY Ea 259, 814).
à premier élément Ὀρθο- ont régulièrement un second membre nominal (°δαμος,
°μένης, °κλῆς), le o-to-wo-wi-je féminin est attesté à côté des noms de femme non
grecs ri-su-ra .3 et ke-ti-de .8. Non liquet, et le prétendu nom de femme en /-ēs/
s’avère écartable.
27. A.  Bernabé, « Posibles menciones religiosas en la tablillas de Tebas », Simposio
Internacional 55 años de Micenología, Barcelone (2007), Faventia, 2012, p. 204.
28. Référence à un mémoire de licence inédit de T.  Meixner (2006) dans K.  Stüber,
U. Remmer, T. Zehnder, Indogermanische Frauennamen, Heidelberg, 2009, p. 116.
44 josé luis garcía ramón

On connaît bien l’existence de o-ki-ro /Οrkhilos/ (KN Dv 1509.B) qui


reflète le zoonyme ὀρχίλoς « roitelet » 29. La simple prise en considé-
ration des doublets /-os/ : /-ās/ dans l’onomastique permet de translit-
térer o-ki-ra comme /Οrkhil(l)ās/, qui trouve un parallèle direct en grec
alphabétique, où l’on a les noms Τροχίλoς et Τρoχιλλᾶς (Αttique) reflé-
tant un autre zoonyme, très proche de ὀρχίλος, en l’occurrence τρoχίλoς
« pluvier à tête noire » ou « roitelet ». L’association de ὀρχίλoς avec
ὄρχις « testicule » était sentie, même avec des effets comiques, en grec
(Ar. Av. 568… βασιλεύς ἐστ’ ὀρχίλος ὄρνις, | ᾧ προτέρῳ δεῖ τοῦ Διὸς
αὐτοῦ σέρφον ἐνόρχην σφαγιάζειν). Le terme est, de fait, aussi pré-
sent dans o-ko, que j’ai proposé d’interpréter comme /Orkhōn/ 30, bâti
sur ὄρχις « testicule » (type ῾Ρίνων : ῥίς « nez », cf. lat. Nasō : nās). Le
grec offre bien des parallèles pour la sémantique, cf. Κέρκων (: κέρκoς,
Hsch. κέρκoς· oὐρά. καὶ ἀνδρεῖoν αἰδoῖoν), Κρίθων (: κριθή « orge »,
aussi synonyme de πόσθη, πέoς Αrist. Pax 965,967, cf. aussi Kριθεύς,
Κριθύλoς), Μύσχων (:  μύσχoν· τὸ ἀvδρεῖoν καὶ τὸ γυvαικεῖoν μόριoν
Hsch.), Πόσθων (: πόσθη) et d’autres. On peut aussi interpréter o-ke-u
comme /Orkhēus/, qui aurait des parallèles de sens dans les sobriquets
Κερκεύς, Κριθεύς, Μυσχεύς, Ποσθεύς.
D’autre part. le nom da-te-wa KN V (2) 147.4 se laisse bien inter-
préter comme /Dait-ēwās/ (: δαίς « banquet »), inséparable de e-u-da-i-ta
/E(h)u-daitās/, alph. Δαίταρχoς), en vue de l’existence en grec alphabétique
d’une série Δαίτ-ας (-ης) : Δαῖτ-ις : Δαίτ-ιχoς : Δαίτ-ων, tout comme on
a Ἀριστ-έας (et Ἀριστ-εύς) dans la série de Ἀρίστ-ας : Ἄριστ-ις : Ἀρίστ-
ιχoς : Ἀρίστ-ων, ou Κυδ-έας (et Κυδεύς) dans celle de Κύδ-ας : Κῦδ-ις :
Κύδ-ιχoς : Κύδ-ων ou celle de Πρωτ-έας (et Πρω/ατεύς) dans celle
de  Πρώτ-ας : Πρῶτ-ις : Πράτ-ιχoς : Πρώτ-ων. La coexistence de myc.
/-ēwā-/ : -έᾱς et /-ēw-/ : -εύς laisse penser que -έᾱς procède de *-ēu̯+ā- 31,
29. Grec ὀρχίλoς a un parallèle formel dans lit. erž̃ ilas « étalon », aussi « jeune homme
non marié », lett. Erzelis, sur lequel cf. D. Petit, « Lituanien Erž̃ vilkas : une formule
poétique indo-européenne ? », dans G.-J. Pinault, D. Petit (éd.), La langue poétique
indo-européenne, Louvain - Paris, 2006, p. 343-366.
30. P. Ilievski, « The Personal Names from the Knossos D Tablets », dans Mykenaïka,
p.  321-349, p. 336 ; J. L.  García Ramón, « Anthroponymica Mycenaea: 1. Myke-
nisch o-ki-ro, alph.gr. ὀρχίλος. 2. Mykenisch da-te-wa /Daitēwās/ und e-u-da-i-ta,
alph.gr. Δαίτας, Πανδαίτης », Minos 35 (2000-2001), p. 431-436.
31. A. Leukart, Die frühgriechischen Nomina auf -tās und -ās, Vienne, 1994, p. 112 sq. ;
M. Peters, Untersuchungen zur Vertretung der Laryngale im Griechischen, Vienne,
1980, p. 301 n. 251 ; J. L. García Ramón, art. cit., Minos 2001, p. 440 sq.
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 45

cf. en particulier les doublets ma-re-wa /Malēwās/ (Μαλέας) : ma-re-


u* (KN  : gén. ma-re-wo /Malēwos/, Μαλεύς) et ta-re-wa /Thalēwās/*
(Θαλέας, -ᾶς) : ta-re-u /Thalēus/.

§ 5.  L’interprétation des anthroponymes mycéniens se heurte, on le


sait, à des difficultés inhérentes aux limitations du linéaire B. Dans le cas
de noms d’une certaine longueur on ne peut même pas toujours distinguer
entre composés et dérivés : une décision doit être prise au cas par cas,
en fonction de ce que le grec du premier millénaire peut nous offrir dans
un sens ou dans l’autre. Une révision du dossier des noms mycéniens
en -(C)a-ko, qui peuvent recouvrir des sobriquets dérivés en /ako-/ (ou
/āko-/) aussi bien que des composés avec /°arkhos/ ou /°āgos/, exem-
plifie très bien les limitations et les possibilités d’interprétation qui
s’offrent. On rappellera que les dérivés (non exclusivement onomas-
tiques !) en -αξ, source de ceux en -ακος 32, ont souvent une connota-
tion péjorative par rapport à l’appellatif ou à l’adjectif qui leur sert de
base dérivationnelle, p. ex. πλοῦταξ « richard » (: πλοῦτος), στόμφαξ
« charlatan » (: στόμφος « propos emphatique »), νέαξ (: νέος), γαύρηξ
« arrogant » (: γαῦρος « joyeux »). On connaît une série de noms propres
bâtis sur des appellatifs et sur des adjectifs : parmi les premiers, on rap-
pellera Ἵππακος (: ἵππος), Μίλακος (: (σ)μῖλος « if, sorte de chêne »,
cf. aussi (σ)μῖλαξ), Βώτακος (: βωτίον· στάμνιον « gobelet pour vin »),
Δρώπακος,Thess. Δρούπακος (: δρώψ· ἄνθρωπος Hsch.) ; parmi les déa-
jectivaux, Ἄβρακος (: ἁβρός « tendre »), Βύττακος (: βυσσός « pro-
fond », cf. aussi βυσσακός et βύττος· γυναικὸς αἰδοῖον Hsch.), Γύρακος
(: γυρός « rond »), Δρίμακος (: δριμύς « perçant »), Κυρίακος (: κύριος
« fort »), Σίμακος (: σιμός « camard »).
Le dossier des noms propres en -Ca-ko en mycénien est fort réduit,
mais hétéroclite. On les passera en revue par ordre alphabétique :

32. Les mots en -ακος se laissent analyser soit a) comme -a-ko- avec des noms en
-ā̌-, soit b) comme -ak-o- avec des thèmes en -ā̌k-. Pour (a) cf. Ἅρπακος, Ἅρπαξ
(: ἅρπη· ἄνεμον. δρέπανον. ἢ ὀρνέου γένος, κατὰ Λατίνους], Εὐδίακος (: εὐδία
« beau temps »), Λύρακος (: λύρα), Πάλακος (: πάλα· ζώνη Hsch.) Πίττακος
(: πίττα « poix, résine »), Σείρακος (: σειρά « corde »). Pour (b) cf. Δόνακος (: δόναξ
« Arundo donax », aussi NP Δόναξ).
46 josé luis garcía ramón

a-da-ra-ko[ KN X 793 (dat.) peut recouvrir un composé /Andr-arkhōi/


comme l’a proposé P.  Ilievski 33. La formation est reconnaissable
comme un composé du type ἵππαρχος et on a bien, pour le sens, NP
Ἄρχανδρος. On remarquera, en tout cas, qu’il n’y a pas de corres-
pondant direct en grec du premier millénaire : pas d’attestation d’un
composé *Ἄνδρ-αγος ni *Ἄνδρ-αρχος, encore moins de sobriquet
*Ἄνδρακος ;
pe-ra-ko TH Fq 257.4 : Φέρακος (nom d’un Crétois à Milet, 228-227
a. C.) est une variante formelle de *Φεράκης (qui serait l’adjectif en
°ακής régulier), synonyme de ἀκεσφόρος « qui porte remède » (cf.
Eur. Ion 1005 τὸν μὲν θανάσιμον, τὸν δ’ ἀκεσφόρον νόσων), et reflé-
tant la collocation [φέρει ἄκος] (Pind. Nem. 3,18 ἄκος ὑγιηρὸν…
τὸ καλλίνικον φέρει. Les variantes onomastiques en -ος au lieu de
-ης régulier au second membre de composé du type °γενής, °τελής
sont attestées pour quelques lexèmes : on a ainsi °αλκος vs °άλκης
(Εὔαλκος, Μέναλκος : Εὐάλκης, Μενάλκης), ou °ανθος vs °άνθης
(Κλέανθος, Φίλανθος : Κλεάνθης, Φιλάνθης) et, concrètement,
Ἔξ-ακος vs Ἐξ-άκης (cf. Ἐξάκεστος) ou Ἄνακος au lieu de *Ἀνάκης
correspondant à ἀνακής « non guérissable » (Soph.+), ἀνήκεστος
(Hom.) 34 ;
po-ma-ko PY Cn 45.15 demeure obscur ;
po-so-ra-ko PY Jn 725.8 recouvre un sobriquet, soit /Psol-akos/ derivé
soit de ψόλος « fumée », cf. ψόλος· καπνός, αἰθάλη, φλόξ, ἀσβόλη
Hsch.), ψολόεις « fumant, fumeux », soit /Psōl-akos/, de ψωλός
« déprépucé », ψωλή « gland » (Aristoph.), comme me l’indique Lau-
rent Dubois : les formes Ψολων (Athènes ca 420) en alphabet ionien 35
et [ ]ολεας (ibid., ca 560) ne permettent pas de décider. Cf. aussi po-
so-ri-jo (§ 3) ;
pu-ra-ko[ KN Xd 141, si le mot est complet, peut être un sobriquet
/Phulakos/ (: φύλαξ « gardien »), aussi φυλακός (Hom.+) cf. Φυλάκα,

33. P. Ilievski, « A-da-ra-ko », ŽAnt 18 (1968), p. 216.


34. J. L.  García Ramón, « Anthroponymica Mycenaea: 4. Mic. pe-ra-ko /Pherakos/,
gr.alf. Φέρακος y el topos ἄκος φέρειν, ἀκεσφόρος », dans F. Poli (éd.), De Cyrène
à Catherine (Mélanges Dobias-Lalou), Nancy, 2005, p. 101-110.
35. La graphie ne permet pas de préciser la quantité du /o/ pour ce nom, car à cette
époque il y a des oscillations entre <o> et <ω> pour la notation de /o:/, comme me
l’indique Alcorac Alonso Déniz.
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 47

Φυλακίνη, Φυλακίων, aussi bien qu’un composé /Phūl-arkhos/


(: Φύλαρχος Eubée, cf. pour le sens Ἀρχέφυλος), qui est aussi attesté
comme appelatif commun « chef d’une tribu » (pap.). Non liquet ;
pu-za-ko PY Cn 328.14 recouvre un sobriquet /Phudzakos/ 36, dérivé
de φύζα « fuite honteuse » (Il. 9, 2 φύζα, φόβον κρυόεντος ἑταίρη,
15, 62 ἀνάλκιδα φύζαν ἐνόρσας), qui serait en plus à la base de
l’hapax homérique φυζακινός « fuyard, lâche » (Il. 13, 102 φυζακινῇς
ἐλάφoισι), cf. ἅλιoς « de la mer, marin » (Hom.+) : ἁλινός « de sel »
(Hdt.). On pourrait penser aussi à un sobriquet /Phuskakos/ (cf. φύσκη
« (gros) intestin, boudin » Sophr., φύσκη· κοιλία, καὶ τὸ παχὺ ἔντερον
Hsch.), comme me signale J. L. Melena (per litteras) : le terme est
à la base de φυσκώv « ventru » (φύσκων· γάστρων, παχύς Hsch.)
Plut.+) et de plusieurs sobriquets, par ex. Φύσκων « id. » (de Pittakos
chez Alcée ; Plb.+), Φύσκα, Φυσκίων. L’une ou l’autre possibilités
sont sûrement plus satisfaisantes que l’interprétation comme un com-
posé /Phuz-agos/ « der (die Feinde) in die Flucht treibt » 37 ;
pu2-ṣị-ja-ko PY Jn 310.17, dont le deuxième signe est obscur, pourrait
recouvrir /Phūsi-arkhos/?, un composé au sens obscur, dont gr. alph.
Φύσων, Φυσέας pourraient être des formes « courtes ». Non liquet ;
qa-sa-ko ΚΝ C(4) 912, Dd 1283.B recouvre un composé /Kwās-
arkhos/ « qui a acquis / possède le pouvoir » (: Πάσαρχoς) avec pre-
mier membre *ku̯ ās(i)° de aor. πᾱσα- « acquérir », perf. πέπᾱμαι
« posséder » (synonyme de κτάομαι‚ « id. »), dont qa-ti-ja KN As(2)
1519.4, Fh 355 serait une forme « courte » /Kwā(s)tiās/ (équivalent
pour le sens à Κτησίας), comme j’ai essayé de le montrer 38. Le com-
posé serait équivalent de Κτήσαρχoς, et reflèterait la collocation [τὴν

36. Č. B. Čop, « Zwei mykenisch-griechische Wortdeutungen », ŽAnt 8 (1958), p. 254


n. 25.
37. Comme le propose G. Neumann, « Wertvorstellungen und Ideologie in den Personen-
namen der mykenischen Griechen », Anzeiger der phil.-hist. Klasse der Österreichi-
schen Akademie der Wissenschaften 131, Vienne, 1995, p. 136 (« *Phugj(a)-agos »).
Cette interprétation se heurte à de sérieuses difficultés : φύζα « fuite » n’est pas
attesté en composition, ni comme but de ἄγω. De plus, le premier membre de com-
posés avec °ᾱγoς n’indique pas le but auquel on conduit, mais l’objet qu’on conduit.
38. J. L.  García Ramón, « Mycénien qa-sa-ko /Kwās-arkhos/, grec alphabétique
Πάσαρχoς, Κτήσαρχoς et le dossier de *ku̯ā(s)- dans la langue des tablettes », dans
L. Dubois, E. Masson (éd.), Philokypros, Salamanque, 2000, p. 153-176. Sur qa-ti-
ja cf. déjà C. J. Ruijgh, op. cit., p. 156 n. 301 (« Kwᾱστίᾱς » ou « Kwᾱτίᾱς » comme
48 josé luis garcía ramón

ἀρχὴν κτήσασθαι / κεκτῆσθαι], cf. Hdt. 6.34 κτησαμένoυ τὴν ἀρχὴν


ταύτην, Hdt. 3.73 ἀνακτᾶσθαι τὴν ἀρχήν, Thuc. 7.66.2 καὶ ἀρχὴν τὴν
ἤδη μεγίστην τῶν τε πρὶν Ἑλλήνων καὶ τῶν νῦν κεκτημένoυς 39 ;
qi-si-ja-ko PY Jn 706.6 recouvre un composé /Kwī̆si-arkhos/ « qui
honore celui qui commande » (: T[ε]ίσ-αρχoς), probablement un com-
posé instrumental-factitif « celui qui rend X honoré » du type reconnu
par J.  Schindler, cf. Il. 1, 412 ὅ τ’ ἄριστoν Ἀχαιῶν oὐδὲν ἔτεισεν),
dont le NP Τιμήσ-αρχoς est le continuateur formel avec remplace-
ment de τίω par le dénominatif τιμάω au premier membre 40 ;
re-wa-ko TH Fq 130.3 et al. recouvre un sobriquet /Leiw-ako-/
« imberbe », cf. λείαξ « jeune homme imberbe » 41 (λείαξ· διὰ τῆς ει
διφθόγγου. παρὰ γὰρ τὸ λεῖον γέγονε λείαξ Hérodien dans EM, λίαξ·
παῖς ἀρχιγένειος (aussi Hsch.), dérivé de λεῖος « lisse » (i.-e. *leiu̯o-,
cf. lat. lēuis), dit de lieux chez Homère (ἐν λείῳ πεδίῳ Il. 23, 359,
λείην ὁδόν Od. 10, 103, χῶρος… ǁ λεῖος πετράων Il. 5, 442-443),
aussi d’animaux « sans poil » (Arist. Hist. Anim. 583a6 λειότατον τῶν
ζώων ἐστὶν ἄνθρωπος), « sans barbe » (Theocr.) ;
si-ra-ko KN Ai (3)5796.1 et al. peut être interprété comme un sobri-
quet /Sir-akos/ bâti sur σιρός « cavité souterraine pour garder le blé »
(cf. σιρός· πίθος, δεσμωτήριον, Hsch.) avec une correspondance
exacte dans Σίρακος (Kuphaira, 326), Σίρων (Stratos, ive-iiie a. C.),
Σίραχος (Olbia, iie a. C.), plutôt qu’un composé /Sir-arkhos/, que
l’on a prétendu voir dans le nom de métier si-ra-ko /sir-arkhoi/ (KN
Ai 5976.1) qui a été interprété par J.-P.  Olivier comme « chefs de
prison » 42 ;

hypocoristique d’un nom comme béot. Θιόππαστος), sur le rapport avec qa-sa-ko cf.
J. L. García Ramón, op. cit., p. 164.
39. On notera l’existence de variantes formelles avec des synonymes, cf. τὴν βασιληίην
κτήσασθαι (Hdt. 3, 89, 1), τὴν τυραννίδα κτήσασθαι (Hdt. 8, 137, 1), ἀρχὴν σχεῖν
(Ηdt. 1, 7, 4, et 1, 98, 3).
40. A.  Vegas Sansalνador, « En torno al antropónimo micénico qi-si-ja-ko », dans
H.  Eichner et al. (éd.), Compositiones Indogermanicae (Gs Jochem Schindler),
Prague, 1999, p. 545-553.
41. J. L. García Ramón, « Zur Onomastik der neuen Texten aus Theben », dans S. Deger-
Jalkotzy, O.  Panagl (éd.), Die neuen Linear B-Texte aus Theben, Vienne, 2006,
p. 37-52.
42. J.-P.  Olivier, « Des extraits de contrats de vente d’esclaves  dans les tablettes de
Knossos », dans J. T. Killen, J. Melena, J.-P. Olivier (éd.), Studies John Chadwick =
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 49

we-re-na-ko TH 123 [*3] et al. 43, nom d’un receveur de grain 44,


pour lequel on s’accorde à reconnaître */wrēn-/ « brebis », variante
de ἀρήν (*u̯ r̥ h1en-) : les deux termes sont attestés comme des syno-
nymes chez Homère, cf. πολύρρηνες « riche en troupeaux » (Il. 9,
154 ἐν δ’ ἄνδρες ναίουσι πολύρρηνες πολυβοῦται), thématique nom.
sg. πολύρρηνος (Od. 11, 257) vis-à-vis de dat. πολύαρνι Θυέστῃ (Il.
2, 106) 45. Les deux variantes sont attestées en mycénien, dans des
dérivés : d’un côté, we-re-ne-ja /wrēneiā/ (PY Ub 1318.7) « peau
de brebis, de mouton », de l’autre le NP ]ẉạ-ni-ko /Warniskos/ (PY
An 478.4 : Ἀρνίσκος) 46. Deux possibilités d’interprétation s’offrent
pour we-re-na-ko, notamment (a) comme sobriquet /Wrēn-ako-/ et (b)
comme composé /Wrēn-āgos/, sans que, on le verra, l’une s’impose à
l’exclusion de l’autre, car on trouve des parallèles dans l’onomastique
du premier millénaire pour l’une et pour l’autre.
Pour (a), cf. les anthroponymes Ἱππακός (: ἵππος), Χοίρακος (: χοῖρον
« petit cochon », aussi Χοῖραξ, cf. patron. Χυράκιος, Tanagra, iiie a. C.),
Ψύλλακος (: ψύλλα « pouce »), parmi d’autres 47.

Minos 20-22 (1987), p. 488-491. La translittération comme *σειραγός ou *σείραρχος


[sic] (Olivier p. 490) « chef de la corde » (celle qui lie les esclaves, bien sûr) » est
phonétiquement insoutenable.
43. Le nom est traité en détail dans J. L. García Ramón, « Anthroponymica Mycenaea:
5. a-wi-to-do-to /Awisto-dotos/ und die unsichtbaren Götter im Alph.-Griechischen.
6. we-re-na-ko und Myk. */wrēn/: alph. gr. °ρρην-, ἀρήν », ŽAnt 55 (2005), p. 85-97.
44. Mentionné à proximité de zo-wa ou qe-re-ma-o (qui sont aussi des anthroponymes
au datif), cf. TH Fq 240. 5̣ ]1. we-re-ṇạ-ko V1 Z 2 zo-wa V1 ; Fq 241.[5̣] we]ṛẹ-na-ko
V1 Z 2 zo-wa V1) ; Fq 258.[4] qẹ-ṛẹ-ma-o
̣ V.1 Z 2. we-re-ṇạ-[ko / zo-wa V 1.
45. Le simple ῥήν est aussi attesté (CHipp, ῥήνεσσι Ap. Rhod. 4, 1947), cf. aussi
les gloses ῥᾶνα· ἄρνα (éléen), ῥῆνιξ « peau d’agneau », ou le toponyme Ῥηναία
(HHApol.), ethnique Ῥηναεύς (Hypér. fr. 70).
46. Le degré zéro est aussi attesté dans wo-ro-ne-ja (MY Oe 111.2) /wroneiā/ « laine
de mouton » ou neutre /-eiă/ avec idéogramme LANA (cf. ἀρνέα « peau d’agneau »
Hdn.) MY Oe 111.2 (*/worn-/ avec métathèse, ou bien */wr̥ n-/ avec /r̥ / conservé),
ainsi que wo-ne-we /wornēwes/ « animaux jeunes » (PY Cn 40.2 et al.) par opposi-
tion à pa-ra-jo /palaioi/ « vieux » .1.5.8, cf. ἀρνευτήρ « plongeur en avant (comme
un mouton) », ἀρνειός « bélier », ἀρνεύω Lyc.), comme le montre M. Peters « Ein
weiterer Fall fur das Rixsche Gesetzt », dans G. Meiser (éd.), Indogermanica et Ita-
lica, Innsbruck, 1993, p. 387-391 (« junge Widder »).
47. Cf. aussi Βαττάρακος (: βαττάρα « renard » ou bien cf. βατταρίζω « bégayer, balbu-
tier »), Βάρβακος, Βάρβαξ (: βάρβαξ· ἱέραξ, παρὰ Λίβυσι Hsch.), Κόρακος, Ϙόραξ
à Théra (: κόραξ « corbeau »).
50 josé luis garcía ramón

Pour (b) /Wrēn-āgo-/ « qui conduit des brebis » on a une correspon-


dance quasi-exacte, à la variation du premier élément près, dans le NP
Ἄρναγος (Pythion, iiie a. C.), Ἄ[ρν]αγος (27-14 a. C.) 48. Il est vrai que
ἀρήν / ῥήν comme objet de ἄγω est attesté pour la première fois chez
Lucien (De sacrificiis 12 προσάγουσι τὰς θυσίας…, ἄρνα δὲ ὁ ποιμήν…).
Mais le sens du composé est plausible et il y a des parallèles avec °αγός
(: ἄγω), ainsi qu’avec le synonyme ἄρνα… ἐλαύνω (Od. 9, 226-227…
ἄρνας ǁ σηκῶν ἐξελάσαντας). De fait la collocation [animal – ἄγω] est
bien représentée dans la composition nominale (avec d’autres types de
composés aussi), ainsi que dans l’onomastique, ainsi avec « chien » (NP
Κύναγος : κυναγός [Aesch.], κυνᾱγέτας, κυνᾱγέτις [Hom., Pind.]48, déjà
en mycénien dat. pl. ku-na-ke-ta-i /kunāgetāhi/) 49, avec « cheval, pou-
lain » (ἱππαγωγός « qui sert au transport de chevaux » [dit de πλοῖα, νέες
Hdt.+], ἱππηγός [Plb.+], chypr. po-la-ka-te-se /Pōl-aktēs/ ICS 352a.B3
[ºag-tās]), avec « vache » (: myc. qo-wa-ke-se-u /Gwōwaksēus/) et les
noms de fêtes Βοήγια et sim. (§ 10).
Il en résulte donc que we-re-na-ko peut parfaitement être un composé.
On ne retiendra pas comme objection décisive le fait qu’il n’y ait pas
d’attestation incontestable de composé de /°āgos/ en mycénien, où l’on
ne trouve que /°āg-etās/ cf. ra-wa-ke-ta /lāw-āgetās/ (: λᾱγέτας [Pind.])
vis-à-vis de -ᾱγος dans NP Λᾶγος avec le synonyme Κόρραγος), ou de
thess. Λαγειταρρα (*lāu̯-āgetori̯ a-), épithète d’Athéna 50 à Larissa.
En conclusion, le dossier des noms en -(C)a-ko laisse un bilan
contrasté : des composés (a-da-ra-ko-, pe-ra-ko, qa-sa-ko, qi-si-ja-ko),
des sobriquets en /-akos/ (po-so-ra-ko, re-wa-ko, si-ra-ko) et quelques
formes où les deux analyses sont possibles, notamment pu-ra-ko et
we-re-na-ko.

§ 6.  La continuité entre le mycénien et le premier millénaire peut


être illustrée par les formes « courtes » en /°s-ēus/ : °σ-εύς et par les

48. On ne saurait y voir une forme « courte » de Ἀρναγόρας (Azoros, Thessalie,


27 a. C.).
49. Une translittération avec /°hāgetās/ (: ἁγέτᾱς Pind. Nem. 6, 14, de ἡγέομαι) ou
comme /°arkhetās/ (de ἄρχω) serait possible du point de vue purement formel (dis-
cussion d’A. Leukart, op. cit., p. 295), mais certainement à écarter pour le sens.
50. B. Helly, « À Larisa. Bouleversement et remise en ordre de sanctuaires », Mnemo-
syne 23 (1970), p. 250-296.
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 51

composés à deuxième élément en /°-sēus/ et en °σος. On sait que les


noms à lexème unique en /°s-ēus/ (: °σ-εύς) laissent reconnaître le pre-
mier membre d’un composé du type τερψίμβρoτoς. Les noms en /°s-
ēus/ sont fort fréquents dans l’onomastique mycénienne, à une échelle
proportionellement plus large qu’en grec du premier millénaire, et, dans
les deux cas, en concurrence avec d’autres suffixes largement attestés
(°σέᾱς °σίᾱς, °σις, °σ[ί]-ωv, °σoς pour les noms d’hommes, °σώι pour
les féminins). En général, le premier membre des composés du type
τερψίμβρoτoς laisse reconnaître un thème verbal sigmatique (aoriste,
aussi futur) ou bien reflète soit un radical élargi en -s-, soit une formation
en -s- dont l’existence et le sens doivent être précisés, si possible, à l’aide
de la comparaison. On a ainsi pour le type τερψίμβρoτoς un schéma :
/°sēus/ (: °σ-εύς) : /°s(i)-X/ (: °σ(ι)-X) :: -s- (aoriste, ou élargissement
ou morphème) 51.
Le dossier mycénien inclut les noms suivants 52 :
a-re-pe-se-u /Aleipsēus/ (TH Av 106.6), forme « courte » de
*ἀλειψ(ι)°, cf. ἀλείφω « oindre » 53, aor. ἀλειψα- ou ἄλειψις (Hdt.+),
ἀλείπτης « qui oint les athlètes » (Arist.), ἀλειφεύς (Priène, imp.),
aussi myc. a-ro-po /aloiphoi/ PY An 199.2 « ceux qui oignent » 54.

51. Le type τερψίμβρoτoς, βωτιάvειρα a normalement le degré plein ou long, mais aussi
le degré zéro, si c’est celui-ci qui se trouve dans la racine, par ex. Καστι-άvειρα
(: κέκασμαι, Καστι° de *kad-ti°- < *k̂n̥ d-, k̑ end, cf. J. L. García Ramón, « Homé-
rico κέκασμαι: védico śāśad, protoario *sćand, IE *(s)ḱend- “aparecer, hacerse
visible” », Sprache 34, 1988-1990, p. 27-58.). En général, le vocalisme du premier
membre du composé coïncide avec celui de l’aoriste sigmatique, tel qu’il est attesté
en grec, ainsi Λυσι° : aor. λυσα-. La comparaison avec le védique permet de consi-
dérer le type βωτιάvειρα comme ancien, à en juger par des formes aussi bien à degré
plein (dā́ ti-vara- « qui donne des cadeaux » RV : *deh3-ti°, cf. le théonyme fém.
Δωτώ Ηés.) qu’à degré zéro (NP puṣṭi-gú- « qui nourrit des vaches » RV).
52. Données tirés d’Α.  Heubeck, « Bemerkungen zu einigen griechischen Personen-
namen auf den Linear B-Tafeln », BzN 8, 1957, p. 28-32 (= Kl. Schr., p. 473-
477), « Weitere Bemerkungen zu den griechischen Personennamen auf den Linear
B-Tafeln », BzN 8, p. 268-278 (= Kl. Schr., p. 481-490) ; J.-L. Perpillou, Les sub­
stantifs grecs en -εύς, Paris, 1973, p. 222 sq.
53. N. Guilleux, compte rendu de L. Aravantinos, L. Godart, A. Sacconi, Thèbes, fouilles
de la Cadmée, Pise, 2001, BSL 98 (2003), p. 262-268, p. 266.
54. Cf. J.-L. Perpillou, op. cit., p. 125. La racine est bien attestée en mycénien, cf. a-ro-
pa : hom. ἀλοιφή, a-re-pa /aleiphar/ et A+RE+PA, e-na-ri-po-to /enaliptos/ « oint »
(cf. ἐνάλειπτος).
52 josé luis garcía ramón

a-re-ke-se-u /Aleksēus/  (KN Da 1156.B) : Ἀλεξεύς (Argos, 303),


Ἄλεξις, Ἀλεξᾶς, Ἄλεξος (9× : Delos, 530+), Ἀλεξομενός, Ἀλεξίουν
(Atrax, ive a. C.), Ἀλεξώ : Ἀλεξί-δημoς, Ἀλεξί-κακoς, Ἀλεξί-μβρoτoς
de ἀλέξω « écarter (un malheur) », d’où « défendre, protéger », aor.
ἀλεξα- (i.-e.*h2lek-s- : véd. rakṣ, rakṣijana- « protecteur du jana- »).
On a aussi a-re-ki-si-to /Aleksi-tos/, gén. -si-to-jo (KN So (2) 433b.
et al.)  forme « courte », comme fém. Ἀλεξιτώι, de Ἀλεξι-τέλης,
Ἀλεξί-τιμος ;
a-we-ke-se-u /Aweksēus/, dat. -se-we (PY Cn 285.5 et al.) : *Ἀϝεξεύς,
cf. ἀεξί-γυιoς (Pind.), ἀεξί-φυλλoς (Esch.), de ἀέξω « faire croître »,
aussi intransitif « s’accroître » (i.-e.*h2u̯ eg-s- : véd. vakṣ, av. vaxš- ;
got. wahsjan < *h2u̯ og-s-, cf. aussi *h2eu̯ g-s- : αὐξ-άνω, αὐξ(ι)° et les
noms Αὐξίας, Αὐξίων, Αὖξος (1× : Samos, imp.) ;
de-ke-se-u /Deksēus/ (KN Db 1426.B, Df 1119.B) : Δεξεύς (Argos,
ive-iiie a. C.), Δεξίας, Δεξιoς… ; Δεξώ, cf. Δεξί-μαχoς, Δεξί-χαρις,
δεξί-μηλoς (Εur.), et aor. δέξατo (myc. de-ka-sa-to /deksato/,
i.-e.*dek̂-: véd. dāś- « honorer » [*« recevoir »], lat. docēre) ;
ka-nu-se-u /Ganusēus/ (KN As (1) 602.3) : *Ganu-s(i)°, cf. fut.
γανυσσo/ε- (Il. 14, 503-504 oὐδὲ γὰρ […] δάμαρ […] ǁ ἀνδρὶ φίλῳ
ἐλθόντι γανύσσεται 55 ;
ka-ri-se-u /Kharisēus/ (KN As (1) 609.2 et al., PY Jn 431.22, MY
Au 102.3), forme « courte » comme ka-ri-si-jo  (PY Jn706.16) :
Χαρίσιoς, Χάρισος (6× : Attique, ca 400+), cf. Χαρίσ-ανδρoς et hom.
χαρίσαιτo, χαρίσασθαι) 56 ;
o-na-se-u /Onāsēus/ (KN V (7) 1523.7, PY An 1281.5 et al.) : Ὀνησᾶς,
Ὀνησίας, Ὄνησις, Ὀνησ(ί)ων, Ὄνασος… ; Ὀvασώ), cf. Ὀνασί-
τιμoς et al. et aor. ὀνησα- (*h3neh2- « tirer profit »). On reviendra sur
°ονᾱσος § 10.

55. L’interprétation du NP ka-wa-do-ro comme /Gaw-andros/ (PY Ep 212.7), avec


/gaw°/ : γαίω de *gau̯-i̯ o/e-, comme « er soll sich an seinen Mannen freuen, stolz
auf sie sein können » (Neumann, art. cit., p. 140, n. 30-31) présuppose l’existence
de *gau̯- comme lexème verbal qui forme la base de dérivation. Le NP ka-jo (KN
Da 1451) /Gaios/ ou /Gaiōn/ (*Gau̯ -i̯ os, *Gau̯-i̯ ōn) est une forme « courte » de ka-
wa-do-ro /Gaw-andros/ ou bien reflète, tout simplement, le part. γαίων (hom. κύδει
γαίων).
56. Dénominatif de χάρις (i.-e. *ĝhr̥ (H)i-, de *ĝher(H)- : véd. hari, Hitt. kari tii̯ a- « entrer
en état de remerciement / de grâce »).
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 53

pa-ra-ke-se-we (PY Fn 324.10) dat. /Prāksēwei/ ou /Phrāksēwei/,


cf. d’un côté Πραξεύς (Délos, 172) Πραξέας, Πραξίας, Πρᾶξος (1×
Paros, iiie a. C.)… ; Πραξ(ι)ώ (cf. Πραξί-δαμος et sim., aor. πραξα-),
de l’autre Φράξος (1× : Νaxos, viie a. C.), cf. φράσσω « encercler,
fortifier », aor. φραξα-, aussi NP Φρασσαμενός (Cyrène, ive a. C.).
L’existence de noms en -(σ)εύς en grec alphabétique, ainsi que la
cohérence du système de dérivés onomastiques constatée supra (§ 3) per-
mettent de supposer, à côté des noms attestés Ἀλεξεύς, Δεξεύς, Πραξεύς
(cf. supra) l’existence de formes comme *Ἀλειψεύς, *Ἀεξεύς / *Aὐξεύς,
*Γανυσεύς, *Χαρισεύς, *Ὀνασ-εύς 57, *Φραξεύς en grec du premier mil-
lénaire. Il est bien possible qu’une nouvelle trouvaille dans un avenir
plus ou moins prochain nous livre de tels noms, comme d’autres nous
ont livré Δεξεύς et Πραξεύς bien après le HPN de Friedrich Bechtel
(1917) 58. Sur le type en -σος (Ἄλεξος, Ἄεξος, Χάρισος, Ὄνασος, Φράξος
et Πρᾶξος et sim, cf. infra § 10).
On peut y ajouter deux noms, non attestés au premier millénaire, dont
le premier membre correspond à un aoriste en -s- attesté directement ou
indirectement 59 :
ka-e-se-u /Kahēsēus/ (PY Qa 1299, MY Ge 605.4B), dat. ka-e-se-
we (MY Ge 602.4B) est une forme « courte » du NP ka-e-sa-me-no

57. La prétendue forme Ἀλεξεύς relève probablement d’une fausse lecture, cf.
O. Masson, « Remarques sur les anthroponymes mycéniens et leurs correspondants
au premier millénaire », SMEA 2 (1967), p. 27-40 (= OGS I, p. 97-110), p. 36 sq.
(= OGS I, p. 106 sq.) ; J.-L. Perpillou, op. cit., p. 222 sq.
58. Les deux noms sont mentionnés dans LGPN s.v. (mais non dans Bechtel, HPN) :
Δεξεύς avec référence à une inscrition inédite d’Argos (ive-iiie a. C.), Πραξεύς est
attesté à Délos (LGPN 1 s.u.).
59. On ne saurait être sûr que le NP qe-ta-se-u (KN As (1) 605.3, et al. avec lecture
<ṭạ> douteuse ou corrigée en <te>) recouvre /Kwhethasēus/ (appartenant à φθάνω
« prendre les devants, précéder », 3pl. ἔφθαν : grec *ku̯ heth(a)-, i.-e. dhegu̯ hh2-, véd.
dagh-), dont une forme à degré plein radical de l’aoriste sigmatique est attestée en
grec alphabétique comme φθα-σα-, comme le propose A. Heubeck, « Der Name der
Thessaler », Studia linguistica in honorem V. I. Georgiev, Sofia, 1980, p. 305 sq.
(= Kl. Schr. p. 310 sq.). Le fait est que l’aoriste φθα-σα- a été créé secondairement
sur la base φθα- (cf. R. Lipp, dans LIV2 s.v. *dhegu̯ hh2-), et l’existence d’un aoriste
sigmatique gr. *ku̯ hedha-s(a)-, comme celle d’un abstrait, demeure hypothétique. La
possibilité que qe-ta-se-u reflète un ethnique correspondant à un toponyme *qe-ta-
so demeure ouverte. Non liquet. Il en est de même pour la forme ọ-te-se-u. KN Db
1241, qui demeure énigmatique.
54 josé luis garcía ramón

(PY An 656.19, TH Ug 5), Gén. -o-jo (Vn 1191.2), quoi qu’il en soit
du verbe dont ka-e-sa- noterait l’aoriste. L’interprétation de ka-e-
sa-me-no comme /Kah-ē-sameno-/ (aor. *k̂ n̥ s-ē- de *k̂ ens- « parler
avec autorité / solennellement, donner un jugement »), proposée
par C. J. Ruijgh 60, est appuyée par l’existence de paires du type NP
Χαρησι° (aor. χαρ-η-) à côté de l’aoriste χήρατo, ou (ϝ)Αδησι° (fut.
ἁδ-ή-σω Hdt.+) à côté de l’aoriste ἥσατο (Od. 9, 353) 61.
qe-te-se-u /Kwhtheisēus/ (KN As (1) 609.3, correction sur 〚ṭạ〛), cf.
hom. φθεισήνωρ « qui fait périr les hommes » (dit de πόλεμος Il. 2,
833, φθισί-μβρoτoς Il. 13, 339, Od. 22, 297 avec [i:]), et aor. hom.
ἔφθισα (*kwhthei̯ -s-). L’aoriste sigmatique *φθει-σ(α)- (véd. kṣe-ṣ-)
s’oppose comme transitif à l’intransitif aor. ἔφθιτο « il périt », parf.
ἔφθιται (myc. part. e-qi-ti-wo-e /ekwhthiwoh-e(s)/ correspondant à
hom. ἐφθιμένος), avec prés. intr. φθίνω 62.
On retiendra en tout cas que pour les noms en -se-u il y a au moins
une condition préalable claire : c’est la coexistence d’un thème verbal en
-s- (aor. -σα- et/ou fut. -σo/ε-) et/ou un élargissement -s- et/ou un nom
en -σι-. Seul le NP e-ne-ke-se-u fait exception, au moins à la lumière du
matériel grec alphabétique (cf. § 8).
Dans bien des cas ce n’est qu’en grec du premier millénaire qu’une
forme « courte » est attestée. L’absence de telles formes dans les textes
mycéniens, étant un fait, au moins à l’heure actuelle, n’exclut pourtant
pas qu’elle ait existé à l’époque mycénienne. Vu l’existence d’un sys-
tème cohérent de formes et le fait que, même en grec alphabétique, des
formes nouvelles viennent au cours du temps remplir le vide des formes
qui, étant possibles dans la logique du système, n’étaient pas attestées, on
60. C. J. Ruijgh, op. cit., p. 363-364 ; A. Heubeck, « Weitere Bemerkungen zu den grie-
chischen Personennamen auf den Linear B-Tafeln », BzN 8, p. 268-278 (= Kl. Schr.,
p. 481-490) ; J. L. García Ramón, « Mycénien ke-sa-do-ro /Kessandros/, ke-ti-ro /
Kestilos/, ke-to /Kestōr/: grec alphabétique Αἰνησιμβρότα, Αἰνησίλαος, Αἰνήτωρ et
le nom de Cassandra », dans Mykenaïka, p. 239-255 ; C.  Le Feuvre, « La forme
homérique καμμονίη, le parfait κέκασμαι et le groupe de skr. śáṃsati “louer” », RPh
82 / 2, 2008 [2011], p. 305-320.
61. J. L. García Ramón, art. cit., dans Mykenaïka, p. 250-251.
62. En védique, au contraire, ce sont les désinences moyennes qui expriment l’intran-
sitivité inhérente au lexème : l’aoriste moyen kṣe-ṣ- (mā́ kṣeṣta AV 4.34.8c « qu’il
ne soit pas détruit ! ») correspond au présent intransitif kṣīyate vis-à-vis du transitif
kṣinā́ ti (RV), kṣinóti (AV+).
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 55

peut imaginer une situation similaire pour le mycénien – toujours dans


l’attente de nouvelles données. Rappelons quelques formes attestées au
premier millénnaire qui ne sont pas attestées (pour le moment, si j’ose
dire !) en mycénien, pour lesquelles Olivier Masson 63 a tracé un cadre
précis, dans lequel on trouve :
Ἀκεσ-εύς (-ις, -ίας, -(ί)ων… ; Ἀκεσώ) à côté de Ἀκεσί-δαμoς (cf.
Aor. Ἀκεσ(σ)α-), cf. ἀκέομαι « soigner », ou *ἀκέω « aiguillonner,
piquer » (*h2ék-es-, hom. ἀκεστός « aiguillonné, aiguillonnable »)
comme le montre C. Le Feuvre 64 ;
Μνασ-εύς (-ις, -έας, -(ί)ων ; Μνασώ) à côté de Μνησί-στρατoς (cf.
Aor. μνησα-) cf. μιμνήσκω « se souvenir » permettent de supposer
l’existence des formes correspondantes en /-ēus/. Il est pourtant pos-
sible que le théonyme ma-na-sa (PY Tn 316.4) puisse recouvrir
/Mnāsā-/, forme « courte » d’un composé féminin avec Mnās(i)°,
voire un vieil abstrait /Mnāsa-/ 65.
Particulièrement remarquables sont quelques noms en -σος (type
Ἄλεξος, Ἄεξος, Ὄνασος (60×) qui semblent être le résultat de la tronca-
tion d’un premier membre en -σ(ι)°, sur lesquels on reviendra § 10.

§ 7.  L’anthroponyme e-ne-ke-se-u prend une position spéciale dans


le cadre des noms en /-(C)ēus/. Attesté une seule fois à Cnossos (KN Da
1081: H. 117) :
e-ne-ke-se-u, / a-ka OVISm 200, il n’a aucun parallèle au premier mil-
lénaire. On s’accorde à voir dans e-ne-ke-se-u /Enek-s-ēus/ une forme
« courte » d’un composé du type τερψίμβρoτoς avec /Enek-s(i)°/ 66, qui

63. O.  Masson, « Anthroponymes mycéniens », SMEA 2 (1967), p. 27-40 (= OGS I,


p. 97-110).
64. C.  Le Feuvre, Ὅμηρος δύσγνωστος. Réinterprétations de termes homériques en
grec archaïque et classique, Genève, 2015, p. 255 sq.
65. Ainsi, M.  Janda, « Eine mykenische Muse gratuliert Heiner Eichner », dans
R.  Nedoma, D.  Stifter (éd.), *h2nr. Festschrift für Heiner Eichner, Sprache 48
(2009), p. 80-86, avec référence aux Μνεῖαι Μοῦσαι mentionnées par Plutarque. La
forme a toujours été considérée comme pré-grecque, ce qui entre bien dans l’analyse
interne des documents de Cnossos.
66. A. Heubeck, art. cit., BzN 8, p. 269 (= Kl. Schr., p. 482) propose de voir dans e-ne-
ke-se-u un *Ἐνεξεύς comme forme « courte » de *᾿Εvεξικλέϝης avec référence à
Φερεκλῆς.
56 josé luis garcía ramón

ne saurait appartenir qu’à ἐνεγκ-o/ε-, l’aoriste supplétif de φέρω. Cette


possibilité semble se heurter à deux difficultés, qui ne sont, en réalité,
pas insurmontables. D’un côté, elle semble achopper sur la formation des
mots : les formations usuelles à côté d’un composé avec °σ(ι)- (aoriste
et/ou futur sigmatique, abstrait en -σις) font défaut pour e-ne-ke-se-u.
De l’autre, il reste à préciser (toujours dans l’ignorance du deuxième
membre de composé !) si /Eneks°/ a le sens du verbe supplétif, donc
celui de φέρω « porter » (aussi « apporter », « supporter » et d’autres),
ou bien le sens présupplétif de *ἐνεκ-, avant l’intégration dans le para-
digme suplétif attesté depuis Homère (§ 8), qu’il faut préciser à l’aide de
la comparaison et des formes résiduelles de la racine en grec.

§ 8.  Un nom composé avec /Enek-s(i)°/ est parfaitement concevable,


même si le lexème verbal n’a pas de trace d’aoriste (ni de futur) sigma-
tique en grec alphabétique : le /-s-/ de /enek-s°/ a des parallèles avec
d’autres lexèmes verbaux sans trace de formation sigmatique (§ 10),
ce qui permet d’établir que le /-s(i)°/ n’en implique pas nécessairement
l’existence, quoi qu’il en soit du mécanisme du procédé.
Un parallèle formel presqu’exact est celui des noms en Ἀξ(ι)° (*ak-
s(i)° : ἄγω, aor. ἀγαγ-o/ε-, fut. ἀξo/ε-) du type Ἄξ-αvδρoς (Rhodes,
187/178), Ἀξί-λεως (Ioulis, ve a. C.), Ἀξί-οχος (Milet, ve a. C.+,
Athènes, 407-406+), qui est très fréquent (35×) 67, Ἀξί-πολις (Syphnos,
iiie a. C.), avec Ἄξ-ων (1× : Assos, hellén.) 68. Ἀξ(ι)° peut être soit un
reflet phonétique de *Ak-t(i)° (> /Aks(i)°/) soit une forme bâtie sur le
futur ἄξo/ε- (Hom.+).
Οn peut donc supposer qu’en synchronie myc. /enek-s°/ se trouve
vis-à-vis de l’aor. ἐνεγκo/ε- dans le même rapport que Ἀξ(ι)° vis-à-vis
de ἀγαγo/ε-. D’après les règles d’alternance des suffixes (§ 4), à côté
de Ἀξ(ι)° on pourrait en principe attendre *Ἀξεύς, *Ἀξέας, *Ἄξος (pas
67. Le NP Ἀξίοχος reflète bien ὄχον ἄγειν (cf. Dion Cassius, Hist. Rom 66.1.3 καὶ αὐτὸς
ὁ Νέρων ἔδοξέ ποτε ἐν τοῖς ὕπνοις τὸν τοῦ Διὸς ὄχον ἐς τὴν τοῦ Οὐεσπασιανοῦ
οἰκίαν ἐσαγαγεῖν).
68. Dans ces noms, on ne peut voir un premier membre ἀξιο-, dont le -o- aurait dû
être retenu. Les noms composés avec Ἀναξ(ι)° du type Ἀνάξ-ανδρος , avec forme
« courte » Ἄναξος (2× : Délos 250+) à côté de Ἀναξέας (Cyrène, ive a. C.), reflètent
(ϝ)ἀνάσσο/ε (noté parfois <ϝ> ου <β>), même si le second membre ne donne pas de
sens satisfaisant (par ex. Ἀναξάνθης, Assos, hellén.), non pas ἀν-άγ-ο/ε, même si cela
pourrait être suggéré par la phraséologie, par ex. pour Ἀναξί-λας qui pourrait refléter
λαὸν ἀνάγω (Il. 9, 338-339 … τί δὲ λαὸν ἀνήγαγεν ἐνθάδ’ ἀγείρας ǁ Ἀτρεΐδης;).
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 57

attestés, mais possibles, ainsi que °αξος (c’est-à-dire avec interversion


formelle des membres du composé, que l’on trouve en grec alphabé-
tique (cf. Χάρ-αξoς) aussi bien qu’en mycénien (cf. qo-wa-ke-se-u
/Gwōwaksēus/, qui présuppose */Gwōw-akso-/, cf. § 10).

§ 9.  Une fois admis que le second membre du composé « tronqué »


demeure inconnu, la question se pose de savoir si /Eneks-/ a le sens
du verbe à paradigme supplétif φέρο/ε- :: ἐνεγκο/ε- « porter » (aussi
« apporter », « emmener », « supporter », même « voler » et d’autres) ou
bien le sens pré-supplétif de *ἐνεκ- (proto-gr. *enek-), ce qui ne peut être
élucidé qu’à la lumière de la comparaison, notamment Toch. B /eṅk-/
« obtenir, recevoir », et de ἕνεκα « à cause de » (myc. e-ne-ka, aussi
hom. εἵνεκα) forme résiduelle dont le sens reflète le sens hérité.
Toch. B /eṅk-/ « obtenir » (accompagné souvent de ṣañ ṣarsa « dans
sa propre main »), est crucial pour le sens, puisqu’il montre à l’évidence
que la racine n’était autre que *h1nek̂ - (B /eṅk-/ : *h1n̥ k̂ -), avec un sens
précis « prendre » : le verbe a un paradigme complet, non supplétif (prés.
IXa eṅkastär /eṅk-sk-/, subj. I eṅtär, prét. III eṅksate [*h1n̥ k̂ -s-]), cf. B
107b4S ñakti arjuṃ-stām nemar-neś, cau eṅksate « les dieux lui offrirent
un arbre de Arjuna, il le prit ».
En partant d’une valeur originelle « obtenir » pour *h1nek̂ - on explique
bien ἕνεκα « à cause de », à l’origine acc.sg. fossilisé *enek-m̥  69 d’un
nom-racine *h1nek̂ - « obtention », notamment employé comme accusatif
de direction avec un verbe de mouvement, donc « [aller, s’adresser] à
l’obtention de » (avec génitif de l’objet que l’on veut obtenir). Le dépla-
cement sémantique de « pour l’obtention de » à « à cause de » a eu lieu
en trois phases 70 :
(I) [aller – ἕνεκα (+ gén.)] : ἕνεκα comme actant (direction, but)
dans l’accusatif du verbe de mouvement, par ex. Il. 5, 651 οὐδ’
ἀπέδωχ’ ἵππους, ὧν εἵνεκα τηλόθεν ἦλθε ;
69. On sait que l’aspiration initiale se serait étendue à partir de hom. oὕνεκα (: oὗ ἔνεκα).
70. Cf. J. L. García Ramón, « Zur Bedeutung indogermanischer Verbalwurzeln: *h2neḱ-
“erreichen, reichen bis”, *h1nek̑ - “erhalten, (weg)nehmen” », dans J. Habisreitinger,
R. Plath, S. Ziegler (éd.), Gering aber doch vom Herzen (Fs Bernhard Forssman),
Wiesbaden, 1999, p. 47-80 ; Id., « Langue poétique, hyperdialectalismes et langue
de chancellerie : le cas des textes thessaliens et l’origine de ἕνεκα », dans A. Blanc,
E.  Dupraz (éd.), Procédés synchroniques de la langue poétique, Bruxelles, 2007,
p. 86-88.
58 josé luis garcía ramón

(II) [aller – à X (acc.) – ἕνεκα (+ gén.)] : ἕνεκα comme circonstant


(final), c’est-à-dire facultatif, puisque le verbe de mouvement a
comme complément un accusatif de direction, par ex. Od. 14, 70
καὶ γὰρ κεῖνος ἔβη Ἀγαμέμνονος εἵνεκα τιμῆς ;
(III) [verbe non motionnel – ἕνεκα (+ gén.)] : ἕνεκα comme circons-
tant (final), par ex. Il. 3, 290 αὐτὰρ ἐγὼ καὶ ἔπειτα μαχήσομαι εἵνεκα
ποινῆς.
La phase (III) est déjà atteinte en mycénien, comme le montre au
moins la tablette PY Ae 303.a :
i-je-ro-jo
pu-ro, i-je-re-ja, do-e-ra, e-ne-ka, ku-ru-so-jo MUL 14
où le sens « à cause de l’or sacré » est évident, ainsi que, bien entendu,
dans une série de constructions homériques de ἕνεκα sans verbe de
mouvement.
Une fois établi que le sens pré-supplétif de gr. *ἐνεκ- (myc. */enek-/)
« obtenir » est pratiquement synonyme de κτᾱ- (κτάομαι) « obtenir » et
de πᾱ- (aor. πᾱσα-) « id. », on peut supposer que justement ce sens est
celui du lexème sur lequel est bâti l’anthroponyme e-ne-ke-se-u. On peut
donc faire un pas en avant et supposer que le second membre « tronqué »
du composé dont e-ne-ke-se-u est une forme « courte » peut bien être un
des objets usuels avec κτάομαι (et avec πᾱσα-), dans des phrases ou dans
des composés avec Kτᾱσ(ι)° / Πᾱσ(ι)°, par exemple °άρετoς, °αρχoς, ou
°φιλoς. On a ainsi Κτησ-άρετoς / Πασ-άρετoς (cf. Thuc. 1.123 πάτριoν
γὰρ ὑμῖν ἐκ τῶν πόνων τὰς ἀρετὰς κτᾶσθαι), Κτήσ-αρχoς / Πάσ-αρχoς (cf.
Hdt. 3.73 μὴ πειρωμένoισι ἀνακτᾶσθαι τὴν ἀρχήν) et Κτησί-φιλoς / Πασί-
φιλoς (cf. Soph. Aj. 1360 τoιoύσδ’ ἐπαιvεῖς δῆτα σὺ κτᾶσθαι φίλoυς;).
La même chose vaut pour °ιππoς, °δημoς, °κλῆς, °κράτης, °λαoς/°λᾱς,
°νικoς, °τιμoς, °χάρης. Οn peut donc imaginer pour myc. /Eneksēus/
une forme pleine de composé comme */Eneks-aretos/, */Eneks-arkhos/,
/*Eneksi-philos/ vel sim. Il va sans dire que */Eneks-arkhos/ peut bien
coexister avec qa-sa-ko /Kwās-arkhos/, voire avec la forme mycénienne,
non attestée correspondant à alph. Kτήσαρχος, étant donné que *ἐνεκ- et
κτᾱ- (*ktā-) / πᾱ- (*ku̯ā-) coexistaient en proto-grec 71.

71. Myc. po-ka-ta-ma PY Tn 996.4 dans une liste de vases peut refléter /pos-ktāma/
« propiedad aditional » (cf. πρoσκτάoμαι).
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 59

§ 10.  Revenant à la suffixation des anthroponymes, on fera état d’un


nouveau type de formation, particulièrement remarquable : il s’agit des
noms composés à second membre en °X-σος (type °ονᾱσος, °αξος).
On a observé dans ce qui précède l’existence de noms en -σος qui
semblent être le résultat de la troncation d’un premier membre en σ(ι)° :
Ἄλεξος (9×), Ἄεξος (1×), Χάρισος (6×), Ὄνασος (60×), Пρᾶξος (1×),
Φράξος (1×), aussi Ἄναξος (2×), à côté d’autres variantes en σέᾱς, -σεύς
(§ 6). Dans d’autres cas, tel nom en -σος peut relever de l’adaptation d’un
abstrait en -σις (et non d’un composé) : c’est le cas du nom Ἐπόνᾱσος
(Athènes 520-490), signalé par O. Masson 72, qui à mon avis relève de
l’adaptation de  ἐπόνᾱσις, appellatif attesté chez Alcée (fr. 368.1-2…
κέλομαί τινα τὸν χαρίεντα Μένωνα κάλεσσαι, ǁ αἰ χρῆ συμποσίας
ἐπόνασιν ἔμοιγε γένεσθαι), à côté de ὄνησις‚ « profit » (Hom.+) plutôt
que d’un premier élément de composé Ὀνᾱσι°.
D’autre part le second élément °X-σος de ces noms composés peut
avoir un pendant dans les composés à premier membre X-σ(ι)° du
type τερψίμβροτος. C’est le cas de Μορτόνασος à Thèra (ve a. C.), où
O. Masson 73 a reconnu un premier membre μορτo° (μορτός· ἄνθρωπος
Hsch.), variante de βροτός, et un °όνᾱσος correspondant évidemment
à Ὀνᾱσι-, si bien que le Μορτόνασος théréen reflèterait l’interversion
des deux membres d’un composé qui se trouve dans sa structure cano-
nique dans le type richement attesté Ὀνασίμβροτος, Ὀνάσανδρος /
Ὀνήσανδρος. L’origine du type Μορτ-όνασος se laisse aisément pré-
ciser : à partir de Ὀνᾱσι° (: aor. ὀνᾱσα-, ὄνησις / ἐπόνᾱσις), on a formé la
variante « courte » Ὄνᾱσος, puis il y a eu une interversion des membres
du composé, comme dans d’autres langues indo-européenes, d’où
°όνᾱσος que l’on trouve dans Ἐπ-όνασος. La liste de ce type de com-
posés peut être élargie avec d’autres noms :
Πρόμνησος (Céphallénie, cité par Aristote fr. 611, cf. Μνησι°, aor.
μνησα-).
Πανδάμασος (Éphèse, iiie a. C., cf. Δαμασί-λᾱς, -πολις, et δαμασίφρων
Pind., δαμασίχθων Bacch., aor. δαμασ(σ)α-).

72. O.  Masson, « Quelques noms grecs à l’Agora d’Athènes », Festschrift H. Hoe-
nigswald, Tübingen, 1987, p. 256 (= OGS II, p. 568).
73. O.  Masson, « Anthroponymie grecque et dialectologie II. μoρτός et les noms en
-μoρτoς », RPh 37 (1963), p. 220 (= OGS I, p. 45) ; A. Inglese, Thera arcaica. Le
iscrizioni rupestri dell’agora degli dei, Tivoli, 2008, p. 107, n. 18.
60 josé luis garcía ramón

῾Ιππόλυσος (3× : Cyrène, 270+). Le nom, attesté dans des papyrus,


dont l’authenticité m’est assurée par la gentillesse de Catherine Dobias-
Lalou, résulte, selon toute vraisemblance, d’un croisement entre Λυσ(ι)°
(Λύσ-ιππος) et °λυτος (Ἵππό-λυτος) et reflète, sous sa forme inédite
jusqu’à présent, la collocation phraséologique héritée [délier – cheval],
reflétée dans les noms Ἱππόλυτος, Λύσιππος 74 (Il. 8, 543-544 οἳ δ’ ἵππους
μὲν λῦσαν ὑπὸ ζυγοῦ ἱδρώοντας, ǁ δῆσαν δ’ ἱμάντεσσι παρ’ ἅρμασιν
οἷσιν ἕκαστος). La collocation est aussi attestée en iranien, dans le com-
posé posessif av., v.-p. Vīštāspa- 75, avec vī-štā° « dé-lié » (ppp. *u̯ i-s(h2)
to- de *seh2- « délier », cf. véd. áva-sā-, vi-sā-), dont le sens « ayant ses
chevaux non attachés » correspond à celui de Ἱππόλυτος, la seule diver-
gence étant formelle, résultant de l’interversion (« Umsetzung ») des
membres du composé en grec. D’autre part, dans le domaine indo-ira-
nien la collocation a le caractère d’une métaphore spécifique : l’offrande
est conceptualisée comme véhicule dans le Rig Veda, et les chevaux sont
déliés de façon à pouvoir courir vers les dieux 76. La collocation antithé-
tique [attacher – cheval] est attestée dans l’onomastique des deux
langues, cf. Ζεύξιππος : av. Yuxtāspa- (: yaog-).
Or il y a des cas où le composé en °X-σος à côté d’un premier
membre X-σ(ι)° est attesté pour un verbe où le thème sigmatique fait
défaut, notamment celui représenté par °αξος (Χάρ-αξoς et myc. qo-wa-
ke-se-u /Gwōwaksēus/, qui présuppose */Gwōw-aks-o-/), à côté de Ἀξι°.
Comme dans le cas de Μορτόνασος (cf. supra), les types Χάρ-αξoς et
mic. qo-wa-ke-se-u, répresentent une interversion formelle des membres
du composé, que l’on trouve aussi bien en mycénien qu’en grec du pre-
mier millénaire. Le dossier est, certes, fort réduit :

74. Le composé onomastique Ἱππό-λυτος relève de l’interversion de *Λύτ-ιππος, du


type régulier Πίστ-ανδρος, Σώτ-αρχος.
75. Le nom, transmis en grec comme ‘Υστάσπης, reflète indo-iran.*Vištāćpa- : « having
unfettered, unharnessed, free horses » (O. Szemerényi, « Vīštāspa », BzN 2 [1951],
p. 165-177). La collocation sous-jacente [víṣita- áśva-] est bien attestée dans le Rig
Veda, cf. III 33.1b áśve iva víṣite hā́samāne, VI 6.4b vísitāso áśāḥ « (zum Rennen)
losgebundene Pferde » (J.  Narten, Die sigmatischen Aoriste im Veda, Wiesbaden,
1964, p. 286, n. 897 ; W. Wüst Altpersische Studien, Munich, 1966, p. 280), I 25,3cd
ví… áśvaṃ ná sáṃditam… sīmahi « nous le détacherions comme (on fait avec) un
cheval attaché ».
76. Cf. W. Wüst, op. cit., qui voit dans RV VI 6.4 la « Keimzelle » du NP Vištāspa-.
du mycénien aux dialectes du ier millénaire 61

Χάραξος 77 (Mytilène, viie-vie a. C.), qui reflète la collocation [χάραν /


χάριν – ἄγω], cf. Pind. Pyth. 3.72 τῷ μὲν διδύμας χάριτας εἰ κατέβαν
ὑγίειαν ἄγων χρυσέαν κῶμόν τ’(ε), Pae. 9.37 ἀγαυὸν καλάμῳ συνάγεν
θρόον μήδεσί τε φρενὸς ὑμετέραν χάριν, Eur. Hipp. 527 Ἔρως… εἰσάγων
γλυκεῖαν χάριν (Laura Massetti, c.p.). Les parallèles phraséologiques
rendent cette interprétation préférable à celle qui ferait de Χάραξος une
forme « courte » de Χαραξ(ι) (: aor. χαρασσα- de χαράσσω « aiguiser »,
« entailler », « graver » [Hés.+]), qui n’est attesté que chez Erinna, fr. 5.8
Ἤρινν᾿ ἐν τύμβῳ γράμμ’ ἐχάραξε τόδε.
Εὔαξος (Mégare, 242-238), fém. Εὐαξίς (Athènes, 175-174), cf.
Ἄξων (Arsos, hellén.).
On y ajoutera myc. qo-wa-ke-se-u /Gwōwaksēus/ (KN (1) As 602.4),
cf. les noms de fête Βοήγια à Milet, Bοηγία à Didyma, et les βοηγοί à
Priène) réflétant une collocation bien connue (cf. Il. 13, 571-572 … ὡς
ὅτε βοῦς τόν ǁ … βίῃ … ἄγουσιν), où le /s/ ne s’explique pas par l’in-
fluence d’un aoriste sigmatique, qui n’existe pas pour ἄγω.

§ 11.  Cette contribution a essayé de faire voir l’existence d’une conti-


nuité des procédés de la dérivation onomastique mycénienne au premier
millénaire : tous les suffixes qui se laissent reconnaître en mycénien
se trouvent aussi en grec jusqu’à l’époque impériale. L’existence d’un
système de suffixes ayant comme base un même lexème, qui s’avèrent
comme pratiquement interchangeables, permet de translittérer des hypo-
coristiques et sobriquets mycéniens qui restent obscurs à cause des limi-
tations de la graphie du linéaire B. Cette approche combinée et la prise
en considération de la phraséologie permettent d’interpréter des séries
de noms propres mycéniens, comme ceux en -(C)a-ko, ou les formes
« courtes » de composés en -e-u n’ayant pas de composé parallèle attesté
en linéaire B, ainsi que la forme « courte » e-ne-ke-se-u /Eneksēus/, qui
n’a pas de continuant formel au premier millénaire, mais reflète la valeur
pré-supplétive de ἐνεκ- (*h1nek̂ - « prendre », ἕνεκα), et les composés à
second membre en -σος du type Ἱππό-λυσος ou Χάραξος (aussi myc.
*/°ak-so-/ présupposé par qo-wa-ka-se-u /Gwōwaksēus/), qui relèvent de
l’interversion des membres des composés du type τερψίμβροτος (Λυσι°,
Ἀξι°).
77. Sans rapport avec °Xάραξ (Athènes iie-ier a. C.) : χάραξ « pieu », « échalas »,
« rameau » (Arist., aussi NP Χάρακος).
62 josé luis garcía ramón

Références bibliographiques

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du mycénien aux dialectes du ier millénaire 63

—, « Langue poétique, hyperdialectalismes et langue de chancellerie : le cas


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Les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος :
réflexions complémentaires

Nicole Guilleux
Université de Caen-Normandie,
CRAHAM, CNRS

L
es anthroponymes masculins en ‑ήν, ‑ῆνος, réputés typiques
du grec du Nord-Ouest et connus essentiellement par les sources
épigraphiques, ont suscité peu de travaux depuis la contribution
de F. Solmsen en 1909 1, du fait sans doute de leur nombre réduit 2. Le
colloque Nouveaux acquis sur la formation des noms en grec ancien, qui
s’est tenu à l’université de Rouen en octobre 2013, m’a donné une pre-
mière occasion d’étudier ce petit groupe d’anthroponymes et de mon-
trer notamment qu’ils sont en distribution complémentaire avec ceux en
‑εύς. Sur la base de ce constat, prolongeant la suggestion de F. Solmsen
de donner à ces anthroponymes une origine « vordorisch », j’ai fait l’hy-
pothèse que les anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος avaient dû commencer à se
développer au IIe millénaire à partir de l’accusatif singulier en ‑ήν des
thèmes en ‑εύς. Le tour d’horizon présenté dans ce premier texte 3 restait
cependant incomplet.

1. F. Solmsen, Beiträge zur griechischen Wortforschung, Strasbourg, 1909, p. 116-117.


Cf. toutefois P. M. Fraser et T. Rönne, Boeotian and West-Greek Tombstones, Lund,
1957, p. 167‑168.
2. J’ai plaisir à remercier Alcorac Alonso Déniz, Dan Dana, Catherine Dobias-Lalou,
Laurent Dubois, Violeta Gomis García et Sophie Minon pour leurs questions, leurs
remarques et leurs suggestions.
3. Cf. N. Guilleux, « Productivité et concurrence suffixale : Le cas des anthroponymes
en ‑ήν, ‑ῆνος », dans A. Blanc et D. Petit (éd.), Nouveaux acquis sur la formation des
noms en grec ancien, Louvain-la-Neuve, 2016, p. 283‑304.
68 nicole guilleux

Je reprends ici mon corpus, pour réexaminer ensuite les anthropo-


nymes en ‑ήν, ‑ῆνος dans une perspective synchronique impliquant la
prosopographie. Puis, dans une optique diachronique, toujours dans le
cadre de mon hypothèse donnant une origine mycénienne à ce suffixe,
j’élargis mon enquête aux noms propres d’hommes en ‑ής, où le suffixe
compte un ē ancien et une flexion non sigmatique – catégorie signalée
par Olivier Masson dès 1957 4. Sont aussi inclus dans cette étude non
seulement les thèmes en diphtongue Ζεύς, ναῦς et βοῦς, mais encore le
théonyme Ἄρης et les anthroponymes en ‑ης, ‑ητος. Ce réexamen a pour
objectif de sortir les anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος de leur isolement et de
montrer de quels processus, internes au grec ancien dans son ensemble,
ils procèdent. Bref, il s’agit de les inscrire dans une perspective synchro-
nique et historique renouvelée.

1. Le corpus actualisé des anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος

1.1. Les limites du corpus. Formes exclues


Établir la liste précise des anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος ne va pas
de soi. Certaines formes n’ont pas d’existence assurée. C’est le cas de
Μελιθήν, lecture qui a été proposée par P.  le Bas, puis contestée par
E. Fraenkel 5 : on lit désormais Μελιθήριος (LGPN 3a, Phliasie, ive a. C.).
Quant au supposé Κυλλήν d’une dédicace de Phrygie, c’est pour des rai-
sons philologiques que je ne le retiens pas 6. Il n’est pas non plus envi-
sageable de prendre en compte le nom du héros homonyme. L. Robert 7,
suivant la tradition littéraire, fait de Κυλλήν, nom de l’un des fils du roi
de Phocide Élatos, un ethnique en ‑ήν, ‑ῆνος, qui serait lui-même à l’ori-
gine du nom du mont Κυλλήνη / dorien Κυλλάνα. Or le texte transmis par
Pausanias ne renseigne pas sur la forme originelle qu’a le nom du person-
nage mythologique, Κυλλήν ou *Κυλλάν. Il y a ici une difficulté inhé-
rente à la documentation et qui se rencontre pour d’autres anthroponymes
4. O. Masson, « Notes d’anthroponymie grecque et asianique », BN 8 (1957), p. 165
(=  OGS  I, p.  9) ; « Nouvelles notes d’anthroponymie grecque, VII. Essai d’une
histoire de Δίης », ZPE 102 (1994), p. 179-184 (= OGS III, p. 184-189).
5. Cf. P. M. Fraser et T. Rönne, op. cit., p. 168 n. 67.
6. Je préfère analyser la forme comme Κιλλήν : voir infra p. 72 et n. h, p. 74.
7. L.  Robert, Hellenica. Recueil d’épigraphie, de numismatique et d’antiquités
grecques, XI-XII, Paris, 1960, p. 583 et n. 3.
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 69

en ‑ήν, ‑ῆνος, lesquels, malgré les apparences, n’appartiennent pas au


corpus. À prendre le cas de l’anthroponyme issu de l’ethnique Ἕλλην,
on se souviendra que son ē repose en fait sur un ā ancien puisque, hors
de l’Ionie et de l’Attique, lui correspond Ἕλλαν. C’est pourquoi on ne
doit pas intégrer à l’étude de tels noms, où la voyelle longue du suffixe ne
repose pas sur un ē ancien 8. J’ai donc éliminé, par exemple, le Κεφαλλήν
enregistré en Élide (LGPN 3a, Élide, 252 a. C.) car – si tant est qu’il ne
soit pas un ethnique – il figure dans une inscription visiblement rédigée
en koinè ionienne-attique. De même sont exclus de mon recensement les
sobriquets comme Ποιμήν où la voyelle suffixale connaît une alternance
de quantité, ce qu’atteste notamment l’accusatif Ποιμένα (LGPN 3a,
Épire, ive‑iiie a. C.) d’un affranchissement 9. En revanche, Ὠλήν appar-
tient bien au corpus parce que, qu’on le rattache à ὠλένη « coude » et
à son antécédent mycénien athématique */ōlēn/, */ōlenos/ ou au topo-
nyme Ὤλενος 10, il comporte le suffixe ‑ήν, ‑ῆνος, ce dont témoignent les
diverses formes fléchies conservées chez Pausanias 11.

1.2. L’effectif du corpus


La vulgate dialectologique, qui néglige l’apport de F. Solmsen, limite
l’aire d’attestation des anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος au corinthien 12, ainsi
qu’aux villes et régions d’Illyrie et de Dalmatie 13. Les formes relevées
par F. Bechtel se montent à 17 noms et 24 occurrences concernant, outre
Corinthe, Corcyre et les colonies de Corinthe et / ou Corcyre, Épidamne-
Dyrrhachium et Apollonia d’Illyrie. Pourtant, dès 1909, F.  Solmsen 14

8. Contra Balles, NWIG 1, p. 208, qui travaille dans une perspective purement syn-
chronique.
9. Mais on notera que, quand il s’agit de classer les substantifs en ‑ήν (noms propres
et noms communs), Hérodien (III.1, p. 15) ne se soucie pas d’une telle différence
suffixale, car il associe dans la même liste Ἀγήν (‑ῆνος) à αὐχήν (‑ένος).
10. Discussion du statut de l’anthroponyme (sobriquet ou ethnique ?) infra p. 83.
11. Acc. Ὠλῆνα (X, 5.7, -8), gén. Ὠλῆνος (I, 18.5, IX, 27.2), dat. Ὠλῆνι (II, 13.3).
12. Cf. F. Bechtel, Die Griechische Dialekten, II. Die Westgriechischen Dialekte, Berlin,
1923, p. 246. La partition de l’ouvrage en chapitres qui isolent les dialectes les uns
des autres pour en définir les spécificités empêche fatalement de saisir les données
faiblement représentées, ce qui ne signifie pas qu’elles n’existent pas.
13. Cf. L. Robert, Hellenica, p. 517 ; O. Masson, « Notes épigraphiques : Thessalie et
Dalmatie », BCH 115 (1991), p. 359 (= OGS III, p. 122).
14. F. Solmsen, op. cit., p. 116-117.
70 nicole guilleux

avait intégré au corpus incluant des légendes monétaires des noms rele-
vant d’une aire géographique plus vaste, qui comprenait déjà la Pho-
cide, la Béotie, l’Argolide et Mégare. Au total, il recensait 24 noms pour
41 occurrences.
Actuellement, les données combinées du Lexicon of Greek Personal
Names, de la base épigraphique Searchable Greek Inscriptions du Pac-
kard Humanities Institute (PHI), du Thesaurus Linguae Graecae et du
LAGM livrent 46 anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος, auxquels s’ajoute le nom
fictif, Δαμασήν, d’un personnage mythologique des Dionysiaques de
Nonnos, le tout pour 200 occurrences. La cause principale de cette aug-
mentation est non seulement la découverte de nouvelles inscriptions ou
monnaies, mais aussi la prise en compte des tuiles inscrites 15, ainsi que
de quelques autres noms (je pense notamment aux anthroponymes prove-
nant d’Asie mineure 16), qu’on rejetait jusqu’alors au motif qu’ils ne sont
pas attestés en Grèce du Nord-Ouest.

1.3. Pour une liste des anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος 17


Par commodité, les noms ont été ramenés au nominatif 18 et leurs
références ne figurent ici que de manière exceptionnelle, essentielle-
ment quand la forme n’est pas enregistrée dans les bases de données
habituelles 19.

15. Cf. B. Kindt, Les tuiles inscrites de Corcyre, Louvain-la-Neuve, 1997.


16. Pour une justification, cf. infra p. 76-77.
17. Il se peut que certains noms aient échappé à mes recherches, le lecteur voudra bien
m’en excuser.
18. Je ne méconnais pas l’importance du cas réellement attesté (nominatif et génitif en
majorité) pour le numismate et l’historien, le nominatif désignant le monétaire et le
génitif le prytane éponyme.
19. Liste des abréviations utilisées dans le tableau : NS = nature des sources, NO =
nombre d’occurrences, I = inscription, TI = tradition indirecte, M = monnaie,
timbre = timbre sur tuile ; Apoll. = Apollonie d’Illyrie, Ath. = Athènes, Corc. = Cor-
cyre, Dyrrh. = Épidamne-Dyrrhachion, Koin. Ép. = Koinon d’Épire, Bouthr. = Bou-
thrôtos ; hell. = période hellénistique, imp. = période impériale. Quant au nombre
d’attestations, ne sont pas comptés les exemplaires multiples d’une même monnaie,
non plus que les diverses occurrences de la tradition littéraire quand elles ne sont que
reprises et commentaires d’un même nom ou personnage.
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 71

Forme NS NO Provenance / auteur et dates


Corc. (2 : iiie-iie a. C., hell.), Apoll. (1 : timbre a, hell.),
I 5
Dyrrh. (2 : ive a. C., iie a. C.)
Ἀγήν TI 1 drame satyrique b (1 : Python, fr. 1, ive a. C.)
Apoll. (2 : iiie-ier a. C.) ; Dyrrh. (1 : iiie-ier a. C.), Koin. Ép.
M 4
(1 : iiie-iie a. C.)
Ἀκ[ρη]φείν TI 1 Corinne (1 : Page fr. 1, col. 3, 31, vie-ve a. C. ?)
Ἀλεξήν I 2 Dyrrh. (2 : hell.-imp.)
Ἀλκήν I 1 Corc. (1 : épitaphe d’Amphilochia, iiie a. C.)
Philosophe pythagoricien (1 : liste ad Jambl. V, Pyth. 267,
Ἀνθήν TI 1
Καλχηδών c, ve a. C. ?)
Apoll. (5 : ive-iiie a. C., 2 : timbre, hell.), Dyrrh. (1 : hell.,
1 : iie a. C., 5 : hell.-imp., 1 : timbre, iie-ier a. C.), Issa (6 :
Ἀριστήν I 23 ive-iiie a. C.), région de Byllis (2 : 1 péripole, iie a. C.) ;
Olympe de Bithynie (1 : IMT Olympene 2752, Πόπλιος
Ποπλίου Ἀριστῆνος d, iie-iiie p. C.)
M 6 Apoll. (2 : iiie-ier a. C.), Dyrrh. (4 : iiie-ier a. C.)
Apoll. (1 : imp.), Dyrrh. (1 : hell., 3 : hell.-imp.),
I 6
Bouthr. (1 : f. iie a. C.)
Apoll. (2 : iiie‑ier a. C., 2 : ier a. C.), Dyrrh. (1 : iiie-
Ἀρχήν M 5
ier a. C.)
I 1 Dyrrh. (1 : timbre, iie-ier a. C.)
Βοικήν e
M 2 Dyrrh. (2 : iiie-ier a. C.)
I 1 Dyrrh. (1 : hell.-imp.)
Γοργήν
M 1 Dyrrh. (1 : iiie-ier a. C.)
héros méonien (Hdn, Nonnos, Dion. XXV, 453, 486, 506,
Δαμασήν TI 1
ve p. C.)
Apoll. (3 : iiie-iie a. C.), Dyrrh. (1 : timbre, iie-ier a. C.),
I 5
Dimalè (1 : iiie-iie a. C.)
Δαμήν
TI 1 Argos (1 : historien, Hdn III.1, p. 17, ive a. C.)
M 3 Apoll. (1 : iiie-ier a. C.), Dyrrh. (2 : iiie-ier a. C.)
Ἐθελήν I 1 Dyrrh. (1 : hell.)
Θαρσήν I 1 Oponte (1 : décret hon. Delphes, 154 a. C.)
Θερσήν I 2 Apoll. (1 : imp.), Dyrrh. (1 : hell.)
I 2 Dyrrh. (2 : iiie a. C. ?)
Ἱερήν
M 1 Dyrrh. (1 : hell.-imp.)
Tarente (1 : lampe, IG XIV 2405, 15, Η ΙΠ Π Η Ν Ο [.] ;
Ἱππήν I 1
ve-ive a. C.) f
Apoll. (1 : Κα[λ]ήν, imp.), Acarnanie (1 : vase Κα[λ]ῆ-
Καλήν I 2
[ν]ος g, iiie a. C.),
72 nicole guilleux

Forme NS NO Provenance / auteur et dates


Apoll. (2 : iiie-iie a. C., 1 : timbre, hell.), Dyrrh. (5 : hell.-
imp.), Issa (6 : Hylleis, ive- iiie a. C.), Salona (1 : ie a. C.) ;
I 21 Mégaride (1 : Aegosthènes, 224 a. C.), Imbros (1 : myste),
Καλλήν IG XII, 8, 87, date inconnue ; Béotie (2 : Aulis, imp.) ;
Épidaure (2 : Hysminatai, 146 a. C.)
Apoll. (2 : iiie-ier a. C., 1 : ier a. C.), Dyrrh. (2 : iiie-
M 6
ier a. C.), Skodra (1 : av. 168 a. C.)
Κιλλήν I 1 Phrygie (musée d’Izmir : Κε�ιλ[λ]ήν h, imp.)
Κηκήν i I 1 Crète (1 : Olonte, iie-ier a. C. ?)
I 5 Dyrrh. (4 : hell.-imp., 1 : hell.)
Λαήν
M 2 Dyrrh. (2 : iiie-ier a. C.)
Λυκήν M 1 Dyrrh. (1 : iiie-ier a. C.)
Corc. (2 : ca 315-280 a. C.), Apoll. (1 : iie a. C),
Antigoneia de Chaonie (1 : imp.), Bouthr. (1 : hell.), Épid.
I 9
(1 : 370-365 a. C), Mégare (1 : 242-238 a. C.), Carie (2 :
Λυσήν
Iasos, 230-210 a. C., 173‑167 a. C.)
Apoll. (1 : iiie-ier a. C., 1 : ier a. C.), Dyrrh. (2 : iiie-
M 5
ier a. C.), Koin. Épir. (1 : 234-168 a. C.)
Μενήν I 1 Apoll. (1 : iie-ier a. C.)
Apoll. (1 : iie-ier a. C.), Dyrrh. (1 : hell.-imp.), Dimalè (1 :
I 5
hell.), Ambracie (1 : iie a. C.), Halai (1 : 206 a. C.)
Μνασήν
Apoll. (1 : ier a. C., 1 : iiie-ier a. C.), Dyrrh. (1 : iiie-
M 3
ier a. C.)
Ναυσήν I 1 Dyrrh. (1 : hell.-imp.)
Apoll. (1 : iie a. C.), Dyrrh. (2 : hell.-imp., 2 : hell., 1 : iie-
I 5
Νικήν ier a. C.), Divjakë (1 : hell.)
M 3 Apoll. (1 : iiie-ier a. C.), Dyrrh. (2 : iiie-ier a. C.)
I 1 Dyrrh. (1 : hell.-imp.)
Ξενήν
M 1 Dyrrh. (1 : iiie-ier a. C.)
Apoll. (1 : iiie‑iie a. C., 1 : hell., 3 : iie-ier a. C. ; 2 :
I 10
timbres, hell.), Dyrrh. (1), Balaiitai (2 : iie a. C.)
Παρμήν
Apoll. (2 : iiie-ier a. C., 2 : ier a. C.), Dyrrh. (1 : iiie-
M 5
ier a. C.)
I 2 Dyrrh. (1 : hell.-imp. + 1 : timbre, iie-ier a. C.)
Πατερήν j
M 2 Dyrrh. (2 : iiie-ier a. C.)
Παυσήν I 1 Apoll. (1 : timbre, hell.)
I 1 Tarente (1 : ΠΟΛΕΝΟΣ k, vase, ve a. C.)
Πoλλήν
M 1 Dyrrh. (1 : iiie-ier a. C.)
Πουρεινίδας I 1 Orchomène (1 : patronymique de *Πυρήν, 223 a. C.)
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 73

Forme NS NO Provenance / auteur et dates


I 1 Issa (1 : iiie-iie a. C.)
Πυθήν Corinthe (1 : Thuc. VI 104.1, VII 1.1, 70.1 ; D. H, etc.,
TI 1
414-413 a. C.)
Épidaure (1 : comptes, ive a. C.), Athènes (1, poète
Πυρρήν I 2
comique, victοire Lénéennes, 278 a. C.)
Σαλλήν I 1 Dyrrh. (1 : péripole, iie a. C.)
Σατυρήν M 1 Dyrrh. (1 : iiie-ier a. C.)
Élide (1 : olympionique éléen, iiie-ier a. C.). Lire
Στρογιήν I 1
ΣΤΡΟΓΙΗΝ Στροπήν plutôt que Στρογιήν l.
timbres : Cefalù (1 : hell.), Lipara (3 : hell.), Messine (1 :
Σωσήν I 9
hell.), Solonte (1 : hell.), ? (1 : hell.), Rhégion (2 : hell.)
Σωσιλήν I 1 Dyrrh. (1 : hell.-imp.)
Σωστρήν M 2 Dyrrh. (2 : iiie-ier a. C.)
Τεισήν I 1 Épidaure (1 : ive a. C.)
Corinthe (1 : vie a. C.), Tarente (1 : vase, ive-iiie a. C.),
I 4 Thèbes (1 : Τ. Κυψέλιος, Delphes, 345-341 a. C.), Mégare
Τελλήν m (1 : f. ive a. C.)
flûtiste et/ou poète (Dicéarq. fr. 102, Leonid. Tar., Plut.,
TI 1
Hdn, etc.)
I 3 Apoll. (2 : iie-ier a. C.), Dyrrh. (1 : imp.n)
Τιμήν
M 2 Apoll. (1 : iiie-ier a. C., 1 : iiie-ier a. C.)
Τυρήν o I 1 Ath. (1 : liste d’individus acquittés, 330‑310 a. C.)
Apoll. (1 : timbre, hell.), Gurëzezë (2 : timbre, hell.),
I 5
Χαιρήν Margëlliç (1 : timbre, hell.), Ambracie (1 : iiie-iie a. C.)
M 2 Apoll. (1 : iiie-ier a. C., 1 : ier a. C.)
Χαρμήν p M 1 Halicarnasse (1 : ier a. C.)
Χερσήν I 1 Delphes (1, prytane, 341 a. C.)
poète lycien : Hdt (IV.35), Boeus (fr. 2), Call. (Del. 4,
Ὠλήν TI 1
305), Hdn, Paus. (passim), Arcadius, Souda, ve a. C.
a.  Les timbres sur tuiles sont comptés au nombre des inscriptions, mais distingués dans la colonne
signalant leur lieu d’invention. — b.  On ne connaît de la pièce que son titre, dont l’auteur est Python
(de Catane ?). — c.  Philosophe d’origine discutée : est-il carthaginois (Καρχηδών) ou chalcédonien
(Καλχηδών, var. pour Χαλκηδών) ? O. Masson, « Sur quelques noms de philosophes grecs à propos
du Dictionnaire des philosophes antiques, vol. II », RPh (1994), p. 235-237 (= OGS III, p. 222‑224),
estime avec de bons arguments philologiques la seconde lecture mieux fondée. — d.  Et non Ἀρι-
στηνός, comme dans PHI, à la suite de Matthias Barth et Josef Stauber, les éditeurs de l’inscription
(M. Barth et J. Stauber, Inschriften von Mysia und Troas, Munich, version du 25.08.1993, Ibycus),
qui en font un ethnique du type Ἀβυδηνός, à tirer alors du toponyme phrygien Aristé (E. Schwert-
heim, Die Inschriften von Hadrianoi und Hadrianeia, Bonn, 1987, p. 145). Au vrai, l’anthropo-
nyme figure dans une formule onomastique d’époque impériale qui évoque celles, avec noms
seconds, d’Aphrodisias notamment, comme l’épitaphe de [Φ]λα(βία) Ἀπφία (…) θυγάτηρ Μηνο-
δότου Βραβέως : cf. A.  Chaniotis, « Second Thoughts on Second Names in Aphrodisias », dans
74 nicole guilleux

PNAA, p.  215. Ἀριστῆνος me paraît être plus probablement le génitif de Ἀριστήν. — e.  Βοικήν
note /woikḗn/, les dialectes de Corinthe et Corcyre conservant le wau initial. Quant à Βοιλήν,
signalé dans le SGDI 3225, mais absent des diverses bases de données, il résulte d’une mauvaise
lecture, influencée par le féminin Βόϊλλα (4 occurrences à Boutrôtos et Corcyre) : cf. M. Beaure-
gard, Recherches sur l’onomastique d’Apollonia d’Illyrie et d’Épidamne-Dyrrhachion d’après les
inscriptions et les légendes monétaires, 3 vol., thèse dactylographiée, EPHE, section des Sciences
historiques et philologiques, O. Masson (dir.), Paris, 1992, p. 226-227. — f.  Nom incomplet qu’on
peut en théorie lire hιππῆνο[ς] (LGPN 3a, Tarente, ve-ive a. C.), hιππήνο[υ] (PHI) ou hιππίνο[υ] (sic,
LGPN ibid.). La première option me paraît la plus satisfaisante car elle ne crée aucune difficulté ni
morphologique ni phonétique. — g.  La restitution proposée dans le LGPN suit le texte édité par
B. F. Cook, Inscribed Hadra Vases in the Metropolitan Museum of Art, New York, 1966, p. 28, avec
double lacune d’une lettre. Contra la restitution de Pomtow, citée par Cook ad loc. — h.  Pour cette
lecture, voir J. H. Oliver, compte rendu de L. Robert, Hellenica. Recueil d’épigraphie, de numisma-
tique et d’antiquités grecques X, 1955, AJPh 78 (1957), p. 332, où il dit « with an incomplete epsilon
as a second letter ». Il considère cependant qu’il s’agit d’un Κυλλήν, qui apparaît dans la tradition
indirecte comme nom de héros (voir supra, p. 68). Κυλλήν s’analyserait comme un sobriquet ayant
pour base κυλλός « tordu, cagneux », ce que suggère L. Robert, Hellenica, p. 253, par le renvoi à
HPN 492, avant de récuser l’anthroponyme en raison de son lieu d’invention, le Nord de la Phrygie.
Condamnation de principe qui ne me paraît pas justifiée. — i.  Cité par P. M. Fraser et T. Rönne, op.
cit., p. 168, et repris dans LGPN 1, Olonte, iie-ier a. C. — j.  On renoncera à Παταρήν (Dyrrh.), forme
fantôme. — k.  Graphie en alphabet archaïque où le lambda n’est pas géminé, selon l’habitude géné-
rale à date. — l.  Je remercie Alcorac Alonso Déniz pour cette suggestion très intéressante, inspirée
de la discussion philologique de Ἐννοδια Στρογικα / Στροπικα par J. L. García Ramón et B. Helly
(« Deux nouvelles épiclèses de la déesse En(n)odia dans des inscriptions de Larisa », dans A. Blanc,
L. Dubois et C. de Lamberterie (éd.), Polymètis. Mélanges en l’honneur de Françoise Bader, Lou-
vain, 2012, p. 42-43). Voir aussi infra p. 82. — m.  La tradition littéraire et parémiographique donne
presque toujours Τέλλην (Dicéarque fr. 103.1, Plut. Paroem. 1.27.1, Diogenan. Paroem. 1.44, etc.)
dans l’injonction proverbiale : « Ἄειδε τὰ Τέλληνος », mais les grammairiens – Hérodien (III.1,
p. 15), Arcadius (Accent. 7) et Ps.‑Zonaras (Lex. T, 1716) –, ainsi que Léonidas de Tarente (7, 719)
et Plutarque (Reg. Apophth. 193F), accentuent Τελλήν, ce qui me paraît préférable. — n.  Τεῖτος Τει-
μῆνος (LGPN 3a, Dyrrh., imp.), avec graphie inverse ΕΙ pour Ι. — o.  Τυρήν (LGPN 2, Athènes, 330-
320 a. C.) doit bien être considéré comme un anthroponyme en ‑ήν, ‑ῆνος. SEG 18, 13.433 donne :
Τυρὴν αὐλοποι(ός) ἐν Κυδαθη(ναίωι) οἰκῶ(ν) ἀποφυγώ[ν], avec accord des participes au masculin,
selon un usage cohérent tout au long du texte et dans les inscriptions athéniennes du même type
(IG ΙΙ2 1554-1559). — p.  Alors que Χαρμήν se lit parfaitement sur le revers du triobole d’argent, le
nom figure avec un point d’interrogation dans B. V. Head, A Catalogue of the Greek Coins in the Bri-
tish Museum, 18. Caria, Cos, Rhodes, etc., Londres, 1897, p. 107, no 50, et il est absent du LGPN 5a.

1.4. La nature des sources


Du tableau il ressort que la majorité des anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος
– exactement 43 – sont connus par les sources épigraphiques et / ou
numismatiques. La tradition littéraire ne fournit que quatre noms inédits,
Ἀκ[ρη]φείν, Ἀνθήν, Δαμασήν et Ὠλήν, ce qui représente 8,5 % du total et
2 % des occurrences, alors que quatre autres noms – Ἀγήν, Δαμήν, Πυθήν,
Τελλήν – figurent dans les deux types de sources. Le poids exorbitant des
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 75

données épigraphiques et numismatiques permet de comprendre pour-


quoi les considérations de géographie dialectale ont conditionné l’ana-
lyse de ce groupe d’anthroponymes.

1.5. La répartition géographique des noms


Signalons d’abord que les sources ne permettent pas de situer l’ori-
gine des deux Πυρρήν, à Delphes et Athènes, ni celle du poète Τελλήν 20,
non plus que celle du personnage éponyme du drame satirique Ἀγήν.
Cela posé, l’écrasante majorité des occurrences des anthroponymes en
‑ήν, ‑ῆνος se rencontre encore en Grèce du Nord-Ouest – presque 70 %
du total –, alors que Corinthe ne fournit que deux exemples, Πυθήν et
Τελλήν, et Corcyre cinq, pour trois noms, Ἀγήν, Ἀλκήν et Λυσήν 21. Il
apparaît que, malgré l’origine corinthienne de ces noms, c’est dans les
colonies de ces deux cités qu’ils ont fait l’objet d’un véritable engoue-
ment. Ils sont également présents dans les cités, villes ou régions
avoisinantes : Illyrie (koinon de Byllis ; Dimalè, Skodra), Dalmatie (fon-
dations syracusaines d’Issa 22 et Korkyra Melaina, Salona, etc.), Acar-
nanie (Amphilochia et sa région), Épire (Bouthrôtos, ville en relation
avec Corinthe dès l’époque archaïque ; koinon de l’Épire ; Antigoneia
de Chaonie), Locride orientale (Oponte 23, Halai). On y voit avec vrai-
semblance le résultat d’une influence aréale. Le total de ces occurrences
cumulées avec les précédentes frise les 80 %.
Il n’en demeure pas moins que l’existence avérée d’anthroponymes
en ‑ήν, ‑ῆνος dans d’autres régions, bien qu’elle apparaisse marginale,
doit être examinée. C’est en Grèce centrale que les occurrences sont les

20. Pourtant ce Τελλήν est connu comme « auteur de poèmes confus » (Dicéarque fr.
102) ou de « chansons pour rire » (Anth. 7.719) et comme « flûtiste exécrable »
(Plut. Reg. Apophth. 193F).
21. Ce qui peut s’expliquer en partie par la maigreur des sources épigraphiques d’époque
ancienne dans ces deux cités : cf. I. Athanassoudi, « L’état du corpus de Corinthe »,
Verbum 17 (1994), p. 337‑343, et M. Baillard, « Le corpus de Corcyre », Verbum 17
(1994), p. 345‑351.
22. Une liste athénienne d’acquittements mentionne un Τυρήν, fabricant de flûtes dont
on peut penser qu’il est originaire de la ville dalmate de Turus, Τύρος en grec, ce que
valide le LGPN (LGPN 3a, Issa [Dymanes], ive-iiie a. C.). Suggestion de F. Bechtel
(HPN 553) suivie par O. Masson, « À propos d’inscriptions grecques de Dalmatie »,
BCH 114 (1990), p. 503 (= OGS III, p. 83).
23. Θαρσήν, juge envoyé à Delphes (LGPN 3b, Oponte, 145 a. C.).
76 nicole guilleux

plus nombreuses : deux en Phocide (Χερσήν et un prytane, Τελλήν, à


Delphes), quatre en Béotie (Ἀκ[ρη]φείν chez Corinne, Καλλήν à Aulis,
Πουρεινίδας à Orchomène et un Τελλήν thébain, fils de Κύψελις, dont le
patronyme signale des « antécédents » corinthiens) et trois en Mégaride
(Λυσήν et Τελλήν à Mégare même, Καλλήν à Ægosthènes). Pour l’Ar-
golide, Hérodien transmet le nom d’un historien, Δαμήν 24, nom par ail-
leurs connu par les inscriptions et les monnaies du Nord-Ouest, tandis
que, pour le reste du domaine dorien, on peut citer deux anthroponymes :
l’olympionique éléen Στροπήν et Κηκήν en Crète (Olonte). S’y ajoutent
Σωσήν, nom d’un fabricant de tuiles disséminées entre Sicile et Grande
Grèce, et Πολ(λ)ήν, Τελλήν et Ἱππήν, anthroponymes gravés sur des
vases ou une lampe, objets mobiles par excellence, ce qui ne permet pas
de garantir l’origine de ceux qui portent ces noms. Ces anthroponymes
attestés en Grèce centrale et en Crète indiquent soit une diffusion à partir
de Corinthe, soit un usage à date ancienne sur une aire plus vaste que la
seule Corinthie.
Restent à mentionner les noms attestés loin de Corinthe et de la Grèce
du Nord-Ouest. L’un d’eux l’est à Chalcédoine, colonie de Mégare, qui
fournit deux anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος. Or il convient de reconnaître,
avec L. Robert 25, l’influence d’une métropole sur l’anthroponymie de ses
colonies. Ainsi, l’origine chalcédonienne attribuée au philosophe pytha-
goricien Ἀνθήν se trouve justifiée, de même que – mais d’une manière
moins contraignante – la présence d’un Ἀριστήν à Olympe de Bithynie et
du myste Καλλήν à Imbros, tous lieux proches des établissements méga-
riens de Propontide 26. C’est une explication identique qui pourrait valoir
pour les deux Λυσήν d’Iasos (LGPN  5b, ca 230-210  a. C. et ca 173-
167 a. C.), si l’on admettait l’existence de liens anciens entre la cité et
Argos 27. Mais il semble moins vraisemblable d’expliquer de la sorte les
quatre derniers anthroponymes attestés en Asie Mineure. On ne saurait

24. Voir FGrH 304 T 1.


25. L. Robert, « Les inscriptions grecques de Bulgarie », RPh (1959), p. 230‑234 ; idée
reprise dans L. Robert, Hellenica, p. 516-517.
26. Cf. A. Robu, Mégare et les établissements mégariens de Sicile, de la Propontide et
du Pont‑Euxin. Histoire et institutions, Berne - Berlin, 2014, p.  201‑324, et carte
p. 488.
27. Εὔχονται δὲ τὸ μὲν ἀνέκαθεν Ἀργείων ἄποικοι γεγονέναι « Ils se vantent d’être, à
l’origine, des colons d’Argos », écrit Polybe (XVI, 12.2), qui récuse cette informa-
tion, au milieu d’autres, en ce qu’il s’agit d’un « conte pour enfants ».
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 77

en effet mettre sur le compte d’une influence directe ou d’une « dias-


pora » soit mégarienne soit argienne les noms Δαμασήν du héros sau-
roctone de Méonie mis en scène par Nonnos 28, Χαρμήν d’une monnaie
d’Halicarnasse 29 ou Ὠλήν, nom d’un poète lycien, auteur d’hymnes et
prophète d’Apollon selon Hérodote (IV, 35) 30. Même chose pour l’attes-
tation en Phrygie de Κιλλήν, que j’ai choisi d’intégrer au corpus en me
fondant sur la lecture Κε�ιλ[λ]ήν de J.  H.  Oliver 31. La localisation des
quatre derniers anthroponymes autorise, me semble-t-il, à se demander
avec prudence s’ils ne témoigneraient pas d’un héritage antérieur à la
colonisation, d’un substrat « pré-dorien » pour reprendre l’expression de
F. Solmsen, étant donné ce que l’on sait maintenant des contacts entre les
Grecs du IIe millénaire et les populations d’Asie Mineure 32.
Donc, si la plus forte concentration des anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος
se situe à l’évidence dans l’aire corinthienne et plus précisément en
Grèce nord-occidentale, il est indispensable de signaler leur présence,
certes plus discrète, en Grèce centrale – dans la région de Mégare et dans
une de ses colonies de Propontide, ainsi qu’en Béotie et en Argolide – et
en divers points de l’Asie Mineure.

1.6. La répartition chronologique des sources


C’est à partir de la période hellénistique que les 4/5e des anthropo-
nymes en ‑ήν, ‑ῆνος et de leurs occurrences se concentrent en Grèce du
28. Bien que Nonnos soit un auteur tardif, il utilise, on le sait, du matériel qui peut être
ancien. Ce qu’on ne saurait exclure dans le cas présent, malgré l’impossibilité de le
prouver.
29. Cf. supra n. p, p. 74. De R. Münsterberg, Die Beamtennamen auf den griechischen
Münzen, Hildesheim, 1927, p. 118, à O. Masson, « À propos de la réimpression des
Beamtennamen auf den griechischen Münzen de Rudolf Münsterberg », RPh (1977),
p. 88 (= OGS III, p. 6) on constate le rejet de l’idée qu’un tel anthroponyme puisse
être attesté en Carie. Cette objection a priori ne me paraît pas recevable.
30. Le LGPN opte pour l’origine lycienne du personnage, suivant en cela l’opinion
dominante qui découle des informations transmises par Hérodote (IV, 35) et relayées
par Boeus, Callimaque et Pausanias (12 mentions). Cependant, des sources minori-
taires (Alex. Polyh., fr. 85, Souda Ω 71) le disent originaire de Dymè, ville d’Achaïe.
Difficile de trancher.
31. Cf. supra p. 72 et n. h, p. 74. Discussion de la formation infra p. 84.
32. Sur cette question délicate, cf. R. Treuil et al., Les civilisations égéennes du néoli-
thique et de l’âge de Bronze, Paris, 2008, 2e édition, p. 366-369, où sont mentionnées
notamment les nécropoles de Kos (Eleona et Langada) et de Carie (Müsgebi).
78 nicole guilleux

Nord-Ouest ; leur usage s’y prolonge durant l’époque romaine et sous


l’Empire. Il est difficile d’aller plus avant dans l’analyse car, très souvent,
inscriptions et monnaies ne sont pas datables avec précision. Pour les
périodes archaïque et classique, qui fournissent environ 20 % des occur-
rences totales, les inscriptions sont plus rares qu’ensuite et la répartition
géographique des noms les plus anciennement attestés est beaucoup plus
variée qu’aux époques ultérieures. Il apparaît qu’alors la localisation des
anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος n’est pas concentrée dans une seule région,
ce qui accrédite l’idée que l’origine de ces formations puisse ne pas être
une exclusivité corinthienne, et encore moins nord-occidentale.
La tradition indirecte, en bien des cas plus ancienne que les témoi-
gnages épigraphiques, constitue, au regard de la diversité des lieux d’at-
testation de ces anthroponymes, une source d’information qu’il serait
malvenu de négliger, voire de refuser de prendre en compte.
Il reste à examiner ces formations dans leur usage social et dans leur
formation en synchronie, avant de se pencher sur leur origine.

2. Les anthroponymes masculins en ‑ήν, ‑ῆνος


en synchronie et en diachronie

2.1. Les anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος : aperçu


prosopographique
Les porteurs d’un anthroponyme en ‑ήν, ‑ῆνος en Grèce du Nord-
Ouest appartiennent à la catégorie des magistrats aussi bien qu’à celle
des simples citoyens : le monnayage en témoigne pour les uns et les
inscriptions funéraires, en partie, pour les autres 33. Il est généralement
admis – ce qui, à mon avis, ne vaut qu’en synchronie – que les anthropo-
nymes en ‑ήν, ‑ῆνος sont la contrepartie de ceux en ‑ων, ‑ωνος 34, parce
que les uns et les autres partagent la propriété d’être ou des abrévia-
tifs ou des sobriquets. C’est ce qu’illustrent par exemple les formules
onomastiques Καλλὴν Καλλιπίδα (LGPN 3a, Dyrrh., iiie a. C.) pour les

33. Pour le monnayage, voir le tableau (passim), supra p. 71‑73 et, pour les épitaphes,
voir entre autres Ἀρχήν (LGPN 3a, Dyrrh., hell.), Ἱερήν (LGPN 3a, Dyrrh., iiie a. C.)
et Νικήν (LGPN 3a, Apollonia, iie a. C.).
34. Cf. notamment P. M. Fraser et T. Rönne, op. cit., p. 167‑169.
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 79

abréviatifs 35, et Βαδύλα Γοργῆνος (LGPN 3a, Dyrrh., hell.‑imp.) pour


les sobriquets. En cela, ce sont des formations parfaitement grecques,
et non illyriennes, ce sur quoi M. Beauregard a raison d’insister quand
il présente le matériel d’Apollonia et d’Épidamne-Dyrrhachion. Pour ce
qui est des abréviatifs, qui sont de beaucoup les plus nombreux dans le
corpus – sans doute parce qu’ils sont plus flatteurs à porter –, on observe
que coexistent dans la société, voire dans la même famille, les variantes
diversement suffixées d’une même base lexicale : ainsi, les séries Ἀγήν,
Ἀγίας, Ἀγίων, ou Ἀριστέας, Ἀριστήν, Ἀριστίων, Ἀρίστων 36… Je citerai
également le nom des individus suivants, parmi de nombreux autres :
Καλλήν Φίλωνος (LGPN 3a, Dyrrh., hell.-imp.), Αἴσχρων Ἀριστῆνος
(LGPN 3a, Issa, ive-iiie  a. C.), Κτήσων Ἀριστῆνος (LGPN 3a, Dyrrh.,
hell.). Ils confirment que, pour les locuteurs hellénophones d’Illyrie et
de Dalmatie – au-delà même des deux cités scrutées par Marc Beau-
regard –, les suffixes ‑ήν, ‑ῆνος et ‑ων, ‑ωνος sont perçus comme des
variantes l’un de l’autre. La fréquence de leur emploi conjugué semble
relever d’un effet de mode, tout comme l’usage combiné de deux anthro-
ponymes en ‑ήν, ‑ῆνος. C’est le cas d’un fabricant de tuiles, Καλλὴν
Παυσῆνος (LGPN 3a, Apoll., hell.), de Ἀριστὴν Ἀγῆνος (LGPN 3a,
Dyrrh., iie a. C.) et encore d’un Καλλὴν Καλλῆνος (LGPN 3a, Dyrrh.,
hell.‑imp.). D’autres formules onomastiques, telles Τειτος Τειμῆνος
(LGPN 3a, Dyrrh., iie-ier a. C.), Ἀριστὴν Σκυρθανα (LGPN 3a, Dyrrh.,
hell.‑imp.) ou Θαρνα Ἀριστῆνος (LGPN 3a, Dyrrh., hell.‑imp.) asso-
cient un anthroponyme grec à un autre, romain ou peut-être illyrien. Si le
milieu où les anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος sont en usage est plurilingue,
apparemment, le suffixe semble n’avoir servi que rarement à helléniser
une base non grecque : en effet, seuls Τυρήν et moins sûrement Σαλλήν
peuvent relever de cette catégorie 37.
Il ne fait nul doute que le suffixe ‑ήν, ‑ῆνος, formant typiquement grec,
a été perçu en Illyrie et dans les régions environnantes comme un moyen
commode d’élargir le répertoire d’anthroponymes, étant donné sa grande
productivité dans l’aire dialectale nord-occidentale. Il a sans doute aussi
servi à créer un sentiment de distinction et d’« entre soi » hellénophone.

35. Dossier complet dans N. Guilleux, art. cit., p. 290-292.


36. M. Beauregard, op. cit., p. 65.
37. Cf. infra p. 81 et 84.
80 nicole guilleux

De fait, il est significatif que ce soient les abréviatifs qui prédominent


dans le corpus, représentant 80 % des anthroponymes de cette région, au
détriment des sobriquets et très accessoirement des ethniques.

2.2. Fonctions du suffixe ‑ήν, ‑ῆνος en synchronie


Au regard de la morphologie lexicale, le suffixe ‑ήν, ‑ῆνος, ainsi que
je l’ai déjà écrit 38, a principalement une fonction abréviative et, secon-
dairement, une fonction individualisante, ce qui recoupe les usages du
suffixe ‑ων, ‑ωνος en onomastique.
Abréviatifs
Les abréviatifs, qui prédominent dans le corpus (38 noms sur 46 avec
Χαρμήν) 39, obéissent à un principe de formation bien réglé : tirés d’an-
throponymes composés, ils en reprennent généralement le premier terme,
comme dans Ἀριστήν / Ἀριστο-κλῆς, Ἀριστό-δαμος. Il arrive aussi que
le début du second membre du composé soit conservé dans l’abréviatif,
comme dans le type Πάτροκλος / Πατροκλῆς : ce qu’illustrent Σωσιλήν /
Σωσίλαος et Σωστρήν / Σώστρατος. Quant à Χαρμήν (Halicarnasse),
dont je ne vois pas à quel titre mettre en doute l’existence 40, on peut le
rapprocher des composés en Χαρμ(ο)‑ : il répond parfaitement à Χάρ-
μιππος (LGPN 1, Cos, 17 fois, ca 200 a. C.) ou Χαρμοκλῆς (LGPN 1,
Cos, ca 200 a. C., Rhodes, iiie-iie a. C.) et il entre dans la série des abré-
viatifs au même titre que Χάρμης (LGPN 1, Rhodes, ca 210‑175 a. C.)
ou Χάρμων (LGPN 1, Rhodes, iie-ier a. C.).
Sobriquets
Pour les anthroponymes relevant de la fonction individualisante
de ‑ήν, ‑ῆνος, on compte seulement trois sobriquets assurés : Γοργήν,
tout d’abord. En effet, en l’absence de toute occurrence de composé en

38. N. Guilleux, art. cit., p. 292-293. Les indications données ici seront donc allusives,
sauf en cas de nom ne figurant pas dans le premier état du corpus.
39. Appartiennent assurément à cette catégorie : Ἀγήν, Ἀλεξήν, Ἀλκήν, Ἀνθήν, Ἀρι-
στήν, Ἀρχήν, Βοικήν, Δαμασήν, Δαμήν, Ἐθελήν, Θερσήν / Θαρσήν, Ἱερήν, Ἱππήν,
Καλ(λ)ήν, Λαήν, Λυκήν, Λυσήν, Μενήν, Μνασήν, Ναυσήν, Νικήν, Ξενήν, Παρμήν,
Πατερήν, Παυσήν, Πoλ(λ)ήν, Πυθήν, Πυρρήν, Σωσήν, Σωσιλήν, Σωστρήν, Τεισήν,
Τελλήν, Τιμήν, Χαιρήν et Χερσήν.
40. Cf. supra n. p, p. 74.
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 81

Γοργ‑ en Grèce du Nord-Ouest, il me paraît plus vraisemblable de lier


cet anthroponyme à l’adjectif γοργός « impétueux, farouche », sur lequel
a été fait Γόργος, nom du fils du tyran corinthien Κύψελος, sobriquet lui
aussi, qui renvoie à l’oiseau « martinet ». D’ailleurs, comme le souligne
O.  Masson 41, les noms d’animaux constituent une source importante
en anthroponymie, ce qu’illustre également Κηκήν, nom isolé, qu’on
explique de manière convaincante par la glose d’Hésychius κεκῆνας·
λαγωούς. Κρῆτες « kekênas : lièvres. Crétois » 42. Quant à Σατυρήν, il est
clair qu’il est en rapport avec Σάτυρος (HPN 567-568, LGPN, 530 occur-
rences, pangrec, ve a. C.-iiie p. C.).
Ethniques
Le dernier emploi, atypique celui-là, du suffixe ‑ήν, ‑ῆνος, est celui
d’ethnique utilisé comme nom personnel. Cette fonction paraît relati-
vement ancienne et probablement résiduelle, puisque l’exemple le plus
assuré date du vie-ve  siècle a. C. Il s’agit de l’anthroponyme béotien
Ἀκ[ρη]φείν, nom d’un prophète transmis par Corinne, qui apparaît
comme une variante de l’ethnique proprement dit, Ἀκραιφιεύς, bien
attesté (plus de 65  occurrences) essentiellement à Akraiphia même ou
dans le sanctuaire du Ptoïon, mais aussi une fois à Lébadée, cinq fois à
Oropos et deux fois à Delphes. Selon P. Fraser, le choix d’une variante
est rare dans les inscriptions 43. Sans doute faut-il l’attribuer au contexte
poétique : Corinne a pu opter pour une forme archaïque de l’ethnique,
faite sur le modèle des ethniques divins et royaux, qui ne sont pas néces-
sairement fondés sur la même base que l’ethnique courant 44. Le statut de
Τυρήν, dont on a vu plus haut 45 qu’il a pour base Τύρος, nom hellénisé
de la ville dalmate de Turus, ressortit à une catégorie différente : ethnique
certes, il est selon toute probabilité un mot nouveau, puisque sa base est
empruntée.

41. O.  Masson, « L’apport de l’anthroponymie grecque à l’étymologie et à l’histoire


des mots », dans F. Létoublon (éd.), La langue et les textes en grec ancien. Actes du
colloque Pierre Chantraine, Amsterdam, 1982, p. 264 (= OGS ΙΙΙ, p. 147).
42. Déjà HPN 582.
43. P. M. Fraser, « Ethnic as Personal Names », dans GPN, p. 151.
44. Cf. J.-L. Perpillou, Les substantifs grec en -εύς, Paris, 1972, p. 343-345.
45. Supra p. 79 et n. o, p. 74.
82 nicole guilleux

Noms inanalysables ou discutés (abréviatifs ou sobriquets, ethniques


ou sobriquets)
Il est parfois difficile de classer certains anthroponymes. Ainsi Στρο-
γιήν (LGPN 3a, Élide, fin ier a. C.), ne se laisse pas interpréter tel qu’il
est édité. Cependant, si l’on admet la lecture alternative Στροπήν 46, on
peut mettre ce nom en rapport non seulement avec les gloses d’origine
paphienne στορπάν· τὴν ἀστραπήν « storpan : l’éclair » (Hsch., σ 1938
Hansen) et στροπά· ἀστραπή· Πάφιοι (Hsch., σ 2030 Hansen) 47, mais
aussi avec deux épiclèses, celle de Zeus Στόρπας à Tégée (Διός Στορπάο,
ve  a. C.) et d’Ennodia Στορπικά à Larissa 48. Στροπήν serait alors un
sobriquet, tiré du nom de l’éclair et il entrerait dans la série des anthro-
ponymes comme Ἀστήρ ou Σπινθείρ (HPN 599).
Dans quelle catégorie faire entrer le nom *Πυρήν, qui se déduit
du patronymique béotien Πουρεινίδας (HPN 392, LGPN 3b, Orcho-
mène, 223 a. C.) ? Il est tentant de le lier à πυρήν « noyau, pépin » ou
à πυρός « grain de blé », mais cette interprétation n’est pas la seule
possible. De fait, F.  Bechtel 49 interprète *Πυρήν comme un abréviatif
du composé Πύρ-ιππος (LGPN 3b, Chéronée, hell.), bahuvrihi paral-
lèle à Γλαύκ‑ιππος (LGPN : 57 occurrences, toutes régions, à partir du
ve  a. C.), Λεύκ‑ιππος (LGPN : 45  occurrences, toutes régions, à partir
du vie a. C.) ou Ξάνθ‑ιππος (LGPN : 89 occurrences, toutes régions, à
partir du vie a. C.), ce que sa formation de patronymique en ‑ίδας pour-
rait accréditer. Mais on peut s’étonner aussi de ce que Πύρ-ιππος, certes
attesté en Béotie, soit si rare. Ce serait en outre ne pas considérer que le
suffixe s’ajoute en toutes régions à de nombreux sobriquets 50, lesquels,
comme Μυσχίδης (HPN 482, LGPN : 1 occurrence, Athènes, milieu du
ive a. C., ainsi que Μύσχων / μύσχον), peuvent être extrêmement triviaux.
Il n’est donc pas sûr que Bechtel ait raison, d’autant que les sobriquets

46. Cf. supra p. 73 et n. l, p. 74.


47. Cf. M. Egetmeyer, Le dialecte grec ancien de Chypre, I. Grammaire, Berlin - New
York, 2010, p. 161-162.
48. J. L. García Ramón et B. Helly, art. cit., p. 45-48 pour la justification de la forme et
son analyse.
49. Cf. Bechtel, HPN 392, sous l’entrée « Πυρο‑ zu Πυρϝός ».
50. Δρωπίδης / Δρωπίδας (HPN 477, LGPN : 13 occurrences, Attique, Macédoine, etc.,
dès le viie  a. C. / δρώψ), Κυλωΐδας (HPN 480, LGPN 3a, Sparte, 334-324 a. C. /
κύλα), etc.
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 83

reposant sur des noms de plantes sont bien attestés 51. À examiner en


outre les anthroponymes de l’inscription béotienne, IG VII 3179, attes-
tant Πουρεινίδας, on observe que, loin de tous être des noms composés
ou des abréviatifs, trois d’entre eux sont des sobriquets : Δρωπούλος père
de Ἀμφικτούων (cf. HPN 477 : Δρουπύλος, Pharsale, iiie a. C. / δρώψ),
Κάπων fils de Θιόδωρος (cf. HPN 601 : Thespies, ve a. C. 52) et Λίπαρος
fils de Ὀνάσιμος (HPN 489, un Richard, un « opulent », λιπαρός au sens
positif du terme). Au total, aucune des deux interprétations du *Πυρήν
sous-jacent à Πουρεινίδας ne me paraît à exclure, et je ne trancherai pas
entre l’abréviatif d’un composé et le sobriquet Monsieur Pépin ou Mon-
sieur Blé.
De même, Ὠλήν, Κιλλήν et Σαλλήν sont-ils des ethniques ou des
sobriquets ? Le poète Ὠλήν, dont Hérodote nous transmet qu’il est lycien,
a un nom qu’on peut associer à Ὤλενος, nom de trois cités d’Achaïe,
d’Étolie et de Triphylie 53. Ce rapprochement est gênant car il contredit
l’origine supposée de Ὠλήν. D’ailleurs, c’est sans doute pour cette raison
qu’Alexandre Polyhistor (fr. 85) et la Souda (ω 71 Adler) le disent ori-
ginaire de Dymè, en Achaïe, ce qui le rapproche en outre du foyer grec
des anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος. Cela étant, se trouve confirmé le fait
que, dans l’Antiquité, Ὠλήν pouvait s’interpréter comme un ethnique.
Mais on pourrait aussi bien faire d’Ὠλήν un sobriquet, le rapprochant
de la glose ὠλήν· [...] ὁ βραχίων « ōlḗn : le bras » (Suda ω 70 Adler),
et de l’adjectif mycénien o‑re-ne‑a/ ‑ja/ ‑jo « avec des manches » (uel
sim.), qui caractérise des vêtements à Cnossos et qui atteste indirecte-
ment l’athématique en ‑n‑ au IIe millénaire 54. Ὠλήν entrerait alors dans
la même série d’anthroponymes que Κόσυβος ou Τρίβων (HPN 600-
601). Mais comme le sens d’ὠλήν peut être métaphorique et désigner

51. Bechtel en enregistre 123, dont 75  pour les hommes. Me limitant aux noms de
graines, je citerai Καχρυλίων (HPN 593, LGPN 2, Athènes, vie  a. C.) / κάχρυς
« orge grillée »), Κέγχραμος (HPN 593, LGPN 2, Athènes, ive  a. C.) / κεγχραμίς
« graine de figue »), Κόκκαλος (HPN 593, 5 occurrences, Issa et Asie Mineure,
ive  a. C.-ier  p. C. / κόκκαλος « pignon ») et Σήσαμος (HPN 594, LGPN 1, Délos
[Athen.], 173 a. C. ; LGPN 5a, Héraclée, ive a. C. / σήσαμον « sésame »).
52. Le Κάπων d’Orchomène n’est pas mentionné, mais un autre l’est à Thèbes. Le nom
est fondé sur le type de coiffure appelé κῆπος, sur quoi voir la notice de Sophie
Minon dans le DELG3 p. 1314.
53. Cf. P. M. Fraser, Ethnic Greek Terminology, Oxford - New York, 2009, p. 164‑166.
54. Cf. DMic. s.v.
84 nicole guilleux

« la courbe d’une colline ou le coude d’une rivière » 55, on a de nouveau


des arguments en faveur d’un ethnique qui pourrait être compatible, cette
fois, avec l’origine lycienne du poète.
Κιλλήν peut être mis en relation ou avec Kίλλος, et donc rapporté à
Kίλλα, nom d’une ville de Troade (HPN 557), ou avec Kίλλης qui est tiré
du nom de couleur κιλλός « gris » (HPN 494) : son lieu d’invention, la
Phrygie, incite à lui donner pour origine un ethnique, sans autre argument
décisif.
Σαλλήν, enfin, (LGPN 3a, Dyrrh., iie  a. C.), a été rapproché par
Masson de Σαλλας (LGPN 3a, Issa : 8 fois, de ive-iiie a. C. à fin iie a. C.)
qui, à son avis, appartient au stock des noms « illyriens » 56. Masson
manifeste cependant une légère réticence à l’égard de cette analyse
quand il constate l’absence « d’équivalent latinisé Sallas dans les ins-
criptions de Dalmatie ». Ne serait-il pas préférable alors de souscrire à
la proposition de J. Curbera 57 qui invoque le groupe lexical de σάλος
« agitation » et celui de σαλός « imbécile, fou » 58, lequel peut qualifier
des êtres extravagants, philosophes, intellectuels et, plus tardivement,
saints ? En effet, s’appuyant sur la mention, chez Diogène Laërce (2.46),
d’un certain Σάλαρος Πριηνεύς, opposant du philosophe Bias de Priène,
Curbera suggère, « despite the existence of a name Σαλας in Thracian,
Illyrian and Lydian », de chercher une explication du côté du grec. C’est
que l’onomastique fournit aussi Σάλαξ (LGPN 2, Athènes, ca 500 a. C.),
Σάλακος (LGPN 1, Théra, vie a. C.), ainsi que Σάλιος (LGPN 2, Athènes,
fin iiie  a. C.), Σάλλιος (LGPN 2, Athènes, 325‑300 a. C.) et Σάλλιον
(LGPN 4, Olbia-Borystène, ier-iie p. C.). Je ne peux dire laquelle de ces
deux options est préférable, un cas d’homonymie n’étant pas après tout
à exclure.

55. Cf. DELG ὠλένη s.v.


56. O. Masson, « Dalmatie », art. cit., p. 503 (= OGS III, p. 83). L’exemple de Τυρήν
(cf. supra p. 79 et p. 74, n. o) montre que le suffixe ‑ήν, ‑ῆνος permet la création de
nouveaux anthroponymes sur des bases non grecques.
57. J. Curbera, « Simple Names in Ionia », dans PNAA, p. 139.
58. S’ils sont distincts, ce qui n’est pas assuré. Je me demande d’ailleurs si, du substantif
à l’adjectif, l’écart sémantique ne s’expliquerait pas par un rapport métaphorique
établi entre l’agitation et le dérangement psychique, comme dans l’expression fran-
çaise familière être complètement secoué, qui signifie « être totalement dérangé, être
fou ».
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 85

Pour conclure sur la fonction du suffixe dans les anthroponymes en


‑ήν, ‑ῆνος, il me paraît important de souligner que, même s’ils donnent
l’impression d’être le pendant des dérivés en ‑ων, ‑ωνος quand il s’agit
d’abréviatifs et de sobriquets, le fait que le suffixe ‑ήν, ‑ῆνος ait permis,
plus rarement il est vrai, de créer des ethniques invite à le rapprocher du
suffixe ‑εύς 59. Or il se trouve que les hypocoristiques en ‑εύς – à l’ex-
ception d’Ἀνθεύς, attesté en Dalmatie, mais dans la fondation syracu-
saine d’Issa – sont précisément absents de l’aire où les anthroponymes
en ‑ήν, ‑ῆνος sont majoritaires, alors que près d’un tiers des abréviatifs
de ce type ont un répondant en ‑εύς hors de leur zone d’attestation privi-
légiée, la Grèce du Nord-Ouest : ainsi, Ἀγεύς, Ἀριστεύς, Ἀρχεύς, Θαρ-
σεύς, Ἱππεύς, Καλλεύς, Λυκεύς, Μνασεύς, Νικεύς, Πυθεύς et *Τελλεύς,
sous-jacent au patronymique Τελλεΐδας. Il convient donc d’examiner à
présent ce que peut recouvrir en diachronie cette complémentarité dans
l’anthroponymie entre les suffixes ‑ήν et ‑εύς.

2.3. Le suffixe ‑ήν, ‑ῆνος des anthroponymes en diachronie


J’ai déjà indiqué plus haut 60 la nécessité de prendre en compte sans a
priori toutes les attestations, épigraphiques ou non, des anthroponymes
en ‑ήν, ‑ῆνος, de quelque région qu’elles proviennent. La validité de la
démarche diachronique est à ce prix.
Si l’essentiel du corpus se rencontre en Grèce du Nord-Ouest, l’ori-
gine grecque du suffixe est évidente : aucun indice sérieux ne permet
d’envisager qu’il ait une origine illyrienne 61, non plus qu’il soit hérité.
Les deux suffixes ‑ήν, ‑ῆνος et ‑εύς, qui sont en synchronie en distri-
bution géographique complémentaire, entretiennent une proximité fonc-
tionnelle puisqu’ils partagent la capacité à créer, outre des abréviatifs et
des sobriquets, des anthroponymes issus d’ethniques – propriété que n’a
pas le suffixe ‑ων, ‑ωνος et qui, faiblement représentée, apparaît comme
un archaïsme en voie de disparition. Ces faits m’ont amenée à chercher
l’élément-pivot dans le passage d’un suffixe à l’autre, d’une flexion à
l’autre 62 : il ne peut s’agir que de l’accusatif singulier des thèmes en
59. Cf. J.‑L. Perpillou, op. cit., Paris, 1973, p. 169‑211.
60. Supra n. h et p, p. 74 ; p. 77 et n. 29.
61. Cf. supra p. 79 et n. 36.
62. Je résume ici les points développés dans mon art. cit., p. 293‑299. On y trouvera tous
les détails que je ne peux reprendre ici.
86 nicole guilleux

‑εύς, dont la forme héritée est ‑ήν 63. On constate que, sous la pression de
l’analogie, cette finale est sortie de l’usage au Ier millénaire dans quasi-
ment tous les dialectes – à l’exception de l’arcadien et du chypriote, où
l’on en trouve des traces somme toute assez ténues. C’est donc en amont,
dans le grec des archives palatiales mycéniennes, que j’ai recherché des
attestations de cet accusatif singulier à voyelle longue. Certes, on pour-
rait objecter que l’hypothèse d’une origine mycénienne du suffixe ‑ήν,
‑ῆνος ne s’accorde pas avec le développement des anthroponymes ainsi
suffixés à partir de Corinthe. Ce serait oublier que la Corinthie a un passé
mycénien on ne peut mieux établi 64, ce qui rend tout à fait vraisemblable
la transmission de traits linguistiques d’un millénaire à l’autre. Or on peut
invoquer notamment le latif pylien e‑re‑de =  /…ḗn‑de/, dont le dérivé
est e‑re‑wi‑jo‑ =  /…-ḗwiyon‑/. Bien plus, on a la chance, rare dans ce
domaine de la philologie grecque, de disposer, à Cnossos cette fois, d’un
témoignage parfaitement fiable de la concurrence entre les thèmes en
‑εύς et en ‑ήν, ‑ῆνος, ce qu’illustre sans ambiguïté le doublet u‑wo‑qe‑ne
/u(w)‑ōkwēnes/ de l’appellatif en ‑εύς (u‑)wo‑qe‑we /u(w)‑ōkwēwes/ « sur-
veillants » 65. Moins claires et donc moins exploitables sont les « paires
formelles » d’anthroponymes mycéniens en ‑e et ‑e‑u 66.
D’autres traces indirectes d’une flexion en ‑ής, relevant de la tra-
dition manuscrite des poèmes homériques, ont été repérées dans le
substrat de la langue épique par J. Rau 67 : il suggère d’ajouter au dos-
sier quelques noms propres isolés comme Κισσῆς (à accentuer plutôt
Κισσής) qui répondent à Κισσεύς et auxquels sont associés des féminins
en ‑ηΐδ‑ (<*‑ηϝ‑ΐδ‑). On sait également qu’une désinence d’accusatif à

63. Cf. Schwyzer, GG I, p. 575-576.


64. Cf. C. Morgan, Isthmia, VIII. The Late Bronze Age Settlement and Early Iron Age
Sanctuary, Princeton (NJ) - Athènes, 1999.
65. Le mot équivaut en grec alphabétique à *ἐπ‑ωπῆϝες, qui survit dans le nom du roi
légendaire de Sicyone, Ἐπωπεύς. Sur ὐ‑/ ὑ‑, voir J.-L. Perpillou, Recherches lexi-
cales en grec ancien. Étymologie, analogie, représentations, Louvain - Paris, 1996,
p.  125‑136, et DELG p.  1361, ainsi que, sur les parfaits ϝωφλήασι et ϝωφληκόσι
« ils restent encore redevables » (Mantinée), L. Dubois, « Un vieux préfixe grec »,
dans P. Carlier et al. (éd.), Études mycéniennes. Actes du XIIIe colloque international
sur les textes égéens (Sèvres, Paris, Nanterre, 20-23 septembre 2010), Pise - Rome,
p. 421‑425.
66. Sur ce dossier discuté, voir en dernier lieu N. Guilleux, art. cit., p. 298‑299.
67. J.  Rau, « Δ 384 Τυδῆ, Ο 339 Μηκιστῆ and τ 136 Ὀδυσῆ », HSCP  104 (2008),
p. 1‑18.
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 87

voyelle longue survit dans les autres thèmes en diphtongues sur une aire
qui inclut le dorien, et que cet accusatif hérité en ‑ήν, à l’origine du dou-
blet Ζήν, Ζηνός de Ζεύς, peut expliquer l’existence de nominatifs en ‑ής
dans les noms de héros comme Ἀχιλ(λ)ής, points qu’il importe à présent
d’aborder en élargissant la perspective.

3. Les variations flexionnelles et suffixales


autour des thèmes en ‑εύς

3.1. Les flottements dans les noms de héros


et les anthroponymes en ‑εύς
Noms de héros et de personnages mythologiques
Plusieurs personnages appartenant à la mythologie ou à la fiction lit-
téraire portent un nom en ‑εύς fournissant une variante en ‑ης ou ‑ής dont
l’accentuation paraît fluctuer en fonction du lien plus ou moins implicite
fait avec le thème en -εύς correspondant. Les sources de ces noms sont
d’abord la tradition grammaticale, grecque et / ou latine : ainsi, Τύδης
(/ Τυδεύς), Φύλης 68 (/ Φυλεύς) et Ὄρφης, Ὀρφᾱ�ς 69 (/ Ὀρφεύς), que men-
tionne Hérodien (III.1, p. 14, 12-16). Ὀρφεύς constitue d’ailleurs un cas
intéressant, car on lui connaît aussi un accusatif en ‑ήν, attesté dans le
fragment 25 d’Ibycus (vie a. C.) : ὀνομάκλυτον Ὀρφήν. Un tel exemple
chez un poète dorien est notable. On remarquera en outre que le grammai-
rien latin Priscien (VI, 92, p. 276, Hertz.) transmet le même syntagme,
mais au nominatif : ὀνομάκλυτος Ὀρφήν, ce qui, loin d’accréditer une
faute, invite plutôt, selon moi, à poser l’existence d’un doublet en ‑ήν,
‑ῆνος pour Ὀρφεύς. Les inscriptions sur divers supports fournissent éga-
lement d’autres noms bien connus, comme Ἀχιλς du pinax de Sybaris
(580‑570  a. C.) 70 ou Γᾱρυϝονς, Γρυϝονς et Ϝῑλιονς des légendes

68. Nominatifs Τύδης et Φύλης, ainsi que le vocatif Τύδη – parallèle à Χρύση
(Il. 1.442) –, chez Antimaque de Colophon dans les fragments 6 et 7 de sa Thébaïde.
69. Ὀρφᾱ�ς, signalé par Schwyzer, GG I, p. 575, se rencontre dans une inscription de
Sicyone du vie  siècle a. C. (référence dans S.  Minon, Les inscriptions éléennes
dialectales. VIIe-IIe siècles avant J.-C., Genève, 2007, vol. I, p. 290, n. 13).
70. L. Dubois, IGDGG, 2. Colonies achéennes, Genève, 2002, no 6, p. 27‑30, avec dis-
cussion approfondie du dossier, dont je reprends les grandes lignes dans cet alinéa.
88 nicole guilleux

vasculaires non attiques 71, ainsi qu’Ἐρεχθς, Ὀλυτς, Περσς, Προμθς


et Πλς des vases attiques. Il faut enfin mentionner les sources latines,
épigraphiques ou indirectes. Les premières attestent des anthroponymes
grecs latinisés en Italie du Sud – Aciles (LGPN 3a, Volcei, ier  a. C.),
L. Sep. Achilles (LGPN 3a, Salerne, iie p. C.) – et en Illyrie – M. Ins-
teius Agiles (LGPN 3a, Byllis, imp.). La tradition manuscrite est, elle
aussi, riche d’exemples : Achillēs, Nerēs, Pelēs, Persēs, Telēs et Ulixēs.
Je m’appuie ici sur l’étude de F. Biville 72 : rendant compte des noms
latins en -ēs de héros grecs originellement suffixés en ‑εύς, elle ne sous-
crit pas à l’explication traditionnelle qui consiste à invoquer l’influence
d’un intermédiaire étrusque, car cette « thèse étrusque » 73 ne prend pas
en considération la neutralisation dans cette langue des finales grecques
‑εύς ou ‑ής / ‑ης. Au contraire, elle privilégie une explication interne au
grec, qui, elle le souligne à juste titre, a déjà abouti, au moins dans l’aire
dorienne, au remplacement de ‑εύς par ‑ής ou ‑ης.
Ce recensement met en lumière une abondance et une diversité des
attestations qui oblige à en tenir le plus grand compte et, à mon avis, à y
voir, non des faits dispersés qu’il faudrait tenter de récuser au coup par
coup 74, mais les témoignages convergents d’un même phénomène quasi-
ment pangrec, qui inclut les principaux genres littéraires et qui est enra-
ciné dans la protohistoire du grec.
Des anthroponymes masculins en ‑ής ou ‑ης, distincts
de ceux en ‑ῆς
La concurrence flexionnelle et suffixale ne se limite pas à quelques
noms de héros. Elle se rencontre aussi dans l’anthroponymie avec Δίης et
Ζώης notamment, qu’O. Masson a repérés loin de la Grande Grèce et des
colonies corinthiennes 75. Le premier nom, connu par la tradition manus-

71. R. Wachter, NAGVI, respectivement, CHA 2c, CHA 9c et COR 74k ; L. Dubois
IGDGG 2, p. 29.
72. F. Biville, « Achille, Ulysse, Pélée… et les autres : les métamorphoses de quelques
noms de héros grecs », RPh (1986), p. 212-213.
73. C.  De Simone, Die griechischen Entlehnungen im Etruskischen, Wiesbaden,
1968‑1970, vol. 1, p. 123-125.
74. Il en va ainsi, à mon avis, du traitement des nominatifs en ‑ής des noms héroïques ou
mythologiques des vases attiques, qui sont parfois expliqués comme étant des fautes.
75. O. Masson, « Notes d’anthroponymie », art. cit., p. 165 (= OGS I, p. 9) ; « Nouvelles
notes d’anthroponymie grecque : VII. Essai d’une histoire de Δίης », ZPE 102 (1994),
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 89

crite chez Crinagoras (Mytilène, AP VII, 628.5), est également fréquent,


entre le iiie et le ier a. C., dans les inscriptions de Lesbos et d’Éolide,
ainsi qu’en Ionie, Carie et Pamphylie ; en outre, il est assuré mais isolé
en Macédoine et à Délos, pour des « Athéniens » originaires de Tyr. À
côté du nominatif Δίης (Δίϝεις, en Pamphylie), on a plusieurs occur-
rences du génitif : Δίους en Éolide (Ilion) ou Διέους en Ionie (Milet), en
Macédoine (Létè), Διείους (Milet) et Διήους (Délos). Quant au second
anthroponyme, Ζώης, il est éolien (Ζώης, Mytilène, Éressos) et arcado-
chypriote (Ζώϝης et Ζώης, LGPN Chypre ; Ζϝς et Ζϝεις Pamphylie),
les formes où le -ϝ- est conservé étant inévitablement plus anciennes (vie-
ive a. C.) que les autres (iiie a. C.-imp.). O. Masson termine la présenta-
tion de ces anthroponymes en insistant sur la question de l’accentuation
traditionnelle (Διῆς), qui ne convient pas car « elle suppose une contrac-
tion ionienne de ‑έας en ‑ῆς, comme c’est le cas pour de nombreux noms
effectivement connus sous les deux formes, tels Ἀπελλέας et Ἀπελλῆς,
etc. » ; or « un prototype *Διέας (…) ne se trouve jamais 76 ».
Certes, il est peu probable qu’on acquière jamais de certitude concer-
nant les paires formelles d’anthroponymes en ‑e et ‑e‑u de l’époque mycé-
nienne, mais les données du Ier millénaire rassemblées ici permettent de
dresser la carte d’une dispersion très large – de l’Italie du Sud à l’Asie
Mineure, et dans divers genres littéraires –, des variantes en ‑ής ou ‑ης
des anthroponymes et des noms de héros en ‑εύς. D’autres exemples sont
fournis par les trois thèmes en diphtongue anomaux et le théonyme Ἄρης.

3.2. La flexion multiforme des thèmes en diphtongues isolés


et du théonyme Ἄρης
La flexion de Ζεύς, βοῦς et ναῦς
La flexion originelle de Ζεύς est normalisée à l’accusatif dans nombre
de dialectes : nom. Ζεύς, crétois Δεύς ; voc. Ζεῦ ; acc. Δία ; gén. Διϝός,
Διός ; dat. Διϝί, Διί, Δί / Διϝεῖ, Διεῖ 77. Elle est largement répandue, autant

p. 179-184 (= OGS III, p. 184-189). Je renvoie au second article pour des références
plus détaillées et un historique du dossier.
76. O. Masson, « Nouvelles notes », art. cit., p. 183‑184 (= OGS III, p. 188-189). Il est
peut-être intéressant de noter que Δίης a une contrepartie en ‑εύς, Διεύς (LGPN 4,
Naples, ive a. C.).
77. Déjà di‑wo /diwós/ et di‑we /diweî/ dans les tablettes de Cnossos et Pylos.
90 nicole guilleux

que celle qui repose sur le thème Ζην‑, usuel dans la poésie homérique et
en de nombreux dialectes ; ce thème est par ailleurs à la base d’une quan-
tité considérable d’anthroponymes (un peu plus de 1200 selon le LGPN).
On a ainsi : nom. Ζήν (épique, ionien d’Asie, dorien de Cos, de Théra, de
Crète, éléen, etc.), Δήν (crétois) ; acc. Ζῆνα, Δῆνα et Τ(τ)ῆνα (crétois) ;
gén. Ζηνός ; dat. Ζηνί (Cos). En dorien littéraire et épigraphique s’ob-
serve une variante en ā de ce dernier paradigme 78 : nom. Ζάν (Pythag.
Ép. 7.1), Τάν (Head, HN2 469, Crète) ; acc. Ζᾶνα (Call. fr. 191.10) ; gén.
Ζανός (Chios, ive a. C., Sparte iie a. C. ; Philox. fr. e.11 ; Thcr. 18.19 ;
Call. H. 13, 10, etc.) ; dat. Ζανί (lyr. adesp., ionien), à quoi s’ajoute le
nominatif pluriel de l’éléen, Ζᾶνες (Paus. V, 21.2). Quant aux formes
fléchies Ζέα, Ζεός, Ζεΐ (Hdn, Klis. Onom. III.2, p.  674.37), elles me
paraissent analogiques du nominatif Ζής cité par Hérodien (III.2, 611.8).
Le nominatif Ζάς (Phéréc. fr. 1.2, 1.31, etc.), lui, est ambigu : nominatif
de la flexion sigmatique dorienne, il pourrait répondre à Ζής, mais ses
formes fléchies en ‑nt‑, Ζάντα (Phéréc., fr. 8.2) et Ζάντος (Hdn, Pr. Cath.
III.1, p. 399, 18, etc.), signalent un changement suffixal.
Pour la flexion de βοῦς, on a le nominatif βῶς chez Théocrite (8, 77 ;
9, 7) et l’accusatif βῶν dans l’Iliade (7, 238) aussi bien qu’en dorien lit-
téraire (Thcr. 8.48 ; Call. Dém., 108, notamment) ou épigraphique (SEG
41, 744, 8, Crète). Quant à ναῦς, le nominatif à voyelle longue, νᾶς, qui
oblige à supposer l’existence de l’accusatif *νᾶν, a été transmis par Héro-
dien (III.2, p. 553, 12, entre autres) et il est reconnu comme dorien. Le
dossier se complète d’une forme mycénienne puisqu’à Pylos, en PY Cn 3,
se rencontre l’accusatif pluriel qo‑o, qui bénéficie exceptionnellement
d’une graphie amplifiée. Il se peut que cette forme, à lire /gwṓns/ ou
/gwṓns/, atteste l’accusatif pluriel hérité 79.
Dans ces thèmes à voyelle longue, l’accusatif est hérité et les nomina-
tifs en ‑ης, -ᾱς ou -ως analogiques de ces accusatifs.

78. Sur les graphies, éléennes ou d’origine éléenne, A pour E ou H, et sur le cas particu-
lier de Ζᾶνες, voir S. Minon, Les inscriptions éléennes dialectales, vol. 2, Genève,
2007, p. 287‑299 et 561.
79. Cf. W. Cowgill et M. Mayrhofer, Indogermanische Grammatik, I, 1.2. Einleitung,
Lautlehre, Heidelberg, p. 163-164 sur la loi de Stang.
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 91

La flexion du théonyme Ἄρης


Pour les données mycéniennes, on s’appuiera sur l’étude de
J.  L.  García Ramón 80 qui conclut à la coexistence probable de deux
flexions distinctes, l’une à voyelle longue (cf. a‑re‑me‑ne) et l’autre sig-
matique (cf. a‑re-ị‑me‑ne). Ce qui ne diffère pas de ce qu’on observe
au Ier millénaire avec le paradigme à voyelle longue épique et éolien –
nom. Ἄρης, voc. Ἄρη, acc. Ἄρηα / Ἄρην 81, gén. Ἄρηος / Ἄρεος (formes
épiques) > att. Ἄρεως, dat. Ἄρηϊ – et la flexion sigmatique, épique –
nom. Ἄρης, voc. Ἄρες / Ἆρες, acc. Ἄρεα, gén. Ἄρεος, dat. Ἄρεϊ. Le para-
digme en ‑εύς, lui, attesté chez Sappho et Alcée, est une innovation ; il
comporte les formes suivantes : nom. Ἄρευς, voc. Ἄρευ, acc. Ἄρευα,
gén. Ἄρευος, dat. Ἄρευϊ. On a là un processus inverse de celui qu’on
observe dans la flexion de Ζεύς, mais tout à fait comparable au choix de
Πολυδευκεύς (Pd I. 4.42) face à l’original Πολυδεύκης 82. Dans le cas
du nom d’Arès, c’est en effet le thème à voyelle longue qui est premier.
Ainsi, comme le rappelle O. Masson 83, le thème originel du théonyme
présente une voyelle longue de timbre e pour laquelle A. Heubeck a posé
« un suffixe *‑eH1s 84 » et, « bien qu’il ne fasse pas intervenir nos anthro-
ponymes, on se ralliera à ce raisonnement, comme l’a fait C. Brixhe au
sujet du pamphylien 85 ».

80. J.  L.  García Ramón, « Mykenische Personenamen und griechische Dichtung und
Phraseologie: i‑su-ku-wo-do‑to und a‑re‑me‑ne, a‑re-ị‑me‑ne », dans A. Sacconi et
al. (éd.), Colloquium Romanum. Atti del XII colloquio internazionale di micenologia,
Roma 20‑25 febbraio 2006, I, Pise - Rome, 2008, p. 331‑335.
81. Ces deux accusatifs contribuent à la flexibilité métrique en synchronie : l’amphi-
braque Ἄρηα, réduit à un iambe quand il s’élide devant voyelle, s’emploie devant
consonne et Ἄρην, de structure iambique, devant voyelle. On rappellera aussi que,
sous la leçon Ἄρη’ ἀνδροκτασιάων # (Il. 5. 909), c’est l’ancienne forme du thème en
‑ης, Ἄρην, qu’il faut restaurer.
82. Cf. F. Biville, art. cit., p. 211.
83. Cf. O. Masson, « Nouvelles notes », art. cit., p. 183 = OGS III, p. 188.
84. A. Heubeck, « Amphiaraos », Sprache 17 (1971), p. 15-17.
85. C. Brixhe, Le dialecte grec de Pamphylie, Paris, 1976, p. 104.
92 nicole guilleux

3.3. Convergences entre flexions (thèmes en ‑εύς et ‑ης


sigmatiques et non sigmatiques) et changements suffixaux
Des convergences entre flexions
Les convergences entre thèmes en ‑εύς et ‑ής ou ‑ης pour les noms
de héros, les théonymes et les anthroponymes participent d’un ensemble
plus vaste incluant aussi les échanges entre thèmes en ‑εσ- et mascu-
lins en ‑ης ( / ‑ας) dans l’anthroponymie, qui sont notoires, eux 86. En
revanche, qu’il en aille de même pour les thèmes en ‑εύς et ‑ης non sig-
matiques n’est pas unanimement reconnu. Pourtant, le nombre de formes
communes aux quatre types flexionnels principaux est incroyablement
élevé, ce que montre le tableau ci-dessous 87.

Thèmes en ‑εύς Thèmes en ‑ης Thèmes en ‑εσ- Masculins


(type Ἄρης) en ‑ης / ‑ᾱς

Nominatif ‑εύς ‑ής ‑ης ‑ης ‑ης / ‑ᾱς


Vocatif ‑εῦ ‑η ‑η ? ‑ες ‑α
‑ῆ(ϝ)α > ‑ῆα
Accusatif ‑ήν ‑ην / ‑ηα ‑εα > ‑η / ‑ην ‑ην / ‑ᾱν / ‑η
> ‑έα > ‑ῆ
‑ῆ(ϝ)ος > ‑ῆος > ‑έως / ‑εος > ‑ους  / ‑αο > -εω / ‑ᾱ
Génitif ‑ηος > ‑εος
‑εος ‑ου ‑ου / ‑ους
‑ηι > -ῃ
Datif ‑ῆ(ϝ)ι > ‑ῆϊ > ‑εϊ > ‑εῖ ‑ηϊ > ‑εϊ > -ει ‑εϊ > ‑ει
/ ‑ᾱι > ‑ᾳ

On comprend donc aisément pourquoi, suite à l’évolution phonétique,


la flexion secondaire à voyelle longue des thèmes en ‑εύς et celle, pri-
maire, des rares thèmes en ē étaient vouées à disparaître sous la pression
de l’analogie. C’est aussi pour cette raison qu’elle n’est pas nettement
identifiée, si bien que les anthroponymes de ce type particulier sont sou-
vent accentués comme si leur finale résultait de la contraction de ‑έας. Il

86. Sur la confusion des finales et les échanges entre les thèmes en ‑εσ- et les mascu-
lins en -ης de la première déclinaison, voir la contribution de Violeta Gomis García
ici même (p. 539-562). Les finales analogiques de ces deux paradigmes sont en ita-
liques dans le tableau.
87. On voudra bien excuser la simplification des données, qui ne sont référées ni à un
lieu ni à une époque. L’important est ici de souligner les faiblesses générales du sys-
tème flexionnel dans sa structure même.
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 93

est vrai, comme le notait O. Masson 88 à propos de Δί(ϝ)ης et Ζώης, que


« l’absence d’un soutien dans le lexique et le peu de vitalité du suffixe
expliquent bien pourquoi ces noms n’ont pas subsisté avec une décli-
naison fermement établie et comment les génitifs varient suivant les
régions ». Dans ce cas particulier, on constate l’influence de la flexion
de Ἄρης. « Ainsi, », continue O.  Masson, « un génitif ancien du type
Ἄρεος explique nos génitifs rares Διέος et Ζṓεος. Mais la fragilité de la
déclinaison a fait surgir ensuite diverses variantes analogiques, comme
le génitif éolien en ‑η, les variations en ‑έους, ‑είους, ‑ίους, avec des
différences suivants les noms ».
Des changements suffixaux comme remède aux fluctuations
flexionnelles
Quand les paradigmes fragiles – des thèmes en voyelle principale-
ment – ne sont pas (ou ne peuvent pas être) remodelés par l’analogie,
l’adoption d’un nouveau suffixe, pouvant comporter un élargissement
consonantique, permet de résoudre les difficultés inhérentes aux conver-
gences flexionnelles. On peut songer à l’usage que le grec a fait entre
autres du *‑t‑ hérité 89. À cet égard, la situation des anthroponymes (et
plus largement des noms propres) diffère de celle des noms communs,
ainsi que l’a montré A. Morpurgo Davies 90. Dans le cas présent, comme
la flexion des noms communs résiste moins aux réfections analogiques
que celles des noms propres, les flottements flexionnels et les réaménage-
ments suffixaux y sont plus rares. On en a toutefois quelques exemples :
ὄρνις « oiseau », thème en ‑i‑ hérité différemment élargi, ὄρνιθ‑ chez
Homère et en ionien-attique, mais ὄρνιχ‑ en dorien 91 ; μύκης « champi-
gnon » (et par métaphore, divers référents), génitif μύκητος, mais μύκεω
en ionien 92 ; formes concurrentes du nom de la dartre, ἕρπης, ‑ητος, terme
consacré du lexique médical (Hipp., Diosc., Gal., etc.), que doublent
ἑρπήν, ‑ῆνος (Philon, EM) et ses dérivés, ἑρπήνη « dartres généralisées »
(Photius, EM, LS) et ἑρπηνώδης « de la nature de la dartre » (Aristote,

88. O. Masson, « Nouvelles notes », art. cit., p. 183 (= OGS III, p. 188).
89. Chantraine, Formation, p. 265-267.
90. A.  Morpurgo, « Greek Personal Names and Linguistic Continuity », dans GPN,
p. 15‑39.
91. DELG ὄρνις s.v.
92. Une inscription (SEG 13, 166, Athènes, ve a. C.) atteste aussi le féminin μύκη.
94 nicole guilleux

Philon, Eusèbe). On relève enfin πόλις, thème vocalique en tant que


nom commun, qui est élargi en ‑δ‑ dans les anthroponymes masculins :
les exemples abondent en Attique, et en Ionie 93, ce qui crée une confu-
sion avec les féminins pareillement suffixés et entraîne parfois l’adop-
tion de formes en ‑πόλε(ι)α ou ‑πόλη (HPN 376-377). Au total, parmi
les solutions apportées aux fluctuations flexionnelles, on peut compter
non seulement les réfections analogiques de paradigmes mais aussi les
dédoublements flexionnels ou suffixaux, que favorise la polysémie du
lexème ou son appartenance à un lexique spécialisé.
Dans le sous-système des anthroponymes grecs, la variété des suf-
fixes est grande, participant au nécessaire accroissement du nombre des
idionymes. Ces suffixes servent parfois aussi à intégrer des noms étran-
gers, cas des divers suffixes en dentale du pamphylien 94. Le suffixe ‑ης,
‑ητος 95, quant à lui, a connu une belle fortune surtout dans des formes
courtes, des abréviatifs essentiellement face à de rares sobriquets. Entre
nombreux exemples, on peut citer, pour les uns, Κράτης, Λάβης, Λάχης,
Μέλης, Μένης, Πύρης, Φέρης, Φίλης, Χάρης et, pour les autres, Κέλης,
Πάχης et Χρέμης. Ces anthroponymes en ‑ης, ‑ητος sont aussi attestés
indirectement à travers des patronymiques comme Πολλητίδας, Χαιρη-
τίδης / Χαρητίδης. Toutes ces formations mériteraient une étude d’en-
semble portant notamment sur leur répartition géographique, car le suffixe
n’a pas été partout aussi productif qu’en Pamphylie 96 ou en Attique. La
base sur laquelle les anthroponymes en ‑ης, ‑ητος, sont construits mérite
aussi d’être examinée. Ainsi, le génitif Ἄρητος de l’anthroponyme Ἄρης
(LGPN 5a, Cnide, iie‑ier  a. C.), élargissement du thème en ‑η‑ du théo-
nyme, et le patronymique Ἀρητάδης (LGPN 2, Athènes, 365-340 a. C.,
LGPN 1, Cyrène, iie a. C., LGPN 2, Athènes [Alciphr.], ive p. C.) / Ἀρη-
τάδας (LGPN  5b, Cnide, hell., LGPN 5b, Cnide, iie  a. C. ? LGPN 3b,
Corinthe [pinax, fragmentaire], vie a. C.), pourraient souligner, à l’instar
de Ζώϝειτους (pamphylien pour Ζώϝητος) et Ζώητος patronyme d’un
Πυργοτέλης, un possible Rhodien 97, un lien entre le suffixe ‑ης, ‑ητος et un
paradigme en ‑ē‑. Plus largement, c’est l’usage anthroponymique de tous
93. Une centaine d’occurrences pour 45 anthroponymes différents.
94. C. Brixhe, op. cit., p. 104-107.
95. Chantraine, Formation, p. 267.
96. Anthroponymes en ‑ε̄ τυς, ‑ειτους, ‑ιτους, ‑ιτυς et ‑ειτυς, sur quoi voir C. Brixhe, op.
cit., p. 104‑105.
97. O. Masson, « Nouvelles notes », art. cit., p. 183 (= OGS III, p. 188).
les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος 95

les suffixes en dentales simples et en ‑nt‑ qui demanderait à être examiné,


ce à quoi incite l’existence, mentionnée par Georges Choiroboscos, d’une
flexion de Ζεύς Ζάς, Ζαντός – mieux que Ζάς, Ζάντος (Hdn passim).

Conclusion

Au terme de ce parcours, des noms d’hommes en ‑ήν, ‑ῆνος aux


variations suffixales et flexionnelles dans les thèmes en diphtongue, il
se confirme que ces anthroponymes s’inscrivent dans un ensemble beau-
coup plus vaste que ne le laisse supposer leur expansion dans l’épigraphie
de la Grèce du Nord-Ouest. On les rencontre, hors de Corinthe et de ses
colonies nord-occidentales, dans les régions voisines de l’Isthme, dans
le Péloponnèse et la Grèce centrale, où certains exemples attestent une
diaspora corinthienne et où d’autres font envisager une assise ancienne
de ces formations débordant le cadre de la seule Corinthe. En outre, à
partir de Mégare on observe un essaimage discret vers Chalcédoine, une
de ses colonies de Propontide ; cela peut expliquer les quelques autres
noms trouvés dans les régions avoisinantes, mais assurément pas ceux
d’Halicarnasse (Χαρμήν), de Méonie (Δαμασήν), d’Iasos (Λυσήν) ni de
Phrygie (Κιλλήν). La capacité des anthroponymes en ‑ήν, ‑ῆνος à former
des ethniques, ce qui les isole des abréviatifs et des sobriquets en ‑ων,
‑ωνος, oblige à orienter leur analyse diachronique dans une perspective
qui s’énonce désormais résolument comme mycénienne. Les faits réunis
ici confirment que l’accusatif singulier ‑ήν 98 des thèmes en ‑εύς est au
centre de réfections flexionnelles et suffixales multiformes dont on ne
perçoit plus que des membra disjecta au Ier millénaire : embryon d’une
flexion en ‑ής ou ‑ης, qui rejoint celle en ‑η‑, probablement héritée, du
théonyme Ἄρης ; formes fléchies anomales de noms de héros et de Ζεύς,
qui semblent participer de la vieille tradition poétique hexamétrique ; mais
changement suffixal aboutissant à la création des anthroponymes en ‑ήν,
‑ῆνος ou en ‑ης, ‑ητος, le procédé permettant de résoudre élégamment
les difficultés inhérentes aux convergences flexionnelles. Et, dans cette
perspective renouvelée, c’est toute l’aire grecque qui est concernée, fait
qui accrédite plus solidement encore l’hypothèse d’un héritage mycénien.
98. On notera, en revanche, que dans le cas des thèmes sigmatiques et en ‑ā, que Violeta
Gomis García examine infra p. 539-562, c’est le génitif qui joue le rôle de pivot dans
les changements flexionnels.
96 nicole guilleux

Il ne reste plus désormais qu’à recenser, ce que je n’ai pu faire ici, les
anthroponymes en ‑ης ou ‑ής où la longue ne repose pas sur une contrac-
tion de ‑έας, cela en réévaluant l’accentuation périspomène générale-
ment adoptée par les éditeurs. Y adjoindre l’exploration systématique des
anthroponymes en ‑ης, ‑ητος serait également utile pour faire apparaître
leur productivité relative et leur répartition géographique, qu’il faudrait
mettre en relation avec la manière qu’a eue le grec ancien de traiter les
convergences flexionnelles de ses thèmes en voyelle longue.

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Robu, A., Mégare et les établissements mégariens de Sicile, de la Propontide et
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Wachter, R., Non-Attic Greek Vase Inscriptions, Oxford - New York, 2001.
Les composés du type de Σθεν-έ-λαος :
affixation à la jonction
et interprétation sémantique

Alain Blanc
Université de Rouen

1. Les deux grands types de composés du grec ancien

1.1. Grâce au témoignage de plusieurs langues indo-européennes, on


sait qu’il y a eu en indo-européen un système de formation d’anthropo-
nymes composés 1. En règle générale, il s’agit de noms composés d’un
substantif et d’un substantif (Ἀνδροκλῆς), d’un adjectif et d’un substantif
(Θρασύβουλος), d’un préfixe et d’un substantif (Περικλῆς). Ils appar-
tiennent à la classe que les Indiens ont appelé bahuvrīhi et que la tradi-
tion grammaticale occidentale appelle composés possessifs. À côté de
ce noyau très ancien, les langues ont développé des types nouveaux, ou
des types anciens qui étaient peu courants. Le grec, où la composition
nominale est un procédé très usité, a donné une grande extension à des
composés où l’un des deux membres est tiré d’un verbe et régit l’autre
membre à la manière d’une forme verbale qui régit un complément. Le
membre déverbatif recteur peut être le premier (Ὀρσέλαος « celui qui
fait s’élancer les guerriers ») ou le second (Ἱππόδαμος « celui qui dompte
les chevaux ») 2.
1. Cf. par exemple A. Meillet, J. Vendryes, Traité de grammaire comparée des langues
classiques2, Paris, 1948, p. 422 : « En indo-européen, les noms propres de personnes
avaient normalement une forme solennelle, que caractérisait la composition. Le grec
en a conservé un grand nombre de ce type : Ἱππομέδων, Δημοσθένης, Μενέλαος,
Περσέπολις, Θεόκλεια, Ὑψιπύλη, etc. ». Cf. aussi Solmsen - Fraenkel, IESK, p. 111-
118, et, pour les noms de femmes, Stüber, GFN.
2. Sur les composés du grec (appellatifs et anthroponymes), l’exposé d’A. Debrunner,
GW, reste fondamental (notamment p. 24-39 : « Die Komposita nach der Wortart
100 alain blanc

1.2. En général, la structure sémantique des noms composés du grec


est claire et on reconnaît facilement si un nom est un composé possessif
(donc à second membre d’origine nominale) ou un composé qui com-
porte un membre déverbatif. Il y a cependant quelques cas où l’analyse
est délicate. Il en est ainsi pour ce que nous appelons le type Σθενέλαος.
Si on reconnaît facilement le second membre -λᾱος « peuple », le pre-
mier membre peut a priori s’expliquer soit par rapprochement avec le
substantif neutre τὸ σθένος, le thème de ce mot ayant alors subi une
légère déformation lors de son entrée en composition, soit par rapproche-
ment avec le verbe (non homérique) σθένω, auquel cas il faut trouver la
relation sémantique qui unit l’un à l’autre le premier membre déverbatif
(qui correspond ici à un verbe intransitif) et le second membre.
1.3. Pour aborder ce problème, nous nous demanderons d’abord
si Σθενε- peut reposer sur σθένος et nous étudierons donc en détail la
façon dont un substantif sigmatique est entré en composition. Nous ver-
rons qu’en grec du premier millénaire, dans les appellatifs, ce premier
membre est dans un premier temps en -εσ- (+ C [consonne]) (2.1.1) et
dans un second temps en -ο- + C (2.1.2), mais, dans les anthroponymes,
seulement en -o- (2.1.3). Nous essaierons de déterminer quelle a été la
forme employée (-εσ- ou -ο- ?) devant un second membre à initiale voca-
lique (2.3), puis nous présenterons le type Ἐχεκλέης (3.), qui ne pose pas
de difficulté d’analyse, et le type Σθενέλαος, qui en pose (4.), et nous
essaierons de les résoudre. Chemin faisant, nous aurons à mentionner
les noms en Ἀνθε-, (4.1), Γενε- (4.2), Καλλε- (4.3), Κλεϝε- (4.4), Μενε-
(4.5), Τελε- (4.6) et Φαε- (4.7). Notre thèse sera qu’il n’est pas besoin de
faire l’hypothèse de formes factitives pour expliquer Σθενέλαος et Θαρ-
ρέδαμος, mais qu’il vaut mieux partir de bases intransitives, étant donné
que telle est leur diathèse dans la synchronie grecque.

und Wortform des Vorderglieds »), ainsi que celui de Schwyzer, GG I, p. 425-455.


Compléments chez M.  Meier-Brügger, Griechische Sprachwissenschaft, Berlin -
New York, 1992, II, p. 33-39, et dans T. Lindner, Indogermanische Grammatik, IV.1.
Komposition, Heidelberg, 2011-2012.
le type Σθεν-έ-λαος 101

2. L’entrée des substantifs en *-e/os en premier


membre de composé : Σθενε- pour Σθενεσ- ?

L’explication qui vient tout de suite à l’esprit consiste à voir à la base


de Ἀνθε-, Γενε-, Θαρρε-, etc., les substantifs neutres sigmatiques ἄνθος,
γένος, θάρρος, etc. Il faut voir si ceci est possible du point de vue mor-
phologique et du point de vue phonétique. Une remarque préliminaire
s’impose : en conséquence d’un héritage indo-européen, les substantifs
sigmatiques neutres du type de γένος présentent le vocalisme suffixal o
aux cas directs du singulier (τὸ γένος) et le vocalisme e aux cas obliques
du singulier, ainsi qu’au duel et au pluriel 3. Ce [e] est bien visible dans
la langue homérique (génitif singulier μένεος Il. 1, 103, etc.) 4 et il l’est
a fortiori en grec mycénien (we-te-i datif de we-to = ϝέτος « année ») 5.
Le processus de l’entrée des thèmes du type de γένος au premier membre
des composés nominaux est bien connu quand il s’agit des appellatifs,
mais il faut distinguer selon que le premier membre se trouve devant un
second membre commençant par une consonne sourde, par une consonne
sonore ou par une voyelle.

2.1. Devant consonne sourde


2.1.1. Devant consonne sourde, et occassionnellement devant
consonne sonore, dans une série de formes, le premier membre est en
-εσ-, c’est-à-dire que le suffixe sigmatique est intact et comporte le voca-
lisme e. On a ainsi, dans la langue homérique 6, nom. pl. ἐγχέσ-παλοι

3. Cf. Chantraine, Formation, p. 414-421, E. Schwyzer, GG I, p. 511-513, Chantraine,


Morphologie, p.  69-70, R.  Beekes, Comparative Indo-European Linguistics.
An Introduction, Amsterdam, 1995, p.  185-186, A.  Sihler, A New Comparative
Grammar of Greek and Latin, New York - Oxford, 1995, p. 305-307, K. Stüber, Die
primären s-Stämme des Indogermanischen, Wiesbaden, 2002, p. 19-22 et passim,
T.  Meissner, S-stem Nouns and Adjectives in Greek and Proto-Indo-European,
Oxford, 2006, p.  1-128, et B.  Fortson Indo-European Language and Culture. An
Introduction, Malden (MA) - Oxford - Chicester, 2010, p. 125.
4. Cf. Chantraine, Morphologie, p. 208-209.
5. Cf. par exemple A. Bartoněk, Handbuch des mykenischen Griechisch, Heidelberg,
2003, 260-261, et E.  Luján « Los temas en -s en micénico », dans A.  Bernabé et
E. Luján (éd.), Donum Mycenologicum. Mycenaean Studies in Honour of Francisco
Aura Jorro, Louvain-la-Neuve, 2014, p. 51-54.
6. Debrunner, GW, p. 66, Schwyzer, GG I, p. 440, et Risch, Wortbildung, p. 218.
102 alain blanc

« qui lancent la javeline » (épithète de ἄνδρες en Il. 2, 131), ἐπεσ-βόλος


« qui lance des paroles », c’est-à-dire « injurieux, outrageant » (appliqué
à Thersite, Il. 2, 275, +), dat. pl. ὀρεσ-κῴοισι (épithète de Φηρσί, Il. 1,
268), « (monstres) qui gîtent dans la montagne » (ὄρος + nom d’agent
de la racine de κεῖμαι), σακέσ-παλος « qui agite ou brandit son bou-
clier » (ép. de Tydée en Il. 5, 126) et τελεσ-φόρος « qui mène à terme,
qui accomplit » (dit de l’année, Il. 19, 32, +). Après la langue homé-
rique, des composés de ce type apparaissent encore chez les Tragiques,
mais ils reprennent des éléments homériques. On a par exemple σακεσ-
φόρος « porteur d’un bouclier » chez Sophocle (Ajax, 19) et Euripide
(Philoctète, 139), mais il n’apparaît pas de premier membre sigmatique
nouveau 7.
Pour ce qui est de l’onomastique, on doit faire une observation impor-
tante : on ne trouve à citer aucun anthroponyme en *Γενεσ-, *Ἐγχεσ-,
*Ἐπεσ-, *Κλεεσ-, *Ὀρεσ-, *Σακεσ-, *Τελεσ-, etc., si ce n’est le nom
d’Oreste dans lequel A. Leukart a décelé un composé contenant Ὀρεσ-
+ στᾱ- 8. Et, autant que nous sachions, il n’y a pas non plus d’anthropo-
nyme tel en mycénien, si ce n’est o-re-ta = /Orestās/ 9.
On peut donc conclure sur ce point. Devant consonne, on a quelques
exemples d’appellatifs conservant intact le suffixe sigmatique -εσ-, mais
cette conservation est limitée au mycénien et à la langue homérique, et
elle ne concerne, si l’on excepte le nom d’Oreste, que les appellatifs.
2.1.2. Dans une série de formes plus récentes, -εσ- a cédé la place à
-ο- 10. Cet -ο- apparaît dans des formes homériques 11 : εἰροκόμος et εἰρο-
πόκος (εἶρος), μενοεικής (μένος), σκυτοτόμος (σκῦτος), Κλεόβουλος et

7. Pas de *γενεσ-, *θερσεσ-/θαρσεσ-, *κλεεσ-, etc.


8. Cf. E. Risch, BSL 69 (1974), p. 117, et M. Peters, Sprache 35 (1991-1993), p. 135-
138.
9. Cf. DMic II, p. 48.
10. [o] s’est-il substitué à [es] dès le mycénien ? Ce serait le cas si e-to-wo-ko devait être
compris comme *ἐντο-ϝοργός avec un premier membre ἐντο- à rapprocher de ἔντεα
« armes », mais cette interprétation n’est pas du tout assurée. Voir DMic I, p. 259-
260, avec ample bibliographie (notamment F. Bader, Les composés grecs du type de
demiourgos, Paris, 1965, p. 37-38). Depuis la parution du DMic I (1985), la question
ne paraît pas avoir progressé.
11. Debrunner, GW, p. 68, Schwyzer, GG I, p. 440, et Risch, Wortbildung, p. 218.
le type Σθεν-έ-λαος 103

Κλεοπάτρη (κλέος) 12. À l’époque classique, si l’on excepte la persis-


tance de quelques mots archaïques comme ἀνθεσ-φόρος, cet -o- est de
règle, comme on le voit par le relevé suivant :
ἀνθονόμος Eschyle, Supp. 539, cf. ἄνθος 13,
ἀχθοφόρος (Hdt.), cf. ἄχθος,
ἑλκοποιός (ion.-att.), cf. ἕλκος,
ἐποποιός (ion.-att.), cf. ἔπος,
Ἐρεβοδιφάω (Ar. Nu. 192), cf. Ἔρεβος,
ἑρκοθηρικός (Platon), cf. ἕρκος,
ζευγοποία (Théophraste), cf. ζεῦγος,
ἠθογράφος (Aristote), cf. ἦθος,
ἰχνοσκοπέω (Eschyle), cf. ἴχνος,
κρανοποιός (Aristophane), cf. κράνος,
μελοποιός (Aristophane), cf. μέλος,
ξιφοδήλητος (Eschyle), cf. ξίφος,
ῥακόδυτος (Euripide), cf. ῥάκος,
σακοδερμηστής (Sophocle), cf. σάκος,
στελεχόκαρπος (Théophraste), cf. στέλεχος,
τειχομαχέω (ion.-att.), cf. τεῖχος 14,
τεμαχοπώλης (Antiph. Com.), cf. τέμαχος,
τευχοφόρος (Euripide), cf. τεῦχος 15.
Dans les appellatifs, on voit donc apparaître -o- à la place de -εσ- dès
Homère, et à l’époque classique -o- règne en maître 16.

12. Mais hom. θυοσκόος semble devoir être segmenté θυοσ-κόος et semble donc être
du type de φωσφόρος <  φαοσφόρος (Lyr. Adesp.) (φάος + -φόρος) : le premier
membre n’est pas ici le thème du mot, mais la forme de nominatif-accusatif sg. Cf.
J.-L. Perpillou, dans le DELG, p. 1308.
13. Cf. aussi ἀνθολογέω « cueillir le suc des fleurs » (Aristote, HA 628b 32) et
ἀνθολογία, qui a eu le succès que l’on sait, ainsi que ἀνθοφόρος « qui produit des
fleurs », d’où « couvert de fleurs » (Ar. Ra. 442).
14. Cf. aussi τειχοποιός (Dém., Eschine) et τειχοφύλαξ (Hdt. 3, 157).
15. Nous n’avons pas tenu compte des cas ambigus comme σκευοποιός (Ar. +), qui est
en relation à la fois avec σκεῦος n. et σκευή f. (même si, pour le sens, ce composé
semble bien en relation avec le substantif neutre).
16. Le processus par lequel -ο- s’est substitué à -εσ- n’est pas clair. A-t-on d’abord
pris la forme de NVA sg. (-ος) au lieu du thème en -εσ-, puis la sifflante s’est-elle
amuïe phonétiquement quand elle précédait une consonne sonore (sans allongement
compensatoire ? C’est très douteux), ou bien a-t-on simplement remplacé -εσ- par
-ο- en généralisant la même « voyelle de liaison » -ο- que dans πυρ-ο-φόρος, ὑ-ο-βο-
σκός, χερ-ό-νιπτρον, ἁρματ-ο-πηγός, etc. ?
104 alain blanc

2.1.3. Mais qu’en est-il dans les anthroponymes ? On remarque que -o-
remplaçant -εσ- est attesté dès Homère par Κλεοπάτρη (κλεο- + consonne
sourde) et Κλεοβούλη (κλεο - + consonne sonore). À l’époque classique,
on trouve Γενοκλῆς (Cos, Carie, HPN 164), Εἰδόκριτος (Délos, ive a. C.)
et Εἰδομένης (Thasos, HPN 149), Θαρσόμαχος (Akraiphiai, iiie a. C.),
Θερσόλοχος (Larissa), une foule de noms en Κλεο- (HPN 239-241), Καρ-
τόνους (Crétois à Milet, IIe a. C.) et Κρατόξενος (ive a. C.), six noms en
Κυδο- (-κλῆς Cnide ; ‑κράτης Cnide ; -λᾱος Dodécanèse ; -νικος Égine ;
-σθένης Cnide ; -φάνης Ialysos, ive-iiie a. C.), Μειδοκλέης, Μειδό­κριτος,
Μειδόνικος, Μενοκράτης (Crète) et Μενοπτόλεμος (Ténos), Μηδοκρίτα
(Théra), Σθενόδημος, Σθενοκράτης (Athènes), Σθενόλας (Mégalopolis),
Ὑψοκλῆς (vie a. C.), Φαύδαμος (Chypre) et Φώκριτος (Délos).
À première vue, on pourrait penser que les premiers membres où -o-
tient la place de -εσ- ont été aussi productifs dans l’onomastique que dans
le lexique appellatif, mais un examen plus approfondi amène à recon-
naître deux faits : a) le premier membre Κλεο- est ancien (langue homé-
rique) et il a connu une productivité remarquable ; b) les autres premiers
membres où -o- tient la place de -εσ- sont très peu nombreux par rapport
au grand nombre des substantifs sigmatiques 17, et surtout ils sont peu
productifs. De plus, ils apparaissent très localisés (ainsi Κυδο- à Cnide).
2.1.4. On peut donc dire que les substantifs sigmatiques sont entrés en
composition, devant un second membre commençant par une consonne
sourde, sous forme -εσ-, puis sous forme -o-. Dans les appellatifs, -εσ-
apparaît dans cinq formes homériques, puis -o- apparaît dans des com-
posés nombreux ; dans l’onomastique, en revanche, -εσ- est jusqu’à
présent inconnu (sauf Ὀρέστης) et, ainsi qu’on vient de le dire, -o- est
rare et peu productif, sauf pour ce qui est des noms de personnes en
Κλεο-.
Signalons enfin les faits mycéniens. Devant consonne sourde, la sif-
flante est censée se conserver, mais ne peut pas être notée par les règles
orthographiques du syllabaire. On peut penser qu’on a un thème sig-
matique au premier membre de re-ke-to-ro-te-ri-jo, qui semble valoir

17. Γενο-, Εἰδο-, Θαρσο-/Θερσο-, Καρτο-/ Κρατο-, Κυδο-, Μειδο-, Μενο-, Μηδο-,
Σθενο-, Ὑψο- et Φαυ-/ Φω-, soit 11 seulement.
le type Σθεν-έ-λαος 105

*λεχεσ-στρωτήριον et désigner un lectisterne 18. Curieusement, les don-


nées de l’onomastique sont ici muettes : s’ils ont existé, les premiers
membres *Genes-, *Klewes-, *Kūdes-, etc., ont dû être écrits *ge-ne-,
*ke-re-we-, *ku-de-, etc., mais pour le moment, notre documentation ne
contient rien de tel 19.

2.2. Devant consonne sonore


2.2.1. En mycénien, devant consonne sonore, on peut s’attendre à
une altération de la sifflante sourde. Le mot e-te-do-mo semble formé du
thème du neutre pluriel ἔντεα et d’un nom d’agent de la racine de δέμω.
On peut donc lui attribuer le sens de « fabricant d’armes » 20, mais la
question se pose de savoir quelle était la prononciation : /entes-domos/
ou /entez-domos/ ? La question ne peut évidemment pas être tranchée.
On a aussi proposé de voir dans le mot e-ke-ra2-wo un /Enkhellāwōn/
< *Enkhes-lāw-ōn « Qui tire bénéfice de la lance » (cf. ἔγχος et λαύω,
avec traitement *-sl-  > /ll/), mais l’explication nouvelle présentée par
García Ramón est plus convaincante : e-ke-ra2-wo note vraisemblable-
ment /Enkherjā-wōn/ ; il s’agit probablement d’un dérivé de *enkherrijā
« entreprise, attaque » (cf. att. ἐγχειρία) 21. Un autre mot a été évoqué. À
la suite de Georgiev, Neumann considère que la forme su-we-ro-wi-jo
de PY An 657, 4 pourrait être un anthroponyme dérivé de *Su-we-ro qui
serait soit un nom de personne, soit un nom de lieu, à comprendre comme

18. Cf. A. Bartoněk, Handbuch, p. 208 et 378, A. Bernabé et R. Luján dans Y. Duhoux,
A. Morpurgo Davies (éd.), A Companion to Linear B. Mycenaean Greek Texts and
their World, vol. 1, Louvain, 2008, p. 202 ; S. Hiller dans Y. Duhoux, A. Morpurgo
Davies (éd.), A Companion to Linear B. Mycenaean Greek Texts and their World,
vol. 2, Louvain, 2011, p. 172, 189 et 199 ; C. J. Ruijgh, dans Y. Duhoux, A. Morpurgo
Davies (éd.), A Companion to Linear B. Mycenaean Greek Texts and their World,
vol. 2, Louvain, 2011, p. 270 ; J. L. Melena, ibid., p. 63. Sur la variante re-ke-e-to-
ro-te-ri-jo et son interprétation, voir DMic, s.v., et voir les auteurs auxquels on vient
de renvoyer.
19. Sur les anthroponymes mycéniens, la dernière publication importante est le chapitre
de J. L. García Ramón, « Mycenaean Onomastics », dans Y. Duhoux, A. Morpurgo
Davies (éd.), A Companion, vol. 2, p. 213-251.
20. Cf. en dernier lieu A. Bartoněk, Handbuch, p. 193 et 364, C. J. Ruijgh, A Companion,
vol. 2, p. 269 et J. L. Melena, A Companion, vol. 3, p. 37 n. 1.
21. J. L. García Ramón, « Anthroponymica Mycenaea: e-ke ra2-wo [...] », dans Donum
Mycenologicum, 2014, p. 35-49.
106 alain blanc

/ssuwerrowos/ <  *ssuwes-srowos. Le premier membre viendrait d’un


substantif neutre *σύος « élan » qui se retrouverait au second membre
du nom Εὐσύης (Bechtel, HPN 412) 22. Cette explication est séduisante,
mais demeure évidemment hypothétique. On doit signaler que Melena
comprend su-we-... comme /Swe.../, ce qui mérite aussi considération 23.
2.2.2. En grec homérique, la sifflante σ devant consonne sonore a dû
se sonoriser, mais elle est maintenue, écrite σ, dans ἐπεσβόλος, qui est un
cas unique. Le remplacement de -εσ- par -o- s’observe dans hom. Κλεό-
βουλος et surtout dans les anthroponymes d’époque classique en ‑o- cités
ci-dessus (2.1.2).

2.3. Devant voyelle


Devant voyelle, la sifflante du suffixe -εσ- est censée se transformer
en une aspiration et on attend donc un hiatus graphique e + voyelle.
Jusqu’ici, aucun anthroponyme mycénien ne semble être de ce type.
Nous passons donc à l’examen des formes homériques et classiques.
2.3.1. Le résultat de la rencontre d’un premier membre représentant
un substantif sigmatique et d’un second membre à initiale vocalique est
bien connu, tant dans les anthroponymes que dans les appellatifs. En grec
classique, le résultat est une forme du type de τειχ-ήρης, si la voyelle ini-
tiale du second membre est suivie d’une seule consonne, et une forme du
type de ψευδ-άγγελος si la voyelle initiale du second membre est suivie
de deux consonnes, c’est-à-dire qu’il y a dans le premier cas allongement
de l’initiale du second membre de composé selon la loi de Wackernagel,
l’allongement étant entravé dans le second cas par les deux consonnes.
La question se pose de savoir ce qui a disparu devant la voyelle ini-
tiale du second membre. Il faut se demander si c’est le suffixe original,
-εσ-, ou si c’est la voyelle de substitution, -o-. Si l’on applique de façon
stricte les règles morphologiques, *dheighes- + h2(e)res- devrait aboutir
à *θειχε(h)ᾰρεσ- avec conservation de l’hiatus εα dans la langue homé-
rique, et un composé comportant ἅγος « souillure » + racine de ἐλαύνω
22. G.  Neumann, « Deutungsvorschläge zu mykenischen Namen », dans Mykenaïka.
Actes du IXe colloque international sur les textes mycéniens et égéens. Athènes, 6-10
octobre 1990, Athènes - Paris, 1992, p. 435-436.
23. J. L. Melena, « Mycenaean Writing », dans Y. Duhoux et A. Morpurgo Davies (éd.),
A Companion, vol. 3, p. 107.
le type Σθεν-έ-λαος 107

devrait donner *ἁγε(h)ελατέω qui, ultérieurement, devrait se contracter


en *ἁγειλατέω 24. En revanche, en posant des étymons à voyelle -o-,
on obtient des formes qui requièrent l’allongement de Wackernagel :
*θειχο- + ἀρ- > *τειχ-ᾱ́ρης > τειχήρης, *ἁγο- + ἐλ- > ἁγηλατέω, comme
*στρατο- + ἀγ-  > στρατᾱ/ηγός. Devant un second membre contenant
voyelle + deux consonnes, il n’y a évidemment pas d’allongement :
ψευδο- + ἄγγελος > ψευδάγγελος, *ϝειδο- + ἐχθ- > εἰδεχθής. À en juger
par ces schémas, on peut donc considérer que les formes comme τειχ­
ήρης et ψευδάγγελος ont comporté -o- plutôt que -εσ-.
2.3.2. Il faut toutefois introduire une réserve : si l’on admet que l’al-
longement de Wackernagel est resté d’application mécanique assez
tardivement, après le moment où l’amuïssement de s a mis en contact
la voyelle finale du premier membre et la voyelle initiale du second
membre, on pourrait poser *τειχε-άρης > *τειχεᾱ́ρης > τειχήρης et *ἁγε-
ελ- > *ἁγεηλ- > ἁγηλατέω. On ne peut donc pas savoir de façon précise
ce que représentent morphologiquement les formes du type de τειχήρης
et de ψευδάγγελος.
Il en est de même pour les anthroponymes. En théorie, des formes
comme Θαρσᾱγόρας, Κάλλαισχρος, Κερδώνυμος, Κλέανδρος, Κρά-
τερμος, Κυδήνωρ peuvent supposer *Θαρσεσ- + -αγόρας, etc. Mais nous
n’avons jamais de trace de la voyelle élidée, et à la place d’un ancien
substantif à finale -εσ- on peut aussi partir, suivant les cas, d’un adjectif
à finale -ι- (cf. les noms en Θαρσι-, Καλλι-, Κρατι-, Κυδι-) ou d’un subs-
tantif sigmatique où -ο- s’est substitué à -εσ- (cf. les noms en Κερδο- et
Κλεο-). On ne peut donc pas tirer argument des formes à élision pour
supposer des anthroponymes à premier membre en -εσ-.

3. Le type Ἐχ-ε-κλέης

3.1. Le grec ancien a des anthroponymes composés dont le pre-


mier membre est en -ε- et se rattache manifestement à un verbe. Pour se
limiter à des noms homériques, on peut citer Ἀγέλᾱος (cf. ἄγω et λᾱός),
24. Dans les appellatifs, les exemples d’hiatus sont extrêmement rares. On cite γενε-
άρχης (IG 3, 1278, +) (cf. LSJ) et τελέ-αρχος (Plutarque), cf. F. Bader, Demiourgos,
p.  37, qui observe que les premiers membres peuvent aussi être (en fait chez les
poètes) des formes casuelles (cf. ὀρει-, ὀρεσσι- / ὀρεσι-), point qu’il n’y a pas lieu de
développer ici.
108 alain blanc

Ἀρχέλοχος (cf. ἄρχω et λόχος), Ἀρχεπτόλεμος (cf. ἄρχω et πόλεμος),


Ἐχεκλέης (cf. ἔχω et κλέ(ϝ)ος), Ἐχένηος (cf. ἔχω et ναῦς), Ἐχέπωλος (cf.
ἔχω et πῶλος), Μελέαγρος (cf., synchroniquement, μέλω, -ομαι et ἄγρος)
et Μενέλᾱος (cf. μένω et λᾱός), à quoi on peut ajouter Μενεσθεύς, -ιος,
formes courtes d’un Μενεσθένης (cf. μένω et σθένος), Φέρεκλος, forme
courte d’un Φερεκλέ(ϝ)ης (cf. φέρω et κλέ(ϝ)ος), Ἐχέμμων, forme courte
d’un nom en -μένης ou -μήδης, ainsi que quelques noms dans lesquels
la voyelle finale du premier membre n’apparaît plus, mais était proba-
blement un -ε-, Ἀλεγηνορίδης, qui suppose un Ἀλεγήνωρ (cf. ἀλέγω et
ἀνήρ), Ἐλεφήνωρ, qui semble supposer un thème verbal *ἐλέφω (cf.
ἐλεφαίρω) et ἀνήρ, Ἐλπήνωρ (cf., synchroniquement, ἔλπομαι et ἀνηρ),
Εὐχήνωρ (cf. εὔχομαι et ἀνήρ), Μένοιτος (cf. μένω et οἶτος), Φαίνοψ (cf.
φαίνομαι et *ὄψ) et Φείδιππος (cf. φείδομαι et ἵππος).
3.2. Dans ces noms, le premier membre n’est en rapport qu’avec un
thème verbal et il en est donc dérivé. Comportant la voyelle thématique
*-e/o- de ce thème verbal, ici sous forme /e/, ce premier membre a une
fonction verbale dans la mesure où il gouverne le second membre. Le
sens que percevaient les Grecs n’est pas toujours facile à établir et il
échappe à la vérification puisque les anthroponymes n’ont pas tant pour
fonction d’être porteur d’une charge sémantique que de désigner. Néan-
moins, on voit très bien que le premier membre régit le second, et on peut
traduire Ἀγέλᾱος par « Qui mène le peuple en armes », Φείδιππος par
« Qui épargne son (ses) cheval (-aux) », etc.
3.3. Cette structure se trouve aussi dans des appellatifs. Risch cite
ἀρχέκακος « qui commence les malheurs » (Il. 5, 63), ἐχέθῡμος « qui est
maître de ses désirs, sage » (Od. 8, 320), λεχεποίης, littéralement « qui est
couché dans l’herbe », dit d’une ville située au milieu de prairies (Il. 2,
697), μενεδήϊος « qui résiste aux ennemis » (Il. 12, 247 +), etc. 25 Ce type
de composé reste en usage à l’époque classique, comme l’indique l’ex-
cellente synthèse de Schwyzer 26, et la langue grecque puriste a conservé
de nos jours ἐχέθῡμος « discret » et les termes juridiques ἐχέγγυον
n. « garantie, gage » et φερέγγυος « qui présente des garanties, solvable ».

25. Risch, Wortbildung, p. 191.


26. Schwyzer, GG I, p. 441-442.
le type Σθεν-έ-λαος 109

4. Le type Σθεν-έ-λαος

Le grec possède un autre groupe d’anthroponymes composés à pre-


mier membre en -ε-. Le premier membre qui figure dans ceux-ci a à côté
de lui une famille de mots qui compte un substantif neutre sigmatique et
des formes verbales ou plusieurs formes nominales :
Ἀνθε- (Ἀνθεπῶλις, nom de femme, HPN 519) : cf. ἀνθος et ἀνθέω,
Γενε- (Γενέλεως, Samos, LGPN 1 106) : cf. γένος et γενέσθαι,
Θαρρε- (Θαρρέδαμος, Lipara, Sicile, SEG 37, 765) : cf. θάρρος et
θαρσέω,
Καλλε- (Καλλένῑκος, Καλλετῑ́μα, HPN 229) : cf. κάλλος et sa famille,
Κλεϝε- (béot. Κλεϝεθοίνιος et Κλεϝεκράτεα ; etc., cf. HPN 238) : cf.
κλέος et κλέομαι,
Μενε- (Μενέλαος, etc., HPN 305 et 308) : deux familles différentes, celle
de μένος et celle de μένω,
Σθενε- (Σθενέλαος, etc., HPN 398) : cf. σθένος et σθένω,
Τελε- (Τελέβουλος, etc., HPN 420) : cf. τέλος et τελέω, τελέσαι,
Φαε- (Φαενίκης, Argolide, HPN 435), cf. φάος et φάε.
Le -ε- représente-t-il d’une façon ou d’une autre le suffixe -εσ- ? La
sifflante aurait-elle disparu phonétiquement, ou -ε- serait-il, comme
-ο-, un élément qui se substituerait à -εσ- ? Pour tenter d’apporter des
réponses, nous allons examiner chacun de ces premiers membres. Parmi
eux, certains sont très peu productifs (Ἀνθε-, Γενε-, Θαρρε-, Καλλε- et
Φαε), tandis que les autres (Κλεϝε-, Μενε-, Σθενε- et Τελε-) fournissent
des noms assez nombreux, ou des noms qui, étant peu nombreux, ont été
portés par de nombreux individus. Dans la discusion qui suit, Σθενε- et
Θαρρε- seront traités indépendamment.
4.1. Ἀνθε-. — Ce premier membre n’apparaît que dans le nom de
femme Ἀνθεπῶλις (Priansos, 223 / 222 a. C.), signalé par Bechtel dans
les übrigen Namen (HPN 519), ainsi accentué. Le second membre est
certainement °πωλιδ-, qui signifie « marchande » 27, et Masson traduit à
bon droit par « fleuriste » 28. Il doit d’agir d’un ancien appellatif. Si ce mot
était très archaïque, on attendrait *ἀνθεσ-πῶλις ; s’il est récent, on aurait
dû avoir *ἀνθο-πῶλις. Le -ε- surprend. Peut-être le -o- a-t-il été dissimilé
par le ω qui suit, avec éventuellement influence du mot ἄνθεμον ?
27. Cf. DELG, s.v. πωλέω.
28. Masson, OGS III, p. 95 n. 15.
110 alain blanc

4.2. Γενέ-λεως (Samos, ca 560 a. C., LGPN 1) a été un nom rare. Il


est donné comme nom d’un unique individu par le LGPN (s.v.), mais il
semble aussi être attesté en Attique (Γενέλε[ω], SEG 34.39, ive a. C.).
Bechtel cite le nom Γενο-κλῆς et en fait l’inversion de Κλεο-γένης. Dans
le cas présent, une explication de ce type est assez vraisemblable : Γενέ-
λεως peut être l’inversion d’un Λεω-γένης, nom qui n’est pas attesté en
Attique, mais qui est connu à Thasos 29.
4.3. Le premier membre Καλλε- est enregistré dans les HPN de
Bechtel (229 : un Καλλέ-νῑκος à Mégare). Le LGPN 2 (Attique) relève
quatre individus porteurs de ce noms (ive et iiie s. a. C.) et il y a eu
des femmes appelées Καλλε-νῑ́κα en Italie (LGPN 3a, 228) et en Grèce
centrale (LGPN 3b, 215). De plus, le LGPN 2, relève aussi Καλλε-τῑ́μα
(Athènes ? iie s. a. C.) 30. Bechtel a proposé plusieurs fois dans les HPN
de considérer des anthroponymes à premier membre en -ε- ou en -εσι-
comme des inversions de composés sigmatiques. Ainsi, il cite le nom
Γενο-κλῆς (Cos) et il écrit (p.  164) : « Der isoliert stehende Name ist
durch Umsetzung der Glieder aus Κλεο-γένης entstanden », et il observe
à propos de Εἰδεσί-λεως (p. 149) : « Dieser Name läβt sich als Umkeh-
rung von Λαϝο-ϝείδης betrachten. Analoga sind Ἀλκέσ-ιππος neben Ἱππ-
άλκης, Ἀνθεσί-λας neben Λάνθης, Μενέσ-ανδρος und Μενέσ-ιππος
neben Ἀνδρο-μένης, Ἱππο-μένης, Φειδεσί-λεως neben Λεω-φείδης
[...] ». Si l’on employait aussi ce mode d’explication pour les anthropo-
nymes à premier membre en -ε-, on pourrait considérer que le premier
membre Καλλε- est né de l’inversion des membres d’un anthroponyme
en -κάλλης. Cette explication se heurte toutefois à une objection grave :
-κάλλης n’a pas été courant dans l’onomastique. Bechtel (HPN 232)
ne cite en effet que Φιλο-κάλλης et le LGPN 2 ne cite aucun anthropo-
nyme en ‑κάλλης en Attique. Ont été courants, en revanche, les noms en
Καλλι-. Bechtel en relève 66 (HPN 230-232) et parmi eux il y a Καλ-
λί-νῑκος 31 et Καλλί-τῑμος 32. Deux explications peuvent alors venir à l’es-
prit, l’une d’ordre phonétique, l’autre d’ordre morphologique. On peut
29. Deux individus, cf. LGPN 1, p. 286. Cf. un Λαγένης en Achaïe (incertain), LGPN 3a,
p. 264.
30. Κάλλεχρος est douteux : voir LGPN, ibid.
31. Treize individus en Attique, cf. LGPN 2, p. 250, et trois Καλλινῑ́κη.
32. Deux individus LGPN 3a, et cinq individus LGPN 3b, ainsi qu’une Καλλιτίμα
LGPN 1.
le type Σθεν-έ-λαος 111

d’abord se demander si le [i] n’aurait pas été transformé en [e] par dissi-
milation vocalique (dilation). Cette dissimilation ne s’est pas appliquée à
Καλλί-βῐος et Καλλι-κρῐ́τη. Elle n’aurait donc eu lieu que si le second [i]
était long. Cette dissimilation n’est pas attestée, semble-t-il, par d’autres
mots. Elle se serait limitée à ces noms et il faudrait constater que même
dans ces noms une nouvelle prononciation rétablissant le premier [i] s’est
imposée car à partir du iie s. avant notre ère on ne rencontre plus en
Attique que Καλλίνῑκος et Καλλινῑ́κη. Cette explication reste donc fra-
gile. On peut alors préférer celle que propose L. Threatte : « The ε of
Καλλένικος, Καλλετείμα, etc., illustrates use of another linking vowel in
composition ; see also in ἀρχι- ~ ἀρχεθέωρος, etc. Cf. Morphology » 33.
On peut conclure en tout cas que les noms Καλλένικος, -νῑ́κη et Καλλε-
τείμα sont de pures variantes de formes en Καλλι-. Ils ne doivent pas être
insérés dans le groupe des noms du type de Σθενέλᾱος et nous les lais-
sons donc de côté.
4.4. Composés en Κλεϝε-. — Le nom du grand législateur d’Athènes,
chef de la famille des Alcméonides, et de son grand père maternel, le
tyran de Sicyone, est en graphie post-euclidienne, Κλεισθένης. On s’in-
terroge sur son premier élément : « Premier membre reposant sur κλεϝι-
(sans suffixe en s ? ou de κλεϝε[σ]ι ? », se demande Chantraine (DELG,
s.v. κλέος), « Κλει-σθένης from *Κλεϝεσ- or *Κλεϝι-σθένης », lit-on
sous la plume de Beekes (EDG I 712). L’hypothèse selon laquelle il y a
eu un premier membre κλεϝι- remonte au moins à W. Schulze 34 et repose
surtout sur la forme béotienne Κλεί-εργος (Thespies, HPN 162, LGPN
3b). Il conviendrait d’examiner si cette forme contraint réellement à
poser un premier membre en -ι-, mais nous ne pouvons pas nous écarter
de notre sujet et nous laissons donc le nom de Clisthène. Ce qui est cer-
tain, c’est qu’il a existé des noms à premier membre Κλε(ϝ)ε- < *ḱlewe-.
Sont en effet attestés en béotien, avec ϝ, les noms Κλεϝεθοίνιος et Κλεϝε-
κράτεα (Thespies, ve a. C.) et, avec effacement du ϝ, toujours en béotien,
Κλεεσθένεις et le nom de femme Κλεεσθένεια 35. Plusieurs formes épi-
graphiques attiques requièrent aussi un point de départ Κλεε- (< Κλεϝε-).
33. L. Threatte, Grammar of Attic Inscriptions, vol. 1, Berlin - New York, 1980, p. 139.
Le volume II (Morphology, 1996) ne contient, semble-t-il, rien sur cette question.
34. W.  Schulze, Quaestiones epicae, Gütersloh, 1892, p.  41, n.  3. Cf. aussi Fick -
Bechtel, GP, p. 162.
35. Pour toutes ces formes, cf. LGPN 3b.
112 alain blanc

Les graphies préeuclidiennes correspondant aux noms Κλείσοφος, Κλεί-


βουλος, Κλειγένης, Κλείδημος et Κλείδικος sont en effet ΚΛΕΣΟΦΟΣ,
ΚΛΕΒΟΛΟΣ, ΚΛΕΓΕΝΕΣ, ΚΛΕΔΕΜΟΣ et ΚΛΕΔΙϙΟΣ / ΚΛΕΔΙΚΟΣ
(cf. LGPN 2 263-264). Elles indiquent bien que le premier membre ne
peut pas reposer sur *Kλεϝι-, mais repose bien sur Κλεϝε-. Il faut aussi
ajouter que les noms en Κλη- dans les dialectes à contraction isovoca-
lique severior (p. ex., le laconien ou le cyrénéen) ne peuvent pas procéder
de Κλεϝι-.
Le verbe κλέομαι, attesté dès l’Odyssée, signifie « avoir bonne répu-
tation, être illustre, être connu » et il peut être accompagné de la men-
tion de ce qui cause cette réputation, au datif, cf. ἐγὼ δ´ ἐν πᾶσι θεοῖσι |
μήτι τε κλέομαι καὶ κέρδεσιν « je suis fameuse entre tous les dieux par
ma finesse et mon astuce » (Od. 13, 298-299). On peut donc penser que
les noms ci-dessus signifiaient « Qui s’illustre par (ses conseils, etc.) »
ou, « Qui s’illustre au (combat, etc.) ». Le composé se rapporte à un per-
sonnage qui joue le rôle de sujet du verbe, tandis que le second membre
joue le rôle d’un complément de moyen ou d’un complément de lieu 36.
4.5. Dans les HPN 308, Bechtel classe sous μένος 21 anthroponymes
du type de Μενέβωλος, Μενέδημος, Μενεθάλης, etc., mais classe sous
μένω : Μενεδάϊος, Μενεκράτης, Μενέμαχος, Μενέπτολις, Μενεπτό-
λεμος, Μενέχαρμος et Μενέψοφος (305-306). À la page 309, c’est-à-
dire dans les noms qui se relient à μένος, il cite aussi Μενέσ-ανδρος
Αἰτωλός et Μενέσ-ιππος Καλλι-μένιος (Arkesinè) en indiquant : « Die
beide Namen sind aus Ἀνδρο-μένης, Ἱππο-μένης hervorgegangen ». Il ne
précise pas dans quelle relation Μενε- de Μενέ-βωλος (= Μενέ-βουλος)
se trouve avec μένος. Il est bien certain qu’il y a des mots qui se relient à
μένος et d’autres à μένω, mais le départ n’est pas toujours facile, comme
l’ont indiqué Bechtel lui-même (HPN 306) et Masson (OGS  I, p.  66).
Pour certains mots cependant le sens et la structure paraissent clairs. On
s’accorde par exemple à penser que le nom de Ménélas signifie « Qui
attend (de pied ferme) l’armée (adverse) » 37, avec peut-être, un jeu de
mots pour le Ménélas de l’Iliade : « Celui qui fait rester le peuple en
36. Cf., avec un autre ordre des deux membres, et avec un adjectif verbal au lieu d’un
thème verbal, hom. δουρι-κλειτός « fameux par sa lance » et hom. δουρι-κλυτός
(même sens).
37. Cf. Kamptz, HomPN, p. 60, et J. L. García Ramón, « Thessalian Personal Names
and the Greek Lexicon », dans ONW, p. 43-44.
le type Σθεν-έ-λαος 113

armes (si longtemps sous les murs de Troie) » 38. Le premier membre est
donc en relation avec le verbe μένω. Mais tous les anthroponymes en
Μενε- doivent-ils sans exception être rapportés à ce verbe (et donc aucun
à μένος), et que représente précisément l’élément Μενεσ- de Μενέσ-αν-
δρος ? Tenter de répondre serait long et difficile. Nous laisserons donc
ici ces questions en suspens et ne prendrons pas en compte le premier
membre Μενε- dans les discussions qui suivent.
4.6. La place nous manque pour étudier en détail les composés à pre-
mier membre Τελε-. Nous nous bornerons à faire observer que Τελέ-
βουλος, Τελέ-δαμος, Τελε-κλίδας, Τελέ-μβροτος (Rhodien), Τελέ-νικος,
et Τελέ-στρατος (Bechtel, HPN  423) sont parallèles à Τελεσί-βουλος,
Τελεσί-δημος, Τελεσι-κλῆς, Τελεσί-μβροτος, Τελεσί-νικος et Τελε-
σί-στρατος (Bechtel, ibid.), qui ont un premier membre verbal 39. Τελε-
ne représente donc pas le thème de τέλος (telle est encore l’explication
de Bechtel, 420), mais le thème verbal de τελέω, aoriste ἐτέλεσ(σ)α, etc.
4.7. Sous « Φαε-, Φαο-, -φάης zu φάϝος », Bechtel (HPN 435, cf.
aussi 335) enregistre Φαε-νίκης (Argolide, iie-ier s., LGPN 3a) avec la
source IG IV 731, I, 18. Dans le DELG (s.v. φάε, D, 2), J.  Taillardat
considère avec raison que le premier membre de ce composé est le thème
de l’aoriste φάε. On peut traduire : « Qui brille de (l’éclat de) sa (ses)
victoire(s). »
4.8. Explications proposées pour Σθενέλᾱος. —  Dans ses HPN,
Bechtel classe Σθενέ-δημος, -λαος, -λος, -λίδης sous Σθενε-, Σθενο-,
-σθένης, -σθενος, -σθένιος, en indiquant seulement : « zu σθένος ». En
revanche, Schwyzer (GG I, 441) enregistre Σθενέλᾱος dans les formes
à premier membre verbal du type de ἐχέθυμος. Risch (Wortbildung,
p. 218) écrit : « Σθενέλᾱος nach Μενέλᾱος analog σθένος neben μένος ».
Il indique que le premier membre μενε- de μενεδήϊος et Μενέλᾱος est
verbal. Il faut donc comprendre que Σθενέλᾱος est une forme particu-
lière, qui était liée au substantif σθένος, mais qui a perdu la sifflante du
thème σθενεσ- par suite de l’influence de Μενέλᾱος. Kamptz (HomPN,

38. Cf. F. Bader, La langue des dieux, ou l’hermétisme des poètes indo-européens, Pise,
1989, p. 257.
39. Il apparaît aussi dans les appellatifs : τελεσί-καρπος, τελεσι-ουργός, τελεσσί-φρων,
cf. LSJ.
114 alain blanc

68) est totalement d’accord avec Risch puisqu’il écrit : « Σθενέ-λᾱος (:


σθένος) ist offensichtlich Nachbildung von Μενέλᾱος [...], das fälschlich
auf μένος statt auf μένω bezogen wurde » 40. Enfin, L.  Dubois s’est
exprimé très nettement sur ce problème. Cherchant à expliquer le sens et
la structure du nom locrien Σθενέδᾱμος, il attribue au premier membre
une valeur causative par rapport à σθένω « être vigoureux » et il traduit
donc ce nom par « Qui donne la vigueur à son peuple ». Il utilise Σθε-
νέλᾱος pour apprécier l’ancienneté de σθένω. « Comme est connu chez
Homère un nom Σθενέλᾱος, écrit-il, le verbe σθένω n’est, quoi qu’en
dise Chantraine, sûrement pas un dérivé inverse de σθένος 41 ». Dubois
considère donc que Σθενέλᾱος a la même structure que Σθενέδᾱμος, que
son premier membre est verbal et qu’il a un sens causatif.
Trois questions se posent à propos de Σθενέλᾱος : 1) Σθενε- repose-t-il
sur *Σθενεσ- avec amuïssement phonétique du -σ- ? 2) Σθενε- représente-
t-il en fait *Σθενεσ- avec disparition du -σ- par analogie de Μενε- (vel
sim.) ? 3) Σθενε- peut-il se comprendre comme un thème verbal, auquel
cas il faut trouver un sens satisfaisant pour le composé, c’est-à-dire mettre
en lumière la relation qu’entretiennent entre eux ses deux membres ?
4.8.1. Des composés comportant *Σθενεσ- + δᾱμος ou *Σθενεσ- +
λᾱος auraient donné *Σθενέζᾱμος (qui aurait pu être refait en *Σθε-
νεσδᾱμος, du type de hom. ἐπεσβόλος) et *Σθενε̄ ́ λαος, avec le second
/e/ allongé par allongement compensatoire. Or, en plus des deux noms
homériques Σθενέλᾱος et Σθένελος, on a bien Σθενέδᾱ/ημος, en Attique,
en Illyrie et en Grèce du Nord (cf. LGPN 2, 3a et 3b), et Σθενέλαος
(Laconie, LGPN 3a), Σθενέλας (Rhodes et Camiros, LGPN 1 ; Argos,
LGPN 3a), Σθένελος (Athènes, Téos, Carie et Lycie, cf., respectivement,
LGPN 2, 5a et 5b), avec le dérivé Σθενελαΐδας (Sparte, LGPN 3a) / Σθε-
νελίδης (Thasos, LGPN 1). De même, on a Θαρρέδαμος (Sicile, Lipara,
iiie-iie  s. a. C., LGPN 3a) et Θαρρελείδης, nom de trois individus du
ve siècle avant notre ère en Attique (LGPN 2) 42. Enfin, on a également

40. Risch, Wortbildung, p. 191.


41. L. Dubois « Diathèse et anthroponymie grecque », dans Typologie et comparatisme.
Hommages offerts à Alain Lamaréchal, I. Choi-Jonin, M. Duval et O. Soutet (éd.),
Louvain - Paris - Walpole (MA), 2010, p. 101.
42. Un problème est posé par le vers 17 des Oiseaux d’Aristophane. La récente édition
d’Oxford (N.  G. Wilson, OCT, 2007, tome I, p.  347) imprime Θαρραλείδου et
n’indique pas de variante, tandis que l’édition de la CUF (Coulon et Van Daele,
le type Σθεν-έ-λαος 115

Κλεϝε-, et non -εσ-, devant des consonnes sourdes, en béotien : Κλεϝε-


θοίνιος et Κλεϝεκράτεα (cités ci-dessus, 4.4). Là non plus, une sifflante
ne peut pas avoir disparu phonétiquement.
4.8.2. Σθενε- représente-t-il en fait *Σθενεσ- avec disparition du -σ-
par analogie de Μενε- (vel sim.) ?
Cette position obligerait à admettre des analogies pour plusieurs
autres premiers membres (pour Θαρρε-, Κλεϝε-, Τελε-, Φαε-) et surtout
elle suppose qu’il y a eu, dans un passé pas trop éloigné, des anthropo-
nymes à premier membre en -εσ-. Or on a vu ci-dessus qu’il en a sans
doute existé un, très ancien, Ὀρέστης, qui peut effectivement reposer
sur *Ὀρεσ- + -στᾱ-, mais notre documentation onomastique, qui est
très importante, n’en contient aucun autre en raison de la substitution
ancienne de -o- à -εσ-. À la seconde question, nous répondons donc
négativement : Σθενε- ne représente pas *Σθενεσ-.
4.8.3. Nous en arrivons donc à la troisième question : Σθενε- peut-il
se comprendre comme un thème verbal, ce qui implique de trouver un
sens satisfaisant pour le composé, c’est-à-dire de mettre en lumière la
relation qu’entretiennent entre eux ses deux membres ?
Le verbe σθένω a le sens de « être fort » 43. À l’époque classique, ce
verbe n’est jamais construit avec un régime à l’accusatif et n’est donc
jamais transitif. La difficulté de l’interprétation de Σθενέλᾱος et Σθενέ-
δᾱμος vient de là. Dans l’article cité ci-dessus, L. Dubois a proposé une
solution nouvelle (p. 99-102). Partant de l’idée que le sens demande un
premier membre recteur de sens transitif, il forme l’hypothèse qu’à côté
d’un verbe intransitif ou du moins non causatif, il a pu exister un pre-
mier membre à valeur causative. Il rassemble en particulier les anthro-
ponymes suivants, que nous citons avec les traductions qu’il en donne :
t. III, 6e tirage revu, 1967, p. 24) indique : Θαρραλείδου Lobeck : Θαρελλείδου R1
Θαρρελείδου R2VΦΣRV Ald. Il est possible qu’Aristophane ait joué sur le nom
propre en le rapprochant de l’adjectif θαρραλέος « hardi » (A. M. Desrousseaux, cf.
J. Taillardat, Les images d’Aristophane. Études de langue et de style, Paris, 1965,
p.  215 n.  6, et M.  Casevitz, Commentaire des « Oiseaux » d’Aristophane, Lyon,
1978, p. 24). Il n’en demeure pas moins que le nom Θαρρελείδης a bel et bien existé.
Le relevé du LGPN lève à cet égard tous les doutes.
43. Par exemple, σθένεις δ´ ἔλασσον τῶν ἐναντίων χερί « tu es moins forte par ton
bras que tes ennemis » (Sophocle, Électre, v. 998), ηὔχεις τις εἶναι τοῖσι χρήμασι
σθένων « tu te flattais d’être quelqu’un d’important parce que tu étais puissant par
tes richesses » (Euripide, Électre, v. 939), etc. ; cf. LSJ, s.v.
116 alain blanc

Ἐρέδᾱμος « celui qui fait se lever le peuple (pour aller au combat) », cf.
ἔρετο· ὠρμήθη (Hsch.),
Ἐρχέλαος « qui fait marcher son peuple en armes contre l’ennemi », cf.
ἔρχομαι « marcher »,
Σθενέδᾱμος « qui donne la vigueur à son peuple »,
Θαρρέδαμος « qui rend son peuple audacieux », cf. racine *dhers- « être
audacieux » 44,
Μενέλᾱος « qui fait tenir bon ses troupes », cf. μένω « tenir bon »,
myc. ne-e-ra-wo = /Nehelāwos/ « qui ramène dans leur patrie les soldats
qui ont combattu », cf. νέομαι « revenir sain et sauf ».

4.8.4. L. Dubois (p. 108) montre bien l’originalité de ces composés.


« Ce qui est intéressant pour l’histoire de la langue grecque, c’est que
ces anthroponymes se font l’écho, du moins pour certains d’entre eux,
d’un état morphologique plus riche où les oppositions de diathèse étaient
exprimées d’une façon différente de celles du grec archaïque ». Gardant
toute sa prudence, il ajoute tout de suite après : « Mais je ne peux décider
si les formes causatives constituent toujours des archaïsmes et si nous ne
sommes pas aussi parfois en présence d’un infléchissement sémantique
dû à la seule composition ». Il conclut son article des Hommages offerts
à A. Lemaréchal en exprimant une attente : « Des linguistes spécialistes
de typologie comme Alain devraient pouvoir nous dire si le grec est isolé
dans ce domaine ou s’il s’agit d’un phénomène morpho-sémantique plus
général » (p. 108-109). À notre connaissance, les typologues ne se sont
pas exprimés sur ce point. Nous voudrions pour notre part apporter le
point de vue d’un chercheur sur la composition nominale grecque, en
partant non des anthroponymes, mais des appellatifs.
4.8.5. Les études consacrées à la composition nominale en grec
ancien ont généralement tenu compte dans une certaine mesure des noms
de personnes, pour montrer qu’ils suivent les règles de la composition
des appellatifs. Il y a bien entendu des phénomènes qui sont propres à
l’onomastique, mais les procédés morphologiques sont identiques et les
types de composés sont les mêmes. Or, dans les appellatifs, on n’observe

44. Cf. LIV, s.v. dhers-. Cette racine fournit des formes de valeur intransitive au sanskrit
(participe aoriste dhr̥ ṣánt-, présent à nasale dhr̥ ṣṇóti « il ose » et parfait dadhárṣa
« il est courageux »), au lituanien (dręsù « oser ») et au gotique (ga-dars « il a le
courage de »).
le type Σθεν-έ-λαος 117

jamais de premier membre de composé causatif répondant à un verbe qui


ne connaîtrait pas d’emploi causatif 45. Ce fait indique que la causativité
qu’on observe en premier membre de composés anthroponymes résulte
de phénomènes secondaires, et Dubois donne lui-même deux éléments
de réponse qui permettent à notre avis de comprendre les composés en
question en faisant appel pour certains à un premier membre transitif,
pour d’autres à un premier membre intransitif.
4.8.6. Le premier élément de réponse est qu’il a pu exister entre l’indo-
européen et le grec des thèmes verbaux transitifs que le grec ne possède
plus comme formes de la conjugaison, mais dont il a encore trace en pre-
mier membre de composé. Ainsi, Dubois montre très bien (105) qu’en
face de l’aoriste ἁδεῖν « plaire à », il a pu exister un aoriste en -σ- cau-
satif de sens « faire approuver » et qu’on en a une trace dans le premier
membre du nom d’homme thessalien ϝασίδαμος <  *ϝαδ-σ-ί-δᾱμος. Et
comme des actifs transitifs fonctionnent souvent comme causatifs par
rapport à des verbes moyens (cf. πείθω « persuader » par rapport à πεί-
θομαι « obéir »), on peut aussi penser qu’il y a eu un aoriste actif (sans
augment, 3e sg. *ἔρε) en face de ἔρετο· ὠρμήθη. Le premier membre de
Ἐρέδᾱμος peut refléter ce sens factitif et l’on ne peut qu’être d’accord
avec la traduction de Dubois (p. 100), « celui qui fait se lever le peuple
(pour aller au combat) ».

45. Pour apporter un parallèle à l’emploi causatif, on pourrait être tenté d’invoquer
le composé védique trasádasyu-, nom d’un roi célébré pour ses exploits dans le
Rgveda (IV, 42, 8). Ce nom, unique en son genre, comporte le thème du présent
trásati « il tremble » et le nom d’un peuple ennemi, les Dasyus. J.  Wackernagel
(Altindische Grammatik, II, 1. Nominalkomposition, Göttingen, 1905, p. 316) tra-
duisait par « die Feinde zittern machend » et sa traduction a souvent été reprise (par
exemple T. Burrow, The Sanskrit Language, Londres, 1973, p. 216), mais d’autres
indianistes ou comparatistes ont préféré des traductions qui font ressortir le sens
fondamentalement intransitif de trásati : « der, dessen Feinde zittern » (H. Grass-
mann, Wörterbuch zum Rigveda, 1872, p. 554), « before whom the Dasyus tremble »
(M. Monier-Williams, A Sanskrit-English Dictionary, Oxford, 1899, p. 457), « mit
zitternden Feinden » (F.  Sommer, IF  55, 1937, p.  191), et M. Mayrhofer indique
les deux traductions (Etymologisches Wörterbuch des Altindoarischen, Heidelberg,
1992-2001, I, p. 678). On doit constater qu’il n’y a pas en indo-iranien de système
productif de formation de premier membre de composés causatifs à partir de verbes
intransitifs. Trasádasyu- est isolé. Il serait de mauvaise méthode de s’appuyer sur lui
pour interpréter les formes grecques. Ce serait expliquer obscurum per obscurius.
118 alain blanc

Nous sommes tout à fait d’accord aussi sur la traduction du nom mycé-
nien ne-e-ra-wo = /Nehelāwos/ par « celui qui ramène dans leur patrie
les soldats qui ont combattu » (p. 103). En grec du premier millénaire,
νέομαι est intransitif (« revenir sain et sauf ») et il n’y a pas d’attestation
d’un causatif, mais on possède les anthroponymes Νέστωρ, qui est un
ancien nom d’agent, et Νέσσανδρος (Thessalie), qui suppose un premier
membre *νεσ-σ-ι- bâti sur un aoriste en -σ- (cf. ϝασίδαμος cité ci-dessus).
4.8.7. L’idée qu’il y ait eu une possibilité de construire un premier
membre factitif si la base verbale correspondante est manifestement non
factitive en grec et même au niveau indo-européen nous paraît beaucoup
plus difficile à admettre pour la raison qu’il n’y a aucun phénomène com-
parable dans les appellatifs. Or, si l’anthroponymie développe particuliè-
rement certains procédés de la composition nominale, elle ne les invente
pas. Elle les prend toujours au pot commun, si l’on peut dire. L’absence
de phénomène similaire dans les appellatifs amène à reconsidérer le prin-
cipe d’explication et nous tenterons donc de comprendre les trois noms
en question sans avoir recours à ce mécanisme spécial.
4.8.8. Ἐρχέλαος est rapproché par Dubois de Ἐρέδᾱμος, mais il ne
peut pas s’expliquer de la même façon car ἔρχομαι est bien attesté pen-
dant toute l’histoire du grec avec un sens intransitif (« marcher », et non
« faire marcher »). Admettre une analogie d’un *Ἐρέλαος serait arbi-
traire. Nous pensons donc que Ἐρχε- signifie bien « qui marche » et que
le second membre joue le rôle d’un complément d’accompagnement :
« qui marche avec le peuple en armes » (pour le guider, l’entraîner, etc.) ;
le second membre -λαος aurait une valeur de datif comitatif 46.
4.8.9. La base verbale qui correspond au premier membre de Θαρ-
ρέδαμος est fondamentalement intransitive. Dubois formule l’hypothèse
qu’il y a eu en grec un présent à vocalisme réduit *θάρσω, intransitif,
répondant aux formes sanskrites, également intransitives en dhars� - et
il pense donc que c’est le phénomène de la composition qui amène la

46. On pourrait objecter que dans les épopées homériques, le verbe ἔρχομαι n’est que
très rarement accompagné d’un complément d’accompagnement. Nous n’avons en
effet trouvé que ἐξ ἁλὸς ἥδε σὺν ἀθανάτῃσʹ ἁλίῃσιν ‫ ׀‬ἔρχεται « elle sort des flots
accompagnée des déesses marines », Od. 24, 55-56. Mais les expressions ἔρχεαι
οἶος (Il. 10, 385+), σύν τε δύʹ ἐρχομένω (Il. 10, 224), ἐρχομένων ἄμυδις (Il. 14, 343),
etc., impliquent que ἔρχομαι pouvait s’employer avec une spécification d’accompa-
gnement.
le type Σθεν-έ-λαος 119

valeur transitive. Cependant, on ne peut pas exclure que Θαρρέδαμος


signifie, avec un second membre équivalant à un complément de moyen,
« celui qui a de la hardiesse grâce à son peuple », ou même « celui qui
a confiance en son peuple » 47. L’interprétation de Dubois est plus flat-
teuse, certes, mais elle n’a pas d’appui phraséologique, sauf à penser que
Θαρρε- puisse être une abréviation pour *Θαρσυνε- (θαρσύνω + accu-
satif « encourager »).
4.8.10. Σθενέλαος et Σθενέδᾱμος. — Le verbe σθένω ne connaît que
des emplois intransitifs (« être fort » 48) et rien ne laisse à penser qu’il
ait eu des formes factitives. Le premier membre Σθενε- ne peut se com-
prendre que par référence aux emplois intransitifs. Nous proposons donc
de comprendre simplement « qui est fort par son peuple ». Ici aussi, la
traduction est moins flatteuse que celle de Dubois mais elle évite de poser
une valeur factitive qui n’a pas d’appui en grec.
4.9. Nous pensons donc que les interprétations sémantiques propo-
sées pour rendre compte de la majorité des noms en -δᾱμος et -λαος sont
tout à fait justes et que le chef indo-européen, puis grec, a pu être désigné
par des noms propres signifiant « qui fait se lever son peuple », etc. Nous
partageons tout à fait l’idée que des thèmes factitifs ont pu disparaître,
mais qu’il en reste trace dans des premiers membres (cf. ϝασι-, Ἐρε-,
Νεhε-), la valeur factitive apparaissant aussi dans des noms d’agent
comme Νέστωρ et dans les éléments de composés Ἐρτι- (cf. myc. e-ti-
ra-wo /Ertilāwos/), et -έρτης (cf. Λαέρτης). Cependant, lorsqu’un verbe
ne connaît pas de formes factitives et qu’aucun indice n’en fait supposer,
le premier membre en -ε- nous paraît pouvoir s’expliquer directement
par le thème verbal non factitif. Il faut alors se rappeler que, comme
l’indique Dubois lui-même (p. 100), dans un composé qui comporte un
membre verbal, la rection n’est pas forcément accusative. On peut avoir
une équivalence avec un génitif (Φειδέλαος « qui épargne son peuple »,
avec un datif d’intérêt (Εὐχέλαος « qui fait des vœux pour son peuple »),
47. Il faut remarquer que θαρσέω a un complément à l’accusatif chez Xénophon, Cyro-
pédie, 5, 5, 42, ἵνα καὶ εἴ τινές σε τιμῶσι, ἀνασπάζου καὶ εὐώχει αὐτούς, ἵνα σε καὶ
θαρρήσωσιν, « à ceux qui te témoignent leur respect, donne à ton tour des marques
d’amitié et traite-les bien, afin qu’ils se sentent en confiance avec toi ». En par-
tant de cette construction, on pourrait voir dans le second membre de Θαρρέδαμος
l’équivalent d’un accusatif.
48. Cf. note 43 ci-dessus.
120 alain blanc

et même avec un locatif (Πρεπέλαος « qui se distingue au sein de son


peuple). C’est dans les composés de ce genre que nous proposons d’in-
sérer Ἐρχέλαος, Θαρρέδαμος et Σθενέλαος.

Conclusion

Notre objectif a été de montrer la rigueur du phénomène de la com-


position nominale. On sait qu’il y a des règles strictes pour la forma-
tion des appellatifs. La recherche que nous avons exposée ici montre que
les mêmes règles s’appliquent à la formation des noms de personnes.
S’agissant de l’entrée des thèmes en s en composition, on observe des
constantes dans leur fonctionnement en second membre, l’appellatif et le
nom propre ne se distinguant que par l’accentuation (Εὐγένης / εὐγενής),
et dans leur fonctionnement en premier membre, avec substitution de -ο-
à -εσ- (Κλεο-μένης avec la même voyelle -o- que τειχο-ποιός).
Il y a toutefois une différence. Les appellatifs font partie du lexique
de la langue. Ce lexique est stable. Il comprend en synchronie des formes
d’âge divers : des formes archaïques, des formes plus récentes et quelques
néologismes. Les noms de personnes du grec ancien, en revanche, ne sont
pas figés comme les éléments du lexique. En effet, les composés qui les
constituent pour une grande part sont forgés par les parents qui fabriquent
le nom de leur enfant à partir d’un fonds de premiers et de seconds
membres 49. À partir des premiers membres Ἱππο-, Φιλο-, etc., et des
seconds membres -δᾰμος, -ξενος, etc., les parents grecs pouvaient former
Ἱππόδαμος, Φιλόξενος, etc. 50, et ils ont même quelquefois formé des
noms auxquels on ne peut pas attribuer un sens clair, tel Ἱππόξενος. Mis
à part les cas où un nom a été repris tel quel à un ancêtre, les noms com-
posés du grec sont donc des créations qui datent du moment de la dation
du nom, quelques jours après la naissance de l’enfant. La conséquence en
est que les anthroponymes composés du grec ne sont pas, en synchronie,
des archaïsmes, mais au contraire des formes nouvelles, et en tant que
formes nouvelles ils reflètent les modes de formation contemporains.

49. Comme le montre bien le célèbre passage des Nuées d’Aristophane, v.  60-67
(invention du nom Φειδιππίδης). — On doit remarquer à ce propos qu’il y a eu un
Φειδιππίδης à Athènes bien avant la comédie d’Aristophane (un peintre, cf. LGPN 2,
p. 444) et de nombreux Φείδιππος (ibid.).
50. L. Dubois, « Noms en Ἱππο-, -ιππος », dans GPN, p. 41-52.
le type Σθεν-έ-λαος 121

Il n’est donc pas surprenant que l’on ne trouve pas au premier mil-
lénaire d’anthroponymes en *Γενεσ-, *Γηθεσ-, *Εἰδεσ-, *Κλεϝεσ-,
*Μενεσ-, *Σθενεσ-, etc. Si l’on veut former un premier membre de com-
posé à partir d’un substantif sigmatique, la règle synchronique est la
substitution de -ο- à -εσ-, et on forme donc Γενο-, Γηθο-, Εἰδο-, Κλεο-,
Μενο-, Σθενο-, etc. Ce cadre rigide étant dégagé, il est impossible de rap-
porter les premiers membres en -ε- Κλε(ϝ)ε-, Σθενε- et Τελε- aux substan-
tifs κλέος, σθένος et τέλος. Il vaut mieux les inclure dans le grand groupe
des composés de dépendance progressif de ἑλκε-χίτων, ἐχέ-θῡμος, Ἐχέ-
πωλος, etc., en reconnaissant l’existence de composés très particuliers où
la relation sémantique n’est pas « qui fait ceci ou cela », mais « grâce à
qui/grâce à quoi x est ceci ou cela ».
Il reste évidemment d’autres domaines de la composition nominale
à reconsidérer, par exemple le domaine et la productivité des premiers
membre en -ι- (Γηθι-μένης, etc.), en -εσι- (Ἀνθεσί-λαος, Μενέσ-αν-
δρος) et en -ησι- (Θαλησι-κλῆς). Puisque les anthroponymes composés
sont des noms qui ont été créés et recréés lors de la dation du nom à
chaque enfant, ils sont instructifs sur le fonctionnement synchronique de
la langue et pourront encore jeter bien des lumières sur les mécanismes
de la composition nominale en grec 51.

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51. Lors d’une lecture d’un premier projet d’article sur ces noms composés, Sophie
Minon m’a fait part de ses remarques, qui m’ont amené à modifier profondément
l’ordre de présentation des faits et à préciser des points délicats. Qu’elle trouve ici
l’expression de mes remerciements.
122 alain blanc

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Les Grecs d’Étrurie :
l’adaptation des anthroponymes grecs à l’étrusque

Gilles van Heems


Université Lyon 2

1. Introduction

Les relations entretenues entre les Grecs et les Étrusques sont remar-
quables pour leur précocité. Sans remonter à l’époque héroïque, on rap-
pellera que les Étrusques constituent l’interlocuteur privilégié des Grecs
en Italie, lorsque les Eubéens s’installent dès le viiie siècle en Campanie
(comptoir de Pithécusses et colonie de Cumes) et deviennent rapidement
leur principal partenaire commercial à l’époque archaïque : l’Étrurie est
alors l’un des principaux débouchés en Occident du commerce grec, et
le goût affiché par les aristocrates tyrrhéniens pour ses produits incite
nombre de marchands et d’artistes du monde grec à côtoyer les cités
étrusques, voire à s’y installer. Il suffit de se rappeler le destin du Corin-
thien Démarate 1 qui, chassé de sa patrie par la révolution des Cypsé-
lides, décide de se réfugier à Tarquinia, car c’est une cité avec laquelle
il avait des relations d’hospitalité de longue date – il y épouse une noble
étrusque et en aura des enfants, parmi lesquels le roi de Rome Tar-
quin l’Ancien ; d’après la tradition, il emmena avec lui à Tarquinia trois
artistes-artisans aux noms « parlants », Eucheir, Eugrammos et Diopos 2 ;

1. Nos principales sources sur ce personnage, dont l’historicité n’est certainement


pas à mettre en doute, même si certains détails de sa « vie » sont indéniablement
romancés, sont : Pol., VI, 11a, 7 ; Cic., Rep., II, 19 ; Tusc., V, 37, 109 ; Liv., I, 34 ;
Dion. Hal., III, 46-47 ; Strab., V, 2, 2 ; VIII, 6, 20 ; Plin., Nat., XXXV, 43 ; Tac., Ann.,
XI, 14 ; Val. Max., III, 4, 2 ; Plut., Rom., 16, 8 ; Publ., 14, 1 ; Macr., Sat., I, 6, 8 ; III,
4, 8.
2. Plin., NH, XXXV, 152.
126 gilles van heems

on peut aussi mentionner le fameux marchand éginète Sostratos 3, dont


nous parle Hérodote, et qui a laissé des traces épigraphiques précisément
en Étrurie 4. Tous ces Grecs, qu’ils fussent de passage ou durablement
installés dans les communautés locales, ont eu des interactions avec les
« indigènes » et ont nécessairement été nommés par ces derniers. C’est à
ces noms grecs étruscisés que je voudrais consacrer mon étude.
Ce thème est évidemment très stimulant pour l’étruscologue, puisqu’il
se trouve en quelque sorte au croisement de deux préoccupations
majeures de cette science, la question du bilinguisme et des contacts de
langues en Italie préromaine – qui est de nouveau, ces dernières années,
au cœur de l’attention de la communauté savante – et celle de l’ono-
mastique, secteur du lexique étrusque qui, à la fois par son abondance
– la quasi-totalité de la dizaine de milliers d’inscriptions étrusques que
nous possédons conserve au moins un nom propre – et son relatif affran-
chissement des problèmes herméneutiques que pose le reste du lexique
étrusque, a fait l’objet d’études approfondies dès les débuts de l’étrusco-
logie scientifique 5. Nous bénéficions donc, pour ce faire, d’excellentes
bases de travail, la plus importante restant encore la somme consacrée
par C. De Simone 6, dans laquelle il étudie exhaustivement l’adapta-
tion linguistique des mots grecs à l’étrusque – et tout particulièrement à
partir des théonymes et autres noms de personnages du mythe grec, qui
constituent le contingent de loin le plus important d’emprunts faits par
l’étrusque au grec.

3. Hdt., IV, 152, 3.


4. Sur la fameuse « ancre » consacrée dans le sanctuaire de Gravisca : voir IGDGG I,
66, avec références bibliographiques.
5. L’œuvre pionnière en la matière est celle de W. Schulze, Zur Geschichte lateini-
scher Eigennamen, Berlin, 1904, qui, malgré ses défauts, a constitué la base de tous
les travaux ultérieurs consacrés à l’onomastique étrusco-italique. On citera encore
la somme fondamentale de H. Rix, Das etruskische Cognomen. Untersuchungen
zu System, Morphologie und Verwendung der Personennamen auf den jüngeren
Inschiften Nordetruriens, Wiesbaden, 1963, pour le domaine étrusque, ou encore
les importantes contributions dans P. Poccetti (éd.), L’onomastica dell’Italia antica:
aspetti linguistici, storici, culturali, tipologici e classificatori, Rome, 2009, emblé-
matiques de l’intérêt renouvelé pour l’étude de l’onomastique des peuples de l’Italie
préromaine depuis le début du xxie siècle.
6. C. De Simone, Die griechische Entlehnungen im Etruskischen, 2 vol., Wiesbaden,
1968-1970.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 127

Un tel sujet soulève plusieurs questions fondamentales, auxquelles


cet essai tentera d’apporter des éléments de réponse.
1) En premier lieu, la question du bilinguisme et de l’onomastique :
comme les spécialistes de la question le savent bien 7, un nom propre, et
en particulier un anthroponyme, désigne avant d’éventuellement signi-
fier ; son transfert d’un domaine linguistique à l’autre implique-t-il donc
d’abord une transposition ou peut-on s’attendre, dans un tel processus,
à rencontrer des phénomènes de traduction ? Or, dans le cas qui nous
occupe, le problème traditionnel et « universel » posé par les différences
linguistiques (et en particulier phonologiques) entre les deux idiomes
concernés se double du problème soulevé par l’écart entre les systèmes
onomastiques grec et étrusque et plus généralement par l’écart entre les
usages onomastiques propres aux deux peuples : alors que le système
onomastique grec est de type patronymique « classique » (où la dési-
gnation de l’individu se fait au moyen d’un nom individuel accompagné
d’un patronyme, type « X fils de Y »), les Étrusques sont passés à un sys-
tème gentilice, fondamentalement différent du précédent, dont pourtant
il doit être issu 8 ; mais au delà de cette différence systémique, on notera
encore que si les Grecs ont un goût immodéré pour les noms composés
ou les noms théophores, les Étrusques ignorent presque totalement ces
deux types de formation anthroponymique 9 et privilégient un répertoire
de noms sémantiquement opaques. Ce double constat doit donc amener
à se demander de quelle manière un nom individuel grec peut être adopté
et adapté en étrusque : l’idionyme grec est-il considéré comme équi-
valant à un prénom ou à un gentilice étrusque ? Dans quelle mesure le

7. Pour une bonne synthèse des aspects linguistiques du nom propre, v. M.-N. Gary-
Prieur, Grammaire du nom propre, Paris, 1994.
8. H. Rix, « Zum Ursprung des römisch-mittelitalischen Gentilnamensystems »,
dans ANRW, I, 2, Berlin - New York, 1972, p. 700-758 ; G. van Heems, « Vers une
koinè italienne ? La langue latine au contact de ses voisines : questions de méthode
et réflexions autour du cas du “bilinguisme” étrusco-latin », dans M. Aberson,
C. Biella, M. Di Fazio et M. Wullschleger (éd.), L’Italia centrale e la creazione di
una koiné culturale? I percorsi della “romanizzazione”, Berne, 2016, p. 113-114.
9. Les deux seuls noms qui peuvent éventuellement s’analyser comme des noms
composés sont les prénoms arc. θanaχvil, réc. θanχvil (si l’élément ‑χvil est bien le
même qui est à l’œuvre dans le composé tins‑cvil [tinś-cvil] « offrande » [litt. « don
à Tinia » ?]) et éventuellement arc. θesanθei, si l’élément ‑θei n’est pas qu’un suffixe
dérivatif (θesan : « [déesse de l’]aurore, matin »). On renvoie au ThLE I2, s.v., pour
les attestations de ces formes. Sur les noms théophoriques en étrusque, voir infra.
128 gilles van heems

statut social de l’individu (« pérégrin », pour reprendre la terminologie


latine, ou citoyen, membre de l’aristocratie de sa patrie ou représentant
de classes inférieures, qu’il s’agisse d’ingénus pauvres ou d’esclaves)
intervient-il dans ce processus ?
2) Cette étude devra donc être non seulement linguistique, mais aussi
socio-historique et s’intéresser aux usages du nom grec en étrusque :
comment désigne-t-on un Grec dans les documents étrusques ? Comment
désigne-t-on un Grec installé dans une communauté étrusque ? Comment
désigne-t-on le descendant, en ligne patrilinéaire, d’un Grec ? Comment
un Grec ou un descendant de Grec devenu citoyen étrusque est-il appelé ?
Peut-on déceler des phénomènes de mode, consistant à donner des noms
grecs ou grécisants à des Étrusques ?
3) Cette question de l’adoption et de l’adaptation des noms grecs en
étrusque pose donc, on le voit, la question du transfert onomastique : et
ce transfert onomastique est-il un cas particulier du transfert lexical ou se
rapproche-t-il de ce qu’on appelle un transfert culturel ? Répondre à cette
question doit passer par une étude attentive de la morphologie de l’em-
prunt et des règles qui régissent le passage d’un anthroponyme grec en
étrusque ; il conviendra, à ce sujet, de se demander si le matériau anthro-
ponymique reçoit un traitement identique ou différencié par rapport aux
autres noms propres (essentiellement les théonymes et les « noms du
mythe ») et / ou par rapport au reste du lexique (puisqu’on dispose d’un
nombre important d’appellatifs étrusques tirés du grec). Les aspects pho-
nologique – comme on sait, les emprunts linguistiques, et en particulier
les emprunts au grec, ont joué un rôle essentiel dans notre reconstruction
du système phonologique étrusque 10 – et morphologique de la question
auront donc une place centrale dans cette étude.
4) Bien entendu, ces analyses seront attentives aux différences régio-
nales et, surtout, chronologiques, car le traitement onomastique réservé
à un Grec n’est pas nécessairement le même d’une région à l’autre de
l’Étrurie – on verra ainsi qu’existent d’importants particularismes régio-
naux dans l’adaptation des anthroponymes grecs à l’étrusque – ni d’une
époque à l’autre, puisque les Grecs qui s’installent en Étrurie à l’époque

10. L. Agostiniani, « Contribution à l’étude de l’épigraphie et de la linguistique


étrusques », Lalies 11 (1992), p. 47.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 129

archaïque ne sont pas les mêmes que ceux qui arrivent, généralement par
le trafic d’esclaves, aux époques hellénistique et romaine.

2. Présentation du corpus

Bien qu’elles soient incomplètes 11, les données disponibles per-


mettent d’établir un répertoire des noms de personnes étrusques d’origine
grecque comprenant 59 probables bases onomastiques, correspondant à
79 noms différents, attestés par 175 inscriptions de natures très variées 12.
S’ils constituent un noyau anthroponymique cohérent et important du
point de vue numérique, on constatera néanmoins que les noms d’origine
grecque attestés en étrusque sont largement minoritaires par rapport aux
noms d’origine sabellique et latino-falisque (mais bien mieux représentés
que les noms d’origine celtique ou sémitique 13).

11. La somme de C. De Simone, op. cit., offre une base de travail encore indépassée, bien
que l’accumulation des nouveautés depuis les années 1970 et les progrès conceptuels
et méthodologiques acquis dans le domaine de la linguistique de contacts suggère-
rait de reprendre ce travail. Les travaux plus récents sont généralement concentrés
sur certaines formes ou incomplets : v., en dernier lieu, S. Bourdin, « Fréquenta-
tion ou intégration : les présences allogènes dans les emporia étrusques et ligures
(vie-ive siècles av. J.-C.) », dans Espaces d’échanges en Méditerranée : Antiquité
et Moyen Âge, Rennes, 2006 [disponible sur Internet : http://books.openedition.
org/pur/7832], en part. § 31 et tab. 3, qui ne prend en compte que les témoignages
d’époque archaïque.
12. Le catalogue de ces formes est rassemblé en annexe à la fin de cet article, où sont
précisés, pour chaque base nominale retenue, les lieux de provenance, l’époque d’at-
testation et la ou les fonctions dans lesquels les noms dérivés de ces bases sont
employés. Du point de vue de la répartition de ces noms d’origine grecque par type
d’inscriptions, on constatera qu’elle reflète assez fidèlement la composition du
corpus épigraphique étrusque : on trouve en premier lieu des épitaphes – qui consti-
tuent la classe d’inscriptions de loin la plus représentée dans le corpus étrusque –,
puis des inscriptions de propriété sur instrumentum, des inscriptions de don et des
inscriptions votives (ex-voto).
13. Là encore, la comparaison précise est rendue malaisée par le manque d’études
exhaustives. Sur les noms étrusques d’origine celtique, on se contentera de l’étude
(elle aussi ancienne) de C. De Simone, « Un nuovo gentilizio etrusco di Orvieto
(Katacina) e la cronologia della penetrazione celtica (gallica) in Italia », PP 33
(1978), p. 370-395.
130 gilles van heems

2.1. Constitution du corpus


Comme on peut s’en douter, la constitution d’un tel répertoire n’est
pas aisée, tant les ambiguïtés de l’analyse étymologique des formes
onomastiques étrusques sont nombreuses : C. De Simone retenait déjà
une liste de 68 bases onomastiques d’étymologie grecque employées
comme anthroponymes 14 ; mais compte tenu des progrès de l’épigraphie
étrusque, cette liste doit être à la fois complétée par les nouveautés appa-
rues depuis la fin des années 1960 et – surtout – amendée, car nombre de
formes incluses sans discussion par C. De Simone sont en réalité d’éty-
mologie discutable. Je ne donnerai comme illustration des difficultés à
juger de l’étymologie des noms étrusques que celui du prénom murila,
attesté dans une dédicace tarquinienne sur un thymiaterion de bronze 15,
car elle est emblématique des difficultés posées par l’analyse des formes
étrusques. La structure syntaxique de l’inscription
cn. turce. murila. hercnas : / θuflθas. cver :
ne pose pas de difficultés d’interprétation et indique que murila est indu-
bitablement un prénom féminin, qui est, depuis les travaux de C. De
Simone, considéré comme l’étruscisation du nom grec Μύριλλα 16. Pour-
tant, le recours à une étymologie alloglotte n’est nullement nécessaire
pour rendre compte d’une forme qui peut être considérée comme plei-
nement étrusque, à savoir une formation diminutive en ‑la sur une base
onomastique étrusque bien connue (*mur: / *murc, gentilice murina) 17.
Le déséquilibre dans notre connaissance des deux langues – l’onomas-
ticon grec est infiniment plus riche que l’onomasticon étrusque – fait que
nous risquons de considérer comme d’ascendance grecque des forma-
tions qui sont proprement étrusques, ce qui constitue le premier obstacle
14. C. De Simone, op. cit., p. 211-240.
15. ET Ta 3.6. Sur l’objet et l’inscription, voir L. Ambrosini, Thymiateria etruschi in
bronzo di età tardo classica, alto e medio ellenistica, Rome, 2002, p. 233, no 119 et
p. 428, no 6 ; D. M. Maras, Il dono votivo. Gli dei e il sacro nelle iscrizioni etrusche
di culto, Pise - Rome, 2009, p. 387-388, Ta do.4, avec bibliographie principale.
16. C. De Simone, op. cit., p. 232-233 ; la doxa a été depuis acceptée unanimement : cf.
F.-H. Massa-Pairault, Recherches sur l’art et l’artisanat étrusco-italique à l’époque
hellénistique, Rome, 1985, p. 98 ; D. M. Maras, op. cit., p. 211 et 388.
17. Sur la question, G. van Heems, « Diminutifs, sobriquets et hypocoristiques
étrusques », dans P. Poccetti (éd.), Les prénoms de l’Italie antique, Pise - Rome,
2008, p. 88.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 131

à un recensement exhaustif des formes anthroponymiques étrusques


issues du grec.
Ainsi, un examen critique des données recueillies par les travaux pré-
cédents doit amener à considérer certaines formes comme étant seule-
ment probablement d’origine grecque et d’autres comme certainement
pas d’origine grecque. Dans le catalogue présenté en annexe, le premier
contingent de formes est signalé par un « ? » apposé à l’étymon supposé :
il s’agit de formes étrusques isolées, pour lesquelles l’étymologie pro-
posée pose des difficultés formelles.
C’est le cas, notamment, de la forme étr. carucra, acquisition récente
de l’onomasticon étrusque 18, dont l’éditeur de l’inscription qui l’at-
teste a proposé de faire un dérivé étrusque en ‑ra (suffixe dérivatif mar-
quant l’appartenance, et utilisé en particulier pour former des gentilices
à partir de prénoms ou noms individuels) à partir d’une base empruntée
au gr. (dialecte dorien) Κᾶρυξ / κᾶρυξ « Héraut/héraut » ; pour l’éditeur,
il s’agit d’une forme dérivée non pas d’un anthroponyme grec (Κᾶρυξ
« Héraut »), mais de l’appellatif, à partir de sa forme d’accusatif (κάρυκα)
(*caruca‑ra > carucra) ; on aurait ainsi à la base un emprunt arrivé en
étrusque par voie « orale » et non savante. Mais en réalité une telle éty-
mologie pose deux problèmes insurmontables : d’abord, l’absence de
modèles directs, de formations anthroponymiques étrusques faites à
partir de mots grecs empruntés (qui plus est sous leur forme d’accusatif
– car si certains emprunts au grec ou à d’autres langues semblent bien se
faire, en étrusque, à partir de la forme d’accusatif, il reste que ce procédé
n’est pas autrement attesté pour les anthroponymes) ; ensuite, l’absence
d’exemple de l’emploi de gr. κῆρυξ pour désigner un individu dans le
riche patrimoine anthroponymique grec ; il peut certes s’agir d’une inno-
vation « locale », mais supposer qu’un Grec fréquentant le sanctuaire de
Pyrgi se soit fait appeler par son statut (certes encore prestigieux au ve
siècle a. C.), plutôt que par son nom individuel, me semble peu vraisem-
blable. Aussi me semble-t-il plus prudent de considérer qu’on a affaire
à une formation en ‑ra sur une base étrusque *caruc‑ pour le moment
isolée.
L’autre série est constituée des noms que nous n’avons pas retenus.
Quelques-unes méritent commentaire.

18. G. Colonna, dans REE 69 (2003), no 29, p. 319-322.


132 gilles van heems

a) Il en va ainsi de la forme kraitiles, attestée dans l’une des plus


anciennes inscriptions étrusques 19, malheureusement de sens fort dif-
ficile à cerner. S. Marchesini 20 y voit l’étruscisation de gr. Κρατίλος ;
mais d’une part il n’est pas certain – tant s’en faut ! – qu’il s’agisse
d’un nom propre 21, et d’autre part il faudrait expliquer le passage gr.
‑a‑ > étr. ‑ai‑, totalement contraire aux règles de transposition phono-
logique qu’on peut établir 22.
b) L’acquisition récente du nom arχusna, employé à Orvieto à l’époque
tardo-archaïque 23, que l’éditeur considère comme une formation en
‑na (suffixe dérivatif bien connu en étrusque, et utilisé en particulier
dans l’anthroponymie pour créer des gentilices à partir de prénoms
ou noms individuels) sur le gr. ἀρχός « chef », mérite également cri-
tique. On signalera que l’étymologie par ἀρχός pose un grave pro-
blème formel : une telle forme grecque serait passée en étrusque sous
la forme *arχe et non *arχus ; on pourrait, alternativement, proposer
que le nom grec emprunté ait été Ἄρχων, attesté comme NP surtout
à partir du ive siècle a. C. 24 : un tel nom aurait été adapté en étrusque
sous la forme *arχu (gén. *arχus) ou *arχun (gén. *arχunus). Mais
outre les difficultés chronologiques soulignées, une telle hypothèse
suscite un sérieux obstacle morphologique : les dérivés étrusques en
‑na ne sont jamais bâtis sur des formes de génitif, mais toujours d’ab-
solutif (on attendrait donc *arχuna). Aussi faut-il absolument rejeter
cette étymologie.
19. ET Ta 3.1 (fin viiie-début viie s. a. C.).
20. S. Marchesini, Studi onomastici e sociolinguistici sull’Etruria arcaica : il caso di
Caere, Florence, 1997, p. 164.
21. Cette inscription de don rédigée en scriptio continua ne pose pas de problème de
séparation des unités lexicales (mi velelθus kacriqu numesiesi putes kraitiles θis
putes), mais d’interprétation de la nature et de la fonction des noms communs (en
particulier du corrélatif – s’il s’agit bien d’un corrélatif – putes… putes). Si l’on
retient l’hypothèse de D. Steinbauer que θi est la désignation d’un liquide (« eau »
uel sim.), kraitiles a de bonnes chances d’être également un appellatif (désignant un
liquide ?) ; voir, en ce sens, l’interprétation de H. Eichner, « Anmerkungen zum Etrus-
kischen in memoriam Helmut Rix », dans G. Rocca (éd.), Atti del Convegno Inter-
nazionale « Le lingue dell’Italia antica. Iscrizioni, testi, grammatica / Die Sprachen
Altitaliens. Inschriften, Texte, Grammatik. In memoriam Helmut Rix (1926-2004),
᾽Αλεξάνδρεια / Alessandria 5 (2011), p. 84 (« ein Rauschtrank, Met ? »).
22. Voir infra.
23. Orvieto, Crocifisso del Tufo, fin vie s. a. C. (voir G. Colonna, dans REE 74 (2008),
no 50, p. 289-290).
24. Nous renvoyons aux données rassemblées dans le LGPN en ligne (vol. 3a, etc.), s.v.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 133

c) La troisième forme qui mérite commentaire est puinel, qui, présente


sur la fameuse tessère d’hospitalité de Carthage 25, est quasi-unanime-
ment, depuis la fameuse étude de É. Benveniste 26, considérée comme
un dérivé du gr. Φοῖνιξ, désignant un Phénicien et / ou un Punique –
interprétation renforcée par la présence, juste après ce mot, de la
forme karθazie, renvoyant clairement à Carthage même si là encore la
nature et la fonction exactes de ce terme nous échappent. Le détail du
transfert onomastique peut varier selon les analyses – emprunt direct
au grec ou passé par une langue italique (en général, un parler sabel-
lique, à cause de l’apocope, cf. osq. famel : lat. famulus, qui permet
de poser sabell. *poinel/*puinel : lat. Poenulus) –, ainsi que la nature
lexicale de puinel (adjectif ethnique ou NP) 27, mais la valeur ethnique
de la forme n’est jamais remise en cause. Pourtant, une telle hypo-
thèse pose des problèmes à la fois formels et historiques – puisque étr.
puinel ne peut venir directement de lat. Poenulus, comment expliquer
un intermédiaire sabellique à une date si haute ? – et l’édition récente
de fragments de tessères d’hospitalité du palais princier de Murlo par
A. Maggiani 28, dont l’un contient la séquence <puin[ ]e[> (restituée
en puineḷ par l’éditeur) amène à formuler d’autres hypothèses – selon
lesquelles ce mot pourrait être soit un appellatif désignant l’objet-
support, équivalent étrusque de gr. σύμϐολον, soit plus simplement
un prénom proprement étrusque. En tout état de cause, il est plus sûr
de ne pas inclure cette forme dans le patrimoine des anthroponymes
étrusques d’origine grecque 29.

25. ET Af 3.1 (Carthage, milieu du vie s. a. C.). Quoiqu’elle n’ait pas modifié la forme
de ce nom, nous renvoyons à la relecture faite par A. Maggiani de cette inscription
lacunaire : A. Maggiani, « Dinamiche del commercio arcaico : les tesserae hospi-
tales », dans G. Della Fina (éd.), Gli Etruschi e il Mediterraneo: commerci e poli-
tica, Annali della fondazione per il museo « C. Faina » 13 (2006), p. 319-321.
26. É. Benveniste, « Notes étrusques », Studi Etruschi 7 (1933), p. 245-258.
27. Pour la communis opinio sur cette forme, voir la bonne synthèse que propose P. Poc-
cetti, « Anthroponymes et toponymes issus d’ethniques et noms géographiques
étrangers », dans C. Ruiz Darasse et E. Luján (éd.), Contacts linguistiques dans
l’Occident méditerranéen antique dans la Méditerranée archaïque, Rome, 2011,
p. 146-147.
28. A. Maggiani, art. cit., p. 321-325.
29. Sur ce point, voir G. van Heems, « De Carthage à Gouraya : onomastique étrusque
d’Afrique », dans L’onomastica africana, Ortacesus, 2012, p. 151-153.
134 gilles van heems

2.2. Répartition du corpus


Le corpus rassemblé présente quelques particularités intéressantes,
quant à la répartition de ces formes : si l’ensemble de l’Étrurie semble
employer des noms de personne grecs, c’est la cité de Chiusi et, secon-
dairement, de Pérouse, qui en font – et de loin – le plus grand usage (cf.
fig. 1). Mais c’est là un effet de distorsion lié en partie à la répartition géo-
graphique du corpus épigraphique étrusque dans son ensemble : les cités
de Chiusi et Pérouse totalisent à elles seules plus de la moitié du corpus
épigraphique étrusque, grâce en particulier à leur série d’urnes inscrites
produites entre le iiie et le ier s. a. C. En revanche, la présence répétée de
formes anthroponymiques empruntées au grec dans les régions périphé-
riques que sont la plaine Padane (Spina, Adria, Bologne), la Campanie
(Capoue), et la colonie corse d’Aléria, centres où la production épigra-
phique a été nettement plus modeste, est, nous le verrons, significative.
40
35
30
25
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Fig. 1. — Répartition géographique des anthroponymes étrusques d’origine grecque.

Un autre effet de distorsion, chronologique cette fois, est patent


dans ce corpus : si les attestations archaïques (viie-ve s. a. C.) de noms
grecs étruscisés sont nettement moins nombreuses que les attestations
d’époque récente (ive-ier s. a. C.), c’est que les inscriptions archaïques
sont quatre à six fois plus rares 30 que les inscriptions récentes.

30. Le nombre d’inscriptions archaïques est généralement évalué à un quart du corpus


total, mais en réalité les chiffres varient grandement en fonction de la classe
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 135

Enfin, ce répertoire montre un écart très net entre les emplois fonc-
tionnels de ces formes onomastiques (cf. fig. 2). En effet, si toutes les
catégories que connaît l’onomastique étrusque (prénoms, idionymes
d’esclaves et/ou de lautni, idionymes d’étrangers, gentilices et cogno-
mina) intègrent des noms grecs, la répartition de ces derniers selon leur
fonction est loin d’être égale : la surreprésentation des gentilices est
manifeste, mais se cachent dans cette même catégorie des noms qui sont
en réalité de nature très différente. Ainsi, à côté des gentilices dérivés
de bases nominales grecques (type cuclnie, platunalu ou pulena), qui
impliquent que l’auctor gentis de ces familles portait un nom individuel
grec à partir duquel le nom de la gens a été élaboré, on trouve nombre
de gentilices formellement semblables à des idionymes (autrement dit,
selon la terminologie introduite par H. Rix, des Vornamengentilicia 31),
cognomen 8 %

prénom 1 %

nom individuel
d’esclave 35 % gentilice 51 %

nom individuel
d’étranger 1 % nom individuel
indéterminé 4 %

Fig. 2. — Répartition fonctionnelle des anthroponymes étrusques d’origine grecque.

d’inscriptions considérées : ainsi seulement 10 % à 15 % du corpus des inscriptions


funéraires est antérieur au milieu du ve s. a. C.
31. H. Rix, Cognomen, op. cit., p. 325 sq.
136 gilles van heems

qui impliquent une genèse très différente : dans tous ces cas, on a affaire
à d’anciens noms individuels d’esclaves, réutilisés comme gentilices au
moment de l’affranchissement, conformément à la pratique étrusque 32.
Autrement dit, les chiffres qui ressortent de ce tableau cachent donc de
fait une caractéristique très particulière du corpus des anthroponymes
grecs d’origine étrusque : leur surreprésentation, voire leur « spéciali-
sation », au moins à l’époque récente, dans la désignation d’esclaves,
particularité qui s’explique sans difficulté par les flux géographiques du
marché des esclaves à l’époque tardo-républicaine, et que l’épigraphie
étrusque, où ces catégories sont particulièrement bien représentées à
partir du ive s. a. C. 33, reflète fidèlement.

3. Étude linguistique
Après cette sommaire présentation du corpus, il convient de proposer
une étude linguistique exhaustive de ce matériau onomastique, afin de
mettre en évidence les mécanismes de l’adaptation linguistique des noms
grecs à l’étrusque. Sur ce point, je signalerai d’emblée que dans l’ensemble
les anthroponymes étrusques tirés du grec se conforment aux règles qui
régissent les emprunts faits au grec, tant du point de vue de la phonologie
de l’emprunt que de la suffixation de ces formes. On ne soulignera ici que
quelques points remarquables, dans ce panorama bien connu.

3.1. Phonologie de l’emprunt


Du point de vue phonologique, l’adaptation des mots grecs – les
anthroponymes ne faisant pas figure de cas particulier sous cet aspect – à
l’étrusque implique une série de modifications bien connues 34, et sur les-
quels je ne reviendrai que brièvement.
La correspondance phonématique entre le grec et l’étrusque ne pose
problème que pour un petit nombre de phonèmes :
a) Le traitement des occlusives sonores du grec : celles-ci, à l’inverse
des occlusives aspirées, n’ont pas d’équivalent en étrusque et sont
rendues par les mêmes graphèmes que les occlusives sourdes du grec
(et issus des lettres de l’alphabet grec qui notaient les sourdes, <τ>,
32. H. Rix, ibid., p. 356-372.
33. H. Rix, Die Termini der Unfreiheit in den Sprachen Alt-Italiens, Stuttgart, 1994.
34. C. De Simone, op. cit., p. 9-92.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 137

<κ>, <π>, <ϙ>, auxquelles on peut ajouter <γ> sous sa forme semi-
lunaire, et qui note en étrusque l’occlusive vélaire sourde – ou plutôt
non marquée – /k/) ; ainsi, on pourra comparer les formes eucle :
Εὐκλῆς ~ clauce : Γλαῦκος ; φilutis : Φιλῶτις ~ pultuce : Πολυδεύκης
(le corpus n’a pas d’exemple de gr. <β> /b/ rendu en étrusque par <p>
/p/, mais les exemples tirés de théonymes sont sûrs (cf., p. ex., gr.
Φοίβᾱ > étr. φuipa 35).
b) Le traitement des voyelles vélaires : l’étrusque ne possède qu’une
seule voyelle vélaire 36, qu’il note dès le début de la tradition écrite
au moyen de gr. <υ> (= étr. <u>), laissant supposer que cette voyelle
était phonétiquement perçue par les Étrusques qui ont adapté l’al-
phabet eubéen à la notation de leur langue à la fin du viiie s. a. C.
comme étant plus proche de [u] que de [o]. C’est cette lettre qui est
seule chargée de transposer toutes les voyelles vélaires du grec (/u/ et
/o/, quelle que soit leur longueur ; comp. antrumacia : Ἀνδρομάχη ~
atunes : Ἄδωνις ~ pure : Πύρρος). Les diphtongues gr. <αυ>, <ευ>
sont sans difficulté rendues par les digraphes correspondants étr.
<au>, <eu> (taure : Ταῦρος ; eupuria : Εὐπορία).
c) Les sifflantes : le /s/ du grec est généralement rendu par la lettre
dévolue à la notation de la sifflante alvéolaire de l’étrusque (sigma
en Étrurie méridionale, san en Étrurie septentrionale : comp. sminθe
[Volsinies] : śminθi [Adria]), mais on note quelques anomalies
(comme l’emploi de étr. <z> pour noter l’initiale de gr. Σαραπίων,
Σεραπίων (> zarapiu, zerapiu), sans doute à cause d’une évolution
dialectale propre à l’Étrurie tibérine 37.
Ces principes sont toutefois, comme on peut s’y attendre, quelque
peu contrecarrés par l’évolution diachronique de la langue, qui provoque
de nombreux bouleversements phonétiques perceptibles dans les ins-
criptions. En effet, l’étrusque connaît un bouleversement majeur de son
système phonologique au milieu du ve siècle (date à laquelle ce boulever-
sement commence à être noté), appelé syncope vocalique : les voyelles
internes cessent d’être notées. Les spécialistes attribuent cette modifi-
cation à des causes suprasegmentales et à l’existence, au renforcement

35. ET Vc 7.7 (Vulci, ive s. a. C.).


36. L. Agostiniani, art. cit., p. 48-49.
37. G. van Heems, « <s>/<z> (à Volsinies) », Studi Etruschi 69 (2003), p. 195-219.
138 gilles van heems

ou à l’apparition d’un fort accent à l’initiale. Or, comme tous les mots
empruntés au grec sont soumis aux règles prosodiques de l’étrusque
(neutralisation quasi totale de l’opposition de longueur pour les voyelles
et, surtout, accentuation initiale « à l’étrusque »), ce phénomène conjoint
induit toute une série de neutralisations et d’assimilations, qui sont assez
nombreuses dans notre corpus. C’est ainsi qu’une occlusive initiale
sourde du grec peut être rendue en étrusque par l’aspirée correspondante
(φerse : Περσεύς) ou qu’apparaissent de nombreuses lénitions, spiranti-
sations et assimilations : on citera en particulier la tendance avec le temps
à traiter le gr. <‑διV‑> 38 /djV/ comme une affriquée /ts/ 39, notée <z> :
arχaza : Ἀρκαδία 40 ; à l’initiale, le groupe <διV‑> /djV/ est monoph-
tongué différemment : l’accentuation de ce nom étranger, peut-être sur
la dernière syllabe longue du mot 41, a provoqué la chute la voyelle /o/
(tinusi : Διονύσιος, tiφane : Διοφάνης).

3.2. Suffixation
L’étude de la suffixation des anthroponymes étrusques empruntés
au grec est intéressante, dans la mesure où elle démontre que les noms
propres (anthroponymes et théonymes) reçoivent un traitement différent
des appellatifs.
On repère quatre principaux suffixes primaires dans les formes que
nous avons rassemblées, et qui toutes remplacent les suffixes grecs des
noms empruntés :
a) ‑e (gén. ‑es) : il s’agit du suffixe le plus représenté, parce qu’il sert
d’équivalent à quatre suffixes grecs différents, ‑ος, ‑ης/‑ῆς, ‑εύς et
‑ᾶς (si la forme gén. tames attestée à Viterbe 42 est bien une adapta-
tion de gr. Δᾱμᾶς, ce qui n’est pas certain) ; si l’on inclut les attesta-
tions offertes par les théonymes, on constate, avec C. De Simone, que
ce suffixe correspond à 9 suffixes grecs différents 43. On notera, enfin,

38. V note ici une voyelle de timbre indifférent.


39. Ce qui n’exclut une réalisation sonore du groupe (/dz/, voire par assimilation /z/).
40. Phénomène qui n’est pas inconnu du grec : l’emprunt à pu également se faire à partir
d’une forme spirantisée en grec.
41. H. Rix, « Etruscan », dans R. D. Woodard, The Cambridge Encyclopedia of the
World’s Ancient Languages, Cambridge, 2004, § 3.4.
42. ET AT 2.32.
43. C. De Simone, op. cit., p. 140 (tableau récapitulatif).
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 139

qu’il n’intervient que dans la formation de noms propres : ainsi, le


mot grec désignant le vin, ϝοῖνος, a été emprunté sous la forme vinum,
au moyen d’un suffixe ‑um marquant le substantif comme appartenant
à la classe des inanimés (trait [- animé] ou [- humain]) 44 ; pareille-
ment, les noms de personnes en ‑o‑ empruntés aux langues sabel-
liques ou latino-falisques sont formés au moyen de ce suffixe (lat.
arc. *Numesios [réc. Numerius] > étr. *numesie, lat. Quintus > étr.
cuinte ; osq. Mamereks / lat. Mamercus > étr. mamarce / mamerce, etc.)
et les emprunts de noms étrusques en ‑e par le latin rendent ce dernier
par le suffixe ‑us (étr. avile, avle > lat. Aulus, étr. spurie > lat. Spu-
rius). Ce suffixe, qui désigne le nom comme appartenant à la caté-
gorie des animés (trait [+ animé] ou [+ humain]), intervient dans la
formation d’anthroponymes (prénoms, gentilices, cognomina), dès
les premiers documents écrits et sa productivité avec les bases ono-
mastiques indigènes (cf. avil‑e, σeθr‑e) explique qu’il ait joué un rôle
de premier plan dans l’acclimatation linguistique des emprunts. Bien
qu’il remonte à l’époque prédocumentaire, on peut estimer que ce
suffixe est de formation secondaire, élaboré au moment où l’étrusque
intègre, à l’imitation des langues indo-européennes avec lesquelles
il était en contact, la distinction du genre naturel dans les anthropo-
nymes (et quelques appellatifs), dans son système linguistique, qui
ne connaissait jusqu’alors qu’une opposition animé vs inanimé ou
humain vs non humain 45. Il n’est dès lors pas étonnant qu’il ait été
utilisé pour adapter les noms grecs terminés par des morphèmes typi-
quement masculins, tels que -ος, ‑ης ou ‑εύς.
b) ‑u (gén. ‑us) / ‑un (gén. ‑unus) : surtout employé pour rendre le gr. ‑ων
(metru : Μήτρων), le suffixe ‑u intervient aussi dans l’adaptation des
noms grecs (plus rares) en ‑ώ, ‑ωψ et ‑ωνός 46. Il s’agit là aussi d’un
morphème proprement étrusque, mais plurifonctionnel, par rapport à
‑e. Il intervient ainsi dans la formation de noms d’agents (étr. śupl‑u

44. L. Agostiniani, « Sull’origine del nome del vino in etrusco e nelle altre lingue
dell’Italia antica », dans do-ra-qe pe-re. Studi in memoria di Adriana Quattordio
Moreschini, Pise, 1998, p. 1-13.
45. L. Agostiniani, « La considerazione tipologica nello studio dell’etrusco », Incontri
linguistici 16 (1993), p. 23-44 ; L. Rigobianco, Su numerus, genus e sexus. Elementi
per una grammatica dell’etrusco, Rome, 2013, p. 91 sq.
46. C. De Simone, op. cit., p. 140 (tableau récapitulatif).
140 gilles van heems

« flûtiste » [> lat. sūbulo], ziχ‑u « écrivain, scribe » [attesté comme


cognomen et rendu en latin par la forme Scribonius], mar‑u « magis-
trat » [> lat. Maro]) ; dans la morphologie verbale, il sert, semble-
t‑il, à former des formes d’accompli (morphème de perfectum : lup‑u
« mort ») 47 ; enfin, il semble également servir à former des gentilices
(patronymiques ?) à partir de noms individuels (type cut‑u), parfois
secondairement employés comme cognomina.
Dans les formations dérivées de mots grecs, ce morphème semble
avoir un doublet en ‑un (gén. ‑unus), qui intervient en étrusque, peut-être
par imitation du grec, pour former des noms d’animés (tamun : Δάμων ;
doublet étr. ap(u)lu ~ aplun « Apollon »), même s’il remplace parfois le
suffixe ‑um (dont il procède par dissimilation ?), comme l’indiquent les
doublets vinum ~ vinun « vin », qutum ~ qutun « nom de vase », où les
formes en ‑un sont toujours minoritaires 48. La forme ‑un, que j’ai ten-
dance à considérer comme un hellénisme calqué sur gr. ‑ων, n’est autre
qu’une réactivation analogique et secondaire de la nasale, qui est bien
conservée dans les formes dérivées (platun‑alu, aplun‑ie ; en revanche le
gén. des formes en ‑u est bien ‑us et non *‑unus qui doit être tenu pour
la forme de gén. de -un : la représentation d’Ajax fils de Télamon de la
tombe François de Vulci porte la légende 49 aivas : tlamun/us « Ajax (fils)
de Télamon ») ; ‑un constitue donc un emprunt morphématique au grec
(en l’occurrence l’emprunt du suffixe nom. ‑ων, gén. ‑ωνος) et témoigne
par conséquent d’un degré majeur de bilinguisme 50. On peut imaginer
sans peine que le milieu des peintres et des coroplastes d’Étrurie, où les
Grecs étaient fort nombreux, a pu jouer un rôle moteur dans l’emprunt de
ce suffixe 51 et sa confusion partielle avec le suffixe autoctone ‑u.
47. La question de savoir s’il s’agit d’un morphème unitaire ou de deux (ou plusieurs)
morphèmes homophones se pose, mais dépasse de beaucoup les limites que nous
nous sommes fixées.
48. Sur ces doublets, voir L. Agostiniani, « Genere grammaticale, genere naturale e il
trattamento di alcuni prestiti lessicali in etrusco », dans Studi linguistici per i 50 anni
del Circolo linguistico fiorentino, Florence, 1995, p.  9-23 ; Id., « Sull’origine del
nome del vino… », art. cit.
49. ET Vc 7.20 (ive s. a. C.).
50. On sait que l’emprunt de suffixes alloglottes dans une langue donnée implique,
contrairement à l’emprunt d’éléments du lexique, un degré de contact entre les com-
munautés linguistiques et un bilinguisme majeur de la part de la population emprun-
teuse (cf. S. Thomason et T. Kaufman, Language Contact, Creolization, and Genetic
Linguistics, Berkeley, 1988).
51. Cf. infra.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 141

c) ‑a, ‑ia : ces deux suffixes sont eux aussi des morphèmes empruntés,
mais plus probablement à une langue indo-européenne d’Italie (parler
sabellique et/ou latino-falisque) qu’au grec lui-même. Le second
conjoint le morphème dérivatif indo-européen *‑yo‑ et la marque de
féminin ‑a, qui en fait le pendant du suffixe dérivatif masculin ‑ie de
l’étrusque (qui sert en particulier à former des gentilices). Il rend tout
naturellement les formes de féminin en ‑ᾱ (att. ‑η) du grec (gr. Φίλη >
étr. φila), et l’emploi de ‑ia plutôt que ‑a (gr. Ἀνδρομάχη / Ἀνδρομάχα
> étr. antrumacia) est, quoique minoritaire, bien attesté 52.
À côté de ces formes issues de l’adaptation directe de noms grecs,
on trouve des formes dérivées de formes grecques, selon des procédés
propres à l’étrusque. Cette suffixation secondaire – qui ne sert à former
que des gentilices, à l’exclusion de toute autre fonction anthropony-
mique –, prend les formes suivantes :
a) ‑na (gén. ‑nas ; fém. abs. ‑nei, gén. ‑nal) : ce suffixe est certainement
le suffixe dérivatif le plus répandu en étrusque, à tel point qu’il a
été emprunté à son tour par le latin, non seulement pour former des
anthroponymes empruntés à l’étrusque (Catilina, ‑ae, Maecenas,
‑atis), mais aussi des appellatifs empruntés (persona, ‑ae ; scaena,
‑ae) ou indigènes (catēna, ‑ae ; nās(s)iterna, ‑ae) 53. En étrusque, il
entre dans la composition de la majorité des gentilices dits patrony-
miques (arc. marc(e)‑na « litt. (fils/descendant) de Marce »), ce qui
en fait l’exact équivalent du suffixe italique (et indo-européen) *‑yo‑
(cf. lat. Marc‑ius, exact équivalent de étr. marc(e)‑na). Le fait que
des gentilices patronymiques en ‑na aient été formés à partir de noms
individuels empruntés au grec (type creic‑na ou pule‑na) indique
que ces formes étaient parfaitement intégrées morphologiquement et
institutionnellement.
b) ‑ie (gén. ‑ies ; fém. abs. ‑ia, gén. ‑ial) : ce suffixe patronyme résulte
de l’emprunt du suffixe de dérivation italique *‑yo‑ (on y retrouve la
marque ‑e désignant les personnes de sexe masculin). Tout comme
‑na, il sert à former des gentilices patronymiques (aussi bien à partir
de bases empruntées que proprement étrusques).

52. C. De Simone, op. cit., p. 115-116.


53. G. van Heems, « Vers une koinè italienne ?… », art. cit.
142 gilles van heems

c) ‑nie (gén. ‑nies) / ‑ni (gén. ‑nis) : le suffixe ‑nie est issu de la coales-
cence des deux précédents suffixes (‑na+‑ie > ‑naie / ‑nie) et inter-
vient à son tour dans la formation de gentilices patronymiques. ‑ni est
une forme apocopée typique des dialectes septentrionaux (zones de
Pérouse et Chiusi).
d) ‑ra (gén. ‑ras) : ce suffixe dérivatif bien connu semble être, morpho-
logiquement et sémantiquement, totalement comparable à ‑na. Il n’est
néanmoins pas sûr qu’il intervienne dans la formation de gentilices
dérivés de noms empruntés au grec, puisque l’étymologie grecque de
carucra est plus que suspecte 54.
e) ‑alu (gén. ‑alus) : ce morphème dérivatif, qui sert également à créer
des gentilices à partir de prénoms (ou noms individuels), est attesté
par deux fois dans notre répertoire, gén. kraikaluś (Bologne, ve s.) et
gén. platunaluś, formés respectivement sur la base kraike (ou kraiku,
qui semble être une variante attestée précisément dans la région 55)
et *platu ou *platun, évidente adaptation de gr. Πλάτων. Ce suffixe
‑alu est un suffixe typique et quasi-exclusif 56 de la région padane
(Adria, Spina et Bologne) et s’ajoute à sa base à la place de la voyelle
finale : prén. gén. titl‑eś (Bologne 57) > gent. gén. titlaluś (Bologne 58) ;
prén. gén. rac‑us (Capoue, Caeré 59) > gent. gén. rak‑aluś (Marza-
botto, vie  s. 60) ; pour les noms-bases à finale consonantique, le seul
cas attesté semble indiquer que le suffixe ‑alu ne s’adjoint pas directe-
ment à la base (laθ‑i‑aluś à Monterenzio 61, et non *laθ‑aluś). Le statut
de cette voyelle, néanmoins, n’est pas clair : s’agit-il d’une voyelle

54. Voir supra, p. 131.


55. La forme est attestée à Adria au iie s. a. C. (E. Mangani, « Adria », Notizie degli scavi
di Antichità 36 (1982), tombe 43, no 20, p. 82).
56. Cf. en dernier lieu, A. Maggiani, « L’alfabeto etrusco nel Veneto », dans A. Marinetti
(éd.), Akeo. I tempi della scrittura. Veneti antichi. Alfabeti e documenti, Cornuda,
2002, p. 59-61. Un gentilice en ‑alu (velcialu, fém. velcialui) est néanmoins attesté
à Chiusi (ET Cl 1.1184, 1.1599, 1.1600). Ce nom est certainement parvenu dans la
région par migration personnelle d’un individu venu d’Étrurie padane.
57. ET Fe 2.18.
58. ET Fe 1.3.
59. ET Cm 2.67, Cr 2.140.
60. G. Sassatelli, dans REE 58 (1992), no 8, p. 284-286.
61. D. Vitali, « Monte Bibele tra Etruschi e Celti : dati archeologici e interpretazione
storica », dans D. Vitali (éd.), Celti ed Etruschi nell’Italia centro-settentrionale dal
V secolo a. C. alla romanizzazione, Bologne, 1987, p. 370-371 et fig. 43, 5.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 143

d’épenthèse ? D’une voyelle thématique « préhistorique » restaurée


par la composition ? La première hypothèse se heurte à l’isolement de
cette forme ; la seconde, qui fait référence à une hypothèse formulée
par H. Rix 62 et confirmée depuis, se fonde sur le fait que le gén. arc.
du prénom la(r)θ est la(r)θ‑ia, et permet de reconstruire une forma-
tion *la(r)θi(a)-alu > *la(r)θialu. En tout état de cause, il faut exclure
l’hypothèse que laθialuś soit le gentilice dérivé du fém. laθi : les gen-
tilices ne sont jamais formés à partir de prénoms/noms individuels
féminins, puisque les gentes ont pour fondateurs des hommes.
Enfin, à côté de ces cas majoritaires, on trouve une poignée de noms
qui ne se conforment pas à l’usage. Il s’agit des formes :
a) eris, turis, φilutis, qui sont, comme la forme tlamun déjà citée, des
transcriptions exactes des noms grecs correspondants ; même si cer-
taines de ces formes sont incertaines (en particulier turis, qui apparaît
dans un contexte très obscur et pour laquelle l’interprétation anthro-
ponymique est loin d’être sûre 63), il est hors de doute que le suffixe gr.
‑ις a été tel quel retranscrit 64 ; malheureusement ces formes sont des
hapax et ne sont attestées qu’au nominatif : il nous est donc impos-
sible de savoir comment elles ont été intégrées à la morphologie de
l’étrusque ; néanmoins, comme l’étrusque a une classe de prénoms en
‑is (type laris, gén. laris‑al), il est possible que ces formes aient été
calquées sur ce modèle (abs. ‑is, gén. ‑isal).
62. H. Rix, « La scrittura e la lingua », dans M. Cristofani (éd.), Gli Etruschi : una
nuova immagine, Milan, 1984, p. 216 ; Id., « Etruscan », art. cit., § 3.5.2.1.
63. Cette forme, qui apparaît dans une inscription peinte sur un petit askos d’argile de la
région de Volsinies (ET Vs 2.40 : turis : mi : une : ame), est interprétée par H. Rix
comme un nom féminin à l’absolutif (marquant ici l’apostrophe et étant fonction-
nellement équivalent au vocatif des langues indo-européennes ; cf. H. Rix, « Etrusco
un, une, unu, “te, tibi, vos” e le preghiere dei rituali paralleli nel liber linteus », dans
Miscellanea etrusca e italica in onore di M. Pallottino (= Archeologia classica 43
[1991]), Rome, 1991, p. 684-685, et, en dernier lieu, Id., « Etruscan », art. cit., § 4.4,
exemple (9), où il traduit à nouveau l’inscription ainsi « Turis (= Doris), je t’appar-
tiens »). Malheureusement l’interprétation de une comme forme de pronom de la
seconde personne et, partant, l’interprétation de l’ensemble de l’inscription sont très
problématiques, ce qui doit conduire à traiter la forme turis avec une extrême pru-
dence. Pour une interprétation alternative, voir G. Colonna, « Un’iscrizione da Tala-
mone e l’opposizione presente/passato nel verbo etrusco », PP 37 (1982), p. 10 (NP
turi) ; A. Morandi, Ascendenza indoeuropee nella lingua etrusca II, Rome, 1985,
p. 10.
64. Voir, immédiatement infra, nos considérations à propos de la forme atunis.
144 gilles van heems

b) atunes : il s’agit là aussi de la transcription pure de la forme grecque


(Ἄδωνις), avec ouverture de /i/ à /e/, bien attestée non seulement dans
les emprunts (cf. gr. Κίρκα > étr. cerca ; lat. Minerua > gr. menerva,
menrva), mais aussi dans le lexique « national » (arc. pisna ~ réc.
pesna) 65. Mais comme le passage /i/ > /e/ a plutôt lieu dans les syl-
labes initiales ou internes, que la forme atunis est par ailleurs bien
attestée par l’épigraphie et qu’atunes désigne dans sa seule occur-
rence 66 un lautni, il est probable que nous ayons affaire à une erreur
du scribe ou à un vulgarisme.
c) tama (< gr. Δαμᾶς) : C. De Simone traite les rares formes en ‑a attes-
tées pour rendre des noms grecs masculins en ‑ᾱς comme des dou-
blons de formes en ‑as, bien mieux documentées (type gr. Αἴϝᾱς > étr.
aivas (var. evas, eivas), aiva). Il est possible, comme il le propose,
que l’existence d’un suffixe indigène ‑a pour marquer des appellatifs
et des noms propres masculins (papa « grand-père », velχa « Velcha
(prénom masculin) ») ait influencé ces rares emprunts au grec. On
signalera d’ailleurs que ce suffixe ‑a a été employé pour adapter le gr.
βάκχος « le bacchant » en étrusque (> *paχa‑).

3.3. Création lexicale


Les phénomènes de calque pour les anthroponymes empruntés au
grec ne sont pas attestés en étrusque : le seul cas éventuel concerne un
quasi-théonyme, avec le très ancien calque étrusque tinas cliniiaras (Tar-
quinia, vie s. a. C. 67), litt. « aux fils de Tinia », du gr. Διὸς κοῦροι ; la
forme empruntée, attestée en latin archaïque à la même époque sous la
forme qurois dans la fameuse dédicace sur lamelle de bronze de Lavi-
nium 68, n’est pas documentée en étrusque. Mais il ne s’agit que secon-
dairement d’un théonyme, puisqu’il dérive d’une périphrase, ce qui
justement explique le recours à un calque. Pour les anthroponymes com-
posés et « parlants » (type Ἱππο‑κράτης), l’étrusque ne connaît que la
transcription.

65. H. Rix, « Etruscan », art. cit., § 3.5.2.2.


66. ET Pe 1.979.
67. ET Ta 3.2.
68. ILLRP 1271a.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 145

3.4. Particularismes diatopiques et diachroniques


L’examen de ce corpus anthroponymique doit en outre conduire à
formuler quelques remarques à propos de particularismes diatopiques et
diachroniques.
On signalera ainsi le groupe de formes en ‑alu attestées en Étrurie
padane : le nombre relativement important d’anthroponymes empruntés
au grec dans ces cités doit appeler un commentaire, puisque, de toute évi-
dence, des Grecs y ont, peut-être plus qu’ailleurs, fondé des gentes – ce
qui ne doit pas étonner dans un territoire qui a très tôt suscité la convoi-
tise des marchands grecs (ports d’Adria et Spina) et dans une cité qui
peut à bon droit être considérée comme une société pluriethnique 69.
Une série de noms mérite également un commentaire : antipater
(< gr. Ἀντίπατρος) et nicipur  (< gr. Νικηφόρος), qui constituent des
formes anomales du point de vue de leur formation, puisque l’on atten-
drait respectivement *antipatre (comp. étr. licantre : gr. Λύκανδρος) et
*niceφure / *niceφre. Elles ne peuvent se comprendre que par un inter-
médiaire latin, en l’occurrence Antipater et Nicepor (qui sont les formes
attendues en latin et qui sont attestées comme noms d’esclaves 70), qui
sont donc l’étymon direct des formes étrusques. On notera en outre que
le nom Nicepor entre dans une classe de noms individuels d’esclaves
bien établie dans le latin républicain, Nae‑por, Oli‑por, Marci‑por,
Quinti-por etc., qui ont été traditionnellement analysés et compris, à la
suite des grammairiens latins, comme des noms parlants *Gnaeui‑puer,
*Auli-puer, *Marci‑puer, *Quinti-puer « esclave de Gnaeus  / Aulus  /
Marcus  /  Quintus » 71, même si certains éléments formels restent dif-

69. Cf. G. Colonna, « La società spinetica e gli altri ethne », dans Spina. Storia di una
città tra Greci ed Etruschi, Ferrare, 1993, p.  131-143. Sur la « grécité » de ces
cités, il existe une bibliographie imposante, qui s’est largement accrue ces dernières
années : je me bornerai à renvoyer à quelques récentes études, telles que S. Bourdin,
art. cit., en part. §  27-36, et M.-L. Haack, « Grécité réelle et grécité fantasmée à
Spina et Adria », dans M.-L. Haack (éd.), Écritures, cultures, sociétés dans les
nécropoles d’Italie ancienne, Bordeaux, 2009, p. 45-62.
70. Cf. C. De Simone, op. cit., II, p. 95 et 98-99 ; les attestations remontent au ier s. a. C.
et au début de l’époque impériale.
71. Cf. Quint. I, 4, 26 ; Festus 306L ; Plin., HN, XXXIII, 26 ; Probus, GL IV, 16 ; Pris-
cien, GL III, 26 ; cf., entre autres, A. Ernout - A. Meillet, s.v. puer ; F. Bader, La for-
mation des composés nominaux du latin, Paris, 1962, p. 316, ou M. Leumann, Latei-
nische Laut‑ und Formenlehre, Munich, 1977, p. 134.
146 gilles van heems

ficiles à justifier 72 ; de ces noms, l’élément ‑por s’est grammaticalisé


(comme semble le montrer son évolution phonétique par rapport à puer)
et étendu à des formations analogiques (expliquant étr. nicipur / Nicepor,
pour lequel il est tentant de poser un antécédent lat. Nicepor 73) typiques
de l’onomastique servile.
Ces deux formes étrusques doivent attirer l’attention sur un phéno-
mène fondamental, celui de l’influence grandissante du latin sur l’étrusque
à partir de la conquête romaine de l’Étrurie (achevée au iiie siècle) et
de la progressive romanisation et latinisation des cités étrusques. Il faut
ainsi faire le compte avec ce phénomène qui doit toucher la plupart des
noms d’esclaves d’origine grecque attestés entre le iiie et le ier s. a. C. –
et qui constituent, comme on l’a vu, la majeure part de nos attestations.
Ainsi, ces noms ou tout au moins certains d’entre eux (comme antipater,
nicipur, mais aussi arista, eupuria, φila, bien attestés dans l’onomastique
servile de langue latine) doivent être considérés comme des formes arri-
vées en étrusque par l’intermédiaire du latin : un contingent important
de noms étrusques d’origine grecque sont donc des emprunts directs au
latin et des emprunts indirects au grec, offrant ainsi une sorte de « pen-
dant » au contingent significatif d’emprunts secondaires au grec du latin,
qui ont eu pour intermédiaire en réalité des mots étrusques (comme les
célèbres triumphus ou scaena) 74. Cette approche diachronique du corpus
est donc essentielle pour reconstituer l’histoire de l’influence de l’ono-
mastique grecque sur l’onomastique étrusque – histoire qu’il convient de
replacer dans le cadre plus vaste de l’Italie centrale du Ier mill. a. C. Car
les « Grecs » qui se trouvent derrière ces noms ne sont pas du tout les
mêmes entre l’époque archaïque et l’époque romaine. Aussi faut-il dou-
bler cet examen linguistique d’une étude prosopographique des porteurs
de noms étrusques d’origine grecque, pour comprendre la genèse et l’his-
toire de ce phénomène onomastique et interlinguistique.

72. En particulier le fait que le ‑i‑, qui devrait être la désinence de génitif, est bref et
non long, comme attendu. Sur l’ensemble des problèmes posés par l’analyse de ces
formes, cf. C. Cheesman, « Names in ‑por and slave naming in Republican Rome »,
CQ 59-2 (2009), p. 511-531.
73. Car il est peu probable, vu l’isolement de ces formes, que l’élément ‑por ait été
emprunté comme suffixe en étrusque et étendu à une base empruntée au grec.
74. G. Breyer, Etruskisches Sprachgut im Lateinischen unter Ausschluß des spezifisch
onomastischen Bereiches, Louvain, 1993, à ces entrées.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 147

4. Étude socio-historique

La dimension chronologique étant essentielle, il est important de


traiter de manière très différente les attestations archaïques des attes-
tations de l’époque récente, qui concernent essentiellement (mais pas
exclusivement) des lautni (esclaves et affranchis). Nous terminerons
donc cette étude par un examen de quelques-uns de ces Grecs d’Étrurie
que nous donne à connaître l’épigraphie.

4.1. Les Grecs et la société étrusque


Les témoignages de l’époque archaïque nous informent sur une poi-
gnée d’individus portant des noms grecs et, par conséquent, appartenant
sans doute à ce peuple. Parmi ces témoignages, trois attirent tout particu-
lièrement l’attention, l’hipucrate qui a vécu à Tarquinia dans la seconde
moitié du viie siècle, le telicle (même époque, de Caeré ?), et le pere-
cele qui a vécu à Volsinies au vie siècle. Si le premier nom a immédiate-
ment été perçu comme un emprunt de gr. Ἱπποκράτης, les autres ne l’ont
été qu’assez tardivement : G. Colonna a rapproché le gén. telicles de gr.
Τηλεκλῆς/Τήλεκλος 75, et on doit à M. Cristofani 76 d’avoir proposé pour
pereceles une origine grecque convaincante (Περικλῆς), même si elle ne
s’impose pas nécessairement 77. Ces inscriptions méritent commentaire.
La première est une inscription peinte au minium sur le fond d’une œno-
choé de la seconde moitié du viie s. a. C. retrouvée en contexte funéraire
(tumulus du Roi, Doganaccia). Le texte 78, quoique rédigé en scriptio
continua, ne pose ni problème de lecture ni problème de division :
aχapri rutile hipucrates

75. G. Colonna, « Una nuova iscrizione etrusca del VII secolo e appunti sull’epigrafia
ceretana dell’epoca », Mélanges de l’École française de Rome – Antiquité 82, 1970,
p. 649, no 4 ; Cf. C. De Simone, « Per la storia degli imprestiti greci in etrusco »,
ANRW, I, 2, Berlin - New York, 1972, p. 508-509.
76. M. Cristofani, « Diffusione dell’alfabeto e onomastica arcaica nell’Etruria interna
settentrionale », dans Aspetti e problemi dell’Etruria interna, Florence, 1974, p. 315.
77. Pour l’interprétation traditionnelle, cf. M. Morandi Tarabella, Prosopographia
Etrusca, I, 1. Etruria meridionale, Rome, 2004, p. 368.
78. ET Ta 6.1.
148 gilles van heems

et l’on y reconnaît deux éléments onomastiques, rutile, une forme pro-


bable de prénom ou de nom individuel masculin (suff. ‑e) construite sur
une base italique empruntée (comp. lat. Rutilus, Rutulus, qui sont à l’ori-
gine des adjectifs désignant la rougeur ; on a donc affaire à une désigna-
tion onomastique de type « le Rouge », selon un schème bien établi en
Italie centrale), et la forme hipucrates ; quant à aχapri, il s’agit très cer-
tainement d’un appellatif, dont le sens peut être conjecturé sans certi-
tude à partir du contexte (nom de l’objet-support ? « don » ?). Toute la
question est de savoir si la forme hipucrates est sur le même plan que
rutile, et doit être considéré comme le gentilice de ce personnage, ou
si hipucrates conserve bel et bien son autonomie syntaxique et déter-
mine rutile 79 ; C. De Simone a ainsi proposé de voir dans cet hipucrate
le patron de rutile (« Rutile (esclave ?) d’Hipucrate ») 80 ; S. Marchesini
émet l’hypothèse plus convaincante qu’il s’agit du patronyme de rutile
(« Rutile (fils) d’Hipucrate) 81. Mais, malheureusement, tant que la fonc-
tion d’aχapri ne sera pas assurée, nous ne pourrons comprendre exacte-
ment la syntaxe de cet énoncé et donc l’articulation entre les deux formes
onomastiques. Or l’enjeu est de taille, car seule une claire compréhen-
sion de sa formule onomastique pourrait nous permettre de savoir si ce
personnage nommé Rutile (et donc partiellement d’origine italique ?)
était intégré dans la communauté civique (comme pourrait le prouver le
port d’un gentilice, s’il était avéré) ou si sa désignation « à la grecque »,
si hipucrates est son patronyme, l’exclut de facto de la communauté en
en faisant une sorte de métèque.
La question est la même pour le personnage mentionné sur l’aryballe
globulaire de bucchero du milieu du viie s. a. C., peut-être de provenance
cérétaine 82,
mi larθaia telicles leχtumuza,
signifiant « je suis la (belle) petite lécythe de L. T. ». Les incertitudes sont
nombreuses, tant concernant son sexe, puisqu’on ne peut dire si larθaia
est le génitif (archaïque) du prénom masc. larθ ou celui du prénom

79. Ainsi que le propose M. Morandi Tarabella, op. cit., p. 239.


80. C. De Simone, op. cit., II, p. 228.
81. S. Marchesini, op. cit., p. 164.
82. G. Colonna, « Una nuova iscrizione… », art. cit.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 149

féminin larθai 83, qu’à propos de la nature du second élément onomas-


tique, telicles. Là encore deux interprétations inconciliables sont pos-
sibles : telicles peut être le patronyme de cette personne (« …lécythe de
Larθ[ai] [fils / fille] de Telicle »), qui n’est alors pas intégrée à la commu-
nauté civique, ou son gentilice (« …lécythe de Larθ[ai] Telicle[i] » 84).
Le dernier texte, plus récent, puisqu’il date de la fin vie s., ne pose en
revanche aucune difficulté de compréhension : il s’agit d’une inscription
de propriété gravée sur l’architrave d’une des tombes en dé de la nécro-
pole tardo-archaïque de Crocifisso del Tufo à Orvieto, ayant pour fonc-
tion de désigner le propriétaire du tombeau :
mi velθurus pereceles
à savoir « j’appartiens à Velθur Perecele ». Le parallélisme avec les
autres inscriptions de la nécropole, qui suivent dans leur quasi-totalité un
canon formulaire fixe ‘mi + prénom + gentilice’ 85 laisse peu de doutes
quant à la fonction du nom perecele : il s’agit indubitablement d’un gen-
tilice. S’il s’agit bien d’un nom d’origine grecque, on doit conclure soit
que ce Περικλῆς s’est installé à Volsinies où il a obtenu la citoyenneté
(il a utilisé alors son nom individuel non dérivé comme gentilice, et s’est
choisi un prénom étrusque), soit que ce Velθur Perecele est un descen-
dant d’un Grec venu à Volsinies. Dans tous les cas, il importe de noter
que le nom individuel de cet étranger a été réutilisé directement comme
gentilice, à la manière des Vornamen‑ ou Individualnamengentilicia fort
répandus dans le monde étrusque, dès l’époque archaïque.
On le voit, derrière ces problèmes de nomenclature est tapi l’impor-
tant débat sur la mobilité sociale à l’époque archaïque, qui a tant animé
la recherche au cours des dernières décennies du xxe siècle 86 : les aris-

83. L’hypothèse « féminine » a été proposée par S. Marchesini (op. cit., p. 130) ; pour
l’hypothèse « masculine », v. G. Colonna, art. cit.
84. Les formules onomastiques juxtaposant un prénom féminin et un génitif masculin au
gén. ne sont pas rares dans l’épigraphie étrusque.
85. G. van Heems, « La naissance des traditions épigraphiques funéraires dans l’Étrurie
archaïque : le cas de Crocifisso del Tufo », dans M.-L. Haack (éd.), Écritures,
cultures, sociétés dans les nécropoles d’Italie ancienne, Bordeaux, 2009, p. 15-44.
86. Les travaux fondateurs sur ce thème restent C. Ampolo, « Demarato. Osservazioni
sulla mobilità sociale arcaica », Dialoghi di Archeologia 9-10 (1976-1977), p. 333-
345 ; D. Musti, « Etruria e Lazio arcaico nella tradizione (Demarato, Tarquinio,
Mezenzio) », dans Etruria e Lazio arcaico, Rome, 1987, p.  139-153 ; F. Zevi,
150 gilles van heems

tocrates grecs venus au viie s. a. C. en Étrurie obtenaient-ils, comme


Démarate, si l’on en croit nos sources, un statut civique ambigu, à la fois
prestigieux (les personnages de nos inscriptions accèdent à la dignité
épigraphique et possèdent des tombeaux et des objets extrêmement pré-
cieux ; d’après les sources littéraires, Démarate conserve ses richesses
et côtoie l’aristocratie tarquinienne, dont il épouse une représentante,
Tanaquil) et en marge de la citoyenneté étrusque (marquée dans nos ins-
criptions par l’absence de gentilice et par le maintien d’un système de
désignation patronymique, si cette interprétation est juste) ? Si l’on en
croit les sources littéraires, Démarate est exclu des charges publiques ; ses
fils Arruns et Lucumon, pourtant fils d’une Tarquinienne de haut rang, ne
peuvent pas davantage accéder aux responsabilités publiques dans leur
cité natale. Il est partant fort possible que Hipucrate et Telicle aient été
des sortes de riches métèques ou pérégrins, partiellement exclus (mais
peut-être par leur propre volonté 87) de la cité dans laquelle ils avaient
décidé d’habiter. Mais, inversement, le Velθur Perecele d’Orvieto montre
qu’en un peu moins d’un siècle les choses ont changé, soit par l’intégra-
tion progressive des descendants de ces métèques, soit parce qu’à cette
époque, la cité d’Orvieto intégrait directement un étranger d’un statut
social médio-supérieur.

4.2. Démarate et ses artisans


La documentation épigraphique semble donner du crédit au filon
de la tradition transmis par Pline, selon lequel Démarate n’aurait pas
émigré seul à Tarquinia, mais serait venu accompagné d’artistes et d’arti-
sans 88. Car à côté des hipucrate et des perecele, qui semblent malgré tout
plutôt bien intégrés dans la société aristocratique, on trouve, à l’époque
archaïque et tardo-archaïque, des artisans porteurs de noms grecs : on

« Demarato e i re “corinzi” di Roma », dans A. Storchi Marino (éd.), L’incidenza


dell’antico. Studi in memoria di Ettore Lepore, I, Naples, 1995, p. 291-314.
87. Il ne faut en effet pas plaquer sur ces réalités archaïques des lectures par trop ana-
chroniques – et rien n’indique que les aristocrates grecs débarqués en Étrurie aient
nécessairement recherché leur intégration politique (il n’en va pas de même pour
leur intégration économique et sociale).
88. Il s’agit du potier Ecphantus (Nep., apud Plin., XXXV, 16), et des coroplastes (fic-
tores) Eucheir, Diopus et Eugrammus (Plin., XXXV, 151) aux noms trop « parlants »
pour être authentiques, mais significatifs de la nature de ces transferts de population.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 151

citera en particulier metru, ce potier actif probablement à Vulci, ou tout


au moins en Étrurie méridionale, au milieu du ve siècle, qui signe orgueil-
leusement son œuvre, une kylix de style attique (ca 450-440 a. C.), à la
peinture blanche et en parfait étrusque 89 :
metru. menece
Ce metru a été tantôt considéré comme un Grec arrivé en Étrurie de
fraîche date et travaillant, comme sans doute les artisans du cercle de
Démarate, pour des commanditaires étrusques, soit comme un artiste du
Céramique, grec ou étrusque, capable d’écrire dans cette langue 90. En
tout état de cause, il a appris à parler et à écrire l’étrusque en Étrurie méri-
dionale (il se conforme aux règles orthographiques en vigueur dans cette
partie du monde étrusque), mais exporte ses biens dans toute l’Étrurie,
puisque le vase a été découvert dans une tombe de Populonia.
On mentionnera également un de ses possibles contemporains et peut-
être « voisins », actif à Vulci à la même période (ca 480-460 a. C.), qui
signe également une amphore à figure rouge qu’il a peinte ; l’originalité
de ce texte est qu’il se trouve peint sur deux parties opposées, mais com-
plémentaires du vase, et qu’il comporte deux formes onomastiques rédi-
gées en alphabet grec 91 :
αρνθε / πραξιας
Mais l’interprétation de ce texte, qui a suscité plus d’une interroga-
tion et tentative d’explication, est extrêmement complexe : la première
question est de savoir, si ces deux noms, nettement séparés dans l’es-
pace épigraphique, sont distincts ou forment un ensemble unitaire – en
d’autres termes si l’on a affaire à deux personnages (et dans ce cas quel
est le rapport syntaxique qui unit ces deux noms ?) ou si le syntagme
αρνθε πραξιας ne désigne qu’un seul individu ; la seconde est de savoir
89. ET Po 6.1.
90. G. Colonna, « Firme arcaiche di artefici nell’Italia centrale », MDAI(R) 82 (1975),
p. 190-191, F. Gaultier, « Le ceramiche dipinte di età arcaica », dans M. Torelli, Gli
Etruschi, Milan, 2000, p. 421‑437 ; M. Harari, « Le ceramiche dipinte di età classica
ed ellenistica », ibid., p. 439-453. On notera la récente hypothèse, formulée par V.
Belfiore et L. Medori, « Potters’ signatures: the artistic phenomenon between ins-
criptions and artifacts », dans K. Lomas et J. Wilkins (éd.), Etruscan Literacy in its
Social Context, à paraître, qui proposent de faire de metru non pas un artisan, mais
un aristocrate grec qui a donné le vase.
91. F. Gaultier, loc. cit.
152 gilles van heems

dans quelle langue est rédigé le texte : l’alphabet et le ductus sont indé-
niablement grecs – même si l’alphabet employé ne renvoie pas à celui
d’une même cité, mais semble au contraire composite 92 –, tout comme
l’est le second nom, πραξιας (= Πραξίας) ; mais le premier est indubita-
blement étrusque : arnθ est l’un des prénoms les plus répandus dans cette
langue. Dans ces conditions, les interprétations donnés à ce texte sont,
en substance, deux : pour beaucoup, à la suite de G. Colonna 93, qui rap-
proche cette formule de celles d’autres « Étrusco-Grecs » tels que Rutile
Hipucrates, où sont juxtaposés un nom italico-étrusque et un nom grec,
αρνθε πραξιας est un seul personnage, un peintre grec ou fils d’immigré
grec, qui aurait acquis la citoyenneté étrusque (prouvée par la formule à
deux éléments qu’il porte). Inversement, pour d’autres 94, αρνθε désigne
un personnage étrusque (avec un ‑e de « cas oblique » [!]), peut-être le
commanditaire du vase ou son destinataire, tandis que πραξιας, au nomi-
natif, désigne l’artisan qui l’a créé 95. Linguistiquement parlant, αρνθε
me semble être – de manière incontestable – la transcription grecque
du prénom étrusque arnθ, cette langue n’admettant pas d’occlusive en
finale absolue (a fortiori dans un groupe consonnantique /rnth/) : le ‑ε
final d’αρνθε n’est donc qu’une voyelle d’appui (et aucunement une
marque de flexion). Reste πραξιας : de deux choses, l’une : soit il s’agit
d’un nom désignant un deuxième personnage et il faudrait alors consi-
dérer que le vase a été signé par deux artistes, un Étrusque nommé Arnθ,
un Grec nommé Πραξίας. Ces artistes auraient ainsi collaboré dans le
même atelier : mais cet atelier se trouvait-il en Grèce, puisque le vase est
rédigé au moyen de l’alphabet grec, ou en Étrurie ? Soit on a affaire à un
seul personnage nommé Arnθ Praxias (dont les deux parties du nom ont
été volontairement séparées sur le champ épigraphique), et on devrait

92. Sur les problèmes posés par l’alphabet de l’inscription, v. G. Colonna, art. cit., p. 190-
191 ; R. Wachter, Non-Attic Greek Vase Inscriptions, Oxford, 2001, p.  194-196 ;
M. Scarrone, « Arnthe, le peintre de Praxias. Une hypothèse », dans L. Ambrosini et
V. Jolivet (éd.), Les potiers d’Étrurie et leur monde : contacts, échanges, transferts,
Paris, 2014, p. 299-309, en part. p. 301-302.
93. G. Colonna, art. cit.
94. C. De Simone, op. cit., p. 242-243 ; R. Wachter, op. cit.
95. Sur le vif débat interprétatif qu’ont suscité ce vase et son inscription, v. encore
l’utile synthèse de M. Scarrone, « Arnthe, le peintre de Praxias… », art. cit., dont
les conclusions (les noms αρνθε πραξιας renvoient à deux personnages différents, un
potier et son commanditaire) ne sont toutefois pas pleinement convaincantes.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 153

alors penser à un Grec juxtaposant son nom grec et son nom d’emprunt
étrusque ou un Grec devenu citoyen étrusque et arborant ainsi comme
gentilice son idionyme de naissance ? Malgré les questionnements qu’il
soulève et auxquels pour le moment on ne peut donner de réponse satis-
faisante, ce texte nous donne une belle idée de ce que pouvait être le
bilinguisme étrusco-grec à la fin de l’époque archaïque.

4.3. Les Grecs « anonymes »


La série de formes tirées de gr. Γραικός mérite pour finir commen-
taire : d’abord parce qu’il s’agit de la base onomastique empruntée de
loin la plus productive en étrusque, tant en nombre de noms 96, qu’en
nombre d’attestations ; ensuite, parce que c’est la base qui a servi à dési-
gner l’ensemble de l’ethnos grec auprès des peuples de l’Italie centrale
(cf. lat. Graecus, Graius).
Ces formes, dérivés d’un mot grec arrivé très anciennement en
Italie 97, sont donc à l’origine des adjectifs ethniques ou des formes déri-
vées d’adjectifs ethniques, utilisés comme nom individuel ou gentilice
pour désigner des personnes considérées (à tort ou à raison, au sens
propre ou au sens figuré, peu importe) comme grecques. creice a d’ail-
leurs un emploi assuré comme adjectif ethnique, dans le fameux elogium
de Laris Pulena 98, un texte qui doit nous intéresser à plus d’un égard.
Cette inscription funéraire gravée sur un beau sarcophage de pierre de
Tarquinia du iie s. a. C., débute, comme il est de règle, par la nomencla-
ture du défunt ; mais là où la plupart des scribes se limitent aux noms des
ascendants directs du défunt, l’auteur de cet elogium remonte sur quatre
générations. La raison en est, comme l’a bien démontré J. Heurgon, que
l’auteur veut remonter jusqu’au nom du fondateur de la gens de Laris
Pulena :
L(a)ris. Pulenas. (…) prums. pules. larisal. creices
Son ancêtre, Laris Pule, est qualifié d’un troisième élément, creices
(gén.), qui, plutôt qu’un cognomen, doit être un adjectif ethnique dési-
gnant ce personnage comme de nationalité grecque : « Laris Pulena (…)

96. D. Briquel, « “Monsieur le Grec” en Étrurie », Ktèma 27 (2002), p. 265-270.


97. J. Bérard, « Le nom des Grecs en latin », REA 54 (1952), p. 5-12.
98. ET Ta 1.17.
154 gilles van heems

arrière-petit-fils de Laris Pule le Grec ». J. Heurgon 99 a montré que le


gentilice de ce personnage n’était autre que l’idionyme que devait porter
ce Grec avant son intégration dans la cité de Tarquinia, à savoir un
Πόλλης ou Πῶλος, sans doute célèbre, en Grèce comme en Italie, pour
ses compétences en matière divinatoire. Venu à Tarquinia pour y exercer
sa profession de devin ou en apprendre davantage sur l’Etrusca disci-
plina, cet homme devenu Laris Pule, fut à l’origine d’une gens, dont un
membre éminent se vante, au iie s. a. C., d’avoir composé un livre d’ha-
ruspicine 100. Ces Pulena constituent les rares Grecs d’Étrurie de l’époque
récente à pouvoir se vanter de leurs origines ethniques – les autres, que
ce soient des Creice ou, pis encore, des affranchis nés dans le monde
oriental, jouissaient plutôt d’une réputation moins favorable 101.

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158 gilles van heems

Annexes
(viennent, après les variantes, la ou les fonctions)

1. amφiare : Ἀμφιάραος (-εως)


7 ex. (Populonia, Chiusi ; attestation la plus ancienne : ve s.) 102.
Variantes : amφare, anφare, gentilice ou nom individuel ?
2. antipater : Ἀντίπατρος
1 ex. (Chiusi ; iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
3. antrumacia : Ἀνδρομάχη (-α)
1 ex. (Chiusi ; iiie-ier s.), gentilice.
4. apluni : Ἀπολλώνιος
9 ex. (Bolsena, Chiusi, Pérouse ; iiie-ier s.).
Variantes : aplunia (fém.), aplu (abr. ?), gentilice ; nom individuel d’esclave.
5. arista : Ἀρίστη
1 attestation (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
6. arχaza : Ἀρκαδία
1 ex. (Pérouse, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
7. asklaie : Ἀσκλαῖος ?
1 ex. (Capoue, ve s.), gentilice.
8. atale : Ἄτταλος
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), individuel d’esclave.
9. antuce : Ἀντίοχος
2 ex. (Chiusi, Aléria ; attestation la plus ancienne : iiie s.).
Variante : atiuce, nom individuel d’esclave.
10. atunes : Ἄδωνις
1 attestation (Pérouse, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
11. aχle, aχilena : Ἀχιλλεύς
*aχle : 1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
*aχilena : 1 ex. (Volsinies, vie s.), gentilice.
12. carpe, carpunie, carpnate : Κάρπος
carpe : 1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
*carpunie : 1 ex. (Campanie, ve s.), gentilice.
carpnate : 5 ex. (Volsinies, Chiusi ; époque récente).
Variantes : carpnati, carpnti (fém.), gentilice.

102. Dans ce répertoire, les dates s’entendent av. J.-C.


l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 159

13. carucra : Κᾶρυξ/κᾶρυξ ?


1 ex. (Pyrgi, ve s.), gentilice.
14. certu : Κέρδων
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
15. clauce : Γλαῦκος
9 ex. (Sienne, Chiusi, Arezzo ; épq. récente), cognomen.
16. clepatra : Κλεοπάτρα
1 ex. (+ 2 attestations en latin ; Chiusi, iiie -ier s.), nom individuel d’esclave.
17. craica, craicie, craci, cracina, kraiku, kraikalu, creice, creicna : Γραικός
craica : 1 ex. (Vulci, ve s.), gentilice.
craiciie : 1 ex. (Suessula [?], fin vie-déb. ve s.), gentilice.
craci : 4 ex. (Tarquinia, Norchia, Chiusi ; époque récente).
Variante : cracia, gentilice.
cracina : 4 ex. (Volterra, Pérouse ; iiie-ier s.).
Variante : cracnei (fém.), gentilice.
*kraiku : 1 ex. (Adria, ve-iiie s. ?), gentilice ? Adjectif ethnique ?
*kraikalu : 1 ex. (Bologne, ve s.), gentilice.
creice : 25 ex. (Caeré, Tarquinia, Vulci, Chiusi, Pérouse ; épq. récente).
Variantes : *creica, creici, creicia (fém.), cognomen, gentilice.
*creicna : 1 ex. (Arezzo ; iiie-ier s.), gentilice.
18. cuclnie : Κύκλωψ
5 ex. (Tarquinia ; ive-ier s.).
Variante : cuclni (fém.), gentilice.
19. evantra : Εὐάνδρα
3 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
20. elnei : *Ἐλένα
1 ex. (Tarquinia, iie s.), gentilice.
21. eris : Ἔρις
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
22. eucle : Εὐκλῆς
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), gentilice.
23. eupuria : Εὐπορία
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), gentilice ou nom individuel d’esclave ?
24. zarapiu, zerapiu : Σαραπίων, Σεραπίων
2 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), gentilice, nom individuel d’esclave.
25. hercle, herclna : Ἡρακλῆς
3 ex. (Volsinies, Vulci, Chiusi ; époque récente), gentilice.
160 gilles van heems

26. herclite : Ἡρακλείδης (Ἡράκλειτος)


2 ex. (et 2 occurrences en latin ; Chiusi, iiie-ier s.).
Variante : ferclite, gentilice et nom individuel d’esclave.
27. hipucrate : Ἱπποκράτης
1 ex. (Tarquinia, viie s.), gentilice ou nom individuel d’étranger ?
28. lecusti, lecsutini : Λιγύστιος, Λιγυστῖνος ?
lecusti : 2 ex. (Pérouse ; iiie-ier s.).
Variante : lecusta (fém.), nom individuel d’esclave.
lecsutini : 7 ex. (Chiusi, iiie-ier s.).
Variantes : lecstini, lecstinei (fém.), lestinei (fém.), gentilice.
29. licantre : Λύκανδρος
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
30. memru : Μέμνων
2 ex. (Pérouse, iiie-ier s.).
Variante : mempru., cognomen.
31. metru : Μήτρων
2 ex. (Populonia, ve s.), nom individuel d’esclave.
32. nicipur : Νικηφόρος
1 ex. (et 1 occurrence latine, sous la forme Nicepor ; Chiusi, iiie-ier s.), nom
individuel d’esclave.
33. pele, pelie : Πηλεύς
pele : 2 ex. (Bomarzo, Pérouse ; épq. récente), gentilice et nom individuel
d’esclave.
pelie : 1 occurrence (Tarquinia ; épq. récente), gentilice.
34. perecele : Περικλῆς
1 occurrence (Volsinies, fin du vie s.).
Fonction : gentilice ou nom individuel d’étranger ?
35. platunalu : Πλάτων
1 ex. (Spina, iiie s.), gentilice.
36. *praxias : Πραξίας
1 ex. (Vulci, ca 480-460), nom individuel d’étranger ou gentilice ?
37. prumaθne, prumaθni : Προμαθεύς
prumaθne : 1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), cognomen.
prumaθni : 5 ex. (Chiusi, iiie-ier s.).
Variante : prumaθnei (fém.), gentilice.
38. pule, pulena : Πόλλης (Πῶλος)
pule : 1 ex. (Tarquinia, iie s.), nom individuel d’étranger.
pulenaI : 2 ex. (Tarquinia, iie s.), gentilice.
l’adaptation des noms grecs à l’étrusque 161

39. puliu : Πολλίων


1 ex. (Spina, ive-iiie s.), gentilice ou nom individuel d’étranger ?
40. pultuce : Πολυδεύκης
4 ex. (Tarquinia, Volsinies, Pérouse, Rome ; attestation la plus ancienne :
ive-iiie s.), nom individuel d’esclave.
41. pure : Πύρρος
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), gentilice.
42. sature : Σάτυρος
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), cognomen.
43. scirunie : Σκίρων
1 ex. (Abella, ve s.), gentilice.
44. sminθe, śminθi, śminθinei : Σμινθ‑
sminθe : 1 ex. (et 2 possibles ; Volsinies, époque récente), prénom.
śminθinei : 3 ex. (Pérouse, iiie-ier s.).
Variante : sminθinei, gentilice.
śminθi : 1 ex. (Adria, ive-iiie s.), nom individuel, prénom ?
45. tama, tame : Δαμᾶς
tama : 1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
tame ? : 1 ex. (Viterbe, époque récente), nom individuel ?
46. tamun : Δάμων
1 ex. (prov. inconnue, ve s.), nom individuel (d’esclave ?).
47. tantle, tantlna : Τάνταλος
tantle : 6 ex. (Pérouse, iiie-ier s.), gentilice.
tantlna : 1 ex. (Capoue, ve s.), gentilice.
48. taure : Ταῦρος
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), gentilice.
49. telicle : Τήλεκλος (Τηλεκλῆς)
1 ex. (Caere, viie s.), nom individuel d’étranger.
50. telmu : Τελαμών
1 ex. (Tarquinia, épq. récente), cognomen.
51. tinusi : Διονύσιος
4 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
52. tiφane : Διοφάνης
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), gentilice ou cognomen ?
53. tiφile : Δίφιλος
4 ex. (Tarquinia, Chiusi ; attestation la plus ancienne : iiie-iie s.).
Variante : tiple (Tarquinia), gentilice.
162 gilles van heems

54. turis : Δῶρις (Δοῦρις)


1 ex. (Volsinies, iiie-iie s.), nom individuel ?
55. urste : Ὀρέστης
1 ex. (Arezzo, iiie-ier s.), gentilice.
56. φerse : Περσεύς
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
57. φila : Φίλη
1 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
58. φilunice : Φιλόνικος
1 ex. (Chiusi ; iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
59. φilutis : Φιλῶτις
2 ex. (Chiusi, iiie-ier s.), nom individuel d’esclave.
La morphologie des anthroponymes grecs
en contexte de contacts : Grande Grèce et Sicile

Paolo Poccetti
Université Roma Tor Vergata

1. Les morphèmes dans les contacts entre langues

La morphologie, se situant au cœur de la langue, joue un rôle primor-


dial parmi les faits de contacts linguistiques. Ce domaine de la gram-
maire implique des phénomènes plus complexes que d’autres aspects
de la langue affectés par les interférences avec des langues étrangères,
tels que le lexique et la syntaxe. Les convergences les plus profondes
entre langues différentes, à la suite de contacts intenses, se mettent en
œuvre au niveau de l’expression et des fonctions des morphèmes. Par
conséquent, la morphologie est le thermomètre véritable qui permet de
mesurer le degré d’intégration et d’adaptation d’un élément étranger
dans une autre langue. Autrement dit la morphologie est l’indice prin-
cipal qui, en synchronie, révèle la profondeur du bilinguisme (individuel
ou collectif) et, en diachronie, dégage la chronologie de l’emprunt à une
autre langue. L’emprunt morphologique est beaucoup plus rare que l’em-
prunt d’un élément lexical ou d’un syntagme, parce qu’il repose sur la
capacité d’analyser la structure des mots, sur la conscience des procédés
sous-jacents à leur formation et sur la comparaison des fonctions gram-
maticales. Par là ce procédé implique des compétences langagières plus
développées et plus profondes 1. Au fond, pour le linguiste la morpho-
logie est un point de repère pour classer les différents types d’emprunts,
de calques, de formations hybrides et de convergences qui se produisent

1. R. Gusmani, Saggi sull’interferenza linguistica, Florence, 1986, p. 27, 45.


164 paolo poccetti

en milieu bilingue. Par conséquent la morphologie constitue un indice


précieux pour détecter les éléments étrangers et le niveau de leur intégra-
tion dans une autre langue.
Les noms de personnes, de leur côté, se distinguent des éléments lexi-
caux et des autres noms propres dans la mesure où ils sont un moyen
d’identification à la fois individuelle et sociale de leurs porteurs. Autre-
ment dit, dans toute communauté ils sont des marqueurs de l’identité
culturelle et sociale qui souvent met en contraste le milieu d’origine et le
milieu d’accueil d’un individu dans les contextes multiculturels et pluri-
lingues. Au sein du domaine plus vaste de l’onomastique, donc, les noms
de personnes dessinent un éventail plus complexe et varié du point de
vue et synchronique et diachronique, étant donné qu’ils sont assujettis
à la mobilité des individus, aux choix entre style personnel et tradition
familiale, aux contraintes sociales, aux variations sociolinguistiques des
registres et des situations de communication.
La multiplicité des combinaisons de toutes ces composantes se
reflète dans la morphologie des anthroponymes, qui, en synchronie, peut
signaler certaines variations sociolinguistiques, le niveau du bilinguisme
ainsi que le degré d’intégration d’un individu dans une société multicul-
turelle et, en diachronie, peut contribuer à fixer la profondeur et la chro-
nologie de l’adaptation d’un nom étranger.
Au sein de la morphologie les suffixes jouent un rôle primordial dans
les procédés d’intégration d’un nom, parce qu’ils orientent le classement
dans un type flexionnel ou un autre. Mais les procédés d’adaptation des
noms étrangers affectent non seulement l’aspect formel, mais aussi le
rôle fonctionnel et la connotation sémantique d’un suffixe. Par exemple,
il se peut qu’un suffixe caractérisant les sobriquets perde sa fonction ori-
ginelle en passant d’une langue à l’autre ou, inversement, qu’un suffixe
qui exprime l’affection ou est « neutre » dans une langue se charge d’une
valeur dépréciative ou méprisante dans l’autre.

2. Noms propres et changements morphologiques

Dans le domaine de l’anthroponymie il est essentiel de distinguer la


fonction dénotative et la fonction connotative d’un nom de personne,
qui s’adjoint à sa fonction primaire, qui consiste à servir à l’identifi-
cation d’un individu. Spécialement, au sein d’un système onomastique
noms grecs en grande grèce et en sicile 165

caractérisé par la transparence synchronique presque totale par rapport


au lexique et par la souplesse dans la formation des composés, le choix
d’un élément ou d’un autre n’est pas indifférent : la composition avec
des termes tels que ἵππος dans l’Athènes de l’âge classique, tout comme
les composés en -rix en Gaule à l’époque de Jules César, ne sont pas
exempts de connotation idéologique ou de référence à une condition
sociale spécifique.
En outre, ce qui distingue les anthroponymes d’autres catégories de
noms propres est l’emploi pragmatique assujetti aux variables des textes,
des contextes et des intentions communicatives. Font partie des traits
essentiels qui font le clivage entre noms de personnes et autres noms
propres (excepté les théonymes) l’emploi en mention (essentiellement
dans un récit ou dans une formule présentative) et l’emploi dans l’in-
terpellation (pour s’adresser à quelqu’un). Les deux fonctions sont, en
général, distinguées par les moyens disponibles dans chaque langue,
à savoir des marqueurs ou phonétiques ou morphologiques ou syn-
taxiques ou les trois à la fois, comme en grec ὦ Σώκρατες par rapport à
(ὁ) Σωκράτης.
Dans les langues qui possèdent la flexion nominale et ont développé
un cas vocatif distinct du nominatif (comme en grec où la distinction
entre les deux cas est beaucoup plus marquée et étendue qu’en latin), le
cas qui sert à l’interpellation joue un rôle important dans la transmission
ou dans l’adoption des noms de personnes. En d’autres termes, le vocatif
véhicule souvent les emprunts onomastiques d’une langue à l’autre dans
le cadre de la conversation. Ce procédé s’insère dans une tendance géné-
rale à remplacer le nominatif par le vocatif, comme le montre en latin
l’origine du nom de Iuppiter qui est passé du vocatif au nominatif.
En grec, W. Schulze 2 avait déjà signalé que, parmi les noms de per-
sonnes, l’emploi du cas vocatif avait déclenché le flottement entre les
thèmes en -s- et les flexions en -ā et -o attesté par l’épigraphie et par les
sources littéraires. Concrètement, les vocatifs du type Πάτροκλε, Πρω-
τογένη, Μενεκράτη au lieu de Πατρόκλεες, Πρωτόγενες, Μενέκρατες
seraient à la source de la réfection du paradigme flexionnel du type
Πάτροκλος, Πρωτογένης, Μενεκράτης /-ου. En effet la flexion en -κλος
2. W. Schulze, « Koseform im Griechischen », ZVS 32 (1893), p. 195-197 ; Id., « Zur
Bildung des Vokativs im Griechischen und Lateinischen », dans Antidoron, Fest-
schrift J. Wackernagel, Göttingen, 1924, p. 240-254.
166 paolo poccetti

au lieu de -κλῆς est très ancienne, comme en témoignent les nombreux


flottements du nom de Πάτροκλος chez Homère, qui d’une manière
significative affectent le plus souvent le nominatif et le vocatif. Cela, on
le verra ci-après, a aussi des retombées significatives en ce qui concerne
le passage de ce type de noms dans les langues italiques, ce qui, parfois,
a entraîné la réinterprétation de l’élément de composition -κλος en tant
que suffixe pourvu d’une valeur fonctionnelle.
L’emploi du cas de l’interpellation s’associe strictement à l’usage
pragmatique de certains suffixes. L’exemple le mieux connu nous est
fourni par le nom de Socrate chez Aristophane, qui au vocatif met en
contraste la forme ὦ Σώκρατες 3 et ὦ Σωκρατίδιον 4 marquée par -ίδιον 5,
issu de la cumulation de deux suffixes au lieu du simple -ιον.
Dans une telle perspective la différenciation fondamentale entre la
structure monomembre de la dénomination personnelle en grec (idio-
nyme) et la structure plurimembre, reposant sur le noyau prénom + genti-
lice 6, instauré dans la majorité des langues de l’Italie antique et en latin,
au fur et à mesure élargi par d’autres éléments (cognomen, supernomen,
adnomen, etc.), se répercute dans les stratégies pragmatiques. Le latin
nous montre que les effets de sens dans l’emploi d’un nom de personne,
tels que l’affection, la dépréciation, la flatterie, le respect, sont atteints
essentiellement par le choix ou la combinaison entre plusieurs éléments
qui composent la dénomination 7, alors que le grec, qui ne dispose que
d’un seul élément (outre le patronyme et l’ethnonyme), doit exploiter les
ressources disponibles dans la langue, notamment les faits phonétiques,
comme le déplacement de l’accent, marqueur du cas de l’interpellation,
et les faits morphologiques, dont les suffixes sont le pivot.
Dans de telles conditions, les suffixes dans les anthroponymes en grec
jouent un rôle plus complexe et varié qu’en latin. En effet, les suffixes
grecs ne se chargent pas seulement de fonctions pragmatiques, subordon-
nées à l’emploi dans certains contextes, mais ils peuvent servir aussi à
3. Arist., Nub. 222, 314.
4. Arist., Nub. 223, 237, 746.
5. Chantraine, Formation, p. 69-70.
6. M. Lejeune, « La romanisation des anthroponymes indigènes d’Italie », dans L’ono-
mastique latine. Actes du colloque (Paris 13-15 octobre 1975), Paris, 1977, p. 35-40.
7. Voir P. Poccetti, « Reflets des conditions d’oralité à travers l’emploi des noms per-
sonnels dans les textes latins », dans N. Pepin et E. De Stefani (éd.), Eigennamen in
der gesprochenen Sprache, Tübingen, 2010, p. 57-87.
noms grecs en grande grèce et en sicile 167

former des formes abrégées ou raccourcies à partir d’un nom composé.


Cependant les raccourcissements d’un nom ont un double visage même
en synchronie : ils peuvent représenter la variante familière dans certains
contextes en parallèle à la dénomination officielle ou bien ils peuvent
donner naissance à des noms nouveaux en élargissant le répertoire ono-
mastique. Ainsi des noms comme Ἀγάθων ou Ἀριστίας, issus de l’abré-
viation des composés à premiers éléments Ἀγαθo- et Ἀριστo-, peuvent
fonctionner synchroniquement ou comme formes familières ou comme
dénominations autonomes d’un individu, s’appliquant à n’importe quel
contexte.
De la même manière, une forme employée en contexte familier ou en
fonction affective peut s’appuyer sur un élargissement suffixal qui peut
à la fois se borner à l’usage pragmatique (fonction diminutive, affec-
tive, flatteuse, etc.) et engendrer des noms nouveaux servant à identifier
un individu. C’est le cas, par exemple, du suffixe -ιoν, dont la fonction
affective et l’emploi dans le style familier nous sont prouvés par le fait
qu’ils s’opposent au nom officiel dans les dialogues dramaturgiques (ex.
Φειδιππίδης ~ Φειδιππίδιoν ; Εὐριπίδης ~ Εὐριπίδιoν, chez Aristophane).
Mais ce suffixe figure également dans les noms qui marquent l’identité
d’un individu dans sa vie, comme nous le montre leur emploi dans les ins-
criptions publiques et sépulcrales (ex. Κάλλιον 8 ; Φιλώτιον 9). Dans cette
dernière fonction, dépourvue de toute connotation affective, ce suffixe
connaît une diffusion remarquable à l’époque hellénistique et romaine,
qui est démontrée par la fréquence des noms grecs pourvus de ce suffixe
dans la littérature latine, en particulier chez Plaute et Térence, et dans les
inscriptions latines, comme, par exemple, le nom Philematium (< Φιλη-
μάτιον) 10. Les formes familières ou affectives des noms ne relèvent
pas toujours d’une coupure ou d’un raccourcissement d’un nom, mais
peuvent reposer sur une forme élargie par un suffixe, comme dans le cas
des suffixes -ιχος et -ίσκος, auxquels on attribue une valeur diminutive 11.
Mais les individus nommés Πύρριχος ou Παρμενίσκος ou Θράσυλλος
ont une identité autonome des Πύρρος ou Παρμένων ou Θρασύλαος,

8. IG II2 1400, 42.


9. SEG XXXVIII 478 ; 490.
10. Ce nom attesté chez Plaute figure dans plusieurs inscriptions spécialement de l’Italie
du Sud : voir LGPN 3a, s.v. Φιλημάτιον.
11. Chantraine, Formation, p. 403-406.
168 paolo poccetti

indépendamment de la relation qui existe entre chaque paire. Par consé-


quent l’affirmation que « nicht alle Kurznamen sind Kosenamen » 12 vaut
également en sens inverse.
Plus généralement les noms propres, et en particulier les noms de per-
sonnes, sont à la source de variations et d’innovations morphologiques et
flexionnelles qui rayonnent jusqu’au lexique. Souvent les contacts entre
langues sont responsables de tels changements. Ainsi en latin la morpho-
logie des noms grecs constitue un chapitre de la grammaire, qui reflète
non seulement les idéaux de la langue littéraire, mais aussi les niveaux
moins châtiés de la langue quotidienne. Déjà en latin de l’époque répu-
blicaine, la flexion des anthroponymes grecs a subi des innovations éten-
dues aux noms latins, tels que la désinence du gén. sg. -es des thèmes en
-ā, qui, d’après le modèle de Tyche : Tyches, est passée à des noms latins
comme Secunda : Secundes, Aquillia : Aquilliaes ; Veneria : Veneries 13,
etc. et, plus tard, la flexion en -(e)n des thèmes en -ā bâtie d’après le
modèle de -ōn (ex. Tyche : Tychen-is ; Calliope : Calliopen-is) étendue à
des noms latins (ex. Barba : Barbanem) 14. De telles réfections du para-
digme flexionnel reposent sur l’emploi généralisé du <η> avec sa valeur
ancienne de /ē/ à la place de <α>, là où il serait attendu dans la koinè, ce
qui s’observe dans certains dialectes 15.

3. Multiplicité et multifonctionnalité des suffixes

Dans toutes les langues les noms propres suivent les règles de for-
mation et de productivité suffixale qui s’appliquent au lexique, et dans
leurs évolutions diachroniques et dans les variations synchroniques. Les
noms de personnes, en tant que subordonnés aux changements de modes,
fonctions communicatives et contextes d’emploi, sont assujettis à des
forces contradictoires : la conservation de formes plus anciennes (par-
fois, à l’état purement graphique) coexistant avec les innovations dans le
12. E. Locker, « Die Bildung der griechischen Kurz- und Kosenamen », Glotta 21
(1932), p. 139.
13. Par ex. CIL I2 1249, 1597, 1600, 1681.
14. V. Väänänen, Introduction au latin vulgaire, Paris, 1967, p.  116. R. Lazzeroni,
« Dall’antroponimo al paradigma. Storia di una declinazione latina », AGI 84
(1999), p. 207-214.
15. A. Morpurgo Davies, « Greek Personal Names and Linguistic Continuity », dans
GPN, p. 26-30.
noms grecs en grande grèce et en sicile 169

système onomastique et le changement du répertoire. Un exemple nous


est fourni par le vocalisme /e/ dans les anthroponymes issus du nom
d’Apollon, tels que Ἀπέλλιχος, Ἀπελλῆς, Ἄπελλις, Ἀπελλᾶς, Ἀπελλαῖoς,
Ἀπελλίδης conservés jusqu’à l’époque romaine 16, alors que le nom de la
divinité a été remplacé de bonne heure par la forme à vocalisme ionien
Ἀπoλλ- qui a produit la série Ἀπoλλόδωρος, Ἀπoλλώνιος, Ἀπoλλω-
νίδης ; d’autre part, l’interaction avec le lexique, d’un côté, renouvelle
constamment les procédés de formation des noms propres parallèlement
au lexique et, de l’autre, vise à les différencier de ce dernier. En effet,
certaines règles de la composition et de la flexion, qui s’appliquent aux
noms de personnes, sont exclues du lexique 17.
En cas d’identité morphologique, la langue grecque dispose d’un
moyen phonétique pour distinguer les noms propres : le changement
d’accent. Sa remontée peut distinguer un nom de personne tel que Φαῖ-
δρος de φαιδρός « brillant » 18. Mais lorsque ce procédé n’est pas dispo-
nible, comme dans le cas des noms issus de l’adjectif numéral πρῶτος, la
seule ressource pour les différencier est alors la suffixation : c’est pour-
quoi une variété remarquable de suffixes est rattachée à ce lexème : ainsi
Πρώτων, Πρωτίων, Πρωτίας, Πρωτέας, Πρατίνας, Πρατῖνoς, Πράτιχoς,
Πρατύλoς, Πρᾶτυς, Πρατώ 19.
Le latin, et vraisemblablement les autres langues de l’Italie ancienne,
ne disposant pas de l’outil phonétique de l’accent, font plutôt appel à la
morphologie pour marquer la fonction onomastique. C’est pourquoi ces
langues présentent un emploi de certains suffixes plus spécialisé qu’en
grec. Par exemple le suffixe -yo- (> lat. -ius ; osque ‑is), qui en grec est
commun au lexique et à d’autres catégories de l’onomastique, comme les
ethnonymes, en latin est presque réservé aux anthroponymes et, parmi
eux, le plus souvent aux gentilices, dont il est la marque spécifique. Dans
les langues sabelliques, le suffixe -i(y)o-, dont « la répartition est entiè-
rement indépendante de la structure syllabique présuffixale » est une
caractéristique presque généralisée des gentilices 20. Mais la discipline

16. Bechtel, HPN 62.


17. A. Morpurgo Davies, art. cit., p. 16-18.
18. P. Probert, Ancient Greek Accentuation. Synchronic Patterns, Frequency Effects, and
Prehistory, Oxford, 2006, p. 298.
19. Bechtel, HPN 387.
20. Citation de M. Lejeune, L’anthroponymie osque, Paris, 1976, p. 74.
170 paolo poccetti

morphologique très rigide adoptée par les langues de l’Italie antique dans
le but de marquer la fonction d’un nom dans la formule de dénomina-
tion personnelle est parfois relâchée par deux forces, souvent simulta-
nées : les influences étrangères, qui sont puissantes en contexte bilingue,
et l’évolution du système onomastique, qui comporte aussi le renouvelle-
ment du répertoire. De ces points de vue, l’anthroponymie latine esquisse
l’éventail le plus complexe et le plus varié dans toute l’antiquité, à la fois
en synchronie et en diachronie. Les suffixes sont au cœur de ces change-
ments, comme le montrent les suffixes d’origine grecque, celtique, ger-
manique, sans parler de ceux des autres langues de l’Italie préromaine,
qui ont été absorbés dans la formation des noms de personne romains. A
l’intérieur du système latin, le renouvellement suffixal le plus saisissant
affecte les cognomina, catégorie des noms qui occupe une place de plus
en plus particulière dans l’anthroponymie romaine en servant souvent à
marquer la condition sociale 21 et à signaler les relations entre individus
dans la langue familière 22.
Presque tous les suffixes de l’onomastique sont plus ou moins mul-
tifonctionnels, dans la mesure où ils sont partagés par des catégories
diverses de noms propres (toponymes, ethnonymes, théonymes, anthro-
ponymes, etc.) et ils sont employés pour indiquer des rôles différents à
l’intérieur de la même catégorie (tels que le prénom, le patronyme, le
nom de famille, le sobriquet, etc.). L’autre aspect de la multifonctionna-
lité des suffixes, qui n’est pas du tout secondaire, concerne la connotation
qui relève de leur emploi pragmatique, notamment les valeurs connexes
aux intentions communicatives et aux interactions interpersonnelles, qui
se mettent en œuvre dans l’énonciation. Il s’agit des fonctions déprécia-
tives, péjoratives, affectives, qui se manifestent au niveau des textes et de
leurs contextes. Pour ces fonctions toutes les langues disposent de plu-
sieurs moyens qui ne sont du reste pas limités à la morphologie.

21. I. Kajanto, « On the Chronology of the Cognomen in the Republican Period », dans
H. G. Pflaum et N. Duval (éd.), L’onomastique latine. Actes du colloque, Paris
13-15 octobre 1975, Paris, 1977, p. 63-69.
22. F. Biville, « La détermination des anthroponymes dans la correspondance de
Cicéron », Paideia 58, (2003), p. 77–94 ; Ead., « Noms propres en usage, noms
propres en mention », dans C. Bodelot (éd.), Éléments « asyntaxiques » ou hors
structure dans l’énoncé latin, Clermont-Ferrand, 2007, p. 107–121.
noms grecs en grande grèce et en sicile 171

Une des propriétés universelles de la morphologie consiste en ce fait


que des suffixes différents sont susceptibles de se charger de la même
fonction et que, inversement, la même fonction peut être exprimée par
des suffixes différents. Dans son analyse détaillée des formations nomi-
nales du lexique grec, P. Chantraine est conscient, d’une part, de donner
des définitions imprécises ou génériques de la valeur de chaque suffixe,
telles que la notion d’appartenance ou de relation, qui se répètent sou-
vent, et, de l’autre, d’aboutir à des résultats contradictoires, en attribuant
à un seul morphème des fonctions très différentes, comme les fonctions
diminutive et affective, d’un côté, et les fonctions péjorative et déprécia-
tive, de l’autre 23. En d’autres termes, on a l’impression que toutes ces
fonctions se dégagent d’une valeur de base commune à plusieurs suf-
fixes, celle de marquer la relation ou l’appartenance, qui, de leur côté,
se traduisent en types suffixaux différents. Mais, souvent il arrive que
la valeur de base soit obscurcie en diachronie et que les effets de sens
soient si ténus qu’ils deviennent insaisissables en synchronie. Une telle
conclusion est valable pour toutes les langues : rappelons, par exemple,
le cas du suffixe -(V)lo- dans l’histoire du latin. Parfois le même auteur,
à l’intérieur du même genre poétique, applique ce suffixe à des noms de
personnes avec des valeurs totalement différentes 24.
Quant à la convergence de suffixes à l’origine différents en une même
fonction, elle a pour conséquence une distribution qui est subordonnée,
d’une part, aux choix du locuteur et, de l’autre, à l’efficacité de l’im-
pact sur le destinataire du message. Un exemple nous est fourni par un
passage de l’historien Dion Cassius se référant à une invective contre
Cicéron, auquel on s’adresse en altérant son nom au moyen de différents
suffixes : ὦ Κικέρων ἢ Κικέρκουλε ἢ Κικεράκιε ἢ Κικέρισκε ἢ Γραί-
κουλε, ἢ ὅ τι ποτὲ καὶ χαίρεις ὀνομαζόμενος 25. Ces suffixes, en partie
grecs (-ακιoν, -ισκoς), en partie latins (-κουλος, -ουλος), convergent dans
ce contexte pour connoter de façon méprisante et dépréciative la figure

23. Chantraine, Formation, p. 64


24. Chez Catulle, le sens dépréciatif de Rufulus (59, 1) se distingue de la fonction affec-
tive de Fabullus et Veraniolus (12, 15-17).
25. Dion. Cass., Hist. Rom. 46, 18, 1. Analyse détaillée de ce passage par F. Biville,
« Cicéron “le grec”. Onomastique polémique et ambiguïté identitaire », dans F. Poli,
G. Vottéro (éd.), De Cyrène à Catherine. Trois mille ans de Libyennes. Études
grecques et latines offertes à Catherine Dobias-Lalou, Nancy, 2005, p. 251-268.
172 paolo poccetti

du grand orateur romain. L’appel aux suffixes des deux langues, outre
la fonction renchérissante, est à mettre en relation avec le bilinguisme
du destinataire, afin qu’il puisse écouter les même injures dans les deux
langues qu’il maîtrisait. Avec humour, le locuteur laisse entendre que
d’autres appellations de même valeur pouvaient être connues de cet
homme cultivé, et lui laisse toute liberté pour les former lui-même (ἢ ὅ τι
ποτὲ καὶ χαίρεις ὀνομαζόμενος) !

4. Anthroponymie grecque et noms indigènes


en contact dans le sud de l’Italie

La colonisation grecque de l’Italie méridionale et de la Sicile se carac-


térise dès le début de son histoire par l’intégration aux populations indi-
gènes d’un certain nombre d’immigrés dans les zones coloniales et par
le rayonnement de l’alphabet et de la langue grecque dans l’arrière-pays
des colonies elles-mêmes. L’onomastique nous fournit le témoignage le
plus saisissant de ce métissage dès l’apparition de la documentation épi-
graphique. Nombre d’anthroponymes non grecs figurent, par exemple,
dans les inscriptions les plus anciennes des colonies eubéennes installées
dans le golfe de Naples, tels que, dans les colonies eubéennes, Δαζίμō
(gén. sg. : Pithécuses, fin viiie s.) 26, Ταταίης (gén. sg. : Cumes, viie s.) 27,
dans les colonies achéennes, Ξύλλας, Fόλχας (gén.  sg. : arrière-pays
de Poséidonia, début ve) 28 et dans les colonies mégariennes de Sicile,
Τίτελος, Καίλιος, Πυκέλειος (Sélinonte, début ve) 29. Parfois il se trouve
qu’un anthroponyme attesté par les inscriptions archaïques de la Grande
Grèce peut être interprété à la fois comme grec et non grec. C’est le cas
de Ϝισύλō (gén.  sg.) sur un graffite en alphabet achéen trouvé dans la
fouille menée sur le site indigène de Fratte dans l’arrière-pays de Posei-
donia 30. En principe, le nom en question est susceptible d’être rapproché
de Ἴσυλλος (IG IV2 1, 128, Épidaure, début iiie) forme diminutive d’un
composé à premier élément formé sur le radical de l’adjectif ἴσος 31, mais

26. L. Dubois, IGDGG I, p. 33.


27. IGDGG I, p. 41.
28. IGDGG II, p. 72.
29. L. Dubois, IGDS, p. 50-51.
30. IGDGG II, p. 74.
31. Bechtel, HPN, p. 228.
noms grecs en grande grèce et en sicile 173

aussi d’un prénom indigène hellénisé à la base des gentilices latins Visul-
lius, Visuleius 32 ainsi que de l’osque Vesulliais 33. La double possibilité
s’explique par la superposition formelle du suffixe grec avec celui des
langues italiques.
Les procédés d’adaptation morphologique des noms indigènes au sys-
tème de l’anthroponymie hellénique témoignent du degré d’intégration
des immigrés dans la vie sociale et professionnelle des villes grecques.
Plus rare, pour des raisons compréhensibles, est le phénomène inverse,
c’est-à-dire l’attestation de noms de personnes grecs en contexte indi-
gène, comme les gentilices osques en milieu campanien Pitakiis 34 issus
de la forme dorienne du nom du « singe » (πίθηκος) ou les anthropo-
nymes ayant à la base les noms grecs des Syriens et des Phéniciens
comme Συριες 35 et Φοινικ[ις] 36 dans des sites lucaniens. Plus complexes
sont l’interprétation et la question de l’origine d’autres gentilices du point
de vue de la suffixation. C’est le cas de Melíssaii[s à Pompéi 37, qui se
retrouve dans le gentilice latin Melissaeus 38, et de Smintiis à Capoue 39,
employé ailleurs dans l’onomastique latine en fonction de cognomen 40.
Comme Μελισσαῖος est inconnu de l’anthroponymie grecque, alors
que d’autres dérivés du nom de l’abeille (μέλισσα / μέλιττα) sont très
répandus, tels Mέλισσα / Mέλισσoς, Mελισσίας, Mελισσίων, Mελισσίς,
Mελισσεύς, on se demandera si Melíssaii[s est une formation du grec,
issue du lexique (μελισσαῖος est attesté comme adjectif) ou de l’onomas-
tique (en tant que nom de personne non attesté), ou bien s’il agit d’une
formation de l’osque sur la base d’un élément grec avec combinaison
de la marque commune -yo- des gentilices italiques 41. Est également

32. H. Solin, O. Salomies, Repertorium Nominum Gentilium et Cognominum Latinorum,


Hildesheim, 1994, p. 211.
33. M. Crawford et al. (éd.), Imagines Italicae, Londres, 2011 (Teruentum 18). Mais ce
rapprochement a été refusé par L. Dubois, IGDGG I, p. 324.
34. M. Crawford, ImIt Surrentum 1.
35. Id., ImIt Laos 3.
36. Id., ImIt Buxentum 3.
37. Id., ImIt Pompei 50. La restauration Melissai<e>[is dans l’édition de M. Crawford,
ImIt Pompei 50, n’a aucune justification.
38. P. Castrén, Ordo Populusque Pompeianus. Acta Instituti Romani Finlandiae, VIII,
Rome, 1975, p. 190.
39. M. Crawford, ImIt Capua 36, 37.
40. H. Solin, O. Salomies, op. cit., p. 173.
41. M. Lejeune, L’anthroponymie osque, Paris, 1976.
174 paolo poccetti

possible une réinterprétation du morphème comme -ayo-, suffixe secon-


daire bien connu dans la formation des gentilices (ex. osque Vesulliais,
lat. Anaios) 42. En ce dernier cas, on pourrait alors envisager une forma-
tion indigène autonome, bâtie sur un élément étranger, selon un procédé
qui est très répandu dans les faits d’interférences linguistiques 43. De là,
on pourrait classer Meliíssaii[s (>lat. Melissaeus) parmi les « emprunts
apparents » puisque -ayo- (d’où -aeus en latin et -ais en osque) se déve-
loppe pour les dérivés nominaux des langues sabelliques d’une manière
parallèle à -αῖος en grec. Le gentilice osque de Capoue Smintiis visible-
ment en relation avec Σμινθεύς / Σμίνθιος, épiclèse d’Apollon, présente
des problèmes en partie homologues 44. Mais la présence en Italie cen-
trale des anthroponymes étrusques Sminθe et Sminθinal, qui semblent
reproduire les variations morphologiques du grec (respectivement
Sminθe de Σμινθεύς et Sminθinal de Σμίνθιος) 45 n’exclut pas la média-
tion de l’étrusque.
Ces échantillons donnent une idée suffisante des difficultés d’ana-
lyse des noms de personnes susceptibles d’être imputés directement ou
indirectement à l’onomastique grecque, en particulier dans le cas où un
même suffixe, aux aboutissements certes différents, comme -yo- (gr. -ιος ;
lat. -ius ; sabell. -i(i)s ; étr. -ie), est partagé par des langues diverses. En
outre, la tendance presque universelle à la formation des noms bâtis sur
des éléments lexicaux et/ou morphologiques d’origine étrangère et aux
combinaisons secondaires, tels que -ayo- ou -eyo-, qui se sont produits
dans chaque langue indépendamment l’une de l’autre, rend le tableau
d’ensemble complexe. Rappelons aussi que l’épigraphie archaïque des
langues indigènes de la Grande Grèce est très pauvre et qu’inversement
l’épigraphie grecque de l’époque hellénistique et romaine, qui par ail-
leurs n’est pas très représentée, présente un mélange souvent inextricable
de noms non grecs. Par conséquent toute évaluation quantitative risque
d’être trompeuse. De ce point de vue on ne peut pas faire confiance au
Lexicon of Greek Personal Names qui dans le volume 3a, consacré à

42. M. Lejeune, op. cit., p. 105.


43. R. Gusmani, op. cit., p. 99-116.
44. Pour les variantes flexionnelles voir Eust., ad Hom. Il. I 56, 2- 57, 17, qui distingue
l’épithète de l’ethnonyme Σμινθαῖος issu du toponyme Σμίνθη.
45. C. De Simone, Die griechischen Entlehnungen im Etruskischen, Wiesbaden, 1970,
I, p. 236, 333.
noms grecs en grande grèce et en sicile 175

l’Italie méridionale et à la Sicile, inclut indifféremment des noms qui


sont manifestement d’origine latine (ex. Μαρκία Μάρκελλα Μαρκελ-
λῖνoς, Σεκοῦνδα, Σεκουνδῖνα), attestés dans les inscriptions grecques, et
des noms grecs ou hybrides attestés dans l’épigraphie grecque ou latine,
tels que Πριμογένεια ou Πριμίων, Σεκουνδίων, formés dans un contexte
bilingue. Il manque encore, par conséquent, un répertoire complet des
noms d’origine grecque dans les langues de l’Italie ancienne, avec en
particulier un classement qui tienne compte de la multiplicité des pro-
cédés d’interférences entre les langues en question.
D’une manière significative, W. Schulze dans son traité monumental
sur les gentilices latins avait évité d’aborder un tel sujet 46. Néanmoins
quelques-uns sont parfaitement reconnaissables comme Bathilius connu
par une inscription latine de Petelia, près de Crotone 47, dont l’ortho-
graphe de la consonne aspirée signale son ancien lien avec Βάθυλλος,
mais l’emploi de <i> au lieu de <y> manifeste l’adaptation à la termi-
naison des nombreux gentilices latins en -ilius. En revanche ce même
nom est transcrit Batullus dans son emploi en fonction de cognomen 48.
Pour d’autres, il y a des incertitudes quant à la direction de l’emprunt, ce
qui pose aussi des problèmes de méthode. Prenons, par exemple, deux
gentilices latins de la Lucanie, qui partagent la même structure mor-
phologique, Lamponius et Stremponius : le premier qui est le nom d’un
commandant lucanien à l’époque de la guerre sociale (Μᾶρκος Λαμπώ-
νιος) 49, pourrait être mis en relation avec Λάμπων, nom associé par la
tradition littéraire à la fondation de la colonie athénienne de Thurii 50
et probablement attesté par une inscription de Centuripe en Sicile 51 ; le

46. W. Schulze, Zur Geschichte lateinischer Eigennamen. Abhadl. Kön. Gesell. Wiss.
Göttingen, Hist.-Phil.Klasse, V, Berlin, 1904.
47. M. L. Lazzarini, « Grecanici come gentilizi. Una nuova iscrizione latina da Petelia,
in Ἐπιγραφαί », Miscellanea epigrafica in onore di Lidio Gasperini, Tivoli, 2000,
p. 503-510.
48. CIL VI 23013 : T.Nonius T.l. Batullus.
49. App., B.C. I 40;41 ; 90 ; 93. Diod.Sic. XXXVII 2. Cf. Fernando La Greca (éd.), Fonti
letterarie greche e latine per la storia della Lucania tirrenica, Rome, 2002, p. 34,
35, 38, 40 et 169.
50. W. Burkert, « Le laminette auree: da Orfeo a Lampone », dans Orfismo in Magna
Grecia. Atti del XIV convegno di studi sulla Magna Grecia (Taranto 6-10 ottobre
1974), Naples, 1975, p. 103-104.
51. IGDS I, p. 225.
176 paolo poccetti

second, attesté par une inscription (CIL X 226) 52, rappelle le Στρίμπων


d’une inscription en alphabet achéen trouvée près de Poséidonia 53. On se
demandera si le fait que Στρίμπων soit un hapax dans l’anthroponymie
grecque suffit à refuser le parallélisme avec Λάμπων. L’explication,
déjà suggérée, selon laquelle Στρίμπων serait une variante de Στίλπων,
donnerait une confirmation au parallélisme avec Λάμπων Lamponius.
En outre, si le général d’Agathoclès qui porte le nom Στίλπων 54 était
un Campanien comme les soldats mercenaires au service du tyran de
Syracuse 55, on pourrait obtenir un indice indirect de la circulation de ce
nom en milieu indigène 56, ainsi que de sa déformation au passage d’une
langue à l’autre. Du point de vue morphologique, le couple Lamponius
et Stremponius  se superpose parfaitement aux innombrables gentilices
se terminant en -ōnio- du latin (ex. Pomponius, Acerronius) et des lan-
gues sabelliques (ex. osque Νανονις, Σκλαπονιες, etc.), issus de la com-
binaison de -ōn- et -yo-.
En général, la parenté de deux langues favorise les procédés d’adap-
tation d’un système à l’autre. En particulier la proximité, sinon l’iden-
tité formelle, de certains morphèmes suscite une convergence visant
à minorer les différences formelles et fonctionnelles entre les lan-
gues concernées. La langue grecque  et les langues italiques partagent
plusieurs suffixes d’origine indo-européenne qui sont fréquemment
employés dans la formation des noms personnels, tels que -yo-, -ōn-,
-(e/o)lo-. Ces suffixes, en outre, appartiennent aux mêmes paradigmes
flexionnels dans les deux langues. La correspondance entre suffixes des
deux langues permet, dans un contexte bilingue, le choix de la flexion
de l’une ou de l’autre langue. Au cours de l’histoire de la langue latine
l’adaptation et la flexion des noms grecs ont suivi des parcours différents
en donnant lieu à nombreuses variations. L’emploi littéraire a divisé le

52. Voir C. Ampolo, « Onomastica e mobilità sociale. Da Strinpon a Stremponius. A


proposito della iscrizione di Pontecagnano », AION ArchStAnt XIV, 1992, p. 63-68.
53. L. Dubois, IGDGG II, p. 75.
54. Diod. Sic. XXI 8.
55. G. Tagliamonte, I figli di Marte. Mobilità, mercenari e mercenariato italici in Magna
Grecia e Sicilia, Rome, 1994, p. 191-193.
56. C’est pourquoi l’explication de Στίλπων proposée par F. Bechtel, HPN 558, en rela-
tion directe avec le toponyme sicilien Στιλπαί nous semble improbable. Le nom
Στίλπων et ses variantes (Στίλπίων, Στίλπας) sont répandus dans le monde hellé-
nique.
noms grecs en grande grèce et en sicile 177

milieu bilingue des Romains cultivés entre fidélité à la flexion grecque


et adoption de la déclinaison latine 57. Toutefois, les flottements entre ter-
minaisons grecque et latine s’observent aussi dans la langue populaire,
le plus souvent en cas d’homogénéité des suffixes, comme dans le nom
Hector, pour lequel Accius préférait l’accusatif Hectora à Hectorem 58.
En revanche, lorsqu’un type morphologique n’a aucun correspondant
dans l’autre langue, l’adaptation à la langue cible nécessite le change-
ment de paradigme flexionnel, comme, par exemple, dans les noms du
type Kαλυψώ, pour lesquels César suggérait d’adopter le suffixe -ōn
(acc.sing. : Calypsonem) 59.
Cependant, dans l’adaptation d’un anthroponyme étranger, le schéma
flexionnel relève aussi des variations de la langue source. Les noms de
personnes grecs plus anciennement passés en latin montrent la fusion
des noms en -ης, notamment des composés en -κλῆς (-κλέFης), -γένης,
-κράτης, -σθένης, des noms en -εύς et des thèmes masculins en ‑ā
convergents tous dans la terminaison -ης au nominatif. Ce fait, qui s’est
répercuté dans les flottements flexionnels entre thèmes en -o et thèmes
en consonne, très fréquent dans l’anthroponymie, se retrouve avec de
légères variations dans les langues préromaines, notamment l’étrusque
et l’osque. En fait, à l’origine de ces développements dans les langues de
l’Italie ancienne se trouvent les variations internes au système grec. Par
exemple, les variantes de la flexion en -ης des noms en -εύς sont attestées
de très bonne heure en Grande Grèce et Sicile, comme en témoignent les
noms d’Achilles et d’Ulysse respectivement connus par les inscriptions
(ex.  Ἀχίλης) 60 et les sources littéraires (ex. Ὠλίξης / Οὐλίξης) 61. Une
telle situation morphologique est reflétée par les emprunts latins les plus
anciens, alors que les terminaisons -eus ne sont qu’une restauration plus
tardive sous l’influence de la koinè 62.
Ces prémisses nous fournissent une clé pour l’explication notamment
de deux noms grecs attestés en contextes indigènes de Sicile : il s’agit de

57. F. Biville, Les emprunts du latin au grec. Approche phonétique, II. Vocalisme et
conclusions, Louvain, 1995, p. 225-240.
58. GRF 78, 3 Funaioli.
59. GRF 154, 20 Funaioli.
60. L. Dubois, IGDGG II, p. 28.
61. Voir F. Biville, Les emprunts…, I. Consonantisme, Louvain - Paris, 1990, p. 73.
62. F. Biville, op. cit., II, p. 369.
178 paolo poccetti

Πρατομάκης et Eυρυμάκης 63, pour lesquels, d’une part, on a invoqué des


composés à membre -μήκης, « postulés par Bechtel 64 pour rendre compte
du nom Mάκης » 65 et, de l’autre, des emprunts aux anthroponymes Πρα-
τόμαχος et Eὐρύμαχος, adaptés à la morphologie de la langue locale 66.
Une troisième solution serait d’envisager un flottement flexionnel dans
les composés en -μαχος → ‑μαχης, qui, en parallèle à ceux en -αρχος
→  -αρχης, se retrouve en Attique, plutôt dans le lexique que dans les
noms de personnes 67. En revanche, un trait indigène est la déaspiration
des consonnes aspirées (χ  >  κ) 68, qui en Sicile est attesté par les flot-
tements du même type dans d’autres noms, tels que Σκύτας au lieu de
Σκύθης 69 et, peut-être inversement, Μύσχελος à coté de Μύσκελος (et
Μύσϙος, Μύσκων) 70. En d’autres termes, un trait du système phonolo-
gique des langues locales de Sicile (l’absence d’occlusives aspirées) a été
étendu aux noms propres grecs.
Quant aux noms composés en -κλῆς, le flottement avec la flexion thé-
matique (-κλος) se poursuit, des attestations homériques jusqu’à l’époque
romaine, comme nous le montre la variation entre Dioclus et Diocles dans
les Verrines de Cicéron 71, lorsqu’il se réfère à un nom assez commun
en Sicile d’après ses occurrences dans l’épigraphie de l’île 72. Ce flotte-
ment flexionnel présente un déroulement synchronique, qui nous donne
un aperçu de sa distribution fonctionnelle. Une désignation personnelle
attestée par une inscription de Sélinonte Ἀρχέ[κλ]ō εἰμὶ τοῦ Eὐκλέος,
d’après la lecture de R. Wachter 73, distribue la flexion en consonne dans
le prénom du père et la flexion thématique dans le nom du fils. Dans les

63. IGDS I, p. 200-201. 


64. Bechtel, HPN 315.
65. Citation de L. Dubois, IGDS I, p. 201, d’après une suggestion d’O. Masson. 
66. L. Agostiniani, « Greci e indigeni nella Sicilia antica », dans E.  Campanile (éd.),
Rapporti linguistici e culturali tra i popoli della Sicilia antica. Atti del convegno
(Pisa 6-7 ottobre 1989), Pise, 1991, p. 23-41.
67. L. Threatte, The Grammar of Attic inscriptions, II. Morphology, Berlin - New York,
1996, p. 8-15.
68. L. Agostiniani, op. cit., p. 512.
69. IGDS I, p. 125, 164, 169. 
70. IGDS I,, p. 70, 194. 
71. Cic., Verr. II 3,93 ; 4, 35 (Diocles : nom. sg.) ; II 5, 16 (Diocli : gén. sg.)
72. IGDS I, p. 127, 211 ; IGDS II, p. 95, 130.
73. R. Wachter, Non-Attic Greek Vase Inscriptions, Oxford, 2001, p. 201.
noms grecs en grande grèce et en sicile 179

lamelles en or de Thurii 74 le même nom (employé comme appellation de


divinité) figure au vocatif Eὖκλε, mais au nominatif Eὐκλῆς. De la même
manière, parmi les cinq occurrences du nom Διοκλῆς en Sicile, la seule
qui présente la flexion en -o se trouve au vocatif (Δίοκλε) 75. Une telle
distribution donne l’impression que la flexion en consonne se situe à un
niveau plus formel et respectueux, qui correspond, dans un cas, au patro-
nyme et, dans les autres, au nom mentionné (récit). En revanche la flexion
en -o figure dans des contextes énonciatifs comme, principalement, l’in-
terpellation de quelqu’un, l’invocation à une divinité, la marque de pro-
priété formulée par l’objet lui-même à la première personne.
Mais il existe d’autres légers indices d’une fonction morpho-
pragmatique reconnue à -klo en zone de contacts avec les langues indi-
gènes du sud de l’Italie. Il faut rappeler, d’abord, que les emprunts
osques des noms en -κλῆς, tels que les théonymes Eὐκλῆς et Ἡρακλῆς,
convergent vers la flexion en -o-, notamment Euklo- et Her(a)klo-. Le
latin aussi garde des traces de la flexion thématique du nom d’Hercule,
dans le génitif Herculī, à côté de Herculis, et dans le vocatif Hercle, plus
ancien et plus répandu dans la langue commune que Hercules 76. Mais à la
différence de Eὐκλῆς, pour lequel le type flexionnel Eὖκλoς, comme on
vient de le voir, est connu du grec d’Italie, la variante Her(a)klo- demeure
tout à fait étrangère à la grécité. La seule exception est une forme assez
étrange attestée par une glose attribuée à Sophron, dramaturge syracu-
sain : Ἡρύκαλον∙ τòν Ἡρακλέα Σώφρων ὑποκοριστικῶς 77. La glose est
intéressante, et pour la forme Ἡρύκαλον, dont la seule explication pos-
sible est une interversion de Ἡρακύλον qui met ce nom en rapport avec
celui d’Héraclès, et pour l’indication de la valeur hypocoristique (ὑπο-
κοριστικῶς). Les deux éléments se confortent mutuellement, parce que
la notion d’hypocoristique a trait à la coupure de l’élément suffixal, qui

74. G. Pugliese Carratelli, Les lamelles d’or orphiques (traduit de l’italien), Paris, 2003,
p. 102.
75. IG XIV 382a ; M. T. Manni Piraino, Iscrizioni greche lapidarie del Museo di
Palermo, Palerme, 1972, p. 125.
76. H. Rix, « I nomi delle figure dei miti greci nelle lingue dell’Italia arcaica. The first
Traces of Achilles and Hercules in Latin », dans J. Penney (éd.), Indoeuropean per-
spectives. Studies in honour of A. Morpurgo Davies, Oxford, 2004, p. 443.
77. Hesychius, s.v. Ἡρύκαλον (Schmidt), corrigé en Ἡρακύλον (Latte) = Sophr., fr. 142,
PGF, p. 176 (Kaibel) = fr. 134, CGF (Kassel-Austin) = Fr 134 (Hordern, cf. p. 190-
191, pour le commentaire).
180 paolo poccetti

admet deux solutions également plausibles. L’une est -υλο- qui permet
une double lecture : côté grec, ce suffixe sert en synchronie à la dériva-
tion des hypocoristiques dans le lexique (ex. ἄρκτος ~ ἄρκτυλλος, ἕρπος
~ ἕρπυλλος) et aux abréviations dans l’anthroponymie (ex. : Ἀστύλαος :
Ἄστυλλος ; Νικόλαος : Νίκυλλος) ; côté italique, ce suffixe avec varia-
tion de la voyelle pré-suffixale (-e/o-lo-) se charge de la même fonction,
comme le montrent les relations synchroniques Veraniolus : Veranius en
latin ; urnela : urna, en falisque, et Pakul : Pakis, en osque. L’identi-
fication du suffixe comme ‑κυλο- nous amènerait totalement, quant à
elle, dans la perspective italique, étant donné que ‑k(e/o)-lo- à fonction
hypocoristique y est productif et dans le lexique (ex. lat. paterculus,
munusculum par rapport à pater, munus, etc.) 78 et dans les noms propres
(ex. osque Steniklum derivé du prénom Stenis) 79. En conclusion, dans un
contexte influencé par le contact avec les parlers indigènes, la flexion thé-
matique -klo- (au lieu de -κλῆς) pouvait donner lieu à la réinterprétation
de cet ancien élément de composition comme suffixe à fonction hypo-
coristique se superposant à celui de l’italique ‑k(e/o)-lo-. De ce contexte
d’emploi s’est inspiré le commentaire de la glose qui nous a transmis le
fragment de Sophron.

5. Suffixes homologues entre grec


et langues italiques

Les langues italiques partagent avec le grec un certain nombre de suf-


fixes primaires hérités de l’indo-européen, qui sont directement impli-
qués dans la formation des noms de personnes. Le noyau le plus ancien
et le plus répandu est formé par les suivants : -yo-, -(V)lo-, -no-, -ōn-.
Des deux côtés, ces suffixes se présentent souvent en combinaison avec
d’autres éléments thématiques donnant lieu à des suffixations secon-
daires, dont la productivité et la distribution distinguent la Grèce de
l’Italie.
Comme l’a remarqué le dictionnaire de Pape-Benseler, le suffixe ‑yo-
est le morphème de dérivation le plus ancien et le plus commun dans
l’anthroponymie grecque, et il se prête à tirer des noms de personnes de
78. Cf. M. Leumann, Lateinische Laut- und Formenlehre, Munich, 1977, p. 306.
79. M. Crawford, ImIt Capua 33 ; pour l’interprétation du nom voir F. Murano, Le
Tabellae defixionum osche, Pise - Rome, 2013, p. 24.
noms grecs en grande grèce et en sicile 181

catégories diverses de noms propres (ex. Ἀπολλώνιος, Βοιώτιος, Ὀλύμ­


πιος) et du lexique (ex. Oὐράνιος, Δείνιος, Eὐμένιος). À la différence
des langues italiques, où -yo- s’est presque spécialisé dans l’anthropo-
nymie comme marque de gentilices, en grec ce suffixe sert le plus sou-
vent à former des ethnonymes, pour lesquels les langues de l’Italie ont
créé d’autres suffixes, notamment -āno-, -īno-, -ēno-, -(V̄ )t-. Dans l’eth-
nonymie grecque, l’emploi de -ιος est plus ancien et répandu que celui
d’autres suffixes (tels que -ευς, -της) comme le montrent les données du
mycénien et de la langue homérique 80. Autour du suffixe -yo- se sont
mises en œuvre deux sortes de convergences entre grec et langues ita-
liques, l’une ancienne, l’autre plus récente. Cette dernière est la réduction
de -ιος à -ις, en parallèle à celle de -ιον à -ιν, variation sub-standard du
grec parlé, qui en Sicile est précoce, comme nous le montre la quantité
des noms se terminant en -ις au nominatif, sur lesquels F. Cordano avait
déjà attiré l’attention à propos des tablettes de Camarina 81.
Il est vrai que la majorité de ces noms figure au génitif en -ιος, dont la
diffusion est connue dans le monde hellénique, indépendamment du dia-
lecte dorien, comme l’avait remarqué à plusieurs reprises O. Masson 82.
Mais à l’origine au moins d’un certain nombre de ces noms se trouve
la réduction de -ιος à -ις, point de départ de la superposition avec la
flexion des thèmes en -i-, comme nous le montre l’exemple de Διoνύ-
σιος (gen. sg.) dans l’inscription sépulcrale de Sélinonte Διoνύσιος τόδε
σᾶμα τỗ Σελίν[ιος] datant de la moitié du ve siècle av. 83. Dans ce cas le
point de départ de la réfection flexionnelle est manifestement l’abou-
tissement de Διoνύσιος à Διoνύσις au nominatif. Un traitement compa-
rable pourrait à bon droit être invoqué pour Ἀρίστις, également attesté
à la même époque à Sélinonte (Ἀρίστoδαμoς Ἀρίστιoς) 84, mais aussi
bien connu ailleurs. Sur les « malheurs » de l’accentuation de ce nom au
nominatif O. Masson a écrit un article, qui plaide en faveur de l’accen-
tuation proparoxytone Ἄριστις en rejetant Ἀρίστις, dont la présence chez

80. E. Risch, « Zur Geschichte der griechischen Ethnika », Museum Helveticum 14, 2
(1957), p. 63-74.
81. F. Cordano, Le tessere pubbliche dal tempio di Atena, Rome,1992, p. 45. 
82. Masson, OGS I, p. 205-209 ; 236-237 ; 345.
83. IGDS I, p. 74. 
84. IGDS I, p. 65. De même à Camarina F. Cordano, Le tessere pubbliche dal tempio di
Atena, p. 32. 
182 paolo poccetti

Pape-Benseler est considérée comme une erreur. Mais il n’exclut pas du


tout le croisement entre deux types morphologiques, notamment -ις et
-ιoς > -ις, bâtis sur l’élément de composition Ἀριστo- 85.
Quoi qu’il en soit, le même raisonnement pourrait être appliqué à
nombre d’autres noms attestés en Grande Grèce et Sicile, tels que, par
exemple, Λεόντις à Camarina (au nom.sg.) 86 et Morgantina (au gén.sg.) 87
par rapport à Λεόντιος ou Γνάθις à Locres. Ce dernier dans le corpus de
Locres est assez fréquent soit au nominatif (Γνάθις) soit au génitif (Γνα-
θιος) 88, alors que Γνάθιoς se rencontre ailleurs, comme Γνάθων, tous
issus de γνάθoς « mâchoire » 89.
Du point de vue synchronique les nominatifs en -ις de l’onomastique
personnelle se rapprochent de l’évolution normale du morphème -yo-,
typique des anthroponymes des langues sabelliques, tels que par ex.
Dekis, Pakis < Dekios, Pakios. Cet aboutissement est occasionnellement
attesté aussi en latin de l’époque républicaine, reflété par les graphies
Marci, Fouri, pour Marcius, Fourius 90.
Plus ancienne est la fusion et formelle et fonctionnelle de -yo- avec
les voyelles thématiques, dont la réanalyse a donné lieu à la productivité
de suffixes autonomes, tels que -αιος, -ειος. Le même développement
s’est déroulé dans les langues de l’Italie ancienne, où les aboutissements
de -ayo- et de -eyo-, sont bien connus dès l’époque archaïque. Ainsi des
suffixations comme lat. Annaeus, pel. Anaes (<  Anaios) et lat. Veno-
leius, osque Hereiis se mettent parfaitement en parallèle avec les couples
du type Ἀλκαῖος, Bιαῖος  et Ἡράκλειος, Ἀστεῖος. Plus rares sont -oyo-
et -uyo-, l’un mieux représenté en grec (ex. Παντοῖος, Γελῷος) qu’en
latin, tandis que c’est l’inverse pour l’autre (ex. Lat. Pacuvius ; osque
Pakkviis).

85. Masson, OGS I, p. 206.


86. IGDS I, p. 136. 
87. IGDS II, p. 129. 
88. L. Del Monaco, Iscrizioni greche d’Italia. Locri, Roma, 2013, p. 43, 56, 146. En
outre IG ΧIV 2401, l. 1-2. En outre F. Costabile, Municipium Locrensium, Naples,
1976, p. 73, A. Landi, Dialetti e interazione sociale in Magna Grecia, p. 332.
89. Bechtel, HPN 481.
90. Par ex. fréquemment parmi les épitaphes des ollae de la Vigna di S. Cesario à Rome :
CIL I2 1015-1201. Cf. J. Kaimio, « The Nominative Singular in -i of Latin Genti-
licia », Arctos 6 (1969), p. 23-42.
noms grecs en grande grèce et en sicile 183

La concurrence entre ces suffixes a produit des allomorphes de la


même base en latin, tels que les gentilices Annaius, Annaeus, Anneius,
Annius du latin et Heriis, Hereiis, Anies, Anaes de l’osque. Il vaut la peine
de souligner qu’un nom assez répandu en Grande Grèce et Sicile figure
alternativement sous les graphies Ἱστιαῖος et Ἱστιεῖος 91, formes rac-
courcies des composés Ἱστιόδωρος, Ἱστίαρχος, attestés dans les mêmes
régions 92. À Tarente à côté de Ἱστιαῖος 93 on trouve aussi Ἱστιήιος 94, ce
qui se rapproche des gentilices latins Histius et Isteius : remarquons à
ce propos qu’à l’époque hellénistique -ηιος sert à transcrire les genti-
lices italiques soit en -ius soit en -eius, comme nous le montrent les flot-
tements du type [Ο]ὐολόσιος / Ὀλόσσηιος (= lat. Volusius) 95 dans les
inscriptions de Délos au iie siècle a. C. Mais souvent il ne s’agit que
de variantes graphiques produites par l’homophonie développée par la
monophtongaison, comme le prouve une inscription bilingue où le nom
d’un même individu figure comme Alleius en latin et Ἄλλιος dans la
version grecque 96. Un indice de la convergence précoce entre les suf-
fixes grecs et italiques -ayo- et ‑eyo- nous est fourni par la concentration
remarquable de -αιος et ‑ειος dans les noms non grecs des imprécations
de Sélinonte : Ματυλαῖoς, Ναννελαῖος, Πυκέλειος 97, Μαμμαρεῖος 98. Il
est impossible de savoir si ces noms étaient déjà pourvus à l’origine de
ces suffixes ou bien s’ils les ont acquis dans le contexte d’immigration,
étant donné que d’autres noms italiques dans les mêmes textes ne les pré-
sentent pas du tout (Tίτελος, Ἀπελος, Ῥοτύλος, Ἀπόντιος). Par ailleurs
en Sicile ‑αιος et -ειος figurent dans les anthroponymes à la fois grecs

91. Les deux en Sicile : IGDS I, p. 182, 239.


92. IGDS II, p. 77, 95. 
93. IG XIV 668.
94. SEG XIX 620. Le même flottement de ce nom se retrouve à Héraclée, colonie de
Tarente : A. Landi, op. cit., p. 323.
95. J.-L. Ferrary, C. Hasenohr, M.-T. Le Dinahet, « Liste des Italiens de Délos », dans
C. Müller, C. Hasenohr (éd.), Les Italiens dans le monde grec (IIe s. av. J.-C.-Ier s.
apr. J.-C.). Actes de la table ronde de Paris (14-16 mai 1998), BCH Suppl., vol. 41,
Athènes, 2002, p. 183-239. En outre F. Rovai, « Notes on the inscriptions of Delos:
The Greek transliteration of Latin names », SSL 53 (2015), p. 163-185.
96. CIL I2 2235 ; Inscriptions de Délos 1771.
97. IGDS I, p.  50. Pour un commentaire onomastique voir O. Masson, La grande
imprécation de Sélinonte (SEG XVI, 573), BCH  96 (1972) p.  377-388 (OGS I,
p. 135-146).
98. IGDS I, p. 46.
184 paolo poccetti

(ex. Iστιαῖος / Iστιεῖος) 99 et non grecs (ex. Ραικαῖος / Ρακαῖος) 100 ou d’ori-


gine incertaine (Koρεῖος) 101.
L’autre suffixe homologue aux langues italiques et au grec est
‑(V)lo-, autour duquel se sont produites des interférences remarquables
dans les noms de personnes en milieu de contact. Ce suffixe contribue à
la formation d’une large partie du lexique, s’appliquant aux thèmes de
verbes, de noms, d’adjectifs, et se charge, par conséquent, de plusieurs
fonctions. À ce sujet, différences formelles et fonctionnelles séparent le
grec des langues italiques. En grec, la variation de la voyelle présuffixale
est subordonnée à la nature du thème nominal : par ex. παχυλός : παχύς ;
πέταλον : πετάννυμι ; δέελος > δῆλος : δέατo, avec des extensions analo-
giques au profit de -υλος ou de -ιλος (ἀρκτύλος, ὀργίλος) 102. Très proba-
blement l’iotacisme de /u/ a dû aboutir de bonne heure à la superposition
des deux suffixes, révélée par les flottements graphiques du type Στρο-
βύλος / Στροβίλος, d’où Στρoβιλίων 103. En revanche en latin et dans les
langues sabelliques, le timbre de la voyelle devant -lo- est phonétique-
ment conditionné, notamment par l’allophonie du /l/ devant voyelle
vélaire ou palatale, ce qui donne lieu à des variations synchroniques à
l’intérieur du latin (ex. Siculus : Sicilia) ou d’une langue à l’autre (ex. lat.
Siculus : gr. Σικελός ; lat. Poenulus : étr. Puinel). Les noms de personnes
sont assujettis à ce flottement, comme le montre le gentilice Venoleius,
auquel correspond Oὐενέληιος dans la version grecque d’une inscription
bilingue de Délos 104.
La fonction fondamentale de -(V)lo- dans les langues italiques est
celle de « marqueur d’appartenance » ; c’est de là que se sont développés
la valeur diminutive et d’autres effets de sens contextuels. Ainsi, parmi
les noms propres, le suffixe peut se charger d’une fonction individuali-
sante : par ex. Romulus désigne celui que sa relation avec le nom de Rome
identifie ainsi, de même que Volsculus, Poenulus désignent un individu
nommé sur la base des ethnonymes Volscus, Poenus. Au niveau textuel,
ce suffixe peut se charger de fonctions opposées, en étant investi d’une

99. IGDS I, p. 182, 239.


100. IGDS II, p. 144, 173.
101. IGDS II, p. 112.
102. Chantraine, Formation, p. 240-243.
103. Bechtel, HPN 605.
104. CIL I2 2238 ; Inscriptions de Délos 1770.
noms grecs en grande grèce et en sicile 185

connotation dépréciative (comme Graeculus par rapport à Graecus) ou


affective comme lorsque Cicéron appelle sa fille Tulliola ou lorsque
Veraniolus alterne avec Veranius dans le même texte de Catulle 105.
La productivité de ce suffixe dans l’onomastique latine est prouvée
par le nombre de gentilices se terminant par -ilius résultant de la com-
binaison de -(V)lo- et -yo. Mais ce suffixe est également répandu dans
l’anthroponymie osque, comme nous le montrent Paakul par rapport à
Pakis, Lukidel 106 par rapport à l’adjectif lucidus et Νύμμελος attesté par
une inscription provenant d’un site indigène de Lucanie 107. Significa-
tivement, ce suffixe est très commun dans les noms d’origine italique
connus en Sicile dès l’époque archaïque, comme les anthroponymes de
la « grande imprécation » de Sélinonte ci-dessus mentionnés : Tίτελος,
Ἀπελος, Ρότυλος et (avec cumulation des suffixes -e/o-lo- + -ayo-)
Ματυλαῖoς, Ναννελαῖος, Πυκέλειος. Ces noms, qui ne sont pas attestés
tels quels dans les langues d’Italie, se ramènent aisément à des bases
onomastiques bien connues grâce aux témoignages indirects de l’ono-
mastique étrusque : par ex. Tίτελος et Ρότυλος sont les formes italiques
à l’origine des prénoms étrusques archaïques Titele et Rutile, d’où sont
dérivés les gentilices Titelna et Rutelna 108. De la même manière la base
de Ματυλαῖoς se rapproche des gentilices étrusque Matulna et latin Mati-
lius (< Mat-e/ol-), alors que celle de Ναννελαῖος se superpose à celles
de l’osque Νανoνις, lat. Nanonius, reposant sur une racine Nan- élargie,
d’une part, par -e/ol- et, de l’autre, par -ōn-.
La caractéristique frappante de tous ces noms attestés à Sélinonte à
l’époque archaïque est le fait qu’ils partagent le même suffixe à varia-
tion vocalique, notamment -(e/o)lo-. En outre l’épigraphie de Sicile met
en évidence d’autres noms italiques (et plus spécifiquement sabelliques),
pourvus du même suffixe, qui ailleurs ne sont connus que dans leur
forme de base, tels que Εἴελος et Πάπελος, manifestement connexes aux

105. Catull. 12, 15-17 : miserunt mihi muneri Fabullus et Veranius haec amem necesset
ut Veraniolum meum et Fabullum.
106. O. Salomies, « Les prénoms italiques. Un bilan vingt ans après la publication de
Vornamen », dans P.  Poccetti (éd.), Les prénoms de l’Italie antique. Actes de la
journée d’études (Lyon, 26 janvier 2004), Pise - Rome, 2008, p. 24, 30.
107. M. T. Manni Piraino, « Iscrizioni greche di Lucania », PP 23 (1968), p. 451-452 ;
A. Landi, op. cit., p.288
108. C. De Simone, « I “rossi” in Etruria: il nome dei Rutuli », Incidenza dell’antico 4
(2006), p. 118-120.
186 paolo poccetti

gentilices de l’osque Heiis et Paapis 109, et à la base des gentilices latins


plus tardifs Heiuleius et Papuleius 110. Or leurs attestations précoces en
Sicile dans des textes officiels nous donnent l’impression que la diffu-
sion du suffixe -(e/o)lo- dans les noms indigènes a été stimulée par le
contact avec les homologues grecs ‑υλος et -ιλος. Mais l’état de la ques-
tion devient encore plus compliqué du fait que les suffixes à consonne
simple se croisent avec des variantes à consonne géminée, notamment
-υλλος et -ιλλος, qui ont parfois des origines différentes : c’est le cas, par
exemple, des noms en ‑υλλος résultant de l’abrégement des composés en
-λαος, tels que Θράσυλλος, Νίκυλλος issus de Θρασύλαος, Νικόλαος 111.
La gémination de la consonne est visiblement en relation avec le
déplacement d’accent : c’est ce qui distingue le type Ἀριστύλος de
Ἀρίστυλλος 112. En latin la nature de l’accent par rapport à la gémina-
tion consonantique est inverse : les paroxytons s’accompagnent de la
consonne géminée, alors que le proparoxytons ont la consonne simple.
Une telle distribution est manifeste parmi les cognomina 113, comme
dans les couples ‘Marculus / Mar’cellus, ‘Proculus / Pro’cella. Un autre
suffixe latin caractérisant les cognomina est -īllus qui en contexte de
contacts se superpose aisément au morphème grec -ιλος en convergence
avec -υλλος et -ιλλος. Mais en latin ces suffixes connaissent une distribu-
tion différente entre lexique et onomastique : -ellus monte en fréquence
dans le lexique, alors que -īllus se concentre plutôt dans l’anthropo-
nymie 114. Bref, le suffixe ’-ulus est au fur et à mesure remplacé par -éllus
dans le lexique de la langue quotidienne, tandis qu’il demeure dans les
formations anthroponymiques anciennes, où s’imposent les variantes à
voyelle longue -īllus (masc.) et -īlla (fém.). La diffusion de ces suffixes
en latin est favorisée par la montée des cognomina, parmi lesquels les
liens avec le vocabulaire sont constamment renouvelés. En effet les suf-
fixes du latin, d’une part, distinguent le lexique de l’onomastique (-ellus

109. O. Salomies, op. cit., p. 22, 31.


110. H. Solin, O. Salomies, op. cit., p. 91, 139.
111. Voir E. Locker, op. cit. ; M. Leumann, « Deminutiva auf -ύλλιον und Personennamen
mit Kennvokal υ im Griechischen », Glotta 32 (1953), p. 214-225.
112. Bechtel, HPN 73.
113. I. Kajanto, The Latin cognomina. Commentationes Humanarum Litterarum,
XXXVI, 2. Acta Scientiarum Fennica, Helsinki, 1965, p. 124-126 et 174.
114. I. Kajanto, op. cit., p. 124-126.
noms grecs en grande grèce et en sicile 187

~ -īllus) et, de l’autre, les fonctions des noms de personnes (-īllus, -īlla
pour les cognomina, ‑ilius pour les gentilices).
On ne s’étonnera pas que l’ensemble des suffixes ’-ulus, -éllus, -īllus
du latin se croise avec la série grecque -ύλος, -ίλος, ’-υλλος, ’‑ιλλος. Ce
croisement se manifeste du point de vue formel dans l’adaptation des
suffixes latins aux lois phonétiques du grec et, inversement, du point de
vue fonctionnel, dans l’adaptation des suffixes grecs aux fonctions des
noms dans le système de la dénomination romaine. C’est le cas déjà men-
tionné de Βάθυλλος, aboutissant à Batullus en tant que cognomen et à
Bathilius en tant que gentilice. Cette interférence entre -(V)lo- latin et ses
correspondants du grec dépasse les limites de l’anthroponymie, surtout
en Sicile et en Italie méridionale, où le contact avec le grec a été profond
jusqu’à l’époque byzantine. Les croisements entre -ύλος et ’‑υλλος, d’une
part, et entre -éllus et ’‑ελλος, de l’autre, se constatent aussi parmi les
emprunts lexicaux grecs au latin, par ex. lat. macéllum vs gr. μάκελλον,
lat. merulus vs gr. μέρουλα 115. Mais la rencontre des suffixes grecs avec
ceux des langues italiques dans les mêmes régions commence bien avant
la diffusion du latin : encore une fois le rayonnement dans l’onomas-
tique précède l’extension dans le lexique. Ainsi, le nom qui figure en
osque comme Paakul, Πακολ, aboutissant en latin au gentilice Pacilius
et aux cognomina Paculus, Pacilus 116, est écrit Πάκυλλος dans une ins-
cription de l’île de Pithécuses 117 datant du iiie siècle a. C. 118, tandis que
dans une tablette d’imprécation de Locres de la même époque 119 se ren-
contre Πακύλα 120. Dans la même tablette, outre le prénom grec mutilé
[.]ρυλλιδαν qui témoigne de l’emploi de la consonne géminée, figurent le
prénom osque Νουία 121 et son dérivé Νουίλα. Or une inscription de l’At-
tique à peu près contemporaine atteste la variante à consonne géminée :

115. F. Fanciullo, « Greco e romanzo in Sicilia e nell’Italia meridionale », dans


J. M.  Brincat (éd.), Languages of the Mediterranean, université de Malte, 1993,
p. 49-55.
116. O. Salomies, op. cit., p. 31.
117. IG XIV 894 ; LGPN 3a, p. 348.
118. L. Del Monaco, op. cit., p. 143.
119. L. Del Monaco, op. cit., p. 143-145.
120. Donnée ignorée par LGPN 3a.
121. O. Salomies, op. cit., p. 29.
188 paolo poccetti

Νόιλλα 122. Il s’agit bien du même nom, comme le confirme la présence


de l’ethnonyme, en l’occurrence Νόιλλα Καμπανή 123, qui indique une
origine osque. Donc Νουίλα à Locres et Νόιλλα en Attique ne relèvent
que des variations suffixales entre -ίλος et ’-ιλλος bâties sur le même nom
bien connu dans le répertoire osque Núvis 124. Ce type de variation s’est
produit en milieu de contact avec le grec, étant donné que cet anthropo-
nyme est attesté en osque avec le suffixe -ello- : Núvellum (gén.pl.) 125.
Significativement ses continuateurs latins sont les gentilices Novellius,
Novelledius et le cognomen Novellus 126, alors que *Novilius, *Novilus,
*Novulus demeurent inconnus. Par conséquent la comparaison entre
les couples Πάκυλλος / Πάκυλα et l’osque Paakul, lat. Paculus ou entre
Νουίλα / Νόιλλα et l’osque Núvellum, lat. Novellus, Novellius montre que
les adaptations au grec respectaient le vocalisme de la langue d’origine,
mais qu’elles étaient sujettes aux flottements entre -ύλος ~ ’-υλλος, -ίλος
~ ’-ιλλος respectivement, où la gémination consonantique était subor-
donnée au déplacement de l’accent. Un exemple inverse de la variation
-ίλος et ’-ιλλος se référant à un nom grec nous est fourni par Mυρτίλος
qui à Locres est attesté avec consonne géminée, Mύρτιλλος 127.
Dans une certaine mesure, les variations entre -ύλος ~ ’-υλλος, -ίλος
’~ -ιλλος affectent aussi -ελος ~ ’-ελλος. Ce dernier type est beaucoup
moins représenté et l’on peut soupçonner que ses attestations en Italie
du sud relèvent de l’influence des langues italiques, ce que signalerait
sa diffusion dans l’épigraphie de Sicile dès l’époque archaïque. Par
conséquent il nous semble difficile de séparer 128 les noms allomorphes
Mύσϙος et Mύσκων bien connus en Sicile 129 de Mύσχελος 130 connu par

122. Les règles d’accentuation grecque en présence de la consonne géminée imposent la


forme Νόιλλα, cohérente aussi avec la chute de /u̯ / intervocalique, au lieu de Νoῖλλα
adopté par l’édition des IG.
123. IG II2 8953. D’une manière surprenante LGPN 3a p. 330, prend en compte pour ce
nom la seule attestation de l’Attique en négligeant celle de la tablette d’imprécation
de Locres, considérée comme une correction pour Νoυία.
124. M. Lejeune, op. cit., p. 90.
125. ImIt. Capua 33. Sur l’interprétation et la fonction de ce nom voir M. Lejeune, op.
cit., p. 120.
126. W. Schulze, LE, p. 482.
127. De Locres, signalée par F. Costabile, op. cit., p. 74, note 11.
128. Pace L. Dubois, IGDS I, p. 71, qui exprime un avis différent.
129. Bechtel, HPN 492 ; LGPN 3a, p. 309.
130. IGDS I, p. 194.
noms grecs en grande grèce et en sicile 189

une inscription de l’arrière-pays de Géla avec aspirée hypercorrecte reflé-


tant le système phonologique indigène 131. Dans les sources littéraires ce
nom, attribué au fondateur de la ville de Crotone, figure avec consonne
géminée (Mύσκελλος) 132. Ce type d’interférence complique l’évaluation
de certains dérivés, en particulier dans les cas où un anthroponyme non
grec a été associé à une base grecque, comme l’osque Stenis < Stenios 133,
dont les graphies Σθένιος, Sthenius 134 manifestent la superposition avec
les noms composés sur σθένος 135. Or pour le nom Stenelus, attesté
dans une inscription latine de Pompéi 136, on hésitera entre l’identifica-
tion proposée par LGPN 3a avec Σθένελος 137, nom porté par des figures
mythiques, et un hypocoristique du prénom osque Stenis, notamment
*Stenelos > Stenel. Évidemment la forme grecque serait homophone des
formes osque et latine. Quant à l’attestation osque Steniklum, également
dérivée de Stenis, elle ne témoigne que de la pluralité de suffixes pour la
formation des hypocoristiques, comme dans les autres langues.
En ce qui concerne les suffixes en -no-, la colonisation grecque d’Italie
connaît une diffusion remarquable de -īno- dans l’onomastique, et son
expansion est comparable à celle de son homologue italique. Si d’une
manière générale, ce suffixe est commun à des régions diverses pour les
anthroponymes et, plus rarement, les théonymes (ex. Ἐλαειλῖνος) 138, la
diffusion tout à fait remarquable de -īno- dans la dérivation des noms
ethniques est, quant à elle, caractéristique de la Grande Grèce et de la
Sicile. Les ethnonymes en -īno-, qui font leur apparition dès le début de la
documentation, s’appliquent aux noms des colonies les plus importantes
d’aires dialectales différentes (ex. Ἀκραγαντῖνος, Ταραντῖνος, Ῥηγῖνος)
et de sites mineurs tels qu’en Sicile les Mακελλῖνοι, Πετρῖνοι, Πιακῖνοι,
Κυτατταρῖνοι, connus par les décrets d’Entella, ou issus d’hydronymes
(ex. Λάμητος ποταμός, ἐν δὲ Λαμητῖνοι) 139. Les grammairiens anciens
131. Voir ci-dessus, p. 178, n. 70.
132. Diod. Sic. VIII 17 ; Strab. VI 1, 12 ; 2, 4 ; VIII 7,5 : Bechtel, HPN 492.
133. O. Salomies, op. cit., p.35.
134. Voir O. Salomies, Die römischen Vornamen. Studien zur römischen Namengebung,
Helsinki, 1987 (Commentationes Humanarum Litterarum 82), p. 92.
135. HPN 389-399.
136. CIL IV 8534.
137. LGPN 3a, p. 392
138. IGDS I, p. 127.
139. Hecat., fr. 89 Nenci.
190 paolo poccetti

avaient reconnu ce suffixe de type « sicule », comme nous l’enseignent


Hérodien et Étienne de Byzance, en mentionnant Ἀμβρακῖνος comme
dérivé du toponyme Ἀμβρακία, employé par l’historien de Syracuse
Philistos à la place de Ἀμβρακιώτης ou de Ἀμβρακιεύς : Φίλιστος δὲ
Ἀμβρακῖνος φησὶ Σικελικῷ τύπῳ 140. Comme ce suffixe se présente fré-
quemment, certes, en concurrence avec d’autres, dans la formation des
ethnonymes des langues sabelliques, l’influence de ces langues dans sa
propagation chez les Grecs paraît tout à fait vraisemblable 141.
En outre, la vitalité de cet outil morphologique pour marquer la rela-
tion, l’appartenance même dans le lexique du grec parlé en Sicile nous est
prouvée par les fragments d’Épicharme et de Sophron, où ‑īno- s’applique
à des termes grecs donnant lieu à des formations inédites ailleurs, comme
παλλακῖνος pour désigner les fils d’une παλλακή « concubine  » 142 ou
Λογῖνα pour désigner l’épouse du Λόγος 143. Dans ce dernier cas (Λόγος :
Λογῖνα), la relation d’appartenance véhicule d’une manière simultanée
la distinction de genre, tout comme dans les couples du lexique latin
gallus : gallīna ; rex : regīna : dans cette fonction, comme l’a observé
P. Chantraine, « ce suffixe ne se rencontre qu’à l’état de survivance » 144.
À partir de ces prémisses il semble difficile de séparer la produc-
tivité de -ῖνος en Sicile et en Grande Grèce de l’influence des langues
locales, même si ce suffixe est connu ailleurs en grec dans la dérivation
lexicale et anthroponymique 145. Ces influences, qui vraisemblablement
ont rayonné dans une certaine mesure hors de l’Italie du sud, contribuent
à esquisser l’histoire de ce suffixe en grec. Il vaut la peine de citer ici
P. Chantraine : « l’histoire du suffixe -īno-/-īna- est compliquée. On y
distingue essentiellement un type indo-européen populaire, qui a servi
surtout à constituer des sobriquets, des noms d’animaux, etc. […] Mais
ce suffixe indo-européen semble s’être rencontré avec une finale -īno-,
140. Steph. Byz. 85, 3 s.v. Ἀμβρακία = Herod. 3,2 (891,16) = FGH 556, fr. 62 Jacoby
141. Ainsi déjà J. Wackernagel, « Zu den lateinischen Ethnika », ALL 14, 1906, p. 1-24 et
E. Risch, op. cit., p. 63. En revanche on ne peut pas retenir l’affirmation de P. Chan-
traine, Formation, p. 205-206, selon laquelle « les ethniques en -ῖνος qui appa-
raissent assez tard […] sont souvent d’origine latine ».
142. Etym. Gud. :< Παλλακῖνος>, παρὰ τῷ Σώφρονι τὸ ὄνομα δηλοῖ δὲ τὸν πάλλικα ἢ τὸν
τῆς παλλακῆς υἱόν.
143. Athen., Deipn. 8, 201, 17 : τοιαῦτα δὲ καὶ Ἐπίχαρμος παίζει, ὥσπερ ἐν Λόγῳ καὶ
Λογίνᾳ.
144. Citation de Chantraine, Formation, p. 205.
145. E. Locker, op. cit., p.73.
noms grecs en grande grèce et en sicile 191

d’origine méditerranéenne, qui s’observe surtout dans les noms d’objets,


de plantes d’animaux et avec un type de féminin en « -ιννα » 146. La diffu-
sion de -īno- en grec d’Italie n’a pas été sans conséquences sur l’histoire
de ce suffixe dans l’ensemble du monde grec. Quant à son emploi dans
l’anthroponymie, les données de Sicile font constater l’association parti-
culière avec certains éléments, en alternance avec d’autres suffixes : ainsi
Πύρρος, d’où Πύρριχος, Πυρρίας et Πυρρῖνος 147, Λύκος, d’où Λυκίσκος
et Λυκῖνος, Φίλo-, d’où Φίλων, Φίλιος, Φιλῖνος 148. Parmi ces noms,
signalons un lien spécial de Πυρρῖνος avec le milieu indigène, rendu
manifeste par deux occurrences dans des dénominations personnelles en
union avec un nom non grec, en fonction de patronyme (Ἄπελος Πυρ-
ρίνου) 149 et inversement (Πυρρῖνος Πυτίκκα) 150. En parallèle au grec,
dans les langues italiques -īno- est productif pour la dérivation d’anthro-
ponymes à partir d’autres noms, spécialement les noms théophores, tels
qu’en osque Κερρινομ du nom de la déesse Cérès, Μαμερτῖνος du nom
de Mars, en ombrien Nurtins de Nurtia (déesse et toponyme). C’est dans
ce sillage que s’inscrit la fortune de -īno- dans la formation des cogno-
mina en latin jusqu’à l’époque tardive, où la relation d’appartenance
ou de parenté a joué un rôle primordial, ex. Agrippa : Agrippīna ; Mar-
cellus : Marcellīnus, etc. 151. Mais d’une manière générale, les variations
suffixales dans les anthroponymes de Sicile esquissent un système mor-
phologique comparable au modèle italique, où le seul moyen de dériva-
tion pour former des noms à partir d’autres noms est l’interchangeabilité
des suffixes : autour de ce système pivote la formation des gentilices et
des cognomina du latin et des langues italiques, par ex. Pacius, Paci-
lius, Pacidius, Paconius ; osque Húsidiis, Húsinies ; Aadiriis : Aadirans ;
Minis : Minatos > Minaz.

Pour finir, le dernier suffixe commun au grec et aux langues ita-


liques dans la formation des noms de personnes est -ōn-, bien connu de
146. Citation de Chantraine, Formation, p. 205
147. IGDS I, p. 59, 61 ; IGDS II, p. 185.
148. IGDS I, p. 65, 114, 207, 211 ; IGDS II, p. 127, 162.
149. IGDS II, p. 142. 
150. IGDS II, p. 102 : c’est la signature apposée sur le monument de Castiglione di
Ragusa.
151. Voir M. Niedermann, « Notes sur le cognomen latin », dans Mélanges A. Ernout,
Paris, 1940, p. 267-276.
192 paolo poccetti

la grammaire comparée, sur lequel on n’insistera pas. Le fonctionnement


synchronique de ce suffixe est d’indiquer que la personne est caracté-
risée par une qualité en relation avec l’élément lexical sous-jacent 152. De
ce fait, -ōn- a une valeur individualisante, qui se prête aisément à la pro-
duction ininterrompue des noms de personnes, prénoms ou sobriquets.
Ainsi, Γνάθων, Γάστρων sont issus de substantifs γνάθος, γαστήρ tout
comme en latin Nasōn-, Cicerōn-, de nasus et cicer, alors que Φείδων ou
Catōn- se mettent en relation avec les adjectifs φειδός et catus respecti-
vement, se distinguant de la flexion thématique parce qu’ils ont la pro-
priété d’indiquer qu’un individu a la qualité d’être, pour l’un, « modéré »,
pour l’autre, « astucieux ». Mais ‑ων se trouve aussi en relation avec les
thèmes en ‑υς (ex. Γλύκων, Δάσων vs γλυκύς, δασύς) 153, se mettant ainsi
en concurrence avec -υλ(λ)ος (ex. en Sicile θρασύς : Θράσων 154 vis-à-
vis de βραχύς : Βράχυλλος 155), mais aussi en relation avec d’autres bases
thématiques 156, ce qui a contribué à sa diffusion.
Indépendamment de sa fonction de base qui explique le rôle de -ōn-
dans la formation de noms de personnes, la distribution de ce suffixe en
grec se distingue de celle qu’il a dans les langues de l’Italie ancienne.
Le système de l’onomastique latine et sabellique reposant sur le noyau
bimembre, prénom et gentilice, a mis à l’écart la flexion en nasale, dont il
ne reste que des débris, comme dans les prénoms Petro(n), Pompo(n) 157.
Mais les formes en -ōn- se retrouvent à la base de nombreux gentilices à ter-
minaison -ōnius (sabellique -unis), issus de la combinaison de -ōn- et -yo-.
Très souvent les gentilices en -ōn-yo- se ramènent à des doublets à flexion
thématique, comme Pompius de Pompo- distinct de Pompōn- impliqué
par Pompōnius. De la même manière, la langue vénète garde des traces
d’anthroponymes en -ōn- qui alternent avec la flexion en -o, se cumulant
à d’autres suffixes 158, en parallèle avec les autres langues italiques. En
latin le suffixe -ōn- reprend sa vitalité parmi les cognomina, où il occupe
la première place dans la période la plus ancienne 159, tandis que plus tard
152. Chantraine, Formation, p. 161.
153. OGS I, p. 22.
154. IGDS II, p. 95, 144.
155. IGDS II, p. 105.
156. OGS II, p. 493.
157. O. Salomies, Die römischen Vornamen, p. 85-86.
158. M. Lejeune, Manuel de la langue vénète, Heidelberg, 1974, p. 49-50.
159. I. Kajanto, op. cit., p. 118
noms grecs en grande grèce et en sicile 193

il fusionne souvent avec d’autres (ex. Fronto > Frontonianus ; Capito >
Capitonianus), suivant la tendance de l’époque impériale à l’élargisse-
ment suffixal, pour la création d’autres noms (ex. Martianus > Martia-
ninus ; Maecenas > Maecenatianus), qui parfois masquent la suffixation
d’origine, comme Frontinus issu de l’haplologie de *Frontōnīnus 160.
En grec, la flexion en -ōn- demeure solide et productive sans conta-
mination avec d’autres suffixes, et se charge de fonctions différentes.
Très souvent le suffixe se retrouve dans les hypocoristiques tirés de noms
composés (ex. Ἀρίστων, Δάμων, Πράτων, en relation avec les composés
de Ἀριστo-, Δημo-, Πρωτo- etc. 161) : une telle propriété confère à -ων le
statut de suffixe dérivationnel pourvu de la même fonction que d’autres
(tout comme -ιος, -ῖνος, -ιχος, -ίας -ιλος, -υλος, etc.). En outre, la com-
binaison avec d’autres suffixes ne le prive pas de son autonomie flexion-
nelle : en effet sa fusion avec -yo- se déroule dans le sens inverse des
langues italiques, puisqu’il aboutit à -ίων qui devient de plus en plus pro-
ductif, alors que -ώνιος, -όνιος ne relèvent que de l’influence des langues
italiques. En tant que suffixe nouveau, ‑ίων se développe à partir de deux
fonctions de base, celle de patronyme (ex. Κρονίων « fils de Κρόνος »
en concurrence avec -ιος et -ίδης) 162, et celle de sobriquet à valeur dépré-
ciative, comme Ὡττικίων (= ὁ Ἀττικίων « cet espèce d’Attique » chez
Aristophane) 163. Le comique athénien, dans le même contexte, met
à l’épreuve la manipulation synchronique des noms entre suffixation
et composition par la création d’ Ἀττικωνικοί, qui évoque à la fois les
adjectifs en -ικός et les composés de νίκη 164. Son emploi, encore relati-
vement rare dans l’anthroponymie plus ancienne, connaît une diffusion
énorme à partir de l’époque hellénistique, comme nous le montre son
rayonnement en Grande Grèce et Sicile : dans l’épigraphie des colonies
eubéennes et ioniennes, on n’en connaît qu’un seul exemple (Fοινίων)
datant du ive a. C. 165, et un seul (Σιμυλίων) datant du iiie, dans les colo-
nies achéennes 166 ; en Sicile aucun exemple n’est antérieur au ive, mais
160. M. Niedermann, art. cit., p. 269.
161. HPN 73, 130 et 387.
162. Chantraine, Formation, p. 165.
163. Aristoph., Paix 214.
164. Voir P. Chantraine, « La linguistique grecque et l’interprétation des textes », RPh 43
(1969), p. 203.
165. IGDGG I, p. 92
166. IGDGG II, p. 114.
194 paolo poccetti

la majorité écrasante se concentre au cœur du iie, et presque toutes dans


le même texte 167.
En revanche, dans les langues de l’Italie ancienne ce suffixe a connu
une diffusion remarquable, qui est considérable parmi les cognomina
latins, où -iōn à l’époque impériale devient bien plus commun que ‑ōn 168.
Les progrès de la diffusion de ce suffixe observés dans l’épigraphie de la
Grande Grèce et de Sicile pendant les deux derniers siècles avant notre
ère sont confirmés par ses reflets dans les langues d’Italie. En osque, par
exemple, on trouve le nom Tryhpíu 169 transcription maladroite de Τρυ-
φίων 170. En fait ce nom semble inconnu du grec 171, tandis que Τρύφων
figure dans tous les volumes du LGPN. Il s’agit, donc, d’une formation
italique per le biais d’éléments grecs : l’exclusion de Τρυφίων du réper-
toire LGPN 3a est donc justifiée, même si incohérente par rapport au
critère normalement suivi, qui est de prendre en compte d’autres noms
attestés uniquement par les épigraphies non grecques de l’Italie du Sud.
Ce suffixe est attesté aussi en étrusque dans des noms empruntés au grec,
comme Zerapiu (Σεραπίων), Ataiun (Ἀκταίων), Uprium (Ὑπερίων) 172.
Mais c’est en latin que -iōn se développe le plus en élargissant ses
fonctions et dans l’emploi pragmatique et dans le renouvellement du
répertoire onomastique sous l’influence du grec 173. Dans l’anthropo-
nymie ce suffixe garde l’ancienne fonction de patronyme, comme le
montre le nom de Καισαρίων attribué au fils de César et de Cléopâtre
ou de Cinnamio porté par les fils d’un Cinnamus 174. Le développement
de cette fonction patronymique se constate dans les dénominations com-
munes dans le monde gréco-romain : ainsi par ex. de Primus et Secundus,

167. IGDGG I, p. 211 ; IGDGG II, p. 94-95 (texte du iie a. C.) et 156.
168. I. Kajanto, art. cit., p. 120.
169. ImIt Capua 33.
170. R. Lazzeroni, « Contatti di lingue e culture nell’Italia antica: elementi greci nei
dialetti italici », SSL 12 (1972), p. 6.
171. D’après la recherche dans les site http://epigraphy.packhum.org/ la seule forme qui
pourrait se rapprocher de Τρυφίων, compte tenu de l’incertitude de la lecture de la
voyelle suffixale, serait Τρύφιο̣[ν] Ἀλεξάν̣[δρου]. Tit. Cam. Supp. 225,168n.
172. C. De Simone, Die griechischen Entlehnungen im Etruskischen, Wiesbaden, 1970,
II, p. 133.
173. L’influence du grec a été soulignée par M. Leumann, Lateinische Laut- und Formen-
lehre, op. cit., p. 364, alors que I. Kajanto, op. cit., p. 121, incline à la nuancer.
174. I. Kajanto, loc. cit. Et voir ici la note de Jaime Curbera consacrée à ce nom.
noms grecs en grande grèce et en sicile 195

employés comme anthroponymes, ont été dérivés Πριμίων à Rhégion 175


et Σεκουνδίων à Locres 176.
En somme à l’époque romaine -iōn est devenu un suffixe outil ser-
vant à tirer des noms de n’importe quelle base et n’importe quelle langue,
comme le prouve le nom de Trimalchio, protagoniste du Satyricon, un
nom hybride composé du terme sémitique pour désigner le « roi », qui
se prête à la fois à l’interprétation de « celui qui est né de quelqu’un qui
est roi trois fois » et à celle de « trois fois petit roi (= roi vaurien) » 177.
La valeur dépréciative dont ce suffixe peut se charger est confirmée
par l’emploi chez Cicéron de la forme Rufio adressée à quelqu’un qui
porte le nom Rufus 178. Rappelons, à ce propos, que le poète Catulle, son
contemporain, utilise dans la même fonction le suffixe -(V)lo- bâti sur le
même nom (Rufulus) 179. De son côté, -iōn renchérit sur le sens péjoratif
de -(V)lo- se rajoutant à celui-ci, aboutissant à la forme Graeculio chez
Pétrone 180, qui renforce la valeur injurieuse et méprisante exprimée par
Graeculus 181. Mais on trouve aussi trace de la valeur affective en tant que
résultat du croisement avec le suffixe -ιoν, révélée par certains textes épi-
graphiques. Dans une épitaphe de Rome le nom grec Φιλημάτιον porté
par la défunte est transcrit Philematium dans la partie en poésie, alors que
dans le titre en prose figure Philematio : Aurelia L.l. Philematio Viva Phi-
lematium sum, Aurelia nominitata 182. Cette variation semble confirmer
la confusion dénoncée par la Rhetorica ad Herennium entre les terminai-
sons -tiōn et -tius / -tium dans la langue parlée 183. Le même type de varia-
tion entre la partie poétique et celle en prose d’une inscription funéraire
est offert par une épitaphe trouvée à Pételia près de Crotone, se référant à

175. SEG 39, 1062 ; L.  D’Amore, Iscrizioni greche d’Italia. Reggio Calabria, Rome,
2007, p. 58.
176. IG XIV 625 ; SEG 40, 841.
177. S. Priuli, Ascyltus. Note di onomastica petroniana, Bruxelles, 1975 (Latomus 140),
p. 39.
178. Cic., Mil. 60 : « heus tu Rufio » verbi causa « caue sis mentiare ». En outre, Cic., ad
Att. 5, 22 : Rufio noster […] hunc hominem parum gratum quisquam putet.
179. Catull. 59, 1.
180. Pétr., Sat. 76, 10 : mathematicus, qui venerat forte in coloniam nostram, Graeculio,
Serapa nomine, consiliator deorum.
181. F. Biville, Cicéron, le grec, art. cit., p. 255.
182. CIL I2 1221.
183. Rhet. ad Her. 3, 21 à propos de la confusion entre le syntagme domum itio et le nom
Domitius.
196 paolo poccetti

un enfant décédé à l’âge de cinq ans 184. Le nom du défunt figure comme


Κέλαδος dans l’épigramme en grec, tandis que dans la formule du titre
latin son nom est pourvu du suffixe -iōn en fonction diminutive ou affec-
tive : Celadioni grex Ionici pantomimi. Vix(it) an(nis) V. Ce texte nous
fournit la preuve de la superposition synchronique entre les suffixes -iōn
(< -ίων) et -ium (< -ιον), phénomène commun aux milieux bilingues de
la Grande Grèce et de Rome 185. D’une manière générale, les avatars de
ce suffixe anthroponymique peuvent être considérés comme un miroir de
la symbiose du monde gréco-romain.

Références bibliographiques

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184. Publiée par M. L. Lazzarini, « Pantomimi a Petelia », Arch. Cl. 55 (2004), p. 363-
372.
185. Au sujet du bilinguisme (grec-osque puis grec-latin) de ce site de la Grande Grèce
des origines à l’âge romain, voir P. Poccetti « Bilingues Bruttaces. Il plurilinguismo
di una città della Magna Grecia attraverso i suoi testi : il caso di Petelia », dans
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Hellénisation par suffixation :
noms non grecs et suffixes grecs

Dan Dana
CNRS, ANHIMA (UMR 8210)

P
artout où les contacts entre Grecs et d’autres populations 1 sont
mieux documentés par des sources écrites (inscriptions, papyrus),
on peut observer la manière dont des interactions onomastiques 2
se sont mises en place, notamment au niveau micro-régional, si l’abon-
dance des séries onomastiques le permet. De tels phénomènes d’enrichis-
sement sont la suffixation de noms non grecs à l’aide de suffixes grecs
ou l’hellénisation d’anthroponymes étrangers 3. Cette enquête se pro-
pose de rendre compte de cette appropriation mutuelle, car ces anthro-
ponymes, appartenant par leurs éléments à deux registres onomastiques
à la fois, jouent un rôle de passerelle entre des groupes qui coexistent et
1. Les mots indigènes ne seront pas accentués dans cet article, à l’exception de ceux
qui sont munis d’un suffixe grec, conformément aux principes exposés par Robert,
Noms indigènes, p. 319 n.  5. Voir aussi Masson, OGS II, p. 499 et L. Dubois,
Inscriptions grecques dialectales de Sicile. Contribution à l’étude du vocabulaire
grec colonial, Rome, 1989, p. xiv. Inversement, W. Clarysse, « Greek Accents on
Egyptian Names », ZPE  119 (1997), p.  177-184, préfère appliquer les règles de
l’accentuation grecque.
2. Dans le monde romain, voir, entre autres, M. Dondin-Payre et M.-T. Raepsaet-
Charlier (éd.), Noms, identités culturelles et romanisation sous le Haut-Empire,
Bruxelles, 2001 ; M. Dondin-Payre (éd.), Les noms de personnes dans l’Empire
romain. Transformations, adaptation, évolution, Bordeaux, 2011. Pour les noms
thraces, voir l’étude de D. Dana, « L’impact de l’onomastique latine sur les ono-
mastiques indigènes dans l’espace thrace », dans ce dernier recueil, p. 37-87 (avec
la bibliographie). Pour le domaine grec et l’« Orient grec », voir les recueils récents
de E. Matthews (éd.), ONW et de R. Parker (éd.), PNAA.
3. Inversement, voir l’étude de G. van Heems dans ce recueil, sur l’adaptation des
anthroponymes grecs à l’étrusque, et celle de P. Poccetti, sur la morphologie des
anthroponymes grecs en contexte de contacts (Grande Grèce et Sicile).
202 dan dana

se mélangent, témoignant ainsi d’acculturations en cours ou plus géné-


ralement de modes régionales et d’évolutions sur la longue durée. On
peut ainsi répertorier des noms illyriens, thraces, micrasiatiques, syriens,
égyptiens (nombreux dans les papyrus), et bien entendu latins, qui ont
connu une suffixation grecque aboutissant à l’enrichissement des stocks
onomastiques régionaux.
En parallèle avec le passage en revue de plusieurs suffixes, plus fré-
quents ou plus rares, quelques pistes de réflexion seront prises en compte :
♦♦ Le genre : cette suffixation touche-t-elle davantage les noms mas-
culins que les noms féminins ?
♦♦ Le type du suffixe et sa valeur (hypocoristiques ? formes péjora­
tives ?) 4.
♦♦ La chronologie et les éventuels effets de mode.
♦♦ Le statut socio-culturel des porteurs de ces noms hybrides.
Lors de la présentation des noms non grecs pourvus de suffixes grecs,
je prendrai comme échantillon-témoin l’onomastique thrace, qui est mon
domaine de recherche (§ 1-2), mais je donnerai également des exemples
provenant d’autres ensembles onomastiques en zones de contact (§ 3-4).
En effet, quelques dizaines de noms thraces inclus dans le récent répertoire
Onomasticon Thracicum (paru en 2014) présentent des formes helléni-
sées et latinisées. Les formes hellénisées peuvent résulter d’une transfor-
mation / substitution d’un élément onomastique ‒ par exemple, des noms
thraces en -πορις sont parfois transcrits en grec en -πολις 5 ‒, ou, le plus
souvent, d’un processus de suffixation et dérivation.
Je précise d’emblée que je préfère m’en tenir aux graphies rencon-
trées dans les sources primaires (épigraphiques et papyrologiques) et
laisser de côté les variantes données par les sources littéraires, où, le plus
souvent, l’hellénisation est secondaire et tardive 6.

4. À propos de la notion de dérivation hypocoristique dans l’onomastique, voir


L. Dubois dans l’introduction de ce volume.
5. Tels Αυλουπολις, Κετρ(ε)ιπολις, Διζαπολις, Διλοπολις, Δορυπολις, Μοκαπολις,
Ρασκουπολις (cf. OnomThrac 274). Pour un autre stock onomastique, voir R. Schmitt,
« Greek Reinterpretation of Iranian Names by Folk Etymology », dans ONW, p. 135-
150.
6. La bibliographie existante sur ce sujet a été souvent victime d’une approche maxi-
maliste (sur la base du répertoire de D.  Detschew, Die thrakischen Sprachreste,
Vienne, 1957), soit en prenant de nombreux noms non thraces pour des noms
thraces, soit en exagérant l’influence grecque ; voir K. Vlahov, « Zur Frage der
hellénisation par suffixation 203

1. Noms thraces : suffixes masculins

Étant donné que les noms masculins sont généralement mieux attestés
que les noms de femmes, on connaît davantage d’anthroponymes mas-
culins construits avec des suffixes grecs ‒ ce qui risque de fausser les
statistiques.

1.1. -ίων
Le suffixe hypocoristique -ίων (lat. -io) 7 apparaît dans *Bithio, ?Βοον-
γίων, Δεγιστίων, Durisio, Σπαρτοκίων, Σουσίων, Syrio/Συρίων, Τορ-
κίων. À cette liste, il convient d’ajouter Paebion (*Παιβίων) 8. Voir
OnomThrac 197.

1.2. -αρίων
Un suffixe complexe, -αρίων (lat. -ario), qui semble une  variante
élargie du suffixe ‑ίων 9 et créé très vraisemblablement sur le modèle de
‑άριον (voir § 2.2), est attesté dans *Διζαρίων, Δινταρίων, Δουλαρίων,
Σουσαρίων. À cette liste, il convient d’ajouter Βιθαρίων, anthroponyme
attesté uniquement en Égypte, qui est sans doute un hypocoristique

Gräzisierung thrakischer Personennamen (Αβλουπορις : Αβλουπολις, Εβρυζελμις:


Αβροζελμης) », ŽAnt 15 (1965), p. 39-44 ; Id., « Der Grad des Einflusses der grie-
chischen Sprache auf die thrakische », Linguistique balkanique 16 (1972), p. 19-21 ;
et, avec les mêmes exagérations, le chapitre « Latinisierte und gräzisierte thrakische
Personennamen » de V. Beševliev, Untersuchungen über die Personennamen bei
den Thrakern, Amsterdam, 1970, p. 38-46, en particulier, p. 43-44. Voir en général
Dana, OnomThrac (« Introduction »).
7. Dans le domaine latin, voir I. Kajanto, The Latin Cognomina, Helsinki, 1965,
p. 120-122 ; F. Gaide, « Les substantifs masculins latins en -(i)ō, -(i)ōnis. Étude syn-
chronique », dans C. Kircher-Durand (éd.), Grammaire fondamentale du latin, IX.
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Dudley (MA), 2002, p. 311-312. Sur l’emploi anthroponymique du suffixe -ίων, voir
S. Minon, « Anthroponymes en Ἀμφ(ι)- et en -αρ(ι)- : de Ἀμφιάρης à Ἀμφαρίο̄ν »,
RPh 84 (2010), p. 308-309.
8. Cf. R. Hernández Pérez, « Paebion: un antropónimo de origen probablemente tracio
en una inscripción romana de Hispania », ZPE 197 (2016), p. 283-286.
9. Sur l’emploi anthroponymique du suffixe -αρίων, voir S. Minon, art. cit., p. 310.
Masson, OGS I-II, p. 443, remarquait sa popularité à l’époque impériale.
204 dan dana

de Βιθυς, le nom thrace le plus populaire 10. Voir Dana, OnomThrac 9


(-αρίων, -ario).
Ce phénomène de suffixation hypocoristique touche toutes les régions
de l’espace thrace : ainsi, la Macédoine Orientale (*Διζαρίων, Δουλαρίων,
Τορκίων), la Bithynie (Δινταρίων, Σουσαρίων, Σουσίων), l’espace daco-
mésien (Δεγιστίων). Il affecte également d’autres noms thraces ailleurs
que dans l’espace balkanique : plusieurs occurrences de Σπαρτοκίων /
Σπαρτακίων sont connues au Nord de la mer Noire, dans le Royaume
du Bosphore. Dans ce cas particulier, il s’agit d’hypocoristiques épicho-
riques dans ce royaume septentrional, dirigé par plusieurs rois appelés
Spartokos (d’évidente origine thrace), d’où le nom de la dynastie des
Spartocides. Ils servent aussi à marquer la loyauté dynastique, à l’instar
de la fréquence du nom Φαρνακης dans le Royaume du Pont, à partir
du nom des rois Pharnace, et de la popularité extraordinaire du dimi-
nutif Φαρνακίων au Nord de la mer Noire, dans un espace hellénophone
et iranophone (LGPN 4) ; de même, il suffit de penser à la popularité de
Ἄτταλος en Asie Mineure, dans le domaine d’influence du royaume atta-
lide (LGPN 5a), y compris par le diminutif Ἀτταλίων (LGPN 5a), et à la
fréquence du nom Πτολεμαῖος et de ses dérivés en Égypte, étudiée jadis
par O. Masson 11. Le même diminutif apparaît dans un catalogue éphé-
bique d’Athènes (IG II² 1011, col. II 102, en 107-106 a. C.) : Σπαρτοκίων
Ἀπολλωνίου Βερενικίδης. Remarquons qu’il appartenait au dème Bereni-
kidai de la nouvelle tribu Ptolemaïs.
Fort heureusement, une épitaphe de la seconde moitié du iie p. C. de
Thessalonique (SEG 51, 777), qui donne les noms des membres d’une
même famille, permet de surprendre la dérivation / variation onomastique
dans le même groupe familial 12 : Κλευπὼ Τορκου Τορκίωνι τῷ ἀνδρὶ
καὶ Μωμω Δέντωνος ἡ μήτηρ αὐτοῦ καὶ Τορκος καὶ Δράκων τῷ πατρὶ
αὐτῶν μνήμης χάριν. Ce mélange onomastique, qui n’a rien d’étonnant
dans cette région, comporte des noms macédoniens (l’hypocoristique
Κλευπώ), des noms thraces dont un père Τορκίων et un fils Τορκος, ainsi
qu’un nom latin de consonance thrace (Δέντων).

10. D. Dana, Onomasticon Thracicum ‒ Supplementum (OnomThracSuppl), version 4,


janvier 2017 (en ligne : http://www.anhima.fr/IMG/pdf/onomthracsuppl), s.v.
11. O. Masson, « Quand le nom Πτολεμαῖος était à la mode », ZPE 98 (1993), p. 157-
167 (= OGS III, p. 149-159).
12. Cf. également Δαζίσκος et Δαζος dans la même famille (§ 1.5). 
hellénisation par suffixation 205

Ce suffixe -ίων est le plus fréquemment utilisé pour l’hellénisation


des noms non grecs, dont d’innombrables noms latins (voir ci-dessous)
et des noms indigènes ; il suffit de mentionner le diminutif Κανκαρίων
(SEG 28, 1137, Euménée en Phrygie), à partir du nom phrygien Καν-
καρας (LGPN 5a, Miletoupolis, iie a. C.).

1.3. -ων
Ce suffixe masculin 13 apparaît dans Β(ε)ίθων / Bitho, dont deux des
trois occurrences sont externes (Dana, OnomThrac 40) : à Rome (lat.
Bitho) et à Athènes, avec la dérivation à l’intérieur de la même famille,
dans un catalogue éphébique du iie p. C., parmi les epengraphoi (Βειθυς
Βείθωνος) (LGPN 2, 176 p. C.).

1.4. -ᾶς
Un autre suffixe hypocoristique est -ᾶς (du type Διογᾶς, Ζηνᾶς, Ἡρᾶς,
Πτολεμᾶς) 14. Ce suffixe n’est attesté pour le moment que dans la famille
des noms théophores bâtis sur le nom de la déesse Bendis, l’Artémis
thrace. On connaît ainsi, à l’époque impériale, deux occurrences de l’an-
throponyme Μενδᾶς à Byzance et à Cyzique (Dana, OnomThrac 29 et
213). Il s’agit très probablement d’un hypocoristique du nom théophore
Μενδίδωρος (< Βενδίδωρος), ou d’autres noms de la même famille (e.g.
Βενδιφάνης), avec le flottement b/m, qui est connu dans l’espace thrace
et dans cette même famille onomastique 15.

1.5. -ίσκος
Un autre suffixe hypocoristique, -ίσκος (cf. Μενίσκος, Παρμενίσκος),
est peut-être présent dans le nom *Διζασκος (Διζασσκος), si l’exemple est
pertinent. Dans un autre domaine onomastique, on peut citer un exemple
plus probant, celui de l’hypocoristique messapien Δαζίσκος (LGPN 3a,
Azetium, 185 a. C.), à partir du nom de facture illyrienne Δαζος : par un
heureux hasard, l’épigraphie délienne nous renseigne sur deux donateurs
13. Sur l’emploi anthroponymique du suffixe -ων, voir S. Minon, art. cit., p. 309-310.
14. Sur la typologie des noms en -ᾶς, cf. l’étude de L. Dubois dans ce recueil.
15. Ainsi Μενδις et Μενδίδωρος, ou le sanctuaire Mendidium/Μενδίδειον (présentant
la nasale initiale).Voir en général O. Masson, « Les noms théophores de Bendis en
Grèce et en Thrace », MH 45 (1988), p. 6-12 (= OGS I-II, p. 605-611).
206 dan dana

d’Azetium en Apulie, au début du iie a. C. (198 et 173 a. C.) : Δαζίσ-


κος Δαζου Ἀζαντῖνος et Δαζος Δαζίσκου Ἀζαντῖνος 16. Cela permet donc
d’observer la dérivation / variation à l’intérieur de la même famille 17.

2. Noms thraces : suffixes féminins

On constate une gamme importante de suffixes pour les noms de femme,


qui semblent avoir été plus affectées par les créations hypocoristiques.

2.1. -ιον
Le suffixe  hypocoristique -ιον, souvent évoqué par O. Masson 18,
forme des péjoratifs, des diminutifs, des hypocoristiques, avec une
notion d’affectivité, de « petite chose » : Βένδιον (Dana, OnomThrac 31,
Thrace Égéenne) est le diminutif d’un nom simple identique à un théo-
nyme (Bendis) 19.

2.2. -άριον
Du suffixe précédent résulte, avec un élargissement, -άριον  (et, sur
ce modèle, le masculin ‑αρίων ?) 20, le nom féminin Σευθάριον (Dana,
OnomThrac 311), qui est une création d’Égypte 21, dérivée du nom thrace
très populaire Σευθης.
16. J. Tréheux, Inscriptions de Délos. Index. I. Les étrangers, à l’exclusion des Athé-
niens de la clérouchie et des Romains, Paris, 1992, p. 35 (ID 380, 396, 424, 439,
442, 445, 455, 465, 1432). Sur l’onomastique illyrienne, voir plusieurs études réu-
nies dans P. Cabanes (éd.), Grecs et Illyriens dans les inscriptions en langue grecque
d’Épidamne-Dyrrhachion et d’Apollonia d’Illyrie. Actes de la table ronde interna-
tionale (Clermont-Ferrand, 19-21 octobre 1989), Paris, 1993, en particulier C. De
Simone, « L’elemento non greco nelle iscrizioni di Durazzo ed Apollonia », p. 42-45
(sur les suffixes, mais il exagère l’influence grecque).
17. Ce même radical a occasionné l’hypocoristique *Δαζίων en Illyrie, cf. Δαζείων
(LGPN 3a, époque impériale).
18. Voir Masson, OGS III, p. 96-97.
19. Cf. l’étude morphologique et sémantique de ce suffixe par F. Réveilhac dans ce
recueil.
20. Comme l’avait expliqué O. Masson (OGS III, p. 156-157), « le suffixe secondaire
-αρίων (…) s’est probablement développé à partir de l’ancien neutre en -άριον
(noms de femmes) ».
21. Ces créations locales s’expliquent par la présence de nombreux clérouques et
d’autres militaires d’origine thrace établis dans le royaume lagide.
hellénisation par suffixation 207

2.3. -οῦς
Le suffixe hypocoristique -οῦς (Dana, OnomThrac 383) apparaît dans
Βενδοῦς (Thasos), Μαντοῦς (Macédoine orientale), Σευθοῦς (Égypte) 22.
Ce dernier nom est une autre création hypocoristique en Égypte, sur
Σευθης, avec le suffixe -οῦς, particulièrement fréquent en Égypte (voir
ci-dessous). Ce type d’hypocoristiques et de sobriquets masculins et
féminins en -οῦς, à partir de la moisson considérable offerte par le tome 4
du LGPN, a été récemment analysé par L. Dubois 23.

2.4. -αροῦς
Avec un élargissement, le suffixe précédent apparaît sous la forme
‑αροῦς : Μανταροῦς (Dana, OnomThrac 209, Thasos). Cette dérivation
n’a rien d’étonnant dans la région, puisqu’on connaît en Macédoine les
hypocoristiques féminins Ζωσαροῦς et Τυχαροῦς 24.
À propos de ce type de noms, L. Dubois notait que « le suffixe ‑αροῦς
strictement féminin semble avoir pris le relais du suffixe -αρώ (féminin
du masc. -αρος) et fonctionne comme une variante du suffixe neutre de
nom de femme -άριον ». Il a même permis l’intégration de noms d’ori-
gine iranienne, sarmate ou scythe au Nord de la mer Noire (les noms
masculins Μασταροῦς et Συβλιαγοῦς). Ailleurs, il fut ajouté à des radi-
caux indigènes ou à des Lallnamen asianiques, mais aussi latins, ira-
niens et sémitiques : f. (?) Μιθροῦς (Cilicie), f. Ταταροῦς (Lycie), f.
Δομναροῦς (Pisidie), m. Γερμανοῦς (Galatie) ; enfin, les noms de femme
Ἀβδοῦς, Δομνοῦς et Μαγνοῦς en Syrie 25.

2.5. -ώ
Le suffixe féminin -ώ est attesté pour un nom de consonance grecque,
Μαντώ (nom grec mythologique) : on le rencontre en Macédoine orien-
tale (LGPN 4 et Dana, OnomThrac 209-210), précisément dans les

22. Un autre exemple de ce nom est connu à Kaunos, voir la relecture du catalogue
I. Kaunos 38 (iie a. C.), dans D. Dana, « Notices épigraphiques et onomastiques II »,
ZPE 190 (2014), p. 153-154, no 15.B : [ὑ]πὲρ Σευθοῦτος τῆς θυγατρός.
23. L. Dubois, « Des anthroponymes en -ους », dans Onomatologos, p. 398-421.
24. Je reviendrai sur ce suffixe plus loin, pour l’Égypte (§ 4).
25. L. Dubois, art. cit., p. 402, 404-405 et 412.
208 dan dana

régions où le nom féminin indigène le plus populaire est Μαντα / Manta


(qui reprend le nom d’une déesse).

2.6. -αρώ
Avec élargissement du suffixe précédent (ou par la féminisation du
suffixe masculin ‑αρος) on rencontre ‑αρώ : Μεσταρώ (Dana, Onom-
Thrac 214, Thessalie), sur la racine thrace mest-, très fréquente en Macé-
doine orientale. C’est un augmentatif connu pour des noms grecs de la
région ou d’ailleurs (Lycaro, Τυχαρώ) 26.

3. Noms latins

Jusqu’à présent, j’ai donné une présentation sommaire des suffixes


grecs sur la base du stock onomastique thrace. Dans le cas d’autres noms
indigènes (anatoliens, sémitiques, égyptiens), la dérivation par suffixation
grecque est mieux documentée. Pourtant, ce sont les noms latins qui ont été
le plus affectés par ce phénomène, pour des raisons historiques évidentes.
Les siècles d’intégration du monde grec dans l’Empire romain ont assez
tôt favorisé l’adoption et l’adaptation des noms latins. Non seulement le
monde balkanique et l’Asie Mineure étaient parsemés de colonies latines et
même d’enclaves latinophones (comme Philippes de Macédoine) 27, mais
les différents aspects de la domination romaine ont naturellement influencé
les stocks onomastiques régionaux, ce qui s’est traduit par l’adoption cou-
rante d’idionymes latins : ainsi, des praenomina, nomina (gentilices) et
cognomina furent utilisés comme idionymes (ce phénomène est tout aussi
banal dans les provinces occidentales), et comme cognomina dans le cas
des citoyens romains. La foule de Γάϊος, Κόϊντος et Μᾶρκος apparaît ainsi
d’une banalité parfaite en Asie Mineure et dans l’ensemble de l’Orient
grec, avec l’observation que ce sont plutôt les couches moyennes et popu-
laires qui semblent priser cette onomastique qui « faisait Romain » 28.
26. À ajouter, dans la région, Μυσταρώ à Apollonia, augmentatif de Μύστα (Kalindoia)
(M. B. Hatzopoulos, BE, 2015, 446).
27. Voir C. Brélaz, « La langue des incolae sur le territoire de Philippes et les contacts
linguistiques dans les colonies romaines d’Orient », dans F. Colin, O. Huck et
S. Vanséveren (éd.), Interpretatio. Traduire l’altérité culturelle dans les civilisations
de l’Antiquité, Paris, 2015, p. 371-407.
28. Et qui font penser, en contexte contemporain et français, aux innombrables Kévin et
Jessica.
hellénisation par suffixation 209

Or, l’usage généralisé de noms latins a encouragé des dérivations et


des suffixations en accord avec les modes régionales, ces noms étant
perçus comme appartenant aux stocks onomastiques locaux. Voici
quelques suffixes accolés aux noms latins :
♦♦ -ᾶς : Λεπιδᾶς, Λουκᾶς, Ποπλᾶς, Ῥουφᾶς (à partir de Lepidus,
Lucius, Publius, Rufus), etc., discutés à plusieurs reprises par L.
Robert 29.
♦♦ -ίδης  (le banal adjectif dérivé patronymique) : un exemple très
intéressant est celui de Ἰουλιάδης sur la côte égéenne de l’Asie
Mineure (Phocée et Priène, LGPN 4 ; Milet, LGPN 5b) 30. On pour-
rait plutôt penser à un phénomène de collision entre Iulius / Iulianus
et le nom théophore épichorique Οὐλιάδης (LGPN 5b) 31.
♦♦ -ιλλος : Φούσκιλλος (Athènes, IG II² 2024, l. 104, début du
iie p. C.).
♦♦ -ιχος : la graphie Δομέστιχος (pour le nom latin Domesticus / Δομε-
στικός) est attestée dans plusieurs régions du monde grec (Athènes,
Béotie, Macédoine, Théra, Éphèse), et fait apparaître un suffixe
fréquent en Béotie 32.
♦♦ -ων : Γαίων (= Gaio), en Égypte 33.
♦♦ -ωνᾶς (type Θεωνᾶς) : Βασσωνᾶς, Γαιωνᾶς, Σεργωνᾶς  34.
♦♦ -ώ : Μαρκώ (Thasos), Φαυστώ (Chypre) 35.
♦♦ -άς : Λουκιάς, dérivé de Lucius avec un suffixe féminin grec, ou
encore Αἰλιάς, Ἀντωνιάς, Αἰμιλιάς, Παυλάς, Τερτιάς, etc. 36.

29. L. Robert, « Inscriptions de Didymes et de Milet. Ire partie », Hellenica XI-XII


(1960), p. 475 (Ποπλᾶς) ; Robert, Noms indigènes, p. 221-222 (Λεπιδᾶς, nom latin
accommodé à la grecque) ; voir aussi J. et L. Robert, BE, 1963, 82 (Ῥουφᾶς).
30. Voir H. Solin, « Analecta Epigraphica », Arctos 35 (2001), p. 203, qui ajoute le nom
d’un vir clarissimus, écrivain du vie s. (Planciades), et celui de Scipiades dans la
littérature latine, pour un membre de la famille des Scipions.
31. Sur sa famille, cf. O. Masson, « Le culte ionien d’Apollon Oulios, d’après des
données onomastiques nouvelles », JS (1988), p. 173-183 (= OGS III, p. 23-31).
32. Voir, en dernier lieu, F. Marchand, « Rencontres onomastiques au carrefour de
l’Eubée et de la Béotie », dans N. Badoud (éd.), Philologos Dionysios. Mélanges
offerts au professeur Denis Knoepfler, Genève, 2011, p. 359-362.
33. H. Solin, « Analecta Epigraphica », Arctos 46 (2012), p. 202.
34. Pour la formation, voir H. Solin, « Analecta Epigraphica », Arctos 38 (2004), p. 184.
35. H. Solin, « Analecta Epigraphica », Arctos 35 (2001), p. 198 et 207.
36. Sur le système et la diffusion des noms féminins à suffixe -(ι)αδ-, voir la contribution
de A. Alonso Déniz dans ce recueil.
210 dan dana

♦♦ -ής : Τατιανής, Φλαουιανής 37.


♦♦ -ίς : Gentianis, Lucianis, Φλαβιανίς 38.
♦♦ -ισσα : Ἰούλισσα (Anazarbe, LGPN 5b).
Deux de ces suffixes, -ᾶς et -ίων, dominent largement pour les noms
masculins dérivés de noms latins. Au Nord de la Grèce, ils sont bien nom-
breux, comme on peut le constater grâce aux index inverses du LGPN 4 :
♦♦ -ᾶς : Λουκᾶς, Πουπλᾶς, Πριμιγᾶς (tiré de Primigenius, abrégé
comme dans le cas des noms grecs composés), Σεβηρᾶς (de
Severus), Σουλπᾶς (tiré du gentilice Sulpicius).
♦♦ -ίων : Βαρβατίων, Βιταλίων, Δομνίων, Καπιτίων, Κερβίων, Κου-
αρτίων, Κουϊντίων, Λογγίων, Μαρκίων, Πριμίων, Προκλίων,
Ῥουφίων, Σεκουνδίων, Σουπερίων, Σπουρκίων, Φαυστίων.
En Asie Mineure, surtout dans les régions de contact, le phénomène
d’hellénisation des anthroponymes indigènes par suffixation grecque est
peu documenté avant l’époque impériale, puisqu’on connaît un nombre
réduit d’inscriptions. Sous l’Empire, en revanche, on constate la latini-
sation par suffixation des noms grecs et asianiques (dont le désormais
célèbre suffixe -ianus) 39, ainsi que l’hellénisation des noms indigènes.
Citons ainsi le suffixe -ον, dans la série des Lallnamen indigènes : Δάδιον,
Μάτι(ο)ν, Πάπι(ο)ν, Τάτι(ο)ν, Τατάσιον, Τατάριον.
Ce sont pourtant les noms latins qui ont été massivement enrichis par
suffixation grecque. Le dépouillement de l’index inverse du LGPN 5a
fournit la liste la plus longue pour -ίων, qui apparaît donc comme le suf-
fixe le plus productif dans ces régions 40 : Αὐρηλίων, Βασσίων, Γεμελ-
λίων, Δομνίων, Καπιτίων, Κοϊντίων, Κορνουτίων, Λουκίων, Μαρκίων,

37. Voir J. et L. Robert, BE, 1959, 411 (Τυχής, Ζωτικής, Ὀνησιμής), qui souligne une
« particularité linguistique bien attestée et enregistrée (…) à l’époque impériale,
notamment en Asie Mineure » ; H. Solin, « Analecta Epigraphica », Arctos 46
(2012), p. 202.
38. H. Solin, « Analecta Epigraphica », Arctos 47 (2013), p. 286.
39. Étudié par T. Corsten, « Names in -ιανός in Asia Minor. A Preliminary Study », dans
Onomatologos, p. 456-463.
40. I. Kajanto remarquait à juste titre : « There is some evidence that the suffix -io was
not exclusively Latin. As the popular Greek suffix -ίων was transcribed in Latin
as -io Greek nomenclature may have contributed to the popularity of -io in Latin
cognomina » (op. cit., p. 121-122). Si les exemples de Communio, Dominio, Felicio,
Primio, Romanio, Vitalio, etc., sont ambigus, Bassion est, par sa terminaison, de
formation clairement grecque (CIL VI 25663).
hellénisation par suffixation 211

Νιγρίων, Οὐαλεντίων 41, Πρινκιπίων, Προκλίων, Ῥουφίων, Σενεκίων,


Σερουιλίων, Φαυστίων, Φηλικίων, etc. ; dans le LGPN 5b  (liste
sélective) : Μαρκίων, Πριμίων, Σεκουνδίων.
Dans sa chronique annuelle consacrée aux cognomina nouveaux et
rares 42, H. Solin a magistralement exploité les créations anthropony-
miques des provinces hellénophones. En voici une liste qui n’est pas
exhaustive, avec des suffixes que j’ai déjà mentionnés : Ἀγγουλᾶς,
Ἁδρίας, Ἀκκεπτοῦς, Ἀκουτᾶς, Ἀντωνᾶς, Αὐρηλιάς, Βενουστίων
(= Venustio), Γαιᾶς, Γεμελλίων, Γεμινίων, Δεκμίων, Δομιτιάς, Δομνοῦς,
Ἰουλίας, Καίστιλλος (du gentilice Caestius), Καπιτᾶς, Καπιτίων,
Κοδρατίων, Κομιτᾶς, Κομιτοῦς, Κορβουλίων, Κορνᾶς, Λουπαρίων,
Μαρκελλάς, Μαρκελλίων, Μαρκώ, Μουνδίων, Νεμωνᾶς, Νιγερίων,
Οὐαλεντᾶς, Οὐαλεριάς (et Βαλεριάς), Πλωτιάς, Πλωτινάς, Ποπλᾶς (et
Ποῦπλας), Πωλλάς, Πωλλιττᾶς, Πριμάς, Πριμιγᾶς, Πριγκιπίων, Που-
πλίων, Σεβηρᾶς, Σεργίων, Σεργοῦς, Σεργωνᾶς, Τερτιάς, Τιβεριάς, Τρι-
βουνᾶς, Φαβατίων, Φαυστάς, Φαυστώ, Φλακκίων, Φούσκιλλος.
Signalant des innovations et la formation de nouveaux noms à l’aide
de suffixes grecs productifs, sur des racines latines pures (Λουκᾶς,
Ποπλᾶς), H. Solin remarquait que ce suffixe très productif -ᾶς fut utilisé
même à Rome, dans un milieu purement latin 43. Or, il reste également
très productif pendant l’Antiquité tardive (e.g. Ἰουστινᾶς, Πετρωνᾶς,
Τριβουνᾶς), puisqu’à cette époque la suffixation grecque de noms latins
continue, voire s’intensifie. Voici quelques exemples tirés, pour la Macé-
doine, du corpus de D. Feissel 44 : Barbatio (no 203, Thessalonique), Κερ-
βίων (no 9, Edessa), Σπουρκίων (no 208, Héraclée des Lyncestes) 45 ; avec

41. Attesté à Iconion, cf. J.-L. Ferrary, Les mémoriaux de délégations du sanctuaire
oraculaire de Claros, d’après la documentation conservée dans le fonds Louis-
Robert, II, Paris, 2014, no 123.
42. H. Solin, la série « Analecta Epigraphica » dans la revue Arctos. 
43. H. Solin, « Ancient Onomastics: Perspectives and Problems », dans A. Rizakis (éd.),
Roman Onomastics in the Greek East. Social and Political Aspects, Athènes, 1996,
p. 8 (avec l’exemple du nom Κανδιδᾶς). Voir en outre ses deux monographies GRSN
et GPNR.
44. D. Feissel, Recueil des inscriptions chrétiennes de Macédoine du IIIe au VIe siècle,
Athènes, 1983.
45. Cet hypocoristique est particulièrement intéressant, non seulement parce qu’il est
dérivé du latin spurcus, mais aussi parce qu’on rencontre dans la même région
Stercorius (dans la même famille, les noms Stercorius, Stercoria et Stercorilla) et des
noms grecs en Κοπρ-, dans la série des « copronymes » étudiés jadis par O. Masson,
212 dan dana

un autre suffixe, Αὐξεντᾶς (dérivé d’Auxentius) en Palestine et Βονιφᾶς


en Sicile (de Bonifatius) 46.
Qui plus est, certains noms latins peuvent retourner d’Orient sous une
forme hellénisée 47. H. Solin citait, dans les sources latines, à Rome et
en Italie, le fréquent Marcion (à la place de Marcio), qui retourne donc
avec le suffixe grec -ίων. C’est par ailleurs le nom de Marcion du Pont,
le fameux hérésiarque des marcionites, originaire de Sinope.

4. Noms égyptiens

Une documentation privilégiée est fournie par les papyrus d’Égypte,


en particulier pour l’époque impériale 48. C’est ici que foisonnent des
hypocoristiques théophores à partir des noms divins égyptiens, notam-
ment pour les anthroponymes féminins : Ἀνουβίων (et Ἀνουβίαινα),
Θαυβάριον, Θερμουθάριον, Τασουχάριον, Ὡρίων. Je laisse de côté le
dossier plus riche des noms théophores bâtis sur Isis et Sarapis, étudié
par W. Clarysse et M. Paganini 49, qui soulignent que ces noms théo-
phores grecs (Ἰσίδωρος, Σαραπίων, etc.) ne sont pas portés, durant les
premiers siècles, par des indigènes, mais par la population hellénophone
d’Égypte, et qu’il s’agit en réalité de noms grecs d’Égypte. Dans une
étude récente 50, L. Dubois avait souligné la productivité du suffixe -οῦς
en Égypte, surtout pour les noms féminins, bâtis sur des radicaux grecs
ou égyptiens, dont les théonymes égyptiens 51. Ces dérivés féminins ‒ le
type tardif de Δημητροῦς, pour citer O. Masson 52 ‒, sont particulièrement

« Nouvelles notes d’anthroponymie grecque. XIV. De Κοπρεύς à Κοπρία et Saint


Coprès : noms copronymes », ZPE 112 (1996), p. 147-150 (= OGS III, p. 260-263).
46. D. Feissel, Chroniques d’épigraphie byzantine 1987-2004, Paris, 2006, nos 751 et
1058.
47. H. Solin, Ancient Onomastics, op. cit., p. 9.
48. J’ai utilisé la base de données Trismegistos (www.trismegistos.org).
49. W. Clarysse et M. Paganini, « Theophoric Personal Names in Graeco-Roman Egypt.
The Case of Sarapis », AfP 55 (2009), p. 68-89.
50. L. Dubois, « Des anthroponymes en -ους », dans Onomatologos, p.  398-421, en
particulier p. 416-417.
51. Avec la flexion locale -οῦς, -οῦτος, bien documentée grâce à la présence des
métronymes dans les papyrus.
52. O. Masson, « Quand le nom Πτολεμαῖος était à la mode », ZPE 98 (1993), p. 163
(= OGS III, p. 155) ; dans BE, 1990, 809, il attirait l’attention sur ces noms féminins
relativement tardifs en -οῦς, type particulièrement fréquent dans l’Égypte romaine.
hellénisation par suffixation 213

fréquents en Égypte – ou plutôt mieux attestés grâce à la documentation


papyrologique d’époque impériale.
Voici trois catégories de ces noms suffixés, si populaires en Égypte,
avec le suffixe complexe ‑αροῦς :
♦♦ Des théophores grecs : Ἀθηναροῦς, Ἀμμωναροῦς, Ἰσαροῦς,
Λεονταροῦς, Παναροῦς.
♦♦ Des hypocoristiques grecs, dont certains bâtis sur des anthropo-
nymes macédoniens, héritage de l’époque lagide : Ἀμυνταροῦς,
Δημαροῦς, Κλευπαροῦς, Λυκαροῦς, Νεικαροῦς, Νειλαροῦς, Πιν-
δαροῦς, Πλουταροῦς, Πρωταροῦς, Πτολλαροῦς, Σωταροῦς.
♦♦ Des théophores et d’autres hypocoristiques bâtis sur des racines
égyptiennes : Διδαροῦς, Θαυβαροῦς, Ιναροῦς, Νινναροῦς, Ταστα-
ροῦς.
Pour ne citer qu’une seule famille onomastique, sur le nom de la divi-
nité Bès on a créé de nombreux hypocoristiques grecs : Βησᾶς, Βησίων,
Βησοῦς, et surtout Βησαρίων. Ce dernier nom fut porté, entre autres, par
le saint Bessarion de Scété, anachorète en Égypte (ive p. C.), d’où une
relative popularité dans le milieu monastique byzantin, jusqu’au célèbre
cardinal Bessarion.
Toujours en Égypte, notons les hypocoristiques Ἀβδίων et Ζαβδίων
(sémitiques) et Βιηγχίων (égyptien, cf. Βιηγχις), qui font pendant à Μαλ-
χίων, fréquent dans l’espace syrien 53.

5. Formation et contexte

Pour la formation de nouveaux noms par suffixation  (avec ou sans


élargissement), je prends des exemples tirés de l’espace thrace :
a) À partir de noms simples :
Διζας → *Διζαρίων (Δισζαρίων)
Διντας → Δινταρίων
Δουλης → Δουλαρίων
Μαντα → Μαντοῦς → Μανταροῦς (avec élargissement)
Σουσας → Σουσίων → Σουσαρίων a (avec élargissement)
Τορκος → Τορκίων
a.  On possède ici les deux cas de figure.

53. Cf. également en Syrie le plus rare Αζιζίων (LBW 2413o, Kenakir).
214 dan dana

b) Des suffixations différentes sur la même racine :


*Βενδᾶς (Μενδᾶς)
Βενδ- → Βένδιον ← Μενδίδωρος (< Βενδίδωρος)
Βενδοῦς
*Διζαρίων (Δισζαρίων)
Διζ- →
*Διζασκος (Διζασσκος)
Μαντώ
Μαντα → Μαντοῦς
Μανταροῦς

La suffixation affecte principalement des noms simples ou des racines,


mais aussi quelques composés : Σπαρ-τοκ-ίων.
Ce type de formation, banal dans les régions où les noms indigènes
furent enrichis par suffixation grecque (comme l’Égypte), commence à
être mieux attesté pour l’onomastique thrace d’époque impériale, grâce à
l’accroissement de la documentation épigraphique. Dans les espaces de
(longue) tradition hellénique, comme la Thrace égéenne, la Macédoine
orientale et l’île de Thasos, on rencontre à l’époque impériale de nom-
breux anthroponymes thraces avec des suffixes grecs, preuve d’une adap-
tation de l’onomastique indigène à l’onomastique grecque : Βενδοῦς,
*Διζαρίων, Δουλαρίων, Μανταροῦς, Μαντοῦς, Μαντώ (pour Μαντα),
Μεσταρώ, Syrio / Συρίων, Τορκίων (voir § 1 et § 2).
Qui sont les noms ou les racines thraces enrichis par suffixation
grecque ? De préférence, et sans surprise, ce sont les anthroponymes
indigènes les plus populaires, en général (Βιθυς, Διζας, Σευθης), ou dans
une région donnée, comme la Macédoine orientale, qui fournit la moitié
des exemples (Δουλης, Μαντα, Τορκος).
Si l’on mettait les occurrences de noms thraces pourvus de suffixes
grecs sur une carte (fig. 1), il ressort que les occurrences se concentrent
dans les régions où la présence grecque était ancienne et importante, avec
plus d’interactions entre les Grecs et les indigènes (Thasos et la Thrace
égéenne 54, Macédoine orientale, Propontide). Parmi les occurrences
externes, si l’on laisse de côté le cas cosmopolite d’Athènes et celui par-
ticulier du royaume du Bosphore, la visibilité de l’Égypte s’explique par
l’héritage onomastique familial des clérouques thraces 55.
54. Voir la monographie de M.-G. G. Parissaki, Prosopography and Onomasticon of
Aegean Thrace, Athènes, 2007.
55. Voir V. Velkov et A. Fol, Les Thraces en Égypte gréco-romaine, Sofia, 1977 ;
J. Bingen, « Les Thraces en Égypte ptolémaïque », Pulpudeva 4 (1983), p. 72-79
hellénisation par suffixation 215

Fig. 1. — Noms thraces avec suffixes grecs (en gris) ; Δηλόπτιχος (en noir).

Quant à la chronologie, les premières attestations sont d’époque hellé-


nistique et en nombre limité (quatre) ; même dans ce dernier cas il s’agit
par deux fois de noms à connotation dynastique, comme Σπαρτοκίων.
Toutes les autres occurrences sont d’époque impériale, comme pour la
plupart des noms anatoliens, égyptiens ou autres, enrichis par une suf-
fixation grecque, dont la foule de noms latins.
Le statut social des porteurs de ces noms suffixés est connu dans très
peu de cas, si l’on se limite aux personnes de l’espace thrace, mais la
plupart sont évidemment de naissance libre. Plus intéressant est le fait
que ces noms apparaissent en combinaison avec des noms thraces, grecs
et latins 56. On peut surprendre parfois la dérivation à l’intérieur de la
(= Id., Hellenistic Egypt. Monarchy, Society, Economy, Culture, Édimbourg, 2007,
p. 83-93) ; D. Dana, « Les Thraces dans les armées hellénistiques : essai d’histoire
par les noms », dans J.-C. Couvenhes, S. Crouzet et S. Péré-Noguès (éd.), Pratiques
et identités culturelles des armées hellénistiques du monde méditerranéen. Helle-
nistic Warfare 3, Bordeaux, 2011, p. 87-115. 
56. Épitaphe d’Imeros (territoire de Maronée, IThrAeg 379, avant 212 p. C.) :
Ἀλέξανδρος Ταρουλου ὁ καὶ Βέβιος, Βένδιον Ῥούφο(υ), (Ζ)ώσιμος Ταρουλο(υ) ;
épitaphe de Chalcidique ou de Thessalonique (G. Mendel, Catalogue des sculptures
216 dan dana

même famille : Τορκος et Τορκίων, Βιθυς et Β(ε)ίθων. Dans la plupart


des cas, lorsqu’on est renseigné sur l’onomastique de la famille de ces
porteurs de noms avec une suffixation grecque, il s’agit évidemment de
milieux d’origine indigène ‒ et, en Égypte, de Gréco-Égyptiens, sou-
vent issus de la classe métropolitaine, qui leur permettait l’accès au gym-
nase. Néanmoins, dans toutes les régions hellénisées on peut observer, à
l’époque impériale, une onomastique profondément mélangée, qui puise
dans les stocks onomastiques grec, latin et indigène, avec des adaptations
et des créations locales, reflétant aussi bien les multiples influences que
la continuité des traditions indigènes 57.

6. Noms hybrides

Un autre angle d’attaque est offert par la popularité du culte de Bendis.


On a pu constater l’existence de dérivés théophores sur Bendis, apparte-
nant déjà à la sphère onomastique grecque, qu’il s’agisse de noms com-
posés (Βενδιδώρα et Βενδίδωρος, Βενδιφάνης) 58 ou de noms suffixés
grecques, romaines et byzantines, III, Constantinople, 1914, no  1049, iie p. C.) :
Διζαλας Γερμανοῦ Δουλαρίωνι καὶ Διζαλᾳ καὶ Βειθυι τοῖς τέκνοις κτλ.
57. Pour un exemple de diversité à l’intérieur du même complexe onomastique, en
l’occurrence sémitique, voir J.-P. Rey-Coquais, « Onomastique et histoire de la
Syrie gréco-romaine », dans D. M. Pippidi (éd.), Actes du VIIe congrès interna-
tional d’épigraphie grecque et latine, Bucarest - Paris, 1979, p. 171-183 ; M. Sartre,
Bostra. Des origines à l’Islam, Paris, 1985, p. 141-152 ; Id., « Nom, langue et iden-
tité culturelle en Syrie aux époques hellénistique et romaine », dans J.-B. Humbert et
A. Desreumaux (éd.), Fouilles de Khirbet es-Samra en Jordanie, I. La voie romaine.
Le cimetière. Les documents épigraphiques, Turnhout, 1998, p. 555-562 ; Id., « The
Ambiguous Name: The Limitations of Cultural Identity in Graeco-Roman Syrian
Onomastics », dans ONW, p. 199-232. Citant la présence dans la même famille, en
Syrie, des noms Ἀλέξανδρος, Δουσάριος et Μᾶρκος, M. Sartre doute que les parents
aient fait un choix culturel conscient et appelle à la prudence (« The Ambiguous
Name », op. cit., p. 231).
58. Pour Bendis à Byzance, et les noms Βενδίδωρος et Δηλόπτιχος, voir L.  Robert,
« Index commenté des noms de personne », dans N. Fıratlı, Les stèles funéraires
de Byzance gréco-romaine, Paris, 1964, p. 152-154. Voir en outre O.  Masson,
« Les noms théophores de Bendis en Grèce et en Thrace », MH 45 (1988), p. 6-12
(= OGS I-II, p. 605-611) ; R. Parker, « Theophoric Names and the Study of Greek
Religion », dans GPN, p. 78. Pour ces noms et leur contexte régional, voir D. Dana,
« Onomastique indigène à Byzance et à Cyzique », dans M. Dana et F.  Prêteux
(éd.), Identité régionale, identités civiques autour des détroits des Dardanelles et du
Bosphore (Ve s. av. J.-C.-IIe s. apr. J.-C.), Besançon, 2016, p. 47-68.
hellénisation par suffixation 217

(Βένδιον, Βενδοῦς). Cependant, la famille onomastique formée sur ce


théonyme est particulièrement riche et semble concerner davantage les
noms féminins, en rapport avec la sphère d’activité et de protection de la
déesse. On compte ainsi :
♦♦ Un nom simple, identique au théonyme : Βενδις.
♦♦ Des noms thraces composés (théophores ?) : Βενδιζητα, *Δεβα-
βενδις, Ζηνιβενδις.
♦♦ Des noms thraces suffixés : Bendia, Βενζης.
♦♦ Des noms grecs composés : Βενδιδώρα et Βενδίδωρος, Βενδι-
φάνης.
♦♦ Des noms grecs suffixés : *Βενδᾶς, Βένδιον, Βενδοῦς.
En rapport avec cette famille de noms théophores, on peut citer un
autre nom hybride, Δηλόπτιχος (LGPN 4). Grâce à deux inscriptions
athéniennes, l’on sait que Δηλόπτης était le parèdre de Bendis 59 ; or,
le nom de ce dieu est évidemment grec. Δηλόπτιχος, nom théophore
grec bâti avec le suffixe hypocoristique -ιχος, très prisé à Byzance (cf.
le nom typique Βοσπόριχος, étudié par L. Robert 60), est donc un nom
épichorique dans la région propontique 61 et un héritage colonial mani-
feste, puisque la cité de Byzance est une colonie mégarienne, avec des
apports béotiens. Δηλόπτιχος n’est pas attesté pour le moment dans la

59. G. Kazarow, « Deloptes », ARW 11 (1908), p. 409-411, soutenant le caractère


thrace du théonyme. Ce nom divin est attesté par deux fois à Athènes (IG II² 1324,
l. 15-16, et B. D. Meritt, « Greek Inscriptions », Hesperia 29 (1960), p. 21, no 27,
l. 3 (cf. maintenant Agora XVI, 329), les deux d’époque hellénistique) et une fois
à Samos ἥρω̣ς Δηλόπτης (IG XII.6.2, 592, milieu du iiie a. C.). Dans LGPN 1,
ces deux occurrences de Δηλόπτης sont données à tort comme anthroponymes
(Samos, Athènes), et il convient de les supprimer. Comme l’écrit avec justesse
L. D. Loukopoulou, Contribution à l’histoire de la Thrace propontique durant la
période archaïque, Athènes, 1989, p. 205, « l’étymologie et la morphologie [de
Δηλόπτης] sont clairement grecques ».
60. L.  Robert, « Index commenté », op. cit., p. 145 ; O. Masson, « L’onomastique de
l’ancienne Byzance (épitaphes et monnaies) », EA 23 (1994), p. 139 (=  OGS III,
p. 208).
61. Voir les commentaires avisés de J. et L. Robert, BE, 1962, 193 ; L. Robert, « Index
commenté », op. cit., p. 152-153 ; O. Masson, « Onomastique de Byzance », art. cit.,
p. 139-140 (= OGS III, p. 208-209) ; L. Dubois, Inscriptions grecques dialectales
d’Olbia du Pont, Genève, 1996, p. 43-44 ; A. Robu, « Traditions et rapprochements
onomastiques dans les cités de la mer Noire : quelques exemples tirés du “monde
mégarien” », Il Mar Nero 8 (2010-2011), p. 281 et 283.
218 dan dana

documentation épigraphique byzantine ; en revanche, ce nom est porté


par au moins trois ressortissants de cette cité aux époques classique et
hellénistique – preuve de l’importance de la prosopographie externe 62.
Ces noms hybrides gréco-thraces en rapport avec le culte de Bendis et
Dèloptès sont ainsi la marque d’une appropriation – certes, grecque – de
traits culturels indigènes.
Pour revenir aux noms non grecs pourvus des suffixes grecs, se pose
la question de leur appellation. Dans le cas de l’Égypte, O. Masson parle
de noms « égypto-grecs, qui comportent un radical égyptien pourvu d’un
suffixe grec, ou bien deux éléments divins en composition » 63. Tou-
jours en Égypte, où les formations onomastiques sont souvent décon-
certantes, J. Bingen estimait : « Je me tiens pour la définition du “nom
grec” au critère sociologique : est “nom grec” tout nom grec créé pour
des gens quelles que soient les composantes de ce nom, par opposition
aux emprunts directs à l’onomastique égyptienne » 64. On peut consi-
dérer que ces noms appartiennent en même temps à plusieurs registres
onomastiques, ou qu’ils sont hybrides. En revanche, du point de vue de
leur formation, il s’agit d’anthroponymes grecs ou à la grecque. Ce pro-
cessus d’enrichissement onomastique par suffixation, qui affecte à la fois
les radicaux grecs et non grecs (indigènes et latins), est multiforme à
l’époque impériale et durant l’Antiquité tardive. L’extraordinaire produc-
tivité des hypocoristiques, qui peuvent concerner n’importe quelle caté-
gorie de noms, montre des évolutions et des modes régionales ‒ ainsi, en
Égypte, la popularité des diminutifs en -οῦς et -αροῦς. On pourrait citer
comme parallèle, sans le risque de l’anachronisme, le foisonnement des
diminutifs (‑ito / ‑ita, ‑cito / -cita), aussi bien dans le domaine du lexique
que dans l’onomastique, des espaces hispanisés en Amérique latine, issus
de l’empire colonial espagnol.

62. Patronyme d’un synèdre en Béotie, pendant la Guerre sacrée (ca 354 a. C., IG VII
2418 = Syll.3 201) ; proxène à Olbia du Pont (ca 340-330 a. C., IOlb 9 = IGDOP 18) ;
patronyme d’un dédicant à Panticapée, dans le royaume du Bosphore (ca 300 a. C.,
CIRB 17) ; voir A. Avram, Prosopographia Ponti Euxini Externa, Louvain - Paris -
Walpole (MA), 2013, p. 73 (no 697), 78 (no 759) et 79 (no 762). À ces ressortissants
de Byzance s’ajoute une occurrence dans une épitaphe sur la côte septentrionale de
la Propontide, à Héraion Teichos (I. Thrace / Turquie I 10.3).
63. Masson, OGS III, p. 257.
64. J. Bingen, Pages d’épigraphie grecque, II. Égypte (1983-2002), Bruxelles, 2005,
p. 76 (par ex., Ἑρμόννωφρις).
hellénisation par suffixation 219

Pourquoi les milieux indigènes ont-ils choisi d’inventer des noms avec
des suffixes grecs ? Outre le jeu sur la variation / dérivation onomastique
à partir des noms des parents, ces créations nous renseignent sur la viva-
cité des cultures locales. En effet, entre le conservatisme onomastique et
l’adoption totale de noms grecs et latins ‒ même si parfois il s’agit de
noms de consonance et de traits régionaux ‒, il existait d’autres options.
On voit surgir des noms hybrides et on assiste notamment à la transforma-
tion en profondeur du stock onomastique de facture indigène, l’aspect le
plus notable étant une sorte de banalisation ou de neutralisation de l’ono-
mastique indigène, notamment dans le cas des femmes, manifeste dans
la préférence pour des noms simples et, surtout, des Lallnamen. À ce
propos, il serait dangereux d’opposer encore, comment cela se faisait il y a
quelques décennies, « résistance culturelle » et « hellénisation » / « latini-
sation », selon une vision dichotomique qui apparaît aujourd’hui comme
à la fois simpliste et alourdie de préjugés idéologiques. On préfère désor-
mais mettre en avant la coexistence entre volonté d’intégration et expres-
sion d’une identité culturelle différente ; or c’est grâce à ces créations
régionales que ce phénomène est mieux perceptible. En vérité, c’est la
diffusion même des pratiques épigraphiques qui assure une meilleure visi-
bilité des populations en place, en même temps qu’elle devient un signe
manifeste de la perméabilité des indigènes aux manifestations culturelles
latine et grecque, ou encore des hellénophones à la domination romaine.
Apparaît ainsi toute une catégorie de noms qui ont l’avantage d’appar-
tenir en même temps à deux registres onomastiques, avec, en arrière-plan,
une vocation à « normaliser » l’onomastique indigène, de pair avec la
vogue des Lallnamen et de leurs dérivés ‒ indice d’un certain appauvrisse-
ment des stocks onomastiques purement indigènes à l’époque impériale 65,
alors que la suffixation grecque et latine est un phénomène généralement
enrichissant ‒ et qui nous sensibilise davantage aux flux et reflux des
modes onomastiques. L’intégration des noms latins se traduit également
par des suffixations et des dérivations qui illustrent la souplesse, la vitalité
et l’extraordinaire productivité de l’onomastique grecque.

65. C. Brixhe parle de « koinéification » du stock onomastique indigène dans son article
« Anatolian Anthroponymy after Louis Robert… and some Others », dans PNAA,
p. 15-30.
220 dan dana

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DEU X I ÈM E PA RT I E

S U F F I X AT I O N E T S U F F I X E S  :
M O DA L I T É S E T S P É C I F I C I T É S
Accentuation, suffixes et loi des appellatifs
dans les anthroponymes grecs antiques

Éric Dieu
Université Toulouse–Jean-Jaurès

U
n fait largement répandu dans l’accentuation des anthropo-
nymes du grec ancien est la récessivité de l’accent, en face de
noms communs (adjectifs ou substantifs) dont l’accent n’est pas
récessif. L’objet de cet article sera d’évaluer l’extension et les limites
de ce phénomène, tout en considérant les cas inverses de conservation,
dans les anthroponymes, de la place de l’accent par rapport aux noms
communs qui sont leurs formes de fondation, ou qui comportent simple-
ment la même suffixation. On consacrera également un assez long déve-
loppement aux quelques exemples d’un mouvement d’accent vers la fin
du mot, afin de déterminer s’ils s’expliquent selon un même principe
général que les anthroponymes à récessivité accentuelle qui répondent à
des noms communs d’accentuation non récessive, ou s’il s’agit de phé-
nomènes bien spécifiques.
Un examen des différents types suffixaux concernés sera nécessaire,
dans la mesure où c’est souvent le suffixe qui détermine l’accentuation
du mot. Il sera intéressant d’observer, de ce point de vue, la spécificité
des noms propres par rapport à d’autres classes de mots d’accentuation
fréquemment récessive, comme les composés (et, au sein même des
noms propres, celle des anthroponymes par rapport aux toponymes). Il
ne sera naturellement pas possible, dans les limites de cet article, d’étu-
dier la totalité des types suffixaux du grec ancien, et l’on se limitera donc
aux cas les plus caractéristiques.
On ne traitera ici que des noms propres intégrés dans le système grec
du point de vue de leur suffixation, c’est-à-dire des formes héritées, consti-
tuées en grec même à partir d’éléments hérités de l’indo-européen, ou
bien issues d’une interpretatio Graeca de noms étrangers par intégration
228 éric dieu

dans un type suffixal spécifiquement grec. Parmi les autres formes, on


peut signaler en particulier les noms bibliques tirés de l’hébreu et de
l’araméen (Ἀβραάμ, Δαβίδ, Ἰσαάκ, Mιχαήλ, etc.), où l’oxytonèse, qui y
est largement répandue, est vraisemblablement reprise des formes sémi-
tiques ; mais il ne s’agit là que d’une tendance, qui connaît de très nom-
breuses exceptions 1.
Les faits d’accentuation mentionnés dans cet article s’appuieront large-
ment sur le témoignage des grammairiens anciens, et en particulier d’Hé-
rodien, grammairien du iie siècle apr. J.-C. (éd. Lentz 1867-1870), et de
l’épitomé de sa Prosodie générale par le Pseudo-Arcadius (éd. Schmidt
1860) 2. Ce témoignage est censé s’appliquer au grec classique et au grec
homérique, sur l’accentuation desquels Hérodien disposait de sources
plus anciennes remontant peut-être, sans que l’on puisse être assuré de sa
source ultime, à Aristophane de Byzance (iiie-iie siècles av. J.-C.), lequel,
comme on le pense parfois, pouvait lui-même s’appuyer sur une tradition
remontant à la période classique, voire à une époque encore plus ancienne
(sans que la nature même de cette tradition puisse être précisée). Dans
quelle mesure est-il fiable en ce qui concerne les noms propres, surtout
lorsqu’il s’agissait de formes homériques qui n’étaient plus vivantes à
l’époque où la tradition alexandrine a commencé à travailler sur ces ques-
tions accentuelles ? Il est impossible de le savoir. L’édition d’Hérodien

1. Voir davantage de données chez H.  W.  Chandler, A Practical Introduction to


Greek Accentuation, Oxford, 1881, 2e éd., p. 206-207. Voir aussi J. Wackernagel,
IF Anzeiger 43 (1926), p. 57-59 = Kleine Schriften, II, Göttingen, 1953, p. 1196-
1198, avec, en outre, un aperçu des données relatives aux emprunts du grec au latin.
Pour un état récent de la question de l’accentuation des emprunts, voir également
P. Probert, Ancient Greek Accentuation. Synchronic Patterns, Frequency Effects, and
Prehistory, Oxford, 2006, p. 131-136.
2. Des renvois aux grammairiens anciens seront largement faits à propos des formes les
plus importantes dans le cadre de cette étude. Mais pour des raisons de place, on ne
les citera pas toujours dans le cas de formes mentionnées plus brièvement, surtout
lorsqu’il s’agit de formes bien représentées dans la littérature. Les attestations indi-
quées pour les noms propres cités dans cet article sont uniquement tirées des sources
littéraires et des travaux des grammairiens et des lexicographes anciens (les abrévia-
tions des noms d’auteurs grecs sont celles du LSJ). On laissera de côté les attesta-
tions épigraphiques, qui ne seraient pas d’une utilité immédiate pour notre sujet. Sur
les différentes sources de notre connaissance de la place de l’accent des mots grecs
(grammairiens anciens, papyrus, tradition manuscrite, ou encore témoignages rela-
tifs à la musique), voir en particulier P. Probert, Ancient Greek Accentuation, op. cit.,
p. 15-52.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 229

par Lentz est elle-même d’un usage difficile, car Lentz y a surtout recons-
titué, d’une manière particulièrement accueillante, le texte d’Hérodien à
partir de tous les témoignages indirects postérieurs dont il pensait qu’ils
étaient susceptibles de refléter l’enseignement d’Hérodien (notamment
ceux de Choiroboscos et de Theognostos). Par conséquent, il se peut que
certaines données accentuelles utilisées dans cet article soient fautives,
sans qu’il soit aisé d’en évaluer l’ampleur 3.

1. Extension et limites de la récessivité accentuelle


des anthroponymes

1.1. Cas de récessivité accentuelle


Dans certains types suffixaux, la récessivité accentuelle des anthro-
ponymes provient uniquement de la nature du suffixe, qui, dans les noms
communs comme dans les noms propres, implique un recul de l’accent
le plus loin possible de la finale d’après la loi de limitation. Il en est ainsi
dans les noms en -ις, gén. -ιος 4, en -(*y)ᾰ (-ιλλα, -ιννα, -υλλα, -ισσα,
-κλεια, etc.) 5, en -ης (gén. -ου), etc.
Dans d’autres cas, la récessivité accentuelle des anthroponymes n’est
pas intrinsèque à leur suffixation, dans la mesure où les noms communs
qui la comportent ont des accentuations variables. C’est en particulier le
cas dans les suffixés suivants (liste non exhaustive) :
— Suffixés en -ος, -η / -ᾱ : on considère généralement que les noms
communs comme les noms propres obéissent à une « loi des appella-
tifs », laquelle, suivant sa présentation par J.  Vendryes 6, implique un

3. Sur Hérodien, voir des états récents de la question et des éléments de bibliographie
chez P. Probert, Ancient Greek Accentuation, op. cit., p. 22-25, et E. Dickey, Ancient
Greek Scholarship, Oxford - New York, 2007, p. 75-77, et « A catalogue of works
attributed to the grammarian Herodian », CPh 109 (2014), p. 325-345.
4. Cf. O. Masson, « Pape-Benseleriana », ZPE 14 (1974), p. 180-181 (= OGS I, p. 206-
207) ; « Remarques sur l’onomastique d’Éphèse (à propos de l’index Ephesos
VIII.2) », ZPE 64 (1986), p. 174 n. 8 (= OGS II, p. 498 n. 8).
5. Cf. O.  Masson, compte rendu de L.  Collins Reilly, Slaves in Ancient Greece,
Chicago, 1978, RPh 55 (1981), p. 327 (= OGS II, p. 387) ; « Notes d’anthroponymie
grecque, IV : les deux prêtresses Philylliô (Alexandrie et Cyrène) », RPh 57 (1983),
p. 187 (= OGS II, p. 411) et loc. cit., 1986.
6. Voir J. Vendryes, Traité d’accentuation grecque, Paris, 1904, p. 152-154.
230 éric dieu

changement d’accentuation d’un adjectif employé comme nom, ou d’un


« appellatif » (adjectif ou, le cas échéant, substantif) employé comme
nom propre (voir plus bas, § 2). Cette loi s’observe particulièrement
bien dans les formations suffixées en -ος et en -η / -ᾱ, dans les noms de
personnes (Πύρρος [D., Theoc., etc.] vs πυρρός « d’un rouge de feu,
roux », Φαῖδρος [Eschn., etc.] et Φαίδρᾱ [Hom.+] vs φαιδρός « bril-
lant », Ξάνθος [Hom.+] et Ξάνθη [Hes., théonyme] vs ξανθός « jaune,
jaunâtre », etc.) comme dans les noms communs : σῖμος (Opp., Artem.,
Ath.), nom de poisson (et Σῖμος chez Call.) vs σῑμóς « camus », λεῦκος
(Theoc.), nom de poisson (et Λεῦκος en Δ 491, etc., déjà attesté en myc. :
re-u-ko, cf. DMic, II, p. 244) vs λευκός « blanc », etc. Nous reviendrons
en conclusion sur la légitimité de cette loi, qui a été remise en question
assez récemment 7. En dehors des formes tirées d’appellatifs, la tendance
générale est à la récessivité accentuelle dans les anthroponymes (ce qui
les distingue des noms communs, où l’accentuation récessive coexiste
largement avec d’autres accentuations) ; mais les exceptions sont loin
d’être rares 8.
— Suffixés en -ων, gén. -ωνος 9 : la récessivité accentuelle est de règle
dans les anthroponymes, comme peuvent l’illustrer des noms tels que
Πλάτων (cf. πλατύς « large et plat ») 10, Στράϐων (cf. στραϐός « tordu,
tors ; louche »), Σῑ́μων (Ar., X., etc. ; cf. σῑμóς « camus »), Kλέων (Ar.,

7. Voir P. Probert, Ancient Greek Accentuation, op. cit., p. 298-300.


8. Voir de nombreuses données, qui s’appuient sur le témoignage des grammairiens
anciens, chez H. W. Chandler, op. cit., p. 7-160, passim. Les noms propres y sont
traités parallèlement aux noms communs, et, comme chez les grammairiens anciens,
classés selon la nature de leurs finales et non de leurs suffixes (mots terminés par
-μος, -νος, etc., que le μ, le ν, etc., soient radicaux ou suffixaux).
9. Voir les données chez H.  W.  Chandler, op. cit., p.  173-176. Nous présentons ici
ce suffixe de manière purement synchronique. En diachronie, il est bien connu
que cette classe suffixale provient de la rencontre de plusieurs suffixes : un suffixe
individualisant (nom. sg. *-ōn), qui apparaît, par exemple, dans στράϐων vs στραϐός,
et un suffixe possessif dit suffixe de Hoffmann (nom.  sg. *-Hōn), par exemple
dans γάστρων vs γαστήρ. Pour un état de la question sur le suffixe de Hoffmann,
voir G.-J.  Pinault, « Védique dámūnas-, latin dominus et l’origine du suffixe de
Hoffmann », BSL 95/1 (2000), p. 62-67, avec une prise de position nette en faveur
d’une laryngale *h3 dans la reconstruction de ce suffixe.
10. Pour d’autres exemples de sobriquets en -ων tirés d’adjectifs en -ύς, voir O. Masson,
« Notes d’anthroponymie grecque et asianique », BN 10 (1959), p. 162 (= OGS I,
p. 22).
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 231

Th., X., etc. ; hypocoristique, cf. les composés en Kλεο- ou en Kλει-,


Kλε-, de κλέος « gloire »), Tρφων (Plu., Ath., etc.), Kόνων (Th.+),
Σόλων, etc. L’accentuation des noms communs en -ων est variable
(avec de très nombreux exemples oxytons), mais des sobriquets comme
Πλάτων et Στράϐων se laissent rapprocher de faits comparables dans les
noms communs : γάστρων (Alc., Ar., Ph.) « homme ventru, goulu » (cf.
γαστήρ « ventre »), γλίσχρων (Ar.) « goinfre » (cf. γλίσχρος « gluant,
visqueux ; tenace ; importun »), etc. 11 ; à côté de Στράϐων existe égale-
ment στράϐων (Poll. 2.51, cf. com. ad. fr. 756 Kassel et Austin) « homme
louche ». À la différence des anthroponymes, les toponymes sont géné-
ralement oxytons, qu’ils soient ou non d’origine grecque : Mαραθών,
Βαβυλών, Σιδών, etc. Il est notable, à cet égard, que les noms communs
qui désignent un lieu (lieu planté d’arbres, nom de pièce, etc. 12) sont
également oxytons : γυναικών « appartement des femmes », κοιτών
« chambre à coucher », λουτρών « salle de bains », ἱππών « écurie »,
ἀμπελεών « vignoble », μυρρινών « bois de myrtes », δαφνών « bois de
lauriers », etc. 13
— Suffixés en -ης, gén. -ους 14 : Ἀριστοφάνης (vs ἀφανής « invisible,
caché, inconnu », etc.), Δημοσθένης (vs ἐρισθενής « très fort, très puis-
sant », etc.), Διογένης (vs διογενής « né de Zeus » et les nombreux autres
composés en -γενής), etc. On trouve aussi des formes périspomènes par
contraction : Σοφοκλῆς, Περικλῆς, etc. (< -κλέης, cf. Ἀγακλέης [Hom.]
vs ἀγακλεής « très illustre », etc.). Font exception les noms de Néréides
Nημερτής et Ἀψευδής (Σ 46), ainsi que Eὐμενής (Hdn. I, 82, 2 Lentz),
qui sont accentués comme les adjectifs correspondants, lesquels sont
oxytons comme la majeure partie des adjectifs composés en -ης (cf. plus
bas, 1.3) 15.
11. Cf. Chantraine, Formation, p. 161 ; C. Bally, Manuel d’accentuation grecque, Berne,
1945, p. 86.
12. Cf. Chantraine, Formation, p. 164-165.
13. Le nom propre Mαραθών, tiré de μάραθος / μάραθον « fenouil » (la plaine de
Marathon produisait une grande quantité de fenouil : cf. Str. III, 4, 9), est un dérivé
du même type, au moyen du suffixe de Hoffmann, que ἱππών « écurie » (tiré de
ἵππος « cheval »), δαφνών « bois de lauriers » (tiré de δάφνη « laurier »), etc. Cf.
G.-J. Pinault, art. cit., p. 62.
14. Cf. P. Probert, A New Short Guide to the Accentuation of Ancient Greek, Londres,
2003, p. 112.
15. Pour d’autres exceptions, voir la note de Lentz ad Hdn. I, 82, 2.
232 éric dieu

— Suffixés en -της, gén. -του : le suffixe n’est pas accentué dans les
anthroponymes, comme peuvent l’illustrer des formes telles que Ὀρέ-
στης, Ἀρχύτης (X., Pl.+), Nῑκήτης (AP, Philostr. ; distingué de νῑκητής
« vainqueur » chez Eustathe, I, 241, 18-19 Van der Valk), etc. En dehors
de l’anthroponymie, on peut citer aussi Ἀργέστης [Arist., Thphr.+ ;
Vent du nord-ouest] vs ἀργεστής « qui éclaircit le ciel (en chassant les
nuages) ». En revanche, dans les noms communs, le suffixe peut aussi
bien attirer l’accent que ne pas être accentué 16.

1.2. Formes d’accentuation non récessive, par conservation


de l’accentuation propre à un type de suffixation particulier
Ce type de conservation se produit lorsque le suffixe était productif
et bien caractérisé du point de vue de la place de l’accent 17. C’est, entre
autres, le cas des suffixés suivants :
— Suffixés en -εύς : Ἀχιλλεύς, Ὀδυσσεύς, Ἱππεύς (chez Xénophon,
comme ἱππεύς « cavalier »), etc. : l’oxytonèse est systématique dans les
noms propres comme dans les noms communs. Il faut préciser que la
productivité de ce suffixe ne vaut que pour les noms communs, car, dans
l’onomastique, elle ne s’observe plus après Homère 18 ; mais son exis-
tence dans les noms communs doit avoir suffi à permettre aux anthropo-
nymes de conserver l’accentuation propre à ce type suffixal 19.
— Suffixés féminins en -ώ (ancien suffixe de noms propres féminins) :
Σαπφώ, Γοργώ (Gorgone, mais aussi nom de femme : Hdt., Theoc.,
Plu.+), etc. (l’oxytonèse est généralisée dans les noms communs) 20.
— Suffixés en -ῐλος, -ῠλος. Ces formes sont très souvent paroxytones :
Tρωίλος (Hom.+), Πενθίλος (Arist.), Ἡδύλος (D.+), Aἰσχύλος, etc. La

16. Sur l’accentuation très complexe des noms communs en -της, voir É. Dieu,
« L’accentuation des noms masculins en -της du grec ancien », Lalies 29 (2009).
17. Cf. O.  Masson, « Nouvelles notes d’anthroponymie grecque », ZPE 91 (1992),
p. 108 (= OGS III, p. 127).
18. Cf. J.-L. Perpillou, Les substantifs grecs en -εύς, Paris, 1973, p. 44-45 ; A. Morpurgo
Davies, « Greek Personal Names and Linguistic Continuity », dans GPN, p. 35-38.
19. Cf. P. Probert, Ancient Greek Accentuation, op. cit., p. 300 n. 9.
20. Voir C. Frei-Lüthy, Der Einfluß der griechischen Personennamen auf die Wortbil-
dung, Heidelberg, 1978, p. 69-76.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 233

paroxytonèse est quasi systématique dans les adjectifs en -ίλος, -ύλος,


conséquence de la loi de Wheeler à partir de prototypes oxytons, ces
formes comportant toutes une finale de rythme dactylique. Mais dans les
substantifs, il ne s’agit que d’une tendance générale (dans les formes à
finale dactylique comme dans les autres formes, où la paroxytonèse s’est
étendue analogiquement), et il en va de même dans les noms propres :
l’accentuation récessive est loin d’y être rare, à côté de l’accent de pénul-
tième 21. Cette accentuation fluctuante des substantifs en -ῐλος, -ῠλος, a
pu favoriser l’apparition d’une accentuation récessive y compris dans des
anthroponymes tirés d’adjectifs, par exemple dans Ἄγκυλος (Arc. 64,
16-17 Schmidt ; Hdn. II, 3, 33-34 Lentz), tiré de ἀγκύλος « courbé ». En
revanche, les autres noms propres suffixés en -λος (-αλος, -ῑλος, -ῡλος,
-ωλος, etc.) sont généralement proparoxytons (mais on compte également
de nombreuses exceptions) : les suffixes autres que -ῐλος et -ῠλος n’étaient
pas nettement caractérisés du point de vue de la place de l’accent dans
les noms communs correspondants, où l’oxytonèse comme l’accentuation
récessive sont répandues 22 ; de ce fait, les noms propres présentant ces suf-
fixes ont pu aisément adopter l’accentuation récessive.
Une absence de récessivité accentuelle s’observe encore dans les
anthroponymes en -ῖνος, qui répondent aux noms communs en -ῖνος 23 ;
en -ίσκος, accentués comme les noms communs en -ίσκος 24 ; etc. 25

1.3. Synthèse des données précédentes, et examen d’exceptions


apparentes
La récessivité accentuelle est attendue en principe dans les anthro-
ponymes qui sont tirés de noms communs (principalement d’adjectifs,
mais aussi de substantifs 26), et elle est également fréquente en dehors de

21. Voir des exemples chez H. W. Chandler, op. cit., p. 78-79.


22. Sur l’accentuation des noms communs en -λος, voir P. Probert, Ancient Greek
Accentuation, op. cit., p. 209-226 et 292-293.
23. Voir des listes de noms communs en -ῖνος chez Chantraine, Formation, p. 203-206.
24. Voir des listes de noms communs en -ίσκος chez Chantraine, Formation, p. 406-413.
25. Cf. O. Masson, loc. cit., 1986.
26. Sur ce point, voir O. Masson, art. cit., 1992, p. 107-108 (= OGS III, p. 126-127), qui
observe que ce procédé accentuel fonctionne bien plus nettement avec les adjectifs
qu’avec les substantifs, et que l’on ne voit pas de règle universelle dans ce second
cas (où le recul de l’accent est représenté par exemple par Kάρπος [App.Anth. ; cf.
234 éric dieu

ce cas précis. Mais l’accentuation des anthroponymes peut ne pas être


récessive lorsque ceux-ci se rattachent à des types suffixaux bien carac-
térisés du point de vue de la place de l’accent dans les noms communs
correspondants.
Il ne semble pas qu’il existe de types suffixaux qui échappent large-
ment à ces principes généraux. Certes, en règle générale, les noms fémi-
nins en -ις (gén. -ιδος) sont accentués sur le ι, surtout lorsque leur accusatif
singulier est en -ιδα, et non en -ιν 27. Or, Vendryes signale un recul de l’ac-
cent dans les anthroponymes Ἔλπις, vs ἐλπίς « espoir », et Φρόντις, vs
φροντίς « soin, souci, préoccupation » 28. Mais ces données ne remettent
pas en question le raisonnement qui précède. Chandler (op. cit., p. 184)
indique que les anthroponymes féminins en -ις (gén. -ιδος) sont généra-
lement accentués sur le ι, et ce, comme dans les noms communs corres-
pondants : par exemple, Bαυκίς (Erinn.) répond à *βαυκίς, pl. βαυκίδες (il
s’agit d’un plurale tantum), qui désigne une sorte de soulier de femme 29.
Il cite donc le nom de femme Ἐλπίς comme mot oxyton, accentuation qui
se retrouve dans les ouvrages de lexicographie et les éditions de textes
(AP V, 9 [Rufin] ; etc. 30). Si l’on trouve une forme accentuée Ἔλπις chez
Eustathe (II, 330, 37-38 Stallbaum : Ἔλπις μὲν κύριον, ἐλπὶς δὲ τὸ κοινὸν
θηλυκόν), il doit s’agir d’un nom masculin, comme le suggère clairement
un passage de Jean Philopon : ἐλπίς· τὸ θηλυκὸν ὀξύνεται, Ἔλπις· τὸ
κύριον παροξύνεται· ἔστι δὲ υἱὸς Ἀκέστου (texte de la recensio A, ε 14
Daly) 31. Le recul de l’accent est donc dû au changement de genre : comme
Hdn. I, 187, 17-18 ; II, 6, 10-11 Lentz] vs καρπός « fruit », ou encore par Θέωρος [Ar.,
accentuation connue d’après les scholies d’Aristophane et la Suda] vs θεωρός « spec-
tateur ; député ; magistrat [à Mantinée] »). Masson indique en outre qu’un déplace-
ment d’accent est moins fréquent dans les anthroponymes tirés de certains types d’ad-
jectifs comme les ethniques, bien que l’on y rencontre quelques bons exemples de
ce phénomène, comme Ἀθήναιος (attesté chez Thucydide ; cf. Arc. 47, 21 Schmidt ;
Hdn. I, 132, 1-2 ; II, 2, 27-28 ; 88, 17 ; 160, 12 Lentz), tiré de Ἀθηναῖος « athénien ».
27. Cf. H.  W.  Chandler, op. cit., p.  180-184 ; J.  Vendryes, op. cit., p.  182 ; C.  Bally,
op. cit., p. 83-84.
28. Voir J. Vendryes, op. cit., p. 153-154.
29. Pour plus de détails, voir H.  W.  Chandler, op. cit., p.  184-186, avec indication
des exceptions (féminins paroxytons ou propérispomènes en -τις qui répondent à
des masculins paroxytons en -της, dans les noms propres comme dans les noms
communs, etc.).
30. Voir DGE VII, p. 1468.
31. Cf. O. Masson, « Pape-Benseleriana, III. Aristis et Elpis, retractatio », ZPE 20
(1976), p. 232 (= OGS I, p. 242).
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 235

l’indique Chandler (op. cit., p. 184), les noms propres masculins en -ις
(gén. -ιδος) ont une accentuation récessive. Quant à Φρόντις, il existe
aussi bien un nom de femme (dans l’Iliade, etc.) qu’un nom d’homme
(depuis l’Odyssée), théoriquement accentués Φροντίς et Φρόντις 32. Mais
l’accentuation du nom féminin était controversée chez les grammairiens
anciens 33, et il est possible que ce nom de femme fasse partie des excep-
tions à l’oxytonèse qui sont relevées par Chandler (op. cit., p. 185-186).
Il faut toutefois revenir sur le cas des anthroponymes en -ης, gén. -ους
(cf. plus haut, 1.1), qui peut sembler en partie étrange : leur accentuation
est très largement récessive, tandis que les adjectifs composés, même
lorsqu’ils appartiennent à des classes de composés où une récessivité
accentuelle est attendue a priori (comme les composés possessifs 34), sont
très majoritairement accentués sur le suffixe. On trouve ainsi des com-
posés possessifs comme χαλκοϐαρής (Hom.+) « chargé, garni d’airain »
(cf. βάρος « poids, charge »), δολιχεγχής (Hom.) « à la longue jave-
line » (cf. ἔγχος « javeline »), δυσμενής (Hom.+) « malveillant, hostile »
(cf. μένος « pensée, ardeur »), ἀκρατής (ion.-att.) « qui est sans force,
qui n’est pas maître de » (cf. κράτος « force »), etc. Mais il existe de
nombreuses exceptions, lesquelles se rencontrent principalement parmi
les composés possessifs : il s’agit notamment des composés en -ήθης,
-μήκης, -ήκης, -κήτης, -άρκης, -μεγέθης, -στελέχης, etc. 35 L’origine de

32. Cf. O. Masson, art. cit., 1992, p. 108 (= OGS III, p. 127).
33. Voir le dossier philologique chez H. W. Chandler, op. cit., p. 185-186.
34. Dans d’autres types de thèmes, une telle récessivité accentuelle s’observe par exemple
dans ἀργυρότοξος (Hom.) « à l’arc (τόξον) d’argent », οἰοχίτων (Hom., Nonn.)
« vêtu d’une simple tunique (χιτών) », etc. Il s’agit, en réalité, d’une simple récessi-
vité accentuelle de date grecque, l’impression d’un accent récessif étant due, en syn-
chronie, à la loi de limitation. En sanskrit védique, l’accent des composés bahuvrīhi
se trouve, en principe, sur le premier membre du composé, mais pas nécessairement
sur la première syllabe de ce premier membre. Il est généralement à la même place
que lorsque ce premier membre est employé en dehors de la composition, comme, par
exemple, dans sahásrapad- (RV.+) « qui a mille pieds » (cf. sahásra- « mille »). Les
données védiques sont toutefois bien plus complexes, et le second membre de compo-
sition est assez souvent accentué : voir J. Wackernagel et A. Debrunner, Altindische
Grammatik, Göttingen, 1896-1954, II.1, p. 291-302.
35. Voir A.  Blanc, Les adjectifs sigmatiques en grec, thèse de doctorat d’État, Paris,
1987, p. 60-69 ; T. Meissner, S-stem Nouns and Adjectives in Greek and Proto-In-
do-European. A Diachronic Study in Word Formation, Oxford, 2005, p. 199. Tous
ces composés sont d’accentuation récessive (nom.-acc. nt. sg. en -ες proparoxyton).
Mais il existe également quelques anciens composés, à savoir ceux en -ώδης, -ήρης
236 éric dieu

l’accentuation des composés possessifs en -ης doit être la suivante 36.


L’accentuation de celles des « exceptions » qui sont d’anciens composés
possessifs, comme ceux en -ήθης (cf. ἦθος « caractère ») et en -μήκης (cf.
μῆκος « longueur »), serait héritée, et se serait étendue à d’autres com-
posés de structure phonique voisine : par exemple, ceux en -φλεγέθης
(cf. φλεγέθω « enflammer »), accentués comme ceux en -μεγέθης (cf.
μέγεθος « grandeur ») et en -στελέχης (cf. στέλεχος « tronc »). L’oxy-
tonèse des autres formes proviendrait de la réinterprétation de certaines
d’entre elles comme des dérivés verbaux (puis d’extensions analogiques
aux autres formes). Par exemple, διογενής (Hom.+), ancien composé
possessif signifiant « qui a son γένος à partir de Zeus », aurait été réin-
terprété comme « né de Zeus », avec un second membre verbal (cf. γενέ-
σθαι) 37 ; cette réinterprétation est d’autant plus probable que l’on trouve
par ailleurs un composé διοτρεφής (Hom., Hes.) « nourrisson de Zeus »,
qui repose nécessairement sur τρέφω « nourrir », puisque le neutre sig-
matique τρέφος (Soph.) « nourrisson, rejeton » a chance d’être une créa-
tion secondaire (peut-être sous l’influence de βρέφος [Hom.+] « enfant /
petit d’animal encore dans le sein de sa mère ; nouveau-né ») 38.
Dans ces conditions, pourquoi a-t-on Διογένης en face de διογενής ?
Serait-ce parce que les formes du type de Διογένης  auraient préservé
l’accentuation ancienne des composés possessifs, dans la mesure où, de
par leur nature de noms propres, elles étaient hors système ? Cela est peu
probable : il est plus simple de considérer qu’un recul de l’accent a pu
se faire dans Διογένης par rapport à διογενής, parce que, à la différence
d’un suffixe comme -εύς, le suffixe -ης n’était pas parfaitement carac-
térisé comme accentué (du fait de l’existence des composés en -ήθης,
-μήκης, etc.) 39.
et -ώλης, qui sont propérispomènes au nom.-acc. nt. sg. (-ῶδες, -ῆρες, -ῶλες), et ce,
pour une raison non élucidée (voir des éléments de réflexion chez C. Bally, op. cit.,
p. 27-28, 89 ; P. Probert, Short Guide, op. cit., p. 61-62).
36. Cf. C. Bally, op. cit., p. 89 ; A. Blanc, op. cit., p. 63-65 ; et, avec des variantes dans
le détail desquelles il n’est pas possible d’entrer dans les limites de cet article,
T. Meissner, op. cit., p. 200-201.
37. Cf. Risch, Wortbildung, p. 81.
38. Cf. T. Meissner, op. cit., p. 92.
39. L’explication fournie par O. Masson, art. cit., 1992, p.  107 (= OGS III, p.  126) :
« Vendryes cite aussi διογενής et Διογένης, mais ici le recul de l’accent est automa-
tique pour un composé », ne semble pas parfaitement nette. Pour une autre hypo-
thèse, relative à l’extension analogique de l’accent récessif du vocatif dans les noms
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 237

2. Cas de mouvement d’accent vers la fin du mot ?

Vendryes formule de la manière suivante la loi des appellatifs :


Lorsqu’un qualificatif est employé comme appellatif, il modifie son
accentuation.
I. Toutes les fois qu’un adjectif qualificatif est employé pour désigner un
objet particulier présentant la qualité qu’il exprime, il change d’accent ;
c’est-à-dire que s’il est oxyton, il devient baryton, et, s’il est baryton, il
devient oxyton 40.
II. Toutes les fois qu’un nom commun (substantif ou adjectif) est employé
comme nom propre, il modifie son accentuation 41.
Il observe toutefois, et avec raison, que lorsque l’accent ne peut pas
se déplacer vers le début du mot, la loi des appellatifs n’est pas fré-
quente 42. De fait, en règle générale, l’anthroponyme (ou, dans le cas
de Πλοῦτος, le théonyme) conserve, dans ce cas, l’accentuation du
nom commun : πλοῦτος « richesse » → Πλοῦτος (dieu de la richesse),

de personnes tirés d’adjectifs en -ης, voir C. Bally, op. cit., p. 41 ; voir aussi, plus bas
(§ 3), des éléments de réflexion sur cette hypothèse, qui n’est guère probable. En tout
cas, on ne peut pas utiliser comme argument en sa faveur le fait que le vocatif d’un
adjectif comme κακοήθης (« méchant, vicieux, etc. ») est κακόηθες : le nom.-acc. nt.
sg. est également κακόηθες, et seuls les adjectifs en -ης dont le nom. masc. sg. n’est
pas oxyton ont un vocatif à accent récessif (l’accentuation de ce dernier ne s’ex-
plique donc pas, en synchronie, par une récessivité accentuelle spécifique au vocatif,
mais par une récessivité accentuelle plus générale de ces adjectifs en -ης : l’accent de
κακοήθης n’est pas un véritable accent de pénultième, mais un accent récessif qui ne
peut pas remonter plus haut que la syllabe pénultième du fait de la loi de limitation).
40. En écrivant ces lignes, Vendryes pensait visiblement aux formes dissyllabiques.
Mais la loi des appellatifs ne peut pas toujours être formulée ainsi en parlant de poly-
syllabes : cf., pour les noms propres, des exemples (signalés plus haut) du type de
ἀγκύλος → Ἄγκυλος et Ἀθηναῖος → Ἀθήναιος. Vendryes citait d’ailleurs, comme
illustration de cette loi, un exemple comme αἰόλος (Hom.+) « bigarré ; changeant »
→ αἴολος (Nic.  Thyat. apud Ath.), nom de poisson, pour lequel la terminologie
employée (oxyton vs baryton) n’est pas adaptée ; cet exemple concerne aussi les
noms propres, puisque le nom d’Éole, Aἴολος, semble présenter un recul de l’accent
par rapport à αἰόλος (sur l’accentuation de ce nom propre, qui était controversée
chez les grammairiens anciens [Aἴολος ou Aἰόλος], voir LfgrE, I, col. 331, notice
de H. Geiß ; voir aussi H. W. Chandler, op. cit., p. 79, qui indique également que
l’accentuation du nom de poisson αἴολος est incertaine).
41. Voir J. Vendryes, op. cit., p. 152-153.
42. Cf. P. Probert, Short Guide, op. cit., p. 113 et Ancient Greek Accentuation, op. cit.,
p. 298.
238 éric dieu

πρῶτος « premier » → Πρῶτος (chez Démosthène), μήστωρ « qui prend


soin de, qui dirige » → Mήστωρ (Hom., Pl. ; la conservation de l’accent
de μήστωρ se comprend bien d’après les règles énoncées plus haut, car
aucun nom commun en -τωρ n’est oxyton), etc. La même chose s’ob-
serve dans les noms communs en -ος et en -η / -ᾱ : par exemple, λεῖος
« lisse, poli, plat » → λείᾱ (Soph.) « polissoir ».
Dès lors, il faut s’interroger sur les quelques exemples d’un dépla-
cement accentuel vers la fin du mot, afin de déterminer s’ils doivent
être interprétés par une tendance inverse au type de πυρρός → Πύρρος,
etc., ou s’ils se laissent comprendre d’une manière plus spécifique. Ils
apparaissent surtout dans les noms propres (anthroponymes et topo-
nymes), mais aussi dans quelques noms communs. L’étude de l’accen-
tuation des anthroponymes soumis à ce phénomène ne peut être séparée
de celle des toponymes et des noms communs. Nous les étudierons donc
conjointement.

2.1. Examen critique général des exemples signalés


par Vendryes
Les exemples signalés par Vendryes (Traité, p. 152-154, 161) sont les
suivants :
♦♦ Toute une série de noms propres en -μενóς, -μενή (anthropo-
nymes, théonymes et toponymes) répondant le plus souvent à des
participes présents ou aoristes en -μενος (ou, plus rarement, à des
participes parfaits en -μένος), ainsi que deux noms communs en
-μενή : εἱαμενή (Hom., Theoc., Call.+) « prairie humide » vs *εἱά-
μενος (du moins s’il s’agit d’un participe substantivé) 43, et δεξα-
μενή (Hdt.+) « réservoir, réservoir d’eau, citerne » vs δεξάμενος
« ayant reçu ».
♦♦ Ἀμφοτερός (anthroponyme, Π 415, etc. ; voir Arc. 81, 6-7 Schmidt ;
Hdn. I, 196, 5-6 ; II, 4, 5-7 Lentz) vs ἀμφότερος « l’un et l’autre
de deux » (l’anthroponyme peut être une désignation de quelqu’un
qui était adroit de ses deux mains 44).

43. Sur l’étymologie de εἱαμενή, et pour une autre analyse de son accentuation que celle
qui va être défendue ici, voir plus bas, en annexe.
44. Cf. Kamptz, HomPN, p.  234, qui se demande s’il ne pourrait pas s’agir d’un
hypocoristique de *Ἀμφοτεροδέξιος. L’adjectif ἀμφοτεροδέξιος (LXX, Aristaenet.,
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 239

♦♦ Ἀξιóς 45 (fleuve de Péonie et de Macédoine [Vardar], B 849-850,


Π 288, Φ 141, 157-158 ; Strabon) vs ἄξιος « digne de ».
♦♦ Σκυμνóς (anthroponyme, chez Ptolémée d’Ascalon : voir Hdn. II,
6, 3-4 Lentz < schol. ad Σ 319) vs σκύμνος « petit d’un animal »,
notamment « lionceau ».
L’exemple de Ἀξιóς est toutefois contestable : un rapport avec l’ad-
jectif ἄξιος est hautement improbable, et n’a d’ailleurs été que très rare-
ment retenu par les savants qui ont discuté de l’étymologie de ce nom de
fleuve, qui reste incertaine (origine illyrienne, ou thrace, ou thraco-scy-
thique ?) 46. En outre, on trouve une accentuation Ἄξιος chez Eustathe (I,
564, 16 ; 565, 8 ; III, 170, 12 ; IV, 474, 2 ; 475, 6 Van der Valk), qui est
considérée comme la meilleure par Chandler (op. cit., p. 69). Dans la tra-
dition homérique, Ἀξιóς n’est d’ailleurs qu’une uaria lectio, et la vulgate
(non suivie par la quasi-totalité des éditeurs) n’a que Ἄξιος 47.
Vendryes citait quelques autres exemples douteux parmi les noms
communs 48, comme ἱλαρή (Androm. apud Gal.), nom d’un remède, qui
serait le « féminin de l’adjectif ἵλαρος » ; mais en réalité, ἱλαρóς « bien-
veillant, gai, joyeux » est oxyton, et ἱλαρή n’obéit donc pas à la loi des
appellatifs 49. Il citait également θαλαμιή / θαλαμι (Hdt., Ar., inscriptions)
« ouverture pour le passage de la rame à la partie inférieure du navire ;

Gal.), de même sens que ἀμφιδέξιος « adroit des deux mains, ambidextre » (sens
attesté chez Hippon., Hpc., Arist.), est tardif. Voir aussi P. Wathelet, Dictionnaire des
Troyens de l’Iliade, Liège, 1988, p. 273-274, 1213, qui se demande également si ce
nom propre n’est pas un abréviatif de composé. Mais même dans cette hypothèse,
l’accent de Ἀμφοτερός devrait, en synchronie, être comparé à celui de ἀμφότερος.
45. Ce nom propre est accentué fautivement Ἀξίος chez J. Vendryes, op. cit., p. 154,
suivi par J. Kuryłowicz, Études indoeuropéennes, I, Cracovie, 1935, p. 186, et par
P. Probert, Ancient Greek Accentuation, op. cit., p. 298 n. 6, comme s’il obéissait à
la loi de Wheeler à partir d’une forme oxytone.
46. Voir le dossier étymologique dans LfgrE (I, col. 972-973, notice de W. Spoerri). Voir
aussi, plus récemment, I.  von Bredow, « Ethnonyme und geographische Bezeich-
nungen der Thraker bei Homer », dans J. G. P. Best et N. M. W. De Vries (éd.),
Thracians and Mycenaeans: Proceedings of the Fourth International Congress of
Thracology, Rotterdam, 24-26 September 1984, Leyde - New York - Copenhague -
Cologne, 1989, p. 146, avec de nombreux renvois à la bibliographie antérieure.
47. Voir le dossier accentuel dans LfgrE (I, col. 973).
48. Voir J. Vendryes, op. cit., p. 153 et 161.
49. Cf. T. Bolelli, « Rapporti fra intonazione e valore morfologico e semantico nei nomi
d’agente e nei nomi d’azione in -ā e in -o- in greco », SIFC 24 (1950), p. 96.
240 éric dieu

rame du rang le plus bas », vs θαλάμιος « du rang inférieur de rames ».


Mais l’adjectif, qui n’est d’ailleurs qu’un mot de grammairiens 50, serait
oxyton (θαλαμιóς) selon Arc. 44, 2 Schmidt, Hdn. I, 119, 25 Lentz, tandis
que d’autres sources indiquent, pour θαλαμιή / θαλαμι, un accent sur le
ι 51. La meilleure hypothèse consiste à voir dans θαλαμιή / θαλαμι un
dérivé oxyton de θάλαμος (Hom.+) « chambre intérieure de la maison »
(aussi « creux de la coque d’un bateau » chez Timée et Pollux) 52, avec
l’oxytonèse qui est largement répandue dans les dérivés en -ιή / -ι de
sens concret. Un autre exemple éventuel, qui n’est pas cité par Vendryes,
serait δοκιμή (Nouveau Testament, Dsc.+) « épreuve, essai ; caractère
éprouvé », dérivé, selon certains auteurs, de l’adjectif δόκιμος (Alc.+)
« acceptable, approuvé, estimé » 53, avec un déplacement accentuel
inverse de celui des abstraits désadjectivaux du type de κάκη (Eschl.+)
« méchanceté, lâcheté » vs κακός « méchant, lâche ». Mais il est plus
simple d’y voir un dérivé inverse de δοκιμάζω (ion.-att.) « mettre à
l’épreuve ; approuver » (verbe lui-même issu de δόκιμος) 54 : la dériva-
tion inverse n’exclut nullement l’oxytonèse dans les noms en -η, comme
le montre par exemple μενοινή (Call.+) « vif désir », dérivé inverse de
μενοινάω (Hom.+) « désirer vivement, être plein d’ardeur ».
Parmi les formes citées par Vendryes, il ne reste alors, comme
exemples d’un tel déplacement d’accent, que les noms en -μενóς, -μενή,
et les deux anthroponymes Ἀμφοτερός et Σκυμνóς. Le cas de Σκυμνóς
peut d’ailleurs être analogique de celui des anthroponymes en -μενός.
D’emblée, il paraît raisonnable de penser qu’il serait illégitime d’éta-
blir une règle générale à partir de termes qui appartiennent manifeste-
ment, pour la quasi-totalité d’entre eux, à un type suffixal particulier. Il
convient donc d’examiner de plus près les exemples qui comportent cette
suffixation.

50. La forme θαλαμιῶν qui apparaît chez Thucydide (IV, 32) n’est vraisemblablement
pas le génitif pluriel de θαλαμιóς, mais doit plutôt être celui d’un nom en -ᾱς,
θαλαμίᾱς, qui est attesté par ailleurs (App., Them.) : voir H. Frisk, Griechisches
etymologisches Wörterbuch, Heidelberg, 1960-1972, I, p. 648 ; DELG, p. 419.
51. Cf. M. Scheller, Die Oxytonierung der griechischen Substantiva auf -ιᾱ, Dissertation
Zurich, 1951, p. 129.
52. Cf. H. Frisk, op. cit., I, p. 648 ; DELG, p. 419.
53. Voir C. D. Buck et W. Petersen, A Reverse Index of Greek Nouns and Adjectives,
Chicago, 1945, p. 213.
54. Cf. H. Frisk, op. cit., I, p. 405 ; DELG, p. 291.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 241

2.2. Examen spécifique des formes en -μενός, -μενή


2.2.1. Description des formes concernées
Les faits accentuels concernant ces formes, qui sont, pour la plupart
d’entre elles, tirées de participes présents ou aoristes en -μενος (ou, le
cas échéant, de participes parfaits en -μένος) 55, sont traités dans l’édition
d’Hérodien par Lentz (I, 180, 24-34 - 181, 1-3, et 329, 22-29 - 330, 1-11).
Ces passages d’Hérodien sont reconstruits à partir de sources diverses,
en particulier Étienne de Byzance (vie s. apr. J.-C.), dont il faut consulter
l’édition beaucoup plus moderne de Billerbeck et alii (2006-2017) ; mais
une partie devait effectivement se trouver chez Hérodien, puisqu’Héro-
dien a servi de source à Étienne de Byzance 56, et que certains de ces faits
sont mentionnés dans l’épitomé du Pseudo-Arcadius (73, 21-22 - 74, 1-4,
et 127, 16-18 Schmidt). On y trouve ainsi :
♦♦ Des toponymes principalement féminins : Κλαζομεναί (Hdt.+,
ville d’Ionie), Ἀκε(σ)σαμεναί (ville de Macédoine), Ἀλαλκο-
μεναί (ville de Béotie), Ἰδομεναί (ville de Macédoine), Eὐρυμεναί
(ville de Thessalie et d’Épire), Mισγομεναί (ville de Thessalie),
Ὀργομεναί (ville d’Illyrie), Δεξαμεναί (partie d’Ambracie), Εἰδο-
μενή (ville de Macédoine). Il faut y ajouter un toponyme masculin
non cité par Hérodien : Ὀρχομενός / Ἐρχομενός (Hom.+, ville de
Béotie et ville d’Arcadie).
♦ Des anthroponymes masculins : Στησαμενóς, Ἀκε(σ)σαμενός
(Φ 142) 57, Φαμενóς, Ἰαμενóς (M 139, 193, avec ῑ), Σῳζομενóς

55. Sur l’étymologie de ces formes, voir notamment Kamptz, HomPN, p. 164-166. Cer-
taines d’entre elles ne proviennent pas d’anciens participes, mais doivent résulter
de l’interpretatio Graeca de mots étrangers (comme, entre autres, la ville d’Illyrie
Ὀργομεναί). Kamptz avance cette hypothèse à propos de plusieurs formes, d’une
manière qui peut parfois sembler excessive : outre Ἀκε(σ)σαμενός (cf. la note ci-
dessous), cela vaudrait aussi, selon lui, pour Ἰαμενóς, Kτιμένη, Ὄρμενος, etc. Que
ces formes soient d’origine grecque ou résultent d’une interpretatio Graeca de mots
étrangers au moyen d’un rattachement à une suffixation de type grec, voire à une
racine grecque, elles doivent être analysées, pour la place de l’accent, à l’intérieur
du système grec.
56. Cf. E. Dickey, Ancient Greek Scholarship, Oxford - New York, 2007, p. 101.
57. Sur ce nom, voir Chronique d’étymologie grecque, 12 (RPh 83, 2009, p. 289, notice
de C. de Lamberterie), avec des éléments de bibliographie sur l’analyse de cet
anthroponyme comme issu du participe aoriste ἀκεσσάμενος (de ἀκέομαι / -οῦμαι
« soigner, guérir »), et avec mention d’une interprétation concurrente de Kamptz,
242 éric dieu

(noté Σωζομενóς chez Hdn.), Δεξαμενός (Call., D.H.+), Τῑσαμενός /


Tεισαμενóς (Hdt.+), Kλαυσαμενóς, Ἀγχομενóς (Ar.). On peut
ajouter à cette liste Ἀκουμενός (X., And., Pl.), qui n’est pas cité
par Hérodien 58.
L’oxytonèse des anthroponymes et celle des toponymes doivent être
liées : dans plusieurs cas, le toponyme trouve son origine dans un anthro-
ponyme. Il en est ainsi de Ἀκε(σ)σαμεναί, ville fondée par Ἀκε(σ)σα­
μενός, et de Δεξαμεναί, qui tire son nom de celui de Δεξαμενός (Hdn. I,
330, 2, 7-8 Lentz, passage reconstruit d’après Étienne).
Il est notable que les féminins en -μενή / -μεναί oxytons sont des
toponymes. L’accentuation des noms communs δεξαμενή et εἱαμενή a
donc chance d’être liée à celle de ces noms propres : le nom de la prairie
humide, εἱαμενή, renvoie à une réalité locale ; et si δεξαμενή est d’abord
un nom d’instrument (<  « ce qui sert à recevoir [de l’eau] »), il sup-
pose aussi l’occupation d’un certain espace, et, surtout, ce nom coexiste
avec le toponyme Δεξαμεναί. Il est, en tout cas, préférable de penser
que l’oxytonèse a pu s’étendre de certains noms propres vers ces noms
communs plutôt que l’inverse : les quelques autres cas d’un déplacement
de l’accent vers la fin du mot par rapport à leur forme de fondation qui
ont été mentionnés plus haut (2.1) s’observent justement dans des noms
propres (Ἀμφοτερός vs ἀμφότερος, et Σκυμνóς vs σκύμνος).
Il existe plusieurs exceptions à l’oxytonèse des noms propres en
-μενος / -μενη. Il faut mentionner, parmi les féminins, les noms de divi-
nités Δυναμένη (Σ 43, Hes.), Kλυμένη (Σ 47, etc.) et Mελπομένη (Hes.+),
ainsi que les toponymes Kασμένη (Hdt., et au pluriel chez Th., ville de
Sicile), Kτιμένη (A.R., ville de Thessalie ; il s’agit aussi d’un nom de
femme dans l’Odyssée), Kατακεκαυμένη (Str., contrée de Mysie ou de
Méonie), Σταμένη (ville des Khalybes) et Ἀρμένη (village de Paphla-
gonie). Dans la liste des Néréides du chant Σ où se trouvent Δυναμένη
et Kλυμένη, est également attestée la forme Δεξαμένη (Σ 44) 59, qui se

HomPN, p. 164-165, 265, 305 : cet anthroponyme, qui est le nom d’un roi thrace,
résulterait de l’interpretatio Graeca d’un nom étranger (cf. le toponyme macédonien
Ἀκε(σ)σαμεναί).
58. Sur cet anthroponyme, voir Chronique d’étymologie grecque, 12 (RPh 83, 2009,
p. 289, notice de C. de Lamberterie).
59. L’accentuation de Δεξαμένη est bien indiquée par les scholiastes (schol. B ad Σ 44,
citée en note de la page 330, tome I, de l’édition d’Hérodien par Lentz).
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 243

distingue donc par l’accent du toponyme Δεξαμεναί. Il apparaît ainsi que,


parmi les noms féminins, l’oxytonèse est principalement répandue parmi
les toponymes qui sont des pluralia tantum.
On trouve également des exceptions parmi les anthroponymes mas-
culins, comme Ἰάλμενος (B  512, I  82), Ὄρμενος (Θ  274, M  187),
Kλύμενος (myc. ku-ru-me-no, γ 452, etc. ; cf. Kλυμένη, cité ci-dessus).
Ces exceptions s’expliqueraient, suivant Hérodien (I, 180, 24 - 181, 3
Lentz, cf. Arc. 73, 21 - 74, 4 Schmidt), par le fait que ces anthroponymes
étaient distincts formellement des participes correspondants, et qu’il n’y
avait donc pas lieu de les en différencier au moyen d’un déplacement
d’accent. De fait, ces vieilles formes athématiques sont distinctes des
formes vivantes de participes moyens (ou, au présent, moyens-passifs) :
Ἰάλμενος était distinct des participes moyens vivants de ἰάλλω « lancer,
jeter » (prés. ἰαλλόμενος, aor. ἰηλάμενος), de même que Ὄρμενος de
ceux de ὄρνῡμι « faire se lever, faire s’élancer, soulever » (prés. ὀρνύ-
μενος, aor. ὀρσάμενος). Mais il existe un vieux participe aoriste athé-
matique ὄρμενος (Λ 326, 572, P 738, Φ 14), ainsi qu’un ancien participe
κλύμενος, assez rare il est vrai (Antim., Theoc.), qui est employé comme
équivalent de κλυτός « renommé, célèbre » (de κλύω « entendre »). On
observera toutefois que, selon ce principe, certaines formes athématiques
qui sont oxytones auraient pu ne pas l’être : c’est le cas, par exemple, de
Ἰαμενóς (avec ῑ et ᾰ 60), qui n’avait aucune raison d’être accentué dif-
féremment du participe présent vivant dans la langue de άομαι / ῶμαι
« soigner, guérir », à savoir αόμενος / ώμενος, qui est thématique.
2.2.2. Analyse diachronique : archaïsme ou innovation ?
On a souvent supposé que l’oxytonèse de ces mots résulterait de la
conservation d’une accentuation ancienne 61 : ils formaient, en synchronie,

60. Il ne s’agit donc pas d’un ancien participe parfait, le parfait (1re pers. du sg.) étant
�ᾱμαι, avec ᾱ.
61. Cf. B.  I.  Wheeler, Der griechische Nominalaccent, Strasbourg, 1885, p.  52,
67 ; Kuryłowicz, op. cit., 1935, p.  186-187, 194 n.  2, mais l’auteur a renié cette
thèse dans ses ouvrages postérieurs (Kuryłowicz soutenait également, dans son
ouvrage de 1935, que, dans les couples Ἀμφοτερός / ἀμφότερος, Ἀξιóς / ἄξιος et
Σκυμνóς / σκύμνος, les noms propres préserveraient une accentuation héritée) ;
Schwyzer, GG I, p. 380 ; T. Bolelli, art. cit., p. 96 ; N. Van Brock, Recherches sur le
vocabulaire médical du grec ancien. Soins et guérison, Paris, 1961, p. 23.
244 éric dieu

un petit groupe bien distinct de la classe productive des participes, et ils


auraient pu, par conséquent, préserver l’oxytonèse originelle au moment
où ceux-ci l’ont perdue. En dehors des noms propres, il est notable, à cet
égard, que εἱαμενή est totalement isolé à l’intérieur du grec.
Bolelli (voir n. 61), par exemple, soutient que ces noms conserve-
raient l’accent originel des participes parfaits en *-μενός. Ceux-ci, oxy-
tons à l’origine, ont pu connaître un recul de l’accent conformément à
la loi de Wheeler, lorsque la finale était dactylique, et ce recul se serait
généralisé ensuite à l’ensemble de ces formations 62. Mais ces noms sont
tirés de participes présents et de participes aoristes, et non de participes
parfaits, à l’exception de Kατακεκαυμένη (Str., contrée de Mysie ou de
Méonie), qui n’est pas oxyton ! P. Probert propose une analyse un peu
différente 63 : les formes en -μενóς, -μενή préserveraient une accentua-
tion ancienne, et celle-ci serait héritée de l’accentuation des participes
en -μενο-, qui étaient tous oxytons (aussi bien les participes présents et
aoristes que les participes parfaits). Plusieurs évolutions se seraient pro-
duites ultérieurement dans l’accentuation de ces participes. Tout d’abord,
les participes parfaits à finale dactylique auraient connu un recul de l’ac-
cent sur la pénultième, selon la loi de Wheeler. Ensuite, les participes
présents et aoristes en -μενο- auraient été refaits avec une accentuation
récessive, par analogie de la plupart des autres formes verbales (ils ne
pouvaient pas obéir à la loi de Wheeler, car ils ont, du moins pour la
majeure partie d’entre eux, une finale -ομενος ou -αμενος non dacty-
lique) ; et, d’autre part, les participes parfaits dont la finale n’était pas
dactylique auraient connu un recul de l’accent sur la pénultième, analo-
gique de celui des autres participes parfaits.
Mais cette théorie sur l’accentuation des participes est impossible.
En indo-européen, les participes présents moyens thématiques étaient
accentués soit selon le type véd. bháramāṇa- (≈ φερόμενος < *φέρο-
μενος), soit selon le type véd. diśámāna- (avec, dans ce second cas, l’ac-
cent sur la voyelle thématique) ; du point de vue de la place de l’accent,
le grec a généralisé le premier type dans les présents thématiques, et le
second dans les aoristes thématiques (par exemple, pour λείπω « laisser,

62. J.  Vendryes, op. cit., p.  149 ; M.  Lejeune, Phonétique historique du mycénien et
du grec ancien, Paris, 1972, p. 298 ; N. E. Collinge, The Laws of Indo-European,
Amsterdam - Philadelphie, 1985, p. 222.
63. Voir P. Probert, Ancient Greek Accentuation, op. cit., p. 92-93 et 298, n. 6.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 245

quitter », prés. λειπόμενος < *λείπομενος : aor. λιπόμενος, où l’opposi-


tion accentuelle entre les deux types n’est plus visible du fait de la loi
de limitation, mais s’observe à l’actif dans prés. λείπων, -οντος : aor.
λιπών, -όντος). Suivant la reconstruction la plus communément défendue
actuellement 64, on pose un suffixe inaccentué *-mh1no- dans les parti-
cipes présents thématiques, et un suffixe oxyton *-mh1nó- dans les par-
ticipes parfaits. Cette divergence accentuelle serait une conséquence du
contraste accentuel qui pouvait exister entre les formations thématiques
et athématiques de participes : l’accentuation des participes athématiques
moyens répond à celle de l’indicatif athématique moyen (cf. le parfait
moyen véd. riricé « il a laissé », en face du présent moyen véd. bhárate
« il porte ») 65. Les faits peuvent être résumés comme suit :
♦♦ Formations athématiques en *-m̥ h1nó-, après consonne :
*le-liku̯ ‑m̥ h1nó-s (racine *lei̯ ku̯ - « laisser, quitter ») > véd. riricāná-
(redoublement en -i- par harmonie vocalique) ; gr. λελειμμένος, qui
remplace *λελιμμηνóς, sous la triple influence de la forme post­
vocalique du suffixe (*-mh1no- > -μενο-), du vocalisme radical de
λείπω et, pour l’accent, de la loi de Wheeler.
64. Pour la reconstruction laryngaliste du suffixe, voir G. Klingenschmitt, « Tocharisch
und Urindogermanisch », dans H. Rix (éd.), Flexion und Wortbildung. Akten der
V. Fachtagung der Indogermanischen Gesellschaft (Regensburg, 9.-14. September
1973), Wiesbaden, 1975, p. 159-163 ; G.-J. Pinault, « Sound laws and the suffix of
the PIE “middle” participle », dans R. Sukač et O. Šefčík (éd.), The Sound of Indo-
European 2. Papers on Indo-European Phonetics, Phonemics and Morphophone-
mics, Munich, 2012, p.  227-251. Voir aussi R.  Lipp, Die indogermanischen und
einzelsprachlichen Palatale im Indoiranischen, Heidelberg, 2009, II, p. 445-448 sur
le suffixe *-mh1no- en indo-iranien, avec de nombreux renvois bibliographiques.
On ne saurait cependant passer sous silence certaines difficultés posées par cette
reconstruction laryngaliste en ce qui concerne les données arméniennes, et, par voie
de conséquence, les données grecques : question sur laquelle on renvoie à C.  de
Lamberterie (compte rendu de G.  Klingenschmitt, Aufsätze zur Indogermanistik,
Hambourg, 2005, Kratylos 54 [2009], p.  54-55, avec bibliographie), à propos du
nom arménien du corps, marmin (gén. marmnoy), qui aurait chance de remonter à
un étymon *mr̥ -meno-, lequel serait un neutre substantivé du participe moyen *mr̥
-meno- « qui meurt, périssable » (un étymon *mr̥ -mh1no- ne permettrait en aucun cas
de rendre compte de ce substantif arménien). Pour plus de détails, voir aussi C. de
Lamberterie, « Grec, phrygien, arménien : des anciens aux modernes », JdS 2013,
p. 43-47.
65. Cf. H. Rix, Historische Grammatik des Griechischen. Laut- und Formenlehre,
Darmstadt, 1976, p. 236 ; M. Meier-Brügger, Indogermanische Sprachwissenschaft,
Berlin - New York, 2010, 9e éd., p. 319-320.
246 éric dieu

♦♦ Formations thématiques en *-o-mh1no- ou *-ό-mh1no- (sans dis-


parition de la laryngale suivant l’« effet de Saussure » en grec,
sans doute par analogie des formations athématiques) : *bhér-o-
mh1no‑s (racine *bher- « porter ») > véd. bháramāṇa- (vocalisme
du suffixe refait d’après celui de -āna-), gr. φερόμενος.
Les participes présents et aoristes moyens grecs athématiques en
-μενος auraient généralisé l’absence d’accentuation du suffixe, sous l’in-
fluence du type thématique. En revanche, les participes parfaits moyens,
étant essentiellement athématiques, seraient régulièrement oxytons, puis,
en grec, seraient devenus paroxytons suivant la loi de Wheeler géné-
ralisée à partir des formes à finale dactylique. On ne saurait exclure,
toutefois, l’idée selon laquelle les participes parfaits en -μένος, indépen-
damment de la loi de Wheeler, pourraient avoir une accentuation ana-
logique de celle des participes parfaits actifs en *-ϝώς, *-ϝότος, qui est
héritée (λελυ-μέν-ος, -μέν-ου, comme λελυ-κ-ώ-ς, -ότ-ος).
Ainsi, il est préférable de tenir l’oxytonèse pour secondaire dans
toutes les formes en -μενός / -μεναί étudiées ici 66. De fait, il n’y a pas
de raison de considérer qu’elles refléteraient une accentuation de parti-
cipes présents et aoristes moyens athématiques datant d’une époque anté-
rieure à la généralisation de l’accentuation récessive dans ces formations
d’après le type thématique : on n’y observe absolument aucune corréla-
tion nette entre formes thématiques et accentuation récessive d’une part,
et formes athématiques et oxytonèse d’autre part. Il n’y a pas lieu, par
ailleurs, de supposer que ces formes conserveraient la trace d’une accen-
tuation caractéristique de formes athématiques de participes, étendue
analogiquement aux formes thématiques.
Mais encore faut-il déterminer pourquoi l’oxytonèse a pu se déve-
lopper précisément dans ce type suffixal, puisque, selon la règle générale,
66. Cf. J. Kuryłowicz, L’accentuation des langues indo-européennes, Wrocław - Cra-
covie, 1958, 2e éd., p. 156-157 ; Indogermanische Grammatik, II. Akzent – Ablaut,
Heidelberg, 1968, p. 91, qui renie ici l’analyse qu’il avait proposée dans un ouvrage
de 1935, Études, op. cit. (p. 186-187, 194 et n. 2). Kuryłowicz postule un déplace-
ment de l’accent vers la fin du mot qui se serait fait dans un premier temps dans les
noms en -η, du fait de l’ambiguïté du génitif pluriel en -μενῶν des participes fémi-
nins en -μένη (celui-ci pouvait être réinterprété comme le génitif pluriel de formes
oxytones en -μενή). À partir de là, l’oxytonèse se serait étendue analogiquement aux
masculins en -μενóς. Mais le recours au génitif pluriel comme forme-pivot n’est
sans doute pas indispensable.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 247

l’accent des noms propres tirés de noms communs non oxytons ne se


déplace pas vers la fin du mot. Comme on l’a indiqué plus haut (2.2.1),
l’accentuation des noms communs εἱαμενή et δεξαμενή a chance d’être
secondaire par rapport à celle des toponymes en -μεναί. C’est donc du
côté des noms propres que la solution est à chercher.
2.2.3. Les toponymes comme point de départ de l’extension
de l’oxytonèse ?
L’oxytonèse est loin d’être rare dans les toponymes en -η / -ᾱ. On y
rencontre en particulier d’autres cas d’avancée de l’accent vers la fin du
mot par rapport aux noms communs dont les toponymes concernés sont
issus. Mais il semble qu’ils ne s’expliquent pas simplement par une loi
des appellatifs, car l’oxytonèse apparaît aussi dans des toponymes issus
de noms communs déjà oxytons.
L’oxytonèse se rencontre dans d’autres toponymes terminés par -νη ;
elle y est surtout répandue parmi les pluralia tantum, comme c’est le
cas pour les toponymes en -μεναί 67. Leur type de formation n’est évi-
demment pas le même (certaines des formes concernées sont d’ailleurs
inanalysables), mais l’identité des finales (à défaut de pouvoir toujours
parler de suffixes) peut avoir favorisé une influence de ces formes les
unes sur les autres. Parmi les pluralia tantum terminés par -ναί, on peut
mentionner, entre autres exemples, Θεναί (Hdn. I, 329, 13 Lentz 68 ; ou
Θενή chez Arc. 127, 14 Schmidt), ville de Crète ou d’Arcadie ; Mεναί
(Hdn. I, 329, 14 Lentz), ville de Sicile ; Kολωναί (Hdn. I, 337, 33-34
Lentz), ville de Troade (Th., X.) ou nom d’un dème attique (Call.), vs
κολώνη « hauteur, colline » (cf. le nom de dème attique Kολωνóς [Th.,
Soph.+], accentué comme κολωνóς « hauteur, colline »). Dans le cas
de Eὐναί (Hdn. I, 329, 18 Lentz), ville de Carie, l’accent est le même
que dans εὐνή « couche, lit ». En dehors des noms à finale -νη, on peut
également citer les faits suivants, qui sont loin d’être exhaustifs, et qui
apparaissent en particulier (mais pas exclusivement) dans des noms de
dèmes :

67. Voir les données chez H.  W.  Chandler, op. cit., p.  42-43, avec indication des
nombreuses exceptions à l’oxytonèse.
68. Les données de l’édition d’Hérodien par Lentz sont, ici encore, largement puisées
chez Étienne de Byzance.
248 éric dieu

♦♦ Noms de dèmes terminés par -λή, ou toponymes terminés par -λαί


(voir Chandler, op. cit., p. 38) : des noms de dèmes tels que Ἀγκυλή
(Arc. 125, 17 Schmidt ; Hdn. I, 323, 22 Lentz) vs ἀγκύλη « arti-
culation, courbure du bras, pli du genou ; attache » 69 ; Ἀγρυλή /
Ἀγραυλή (Arc. 125, 18 Schmidt ; Hdn. I, 323, 22 - 324, 4 Lentz)
vs ἄγραυλος « qui demeure aux champs, qui passe la nuit aux
champs ») ; Ἀγγελή (Arc. 125, 2 Schmidt ; Hdn. I, 322, 10 Lentz)
vs ἄγγελος « messager », etc. On trouve aussi des toponymes oxy-
tons tirés de noms communs oxytons : des noms de dèmes comme
Kεφαλή (Hdn. I, 321, 14 Lentz ; cf. κεφαλή « tête »), Φῡλή (Ar.,
X., D. ; cf. φῡλή « tribu ; corps de troupes »), etc., ou d’autres
noms de lieux comme Aὐλαί (Hdn. I, 319, 4 Lentz), port de Cilicie
(cf. αὐλή « endroit où l’on passe la nuit, cour, etc. »), ou encore,
avec un λ non suffixal, Ἐπιπολαί (Th., Plu., etc. ; cf. Hdn. I, 323,
7 Lentz), hauteur au nord-ouest de Syracuse (cf. ἐπιπολή « sur-
face », surtout attesté au gén. adverbial ἐπιπολῆς « à la surface »).
♦♦ Noms de dèmes terminés par d’autres finales : par -ι 70 ; par -σή 71,
par exemple Bησσή (Arc. 131, 2 Schmidt ; Hdn. I, 342, 4 Lentz) et
Περγασή (Περγασῆθεν « du dème Pergasè » chez Is., Περγασῆσι
« dans le dème Pergasè » chez Ar. ; cf. Arc. 131, 2 Schmidt ; Hdn.
I, 342, 4 Lentz) ; etc.
♦♦ Autre exemple plus isolé : Ἐλευθεραί (X., Plu.+ ; cf. Arc. 115, 11
Schmidt ; Hdn. I, 260, 15 Lentz), localité à la frontière de l’Attique
et de la Béotie, etc., vs ἐλεύθερος « libre » 72.

69. Cf. plus haut (1.2) un mouvement d’accent inverse dans l’anthroponymie : ἀγκύλος
« courbé » → Ἄγκυλος.
70. M. Scheller, op. cit., p. 129, 136-137, explique l’oxytonèse de ces noms de dèmes
en -ι comme secondaire par rapport à *-ίᾱ, par un traitement consonantique /y/ du
/i/ suffixal dans la prononciation populaire, qui aurait entraîné un déplacement de
l’accent sur la voyelle suivante. Notre présentation des faits invite à penser qu’il
s’agit plutôt d’un fait accentuel spécifique à certaines classes de toponymes, et tout
particulièrement aux noms de dèmes, plutôt que d’une question de nature phonétique
ou sociolectale. Sur cette question, voir É. Dieu, L’accentuation des noms en *‑ā
(*‑eh2) en grec ancien et dans les langues indo-européennes. Étude morphologique
et sémantique, Innsbruck, 2016, p. 267-271.
71. Voir H. W. Chandler, op. cit., p. 51.
72. Il se peut que Ἐλευθεραί soit un nom d’origine étrangère refait d’après ἐλεύθερος,
avec un déplacement de l’accent vers la fin du mot : voir H. Frisk, op. cit., I, p. 491 ;
DELG, p. 336-337.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 249

Au vu de ces quelques faits d’accentuation, il ne semble pas impos-


sible de postuler que l’accentuation des toponymes en -μεναί (ou,
rarement, en -μενή) devrait être rattachée à une tendance accentuelle
répandue dans certains types de toponymes en -η / -ᾱ (surtout, en dehors
des noms de dèmes, parmi les pluralia tantum, et notamment parmi ceux
qui se terminaient par -ναί), mais d’origine difficile à déterminer exac-
tement 73. L’oxytonèse de ceux de ces toponymes qui sont tirés de noms
communs ne doit pas nécessairement être imputée à la loi des appella-
tifs, puisque certains de ces toponymes répondent à des noms communs
déjà oxytons. Il en irait donc de même, a priori, pour les toponymes
en -μεναί. Il serait alors envisageable de postuler une influence analo-
gique de l’accentuation des toponymes en -μεναί sur celle des anthropo-
nymes en -μενός : une telle influence serait tout à fait vraisemblable, car,
comme on l’a vu ci-dessus (2.2.1), ces toponymes et ces anthroponymes
étaient souvent liés. On aurait donc affaire à un système constitué à date
grecque, plutôt qu’à des résidus de faits accentuels directement hérités
de l’indo-européen.
2.2.4. Une innovation commune avec le védique ?
Il faut toutefois ajouter à ce dossier un élément qui serait suscep-
tible d’en modifier l’interprétation. Il existe en védique un phytonyme
trāyamāṇā́ - (AV.+), oxyton, issu du participe trā́ yamāṇa- (RV.+) « qui
préserve, qui protège » 74. Celui-ci présente apparemment le même phé-
nomène accentuel que les toponymes en -μεναί et les anthroponymes en
-μενός qui sont tirés de participes.
Or, comme en grec, les cas de déplacement accentuel vers la fin du
mot selon la loi des appellatifs sont rares en védique (tandis que les
exemples d’un mouvement d’accent vers le début du mot sont nom-
breux). Wackernagel en cite trois 75 :
sukr̥ tá- (nt. ; RV.+) « bonne action » vs súkr̥ ta- (RV.+) « bien fait » (cf.
avest. hūkǝrǝta-, de même sens) ;

73. Pour des éléments de réflexion sur l’origine de cette tendance accentuelle, qui, au-
delà des toponymes, concerne également des noms communs de sens local, souvent
en lien avec une valeur collective, et comportant les mêmes suffixes que les topo-
nymes mentionnés ci-dessus, voir É. Dieu, op. cit., p. 270-271.
74. Cf. J. Wackernagel et A. Debrunner, op. cit., II.2, p. 240.
75. Voir J. Wackernagel et A. Debrunner, op. cit., II.1, p. 20.
250 éric dieu

asitá- (AV.) « serpent noir » vs ásita- (RV.+) « noir » ;


br̥ haddivā́ - (RV. II.31.4c, V.41.19c, V.42.12c, X.64.10a), nom ou épiclèse
de déesse, vs br̥ háddiva- (RV.) « céleste, qui réside dans les hauteurs du
ciel ».
Toutefois, ces exemples sont bien spécifiques. Le troisième n’est
pas parfaitement évident : l’adjectif br̥ háddiva- s’accentue également
br̥ haddivá- dans un passage du R̥ gveda où il s’applique à des dieux
(X.66.8b), sans que cette accentuation soit liée à cet emploi, puisque la
forme br̥ háddiva- qualifie également des dieux (I.167.2b, II.2.9b, etc.).
Quant à sukr̥ tá-, il s’agit d’un fait d’accentuation spécifique aux suf-
fixés en -ta-, qui s’observe bien dès le R̥ gveda : les adjectifs composés
ou préfixés dont le second membre est un adjectif verbal en -ta- sont
généralement accentués sur le premier membre (d’où l’accentuation de
l’adjectif súkr̥ ta-), mais, en cas de substantivation, ils sont habituelle-
ment oxytons 76. On pourrait d’ailleurs se demander si la même analyse
ne devrait pas être avancée à propos de asitá-, bien qu’il ne s’agisse pas
d’un adjectif verbal en -ta- 77 : il existe, à l’époque classique, un adjectif
sita- (MBh.+) « pâle, blanc » qui a clairement été tiré d’une réinterpré-
tation de l’adjectif ásita- comme une forme privative en a- 78. Si cette
réinterprétation était au moins aussi ancienne que l’époque de l’Athar-
vaveda, on pourrait alors rendre compte du déplacement accentuel pré-
76. Voir J. Wackernagel et A. Debrunner, op. cit., II.1, p. 214 et 225-226. Le recul de
l’accent dans les adjectifs composés ou préfixés par rapport aux formes simples
d’adjectifs verbaux (qui sont oxytones, cf. kr̥ tá- « fait ») semble très ancien (cf.
J. Wackernagel et A. Debrunner, op. cit., II.1, p. 238) : on peut comparer gr. θετός
« posé, placé, établi » / σύνθετος (Eschl., Hdt.+) « composé, complexe », avec véd.
hitá- « posé, placé, établi » / práhita- (RV.+) « excité, stimulé ; jeté, lancé » (θετός =
hitá- < *dhh1-tό-s). L’oxytonèse des formes substantivées provient sans doute d’un
déplacement accentuel à partir des formes adjectivales accentuées sur le premier
membre. Elle relèverait donc d’un développement interne au védique, comme le
suggère le fait que l’on n’observe rien de comparable en grec. Pour une autre hypo-
thèse, voir cependant J. Kuryłowicz, Accentuation, op. cit., p. 85, à propos des com-
posés en -ta- ayant pour premier membre a(n)-, su- et duṣ- : les formes substanti-
vées, s’étant détachées de la série productive des adjectifs verbaux, conserveraient
l’accentuation héritée des adjectifs verbaux simples en -ta- (sukr̥ tá- « bonne action »
préserverait immédiatement l’accentuation de kr̥ tá- « fait », etc.).
77. Sur l’étymologie de ce mot, qui est difficile, voir M. Mayrhofer, Etymologisches
Wörterbuch des Altindoarischen, Heidelberg, 1986-2001, I, p. 146.
78. Cf. J. Wackernagel et A. Debrunner, op. cit., II.1, p. 38 ; II.2, p. 327 ; M. Mayrhofer,
op. cit., I, p. 146.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 251

senté par la forme asitá- de la même manière que de celui de sukr̥ tá-, en
considérant que le couple ásita- / asitá- aurait été traité, du point de vue
de l’accent, sur le même plan que les formations en -ta-.
L’exemple de trāyamāṇā́ - est donc plutôt isolé en védique, d’autant
que les participes substantivés en -māna- sont très rares 79. Ce nom aurait
donc des chances de provenir d’un type de formation résiduel, et le dépla-
cement accentuel vers la fin du mot qu’il suppose par rapport au participe
trā́ yamāṇa- pourrait théoriquement remonter à une préhistoire commune
avec les formes grecques en -μενός et -μεναί. Mais il est difficile d’aller
plus loin. Force est de constater que l’oxytonèse des toponymes grecs en
-μεναί ne constitue pas une anomalie dans le système accentuel des topo-
nymes grecs, et qu’il n’est donc pas nécessaire d’y voir un fait d’accen-
tuation remontant à l’indo-européen (rien ne permettant clairement de
penser que l’accentuation des toponymes en -μεναί serait à l’origine de
celle des autres toponymes terminés par -ναί, etc.) ; et il faut reconnaître
que la comparaison avec le seul mot védique trāyamāṇā́ - constituerait un
argument bien maigre pour étayer une telle idée.

2.3. Oxytonèse et suffixation


Les cas de mouvement d’accent vers la fin du mot sont donc assez
isolés dans les anthroponymes comme dans les noms communs. Ils
apparaissent parfois en lien avec la suffixation (au moins dans le cas des
formes en -μενος, -μενη) :
— Suffixe -μενος : l’oxytonèse pourrait trouver son origine dans les
toponymes en -μεναί (pluralia tantum), à partir desquels elle se serait
étendue aux anthroponymes en -μενός (sans, toutefois, que tous les
anthroponymes en -μενος aient connu cette analogie), et peut-être, par
voie de conséquence, à un anthroponyme en -μνός, Σκυμνóς, ainsi qu’aux
noms communs εἱαμενή et δεξαμενή. Comme le suggèrent d’autres topo-
nymes où de tels déplacements d’accent sont manifestes (Kολωναί vs

79. Cf. J. Wackernagel et A. Debrunner, op. cit., II.2, p. 774. Parmi les autres formes
citées dans ce passage, on trouve un autre cas de déplacement accentuel dans le
patronyme cāyamāná-, issu de cā́ yamāna- (de la racine cāy- « observer, percevoir,
remarquer »). Mais il s’agit d’un type de déplacement accentuel très différent, lié au
phénomène de la vr̥ ddhi, cf. J. Wackernagel et A. Debrunner, op. cit., II.2, p. 110,
135-136.
252 éric dieu

κολώνη, Ἀγκυλή vs ἀγκύλη, Ἀγρυλή / Ἀγραυλή vs ἄγραυλος, etc.), mais


où l’oxytonèse apparaît également lorsque le nom commun correspon-
dant était oxyton (Eὐναί / εὐνή, Aὐλαί / αὐλή, etc.), le déplacement d’ac-
cent supposé par les toponymes en -μεναί ne doit probablement pas être
attribué à la loi des appellatifs : une récessivité accentuelle régie par
la loi des appellatifs existe bien, par ailleurs, dans les toponymes (voir
quelques exemples plus bas, §  3), mais si ces phénomènes accentuels
devaient simplement être expliqués en faisant intervenir cette loi, on s’at-
tendrait sans doute à ce que Eὐναί (← εὐνή) et Aὐλαί (← αὐλή) ne soient
pas oxytons. En outre, cette loi ne permettrait pas de comprendre pour-
quoi, parmi les féminins, seuls les toponymes en -μεναί (et, pour une
part, en -μενή) auraient connu une telle différenciation accentuelle par
rapport aux participes, tandis que les anthroponymes et théonymes fémi-
nins, ainsi que bon nombre de toponymes en -μένη, y auraient échappé.
— Suffixe -τερος : parmi les anthroponymes, le cas de Ἀμφοτερός est
net. La suffixation de ce nom a-t-elle pu favoriser un mouvement d’ac-
cent vers la fin du mot par rapport à ἀμφότερος, qui serait dû, cette fois-
ci, à la loi des appellatifs ? Il existe peut-être, en tout cas, un parallèle
dans un nom d’animal (avec un mouvement d’accent inverse par rap-
port à des noms d’animaux comme les noms de poissons, signalés plus
haut [1.1], σῖμος vs σῑμóς « camus », λεῦκος vs λευκός « blanc », etc.) :
περιστερ (Hdt.+) « pigeon commun » (le masculin περιστερóς [Phe-
recr., Alex.] « pigeon mâle » est secondaire par rapport à περιστερ, et
considéré comme fautif par Lucien, Sol. 7). Ce terme a été interprété par
Benveniste comme apparenté à πελιóς « sombre », πελειάς « pigeon sau-
vage », avec le suffixe différenciatif -τερο- (cf. pehlevi kapōtar, persan
kabōtar « le (pigeon) bleu » < iran. *kapauta-tara-), et il remonterait
à *πελιστερ « le (pigeon) sombre », en supposant une assimilation
régressive 80. L’accent de περιστερ doit être dû à la loi des appellatifs,
puisque l’adjectif en -τερο- devrait être accentué *περίστερος (< *πελί-
στερος), avec l’accentuation récessive des dérivés en -τερο- 81. Les rares
80. Voir É. Benveniste, Noms d’agent et noms d’action en indo-européen, Paris, 1948,
p. 119.
81. Voir C. de Lamberterie, Les adjectifs grecs en -υς. Sémantique et comparaison, I-II,
Louvain-la-Neuve, 1990, p. 896. Le védique confirme le caractère récent de l’oxy-
tonèse de -τερός en grec : en védique, l’oxytonèse ne se rencontre, dans les formes
suffixées en -tara-, que dans les formations adverbiales en -tarám (acc. adverbial),
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 253

exceptions à cette règle se laissent interpréter aisément : il s’agit des


adjectifs ἀριστερóς (Hom.+) « qui est à gauche » et δεξιτερóς (Hom.+)
« qui est à droite ». Ces adjectifs, qui comportent le suffixe différenciatif
-τερο-, s’opposent respectivement à δεξιóς (Hom.+) « qui est à droite »
et à σκαιóς (Hom.+) « qui est à gauche » (cf. aussi λαιóς [Tyrt.+], de
même sens) :
Tel est l’emploi ancien de l’adjectif en *-tero- : il s’oppose toujours à une
forme différente au « positif » et non à une autre forme en *-tero-. L’op-
position n’est pas : δεξιτερóς / ἀριστερóς, mais toujours δεξιóς / ἀριστερóς
ou σκαιóς / δεξιτερóς 82.
Dans ces conditions, on peut aisément recourir à l’idée d’une influence
analogique de l’accent de δεξιóς sur celui de ἀριστερóς, ainsi que de
celui de σκαιóς sur celui de δεξιτερóς 83.
On aurait ainsi, avec περιστερ, un second exemple de déplacement
de l’accent vers la fin du mot selon la loi des appellatifs à partir d’un
adjectif à accent récessif en -τερος. Mais contrairement aux formes en
-μενος, on ne parvient pas à reconstituer les étapes du développement de
l’oxytonèse dans les formes en -τερος : la loi des appellatifs s’est visible-
ment exercée indépendamment sur Ἀμφοτερός et περιστερ.

-tarā́ t (abl. adverbial) qui s’opposent à l’accentuation des adjectifs en -tara- (cf.
uttarā́ t [RV.+] « depuis le nord ; depuis la gauche », vs úttara- [RV.+] « qui est en
haut, supérieur ; qui est au nord ; qui est à gauche » ; etc.). Un déplacement de l’ac-
cent vers la fin du mot est courant, en védique, dans les contextes d’adverbiali-
sation : on peut citer par exemple l’instrumental adverbial dakṣiṇā́ (RV.+) « à
droite », vs dákṣiṇa- (RV.+) « droit, situé à droite », et l’ablatif adverbial sanā́ t (RV.,
ŚāṇkhŚr.) « depuis longtemps, toujours, pour toujours », vs sána- (RV.+) « ancien,
qui dure longtemps ». Voir J. Wackernagel et A. Debrunner, op. cit., II.1, p. 21 ; III,
p.  87 ; J.  Kuryłowicz, Accentuation, op. cit., p.  45 ; S.  Schaffner, Das Vernersche
Gesetz und der innerparadigmatische grammatische Wechsel des Urgermanischen
im Nominalbereich, Innsbruck, 2001, p. 333-334.
82. É. Benveniste, op. cit., p. 117.
83. Cf. C. de Lamberterie, op. cit., p. 896. J. Vendryes, op. cit., p. 175, mentionne aussi
l’influence de δεξιóς sur ἀριστερóς.
254 éric dieu

3. Conclusion : récessivité accentuelle et loi


des appellatifs

En fin de compte, il apparaît qu’une accentuation récessive est


attendue, en principe, dans les anthroponymes, lorsqu’ils ne comportent
pas un suffixe productif et bien caractérisé du point de vue de la place de
l’accent (auquel cas ils conservent la place de l’accent caractéristique de
leur suffixation, comme les anthroponymes en -εύς) ; mais les exceptions
sont nombreuses. Pour les noms de personnes qui sont tirés d’appellatifs
dont l’accent remontait déjà le plus loin possible de la finale d’après la
loi de limitation, les cas de déplacement de l’accent vers la fin du mot
par rapport à leurs formes de fondation sont aussi rares que spécifiques.
Il faut alors s’interroger sur l’origine de cette récessivité accentuelle.
Une synthèse récente en a été faite par P. Probert, qui présente les choses
de la manière suivante 84 :
(1) Elle rejette l’hypothèse d’une différenciation accentuelle due à la
loi des appellatifs : cette loi, ne se produisant quasiment qu’à sens unique
(vers le début du mot), perdrait toute raison d’être.
(2) Elle rejette également l’idée, retenue par Wheeler et par
Kuryłowicz 85, d’une continuation indirecte, avec généralisation à tout
le paradigme, de l’accent récessif du vocatif indo-européen (largement
abandonné en grec historique sous l’influence de l’accentuation colum-
nale du reste du paradigme 86, mais qui aurait été préservé dans la fonc-
tion secondaire de nom propre) : si cette idée est loin d’être absurde à
propos des anthroponymes (le vocatif pouvant être considéré comme le

84. P. Probert, Ancient Greek Accentuation, op. cit., p. 298-300.


85. Voir B. I. Wheeler, op. cit., p. 51-52, J. Kuryłowicz, Accentuation, op. cit., p. 117,
Id., « La position linguistique du nom propre », dans Esquisses linguistiques,
I, Wrokław  - Cracovie, 1960 (2e éd., Munich, 1973), p. 186 [article repris de
Onomastica. Pismo poświęcone nazewnictwu geograficznemu i osobowemu oraz
innym nazwom własnym, 2, 1956, p. 1-14], et Id., Grammatik, op. cit., p. 93. Voir
aussi C. Bally, op. cit., p. 41, à propos des noms propres en -ης (cf. plus haut, 1.3).
86. Sur quelques manifestations d’une accentuation récessive du vocatif en grec (par
exemple, voc. πάτερ vs nom. πατήρ « père », cf. véd. pitā́ , voc. pítar [vs pitar
inaccentué lorsque ce vocatif ne se trouve pas en tête de phrase ou de pāda]), voir
J. Vendryes, op. cit., p. 203-205 ; C. Bally, op. cit., p. 37-38 ; P. Probert, Short Guide,
op. cit., p. 71-73, 96.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 255

cas le plus important de leur paradigme 87), comment la justifier à propos


des toponymes 88 ? De fait, le recul de l’accent est répandu dans les topo-
nymes, et, même si l’oxytonèse n’y est pas inattendue avec certaines
finales (en particulier dans les noms de dèmes ainsi que dans les pluralia
tantum en -η / -ᾱ : cf. plus haut, 2.2.3), l’accentuation récessive semble
être la tendance majoritaire d’après les témoignages des grammairiens
anciens 89. P. Probert cite, parmi bien d’autres, quelques exemples com-
parables à ce que l’on observe dans les anthroponymes 90 : Mάκρον, pro-
montoire de Sicile (vs μακρός « long ») ; Λεύκη, île de Mysie et village
d’Arabie (vs λευκός « blanc ») ; Δολίχη (Call., Plb.+), nom d’une des îles
Sporades, ou autre nom de la Crète, ou ville de Piérie (en Macédoine),
etc. (vs δολιχός « long »). Supposer une analogie généralisée de l’accent
des anthroponymes vers les toponymes ne semble nullement évident.
(3) P. Probert avance alors l’idée d’une « démorphologisation » des
noms propres, qui reçoivent « l’accentuation par défaut », c’est-à-dire
l’accentuation récessive : dans un adjectif comme φαιδρός « brillant »,
-ρός est un suffixe d’adjectif identifiable formellement et fonctionnel-
lement, ce qui ne serait plus le cas dans Φαῖδρος ; en revanche, dans les
anthroponymes en -εύς, l’identification du suffixe serait bien plus aisée
que dans ceux en -ρος, en -τος, etc. (et ce, du fait de l’existence de nom-
breuses classes de formations en -ος, qui ne sont pas toujours suffixées en
« consonne + -ος » ou « voyelle + -ος », mais dont beaucoup comportent
simplement la voyelle thématique -ο-). Cette idée entre dans le cadre plus
général de la thèse de P. Probert, selon laquelle, dans les noms communs
en -ος qui y sont étudiés, l’accentuation récessive est la marque d’une
« démorphologisation » (le suffixe, avec les propriétés accentuelles qui
87. C’est en tout cas ce qu’indique J. Kuryłowicz, Grammatik, op. cit., p. 93.
88. J.  Kuryłowicz, Accentuation, op. cit., p.  117-118 et Grammatik, op. cit., p.  93,
considérait les cas du type de λευκός (Hom.+) « blanc » → λεῦκος (Theoc., nom
de poisson) comme secondaires par rapport au recul de l’accent des anthroponymes
(type de λευκός → Λεῦκος [Δ  491], cf. myc. re-u-ko) : la récessivité accentuelle
aurait « son point de départ au vocatif de noms de personnes (noms propres,
communs, sobriquets provenant d’adjectifs) », et elle se serait ensuite étendue
analogiquement aux noms d’animaux, puis d’objets inanimés. Mais il ne parlait
nulle part des toponymes.
89. Cf. P. Probert, Ancient Greek Accentuation, op. cit., p. 299 n. 8.
90. Les trois exemples qui suivent sont attestés, entre autres sources, chez Jean Philopon,
De vocabulis quae diversum significatum exhibent secundum differentiam accentus
(recensio A, μ 1, λ 5, δ 14 Daly, ainsi que dans les autres recensiones).
256 éric dieu

lui sont inhérentes, cesse d’être reconnu comme présent en synchronie).


Elle rejoint assez largement celle, antérieure aux travaux de P. Probert,
selon laquelle un recul de l’accent se produit en cas de perte de motiva-
tion (morphologique, sémantique, etc.) : passage du statut d’adjectif à
celui de substantif, perte d’un rapport étymologique avec la base verbale
lorsqu’il s’agit de dérivés primaires, etc.
Cette idée d’une « démorphologisation » paraît globalement juste.
Elle présente en tout cas l’intérêt, par rapport à l’hypothèse d’une loi des
appellatifs, de pouvoir être appliquée très largement aux noms propres,
sans se limiter aux formes tirées d’appellatifs. Mais il est difficile de
renoncer pour autant, parallèlement, à l’idée d’une loi des appellatifs,
qui, dans bien des exemples, apparaît comme l’analyse la plus évidente.
L’objection émise par P. Probert à l’encontre de cette loi ne semble guère
convaincante : si les déplacements d’accent qui se font d’après cette loi
se font presque uniquement dans un seul sens (vers le début du mot),
cela n’implique pas que l’idée même de l’existence d’une loi des appel-
latifs soit illégitime ; c’est bien plutôt parce que seul ce type de déplace-
ment accentuel était aisément compatible avec le système général de la
langue. De fait, la loi des appellatifs implique souvent un recul de l’ac-
cent accompagnant le passage du statut d’adjectif à celui de substantif :
cela était conforme à ce que l’on trouve par ailleurs, dans les forma-
tions thématiques, entre le type τόμος (qui comprend des substantifs de
sens abstrait ou, très souvent, de sens secondairement concrétisé) et le
type τομός (lequel est assez largement un type de « noms d’agent », qui
sont, pour la majeure partie d’entre eux, des adjectifs). De même, pour
les féminins en -η / -ᾱ, l’accentuation des noms communs sur lesquels la
loi des appellatifs s’est appliquée rejoint celle qui est la plus répandue
par ailleurs dans ces noms : les dérivés du type de λεύκη (Hdt.+) « peu-
plier blanc ; lèpre blanche », issu de λευκóς (déjà mycénien) « blanc »,
λαπάρη / λαπάρᾱ (Hom.+) « flanc », issu de λαπαρός (Hpc., Arist.+)
« flasque, creux, mou », etc., ont une accentuation comparable à celle de
la majeure partie des dérivés secondaires en -η / -ᾱ, ainsi que des dérivés
primaires de sens concret (non résultatif) en -η / -ᾱ à vocalisme radical
autre que *o. Et même le cas (en partie comparable, à nos yeux, aux
exemples de la loi des appellatifs qui concernent des animaux ou des ina-
nimés) des abstraits désadjectivaux du type de ἔχθρη / ἔχθρᾱ (Eschl., Pi.,
Hdt.+) « haine, inimitié » vs ἐχθρóς « haineux, ennemi », κάκη (Eschl.+)
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 257

« méchanceté, lâcheté » vs κακóς « méchant, lâche », θέρμη (Hpc.,


Th.+) « chaleur » vs θερμóς « chaud », ne semble nullement anomal en
synchronie 91 : l’accentuation de θέρμη « chaleur » est en accord avec
celle des dérivés abstraits en -μη, qui, à la différence des dérivés en
-η / -ᾱ, ne sont qu’exceptionnellement accentués sur le suffixe ; quant à
ἔχθρη / ἔχθρᾱ et à κάκη, il faut noter d’une part, pour le premier d’entre
eux, que les noms suffixés en -ρη / -ρᾱ ne sont jamais oxytons, et, d’autre
part, que ces deux noms se laissent rapprocher, pour le sens comme pour
la place de l’accent, de dérivés primaires du type de βλάβη (Eschl.+)
« tort, dommage » (cf. βλάπτω « nuire »), πάθη (Pi., Hdt.+) « état passif,
souffrance, douleur, affliction » (cf. πάσχω, aor. ἔπαθον « subir, souf-
frir »), etc. 92
Ainsi, la loi des appellatifs reste légitime : si les cas de déplacement
accentuel qu’elle régit se font quasiment à sens unique vers le commen-
cement du mot, c’est parce que, dans les noms communs, un mouvement
d’accent inverse aurait très souvent produit des résultats anomaux dans
le système de la langue.

91. Sur ces exemples, voir J. Kuryłowicz, Accentuation, op. cit., p. 115 ; Grammatik, op.
cit., p. 91, qui tendait à les expliquer par un phénomène de différenciation accen-
tuelle indépendant des phénomènes accentuels concernant les noms d’animaux,
d’objets inanimés, etc. (type de λευκóς→ λεῦκος, nom de poisson, et λεύκη, nom du
peuplier blanc, etc.), que, rappelons-le, il considérait comme secondaires par rapport
à la récessivité accentuelle des noms de personnes, elle-même conçue comme conti-
nuation indirecte de celle du vocatif indo-européen. Toutefois, pour les féminins du
type de λεύκη, il n’excluait pas absolument une différenciation accentuelle du type
de κακός → κάκη, etc. Notre rejet de l’explication par l’ancienne récessivité accen-
tuelle du vocatif invite plutôt à considérer tous ces cas de figure comme relevant
de phénomènes similaires, reposant sur l’apparition d’une récessivité accentuelle
lorsqu’un adjectif qualificatif est employé pour désigner une réalité (concrète, ou
éventuellement abstraite dans le cas des noms en -η / -ᾱ) présentant la qualité qu’il
exprime.
92. Il n’est pas possible, dans les limites de cet article, de développer davantage cette
question (et en particulier le dossier difficile des formes du type de βλάβη et de
πάθη). Pour le détail des faits, voir É. Dieu, Accentuation, op. cit., passim.
258 éric dieu

Annexe
(complément au § 2, note 43) :
un traitement récent de l’étymologie
et de l’accentuation de εἱαμενή (hom.+)
« prairie humide »

L’étymologie de εἱαμενή est difficile. A priori, le parallèle de δεξαμενή peut


suggérer qu’il s’agirait d’un ancien participe substantivé (sans qu’il soit permis,
néanmoins, d’en être assuré), et l’on peut admettre que le ει initial soit le produit
d’un allongement métrique : on reconstruirait alors un participe féminin *heu̯ a-
menā ou *(h)eha-menā. Une analyse de ce dossier, avec une hypothèse concer-
nant l’accentuation de εἱαμενή, a été avancée récemment par Nikolaev, chez qui
l’on trouvera une présentation d’autres hypothèses étymologiques antérieures 93 :
εἱαμενή (issu de *ἑαμενή par allongement métrique) devrait être rapproché de
l’indo-iranien *Hi̯ áu̯asa- > véd. yávasa- « herbage, pâturage, prairie », à partir
d’une racine *Hi̯ eu̯ h2- « paître ». Cela suppose d’admettre que véd. yávasa- soit
sans rapport avec véd. yáva- « orge », qui est apparenté à gr. ζειαί (Hom.+)
« épeautre » 94. Eἱαμενή serait alors un ancien participe fait sur une base verbale
athématique *ἑα- < *heu̯ a- < *Hi̯ eu̯ h2-. La chaîne dérivationnelle reconstruite
par Nikolaev serait la suivante :
*heu̯ ámeno- (participe athématique) « qui se nourrit d’herbe, qui paît »,
substantivé au sens de « ce qui paît », d’où « bétail » → *heu̯ amenό-

93. A. Nikolaev, « Greek εἱαμενή, Vedic yávasa- », MSS 68 (2014), p. 127-139. Dans
son histoire de la question, Nikolaev a toutefois omis de mentionner plusieurs tra-
vaux. D’une part, ceux de C. J. Ruijgh (Études sur la grammaire et le vocabulaire
du grec mycénien, Amsterdam, 1967, p. 360-361 ; compte rendu de DELG, Lingua,
28 (1971), p. 168 = Scripta minora, 1991-1996, I, p. 597), qui rapprochait εἱαμενή
de ἐάω / ἐῶ « laisser » : ce nom serait, à proprement parler, une désignation du « ter-
rain abandonné, laissé de côté par un fleuve ». Cela pourrait s’appuyer sur une glose
d’Hésychius (τóπος ὅπου πóα φύεται ποταμοῦ ἀποϐάντος […] « lieu où de l’herbe
pousse après qu’un fleuve l’a quitté »). Cette étymologie pose cependant le problème
de l’aspiration initiale de εἱαμενή : contrairement à ce que pensait Ruijgh, il se peut
que ἐάω / ἐῶ provienne non pas d’une racine à *s- initial, mais d’une racine *h1u̯ eh2-,
suivant une analyse de A. J. Nussbaum, Two Studies in Greek and Homeric Linguis-
tics, Göttingen, 1998, p. 9-84 (cf. LIV2, p. 254). D’autre part, selon M. Peters (Unter-
suchungen zur Vertretung der indogermanischen Laryngale im Griechischen, Vienne,
1980, p. 88), εἱαμενή devrait être rattaché à ει « il pleut » (< *suh2-i̯ e/o-, cf. LIV2,
p. 545 ; cf. tokh. A swiñc [3e pers. du pl.], B suwaṃ [3e pers. du sg.] « pleuvoir »).
94. Cette scission est assez largement admise : voir M. Mayrhofer, op. cit., II, p. 404.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 259

(dérivé en *-ό- de sens possessif) « qui a du bétail, occupé par du bétail »


→ *heu̯ amenā́ - (collectif, par substantivation de *heu̯ amenό-) « pâtu-
rage » > εἱαμενή.
Mais il n’est pas évident que ce type de dérivation implique nécessaire-
ment l’oxytonèse de εἱαμενή. Pour prendre un point de comparaison, Nussbaum
admet un schéma dérivationnel comparable pour le substantif de sens collectif
φρήτρη / φρτρᾱ (Hom.+) « phratrie » à partir de φρτηρ « membre d’une phra-
trie », en supposant comme intermédiaire un adjectif en *-o- de sens possessif
(« qui a, qui comprend des membres d’une phratrie ») 95. Or, φρήτρη / φρτρᾱ
n’est pas oxyton. Nikolaev, quant à lui, citait deux autres parallèles éventuels
pour justifier l’oxytonèse 96. Selon lui, *heu̯ amenā́ - serait un collectif du même
type que *h2u̯ erséh2 (> véd. varṣā́ - « pluie, saison pluvieuse »), tiré d’un adjectif
de sens possessif *h2u̯ ersό- « pluvieux » (substantivé dans le neutre *h2u̯ ersό-
« pluie » > véd. varṣá-), lui-même dérivé de *h2u̯ όrso- « brume, pluie » (cf. hitt.
warša- « brume, brouillard ») 97. Or, il se trouve que gr. ἐέρση / ἕρση (Hom.+)
« rosée » (avec ἐε- au lieu de ἀε- par assimilation), qui correspond à véd. varṣā́ -,
n’est pas oxyton : ce nom comporte l’accentuation récessive caractéristique, en
règle générale, des formes en -η / -ᾱ à vocalisme autre que *o qui ne sont pas
motivées, en synchronie, comme des dérivés primaires de sens abstrait, ou, le cas
échéant, de sens concret résultatif (accentuation que devrait également, a priori,
présenter εἱαμενή). Selon Nikolaev, *heu̯ amenā́ - serait également du même
type que πυρή / πυρ (Hom.+) « bûcher », qui serait tiré d’un adjectif en *-ό- de
sens possessif signifiant « qui a du feu, enflammé » (substantivé dans le pluriel
thématique πυρά [Hom.+] « feux de camp », qui fonctionne comme pluriel du
neutre athématique πῦρ « feu »), lui-même dérivé de πῦρ 98. Si le nom du bûcher
est bien oxyton, il s’agit toutefois d’un exemple bien spécifique, dont l’accen-
tuation peut difficilement être comparée directement avec celle de εἱαμενή : la
conservation, à date grecque, de l’oxytonèse de πυρή / πυρ (qui a effectivement
chance de remonter à une accentuation de collectif indo-européen), s’explique
par la coexistence de ce nom avec le neutre pluriel oxyton πυρά, dont l’accentua-
tion constitue elle-même, en synchronie, une anomalie au sein des neutres thé-
matiques grecs (très majoritairement d’accentuation récessive), mais pouvait être

95. Voir A. J. Nussbaum, « Feminine, Abstract, Collective, Neuter Plural: Some remarks
on each (Expanded Handout) », dans S. Neri et R. Schuhmann (éd.), Studies on the
Collective and Feminine in Indo-European from a Diachronic and Typological Per-
spective, Leyde - Boston, 2014, p. 291.
96. A. Nikolaev, art. cit., p. 134, n. 27.
97. Cf. A. J. Nussbaum, art. cit., p. 299.
98. Cf. A. J. Nussbaum, art. cit., p. 295, 297.
260 éric dieu

rendue naturelle par l’oxytonèse des cas obliques de πῦρ (gén. πυρóς, dat. πυρί),
dont πυρά, de par sa structure radicale (avec ῠ), était plus proche que de πῦρ 99.
Une autre difficulté posée par cette reconstruction est le stade intermédiaire
constitué par le dérivé possessif oxyton en *-ό-. Ce type de dérivation d’un
adjectif à partir d’un substantif thématique est productif en védique : c’est le
type de támas- (RV.+) « obscurité » → tamasá- (AV.) « de couleur sombre »,
ou, plus encore, celui de kárṇa- (RV.+) « oreille » → karṇá- (AV.+) « pourvu
d’oreilles, aux longues oreilles », type qu’à la suite de Schindler 100, Nikolaev
analyse comme reposant sur une substitution de suffixe (voyelle thématique *-o-
→ suffixe possessif *-ό-) plutôt que sur un fait de dérivation interne avec chan-
gement d’accent 101. Ce type de dérivation est largement reconnu aujourd’hui,
et avec raison. Mais dans quelle mesure était-il encore productif en grec ? Des
exemples comme celui de ὦχρος (Hom.+) « pâleur » → ὠχρός (Eur.+) « d’un
jaune pâle », cité par Nikolaev, ou μῶκος (poète anonyme chez Ath. 187a)
« moquerie » → μωκός (Arist.+) « moqueur, flatteur » (cf. μωκάομαι / -ῶμαι
« se moquer de »), souvent rapprochés de véd. srā́ ma- (RV.+) « paralysie » →
srāmá- (RV.+) « paralysé » (formes d’origine inconnue, non rattachées à une
racine verbale), ne prouvent nullement que ce type dérivationnel était encore
productif. De fait, du point de vue de la place de l’accent, les couples ὦχρος /
ὠχρός et μῶκος / μωκός sont visiblement des innovations du grec, constituées
sur le modèle des types τóμος (noms abstraits déverbatifs à degré *o apopho-
nique, très souvent concrétisés secondairement) et τομóς (principalement « noms
d’agent », surtout de nature adjectivale) 102, et il en va de même de véd. srā́ ma-

99. Pour plus de détails sur le caractère bien spécifique de l’accentuation de πυρή / πυρ
et du neutre πυρά, avec d’autres arguments et des renvois bibliographiques, voir
É. Dieu, « L’oxytonèse dans les noms de parties du corps et de céréales en *-ā-
du grec ancien, et l’accentuation des collectifs indo-européens », BSL 105 (2010),
p. 174-175. Voir aussi É. Dieu, Accentuation, op. cit., p. 146-147, 300-301.
100. Voir J. Schindler, « Einiges über indogermanische o-Stämme », conférence faite à
l’université de Vienne (citée d’après A. Nikolaev, art. cit.), 4 décembre 1984.
101. Voir A. Nikolaev, art. cit., p. 133, n. 26.
102. Certes, les types τόμος et τομός, ou, d’une manière plus formalisée, *CόC-o-s et
*CoC-ό-s, pourraient eux-mêmes relever du même type de phénomène en indo-
européen (*CόC-o-s → *CoC-ό-s, avec *CoC-ό-s de sens actif [> noms d’agent]
ou de sens passif [> noms résultatifs]) : voir S. Schaffner, op. cit., p. 97-98, qui suit
également J. Schindler, mais qui parle seulement de dérivation interne, sans évoquer
l’idée d’une éventuelle substitution de suffixe. Mais dans la synchronie du grec,
les deux types *CόC-o-s et *CoC-ό-s étaient analysables comme déverbatifs, de
sorte que leur existence ne permet pas d’étayer la productivité, à date grecque, de la
suffixation possessive en *-ό-.
accentuation, suffixes et loi des appellatifs 261

et srāmá- 103 ; le substantif ὦχρος est, d’ailleurs, vraisemblablement secondaire


par rapport à l’adjectif ὠχρός (cf. DELG, p. 1306), et μῶκος / μωκός, sans doute
tirés d’une racine onomatopéique (appliquée au cri du chameau suivant un
texte anonyme 104 publié par Bancalari [μωκᾶται κάμηλος, etc.]), ne remontent
peut-être pas plus haut que la date assez récente de leurs premières attestations
(cf. DELG, p. 729). De même, l’exemple de ὕβος ou ὗβος (Arist.) « bosse » →
ὑβός (Hpc., Theoc.) « bossu », qui est cité par Nussbaum 105 sur le même plan
que véd. kárṇa- → karṇá-, en est visiblement indépendant : l’oxytonèse de ὑβός
est interne au grec, en relation avec celle d’adjectifs à finale -βός indiquant des
défauts, qui ont pu s’influencer mutuellement, tels que στραβός « tordu, tors ;
louche », κολοβός « tronqué, mutilé », etc.
L’exemple principal de Nikolaev pour rendre compte du déplacement accen-
tuel dans *heu̯ ámeno- « ce qui paît, bétail » → *heu̯ amenό- « qui a du bétail,
occupé par du bétail » est, en grec, ἀσφόδελος « asphodèle » → ἀσφοδελός
« rempli d’asphodèles » (épithète de la prairie des Enfers dans l’Odyssée). Cet
exemple serait sémantiquement très proche de celui de εἱαμενή. Mais il repose
sur des bases philologiques douteuses. L’accent de l’adjectif ἀσφοδελός est
signalé comme tel chez certains grammairiens anciens (Herennius Philo, suivi
par Hérodien : voir Arc. 62, 3-4 Schmidt ; Hdn. I, 161, 1 ; II, 152, 17-22 Lentz) ;
mais le grammairien Tryphon s’opposait à cette accentuation de l’adjectif, et
les papyrus de l’Odyssée (Od. 24, 13) ne la confirment pas 106. Si l’accentua-
tion transmise par Hérodien était la meilleure, sans doute faudrait-il en rendre
compte par une extension abusive, à date grecque, de la loi des appellatifs à un
substantif et un adjectif homonymes 107. Mais il semble que cette forme ἀσφο-
δελός soit en réalité un « mot-fantôme », suivant une analyse défendue par Ami-
gues à partir de passages d’Hérodien et d’Eustathe où l’on trouve trois variantes
de la formule dans laquelle est employé ἀσφοδελός (κατ’ ἀσφοδελὸν λειμῶνα,
κατὰ σφοδελὸν λειμῶνα, κατὰ σποδελὸν λειμῶνα) : la troisième formule serait
la plus ancienne, avec un adjectif σποδελός « cendreux, couvert de cendres »
(cf. σποδός « cendre ») qui ferait référence à l’incinération des morts et serait
un adjectif en -ελος sémantiquement proche de στυφελός « âcre, ferme, dur »

103. A. M. Lubotsky, The System of Nominal Accentuation in Sanskrit and Proto-Indo-
European, Leyde, 1988, p. 73 et 77.
104. Voir F. Bancalari, « Sul trattato greco De vocibus animalium », SIFC 1 (1893), p. 93.
105. A. J. Nussbaum, art. cit., p. 299. Voir aussi P. Widmer, Das Korn des weiten Feldes.
Interne Derivation, Derivationskette und Flexionsklassenhierarchie: Aspekte der
nominalen Wortbildung im Urindogermanischen, Innsbruck, 2004, p. 32-33.
106. Voir le dossier chez P. Probert, Ancient Greek Accentuation, op. cit., p. 47.
107. En ce sens, voir Vendryes, op. cit., p. 153 ; Schwyzer, GG I, p. 420 ; S. Amigues, « La
“Prairie d’Asphodèle” de l’Odyssée et de l’Hymne homérique à Hermès », RPh 76
(2002), p. 8.
262 éric dieu

et de πέμπελος « décrépit, usé » ; secondairement, σποδελόν, dans cette for-


mule, aurait été refait en σφοδελόν sous l’influence de σφοδελός « asphodèle »
(variante de ἀσφόδελος qui est attestée, avec cette accentuation, chez Ar., fr.
693 Kassel-Austin), d’où, avec élision, κατ’ ἀσφοδελὸν λειμῶνα d’après ἀσφό-
δελος 108. On serait ainsi passé de la prairie des Cendres à la prairie d’Asphodèle
(l’asphodèle étant une plante consacrée à Perséphone).
Bref, le défaut de l’analyse de Nikolaev, du point de vue de l’accentuation,
est d’essayer d’expliquer mécaniquement un fait d’accentuation grecque par
un schéma dérivationnel certes hérité de l’indo-européen, bien représenté en
védique, et que l’on peut aussi, le cas échéant, utiliser à un stade largement
préhistorique pour rendre compte de certaines formations du grec  109, mais
dont il n’est nullement évident qu’il fût encore assez productif en grec pour en
permettre une application à un ancien participe en -μενος. Il faut ajouter que
Nikolaev se demandait aussi 110, éventuellement, si εἱαμενή ne pouvait pas être
un collectif qui refléterait l’accent des participes présents et aoristes moyens
d’avant l’époque où la récessivité accentuelle s’était étendue dans ces forma-
tions (en partant d’un participe *heu̯ amenό-, au lieu de *heu̯ ámeno-). Certes,
il s’agirait d’un ancien participe athématique. Mais, dans les noms propres en
-μενός, -μεναί, rien ne vient suggérer que l’oxytonèse soit caractéristique des
anciens participes athématiques plutôt que des anciens participes thématiques,
qui, eux, n’ont jamais été oxytons (voir plus haut, 2.2.2). Pas plus que dans ces
noms propres, il n’y a lieu de supposer que εἱαμενή préserve une accentuation
ancienne de participe. Il n’est donc guère vraisemblable que l’accentuation de
εἱαμενή doive être expliquée indépendamment de celle de δεξαμενή et des noms
propres en -μεναί.

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108. S. Amigues, art. cit., p. 7-14.
109. Il peut en être ainsi, entre autres exemples, de βιός (Hom., Heracl.) « arc », issu de
*gu̯ iH-ό- « qui possède une corde (d’arc) » (à partir d’un nom-racine *gu̯ i̯ eH- / *gu̯ iH-,
cf. véd. jyā́ - « corde d’arc » ; voir J. Schindler, Das Wurzelnomen im Arischen und
Griechischen, Dissertation Würzburg, 1972, p. 20 ; P. Widmer, op. cit., p. 33), ou
encore de θεός « dieu » (voir une présentation du dossier étymologique de ce nom
par N. Guilleux, Chronique d’étymologie grecque, 13 [RPh 85, 2011], p. 345-346).
110. Voir A. Nikolaev, art. cit., p. 134, n. 27.
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Words, names and suffixes. Four notes

Jaime Curbera
Inscriptiones Graecae, Brandenburgische Akademie
der Wissenschaften, Berlin

D
ealing with the formation of Slavic personal names, Franz
Miklosich famously stated that, while in the nomina appellativa
the value of suffixes is infinitely manifold, in personal names
they indicate mere derivation (“nach dem benannt sein, was das Thema
bedeutet”). 1 This observation is partly valid for ancient Greek—nobody
would argue that the suffixes of the 36 names formed on ἀγαθός men-
tioned by Sophie Minon in the introduction (Ἀγαθίας, Ἄγαθις, Ἀγάθων...)
have very different meanings. But Miklosich’s words also have the virtue
of identifying one of the central differences between ancient Greek and
modern onomastics—the sheer abundance and complexity of suffixes, a
consequence of the blurred lines between nomina appellativa and nomina
propria. Names and vocabulary were inextricably linked. Most simple
names could be found as words in everyday vocabulary, and even com-
pound names were not without links to common vocabulary, if only in
the way they were adapted to everyday speech. This fundamental truth
(often ignored by linguists) is the underlying subject of the following
notes.

1. F. Miklosisch, “Die Bildung der slavischen Personennamen”, Denkschriften der


phil.-hist. Klasse der kais. Akademie der Wiss., Wien, 1860, p. 218 (= Heidelberg,
1927, p. 4): “Während die Bedeutung der bei den nomina appellativa eintretenden
Suffixe unendlich mannigfaltig ist, haben die Suffixe der Personennamen stets eine
und dieselbe Bedeutung, nämlich, nach dem benannt sein, was das Thema bedeutet”.
268 jaime curbera

1. Gaulites

The word γαυλός has four different meanings in Greek, all of them
derived from the basic idea of a big flat receptacle, used as a shep-
herd’s milk-pail (Od. 9, 223), as a drinking bowl, or as a bucket to bale
out water from ships. From this basic notion is derived that of “round
vessel”, navis oneraria (usually accented γαῦλος), as documented by
Epicharmos, Herodotos and Aristophanes. The shift from “receptacle”
to “vessel” is documented also for κύμβη and σκάφος and is known in
modern languages. Here are two little known cases. Arabic hajm, a large
drinking bowl, was the name for a type of ship with a round hull on the
route between Sicily and Egypt. 2 Modern Greek γαΐτα, a kind of flat
boat used for fishing in shallow water, is derived from Italian gavetta,
a big bowl—“grossa scodella, per lo più di legno, nella qualle mangia-
vano i marinai sui bastimenti e i galeotti sulle galere” (Battaglia, Grande
Dizionario s.v.). On the other hand, the island of Γαῦλος (today’s Gozo,
near Malta) owes its name to its resemblance to a round vessel. While
these meanings are well documented in literature, two others are known
only thanks to ancient lexica, no doubt because they belonged to a lower
registrer. A gloss of Cyrillus (Hsch. γ 207, Suda γ 73, al.) explains γαυλός
as ὁ ἐξ ἀλλοτρίων ζῶν, i.e. “parasite.” Latte ascribed this interpolation
in Hesychius to a different lemma, but it can be easily explained either
as a metaphor to denote people who ask or receive from others (cf. Od.
4, 248 δέκτης, litt. “receiver” = beggar) or a metonymic use of a tool
characteristic of beggars. Thus the θύλακος (a kind of sack) was associ-
ated in Greek with begging (Hsch. θ 848 θυλακίζειν· ἐπαιτεῖν ἑπόμενον
μετὰ θυλάκου), just as modern Greek γαβάθα, a big bowl. 3 A different
nuance is found in γαυλός = εὐαπάτητος, “easy to cheat”, “simpleton”,
a marginal gloss at Suda γ 73. Here the receptacle is used as a symbol of
emptiness (cf. Aristophanes’ Nub. 1203 ἀμφορῆς νενησμένοι). The same

2. S. D. Goitein, A Mediterranean Society, I, Berkeley–Los Angeles, 1967 (1990),


p. 477.
3. P. Koukoules, Βυζαντίνων βίος καὶ πολιτισμός, vol. 2, Athens, 1948, pp. 93–94, who
refers to the curse νὰ σὲ δῶ μὲ τὴ γαβάθα ᾿ς τὸ χεῖρι (“may I see you [begging] with
a bowl in your hand”). English to maunder, “to beg”, is derived from maund, “a
wicker basket”, and to cadge (same meaning) from cadge, a basket or pannier, as
used by beggars. There are paralleles in other languages.
words, names and suffixes 269

image is found in English slang mug, “simpleton”, and muggins (same


meaning), a surname chosen in allusion to mug . 4
Given the variety of meanings that γαυλός can assume, one might
wonder which one lies behind the personal name Γαυλίτης, which is doc-
umented for a bilingual Carian (Thuc. VIII 85, 10: Κᾶρα δίγλωσσον) and
for a Samian exile (Xen. Anab. I 7, 5: φυγὰς Σάμιος). The meanings of
parasite and simpleton can be excluded, not because they are marginal
uses, but because in that case no suffix would be needed.
Except for certain regions (Asiatic Aeolis), the suffix -ίτης was not
productive in onomastics. Most personal names with this suffix were orig-
inally vocabulary words—nomina agentis, ethnics, descriptive denomi-
nativa. Bechtel’s idea that Γαυλίτης is the ethnic of Γαῦλος (Steph. Byz.,
coins) is unlikely, if only for the insignificance of the island. I see two
possibilities. Γαυλίτης could be a descriptive term indicating shape or
other characteristics, just like πιθίτης (: πίθος), θυλακίτης (: θύλακος),
ὀρχίτης (: ὄρχις), or στηλίτης (: στήλη), 5 or like personal names such
as Πλακίτας (: πλακοῦς, a flat cake), Σαυρίτας (σαύρα, lizard), Σειρίτης
(: σειρά, rope), which reflect some physical characteristic. Yet, although
comparison of a person with a γαυλός, a very flat bowl, is not impossible,
the simplest answer is that Γαυλίτης originated as a noun (missing from
dictionaries) meaning “sailor of a γαῦλος” (cf. τριηρίτης, σκαφίτης), or
perhaps, more generally, sailor or cabin boy. These kinds of personal
names (Ναύτης, Ναυτίλος, Ναυβάτης, Βαστᾶς, Προύνικος, Βουκόλος,
Φύλαξ, Ἄγγελος, etc.) have been traditionally interpreted as nicknames
ex officio, but this is not the only possibility: they may have originated,
for example, as appellatives that emphasized youth, strengh or other vir-
tues. The concentration of the examples (Samos and Caria) suggests that
γαυλίτης was a word of the local (Southern Ionic) vocabulary.

2. Ennes

The meaning of the adjective ἐν(ν)εός (documented since Plato


though never in poetry) is well established: “speechless”, “dumb”—
ὃς οὔτε ἀκούει οὔτε λαλεῖ, μετέωρος (Hsch.), διὰ μωρίαν λήθαργος
4. Juggings (: jug) is a riming variation of the same theme: E. Weekley, Words and
Names, London, 1933, p. 144.
5. G. Redard, Le suffixe grec -ιτης, -ιτις, Paris, 1949, p. 197 et passim.
270 jaime curbera

καὶ ἀμνήμων (Λέξ. ῥητ. 251, 27 Bekker), stupidus (CGL II 189, 47).
This widely held view was opposed by an unknown grammarian (apud
Phot. ε 887 ἐνεός· οὐχ ὁ ἠλίθιος, ἀλλ᾿ ὁ ἄφωνος), perhaps because this
is the meaning of ἐννεοί in Act. Apost. 9, 7 (conversion of Saul: οἱ συνο-
δεύοντες αὐτῷ εἱστήκεισαν ἐννεοί). If the meaning of this adjective is
clear, the etymology and the relationship between the form with a single
and a double ν remain opaque. Erasmus (ad Act. Apost. cit.) coupled it
with νέος (“rei novitas hominem reddit attonitum”), later scholars with
Homeric ἄνεω, “in silence”. Modern dictionaries are cautious—“ohne
Etymologie” (Frisk), “aucune étymologie, ce qui n’étonne pas pour un
mot de ce genre” (Chantraine). The immediate cause of this is the isola-
tion of the stem, and here personal names come to our aid. IG XII 2, 340,
copied in Mytilene by Gregorios Bernardakis, has preserved the name
of a certain Ἔννης Πυθοδώρου. Von Wilamowitz doubted Bernardakis’
reading (“non creditur”, IG XII Suppl. p. 25), but Ἔννης is supported
by Ἐννίων in Cyprus and Ἐννέων in Arcadia. These are Lallnamen, as
indicated by the presence of similar names in Asia Minor (Ἔννις, Ἔνη,
Ἐνάς and Ἐνᾶς), 6 Dalmatia (Enna), or Southern Italy (Ennius), and by
their structure itself. The nursery word underlying these names is found
in Lydian ênaś and Tigrinya (a Semitic language in Ethiopia) ĕnnō; both
terms mean “mother”, but (as often with Lallwörter) the meaning may
have been different in other languages. Ἔννης and related names hint at
the use of a similar term in parts of Greece as a way to address young
children—which is the origin of the personal names.
Now back to the adjective: the term behind Ἔννης and Ἐννίων was
absorbed into common vocabulary as ἐνεός/ἐννεός, with the same suffix
as ἠλεός, “foolish”, and κενεός, “empty”, and with the same depreciatory
meaning (a childlike connotation) of other baby-words when adopted in
adult language: cf. ἀβάς, μυττός, νενός, etc. The form with double νν
was probably deemed too vulgar or too familiar (geminates are charac-
teristic of nursery-words: μικκός, νάννα, νέννος, τυννός, etc.), but it was
nevertheless used by unpretentious writers, for example in Act. Apost. 9,
7, where scholars have changed the textus receptus ἐννεοί in ἐνεοί. Thus

6. Zgusta, KP, p. 163 § 334, mentioning also a 6th c. AD Ἰσαύρων ἀρχηγὸς Ἔννης:
Proc., bell. goth. I 28, 23.
words, names and suffixes 271

personal names bring this evasive adjective out of its isolation, and the
adjective in turns illuminates the origin of the names.
The suffix of Ἔννης is found in other Lallnamen—Ἄκ(κ)ης, Ἄτ(τ)ης,
Βάβης, Κόκκης, Λύλης, Μάμμης, Τάττης, Πάπης, et al. There is a ten-
dency to accent these names as perispomena, as if we had here con-
tracted forms of the suffix -έας, but there is no authority for this. In fact,
these are two different suffixes. Long ago scholars noticed the existence
of a nominal suffix -ης used in Mycenaean Ko-we (Korwēs), in Cypriot
Ζώϝης, in Pamphylian Ἀγάθεις (< -ης), in Boeotian nominatives (orig-
inally vocatives) in -ει (< -η), and in other simple and shortened names
such as Δίης, Κέβης, Κόμμης, Λάχης and Πύρης. 7 Interestingly, Ernst
Risch observed that shortened forms -ης are frequent in Mycenean and
that their declension is uncertain (datives -e and -e-i), which suggests
that these are forms originating in family settings. 8 The fragility of the
declension, which is also found in later Greek (gen. -ητος, -η, -έους), can
be compared with that of the names in -ᾶς (gen. -ᾶ, -ᾶδος, -ᾶτος) and
points indeed to a group of names which were used mainly in the voca-
tive and were defective in their declension. 9
The existence of Lallnamen in -ης supports the assumption that we
are dealing with a suffix originating in family settings, as do terms such
as ἄμης (a milk cake), κίβδης (= κακοῦργος), λέβης (kettle), μύκης
(knobbed round body; τὸ αἰδοῖον: Arch. 252 W.), τάπης (rug), φάλης
(= φαλλός), perhaps also (with different accent) ἀβής (= ἀναίσχυντος)
and δαλής (= μωρός). One can compare the English ending [-i] (-y, -ey,
-ie) used both for shortened names (Mickey, Mary, Billy, Ritchie, etc.)
and for baby-talk words (baby, mommy, daddy, doggie, bunny, etc.). 10

7. O. Masson, “Nouvelles notes d’anthroponymie grecque”, ZPE 102 (1994), pp. 167–


184 (= OGS III, pp. 172–189); Schwyzer, GG I, pp. 461–462.
8. E. Risch, “Die mykenischen Personennamen auf -e”, Tractata Mycenaea, Skopje,
1987, pp. 281–298.
9. G. Björk, Das Alpha Impurum und die tragische Kunstprache, Uppsala, 1950,
p. 270: “Es ist anzunehmen, dass die Kurznamen anfänglich Defektiva waren; einer
vollständigen Kasusflexion konnten diese Gelegenheitsbildungen, die aus dem prak-
tisch notwendigen Sprachvorrat herausfielen, zunächst entraten. Dazu stimmt, dass
sie überhaupt keine feste Deklination besitzen”.
10. O. Jespersen, A Modern English Grammar on Historical Principles, VI, Copenhagen,
1942, pp.  215–220. According to Jespersen, the ending was first used in proper
names and from these it was transferred to common names.
272 jaime curbera

Shortened names, being more casual and less assertive than official
names, are closely related, in terms of form, to Lallnamen, so that mutual
influence should not be surprising. The clearest example is consonant
gemination, which has a certain hypocoristic value and is characteristic
not only of Lallnamen and Lallwörter, but also of shortened names. 11
The important point about all this is not only that the suffix of Βάβης
and Ἔννης is the same as that of Λάχης and ἄμης (and that their accent
should be, therefore, the same), but also the constatation that in tone, in
phonetics and in morphology nursery words (Lallwörter and Lallnamen)
and shortened names belong to the same category.

3. Kaisarion

The official name of Cleopatra’s and Caesar’s son (47–30 BC)


was Πτολεμαῖος Φιλοπάτωρ Φιλομήτωρ Καῖσαρ (OGIS 194), but he
was unofficially called Καισαρίων. In a very well-documented discus-
sion of this name, the historian Jürgen Deininger (2000) maintained
that it is wrong to understand Καισαρίων as “kleiner Caesar” or “Cae-
sarlein”, and his name was only remarkable for the use of a “neutral” and
“nichtsagend” suffix with the name of the great Caesar. In Deininger’s
view, in 1st c. BC Alexandria -ίων had no diminutive value at all, as indi-
cated by the numerous personal names formed with it. This is arguable.
An endearing use of this suffix (or suffix conglomerate) is already
documented for Κυλλοποδίων, an epithet of Hephaistos in Homer: ὦ
κυλλοπόδιον Il. 21, 331 (ῑ metri causa). It is true that the source of the
idea of endearment may not be the suffix, but Hera’s tone. Yet, the wide-
spread use of personal names in -ίων in later Greek (Lallnamen, simple
and shortened names) suggests that this nuance was indeed known (see
the previous §). There should be little doubt that Ἀπφίων, Βαβίων, Βαλ-
λίων, Γιλλίων, Παππίων, Σατυρίων or Σιμίων originated in the spoken
everyday language and were closer to modern casual forms of address

11. Schulze, GLE, pp. 519–520; M. Redin, Studies on Uncompound Personal Names in


Old English, Uppsala, pp. xxx–xxxvii; Ο. Masson, “Géminations expressives en
grec”, MSL 81 (1986), pp. 217–219 (= OGS II, pp. 549–561). Contrary to what it is
often stated, this kind of gemination is not exclusive of Indo-European languages,
cf. Μ. Lidzbarski, “Semitische Kosenamen”, Ephemeris für semitische Epigraphik,
II, Giessen, 1908, pp. 11 and 15.
words, names and suffixes 273

than to official names. This was not a suffix limited to personal names.
Ancient grammarians mention a term μωρίων as an example of the hypo-
coristic suffix ‑ίων (μωρίων ὁ μωρός), 12 and, unsurprisingly, the same
word is documented also as a personal name in 2nd c. AD Egypt. In some
frequent names, such as Ἀριστίων, this original nuance may have been
lost, but this was not the rule: -ίων was a living and morphologically pro-
ductive suffix, as we see also in Aristophanes’ Ἀττικίων (Pax 214), μαλα-
κίων (Ec. 1058) and δειλακρίων (Pax 193, Av. 143)—the unflattering
character of these terms can be explained as a development of the dimin-
utive value. But there is more.
The hypocoristic function of the suffix was reinforced after the 6th
or 5th c. BC, when diminutives in -ιον became very popular in collo-
quial Greek; 13 so popular, indeed, that they attracted ‑ίων to their orbit,
as we can see from the fact (first noted by Fick and Bechtel) that a great
deal of names in -ίων (Βατίων, ῾Ερμαδίων, Ψυχαρίων...) are the mascu-
line forms of diminutives in -ιον (βάτιον, Ἑρμάδιον, ψυχάριον). 14 What
Fick and Bechtel did not know, though, is that the same phenomenon was
taking place in common vocabulary. This can be seen in terms such as
παιδαρίων, πατερίων or συνδουλίων, which are the masculine pendants
of diminutiva in -ιον (παιδάριον, πατέριον), even if (as in the case of
συνδουλίων) the corresponding form in -ιον is not documented—either
because written sources do not tend to reflect such substandard words,
or because -ίων was an independent suffix that could be added to any
stem. True, the mentioned terms are late and rare (they are missing from
dictionaries), 15 but personal names prove that they were older and more
popular than our texts suggest. The corollary of all this is that Καισαρίων

12. Schol. Dion. Thrac. in Bekker, An. Gr. II, p.  857; Arcadius, Epitome p. 17, 18
Schmidt (μωτίων mss., μωρίων L. Dindorf, Thes. V 1341 and, according to LSJ,
Arcadius’ Codex Oxon.; cf. Herodian. I 19, 21 Lentz).
13. On this ending see Chantraine, Formation, pp. 64–68.
14. Fick–Bechtel, GP, p. 319, and Bechtel, HPN 510 (“so wird man sich als Ausgangs-
punkt für Γλυκαρίων die schmeichelnde Anrede ὦ γλυκάριον zu denken haben”).
The widespread use of women names in -ιον may have favoured that of -ίων, as
Sophie Minon points out to me.
15. Παιδαρίων is documented in Hesychios; πατερίων and συνδουλίων in the Vita Aesopi
G (a work with pronounced Egyptian colouring); πατερίων (πάτερ Ἴων edd.) in a
mimus from a 2nd c. AD papyrus: see P. Maass, “Zum griechischen Wortschatz”,
AIPHO 6 (1938), pp. 129–132 (= Kleine Schriften, pp. 197–200).
274 jaime curbera

was most likely a diminutive or endearing name and at the same time
a record of the ways people spoke—according to Plutarch it was the
people of Alexandria who gave the child this name (Caes. 49, 10: ὃν
Ἀλεξανδρεῖς Καισαρίωνα προσηγόρευον). 16
There is still one question to be addressed. As it is known, Caesar
did not officially acknowledge Καισαρίων as his son. Dio Cassius
reports that Octavian reproached Marcus Antonius for using the nick-
name Καισαρίωνα, as if he were indeed accepting Caesar’s paternity (ὅτι
Κασαρίωνα ἐπωνόμαζεν οὕτω καὶ ἐς τὸ τοῦ Καίσαρος γένος ἦγε: 50,
1, 5). Was Octavian interpreting Κασιαρίων as a Homeric patronymic,
like Οὐρανίων or Κρονίων? It is doubtful. Contrary to the hypoco-
ristic use, the patronymic value of -ίων in later Greek became an arti-
ficial archaism, and its use almost inevitably had ironic undertones. 17
The comedian Kallias was mockingly called Σχοινίων because he was
the son of a rope-maker (Suda κ 213), but a similar witticism is unlikely
in the case of Καισαρίων. Deininger may well be right that in this case
it was only the use of a name formed on that of Caesar, no matter the
suffix, that stressed the connection with the great man. Yet we should
not forget that the semantic bridge from the diminutive (little Caesar)
to the patronymic (son of Caesar) is a short one, especially in popular
settings. There is a well-established link in our mind between these two
domains. In a patronymic interpretation Καισαρίων designates a small
specimen of Caesar, as when diminutives designate statues (Ἀπολλωνί-
σκος, Πανίσκος, ἱππίσκος) or young animals (ἄρκιλος, λαγιδεύς, μυΐ-
σκος, etc.). It is no wonder that some modern patronymic endings (for
example, modern Greek family-names in -πουλος) are first documented
as diminutives (ὀρνιθόπουλον, σκυλόπουλον, etc.: see Hatzidakis 1915).
Thus, if -ίων was indeed perceived as a diminutive, it could also work as
a patronymic, without having to assume a snobish or sarcastic archaism.

16. According to Dio Cass. 47, 31, 5, Cleopatra too used this name (Καισαρίωνα
προσηγόρευε).
17. Bechtel thought to recognize this value in many personal personal names, but most
examples can be explained differently.
words, names and suffixes 275

4. Oileus

The pressure to express the concept of smallness (especially the


endearing or pejorative connotations) better than with a simple dimin-
utive suffix leads to diminutive endings being added to existing dimin-
utive suffixes, as in the known cases of νεανισκάριον, ῥηματίσκιον, or
χλανισκίδιον. The phenomenon is universal and it is, of course, common
for personal names too. The Delian name Ἀρκιλεύς (two examples in the
3rd c. BC) seems to all intents and purposes to be formed on ἄρκιλος,
“bear cub,” a word documented so far only by Eustathios of Thessa-
lonica in his commentary on Odyssey 5, 274 (p. 1535, 16): ἄρκιλοι τὰ
τῶν ἄρκτων εἴτουν ἄρκων νεογνά. This seems to be a name similar
to Ἀρκτεύς, Δορκεύς, Χιμαιρεύς, or Σκυλακεύς, 18 in which the suffix
-εύς has preserved an old hypocoristic connotation (it was common in
Mycenic shortened names). The problem of this explanation is that a
name Ἀρκίλεως (same ending as Ἀρκεσίλεως, Θρασίλεως, etc.) was
also used in Delos (and only in Delos) in the same period, which sug-
gests that Ἀρκιλεύς and Ἀρκίλεως are related to each other—the ques-
tion is how. Evidence is scarce, but it is relevant that, while Ἀρκεσίλαος,
the Doric form of Ἀρκεσίλεως, is well attested, *Ἀρκίλαος, the Doric
pendant of Ἀρκίλεως, is not. This could be mere chance—or a hint that
Ἀρκιλεύς (: ἄρκιλος) was the original form, and that it was later assim-
ilated to the more prestigious names in -λεως/-λαος. A similar change
is found in the name Βαβύλαος in Attica, which is a deformation of
Βαβύλος, a Lallname, after the names in -λαος. 19 This interpretation is
supported by Βηβιλεύς, a name documented three or four times in Hel-
lenistic and Roman Miletos. Βηβιλεύς is best explained as derived from
a noun *βήβιλος (or *βηβίλος), itself formed on the onomatopoeic word
βηβήν (= πρόβατον, Hsch.) and μπεμπέ (which has the same meaning in
modern Greek nursery-talk). 20 It is true that *βήβιλος, “lamb,” is hith-
erto unknown, but we know of several nouns of young animals formed
with the same diminutive suffix (ἄρκιλος, κόντιλος, κόρθιλος, ὀρχίλος,

18. J.-L. Perpillou, Les substantifs grecs en -εύς, Paris, 1983, pp. 200–203 (“sobriquets
sur des noms d’animaux”).
19. Νηλεύς and Νείλεως are probably two different names: H. Mühlestein, “Namen von
Neleiden auf den Pylos Tafeln”, MH 22 (1965), pp. 164–165.
20. N. C. Conomis, “Varia Graeca”, Acta Classica 9 (1969), pp. 69–70.
276 jaime curbera

χοιρίλος, etc.), so that its existence is very likely. On the other hand,
terms designating young sheep or goats are well known in personal ono-
mastics—Mycenaean wa-ni-ko (ϝαρνίσκος), o-wi-ro (Ὄϝιλος), later
Greek Ἄμνος, ϝάριχος, Ἔριφος, Μιτύλος, Τραγίσκος. 21
Βηβιλεύς brings us straight to the best known of this group of names
—Ὀϊλεύς, father of the Locrian Ajax (also a Trojan charioteer killed
by Agamemnon). Some scholars have already suggested that Ὀϊλεύς is
related to the Mycenic personal name o-wi-ro ~ Ὄϝιλος, 22 an idea that
now has more of a factual basis. Ὀϊλεύς is indeed formed like Ἀρκι-
λεύς and Βηβιλεύς on a noun ὄϝιλος, documented so far only as personal
name—the long ι guaranteed by the metre is the result of a contraction
ὄϝι-ιλος (as in ὀφι-ίδιον or οἰκι-ίδιον). There is, though, a problem: in
continental and Western Greece Ὀϊλεύς was not the form (or the only
form) of this name. Hesiod and Stesichoros used Ἰλεύς (Schol. T Hom.
Il. 14, 336 = IV 83 Erbse), an Attic black figure amphora (570–560 BC)
has the inscription Αἴας Ἰλιάδες, and a bronze cista from Preneste (late
4th c. BC) Aiax Ilios. 23 Moreover, in Il. 14, 336 and in other verses Zeno-
dotos read ὁ Ἰλεύς instead of Ὀϊλεύς, cf. Schol. A Hom. Il. 13, 203 = III
438 Erbse: Ζηνόδοτος ἄρθρον ἐνόμιζε τὸ ō, Ἰλέως τὸν Αἴαντα καὶ οὐκ
Οϊλέως ἀκούων. Some later authors used this form, and modern scholars
too have assumed that this was the original form of the name. 24 Yet in
several Homeric verses the form with Ὀ- is unavoidable and, as we have
seen, the formation of Ὀϊλεύς is self-evident. What happened here is that
a name formed on ὄϊος plus a diminutive ending (cf. Lat. agniculus) has
been deemed inappropriate for a hero and shifted towards a more hon-
orable stem, in this case Ἴλιον—the same phenomenon as in Ἀρκιλεύς

21. These names, of course, originated as appellatives of young children, like English
kid, originally “the young of a goat”; cf. also S. Xanthoudides, “Οἰκογενιακὰ ἐπώ-
νυμα Κρήτων προέλθόντα ἐκ ποιμενικῶν καὶ κτηνοτροφικῶν ὅρων”, Λεξ. Ἀρχεῖον
6 (1923), pp. 326–350, esp. p. 329 [= Μελετήματα (Heraklio, 1979 = 2002), p. 438]:
σήμερον οἱ σφριγῶντες νεανίσκοι καλοῦνται τραγάκια.
22. Landau, MGP, p. 93; Chantraine, GH I, pp. 116–117. Οἶλος, corresponding to Myc.
O-wi-ro, is documented in 4th c. BC Sardes (SEG 36, 1011, p. 28).
23. LIMC I (1981), p. 338, n. 8* (photo: I, 2, p. 253); CIL I 565.
24. W. A. Oldfather, “Oileus”, RE XVII (1937), col.  2180–2181; Kamptz, HomPN,
pp. 295–298.
words, names and suffixes 277

> Ἀρκίλεως. 25 Thus the name of Ajax’ father may be compared to the
nickname Ovicula of the Roman general Q. Fabius Maximus, which,
according to Plutarch (Fabius Max. 1, 4), ἐτέθη δὲ πρὸς τὴν πρᾳότητα
καὶ βραδυτῆτα τοῦ ἤθους ἔτι παιδὸς ὄντος.
Besides these three examples I find this suffix (or suffix conglom-
erate) only in Myc. wa-di-re-u, usually interpreted as Wadileus (Ἡδι-
λεύς). In formation and meaning these names can be compared with
nouns such as ἀετιδεύς, λαγιδεύς or λεοντιδεύς. But our names always
remained as by-forms of nouns in -ιλος (i.e. -ιλεύς did not become an
independent suffix) and never left the realm of unofficial vocabulary and
onomastics. 26

Bibliographical references

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Conomis, N. C., “Varia Graeca”, Acta Classica 9 (1969), pp. 61–72.
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Hatzidakis, G. N., “ Ὀρθογραφικά” in Μεσαιωνικὰ καὶ νέα Ἑλληνικά, I,
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(= OGS II, pp. 549–561).
—, “Nouvelles notes d’anthroponymie grecque”, ZPE 102 (1994), pp. 167–184
(= OGS III pp. 172–189).

25. Cf. R. Wachter, Altlateinische Inschriften, Berne, 1987, p. 139: “Wie erklären wir
uns nun aber die griechischen Formen ohne Ὀ-? Am wahrscheinlichsten scheint mir,
nachhomerische volksetymologische Anlehnung an Ἴλιον anzunehmen, etc.”.
26. This article is part of the project “Modos de contacto e interacción dialectal en los
textos epigráficos del griego antiguo” (FFI2012–35721-C02–01), of the Spanish
Ministry of Economy and Competitiveness.
278 jaime curbera

Miklosisch, F., “Die Bildung der slavischen Personennamen”, Denkschriften


der phil.-hist. Classe der kais. Akademie der Wiss., Wien, 1860, p.  218 =
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καὶ κτηνοτροφικῶν ὅρων”, Λεξ. Ἀρχεῖον 6 (1923), pp. 326–350 [= Μελε-
τήματα (Heraklio, 1979 = 2002), pp. 422–458].
Remarques sur la suffixation des anthroponymes
composés à premier terme prépositionnel
du grec ancien

Nathalie Rousseau
Université Paris-Sorbonne
UMR 8167 Orient & Méditerranée

O
n observe dans un certain nombre d’anthroponymes grecs
composés un premier terme que l’on peut appeler « préposi-
tionnel », et qui correspond à un élément qui fait fonction, dans
la langue grecque, à la fois d’adverbe, de préposition ou de préverbe 1 :
Ἀμφιάναξ, Ἀντήνωρ, Ἀντιλέων, Ἐπίλυκος, Περικλῆς, Προμένης ou
Σύμμαχος.
De tels anthroponymes se rapprochent ainsi à première vue des nom-
breuses formes de la langue grecque qui, sous une même structure for-
melle apparente [« préposition » + radical nominal ou verbal (+ éventuel
suffixe) + désinence], recouvrent des origines très différentes, selon la
relation syntaxique qu’entretiennent la « préposition » et le radical du
second terme 2 : « composés possessifs » ou bahuvrīhi, dans lesquels le
premier élément a une fonction adverbiale, comme ἐπίχρυσος « qui a de
l’or par-dessus, couvert d’or » 3 ; composés déterminatifs à premier terme
1. Sur les trois fonctions assumées par ces éléments dans la langue grecque, qu’il n’est
pas toujours possible de distinguer dans la langue homérique, voir par exemple
E. Schwyzer et A. Debrunner, Griechische Grammatik, II. Syntax und Syntaktische
Stilistik, Munich, 1950, p. 419-420 ; P. Chantraine, Grammaire homérique, II. Syn-
taxe, Paris, 1953, p. 83-84, § 115-116.
2. Nous reprenons la classification des composés nominaux proposée par Risch, Wort-
bildung, p. 182. Voir N. Rousseau, Du syntagme au lexique. Sur la composition en
grec ancien, Paris, 2016, p. 8-10.
3. En reprenant l’exemple-type choisi par H.  Forster dans son ouvrage portant sur
cette catégorie de composés, Zur Geschichte der griechischen Komposita vom
280 nathalie rousseau

déterminant, dans lesquels le premier élément a également une fonction


adverbiale, comme hom. συνέριθος « compagne de travail » (all.  Mit-
arbeiterin) 4 ou ἔκδηλος « très illustre, insigne » 5 ; dérivés inverses de
verbes préverbés, comme ἐπίσκοπος « surveillant » 6 ; enfin, ce que
l’on appelle traditionnellement « composés à rection prépositionnelle »
(all.  präpositionale Rektionskomposita, angl. prepositional governing
compounds) ou « composés hypostatiques », qui reposent sur la dériva-
tion d’un syntagme prépositionnel, comme ἐπιχθόνιοι « terriens », épi-
thète des hommes qui sont « sur la terre », ἐπὶ τῆς χθονός 7.
Hormis les dérivés inverses de verbes préverbés, ces différentes
formes, qu’elles soient adjectives (ἐπίχρυσος, ἐπιχθόνιοι, ἔκδηλος) ou
substantives (συνέριθος), sont des composés qui reposent sur un second
terme déjà nominal : les types flexionnels des substantifs et des adjectifs
étant parallèles, ces composés peuvent ainsi reprendre la flexion de leur
second terme, que celui-ci soit thématique (ἐπίχρυσος, -ος, -ον fléchi
comme χρυσός, -οῦ « or ») ou athématique (masc. et fém. ἀπόπολις « loin
de la cité », « privé de cité » fléchi comme πόλις, -εως « cité ») 8, avec
éventuellement un changement de degré vocalique, comme dans πρό-
φρων « de bonne volonté » formé sur φρήν, φρενός (ἡ) « cœur, esprit »,
ou περικαλλής, -ές « très beau » formé sur κάλλος, -ους (τὸ) 9, de sorte

Typus ἐπίχρυσος, Zürich, 1950. Nous préférons éviter l’expression traditionnelle


« type ἔνθεος » consacrée par l’article de K. Brugmann, « Der Kompositionstypus
ἔν-θεος », IF 18 (1905-1906), p. 127-129, qui suppose pour ce terme le sens « qui
a un dieu en soi », car ἔνθεος repose plus vraisemblablement, au moins à l’ori-
gine, sur un syntagme signifiant « au pouvoir du dieu » : voir N. Rousseau, op. cit.,
p. 134-135.
4. Od. 6.32 ; de même ὑποδμώς (ὁ) « serviteur subalterne » (Od. 4.386).
5. Il. 5.2, à propos de Diomède.
6. Voir par exemple K. Zacher, Zur griechischen Nominalcomposition, Breslau, 1886,
p. 8.
7. Sur ces formes que l’on peut appeler, par concession à la tradition philologique,
« hypostatiques » ou « hypostases », qui relèvent d’un véritable type de formation
(permettant des créations analogiques qui ne reposent pas sur un syntagme possible
en synchronie) qui participe à la fois de la dérivation et de la composition, dont elles
présentent les marques formelles (notamment l’allongement de l’initiale du second
terme, dit « de Wackernagel ») et sémantiques, voir N. Rousseau, op. cit.
8. De même ὑποδμώς (ὁ), comme δμώς (ὁ), s’il ne s’agissait d’un hapax seulement
attesté au nominatif singulier.
9. Voir Risch, Wortbildung, p. 226.
composés à premier terme prépositionnel 281

que la présence d’un « suffixe de composition » 10 après le radical de ce


second terme n’est morphologiquement pas nécessaire 11.
Un tel « suffixe de composition » apparaît cependant dans certaines
de ces formes : par exemple -ιο- dans ἐπιχθόνιοι, formé sur χθών, χθονός
« terre », ou une simple voyelle thématique ‑ο- dans ἀμφίαλος « qui a la
mer de chaque côté » ou « tout autour », « entouré par la mer », formé
sur ἅλς, ἁλός « mer » 12. Les conditions de présence d’un suffixe (ou de
la voyelle thématique) à la fin des composés ont été très discutées, en
particulier, au milieu du siècle dernier, dans le cadre d’une polémique entre
O. Hoffmann et F. Sommer sur l’origine de l’anthroponyme Ἀλέξανδρος 13.
Il est certain, en tout cas, que le grec fonctionne à cet égard de façon
différente du sanskrit, et que l’observation de J.  Wackernagel qui a
longtemps fait autorité, selon laquelle « en sanskrit, de même que dans la
langue d’origine, les composés sont assez souvent caractérisés comme
tels par l’adjonction de suffixes » 14, ne vaut pas pour le grec.

10. Sur les « suffixes de composition » employés en grec ancien, voir par exemple
A. Debrunner, Griechische Wortbildungslehre, Heidelberg, 1917, p. 75-76 ;
Schwyzer, GG I, p. 450-452.
11. Au contraire des dérivés inverses de verbes préverbés, pour lesquels on observe un
changement morphologique de la base sur laquelle ils reposent (on trouve ainsi un
nom d’agent en -σκοπός en face du radical verbal d’ἐπισκέπτομαι « surveiller »), et
que nous laissons donc de côté dans cette étude.
12. La voyelle thématique prend ici la fonction d’un suffixe, dans la mesure où elle
se trouve en distribution avec d’autres suffixes : voir les ouvrages cités n. 10, et
Chantraine, Formation, p. 13-14.
13. Les résultats de cette polémique figurent dans l’ouvrage de F.  Sommer, Zur
Geschichte der griechischen Nominalkomposita, Munich, 1948 : à O.  Hoffmann,
selon lequel l’emploi ancien et répandu de la voyelle thématique dans les com-
posés grecs prouve l’origine grecque d’Ἀλέξανδρος, formé sur le radical d’ἀνήρ,
F.  Sommer répond en dressant un inventaire restreint et argumenté des emplois
de -ο-, qui appuie l’hypothèse d’une forme grécisée d’un nom d’Asie Mineure
Alakšanduš. Si les données mycéniennes prouvent bien, en réalité, le caractère grec
du type Ἀλέξανδρος, les analyses de F. Sommer sur la présence de -ο- dans les com-
posés grecs restent en revanche valables : voir Risch, Wortbildung, p. 227, ainsi que
n. 41 et 42.
14. J. Wackernagel et A. Debrunner, Altindische Grammatik, II.1. Einleitung zur Wort-
lehre. Nominalkomposition, Göttingen, 1905, p. 101-102 (nous soulignons), qui
poursuit : « Comme cette adjonction ne s’effectue généralement que dans des
bahuvrīhi et d’autres composés qui ont un second terme substantival mais sont en
réalité des adjectifs, on peut dire que ces suffixes servent à rendre perceptible la
nature adjectivale de ces mots malgré leur second terme substantival. Les suffixes de
282 nathalie rousseau

En ce qui concerne les composés à premier terme prépositionnel, les


formes hypostatiques grecques se distinguent de manière remarquable
des autres types par deux caractéristiques qui leur sont propres. D’une
part, alors que composés bahuvrīhi et déterminatifs conservent le plus
souvent les caractéristiques morphologiques de leur second terme, les
formes hypostatiques présentent dans la très grande majorité des cas un
suffixe différent : on peut ainsi opposer le bahuvrīhi πρόφρων « de bonne
volonté » à la forme hypostatique μετάφρενον « dos », également formée
sur le substantif athématique φρήν, φρενός (ici au sens anatomique de
« diaphragme »), ou πρόθυμος « prêt, empressé » à ἐνθύμιος « à l’es-
prit, sur le cœur », tous deux formés sur θυμός, -οῦ « cœur, esprit, sen-
timent » 15 ; d’autre part, les formes hypostatiques se caractérisent par ce
que l’on peut appeler une certaine liberté suffixale, illustrée par l’exis-
tence de nombreux doublets sans différence de sens ou d’emploi, en
particulier en -ιο- et -ο- (παράλιος et πάραλος « le long de la mer » ;
ἐφημέριος et ἐφήμερος « éphémère »), mais aussi en -ιο- et -ίδιο- par
exemple (ainsi ἐπιθαλάττιος et ἐπιθαλαττίδιος « au bord de la mer ») :
dans cette perspective, la voyelle thématique -ο- n’a pas la même fonc-
tion dans les différents types de composés, dans la mesure où un doublet
en -ιο- est fréquemment associé à une forme hypostatique en -ο-, tandis
qu’un tel doublet reste exceptionnel pour un bahuvrīhi en -ο- 16.
Or les anthroponymes s’écartent à première vue de ce schéma :
F. Sommer observe ainsi que dans la langue homérique, les deux seules
hypostases « non élargies » par un suffixe sont les anthroponymes
Ὑπερήνωρ et Ἀντήνωρ 17. Il en est visiblement de même en mycénien :
composition de ce type sont surtout -ka-, -i- et -ya-, mais aussi -a-. En outre, d’autres
suffixes comme -in- et -vant-, servant à former des adjectifs à partir de substantifs,
sont parfois ainsi utilisés ».
15. D’après la comparaison des caractéristiques morphologiques des quelque quatre
cents formes hypostatiques présentes dans les textes de l’époque archaïque à la fin
de l’époque classique avec celles de leur second terme : voir N. Rousseau, op. cit.,
p. 88-93. Cette distinction nous paraît plus opérante que celle que propose R. Ström-
berg, Greek Prefix Studies. On the Use of Adjective Particles, Göteborg, 1946,
p. 134-135, entre formes « avec » ou « sans suffixe », dans la mesure où la voyelle
thématique n’a pas la même fonction dans πρόθυμος, formé sur un substantif déjà
thématique, et dans μετάφρενον, formé sur un substantif athématique, où elle joue le
rôle d’un suffixe de composition (qui est tout à la fois un suffixe de dérivation : voir
N. Rousseau, op. cit., p. 115-116).
16. Voir N. Rousseau, op. cit., p. 109-119.
17. F. Sommer, op. cit., p. 108.
composés à premier terme prépositionnel 283

J.-L. Perpillou classe ainsi les anthroponymes dans l’ensemble restreint


des « termes résultant de l’univerbation d’un syntagme prépositionnel »
qui « conserve[nt] » leur « modèle flexionnel », tandis que le fait est
« minoritaire » dans le cas des appellatifs 18. Les deux anthroponymes
hypostatiques qui ont été détournés par les poètes pour un usage adjec-
tival, Ἀντήνωρ et Ἀντιλέων, sont également athématiques 19.
Il vaut ainsi la peine de vérifier la validité de ces observations formu-
lées au détour de travaux consacrés à la composition nominale par une
étude spécifiquement centrée sur les anthroponymes.
L’établissement du corpus nécessaire à une telle étude apparaît toute-
fois dès l’abord présenter une difficulté majeure. En effet, c’est le sens d’un
terme qui permet de déterminer le type de composition dont il relève 20,
et la détermination de ce sens apparaît encore plus primordiale dans le
cas des composés à premier terme prépositionnel, qui ont en commun
une même structure formelle : un même composé peut d’ailleurs rece-
voir deux sens correspondant à deux types différents, comme le bahuvrīhi
ἐπήρετμοι, épithète homérique des « navires » (νῆες) « qui ont des rames
sur eux, pourvu de rames », qui apparaît une fois dans l’Odyssée avec
le sens d’une forme hypostatique, comme épithète des « compagnons »
(ἑταῖροι) de Télémaque qui sont « aux rames », ἐπ᾿ ἐρετμά 21. Or contrai-
rement aux termes du lexique, dont le sens peut être établi grâce à une
étude des contextes dans lesquels ils apparaissent, les anthroponymes
ne se prêtent à une analyse sémantique que dans une mesure restreinte :
non seulement la preuve de l’appartenance à tel ou tel type de composé
ne peut jamais être apportée de manière décisive, mais il faut aussi tenir
compte de l’existence de composés « arbitraires » ou « irrationnels »,

18. J.-L. Perpillou, Essais de lexicographie en grec ancien, Louvain - Paris - Dudley


(MA), 2004, p. 186.
19. Selon notre relevé effectué dans les textes de l’époque archaïque à la fin de l’époque
classique : voir n. 15.
20. Mis à part le cas particulier des composés qui, avec le même sens, peuvent à la fois
relever de deux types de composition, comme ἀγχίθεος qui peut autant être analysé
comme un composé possessif (« qui a les dieux près de lui ») que comme une forme
hypostatique (« qui est près des dieux ») : voir N. Rousseau, op. cit., p. 131-141.
21. Pour cette épithète, la coexistence de deux sens différents est visiblement due à un
jeu littéraire ; mais dans d’autres cas, ces deux sens peuvent apparaître dans des
textes ou des états de langue différents, qui ne sont pas nécessairement liés entre
eux : voir N. Rousseau, op. cit., p. 130.
284 nathalie rousseau

selon l’expression d’O. Masson, qui ne relèvent visiblement d’aucun type


de composition 22.
Ces « composés irrationnels », cependant, ne suffisent pas à occulter la
grande majorité des anthroponymes composés qui sont construits de toute
évidence sur les mêmes modèles que ceux qui ont servi à la constitution
du lexique 23. Si l’on suit la tripartition traditionnelle des anthroponymes
entre « noms composés », « diminutifs formés sur tel ou tel composé », et
« surnoms ou sobriquets personnels, tirés de mots du lexique qui ne sont
pas des composés », selon les mots d’O. Masson 24, les composés à pre-
mier terme prépositionnel se retrouvent en réalité dans deux de ces trois
catégories : non seulement dans la première, mais aussi dans la troisième,
dans la mesure où rien ne s’oppose à ce qu’un mot déjà composé du
lexique soit employé comme sobriquet 25. Dès lors, la distinction entre les
première et troisième catégories n’est pas aisée à établir : en particulier, il
est tout à fait possible qu’un anthroponyme composé constitue un sobri-
quet, même s’il n’est pas attesté par ailleurs dans le lexique, puisque cette
absence d’attestation est tributaire des textes qui nous sont parvenus 26.
22. Voir par exemple Masson, OGS III, p. 226 ; L. Dubois, « Hippolytos and Lysippos :
Remarks on some Compounds in Ἱππο-, -ιππος », dans GPN, p. 41-43.
23. Voir déjà Frick - Bechtel, GP, qui définit le « nom complet » (Vollname) comme un
« composé formé selon les règles de la composition » (p. v). De même O. Masson,
art. cit., p. 225 ; ou L. Dubois, art. cit., qui, après avoir écarté les « composés irra-
tionnels », distingue par exemple dans les anthroponymes en -ιππος des composés
déterminatifs à valeur totémique comme Ξάνθιππος ou Κάλλιππος, comparables à
Θρασυλέων ou Δηιλέων (desquels il convient sans doute de dissocier Ἀντιλέων :
voir ci-dessous), ou encore des composés à rection verbale. Voir aussi l’étude de
J.  Oulhen, « Ἡρόπυθος. Une pousse printanière pour Elaine Matthews ? », dans
Onomatologos, p. 628-645, selon lequel « les noms composés irrationnels sont, au
final, plus rares qu’on ne l’imaginerait » (p. 629).
24. Masson, OGS III, p. 225. Voir aussi, de manière plus développée, Dobias-Dubois,
Intr., p. vii-xiv. Cette classification reprend sous d’autres termes celle de Bechtel,
HPN.
25. Ainsi que l’observent C. Dobias-Lalou et L. Dubois, qui classent dans la troisième
catégorie les « surnoms ou sobriquets au sens large et qui théoriquement ne sont
jamais des composés » (p. vii, nous soulignons), et ajoutent qu’« il existe des
composés du lexique sentis de ce fait comme une unité lexicale quand ils deviennent
des anthroponymes, e.g. Ἀρχιτέκτων, Πρόξενος ou même Εὐγένης ». Les pages
de F.  Bechtel consacrées aux « noms restants » (die übrigen Namen) contiennent
d’ailleurs un bon nombre de mots composés.
26. À ce titre, les anthroponymes constituent d’ailleurs une source d’information pré-
cieuse, en particulier sur certains champs du lexique qui ne sont pas représentés dans
composés à premier terme prépositionnel 285

Une telle distinction peut néanmoins être reprise en tant qu’outil com-
mode pour la constitution d’un corpus des anthroponymes qui reposent
sur la dérivation d’un syntagme prépositionnel, préalable à l’examen de
leurs éventuelles particularités suffixales.
S’ils restent peu représentés dans l’ensemble des anthroponymes, les
composés à premier terme prépositionnel se révèlent tout de même nom-
breux ; une lecture du LGPN 2 27 permet de recenser plus de trois cents
noms différents (sans compter leurs dérivés) en attique 28, certaines pré-
positions étant beaucoup plus représentées que d’autres 29.

Surnoms ou sobriquets correspondant à des termes


attestés par ailleurs dans le lexique

Parmi ces trois cents formes, nombreuses sont celles qui peuvent être
rapprochées du dérivé d’un verbe préverbé déjà présent dans le lexique 30,
comme Μεταγένης 31 ou Σύμμαχος 32 en face de μεταγενής « né après »
et σύμμαχος « allié » ; on trouve aussi des composés possessifs, comme

les textes littéraires et qui n’apparaissent par ailleurs que de façon tardive, chez les
lexicographes ou même en grec moderne : voir Dobias - Dubois, Intr., p. xiii.
27. Étant donné ce très grand nombre de formes, cette étude prend pour base le corpus
des anthroponymes attiques, qui constitue un échantillon déjà représentatif et permet
une bonne comparaison avec les composés du lexique attestés dans les textes litté-
raires ; il est complété par les noms figurant dans Bechtel, HPN, qui fournit l’occa-
sion d’un sondage dans les autres dialectes.
28. Sur les 8 306 noms différents du volume (voir LGPN 2, p. vi) : soit entre trois et
quatre pour cent.
29. On ne trouve aucune forme en Εἰσ-, moins de 5 formes en Ἀνα-, Κατα-, Μετα-,
Παρα- et Ὑπο-, moins de 10 en Ἀπο-, Ἐκ- / Ἐξ-, Περι-, Προσ- et Ὑπερ-, moins de
25 en Ἐν-, Δια-, Προ- et Συν-, presque 50 en Ἀμφι-, plus de 50 en Ἀντι-, et enfin
presque 100 en Ἐπι-. Les formes dont le premier terme est constitué d’une autre
préposition sont pratiquement inexistantes : Ὀπώρα reposant sur ὀπώρα (ἡ) « fin de
l’été » qui n’était vraisemblablement plus compris comme un composé en grec his-
torique (ainsi que ἔνδιος par exemple : voir n. 37), on ne peut guère citer que deux
formes en Ἀγχι-.
30. Nous mentionnons ci-après, pour chaque forme, la date de l’occurrence certaine la
plus ancienne.
31. Bien attesté (par une vingtaine d’occurrences) dans toute la Grèce à partir du
vie s. a. C.
32. Courant (plus de deux cents occurrences) dans toute la Grèce dès l’époque classique.
286 nathalie rousseau

Ἐπώνυμος 33 ou Πρόθυμος 34 en face d’ἐπώνυμος « surnommé » ou « épo-


nyme » et de πρόθυμος « prêt, empressé », ainsi que des composés déter-
minatifs, comme Πρόξενος 35 en face de πρόξενος « hôte public » 36 ; enfin,
une poignée correspond à une forme hypostatique attestée par ailleurs,
antérieurement ou à la même époque 37.
Six de ces anthroponymes sont bien attestés dès l’époque classique
ou le début de l’époque hellénistique, et ne sont pour la plupart pas spé-
cifiques à Athènes :
Ἀντίθεος (Athènes, père ive a. C.) : 4× à Athènes, 4× ailleurs en Grèce ;
Ἐξώπιος (Athènes, 367 / 366 a. C.) : 3× à Athènes ;
Ἔμπεδος (Athènes – Œè, 418 / 417 a. C.) : 4× à Athènes, 20× ailleurs (à
partir du vie / ve a. C.) ;
Ἔνδημος (Athènes, ve a. C.) : 5× à Athènes, 6× ailleurs ;
Ἔφιππος (Athènes, mère ive a. C.) : 4× à Athènes, 4× ailleurs ;
Πάραλος (Athènes – Cholargos, ve a. C.) : 8× à Athènes, 8× ailleurs.
Deux formes rares peuvent leur être associées 38 :

33. Athènes – Acharnes, ve / ive a. C. ; au moins une autre occurrence à Athènes, et peut-
être une deuxième.
34. Bien attesté (par une trentaine d’occurrences) dans toute la Grèce à partir de l’époque
hellénistique.
35. Courant (plus de deux cents occurrences) dans toute la Grèce dès l’époque classique.
36. Sur la double interprétation possible de ce terme, comme « composé à rection prépo-
sitionnelle » et comme composé déterminatif, voir E. Risch, « Griechische Determi-
nativkomposita », IF 59 (1949), p. 38. D’autres composés déterminatifs plus clairs
sont attestés à date plus récente : ainsi Συνίστωρ (Athènes, 112-115 p. C. ; 11 autres
occurrences hellénistiques ou impériales) en face de συνίστωρ « co-témoin ».
37. Nous laissons de côté Ἔνδιος (Athènes, mère ive a. C. ; 8 autres occurrences à
Athènes, 4 autres ailleurs en Grèce) : si ἔνδιος « au milieu du jour, à midi » est vrai-
semblablement une forme hypostatique reposant sur un syntagme non attesté *ἐν
διϝί, dans lequel le thème *διϝ- conserve son sens ancien de « jour », celle-ci n’était
certainement plus comprise comme un composé en grec historique.
38. Ainsi peut-être que l’hapax Ἀγχίθεος (Athènes, ive a. C.), si l’épithète ἀγχίθεος ne
pouvait à la fois être interprétée comme bahuvrīhi et comme forme hypostatique :
voir n. 20. Le LGPN 2 enregistre aussi Ἐνλόγιμος (Athènes, ca 450 a. C.) : il s’agit
cependant d’un hapax de lecture incertaine (Ἐνλό[γιμος]?), dont le suffixe pourrait
éventuellement être autrement restitué. On pense bien sûr d’abord à ἐλλόγιμος « en
compte, qui compte », d’où « d’importance, illustre », mais le rapprochement avec
le bahuvrīhi ἔλλογος « doué de raison », par exemple, ne peut être a priori exclu,
puisqu’aucun des deux termes n’est par ailleurs attesté comme anthroponyme.
composés à premier terme prépositionnel 287

Ἐφέστιος (Athènes – Probalinthos, 322 a. C.) : peut-être 1 seule autre


occurrence, en Bithynie 39 ;
Παράλιος (Athènes – Anagyrous, ve / ive a. C.) : 1 seule autre occurrence
très tardive, en Carie 40.
Trois autres sont attestées au début de notre ère :
Ἐγκόλπιος (Athènes, 150 / 151 p. C.) : 5× à Athènes, 3× ailleurs (égale-
ment à l’époque impériale) ;
Ἔφηβος (Athènes, mère iie p. C.) : 5× à Athènes, 16× ailleurs (les plus
anciennes à Pompéi, ier a. C.-ier p. C.) ;
Ἐφήμερος (Athènes*, 195 / 196 p. C) : peut-être 1 seule autre occurrence,
en Carie 41.
Le rapprochement de ces anthroponymes avec les formes hyposta-
tiques correspondantes du lexique fait apparaître deux catégories. Pour
six de ces termes, une seule forme hypostatique est attestée, et ainsi logi-
quement reprise par l’anthroponyme : ἀντίθεος « égal à un dieu » 42,
ἐγκόλπιος « dans le sein », ἐξώπιος « hors de vue », ἔμπεδος « inchangé,
ferme, continuel » (« sur, dans le sol »), ἐφέστιος « au foyer », ἔφηβος (ὁ)
« éphèbe » (« à l’adolescence ») 43. Pour trois autres, en face des dou-
blets ἐνδήμιος et ἔνδημος « dans le pays », ἐφίππιος et ἔφιππος « sur le
cheval, à cheval », et ἐφημέριος et ἐφήμερος « pendant un jour, éphé-
mère », seule la forme avec voyelle thématique -ο- est adoptée par les
anthroponymes 44. Enfin, il existe un seul cas de doublets : la forme en
-ο-, Πάραλος, est alors de loin plus usitée que celle en -ιο-, Παράλιος,
dont il n’existe qu’une seule occurrence ancienne.
Un tel constat, s’il était isolé, reposerait certes sur des bases fragiles.
Ces exemples ne sont en effet pas assez nombreux pour être probants ;
par ailleurs, il se trouve qu’en l’occurrence, ces doublets ne sont pas
équivalents, contrairement à beaucoup d’autres doublets hypostatiques :
ἐφημέριος et ἐνδήμιος sont des hapax poétiques, en face des formes
courantes ἐφήμερος et ἔνδημος ; enfin, ἐφίππιος et ἔφιππος ont connu
39. La lecture en est cependant très incertaine, et l’inscription date de l’époque impé-
riale : (Ἡ)φ(αί)στιος? (LGPN 5a, Nikaia, imp.).
40. LGPN 5b, Aphrodisias, ve p. C.
41. La forme du suffixe n’est en effet pas certaine : Ἐφήμε[ρος] (LGPN 5b, Mylasa,
? iie a. C.).
42. Voir ci-dessous.
43. Pour les sens et emplois de toutes ces formes hypostatiques, voir N. Rousseau, op. cit.
44. La forme correspondante en -ιο- n’est pas non plus attestée ailleurs en Grèce.
288 nathalie rousseau

une spécialisation remarquable, le premier pour désigner un type de


« course », δρόμος, qui s’effectue « à cheval », la « course équestre »,
puis dans le domaine de la sellerie, un type de « tapis » ou de « couver-
ture » placé « sur le cheval » 45, le second pour désigner, sous la forme
substantivée ἔφιππος, le « cavalier ». Dans ce dernier cas, si la forme
thématique s’imposait nécessairement à l’anthroponyme Ἔφιππος, c’est
avant tout pour des raisons sémantiques, plus que morphologiques.
Toutefois, un relevé dans les HPN de F. Bechtel des anthroponymes
correspondant à des formes hypostatiques attestées par ailleurs dans le
lexique conduit à un constat similaire : pour trois de ces termes, une seule
forme hypostatique est attestée (ἔκδικος « contraire à la justice, injuste »,
ἐλλιμένιος « dans le port » 46, ἔντιμος « en honneur, estimé »), et donc
reprise par l’anthroponyme 47 :
Ἔκδικος (HPN 155, LGPN 3a, Sparte, 391 a. C.) : hapax ;
Ἐλλιμένιος (HPN 154, LGPN 1, Thasos, 510 a. C.) : hapax ;
Ἔντιμος (LGPN 1, Crète, viie a. C.) : bien attesté dans plusieurs régions
par la suite, sauf en attique (22×) 48.
Pour les deux autres anthroponymes, alors que des doublets sont
connus dans la langue sans différence de sens ou d’emploi (ἐπιδήμιος et
ἐπίδημος / ἐπίδαμος « dans le pays, sur le territoire », ἐννύχιος et ἔννυχος
« pendant la nuit ») 49, seule la forme en -ο- est attestée :
Ἐπίδημος en Eubée (HPN 157, LGPN1, Érétrie – Grynchai, ive / iiie a. C.) :
4× ailleurs, à Thasos ainsi que dans le Pont ; Ἐπίδαμος en Cyrénaïque
(LGPN 1, Cyrène, ive a. C.) : 3× ailleurs ;
Ἔννυχος (LGPN 3a, Herculanum, mère ier p. C.) : 5× ailleurs à l’époque
impériale, en Laconie et en Béotie 50.
45. L’adjectif substantivé ἐφίππιον (τὸ) est ainsi le nom de la « selle » (chez Xénophon
par exemple).
46. Cet adjectif est seulement attesté postérieurement à l’anthroponyme correspondant,
chez Strabon, mais la forme substantivée ἐλλιμένιον (τὸ) « taxe portuaire » est déjà
connue à l’époque classique.
47. Les dictionnaires donnent aussi une forme Ἔφαλος (Bechtel, HPN 157, LGPN 1,
Paros, ? iie a. C.) ; il s’agirait cependant d’un hapax, et une lecture [Κ]έφαλος est
aussi possible, de sorte qu’il est préférable de ne pas en tenir compte.
48. Bechtel, HPN 154 (Rhodes) ne donne pas l’attestation la plus ancienne.
49. ἐννύχιος et ἔννυχος sont tous deux attestés à la fois dans la poésie archaïque et dans
la tragédie, et sont restés courants en poésie après l’époque classique ; on trouve
ἐπιδήμιος dans les poèmes homériques et en prose classique, ἐπίδημος chez Aristo-
phane et Sophocle, et les deux formes dans les textes hippocratiques.
50. Bechtel, HPN 154 (Sparte) ne donne pas l’attestation la plus ancienne.
composés à premier terme prépositionnel 289

Seul un contre-exemple pourrait être mentionné : on trouve en Cilicie


Pedias Ἐκδίκιος (LGPN 5b, Tarse – Antioche, ive p. C.), alors qu’un tel
doublet n’est pas attesté dans la langue ; mais le terme est trop tardif pour
être significatif 51.

Anthroponymes composés à premier terme


prépositionnel non attestés par ailleurs
dans le lexique

Ces observations peuvent également être corroborées par des formes


qui, si elles ne sont pas par ailleurs présentes dans le lexique, paraissent
visiblement correspondre à un syntagme prépositionnel 52. En effet, l’hypo­
stase étant un procédé de formation productif dans la langue grecque,
rien ne s’oppose à ce que des noms propres soient créés soit de façon
analogique, comme synonymes ou antonymes de termes hypostatiques
déjà attestés dans la langue, soit directement sur le modèle d’un syn-
tagme prépositionnel.
La toponymie en a largement bénéficié : on trouve ainsi, avec un pre-
mier terme pourvu d’un sens spatial, des noms désignant des lieux par la
place où ils se trouvent par rapport à un autre lieu, comme Παραποτάμιοι
« Parapotamies », nom de la ville située « le long du fleuve » (en l’occur-
rence le Céphise), ou encore des adjectifs précisant une place par rapport
à un lieu donné, comme Ἐπιζεφύριοι « près du cap Zéphyrion », épithète
de la cité de Locres (Λοκροί), qui est dite « Épizéphyrienne » ; le même
procédé a donné naissance à des ethniques, comme Πάραλοι « Athéniens
de la côte » ou Ὑπεράκριοι « Athéniens des hauteurs » 53.
Le rapport entre hypostase et anthroponymes, s’il peut paraître à
première vue moins évident, est en réalité tout à fait vraisemblable. Le
témoignage de deux poètes, en particulier, offre deux exemples d’une
remotivation ou réinterprétation d’un nom en Ἀντι-, pourvu d’un sens
abstrait.

51. On ne peut non plus exclure qu’il s’agisse du « fils d’Ἔκδικος » : voir ci-dessous.
52. Outre le cas (évoqué ci-dessus), toujours possible en théorie, mais indémontrable
dans les faits, des anthroponymes reposant sur un adjectif existant dans la langue,
mais qui n’a pas été transmis dans les textes qui nous ont été conservés.
53. L’expression Λοκροὶ οἱ Ἐπιζεφύριοι fait aussi référence au peuple des « Locriens
Épizéphyriens ».
290 nathalie rousseau

Un passage lyrique de l’Agamemnon d’Eschyle fait ainsi un emploi


adjectival d’Ἀντήνωρ dans un contexte marqué par l’image de la balance
symbolisant l’échange : le dieu Arès est en effet évoqué par le chœur
comme un changeur de morts (ὁ χρυσαμοιβὸς δ᾿ Ἄρης σωμάτων καὶ
ταλαντοῦχος ἐν μάχῃ δορός « le changeur d’or Arès, changeur de corps,
qui tient la balance dans la mêlée des lances » : v. 438-439), qui, de façon
tout à fait inégale, ne renvoie que « poussière », ψῆγμα, aux parents des
guerriers tombés à Troie, « emplissant aisément les urnes de cendre
en guise d’hommes », ἀντήνορος σποδοῦ γεμίζων λέβητας εὐθέτους
(v. 442-444).
De façon encore plus explicite, Aristophane, qui n’est pas avare d’éty-
mologies anthroponymiques 54, met en parallèle le nom Ἀντιλέων avec le
syntagme correspondant dans un passage des Cavaliers où le Paphlago-
nien assure à Démos que conformément à l’oracle qui annonce qu’une
femme enfantera un « lion », λέων, il est pour lui ce « lion » :
ΠΑ.  Ἐγὼ γὰρ ἀντὶ τοῦ λέοντός εἰμί σοι.
ΔΗ.  Καὶ πῶς μ᾿ ἐλελήθεις Ἀντιλέων γεγενημένος;
Paphlagonien : « En effet, je suis pour toi comme un lion. »
Démos : « Et comment as-tu pu devenir Vrai-lion à mon insu ? » 55.
Qu’il s’agisse, dans ces passages, de remotivations ou de réinterpréta-
tions, celles-ci montrent en tout cas qu’il était naturel ou possible, en syn-
chronie, de mettre de tels anthroponymes en relation avec un syntagme
prépositionnel. On peut ainsi tenter de relever les anthroponymes qui
peuvent être rapprochés avec une bonne probabilité d’un tel syntagme
ou d’une forme hypostatique synonyme ou antonyme, même si l’hypo-
thèse de « composés irrationnels » ne peut a priori jamais être exclue.
L’appui offert par les réinterprétations d’Eschyle et d’Aristophane et le

54. On pense en particulier à la célèbre explication du nom de Phidippide, Φειδιππίδης,


au début des Nuées : voir par exemple O. Masson, art. cit., p. 226 ; A. Morpurgo-
Davies, « Greek Personal Names and Linguistic Continuity », dans GPN, p. 18-19 ;
ou L. Dubois, art. cit., p. 41-42 ; ainsi que N. Kanavou, Aristophanes’ Comedy of
Names, Berlin - New York, 2011.
55. Aristophane, Cav. 1043-1044. Dans ce passage, le poète fait à la fois entendre l’an-
throponyme, et un adjectif non lexicalisé qui est strictement équivalent au syntagme
correspondant ἀντὶ λέοντος « égal à un lion, équivalent à un lion » (sur ce type d’em-
ploi que l’on peut appeler « actuel », et qui relève de ce que la grammaire tradition-
nelle appelle les « adjectifs prédicatifs », voir N. Rousseau, op. cit., p. 151-158).
composés à premier terme prépositionnel 291

bon nombre d’anthroponymes en Ἀντι- invitent à nous concentrer, dans


les limites de cette étude, sur les noms pourvus de ce premier terme.
Dans les hypostases de la langue archaïque et classique, le premier
terme ἀντι- peut être pourvu de deux sens abstraits différents 56, issus du
sens spatial premier « en face de » à travers « l’image de la balance où
s’équilibrent l’un en face de l’autre deux objets » 57 : il est surtout attesté
au sens « égal à, équivalent à » mis en évidence dans les Cavaliers d’Aris-
tophane, par exemple dans l’épithète fréquente dans la poésie homé-
rique et lyrique ἀντίθεος « égal à un dieu », ou dans les formes tragiques
rares ἀντίδουλος « équivalent à un esclave », ἀντίπαις « équivalent à un
enfant » ; il signifie moins souvent « à la place de, au lieu de, en échange
de » (dans l’hapax ἀντίφερνος « en guise de dot » et l’adjectif seulement
repris à époque tardive ἀντίμισθος « en guise de salaire »), mais la prépo-
sition ἀντί est bien attestée en ce sens, comme l’illustre notamment l’Aga-
memnon d’Eschyle 58. Le sens d’opposition (« contre ») qui est parfois
donné à certaines formes nominales en ἀντι- est moins convaincant, car
il apparaît d’abord dans les formes préverbées, qui sont de plus très rares
dans les poèmes homériques 59 ; il n’est en tout cas pas le plus ancien.
Sur le modèle d’ἀντίθεος, on relève ainsi dans le LGPN 2 60 plu-
sieurs anthroponymes qui peuvent reposer sur un syntagme exprimant
une comparaison avec un être vivant dont la personne ainsi nommée est
réputée posséder les qualités. La comparaison avec un animal connoté
de façon positive, suggérée par Aristophane pour le « lion », λέων (avec
le sens « égal à un lion, au lion pareil, vrai lion »), paraît également pro-
bable pour le « cheval », ἵππος (d’où « égal à un cheval, au cheval pareil,
vrai cheval ») :
56. Voir N. Rousseau, op. cit., p. 570-580 et 638.
57. Chantraine, GH II, p. 92 § 130 ; voir aussi E. Schwyzer et A. Debrunner, Griechische
Grammatik, II, p. 443.
58. Dans les v. 442-444 cités ci-dessus, Ἀντήνωρ reçoit un sens correspondant à celui
du syntagme ἀντ᾿ ἀνδρός « à la place d’un homme », qui apparaît dans la même tra-
gédie : ἀνήρ τε δυσδάμαρτος ἀντ᾿ ἀνδρὸς πέσῃ « (le jour où) un homme tombera en
échange de l’homme à l’union malheureuse » (v. 1319).
59. Voir E. Risch, art. cit., p. 65-67 ; P. Chantraine, op. cit., qui évoque « ἀντιφέρεσθαι
“s’opposer àˮ […], avec le dérivé ἀντιφερίζω » (p. 92 § 130) ; E.-M. Voigt, LfgrE
s.v. ἀντί. Le passage du sens « en face » à celui de « contre » s’explique par l’image
du combat opposant un homme « face à » un autre ; l’évolution sémantique parallèle
d’ἄντα (voir G. Lohse, LfgrE s.v.) a aussi pu jouer un rôle.
60. Outre Ἀντίθεος évoqué ci-dessus.
292 nathalie rousseau

Ἄνθιππος (Athènes, ca 540 a. C.) : 14× à Athènes, 12× ailleurs 61 ;


Ἀντιλέων (Athènes, vie / ve a. C.) : 3× à Athènes, 42× ailleurs.
La même explication peut valoir pour l’anthroponyme très courant
formé à partir du nom du « père », πατήρ (avec le sens « égal à son père,
tout son père ») :
Ἀντίπατρος (Athènes, ive a. C.) : 78× à Athènes, 562× ailleurs.
La question est plus délicate pour plusieurs noms formés à partir du
substantif ἀνήρ « homme » :
Ἀντήνωρ (Athènes, ca 650 a. C.) : 6× à Athènes, 42× ailleurs ;
Ἄντανδρος (Athènes, fils ive a. C.) : 5× à Athènes, 49× ailleurs ;
Ἀντίανδρος (Athènes, ca 250 a. C.) : 8× ailleurs.
Le nom Ἀντήνωρ, en particulier, déjà attesté dans les poèmes homé-
riques, a fait l’objet de nombreuses discussions. Le sens « qui s’oppose aux
hommes » 62 est trop récent pour ne pas susciter des réserves, sans toutefois
être exclu 63 ; à l’inverse, si ce nom exprime une comparaison, « égal à un
homme » ne fournit pas un sens très satisfaisant, de sorte qu’il faut sous-
entendre « égal à (beaucoup) d’hommes », comme le propose F. Sommer
de façon convaincante en rapprochant deux expressions de l’Iliade 64 :
ἀντί νυ πολλῶν / λαῶν ἐστὶν ἀνὴρ ὅν τε Ζεὺς κῆρι φιλήσῃ
« Il vaut une nombreuse armée, celui que Zeus chérit en son cœur » ;
ἰητρὸς γὰρ ἀνὴρ πολλῶν ἀντάξιος ἄλλων
« un médecin équivaut à beaucoup d’autres hommes » 65.

61. Il existe une forme de féminin Ἀνθίππη (Athènes, mère ive a. C.), également attestée
par deux autres occurrences, à Athènes et à Ténos.
62. Voir H.-J. Newiger, LfgrE s.v., qui renvoie à E. Risch, art. cit., p. 41 (ce dernier ne
précise toutefois pas le sens qu’il donne à ce terme qu’il analyse comme un « com-
posé à rection prépositionnelle »).
63. On peut en effet rapprocher le syntagme ἄντ᾿ ἀνδρός, avec l’adverbe ἄντα « en face,
contre » : ἀλλ᾿ ἄγ᾿ ἀνὴρ ἄντ᾿ ἀνδρὸς ἴτω, μεμάτω δὲ μάχεσθαι « allons, que chaque
homme se place face à un homme, et brûle de combattre » (Il. 20.355).
64. « Ἀντήνωρ = “einer, der viele ἄνδρες wert istˮ » : F. Sommer, op. cit., p. 171, qui y
voit l’un des nombreux « noms parlants » de l’épopée et souligne qu’il fait référence
à un sage vieillard troyen. Sur les « noms parlants » dans les poèmes homériques,
voir Kamptz, HomPN, p. 25-35, qui cite cependant les différentes interprétations
d’Ἀντήνωρ sans choisir, p. 56.
65. Il., resp. 9.116-117 ; 11.514.
composés à premier terme prépositionnel 293

Si ce rapprochement est exact, il permet aussi d’expliquer un nom qui


pourrait signifier « égal à (beaucoup) d’autres » :
Ἄνταλλος (Athènes – Colone, ier a. C.) : 3× à Athènes, 33× ailleurs (dès
le ive / iiie a. C.).
Une autre piste est offerte par le sens « à la place de, au lieu de, en
échange de » de la préposition ἀντί. L’idée qu’une vie puisse apparaître
« en échange » d’une autre vie donnée est en effet bien attestée dans les
textes grecs 66. En particulier, un enfant peut être considéré comme le
substitut de son père décédé, ainsi que l’illustre une épigramme de Téos
datant de l’époque hellénistique :
νήπιον ἀνθʼ αὑτοῦ παῖδα λιπόντα δόμοις
« laissant à sa place un jeune enfant à la maison » 67.
Plus généralement, un enfant peut être destiné à prendre les fonc-
tions de son père, comme le souligne la fin des Suppliantes d’Euripide,
où Athéna prédit le destin des Épigones qui « vengeront la mort de leurs
pères » :
σύ τʼ ἀντὶ πατρός, Αἰγιαλεῦ, στρατηλάτης νέος καταστάς
« toi, Égialée, en t’instituant nouveau chef de l’armée à la place de ton
père » 68.
Il n’est dès lors pas exclu qu’une telle conception ait présidé à la for-
mation d’Ἀντίπατρος, ou du moins que ce nom ait pu être compris ainsi.
De façon un peu différente, il est également possible qu’une naissance ait
été perçue comme un présent reçu « en échange d’un présent (δῶρον) »
ou « en échange de l’amour (ἔρως) » :
Ἀντίδωρος (Athènes, ca 540 a. C.) : 33× à Athènes, 39× ailleurs ;
Ἀντέρως (Athènes, mère iie p. C.) : 15× à Athènes, 71× ailleurs (à partir
de l’époque hellénistique).

66. Voir N.  Rousseau, « “En échange d’une vie” : histoire d’ἀντίψυχον », REG 128
(2015), p. 127-170.
67. Voir R. Demangel et A. Laumonier, « Inscriptions d’Ionie », BCH 46 (1922), p. 346,
no 37, et fig. 15 ; W. Peek, Griechische Vers-Inschriften. Band I. Grab-Epigramme,
Berlin, 1955, no 775, v. 6 (ier ou iie a. C.).
68. Eur., Suppl. 1216-17. Voir aussi, avec la même idée de succession, ὅταν παῖς ἀντὶ
πατρὸς εἰσίῃ « lorsque le fils entre en fonction à la place de son père » (Aristote,
Politique, 1292b.5 ; 1298b.3).
294 nathalie rousseau

Un relevé dans les HPN de F. Bechtel des anthroponymes en Ἀντι-


donne deux formes possibles supplémentaires, que l’on peut respective-
ment comprendre « égal à son grand-père (πάππος), tout son grand-père »
ou « successeur de son grand-père », et « égal à un ami (φίλος), vrai
ami » ou « en guise d’ami » :
Ἀντίπαππος (HPN 59, LGPN 1, Égialos, iiie a. C.) : 9× ailleurs (à partir
du ve a. C.) ;
Ἀντίφιλος (HPN 60, LGPN 3b, Mégare, 306-301 ou 295-288 a. C.) :
159× ailleurs (à partir du ve a. C.) 69.

De telles explications trouvent cependant vite leurs limites. En particu-


lier, on ne voit pas de quel genre de comparaison ou d’échange pourraient
relever class. Ἀντίβιος, hell. Ἀντίδημος, Ἀντιλᾶς, Ἀντίξενος (hapax) ou
Ἀντίφημος 70 par exemple. Par ailleurs, Ἀντίδωρος peut aussi bien être
analysé comme le réarrangement au masculin d’un composé détermi-
natif ἀντίδωρον (τὸ) « présent reçu en échange » 71, ou encore comme le
dérivé inverse de ἀντιδωρέομαι « recevoir en présent d’échange ».
Quoi qu’il en soit, tous ces anthroponymes qui peuvent être rappro-
chés avec une certaine probabilité d’un syntagme prépositionnel semblent
suivre une règle différente de celle des formes hypostatiques du lexique :
ils conservent en effet la morphologie du second terme, qu’il soit athé-
matique (Ἀντιλέων, Ἀντέρως) ou thématique (Ἄνθιππος, Ἀντίδωρος,
Ἄνταλλος, Ἀντίπαππος et Ἀντίφιλος).

69. Le féminin Ἀντιφίλη est attesté à Athènes, ca 249 / 248 a. C. (2 autres occ. ailleurs à
la même époque).
70. Pour ce dernier terme, le Dictionnaire grec-français propose, avec une hésitation,
l’explication « litt. égal en renom ? » ; mais il est alors difficile d’assigner un type de
composition à l’anthroponyme. Si celui-ci n’est pas « irrationnel », la moins mau-
vaise explication serait sans doute celle de l’hypostase d’un syntagme signifiant
« égal à son renom », d’où « digne de son renom », mais cette explication est loin de
s’imposer avec évidence.
71. Ce substantif est seulement attesté dans le lexique à partir du vie p. C. De même,
Ἀντίχαρμος (Athènes – Lamptres, fils ive a. C. : 2 autres occ. à Athènes, 6 autres
ailleurs) pourrait être compris comme le réarrangement d’un composé déterminatif
signifiant « joie (χάρμα ou χάρμη) en échange ». Cette modification de la finale d’un
composé afin de lui donner le genre masculin serait alors comparable à celle des
adjectifs composés épicènes qui reçoivent une forme spécifique de féminin lorsqu’ils
sont employés comme anthroponymes : voir n. 75.
composés à premier terme prépositionnel 295

La seule exception concerne ceux qui reposent sur un ancien sub­


stantif en *-r- / -n- : à côté de la conservation de la morphologie du second
terme dans le nom épique Ἀντήνωρ, on observe le passage à la flexion
thématique dans Ἄντανδρος et Ἀντίπατρος, qui apparaissent comme
les formes vivantes et attendues en face de la forme archaïque homé-
rique 72, déjà attestée sous la forme a-ta-no /Antā́ nōr/ (gén. a-ta-no-ro
/Antā́ noros/) en mycénien 73. Par ailleurs, il n’existe pas de forme athé-
matique correspondant à Ἀντίπατρος : aucun des quatre anthroponymes
en -πάτωρ différents (attestés en tout par une trentaine d’occurrences)
n’est pourvu d’un premier terme prépositionnel, alors qu’au sein des plus
de 1 000 occurrences d’anthroponymes en -πατρος attestés dans le LGPN
électronique, dans toutes les régions de la Grèce et de l’époque archaïque
à l’époque romaine, on relève deux autres noms à premier terme prépo-
sitionnel, formés à partir des prépositions μετά et πεδά « après », qui
peuvent être interprétés comme des hypostases signifiant « après son
père, successeur de son père » :
Μετάπατρος (LGPN 1, Lindos, mère iii e a. C.) : 2× à l’époque
hellénistique ;
Πεδάπατρος (LGPN 1, Lindos, iiie / iie a. C.) : 7× à l’époque hellénistique.

72. La forme plus récente et plus rare Ἀντίανδρος, caractérisée par une absence d’élision
anomale du premier terme, n’est pas attendue.
73. Voir DMic s.v. Les poèmes homériques ne connaissent que des anthroponymes en
-ήνωρ ; Ὑπερήνωρ peut également être compris comme hypostatique (avec le sens
« se tenant au-dessus des hommes » : voir E. Risch, art. cit., p. 41, ou « dépassant
la mesure humaine » : voir F. Sommer, op. cit., p. 170-172, qui juge anachronique
l’analyse comme un composé déterminatif « homme en excès, surhomme » proposée
par O. Hoffmann, ce qui est aussi l’avis de Kamptz, HomPN, p. 58) ; mais si l’on suit
l’interprétation de F. B. J. Kuiper, « Νώροπι χαλκῷ », Mededelingen van de Konink-
lijke Nederlandse Akademie van Wetenschappen, 14.5 (1951), p. 201-227, il pourrait
s’agir au départ d’un bahuvrīhi signifiant « qui possède la force vitale en excès »,
de façon analogue à ὑπέρθυμος « plein d’ardeur » : voir Kamptz, HomPN, p. 100.
Même si elles sont loin d’atteindre les quelque 7 000 occurrences d’anthroponymes
en -ανδρος attestés dans le LGPN électronique, les formes en -ήνωρ ont toutefois
connu une certaine faveur qui ne se limite pas à la reprise de termes homériques :
outre la cinquantaine d’occurrences d’Ἀντήνωρ, il existe environ deux cents occur-
rences de trente anthroponymes en -ήνωρ différents, attestés dans toutes les régions
de la Grèce, de l’époque archaïque à l’époque romaine ; Ἀντήνωρ et Ὑπερήνωρ sont
cependant les deux seules formes à premier terme prépositionnel.
296 nathalie rousseau

Conclusion

Si bon nombre d’anthroponymes formés d’un premier terme préposi-


tionnel et d’un second terme substantival semblent correspondre, pour le
sens, aux différents types de composés de même structure formelle pré-
sents dans le lexique, bahuvrīhi, composés déterminatifs et hypostases,
ils s’en écartent par la forme.
En effet, pour autant que l’on puisse identifier, parmi ceux-ci, des
hypostases, la reprise des caractéristiques morphologiques du second
terme, le plus souvent évitée par les formes hypostatiques du lexique, et
qui constitue de ce fait un critère de distinction entre les hypostases et
les autres types de composés, y est régulière. De surcroît, les autres spé-
cificités morphologiques des formes hypostatiques ne sont pas reprises
par les anthroponymes : les doublets, en particulier, formes qui ne se
distinguent que par le suffixe et qui sont concurremment attestées sans
différence de sens ou d’emploi, sont pratiquement inexistants ; si le suf-
fixe -ιο- peut apparaître, lorsque l’anthroponyme repose sur une forme
hypostatique du lexique uniquement suffixée en -ιο- (ἐλλιμένιος « dans
le port », ἐγκόλπιος « dans le sein » et ἐξώπιος « hors de vue » en face
de Ἐλλιμένιος, Ἐξώπιος et Ἐγκόλπιος), c’est cependant la simple
voyelle thématique -ο- qui est préférée pour ces surnoms ou sobriquets
tirés du lexique, lorsque le choix existe, que le second terme soit thé-
matique (Ἔνδημος, Ἐπίδημος, Ἔφιππος) ou athématique (Ἐφήμερος,
Ἔννυχος) 74.
Or ce qui peut apparaître comme une anomalie du point de vue du
lexique, et qui s’ajoute à d’autres différences morphologiques déjà obser-
vées entre anthroponymes et termes du lexique 75, trouve une explication

74. On observe alors une conservation de la morphologie du second terme lorsque


celui-ci est thématique, mais un changement lorsqu’il est athématique (les formes
hypo­statiques athématiques étant pratiquement inexistantes dans le lexique : voir
N. Rousseau, op. cit., p. 84-88). Cette observation pourrait constituer un critère de
distinction, parmi les anthroponymes reposant sur un second terme athématique,
entre emprunts au lexique et formes relevant uniquement de l’anthroponymie, n’était
le grand nombre de noms dont l’appartenance à l’un ou l’autre type de composés
peut prêter à discussion.
75. Voir par exemple A. Morpurgo-Davies, art. cit., p. 16-17, qui évoque la question des
dérivés en -ιος ou -ειος de substantifs thématiques, ainsi que celle de la forme spéci-
fique de féminin des anthroponymes composés.
composés à premier terme prépositionnel 297

très simple du point de vue de l’anthroponymie. En effet, les « suffixes


de composition » les plus caractéristiques des formes hypostatiques
se trouvent justement être des suffixes très employés dans la dériva-
tion 76 : on comprend ainsi que pourvus d’autres fonctions dans le cadre
de l’anthroponymie, -ιο- (fournissant des dérivés patronymiques) 77,
-ίδ- (permettant de créer des féminins) 78 et -ίδιο- (servant à former des
diminutifs) 79 aient été évités dans les anthroponymes composés à pre-
mier terme prépositionnel, même là où ils auraient pu être légitimés par
les règles de composition du lexique.

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76. Ce qui se comprend par ailleurs pour ces formes qui constituent en même temps des
dérivés de syntagmes : voir n. 7.
77. E.  Risch, art. cit., p. 112, observe que cet usage est « isolé » dans la langue
homérique.
78. Voir M. Meier, -ίδ-. Zur Geschichte eines griechischen Nominalsuffixes, Göttingen,
1975, p. 32-34.
79. Voir la contribution de F. Réveilhac dans ce volume. Sur l’absence de sens diminutif
dans les hypostases en -ίδιο-, voir N.  Rousseau, « -ΙΑΙΟ- uersus -ΙΔΙΟ- : l’étude
des suffixes à l’appui des choix textuels dans les textes médicaux grecs », dans
A. Roselli (dir.), Actes du VIIe colloque international sur l’ecdotique des textes médi-
caux grecs, juin 2013, Naples (à paraître) ; N. Rousseau, op. cit., p. 103 et 113-115.
298 nathalie rousseau

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Des noms en -ᾶς

Laurent Dubois
École pratique des hautes études, Paris

J’
ai récupéré en 1997 à la mort de mon maître Olivier Masson un
certain nombre de dossiers onomastiques. J’avais utilisé le dos-
sier consacré aux noms en -οῦς pour mon article des Mélanges
en l’honneur d’Elaine Matthews 1. Je me suis ensuite plongé dans le
très gros dossier des noms en -ᾶς et j’en ai déjà tiré un article dans les
Mélanges en l’honneur de Françoise Skoda sur les sobriquets indiquant
un défaut physique 2. Nous savons tous qu’Olivier Masson a consacré
beaucoup d’articles à des points particuliers comme certains noms de
métiers qui sont aussi des sobriquets, à des noms typiquement ioniens, à
des noms grecs en Égypte 3 ; mais depuis 1966 il avait rêvé de faire une
grande synthèse sur les noms en -ᾶς que finalement il ne nous a jamais
donnée. Je crois avoir trouvé dans ses papiers l’une des causes du non
aboutissement de ce projet : comme l’avait déjà fait en son temps son
maître Bechtel qui a parfois changé d’avis entre la rédaction du chapitre
sur les inscriptions ioniennes de la SGDI III / 2 de 1905 et celle des HPN
de 1917, il a buté sur le problème de l’accentuation, en particulier sur
celle des noms abrégés pour lesquels il a hésité entre paroxytons et péris-
pomènes. Je pense en particulier à un fort dossier sur Ἀριστας pour lequel
il avait accompli un très gros travail philologique de plusieurs années,
notamment sur la présence ou non de cet anthroponyme sur les timbres
amphoriques rhodiens, travail au terme duquel il reconnaît, en l’écrivant
désespérément sur le dos du dossier, ne pas avoir résolu le problème de
1. « Des anthroponymes en -οῦς », dans Onomatologos, p. 398-421.
2. « Monsieur “Leboitard” en Sicile », dans I. Boehm et N. Rousseau (éd.), L’expressi-
vité du lexique médical en Grèce et à Rome, Paris, 2014, p. 77-85.
3. Voir les onze articles d’O. Masson énumérés dans la bibliographie.
300 laurent dubois

l’accentuation. Car, en fin de compte, pour distinguer ces deux catégories


morphologiques dans les sources épigraphiques, nous n’avons pour seul
secours que celui de la flexion même si celui-ci est limité et très partiel :
— Si les périspomènes ont une flexion en -ᾶδος en ionien, en -ᾶτος en
Égypte, quelquefois dans le Pont, à Chypre dans les inscriptions alphabé-
tiques et en pamphylien, en -ᾶϝος et -ᾶος à Chypre dans les inscriptions
syllabiques plus anciennes, parfois en -ᾶς, -ᾶνος (à partir du thème de
l’accusatif) en Macédoine, dans toutes les autres régions, ce que confir-
ment les grammairiens, le génitif est en -ᾶ.
— Or, si l’on exclut les anthroponymes à suffixe complexe terminé
par -ᾱς > ion. -ης, les paroxytons ont aussi un génitif en -ᾱ (sauf dans
certains dialectes, comme le béotien, l’arcadien et le chypriote), iden-
tique donc sur la pierre à celui des périspomènes. Le départ entre les
deux catégories est donc très délicat.
— Quant aux noms en -ᾱς transmis par la tradition manuscrite, leur
accentuation varie selon les copistes et les auteurs. Rien de fiable donc
de ce côté. Pourtant, et c’est remarquable, on retiendra que les grammai-
riens anciens, quand ils donnent des listes de noms en -ᾱς paroxytons, ne
les mentionnent jamais comme étant des hypocoristiques.

1. Histoire de l’interprétation des anthroponymes


en -ᾶς

1.1. Les grammairiens anciens


a. Morphologie et sémantisme
Les noms en -ᾶς sont mentionnés dans trois passages principaux
d’Hérodien (iie p. C.) dont le texte fourni dans l’édition Lentz procède
d’une reconstruction à partir de fragments de grammairiens postérieurs
qui se sont tous inspirés d’Hérodien. Cette source commune est assurée
par la similitude des exemples invoqués aussi bien pour les anthropo-
nymes que pour les mots du lexique.
Le premier figure au tome II / 2, p. 657, de l’édition Lentz et est inséré
dans le recueil Περὶ κλίσεως ὀνομάτων « Sur la flexion des noms » 4 ; il

4. No 28, p. 335 de E. Dickey, « A catalogue of works attributed to the grammarian


Herodian » dans Class. Phil. 109 (2014), p. 325-345.
des noms en -ᾶς 301

est reconstitué à partir d’un passage de Choiroboscos (ixe-xe p. C.) 5, qui


n’a pas été repris par Hilgard car n’appartenant pas au commentaire sur
Theognostos 6.
Τὰ εἰς ΑΣ περισπώμενα δύο κλίσεις ἐπιδέχονται, καὶ ἰσοσυλλάβως κλί-
νονται, οἷον Μηνᾶς Μηνᾶ, καὶ περιττοσυλλάβως, οἷον πελεκᾶς πελεκά-
ντος· χωρὶς τῶν Ἰωνίων ἐκφερομένων διὰ τοῦ ΔΟΣ, οἷον Βιτᾶς Βιτᾶδος 7,
Κυρᾶς Κυράδος (sic), εἰσὶ δὲ ὀνόματα κύρια.
Τὰ εἰς ΑΣ περισπώμενα, εἰ μόνως κύρια ἤ ὑποκοριστικὰ ἤ ἐπισκώμματα
ἤ ἀπὸ συμβεβηκότος, ἰσοσυλλάβως κλίνονται. Κύρια μὲν, οἷον Μηνᾶς
Μηνᾶ, Ζηνᾶς Ζηνᾶ, Μητρᾶς Μητρᾶ, Κομητᾶς Κομητᾶ, Φιδιτᾶς Φιδιτᾶ,
Θωμᾶς Θωμᾶ, Λουκᾶς Λουκᾶ, καὶ τὰ ὅμοια. Ὑποκοριστικὰ δὲ, οἷον
ὀστρακᾶς, ὀστρακᾶ, πινακιδᾶς πινακιδᾶ, λαχανᾶς λαχανᾶ. ᾿Επισκώμ-
ματα δὲ, οἷον καταφαγᾶς καταφαγᾶ 8, δακνᾶς δακνᾶ. Ἀπὸ συμβεβηκότος
δὲ, οἷον τρεσᾶς τρεσᾶ, ὁ δειλός.
« Les mots en -ᾶς périspomènes admettent deux flexions : ils ont une
flexion parisyllabique comme Μηνᾶς Μηνᾶ et une flexion imparisylla-
bique comme πελεκᾶς πελεκάντος ; font exception les mots ioniens qui
se termine en ΔΟΣ, comme Βιτᾶς Βιτᾶδος, Κυρᾶς Κυράδος, mais ce sont
des noms propres.
Les mots en -ᾶς périspomènes, à la seule condition que ce soit des noms
propres ou des désignations familières ou des qualificatifs railleurs ou des
noms exceptionnels, ont une flexion parisyllabique : des noms propres
comme Μηνᾶς Μηνᾶ, Ζηνᾶς Ζηνᾶ, Μητρᾶς Μητρᾶ, Κομητᾶς Κομητᾶ,
Φιδιτᾶς Φιδιτᾶ, Θωμᾶς Θωμᾶ, Λουκᾶς Λουκᾶ et d’autres semblables ;
des désignations familières comme ὀστρακᾶς ὀστρακᾶ, πινακιδᾶς πινα-
κιδᾶ, λαχανᾶς λαχανᾶ ; des qualificatifs railleurs comme καταφυγᾶς

5. Georgii Choirobosci dictata in Theodosii canones necnon epimerismi in psalmos


e codicibus manuscriptis, I, Oxford, 1842, p.  42-43 (T.  Gaisford). Le manuscrit
est en l’occurrence le Coislin 176 (xve-xvie s.), folios 43-68v : voir R. Devresse,
Catalogue des manuscrits grecs de la Bibliothèque nationale. Le fonds Coislin,
Paris, 1945, p. 157-158.
6. Pour la date de ce manuscrit et son rôle dans la tradition orthographique, voir
J. Schneider, Les traités orthographiques grecs et byzantins, Turnhout, 1999, p. 111-
112.
7. Ce nom est celui d’un personnage du mime VI d’Hérondas, cf. Masson, OGS I,
p. 114. L’accent paroxyton de Choiroboscos est à corriger en périspomène. Le nom
suivant Κυρᾶς est désormais attesté à Callatis et en Cilicie, voir J.-L. Ferrary, Les
mémoriaux de délégations du sanctuaire oraculaire de Claros, Paris, 2014, p. 393,
n. 31. Mais dans quelle œuvre littéraire les grammairiens l’ont-ils trouvé ?
8. Καταφαγᾶς attesté chez les comiques attiques est une correction de Lentz pour le
καταφυγᾶς des manuscrits : voir Masson, OGS I, p. 315-317.
302 laurent dubois

καταφυγᾶ, δακνᾶς δακνᾶ ; des noms exceptionnels comme τρεσᾶς, τρεσᾶ


“le peureux” ».
Le deuxième passage figure au tome II, p. 434 de l’édition Lentz : il
est reconstitué à partir d’un traité d’orthographe anonyme nommé Περὶ
ποσότητος qui figure dans le Barrocianus 50 (xe s.) 9. Il remonte, selon
P.  Egenolff, non à Choiroboscos comme le voulaient Cramer et Lentz
mais à l’épitomé d’une anonyme Orthographia dont il reste des traces
dans le manuscrit Vind. Ph. Gr. 240 10. Il comporte un passage important
concernant les noms en -ᾶς :
Τὰ εἰς ας ὀνόματα, εἴτε περισπώμενα εἴτε ὀξύτονα ἀρσενικὰ… οὐ θέλουσι
τῇ ει διφθόγγῳ παραλέγεσθαι · οἷον Ζηνᾶς, Μηνᾶς, Μητρᾶς, ὄνομα
κύριον· Γλισᾶς, Κερκιδάς (sic), Πινακιδάς (sic), Κομητάς, Μαρικάς.
« Les noms en -ας, périspomènes ou oxytons, n’admettent pas d’avoir
une diphtongue ei à la pénultième, comme Ζηνᾶς, Μηνᾶς, Μητρᾶς nom
propre… »
On constate que dans ce passage Lentz a abusivement corrigé πινα-
κιδᾶς en πινακᾶς, ce qui est infirmé par le passage précédent.
Enfin dans le Περὶ καθολικῆς προσῳδίας « Sur la prosodie en
général » 11, on trouve un passage assez proche qu’il nous faut citer en
entier :
Ἔτι δὲ περισπῶνται μόνως κύρια ἢ ὑποκοριστικὰ, Ἑρμᾶς, Ἀργᾶς, Αἰγᾶς,
Καρρᾶς, Βορρᾶς, Γονατᾶς, ὁ Γούνιος ἐθνικόν, Κομητᾶς, Φιλητᾶς,
Μηνᾶς, Ζηνᾶς, Μητρᾶς, ὀστρακᾶς, πινακιδᾶς, λαχανᾶς ἢ ἐπὶ σκώμματος
τασσόμενα φαγᾶς, καταφαγᾶς, δακνᾶς ἢ ἀπὸ συμβεβηκότος οἷον τρεσᾶς.
ὡσαύτως δὲ καὶ τὰ Ἰωνικῶς παραλόγως διὰ τοῦ δ κεκλιμένα ὧν τὸ α
μακρόν, Βοιβᾶς, Βιττᾶς, Κυρᾶς· εἰσὶ δὲ ὀνόματα κύρια.
« Reçoivent aussi le périspomène seulement les noms propres ou les dési-
gnations familières : Ἑρμᾶς, Ἀργᾶς, Αἰγᾶς, Καρρᾶς, Βορρᾶς, Γονατᾶς,
(ὁ Γούνιος, l’ethnique), Κομητᾶς, Φιλητᾶς, Μηνᾶς, Ζηνᾶς, Μητρᾶς,
ὀστρακᾶς, πινακιδᾶς, λαχανᾶς ; ou ceux dont on admet qu’ils sont des

9. Le passage se trouve p. 250 des An. Oxon. II (1835) d’O. Cramer ; il a été revu par
R. Schneider, Bodleiana, Leipzig, 1887, p. 30.
10. P. Egenolff, Die orthographischen Stücke der byzantinischen Litteratur, Leipzig,
1888, p. 20. Voir K. Alpers, Bericht über Stand und Methode der Ausgabe des Etym.
Gen., Copenhague, 1969, p. 13 ; et du même, Theognostos Peri Orthographias Über-
lieferung, 1964, p.  4-7. Pour la date de ce manuscrit et son rôle dans la tradition
orthographique voir J. Schneider, op. cit., p. 111-112.
11. Hérodien, Περὶ καθολικῆς προσῳδίας, I, p. 51 (Lentz), no 27, p. 334 chez Dickey.
des noms en -ᾶς 303

termes railleurs, φαγᾶς, καταφαγᾶς, δακνᾶς, ou des cas exceptionnels


comme τρεσᾶς ; on accentue de la même façon d’un périspomène les
mots ioniens dont le α est long qui se fléchissent anormalement avec un
δ, Βοιβᾶς, Βιττᾶς, Κυρᾶς ; ce sont des noms propres. »
Dans le même ouvrage, il est à nouveau précisé que le terme δακνᾶς
reçoit un périspomène car il est classé parmi les mots répertoriés comme
termes railleurs : τὸ δὲ δακνᾶς περισπᾶται ὅτι ἐπὶ σκώμματος τάσσεται 12.
Le témoignage des grammairiens est important pour le sémantisme de
ces mots en -ᾶς car il est dit clairement que le suffixe accentué du péris-
pomène est l’un des six suffixes caractéristiques des hypocoristiques.
Dans des scholies marcienne et vaticane à la Grammaire de Denys le
Thrace 13, on trouve un passage essentiel pour la création de ces noms 14 :
Τῶν ὑποκοριστικῶν τύποι εἰσιν…. ἕξ ; après -ων, ίων, -αξ et avant -σκος
et -λος … ὁ τέταρτος εἰς -ᾶς, ὡς Ζηνᾶς ὁ Ζηνόδωρος καὶ Μητρᾶς ὁ
Μητρόδωρος. Or cette indication se retrouve quasiment à l’identique
dans le Περὶ παρωνύμων « Les dérivés nominaux » d’Hérodien 15, Lentz
II,2, p.  859, qui doit sûrement être la source de la scholie à Denys le
Thrace : dans la liste des suffixes d’hypocoristiques, après les noms en
-ων, -έων, -ίων, on lit en effet ἔστι δὲ καὶ εἰς ας ὑποκοριστικὰ περισπώ-
μενα, Θευδᾶς ὁ Θεόδωρος, Μητρᾶς ὁ Μητρόδωρος, Ζηνᾶς, Πυθᾶς…
Bref, pour nous en tenir aux seuls mots en -ᾶς, nous constatons qu’Hé-
rodien et ses successeurs les classaient en deux catégories principales :
— Des ὑποκοριστικά ou des désignations familières qui concer-
naient aussi bien les anthroponymes courts –  mais aussi des théo-
nymes, des potamonymes et des ethniques – (Ἑρμᾶς, Βοιβᾶς, Βιττᾶς)
ou des anthroponymes bi-membres abrégés (Μητρᾶς) que des mots
du lexique aussi abrégés (λαχανᾶς pour λαχανοπώλης) ;
— Des ἐπισκώμματα ou termes railleurs ressortissant au seul lexique
(φαγᾶς). Le cas de τρεσᾶς doit être aussi considérer comme un terme

12. Op. cit., p. 56.


13. Commentaria in Dionysii Thracis Artem Grammaticam, éd. A. Hilgard, Gr. Gr., III,
1901, p. 227, pour les scholia vaticana et p. 375-376, pour sa variante marciana.
14. Ibid., p. 376.
15. No 41, p. 336 chez Dickey.
304 laurent dubois

railleur : s’il a reçu un traitement particulier c’est que son radical est
celui du verbe poétique τρέω et non celui du banal τρέμω 16.
Nous verrons plus loin que cette classification est restrictive et qu’elle
peut être largement étoffée et complétée par l’étude des noms historiques
et non plus littéraires.
b. Origine du suffixe pour les Anciens
Selon une scholie vaticane à la Grammaire de Denys le Thrace, le
suffixe -ᾶς serait issu de la contraction de -έας 17 : ὥσπερ καὶ τὸ Δημᾶς
κύριον ἀπὸ τοῦ Δημέας, Νομᾶς < ἀπὸ τοῦ Νομέας > καὶ τὰ ὅμοια.
Un Δημᾶς apparaît comme compagnon de Paul en Asie Mineure
dans les Actes des Apôtres. Νομᾶς est quant à lui le résultat de l’adapta-
tion grecque du nom du roi de Rome Numa Pompilius dont l’accentua-
tion hésite depuis Denys d’Halicarnasse, Ant. Rom. Ι 75, entre Νόμας et
Νομᾶς sans qu’il y ait la moindre trace d’un **Νομέας.
Or la même explication se retrouve dans le Περὶ καθολικῆς προσῳδίας
dans un passage consacré aux mots en -ᾶς de plus d’une syllabe, Lentz I,
p. 54 : τὸ μέντοι Θευδᾶς περισπᾶται ὡς Μητρᾶς, Ζηνᾶς, Πυθᾶς. Τὸ Κερ-
κιδᾶς ἀπὸ συναλοιφῆς.
L’explication par une συναλοιφή « contraction » s’explique très vrai-
semblablement par la présence au sein des noms en -ᾶς du nom de vent,
le Βορρᾶς, dont les Anciens pouvaient croire qu’il était issu phonétique-
ment d’une forme plus ancienne Βορέας, hom. Βορέης, mais ceci, bien
évidemment, ne peut être prouvé pour les autres noms.
c. Indications des Anciens sur la flexion
Génitif. — Dans le passage du Περὶ κλίσεως ὀνομάτων « Sur la flexion
des noms » d’Hérodien, tel qu’il est reconstitué par Lentz, à partir de
fragments de Choiroboscos 18 nous trouvons cette excellente remarque :
ἐπὶ τῶν εἰς ας περισπωμένων, ἐὰν εἰς α εὕρομεν τὴν γενικήν, οὐκέτι
Δωρικὴν αὐτὴν λέγομεν, ἀλλὰ κοινὴν οἷον ὁ Μηνᾶς τοῦ Μηνᾶ, ὁ Ζηνᾶς
τοῦ Ζηνᾶ, ὁ Μητρᾶς τοῦ Μητρᾶ.

16. Pour l’explication de τρεσᾶς, voir Eusthate, Comm. Il., 772 : ὁ φύξηλις ὃν καί
τρεσᾶν εἴποι ἄν τις κωμικευόμενος ; et 1000, (ad 14, 522) ὅθεν καί τις ἐν Ἀθηναίοις
ἐπὶ δειλίᾳ κωμῳδούμενος τρεσᾶς ἐκαλεῖτο, καθὰ καί τις ἕτερος, διάρροιαν πάσχων
γαστρὸς, χεσᾶς ἐλέγετο.
17. A. Hilgard, op. cit., p. 153.
18. Hérodien, Περὶ κλίσεως ὀνομάτων, II, 2, p. 665 (Lentz), no 28, p. 335, chez Dickey.
des noms en -ᾶς 305

« Pour les périspomènes en ‑ᾶς, si nous avons trouvé le génitif en -ᾶ, nous
n’en faisons pas une forme dorienne mais une forme de koinè : ainsi ὁ
Μηνᾶς τοῦ Μηνᾶ, ὁ Ζηνᾶς τοῦ Ζηνᾶ, ὁ Μητρᾶς τοῦ Μητρᾶ ».
Dans le Περὶ καθολικῆς προσῳδίας « Sur la prosodie en général » 19,
on lit :
ὡσαύτως δὲ καὶ τὰ Ἰονικῶς παραλόγως διὰ τοῦ δ κεκλιμένα ὧν τὸ α
μακρόν, Βοιβᾶς, Βιττᾶς, Κυρᾶς· εἰσὶ δὲ ὀνόματα κύρια.
« On accentue de la même façon d’un périspomène les mots ioniens dont
le α est long qui se fléchissent anormalement avec un δ, Βοιβᾶς, Βιττᾶς,
Κυρᾶς ; ce sont des noms propres ».
Vocatif. — Dans le Περὶ κλίσεως ὀνομάτων à nouveau :
Τὰ εἰς ας ἰσοσυλλάβως κλινόμενα ἀποβολῇ τοῦ ς ποιεῖ τὴν κλητικὴν οἷον
ὁ Ζηνᾶς τοῦ Ζηνᾶ ὦ Ζηνᾶ, ὁ Μητρᾶς τοῦ Μητρᾶ ὦ Μητρᾶ 20.
« Les noms en ‑ᾶς parisyllabiques font leur vocatif par éviction du sigma
comme ὁ Ζηνᾶς τοῦ Ζηνᾶ ὦ Ζηνᾶ, ὁ Μητρᾶς τοῦ Μητρᾶ ὦ Μητρᾶ ».
Accusatif. — La seule indication semble se trouver dans un passage
du Περὶ μονήρους λέξεως « Sur la singularité lexicale » II,2, p.  917
(Lentz) 21: Hérodien présente la flexion du théonyme Ποτιδᾶς en invo-
quant pour l’accusatif un passage du Cyclope d’Épicharme, ναὶ τὸν
Ποτιδᾶν (81 K = PCG I no 70) ; est également cité ici le vocatif Ποτιδᾶ
chez Sophron (PCG I no 125 p. 240) et le génitif τέμενος Ποτιδᾶ ποντίω
chez Eupolis dans les Hilotes (PCG V no 149, p. 378). Ainsi Hérodien
ne faisait-il aucune différence entre un théonyme à la flexion très parti-
culière (< *Ποτιδασ-ας 22) et un nom propre à suffixe familier comme
Κερκιδᾶς 23.
Il ne semble point y avoir d’indication concernant le datif.
Le reprise des mêmes exemples indique clairement que les sources
des grammairiens étaient strictement littéraires et qu’ils connaissaient,
grâce aux fragments d’Hipponax et d’Hérondas et d’autres poètes iam-
biques, le génitif ionien en -ᾶδος. C’est en outre vraisemblablement
parce qu’Hérodien n’a pas vécu en Égypte mais à Rome qu’il n’a pas
19. I, p. 51 (Lentz) no 27, p. 334, chez Dickey.
20. Hérodien (< Choir. 128), Περὶ κλίσεως ὀνομάτων, II, 2, p. 667 (Lentz).
21. Περὶ μονήρους λέξεως, II, 2, p. 917 (Lentz), no 33, p. 336, chez Dickey.
22. Cf. nos Recherches sur le dialecte arcadien 1988, p. 36-37.
23. Cela sera repris dans le Περὶ παθῶν, ΙΙ, 1, p. 378 et dans le Περὶ μονηροῦς λέξεως,
ΙΙ, 2, p. 917 (Lentz) : εἴρηται δὲ καὶ Ποτιδᾶς ὡς Κερκιδᾶς.
306 laurent dubois

mentionné les si nombreux génitifs locaux en -ᾶτος qu’aucun Grec


d’Égypte ne pouvait ignorer.

1.2. Les Modernes


C’est à partir de 1820 que les savants semblent s’être intéressés aux
noms en -ᾶς. Dans un mémoire au titre explicite, De Substantivis in -ᾶς
exeuntibus, C. A. Lobeck écrit, après avoir évoqué les monosyllabes :
ad secundam classem referenda sunt nomina hominum propria Κοσμᾶς,
Μηνᾶς, Διονῦς ordinaria quidem et haud dubie antiqua, sed vernaculi
et plebeii sermonis finibus conclusa. Sunt enim illa omnia, citata pro-
nuntiatione, ut fert natura familiaris commercii, ab integris Διόνυσος,
Μηνόδωρος etc, violenter contracta, ideoque a grammaticis in deminu-
tivorum numero censentur. Sicut autem apud nos inurbanum habetur,
nomen cuiuspiam hoc modo decurtare, nisi veniam dat familiaritas, ita
in cultissima Graeciae civitate, Athenis, neminem ingenuum natum hanc
nominis quasi deminutionem subisse reperio, sed fuit haec hominum ser-
vilis conditionis propria appellatio 24.
Lobeck admet pourtant l’exception que constitue le nom du député
spartiate Μηνᾶς chez Thucydide V 19-21. Il écrit ensuite :
Ut a vulgatissimis ordiar, Δημᾶς non a Δημήτριος solum, ut Bentleio
visum 25, sed et a Δημέας corrumpi potuit, Ἡρᾶς ab Ἡρέας et Ἡρόδωρος,
Νικομᾶς a Νικομήδης et Νικόμαχος; sed corrumpendi initium a nominibus
in εας et ιας, Χαιρέας, Φειδίας, Σωσίας, sumptum fuisse coniicio, quae
levissima mutatione ab ingenuis ad servos et libertos traduci potuerunt 26.
On trouve ensuite des pages intéressantes chez Friedrich Wilhelm
Sturz, Opuscula nonnulla, I De nominibus Graecorum, mémoire dans
lequel sont, pour l’époque, bien posés tous les problèmes de la datio du

24. C. A. Lobeck, De Substantivis in -ᾶς exeuntibus, dans F. A. Wolf, Litterarische


Analekten, II, Leipzig, Weidmann, 1820, section III, § III, p. 49.
25. Je remercie mon ami Alcorac Alonso Déniz qui a pu retrouver ce passage : il s’agit
de l’ouvrage de R. Bentley, Epistola ad Joannem Millium (1691), réédité plus tard
dans le volume II de The works of Richard Bentley (1836) par A. Dyce : en étudiant
une liste importante d’anthroponymes grecs en –AΣ adaptés en latin, il écrit p. 347 :
« Sic Dama apud Persium, si Graecum est, a Δαμᾶς vel Δημᾶς, quod est diminutivum
a Δημήτριος, Mettius Damas [CIL X, 6164] ».
26. Op. cit., p.  51. Le même Lobeck revient sur ces noms 23 ans plus tard dans ses
Pathologiae graeci sermonis prolegomena, Leipzig 1843, p. 505-506.
des noms en -ᾶς 307

nom chez les Grecs, de leur adaptation en latin, et ses remarques pré-
figurent la seconde partie des HPN de Bechtel. On notera qu’il admet
comme Lobeck la théorie des Anciens sur l’origine contracte du suffixe,
-έας > -ᾶς 27. Chez ces deux savants on constate donc une reprise des
théories des Anciens avec, chez Lobeck, une explication de nature socio-
logique : les noms en-ᾶς sont populaires, voire serviles. Il n’y a bien sûr
chez eux aucune allusion à un nom transmis par des inscriptions.
Mais c’est la parution des deux premiers tomes du CIG de Boeckh
(1827-1843) qui a donné le branle à de nouvelles études, en particulier
à celles de Karl Keil. Dans son Specimen onomatologi graeci, il res-
titue par exemple, et à juste titre selon moi, le nom argien Β]ραχᾶς de
CIG 166, 4 (= IG I3, 1149, l. 69 (458 a. C.) 28. Il évoque aussi dans deux
articles postérieurs les diminutifs du nom Ἀπολλόδωρος : « Ἀπολλᾶς ein
ächt griechischer Name » et Ἀπελλᾶς 29.
Ensuite, c’est incontestablement A.-J. Letronne, l’auteur du Recueil
des inscriptions grecques et latines de l’Égypte, 1842-1848, qui fait faire
à l’anthroponymie grecque les plus gros progrès 30. On trouve ainsi, dans
ses Mémoires de l’Académie, concernant notre propos, l’identification
d’un génitif Ἀλεξᾶ sur une intaille d’époque romaine, la correspondance
entre les noms grecs en -ᾶς et les noms latins en -ā, le repérage des géni-
tifs en -ᾶτος en dialecte alexandrin 31.

27. Friedrich Wilhelm Sturz, Opuscula nonnulla, I. De nominibus Graecorum, Leipzig,


1825, p. 3-130, notamment p. 34, pour l’origine du suffixe.
28. Karl Keil, Specimen onomatologi graeci, Leipzig, 1840, p.  84. De nombreuses
remarques onomastiques figurent aussi dans ses Analecta epigraphica et onomato-
logica, Leipzig, 1842.
29. Id., respectivement Philologus 6 (1851), p. 168-170 et 8 (1853), p. 171-174.
30. A.-J. Letronne, Recueil des inscriptions grecques et latines de l’Égypte, 1842-
1848 ; « Observations philologiques et archéologiques sur l’étude des noms propres
grecs », Annales de l’Institut de correspondances archéologiques, t. XVII, 1845,
p. 251-346, et chez Didot en tiré à part en 1846 ; « Mémoire sur l’utilité qu’on peut
tirer de l’étude des noms propres grecs pour l’histoire et l’archéologie », Mémoires
de l’Académie XIX, 1re partie, 1851, p. 1-139, reprise du compte rendu de la pre-
mière édition de 1842 du Wörterbuch der griechischen Eigennamen de Pape,
d’abord paru de façon progressive dans le Journal des Savants de 1845, p. 672-682
et p. 728-743, puis 1846, p. 109-121 et p. 161-174 (= Œuvres choisies, IIIe série,
Paris, Leroux 1885).
31. A.-J. Letronne, Mémoires de l’Académie, p. 20.
308 laurent dubois

Il faut alors faire un saut d’une quarantaine d’années pour voir émerger
de nouvelles tentatives d’explication de ce suffixe. Ainsi F. Bechtel refuse
la contraction -έας > -ᾶς, qui serait incompatible avec la phonologie de
l’attique, et suppose l’allongement du a bref du premier élément de
Ἀλκαμένης / Ἀλκᾶς ou du second membre de Μολπαγόρας / Μολπᾶς 32.
Sans se prononcer sur l’origine du suffixe, la grammaire de R. Kühner
et F.  Blass met en relation le témoignage d’Hérodien avec la langue
d’Hipponax et d’Hérondas et celle des inscriptions ioniennes 33. C’est
aussi à la forme de gén. Βιτᾶτος du mime VI, v. 2 et 81, d’Hérondas que
W. Schulze consacre d’intéressantes remarques : il considère que la den-
tale sourde du suffixe s’explique comme un provincialisme égyptien du
scribe du papyrus et qu’Hérondas n’a pu écrire que Βιτᾶδος 34.
Au tout début du xxe siècle, A. Thumb insiste sur la productivité
parallèle des féminins en -οῦς et des masculins en -ᾶς : il montre que
les noms de métiers du grec moderne comme ψαρᾶς « poissonnier » ou
ψωμᾶς « boulanger » ont hérité une double flexion : de la koinè un génitif
singulier en -ᾶ, de l’ionien ancien, un pluriel en -ᾶδες 35.
L’année suivante, W. Crönert montre bien que la forme ionienne
Φιλητᾶς du nom de ce poète de la fin du ive siècle, est une variante de
Φιλητός et qu’il ne s’agit ni d’un sobriquet ni d’une forme abrégée,
mais d’un renouvellement par ‑ᾶς d’une ancienne terminaison théma-
tique en -ος, au même titre que Τρόφιμος / Τροφιμᾶς, Εὔτυχος / Εὐτυχᾶς.
Il esquisse en outre une répartition géographique assez juste entre les
hypocoristiques ioniens et les sobriquets des autres régions mais la chro-
nologie proposée, qui fait émerger les hypocoristiques au iie s. a. C., est
entièrement à revoir au vu des témoignages épigraphiques 36.
32. F. Bechtel, Inschriften des ionischen Dialekts, Göttingen, 1887, p. 60 ; cette hypo-
thèse sera reprise au siècle suivant par G. Björck, Das Alpha impurum und die tra-
gische Kunstsprache, Uppsala, 1950, p.  59-50 et p.  268-270. W.  Petersen, « The
Greek Masculines in Circumflexed -ᾶς », Class. Phil. 32 (1937), p.  123, montre
qu’il faut en fait accentuer Ἄλκας, en supposant un génitif Ἄλκαντος, nom bâti sur
le modèle de Βίας, Βίαντος, ce qui est admis par O. Masson, OGS I, p. 317.
33. R. Kühner et F. Blass, Ausführliche Grammatik der griechischen Sprache, I. Ele-
mentar und Formenlehre, I, 1, Hanovre, 1890, p. 492-494.
34. W. Schulze, RhM 48 (1893), p. 248-257 = (Kleine Schriften, p. 417-418). Cela vaut
aussi pour la forme Κανδᾶτος du même mime v. 87.
35. A. Thumb, Die griechische Sprache im Zeitalter des Hellenismus, Strasbourg, 1901,
p. 230-233.
36. W. Crönert, « Philitas von Kos » Hermes 37 (1902), p. 213-215.
des noms en -ᾶς 309

F. Bechtel, dans le sillage de sa première interprétation de 1887, fait


dans ses HPN une distinction claire entre les différents noms en ‑ᾶς :
les hypocoristiques abrégés de composés bimembres (Μολπᾶς) et les
sobriquets bâtis sur un lexème à membre unique (Μικᾶς) 37. E. Locker,
qui tente une analyse statistique incorporant les noms mythologiques,
estime quant à lui que tous les noms en -ᾶς sont des hypocoristiques,
qu’il s’agisse d’anthroponymes ou de noms de métiers (type μαχαιρᾶς
ou ὀρνιθᾶς) 38. W. Petersen considère qu’à l’origine le morphème -ᾶς qui
figure dans les hypocoristiques ioniens n’a rien à voir étymologique-
ment avec celui des différents noms d’oiseaux connus depuis Hipponax
(ἀτταγᾶς fr. 26 Masson), en Attique et en particulier par Aristophane dans
les Oiseaux comme ἐλεᾶς (v. 302), ἐλασᾶς (v. 886), καταφαγᾶς (v. 288) ;
les deux types auraient convergé à l’époque de la koinè pour donner
naissance à une catégorie très productive de dérivés aussi bien anthropo-
nymiques que lexicaux, notamment des noms de métiers 39. Plus récem-
ment, V. Schmidt dresse un bon panorama de l’histoire des noms en -ᾶς à
partir de la forme Βιτᾶτος d’Hérondas et admet l’hypothèse de Schulze 40.
Ces contributions dues à des grands noms de l’histoire de la langue
grecque sont toutes intéressantes dans la mesure où elles ne prennent pas
pour argent comptant le témoignage des Anciens et ont chacune mis en
évidence une particularité des noms en -ᾶς. Néanmoins la progression
considérable des données onomastiques provenant des découvertes épi-
graphiques permet de reprendre ab ovo maintes hypothèses formulées
depuis l’Antiquité.

2. Les noms en -ᾶς dans les sources historiques

Par principe nous nous intéresserons avant tout aux attestations les
plus anciennes antérieures au moment où la koinè va diffuser dans l’en-
semble de la Méditerranée ce type de noms. Les anthroponymes cités
sont puisés aux différents volumes du LGPN auxquels nous renvoyons
le lecteur pour les références. Mais j’attire dès maintenant l’attention
sur un défaut des admirables HPN qui sont aujourd’hui centenaires :
37. Bechtel, HPN IX-X.
38. E. Locker, Glotta 22 (1934), p. 89-94.
39. W. Petersen, art. cit., p. 121-131.
40. V. Schmidt, Sprachliche Untersuchungen zu Herondas, Berlin, 1968, p. 47-54.
310 laurent dubois

Bechtel considérait que certains noms en -ᾶς étaient à l’origine de noms


en ‑αῖος ou en -άδας et il supposait donc l’existence d’un *Καλλᾶς à
Naxos d’après un Καλλαῖος 41, d’un *Οἰνᾶς d’après un Οἰναῖος en Crète
et d’un Οἰνάδης à Tènos, d’un *Ζηλᾶς d’après un Ζηλάδης à Érétrie :
cette démarche est parfaitement légitime quand il s’agit d’extraire un
anthroponyme d’un adjectif patronymique, en thessalien ou en béotien ;
mais dans d’autres régions, elle est abusive car il est désormais certain
que -αῖος et -άδης sont des suffixes indépendants et qu’ils ne sont pas
dérivés de noms en -ᾶς souvent imaginaires.

2.1. Formes courtes de composés : un développement aréal


ionien ancien
Un premier point certain, les inscriptions ioniennes anciennes confir-
ment pleinement le témoignage des grammairiens.
2.1.1. Formes courtes de théophores
Le type Μητρᾶς attesté à Éphèse vers 400 avec maintien du seul pre-
mier membre de Μητρόδωρος et adjonction du suffixe se rencontre lui
aussi très tôt dans des formes courtes de noms de l’ionien ancien en par-
ticulier dans les noms théophores.
— Διᾶς forme courte de nombreux noms en Διο-, près de Milet, vie s. ;
— Πυθᾶς, Érythrées, ive s., et Thasos, ve s. / Πυθόδοτος ;
— Ἑκατᾶς, Érythrées,ve s. / Ἑκατόδωρος ;
— Ἱσᾶς, Érythrées, ca 300 / Ἰσίδωρος ;
— Ἀπελλᾶς, Ἀπολλᾶς, Érythrées / Ἀπολλόδωρος ;
— Δελφινᾶς, Érythrées, iiie s. / Apollon Delphinios de Milet ;
— Ἀθηνᾶς, Érythrées / Ἀθηνόδοτος ;
— Ἡρᾶς, très courant à Thasos et dans les Cyclades, ve s. ;
— Διονυσᾶς Διονυσοδώρου, Colophon, ive s. ;
— Μητρᾶς, Smyrne, ve s. / Μητρόδωρος ;
— Μηνᾶς, Smyrne / Μηνόδωρος ;

41. Bechtel, HPN  229, pour Καλλᾶς, déductible selon lui de Καλλαῖος. Cette idée a
été reprise récemment à propos de noms en -αῖος en Eubée, par M. Bueno, « Los
antropónimos en -ᾶς como rasgo de diferenciación dialectal dentro del jónico-
ático », dans E. Crespo, M. J. Barrios Castro (éd.), Actas del X Congreso Espanol de
Estudios Clásicos, Madrid, 2000, p. 177-184.
des noms en -ᾶς 311

— Μοιρᾶς, Colophon, ive s. / Μοιρόδοτος ;


— Ἀσκλᾶς, fils d’  Ἀσκλάπων, forme abrégée, comme Ἀσκληπᾶς,
d’ Ἀσκληπιόδωρος, Délos, ier s. a. C. ;
— Νυμφᾶς, Panticapée, impérial / Νυμϕόδωρος.
2.1.2. Composés à second élément tronqué
Le type Θεοδᾶς, attesté à Éphèse au ive s. avec conservation de la pre-
mière consonne du second membre abrégé de Θεόδωρος est très fréquent
dans les métropoles ioniennes et dans certaines de leurs colonies.
— Σωκρᾶς, Milet (-ᾶδος), vie-ve s. / Σωκράτης ;
— Ζωγᾶς, Milet / Ζωγένης ;
— Ζωπᾶς, Érythrées, iiie s. / Ζώπυρος ;
— Νεομᾶς, Milet, ve s. / Νεομήνιος ;
— Σωτᾶς, Milet, ive s. / Σώτιμος ou Σωτήρ et ses nombreux dérivés ;
— Ἀντιπᾶς, Halicarnasse, dont le dialecte était ionien aux ve-ive s. /
Ἀντίπατρος ;
— Εὐφρᾶς, Colophon, ive s. / Εὐφράνωρ ou Εὐφρόνιος ;
— Ἡροφᾶς, Colophon / Ἡρόφιλος ou Ἡροφάνης ;
— Παμφᾶς, Thasos, ve s. / Πάμφιλος ou Πανφάνης.
En dehors de la région ionienne, sont attestés au ive s., à titre excep-
tionnel, à Chypre, un Φιλοπᾶς / Φιλοπάτωρ, à Rhodes, un Πυθοδᾶς /
Πυθόδαμος et même à Épidaure, un Ἀριστρᾶς / Ἀρίστρατος.
2.1.3. Composés sans second élément apparent
— Μολπᾶς, Abdère, colonie de Téos, ve s., évoque le nom milésien
banal Μολπαγόρας au premier membre duquel on retrouve le nom du
magistrat qu’est le μολπός ;
— Δημᾶς, Érythrées, ive s. / Δημάρατος, Δημάρχος, Δημαίνετος ;
— Ἱππᾶς, Érythrées / noms en Ἱππο- ;
— Φιλᾶς (-ᾶδος), Maronée, ve s. ;
— Κυδρᾶς Abdère, iiie s. ;
— Μενᾶς, Érythrées, ive s. ;
— Νικᾶς, Érythrées, Kios et Chypre, ive s. / Νικοκλῆς ;
— Δαμνᾶς, Milet, ive s. / Δάμνιππος (Attique) ;
— Τιμᾶς, Milet et Cnide, iiie s. / Τιμοκράτης ;
— Ξενᾶς, Ephèse, iie s. / Ξενόφιλος, -δοκος ;
— Κρινᾶς, Marseille, iiie s. / Κριναγόρας, Κρινόδαμος ;
312 laurent dubois

— Φειδᾶς, Céos, iiie s. / Φειδαγόρας ;


— Λαμπρᾶς, Eubée ier a. C. / Λαμπροκλῆς ;
— Φιλτᾶς et Φιλιστᾶς, hors domaine ionien, Rhodes, ive s. ;
— Δρακᾶς, Achaïe, iiie s. / Δρακοντομένης.
Voilà donc une brève liste de la catégorie des hypocoristiques tels que
les définissaient les grammairiens anciens : ils sont presque tous ioniens
et n’ont quasiment pas de correspondants dans les autres régions grecques
jusqu’à la fin du ive siècle. Deux exemples chypriotes méritent cependant
d’être cités : on notera dès le vie s. à Salamine de Chypre (Athénée II
48b) un probable Ἀκεσᾶς au génitif, non dialectal certes, Ἀκεσᾶ, mais
garanti par la présence d’un Ἀκέσανδρος à Chypre ; de même le Chy-
priote Ὀνασιμᾶς (ve-ive s.) est plutôt l’hypocoristique d’un Ὀνασιμένης,
attesté à Chypre même, qu’un renouvellement de Ὀνάσιμος qui est plus
tardif 42. Ces attestations proches des données ioniennes ne sont pas sans
intérêt pour l’hypothèse de l’existence de ce suffixe au second millénaire.
Nous y reviendrons. À partir du ive s. on voit apparaître en particulier
des noms en -σᾶς -σᾶ ou -σᾶδος (et non en -σας, -σαντος) bâtis sur des
anthroponymes à premier membre verbal sigmatique : Ἀναξᾶς à Téos,
Πρηξᾶς à Érythrées, Ἡγησᾶς à Éphèse.
Que les Ioniens avaient pleinement conscience du pouvoir abréviatif
de ce suffixe apparaît clairement dans une dédicace d’Abou Simbel du
vie s. faite par un Colophonien en compagnie du pharaon Ψαμμήτιχος
appelé familièrement ici Ψαμματᾶς 43. Cette fonction a perduré dans la
conscience des Grecs et a dépassé le cadre strictement ionien puisqu’on
trouve à Byzance, à l’époque romaine, un Ἡρᾶς Ἡροστράτου et un
Μηνᾶς Μηνοθέμιος, et à Rhodes, à la même époque, un Διογᾶς Διογέ-
νευς ; on citera aussi le nom d’un roi des Athamanes du iiie a. C. en Acar-
nanie qui, par Polybe, est appelé tantôt Ἀμύνανδρος, tantôt Ἀμυνᾶς 44.

42. Ὀνασιμᾶς et Ὀνασιμένης, respectivement ICS 304 et 303, n. 1.


43. LSAG no 56 p. 340 et 344. Voir surtout O. Masson, A. Bernand, REG 70 (1957),
p. 19-20, no 6bis.
44. Cf. l’excellent article de O. Crusius, « Die Anwendung von Vollnamen und Kurz-
namen für desselben Person und Verwandtes », JClPh, 1891, p. 385-393. Voir déjà
Hérodien t. II, p. 859 (Lentz).
des noms en -ᾶς 313

2.2. Sobriquets en -ᾶς : un développement panhellénique


ancien
Il est notoire qu’aucun grammairien ne signale qu’il a existé très tôt,
aussi bien dans les pays ioniens qu’ailleurs dans le monde grec – à l’ex-
ception d’Athènes où les mots en -ᾶς n’apparaissent qu’au second siècle
avant notre ère 45 –, des anthroponymes sobriquets ou seconds noms en
-ᾶς bâtis sur des substantifs ou des adjectifs du lexique, voire des thèmes
verbaux.
— Le plus ancien exemple est daté du viie s. à Amorgos: dans cette
inscription funéraire, le nom au nominatif du père, curateur du monu-
ment, a clairement la forme Πυγμᾶς (CEG 152), nom dans lequel
je ne vois pas comme Bechtel (HPN 576), une forme abrégée de
Πυγμαλίων, mais bien plutôt un anthroponyme directement bâti sur
πυγμή « la boxe » : ce sobriquet aurait pu avoir été donné à un bébé
qui jouait déjà des poings.
— En Locride, au vie s., un Φαλας au nominatif a des chances d’être
un Φαλᾶς, nom bâti soit sur φαλός « blanc » soit sur φαλλός ;
— Τριχᾶς au génitif, dans la formule de datation de l’inscription
archaïque des Labyades (DGE 320), à Delphes, près de Castalie : ἐπὶ
Τριχᾶ ἄρχοντος : il s’agit du sobriquet « Lechevelu, Lepoilu » ;

45. Cf. L. Threatte, GAI II, 1996, p. 71: récusons cependant dans ce passage la men-
tion d’une origine dorienne de ces noms en -ᾶς. Pour le génitif Μαρικᾶδος d’un
Μαρικᾶς sur un vase du vie siècle, O. Masson, OGS I, p. 317-318, a montré qu’il
s’agissait d’un étranger dont le nom, sans étymologie grecque, avait été intégré à
la langue grecque par l’adjonction de la variante ionienne du suffixe. Voir aussi
Threatte, GAI II, p.  87. O. Masson avait constitué un dossier concernant quatre
jeunes gens qualifiés de καλός sur des vases attiques sur la base d’une étude de
P. Kretschmer, Die griechischen Vaseninschriften, Gütersloh, 1894, p. 186, qui esti-
mait que Φανᾶς, Λιχᾶς, Κακᾶς et Βραχᾶς étaient la preuve de l’existence de noms
en -ᾶς en Attique aux vie-ve s. O. Masson se montre très circonspect et préfère voir
dans ces personnages des étrangers, ioniens ou doriens. Ces noms sont repris avec
un accent paroxyton dans le LGPN 2 sauf Κακᾶς qui devient curieusement Κακα-
σανός ! O. Masson ne semble pas être revenu plus tard sur ce problème. Ces noms ne
sont en tout cas pas discutés par Threatte dans ses GAI II. Nous serions plutôt, quant
à nous, favorables à la possibilité qu’il s’agisse de noms de Grecs non athéniens en
-ᾶς. Enfin un Εὐγᾶς, diminutif de Εὐγένης, dans l’inventaire d’équipage IG I3, 1032,
l. 424 (405 av.) a de fortes chances d’être un métèque d’origine ionienne.
314 laurent dubois

— En Doride, vie s., le nom Τροχᾶς pourrait être en rapport soit


avec le nom de la « course », soit avec le verbe τροχάω qui depuis
l’Odyssée signifie « trottiner » pour un enfant ;
— Πεταλᾶς, sur un aryballe corinthien du vie s., cf. πέταλον
« feuille » ;
— Χαβᾶς, Tanagra, ve s., est un sobriquet bâti sur l’adjectif rare χαβός
« courbé, tordu » ;
— Κλονᾶς, Béotie, viie-vie s., semble bâti sur κλόνος « tumulte » ;
— Παταγᾶς, nom d’un magistrat de Sardes, ve s., « Leraffut » ;
— Σφυρᾶς, Sélinonte, ve s., sur σφῦρα « maillet » : est-ce l’abrévia-
tion d’un *σφυροποιός ?
— Σιναρᾶς, Sélinonte, sur σιναρός « abimé » ;
— Μικᾶς, Thasos, ve s. ;
— Κιβᾶς, Thasos, ive s., « Lemuet », sur κιβός « muet » (Hsch.) ;
— Στραβᾶς, Cyrène, ive s. ;
— Φακᾶς, Thessalie, iiie s., sur φακός « lentille et tache de rousseur » ;
— Ῥαχᾶς, Acarnanie, iiie s., sur ῥαχός « épine ».
Voilà donc la situation et la répartition géographique de ce suffixe
aux hautes époques : sa valeur abréviative est évidente en pays ionien
oriental, dans les îles de l’Est de l’Égée et à Thasos, ses emplois comme
sobriquets dérivés d’un primaire sont attestés en toutes régions à l’excep-
tion d’Athènes.
Ce type de dérivés a été tellement productif 46 qu’il a servi à l’in-
tégration de noms étrangers aussi bien dans l’est du monde grec avec,
à Chypre, des noms orientaux comme Σεσμᾶς ou Σασμᾶς, Αβδᾶς, ou
Θωμᾶς dans le NT, en Pamphylie avec des noms anatoliens comme Βᾶς,
Οβας et Εχϝαλιᾶς ; dans le Pont avec un nom Δαλᾶς (-ᾶτος) bâti sur une
racine thrace Dal- 47 de même que Ζιπᾶς en Macédoine 48. Mais surtout ce
suffixe s’est ajouté à des noms latins comme Ῥουφᾶς, Λεπιδᾶς, Ποπλᾶς
46. On ne connaît, semble-t-il, que très peu de noms de femmes en -ᾶς : citons, à
Philai, une Κλεοπᾶς, au génitif en -ᾶτος, diminutif en relation avec le nom royal
Κλεοπάτρα, voir OGS II, p. 378. Voir aussi O. Masson, RPh 1974, p. 82-83, qui cite
pour Rhodes, Maiuri, Nuova silloge 1925, no 223 une Νανᾶς Κίλισσα et, no 264, au
génitif, Νανᾶτος τᾶς ἐπικαλουμένας. Cette dernière attestation ne figure pas dans le
LGPN 1, vraisemblablement parce qu’elle a été soupçonnée de ne pas être rhodienne
(je remercie R. Catling pour cette précision).
47. Cf. Dana, OnomThrac, p. 108-109.
48. Ibid. p. 400-402.
des noms en -ᾶς 315

et même Φορνεικᾶς à Ephèse, ou à des adjectifs à titre de sobriquet


comme Βαρωνᾶς à Philai en Égypte, sur latin baro « lourdaud ».
Autre caractéristique de cette productivité anthroponymique : le suf-
fixe a pu, comme l’avait remarqué Crönert (voir n. 36) se substituer à
la structure thématique quitte à s’adjoindre à d’autres suffixes d’hy-
pocoristiques : ainsi à Priène Βακχ-υλᾶς est un dérivé de Βακχ-ύλος,
tout comme Δημ-υλᾶς (gén. -ᾶδος) est un dérivé de Δημ-ύλος attesté
au même endroit. Il en va de même pour Τροφ-ιμᾶς courant en Asie à
l’époque impériale.
La répartition si nette entre l’Ionie et le reste du monde grec pour-
rait inciter à considérer qu’il ne s’agit pas à l’origine du même suffixe.
Avant de trancher, il faut s’interroger sur la complexité sémantique de
l’abréviation.

2.3. Une répartition géographique d’origine sémantique ?


L’abréviation ionienne consiste en une polarisation sur le premier
membre, amplifié ou non du début du second, d’un composé anthropo-
nymique bimembre. Il s’agit dans ce cas d’une abréviation affectueuse
qui a pour but de maintenir d’un point de vue strictement formel un lien
sentimental entre le détenteur du nom composé, quel qu’il soit, père,
grand-père, oncle, et l’enfant qui reçoit le nom réduit : Δημᾶς devait être
compris comme « le petit Δημοσθένης ».
Mais cette polarisation sur le premier membre peut procéder d’inten-
tions autres qu’affectueuses : en privilégiant dans un composé le premier
membre « déterminant » et en oblitérant le second membre « déter-
miné » quand ce dernier est banal ou que son expression n’est pas néces-
saire, on met en évidence la spécificité du nom. Ceci apparaît clairement
dans les noms de métiers appelés à être utilisés comme surnoms. Un
λαχανοπώλης « marchand de légumes » (Hérodien) est remplacé par un
λαχανᾶς « l’homme aux légumes » (pap. du ive p. C.), lequel est uti-
lisé comme anthroponyme au xiie s. à Byzance 49. Un terme rare attesté
par des gloses comme ὀστρακοποιός « fabricant de pots » est abrégé en
ὀστρακᾶς « l’homme aux pots » attesté à l’époque chrétienne. Bien que

49. Cf. Masson, OGS I, p. 170-171.


316 laurent dubois

le composé ne soit pas attesté, le πινακιδᾶς d’Ηérodien (cf. supra) est un


« fabricant d’écuelles, l’homme aux écuelles », des πινακίδες 50.
Or O. Masson a montré que ce processus sémantique est beaucoup
plus ancien : le nom arcadien Κερκιδᾶς, attesté depuis le ive s. a. C. est
à l’origine un nom de métier *κερκιδᾶς « l’homme aux navettes » qui
procède de l’abrègement de *κερκιδοποιός que l’on déduit légitime-
ment de l’abstrait aristotélicien κερκιδοποιική « art de la confection des
navettes », les κερκίδες. Que ce processus est ancien est aussi prouvé par
le fait que les hasards de la documentation font parfois que le surnom est
le plus anciennement attesté : ainsi le cognomen latin Cymina est attesté
aux ier-iie s. p. C., le nom Κυμινᾶς dans un papyrus vers 500, tandis que
le composé κυμινοπώλης est seulement connu par des papyrus byzan-
tins. Plus démonstratif encore, l’équivalence entre le composé et la forme
abrégée a été prouvée par un article de W. Clarysse et d’O. Masson dans
lequel il est montré qu’un même personnage, dans des étiquettes égyp-
tiennes, est qualifié tantôt de χηνοτρόφος « éleveur d’oies », tantôt de
χηνᾶς « l’homme aux oies » 51.
La même analyse pourrait s’appliquer aux noms en -ᾶς théophores :
point n’est besoin d’avoir recours au second élément très fréquent -δωρος
ou -δοτος pour considérer qu’un enfant est un don de la divinité sous la
protection de laquelle on souhaite le placer ; la simple présence du suffixe
-ᾶς fait de lui « le protégé de tel ou tel dieu ».
Cette polarisation qui aboutit à la seule présence du déterminant
est évidente dans un grand nombre de surnoms, de sobriquets devenus
anthroponymes à part entière. Du point de vue de la traduction de la
spécificité du déterminant on passe aisément de « l’homme aux  … »,
à « l’homme dont le propre est  … », à « l’homme comme  … », à
« l’homme qui n’est que … (tel défaut, tel excès, telle particularité »,
voire à « l’homme qui … » avec un premier membre verbal (type τρεσᾶς,
δακνᾶς, ou φαγᾶς chez Cratinos).
Il n’y a donc pas, selon moi, à supposer une origine différente pour
le suffixe ionien abréviatif et le suffixe des sobriquets des autres régions.
Ces remarques s’appliqueraient certes aisément à d’autres suffixes hypo-
coristiques, mais la particularité de -ᾶς est d’avoir été beaucoup plus
50. OGS I, p.  172 : noms de métiers du type de κλειδᾶς « serrurier », κοπιδᾶς
« coutelier ».
51. Pour *κερκιδᾶς, Κυμινᾶς et χηνᾶς, voir Masson, OGS I, p. 172-180 et 241.
des noms en -ᾶς 317

productif que -ων ou -αξ, nettement railleurs, parce qu’en conférant au


déterminant une polarisation sémantique plurielle que l’on pourrait qua-
lifier de familière ou de populaire, il pouvait aussi bien fournir une caté-
gorie lexicale précise comme celle des noms de métiers qu’être apte à
former les sobriquets les plus cocasses comme le Παταγᾶς de Sardes.

3. La flexion des noms transmis par les sources


épigraphiques et papyrologiques

3.1. Le génitif ionien en -ᾶδος


Conformément au témoignage des grammairiens, le génitif ionien
en -ᾶδος est particulièrement vivace dans certaines colonies milé-
siennes  avec une constance particulière à Abdère, colonie de Téos,
dont le monnayage a fourni de grandes listes de monétaires des ve et
ive s. : Ἀπολλᾶδος, Μολπᾶδος, Διονυσᾶδος ; à Périnthe Κοννᾶδος (ive),
Βατᾶδος (iiie). Alors que le génitif en -ᾶ déjà présent dans les colonies
mégariennes gagne du terrain dans les colonies ioniennes comme Olbia
(Σιττυρᾶ, Θεμιστᾶ IGDOP 108), on voit curieusement des résurgences
du génitif ionien à l’époque impériale : à Philippopolis Συρᾶδος (iiie
p. C.), à Odessos Ἀπελλᾶδος (iie p. C.).

3.2. Le génitif en -ᾶτος


Le génitif en -ᾶτος est attesté sporadiquement depuis le ive s. dans le
Bosphore cimmérien 52. Le plus authentiquement grec est le génitif Μολ-
πᾶτος de Panticapée (CIRB 210), ainsi que, pour la même cité, le gén.
Μιδᾶτος (CIRB 154, ve s.) 53, que l’on comparera avec le génifif Μιδᾶδος
de Cyzique (I. Kyzikos 1980, no 167) 54. À l’époque impériale est attesté un
génitif Νυμφᾶτος (CIRB 805). Le génitif Νανᾶτος de Panticapée (ive s.)

52. Voir L. Zgusta, Arch. Or. 24 (1956), p. 415.


53. Dans cette même cité, on trouve aussi un gén. Μίδαο, CIRB 228, ive s., dans une
simple funéraire : l’impossibilité d’y voir un génitif béotien ou homérique a incité
Tokhtas’ev, Hyperboreus 1 (1994), p. 163-165, à y voir le génitif d’un Μίδα(ι)ος, ce
qui est repris dans le LGPN 4.
54. On doit donc supposer l’existence d’un Μιδᾶς à côté d’un Μίδας attesté au génitif
Μίδα sur une anse d’amphore de Néapolis du Pont. Un autre exemple inédit est cité
par le LGPN 4 à Bisanthè.
318 laurent dubois

semble être celui du Lallname Ναν(ν)ᾶς attesté à Olbia (IGDOP 110, 5,


iie-ier s. a. C.). En tout cas cette désinence semble être assez banale à Pan-
ticapée pour avoir été utilisée dans des anthroponymes d’origine thrace
comme le nom Δαλᾶς (ive s.), au génitif Δαλᾶτος 55. Est enfin apparu à
Myrmèkion le génitif Ἰοπᾶτος (ive s.) d’un nominatif Ἰοπᾶς : faut-il l’ex-
pliquer comme un dérivé du toponyme palestinien Ἰόπη (Jaffa) comme
le suggère Bechtel (HPN  545 et 553) à propos des noms de femmes
Ἰοππίς, Ἰόππα 56, ou ne faudrait-il pas plutôt suivre Tokhtas’ev qui pro-
pose d’y voir un hypocoristique d’un *Ἰόπατρος 57 au premier membre
duquel figurerait l’élément intraduisible Ἰο- de Ἰογένης, Ἰοκλῆς, Ἰομήδη
(HPN 219). Il est assez difficile de faire une hypothèse sur l’origine de
cette désinence -ᾶτος, mais il est certain que les génitifs ioniens en -ᾶδος
attendus dans la région ne sont pas sûrement établis 58 et que la forme
banale de koinè est en -ᾶ 59. L’ancienneté du génitif Μολπᾶτος aurait pu
inciter à supposer un apport de la métropole ionienne de Milet 60 mais
comme aucun génitif en -ᾶτος n’y est attesté 61, cette hypothèse est en
vérité peu probable. Il vaudrait peut être alors mieux supposer une adap-
tation locale d’un -ᾶδος métropolitain à d’autres flexions du type de -οῦς,
-οῦτος ou ‑ης, -ητος 62.
On le rencontre par ailleurs à Rhodes (IG XII, 1, 954, ier a. C. : Ἀπελ-
λᾶτος), où, dans cette inscription funéraire, le personnage pourrait être
d’origine ionienne. Ce même génitif est encore attesté à Chypre dans
les inscriptions alphabétiques d’époque hellénistique ou romaine 63: on
pourrait se demander s’il ne s’agit pas d’une influence égyptienne due

55. Ce nom n’est pas cité par Dana, OnomThrac, p. 108-109, parmi d’autres anthropo-
nymes bâtis sur cette racine δαλ-.
56. En revanche la dame du nom de Ἰόπη sur un vase du vie s. à Athènes est en relation
avec le nom de l’héroïne femme de Thésée comme l’a bien vu Bechtel (HPN 579).
57. Op. cit. 1 (1994), p. 166 en note.
58. Cf. L. Zgusta, art. cit., p. 415.
59. Voir les listes du CIRB, 815.
60. Cf. N. Ehrardt, Milet und seine Kolonien, Francfort - Berne - New York, 1988, p. 80.
61. Le génitif Μολπᾶδος est en revanche bien attesté à Abdère colonie de Téos au ve s.,
Voir Masson, OGS II, p. 431.
62. Cf. L. Dubois, dans Onomatologos, p. 407.
63. Voir Masson, OGS I, p.  230-231 ainsi que BCH 1079, p.  374 et 376 et M.  Eget-
meyer, Le dialecte grec ancien de Chypre, I, Berlin - New York, 2010, p. 420-421.
des noms en -ᾶς 319

au protectorat des Lagides sur l’île 64. Il est aussi parfaitement attesté


en Pamphylie avec différentes graphies locales, -ᾶτυς, -ᾶτους : ainsi les
génitifs Πελᾶτους ou Πελλᾶτυς correspondent à un nominatif Πελλᾶς
< Ἀπελλᾶς 65. D’autres exemples sporadiques ont été depuis longtemps
observés dans la partie sud de l’Asie Mineure, aux époques romaine et
impériale, en Cilicie  66, en Pisidie 67 et en Lycie 68 : comme l’avait bien
vu V. Schmidt, il s’agit vraisemblablement là de l’influence d’autres
flexions banales dans ces régions 69.
Mais c’est surtout en Égypte que les noms en -ᾶς ont proliféré du
iiie s. a. C. au vie s. p. C. 70.

3.3. La flexion en Égypte : acc. -ᾶν, gén. -ᾶτος, ou -ᾶ, dat. -ᾶτι,
ou -ᾶ(ι).
Il ressort de la consultation d’index électroniques comme Papyri.info
pour les papyrus et les ostraca et de celle de volumes épigraphiques pour
les inscriptions que des anthroponymes en -ᾶς apparaissent dès le iiie s.
a. C., avec un génitif en -ᾶτος : on trouve alors fréquemment des noms à
radicaux égyptiens comme Παᾶς, Πνᾶς, Ποκᾶς, Σουχᾶς, des noms sémi-
tiques comme Ἰωναθᾶς (P. Petrie 2, 14) 71 et plus rarement des noms grecs
comme un Μεγᾶς, au génitif Μεγᾶτος (P. Petrie 3, 43, l. 19, 240 a. C.),
un Αἰσχυρᾶς (dat. en -ᾶ) sur un ostracon (O. Eleph. Wagner DAIK 5), un
Φερᾶς (gén. -ᾶτος), un Οἰμᾶς (gén. -ᾶτος) et un Ὀρνιτᾶς « Loiseleur »
(P. Petrie 3, 27) 72 avec une sourde pour Ὀρνιθᾶς qui apparaîtra plus tard.

64. Ce pourrait aussi être, selon moi, une influence égyptienne qui expliquerait le génitif
Εὐφρᾶτος d’une funéraire du ier-iie p. C. de la campagne de Cyrène que Catherine
Dobias a justement interprété dans son article sur les noms en -ας à Cyrène dans le
recueil qu’elle a publié sous le titre Des dialectes grecs aux Lois de Gortyne, Nancy
1999, p. 23-32, et plus particulièrement p. 27-29.
65. Voir C. Brixhe, Le dialecte grec de Pamphylie, Paris, 1976, p. 105.
66. Ἀππᾶτος (Syll.3), 1235, Μηνᾶτος (ΜΑΜΑ ΙΙΙ 589), Λουκᾶτος (ibid. 250).
67. Ἀττᾶτος (TAM III, no 100), Κυᾶτος (TAM III, no 668).
68. Ἑρμᾶτος (TAM II, nos 972 et 980), Σωσιμᾶτος (ΤΑΜ ΙΙ, no 1130).
69. Op. cit. Les formes attestées en Italie, dat. Τροφιμᾶτι (IG XIV 929) et Διωνυτᾶτι
(IGUR II 485), concernent des Grecs originaires d’Égypte.
70. Voir E. Mayser, Gram. Gr. Papyri, Berlin, 1938, p. 5-8; et Masson, OGS I, p. 54.
71. Le nom est clairement indiqué comme sémitique dans le papyrus puisqu’il est pré-
cédé de l’adverbe συριστί.
72. Cf. Masson, OGS I, p. 196.
320 laurent dubois

Au iie s. a. C. apparaissent le sobriquet Κεφαλᾶς (‑ᾶτος), et l’hypocoris-


tique Δημᾶς, et au ier s. les hypocoristiques Πτολλᾶς et Παυσᾶς.
Les noms en -ᾶς deviennent ensuite de plus en plus fréquents et avec
des caractéristiques notoires :
— le suffixe qui est si banal se retrouve sur plusieurs généra-
tions : citons par exemple un Ἡρᾶς Ἡρᾶτος, un Δημᾶς Δημᾶτος
τοῦ Δημᾶτος, un Ἡρᾶς Ἀσκλᾶτος Ἡρᾶτος, un Ζηνᾶς Ζηνᾶτος τοῦ
Ἡρᾶτος, un Σαμβᾶς Ἡρᾶτος ou un Διδᾶς Ἡρᾶτος ;
— le suffixe peut très naturellement figurer dans des noms théophores
locaux du type de Ἀνουβᾶς, Σαραπᾶς, Ἀμμωνᾶς, Σουχᾶς et même des
hybrides gréco-égyptiens comme Ἑρμανουβᾶς ;
— le suffixe est susceptible de fournir la variante abrégée d’autres
formes suffixées plus amples : Μυσθᾶς à côté de Μυσθαρᾶς et de
Μυσθαρίων 73 ;
— le suffixe, avec la même flexion, fournit quelques noms de femmes
comme l’assure la présence du mot μητρός devant certains d’entre
eux : ainsi Κλεοπᾶς 74, Σωπᾶς, Δημᾶς, Εἱρᾶς / Ἡρᾶς 75 sont épicènes ;
— le suffixe, comme en ionien, a une valeur abréviative dans des
hypocoristiques comme Τασουχᾶς pour Τασουχάριον, Λιβᾶς pour
Λίβανος, Ἀρποκρᾶς pour Ἀρποκρατίων ;
— le suffixe -ᾶς figure dans des noms de femmes à préfixe possessif
Τα / Θα- « celle de » ou Χεν- (à Akoris) « fille de » du type de Χεν-α-
λεξᾶς 76, avec après Χεν- l’hypocoristique Ἀλεξᾶς, forme abrégée
d’Ἀλέξανδρος, ou de Τα-διογᾶς, -ᾶτος ; citons par exemple le P. Oxy.
7, 1044 (iiie p. C.) : Σαραποῦτος τῆς καὶ Ταδιογᾶτος Διογένους τοῦ
καὶ Παυσανίου, formule onomastique dans laquelle on constate que
le nom de la fille procède de l’adjonction à Τα- de l’abrègement de
son patronyme 77.

73. Cf. Masson, OGS II, p. 443.


74. Masson, OGS II, p.  378 : ce féminin a été créé sous l’influence du nom princier
Κλεοπάτρα.
75. Le nom de la déesse Ἥρα n’est peut-être pas étranger à la féminisation de cet
anthroponyme.
76. Voir É. Bernand, Inscriptions grecques d’Égypte et de Nubie au musée du Louvre,
Paris, 1992, nos 81-85.
77. Cf. J. Bingen, CdE 63 (1988), p. 168-172.
des noms en -ᾶς 321

Par delà les emplois strictement égyptiens, un fait est certain : la valeur
abréviative, pan-grecque à partir du ive s., est parfaitement représentée
en grec d’Égypte dans bon nombre d’hypocoristiques et on pourrait
même supposer qu’elle a été transmise en Égypte dès l’époque archaïque
par des mercenaires ioniens 78. Par ailleurs le suffixe -ᾶς, dont le déve-
loppement est assez parallèle à celui de -οῦς, a été efficacement utilisé
pour fournir une flexion grecque à des noms égyptiens. En revanche on
peut légitimement se demander si la flexion égyptienne en -ᾶτος, -ᾶτι
est un héritage de la Grèce ou si elle procède d’une innovation locale.
Pour y voir un héritage il faudrait trouver un dénominateur commun
historique et linguistique qui pût expliquer la présence de cette flexion
en Égypte, dans le Bosphore cimmérien, en Pamphylie et à Chypre à
l’époque romaine. Si cette dernière ne doit sans doute pas être prise en
compte puisque nous avons proposé de l’expliquer par une influence pto-
lémaïque, on voit mal ce qui pourrait réunir les trois autres régions car
aucune métropole ionienne d’Asie ne semble avoir adopté cette flexion
à dentale sourde. On se résoudra donc à considérer que la flexion en
-ᾶτος procède, dans les trois régions si éloignées l’une de l’autre, d’un
renouvellement local de la flexion ionienne en -ᾶδος. Le parallélisme des
emplois morphologiques entre les suffixes -ᾶς majoritairement masculin
et -οῦς, -οῦτος 79 majoritairement féminin, qui s’ajoutent aux même radi-
caux onomastiques, pourrait expliquer la transformation en Égypte de
-ᾶδος en ‑ᾶτος 80.

3.4. Le génitif en -ᾶνος


En dehors des papyrus, l’accusatif est rare : on observe un Ἀπολλᾶν
à Apollonia du Pont, colonie milésienne, au ve-ive s. C’est en tout cas
sur cet accusatif qu’ont été formés à l’époque impériale un génitif Εὐτυ-
χᾶνος à Béroia en Macédoine et un génitif Σωπᾶνος à Panticapée 81.

78. Voir supra nos remarques sur le nom Ψαμματᾶς à Abou Simbel au début du vie siècle.
Il n’y a malheureusement pas de noms en -ᾶς dans les graffites de Naucratis.
79. Voir notre article sur ces noms dans Onomatologos, p. 416-418.
80. Je remercie chaleureusement Jean-Luc Fournet pour la révision de la partie
égyptienne de cet article.
81. Voir les références BE 2013, no 80.
322 laurent dubois

4. Classement sémantique des sobriquets en -ᾶς

Dans les mélanges pour Françoise Skoda je n’avais étudié, et encore


d’une façon non exhaustive, que les sobriquets railleurs dénotant un
défaut physique ou comportemental du type Σαννᾶς « Lequeutard » ou
Κοκκωνᾶς « Lecouillard » ou Βαττᾶς « Lebègue », sobriquets dans les-
quels le suffixe a approximativement le même sens que le suffixe du
français -ard d’origine germanique. Mais il y a bien d’autres possibi-
lités sémantiques : je n’en citerai que les plus significatives et renvoie le
lecteur à bien d’autres noms en -ᾶς justement repérés par Louis Robert
dans ses Noms indigènes. Dans ces exemples le suffixe est un marqueur
anthroponymique abréviatif mais a pu aussi s’émanciper de cette valeur
ancienne et acquérir son indépendance en se rapprochant par là même
des autres suffixes formateurs d’hypocoristiques de composés.

4.1. Quasi-ethniques
— Αἰγυπτᾶς, Colophon, ive s. ;
— Κιλικᾶς à Chypre et ailleurs ; plutôt que d’un sobriquet signifiant le
« Cilicien », comme le veut O. Masson, je préfèrerais y voir un quasi-
ethnique appartenant à une série beaucoup moins représentée que les
quasi-ethniques (ou des ethniques sous forme modifiée) en -ων ou
-ίων cités par Bechtel, HPN p. 548-549. C’est le type français Breta-
gnon ou Bretagnol.

4.2. Noms d’animaux


Il va de soi que je n’enregistre pas ici les noms abrégés de composés
banals dans lesquels le premier membre est un nom d’animal du type de
Ἱππᾶς, à Olynthe, ve s., Λεοντᾶς à Sparte, iie a. C., Λυκᾶς à Gonnoi, au
ier a. C. Citons plutôt :
— Περδικκας : O. Masson (OGS III, 293) admettait que le nom royal
macédonien était un dérivé du nom de la perdrix πέρδιξ ; mais alors
pourquoi ne pas accentuer Περδικκᾶς et considérer que la flexion en
‑ου de l’attique a pu être un phénomène secondaire ?
— Καβαλλᾶς, Téos, ive a. C. : cet anthroponyme est particulièrement
remarquable dans la mesure où il est antérieur à la première apparition
des noms en -ᾶς 323

du nom du cheval de somme καβάλλης dans l’Anthologie chez Anti-


pater de Thessalonique au ier s. a. C. (AP 9, 241) 82 ;
— Σιττᾶς, Colophon, ive s., « Lepic » ;
— Ἀραχνᾶς, Cyrène, iiie s., « Laraignée » ;
— Χρεμᾶς, Acarnanie, iiie s., « Legrondin » ;
— Φασσᾶς, Priène, ier a. C-ier p. C., « Lacolombe » ;
— Γυπᾶς, Priène, « Levautour » ;
—  Χηνᾶς, Sardes, ier p. C. : il s’agit de la forme abrégée du nom
de métier χηνοτρόφος « éleveur d’oies » susceptible de donner un
anthroponyme (voir supra) ;
— Ψαρᾶς, Lydie, iie p. C., « Létourneau » (ψάρ) ;
— Ὀρνιχᾶς, Sicile, iie a. C., « Loiseleur », avec une variante dorienne
notoire du radical.
Il est évident, dans le cas d’animaux domestiques, que l’on ne peut
décider entre un simple anthroponyme bâti sur le zoonyme ou l’utilisa-
tion comme anthroponyme d’un nom de métier abrégé.

4.3. Noms de plantes


Les noms de plantes commercialisables ont donné naissance à des
anthroponymes en -ᾶς qui peuvent avoir été des noms de métiers abrégés :
— Σασαμᾶς, Étolie, iiie a. C., « marchand de sésame » ;
— Κυαμᾶς, Sardes 83, « marchand de fèves » ;
— Πιπερᾶς, Bithynie et Pisidie, « marchand de poivre » ;
— Πρασιᾶς, Smyrne, « marchand de poireaux » / nom de métier 
πρασᾶς à Syros 84 ;
— Κανναβᾶς, Lydie, époque impériale 85, « chanvrier » ;
— Κυμινᾶς, Rome, iie p. C., et sous la forme latine Cymina ier-
iie p. C., deux siècles avant le nom de métier κυμινᾶς « marchand de
cumin », attesté quant à lui dans une épitaphe chrétienne de Séleucie
du Kalykadnos 86.

82. Sur l’histoire de ce mot, voir L. Robert, « Hellenica », RPh 13 (1939), p. 175-179.
83. Cf. Robert, Noms indigènes, p. 147.
84. Robert, Noms indigènes, p. 171.
85. Robert, Noms indigènes, p. 142-143.
86. Voir Masson, OGS I, p. 176-179.
324 laurent dubois

— Λαχανᾶς, Égypte, à partir du ive s. p. C. ; le mot λαχανᾶς connu


par Hérodien est l’abréviation du banal λαχανοπώλης « marchand de
légumes ».
Mais l’explication par l’utilisation du nom de métier abrégé 87 comme
anthroponyme n’est pas toujours obligatoire :
— Βατᾶς, Périnthe, iiie a. C., « Laroncière » ;
— Δαφνᾶς et Δαυχνᾶς, Thessalie, iiie a. C., « Lelaurier ».

4.4. Noms d’objets


L’hypothèse du sobriquet issu d’un nom de métier abrégé 88 est très
vraisemblable pour :
— Κερκιδᾶς, Arcadie, ive a. C., « fabricant de navettes » (cf. supra) ;
— Σκεπαρνᾶς, Macédoine, iie p. C., « fabricant d’herminettes »,
σκέπαρνος ;
— Λυχνᾶς, second nom à Béroia, iie p. C. « fabricant de lampes » ;
— Πινακᾶς, époque tardive, « fabricant d’écuelles » ; voir supra ;
— Κοτυλᾶς, Chypre, époque romaine, « fabricant de pots » 89 ;
— Χοισκᾶς, Dèlos, iiie a. C., « fabricant de χοίσκοι, petits pots » ;
— Μαχαιρᾶς, au ier a. C. 90 : le substantif μαχαιρᾶς « coutelier »,
attesté seulement depuis le iiie s. de notre ère, est le diminutif de
μαχαιροποιός attesté chez Aristophane. Le nom Μαχαιρᾶς est encore
un patronyme en Grèce aujourd’hui ;
— les noms de métiers liés au nom du bovidé : un Βōϙᾶς béotien du
vie s. est remarquable et pourrait être une forme abrégée de Βουκόλος.
De même, un damiurge de la cité de Lousoi en Arcadie du nom de
Βουμας que Bechtel (KOS 12) a bien expliqué par une abréviation de
Βου-μάγιρος devrait être accentué du périspomène Βουμᾶς.
On signalera pour finir le cas intéressant du nom Βουτᾶς, -ᾶδος à
Maronée (ve s.) et à Milet (iiie s.) qui procède de l’insertion dans la caté-
gorie des anthroponymes par substitution du suffixe -ᾶς à l’élément -ας
87. Robert, Noms indigènes, p. 245, tire d’un génitif Σκόρδου d’une dédicace de fontaine
dans la vallée du Caystre sous Caligula, un nominatif Σκορδᾶς « marchand d’ail » :
dans les marges de son exemplaire O. Masson écrit à juste titre « on aurait Σκορδᾶ ».
88. Voir Masson, OGS I, p. 163-182.
89. Cf. O. Masson, ZPE 104 (1994), p. 209 et M. Egetmeyer, op. cit., p. 355 (SEG 33,
1210).
90. Josèphe, Bel. Jud. 1, 16, 6-7 et Ant. Jud. 14, 5, 7.
des noms en -ᾶς 325

du nom de métier βούτης, βούτας « bouvier ». D’autres Βουτᾶς sont


d’ailleurs attestés en Argolide au ve s., en Macédoine au iiie s. ; la forme
inchangée Βούτης existe aussi à Halicarnasse au ive s.
Arrêtons là cette énumération dont le principal intérêt est lexico-
logique : alors que les noms abrégés appartiennent au stock noble du
lexique, les sobriquets au contraire présentent des radicaux ressortissant
au vocabulaire populaire, familier, parfois grossier que les grands textes
de la littérature ne nous permettent guère d’appréhender. C’est souvent
par les gloses et les lexicographes byzantins que nous est transmis ce
vocabulaire des petits métiers, des outils, des mets, des insectes ou des
animaux domestiques.

5. Problèmes accentuels et interprétation globale

Venons-en maintenant aux problèmes sur lesquels les onomatologues


ont buté, changé d’avis et hésité, et en particulier à celui du choix entre
les accentuations paroxytone et périspomène pour certains noms simples.
La théorie de Bechtel (HPN IX-X) qui voulait que le a long de l’io-
nien Μολπᾶς résultât de l’allongement du a bref de l’initiale du second
membre du nom Μολπαγόρης ne me semble pas susceptible d’expli-
quer les très nombreux hypocoristiques ioniens du type Σωκρᾶς. Bechtel,
par exemple, accentue paroxyton Φίλτας (HPN 454), mais il est alors en
contradiction avec sa propre théorie puisqu’il existe un Φιλταγόρας. Dans
les marges de son exemplaire O. Masson avait d’ailleurs écrit : « -ᾶς ? ».
En réalité, Φίλτας est un fantôme. Dans un timbre amphorique de Rhodes
où on peut lire ΦΙΛΤΑ, ce n’est que l’abréviation de Φιλτά(του), attesté
comme nom de fabriquant dans d’autres timbres. La même remarque et
la même annotation vaut pour le nom Φιλιστᾶς, lui aussi attesté à Rhodes.
Pourquoi ne pas non plus accentuer Πυρρᾶς ce sobriquet « Lerouquin »
de Théra ? Je crois en effet qu’il s’agit bien plus d’un sobriquet que de
l’abrègement de noms rares comme Πύρρανθος ou Πύρρανδρος comme
le proposait Bechtel (HPN 393). J’estime également que dans les hypoco-
ristiques des noms en Τιμο- il faut écrire Τιμᾶς, pour ce Cnidien, comme
le font du reste les auteurs du LGPN 1 et 5b, et comme Olivier Masson
l’avait suggéré dans les notes de son exemplaire personnel des HPN
(430). Même si la distinction entre sobriquets et formes raccourcies est
parfois délicate, il s’agit pour moi du même suffixe périspomène.
326 laurent dubois

Considérer comme le fait Bechtel que le /a/ long de Κλέας attesté


à Rhodes et à Samos au ive s. et, sous la forme Κλεύας en laconien, au
vie s., et en macédonien, au iie s., s’explique par l’alpha inattendu des
noms rares Κλεαγένης et Κλεαφάνης n’est pas satisfaisant. Je préfère-
rais expliquer Κλέας, Κλεύας, dont Hérodien Περὶ καθολικῆς προσῳδίας
p. 50, nous dit qu’il est paroxyton, par l’émancipation comme anthropo-
nyme de plein droit du second membre d’un Ἀριστοκλέας qui s’explique
soit par Ἀριστοκλ + suffixe -έας, soit par la réduction de -κλεϝέας, hypo-
thèses formulées par Bechtel lui-même (HPN 242). Quant au mycénien
ke-re-wa, puisqu’il n’existe pas au second millénaire d’anthroponyme
en °-ke-re-wa, je propose de l’accentuer Κλεϝᾶς avec un périspomène :
un hypocoristique en -ᾶς à côté d’un autre hypocoristique en -ων comme
Κλέων n’aurait rien de choquant : pensons au couple très productif de
sobriquets du type de Στράβων, Στραβᾶς.
De la même façon myc. e-te-wa pourrait être l’hypocoristique Ἐτεϝᾶς
d’un ᾿Ετεϝοκλέϝης attesté en mycénien sous la forme de son adjectif
patronymique ou d’un Ἐτεϝάνωρ lui aussi mycénien. Je proposerai aussi
d’accentuer de la même façon le nom rhodien Ἐτεᾶς (au génitif en -ᾶ)
[HPN 168], dans lequel je vois un hypocoristique de l’un des noms rho-
diens les plus courants à savoir Ἐτέαρχος. Ne nous cachons pourtant pas
qu’il y a un problème dans la mesure où existe à Knossos (KN X 8270),
il est vrai sans le moindre contexte, un nom etewao qui semble être le
génitif de type homérique ou béotien d’un nom Ἐτέϝας paroxyton, même
si il ne faut pas a priori se refuser à y voir le nominatif d’un nom en -άων.
Pourtant on ne peut pas exclure que le génitif mycénien en -a-o d’un nom
en -ᾶς ait été en ‑ᾶο ou même en -ᾶος: pour les formes chypriotes trans-
mises par les inscriptions syllabiques M. Egetmeyer 91 estime, à la suite
d’O. Masson, que la terminaison -ᾶϝος comporte l’introduction d’un /w/,
c’est à dire d’un glide, ce qui implique que les formes en -ᾶϝος sont plus
récentes que les formes en -ᾶος, même si la chronologie des différentes
formes, toutes datées des ve-ive s., est impossible à établir. Considérer
que le chypriote et le mycénien présentent la même désinence -ᾶος ne
manquerait pas de vraisemblance.
Le second problème est une forme d’incohérence dans la façon d’ac-
centuer chez Bechtel, O. Masson et L. Robert : si les noms doriens du

91. M. Egetmeyer, op. cit., I, p. 420-421.


des noms en -ᾶς 327

type Ἀριμμας ou ᾿Εχεμμας sont bien des formes raccourcies de Ἀρίμνα­


στος ou Ἐχεμένης comme le voulaient Bechtel et O. Masson, pour-
quoi ne présentent-ils pas alors la même accentuation que Σωκρᾶς ou
Διογᾶς ? C’est d’ailleurs cette accentuation périspomène que l’on trouve
dans le vieux GPN de Fick-Bechtel (p. 122, 204) et qui est adoptée par
Bourguet pour un Delphien de la fin du ive siècle 92. Signalons à titre
d’amusette que dans le même Fick-Bechtel (p. 19), le nom Ἐχέμμας a
une accentuation paroxytone, preuve que les auteurs hésitaient forte-
ment. O. Masson, dans l’article qu’il consacre à ces noms, écrit que le
nom est « accentué à tort » périspomène, mais sans se justifier, ce qu’il
aurait pu faire en alléguant le témoignage d’Hérodien, qui nous affirme
qu’Ἐχέμμας et Ἀρίμμας sont des paroxytons 93. Mais comment être sûr
du témoignage du grammairien ? Pour « sauver » l’accentuation paroxy-
tonne il faudrait admettre que la terminaison -μας qui procède de l’abrè-
gement d’un second membre -μένης ou -μαχος, était sentie comme un
suffixe devenu indépendant comportant le même accent que -ίδας, -ίας,
-έας, -ίννας, -ίνας, ‑ίτας, -ώνδας, -όκας, voire -ίλας < -ίλαος 94 et que le
composé bimembre originel n’était plus conçu ou sous-entendu. Je main-
tiendrais volontiers pour ma part l’accentuation périspomène pour ces
deux noms en dépit du témoignage d’Hérodien. Louis Robert 95 quant
à lui, à propos d’un pugiliste d’Adramyteion qu’il a parfaitement iden-
tifié, un certain Ἀττινας connu par Cicéron, Pro Flacco, 13, 31, a hésité
entre Ἀττινᾶς et Ἀττίνας : comme il s’agit d’un dérivé en -ίνας du radical
de Lallname Ἀττα, l’accentuation paroxytone, justement admise par les
auteurs du LGPN 5a et O.Masson 96, me semble attendue et conforme à
l’enseignement d’Hérodien.
À ce stade de réflexion sûrement provisoire mon hypothèse est la sui-
vante : le suffixe -ᾶς périspomène, d’origine strictement grecque mais, je
le reconnais, inconnue, spécialisé comme marqueur onomastique d’an-
throponymes abrégés aurait été déjà présent au IIe millénaire et, fort de

92. Voir É. Bourguet, FD III 5, 20, l. 61.


93. Masson, OGS I, p.  263, n. 41. Cf. Hérodien, Περὶ καθολικῆς προσῳδίας I, p. 55
(Lentz).
94. Voir la liste de ces suffixes paroxytons chez Hérodien, Περὶ καθολικῆς προσῳδίας,
III / 1, 51-59, dont certains sont présents dans la courte liste de Bechtel, HPN 621.
95. Robert, Noms indigènes, p. 211.
96. OGS II, p. 527.
328 laurent dubois

son accentuation unique, il aurait résisté à la fermeture ionienne des a


longs du grec commun. Il aurait été plus fréquent qu’on ne l’a cru au
Ier millénaire. Par ailleurs, la catégorie que je tiens pour résiduelle des
anthroponymes paroxytons en -ας, gén -αο ou -ᾱ, n’est nulle part chez les
grammairiens anciens signalée comme formant des hypocoristiques : si
on voulait admettre son existence dans des dialectes non ionien-attiques,
je proposerais d’y voir le résultat de la masculinisation secondaire de
noms féminins ou d’adjectifs en -ᾱ, ce qui pourrait éventuellement expli-
quer le couple de noms comme Ἀρίστας / Ἀριστᾶς qui avait tant déses-
péré mon maître Masson : ainsi Ἀρισταγόρας aurait engendré Ἀριστᾶς 97 ;
mais le féminin Ἀρίστᾱ aurait engendré Ἀρίστᾱς 98.
Ce processus de création de masculins pourrait être ancien et pour-
rait rendre compte du nom mycénien katawa, notamment PY Cn 40,
l. 13 (παρὸ Κατάρϝαι) 99, dans lequel on voit habituellement Κατάρϝας
« Lemaudit » qui correspond à l’adjectif primaire arcadien κάταρϝος.
Cette hypothèse est soutenue par le fait que l’adjectif κάταρος ne figure
pas au nombre des premiers membres de composés anthroponymiques 100.
Pour des noms qui ne sauraient être ni des formes abrégées de com-
posés, ni des sobriquets, il est légitime de supposer une accentuation
paroxytone : on pourrait ainsi considérer que les abstraits féminins en
‑ᾱ que sont σκοπή et ἀμοιβή ont pu fournir les noms Σκόπας (Athènes,
ve  s.), qui est peut-être un étranger, et Ἀμοίβας (Thessalie, iiie s.). Mais
à côté de ces dérivés d’abstraits, il semble avoir existé un petit nombre
d’anthroponymes dérivés de radicaux verbaux réduits ou de noms-
racines qui semblent avoir une valeur de noms d’agents : Λίχας, ion.
Λίχης (Hérodote, Thasos) que l’on peut traduire par « Leglouton » (cf.
λίχνος), Λίσας en Arcadie « Lesuppliant », Βλύας également en Arcadie

97. Sur la base d’Épidaure IG IV I2 333 (ive-iiie s.) : j’admets donc sans réserve l’accen-
tuation périspomène de Hiller dans la séquence Ἀριστᾶς Ἀριστάρχου.
98. Les génitifs ioniens Νυμφέω ive a. C. dans la colonie milésienne d’Hermonassa,
CIRB 1065 et Ποίω < *Ποιέω d’une inscription d’Halicarnasse, ve-ive a. C., SEG
43, 713, B, l. 10, sont en fait ceux de noms en -ῆς < -έης < ‑έας. Les nominatifs sont
à tort accentués paroxytons dans le LGPN 5a.
99. Nom attesté dans deux tablettes de Pylos : PY Cn 40, l. 13, dans une liste de
livraisons de moutons ; PY Jn 605 et 942, f. 2, l. 4, dans une liste de livraisons de
bronze.
100. L’hypothèse d’un sobriquet railleur Καταρϝᾶς « Maudit gamin » est moins probable.
des noms en -ᾶς 329

« Lebouillonnant » 101, et peut-être Κάνας en Béotie dont le radical


pourrait être le même que celui du nom du coq, ἠϊκανός « qui chante à
l’aurore ».
En dehors des noms à suffixes dissyllabiques (-ίνας, -ίας, -έας, -ίδας),
les anthroponymes paroxytons en -ας, ion. -ης, avec des génitifs attique
en ου, dorien -ᾱ, béotien -ᾱο, arcadien -αυ, sont donc très rares 102 et leurs
correspondants ioniens en -ης, gén. -εω, sont souvent des noms en -έας >
-έης > -ῆς.
Alors que le suffixe -ᾶς périspomène a dès l’origine une valeur abré-
viative certaine, le suffixe paroxyton -ας, ion. -ης sert juste d’intégrateur
morphologique à la catégorie des anthroponymes masculins d’un terme
du lexique en -ᾱ, ion. -η, substantif ou adjectif. En l’absence du génitif ou
d’une séquence anthroponyme – patronyme de même radical, il est donc
parfaitement légitime d’hésiter entre les deux accentuations en ce qui
concerne des noms non-ioniens et non-ioniens-attiques dont le radical est
susceptible d’être aussi bien un mot du lexique qu’un premier membre de
composé : on ne pourra donc jamais accentuer avec certitude un nomi-
natif Ἀριστας hors de tout contexte.
J’ai bien conscience de n’avoir fait qu’ébaucher une partie des ques-
tions que posent les noms en -ᾶς, cette catégorie dérivationnelle qui a été
si productive jusqu’au grec moderne, aussi bien dans les noms de métiers
que dans les sobriquets devenus anthroponymes puis noms de familles.
Je me suis surtout intéressé aux enfances de cette formation dont il reste
à écrire l’histoire et la prolifération de l’époque impériale à nos jours.

Références bibliographiques

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101. À la différence de ce que j’avais fait dans mes RDA I, p. 199-200, j’exclus de cette
liste le nom arcadien **Κύδας supposé par le génitif Κύδαυ IG V 2, 30, l. 22, car il
s’agit d’un texte perdu avec des lettres jugées incertaines par les éditeurs antérieurs
à Hiller von Gaertringen en 1913.
102. C’est dans un remarquable fatras philologique qu’ils sont présentés par Hérodien, I,
p. 51-50, puis que figurent à leur côté des noms dont la flexion est toute différente
comme Ποίας, Ποίαντος.
330 laurent dubois

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des noms en -ᾶς 331

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Anthroponymes et morphologie dérivationnelle :
les anthroponymes en ‑λος, ‑ιλ(λ)ος et ‑υλ(λ)ος
et la gémination expressive

Audrey Mathys
CNRS, fondation Thiers
LATTICE (UMR 8094) et AOROC (UMR 8546)

1. Introduction 1

Les anthroponymes occupent une place ambiguë dans les recherches


sur la morphologie lexicale : alors qu’on leur reconnaît généralement
des spécificités, telles que, par exemple, la conservation des archaïsmes,
ou encore l’existence de procédés de troncation propres aux hypocoris-
tiques, il n’est pas rare que l’on s’en serve pour la reconstruction, notam-
ment lorsque l’on ne dispose pas de matériel plus fiable du fait des limites
du corpus transmis. Or, cette démarche n’est pas sans poser quelques
questions, que nous nous proposons d’illustrer ici par l’exemple d’an-
throponymes comportant une finale ‑λος ou ce qui semble constituer une
variante de celle-ci.
L’étude portera sur l’ensemble des anthroponymes de ce type attestés
en Attique jusqu’à la fin du ive siècle 2 ; nous ne tiendrons pas compte des
1. Remerciements à A.  Alonso Déniz, É. Dieu, L.  Dubois, J. L.  García Ramón,
N. Guilleux, A. Jatteau, S. Minon, D. Petit et F. Réveilhac pour leur aide et leurs
remarques aux divers stades de l’élaboration de ce travail.
2. Les relevés ont été faits à partir du LGPN 2 en ligne. Il va de soi, cependant, que le
lieu d’attestation d’un anthroponyme ne prouve pas qu’il soit représentatif de son
dialecte. Pour l’épigraphie, les abréviations sont celles du LGPN ; pour les sources
littéraires, nous suivons celles du LSJ. Lorsqu’un anthroponyme est signalé par
le LGPN, nous renvoyons uniquement au LGPN, sauf lorsque la source exacte de
l’anthroponyme a une importance pour son analyse. Sauf mention contraire, toutes
les dates s’entendent a. C. Autres abréviations : acc. = accusatif, C = consonne, d. =
334 audrey mathys

féminins en ‑α et en ‑η correspondants, qui posent des problèmes assez


différents. Notre connaissance de la morphologie nominale du grec repose
en grande partie sur les textes littéraires attiques de la même période, ce
qui justifie le choix de ce corpus : il permet de mener des comparaisons
entre le lexique et l’onomastique sans que les données soient perturbées
par des divergences diachroniques ou dialectales. Il faut cependant être
conscient que, même en travaillant sur un corpus très limité géographi-
quement, il est tout à fait possible que l’on soit amené, sans s’en rendre
compte, à utiliser des données extrêmement hétéroclites : les individus
se déplacent, et même si l’on peut, dans certains cas, être sûr que le por-
teur de tel ou tel nom est bien un citoyen athénien, rien n’exclut a priori
que son nom présente des traits dialectaux étrangers à l’ionien-attique,
ou bien par tradition familiale, ou bien par conservatisme linguistique
dans les anthroponymes. De même, il faut être très prudent dans l’utili-
sation des statistiques. Un nom rarement attesté a bien moins de chances
d’être un nom rare qu’un mot dont on a peu d’occurrences n’est suscep-
tible d’être un mot rare ; il suffit que les personnes qui le portent se soient
peu illustrées dans les fonctions publiques, ou que les supports épigra-
phiques sur lesquels il était gravé aient été perdus. À l’inverse, un anthro-
ponyme très bien attesté n’est pas nécessairement très fréquent : il peut
simplement s’agir d’un anthroponyme courant dans quelques familles
assez puissantes pour que l’on en garde des traces.
Pourvu que l’on tienne compte de ces quelques réserves, les suffixes
‑λος offrent un champ d’étude très intéressant pour la question abordée
ici. D’une part, certaines valeurs de formations en ‑λος les rendent par-
ticulièrement susceptibles d’apparaître dans des anthroponymes. C’est
notamment le cas lorsque ‑λος s’emploie dans des adjectifs à valeur
« péjorative » 3, qu’il s’agisse de désigner un véritable défaut physique,

début, dat. = datif, f. = fin, fict. = personnage de fiction, gén. = génitif, m. = milieu,
R = sonante, tr. = tribu, V = voyelle, gaul. = gaulois, got. = gotique, gr. = grec, lat. =
latin, lit. = lituanien, nt. = neutre, v.h.a. = vieux haut allemand, véd. = védique.
3. Nous reprenons ce terme à Chantraine, Formation, p. 239. Cf. également C. D. Buck
et W. Petersen, A Reverse Index of Greek Nouns and Adjectives, Chicago, 1945,
p. 356, qui évoquent la spécialisation de ‑ηλο‑ dans l’expression de tendances (cf.
par exemple ἀπατηλός « trompeur »), et qui soulignent que cette valeur se trouve
aussi pour d’autres variantes du suffixe, cf. par exemple ὀργίλος « colérique », φει-
δωλός « avare » ; d’après eux, ces formes ne sont pas systématiquement déprécia-
tives en grec.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 335

comme, par exemple, dans τυφλός « aveugle », ou χωλός « boiteux »,


ou une simple caractéristique physique marquante, comme dans μυλλός
« lippu » ; et, de fait, Μύλλος est assez fréquent comme anthroponyme
dès le ve siècle 4. Mais c’est surtout sa fonction diminutive qui fait que
l’on s’attend à trouver ce suffixe ou l’une de ses variantes dans les anthro-
ponymes, et les points de contact entre le lexique et les anthroponymes
dans ce domaine ont déjà été soulignés à plusieurs reprises, notamment
par Chantraine 5 et par Leumann 6.
D’autre part, les anthroponymes en ‑λος sont d’autant plus intéres-
sants qu’ils fournissent des données très riches en ce qui concerne les
phénomènes d’interférences entre hypocoristiques et formations suf-
fixales 7. En effet, il existe au moins deux types de composés plus ou
moins fréquents dans l’onomastique susceptibles de donner lieu à des
hypocoristiques à finale ‑λος : si on laisse de côté le cas particulier des
composés en ‑κλέης / ‑κλῆς, cf. κλέος « gloire, renommée », sur lesquels
on forme des hypocoristiques du type de Πάτροκλος, il y a d’une part les
composés en ‑λαος / ‑λεως, cf. λαός « peuple », desquels on tire des hypo-
coristiques en ‑λος ou ‑λλος 8, et sans doute d’autre part les composés en
‑λοχος, cf. λόχος « troupe », qui sont plus rares, mais qui donnent proba-
blement lieu au même type de formations en ‑λος 9. De surcroît, ces pro-
cédés sont visiblement productifs, puisque l’on dispose de plusieurs cas

4. On en trouve plusieurs occurrences à Athènes et à Thasos ; cf. LGPN (1, p. 321 et 2,


p. 322).
5. Chantraine, Formation, p. 250.
6. M. Leumann, « Deminutiva auf ‑ύλλιον und Personennamen mit Kennvokal υ im
Griechischen », Glotta 32 (1953), p. 214-225.
7. Cf. E. Locker, « Die Bildung der griechischen Kurz- und Kosenamen », Glotta 21
(1932), p. 146 : « Bei einigen KN. ist es ungewiß, ob sie als ein- oder zweistämmige
aufzufassen sind. Ἄρτυλλος neben Ἀρτύλοχος kann zweistämmig sein oder eins-
tämmig mit dem Suffixe ‑υλλος. » Cf. encore E. Locker « Die Bildung der griechi-
schen Kurz- und Kosenamen », Glotta 22 (1933), p. 66 à propos de formes en ‑ύλος.
Voir enfin Masson, OGS II, p. 558 : « certains diminutifs de composés montrent un
autre genre d’ambiguïté : a-t-on affaire à la gémination de la première consonne du
radical, ou bien à un suffixe à consonne redoublée, attaché directement au premier
élément ? ». D’après cet auteur, la question se pose par exemple pour Ἀγάσιλλος
(sur Ἀγασίλλα(ϝ)ος ou Ἀγάσ‑ιλλος), ou encore pour Θράσυλλος (sur Θρασύλαος ou
Θράσυ‑λλος).
8. Cf. notamment E. Locker, art. cit. (1933), p. 47-48.
9. Cf. M. Leumann, art. cit., p. 244, qui évoque aussi le cas des noms en ‑λογος.
336 audrey mathys

où la même personne se trouve désignée tantôt par le composé complet,


tantôt par la forme tronquée en ‑(Κ)λος 10.
Enfin, la complexité des emplois du suffixe ‑λος et de ses variantes
dans le lexique en fait un domaine où l’on pourrait être tenté de recourir
aux faits de l’onomastique pour mieux comprendre les données du
lexique. Il est en effet difficile de ramener l’ensemble des emplois de ce
suffixe et de ses variantes à voyelle de liaison à une unité, et la produc-
tivité de certaines de ses valeurs dans le lexique est extrêmement faible.
Or, le rôle central que des formations correspondantes ont été amenées
à jouer dans le système verbal de certaines langues indo-européennes
les rend particulièrement intéressantes pour les comparatistes, puisque
les participes parfaits des langues slaves, les adjectifs verbaux du tokha-
rien, et certaines formations nominales du verbe de l’arménien classique
reposent, en dernière analyse, sur des dérivés primaires en *‑lo‑ ou en
*‑li̯ o- 11. Dans un tout autre domaine, plusieurs auteurs ont proposé d’ex-
pliquer certains aspects des emplois des suffixes en ‑λος à voyelle de
liaison ‑ι‑ ou ‑υ‑, avec ou sans redoublement de la consonne, dans les
appellatifs du grec ancien, par une influence des anthroponymes 12.
Dans la mesure où, comme le soulignent C. Dobias et L. Dubois 13, « à
peu près tout élément de la langue courante, adjectif ou substantif, concret
ou abstrait, tout théonyme, tout hydronyme, tout toponyme pouvait

10. Voir ci-dessous pour des exemples de formes en ‑λος issues de composés en ‑λαος /
‑λεως ou en ‑λοχος. Dans un domaine un peu différent Solmsen-Fraenkel, IESK,
p. 120, citent les cas de Patrocle, cf. par exemple Πατρόκλεες (Α 337) et Πάτροκλος
(Ι 205), ainsi que celui du frère d’Héraclès, Ἰφικλῆς (par ex. Ἰφικλῆα, Hes. Sc. 54),
qui apparaît sous le nom de Ἴφικλος chez Apollonios de Rhodes (par ex. 1.45) et
Diodore de Sicile (par ex. 4.34.1). Des formes de ce type sont attestées dans notre
corpus, cf. par exemple Ἐτέοκλος (LGPN 2, Athènes, ca 540), ou encore Σωκλός
(LGPN 2, Athènes [étranger], ca 408-405) face à Σωκλῆς (LGPN 2, Athènes, vie +).
11. Cf. pour une présentation des données O. Hackstein, « Zur Entwicklung von Moda-
lität in Verbaladjektiven », dans E. Tichy, D. S. Wodtko et B. Irslinger (éd.), Indo-
germanisches Nomen. Derivation, Flexion und Ablaut, Brême, 2003, p. 53-64.
12. Cf. notamment E. Locker, art. cit. (1933), p. 65-68, à propos de ‑ίλος et ‑ύλος, et
Leumann, art. cit., p. 250, à propos de ‑ύλλιον (mais pas de ‑ύλος) ; sur ‑ύλλιον,
opinion inverse chez C. Symeonidis, « Zur altgriechischen Konsonantengemination
in Eigennamen », IF 114 (2009), p. 140. Cf. encore C. Frei-Lüthy, Der Einfluß der
griechischen Personennamen auf die Wortbildung, Heidelberg, 1978, p. 43-80, pour
d’autres exemples d’influence de l’onomastique sur le développement et l’emploi de
certains suffixes, en particulier ‑ίδης, ‑ιμος, et ‑ίας, dans le lexique.
13. Dobias-Dubois, Intr., p. xii
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 337

fournir un idionyme », on pourrait espérer trouver dans l’anthroponymie


des données concernant tous les types de suffixes ‑λος. Toutefois, pour
ce qui est des formations primaires en ‑λος, le corpus abordé ici s’avère
décevant : on n’y observe que quelques rares formes également attes-
tées dans le lexique, telles que, par exemple, Διάδηλος (LGPN 2, Rham-
nonte, fin ive), Ἀρίδηλος (LGPN 2, Oa, ca 380), Ἔνδηλος (LGPN 2, tr.
Akamantide, ca 394-393), Θεόδηλος (LGPN 2, Sounion, ca 359), Πυθό-
δηλος (LGPN 2, Athènes, ca 510-500 +) et Πέταλος (LGPN 2, Athènes,
ca 500 +).
Dans ces conditions, considérer un anthroponyme tel que, par exemple,
Δράκαλος, qui est attesté une fois en Attique au ve siècle (LGPN 2, tr.
d’Érechthée, ca 459), comme le reflet d’une formation primaire non
attestée dans le lexique relève de la pure spéculation. Il est vrai que ‑αλος
ne semble pas être une finale d’hypocoristique très répandue, mais, faute
de parallèles très nombreux, on ne peut se fonder sur des critères formels
(degré vocalique du radical, forme de la voyelle de liaison) pour analyser
un anthroponyme de ce type comme une formation primaire. Quant à la
sémantique, elle n’est d’aucun secours. Certes, il faut peut-être se garder
de projeter directement sur le grec ancien certaines des analyses portant
sur les anthroponymes des sociétés occidentales actuelles, où l’on consi-
dère qu’ils ne font que désigner leur référent, contrairement aux noms
ou aux adjectifs qui désignent leur référent par une de ses propriétés 14.
En effet, dans une société où les anthroponymes sont tous transparents,
il possible que certains sobriquets trouvent leur justification dans une
caractéristique de leur porteur ; par ailleurs, il est envisageable que les
hypocoristiques, qui ne dénotent pas, possèdent, du fait de leur finale,
une connotation spécifique. Mais aucune de ces remarques ne vaut pour
les anthroponymes issus de formations primaires ; elles ne sont donc
d’aucun secours pour l’analyse des formes du type de Δράκαλος.

14. Cf. R. Jakobson, « Les embrayeurs, les catégories verbales et le russe », Essais de
linguistique générale, Paris, 1963, p. 177-178, avec bibliographie : « La significa-
tion générale des mots tels que “chiot”, “bâtard” ou “lévrier” pourrait être indiquée
au moyen d’abstractions telles que “la bâtardise”, ou de périphrases comme “jeune
chien”, “chien utilisé dans les courses”, mais la signification générale de “Fido” ne
peut être qualifiée de la sorte. Paraphrasant Bertrand Russell, nous dirons que si
beaucoup de chiens s’appellent “Fido”, ils n’ont en commun aucune propriété spé-
ciale de “fidoïté”. »
338 audrey mathys

Dans ces conditions, il paraît plus prudent de se limiter ici à l’examen


des formations hypocoristiques ou diminutives 15 pour déterminer si la
prise en compte de l’onomastique peut contribuer à l’étude de la mor-
phologie dérivationnelle d’une langue pour laquelle on ne dispose que
de données lacunaires. On tentera de répondre à cette question en com-
parant les aspects bien connus du fonctionnement du ou des suffixes ‑λος
dans le lexique à ce que l’on observe dans les anthroponymes. Parmi les
points dont la description dans le lexique fait difficulté, c’est sur les cri-
tères déterminant la forme du suffixe ‑λος (présence ou absence d’une
voyelle de liaison, gémination) que les anthroponymes sont les plus sus-
ceptibles de fournir des informations ; c’est donc en priorité à ces carac-
téristiques que l’on s’intéressera ici.

2. Caractéristiques du ou des suffixes ‑λος diminutifs


dans le lexique

Les caractéristiques du ou des suffixes ‑λος dans le lexique sont


mieux connues que son fonctionnement dans les anthroponymes. C’est
pourquoi on commencera par présenter rapidement les emplois dériva-
tionnels de cette finale avant d’aborder les faits de l’onomastique.
Il n’existe pas, à ma connaissance, de synthèse récente sur les diffé-
rents suffixes ‑λος du grec. Le traitement le plus complet de la question
se trouve dans la Formation des noms de P. Chantraine 16. À la lecture des

15. Dans les anthroponymes, ces deux catégories ne se distinguent pas toujours nette-
ment, notamment lorsque la base de dérivation semble être un adjectif, et, en l’ab-
sence d’arguments sémantiques, il n’est pas toujours aisé, pour un anthroponyme
donné, de déterminer si l’on a affaire à l’un ou l’autre type (cf. Schwyzer, GG I,
p. 485) : par exemple, faut-il voir dans Ἡδύλος un hypocoristique fondé sur un com-
posé en Ἡδυ‑, tel que, par exemple, Ἡδύφιλος (LGPN 2, Athènes, 276-275 ; pour
d’autres noms en Ἡδυ‑, voir Bechtel, HPN 191) ou un diminutif de ἡδύς « doux,
agréable » ? De ce fait, les deux catégories sont souvent traitées ensemble dans les
ouvrages de référence ; cf. K.  Brugmann, Vergleichende Laut-, Stammbildungs-
und Flexionslehre nebst Lehre vom Gebrauch der Wortformen der indogermani-
schen Sprachen, vol. II.1, Strasbourg, 1906, p. 367-368, Chantraine, Formation,
p. 249-250 et 256, qui évoque une confusion entre les deux types, et C. D. Buck,
W. Petersen, op. cit., p. 354-355.
16. Chantraine, Formation, p. 237-256. Voir également les données recueillies par
E. Herrmann, Die Liquidaformantien in der Nominalbildung des ionischen Dialekts,
Tübingen, 1911.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 339

pages qui y sont consacrées, on reste frappé par le manque d’unité des
données, dont la raison apparaît d’emblée : comme le note Chantraine,
« le grec a hérité de l’indo-européen un suffixe ‑lo‑ qui n’a pas été pro-
ductif, mais qui s’observe dans un certain nombre de survivances » 17. Le
deuxième fait remarquable que l’on retrouve dans les différentes présen-
tations de ce suffixe est le nombre très important des formes peu claires,
obscures, « sans étymologie », d’étymologie douteuse, etc. 18 Ces carac-
téristiques se reflètent dans le comportement accentuel d’une part non
négligeable des formes en ‑λος : à part dans quelques finales relativement
reconnaissables, telles que ‑ίλος et ‑ύλος, qui semblent attirer l’accent sur
leur première syllabe 19, ainsi que dans quelques adjectifs primaires dont
le suffixe attire l’accent, l’accentuation des formes en ‑λος ne présente
que peu de régularité et est le plus souvent récessive, ce que P. Probert 20
explique de la façon suivante :
The suffix ‑λο‑, which was not productive during the historical period,
was beginning to lose its synchronic identifiability by the time the ancient
Greek accent was codified. Words with ‑λο‑ were tending to become
“demorphologized” even if they were adjectives, although the tendency
was greater for the nouns. The consistent recessive accentuation of
very low frequency nouns with ‑λο‑ can be related to the same general
tendency for a word not to be analysed as having the suffix ‑λο‑.
En ce qui concerne les formations diminutives comportant une
finale ‑λος, qui sont les plus proches de ce que l’on observe dans les

17. Chantraine, Formation, p. 237. Sur la faible productivité des formations en ‑λος,
voir encore C. D. Buck, W. Petersen, op. cit., p. 354 : « In pre-Hellenic times the
suffix ‑lo- had an extensive formal and semantic development in both primary and
secondary formations. Practically all of these uses have left a trace in Greek, and in
one or two directions the suffix even shows a modest productivity. On the whole,
however, it has become fossilized, and only rarely could a distinctive force have
been attributed to it ». Cf. encore Risch, Wortbildung, p. 107.
18. Cf. par exemple Risch, Wortbildung, p. 108-109, où des mentions de ce type
apparaissent quatre fois.
19. Cf. P. Probert, Ancient Greek Accentuation, Oxford, 2006, p. 225, qui analyse cela
comme une morphologisation de la loi de Wheeler, qui imposait le recul de l’ac-
cent originellement final dans des formes de structure dactylique telles que ποικίλος
« bigarré » ou encore ὀργίλος « coléreux ». La morphologisation de cette loi appa-
raît dans des mots tels que τροχίλος « roitelet », dont la structure ne présente pas les
conditions requises pour l’application de la loi de Wheeler.
20. P. Probert, op. cit., p. 293.
340 audrey mathys

anthroponymes, elles n’apparaissent réellement qu’à partir de la période


classique : chez Homère, le seul exemple possible est δάκτυλος « doigt »,
dont l’étymologie est incertaine 21. Toutefois, l’absence de diminutifs
chez Homère ne prouve pas nécessairement qu’il s’agisse de formations
récentes, et on l’attribue plutôt à une tendance de la langue épique à les
éviter 22.
À l’époque classique, ces formations sont courantes dans le lexique, et
ont peut-être même connu une légère productivité 23. Buck et Petersen 24
signalent que les formations diminutives comportant une finale ‑λος
désignent presque toujours des êtres vivants. Ils en distinguent deux caté-
gories, qu’ils mettent explicitement en rapport avec les hypocoristiques :
les diminutifs sur base nominale, par ex. béot. πάϊλλος 25 < *παϊδλος
« petit garçon », et les diminutifs sur base adjectivale, par exemple μικ-
κύλος (Mosch. +) « tout petit » sur μικκός « petit ». La description plus
détaillée de P. Chantraine 26 fait apparaître une situation complexe : si les
mots qualifiés de « populaires », « expressifs », ou encore « techniques »
sont très nombreux parmi les formations en ‑λος – ces trois termes
reviennent sans cesse dans sa description –, les véritables diminutifs sont
plus rares. Chantraine n’utilise ce terme que pour quelques formations
en ‑ιλ(λ)ος (p. 248), par exemple les noms d’oiseaux tels que τροχίλος
(Hdt. +) « roitelet », ou encore le nom de l’œil attesté dans l’épigraphie
dorienne 27 et chez Hésychius, ainsi que pour certaines formations en
‑υλ(λ)ος (p.  250), telles que les adjectifs δριμύλος (Mosch.  +) « aigu,
perçant », μικκύλος et καθάρυλλος (Pl. com. +) « propret », ou encore les
substantifs κογχύλη (Ph. +) « coquillage d’où l’on tire la pourpre » 28 sur

21. Cf. Risch, Wortbildung, p. 107, n. 93 ; Frisk, GEW (I, p. 344-345) ; DELG (p. 239) et
EDG I-II (p. 300).
22. Cf. Risch, Wortbildung, p. 107, n. 93.
23. C. D. Buck, W. Petersen, op. cit., p. 354 ; mais Chantraine, Formation, p. 250,
souligne que, si cette fonction diminutive remonte probablement à l’indo-européen,
puisqu’on la retrouve en latin, en gotique et en lituanien, en grec, le suffixe diminutif
‑λος « n’a pas constitué de système, les diminutifs étant formés par un autre
procédé. »
24. C. D. Buck, W. Petersen, op. cit., p. 354-355.
25. Cf. notamment IG VII 707, Tanagra.
26. P. Chantraine, Formation, p. 236-251.
27. Cf. IG IV² 1.121, Épidaure, et É. Lhôte, Les lamelles oraculaires de Dodone,
Genève, 2006, p. 72, Dodone, ca 400-375.
28. Ph. 1.536.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 341

κόγχη « coquillage » et ἀρκτύλος 29 « ourson » et sa variante ἄρκυλλος 30


sur ἄρκτος « ours ».
Par ailleurs, de manière significative, aussi bien Chantraine que Buck
et Petersen dissocient presque entièrement la description des différentes
variantes formelles du ou des suffixes ‑λος de leur analyse fonction-
nelle 31. Cette façon de procéder est d’autant plus justifiée qu’il est très
difficile de repérer des régularités. Même l’apparition de la gémination
semble aléatoire : elle n’est en tout cas pas limitée aux formations dites
« diminutives », puisque Chantraine signale des « géminations expres-
sives » également pour des formes difficilement analysables désignant
des infirmités, par exemple μυλλός (Hsch. +) « lippu » et σίλλος (Luc. +)
« louche » 32. Il indique encore le cas des formes possédant un suffixe
‑αλο- « qui s’est ajouté à des formations nominales, populaires et expres-
sives », comme ἔταλον « étalon » (DGE 644.18, Aigaiai (Éolide), f. ive ou
ive-iiie) et σίαλος (Hom. +) « porc gras », à côté desquelles on trouve par-
fois des substantifs à géminées, κορυδαλλός (Theoc. +) « alouette » (cf.
κορυδός, de même sens) et ὄκταλλος (Corinn. ? ; Hdn. +) « œil ».
Enfin, les données comparatives paraissent confirmer l’ancienneté des
emplois diminutifs et hypocoristiques du ou des suffixes *‑lo‑. Il n’est
pas question ici de présenter l’ensemble du dossier, d’autant plus que
les données sont bien décrites par K. Brugmann 33, et que des travaux y
ont été consacrés récemment, qui prennent en compte les données tokha-
riennes et hittites 34 ; et l’on n’évoquera donc ici que celles des formations
secondaires qui nous intéressent directement.
La fonction diminutive est probablement ancienne, puisqu’elle se
retrouve dans plusieurs groupes de langues ; mais c’est dans cette fonc-
tion du ou des suffixes *‑lo‑ que les différentes langues présentent le plus

29. Hapax cité dans l’Onomasticon de Pollux (5.15), au nominatif pluriel.


30. Sch.Opp.H. 2.248, cf. LSJ (p. 242).
31. Chantraine, Formation, p. 236-251 ; C. D. Buck, W. Petersen, op. cit., p. 354-357.
32. Chantraine, Formation, p. 246.
33. K. Brugmann, op. cit., p. 360-377.
34. Voir en particulier O. Hackstein, art. cit., p. 56-57 et I. Igartua, « The Indo-Euro-
pean Adjectival Class with the Suffix *‑lo- and its Development in Slavic », JIES
42, 2014. Voir encore F. Mezger, « Zu einigen idg. ‑g‑ und ‑l‑Bildungen », ZVS 72
(1954), p. 104-118, A. Lubotsky, The System of Nominal Accentuation in Sanskrit
and Proto-Indo-European, Leyde, 1988, p. 131-132, et Balles, NWIG 1, p. 73-75 et
141.
342 audrey mathys

d’innovations formelles. D’après Brugmann, c’est en italique, en ger-


manique et en baltique que ce type a été le plus productif, cf. par ex. lat.
porculus sur porcus « porc », got. barnilo nt. (avec réfection du suffixe)
sur barn nt. « enfant », lit. tėvẽlis (avec réfection du suffixe) sur tė́ vas
« père ». La formation d’adjectifs diminutifs en *‑lo‑ est également pos-
sible dans plusieurs langues, cf. par exemple véd. bahulás « épais, large,
grand » (cf. gr. παχυλῶς « grossièrement ») et lat. paruolus sur paruus 35
« petit ». Enfin, l’utilisation du même suffixe pour former des hypocoris-
tiques est attestée en sanskrit (cf. Bhānulas face à Bhānudattas), en cel-
tique (cf. gaul. Teutalus face à Teutomatus), et en germanique, cf. v.h.a.
Wolfilo face à v.h.a. Wolfhart, etc. 36
La difficulté est la même dans l’ensemble des descriptions : on dispose
de peu de matériel lexical hérité pour déterminer la fonction exacte de
chaque suffixe, et il subsiste donc un certain nombre de zones d’ombre.
Les langues où le suffixe semble productif dans la formation des diminu-
tifs ne sont pas systématiquement celles où il est fréquent dans les hypo-
coristiques, et une étude plus approfondie de la question imposerait de
préciser la relation entre ces deux fonctions.

3. Les suffixes diminutifs et hypocoristiques

Dans ces conditions, il est compréhensible que l’on soit tenté d’avoir
recours aux faits de l’onomastique pour essayer de préciser la descrip-
tion des différentes variantes du ou des suffixes ‑λος secondaires du grec.
Disposer de données supplémentaires pourrait éventuellement permettre
de mieux comprendre la distribution des différentes variantes à voyelle
de liaison du ou des suffixes ‑λος, ainsi que le statut de la gémination dite
« expressive » ; et, de fait, les anthroponymes en ‑ιλ(λ)ος et en ‑υλ(λ)ος
sont très nombreux et sont donc susceptibles de fournir des renseigne-
ments précieux. Mais il serait imprudent de comparer directement les
anthroponymes au lexique, et il importe, dans un premier temps, de les
étudier pour eux-mêmes et d’essayer de dégager des régularités dans leur
formation.

35. Cf. K. Brugmann, op. cit., p. 377.


36. Cf. K. Brugmann, op. cit., p. 376.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 343

3.1. Des géminées expressives ?


Pour plusieurs raisons, il pourrait paraître audacieux de tenter de pro-
poser un classement raisonné des formations hypocoristiques ou diminu-
tives représentées dans l’onomastique qui prenne en compte le critère de
la gémination.
D’une part, même en laissant de côté le problème de l’origine de ces
géminées 37, leur caractère « expressif », pour reprendre un terme fré-
quemment employé dans la littérature à ce sujet 38, pourrait les rendre
imprévisibles. O. Masson 39 signale d’ailleurs un cas où un anthroponyme
à géminée paraît interchangeable avec une forme sans géminée : il s’agit
d’un certain Κλεομένης, tyran de Méthymna, qui est cité sous ce nom
chez Théopompe, et que l’on retrouve sous la forme de Κλέομις dans
une inscription (IG II2 284) et de Κλέομμις chez Isocrate. O.  Masson
signale d’ailleurs à propos de ce nom que le type à géminée est secon-
daire, « résultant d’un désir d’expressivité qui est surajouté, obtenu par
le redoublement de la consonne ».
D’autre part, il est vrai que l’on trouve parfois, pour les formes en
‑λο‑, même dans un corpus limité à un unique dialecte et d’une étendue
chronologique restreinte, plusieurs formations sur une même base, sans
que les raisons motivant le choix de l’une ou l’autre variante apparaissent
clairement. Ainsi, parmi les formes du domaine attique étudiées ici, on
peut remarquer les doublets suivants :
— Δράκυλλος (LGPN 2, Athènes (fict.) : Ar., Ach. 612, 425), Δρά-
καλος (LGPN 2, tr. d’Érechthée, 459), Δερκύλος (LGPN 2, Athènes,
422 +) ;
—  Θέελλος (LGPN  2, Athènes, 351-350), Θεολλίδης (LGPN  2,
Athènes, ca 325), Θέϋλλος (LGPN  2, Athènes, ve  +), cf. HPN 205
pour le lien entre ces différentes formes 40 ;

37. Sur ce point, voir notamment M. Leumann, art. cit., p. 243, qui parle d’allongement
hypocoristique, C. de Lamberterie, Les adjectifs grecs en -υς, sémantique et compa-
raison, Louvain-la-neuve, 1990, p. 196, qui pose *‑υλyος, et, récemment, Symeo-
nidis, art. cit., p. 113, qui postule une extension analogique à partir de mots tels que
πάϊλλος < *παϊδ‑λος « petit enfant » (cf. LSJ p. 1288).
38. Cf. Masson, OGS II, p. 549-561, à propos des formes à géminée.
39. Masson, OGS II, p. 557.
40. Bechtel, HPN 205, signalait que Θεΐλος était douteux ; de fait, cet anthroponyme
n’est pas signalé dans le LGPN.
344 audrey mathys

— Ἵππυλλος (HPN 219-226, LGPN 2, Athènes, 422 +) et Ἱππύλος


(LGPN 2, Athènes, ca 460-450) ;
—  Ξενύλος (LGPN  2, Athènes, d.  ve) et Ξένυλλος (HPN 339-343,
LGPN 2, tr. d’Érechthée, 459) ;
— Σθένυλλος (HPN 398-401, LGPN 2, Eiresidai, 329-328) et Σθέ-
νελος (LGPN 2, Athènes, ve +) ;
—  Φάνυλλος (HPN 440, LGPN  2, tr. d’Érechthée, 459  +), mais
Φανύλη (noté ‑λε, LGPN 2, Athènes, f. vie) ;
— Φειδύλος (HPN 443-444, LGPN 2, Athènes, PCG 7 p. 338 fr. 6
[fict.], ive-iiie ; cf. aussi SEMA 1786 (Φειν–), ive) et Φείδυλλος (Φεί-
δυλ[λος], LGPN 2, Ionidai, ive +).
Il est possible que certaines de ces variantes soient liées à des pro-
blèmes de notation des géminées. L. Threatte signale en effet à propos de
l’épigraphie attique que la notation systématique des géminées ne se met
en place qu’à partir des années 520-480 41 ; par ailleurs, même après cette
date, il semble, d’après Threatte, y avoir des hésitations suffisantes dans
le choix entre en ‑λ‑ et ‑λλ‑ pour conclure qu’une partie de la population
simplifiait systématiquement le ‑λ‑ géminé 42.
Mais l’existence de doublets ne témoigne pas nécessairement d’une
absence de règles : il est tout à fait possible, par exemple, qu’il existe
des règles asymétriques, qui interdisent systématiquement certains types
dans certaines conditions, sans qu’il y ait de réciproque lorsque ces
conditions ne sont pas réunies. Par ailleurs, ce qui est vrai pour un hypo-
coristique formé par troncation tel que Κλέομμις ne l’est peut-être pas
pour des formations dont la finale se confond, au moins en partie, avec
un suffixe de diminutif, et rien n’exclut que la gémination fonctionne
différemment selon les types d’anthroponymes. Il importe donc, dans
un premier temps, de prendre en compte uniquement les formes qui ne
connaissent pas de variantes, dans un corpus le plus homogène possible,
et de tenter de déterminer si elles présentent des points communs.

41. Cf. L. Threatte, The Grammar of Attic Inscriptions, vol. 1. Phonology, Berlin - New
York, 1980, p. 511-513, pour le détail en fonction des types de textes.
42. L. Threatte, op. cit., p. 514.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 345

3.2. Critères de classement
La plus grande difficulté consiste à croiser les différents critères. A
priori, les facteurs suivants sont susceptibles d’être intervenus dans la
distribution des différentes formes de ce qui apparaît comme une finale
‑λος en synchronie :
— type de procédé de formation :
1) hypocoristique avec perte totale de l’un des deux membres du
composé sous-jacent ;
2) hypocoristique avec troncation du second membre commençant
par ‑λ- du composé sous-jacent ;
3) formation en ‑λος, non attestée dans le lexique, avec éventuelle-
ment une voyelle de liaison, sur la base d’un adjectif ou d’un subs-
tantif servant déjà de « surnom » ;
4) formation en ‑λος non primaire déjà attestée dans le lexique.
— Structure de la base de dérivation :
1) vocalisme du radical ;
2) structure du suffixe du premier terme du composé ou du suffixe du
« sobriquet » servant de base à la formation en ‑λος ;
3) structure prosodique de la base.
Il est possible que ces différents facteurs influencent la forme de la
finale des anthroponymes en ‑λο‑ ; plus précisément, ils pourraient avoir
une incidence sur la présence et le timbre d’une éventuelle voyelle de
liaison, sur la présence éventuelle d’une gémination, ainsi que sur l’ac-
centuation de l’anthroponyme qui en résulte. Nous nous limiterons ici
aux deux premiers aspects de cette liste ; l’examen de l’accentuation des
anthroponymes en ‑λος demanderait une étude à part entière, qui prenne
en compte les problèmes posés par les différentes sources sur lesquelles
repose notre connaissance de l’accentuation du grec ancien 43.

4. Anthroponymes en ‑ύλος et en ‑υλλος

Les anthroponymes en ‑ύλος et ‑υλλος fournissent les données les plus


nombreuses et paraissent représentatifs de la façon dont les différents

43. Sur ce point, voir notamment l’article d’É. Dieu dans le présent volume.
346 audrey mathys

critères peuvent s’entrecroiser ; en outre, la plupart des exemples de


notre corpus datent d’une époque où la notation des géminées était
systématique.
Les adjectifs et les substantifs en ‑υλλος où aucun des deux ‑λ- n’ap-
partient à la racine sont très rares dans le lexique à date ancienne 44, et
Homère n’en a aucun exemple assuré. Il semble donc assez probable que
les anthroponymes en ‑υλλος constituent de bons exemples des procédés
morphologiques propres à l’onomastique, et la question se pose de savoir
si l’on peut considérer que la gémination soit un procédé morphologique
destiné à souligner que l’on a affaire à des hypocoristiques.

4.1. Présentation des données


Notre corpus contient environ vingt-cinq formes en ‑ύλλος. Nous
signalons, lorsqu’ils existent, les hypocoristiques en ‑ων et en ‑ώ sur le
même thème. En effet, ces différentes formations sont généralement dis-
ponibles pour former des hypocoristiques sur un même radical, ce dont
témoigne le fait que plusieurs de ces finales soient parfois utilisées pour
une même base dans une même famille : R. Étienne 45 signale ainsi le cas
d’une famille athénienne de la première moitié du ive où le petit-fils d’un
dénommé Θέμυλλος, qui doit être un hypocoristique fondé sur des com-
posés en Θεμο- ou ‑θεμος, porte le nom de Θέμων. Dans ces conditions,
la coexistence de formations en ‑ων et en ‑υλλος sur une même base peut
donc constituer un indice en faveur de l’analyse de la forme en ‑υλλος
comme un hypocoristique 46. De même, nous indiquons quand un com-
posé en ‑λαος ou en ‑λοχος susceptible de servir de base de dérivation
est attesté à date ancienne en Attique, puisque le ‑λ‑ initial du deuxième
terme de ces composés pourrait expliquer la finale ‑λος de l’hypocoris-
tique qui en est dérivé.
L’ensemble des données recueillies permet de proposer un premier
classement sur la base d’une distinction entre des hypocoristiques fondés
44. Cf. C. D. Buck, W. Petersen, p. 367, pour une liste des formes concernées et leur
date d’attestation. On a par exemple καθάρυλλος (Pl. com. +) « propret », ἕρπυλλος
(Cratin. +) « le thym ».
45. R. Étienne, « Collection Dolly Goulandris, II : Stèle funéraire attique », BCH 99/1
(1975), p. 380.
46. Sur un lien similaire entre ‑ων et ‑υλ(λ)ος dans les hypocoristiques, voir également
M. Leumann, art. cit. p. 247.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 347

sur des anthroponymes composés et des anthroponymes analysables


comme des surnoms ou des sobriquets. Certaines formations sont dif-
ficiles à classer : il s’agit de celles qui reposent ou bien sur un adjectif
en ‑ύς, ou bien sur un nom d’animal. En effet, rien n’exclut que l’on
forme des sobriquets à partir d’adjectifs en ‑ύς, comme le suggère le cas
de Βράχυλλος cité plus haut, qui constitue un exemple d’anthroponyme
dérivé d’adjectif en ‑ύς qui a peu de chances de provenir d’un composé,
étant donné que les anthroponymes composés sont en général constitués
de termes laudatifs 47 ; et il est fort possible que les finales ‑ύλος et ‑υλλος
dans les anthroponymes résultent de fausses coupes à partir d’anthropo-
nymes comportant un adjectif en ‑υς et un suffixe ‑λος 48. Par ailleurs, il
est fréquent que des noms d’animaux, ou des diminutifs de noms d’ani-
maux, fournissent des « sobriquets », cf. par exemple Χοῖρος (LGPN 2,
Athènes, ca 520 +) et Χοιρίλος (LGPN 2, Athènes, vie-ve +) 49.
Toutefois, certaines des formes qui nous paraissent indécidables
devaient être analysées comme des hypocoristiques par les grammairiens
grecs, comme le suggère le passage suivant de l’Etymologicum Magnum
(142.156 ; = Hérodien, Περὶ παθῶν III/2 205.11) :
Ἀρίστυλλος ὄνομα παρὰ Ἀριστοφάνει· εἴρηται δὲ ὑποκοριστικῶς ὁ
Ἀριστοκλῆς. Ὡς παρὰ τὸ Ἡρακλῆς Ἥρυλλος καὶ παρὰ τὸ Θρασυκλῆς
Θράσυλλος καὶ παρὰ τὸ Βαθυκλῆς Βάθυλλος ὄνομα κύριον ὁ ἐρώμενος
Ἀνακρέοντος, οὕτω καὶ παρὰ τὸ Ἀριστοκλῆς Ἀρίστυλλος.
« Aristyllos est un nom qui se trouve chez Aristophane. Aristoklès est
appelé ainsi de manière hypocoristique. De même que, de Héraklès, on
tire Héryllos, de Thrasyklès, Thrasyllos, et de Bathyklès, le nom propre
Bathyllos, le bien-aimé d’Anacréon, de même, d’Aristoklès on tire
Aristyllos. »
Il est remarquable, dans ce passage, que le grammairien ne traite pas
différemment Ἀρίστυλλος issu de Ἀριστοκλῆς, où le ‑υ‑ ne peut appar-
tenir qu’au suffixe, et Βάθυλλος issu de Βαθυκλῆς, où le ‑υ‑ pourrait
appartenir au premier membre de composé de l’anthroponyme.
Voici donc la liste des formations relevées :

47. Cf. Dobias-Dubois, Intr., p. vii.


48. En ce sens, cf. C. de Lamberterie, op. cit., p. 196-197.
49. Cf. Bechtel, HPN 588.
348 audrey mathys

1. Hypocoristiques sur la base d’anthroponymes composés :


— Ἄντυλλος (LGPN 2, Athènes (fict., PCG 7 p. 76-78 et 322), ive 50) ;
cf. Ἄντων (HPN 57, LGPN 3b, Delphes, 327 +), cf. composés du type
Ἀνταμένης, ou composés en Ἀντι‑, ou -αντος dans Θέαντος, cf. ἄντη
« prière » ? ;
— Ἀρίστυλλος (HPN 69-73, LGPN 2, Athènes, vie-ve +) ; cf. Ἀριστό­
βουλος, Ἀριστόδημος, etc. ; Ἀρίστων (LGPN  2, Athènes, vie  +),
Ἀριστώ (LGPN 2, Athènes, ive +) ;
— Ἀψίθυλλος (LGPN 2, Athènes, f. ve +, cf. HPN 5, où cette forme
est mise en relation avec ψίθυρος « qui chuchote, qui gazouille ») ;
— Δίυλλος (HPN 132-134, LGPN 2, Erchia, 410-409 +) ; cf. Διϝει-,
Δίφιλος ; cf. Δίων (LGPN 2, Athènes, fréquent aux ve et ive) ;
— Ἐράτυλλος (LGPN 2, Athènes, ca 485-480 +) ; cf. Ἐρατο‑, ‑ήρατος
(HPN 160-161), par ex. Ἐρατοσθένης ? ; cf. Ἐράτων (LGPN  2,
Athènes, d. ve +), Ἐρατώ (LGPN 2, Athènes, f. ive) ;
— Ἔχυλλος (HPN 182-183, LGPN 2, Athènes, ca 440-431 ; fréquent
à Delphes, cf. LGPN 3b) ; cf. Ἐχε-, Ἐχι-, ‑οχος, par ex. Ἐχίλαος ;
—  Θέμυλλος (LGPN  2, Oe, f. ive  +) ; cf. Θέμων (HPN 201-202,
LGPN 2, Oe, f. ive) ; cf. Θεμο‑, ‑θεμος, cf. Θεμόθεος (non attesté en
Attique) ;
—  Θέϋλλος (HPN 207, LGPN  2, Athènes, f. ve  +) ; cf. Θευγείτων,
Θευγένης ? ;
— Μένυλλος (HPN 305-312, LGPN 2, tr. Léontide, ca 458  +) ; cf.
Μενε-, Μενι-, Μενο-, ‑μένης, etc., notamment Μενέλαος (LGPN 2,
Myrrhinous, 326-325 +) ; cf. Μένων (LGPN 2, Athènes, ca 525 +) ;
—  Μόρυλλος (LGPN  2, Athènes, ca 520-510) ; cf. ‑μορος, μόριος
(HPN 324) ?
—  Ξένυλλος (HPN 339-343, LGPN  2, tr. d’Érechthée, 459) ; cf.
Ξενϝο-, par ex. Ξενοφῶν, Ξενόφιλος ; cf. Ξένων (LGPN 2, Athènes,
ca 505 +), Ξενώ (LGPN 2, Athènes, m. ive +) ;
— Πόλυλλος (HPN 378, LGPN 2, Athènes, Πόλυλλος m. ive 51) ; cf.
Πολύλαος (LGPN 2, Athènes, ca 510) ;
—  Σθένυλλος (HPN 398-401, LGPN  2, Eiresidai, 329-328) ; cf.
Σθενε-, Σθενο‑, etc. ; cf. Σθέννων (LGPN 2, Athènes, 459-458) ;

50. Plusieurs occurrences épigraphiques plus récentes.


51. Cf. aussi Πόλυλ(λ)ος (LGPN 2, Athènes, ca 510).
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 349

— Φάνυλλος (HPN 440, LGPN 2, tr. d’Érechthée, 459 +) ; cf. ‑φάνης


en composition ; cf. Φανώ (LGPN 2, Athènes, ve-ive +) ;
— Φάϋλλος (HPN 435-436, LGPN 2, Athènes [Φάϋλ(λ)ο[ς]], ca 520-
510 ; Athènes, ca 505 52 +), cf. Φαε-, Φαο-, -φάης ; cf. Φάων (LGPN 2,
Athènes, ve-ive +) ;
— Φείδυλλος (HPN 443-444, LGPN 2, Ionidai, d. ive) ; cf. Φειδε-,
Φειδι-, Φειδο-, etc. ; cf. Φείδων (LGPN 2, Athènes, ca 515 +) ;
— Φίλυλλος (LGPN 2, Éleusis, 418-417, probablement cf. HPN 446-
453) ; cf. Φιλε-, Φιλο‑, ‑φιλος, ‑φίλης ; cf. cependant Masson 53 qui
propose de partir d’un masculin Φίλυς.
2. Formes fondées sur des « surnoms ou sobriquets » :
— Βράχυλλος (LGPN 2, Athènes, ve-ive + ; HPN 485 : « Namen nach
sichtbaren Eigenschaften », sur βραχύς « court ») ;
—  Μέθυλλος (LGPN  2, Athènes, f.  ve, HPN 506 : « Namen nach
Charaktereigenschaft » ; cf. μεθύω « être ivre ») ;
—  Κώθυλλος (LGPN  2, Athènes, 459-458) ; probablement lié à
Κώθων (HPN 606, LGPN  1, Rhodes, ca 68), cf. κώθων « grande
coupe ».
3. Formes indécidables : hypocoristiques sur base de « surnoms » ou
de composés :
— Βάθυλλος (HPN 91, LGPN 2, Athènes, ive +), cf. Βαθυ- (par ex.
Βαθύδικος), sur βαθύς « profond » ;
—  Δράκυλλος (LGPN  2, Athènes (fict.) : Ar., Ach. 612, 425, cf.
HPN 581 « Personennamen aus Tiernamen », où Bechtel ne cite que
Δράκων, cf. δράκων « dragon, serpent », ou HPN 141, Δρακοντο-
μένης) ; cf. Δράκων (LGPN 2, Athènes, ca 624-620 +) ;
—  Θράσυλλος (HPN 312, LGPN  2, Athènes, ve  +) ; cf. Θρασυ-
λέως (Hdt.), Θρασύλοχος (LGPN 2, tr. Æantide, ca 411 +) ; Θράσων
(LGPN 2, Athènes, ca 540-530 +), ou directement sur θρασύς « hardi,
confiant » ;
— Ἵππυλλος (HPN 219-226, LGPN 2, Athènes, 422 +) ; cf. Ἱππο-,
-ιππος ; Ἵππων (LGPN  2, Athènes, 520-510  +), ou directement sur
ἵππος « cheval » ;

52. Voir aussi Φάϋλ(λ)ο[ς] (LGPN 2, Athènes, ca 520-510).


53. Masson, OGS II, p. 411.
350 audrey mathys

—  Τάχυλλος (HPN 419, LGPN  2, Athènes, ive  +) ; cf. Ταχύδημος,


Ταχυκλῆς, etc. ; ou directement sur ταχύς « rapide ».
Plusieurs faits ressortent de ce relevé. D’une part, les formations hypo-
coristiques dérivées de composés constituent la majorité des exemples ;
elles présentent une certaine cohérence, qui apparaît notamment dans
les nombreux cas où elles coexistent avec des formations en ‑ων. Cette
observation suggère que Βάθυλλος, Δράκυλλος, Θράσυλλος et Ἵππυλος
ont de fortes chances d’être également des hypocoristiques fondés sur
des composés, plutôt que des formes tirées de « sobriquets », puisqu’ils
coexistent eux aussi avec des anthroponymes en ‑ων. Le deuxième point
notable est que ‑υλλος paraît devoir s’analyser comme un suffixe à part
entière dans la plupart des exemples évoqués ici, quelle que soit leur
origine. Seul Πόλυλλος coexiste avec un composé Πολύλαος, dont le
‑λ‑ pourrait avoir été conservé. Il est vrai qu’il est possible que l’on ait
perdu des composés du même type sur Βαθυ‑, Ταχυ‑, Θρασυ‑, etc. ; mais
il paraît plus vraisemblable, vu la cohérence du système, que ‑υλλος se
soit répandu comme un suffixe indépendant dans les anthroponymes
dès une date assez ancienne. Le fait qu’une forme comme Ἄντυλλος ne
soit attestée que pour désigner des personnages fictifs pourrait d’ailleurs
témoigner d’une certaine productivité du suffixe pour former de nou-
veaux hypocoristiques ; mais il est également possible que l’absence de
Ἄντυλλος dans l’épigraphie à date ancienne soit le fait du hasard, et les
fragments où ce nom est conservé sont trop brefs pour déterminer dans
quelles conditions ce nom a été attribué aux personnages qui le portent.
Il n’est donc pas invraisemblable que ‑υλλος soit avant tout un suffixe
destiné à fournir des hypocoristiques sur base de composés ; ensuite, des
processus analogiques peuvent éventuellement avoir favorisé son exten-
sion à d’autres formes morphologiquement proches de son domaine de
base, et notamment à des « sobriquets » comportant un ‑υ‑ dans leur der-
nière syllabe ; ainsi, Βράχυλλος pourrait être, par exemple, analogique de
Τάχυλλος, qui serait un hypocoristique de composé. Mais les seuls argu-
ments pour considérer que l’emploi comme suffixe destiné à former des
hypocoristiques sur base de composés serait plus ancien sont statistiques,
ce qui n’est guère probant, et il n’est pas invraisemblable que ‑υλλος ait
la même ancienneté et la même fonction (former des hypocoristiques
ou des diminutifs, sans distinction claire entre les deux) dans toutes les
formes mentionnées ci-dessus.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 351

Les formes en ‑ύλος sont légèrement moins nombreuses.


1. Hypocoristiques sur la base d’anthroponymes composés :
— Δερκύλος (HPN 120, LGPN 2, Athènes, 422 +) ; cf. Δερκ‑, ‑δερκης,
par ex. Δέρκιππος ; cf. Δέρκων (LGPN 2, Athènes, f. ive) ;
— Δημύλος (HPN 130, LGPN  2, Marathon, ive  +) ; cf. Δημο-, par
ex. Δημοκλῆς, Δημοκράτης ; Δημώ (LGPN 2, Athènes, 371-370 +) ou
Δήμων (LGPN 2, Paiania, 430-365 +) ;
—  Ἰσχύλος (HPN 288, LGPN  2, Athènes, ca 540-510) ; cf. Ἰσχε-,
Ἰσχι-, Ἰσχο‑ ; par ex. Ἰσχόμαχος ;
— Μεγύλος (HPN 299-300, LGPN 2, Athènes ([Με]γύλος?), ca 500-
480) ; cf. Μέγα- (par ex. Μεγακλῆς) ;
— Μειδύλος (HPN 302, LGPN 2, Athènes, f. ive +, cf. aussi Μειδυ-
λίδης, LGPN 2, Athènes, ca 450 +) ; cf. Μειδο‑, par ex. Μειδοκράτης ;
cf. Μείδων (LGPN 2, Myrrhinous, ca 410 +) ;
— Νῑκύλος (HPN 331-335, LGPN 2, Athènes, ca 500 ; autres occur-
rences ou bien nettement plus récentes, ou bien hors de l’Attique,
cf. LGPN 1, 2, 3 a et b, 4 et 5a) ; cf. Νικο-, Νικα-, par ex. Νίκαρχος ;
Νίκων (LGPN  2, Athènes, ca 525  +) ; Νικώ (LGPN  2, Athènes,
ve-ive +) ;
— Ξενύλος (LGPN 2, Athènes, d. ve) ; cf. Ξένυλλος ;
— Φειδύλος (HPN 443-444, LGPN 2, Athènes, ive 54) ; cf. Φείδων ;
—  Χαριτύλος (LGPN  2, Athènes, ca 500) ; cf. HPN 466-468, par
ex. Χαριτόκλης ; cf. Χαριτώ (LGPN 2, Athènes, ca 350 +), Χαρίτων
(LGPN 2, Athènes, 302-301 + 55) ;
—  Χαρμύλος (HPN 468-469, LGPN  2, Trinemeia, m.  ive  +) ; cf.
Χαρμο‑, par ex. Ἱππόχαρμος.
2. « Sobriquets » ou « surnoms » attestés dans le lexique :
— Κρωβύλος (HPN 602, LGPN 2, Athènes (PCG 4) ive 56) ; cf. κρω-
βύλος « chignon », probablement emprunt (cf. Frisk, GEW II p. 30,
DELG p. 567 et EDG p. 787-788).

54. Voir ci-dessus, 3.1.


55. Cf. LGPN 2 pour d’autres éventuelles occurrences plus anciennes.
56. Autres occurrences dans d’autres régions, cf. LGPN 3a et 5a.
352 audrey mathys

3. Formes fondées sur ces « surnoms ou sobriquets » :


— Μῑκύλος (LGPN 2, Œnoè, ive ; fréquent ailleurs, cf. LGPN 1, 3a,
3b, 4, 5b ; HPN 485 : « Namen nach sichtbaren Eigenschaften ») ; cf.
Μῖκος ; cf. Μίκων (LGPN 2, Athènes, m. ve) ;
— Μυρσύλος (LGPN 2, Athènes (personne étrangère ; [Μυ]ρσύλος),
ive, seule occurrence) ; cf. HPN 593, Μύρσος, noms dérivés de noms
de plantes ?
— Σῑμύλος (HPN 490, LGPN 2, Athènes, ca 480-470 +) ; cf. Σῖμος ;
cf. Σίμων (LGPN 2, Athènes, vie +) ; cf. σῑμός « camus » ;
— Σμῑκύλος (LGPN 2, Athènes, ca 342-341) ; cf. HPN 593 ? ;
—  Χρεμύλος (LGPN  2, Athènes (fict.), 388 ; deux occurrences ail-
leurs cf. LGPN  1 ; HPN  588) ; cf. Χρέμης ; cf. Χρέμων (LGPN  2,
Athènes [Lys. xxx 12; 14; X. HG 2.3.2], 404-403) ;
— Βωτύλος (?) (LGPN 2, Athènes, ca 405, nom d’un métèque).
4. Formes indécidables : hypocoristiques sur base de « surnoms » ou
de composés :
— Αἰσχύλος (HPN 29, LGPN  2, Athènes, viie  +) ; cf. ‑αισχης, ou
*αἰσχύς (cf. αἰσχρός « repoussant, laid, honteux ») 57 ;
—  Ἡδύλος (LGPN  2, Philaidai, 421-420  +, HPN 511 : « übrigen
Namen ») ; cf. aussi HPN 191 : Ἡδυ-, mais peu de composés de ce type
à date ancienne (par ex. Ἡδύφιλος, LGPN 2, Athènes, 276 / 275 +), ou
ἡδύς « doux, agréable » ;
— Ἱππύλος (LGPN 2, Athènes, ca 460-450) ; cf. ci-dessus Ἵππυλλος ;
—  Κρατύλος (HPN 260, LGPN  2, Ægilia, 334-333) ; cf. Κρατε‑,
Κρατι‑, etc., ‑κράτης ; cf. Κράτων (LGPN  2, Athènes, ive  +), ou
κρατύς « fort, puissant » 58.
Il faut cependant prendre garde à ce que Ἰσχύλος, Μεγύλος, Νικύλος
et Χαριτύλος ne sont attestés qu’à une époque où la notation des gémi-
nées n’était pas systématique dans l’épigraphie attique ; toutefois, on
trouve une géminée dans l’inscription où Μεγύλος est restitué. Ce sont
toutes des formes rares ou très rares, qui n’apparaissent qu’une fois dans
notre corpus.

57. Sur cet adjectif, voir C. de Lamberterie, op. cit., p. 831-840.


58. Sur l’analyse de cet anthroponyme, voir C. de Lamberterie, op. cit., p. 343-344.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 353

4.2. Critères de distribution
4.2.1. Rôle de la prosodie
La comparaison entre les anthroponymes en ‑υλλος et ceux en ‑ύλος
fait apparaître plusieurs convergences entre les deux types. Outre qu’il
existe un certain nombre de doublets, qui ont été mentionnés plus haut, les
deux finales semblent partager les mêmes caractéristiques formelles, avec
les mêmes problèmes de coupe morphologique dans les quelques formes
fondées sur des radicaux reposant sur des adjectifs en ‑ύς. Ces finales
paraissent en outre remplir les mêmes fonctions, et il n’y a pas d’oppo-
sition notable entre ce qui serait, par exemple, un suffixe spécialisé dans
la formation des hypocoristiques dérivés de composés, et un autre suffixe
permettant de former des diminutifs ou des hypocoristiques sur des adjec-
tifs servant de « sobriquets ». Tout au plus peut-on constater que ‑ύλος
semble légèrement plus fréquent que ‑υλλος dans cette dernière catégorie.
En revanche, et c’est là un fait remarquable, la structure du radical
de l’anthroponyme paraît jouer un rôle dans le choix du suffixe. Même
si le principe n’est pas sans exceptions, dans les anthroponymes tri-
syllabiques, ‑ύλος est surtout répandu lorsque la première syllabe du
radical est longue, alors que ‑υλλος est plus fréquent lorsque le radical
est constitué d’une syllabe brève. Seuls Μεγύλος, dont la lecture est
contestée, Ξενύλος, qui est bien plus rare que Ξένυλλος, Χρεμύλος,
qui est très rare, et Κρατύλος, qui est relativement rare, font excep-
tion au premier principe. Dans deux de ces anthroponymes, l’absence
de géminée pourrait s’expliquer par une forme d’instabilité de la struc-
ture du radical : ainsi, Ξενύλος pourrait être une adaptation d’une forme
antérieure à la chute du ‑ϝ‑ ou d’un nom ionien Ξεινύλος, et Κρατύλος
pourrait être une réfection d’un plus ancien *Καρτύλος, avec une vocali-
sation différente du *‑r̥ ‑ ; mais ce sont probablement là des explications
ad hoc. Il faut encore signaler le cas de Χαριτύλος, où le ‑ι‑ précédant
le suffixe est bref. Les exceptions au second principe sont un peu plus
nombreuses : il s’agit de Ἄντυλλος et de Κώθυλλος, qui sont rares, de
Φείδυλλος, qui est un peu plus rare que Φειδύλος à date ancienne, et de
Ἵππυλλος, qui est relativement fréquent. Il faut probablement ajouter à
cette liste les anthroponymes Δίυλλος, si le ι du premier terme du com-
posé sous-jacent était encore long, et Ἀρίστυλλος, à supposer que les
quadrisyllabes obéissent aux mêmes règles.
354 audrey mathys

De façon significative, les exceptions sont moins nombreuses parmi


les formes attestées avec une consonne simple que pour les formes à
consonne géminée, alors même que les géminées ne sont pas toujours
notées dans les inscriptions. Il est vrai cependant que, si l’on prenait
en compte les données d’autres régions, on aboutirait sans doute à des
résultats un peu différents : par exemple, Δήμυλλος est attesté une fois à
Thasos vers 510 (LGPN 1), même si Δημύλος reste nettement plus fré-
quent ; à l’inverse, le LGPN signale deux occurrences anciennes de Θρα-
σύλος, l’une à Argos en 418 (cf. LGPN 3a), l’autre à Iasos en 330-310
(cf. LGPN 5b). Néanmoins, cela ne remet pas en question les remarques
que nous pouvons faire ici, qui paraissent témoigner du fonctionnement
de ces suffixes en Attique.
On peut hésiter sur l’interprétation de ces exceptions. Le fait qu’elles
soient plus rares avec les formes à consonne simple suggère que l’on avait
peut-être affaire à une contrainte asymétrique, interdisant d’employer
‑ύλος dans certains contextes. On sait, par ailleurs, qu’il existait en grec
une tendance à éviter les séquences comportant un trop grand nombre de
voyelles brèves 59. Dans le lexique, celle-ci s’exerce sur les mots de plus
de trois syllabes, et la dernière syllabe du mot ne joue aucun rôle dans
le compte. Ainsi, comme l’avait déjà noté Saussure 60, des formes telles
que ὄνομα « nom », ou encore κέραμος « terre de potier, poterie » sont
parfaitement tolérées dans le lexique ; en revanche, les comparatifs en
‑ώτερος sur des adjectifs tels que σοφός « sage », dont la première syl-
labe est une brève, à côté de δηλότερος « plus visible », où la voyelle thé-
matique ne subit aucun allongement, témoignent d’une tendance à éviter
une succession de trois brèves en dehors de la finale. D’après Devine et
Stephens 61, d’autres types de mots manifesteraient le même comporte-
ment, et c’est ainsi qu’il faudrait expliquer, par exemple, l’opposition
entre πόθεν « d’où ? », ἄλλοθεν « d’un autre côté » et ἑτέρωθεν « d’un
autre côté ». Il est vrai que, même pour les formes quadrisyllabiques,

59. Cf. entre autres M. Lejeune, Phonétique historique du mycénien et du grec ancien,
Paris, 1972, p. 283.
60. F. de Saussure, « Une loi rythmique de la langue grecque », dans C. Bally et
L. Gautier (éd.), Recueil des publications scientifiques de Ferdinand de Saussure,
Genève, 1921, p. 464.
61. A. Devine, L. Stephens, The Prosody of Greek Speech, New York - Oxford, 1994,
p. 104.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 355

cette tendance n’a rien de systématique : comme le note Schwyzer, des


formes verbales comme le participe φερόμενος sur φέρω « porter »
sont parfaitement viables 62 ; et certaines formes de gradation semblent
tolérer, à l’époque classique, des séquences de trois brèves 63. Il est éga-
lement envisageable que la distribution rythmique entre ‑ο‑ et ‑ω‑ dans
les formes de gradation résulte d’une redistribution secondaire, et que
l’origine des formes à allongement soit à chercher ailleurs 64. Quoi qu’il
en soit, le rythme du mot semble bien avoir conditionné, à un moment
de l’histoire de la langue grecque, la forme de certains suffixes 65, et il
est possible que la prosodie joue un rôle dans d’autres phénomènes mor-
phologiques en grec. Outre les faits déjà mentionnés, il faut signaler
l’hypothèse de J. Wackernagel 66, qui propose, après Saussure, d’expli-
quer certains cas rares de syncope ou d’aphérèse par la même tendance
à éviter des suites de trois brèves, ce qui rendrait compte, d’après lui,
de formes telles que ἐλθέμεν « aller » au lieu de *ἐλυθέμεν. S. Minon
signale encore que l’élision de la voyelle finale de ἀμφι‑ en composition
pourrait être due à des facteurs rythmiques : elle permettrait d’éviter les
crétiques en début de composé 67.

62. Schwyzer, GG I, p. 534.


63. Cf. notamment στενότερος < *στενϝότερος « plus étroit », qui semble bien établi
comme variante de στενώτερος (cf. LSJ, p. 1638), ou encore, parmi les comparatifs
formés sur des adjectifs en ‑υς, γλυκύτερος et γλυκύτατος « (le) plus doux », dont
la quantité brève du ‑υ‑ précédant le suffixe est assurée par plusieurs passages (par
ex. Pi. O. 1.19 et 1.109, E. Or. 159). Autres exemples chez A. Moorhouse, « The
morphology of the Greek comparative system: its rhythmical and repetitive fea-
tures », AJPh 70 (1949), p. 160-161, et J. Kuryłowicz, « Remarques sur le compa-
ratif (germanique, slave, v. indien, grec) », dans G. Redard (éd.), Sprachgeschichte
und Wortbedeutung, Berne, 1954, p. 257 ; d’après ces auteurs, les formes de grada-
tion fondées sur des adjectifs en ‑ύς auraient toujours un ‑ῠ‑.
64. Cf. J. Kuryłowicz, art. cit., p. 256-257 et du même, The Inflectional Categories of
Indo-European, Heidelberg, 1964, p. 234, avec bibliographie.
65. Pour une discussion sur les facteurs conditionnant l’apparition de ce type d’alter-
nances rythmiques, qui ne touchent pas toutes les catégories de mots, voir J. Wacker-
nagel, « Das Dehnungsgesetz der griechischen Komposita », Bâle, 1889, p. 6-8 ; tou-
tefois, la distribution proposée par cet auteur ne résout pas directement le problème
des formes du type de γλυκύτερος. Sur ce point, voir ci-dessous n. 71.
66. J. Wackernagel, art. cit., p. 3.
67. S. Minon, « Anthroponymes en Ἀμφ(ι)- et en Ἀρ(ι)- : de Ἀμφιάρης à Ἀμφαρίο̄ν »,
RPh 84 / 2 (2010), p. 291-294.
356 audrey mathys

Dans ces conditions, on pourrait donc éventuellement supposer


que, dans une partie des anthroponymes, la gémination joue, mutatis
mutandis, un rôle similaire à celui de l’allongement de la voyelle théma-
tique des formes de gradation : elle permettrait d’éviter une suite de deux
brèves dans un hypocoristique trisyllabique. Bien qu’il ne semble pas
s’agir d’un procédé courant dans le lexique 68, rien n’exclut que l’ono-
mastique obéisse à des règles spécifiques.
La nature exacte de la contrainte rythmique, si c’en est bien une, est
difficile à préciser. Il ne s’agit pas, en l’occurrence, de privilégier un
rythme dactylique ; Saussure suggérait, pour les formes de gradation,
sans préférer cette explication, qu’une partie des faits se justifiait par la
fréquence de la structure iambique dans la langue parlée 69. C’est éga-
lement ce que proposent Devine et Stephens, pour qui la situation des
formes de gradation s’intègre dans une caractéristique plus générale
du rythme du grec ancien, qu’ils décrivent de la façon suivante : « the
constituent elements thesis and arsis [c’est-à-dire, unités rythmiques lon-
gues et brèves respectivement] are prototypically arranged into binary
alternation » 70. La gémination dans les anthroponymes n’est en tout cas
pas le résultat d’une loi phonétique vivante à l’époque classique, sans
quoi l’on s’attendrait à la voir opérer également dans le lexique.
Il est vrai que les quelques exceptions au principe de distribution des
géminées que nous proposons pourraient le rendre contestable ; toutefois,
il est particulièrement efficace pour rendre compte de l’alternance entre
‑ύλος et ‑υλλος dans les hypocoristiques formés sur des composés dans
lesquels le ‑υ‑ ne peut pas appartenir à la base de dérivation. Qu’il y ait
des hésitations pour des anthroponymes reposant sur des adjectifs en ‑ύς,
tels que Κρατύλος, n’est peut-être pas rédhibitoire pour notre hypothèse,
dans la mesure où ces formes ont pu, à un moment de leur histoire, s’ana-
lyser comme κρατυ‑λο‑, et non comme des formes à suffixe à voyelle de
liaison. Par ailleurs, l’existence de παχυλῶς (Arist.) « grossièrement »
suggère que l’on a pu utiliser dans la langue courante des formes en ‑λος

68. Les exemples de gémination rythmique mentionnés par F. de Saussure, art. cit.,
p. 473 sont en général expliqués différemment aujourd’hui.
69. F. de Saussure, art. cit., p. 474. Cf. Aristote (Poét. 4.19.1449a26).
70. A. Devine, L. Stephens, op. cit., p. 121. Pour d’autres manifestations de cette distri-
bution entre unités longues et brèves, voir dans le même ouvrage les p. 99-117, qui
évoquent des faits accentuels, métriques et stylistiques.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 357

sur la base de ces adjectifs, sans gémination alors même que la base était
brève ; cela a pu freiner l’extension de la gémination dans les anthro-
ponymes correspondants. De même, que des formes dérivées de noms
d’animaux (Χρεμύλος, Ἵππυλλος) fassent exception au principe énoncé
ici pourrait s’expliquer par le fait qu’il ne s’agit peut-être pas toujours
d’hypocoristiques fondés sur des composés : ce n’est donc peut-être pas
tout à fait le même suffixe.
Enfin, on pourrait objecter qu’un relevé portant, par exemple, sur l’en-
semble des données recueillies dans les HPN de Bechtel, ferait apparaître
de nombreux contre-exemples à une distribution rythmique des gémi-
nées. En effet, on trouve parfois, dans d’autres régions, des doublets des
formes que nous citons ici, ce qui suggère que notre hypothèse ne rend
compte que des faits attiques. C’est ce que paraît indiquer le sondage que
nous avons effectué dans les CEG de Hansen, où la quantité des voyelles
des anthroponymes ne fait aucun doute du fait des contraintes métriques :
les noms attestés en Attique ne contredisent pas la distribution proposée,
puisque l’on y trouve Αἰσχυλ[ίδ]ες (CEG 207, ca 510-500) et l’accusatif
Σιμύλον (CEG 469, 433-432, la personne est d’origine corcyréenne),
dans des contextes où il faut une initiale dactylique ; en revanche, les
données des autres régions n’obéissent pas toujours aux mêmes règles 71,
et il faudrait probablement, pour chacune d’entre elles, procéder à une
étude systématique comme celle que nous menons ici pour les anthropo-
nymes attestés en Attique. Mais le fait qu’une règle ne fonctionne que
dans une zone géographique restreinte ne l’invalide pas.

71. Anthroponymes conformes à la loi rythmique : dat. Αἰσχύλοι (CEG 445, Béotie,
ca 550-525 ?), Θριπύλος < θρίψ « ver qui ronge le bois » (CEG 392, Himèra, fin
vie ; mais on a également proposé d’y voir une forme altérée d’un composé Τρί-
πυλος), gén. Γογγύλου (CEG 824.8, Arcadie, 369), Θυμίλος (CEG 847, Crète, ca
300 ?), gén. Μενύλλου (CEG 637, Thessalie, 458-457), et peut-être [Φ]ωκύλος
(CEG 853, Samos, av. 365, inscription très abîmée) ; anthroponymes qui contre-
disent cette loi rythmique : Αἴσχυλλο[ς] (CEG 364, Argos, ca 500-480 ?), peut-être
acc. [?A]̣σχ̣υ[λλο]ν (CEG 149, Motyè, ca 475-450 ?), gén. hαγιλλο = Ἡγιλλου (CEG
808, Égine, fin ve ?). Nous laissons de côté la forme Ὀσθ�ίλος (CEG 113, Béotie, ca
500-480 ?), qui est obscure. Il est remarquable que les exceptions aboutissent tou-
jours à créer des suites de deux longues (radical et début du suffixe), et jamais des
groupes de deux brèves ; mais c’est peut-être en partie lié au type de textes, puisque
les inscriptions métriques en hexamètres dactyliques et en distiques élégiaques
tolèrent mieux les suites de plusieurs longues que les suites de brèves.
358 audrey mathys

Une partie des irrégularités qui apparaissent à l’examen des doublets


mentionnés par Leumann 72 ou des listes compilées par Bechtel dans les
HPN pourrait également s’expliquer par une évolution progressive du
principe conditionnant la gémination du ‑λ‑ dans l’onomastique. Il est
possible qu’une variation libre entre géminée et non géminée se soit
mise en place petit à petit, sous l’influence de plusieurs facteurs. D’une
part, l’onomastique pourrait constituer un domaine moins stable que le
lexique, du fait des déplacements de population et des effets de mode.
D’autre part, cette évolution est d’autant plus plausible que, dans d’autres
types d’anthroponymes, comme dans l’exemple de Κλέομμις mentionné
plus haut, la géminée paraît avoir véritablement une fonction expressive.
Enfin, si jamais il était effectivement justifié de mettre en rapport ce
que l’on observe dans les anthroponymes avec la situation des formes
de gradation des adjectifs thématiques, il est possible que les données de
l’onomastique attique soient, déjà au ve et au ive siècles, des reliques d’un
principe de distribution rythmique qui avait cessé d’opérer. En effet, le
principe opposant ‑ότερος après syllabe lourde et ‑ώτερος après syllabe
légère n’était probablement plus productif à l’époque classique, et c’est
ce qui expliquerait, d’après M.  Lejeune 73, l’existence de formes telles
que μακρότερος « plus long », qui ne peut s’expliquer que par une sylla-
bation de type μακ‑ρό‑τε‑ρος, et στενότερος « plus étroit », dont l’appari-
tion est probablement antérieure à la disparition du digamma en attique 74.
S’il fallait voir dans ces comparatifs la preuve que les contraintes ryth-
miques limitant l’apparition de séquences de trois brèves avaient cessé
d’opérer à l’époque classique, il faudrait alors considérer que les condi-
tions pour le développement d’une variation libre entre ‑ύλος et ‑υλλος
dans l’onomastique étaient en place, et que l’on ne doit la distribution
rythmique que l’on y observe qu’à une sorte de conservatisme.
Toute la difficulté tient en réalité à l’évaluation des parts respectives
de la phonétique et de la morphologie dans ce qui semble constituer la

72. M. Leumann, art. cit., p. 245.


73. M. Lejeune, op. cit., p. 290.
74. C’est peut-être également par la chronologie qu’il faut expliquer la quantité toujours
brève du ‑υ‑ dans les formes de gradation en ‑ύτερος et ‑ύτατος sur les adjectifs
en ‑ύς. On considère en effet que ces formes secondaires remplacent d’anciennes
formes de gradation primaires et sont donc relativement récentes (cf. H. Seiler, Die
primären griechischen Steigerungsformen, Hambourg, 1950, p. 35-62).
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 359

morphologisation de tendances dont le point de départ était probable-


ment une contrainte d’ordre phonologique. Ces quelques remarques sug-
gèrent en tout cas que, si l’opposition entre ‑ύλος et ‑υλλος en fonction
de la nature de la base avait peut-être, à date très ancienne, un point de
départ phonétique, à l’époque classique, cela semble être devenu une
contrainte morphologique. C’est là un fait à prendre en compte lorsque
l’on cherche à s’appuyer sur la morphologie des anthroponymes pour
mieux comprendre la morphologie lexicale, puisque, dans ce cas précis,
il paraît possible de mettre en évidence une règle morphologique dont le
fonctionnement est limité à l’onomastique.
4.2.2. Bilan
Les finales ‑υλλος et ‑ύλος partagent plusieurs fonctions dans l’an-
throponymie en grec, puisqu’elles entrent, notamment, dans la constitu-
tion d’hypocoristiques sur la base de composés et d’hypocoristiques ou
de diminutifs sur la base de sobriquets. Il n’y a pas de différence fonc-
tionnelle très nette entre les deux finales. Par ailleurs, s’il existe un cer-
tain nombre d’anthroponymes en ‑ύλος ou en ‑υλλος fondés, en dernière
analyse, sur des adjectifs en ‑ύς, les arguments susceptibles de montrer
que, en synchronie, la coupe passait encore entre la voyelle et ‑λ(λ)ος
sont peu nombreux. En revanche, il semble que la distribution entre les
deux finales tienne à des facteurs rythmiques, qui sont vraisemblable-
ment asymétriques, et qui résultent de ce que l’on évitait les séquences
de deux brèves au début des hypocoristiques trisyllabiques. En cela, les
anthroponymes en ‑λος se distinguent nettement des formations lexicales
comportant la même finale, pour lesquelles on ne décèle aucune règle
rythmique de ce type.
Il faut encore noter que, en Attique, ce principe rythmique semble
également valide dans les formes en ‑ύλ(λ)ιος, ‑ύλ(λ)ιον, ‑υλ(λ)ίων et en
‑υλ(λ)ίδης, où ‑υλ(λ)‑ se combine avec un deuxième suffixe, comme en
témoignent les données que nous avons recueillies :
1. Radical constitué d’une syllabe brève, suffixe à géminée :
— Πολυλλίδης (LGPN 2, Paiania, ive) ;
— Φιλύλλιος (LGPN 2, Athènes, ve-ive).
2. Radical constitué d’une syllabe longue, suffixe sans géminée :
— Ἀγκυλίων (LGPN 2, Athènes, 422 +) ;
360 audrey mathys

— Αἰσχυλίδης (LGPN 2, Athènes, ca 510-500 +) ;


— Δερκυλίδης (LGPN 2, Athmonon, f. ive +) ;
— Δρωπυλίων (LGPN 2, Athènes, 464) ;
— Ἡδύλιον (LGPN 2, Athènes (étranger), 330-320 +) ;
— Θαρρυλίων (LGPN 2, Athènes, f. ve) ;
— Θηρυλίδης (LGPN 2, Athènes, ca 510-500) ;
— Κωκυλίων (LGPN 2, Athènes, 560-550) ;
— Μειδυλίδης (LGPN 2, Athènes, ca 450 +) ;
— Μῑκυλίων (LGPN 2, Athènes, 405 +) ;
— Σμῑκυλίων (LGPN 2, Kerameis, m. ive +) ;
— Στεμφ[ύλιος] (LGPN 2, Athènes, d. ive) ;
— Στρογγυλίων (LGPN 2, Athènes, ca 420-415 +) ;
— Στρο[μβ]υ[λίων] (LGPN 2, Athènes, ive).
Il est certes envisageable, vu la date d’attestation de certaines formes
(en particulier Κωκυλίων et Θηρυλίδης), que les géminées ne soient
pas toujours notées, et qu’il faille donc revoir à la hausse le nombre de
formes à géminée sur des radicaux à syllabe longue. Toutefois, la cohé-
rence des données demeure remarquable ; la seule forme un peu diffi-
cile est Καχρυλίων (LGPN 2, Athènes, ca 510-500), dont on n’a qu’une
occurrence, à une époque où les géminées n’étaient pas systématique-
ment notées. Or la structure de son radical est problématique : bien
qu’un groupe formé d’une occlusive suivie d’une liquide soit tautosylla-
bique du point de vue de la métrique en grec classique 75, il se comporte
comme un groupe hétérosyllabique pour la formations des comparatifs
et des superlatifs dans le vocabulaire fondamental, et l’on a par exemple
μακρότερος (Hom.  +) et non *μακρώτερος sur μακρός « long », alors
même que le ‑α‑ du radical de cet adjectif est bref. Bien que la situation
de μακρότερος s’explique probablement par des faits de chronologie 76,
il n’en demeure pas moins que, en dehors du vocabulaire fondamental,
dans les formes de gradation, on observe des variations lorsque le suffixe
était précédé d’une séquence ‑V̆ CR‑ : Devine et Stephens 77 signalent,
entre autres, βαρυποτμώτατος (E. Ph. 1345) à côté de βαρυποτμότατος

75. Cf. notamment L. Lupaş, Phonologie du grec attique, La Haye - Paris, 1972, p. 159,
qui signale que cette syllabation est majoritaire chez Aristophane.
76. Voir ci-dessus 4.2.1.
77. A. Devine, L. Stephens, op. cit., p. 40.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 361

(Plu. TG 5) « le plus pénible », et ἐρυθρότερος (Pl. Tim. 83b) à côté de


ἐρυθρώτερος (Anaxandr. 22) « plus rouge », etc. Il n’est pas impossible
que des hésitations du même type se soient produites pour des anthro-
ponymes présentant une séquence ‑V̆ CR‑ devant une finale comportant
un élément ‑υλ‑. Dans ces conditions, l’existence d’un anthroponyme
Καχρυλίων n’a guère de conséquences sur l’hypothèse défendue ici.

5. Les anthroponymes en ‑ίλος et en ‑ιλλος

Afin de préciser la nature du principe morphophonologique qui


semble présider au choix entre ‑ύλος et ‑υλλος dans les anthroponymes
attestés en Attique à l’époque classique, il importe à présent d’examiner
si la même contrainte s’applique dans d’autres cas où l’on a apparemment
deux variantes du même suffixe dans l’onomastique. Après les formes en
‑υλ(λ)ος, c’est pour les formes en ‑ιλ(λ)ος que l’on dispose du plus grand
nombre de données. Toutefois, il convient, cette fois, de ne pas limiter
l’examen aux facteurs formels expliquant la distribution. Εn effet, il n’est
pas certain que cette ou ces finales aient les mêmes fonctions que ‑υλ(λ)ος,
et il faut, en premier lieu, rechercher d’éventuels critères fonctionnels
expliquant la distribution entre les formes avec et sans géminée.

5.1. Proposition de classement
On peut proposer le classement suivant des formes attestées dans le
domaine attique. Comme pour les formes en ‑ύλος et en ‑υλλος, nous
indiquons lorsque des formes en ‑ων ou en ‑ώ (sans ‑ι-) sont attestées sur
la même base 78. Nous ne séparons pas les noms à géminée de ceux sans
géminée 79 :
1. Hypocoristiques sur la base de composés :
a)  Composés dont le premier élément est susceptible d’avoir com-
porté un ‑ι‑ :

78. Sur le lien entre les formes en ‑ιλος et les formes en ‑ων dans les anthroponymes, cf.
J. L. García Ramón, « Anthroponymica Mycenaea », Minos 35 (2000), p. 435-436,
qui en donne des exemples y compris en mycénien.
79. Nous ne tenons pas compte ici de Πάμιλλος (LGPN 2, Athènes, ? ve), dont la lecture
n’est pas claire, et que Bechtel ne mentionne pas dans les HPN.
362 audrey mathys

— Ἀνάξιλλος (LGPN 2, Athènes, ive +, HPN 44 ?) ; cf. Ἀναξι‑, par


ex. Ἀναξίλεως (LGPN 2, Athènes, ca 485-480), Ἀναξίλας (LGPN 2,
tr. d’Érechthée, 459 +) ;
—  Ἄρξιλλος (LGPN  2, Kolonai, tr. Léontide, 371-370 80) ; cf.
HPN 76 : Ἀρξι-, ‑άρκτης ; cf. Ἀρξιλαΐδας (LGPN  3b, Orchomène,
ca 300-275) ? ;
—  Ἄρχιλλος (HPN 84, LGPN  2, Attique, ca 447 81) ; cf. Ἀρχι‑, par
ex. Ἀρχίλοχος (LGPN 2, Agrylè, ca 408-407 +) ; cf. Ἄρχων (LGPN 2,
Athènes, ca 600 +), Ἀρχώ (LGPN 2, Athènes, m. ive +) ;
— Κυρσίλος (LGPN 2, Athènes [D. 18.204, etc.], 480) ; cf. HPN 272 :
« auf Vollnamen mit Κυρσι- weisen Κυρρίας Λαμπτρεύς und Κυρ-
σίλος Φεραῖος ».
b) Composés dont le premier terme ne contenait probablement pas de
suffixe en ‑ι‑ :
—  Γοργίλος (HPN 112-113, LGPN  2, tr. de Cécrops, 409 82) ; cf.
Γοργο-, par ex. Γόργιππος, Γοργοσθένης ; cf. Γοργώ (LGPN  2,
Athènes, ve +), Γόργων (LGPN 2, tr. d’Érechthée, 459 +) ;
—  Δόριλλος (HPN 139-140, LGPN  2, Athènes, d.  ve) ; cf. Δορυ-,
Δορι-, par ex. Δορίμαχος, Δορικλείδης, peut-être Δορύλαος (LGPN 5a,
Amisos, d. iie) ;
— Ζωΐλος (HPN 186-187, LGPN 2, Athènes, ca 515 +) ; cf. Ζω-, par
ex. Ζωαγόρας, Ζώβιος ;
—  Θοινίλος (HPN 210-211, LGPN  2, Acharnai, 435-434  +) ; cf.
Θοινο-, -θοινος, ‑θοινιος ; par ex. Εὔθοινος ;
— Κομίλος (LGPN 2, Athènes, f. ive) ; HPN 253-254 ? ; cf. Κομο‑,
-κομος, -κόμᾱς, par ex. Εὔκομος ; cf. Κόμων (LGPN  2, tr. Ægéide,
ca 430-425 +), Κομώ (LGPN 2, Athènes, ve-ive) ;
— Μένιλλος (LGPN 2, tr. de Pandiôn, ca 411) ; cf. HPN 305 ? ; cf.
Μενε‑, Μενεσ‑, Μενο‑, ‑μενος, ‑μένων, etc., par ex. Μενεκράτης,
Μενέλαος (LGPN 2, Myrrhinous, 326-325 +) ; cf. Μένων (LGPN 2,
Athènes, ca 525 +) ;

80. Une autre occurrence à Orchomène, cf. LGPN 3b.


81. Autres occurrences : cf. LGPN 3a et 3b.
82. Autres occurrences en Attique à partir du iie s., ailleurs dès le vie s., cf. LGPN 1, 2,
3a et 3b.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 363

— Οἰνίλος (HPN 345, LGPN 2, tr. des Hippothontides, ca 411 83) ; cf.


Οἰνο‑, par ex. Οἰνοπίων ;
— Σόφιλλος (HPN 403-404, LGPN 2, Kolonos, f. ve 84) ; cf. Σοφο‑,
par ex. Σοφοκλῆς 85 ; cf. Σόφων (LGPN 2, Athènes, ca 490 +) ;
— Χόριλλος (HPN 471, LGPN 2, Athènes, étranger, m. ive) ; Χορο-,
et ‑χορος, par ex. Χοροκλῆς ; Χόρων (LGPN  2, Athènes, ca 450),
Χορώ (LGPN 2, Athènes, ca 515-510).
2. « Sobriquets » ou « surnoms » attestés dans le lexique :
— Σποργίλος (LGPN 2, Athènes, d. ve) ; nom du moineau ? Cf. Chan-
traine 86, Dunbar 87 et García Ramón 88 : cf. Hsch. σπέργυλος· ὀρνιθά-
ριον ἄγριον ;
— Στροβίλος (LGPN 2, Athènes, d. ive ; HPN 605 : « Spielgeräte ») ;
cf. στρόβῑλος « toupie », στροβῑλός « qui tourbillonne », στρόβος
« tourbillon » ;
— Τροχίλος (LGPN 2, Athènes, 425-400 +) ; cf. τροχίλος « roitelet ».
3. Formes fondées sur ces « surnoms ou sobriquets » :
— Μυρτίλος (LGPN 2, Athènes, d. ve + ; HPN 596 : anthroponymes
formés sur des noms de plantes) ; cf. μύρτος « myrte », Μύρτη
(LGPN  2, Athènes, ca 510  +) ; cf. Μυρτώ (LGPN  2, Athènes, ca
550 +) ;
—  Χοιρίλος (LGPN  2, Athènes, vie-ve  + ; HPN 588 : « Personen-
namen aus Tiernamen ») ; cf. Χοῖρος (LGPN 2, Athènes, ca 520 +), et
χοῖρος « petit cochon » ; cf. Χοιρώ (LGPN 2, Athènes, m. ive).
4. Autres cas :
— Τρωΐλος (LGPN 2, Acharnai, ive + ; HPN 577 : « Personennamen
von Heroen ») 89.

83. Autres occurrences : cf. LGPN 2 et 3a.


84. Une autre occurrence à Oropos (LGPN 3b, ive-iiie).
85. Le passage de Clément d’Alexandrie (Protr.) cité par Radt dans son édition des frag-
ments tragiques (IV, p. 42) ὁ δὲ τοῦ Σοφίλλου Σοφοκλῆς suggère que Σοφίλλος est
bien un hypocoristique de composé en σοφο‑.
86. P. Chantraine, Formation, p. 249.
87. N. Dunbar, Aristophanes Birds edited with introduction and commentary, Oxford,
1995, p. 248.
88. J. L. García Ramón, art. cit., p. 433.
89. Sur l’origine plus lointaine, voir Kamptz, HomPN, p. 364-365, qui y voit un suffixe
étranger fréquent dans les anthroponymes d’Asie Mineure.
364 audrey mathys

Toutes les formes dépourvues de géminées mentionnées ci-dessus


sont attestées au moins une fois dans des inscriptions postérieures à 480
ou dans des textes littéraires ; il y a donc de fortes chances pour que l’ab-
sence de géminée ne soit pas uniquement l’effet de l’absence de notation.

5.2. Plusieurs suffixes ‑ιλ(λ)ος ?


Le relevé présenté ci-dessus fait apparaître que, contrairement à ce
que l’on pourrait attendre, malgré leur fréquence et leur ressemblance
avec les anthroponymes en ‑ύλος et en ‑υλλος, les formes en ‑ίλος et en
‑ιλλος présentent un comportement un peu différent.
Le premier fait remarquable est que l’alternance entre ‑ίλος et ‑ιλλος
n’obéit pas aux mêmes principes que pour ‑υλ(λ)ος. Ainsi, dans Ἀνά-
ξιλλος, Ἄρξιλλος et Ἄρχιλλος, le suffixe, s’il s’agit bien de ‑ιλλος et non
simplement de ‑λος, suit une syllabe longue. À l’inverse, dans Κομίλος,
Στροβίλος et Τροχίλος, le suffixe ‑ιλος suit une syllabe brève. Il est vrai
que toutes ces exceptions ne sont sans doute pas de la même valeur. Dans
Στροβίλος, il est possible que l’on ait affaire à une formation différente,
et qu’il faille corriger l’accentuation proposée par le LGPN, puisque
le nom et l’adjectif correspondants présentent un ‑ι‑ long, et que l’an-
throponyme n’est attesté ni dans des textes littéraires, ni dans des textes
métriques. Τροχίλος peut devoir son absence de géminée au fait qu’il
dispose d’un correspondant exact sans géminée dans le lexique. Quant à
Κομίλος, il n’est attesté qu’une fois en Attique, dans une inscription (IG
II² 11889, f. ive) trop brève pour qu’il soit possible de déterminer si l’ab-
sence de géminée résulte d’un fait linguistique ou d’un fait de notation.
Par ailleurs, il faut également noter que des formes telles que Σόφιλλος,
Δόριλλος ou encore Χόριλλος sont parfaitement conformes aux prin-
cipes énoncés ci-dessus.
Une part non négligeable des formes à géminée comportant une
pénultième longue pourrait s’analyser comme des hypocoristiques tirés
de composés en ‑λαος / ‑λεως. Dans le cas de Ἀνάξιλλος, Ἄρξιλλος et
Ἄρχιλλος, l’hypocoristique aurait été formé sans altération du timbre de
la voyelle finale du premier membre du composé, alors que l’on aurait
eu un remplacement du ‑ε‑ du second membre par un ‑ι‑ dans Μένιλλος.
Certes, il ne semble pas que ce type de remplacement soit fréquent ; mais
les hypocoristiques en ‑ελ(λ)ος ne sont pas très nombreux en Attique à
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 365

date ancienne, et Μενέλαος est un nom relativement courant 90. Enfin,


dans la mesure où Μένιλλος n’est attesté qu’une fois, on ne peut pas
exclure que ce nom résulte d’un choix créatif isolé ou d’une influence
extérieure à l’Attique. Μένυλλος semble d’ailleurs un peu plus fré-
quent 91. L’existence de Κυρσίλος, qui repose probablement sur un pre-
mier membre de composé du même type que Ἀρξι‑, pourrait confirmer
que c’est la présence d’un ‑λ‑ dans le deuxième membre de composé qui
détermine la gémination dans une partie des formes : on ne connaît en
effet aucun *Κυρσίλοχος, *Κυρσίλαος, *Κυρσίλεως ou encore *Κυρ-
σίλας. Cela pourrait également constituer une indication du fait que la
coupe morphologique devait, dans ces hypocoristiques, passer juste
avant ‑λος. Toutefois, il faut prendre garde à ne pas tirer trop de conclu-
sions de formes rares ou de l’absence de formes, qui peut être due au
hasard.
Quoi qu’il en soit, ces quelques remarques suggèrent que les emplois
de ‑(ι)(λ)λος dans l’onomastique présentent moins d’homogénéité que
ceux de ‑υλ(λ)ος, et que la coupe morphologique y est parfois plus diffi-
cile à définir. En réalité, il est possible que l’on ait affaire à trois finales
en partie différentes : une finale ‑λος, éventuellement devenue ‑ιλλος par
fausse coupe, permettant de former des hypocoristiques sur des anthro-
ponymes composés dont le premier membre se terminait en ‑ι‑ et dont le
second membre était ‑λεως / ‑λαος, ‑λοχος, ou tout autre mot commen-
çant par un ‑λ‑ ; un suffixe ‑ιλος permettant de former des appellatifs dans
des conditions qui restent à préciser, fournissant notamment des noms
d’oiseaux ou d’objets susceptibles de prendre leur place dans l’anthropo-
nymie, et un suffixe ‑ιλ(λ)ος formant des hypocoristiques sur des bases
plus variées (composés de divers types, sobriquets), nettement plus rare
que ‑υλ(λ)ος, et dans lequel la gémination semble obéir à peu près au
même principe que dans ‑υλ(λ)ος.

90. Cf. LGPN 2 pour les occurrences en Attique.


91. Cf. LGPN 2. Nombreuses occurrences en dehors de l’Attique, cf. LGPN 1, 3a, 3b, et
5b pour l’époque classique.
366 audrey mathys

6. Critères de distribution de ‑ιλ(λ)ος et de ‑υλ(λ)ος


dans les hypocoristiques

6.1. Hypocoristiques issus de composés


Il faudrait alors parvenir à préciser les raisons conduisant à utiliser
‑ιλ(λ)ος plutôt que ‑υλ(λ)ος dans les anthroponymes où le ‑ι‑ ou le ‑υ‑
précédant ‑λ(λ)ος ne peuvent appartenir qu’au suffixe. C’est peut-être
encore une fois dans la structure du radical qu’il faut chercher la réponse
à cette question : hormis Μυρτίλος, tous les hypocoristiques où le ‑ι‑
n’appartenait sans doute pas à l’anthroponyme servant de forme de fon-
dation à l’hypocoristique présentent une voyelle de timbre ‑ο‑ dans leur
radical. Or, ce qui est remarquable, c’est que ‑υλ(λ)ος est justement rela-
tivement rare dans ces conditions, du moins dans les hypocoristiques
dérivés d’anthroponymes composés : nous n’avons pu relever que
Μόρυλλος, qui est rare, et Πόλυλλος, où la coupe morphologique passait
probablement après le ‑υ‑.
Il est vrai que l’on trouve une association entre un suffixe en ‑υλ‑ et
un radical de timbre ‑o‑ dans quelques noms tirés de « sobriquets », par
exemple Κώθυλλος. Certaines de ces formes sont difficilement analy-
sables (Βωτύλος), et d’autres déjà attestées dans le lexique (Κρωβύλος).
La prise en compte des formes en ‑υλίων ne modifie pas radicalement
cette analyse, puisque Στρομβυλίων est classé par Bechtel (HPN  605)
dans les noms tirés de jouets, et qu’il faut d’après lui le rattacher à
στρόμβος « toupie » ; Δρωπυλίων est sans doute, lui aussi, un hypocoris-
tique tiré d’un « sobriquet », et Bechtel (HPN 477), le rattache à tout le
groupe des anthroponymes formés sur δρώψ· ἄνθρωπος (Hsch.) ; quant à
Στρογγυλίων, il n’a pas acquis son suffixe de timbre ‑υ‑ au moment de la
constitution de l’anthroponyme, mais il le doit à l’adjectif correspondant,
à savoir στρογγύλος « rond, arrondi » 92. Il reste Κωκυλίων, qui n’est pas
92. Cet adjectif doit probablement son ‑υ‑ à la contamination avec ἀγκύλος, qui provien-
drait d’un ancien *ἀγκύς, et qui semble avoir influencé par Reimwortbildung plu-
sieurs adjectifs de sens proche, à savoir καμπύλος « courbe » et στρογγύλος « rond »
(cf. J.-L. Perpillou, « Verbes de sonorité à vocalisme expressif en grec », REG 95
(1982), p. 235 et passim, et C. de Lamberterie, op. cit., p. 715-723). Les contami-
nations de ce type sont particulièrement fréquentes dans les adjectifs en ‑λος ; sur la
notion de Reimwortbildung, voir H. Güntert, Über Reimwortbildungen im Arischen
und Altgriechischen, Heidelberg, 1914.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 367

mentionné par Bechtel ; vu sa structure, il est assez vraisemblable qu’il


soit lié au verbe κωκῡ�ω « se lamenter » ou au nom κωκῡτός « lamenta-
tion », et qu’il s’agisse donc encore une fois d’un hypocoristique formé
sur un sobriquet ; il comporte d’ailleurs probablement un ‑υ‑ long. Il n’est
pas exclu que toutes ces formes tirées de sobriquets ne fonctionnent pas
tout à fait de la même manière que les hypocoristiques formés sur des
anthroponymes composés.
Ainsi, il semble que se dessine, pour les noms attestés en Attique aux
v et au ive s., une distribution entre ‑ιλος et ‑υλ(λ)ος dans les hypocoris-
e

tiques fondés sur des anthroponymes composés 93 qui dépend de la struc-


ture du radical et que l’on peut résumer de la façon suivante :
Syllabe présuffixale brève Syllabe présuffixale longue
Timbre ‑o‑ ‑ιλλος ‑ίλος
Autre timbre ‑υλλος ‑ύλος

6.2. Anthroponymes dérivés de « sobriquets »


Comme on vient de le voir, pour les anthroponymes issus de « sobri-
quets », la distribution est un peu différente et plus confuse, sans doute
en raison des interférences plus nombreuses entre le lexique et l’ono-
mastique. Si les formes dont le radical ne possède pas de voyelle de
timbre ‑ο‑ présentent une certaine cohérence, puisque l’on a presque tou-
jours un suffixe de timbre ‑υ‑, deux tendances contradictoires, qui cor-
respondent justement à deux types morphologiques différents attestés
dans le lexique, apparaissent dans les noms dont le radical comporte une
voyelle de timbre ‑o‑.
La première tendance paraît à même de rendre compte des formes du
type de Στρογγυλίων. J.‑L. Perpillou a en effet mis en évidence l’exis-
tence d’un ensemble de termes, tels στρογγύλος, γογγύλος, etc., présen-
tant une séquence ο...υ...ο à valeur expressive 94. Cette séquence semble
se retrouver dans une partie des hypocoristiques formés sur des mots
exprimant des défauts, des caractéristiques physiques (Στρογγυλίων), ou
encore sur des termes désignant des sonorités (par exemple Κωκυλίων).

93. Rappelons que les noms en composés en ‑ι‑λαος et ‑ι‑λοχος font probablement
exception à cette règle.
94. J.-L. Perpillou, art. cit., p. 235. Cf. également C. de Lamberterie, op. cit., p. 715.
368 audrey mathys

Mais on trouve également dans le lexique un petit groupe de forma-


tions en ‑ίλος comportant une voyelle de timbre ‑o‑ dans leur radical ;
ainsi, on a par exemple les adjectifs κοῖλος (Hom. +, cf. myc. ko-wi-ro 95)
« creux », ποικίλος (Hom. +) « varié, divers, bigarré », ὀργίλος (Hom. +)
« colérique » ; on peut également mentionner quelques noms, tels que τρο-
χίλος (Hdt. +) « roitelet », ὀρχίλος (Ar. +) « roitelet », σχοινίλος (Arist.)
« bruant des roseaux », ποντίλος 96 (Arist.) « argonaute », κοντίλος (Eup.)
« pénis » 97, κόρθιλος (Hsch.) « roitelet » 98 et ὀπτίλ(λ)ος « œil » 99. Le
matériel est assez hétéroclite, et il existe également des formes en ‑ίλος
avec un autre vocalisme radical, par ex. ναυτίλος (Arist.) « marin, argo-
naute », φρυγίλος (nom d’un oiseau, Ar.), ou encore αἴγιλος (Thcr.)
« herbe à chèvres » ; mais les formes à vocalisme de timbre ‑o‑ repré-
sentent une part non négligeable de la liste de formes en ‑ίλος fournie par
Buck et Petersen 100.
L’extension de ce principe de formation, si c’en est bien un, est
aussi peu claire que sa fonction. Le fait que le correspondant sans-
krit de ποικίλος, peśalá- « orné », ne présente pas de voyelle ‑i‑ dans
son suffixe 101, suggère qu’il a pu y avoir des réfections en grec, et ce
à date assez ancienne. En effet, on trouve déjà en mycénien po-ki-ro-
qo (anthroponyme, le deuxième terme est le nom de l’œil, cf. DMic II,
p.  135 *Ποικίλ‑οκwς ou ‑ωκwος) et po-ki-ro-nu-ka (adj. ; cf. DMic II,
p. 135, *ποικιλ‑όνυχα ou ‑ώνυχα), « teint de diverses couleurs » ; et ποι-
κίλος est relativement isolé en synchronie, puisque le lien avec πικρός
« amer » n’est sans doute plus perceptible.
Le plus vraisemblable est que l’on doive partir d’un petit groupe de
formes où le ‑ι‑ appartenait à la forme de fondation, telles que ὀρχίλος
95. Cf. DELG, p. 530-531 pour le détail des données.
96. Sur ce mot, voir en dernier lieu N. Guilleux (à paraître, en particulier p. 258-260 sur
le sens de ce mot en mycénien, où il est attesté sous la forme po-ti-ro), avec biblio-
graphie.
97. Sur ce mot, cf. A. Nussbaum, Head and Horn in Indo-European, Berlin - New York,
1986, p. 204-206, n. 18 ; cf. κοντός « perche, bâton ».
98. Cf. J. L. García Ramón, art. cit., p. 433, qui cite Hsch. ὄρνις, ὅν τινες Βασιλίσκον.
99. La forme à géminée est laconienne (cf. IG IV² 1.121, Épidaure) ; la forme sans
géminée est glosée par ὄφθαλμος « œil » chez Hésychius.
100. C. D. Buck, W. Petersen, op. cit., p. 364-365.
101. La différence d’accentuation entre les deux formes est probablement due à la loi de
Wheeler. Sur cette famille de mots, voir GEW (II, p. 572-573), DELG (p. 890-891)
et EDG (p. 1216-1217).
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 369

« roitelet », sur ὄρχις « testicule », ou encore τροχίλος sur τρόχις « mes-


sager ». Ὀρχίλος pourrait être ancien puisqu’il semble avoir un corres-
pondant en lituanien sous la forme de erž̃ ilas « étalon », alors même que
les formations en ‑la‑ ne sont pas productives dans cette langue 102. Quant
à τροχίλος, le fait que l’on trouve, sur la même base, un adjectif τρόχιμος
« qui court, qui se hâte », suggère que le ‑ι‑ n’appartenait pas néces-
sairement au suffixe ‑ιλος à l’origine 103. Dès lors que certaines de ces
formes étaient liées à des noms ou des adjectifs thématiques, tels que par
exemple τροχός « agile », ‑ιλος a pu ensuite être senti comme un suf-
fixe dénominatif directement utilisable sur des formations thématiques.
Il s’est étendu à des formes appartenant à des domaines sémantiques
proches (noms d’oiseaux, noms d’autres animaux). Il n’est pas impos-
sible que l’extension du suffixe ‑ιλος dans les adjectifs soit due à l’exis-
tence d’abstraits en *‑i‑ sur base thématique signalée par J. Schindler
notamment à propos du slave, cf. v.sl. zъlъ < *‑o- « mauvais », zъlь <
*‑i‑ « mal », où le procédé est resté productif 104. On dispose de traces de
formations de ce type ailleurs dans d’anciens abstraits devenus concrets,
et notamment en grec, cf. par exemple ἄκρις (Hom. +) « sommet d’une
montagne », ὄκρις « pointe » (Hp.) <*h2ek̑ ri‑ / <*h2ok̑ ri- ; cf. véd. áśri-
« arête, côté, lame », lat. ocris (Fest.) « rocher raboteux », sur un adjectif
*h2ek̑ -ro-, cf. gr. ἄκρος « extrême, le plus haut ». D’après Schindler, ce
type morphologique remonte à l’indo-européen, mais il a cessé d’être
productif en dehors du slave, et l’on n’en a pas de bon exemple en grec
pour les adjectifs qui nous intéressent.
Quoi qu’il en soit, il semble que, si jamais il a existé une tendance
à associer ‑ιλ(λ)ος à des radicaux de timbre ‑ο‑ en grec, celle-ci avait
perdu toute motivation fonctionnelle à l’époque classique. On pourrait
dès lors être tenté de rejeter cette hypothèse comme peu économique,
puisqu’elle ne rend compte que d’un tout petit nombre de formes dans
le lexique. Toutefois, c’est peut-être un cas où les données de l’anthro-
ponymie apportent réellement des informations que le lexique n’est plus
102. Sur le détail, voir J. L. García Ramón, art. cit., p. 431-436 et D. Petit, « Lituanien
Erž̃ vilkas : une formule poétique indo-européenne ? », dans G.-J. Pinault et D. Petit
(éd.), La langue poétique indo-européenne, Paris, 2006, p. 356-359.
103. Cf. J. L. García Ramón, art. cit., p. 434, n. 14.
104. Cf. J. Schindler, « Zur Herkunft der altindischen cvi-Bildungen », dans M. Mayrhofer,
M. Peters et O. E. Pfeiffer (éd.), Lautgeschichte und Etymologie, Wiesbaden, 1980,
p. 390.
370 audrey mathys

susceptible de nous livrer, puisqu’elles paraissent confirmer l’existence


d’un lien entre timbre ‑ο‑ et suffixe ‑ιλ(λ)ος, sans que l’on puisse y asso-
cier une fonction claire.
Le dernier point à éclaircir, si l’on admet cette hypothèse, est de déter-
miner comment cette affinité de ‑ιλ(λ)ος pour le timbre ‑o‑ s’est étendue
du lexique aux anthroponymes. Il est possible que le point de départ soit
à chercher dans les quelques noms d’oiseaux employés comme anthropo-
nymes. À partir de là, on a pu former d’autres hypocoristiques de « sobri-
quets » sur des bases sémantiquement proches : par exemple, Χοιρίλος
est fondé, comme Σποργίλος, sur un nom d’animal. Enfin, il est possible
que du fait que, dans d’autres catégories, et notamment dans les hypo-
coristiques en ‑υλ(λ)ος, la séparation entre les noms dérivés d’anthropo-
nymes composés et ceux dérivés de sobriquets n’est pas très nette, ‑ίλος
se soit étendu aux hypocoristiques dérivés de composés comportant une
voyelle de timbre ‑o‑ dans leur radical. Mais rien de cela n’est vérita-
blement démontrable, étant donné que, dans les anthroponymes, aucun
argument sémantique ne vient appuyer les analyses morphologiques.

6.3. Bilan
L’examen des données attiques a montré que les anthroponymes en
‑ίλος et en ‑ιλλος constituent un groupe moins homogène que celui des
noms en ‑υλ(λ)ος, à la fois parce que certaines formes semblent être pas-
sées directement du lexique à l’onomastique, et parce que la coupe mor-
phologique, dans certains hypocoristiques, est susceptible de passer entre
la voyelle précédant le ‑λ‑ et la consonne géminée, voire entre les deux
consonnes.
L’existence d’un nombre significatif de formes en ‑ίλος à radical bref
prouve bien que, dans la synchronie du grec classique au moins, ce qui
semble se produire dans les formes en ‑υλ(λ)ος n’est pas phonologique,
mais morphologique, puisque des formes présentant des caractéristiques
prosodiques apparemment évitées pour les anthroponymes en ‑υλ(λ)ος
semblent bien acceptées dans les anthroponymes en ‑ιλ(λ)ος. Toutefois,
la distribution entre forme à géminée combinée avec une syllabe radi-
cale brève et forme à consonne simple combinée avec une syllabe radi-
cale longue semble fonctionner pour les hypocoristiques fondés sur des
anthroponymes composés dont le deuxième terme ne comporte pas de
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 371

‑λ‑ initial : il faut peut-être en conclure que la validité de la règle ryth-


mique dont nous faisons l’hypothèse s’étendait, pour les anthroponymes
en ‑λος, à l’ensemble des hypocoristiques fondés sur des composés, dont
elle constituait, en quelque sorte, un signe distinctif.
Enfin, nous venons de voir que la structure du radical jouait probable-
ment un autre rôle dans l’emploi de ‑ιλ(λ)ος, notamment dans les hypo-
coristiques dérivés d’anthroponymes composés, puisqu’il semble que
cette finale ait été privilégiée dans les cas où le radical du membre de
composé sur lequel on forme l’hypocoristique comportait une voyelle
de timbre ‑o‑.
Il faut encore noter qu’il est très rare que ‑ιλ(λ)ος se combine avec un
autre suffixe, et les formes où ‑ιων, ‑ιδης, ‑ιος ou encore ‑ιον est précédé
de ‑ιλ(λ)‑ sont bien moins nombreuses que celles où l’on trouve ‑υλ(λ)‑ :
dans notre corpus, on ne trouve que Ὑβριλίδης (LGPN 2, Athènes, 491-
490). Le timbre ‑ι‑ de la voyelle de liaison est probablement lié au fait
que ὕβρις constitue un thème en ‑ι‑, et la coupe morphologique passe
peut-être entre cette voyelle et le ‑λ‑. Quant à l’absence de géminée dans
ce nom, elle est peut-être à attribuer aux problèmes de syllabation posés
par les séquences CR intervocaliques. En tout cas, la convergence entre
cette forme, l’anthroponyme Καχρυλίων mentionné plus haut, et les
formes de gradation du type de μακρότερος, où la syllabation CV̆ .CRV
attendue en attique amène à chaque fois à postuler une séquence de trois
brèves, est remarquable. Peut-être faut-il y voir une indication de ce que
les deux règles morphophonologiques évoquées ici, à savoir la distribu-
tion des géminées dans les hypocoristiques en ‑λος et l’alternance entre
‑ότερος et ‑ώτερος au comparatif, avaient toutes deux cessé d’être pro-
ductives à l’époque classique.

7. Gémination dans les autres hypocoristiques


en ‑(V)λ(λ)ος

La question se pose enfin de savoir si la distribution rythmique de la


gémination que l’on observe dans les hypocoristiques en ‑υλ(λ)ος, et,
dans une moindre mesure, ‑ιλ(λ)ος, vaut également pour les hypocoris-
tiques en ‑λ(λ)ος, ‑αλ(λ)ος, ‑ελ(λ)ος et ‑ολ(λ)ος. Le nombre de formes
à prendre en compte est bien plus réduit que pour les deux catégories
précédentes. Voici les anthroponymes à géminée que nous avons pu
372 audrey mathys

relever 105. Tous pourraient s’analyser comme des hypocoristiques fondés


sur des composés, mais il reste beaucoup d’incertitudes sur le détail des
faits :
—  Θέελλος (HPN 203, LGPN  2, Athènes, 351-350), cf. Θέων
(LGPN 2, Athènes, 384-383 +), Θεώ (LGPN 2, Athènes (étrangère),
ca 325 +) ;
— Θέολλος (HPN 203, LGPN 2, Athènes, f. ive +) ; cf. Θεο‑, par ex.
Θεόλαος (LGPN 2, Athènes, m. ive) ; cf. ci-dessus ;
— Μέγαλλος (HPN 301, LGPN 2, Athènes, ive, une seule autre occur-
rence, en Sicile, cf. LGPN 3a) ; cf. Μεγαλo-, par ex. Μεγαλοκλῆς
(LGPN 2, Kephalè, 305-304 +) ;
—  Νέαλλος (LGPN  2, Paiania, m. ive) ; cf. Νεα‑ (HPN  329) ?, par
ex. Νεαγένης (non attique), mais cf. νεηγενής (Hom.), νεᾱγενής (E.)
« nouveau-né » ; cf. Νέων (LGPN 2, Halai, 386-385 +) ;
— Τέλλος (HPN 420, LGPN 2, Athènes [Hdt. 1.30, etc.], vie 106) ; cf.
Τελε-, τέλης, ‑τέλης ;
— Τίμολλος ? (HPN 247, LGPN 2, Athènes, ΙG I3 1236 bis [Τιμολλο,
à lire Τίμολλος ou Τιμολλώ?], ca 450-425) ; Τῑμο‑, peut-être Τιμόλαος
(pas d’attestation ancienne à Athènes, mais cf. par ex. Τιμολείδης,
LGPN 2, Athènes, f. ve) ; cf. Τίμων (LGPN 2, Athènes, 500-490 +) et
Τιμώ (LGPN 2, Athènes, ive).
Les formes sans géminée sont plus rares, puisque nous n’avons pu
relever que Σθένελος (HPN 398-399, LGPN  2, Athènes, d.  ve 107), qui
semble être un hypocoristique formé sur la base d’un composé en Σθενε‑,
tel que, par exemple Σθενέλαος, qui est rare (deux ex. dans LGPN 3a).
Les données ne permettent pas de conclure avec certitude. Si
Τίμολλος est bien un anthroponyme masculin, alors, on a sans doute un
cas d’hypocoristique à géminée sur base longue, puisque τῑμή « honneur,
estime » et ses dérivés comportent normalement un ‑ι‑ long. À l’inverse,
105. Nous ne tenons pas compte des formes suivantes, dont l’analyse est difficile et qui
ne sont pas citées par Bechtel dans les HPN : Πίτταλος (LGPN 2, Athènes, d. ve +) et
Τρέλλος (LGPN 2, Athènes, ve-ive). Βούταλος (LGPN 2, Oinoe, ve) est peut-être un
hypocoristique fondé sur le nom héroïque Βούτης signalé par Bechtel (HPN 518). Il
faut encore signaler Κύψελος (HPN 583, LGPN 2, Athènes, viie-vie), qui repose sur
un zoonyme, κύψελος « martinet ». On notera cependant que dans toutes les formes
trisyllabiques mentionnées ici, la distribution de la gémination obéit au principe
énoncé plus haut.
106. Une autre occurrence à l’époque classique, cf. LGPN 4.
107. Toutes les autres occurrences datent au plus tôt du iiie s., cf. LGPN 2, 3a, 5a, 5b.
anthroponymes en -λος, -ιλ(λ)ος, -υλ(λ)ος 373

Σθένελος ne présente pas la gémination à laquelle on pourrait s’attendre


dans un anthroponyme dont le radical est une syllabe brève si la règle
prosodique que nous avons énoncée valait pour l’ensemble des hypoco-
ristiques en ‑λος.
Ainsi, seuls les hypocoristiques en ‑ιλ(λ)ος et en ‑υλ(λ)ος paraissent
présenter une distribution relativement stable de la gémination en fonc-
tion de la structure du radical. Partout ailleurs, la fonction de la gémina-
tion apparaît moins clairement. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant
que des échanges se soient produits entre ‑ίλος et ‑ιλλος, ainsi qu’entre
‑ύλος et ‑υλλος, et que la gémination ait fini, dans ces anthroponymes
comme dans tous les autres, par devenir un simple procédé expressif.

Conclusion

L’exemple des anthroponymes à finale ‑λος fait apparaître toute l’am-


biguïté de la situation de l’onomastique par rapport à la morphologie
lexicale en grec ancien. En effet, du fait de leur structure, les composés
anthroponymiques et certains « sobriquets » reflètent parfois très fidèle-
ment le lexique, auquel ils empruntent beaucoup. C’est pourquoi, en ce
qui concerne notamment les formes où ‑λος est un suffixe primaire, ils
ressemblent beaucoup aux adjectifs et aux noms communs présentant le
même suffixe.
Cependant, et c’est là toute la difficulté, dans de nombreux cas, la suf-
fixation des anthroponymes paraît obéir à des règles différentes de celles
que l’on observe dans le lexique. C’est particulièrement visible dans les
hypocoristiques en ‑ιλ(λ)ος et en ‑υλ(λ)ος, qui forment des systèmes suf-
fisamment cohérents pour que l’on puisse considérer qu’il existait de véri-
tables règles morphologiques, peut-être un peu moins strictes que celles
qui prévalent dans le lexique, pour la formation de certains types d’an-
throponymes. Ces règles sont parfois assez différentes de celles que l’on
observe dans le lexique : ainsi, il n’existe pas, à ma connaissance, de caté-
gorie lexicale en grec où la distribution entre un suffixe à géminée et sa
variante sans géminée s’explique par la structure prosodique de la syllabe
radicale. De même, le fait que le choix entre ‑ιλ(λ)ος et ‑υλ(λ)ος dans les
hypocoristiques dérivés d’anthroponymes composés paraisse déterminé
par le vocalisme du radical, ce qui semble imposer d’employer ‑ιλ(λ)ος
lorsque ce radical comporte une voyelle de timbre ‑o‑, est sans parallèle
direct dans le lexique.
374 audrey mathys

Toutefois, il serait sans doute excessif de conclure que l’étude des


hypocoristiques ne peut rien nous apprendre sur le fonctionnement des
suffixes lexicaux proches de ceux que l’on y trouve. En effet, bien que
l’on n’observe pas, dans le lexique, de distribution complémentaire entre
‑ιλ(λ)ος et ‑υλ(λ)ος, on y trouve, en revanche, une certaine affinité entre le
suffixe ‑ίλος et le vocalisme ‑o‑ du radical, sans que cela semble lié à une
spécialisation fonctionnelle de ces formations. Le fait que l’on remarque
la même affinité dans l’anthroponymie suggère que, malgré l’absence
d’unité sémantique ou fonctionnelle des adjectifs et des noms en o‑ιλος
en grec ancien, cette caractéristique formelle n’est peut-être pas le fait
du hasard ; mais on ne peut guère approfondir cette analyse, puisque,
lorsqu’il s’agit d’anthroponymes, on ne peut pas confirmer des hypo-
thèses morphologiques par des arguments sémantiques ou fonctionnels.
En réalité, plutôt que des données supplémentaires ou des solutions
à des problèmes difficiles, il semble que l’apport le plus intéressant de
l’examen des anthroponymes à l’étude de la morphologie lexicale est
que ces formes obligent à considérer d’un œil neuf des difficultés bien
connues, telles que, par exemple, la question de la chronologie des faits
entourant la loi rythmique régissant la forme du suffixe des formes de
gradation secondaires sur la base des adjectifs thématiques, pour lesquels
il apparaît essentiel de distinguer clairement plusieurs étapes (passage
éventuel d’une règle phonologique à une règle morphologique, puis dis-
parition de la règle morphologique). Par ailleurs, il est tout à fait possible
que l’on arrive à des conclusions très différentes de celles que l’on a pro-
posées ici à propos des anthroponymes en ‑ιλ(λ)ος et ‑υλ(λ)ος si l’on pre-
nait en compte les anthroponymes d’une autre région, d’une autre époque
ou encore les anthroponymes féminins en ‑ιλλα, ‑ιλη, ‑υλλα ou ‑υλη, ce
qu’il conviendrait d’ailleurs de faire à l’avenir ; mais l’intérêt des formes
étudiées ici est qu’elles ont permis d’attirer l’attention sur le rôle de la
structure du radical dans le choix de certains suffixes ; et c’est peut-être
là un élément dont il faudrait examiner le rôle dans la morphologie lexi-
cale du grec de façon plus approfondie.

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Les anthroponymes grecs en -ιον :
étude morphologique et sémantique

Florian Réveilhac
Université Paris-Sorbonne
UMR 8167 Orient & Méditerranée

Introduction

Parmi les suffixes qui entrent dans la formation onomastique grecque,


il est une finale qui occupe une place singulière 1 : -ιον, qui représente
le suffixe -(i)i̯ o- 2 avec la désinence neutre. En effet, trouver une finale
de genre inanimé dans des noms de personnes a de quoi surprendre et
ne va pas de soi. C’est précisément à cause de cette hybridité de genre
que des savants au xixe siècle considéraient les anthroponymes en -ιον
typiques des noms de courtisanes. Un siècle plus tard, des chercheurs
comme O. Masson 3 ont démontré que, si ces noms étaient une spéci-
ficité féminine, ils n’étaient pas l’apanage des hétaïres. Des interroga-
tions demeurent néanmoins : on sait que ce suffixe n’apparaît pas dans

1. Ce travail a été initié dans le cadre des recherches que j’ai menées en master sous
la direction du Pr. M. Egetmeyer : qu’il soit ici remercié pour sa disponibilité et les
observations judicieuses qu’il m’a adressées. J’exprime également ma gratitude à
l’égard de Mmes C. Dobias-Lalou, N. Guilleux, A. Mathys, S. Minon et N. Rousseau,
ainsi qu’envers MM. A. Alonso Déniz et L. Dubois, pour leurs remarques précieuses
et les nombreuses références qu’ils m’ont communiquées. Je demeure, néanmoins,
seul responsable des erreurs qui pourraient subsister.
2. Cf. Schwyzer, GG I, p. 470-472 ; P. Monteil, « Les formations grecques diminutives
en -ύδριον », Mélanges de linguistique et de philologie grecques offerts à P. Chan-
traine, Paris, 1972, p. 142 n. 3.
3. Voir, p. ex., O. Masson, « Quelques noms de femmes au neutre dans les inscriptions
attiques », Horos 7, 1989, p.  45-52 (= OGS III, p.  61-68) et « Remarques sur les
noms de femmes en grec », Mus. Helv. 47 (1990), p. 132-133 (= OGS III, p. 96-97).
380 florian réveilha

les noms de personnes grecs à date ancienne, mais à partir de quand est-il
employé exactement ? Et par quels processus est-il entré dans la forma-
tion des anthroponymes ?
Dans un premier temps, nous déterminerons, à partir des données
dont dispose l’onomatologue, à quel moment les noms en -ιον font leur
apparition, quelle est leur répartition et s’ils sont strictement réservés aux
femmes. Nous examinerons ensuite les différents types morphologiques
onomastiques où le suffixe -ιον est représenté ainsi que les suffixes com-
plexes qu’il contribue à former. Dans un dernier temps, nous étudierons
les formations en -ιον dans une perspective sémantique.

1. Apparition et distribution des anthroponymes


en -ιον

Les noms en -ιον ne constituent pas un matériau ancien au sein de


l’anthroponymie grecque, contrairement à d’autres types de formation.
En effet, même si l’on ne saurait l’assurer, il est peu probable qu’ils
soient représentés en mycénien 4, et ils n’apparaissent pas dans les textes
archaïques. Il est donc important de savoir précisément à partir de quel
moment on rencontre une telle finale dans les noms de personnes grecs.

1.1. La finale -(ίδ)ιον dans les noms propres chez Aristophane


Au sein de la littérature, c’est dans la comédie attique que l’on ren-
contre les premiers témoignages de l’emploi de -ιον avec des anthro-
ponymes. Il faut d’emblée nuancer cette affirmation, puisque, chez
Aristophane ces créations relèvent de facteurs pragmatiques : on ne

4. En mycénien, la transcription de ce suffixe serait -jo (noté par le signe 36 du sylla-


baire), or -jo peut tout aussi bien correspondre au grec alphabétique -ίων ou -ιος qui
constituent des finales d’anthroponyme fort courantes. En théorie, donc, rien ne nous
autorise à affirmer que la finale -ion n’était pas employée dans les anthroponymes
mycéniens, mais c’est précisément – comme on le verra – parce qu’elle n’apparaît
pas dans les noms propres du grec alphabétique avant le ve siècle a. C. que des noms
comme na-si-jo (KN B 800.3) ou a‑di‑ri‑jo (KN Do 7613.b) sont interprétés de pré-
férence respectivement comme /Nāsios/ et /Andrios/, ce dernier étant attesté sous la
forme alphabétique Ἄνδριος plusieurs fois depuis le ve s. a. C. (LGPN 5b, notam-
ment) : voir F. Aura Jorro, Diccionario micénico (sous la dir. de F.  R. Adrados),
Madrid, 1983-1995, s.v. na-si-jo et a-di-ri-jo.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 381

rencontre pas à proprement parler de noms de personnes en -ιον, mais


des créations expressives ponctuelles, circonscrites à des situations dra-
matiques spécifiques. Ces créations apparaissent toujours dans le cadre
d’apostrophes et sont par conséquent au vocatif. Elles sont employées
avec une véritable valeur hypocoristique par certains personnages (sou-
vent les mêmes) dans le but de s’attirer les bonnes grâces de leur inter-
locuteur. C’est un Dicéopolis caressant qui, dans Les Acharniens (404),
dérange Euripide en pleine composition en l’appelant Εὐριπίδη, Εὐριπί-
διον, « Euripide, mon petit Euripide ! » ou encore un Strepsiade tendre
dans Les Nuées (79) qui cherche à éveiller son fils Phidippide pour lui
demander une faveur : Φειδιππίδη, Φειδιππίδιον, « Phidippide, Phidip-
pidounet ! ». Ces formations expressives chez Aristophane apparaissent
toujours dans des situations semblables : un personnage s’adresse à un
autre en associant le suffixe diminutif de genre neutre au nom de ce
dernier, en espérant que cette cajolerie lui permettra d’obtenir ce qu’il
désire. Ce désir est parfois charnel, comme lorsque Cinésias, dans Lysis-
trata (906), implore sa Μύρριον, « Myrrhinette » de venir se coucher
auprès de lui, lassé de l’abstinence que celle-ci lui impose.
Il convient de préciser que, dans la plupart de ces formations aris-
tophaniennes en -ιον, c’est en réalité la finale -ίδιον qui est employée
avec la valeur hypocoristique. Ainsi Dionysos, dans Les Grenouilles
tente-t-il d’amadouer Xanthias en l’appelant Ξανθίδιον « Xanthinet »
(582), tandis que Strepsiade, qui désire faire descendre Socrate de sa
corbeille dans Les Nuées, l’apostrophe ainsi : Ὦ Σώκρατες, ὦ Σωκρα-
τίδιον, « Socrate, Socratounet ! » (222-223). Les personnages d’Aristo-
phane, à l’instar du dramaturge lui-même, n’hésitent pas à jouer avec
cette finale -ίδιον : ainsi, Dicéopolis nargue, à la fin des Acharniens,
son ancien adversaire Lamachos en remplaçant ironiquement le suf-
fixe -ίδιον par -ίππιον, créant alors Λαμαχίππιον « Laméquinet » (1206),
afin de railler sa posture de cavalier sans cheval. Dans les Cavaliers, le
Charcutier, dans une apostrophe encore plus mielleuse que les autres à
l’attention de Dèmos, opte pour la concaténation unique -ακ-ίδιον dans
Δημ-ακ-ίδιον (823), au lieu du Δημ-ίδιον utilisé quelques vers au-dessus
(725) ou au-dessous (1199) : on est ici dans la surenchère enjôleuse, que
l’on pourrait rendre par « Populonet » 5. La finale -ίδιον apparaît, dans

5. Je remercie L. Dubois, qui m’a suggéré cette traduction.


382 florian réveilha

des apostrophes, également adjointe à des substantifs exprimant un lien


de parenté : on trouve, par exemple, ὦ παππ-ίδιον « papounet » (πάππας
« papa ») dans Les Cavaliers (1215) ou Les Guêpes (655), ὦ πατρ-ί-
διον dans Les Guêpes (986) avec le sens de « mon petit père » (πατήρ
« père »), ὦδελφ-ίδιον « frérot » (ἀδελφός « frère ») dans Les Gre-
nouilles (60) ou encore ὦ γλυκύτατον τεκν-ίδιον « mon tout doux, mon
petit bambin » (τέκνον « enfant ») dans Lysistrata (889).
Force est de constater que les dérivés hypocoristiques de noms
propres, chez Aristophane, présentent majoritairement la forme -ίδιον du
suffixe. Que penser, dès lors, des noms précédemment cités Εὐριπίδ-ιον
et Φειδιππίδ-ιον ? Faut-il y voir des formes en -ιον originelles déri-
vées d’anthroponymes en -ίδης 6 qui auraient eux aussi été réinterprétés
comme des noms en -ίδιον et qui auraient, par conséquent, contribué à
l’émergence de cette finale secondaire ? Cela n’est pas impossible, mais
peut-être est-il plus plausible d’y voir des haplologies d’*Εὐριπιδ-ίδιον
et de *Φειδιππιδ-ίδιον. Quant à la forme Μύρριον (Lysistrata, 906), citée
précédemment, elle apparaît en face de ὦ γλυκύτατον Μυρριν-ίδιον « ma
très douce Myrrhinette » (872) et semble être le résultat d’une suffixation
en -ιον directement agrégée au radical. Cinésias joue en réalité ici avec
le nom de sa femme, en utilisant le diminutif de l’appellatif à la base de
Μυρρίνη, μύρρα « myrte » : Μύρριον, voire μύρριον, pourrait donc être
traduit par « ma petite baie de myrte ».
Ces exemples témoignent donc parfaitement de la valeur hypoco-
ristique du suffixe -ίδιον parmi des créations onomastiques expressives
motivées par des facteurs pragmatiques. Cette finale de genre neutre s’as-
socie indifféremment à des noms de femmes ou à des noms d’hommes,
avec la même valeur affective. Il n’est pas étonnant de trouver ce type
d’emploi diminutif d’abord dans la langue de la comédie, qui entend se
rapprocher le plus de la langue quotidienne.

6. À propos de ce suffixe dans l’anthroponymie, voir O. Masson, « Trois questions de


dialectologie grecque », Glotta 63 (1965), p. 222-227. On trouve l’emploi du suffixe
dit patronymique -ίδᾱς / -ίδης dans les textes homériques et dans quelques inscrip-
tions chypriotes. Il avait, à l’origine, le sens de « membre du clan de X, de la tribu de
X » et il a pu se spécialiser avec une valeur patronymique (voir M. B. G. Keurentjes,
« The Greek Patronymics in ‑(ί)δας / ‑(ί)δης », Mnemosyne 50 (1997), p. 385-400).
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 383

1.2. Les premières attestations des noms en -ιον


Les premiers anthroponymes en -ιον sont attestés dans des inscrip-
tions datant de la fin du ve s. et de la première moitié du ive s. a. C. Ils
ne sont pas légion proportionnellement à la quantité de noms de cette
époque qui sont répertoriés, puisqu’ils sont seulement au nombre de
cinq 7: Μύννιον (LGPN 2 : Athènes, ve-ive s. a. C.) 8, Μύττιον (LGPN 2 :
Athènes, ve-ive s. a. C.) 9, Κάλλιον (LGPN 2 : Athènes, ve-ive s. a. C. ;
LGPN 1 ? : Salamine, ve-ive s. a. C.) 10, Σελίνιον (LGPN 3b : Thespies,
ve s. a. C.) 11 et Βουβάλιον (LGPN 2 : Athènes, ve a. C. ?) 12. La grande
majorité de ces anthroponymes a été retrouvée au sein d’inscriptions
attiques, sauf Σελίνιον qui provient de Thespies, en Béotie. Dans un frag-
ment de l’historien Idoménée de Lampsaque 13, transmis par Athénée, il
est fait mention d’une certaine Νάννιον (LGPN 2) qui aurait été conduite
dans Athènes en compagnie d’autres hétaïres sur un char attelé par Thé-
mistocle lui‑même. L’anecdote, bien que rapportée par un historien qui a

7. Le nom Φυλάκιον, également répertorié dans LGPN 2 (Athènes, ve-ive s. a. C.), est
loin d’être attesté avec certitude. Il s’agit, en effet, du nom de la personne maudite
dans une tabella defixionis légèrement abîmée (Wissenschaftliche Mitteilungen aus
Bosnien und der Hercegowina 10 [1907], 376 A) et, outre leur nombre incomplet,
ses lettres ont volontairement été écrites dans le désordre, selon l’usage fréquent
dans la defixio attique de cette époque.
8. IG II2 12255 = PA 10472b.
9. IG II2 12220.
10. On connaît une Κάλλιον femme d’Ἀριστοκλῆς, dont le nom apparaît dans plusieurs
inscriptions athéniennes, notamment dans des inventaires de trésoriers d’Athéna et
d’autres dieux, entre la fin du ve s. et le début du ive s. a. C. (IG II2 1400, 42 = cf.
SEG 34, 116 ; IG II2 1401 et SEG 34, 116, 26 ; IG II2 1402 add. = SEG 23, 82, 35).
Le LGPN 1 répertorie aussi un témoignage de Κάλλιον à la même époque, mais à
Salamine, Chypre (ICS 318 b), or il convient d’être prudent parce qu’il s’agit d’une
inscription sur pierre difficile à dater, mais surtout parce qu’elle est rédigée en carac-
tères syllabiques : s’il est vrai que ka-li-yo peut représenter le génitif Καλλίω d’un
nom Κάλλιον, il peut aussi être un nominatif Καλλιώ, voir O. Masson apud V. Kara-
georghis, BCH 87 (1963), p. 355-356.
11. Le nom Σελίνιον est attesté à Thespies, en Béotie, sur un monument funéraire qui
ne porte que ce nom-là (A. Plassart, BCH 82 (1958), p. 11, no 28 = SEG 19, 353 j).
D’après l’alphabet utilisé pour sa rédaction, on déduit qu’il remonte à la fin du ve s.
ou au début du ive s. a. C.
12. On lit ΒΟΥΒΑΛΙΟΝ ΚΑΛΗ au dos d’un fragment de mosaïque retrouvé dans le
quartier de Céramique (AA 1993, p. 139).
13. FGrH 338 F 4 = Athénée 13, 576 c.
384 florian réveilha

vécu entre la fin du ive s. et le début du iiie s. a. C., se rattache à un grand


personnage de la première moitié du ve s.
Au ive s., on compte une soixantaine d’attestations de noms propres
en -ιον dans le deuxième volume du LGPN qui recense les noms de la
région de l’Attique, tandis que seuls moins de vingt se répartissent dans
les autres volumes parus jusqu’à présent 14 : il semble manifeste que c’est
bien Athènes le berceau de cette formation onomastique en -ιον. Il faut
dire un mot également sur les données que fournit l’Égypte lagide pour
notre étude, bien que les anthroponymes grecs de cette région n’aient pas
encore fait l’objet d’une publication par l’équipe du LGPN. Il est certes
fastidieux, à l’heure actuelle, de faire un relevé exhaustif des noms de
cette région, il est néanmoins possible, à partir des outils qui existent 15,
de tirer quelques conclusions pour les documents ptolémaïques : les pre-
miers noms en -ιον attestés dans cette documentation ne semblent pas
remonter au-delà de la fin du ive s., avec le nom de l’Alexandrine Ἀνθρά-
κιον que l’on trouve d’ailleurs dans une inscription athénienne d’environ
330 a. C 16.
Dans les textes littéraires, les noms en -ιον à proprement parler font
leur apparition chez les poètes comiques athéniens du ive s. dont les frag-
ments nous ont été transmis en grand partie dans les Deipnosophistes
d’Athénée. Les personnages qui portent de tels noms sont alors tou-
jours des hétaïres : c’est le cas de Νάννιον, qui semble avoir été inspirée
par une courtisane très célèbre en son temps puisqu’elle a donné son
nom à une pièce d’Eubule 17 et a été mentionnée par Alexis 18, Amphis 19,

14. Il faut souligner que l’on ne connaît aucun anthroponyme en -ιον datant du ive s.
a. C. dans le LGPN 3a, c’est-à-dire dans le volume qui recense les noms des régions
occidentales de la Grèce, la Grande Grèce et la Sicile. Les premiers témoignages de
noms en -ιον dans ce volume remontent au iiie s. a. C. seulement.
15. L’onomatologue qui voudra relever les anthroponymes grecs d’Égypte trouvera une
base de données unique et des moteurs de recherches très utiles sur le site Trisme-
gistos (http://www.trismegistos.org), dont le projet a été initié et est coordonné par
Mark Depauw, de la Katholieke Universiteit Leuven.
16. MDAI(A) 67 (1942), p. 105, no 105, 1.
17. PCG V F 67, cf. Athénée 13, 568 f.
18. PCG II F 225, 1 = Athénée, 13, 587 b.
19. PCG II F 23, 3 = Athénée, 13, 567 b.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 385

Ménandre 20, Antiphanès 21 et Timoclès 22. Un fragment de ce dernier rap-


porte également le nom de Λοπάδιον (LGPN 2) au sein d’une liste d’hé-
taïres 23. Le nom Ναννάριον (LGPN 2) apparaît lui aussi dans une liste
de courtisanes énumérée dans une comédie de Ménandre 24. Ce dernier
aurait, enfin, écrit la pièce intitulée Φάνιον (LGPN 2) d’après un person-
nage féminin éponyme 25.
Puisque les noms en -ιον sont fort bien attestés dans ces textes dra-
matiques de la Comédie Moyenne et de la Comédie Nouvelle attiques,
il n’est pas surprenant d’en trouver des versions latinisées en ‑ium dans
les œuvres de Plaute et de Térence inspirées directement de la Néa et
dont les personnages sont grecs pour la plupart. Le nom de Philaenium
dans l’Asinaria de Plaute nous renvoie ainsi immédiatement à Φιλαίνιον,
attesté dans différentes épigrammes (Posidippe, Epigr., 49, Asclépiade,
Anth. gr., V, 162), et l’anthroponyme Γλυκέριον, présent chez Machon
(= Ath., 13, 582 d), devient Glycerium dans l’Andria de Térence. Pour la
majorité des noms en -ium présents dans la Palliata, l’original grec est
parfaitement attesté mais, même lorsque ce n’est pas le cas (comme par
exemple pour Eleusium, Adelphasium ou Crocotium), on reconstruit sans
mal l’anthroponyme grec correspondant 26.
Attestations littéraires et sources épigraphiques nous offrent, par
conséquent, des indices concordants sur la date d’apparition des noms
de personnes en -ιον : elle se situe entre la fin du ve s. et le début du
ive s. Les premiers témoignages, en outre, proviennent de la Comédie
attique – il n’y a en revanche pas la moindre trace de noms en -ιον dans
la comédie dorienne de Sicile (cf. PCG I) – et d’inscriptions majoritaire-
ment attiques elles aussi : on peut donc en déduire que le berceau de cette
formation onomastique était la région d’Athènes.

20. PCG VI 2 F 414 = Athénée, 13, 587 b.


21. Athénée, 13, 587 b.
22. PCG VII F 27, 2 = Athénée, 13, 567 e.
23. PCG VII F 27, 4 = Athénée, 13, 567 e.
24. CAF II, 476 F 2.
25. PCG VI 2 F 388-393 = Athénée, 13, 567 c.
26. O. Masson, « Nouvelles notes d’anthroponymie grecque », ZPE 119 (1997), p. 63
(= OGS III, p. 270).
386 florian réveilha

1.3. Développement et expansion des anthroponymes en ‑ιον


Ils sont très bien représentés au sein des textes littéraires, encore au
iiie s. chez les comiques comme Machon, par exemple, qui mentionne
une Γναθαίνιον (LGPN 2), hétaïre petite-fille de Γνάθαινα 27. Même
hors de la comédie, il existe d’autres exemples à partir du iiie s., notam-
ment chez des poètes, dont certaines épigrammes sont regroupées dans
l’Anthologie grecque : Βοΐσκιον chez Léonidas de Tarente 28 et Νάννιον
chez Asclépiade 29 pour le iiie s., Καλλίστιον, Τιμάριον et Φάνιον chez
Méléagre 30, au ier s. a. C.
Les statistiques fournies par les attestations épigraphiques confirment
le développement des anthroponymes en -ιον et -ιν dans l’ensemble
du monde hellénique. Pour l’époque hellénistique, on en relève un peu
moins de 150 à Athènes, une trentaine sur les côtes ioniennes d’Asie
Mineure et en Égypte, une vingtaine en Béotie et à Chypre, et une dizaine
en Thessalie. Il convient de dire un mot sur la forme -ιν qu’a pu prendre
notre suffixe : cette forme érodée de -ιον se rencontre d’abord dans les
papyrus égyptiens à partir du iiie s. a. C., puis dans les inscriptions dès le
iie s. a. C. Probablement due à une modification de l’accent, elle est au
départ le résultat d’un phénomène phonétique populaire 31. On trouve à la
même époque la forme réduite parallèle -ις pour -ιος.
Les noms en -ιον/-ιν sont bien représentés également durant les pre-
miers siècles de notre ère dans les documents d’époque impériale, sur
l’ensemble des aires hellénophones. Ils apparaissent aussi en grand
nombre dans des cognomina latins, avec une finale en -ion, en -in ou
en -ium : le nom Γλυκέριον (LGPN 2, 5a) apparaît ainsi latinisé en

27. Machon, fr. 17 = Athénée, 13, 581 a. Γναθαίνιον est attesté ensuite chez Plutarque
(Paul-Émile, 8) comme nom d’une couturière.
28. Anthologie grecque 6, 289, 1.
29. Op. cit., 5, 207, 1.
30. Op. cit., 5, 192, 1 ; 5, 96, 1 ; 12, 53, 4 et 82, 6.
31. Sur cette question, voir D. J. Georgacas, « On the Nominal Endings -ις, -ιν, in
Later Greek », Classical Philology 43 (1948), p. 243-260 ainsi que J. A. Berenguer
Sánchez et J. Rodríguez Somolinos, « Sur la flexion nominale en -ις, -ιν », dans
B. Palme (éd.), Akten des 23. Internationalen Papyrologenkongresses, Wien, 22.-28.
Juli 2001, Vienne, 2007, p. 39-48.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 387

Glycerion 32 et en Glycerium 33, Φιλημάτιον devient Philematium 34 et


Philematin 35. Il existe aussi dans l’épigraphie latine des noms féminins
en -iō, -iōnis, formation habituellement réservée aux noms masculins,
tout comme celle en -ίων pour le grec. Il s’agit certainement d’une autre
évolution du suffixe ‑ιον : d’après F. Biville, ces formes ont pour ori-
gine ‑io et la perte rapide des quantités vocaliques en finale. Après un
élargissement en nasale, leur flexion s’est ensuite superposée à celle des
masculins en -iō, -iōnis, en perdant par conséquent son appartenance au
genre neutre 36. C’est ainsi que l’on rencontre des femmes portant comme
cognomen Pilematio ou Selenio, correspondant respectivement à Φιλη-
μάτιον (cf. LGPN 1, 2, 3a, 4, 5a et b) et Σελένιον (? LGPN 1 : Lebena,
ier a. C.) 37, parfois même, comme le relevait O. Masson 38, une certaine
confusion demeure et une même femme est désignée à la fois par Phile-
matio puis par Philematium 39.

1.4. Les noms en -ιον : une spécificité féminine ?


Si, chez Aristophane, le suffixe hypocoristique est associé indifférem-
ment à des noms de personnages aussi bien masculins que féminins, il
suffit de regarder rapidement les attestations des anthroponymes en -ιον
pour constater qu’ils désignent très souvent des femmes : qu’en est-il
réellement ? Ce suffixe de genre neutre constitue-t-il un domaine réservé
aux individus de sexe féminin ?
Il est indéniable que dans les textes que nous a transmis Athénée,
tous les noms en -ιον se rapportent non seulement à des femmes, mais
plus spécialement à des courtisanes : les Νάννιον, Λοπάδιον, Γναθαίνιον,

32. Saeniae ᴐ. l. Glycerion (CIL VI, 9168).


33. CIL VI, 19049 = ICUR 13549.
34. Venuleia P. P. l. Philematium (CIL VI, 1852), Fulvia ᴐ. l. Philematium (NSA 1925,
52) et Mutia T. l. Philematium (CIL VI, 38648).
35. Sulpicia Philematin (CIL VI, 26992).
36. F. Biville, « Le devenir latin des neutres grecs en -ŏn. Genre, flexion, dérivation »,
Lingua Posnaniensis 33 (1993), p. 19-20. Déjà A. Zimmerman considérait que les
cognomina féminins en -io représentaient des anthroponymes grecs en -ιον : « Die
griechischen Personennamen auf -ιον und ihre Entsprechungen im Latein », Philo-
logus 64 [N. F. 18] (1905), p. 499-505.
37. M. Guarducci, Inscriptiones Creticae, Rome, 1935-1950, p. 175, no 39.
38. O. Masson, « Nouvelles notes », p. 67 (= OGS III, p. 274).
39. CIL VI 9499b = CIL I2 1221 (période Sylla-César).
388 florian réveilha

Φάνιον et autres Καλλίστιον sont des personnages dont on mentionne


les histoires au cours d’une conversation sur les plaisirs de l’amour. Il
ne faut pas en conclure – comme le firent certains savants du xixe siècle
– que de tels noms étaient strictement réservés aux hétaïres. On connaît
du reste, grâce à d’autres textes, des femmes qui portent un nom en -ιον
et qui ne sont pas des courtisanes pour autant : c’est le cas de la nourrice
Γναθαίνιον mentionnée par Plutarque (Paul-Émile, 8) ou de Λυκαίνιον
qui, avec son époux Εὔπολις, fait l’objet d’une épigramme funéraire que
nous a transmise l’Anthologie Palatine (VII, 298). Les attestations litté-
raires semblent donc confirmer que la finale -ιον est typiquement fémi-
nine, puisque l’on ne trouve aucun exemple d’un tel nom porté par un
homme. O. Masson 40 considérait d’ailleurs, à juste titre, que l’emploi du
genre neutre était une « originalité de l’onomastique féminine ». Mais
cela signifie-t-il pour autant qu’il n’existe aucune nom en -ιον porté par
un homme 41 ?
Des personnages masculins portent, chez Plaute, des noms en -ium
qui reflètent des anthroponymes grecs en -ιον. Ces deux noms, Paegnium
et Pinacium, qui apparaissent chacun dans deux comédies, avaient déjà
attiré, en 1997 l’attention d’O. Masson 42, qui en avait proposé une étude
approfondie. Le premier, qui correspond au nom *Παίγνιον, répond au
substantif παίγνιον qui signifie « jouet », mais dont le sens a pu aller
jusqu’à « objet d’agrément » et qui est même attesté chez Plutarque
(Antoine, 59) avec le sens de « mignon ». Pinacium représente *Πινά-
κιον, qui n’est pas attesté sous cette forme, mais que l’on peut rapprocher
du nom masculin Πίναξ retrouvé dans une inscription d’époque impé-
riale en Béotie 43. Selon Masson, l’anthroponyme est un sobriquet formé
à partir du diminutif πινάκιον pour son sens de « petit tableau », d’où
« belle image, belle figure ». L’une et l’autre de ces formes constituent le
nom de jeunes esclaves masculins, en se référant à leur beauté et à leur
fonction d’agrément.

40. O. Masson, « Remarques sur les noms de femme en grec », Mus. Helv. 47 (1990),
p. 132 (= OGS III, p. 96).
41. K. Stüber, dans K. Stüber, K., T. Zehnder et U. Remmer, Indogermanische Frauen-
namen, Heidelberg, 2009, p. 102, prétend, par exemple, qu’aucun anthroponyme
masculin en -ιον n’a jamais été attesté avec certitude.
42. O. Masson, « Nouvelles notes », p. 63-64 (= OGS III, p. 270-271).
43. IG VII, 2076.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 389

Parmi les noms en -ιον attestés dans les papyrus égyptiens, il s’en
trouve quelques uns au iiie siècle a. C. qui sont associés à des hommes
par les papyrologues, sans que cela ne se justifie toujours. Ainsi, Ἐλά-
φιον 44 et Ἐμπόριον 45 sont-ils recensés dans la Prosopographia Ptole-
maica 46 comme des noms d’hommes, sans que le contexte ne permette
d’affirmer qu’ils se réfèrent bien à des individus de sexe masculin, dans
la mesure où d’autres femmes sont mentionnées dans les mêmes listes.
Le cas de Σίμιον 47, qui apparaît lui aussi dans un papyrus du milieu du iiie
s. a. C. et tenu pour masculin dans la Prosopographia Ptolemaica, doit
être considéré avec prudence puisque c’est à partir du génitif Σιμίου que
le nom a été recensé. Or une telle forme constitue plus probablement le
génitif de l’anthroponyme Σιμίας, bien attesté depuis le vie s. a. C.
Dans l’épigraphie, les exemples de noms masculins en -ιον sont rares,
mais ils existent : O. Masson en avait relevé six 48. Sur un graffite égyp-
tien 49 apparaît le nom d’un κίναιδος, Στρούθι(o)ν, écrit Στρούθειν. Or le
cinède, par sa fonction même, possède des caractéristiques éminemment
féminines et, de fait, Στρούθιον, qui appartient au groupe des diminu-
tifs formés sur ὁ στρουθός « le moineau », est connu comme nom d’une
Byzantine du ier s. p. C. (LGPN 4) 50. On peut ajouter un autre témoi-
gnage égyptien de ce nom porté par un homme : Σαραπίων Κεφαλᾶ ἐπι-
καλ(ούμενος) Στρούθειν 51. Il constitue, donc, dans ce dernier exemple, le
surnom d’un homme. À Rome, on trouve trois noms d’hommes en -ιον,
absents du LGPN 3a : Ikadium 52, correspondant à une forme *Εἰκάδιον
non attestée, mais dérivée du numéral « vingt », probablement en réfé-
rence au vingtième jour du mois ; Βούδιον apparaît dans une épitaphe 53
44. P. Cairo Zen. 3. 59333, au datif (10 et 49 : Ἐλαφίωι) et au génitif (56 : Ἐλαφίου).
45. PP 14358 (P. Lille 1. 27, 8).
46. La base de données est accessible en ligne à l’adresse suivante : http://prosptol.arts.
kuleuven.ac.be/pp.html.
47. PP 10476 (P. Cairo Zen. 5. 59825, 13), au génitif (Σιμίου).
48. O. Masson, « Nouvelles notes », p. 64-66 (= OGS III, p. 271-273).
49. IPhilae 155 = CIG 4926.
50. IByz. 146 = N. Fıratlı, L. Robert, Les stèles funéraires de Byzance gréco-romaine,
Paris, 1964, p. 116 no 193.
51. P.Petaus 26, du iiie p. C. (cf. commentaire des éditeurs, p. 146-147, avec bibliogra-
phie). Je remercie A. Alonso Déniz de m’avoir communiqué cette référence.
52. CIL VI, 14211. Nom incontestablement masculin, en dépit des doutes de Solin,
GPNR, p. 1035 (cf. déjà dans Arctos 19 [1985], p. 209) : cf. O. Masson, « Nouvelles
notes », p. 65.
53. IGUR 950.
390 florian réveilha

associé au surnom ὁ καὶ Ταῦρος pour un garçon de 15 ans et peut-être


dans une liste de mystes dionysiaques 54 ; on trouve dans cette même
liste l’hapax Σκίνδιον 55, diminutif à rapprocher de Σκίνδαξ, retrouvé à
Amphipolis, sobriquet expressif en -αξ qui a d’ailleurs servi de base au
verbe obscène σκινδακίσαι « futuere » 56. Μαμμάριον (LGPN 1 : Délos,
287 a. C.) qui apparaît dans une liste d’offrandes délienne 57 pourrait
constituer le surnom étonnant (« Petite Mère ») d’un étranger nommé
Φίλιππος, mais peut-être ne s’agit-il pas d’un nom propre 58. La dernière
forme mentionnée par O. Masson se trouve dans une épitaphe d’Héraclée
du Pont 59 : Ἀπολλώνι(ο)ς ὁ καὶ Μόσχι(ο)ν 60.
En somme, les anthroponymes en -ιον ne sont pas exclusivement
féminins, mais leur emploi comme noms d’hommes est minoritaire. Ils
constituent, la plupart du temps, soit des noms de jeunes esclaves carac-
térisés par une fonction ou des traits féminins, soit des surnoms à pro-
prement parler.

2. Typologie des anthroponymes en -ιον

La typologie des anthroponymes en -ιον s’articule autour de deux


axes principaux : en observant, d’un côté, s’ils constituent des diminutifs
de noms composés ou de noms simples et en étudiant, d’un autre côté, la
forme même de la finale où apparaît le suffixe -ιον.

2.1. Diminutifs de noms composés et de noms simples


Les noms en -ιον se répartissent entre les diminutifs de composés
(Kurznamen) et ceux de noms simples principalement représentés par les
sobriquets (Kosenamen et Spitznamen).

54. IGUR 160, II C, 28.


55. Ibid., II B, 30.
56. DELG, s.v. et J. Taillardat, « Le groupe familier grec : κινδάνω, (σ)κίδαρος,
ὀστρακίνδα, κίνδῡνος », REA 58 (1956), p. 189-194.
57. IG XI 2, 155a, 8.
58. Pour le détail, voir O. Masson, « Nouvelles notes », p. 66.
59. IHeraclea 18 ; cf. BE 1995, no 168.
60. Sur le nom Μόσχι(ο)ν, cf. 3.1. Noms d’animaux.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 391

2.1.1. Les diminutifs de noms composés


Pour les diminutifs de noms composés, on se fondera sur la typologie
morphologique que R.  Schmitt a proposée pour l’onomastique indo-
européenne 61. Étant donné que les formes qui nous intéressent ici pré-
sentent toutes le suffixe -ιον, elles appartiennent toutes à la sous-classe
des hypocoristiques. Elles sont donc classées ainsi :
b2) Premier membre du composé sans second membre et avec suffixe
-ιον : p. ex. Αἰνήσ‑ιον (LGPN 1, 2, 3b) sur Αἰνησι- 62 (cf. Αἰνησι-κράτη),
Μνήσ-ιον (LGPN 1) sur Μνησι- 63 (cf.  Μνησι-στράτη), Πράξ-ιον
(LGPN 3b) sur Πραξι- 64 (cf. Πραξι-νόη), Πύθ-ιον (LGPN 1, 2, 5b) sur
Πυθο- 65 (cf. Πυθο-νίκη), Στράτ-ιον 66 (LGPN 2) sur Στρατο‑ 67 (cf. Στρα-
τό-κλεια), Τείσ-ιον (LGPN 1) sur Τεισι- 68 (cf. Τεισι-κράτεια), Φάν-ιον
(LGPN 1, 2, 3a) sur Φανο- 69 (cf. Φανο-στράτη) ou encore Φείδ-ιον
(LGPN 3a et b) sur Φειδ‑ 70 (Φειδο-στράτη).
b4) Premier membre du composé avec troncation du second membre
et avec suffixe -ιον : p. ex. Ξεν-άγ-ιον (LGPN 1) sur Ξεν-αγόρας 71, Τιμ-
άγ-ιον (LGPN 1) sur Τιμ-αγ° 72 (cf. Τιμ-αγόρα), Τιμό-κ-ιον (LGPN 1, 5b)

61. R. Schmitt, « Morphologie der Namen: Vollnamen und Kurznamen bzw. Kosenamen
im Indogermanischen », dans Namenforschung I, p. 425.
62. Bechtel, HPN 26-27.
63. Bechtel, HPN 319-321.
64. Bechtel, HPN 382-383.
65. Bechtel, HPN 389-390.
66. Le nom Στράτιον peut aussi entrer dans le type c2, c’est-à-dire celui des diminutifs
formés à partir du second membre du composé : les noms en -στράτη ou -στρατος
sont fort bien représentés eux aussi.
67. Bechtel, HPN 408-411.
68. Bechtel, HPN 419-420.
69. Bechtel, HPN 438-440.
70. Bechtel, HPN 443-444.
71. Bechtel, HPN 339. L’origine Ξεναγόρας de Ξενάγιον est suggérée par le nombre
important des témoignages de ce nom (une quarantaine depuis le ive s. a. C., répartis
entre LGPN 1, 2, 3A, 3B et 5A), tandis qu’il n’existe, à notre connaissance, aucun
exemple de composé en Ξεν-αγ- dont le second membre représenterait le radical de
ἄγω.
72. Bechtel, HPN 426.
392 florian réveilha

sur Τιμο-κ° 73 (cf. Τιμό-κλεια, Τιμο-κράτη), Φιλ-αίν-ιον (LGPN 5a) sur


Φιλ-αινέτη 74.
c2) Pas de premier membre du composé, second membre avec suf-
fixe -ιον : p. ex. Μόρφ-ιον (LGPN 2) sur -μορφος 75 (cf. Εὔ-μορφος) ou
Τρόπ-ιον (LGPN 5a) sur -τροπος (cf. Εὔ-τροπος).
Le type c4, c’est-à-dire celui d’un diminutif qui présente un vestige
du premier membre du composé avec le second membre et un suffixe,
n’est pas représenté en grec. En revanche, comme Schmitt, dans son
classement, s’intéresse particulièrement aux formes tronquées, avec ou
sans suffixe, et qu’il n’a pas défini de type « Premier membre et second
membre du composé avec suffixe », une nouvelle catégorie doit être éta-
blie pour ceux-ci, soit :
d) Λυκ-αίθ-ιον (LGPN  1, 5b) sur Λύκ-αιθος 76, et Φιλ-αίθ-ιον
(LGPN 1) sur Φιλ-αίθα ou encore Ζω-βίττ-ιον (LGPN 1) sur Ζω-βί-τας
(LGPN 5a) 77, avec gémination expressive 78.
2.1.2. Les diminutifs de noms simples
L’autre grande catégorie de noms en -ιον est constituée de diminutifs
de noms simples, à l’allure en majorité de surnoms ou de sobriquets. Les
bases lexicales de ces anthroponymes se caractérisent par leur grande
variété sémantique 79, puisque l’on trouve :
♦♦ des théonymes : Ἀπέλλ-ιν (LGPN 3b), Ἀρτέμ-ιον (LGPN 5b), Διο-
νύσ-ιον (LGPN 3a), Ἕρμ-ιον (LGPN 1), etc. ;
♦♦ des noms de parties du corps : Γνάθ-ιον (LGPN 1, 2) sur γνάθος
« mâchoire, joues » ;
♦♦ des adjectifs dénotant une particularité physique : Μίκ(κ)-ιον
(LGPN 2) sur μικκός « petit », Πλάτ-ιον (LGPN 1) sur πλατύς
« large » ou encore Αἴσχρ-ιον (LGPN 2) sur αἰσχρός « laid » ;

73. Bechtel, HPN 427.


74. Aristophane, Ec., 41.
75. Bechtel, HPN 324.
76. Bechtel, HPN 289.
77. Éphèse, ca 380-370 a. C.
78. Sur la gémination expressive, voir O. Masson, « Géminations expressives dans
l’anthroponymie grecque », BSL 81 (1986), p. 217-229 (= OGS II, p. 549-561).
79. Une telle diversité lexicale apparaît déjà dans le chapitre consacré aux anthroponymes
féminins non composés chez Bechtel, AF, p. 40-140.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 393

♦♦ d’autres se référant à un trait de mœurs : Μεθ-ύλλ-ιον (LGPN 5a)


sur μέθη « ivresse » ;
♦♦ certains indiquant l’origine géographique : Ἑλλάδ-ιον (LGPN 5a)
ou Σύρ-ιον (LGPN 2, 3a) ;
♦♦ des noms d’animaux : Λυκαίν-ιον (LGPN 1) sur λύκαινα « louve »,
Στρούθ-ιον (LGPN 4) sur στρουθός « moineau », Φάττ-ιον (LGPN
3b) sur φάττα « le pigeon ramier » ou encore Ἐλάφιον (LGPN 1,
3a) sur ἔλαφος « cerf, biche » ;
♦♦ des noms de végétaux : Ἀμπέλ-ιον (LGPN 1, 3a, 5a) sur ἄμπελος
« vigne », Μύρτ-ιον (LGPN 2, 5a) sur μύρτος « myrte », Ῥόδιον
(LGPN 1, 2, 3a et b, 4) sur ῥόδον « rose » ;
♦♦ des noms de minéraux : Μαρμάρ-ιον (LGPN 5a) sur μάρμαρος
« marbre », Ὀνύχ-ιον (LGPN 2) sur ὄνυξ « onyx » ou encore
Ἀνθράκ-ιον (LGPN 1, 2, 4) sur ἄνθραξ « charbon ».

2.2. Les concaténations avec -ιον


Dans certains cas, -ιον constitue le dernier élément de finales com-
plexes, qui ne se laissent pas analyser aisément car elles ont souvent des
origines très diverses. Dans le cadre d’une étude systématique des suf-
fixes employés dans la formation des anthroponymes, on est contraint
d’isoler tous les éléments qui constituent des morphèmes suffixaux.
Dans le cas du nom Σωτηρίδιον (LGPN 3a : Syracuse, iiie-ve p. C.) 80,
par exemple, il faut segmenter ainsi Σω-τηρ-ιδ-ιο-ν, en dégageant les
différents morphèmes en jeu : Σω- constitue la base, -τηρ-, -ιδ- et -ιο-,
des suffixes dérivationnels et ‑ν, un suffixe flexionnel 81. Un tel décou-
page est certes commode, puisqu’il permet de repérer immédiatement
chacun des éléments qui forment l’anthroponyme, mais, en ne rendant
pas compte des étapes de cette formation, il peut conduire à des inter-
prétations fallacieuses. Pour Σωτηρίδιον, par exemple, on est gêné de
considérer le suffixe -τηρ- comme un suffixe anthroponymique à part
entière, bien qu’il entre dans la formation d’autres noms de personnes
comme Μνήστηρ / Μνᾱ́στηρ, dans la mesure où il constitue un suffixe de
nom d’agent employé dans la dérivation d’appellatifs, comme μνηστήρ
« prétendant » (sur le radical de μνάομαι « rechercher en mariage »),
80. Oikoumene, Catane, 1964, p. 605, no 3.
81. L’analyse de ce nom en diachronie est développée un peu plus bas.
394 florian réveilha

qui, par la suite, ont pu être employés comme noms propres, pouvant
servir eux-mêmes de bases de dérivation anthroponymique, comme en
témoigne Μνᾱστήρ-ᾱς (LGPN 1 : Itanos, iie a. C.). Il est donc essen-
tiel d’adopter, conjointement à la segmentation morphologique de nos
formes, une perspective diachronique dans l’étude des finales complexes
afin de déterminer les procédés qui ont conduit à l’emploi des suffixes
qui sont à l’œuvre et à leurs réinterprétations éventuelles. Nous tâche-
rons donc de déterminer avec précision les différentes phases de créa-
tion des finales complexes en -ιον, en nous appuyant, autant que faire
se peut, sur la chronologie des attestations, afin d’indiquer si la finale
contenue dans tel anthroponyme est issue d’une véritable concaténation
– lorsque l’étape de dérivation précédente nous est connue (par exemple,
dans le cas de Σωτηρίδιον, Σωτηρ-ίδης/-ίδᾱς) – ou si elle est simplement
le résultat d’une réinterprétation morphologique ayant entraîné la créa-
tion d’un morphème renforcé.
2.2.1. La finale -ίδιον
Parmi les anthroponymes en -ίδιον, il en est un, Μείδιον (LGPN 2 :
Athènes, ive ‑ iiie a. C.) 82, qui correspond au diminutif en -ιον d’un com-
posé à premier membre Μειδ(ι)- 83, formé sur le radical que l’on trouve
dans le verbe μειδιάω « sourire » et dans le substantif τὸ μεῖδος « sou-
rire ». La séquence -ιδ- est donc, dans le cas de Μείδ-ιον, constitutive de
la base, issue de la racine *smeid- 84.
Les anthroponymes Νικίδιον (LGPN 1, 3b) et Σωτηρίδιον (LGPN
3a : Syracuse, iiie-ve p. C.), quant à eux, ont de bonnes chances de com-
porter une réelle chaîne suffixale -ίδ-ιον, dont le premier élément forme
le suffixe dit patronymique -ίδᾱς/-ίδης 85. Νικ-ίδιον est attesté quatre
fois : d’abord comme nom d’une hétaïre de l’époque classique 86, puis,
entre le iiie et le iie s. a. C., dans deux inscriptions attiques 87 et une béo-
tienne 88. Ces deux noms sont probablement le résultat d’une dérivation

82. IG II2 1534 A, 64.


83. HPN 302.
84. Sur la forme du radical *smei̯ d- et, notamment, la dentale qui se trouve à la fin, voir
DELG s.v. μειδιάω.
85. Cf. supra, note 6.
86. Diogène Laërce 10, 7.
87. IG II210204 et SEMA 1415.
88. IOrop. 321, 6.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 395

secondaire à partir des noms masculins Νικ-ίδᾱς / Νικ-ίδης 89 et Σωτηρ-


ίδᾱς / Σωτηρ-ίδης 90, très bien représentés l’un et l’autre. On ne manquera
pas de noter que le nom Σωτηρίδιον est le résultat d’une concaténation
de trois suffixes qui se sont adjoints à différents stades : sur le radical
σω- (< σαϝο-) a d’abord été formé le nom d’agent σω-τήρ 91 « sauveur »,
employé comme épithète divine, notamment de Zeus, et, à partir de là 92,
il a intégré le répertoire onomastique, où il est abondamment représenté
puisque l’on en compte 79 attestations selon les statistiques du site Name
Search du LGPN (vol. 1 à 5a). Comme anthroponyme, Σωτήρ a ensuite
été dérivé au moyen du suffixe -ίδᾱς / ‑ίδης. À la terminaison -ᾱς / -ης,
typique du masculin, de la forme Σωτηρ-ίδᾱς / Σωτηρ-ίδης, a ensuite été
substitué le suffixe -ιον, typique du genre féminin quoique non exclusif à
celui-ci, pour aboutir au nom Σωτηρίδ-ιον. Les deux dernières étapes de
ce processus peuvent également expliquer la formation de Νικ-ίδ-ιον à
partir de l’un des nombreux composés à premier membre Νικο- ou Νικᾱ-
ou à second membre -νίκη 93. Pour féminiser les noms en -ίδᾱς / -ίδης,
parallèlement à -ιον, le suffixe -ώ 94 a pu être employé, comme l’atteste
le nom Νικ-ιδ-ώ 95.
Certains noms en -ίδιον sont en réalité des noms simples reposant
sur des substantifs : la dérivation est alors lexicale. Cela est illustré par
l’anthroponyme Βο-ΐδιον (LGPN 1, 2, 3b, 4, 5a) 96 correspondant à l’ap-
pellatif βο-ΐδιον « petit bœuf » 97 (βοῦς) et par Ἐγχειρίδιον (LGPN 3a :
Venusia, ier p. C.) 98, sobriquet qui reflète ἐγχειρίδιον « poignard ». On

89. Νικίδης se rencontre dès la fin du vie s. a. C., à Thasos, par exemple : IG XII (8) 275,
9.
90. Les premières attestations de Σωτηρίδης remontent au ve s. a. C., à Athènes notam-
ment : IG I3 1335 et IG II2 12745.
91. Sur cet appellatif, voir É. Benveniste, Noms d’agent et noms d’action en indo-euro-
péen, Paris, 1948, p. 50-51.
92. Bechtel, HPN 570.
93. Bechtel, HPN 331-335.
94. Sur les différentes sources de -ιδώ, voir plus bas.
95. Attesté dans une inscription arcadienne du ive ou du iiie s. a. C. : A. K. Orlandos,
Alipheira, Athènes, 1968, p. 237.
96. Il existe 21 attestations de Βοΐδιον, dont la moitié datent du ive s. a. C. On connaît
même une Tonneia Boedion à Rome, au ier s. p. C. (Solin, GPNR, 2.1125).
97. Aristote, H. A., 3, 21, 2.
98. Titia Enchiridium, nom d’une affranchie : Rend. Linc. 29 (1974), p. 629, no 38 =
Eph. Ep. VIII 85.
396 florian réveilha

notera que, pour les deux substantifs, la finale -ίδιον n’a pas tout à fait
la même origine ni la même valeur sémantique : dans βοΐδιον, on per-
çoit nettement le sens diminutif, tandis qu’ἐγχειρίδιον n’est autre que
la forme de neutre substantivée de l’adjectif ἐγχειρίδιος « que l’on tient
dans la main » 99.
La finale -ίδιον a pu être utilisée dans la formation des noms propres,
avec la valeur hypocoristique qu’elle pouvait dénoter déjà dans le lexique,
où ses trois sources principales ont été étudiées en détail par Petersen 100 :
— un certain nombre d’appellatifs en -ίδιον résultent de la substan-
tivation d’adjectifs en -ιδιο-, déjà présents chez Homère et qui consti-
tuent originellement des composés hypostatiques désignant l’individu
ou l’objet en fonction de l’endroit où il se trouve : ἐγχειρίδιος « dans la
main », ἐπιθαλασσίδιος « à la mer », etc.
— pour quelques noms en -ίδιον, le -ι- est en réalité à rattacher à la
base, et ils constituent donc à proprement parler des dérivés en -διον,
comme χωρί-διον « petit domaine » formé sur χωρίον, mais réinterprété
comme χωρ-ίδιον, autrement dit comme un dérivé en -ίδιον de χώρα ou
de χῶρος. Bien que l’existence d’un suffixe -διον ait été débattue, elle ne
fait aucun doute pour Petersen 101, qui considère même ce dernier comme
l’une des plus anciennes finales complexes en -ιον, puisque βού-διον
(βοῦς) est attesté dès le ve s. a. C. chez Hermippos (fr. 36, 2). Les ori-
gines de -διον sont diverses : il est tiré de formes substantivées d’adjectifs
en -διος, comme ἀμφάδιος « qui se fait ouvertement », lui-même dérivé
de l’adverbe ἀμφαδόν « ouvertement », mais il y a également plusieurs
noms en -διον tirés de monosyllaβes, comme βού-διον « petit bœuf » sur
βούς ou γή-διον « petit domaine » sur γή. Ces substantifs ont été créés
sur le modèle de παιδ-ίον, réinterprété en παι-δίον, notamment dans le
cadre de formules au vocatif lorsqu’il était associé à la forme du subs-
tantif simple (παῖ, παιδίον « fils, fiston » dans Les Nuées, 132 ; παιδίον,
παῖ « fiston, fils », dans Les Grenouilles, 37), puisque la dentale finale du

99. P. Chantraine, Formation, p. 68-69 ; sur le suffixe -ιδιο- dans les composés hyposta-
tiques et la difficulté d’établir l’origine de la dentale, voir N. Rousseau, Du syntagme
au lexique : sur la composition en grec ancien, Paris, 2016, p. 84 sq.
100. W. Petersen, Greek Diminutives in -ιον, Weimar, 1910, p. 221-222.
101. Ibid., p. 212-220.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 397

thème 102 n’était plus visible dans παῖ 103. Le suffixe complexe -διον pré-
sentait l’avantage d’éviter l’hiatus qu’aurait nécessairement induit l’ad-
jonction du suffixe ‑ιον à des bases possédant une finale vocalique.
— la source la plus féconde de termes en -ίδιον est évidemment celle
des dérivés en ‑ιον sur des thèmes en -ιδ-, comme σπυρίδ-ιον (Les Achar-
niens, 453 et 469) ou ἀσπίδ-ιον (Hermipp. fr. 15) formés respectivement
sur σπυρίς « corbeille, panier » et ἀσπίς « bouclier », qui sont eux-mêmes
des noms d’instrument dérivés au moyen du suffixe -ιδ-.
Une fois constituée, la finale complexe -ίδιον est devenue un mor-
phème qui a possédé différentes valeurs sémantiques, dont, principa-
lement, celles de diminutif et d’hypocoristique, équivalent ainsi à -ιον,
qu’elle a d’ailleurs pu suppléer dans la formation de diminutifs de subs-
tantifs lorsqu’il était impossible d’employer ce dernier : puisque -ιον ne
pouvait pas servir à former le diminutif d’ἀργύριον « monnaie d’argent »,
attendu que ce substantif était déjà lui-même un dérivé en -ιον d’ἄργυρος,
le diminutif ἀργυρ-ίδιον « petite somme d’argent » (Ploutos, 147) a pu
être créé et, puisque πάτρ-ιον, dérivé de πατήρ, existait déjà avec le sens
de « coutume ancestrale », l’hypocoristique de nom du père a été formé
grâce à la finale -ίδιον en πατρ-ίδιον. Comme cela a été remarqué précé-
demment, -ίδιον a connu une grande fortune comme finale d’hypocoris-
tique dans la langue familière dès l’époque classique, associée aussi bien
à des noms de parenté qu’à des noms de personnes, comme en témoigne
la Comédie Ancienne 104.
La finale -ιδώ. — À l’instar de -ίδιον, la finale complexe -ιδώ connaît,
en diachronie, plusieurs origines. Dans le cas du récent Ἐλπιδώ 105, on a
affaire à un nom en -ώ, formé sur le nom Ἐλπίς 106, issu de l’appellatif
102. Bien que la forme du radical sur lequel repose παῖς ne soit pas reconstruite de façon
assurée (voir DELG s.v. et CEG 2, 1997, M. Egetmeyer), la séquence -ιδ- du thème
παιδ- est secondaire.
103. W. Petersen, Greek Diminutives, p. 207 et 219.
104. Ibid., p. 238-240, avec de nombreux exemples.
105. Attesté deux fois seulement dans des inscriptions d’époque impériale, l’une dans
la petite île de Nèsos (LGPN 1, imp. : IG XII Suppl. p. 51 no. 149), l’autre à Milet
(LGPN 5b, iie a. C. : IG II2 9541 = FRA 4388).
106. Cet anthroponyme, qui apparaît dès le ive s. a. C. comme nom d’une affranchie à
Athènes (LGPN 2 : SEG 25, 178, 4), à Atrax (LGPN 3b : SEG 40, 469 a) et à Thèbes
(LGPN 3b : IG IX (2) 122), connaîtra une immense fortune à partir de la fin de
l’époque hellénistique (le site search du LGPN en recense plus de 300 attestations).
398 florian réveilha

ἐλπίς « espoir », qui est lui-même un dérivé en -ιδ- sur le radical ἐλπ-
(cf. ἔλπομαι). Certains résultent également d’une dérivation secondaire
à partir de noms en -ίδᾱς / -ίδης ainsi Νικ-ιδ-ώ (LGPN 3a: Alipheira, ive-
iiie s. a. C.) 107 de Νικ-ίδης 108, Λαμπ-ιδ-ώ (LGPN 3b : Démétrias, iiie s.
a. C.) 109 de Λαμπ-ίδης (LGPN 1 : Aphareus, ive-iiie s. a. C.) 110, Γλαυκ-
ιδ-ώ (LGPN 3a : Mikhaltsi [mod.], ive s. a. C.) 111, de Γλαυκ‑ίδᾱς (LGPN
3a : Mantinée, 425-400 a. C 112. et ive s. a. C. 113) ou Γλαυκ‑ίδης (trois
témoignages attiques au ive s. a. C. : voir LGPN 2) 114 et Ἀριστε-ιδώ
(LGPN 2 : Lamptrée, iie a. C.) 115, d’Ἀριστε-ίδης ou Ἀριστε-ίδᾱς (près
de 450 attestations pour l’une et l’autre de ces variantes, à partir du vie s.
a. C. pour Ἀριστείδης et du ive s. a. C. pour Ἀριστείδᾱς). On remarque,
néanmoins, que, contrairement aux anthroponymes en -ίδιον, une
bonne partie des noms en -ιδώ constituent des diminutifs de composés :
Ἀλκι-δ-ώ (LGPN 3a : Hyperteleaton, ca 500 a. C.) 116 de Ἀλκί-δημος/-
δᾱμος (plusieurs attestations depuis au moins le ve s. a. C.), Κλει-δ-ώ
(LGPN 2 : Athènes, ive s. a. C.) 117 de Κλεί-δημος/-δᾱμος (Κλείδημος
est attesté plusieurs fois depuis le ve s. a. C. et Κλείδᾱμος depuis le ive
s. a. C.) et peut-être Θε-αιδ-ώ (LGPN 3b : Thèbes, vie-ve s. a. C.) 118 de
Θε-αίδητος (bien qu’attesté seulement à partir du ive s. a. C. : LGPN 1
et 5a). Dans le cas du nom Ἀγιδώ, qui constitue le nom en ‑ιδώ le plus
ancien puisqu’il apparaît au viie s. a. C. chez Alcman (PMGF I, 1, 40,
42, 58, 80), si le composé Ἀγί-δᾱμος apparaît en Messénie seulement au
ier s. p. C. (LGPN 3a) 119, l’existence d’Ἀγέ-δᾱμος est attestée dès le ive s.

107. A. K. Orlandos, Alipheira, p. 237.


108. Νικίδης est attesté 7 fois entre le vie et le ive s. a. C., principalement à Thasos et à
Athènes.
109. Thess. Mnem. 199.
110. IG XII (9) 246 A, 117 et VII.
111. SEG 27, 231.
112. SEG 31, 348, 26 et L. Dubois, RDA 2, p. 126 (Γλαυσίδας, corrigé en Γλαυκίδας).
113. IG V (2) 271, 4.
114. IG II2 11001/2 ; IG II2 1202, 2 = PA 2973 ; SEMA 52  (Γλαυκίδ[ης], petit-fils du
précédent).
115. ΙG II2 6646 = PA 1723.
116. SEG 32, 391 = LSAG2, p. 447 no D.
117. IG II2 4858 = 4559.
118. AE 1934-5, Chron. 3, no 29.
119. ΙG V (1) 1354 : père et fils portent le même nom.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 399

a. C. (LGPN 5a : Colophon, 311-306 a. C.) 120 et il ne serait pas étonnant


qu’Ἀγί/Ἀγέ-δᾱμος 121 existât depuis plus longtemps encore. Ce composé,
dont le premier membre est issu du radical de ἄγω (ou de ἡγέομαι) 122,
peut être rapproché, pour le sens, du nom bien connu Ἀγέ-λαος 123.
À la suite d’une réinterprétation morphologique, on tirera de tels
noms un suffixe -ιδώ, qui entrera dans la formation onomastique à partir
de l’époque hellénistique, comme en témoignent les anthroponymes
Σω-τ-ιδώ (LGPN 3α : Hermionè, iie-ier s. a. C.) 124, diminutif d’un com-
posé comme Σω-τίμᾱ / Σώ‑τιμος ou Σω-τέχνᾱ et Φιλτ-ιδώ (LGPN 1 :
Crète, iie s. a. C.) 125, diminutif d’un composé à premier membre Φιλτ(ο)-.
2.2.2. La finale -άριον
Cette finale est la mieux représentée au sein des concaténations en
-ιον, puisque l’on recense environ 180 individus portant un nom en
-άρι(ο)ν dans les volumes 1 à 5b du LGPN. Les toutes premières attesta-
tions remontent au ive s. a. C. : Ναννάριον est le nom d’une courtisane
chez Ménandre et l’on connaît également Μαμμάριον, attesté à la fois
chez Diogène Laërce comme nom d’une hétaïre proche d’Épicure 126 et
dans une inscription athénienne 127. Le premier répond à Νάννιον, porté
à l’époque classique par au moins six femmes, dont trois hétaïres, à
Athènes, Samos et Halicarnasse. Comme l’a bien montré G. Lambin 128,

120. AJPh 56 (1935), p. 361-371 no 1, 516.


121. La coexistence de Ἀγι- et de Ἀγε- est attendue : Ἀρχί-δᾱμος et Ἀρχέ-δᾱμος, attestés
respectivement à partir du viie et du vie s. a. C., présentent, de la même façon, au
premier membre deux variantes issues du radical de ἄρχω.
122. L’esprit doux sur le α- initial de Ἀγιδώ est noté par le scribe du « papyrus Mariette »
(P. Louvre E 3320), cf. E. G. Turner, Greek Manuscripts of the Ancient World,
Londres, 1987 (2e éd. par P. J. Parsons), p. 44. Le fait que Ἀγιδώ débute par un α
long mais sans aspiration témoigne des interférences qu’il existait entre le radical
de ἁγέομαι / ἡγέομαι et celui de ἄγω, notamment au sein de l’anthroponymie, cf.
P. Chantraine, Études sur le vocabulaire grec, Paris, 1952, p. 92, n. 1. Sur le rappro-
chement entre Ἀγιδώ et la dynastie spartiate des Agiades, voir C. Calame, Le chœur
de jeunes filles en Grèce archaïque. 2, Alcman, Rome, 1977, p. 140-142.
123. On compte près de 90 témoignages de cet anthroponyme depuis le vie s. a. C.
124. IG IV (1) 732 IV, 7.
125. IG II2 9092.
126. Diogène Laërce, 10, 7.
127. IG II2 1534 A.
128. G. Lambin, « Mots familiers en ναν(ν)α-/ναν(ν)ι-/ναν(ν)-ο-, νενι-/νεν-ο-, νιν(ν)ι- et
νυν(ν)ι- », RPhil. 58 (1984), p. 83-91.
400 florian réveilha

l’origine de Νάννιον, probablement familière, est certainement le subs-


tantif enfantin νανίον qui apparaît dans une glose du Corpus glossa-
riorum Latinorum, pupus : βρέφος· νανίον 129. Νάννιον pourrait donc
avoir été originellement un surnom tiré de νανίον, avec gémination
expressive, dont le sens de « Poupée » conviendrait parfaitement à des
hétaïres. Νάνναριον signifierait, par conséquent, « Petite poupée », avec
la valeur hypocoristique que possédait dès l’origine la finale -άριον. Ce
sens apparaît aussi dans l’anthroponyme Μάμμαριον, formé sur μάμμη
« mère » et qui devait dès lors avoir le sens affectueux de « Petite mère ».
Les valeurs diminutive et hypocoristique de la finale -άριον trouvent
leur source dans les appellatifs où elle apparaît à partir du ve s. a. C.,
notamment chez les Comiques 130. Elle est issue de la combinaison de
‑αρος avec -ιον, à partir de substantifs comme ἐσχάρ-ιον (Ar.) « petit
foyer, réchaud » (ἐσχάρᾱ « foyer »). Comme le notait déjà Petersen, le
terme οἰνάρ-ιον (Poliochos, ve-iiie a. C.) « petit vin, mauvais vin » puis
« vin » (οἴναρον « vigne ») a probablement joué un très grand rôle dans
l’émergence de -άριον puisqu’il a rapidement été interprété comme un
diminutif, puis comme un synonyme d’οἶνος. Rapidement senti comme
un équivalent de -ιον, le suffixe complexe -άριον s’est même adjoint à
des dérivés en -ιδ- : ἱματιδ-άριον « petit vêtement » (Aristophane apud
Aristote, Rhet. 3.2) à côté du diminutif ἱματίδιον « id. » (Aristophane,
Ploutos, 985) (ἱμάτιον « manteau, vêtement »).
Dans l’onomastique, il faut souligner que le suffixe -αρος sert prin-
cipalement à former des sobriquets 131. Ainsi, Βάτταρος attesté chez
129. Le nom Νίννιον, porté par trois femmes, dont deux Athéniennes du ive s. a. C.,
peut être considéré comme un doublet de Νάννιον, si l’on en croit la glose popus :
νίννιον du Corpus glossariorum Latinorum. Par ailleurs, le nombre conséquent de
femmes dénommées Νάννιον qui sont recensées dans les volumes 5a et 5b du LGPN
– une douzaine – s’explique par le fait qu’en Asie Mineure les Lallnamen étaient
abondamment employés, conformément à l’usage qui en était fait dans les langues
anatoliennes. Ainsi, sur les 30 Νάννη qui sont répertoriées dans le LGPN, 29 sont
micrasiatiques, tout comme les 12 Νάννᾱ que l’on connaît. Ces deux noms reflètent
un Lallname anatolien que l’on trouve déjà en hittite ainsi que dans une langue ana-
tolienne du Ier millénaire comme le lydien sous la forme Nan(n)a-. Le succès de
Νάννιον en Asie Mineure s’explique donc par la ressemblance de cet anthroponyme
avec un nom typiquement anatolien.
130. W. Petersen, Greek Diminutives, p. 260-271 et Chantraine, Formation, p. 74-75.
131. Schwyzer, GG I, p.  482, §b, 4 ; Chantraine, Formation, p.  226-228 ; O. Masson,
Glotta 54 (1976), p. 94 et n. 55 (= OGS I, p. 279) ; S. Minon, « Anthroponymes en
Ἀμφ(ι)- et en -αρ(ι)- : de Ἀμφιάρης à Ἀμφαρίōν », RPh. 84 / 2 (2010), p. 303.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 401

Hérondas (2, 5) est dérivé de l’adjectif βάττος « bègue » et Κύλλαρος,


comme anthroponyme et nom de cheval (sous la forme Ϙύλλαρος), est
formé sur κυλλός « déformé, recourbé » 132. Pour autant, comme l’a bien
démontré S. Minon, tous les noms en -αρος et en -αρώ, ne sont pas des
dérivés et certains constituent des diminutifs de composés avec un vestige
de second membre issu du radical ἀρ-, soit de ἀρετή, soit de ἄριστος 133.
Il en va évidemment de même pour nos anthroponymes en ‑άριον : on
considère les noms Δημάριον (Δημάριν)/Δᾱμάριον (Δᾱμάριν), Νικάριον
(Νικάριν), Τιμάριον (Τιμάριν) et Φιλάριν, dont les premières attestations
remontent seulement à l’époque hellénistique – voire à l’époque romaine
pour Τιμάριον –, comme des diminutifs en ‑ιον de composés dont le
second membre est bâti sur le radical ἀρ-. Les composés Δημαρίστη /
Δᾱμαρίστᾱ, Δημαρέτη / Δᾱμαρέτᾱ, Νικαρίστη/-ᾱ, Νικαρέτη/-ᾱ, Τιμαρί-
στη/-ᾱ, Τιμαρέτη/-ᾱ et Φιλαρέτη sont tous représentés en grand nombre
dès le ve et le ive s. a. C. Les diminutifs en -ιον de tels composés contri-
bueront également à la diffusion de la finale -άριον.
Parmi les anthroponymes présentant le suffixe complexe -άριον, nom-
breux sont ceux qui constituent des doublets de diminutifs en -ιον, comme
Ἀπφ-άριον (LGPN 1 : 3 attestations à partir de l’époque impériale) en
face de Ἄπφ-ι(ο)ν (LGPN 2, 5a : 84 attestations à partir du ier s. a. C.-ier s.
p. C.), Ἐρωτ-άριν (LGPN 3a, 5b : 2 attestations du ier s. a. C.-ier s. p. C.,
l’une à Pompéi 134, l’autre à Cnide 135) en face de Ἐρώτ-ι(ο)ν (LGPN 1, 2,
3b, 4, 5a et b : 38 attestations à partir du ive-iiie s.), Μοσχ-άρι(ο)ν (LGPN
2, 5a : 6 attestations à partir du iie s. a. C.) en face de Μόσχ-ιον (LGPN
1, 2, 3a, 4, 5a et b : 115 attestations à partir de l’époque hellénistique),
Ῥοδ-άρι(ο)ν (LGPN 1, 5a et b : 3 attestations à partir de l’époque impé-
riale) en face de Ῥόδ-ι(ο)ν (LGPN 1, 2, 3a et b, 4, 5a : 12 attestations à
partir du ive s. a. C.) ou encore Τατ-άριον (LGPN 2, 5a et b : 12 attesta-
tions à partir de l’époque hellénistique) en face de Τάτ-ι(ο)ν (LGPN 1, 2,
3a et b, 5a et b : 61 attestations à partir de l’époque hellénistique). Dans
tous ces exemples, on constate que si le suffixe -ιον est représenté à date

132. Sur le groupe des anthroponymes formés sur cet adjectif, voir Robert, Noms indi-
gènes, p. 253-255.
133. S. Minon, art. cit., p. 303-304, avec des exemples.
134. Erotarin : CIL IV 9945 = Gnomon 45 (1973), p. 268.
135. IG XII (3) 69.
402 florian réveilha

plus ancienne et en plus grande quantité qu’-άριον, il est concurrencé par


ce dernier dans la formation onomastique, à partir de l’époque hellénis-
tique mais surtout au cours de l’époque impériale.
Il existe d’ailleurs un contingent de diminutifs en -άριον sans équi-
valent en -ιον. On connaît ainsi une Éphésienne dénommée Φυλλ-άριον
(LGPN 5a : époque impériale), d’après le nom de sa mère, Φυλλάς. Trois
Chypriotes ont pour anthroponyme Πνυτ-άριον (LGPN 1 : Kition, ier s.
a. C., Salamine, ier s. a. C. et Amathonte, époque impériale), d’après
le nom du roi de Chypre Πνυταγόρας. La Macédonienne Φιλλιπ-άριν
(LGPN 4 : Skydra, iiie s. p. C.), elle, porte un nom dérivé à partir de celui
de Philippe. Le nom Σιμ-άριον (LGPN 2 : Marathon, ier s. p. C.), enfin,
appartient au groupe important des sobriquets formés sur l’adjectif σιμός
« camus ».
Le suffixe complexe -άριον est donc utilisé pour former des dimi-
nutifs féminins de noms simples et de noms composés, de même que
-αρώ et -αροῦς (fém.). Comme l’a déjà noté L. Dubois, ces trois finales
sont liées : -αροῦς (fém.), qui constitue une variante morphologique de
-άριον, a probablement pris le relais de -αρώ dans l’onomastique fémi-
nine au cours de l’époque impériale 136. Il semble également exister une
répartition géographique entre -αροῦς et -αρώ, puisque les noms en
-αρώ, qui sont au nombre total de 35 d’après le site Search du LGPN,
sont bien représentés dans les volumes 1 (8 individus), 3a (8 individus) et
3b (12 individus) du LGPN, assez rares dans les volumes 2 (3 individus),
4 (2 individus) et 5b (2 individus), et absents du volume 5a. À l’inverse,
sur les 39 attestations de noms féminins en -αροῦς 137, on en compte 34
dans le volume 5b : 25 rien que pour la Lycie et 9 pour la Cilicie, alors
qu’aucun anthroponyme en ‑αρώ n’a été relevé dans ces deux régions.
Les noms en -αρίων, comme leurs correspondants féminins en ‑άριον,
connaîtront une grande fortune au cours de l’époque impériale.

136. L. Dubois, « Des anthroponymes en -οῦς », dans Onomatologos, p. 402.


137. À ces statistiques tirées du LGPN, on ajoutera les 5 anthroponymes féminins en
-αροῦς que L. Dubois a relevés en Égypte : Dubois, art. cit., p. 417.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 403

2.2.3. Les finales -ύλιον et -ύλλιον


Le suffixe -ιον a pu se combiner avec -ύλος ou avec sa variante
géminée -υλλος 138 dans quelques noms pour former le suffixe complexe
-ύλιον ou -ύλλιον 139.
Certaines de ces formes sont dérivées d’hypocoristiques de noms
composés, comme Ἀρχύλλιον, anthroponyme représenté une seule fois
(LGPN 1 : Itanos, iiie-iie s. a. C.) et qui est rattaché à Ἄρχυλλος 140. Ce
dernier nom est attesté plusieurs fois depuis le ive s. a. C. (LGPN  1 :
Styra, ive s. a. C. 141 ; LGPN 3a : Mantinée, ive s. a. C. 142, etc.). Ἄρχυλλος
représente l’une des nombreuses formes hypocoristiques de composés
dont le premier ou le second membre est issu du radical de ἄρχω « com-
mander » (Bechtel, HPN 78-84). On connaît aussi une dénommée Κρι-
νύλιον (LGPN 1 : Ténos, iiie s. a. C. 143), dont le nom est considéré par
Bechtel (HPN 263) comme un diminutif de composé comportant un
membre issu du radical de κρῑ ́νω. Le masculin *Κρινύλος n’est pas
attesté, mais il y a trois témoignages du féminin Κρίνυλλα 144 datant du
ive s. a. C. (LGPN 2 : Athènes, deux attestations 145 ; LGPN 3b : Atrax 146).
Faut-il voir dans -ύλιον un suffixe complexe indépendant, concurrent ici
d’une autre finale de féminin ? Cela est possible, mais ne peut être cor-
roboré par aucun autre témoignage. Dans la famille des diminutifs de
composés à premier membre Ἀνθε- ou à second membre -ανθος, -άνθης,

138. Pour une analyse complète des anthroponymes en -λος, nous renvoyons à la contri-
bution d’A. Mathys dans le présent volume, qui présente notamment les critères de
distribution de -ύλος, -υλλος, -ίλος et -ιλλος dans l’onomastique de façon tout à fait
éclairante.
139. M. Leumann, « Deminutiva auf -ύλλιον und Personennamen mit Kennvokal υ im
Griechischen », Glotta 32 (1953), p. 214-225.
140. La forme Ἀρχύλος existe également, même si elle est moins fréquente, notamment
comme nom d’un personnage de Thourioi au ive s. a. C. chez Diodore de Sicile
(14.52.5 et 53.4).
141. IG XII (9) 191 B, 11.
142. IG V (2) 271, 4.
143. IG XII (5) 872, 2, 40.
144. La géminée dans -υλλᾰ résulte de l’assimilation du yod du suffixe de féminin *‑i̯ a-
avec le l du suffixe ‑υλ(ο)‑. Cf. O. Masson,  « Géminations expressives », p.  226
(= OGS II, p. 558) et compte rendu LGPN 1, Gnomon 1990, p. 102-103 (= OGS III,
p. 75-76).
145. IG II2 11911 = SEG 39, 257 et IG II2 11179.
146. SEG 42, 494.1.
404 florian réveilha

etc. sur ἄνθος (Bechtel, HPN 54-57), il faut ajouter Ἀνθύλλιον (LGPN
1 : Chios, époque impériale). Cet anthroponyme vient ainsi compléter le
sous-groupe des féminins présentant le suffixe -υλ(λ)-, à savoir Ἄνθυλλα,
Ἀνθύλη 147 et Ἀνθυλλίς, représentés tous les trois plusieurs fois depuis
l’époque classique.
Trois autres formes en -ύλ(λ)ιον constituent des dérivés de diminutifs
de noms simples en -ύλος ou en -υλλος. Ἡδύλιον, d’abord, est la plus
anciennement attestée et fait l’objet des plus nombreux témoignages, à
savoir cinq. Le premier d’entre eux provient du nom d’une affranchie à
Athènes, vers 330-320 a. C. (LGPN 2) 148 ; Ἡδύλιον apparaît dans une
autre inscription athénienne datant du siècle suivant (LGPN 2 : ca 258-
257 a. C.) 149, comme nom d’une Samienne entre le ier s. a. C. et le ier p. C.
(LGPN 1) 150, ainsi que dans deux inscriptions de l’époque impériale,
l’une retrouvée à Rhodes (LGPN 1) 151, l’autre, rédigée en latin, prove-
nant d’Apulie (Hedylium, LGPN 3a) 152. Il s’agit là d’un hypocoristique
dont la base Ἡδύλος est fort bien représentée depuis la fin du ve s. a. C.
notamment en Attique (voir LGPN 2, s.v.), tout comme son équivalent
féminin Ἡδύλη qui apparaît dès le ive s. a. C. (plus de 25 attestations
au ive s. a. C. dans la région d’Athènes). Ἡδύλος et Ἡδύλη représentent
eux-mêmes les hypocoristiques en ‑ύλος d’un surnom issu de l’ad-
jectif ἡδύς (HPN  511). À côté de Ἡδύλιον, on note également l’exis-
tence d’une autre forme hypocoristique, Ἡδυλίνη, attestée à huit reprises
entre le ive et le iiie s. a. C., principalement en Attique (cf. LGPN 2, s.v. ;
une seule fois ailleurs : LGPN 3b, Démétrias, iiie s. a. C. 153). Le nom de
l’Éolienne Μεθύλλιον, qui apparaît dans une inscription attique (LGPN

147. Ἀνθύλη apparaît sur deux hydries attiques à figures noires (LGPN 2 : Athènes, ca
525 a. C., écrit ΑΝΘΥΛΕ [J. D. Beazley, Attic black-figure vase-painters, Oxford,
1956, p. 676, nos 1-2]) et sur un graffito (LGPN 2 : Athènes, ca 550-525 a. C., écrit
ΑΝΘΥΛΕ [Beazley, ABV, p. 676]), mais la forme a été corrigée à tort en Ἀνθύλλη par
les rédacteurs du LGPN. La géminée dans un tel cas ne saurait pourtant s’expliquer
phonétiquement et les noms en -ύλλη sont d’ailleurs rarissimes.
148. IG II2 1560, 16.
149. IG II2 1534 B = Aleshire, Asklepieion, Inv. V, 74.
150. MDAI(A) 49 (1924), p. 28, no 2.
151. Nuov. Suppl. Rod. 7.
152. Le epigrafi romane di Canosa, I (éd. M. Chelotti, R. Gaeta, V. Morizio, F. Grelle et
M. Pani), Bari, 1985, no 206 = CIL IX 6191 (cf. Solin, GPNR, 2.948).
153. Polemon 4 (1949-50), p. 86 no 263.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 405

5a : Myrina, iie s. a. C. 154), est à rapprocher du masculin Μέθυλλος. Ce


dernier nom, attesté dans une inscription attique de l’époque classique
(LGPN 2 : Athènes, ve s. a. C. 155), est formé sur μέθυ « vin », comme
quelques autres surnoms (cf. HPN 506 « trunksüchtig »). Le dernier
nom de ce sous-groupe, Πραΰλιον, est aussi le plus tardif (LGPN 5a :
Lydie, 261 p. C., dat. Πραϋ[λί]ω 156), mais la finale de datif -ω pourrait
tout aussi bien être celle du masculin Πραΰλιος, dont les douze témoi-
gnages proviennent eux aussi de la côte occidentale de l’Asie Mineure
et remontent aux premiers siècles de notre ère (cf. LGPN 5a et b, s.v.).
Pour Πραΰλιος comme pour Πραΰλιον, quoi qu’il en soit, on trouve le
suffixe -i̯ o- adjoint à Πραΰλος (Πρηΰλος), qui nous est connu par le
biais de plus de 25 témoignages depuis l’époque classique (LGPN 3a :
Sicyone, vie-ve s. a. C. 157), et qui n’est autre que l’hypocoristique d’un
nom simple formé sur πρᾱΰς « doux, bon » ou sur son doublet théma-
tique πρᾶος « id. » (HPN 501).
2.2.4. La finale -άκιον
On écartera de cette catégorie les anthroponymes qui constituent des
diminutifs en -ιον de radicaux en -ακ-, comme Νάκ-ιον, attesté deux
fois en Attique au ive et au iiie s. a. C., et qui forme avec Νακ-ώ et
les masculins Νακ-οῦς et Νάκος un groupe de noms issus de νάκη ou
νάκος « toison, peau » 158. Ἀνθράκ-ιον, attesté plusieurs fois depuis le
iiie s. a. C. comme nom d’esclave mais pas seulement, constitue soit un
diminutif en -ιον sur l’appellatif ἄνθραξ 159 « charbon », comme méta-
phore d’une peau foncée, soit un calque du substantif ἀνθράκιον qui peut
désigner une pierre précieuse rouge intense comme l’escarboucle. Dans
les deux cas, la séquence -ακ- doit être rattachée à la base, comme pour

154. IG II2 9975.


155. IG I3 1150, 25.
156. P. Le Bas et W. H. Waddington, Voyage archéologique en Grèce et en Asie Mineure
fait pendant les années 1843 et 1844, Paris, 1847-1857, p. 1535.
157. SEG 11, 244, 18.
158. Robert, Noms indigènes, p. 289, suivi par O. Masson, « Quelques noms de femmes
au neutre dans les inscriptions attiques », Horos 7 (1989), p. 46 (= OGS III, p. 62)
et « Notes d’onomastique béotienne (Thespies) », Études d’archéologie classique 8
(1995), p. 85 (= OGS III, p. 236).
159. Des mots comme ἄνθραξ, φύλαξ ou κόραξ sont de même structure, mais leur
étymologie demeure difficile voire absconse : Chantraine, Formation, p. 377-380.
406 florian réveilha

le nom de l’Athénienne Μαλθάκ-ιον (iiie s. a. C.), qui n’est autre que


le diminutif du nom simple Μαλθάκᾱ/Μαλθάκη, fort bien représenté
depuis le ive s. a. C., lui-même issu de l’adjectif μαλθακός, avec le sens
de « doux, tendre » 160. Quant à Φυλάκ-ιον, qui apparaît dans une inscrip-
tion athénienne du ve-ive s. a. C. et comme nom d’une courtisane du ive-
iiie s. a. C. à Athènes (Plut. Demetr. 11, 2), il s’agit là d’un diminutif du
nom héroïque Φύλακος à rapprocher du substantif homérique φυλακός,
doublet thématique de φύλαξ « garde, sentinelle ». Σαμάκιον (LGPN 2 :
Itée, ive s. a. C.) est un nom simple calqué sur le substantif rare σαμάκιον
« ornement féminin » 161, qui est peut-être dérivé de σάμαξ 162 « jonc,
natte de jonc ».
Finalement, les anthroponymes formés au moyen du suffixe com-
plexe -άκιον sont seulement au nombre de deux : Φιλ-άκιον (LGPN 2 :
Athènes, iiie s. a. C.) et Σιμ-άκιον (LGPN 2 : Athènes, 253/252 a. C.).
Le premier constitue un diminutif de composé en Φιλ(ο)- et le second
un diminutif du nom simple Σῖμος, calqué sur l’adjectif σιμός « camus ».
Dans les deux cas, on a affaire à des familles onomastiques extrêmement
nombreuses, auxquelles se rattachent des myriades d’anthroponymes. Au
sein des diminutifs, il existe un sous-groupe présentant la séquence -ακ-,
dont -ακιον est un constituant, à côté de ‑άκᾱ/η et de -ακώ pour les
femmes, et de -ακος, de -άκης et de ‑άκων pour les hommes. O. Masson
a bien expliqué l’émergence de la finale anthroponymique -ακος à partir
de la thématisation de noms en ‑αξ, comme Ἱέρακος, doublet de Ἱέραξ,
nom simple calqué sur ἱέραξ « faucon » 163. Une fois ce suffixe secon-
daire formé, il a été associé à d’autres suffixes, comme -ιον, pour créer
des finales expressives employées avec les bases très fécondes que repré-
sentent les composés en Φιλ(ο)- et la famille de Σῖμος.

160. Sur l’étymologie délicate de μαλθακός et son rapport avec μαλακός, voir DELG s.v.
161. Bechtel, AF, p.  117 ; O. Masson « Quelques noms de femmes au neutre », p.  47
(= OGS III, p. 63).
162. DELG s.v. σάμαξ.
163. O. Masson, « Les anthroponymes grecs à Délos », Comptes et inventaires dans la
cité grecque, Neuchâtel - Genève, 1988, p. 79 (= OGS III, p. 8).
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 407

3. Étude sémantique

3.1. Des appellatifs à l’origine d’anthroponymes en -ιον


Il n’est pas toujours aisé de déterminer si tel ou tel anthroponyme en
‑ιον est calqué sur un terme du lexique présentant le suffixe neutre, ni
d’affirmer que le substantif a préexisté au nom propre, mais quelques cas
semblent assez éclairants à ce propos.
Noms d’objets. — Des anthroponymes sont tirés de noms d’objets
en -ιον, soit en référence à la fonction de l’esclave qui le porte, c’est
le cas de Λοπάδιον, qui apparaît chez le comique Timoclès, et dont le
nom désigne un « plat », soit parce que l’objet en question est entendu
comme métaphore d’une particularité physique, comme ᾽Εγχειρίδιον et
directement tiré du substantif ἐγχειρίδιον « poignard » qui est passé dans
le répertoire des surnoms peut-être pour désigner un visage allongé, en
« lame de couteau ».
Toponymes. — Il existe également quelques toponymes à l’origine de
noms de personnes en -ιον : Παγγαῖον (LGPN 4 : Thrace, iiie s. a. C.),
attesté en Attique comme nom d’une Thrace 164, est formellement iden-
tique au nom du Mont Pangée, de même que Σούνιον (LGPN 2 : Athènes,
iie-ier s. a. C.) 165 emprunte son nom à celui du Cap bien connu de l’At-
tique 166. Ces noms géographiques de genre neutre ont eux aussi contribué
à introduire l’emploi du suffixe -ιον dans la formation onomastique.
Abstraits. — Les abstraits constituent une part importante des noms
simples, en grec, et certains d’entre eux ont une finale -ιον. Parmi eux,
relevons Παραμύθιον (LGPN 2 : Athènes, ive s. a. C.) 167, reflétant le
substantif παραμύθιον qui signifie parfois « encouragement » 168 mais
aussi « consolation » 169. Il en va de même pour Διαβούλιον (LGPN 2b, 5a
et b : 5 attestations depuis le iiie s. a. C.), dont le substantif correspondant

164. IG II2 8920.


165. IG II2 8709.
166. O. Masson, « Quelques noms de femmes au neutre », p. 47 et 52 (= OGS III, p. 63 et
68).
167. IG II2 12413.
168. Voir, p. ex., Platon, Phèdre, 240d.
169. Pseudo-Théocrite, XXIII.
408 florian réveilha

désigne la « délibération », la « résolution ». Dans ce cas-là aussi c’est la


valeur abstraite du substantif qui est mise en avant. Tous ces noms abs-
traits passés dans l’anthroponymie possédaient une valeur assurément
positive, même lorsqu’ils appartenaient au genre neutre.
Noms de plantes. — Parmi les noms tirés de phytonymes, on relève
Λείριον (LGPN 3b : Delphes, 154‑143  a. C. 170 et Amphissa, 124-
116 a. C. 171) dont la forme est identique au substantif λείριον qui désigne
le « lis blanc » 172 ou le « narcisse », bien que l’attestation du substantif
soit postérieure à celles de l’anthroponyme. Le substantif σισύμβριον
« menthe aquatique », en revanche, est bien attesté à la même époque que
le nom de l’hétaïre Σισύμβριον qui apparaît chez Théophile 173. L’appel-
latif ἀμπέλιον « petite vigne », qui est déjà attesté chez Aristophane 174,
se trouve à l’origine des cinq anthroponymes que l’on recense depuis
l’époque hellénistique (LGPN 1, 3a, 5a).
Noms d’animaux. — Mais ce sont certainement les noms tirés de zoo-
nymes qui fournissent les indices les plus manifestes de ce processus
d’emprunt au lexique. En effet, certains dérivés en -ιον de noms d’ani-
maux possédaient une valeur affective et c’est probablement avec cette
connotation qu’ils ont été employés comme surnoms. Ainsi, le nom Φάτ-
τιον (LGPN 3b : Oropos, iiie s. a. C.) 175 est-il à rapprocher du diminutif
φαττίον « petit pigeon », qui est d’ailleurs présent chez Aristophane 176
comme terme de tendresse se référant à une femme, avec un sens équiva-
lent à « ma petite colombe ». Le nom Ἐλάφιον (LGPN 1 : Chios, imp. 177 ;
LGPN 3a : Épire, iiie-iie  s.  a. C. 178 et Dikaiarchia-Puteoli, imp. 179)

170. SEG 33, 424, 7.


171. SGDI 1696, 1, 8, 10, 13 ; SGDI 1942, 2, 10-11, 13 ; SEG 18, 226, [1].
172. Dioscoride, 3.102.
173. PCG VII, 706, fr. 11.
174. Aristophane, Acharniens, 512.
175. IG VII 303, 72, 81.
176. Aristophane, Ploutos, 1011 : texte de l’édition d’Oxford. Comme l’a bien démontré
J. Taillardat, la conjecture φαττίον de Bentley, pour les leçons βάττιον (M) et βάτιον
(RVAU), semble en effet plus vraisemblable que l’hypothèse *φάβιον proposée par
Meineke : J. Taillardat, Les images d’Aristophane : études de langue et de style,
Paris, 1965 (2e éd.), § 830, p. 479-480.
177. ASAA 2 (1916), p. 157, no 62.
178. IG VII 468 = IOrop 586.
179. Ravia Elapio (affranchie) : CIL X 2912.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 409

constitue un exemple similaire : il correspond exactement au substantif


ἐλάφιον « jeune biche, faon ». Or, on le retrouve aussi chez Aristophane
(Thesmophories 1172) avec le sens affectueux de « bichette ». Ici, c’est
le personnage d’Euripide qui s’adresse à une danseuse en employant le
vocatif d’ἐλάφιον, la métaphore se fonde ici sur la grâce avec laquelle
danse le personnage féminin 180. Mais c’est certainement cette valeur du
terme qui a servi de base à son emprunt dans l’anthroponymie quelque
temps plus tard. Certains zoonymes ont même connu un franc succès en
tant qu’anthroponymes, c’est le cas par exemple de Βοΐδιον dont on a
pas moins de douze attestations au ive s. a. C. en Attique 181 et quelques
autres au iiie s. a. C. notamment en Béotie 182 et en Thessalie 183, et on a
même une Tonneia Boedion à Rome 184 au ier siècle. Ce nom est calqué
sur le substantif βοΐδιον, diminutif de βοῦς « bœuf, vache » 185. C’est
d’ailleurs à la même famille sémantique que sont apparentés les noms
Μόσχι(ο)ν (attesté 115 fois depuis le iiie s. a. C. 186) et Μοσχάρι(ο)ν
(attesté 6 fois depuis le iie s. a. C. 187), puisque les substantifs μοσχίον et
μοσχάριον signifient « jeune veau » 188. J.-L. Perpillou a mis en lumière
les développements métaphoriques assumés par μόσχος « veau » et
ses dérivés pour désigner des petits d’animaux, mais aussi des jeunes
humains, ainsi que des jeunes pousses 189. C’est cette valeur métapho-
rique qui explique l’emploi de cette base dans l’anthroponymie, avec
une connotation éminemment affective. Mentionnons enfin l’exemple de
Χοιρίδιον qui apparaît pour la première fois dans une inscription athé-
nienne du ive s. (LGPN 2) 190. Il reflète χοιρίδιον, un diminutif de χοῖρος

180. J. Taillardat, op. cit., § 791, p. 461.


181. IG II2 5534 ; 10970 ; 10876 ; etc.
182. IG VII 434 ; 2444 III ; etc.
183. IG II2 8845 ; etc.
184. Solin, GPNR, 2.1125.
185. Aristote, H. A., 3.21.2.
186. Notamment à Athènes (LGPN 2 : IG II2 6094 ; 6183 ; 6331, etc.). Μόσχι(ο)ν, comme
tous les anthroponymes de la famille de Μόσχος, est abondamment représenté sur la
côte occidentale de l’Asie Mineure : le LGPN 5a en relève pas moins d’une centaine.
187. Paiania, IG II2 7068 = PA 10424.
188. μοσχίον : Ephippos (ive s. a. C.) 15.12 ; Théocrite (iiie s. a. C.), 4.4 et 44, etc. μοσχά-
ριον : depuis le iiie s. a. C., notamment dans la Septante : Ge. 18.8, 7, Ex. 29.1, etc.
189. J.-L. Perpillou, Essais de lexicographie en grec ancien, ch. III « “Marcotte, drageon,
plant” et “veau” : une métaphore », Paris, 2004, § 3.6-3.9, p. 46-54.
190. LGPN 2 : IG II2 13061.
410 florian réveilha

« cochon » attesté dès le ve s. a. C. 191. L’origine d’un tel nom est certai-
nement populaire et l’on ne peut pas ne pas penser au sous-entendu obs-
cène des diminutifs χοιρίδιον et χοιρίον employés l’un et l’autre chez
Aristophane 192. Le nom du cochon, χοῖρος, constitue, en effet, une méta-
phore bien connue des muliebria 193 et ses diminutifs sont donc employés
dans la comédie avec une valeur hypocoristique, comme en témoigne le
vocatif ὦ χοιρίον lancé par Philocléon à l’adresse de la joueuse de flûte
dont il espère obtenir les faveurs 194.
À l’origine, donc, des substantifs porteurs de la finale neutre -ιον
ont pu pénétrer dans le répertoire des noms de personnes. Ils avaient,
pour la plupart, un sens diminutif à valeur hypocoristique, comme en
témoignent notamment les emplois au vocatif chez Aristophane. À partir
de là, le suffixe a pu entrer dans la dérivation onomastique en étant
associé à des thèmes d’anthroponymes pour former des diminutifs de
noms simples. Le nom Μίκιον (LGPN 2 : Athènes, iie a. C.) ou, avec
gémination expressive, Μίκκιον (LGPN 2 : Lakiadai, ca 100 a. C. 195
et Potamos, iie a. C. 196), constitue un diminutif du nom simple Μῖκος,
dérivé de μικρός « petit ». L’anthroponyme Λύριον (LGPN 1 : Lindos,
iie-ier a. C. 197 et Rhodes, iie-ier a. C 198), lui, constitue le diminutif d’un
nom Λύρα, porté par exemple par une hétaïre chez Lucien 199. Signalons
également Αἴσχριον (LGPN 2 : quatre attestations depuis le ive a. C.), qui
vient enrichir les dérivés du groupe du nom Αἶσχρος, à côté d’Αἰσχρᾶς
et d’Αἰσχρώ.
Le suffixe -ιον entre, enfin, comme on l’a vu, dans la formation des
diminutifs de noms composés. Ainsi, le nom Ἀρίστιον, qui a connu un
grand succès si l’on en croit la cinquantaine d’attestations (LGPN 1, 2,

191. Platon, Euthydème, 298d.


192. Aristophane, Guêpes, 573 (τὸ χοιρίδιον) et 1353 (τὸ χοιρίον).
193. Sur cette métaphore, voir J. Taillardat, op. cit., § 108, p. 75 et, avec un éclairage éty-
mologique, J.-L. Perpillou, op. cit., ch. I « Noms d’animaux », § 1.1, p. 1-10.
194. Philocléon est interrompu par Bdélycléon qui le traite, au vers 1364, de χοιρόθλιψ,
c’est-à-dire littéralement de « presseur de truies », de « débauché » donc.
195. IG II2 1034 d, 27 ; 1942 = PA 10192.
196. IG II2 7266 = Kerameikos III 38 c.
197. IG XII (1) 954.
198. V. Kontorini, Rhodiaka, I, Louvain-la-Neuve, 1983, p. 23.
199. Lucien, Dialogue des courtisanes 6, 2.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 411

3a et b, 5a et b) 200 que l’on en a relevées, constitue l’un des diminutifs


des composés en Ἀριστο-. Comme Ἀρίστιον, Καλλίστιον est fort bien
représenté dans l’épigraphie (LGPN passim) 201 : c’est aussi un diminutif,
formé à partir du premier membre des composés en Καλλιστο-.

3.2. Le genre neutre dans l’anthroponymie


L’emploi d’un suffixe de forme neutre dans la création de noms de
personnes et, principalement, de noms de femmes, pose question, car il
ne va pas de soi. En effet, si la valeur hypocoristique de -ιον est indé-
niable, le genre grammatical auquel il se rattache n’est pas celui que
l’on attend pour des anthroponymes, et ce, d’autant moins qu’il existe
d’autres suffixes hypocoristiques typiquement masculins ou féminins,
comme -ίσκος ou -ίσκη 202.
En réalité, la création des noms en -ιον procède de principes simi-
laires à ceux qui ont présidé, dans plusieurs autres langues, à l’emploi
du neutre pour désigner des jeunes femmes non mariées. On pense, par
exemple, à das Mädchen, en allemand, qui a remplacé die Magd dont
il est dérivé 203, alors que si des hypocoristiques neutres de der Junge
ou der Knabe « garçon » peuvent exister dans certains dialectes, ils
n’ont jamais intégré le lexique. On peut même aller plus loin dans la
comparaison avec certains dialectes allemands et avec le luxembour-
geois où les prénoms de femmes sont déterminés par l’article neutre 204
(p. ex. das Ingrid). En effet, alors que les noms communs allemands de
genre neutre se référant à des femmes sont souvent péjoratifs (p. ex. das
Luder « la garce », etc.) 205, dans certains dialectes de l’allemand et en

200. IG II2 6273 ; 6404 ; 4513 ; IG XII (9) 166 ; SEG 23 650 ; etc.
201. IG IX (1) 914 ; IG IV (1) 589, 12 ; IG VII 55 ; etc.
202. Cf. Chantraine, Formation, p. 406-413.
203. Sur les substantifs neutres de l’allemand se référant à des femmes, voir K. M. Köpcke
et D. A. Zubin, « Metonymic Pathways to Neuter-Gender Human Nominals in
German », dans K. U. Panther et L. Thornburg (éd.), Metonymy and Pragmatic
Interferencing, Amsterdam - Philadelphie, 2005, p. 149-166.
204. En luxembourgeois, les prénoms de femmes sont complètement associés au genre
neutre, tandis que dans d’autres dialectes allemands, l’article est au neutre mais
les pronoms personnels demeurent au féminin : on parle alors de noms hybrides.
À propos des noms hybrides, voir notamment G. G. Corbett, Gender, Cambridge -
New York - Melbourne, 1991, p. 225-259.
205. K. M. Köpcke et D. A. Zubin, op. cit., p. 153-154.
412 florian réveilha

luxembourgeois, comme cela a été très récemment étudié 206, l’emploi de


l’article neutre avec des anthroponymes féminins aurait originellement
une valeur pragmatique et marquerait un lien social ou affectif du locu-
teur à l’égard du référent, que ce soit avec une valeur positive, neutre ou
négative. Par la suite, le genre neutre a été fixé quel que fût le contexte
pour les prénoms de femme, comme en luxembourgeois. En grec, de
même que dans ces parlers germaniques, le neutre dans l’onomastique
est donc d’abord un genre pragmatique qui marque l’attitude du locu-
teur à l’égard du référent d’un point de vue social aussi bien qu’affectif.
La présence de surnoms empruntés à des substantifs neutres ou des
adjectifs au genre neutre dans l’anthroponymie grecque n’est d’ailleurs
pas circonscrite aux noms en -ιον. On connaît ainsi des noms comme
Σῖμον (σιμός, ή, όν : « camus »), Λίγυρον (λιγυρός, ά, όν : « mélo-
dieux »), Γλάφυρον (γλαφυρός, ά, όν : « élégant, gracieux ») ou encore
Ἵλαρον (ἱλαρός, ά, όν : « gai, joyeux »). Les anthroponymes en -μα
directement issus de substantifs neutres constituent également un groupe
bien connu : des noms comme Νόημα « réflexion », Ἀγάπημα « affec-
tion » ou Ἀξίωμα « dignité » se référent d’abord à « des qualités ou [à]
des notions positives », comme le notait O. Masson 207, et rares sont
ceux qui sont empruntés à des substantifs dénotant des concepts péjora-
tifs, tels que Lalema 208 à Rome (λάλημα « bavardage ») ou Παρόραμα
« négligence » comme nom d’hétaïre chez Athénée (596f). Cette caté-
gorie de noms de personnes compte aussi quelques anthroponymes tirés
de noms d’objets : Agalma 209 (ἄγαλμα « statue ») et Stemma 210 (στέμμα
« bandelette ») à Rome. Notons que pour certains des noms en -μα, la

206. Voir D. Nübling, « Between Feminine and Neuter, between Semantic and Pragmatic
Gender: Hybrid Names in German Dialects and in Luxembourgish », dans J. E. Flei-
scher, E. Rieken et P. Widmer (éd.), Agreement from a Diachronic Perspective,
p. 235-265.
207. O. Masson : « Remarques sur les noms de femmes en grec », Mus. Helv. 47 (1990),
p. 134 (= OGS III, p. 98).
208. Cf. Solin, GPNR, 3.1242.
209. Ibid., 2.1173.
210. Ibid., 2.1182.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 413

forme diminutive en -ιον est bien attestée, comme Φιλημάτιον 211, sur


Φίλημα 212, ou encore Ἀγαλμάτιον 213, sur Ἄγαλμα 214.
Les anthroponymes en -ιον représentent en grec des diminutifs de
noms composés et de noms simples. Il est probable que cette forma-
tion onomastique a été grandement favorisée par l’annexion aux noms
propres de substantifs en -ιον possédant une valeur hypocoristique. Par la
suite, la finale neutre a pu intégrer le répertoire morphologique des noms
de personnes et former ainsi des diminutifs de noms composés. Le genre
neutre, d’un point de vue pragmatique, était originellement l’expression
d’un lien affectif ou d’une identité sociale (celle de femme non mariée,
par exemple) qui s’est ensuite figée dans l’onomastique féminine.

3.3. Valeur diminutive du suffixe -ιον


Le morphème hérité *-(i)i̯ o- 215 a une sphère sémantique très étendue
depuis l’indo-européen, qui n’est pas homogène. Il est souvent considéré
comme un suffixe d’appartenance puisqu’il forme des adjectifs avec le
sens de « lié à, appartenant à » : skr. sénya-s, av. haēniia- « qui appartient
à l’armée » ou lat. uxoriu-s « qui appartient à la femme ». C’est de ce
sens-là que découlent les substantifs neutres désignant des lieux (κλίσιον

211. Notamment à Athènes (IG II2 8305) et à Rome Philematium ou Philematio(n) (Solin,


GPNR, 3.1258).
212. Une quinzaine d’attestations de Philema à Rome : Solin, GPNR, 3.1257.
213. En Égypte : F. Preisigke, Namenbuch: Enthaltend alle griechischen, lateinischen,
ägyptischen, hebräischen, arabischen… Menschennamen, soweit sie in griechischen
Urkunden… Ägyptens sich vorfinden, Amsterdam, 1922, s.v. À Rome, Agalmatio(n)
(cf. Solin, GPNR, 2.1173).
214. À Rome, Agalma (cf. Solin, GPNR, 2.1173).
215. Ce suffixe présente tantôt la forme monosyllabique *-i̯ o-, tantôt la forme dissylla-
bique *-ii̯ o-. Tandis que l’indo-iranien présente une constante hésitation entre les
deux, le grec emploie principalement le suffixe dissyllabique *-ii̯ o-, à l’exception de
quelques adjectifs de relation hérités (ἄλλος < *al-i̯ o- « autre », μέσος < *medh-i̯ o-
« situé au milieu »), de quelques anciens adjectifs verbaux composés et de quelques
anciens hypostatiques locatifs tels que ἤπειρος « terre ferme, rivage » (< *āperi̯ o-
qui possèderait une double caractérisation au locatif, d’abord avec le r puis, après
l’hypostase de *āp-er-, avec la postposition locative -i, voir M. Mayrhofer, « Laut-
lehre (Segmentale Phonologie des Indogermanischen) », Indogermanische Gram-
matik, I, 2, Heidelberg, 1986, p.  161 et I. Balles, « Reduktionserscheinungen in
langen Wortformen als Ursprung morphologischer Doppelformen im Urindogerma-
nischen: die Suffixformen *‑i̯ o- und *-ii̯ o », Die Sprache 39 (1997), p. 141-167).
414 florian réveilha

« ce qui est utilisé pour dormir » d’où « lieu pour dormir » : κλίσις), des
noms d’instruments (γραφίον « ce qui est utilisé pour écrire » : γραφή),
des noms de récompenses (ἀέθλιον « ce qui appartient à la lutte », d’où
« prix de la lutte » : ἄεθλος), etc.
Après cette spécialisation pour exprimer la notion d’appartenance,
*-(i)i̯ o- a été employé comme suffixe d’origine et de parenté  (cf. adj.
« possessifs » du louv. hiér. tadiya- « paternel » <  tada/i- « père » et
adj. patronymiques du grec myc. a-re-ke-tu-ru-wo e-te-wo-ke-re-we-i-
jo 216 [= Ἀλεκτρυὼν Ἐτεϝοκλεϝέhιος] « Alektryon fils d’Étéwokléwès »,
éol. Ἀριστόμαχος Θεοδότειος  « Aristomachos fils de Théodotos »,
hom.  Τελαμώνιος Αἴας « Ajax fils de Télamon »). C’est certainement
aussi ce sens qui apparaît dans certains adjectifs dérivés de substantifs :
p. ex. l’adjectif dérivé d’ἀηδών « rossignol » dans le syntagme ἀηδόνιος
νόμος (Ar., Les Grenouilles, 684) « air de rossignol », a le sens de « pro-
venant du rossignol ». Et la forme neutre de tels adjectifs est substantivée
en conservant cette valeur. Ainsi des substantifs en -ιον désignent des
petits d’animaux (ἐχίδνιον « jeune vipère » : ἔχιδνα ; ὀρνίθιον « jeune
oiseau » : ὄρνις) ou bien des objets caractérisés par leur origine (σάρδιον
« ce qui vient de Sardes » = « cornaline » : Σάρδεις).
À partir de cette valeur d’origine, le suffixe *-(i)i̯ o- entre dans la for-
mation d’adjectifs de matière. En grec, les neutres en -ιον représentant
des adjectifs de matière substantivés sont extrêmement bien représentés,
plus que les adjectifs eux-mêmes : ἀργύριον « ce qui est fait d’argent »,
d’où « monnaie d’argent » puis par métonymie « monnaie » (: ἄργυρος),
βιβλίον « ce qui est en écorce de papyrus » d’où « livre » (: βίβλος), etc.
Il arrive que dans certains noms en -ιον, le suffixe dénote l’apparte-
nance à une catégorie. Dans ce cas l’individu ou l’objet appartient à un
genre précis : κογχύλιον « ce qui appartient à la catégorie des coquil-
lages » (: κογχύλη). Parfois, l’appartenance à une catégorie ne tient qu’à
un point de ressemblance, c’est ce qui explique certains noms d’animaux
(ἀστέριον « animal qui est formé comme une étoile », sorte d’araignée :
ἀστήρ), de plantes, de coupes (ἀκάτιον : « coupe allongée en forme de
navire » : ἄκατος), de vêtements, etc.

216. PY An 654.
les noms en -ιον : morphologie et sémantique 415

C’est spécialement la valeur d’appartenance à une catégorie qui serait,


pour Chantraine et Petersen 217, à l’origine du sens diminutif de ‑ιον car ce
qui est semblable à une chose « peut lui être inférieur ou plus petit », selon
les mots de Chantraine. Cette notion d’infériorité constituerait alors le
point de départ d’un nouveau développement permettant à -ιον de former
des péjoratifs, des diminutifs et des hypocoristiques 218. Cette évolution
pourrait avoir été favorisée par le genre inanimé qui désigne des êtres
comme des petites choses. Il semble cependant plus simple 219 de sup-
poser un développement du sens diminutif en partant de la notion d’ori-
gine et de parenté exprimée par la finale -ιον : *ὀρνίθιος, α, ον (: ὄρνις)
« de l’oiseau » → ὀρνίθιον « jeune oiseau » → « petit oiseau, oisillon ».
Le suffixe -ιον devient productif dans la formation de diminutifs dans
la langue familière du ve siècle a. C. jusqu’à la koinè 220. La notion de
diminutif recouvre des concepts variés allant de la petite taille à la dou-
ceur, en passant par la jeunesse et la délicatesse, toutes valeurs par ailleurs
recouvertes par la notion antique d’« hypocoristique », dans son accep-
tion sémantique 221 : ainsi, avec le sens de « délicieux » (παλάσιον « bon
petit gâteau » : παλάθη), de « bon » (βουλευμάτιον « bonne petite réso-
lution » : βούλευμα), et avec le sens affectif de « cher » (θυγάτριον
« chère petite fille » : θυγάτηρ). Et une fois que le suffixe -ιον a acquis
cette valeur hypocoristique, il est employé avec des anthroponymes 222.

Conclusion

En conclusion, les anthroponymes grec en -ιον constituent un type


de formation onomastique relativement récent apparu à l’époque clas-
sique et réservé de préférence aux femmes, mais pas exclusivement.
L’entrée du suffixe dans le répertoire morphologique onomastique a été

217. W. Petersen, Greek Diminutives, p. 132 et Chantraine, Formation, p. 64.


218. Le premier diminutif en -ιον est connu chez Épicharme : πόδιον « petit pied » (fr.
57).
219. Voir déjà la perplexité de C. Prêtre à propos des explications de Petersen et de Chan-
traine sur l’origine diminutive du suffixe -ιον : « Imitation et miniature. Étude de
quelques suffixes dans le vocabulaire délien de la parure », BCH 121 (1997), p. 675.
220. Chantraine, Formation, p. 67.
221. Voir ici même la présentation de la notion d’hypocoristique par L.  Dubois dans
l’introduction.
222. W. Petersen, Greek Diminutives, p. 177.
416 florian réveilha

favorisée par l’emploi tels quels comme anthroponymes de substantifs


présentant eux-mêmes ce suffixe à valeur hypocoristique : cette spécia-
lisation sémantique est directement issue de la valeur diminutive, elle-
même dérivée de celle du morphème hérité *-(i)i̯ o- « descendant de ».
Un tel emploi est originellement d’ordre pragmatique, comme cela
apparaît clairement dans la comédie ancienne. D’ailleurs la spécialisation
du genre neutre dans des noms se référant d’abord à des jeunes femmes,
puis à l’ensemble des femmes, est du même ordre : il connote originelle-
ment l’attitude, souvent affective, du locuteur à l’égard du référent.

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La diffusion du suffixe ‑(ι)άδ‑
dans le système dérivationnel
des anthroponymes féminins

Alcorac Alonso Déniz


CNRS, HISOMA (UMR 5189)

It is necessary to study not only parts and processes


in isolation, but also to solve the decisive problems
found in the organization and order unifying them,
resulting from dynamic interaction of parts, and making the behavior
of parts different when studied in isolation or within the whole.
(L. von Bertalanffy, General System Theory, New York, 1968, p. 31)

Introduction

Dans cette contribution est étudiée la diffusion du suffixe ‑(ι)αδ‑


dans le système dérivationnel de l’anthroponymie féminine grecque. Est
d’abord présentée une classification des catégories qui présentent ‑(ι)άδ‑
dans le lexique, ainsi que l’état de la question sur l’origine du suffixe
(§ 1). Ensuite est examinée la distribution chronologique, géographique
et sociale des anthroponymes féminins en ‑(ι)άδ‑ (§ 2). Après un excursus
sur quelques formes masculines qui pourraient être attestées dans le
corpus étudié (§  3), sont analysées les données mycéniennes et homé-
riques, lesquelles montrent que, même si ‑(ι)άδ‑ est un suffixe ancien, sa
diffusion dans le domaine de l’anthroponymie féminine est un phénomène
récent et lié aux adjectifs ethniques féminins (§ 4). Est ensuite proposé un
modèle de diffusion du suffixe dans les systèmes des noms raccourcis et
des théophores, aussi bien que des sobriquets féminins (§ 5‑6). Est enfin
offerte une interprétation de deux anthroponymes particuliers (Ἀρετιμιάς
et Ἀργονιάς) destinée à permettre de tester la validité de l’analyse précé-
dente (§ 7).
420 alcorac alonso déniz

1. Classification et origine du suffixe grec ‑(ι)άδ‑ :


état de la question

Le classement des noms et des adjectifs en ‑(ι)άδ‑ dans le lexique est


le sujet de plusieurs travaux 1. Je me bornerai ici à une classification som-
maire qui servira de repère pour illustrer les catégories employées dans le
système dérivationnel des anthroponymes féminins. On peut classer les
noms et adjectifs en ‑(ι)αδ‑ en six catégories :
A. Substantifs et adjectifs dénominaux ou déadjectivaux : λιθάς « tas
de pierres » (:  λίθος « pierre »), νεκάς « rangée de cadavres » (:  νέκυς
« cadavre »), ἰονθάς « velue » (: ἴονθος « barbe naissante »), ἱππάς « de
cheval (fém.) » (:  ἵππος « cheval »), Ἀσιάς « femme d’Asie » (:  Ἀσία
« Asie »), Ἰάς « Ionienne » (:  Ἰάονες « Ioniens »), etc. 2 Ce type déri-
vationnel est déjà attesté à l’époque mycénienne : dat.‑loc. pl. wo‑na‑si
/woinasi/ (KN Gv 863.1) « vigne », cf. wo‑no /woinos/ « vin » 3. Quoique
les adjectifs de cette catégorie semblent s’accorder exceptionnellement
avec des noms masculins 4, le genre féminin l’a emporté à une époque plus
récente (voir § 3). Une catégorie particulièrement importante est celle
des adjectifs féminins dérivés des formes en ‑ιο‑ : Ἀχαιιάς « achéenne »
(: Ἀχαιιός « Achéen »), Πηλιάς « femme du Pélion » (: Πήλιον « [mont]
Pélion »), Ὀλυμπιάς « olympienne » (: Ὀλύμπιος « olympien »), etc. 5
(voir § 4).

1. Voir pour une classification formelle et sémantique Chantraine, Formation, p. 349-


358, C. D. Buck et W. Petersen, A Reverse Index of Greek Nouns and Adjectives,
Chicago, 1945, p. 411-415, Balles, NWIG 1, p. 206, 216-217 et 235 et J. Rau, « The
derivational history of the greek stems in ‑άδ‑ », MSS 64 (2004 [2010]).
2. Cf. aussi πελειάς « pigeon » (: πέλεια « pigeon »), ἐπιδιφριάς « rebord supérieur
du char » (: ἐπιδίφριος « posé sur le banc du char »), Ἑλλάς « Hellas (ville de
Thessalie) » (: Ἕλληνες « Hellènes [tribu thessalienne] »), χαμαιευνάς « qui dort à
terre » (: χαμαιεύνη et χαμεύνη « lit bas »).
3. Cf. οἴνη (Hés., Op. 572) vs οἰνάς « vigne » (Iôn, fr. 26.4 West), οἰνάδες· ἀμπελώδεις
τόποι (Hsch., ο 306 Latte). L’interprétation de M. Meier-Brügger, « Zu Griechisch
ἀϱήν und κϱῑός », HS 103 (1990), p. 27 comme un dat./ loc. pl. u̯ r̥ h1n̥ sú > /wonasi /
« aux agneaux » est à écarter.
4. Μονάδα [...] Ξέρξην (Esch., Pers. 734), γυμνάδα στόλον (Eur., fr. 105), Δηλιάσιν
καρποφόροις γυάλοις (Eur., IT 1235 ; neutre !).
5. Cf. Ἰσθμιάς « qui appartient aux jeux isthmiques » (: τὰ Ἴσθμια), Πυθιάς « qui
appartient aux jeux pythiques » (: τὰ Πύθια).
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 421

B. Adjectifs et substantifs déverbatifs à sens actif ou passif : ἀμοιβάς


« qui s’échange » (: ἀμείβω « échanger »), λαμπάς « torche » (: λάμπω
« briller »), μαινάς « femme folle », « ménade » (: μαίνομαι « être pris
de délire »), etc. 6 Les adjectifs qui appartiennent à cette catégorie s’ac-
cordent aussi exceptionnellement avec des noms masculins (cf. φυγάς
« exilé » : φυγεῖν).
C. Substantifs composés à deuxième élément verbal : παραστάς
« montant d’une porte » (: ἔστην) et ἐμβάς « chaussure » (: ἔβην) 7.
D. Substantifs désignant des animaux de possible origine indo‑euro-
péenne : κεμάς « jeune biche », δορκάς ou ζορκάς « chevreuil », etc.
E. Substantifs dérivés des noms de nombre avec un sens collectif :
δεκάς « dizaine », πεμπάς « groupe de cinq personnes ou choses », etc.
F. Substantifs divers d’étymologie inconnue : ἰσχάς « figue sèche »,
ψακάς « goutte », « miette ».
Quant aux catégories dérivationnelles A et B, leur protohistoire est
très spéculative. Après une analyse minutieuse, J. Rau conclut que le
type Α est plus ancien et propose la séquence dérivationnelle suivante
pour expliquer son origine :
1) Des adjectifs thématiques à valeur possessive ont été dérivés à
partir des substantifs à suffixe *‑eh2 : *nomeh2‑ « pâturage » →
*nomh2ó‑ « du pâturage ».
2) Ces adjectifs pouvaient être substantivés avec un suffixe *‑ed‑
qui, à l’origine, avait une valeur individualisante : *nomh2é‑ed‑/
*nomh2é‑d‑ « personne liée au pâturage » > *nomh2ā́ d‑/*nomh2á‑d‑.
3) Une généralisation du degré zéro du suffixe explique la forme
finale du suffixe ‑άδ‑ : nomh2á‑d‑ > *nomád‑ > νομάς « celui/celle
qui pâture ».
Dans cette hypothèse, les adjectifs et substantifs déverbatifs (catégorie
B ci‑dessus) appartiennent à une catégorie secondaire. En effet, certaines
formes peuvent être interprétées comme dénominaux ou comme déad-
jectivaux (τόκος « accouchement » : τοκάς, ἀμοιβή « don en échange » :

6. Cf. aussi τοκάς « qui a mis bas », « qui a des petits » (: τίκτω « avoir un enfant »),
λογάς « choisi » (: λέγω « choisir »), etc.
7. Voir Rau, art. cit., p. 157-160. Ces formes ne sont pas mentionnées dans les listes
de composés à deuxième membre verbal tirés de ces radicaux dans O. Tribulato,
Ancient Greek Verb-Initial Compounds. Their Diachronic Development within the
Greek Compound System, Berlin, 2015, p. 373 et 388.
422 alcorac alonso déniz

ἀμοιβάς, φυγή « fuite » : φυγάς, etc.). Il semble que certaines formations,


qui étaient par leur origine dénominales ou déadjectivales, ont été réin-
terprétées secondairement comme déverbales et ont ensuite déclenché la
création de formes purement déverbales (λαμπάς, μαινάς, etc.).
Enfin, les catégories C et D ont des parallèles dans certaines langues
indo‑européennes, qui cependant présentent une consonne flexionnelle
‑t‑ au lieu de la sonore du grec 8. Il faut admettre que ces deux catégories
ont été attirées à l’époque préhistorique vers le type flexionnel en ‑αδ‑
qui était productif par analogie proportionnelle à partir du nominatif et
du datif pluriel quand *‑ts(‑) et *‑ds(‑) ont abouti à *‑ss(‑) 9.
Comme j’essaierai de le montrer dans cette contribution, le suffixe
‑(ι)άδ‑ s’est étendu dans le système des anthroponymes féminins à partir
des ethniques appartenant à la catégorie A ci‑dessus. La question de la
diffusion du suffixe dans ce système n’apporte rien sur son origine.

2. Distribution chronologique, géographique


et sociale des anthroponymes en ‑(ι)άδ‑

Pour cette étude ont été analysés les anthroponymes féminins à suffixe
‑(ι)άδ‑ que l’on trouve dans les recueils prosopographiques qui couvrent
le monde grec d’Europe et Chypre 10, les régions côtières de l’Asie
Mineure 11, la Cyrénaïque 12, la cité de Rome 13, et l’Égypte 14. En gros,
cela représente quelque 140 noms en ‑(ι)άδ‑ pour environ 1 000 femmes
différentes. Ces chiffres absolus sont à prendre avec précaution, parce

8. Cf. Rau, art. cit., p. 159-160.


9. Postérieurement dans les dialectes méridionaux le groupe *‑ss‑ intervocalique
devient ‑σ‑.
10. Attique (LGPN 2, le supplément en ligne sur le site du LGPN, http://www.LGPN.
ox.ac.uk, et la prosopographie de l’attique en ligne « Athenian Onomasticon », sur le
site http://www.seangb.org), Argolide, Corinthe, Laconie, Messénie, Arcadie, Élide
et Achaïe (LGPN 3a), Mégaride, Béotie, Grèce centrale (LGPN 3b), Grèce du Nord-
Ouest (LGPN 3a), Macédoine, Thrace et la partie septentrionale du Pont (LGPN 4),
îles de la mer Égée (LGPN 1), Sicile et Grande Grèce (LGPN 3a).
11. Pont, Bithynie, Mysie, Éolide, Ionie (sauf Milet) et Lydie (LGPN 5a), Carie (avec
Milet), Lycie, Pamphylie et Cilicie (LGPN 5b).
12. Cyrénaïque (LGPN 1).
13. Solin, GRSN, et Solin, GPNR.
14. Preisigke, Namenbuch, Foraboschi, OAP, et la base de données en ligne Trismegistos
(http://www.trismegistos.org).
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 423

que les onomasticon utilisés n’offrent pas la totalité des formes vrai-
ment attestées dans la documentation. Ainsi, les volumes du LGPN ne
mentionnent pas toutes les femmes affranchies et même les esclaves,
p.  ex. Τιμάς (IBouthrotos 40.14, post 163 a. C.). Les prosopographies
analysées présentent parfois aussi des fantômes, comme Ἰνιάς (LGPN 1,
Samos, iie a. C.), qui est en réalité le banal [Μ]ηνιάς 15.
On n’offre pas ici une liste complète de la distribution par régions
pour deux raisons. D’abord, elle dépasserait l’espace accordé pour cette
contribution. Ensuite, elle serait trop répétitive, sans différences notables
d’une région à l’autre (voir infra). Pour illustrer la distribution chrono-
logie des différents types des noms à suffixe ‑(ι)άδ‑ selon les radicaux,
voici les données de l’Attique dans le tableau nº 1 16.
Tableau 1. — A : ethniques ; B : dérivés d’épiclèses et liés aux concours
panhelléniques 17 ; C : théophores ; D : sobriquets ; E : Lallnamen

A B C D E
ve a. C. Ὀλυμπιάς (?)a
ive a. C. Ἰάς Νεμεάς Ἀπολλωνιάς Γοργάς
Δωριάς Ὀλυμπιάς Δορκάς
Μηλιάς Ἰσθμιάς Βιτιάς
Δηλιάς Πυθιάς
Ἑλλάς
Ἀργονιάς
iiie a. C. Δηλιάς Ὀλυμπιάς Ἀσκληπιάς Δορκάς
Ἰάς Νεμειάς Μηνιάς Ἰσχάς
Πυθιάς Λαμπάς
iie a. C. Δηλιάς Ὀλυμπιάς Ἀσκληπιάς Δορκάς Νανάς
Νεμειάς Ἰσιάς Ἰσχάς
Πυθιάς Μηνιάς Λαμπάς
ier a. C. Δηλιάς Ὀλυμπιάς Ἀσκληπιάς
Πυθιάς Μηνιάς
Ἰσιάς
Σαραπιάς
ier p. C. Ὀλυμπιάς Ἀσκληπιάς
iie p. C. Θεσπιάς Πυθιάς Ἰσιάς Δορκάς
Ἀσκληπιάς Πλειάς
Μηνιάς

15. Voir IG XII 6, 451.1.


16. Pour les dates précises voir LGPN 2 et le supplément du LGPN 2 en ligne.
17. Sur l’origine de ces formes, voir Bechtel, AF, 52-53.
424 alcorac alonso déniz

A B C D E
iiie p. C. Πυθιάς Ἀσκληπιάς Τατιάς
Ὀλυμπιάς Ἀφροδισιάς
Ἰσιάς
Σεραπιάς
a.  La forme est douteuse. Les éditeurs de LGPN lisent ΟΥΜΠΙΑΣ à partir du dessin de F. Wil-
lemsen, « Die Fluchtafeln », dans W. K. Kovacsovics et al. (éd.), Die Eckterrasse an der Gräbers-
trasse der Kerameikos, Berlin, 1990, 147, Abb. 168. En tout cas, D. R. Jordan, « New Greek curse
tablets (1985-2000) », GRBS 41 (2000), 7-8, nº 4, date le document dubitanter du ive a. C.

En dehors de l’Attique, les attestations jusqu’à ca 300 a. C. sont les


suivantes :
Béotie : Ὀλυμπιάς (LGPN 3b, Thèbes, ive a. C. ?), ῾Ελλάς (LGPN 3b,
Thèbes, ive-iiie a. C. ?).
Phocide : Βρομιάς (LGPN 3b, f. ive a. C.), ῾Ελλάς (LGPN 3b, 362
a. C.).
Locride : Ὀλυμπιάς (LGPN 3b, ive a. C.).
Thessalie : Ἑλλάς (LGPN 3b, Phères, ive a. C.), Ὀλυμπιάς (LGPN 3b,
Larissa, ive-iiie a. C.).
Épire : Ὀλυμπιάς (LGPN 3b, Molosses, 380-316 a. C.), Τρωϊάς
(LGPN 3b, Molosses, ive a. C.).
Macédoine : Πυθιάς (LGPN 4, Stagiros, 335-275 a. C.).
Nord de la mer Noire : Ὀλυμπιάς (LGPN 4, Panticapée, ive a. C.).
Kos : Ὀλυμπιάς (LGPN 1, 321-300 a. C.).
Eubée : Ἑλλάς (LGPN 1, Érétrie, f. ve a. C.).
Chypre : Ἑλλάς (LGPN 1, Salamine, ive-iiie a. C.).
Mysie : Πυθιάς (LGPN 5a, Atarnée, m. ive a. C.).
Ionie : Δεξιάς (LGPN 5a, Érythrées, ive a. C.), Νικάς (LGPN 5a, ive-
iiie a. C.).
Carie : Ἀσιάς (LGPN 5b, Cnide, ive a. C.), Βιτιάς (LGPN 5b,
Karyanda, ive a. C.).
Les noms en ‑(ι)άδ‑ les plus répandus (15 attestations ou davantage)
dans le corpus analysé appartiennent aux classes suivantes :
1) Dérivés d’épiclèses et liés aux concours panhelléniques : Ὀλυμ­
πιάς (126) et Πυθιάς (28).
2) Théophores : Ἰσιάς (85), Ἀσκληπιάς / Ἀσκλαπιάς (58), Σεραπιάς /
Σαραπιάς (27), Μηνιάς (24), Ἡλιάς (17) et Διονυσιάς (15).
3) Ethniques anciens : Ἑλλάς (42) et Ἰάς (15).
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 425

4) Sobriquets : Δορκάς (35).


5) Formes raccourcies de noms composés : Φιλιάς (17).
La diffusion de certains de ces noms a peut-être une origine pré-
cise. Ὀλυμπιάς doit figurer à côté des anthroponymes tirés des épiclèses
associées aux grands concours panhelléniques, avec Νεμεάς, Ἰσθμιάς
et Πυθιάς. Mais sa diffusion se trouve en rapport avec la maison royale
de Macédoine. D’après Plutarque, l’épouse de Philippe II et mère du roi
Alexandre le Grand a porté quatre noms différents : Πολυξένη, Μυρτάλη,
Ὀλυμπιάς et Στρατονίκη 18. Elle a été très probablement appelée Ὀλυμπιάς
en commémoration de la victoire de son époux à Olympie en 356 a. C.
D’autres noms se trouvent particulièrement attestés dans certaines
régions. Presque tous les exemples de Φιλιάς proviennent de Cos (voir
LGPN 1). En dehors de cette île, ce nom est attesté une seule fois en
Égypte à la même époque 19 et dans l’épitaphe d’une affranchie à Rome 20.
Les féminins en ‑(ι)άδ‑ sont particulièrement nombreux dans les
sources d’Italie. On y trouve des sobriquets qui ne sont pas attestés ail-
leurs. Comme souvent dans l’onomastique grecque trouvée à Rome, ces
noms apparaissent à basse époque (à partir du ier a. C.), et la plupart sont
portés par des esclaves ou par des affranchies. Sont ainsi attestés : Stibas
(cf. στιβάς « lit d’herbes »), Psacas/Psekas (cf. ψακάς et ψεκάς « miette,
grain, goutte d’eau ») 21, Logas (λογάς « choisie » ou λωγάς « prosti-
tuée ») 22, Alypias (cf. ἀλυπιάς) 23, Myrias (cf. μυριάς « myriade »), Icmas
(ἰκμάς « jus », ἴκμη « sorte de plante »), Nomas (cf. νομάς « nomade »),
Oenas (cf. οἰνάς « vigne »), Cemas (cf. κεμάς « jeune biche »), Rhembas
(cf. ῥεμβάς « vagabonde »), etc.

18. Plut., Mor. 401b. Voir W. Heckel, « Polyxena, the mother of Alexander the Great »,
Chiron 11 (1981), p. 79-96. Sa sœur été appelée Τρωϊάς (Plut., Pyr. I, 1)
19. P. Cairo Zen. 2 59176r.255 (255 a. C.).
20. CIL VI, 8006.4.
21. Psecas est le nom d’une esclave chez Cicéron (Fam. 8, 15, 2) et chez Juvénal (Sat.
2.491). Psecas est aussi le nom donné par Ovide à une nymphe. Voir E. Risch,
« Rund um eine pompejanische Wandinschrift », MH 32 (1975), p. 111-112. D’après
le Thesaurus linguae Latinae, vol. X 2 (2006), p. 2408, cette forme indiquerait aussi
le métier d’un esclave dans CIL VI, 9840 : Arcelaus psecas.
22. Cf. λωγάς· πόρνη (Hsch., λ 1495 Latte).
23. Le nom fait partie d’une série tirée de l’adjectif ἄλυπος, voir HPN 290 et Solin, op.
cit., p. 919-920. Or ἄλυπος ou ἀλυπιάς est le nom d’une plante, Globularia alypum
« globulaire buissonnante », et aussi la Daphne oleoides.
426 alcorac alonso déniz

En Égypte le suffixe ‑(ι)άδ‑ a servi à la création des noms fémi-


nins théophores à partir de divinités autochtones : Ταποσειριάς (P. Oxy.
1276.4, iiie p. C.) et Ἰβειάς (P.Sakaon 79.4, iiie p. C.).
On s’attendrait à ce que certains noms, particulièrement les dérivés
d’ethniques, soient attestés dans les régions géographiques d’origine. Or
Κιτιάς apparaît à Κίτιον, mais aussi à Rome (LGPN 3a, imp.) et à Rhodes
(LGPN 1) 24. Ὀρειάς est une femme de Biannos (LGPN 1, hell.-imp.), à
l’est de la Crète, tandis que les Ὄρειοι désignent une confédération des
cités de l’Ouest de la Crète (Élyros, Hyrtakina, Lisos, Tarrha) 25.
Quant à l’origine sociale, les esclaves et affranchies portent souvent un
nom en ‑(ι)άδ‑ qui est un ethnique : Καριάς (Élimée, 168 a. C.), Θεσπιάς
(Delphes, 84-60 a. C.). Παριάς est une nourrice (μαῖα), à Paros (LGPN
1, imp.). Il n’y a ici rien d’étonnant, car les ethniques sont habituels dans
la prosopographie des esclaves et des affranchis. Quelques prostituées
portent des noms en ‑(ι)άδ‑ : Ἰσθμιάς (LGPN 2, 345-340 a. C.), Νεμεάς
(LGPN 2, ive a. C.), Πυθιάς (LGPN 2, iiie a. C.), Λαμπάς (LGPN 2, Ath.
583e) 26. Ἰσχάς est le nom d’une hétaïre (LGPN 2, ive-iiie) et le nom pour-
rait être associé à son métier, car ἰσχάς « figue sèche » est utilisé comme
métaphore du sexe féminin 27. Cependant, certains de ces noms, comme
Ἰσθμιάς et Νεμεάς, sont très fréquents dans l’anthroponymie féminine, et
par conséquent on ne peut pas tirer de conclusions sur la caractérisation
sociale du suffixe ni sur la caractérisation des noms en question.

3. Excursus : des masculins en ‑άδ‑

Les adjectifs dénominatifs et déverbatifs en ‑(ι)άδ‑ ont pu accom-


pagner des substantifs de genre masculin, et certaines formes ont pu
désigner des entités de sexe masculin (p. ex. φυγάς « exilé », γυμνάς
« athlète » ; voir § 1). Mais les exemples d’anthroponymes mascu-
lins sont presque inexistants. La seule exception est Ἀρκάς, qui est par
24. Voir Masson, OGS I-II, p. 414-415.
25. Les ὀρειάδες sont des nymphes des montagnes chez Bion.
26. Ψακάς. ὄνομα αὐλητρίδος (EM, 817). Il existe une série des formes en ‑αδ‑ pour dire
« prostituée », « hétaïre » : κασαλβάς (Ar. +), χαλιμάδες· ἀναίσχυντοι καὶ θρασεῖαι
(Hsch., χ 56 Hansen Cunningham). Voir Chantraine, Formation, p. 351.
27. Hipp. fr. 124. Voir V. Buchheit, « Feigensymbolik im antiken Epigramm », RhM 103
(1960), et J. Henderson, The Maculate Muse. Obscene Language in Attic Comedy,
New York - Oxford, 1991, p. 21.
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 427

ailleurs la forme habituelle de l’ethnique « arcadien » (p. ex., LGPN 5b,


Milet, 437 a. C.). Même si l’ethnique est utilisé comme féminin (cf.
Ἀρκὰς Ἀταλάντη, Eur., fr. 530.4), il n’y a aucun exemple de femme dans
mon corpus. Les éditeurs du LGPN 3a présentent un Λαμπάς oxyton pour
un potier dans un timbre amphorique d’Héraclée (I.Heraclea, p. 147, ive-
iie a. C.). Étant donné qu’il n’y a pas d’autre femme dans les catalogues
des potiers d’Héraclée, il est mieux de supposer un sobriquet Λαμπᾶς (cf.
Λάμπων, Λάμπις) ou peut-être une erreur pour Λαμπ‹ί›ας (cf. LGPN 1).
Chez Aristophane, il y a un autre exemple possible de masculin : Ἀντί-
μαχον τὸν Ψακάδος [...] κακῶς ἐξολέσειεν ὁ Ζεύς « que Zeus extermine
totalement et de manière épouvantable Antimakhos, fils de Psakas »
(Ach., 1150-1151). Une scholie ajoute ἦν δέ τις καὶ Ὀλυμπιακὸς καλού-
μενος Ψακάς 28, ce qui pourrait confirmer que Ψακάδος est un patro-
nyme et non le nom de la mère d’Antimakhos. Les éditeurs du LGPN 3a,
citant le personnage éléen de la scholie, accentuent Ψακᾶς, comme s’il
s’agissait d’un sobriquet tiré de ψάκαλον ou ψάκελον « nouveau-né d’un
animal » 29. Mais la scansion du vers et la flexion en dentale, inconnue des
documents attiques au ve a. C., excluent cette possibilité dans le passage
d’Aristophane 30. Comme j’essaierai de le montrer ailleurs, les interpré-
tations de commentateurs anciens et modernes, qui considèrent le nom
comme un dérivé du verbe ψακάζω « postillonner », sont erronées 31. En
revanche, le nom masculin Ψακάς peut s’expliquer à la lumière de la
28. Sch. ad Ach. 1150b Wilson.
29. À Athènes nous avons le féminin Ψακύθε̄ (LGPN 2, ca 510-500 a. C. ?), avec un suf-
fixe ‑υθ‑ peut-être issu d’une réanalyse de Μικύθη, Σμίκυθος, Σμικυθίων, etc., voir
C. de Lamberterie, Les adjectifs grecs en -υς. Sémantique et comparaison, Louvain-
la-Neuve, 1990, p. 195-196. Cf. les formes thessaliennes masculin Ψακαδίας (LGPN
3b, Erikinion, av. 356 a. C.) et Ψακελίας (LGPN 3b, Erikinion, 375-350 a. C.), qui
sont tirés de ψάκαλον, ψάκελον et ψακάδιον). Voir Bechtel, EMP, p. 12.
30. Cf. L. P. E. Parker, The Songs of Aristophanes, Oxford, 1997, p. 148-151 pour la
métrique de ce passage. La flexion en ‑ᾶδος des masculins apparaît dans les inscrip-
tions attiques plus anciennes exclusivement dans des noms portés par des person-
nages étrangers, voir L. Threatte, The grammar of Attic inscriptions, II. Morphology,
Berlin - New York, 1996, p. 86-87.
31. Ψακὰς δὲ οὗτος ἐπεκαλεῖτο, ἐπειδὴ προσέρραινε τοὺς ὁμιλοῦντας διαλεγόμενος
(EΓLh) ; τὸν Ψακάδος ἔφη, οἱ μὲν ὅτι οὕτως ἐπεκαλεῖτο διὰ τὸ συνεχῶς πτύειν, ἢ διὰ
τὸ μηδὲν ἀναλῶσαι (R) ; ψεκάς. δρόσος. Ἀντίμαχος οὕτως ἐκαλεῖτο Ψεκάς. ἐπὶ τῶν
πτυελωδῶν (Suda ψ 39) ; Ψεκάς: ἡ δρόσος. Οὕτως ἐκαλεῖτο Ἀντίμαχος πτυελώδης
ὤν (Diogen. 8.71). Voir N. Kanavou, Aristophanes’ Comedy of Names. A Study of
Speaking Names in Aristophanes, Berlin - New York, 2011, p. 47-48.
428 alcorac alonso déniz

glose de Pollux (VI, 145), qui énumère ψακάς parmi les mots employés
εἰς τὸν ὀλίγα ὑπ’ ἀσθενείας λέγοντα. Parallèlement, l’usage de mots qui
désignent de petits objets et des choses insignifiantes pour désigner l’en-
fant se trouve attesté en grec dans l’anthroponymie 32. Une glose d’Hé-
sychius présente une équivalence entre ψακάς et ψίαξ : ψίακα· ψακάδα
(Hsch., ψ 174 Hansen et Cunningham). Or, Ψίαξ est attesté deux fois en
Attique comme nom d’homme (LGPN 2, 530-515 a. C.).
Tout en étant une anomalie dans le système des formations en ‑(ι)άδ‑
dans l’anthroponymie féminine, Ψακάς montre peut-être un trait
archaïque, rappelant l’époque où les mots du lexique à suffixe ‑(ι)άδ‑
pouvaient avoir un genre grammatical masculin aussi bien que féminin 33.

4. ‑(ι)αδ‑ dans l’anthroponymie féminine :


une diffusion tardive à partir des ethniques

Le développement du suffixe ‑(ι)άδ‑ dans l’anthroponymie est rela-


tivement tardif, car nous ne trouvons pas de féminins en ‑(ι)άδ‑ avant le
ve a. C. (§ 2). Parmi les premiers exemples d’anthroponymes féminins
attestés à partir de cette époque figurent les ethniques, tant les anciens
(Ἑλλάς), que les dérivés des masculins en ‑ιος (Δηλιάς). Il est donc très
probable qu’il faille établir le point de diffusion du suffixe dans cette
catégorie.
Il n’y aucune attestation d’ethniques en ‑(ι)άδ‑ en fonction d’anthro-
ponyme dans les textes mycéniens, où les ethniques avec les suffixes
‑id‑ et ‑ijā‑ sont en revanche déjà attestés dans le système des anthro-
ponymes féminins 34. Or, le suffixe existait déjà pour créer des dérivés
d’ethniques féminins. En effet, la tablette PY An 292 (main 1) présente
le texte suivant :

32. Voir J. Curbera, « Simple Names in Ionia », dans PNAA, p. 108. Cf. le cognomen lat.
Gutta.
33. Le prétendu Hirtius Psacas du LGPN est un fantôme. Il s’agit d’une Hirtia
Psacas (CIL IV, 3905). Voir G. Klaffenbach, « Epigraphische Miszellen », dans
G. E. Mylonas et D. Raymond (éd.), Studies Presented to D. M. Robinson on his
Seventieth Birthday, Saint Louis (MO), 1953, p. 290 et E. Risch, art. cit., p. 111-112.
34. Cf. pi-we-ri-di /Pīweridi/ (MY Oe 103.5 ; cf. l’ethnique pi-we-ri-si /Pīwerisi/ MY
Fo 101.5), te‑qa‑ja /Thēgwaijā/ (KN Ap 5864.4), ko‑ri‑si‑ja /Korinsijā/ (PY Eb
347.1+).
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 429

1  si-to-ko-wo
2   ka-pa-ra2-de  MUL  24  ko-wo  10
3   ḳọ-ro-ki-ja[   ]MUL  8  ko-wo[
4   ki-ni-di[-ja   MUL]  21  ḳọ[-wo
Il s’agit d’une liste de femmes, accompagnées de leurs ko‑wo,
qui avaient la fonction de si‑to‑ko‑wo 35. L’interprétation précise de
ka‑pa‑ra2‑de n’est pas sûre, mais il s’agit sans doute d’un groupe de
femmes et d’un mot avec une terminaison /ad/ 36. Chez Homère, le suf-
fixe ‑(ι)άδ‑ apparaît dans les dérivés des ethniques masculins en ‑ιο‑ :
Ἀχαιιός : Ἀχαιιάς (voir infra). Il est donc probable que ka‑pa‑ra2‑de
recouvre un ethnique en ‑(ι)άδ‑ qui aurait été créé à partir d’un ethnique
en ‑ijo‑, cf. ki‑ni‑di[‑ja à la ligne 4 de la même tablette 37. Dans cette
hypothèse, ka‑pa‑ra2, qui apparaît dans une liste d’hommes qui ont la
fonction de ka‑ke‑we /khalkēwes/ « forgerons » (PY Jn 706, main 21), à
côté d’autres noms masculins 38, serait la forme du nominatif singulier,
utilisé comme anthroponyme masculin 39. Après tout, au premier millé-
naire Ἀρκάς est très répandu comme anthroponyme masculin (voir § 3).
Chez Homère des ethniques sont aussi employés comme noms de
femmes. Αἰγιάλεια (Hom., Il. 5.412), la femme de Diomède, correspond

35. Probablement /sītokhowoi/ « celles qui versent des céréales » ; cf. χέω et à Argos les
κριθοχύται, des hommes chargés de la distribution des céréales, voir C. B. Kritzás,
« Ετυμολογικές παρατηρήσεις σε νέα επιγραφικά κείμενα του Άργους », dans
Φωνές, p. 144.
36. Voir J. L. Melena, « Mycenaean writing », dans Y. Duhoux et A. Morpurgo Davies
(éd), A Companion to Linear B. Mycenaean Greek Texts and Their World, III, 2014,
p. 65 et B. A. Olsen, Women in Mycenaean Greece. The Linear B Tablets From Pylos
and Knossos, Milton Park, 2014, p. 85-86. ka‑pa‑ra2‑de apparaît dans un contexte
similaire dans PY Aa 788 (main 1). Le génitif plural ka‑pa‑ra2‑do apparait dans PY
Ad 679 (main 23), dépourvu de contexte.
37. Il est possible qu’il faille situer l’origine de ces individus en Asie Mineure, voir
V. Parker, « Die Aktivitäten der Mykenäer in der Ostägäis im Lichte der Linear B
Tafeln », dans S. Deger-Jalkotzky et al. (éd.), Floreant Studia Mycenaea. Akten des
X. Internationalen Mykenologischen Colloquiums in Salzburg vom 1.-5. Mai 1995,
Vienne, 1999, p. 495-502. À mon avis, la région de Καβαλίς, au nord de la Lycie,
serait un possible candidat.
38. Cf. a‑no‑me‑de /Anormēdēs/ (.5), qi‑si‑ja‑ko /Kwīsijarkhos/ (.6), ma‑ra‑si‑jo
/Malansijos/ (.9 ; cf. μέλας), etc.
39. Il est peu probable que ka‑pa‑ra2 puisse répondre à un masculin en ‑ᾶς. Voir
O. Masson, « Résumé des conférences », Annuaire de la IVe section (Sciences histo-
riques et philologiques) de l’École pratique des hautes études (1966-1967), p. 171.
430 alcorac alonso déniz

au masculin Αἰγιαλεύς, habitant de Αἰγιαλός, l’ancien nom de l’Achaïe 40.


En particulier, comme en mycénien, le suffixe ‑ίδ‑ qui forme le féminin
des ethniques, apparaît dans des noms de femmes. Βρισηίς semble la
forme féminine de Βρισεύς, qui est sans doute un ethnique utilisé comme
anthroponyme 41. On peut interpréter de la même manière Κισσηίς (d’un
*Κισσεύς ; cf. Κισσός) et Χρυσηίς (d’un *Χρυσεύς, cf. Χρύση). Ces
anthroponymes ont de toute évidence été interprétés secondairement
comme des patronymes 42. Quoi qu’il en soit, on ne trouve jamais chez
Homère de noms de femmes dérivés à suffixe ‑(ι)άδ‑ ni d’un toponyme
ni d’un anthroponyme masculin, même si le suffixe apparaît déjà dans les
ethniques : Ὀλυμπιάδες Μοῦσαι (Il. 2.491), Πηλιάδα μελίην (Il. 16.143).
La seule exception est le nom de la mère d’Hermès. Chez Homère,
elle est connue sous le nom de Μαιάς (Od. 14.435), et Hésiode utilise
Μαίη et Μαιάς (fr. 217). La forme Μαιάς apparaît aussi chez Hipponax
(fr. 3 West) 43. Mais en réalité ce mot appartient à un groupe de dérivés
de noms du lexique de nourrice, où la flexion en ‑άδ‑ en alternance avec
‑α est attesté, cf. ἀμμά et ἀμμάς « mère, nourrice » 44.
Étant donné que le suffixe de patronymes en -άδας / ‑άδης et -ίδας /
‑ίδης semble avoir une relation formelle et génétique avec le suffixe
‑(ι)άδ‑ 45, et étant donné que -άδας / ‑άδης et -ίδας / ‑ίδης apparaît dans
le système des anthroponymes masculins à haute époque, il est remar-
quable que ‑(ι)άδ‑ ne soit pas attesté dans les noms de femmes à la même
époque. Les patronymes du type Ἡλιάδες « filles de Ἥλιος » (Parm.
+), Θεστιάς « fille de Θέστιος » (Esch. +, c’est à dire Léda ou Althéa),
Βορεάς « fille de Βορέης » (Soph. +) apparaissent dans la tragédie attique

40. Cf. aussi Δανάη (Hom., Il. 14.319), la fille d’Akrisios et mère de Persée, qui est
dérivé de l’ethnique masculin Δαναός (cf. Δαναίδες)
41. Cf. le toponyme Βρῆσα, Βρῖσα (Lesbos). Voir Kamptz, HomPN, p. 289.
42. Χρυσηίς, fille de Χρυσεύς, Βρισηίς, fille de Βρισεύς. Cf. Νηρηίδες, les filles de
Νηρεύς (Il. 18.38 +). En tout cas, le suffixe ‑ιδ‑ apparaît dans Ἀκτορίς (Od. 23.228),
qui dérive sans doute de Ἄκτωρ, cf. aussi Πανδιονίς, fille de Πανδίων (Sa., fr. 88 +).
43. Hipponax présente aussi le matronyme Μαιαδεύς pour Hermès. Cf. l’anthroponyme
masculin Μαιάδης (LGPN 2, ive a. C.).
44. Cf. ἀμμάς· ἡ τροφὸς Ἀρτέμιδος. καὶ ἡ μήτηρ. καὶ ἡ Ῥέα. καὶ ἡ Δημήτηρ (Hsch., α
3692 Latte). Voir P. Chantraine, « Les noms du mari et de la femme, du père et de la
mère en grec », REG 59-60 (1946), p. 242.
45. Voir Fick-Bechtel, GP, p. 26 et Risch, Wortbildung, § 53.
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 431

et postérieurement, ce qui montrerait qu’ils ont été créés par analogie


avec les formes des patronymes masculins (voir § 5).
Même si les anthroponymes féminins en ‑(ι)άδ‑ sont absents des
textes les plus archaïques, nous trouvons un phénomène dérivationnel
capital pour le développement du suffixe dans le système des anthropo-
nymes féminins. Il s’agit de l’alternance entre une forme en ‑ία ou ‑ίδ‑ et
une forme en ‑(ι)άδ‑ 46 (voir tableau 2).
Tableau 2

Féminins en ‑ία et ‑ίδ‑ Féminins en ‑(ι)άδ‑


Ἀχαιαί, Ἀχαιίδεςa (Hom. +) Ἀχαιιάδες (Hom. +)
Ἑλικωνίδες (Ib., fr. S151.24) Ἑλικωνιάδες (Hés.)
Λεσβίδες (Hom.), Λεσβία (Th.) Λεσβιάδες (Alc., fr. 130.32)
Τρωιαί (Hom. +) Τρωιάδες / Τρῳάδες 
Φθιώτιδες γυναῖκες (Eur.), Φθιάς (γῆ) (Eur.)
a.  L’alternance apparaît aussi en dehors des ethniques, cf. Νηιάδες (Hom., Alcm., fr. 63) vs Νηΐς
(Hom.).

Cette alternance dérivationnelle apparaît aussi dans le lexique


commun : πελειάδες (Hom.) vs πέλειαι, σύες χαμαιευνάδες (Od. 10.243)
vs. Σελλοὶ [...] χαμαιεῦναι (Il. 16.234-235), λευκή vs Λευκάς πέτρη
(Hom.), εἱρῳάς (Corin.) vs ἡρωίς (Pind. +).
Que cette alternance entre ‑α‑/‑ιδ‑ et ‑άδ‑ n’est pas un trait morpho-
logique poétique ou conditionné par le vers est confirmé par wo‑na‑si en
mycénien (KN Gv 863) face à οἴνη « vigne » chez Hésiode (Op. 572).
Par ailleurs, ce phénomène de variation dérivationnelle est bien attesté
dans le vocabulaire commun de toutes époques, même pour les féminins
en ‑α  <  *‑j(e)h2. Il se retrouve particulièrement dans les variantes qui
désignent la femelle des animaux : χιμαιράς (lesb., ive a. C.) vs χίμαιρα,
χιμαιρίς « chevrette », ἀμνάς (Τhéocr.) vs ἀμνά, ἀμνίς « agnelle », αἰγάς
vs myc. a3‑za, lac. αἶζα « chèvre » 47, lesb. ἀρνηάς « brebis » (cf. masc.
ἀρνειός, ἀρνεώς), πενθεράς vs πενθερά « belle-mère » 48. Cette alternance

46. Voir M. Meier-Brügger, -id-. Zur Geschichte eines griechischen Nominalsuffixes,


Göttingen, 1975, p. 64 et Balles, NWIG 1, p. 206.
47. Voir J. Méndez Dosuna, « ¿Un nuevo testimonio de αἶζα “cabra” en una lámina
órfica? », dans Á. Martínez Fernández (éd.), Estudios de epigrafía griega, La
Laguna, 2009, p. 369-375.
48. MAMA VII, 430.2-3 (Galatie, imp.). Voir C. Brixhe, Essai sur le grec anatolien au
début de notre ère, Nancy, 1987, p. 77.
432 alcorac alonso déniz

dérivationnelle est un phénomène de toute l’histoire du grec. En grec


moderne, αγελάδα « vache » est un dérivé de ἀγέλη « troupeau », qui
provient d’une forme ἀγελάς attestée en grec médiéval 49.
Cette alternance dérivationnelle entre ‑(ι)άδ‑ et ‑ία apparaît très sou-
vent dans les ethniques féminins employés comme anthroponymes (voir
tableau 3).
Tableau 3

Féminins en ‑ία Féminins en ‑(ι)άδ‑


Ἀσία (LGPN 2, ve a. C.)a Ἀσιάς (LGPN 5b, Cnide, ive a. C.).
Δηλία (LGPN 2, 258 a. C.) Δηλιάς (LGPN 2, Athènes, f. ive a. C.)
Κασία (LGPN 3b, Larissa, iie-ier a. C.) Κασιάς (LGPN 5b, Myra, iiie p. C.)
Λαμία (LGPN, ive-iiie a. C.) Λαμιάς (LGPN 3a, Palairos, iiie a. C.)
Ῥοδία (LGPN 2, ca 330-320 a. C.) Ῥοδιάς (LGPN 5b, Milet, iie-iiie p. C.)
Σαμία (LGPN 2, iiie a. C. ?) Σαμιάς (LGPN 3b, Mégare, iie-ier a. C.)
a.  Ἀσία est le nom d’une des filles de Themistoklès (Plut., Them. 32). Étant donné que ses sœurs
s’appelaient Ἰταλία et Σύβαρις, le nom semble un toponyme, et non pas un ethnique (HPN 551).
Mais pour la forme de l’ethnique, cf. myc. po-ti-ni-ja a-si-wi-ja /Potnijāi Aswijāi/.

Quant aux sobriquets, comme Δορκάς, Ἰσχάς, Λαμπάς, utilisés à


toutes les époques, ils n’apparaissent dans le corpus analysé qu’à partir
du ive a. C. Il est difficile d’évaluer l’influence que ces noms ont pu avoir
dans la diffusion du suffixe ‑(ι)άδ‑, car il s’agit d’une transposition du
lexique commun à la sphère de l’onomastique. Il en va de même pour
Ἑλλάς et Ἰάς, qui sont isolés dans le système dérivationnel des ethniques
féminins.

5. L’extension de ‑(ι)άδ‑ comme suffixe


dans d’autres systèmes

Une fois que ‑(ι)άδ‑ s’est établi comme suffixe dans le système des
anthroponymes féminins dérivés des ethniques (Δηλία : Δηλιάς), le suf-
fixe s’est étendu à d’autres catégories.

49. E. Trapp (éd.), Lexikon zur byzantinischen Gräzität. Besonders des 9.-12. Jahrhun-
derts, 1. A-K, Vienne, 2001, s.v. ἀγελάς.
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 433

Tableau 4

Masculins -ιάδας / ‑ιάδης Féminins en ‑(ι)άδ‑


Γυρτιάδης (Hom., Il. 14.512) Γυρτιάς (LGPN 3a, Sparta, ive a. C.)
Δαλιάδας (LGPN 3a, Tanagra, 424 a. C.) Δηλιάς (LGPN 2, ive a. C.)
Ἰλιάδης (LGPN 2, 45 a. C.) Ἰλιάς (LGPN 2, iie a. C.)
Κασιάδης (LGPN 5a, Éphèse, 54-59 p. C.) Κασιάς (LGPN 5a, Colophon, imp.)
Λαμιάδης (LGPN 1, Styra, ve a. C.) Λαμιάς (LGPN 3a, Palairos, iiie a. C. ?)
Μαλιάδας (LGPN 3a, iie a. C.) Μηλιάς (LGPN 2, 334 a. C.)
Νησιάδης (LGPN 1, Délos, 257 a. C.) Νησιάς (LGPN 1, Kos, ca 200 a. C.)
Σαμιάδας (LGPN 5a, Calcédoine, ive-iiie a. C.) Σαμιάς (LGPN 3a, Mégare, iie-ie a. C.)

L’usage du suffixe -άδας / ‑άδης avec des radicaux d’ethniques est


déjà connu chez Homère : Ἀργεάδης (Ἄργος, cf. ἐναργής; Il. 16.417), un
patronyme tiré de *Ἀργέης, Γυρτιάδης (Hom., Il. 14.512), un possible
patronyme en rapport avec le nom de la ville Γύρτων, Γυρτώνη en Thes-
salie 50, Kεάδης (Κῶς, Il. 2.847), un patronyme de *Κέης (cf. St. Byz.
Κεῖος ou Κήϊος) 51. Les noms féminins en ‑(ι)άδ‑ tirés des ethniques ont
facilement intégré ce système (tableau 4).
Une fois le système masc. Σαμιάδας / Σαμιάδης : fém. Σαμιάς établi,
‑(ι)άδ‑ à pu être compris comme un suffixe patronymique qui correspon-
dait au masculin ‑(ι)άδας / ‑(ι)άδης. D’une part, on trouve le système des
formes tirées des noms de divinités ou de leurs épiclèses (et qui donnent
leur nom à des concours panhelléniques), comme montre le tableau 5.
Tableau 5

Masculins en ‑(ι)άδας / ‑(ι)άδης Féminins en ‑(ι)άδ‑


Ἀπολλωνιάδης (LGPN 2, 348 a. C.) Ἀπολλωνιάς (LGPN 2, ive a. C.)
Ἀσκλαπιάδας (LGPN 3a, Argos, iv a. C.) Ἀσκληπιάς (LGPN 3a, Thyrreion,
e

iiie a. C.)
Διονυσιάδας (LGPN 5b, Éphèse, i a. C. ?) Διονυσιάς (LGPN 5a, Cumes, ier-iie p. C.)
e

Δημητριάδης (LGPN 2, ive a. C.) Δημητριάς (LGPN 5b, Olymos, 180-


160 a. C.)
Ἡλιάδας (LGPN 5b, Aspendos, iie a. C.)  Ἡλιάς (LGPN 1, Rhodes, ie a. C.)
Ἰσιάδης (LGPN 4, 130 a. C.) Ἰσιάς (BGU 6 1244.23, Phnebieus,
225 a. C.)

50. Voir Kamptz, HomPN, p. 337-338. Cf. Γύρτιος, père de Ὕρτιος (Eust., vol. III,
p. 686).
51. Pour une explication de cette nouvelle formation, voir Bechtel, HPN 560.
434 alcorac alonso déniz

Masculins en ‑(ι)άδας / ‑(ι)άδης Féminins en ‑(ι)άδ‑


Ὀλυμπιάδης (LGPN 1, Chalcis, ive a. C.) Ὀλυμπιάς (LGPN 2, ive a. C.)
Πυθιάδης (LGPN 2, 336 a. C.) Πυθιάς (LGPN 2, ive a. C.)
Σεραπιάδης (LGPN 5b, Mylasa, ier a. C.- Σαραπιάς (I.Memnonion 80.2, ca
ier p. C.) 200 a. C.)

Les formes suivantes appartiennent aussi à ce système, même si le


patronyme masculin correspondant n’est pas attesté dans notre corpus :
Βρομιάς (LGPN 3b, Phocide, ive a. C. ; cf. Βρομίδας), Μηνιάς (LGPN
2, ive-iiie a. C.), Ἀφροδισιάς (LGPN 2, iie-iiie p. C.), Ζηνιάς (LGPN 5b,
Kaunos, imp.), Διοσκουριάς (LGPN 1, Kos, hell.-imp.). De vrais patro-
nymes féminins que l’on trouve chez les tragiques attiques et postérieu-
rement, mentionnés plus haut (type Βορεάς, Ἡλιάς) correspondent aussi
à ce système.
D’autre part, des anthroponymes féminins ont été créés qui corres-
pondent à des anthroponymes masculins issus de la troncation des com-
posés et auxquels on ajoute le suffixe -ιάδας / ‑ιάδης (type Σωτιάδης), ce
que montre le tableau 6.
Tableau 6
Masculins en ‑(ι)άδας / ‑(ι)άδης Féminins en ‑(ι)άδ‑
Ἀἰνεισσάδας (LGPN 3b, Larissa, 200- Αἰνησιάς (LGPN 1, Kos, ca 200 a. C.)
190 a. C.)
Ἀλεξιάδας (LGPN 1, Kamiros, 286 a. C.) Ἀλεξιάς (LGPN 1, Lindos, iie a. C.)
Δεξιάδας (LGPN 3a, Sicyone, vie-ve a. C.) Δεξιάς (LGPN 5a, Érythrées, ive a. C.)
Καρπιάδης (LGPN 2, ive-iiie a. C. ?) Καρπιάς (LGPN 3a, Dikaiarchia,
iie a. C.)
Νικάδας (LGPN 4, Pella, iv a. C.)
e Νικάς (LGPN 5a, Érythrée, ive-iiie a. C.) 
Νικιάδης (LGPN 2, 423 a. C.) Νικιάς (LGPN 1, Lindos, iie a. C.) 
Παντάδας (LGPN 3a, Phlionte, iv a. C.)
e Παντάς (LGPN 5b, Halicarnasse, iiie-
iie a. C.)
Πειθιάδης (LGPN 2, 437 a. C.) Πειθιάς (LGPN 1, Rhodes, iiie a. C.)
Πλε̄στιάδης (LGPN 3a, Sellasia, ca Πλειστιάς (LGPN 3a, Dymè, iiie a. C.)
525 a. C.)
Σωτιάδης (LGPN 2, 328 a. C.) Σωτιάς (LGPN 1, Kos, ca 180 a. C.)
Φιλιάδης (LGPN 2, 510-505 a. C.) Φιλιάς (LGPN 1, Kos, ca 200 a. C.)

On peut attribuer deux autres formes à ce système, comme Θεστιάς,


Ἁγησιάς, même si les masculins correspondants en ‑(ι)άδας / ‑(ι)άδης,
*Θεστιάδας, *Ἁγησιάδας / *Ἡγησιάδης, ne sont pas attestés.
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 435

L’extension de ‑(ι)άδ‑ comme forme féminine correspondant à


‑(ι)άδας / ‑(ι)άδης se trouve aussi dans d’autres systèmes moins fré-
quents. Le nom ῾Ροδοιάς (LGPN 1, Rhodes, ca 215 a. C.) correspond
probablement à un masculin non attesté *῾Ροδοιάδας, cf. Ῥοδοῖος
(LGPN 1, Rhodes, iie a. C.). La forme Χαροιάδης (LGPN 2, 440-425
a. C.) confirme cette hypothèse (voir HPN 466).

6. L’alternance de ‑(ι)άδ‑ avec d’autres suffixes


féminins

Le suffixe ‑(ι)άδ‑ des systèmes définis dans la section précédente


apparaît comme alternative dans des séries dérivationnelles des féminins
en ‑ώ et ‑ίδ‑ (tableau 7).
Tableau 7

‑ώ ‑ίδ‑ ‑(ι)άδ‑
Μαλιώ Μηλίς (LGPN 2, ive a. C.) Μηλιάς (LGPN 2,
334 a. C.)
Πυθώ (LGPN 1, Délos, Πυθίς (LGPN 5a, Πυθιάς (LGPN 2, ive a. C.)
200-209 a. C.) Lampsaque, ive a. C. ?)
Αἰνησώ (LGPN 3a, Lipara, Αἰνησίς (LGPN 1, Kos, ca Αἰνησιάς (LGPN 1, Kos, ca
ive-iiie a. C.) 200 a. C.) 200 a. C.)
Ἀλεξώ (LGPN 3b, Halai, Ἀλεξίς (LGPN 3b, Ἀλεξιάς (LGPN 1, Lindos,
ive a. C.) iiie a. C. ?) iie a. C.)
Φιλώ (LGPN 1, Érétrie, Φιλίς (LGPN 5b, Cnide, Φιλιάς (LGPN 1, Kos, ca
ive a. C.) ive-iiie a. C.) 200 a. C.)

À partir des ces séries ‑(ι)άδ‑ a pu être aussi employé dans les systèmes
des sobriquets et des formes raccourcies, comme alternative à ‑ώ et ‑ίδ‑.
Sobriquets :
Βατιάς (LGPN 1, Kos, ca 200 a. C.) : Βατίς (LGPN 5a, Ilion, iiie-
iie a. C.), Βατιώ (LGPN 5b, Milet, iie a. C.) 52.
Βιτιάς (LGPN 1, Κos, ca 200 a. C.) : Βιττίς (LGPN 1, Kos, f. iiie a. C.) 53.

52. Cf. βατίς, le nom d’un oiseau (Arist, HA 592b). Voir Curbera, art. cit., p. 121-122.
53. Voir pour ce nom J. Curbera, art. cit., p. 124-125. Βιτιάς (4 exemples) est connu des
régions orientales et des îles de la mer Égée (Caria et Kos). L’exemple à Athènes est
douteux. Même si un masculin Βιτίας n’est pas attesté ailleurs, la forme est possible.
436 alcorac alonso déniz

Κοριττάς (LGPN 1, Κos, ca 200 a. C.) : Κοριττώ et Κοριττίς (même


femme dans le mime 6 d’Hérondas) 54.
Μιννιάς (LGPN 3b, Béotie, hell.) : Μιννίς (LGPN 5b, 320-300 a. C.),
Μιννώ (LGPN 4, Pella, ive a. C.) 55.
Ληνιάς (LGPN 1, Astypalée, iiie-iie a. C.) : Ληνίς (HPN 518).
Φιλιστιάς ; (LGPN 5b, iie a. C.) : Φιλιστίς, Φιλίστα (HPN 511).
Τιμάς (LGPN 3b, Delphes, 164 a. C. ?) vs Τίμα (LGPN 3b, Oropos,
vie a. C.), Τιμώ, Τιμίς.
Formes raccourcies :
Εὐπάς (LGPN 3b, Échédameia, 194 a. C.) est sans doute une forme
raccourcie de Εὐπάτρα. On ne connaît pas de *Εὐπῶ ou *Εὐπίς, mais
la série a pu exister, cf. Κλευπώ (LGPN 4, Thessalonique, iiie p. C.) et
Κλεουπώ (LGPN 3b, Larissa, imp.).
Ὀνασιάς (LGPN 1, Kition, iiie p. C.) : Ὀνασίς (LGPN 1, Paphos,
ve a. C.).
Ἀρσάς (LGPN 1, Héraklion, imp.) peut être interprété de la même
manière. Il faudrait supposer à côté du masculin Ἀρσίας (LGPN 1,
Olonte, iie a. C.), forme raccourcie de Ἀρσίλοχος vel sim., un féminin
*Ἀρσίς (cf. Σωτίς) en alternance avec Ἀρσάς.
Dans la plupart des cas, ces noms ne peuvent pas intégrer les systèmes
définis au § 5 et par conséquent une interprétation de ‑(ι)άδ‑ comme
patronymique est moins sûre. Or on hésite devant quelques cas : Σιμάς
(LPGN 3a, Palairos, iiie a. C.) : Σιμώ (LGPN a, Colophon, ive  a. C.),
mais aussi Σιμάδε̄ς (LGPN 1, Styra, ve a. C.).
Dans le système des noms féminins, le suffixe ‑(ι)άδ‑ se trouvait sou-
vent à côté de variantes en ‑ία, tout d’abord dans les ethniques, Δηλία :
Δηλιάς, mais aussi dans les théophores, Ἀπολλωνία : Ἀπολλωνιάς, et les
formes raccourcies, Σωτία : Σωτιάς. À partir de ces alternances, on a créé
des variantes en ‑(ι)άδ‑ de tout nom terminé en ‑α bref et ‑α/η. Ce nou-
veau système ne se trouve qu’à partir du ier a. C. (tableau 8).

54. Cf. respectivement Herond. 6.12+ et .46. Pour la terminaison -ιτος, avec gémination
expressive -ιττος, voir Bechtel, op. cit., p. 64, n. 63 et Masson, OGS III, p. 137-139.
55. Voir J. Curbera, art. cit., p. 133.
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 437

Tableau 8
Féminins en ‑(ι)α et ‑(ί)α / ‑(ί)η Féminins en ‑(ι)άδ‑
Ἀσκληπιοδώρα (LGPN 2, 336 a. C.) Ἀσκληπιοδωράς (MAMA X, 529.2-3,
Tiberiopolis, imp.)
Δόξα (LGPN 2, ive a. C.) Δοξάς (IG II² 7897, ier p. C.)a
Ἐλπιδία (LGPN 2, iie p. C.) Ἐλπιδιάς (LGPN 5a, Syllantenoi, iiie p. C. ?)
Ἐπιμέλεια (LGPN 3a, Laconie, iie a. C.) Ἐπιμελεάς (LGPN 4, Sirrha, 136 p. C.)
Εὐπάτρα (LGPN 3b, Azoros, ive a. C.) Εὐπατράς (LGPN 3b, Delphes, 53-39 a. C.)
Κύριλλα (LGPN 1, Mytilène, imp.) Κυριλ(λ)άς (LGPN 4, Périnthe, iiie p. C.)
Μηνοφίλα (LGPN 5a, Éphèse, iiie- Μηνοφιλάς (Steinepigramme 16/23/13.8-9,
iie a. C.) Aizanoi, 310 p. C.)
Ματροδώρα (LGPN 5a, Chalcédoine, Μητροδωράς (LGPN 5a, Charakipolis,
ive-iiie a. C.) 182 p. C.)
Ποταμία (LGPN 5a, Pergame, i -ii  p. C.) Ποταμιάς (LGPN 5a, Nicée, iie p. C. ?)
er e

Τρυφῶσα (LGPN 4, Byzance, iie a. C.) Τρυφωσάς (LGPN 5a, Sardes, iiie p. C.)
a.  Femme de Ἄ‹γ›κυρα en Galatie.

Cette flexion apparaît aussi pour des noms latins et sémitiques : Ἀντω-
νιάς, Μαριάς (LGPN 1, iiie p. C.) 56. Les alternances du tableau 8 sont res-
ponsables de la création analogique d’un type nouveau en Asie Mineure :
Μητροδώρα : Μητροδωράς :: Τυχής : Τυχῆδος 57. Ces deux flexions, ‑(ι)άδ‑
et ‑ηδ‑, auraient été motivées par le désir d’éviter les anomalies provo-
quées dans la flexion des thèmes en ‑α bref et ‑α/‑η par différents procès
phonologiques du grec tardif 58. Certains faits laissent entrevoir comment
le phénomène s’est développé en provoquant des anomalies. Dans une
épigramme d’époque impériale trouvée à Rome, la défunte, originaire
d’Apamée, est appelée Ὀλυμπία et Ὀλυμπιάδι 59. La fin du vers est Σωτᾶς
Ὀλυμπιάδι πέποικα, où l’avant-dernière syllabe de Ὀλυμπιάδι peut être
comprise comme lourde, ce qui indiquerait un type flexionnel particulier
qui combine la voyelle longue de ‑ία et la dentale de ‑(ι)άδ‑ 60.

56. Cf. aussi Ἰουλιάς, Τερτιάς, Παυλάς, Πωλλάς, Πλωτεινάς, Αἰμιλιάς. Voir J. et
L. Robert, BE 1974, no 330, p. 238, avec des références antérieures.
57. Sauf erreur, ce type de flexion n’est pas connu des grammairiens anciens.
58. Voir Brixhe, op. cit., p. 76-77 et Id., « Linguistic Diversity in Asia Minor during the
Empire: Koine and Non-Greek Languages », dans E. J. Bakker (éd.), A companion
to the ancient Greek language, Oxford, 2010, p. 238.
59. IGUR 1287.
60. Voir W. U. Dressler, « Zu den sigmatischen Nominativbildungen und der Dentalfle-
xion von Frauennamen auf -α, -η », WS 79, (1966), p. 264 et son accentuation Εὐτυ-
χιᾶδι, Μητροδωρᾶδι, etc.
438 alcorac alonso déniz

À propos de cette dernière alternance, Μητροδώρα : Μητροδωράς,


il faut mentionner la question du suffixe ‑άδ‑ dans la catégorie des Lall-
namen qui sont très fréquents en Asie Mineure. On a déjà mentionné
le cas de Μαιάς à côté de Μαῖα / Μαίη chez les poètes (voir § 4), qui
est similaire à l’alternance ἀμμά à côté de ἀμμάς « mère, nourrice » 61.
Νανάς apparaît assez tôt à Athènes (LGPN 2, iie a. C.), à côté de Νανίς
(LGPN 2, ive a. C.), et peut répondre à ce système marginal 62. Par ail-
leurs, en Asie Mineure, Αμ(μ)ας (MAMA VII, 478.1, Kötü Uşak, Galatie,
imp.) apparaît en alternance avec des formes en Αμ(μ)α sans une flexion
en dentale, cf. aussi Τατας (gen. Ταταδος, dat. Ταταδι) à côté de Τατα,
Νανας (gen. Ναναδος) à côté de Νανα (gen. Νανας). Or, il n’est pas
toujours sûr que l’on ait ici un suffixe ‑(ι)άδ‑, et non une terminaison à
voyelle longue. Ces noms apparaissent dans des régions anatoliennes,
où l’usage des Lallnamen est plus fréquent et où une flexion en ‑αδ‑
apparaît aussi pour des masculins : Μασας, Μασαδι (Zgusta, KPN §
875-2) 63, Μουναδι (Zgusta, KPN § 983-2), Μας, Μαδι (Zgusta, KPN
§ 839-2), Τας, Ταδι (Zgusta, KPN § 1493-3). Les deux syllabes initiales
de Ταταδος dans une épigramme de Lydia occupent les deux premières
positions d’un hexamètre 64. Par ailleurs, dans certaines régions d’Ana-
tolie à basse époque des noms féminins ont changé leur flexion sous
l’influence des masculins : Ματρωνιλᾶτι (LGPN 5b, Flaviopolis, imp.),
Οὐαλεριᾶτι (LGPN 5b, Anazarbe, ier-iie p. C.) 65.

7. Anthroponymes particuliers en ‑(ι)άδ‑

Il y a quelques noms de notre corpus qui échappent à toute analyse


sûre : Ἀβάς est attesté à Milet pour des femmes crétoises et pourrait

61. ISmyrna 553.7.


62. Cf. νᾶνος « nain », νανίον « poupée », mais aussi νάνναν· τὸν τῆς μητρὸς ἢ τοῦ
πατρὸς ἀδελφόν· οἱ δὲ τὴν τούτων ἀδελφήν (Hsch., ν 53 Latte) et νάννη· μητρὸς
ἀδελφή (Hsch., ν 57 Latte).
63. Voir Robert, Noms indigènes, p. 258 pour l’origine indigène de Μασας en Lycie et
en Pisidie.
64. TAM 5.760. Le mot grec τατᾶ « père », « mère » présente une deuxième syllabe
lourde, cf. Herondas 3.79 et AP XI, 68.4 (Myrinos, ier a. C.).
65. Voir C. Brixhe, op. cit., p. 129, n. 104.
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 439

correspondre à un ethnique ou un Lallname carien 66 ; Βορκάς (LGPN 5b,


Iulia Gordos, imp.) pourrait être une forme sémitique, bien qu’une inter-
prétation grecque semble possible 67. Quant à Κωνάς (LGPN 5a, Hypaipa,
iie-ier a. C.), il pourrait être expliqué comme un sobriquet grec 68, mais
la forme est très isolée. D’autre part, il n’est pas totalement assuré que
le nominatif Δασχάς (LGPN 4, Panticapée, iie a. C.) corresponde à une
forme à suffixe ‑(ι)άδ‑, comme montre le vocatif Δασχαι (CIRB 306) 69.
Mais certaines formes en apparence difficiles à comprendre du point
de vue de la dérivation deviennent claires à la lumière des différents sys-
tèmes décrits plus haut (§ 5).

7.1. Ἀρετιμιάς
Dans une épitaphe du iiie a. C., écrite par Héraclite d’Halicarnasse,
l’ami de Callimaque, il est question d’une femme morte à l’accouche-
ment de ses deux bébés :
Ξεῖν’, Ἀρετημιάς εἰμι· πάτρα Κνίδος· Εὔφρονος ἦλθον / εἰς λέχος·
ὠδίνων οὐκ ἄμορος γενόμαν
« Passant, je suis Arétémias. Cnide est ma patrie. J’ai partagé le lit d’Eu-
phrôn. Je n’ai pas été ignorante des douleurs de l’accouchement » (ΗΕ
1939 = AP 7.465, v. 5-6).
Le nom de la femme est transmis de deux façons par les deux col-
lections médiévales d’épigrammes : ἀρετημιάς Pl., ἀρετιμίας P, εἰς τὴν
αὐτὴν γυναῖκα Ἀρετιμίαν (lemme de P.).
Un peu plus tard, Antipater de Sidon (iie a. C.) a composé une épi-
gramme inspirée de toute évidence par celle d’Héraclite :

66. Cf. peut-être la variante Ἀβίς (Milet I, 3, 38u.6), corrigé par l’éditeur en Ἀβ<ά>ς.
Pour la première hypothèse, voir HPN 560. Pour la seconde, voir R. Hitchman,
« Carian Names and Crete », dans Onomatologos, p. 47.
67. C’est peut-être un nom sémitique, cf. Βορκιος et Βορκεας ; voir E. Puech, « Ins-
criptions funéraires palestiniennes. Tombeau de Jason et ossuaires », RBi 90 (1983),
p. 527, avec références. S’agit-il peut-être d’un nom tiré d’une variante de βροκός·
μωρός· Ἕλληνες (Hsch., β 1182 Latte), βρόκων· ἀμαθής, ἀπαίδευτος (Hsch., β 1192
Latte) ?
68. En rapport avec κῶνος ? Cf. Κωνέας (LGPN 3a, Héraclée, ive-iiie a. C.).
69. Voir Zgusta, PNS, no 632, sans interprétation.
440 alcorac alonso déniz

Ἦ πού σε χθονίας, Ἀρετημιάς, ἐξ ἀκάτοιο / Κωκυτοῦ θεμέναν ἴχνος


ἐπ’ ἀιόνι, / οἰχόμενον βρέφος ἄρτι νέον φορέουσαν ἀγοστῷ, / ᾤκτειραν
θαλεραὶ Δωρίδες εἰν Ἀΐδᾳ
« Certes, lorsque toi, Arétémias, descendue de la barque infernale, tu as
suivi la trace du Cocyte pour toujours, portant dans tes bras un tout petit
enfant qui venait de mourir, de jeunes Doriennes dans l’Hadès ont eu pitié
de toi » (HE 524-527 = AP 7.464, vv. 1-4).
La variation des manuscrits est identique à celle de l’épigramme
d’Héraclite : ἀρετημίας Pl., ἀρετιμιας P., εἰς Ἀρετιμίαν τὴν Κνιδίαν μετὰ
τό τεκεῖν τελευτήσασαν (lemme de P.).
Dans les deux cas, les éditeurs modernes ont tous adopté la leçon Ἀρε-
τημιάς de la collection de Planude, qui était d’ailleurs la seule connue
jusqu’à la découverte de la collection dite « Palatine ». Ἀρετιμιάς serait
alors une erreur banale dû à la prononciation itaciste. Or, le nom Ἀρετη-
μιάς se dérobe à toute interprétation satisfaisante. U. von Willamowitz a
écarté les formes transmises et a proposé Ἀρτιμμιάς, qui serait une forme
féminine du masculin Ἀρτίμμης, un nom d’origine carienne 70. Mais
‑(ι)άδ‑ comme suffixe des noms indigènes ne semble pas attesté au
iiie a. C. dans la région.
Il est possible cependant de défendre la leçon Ἀρετιμιάς transmise.
On partirait d’un composé *Ἀρετοτίμα, qui n’est pas attesté, mais dont
la formation semble possible à côté d’autres noms, comme Ἀρετοκλῆς
et Ἀρετόφιλος. En fait, les composés féminins avec les radicaux de
*Ἀρετοτίμα dans l’ordre inverse sont bien attestés : Τιμαρέτα (Cyrène,
Arcadie, Élide), Τιμαρέτη (Paros), et la forme raccourcie Τιμαρώ (Melos,
Paros) 71.
Ensuite, dans *Ἀρετοτίμα se serait produite l’haplologie par superpo-
sition de la syllabe ‑το‑ : *Ἀρετοτίμα > *Ἀρετίμα. Le phénomène a plu-
sieurs parallèles : *Ἀκεστότιμα > Ἀκεστίμα (LGPN 1, Anaphè, ive-iiie
a. C.), *Ἁγεστοτίμα > Ἁγεστίμα (LGPN 1, Kasos, ive-iiie a. C.), *Ἀρι-
στότιμος > Ἀρίστιμος (LGPN 1, Samos, iiie a. C.), *Χρειστοτιμίδας >
Χρειστιμίδας (LGPN 3b, Tanagra, iiie-iie a. C. ?). La forme à syncope
*Ἀρετίμα aurait pu alterner avec la forme *Ἀρετιμίς, comme dans les
cas de Ἐυνόμα vs Εὐνομίς, Θεοφίλα / Θεοφίλη vs Θευφιλίς, Θεοδώρα vs

70. Voir U. v. Wilamowitz-Moellendorff, Hellenistische Dichtung in der Zeit des Kalli-


machos, Berlin, 1924, vol. 2, p. 122-123.
71. Voir aussi le composé tardif φιλάρετος.
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 441

Θευδωρίς, Κλειτομάχα vs Κλειτομαχίς, etc. 72 Il faut donc supposer une


variation suffixale *Ἀρετιμίς vs Ἀρετιμιάς à Cnide, comme dans le cas
d’autres formes raccourcies : Ἀλεξίς (LGPN 1, Lindos, ca 115 a. C.) vs
Ἀλεξιάς, Αἴνησίς (LGPN 1, Kos, ca 200a. C.) vs Αἰνησιάς, etc. (voir § 6).

7.2. Ἀργονιάς
Dans trois copies des inventaires annuels du sanctuaire d’Artémis
Brauronia à Athènes (post 344 a. C.), nous trouvons les ex-voto et les
noms des femmes qui les ont dédiés. Parmi ces noms apparaît une Ἀργο-
νιάς 73. Comme F. Bechtel l’avait vu (HPN 58), Ἀργονιάς est en relation
avec le nom béotien masculin Ἀργουνίων (LGPN 3b, Κopai, iiie a. C.)
et le nom féminin Ἀργουνίς (LGPN 3b Étéonos / Skaph(l)ai < Eleusis,
ive a. C.).
De toute évidence, Ἀργονιάς, Ἀργουνίων et Ἀργουνίς, dérivent d’un
radical attesté dans une notice d’Étienne de Byzance, tirée de plusieurs
sources (notamment Aristophane de Béotie et probablement Hérodien) 74
et qui présente dans la tradition manuscrite du lexique les formes
suivantes :
a) Formes à consonne simple : le toponyme Ἀργύνειον et l’épiclèse
d’Aphrodite Ἀργουνίς.
b) Formes à gémination : l’épiclèse d’Aphrodite Ἀργυννίς, le nom de
héros Ἄργυννος et le nom du fondateur Ἀργύννιος 75.
Du point de vue de la graphie, Ἀργουνίων et Ἀργουνίς dans les docu-
ments épigraphiques présentent un trait béotien bien connu. En revanche,
‹o› pour ‹υ› dans Ἀργονιάς est un trait moins fréquent, mais il apparaît

72. Les féminins en -τιμα présentent assez souvent des formes raccourcies οù la
nasale est tombée : Πολυτίμα/Πολυτίμη > Πολυττίς, Ἐμπεδοτίμη > Ἐμπεδοττίς,
Δαμοτίμα > Δαμοτίς.
73. IG II², 1517, I.153 ; IG II², 1514, Ι.47 ; IG II², 1516, I.25.
74. Ἄργυννος, υἱὸς Πεισιδίκης τῆς Λεύκωνος τοῦ Ἀθάμαντος τοῦ Σισύφου τοῦ
Αἰόλου, ἐρώμενος Ἀγαμέμνονος, Βοιωτός, ὃς ἀνιὼν εἰς τὸν Κηφισσὸν τελευτᾷ.
ἀφ’ οὗ Ἀργυννίδα τὴν Ἀφροδίτην ἐτίμησε. λέγεται καὶ Ἀργουνίς. Ἀριστοφάνης
δὲ Ἀργύνειον διὰ διφθόγγου. ὁ οἰκήτωρ Ἀργύννιος (Ét. Byz., α 402 Billerbeck).
Cf. FGrHist 379 F 9 pour le texte d’Aristophane de Béotie. A. Lentz a intégré la
notice d’Étienne dans divers passages de sa reconstruction des fragments d’Hérodien
(Herod., vol. 3.1, p. 96, 175, 364, 522 et vol. 3.2, 478).
75. Le toponyme [Ἀργύννιον ἱερόν], qui serait le lemme chez Étienne de Byzance, est
une reconstruction d’A. Meineke.
442 alcorac alonso déniz

dans certains documents béotiens d’époque hellénistique dans l’ono-


mastique : Γλαφ|ο‹ρ›ίδαο pour Γλάφυρ‑ (LGPN 3b, Akraiphia, 230-
210 a. C.), Μικόλος pour Μικύλος à Orchomène (LGPN 3b, iiie a. C.) 76
et Chéronée (LGPN 3b, iiie-iie a. C.). Le lexique présente aussi ‹o› pour
‹υ› depuis le ive a. C. : σκόφοι = σκύφοι 77 et ἐμπορίδια = *ἐμπυρίδια
« sacrifices de feu » à Thespies 78, θοσίης = θυσίαις à Lébadée 79.
D’après une explication qui date du xixe siècle et qui a été récem-
ment ressuscitée, Ἀργυννίς correspond à l’adjectif védique árjuna‑
(<*h2r̥ ǵun‑o‑), fém. árjunī‑ (< *h2r̥ ǵun‑ih2) « étincelant », qui est
utilisé comme adjectif de l’Aurore dans le Rig Veda : árjuni úṣaḥ (RV
1.49.3)  « étincelante Aurore » 80. D’après M. Janda, la géminée de la
forme Ἀργυννίς s’explique en grec phonologiquement : *h2r̥ ǵun‑ih2 >
*argunja‑ > *argunna. Ce serait donc le reste de l’évolution attendue
de la séquence ‑ih2 après syllabe légère, cf. la terminaison des participes
‑υῖα < *‑us‑ja, par opposition à la séquence après syllabe lourde. Cela
voudrait dire que Ἀργυννίς a remplacé *Ἄργυννα.
À mon avis, c’est peu vraisemblable. En effet, après les voyelles e, i
et u les groupes de *r ou *n + *j aboutissent à une gémination exclusi-
vement en lesbien et en thessalien. Le béotien présente en revanche un
allongement compensatoire : ἀγείρω (Cor.), ἀγιρέμεν (IG VII, 4136.4).
Sauf erreur, il n’y aucun exemple du groupe ‑ur/nj‑ en béotien, mais il n’y
a pas de raison de postuler un développement différent. Puisque la gra-
phie ‹o› au lieu de ‹υ› apparaît exclusivement pour /u/ bref (cf. Μικόλα à
Thespies, θοσίης à Chéronée, etc.), on doit écarter une évolution à partir
d’un groupe *‑nj‑, car on s’attendrait à une voyelle longue en béotien.
Enfin, si les formes à consonne simple (Ἀργονιάς, Ἀργουνίς et Ἀργου-
νίων) et les formes à géminées (Ἀργυννίς et Ἄργυννος) sont en rapport,
comme il est évident, il semble impossible de justifier une réduction
secondaire de la géminée.

76. L’accentuation Μίκολος des éditeurs du LGPN 3b est fautive.


77. IThesp. 38.8 (ca 386 a. C.).
78. Voir A. Alonso Déniz, « Offrandes funéraires à Thespies : les ἐνπορίδια “sacrifices
par le feu” » dans IThesp. 215 », REG 129 (2016), p. 63-83.
79. IG VII, 3083.25 (iie a. C.)
80. Voir W. Sonne, « Eos. Aphrodite », KZ 10 (1861), p. 350, M. Janda, « Die indoger-
manische Göttin der Morgenröte als Namenspatronin », BN 41 (2006) et D. Köl-
ligan, « Aphrodite of the Dawn », Letras Clássicas 11 (2007), p. 119-121.
-(ι)άδ- dans les anthroponymes féminins 443

Ces objections incitent à postuler une histoire différente pour la série


d’anthroponymes Ἀργονιάς, Ἀργουνίς et Ἀργουνίων. Une piste se trouve
dans un passage de Pline, où parmi un groupe de cités de la Locride
occidentale, dont on ignore la localisation précise, figure une localité
appelée Arguna 81. Cette forme présente la terminaison attendue en grec
ancien pour un féminin qui correspond à un masculin thématique : à un
masculin *ἄργυνος correspondrait un fém. *ἀργύνᾱ. En effet, l’adjectif
de la même racine, *h2r̥ ǵr‑ó‑ > dissimilé en *argó‑, se réalise en masc.
ἀργός et fém. ἀργή. Il faut donc partir d’un toponyme béotien *Ἀργύνα
(γᾶ, χώρα) ou *Ἄργυνον (ὅρος, πεδίον). Toutes les formes à consonne
simple s’expliquent alors facilement : Ἀργουνίς est un ethnique
féminin (*Ἀργυνίς) employé comme anthroponyme, Ἀργονιάς est la
forme dérivée de l’ethnique masculin *Ἀργύνιος (cf. Δηλιάς et § 4), et
Ἀργουνίων présente un suffixe banal (voir HPN 548-549) 82. L’épiclèse
d’Aphrodite dans la région a donc dû être *Ἀργυνίς ou *Ἀργονίς, dérivé
du toponyme. L’assimilation de l’épiclèse *Ἀργύνα « étincelante » d’une
tradition indo-européenne ancienne à la forme locale *Ἀργυνίς ne pose
pas de problèmes. Quant à la géminée de Ἄργυννος (nom du héros) et
de Ἀργυννίς (épiclèse d’Aphrodite) des sources indirectes, elle doit être
secondaire 83. On pourrait supposer qu’elle s’explique par la gémination
propre des sobriquets et des noms raccourcis (cf. Σθέννων, Δίοννος, etc.)
et le nom de la déesse *Ἀργυνίς s’y est assimilé. Une autre possibilité
serait d’y voir une interférence avec l’adjectif éolien et homérique
ἄργεννος < **h2erǵ‑es‑no‑, de sens très proche.

81. Proxumi Aetolis Locri cognominantur Ozolae, immunes. oppidum Oeanthe, portus
Apollinis Phaestii, sinus Crisaeus ; intus oppida Argyna, Eupalia, Phaestum, Cala-
misus. (Pl., HN IV.7). Voir l’analyse du passage par L. Lerat, Les Locriens de
l’Ouest, Paris, 1952, p. 52-54.
82. La forme Ἀργύνειον, nom probable d’un sanctuaire, qu’Étienne de Byzance cite
d’après Aristophanès de Béotie, répondrait peut-être à un ethnique *Ἀργυνεύς.
A. Lentz dans son édition d’Hérodien corrige le texte d’Étienne et présente Ἀργύν-
νειον, ce qui n’est pas assuré.
83. Lycimnos de Chios (PMG fr. 768), Phanoklès (fr. 5 Powell) et Euphoriôn (fr. 90.9
Benjamin Acosta-Hughes et Christophe Cusset). Pour une discussion détaillée des
sources, voir F. D’Alfonso, « Afrodite Arginnide. Un mito beotico », dans L. Bom-
bardieri, T. Braccini et S. Romani (éd.), Il trono variopinto. Figure e forme della Dea
dell’amore, Alessandria, 2014, p. 83-108.
444 alcorac alonso déniz

Conclusions

Le suffixe ‑(ι)άδ‑ s’est introduit dans le système des anthroponymes


féminins grecs au ve a. C. à partir de l’usage de certains ethniques qui
présentaient ce suffixe. Sa diffusion comme terminaison productive est
liée à son intégration dans trois systèmes dérivationnels : les féminins en
‑(ι)άδ‑ qui correspondent à des masculins en ‑(ι)άδας / ‑(ι)άδης (anciens
patronymes) dérivés des ethniques, des théophores et des noms composés
raccourcis. Cela justifie l’extension de ‑(ι)άδ‑ comme suffixe alternatif de
terminaisons plus populaires, comme ‑ώ et ‑ίδ‑, dans des sobriquets et
dans quelques formes raccourcies. Grâce aux variations suffixales ‑ώ,
‑ίδ‑ et ‑(ι)άδ‑ nous arrivons au stade final dans la diffusion du suffixe à
l’époque tardive, lorsque tout nom féminin terminé en ‑α bref ou ‑α/‑η
peut avoir une forme alternative en ‑(ι)άδ‑.
Bref, l’analyse du suffixe et de sa diffusion montre un mécanisme
d’intégration lié en partie au développement de ‑(ι)άδ‑ dans d’autres
domaines du lexique, comme les ethniques et quelques mots féminins
du vocabulaire commun, mais elle permet aussi de constater des carac-
téristiques particulières de la dérivation du système des anthroponymes
féminins en grec ancien.

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Wilamowitz-Moellendorff, U. v., Hellenistische Dichtung in der Zeit des
Kallimachos, Berlin, 1924.
Willemsen, F., « Die Fluchtafeln », dans W. K. Kovacsovics et al. (éd.), Die
Eckterrasse an der Gräberstrasse der Kerameikos, Berlin, 1990, p. 142-151.
Étude comparative et diachronique des suffixes
des anthroponymes grecs féminins

Araceli Striano
Universidad Autónoma de Madrid

1. Pourquoi étudier les suffixes des anthroponymes ?

Les suffixes du lexique grec ont été abordés par les manuels classiques
de P. Chantraine et E. Risch 1, que l’on continue à consulter aujourd’hui.
Quand on envisage l’histoire des suffixes, leur origine et leur dévelop-
pement, on constate que l’analogie a joué un rôle décisif dans l’organi-
sation du vocabulaire, de sorte qu’un suffixe de grande diffusion peut
remonter à un groupe assez réduit de thèmes. Parfois les circonstances
de l’expansion des suffixes sont difficiles à entrevoir et c’est la tâche des
savants d’essayer d’offrir une histoire des suffixes, de leur distribution,
de leur disparition, de leur modification, de leur signification, de leur
typologie, etc. En tout cas, les différents mécanismes qui ont pu inter-
venir dans l’histoire des suffixes grecs font partie des chapitres dédiés à
l’étude de la morphologie du grec ancien et de ses dialectes. Il est évident
qu’une recherche autour des suffixes des anthroponymes a partie liée
avec celle des substantifs et des adjectifs du lexique, puisque les uns et
les autres sont corrélés.
Mais il y a quelques différences importantes. Tout d’abord, l’analogie
peut entraîner l’extension d’un suffixe peut-être rare dans le lexique à
un nombre important d’anthroponymes, ce qui fait que la fréquence des
1. Chantraine, Formation et Risch, Wortbildung. Je suis partie aussi de Bechtel, HPN,
qui dresse une petite liste de suffixes des anthroponymes et fournit la liste des hypo-
corisitiques et noms raccourcis dans chacune des entrées de la première partie de son
livre, et de Dobias-Dubois, Intr., p. i-xvi.
448 araceli striano

suffixes dans les deux domaines du vocabulaire ne coïncide pas. Par


exemple, le suffixe féminin -ώ affecte un groupe de mots assez réduit,
mais représente une finale très courante dans les noms de femmes 2.
L’analogie et l’extension des suffixes anthroponymiques sont maintes
fois le reflet du succès d’un nom déterminé qui, à un moment donné, peut
devenir à la mode dans une région. La mode est une variable qui n’a pas
le même poids dans le lexique que dans les anthroponymes. La fréquence
de ces derniers dérive des habitudes et des traditions familiales, c’est-à-
dire de conditions qui leur sont spécifiques. Par conséquent, la producti-
vité des suffixes n’est pas la même de part et d’autre 3.
Ensuite, certains suffixes servent à former des formes raccourcies ou
des hypocoristiques qui sont abondamment attestés dans les anthropo-
nymes grecs et inconnus parmi les substantifs et adjectifs du grec lit-
téraire 4. Nous connaissons et utilisons beaucoup de mots raccourcis au
quotidien, mais ceux-ci sont normalement absents de la langue écrite. Il
en est de même pour les suffixes affectifs qui s’emploient usuellement
dans un contexte familier très peu représenté dans les textes grecs. La
typologie et l’emploi de ces suffixes appartiennent presqu’en exclusivité
aux anthroponymes.
Par ailleurs, la valeur et le sens des suffixes ne sont pas nécessaire-
ment les mêmes dans un cas et dans l’autre – ce qu’illustre l’exemple de
la finale neutre -(ι)ον dans les anthroponymes féminins en attique 5.
Enfin, les caractéristiques linguistiques des anthroponymes contri-
buent à l’apparition de nouveaux suffixes parfois exclusifs, méconnus
en dehors du domaine des noms de personnes, fruit du contact entre le
grec et le latin (hybrides) comme dans le cas de -(ι)ανός, ou qui peuvent
être nés d’autres contextes plus difficiles à cerner, comme c’est le cas de
-ους, -ουτος 6.
2. Une interrogation sur l’ensemble de la base électronique LGPN donne 2 731 exemples.
3. Pour une réflexion sur la considération linguistique des anthroponymes, cf. A. Striano,
« Aspectos del comportamiento lingüístico de los nombres propios: el ejemplo del
griego antiguo », dans A. Martinez Fernandez, B. Ortega Villaro, M.  H.  Velasco
Lopez et H. Zamora Salamanca, Agalma. Ofrenda desde la Filología Clásica a
Manuel García Teijeiro, Valladolid, 2014, p. 302-311.
4. À propos de la notion de dérivation hypocoristique dans l’onomastique, voir
L. Dubois dans l’introduction de ce volume.
5. Voir la contribution de F. Réveilhac à ce volume.
6. Les données sur ce suffixe et les hypothèses sur son origine se trouvent dans
L. Dubois « Des anthroponymes en -ΟΥΣ », dans Onomatologos, p. 398-421.
étude des suffixes des noms féminins 449

Bref, on voit bien que les extensions analogiques, la fréquence, la


productivité et la typologie des usages peuvent avoir leurs spécificités
dans les anthroponymes, ce qui rend nécessaire une étude particulière de
leur suffixation.
Dans cette contribution, je me bornerai à un corpus de noms de
femmes pour différentes raisons. Pour commencer, il s’agit d’un groupe
de noms qui présente des caractéristiques qui lui sont propres : des termi-
naisons spécifiquement féminines, d’une part -ᾱ, -η, et -ία, et de l’autre,
des suffixes résultant de différentes évolutions phonétiques dans le trai-
tement de groupes de consonnes suivies de *-ja : -εια, -λλα, -ειρα, -αινα,
etc., cf. Γνάθαινα (masc. Γνάθων), Τρύφαινα (masc.Τρύφων), Σώτειρα
(masc. Σωτήρ), etc. Ensuite, ce groupe d’anthroponymes contient les
abstraits du type Φρόνησις, Σωφροσύνα, Αὐτοψία, qui par leur genre
grammatical ne peuvent appartenir qu’à ce groupe et sont absents du
système d’anthroponymes masculins. Par ailleurs, les anthroponymes
féminins fournissent des exemples de suffixes neutres, comme -(ι)ον,
d’ordre affectif ou comme les abstraits en -μα, inconnus des noms mas-
culins. Finalement, il faudrait mentionner une motivation d’ordre pra-
tique, mais importante : le nombre total d’exemples de noms de femme
est bien inférieur à celui des hommes, ce qui fait que c’est un échantillon
représentatif des suffixes anthroponymiques. Les chiffres sont incontes-
tables : dans les tablettes mycéniennes les noms des femmes sont 10 %
du total, tandis que selon les statistiques du LGPN les noms masculins
sont 45 623, face aux 13 296 féminins, c’est-à-dire que ces derniers repré-
sentent 22,57 % du total.
Cette contribution fait partie d’une étude plus vaste que j’ai com-
mencée il y a quelques années et qui a pour but une recherche plus géné-
rale sur ce corpus anthroponymique 7.

7. Je me suis intéressée aux anthroponymes féminins depuis longtemps, tout d’abord


en analysant certains d’entre eux, comme les rares Laurotiche, Sycecale et Tricisma,
voir A. Striano, « À propos de la nouvelle édition des inscriptions d’Hispania : deux
notes anthroponymiques Odephorus et Laurotiche », ZPE 147 (2004), p. 225-228,
et Ead., « Sycecale y Tricisma: los nombres propios de dos hermanas procedentes
de una inscripción sepulcral de Tavira », Epigraphica 72 (2010), p. 493-497, ou
en décrivant d’un point de vue linguistique l’ensemble des noms grecs de femmes
attestés dans les inscriptions latines d’Hispania, Ead., « Los antropónimos feme-
ninos de origen griego de la Península Ibérica », Emerita 81 (2013), p. 65-81, et
dernièrement, sur les anthroponymes féminins des tablettes mycéniennes, Ead.,
450 araceli striano

2. Deux considérations préalables

Cet article sera une première approche qui devra être précisée en plu-
sieurs points dans un deuxième temps. Je vais commencer par les don-
nées mycéniennes, continuer avec la langue homérique et terminer avec
les exemples épigraphiques. Les outils qui sont à notre disposition nous
permettent de manier cet énorme ensemble anthroponymique. L’infor-
mation qui se dégage des tablettes mycéniennes est depuis un certain
temps beaucoup plus maniable grâce à la base de données DAMOS 8 de
même que les exemples épigraphiques qui proviendront naturellement
du LGPN. Pour les exemples homériques j’ai utilisé l’ouvrage de H. von
Kamptz 9. Le manuel de F. Bechtel, le HPN, est toujours de consulta-
tion indispensable ainsi que les articles d’Olivier Masson commodément
réunis en trois volumes 10. J’utiliserai pour finir le chapitre dédié aux suf-
fixes féminins du grec rédigé par K. Stüber 11.
Mes considérations des faits seront par conséquent générales, à l’inté-
rieur d’un scénario diachronique global. Du point de vue de la classifica-
tion des données, j’ai décidé de considérer de la même façon un suffixe
et une terminaison anthroponymique fréquente 12, et au contraire, ne pas
considérer comme suffixe une finale très peu attestée.

3. L’apport des tablettes mycéniennes

La démarche diachronique de mon étude débute dans les tablettes


mycéniennes 13. Rassembler les exemples est, certes, une tâche dif-
ficile. Outre les difficultés de l’écriture syllabique, on constate dès le
premier abord que la nature de la grande majorité des exemples nous
est méconnue, ce qui n’est pas le cas des anthroponymes attestés dans

« Teodora, Alejandra y otros nombres de mujer en las tablillas micénicas », Minos


(à paraître).
8. DAMOS est la base de données des textes mycéniens élaborée par F. Aurora, https://
www2.hf.uio.no/damos/Words (consulté le 14.II.2016).
9. Kamptz, HomPN.
10. Voir O. Masson, op. cit., et Id., OGS III.
11. Stüber, GFN, p. 100-148.
12. La différence entre les deux ne se laisse pas apprécier facilement dans plus d’un cas.
13. Cf. la note 8.
étude des suffixes des noms féminins 451

les documents épigraphiques postérieurs. Pour l’identification de ces


anthroponymes féminins 14, j’ai donc suivi les critères suivants par ordre
décroissant d’importance :
a) Les formes suivies de l’idéogramme MUL.
b) Les formes accompagnées d’une spécification, comme te-o-jo do-
e-ra ou i-je-re-ja.
c) Les formes qui ont des correspondants masculins certains.
d) Le contexte des tablettes (groupe de femmes travaillant pour les
centres palatiaux, par ex.).
e) Présence de la finale -e-ja, -i-ja combinée toujours avec un des cri-
tères ci-dessus.

3.1. Les exemples des différents sites


Suivant les critères énumérés ci-dessus, on a obtenu un total de
198 exemples dont 92 correspondent aux tablettes de Knossos, 69 aux
documents de Pylos et 37 à ceux de Mycènes 15. Les différences par rap-
port au grec alphabétique se laissent entrevoir dès l’abord. Les bases
anthroponymiques sont très souvent méconnaissables, aussi bien que
certaines terminaisons. On constate aussi quelques différences entre les
centres palatiaux.
Knossos
-a -o -eja -(i)ja / -ja -u -i -e
24 24 10 12 11 10 1

Pylos
-a -o -eja -(i)ja / -ja -u -i -e
35 0 13 14 0 4 3 (?)

Mycènes
-a -o -eja -(i)ja / -ja -u -i -e
19 5 3 4 ? 4 2

14. À propos de l’utilisation de quelques-uns de ces critères, voir en dernier lieu, B. Olsen,
Women in Mycenaean Greece: The Linear B Tablets from Pylos and Knossos, Oxford,
2014.
15. Les tablettes de Thèbes ne fournissent aucun exemple sûr.
452 araceli striano

3.2. Présence de formes raccourcies, hypocoristiques


et sobriquets ?
Compte tenu de la fréquence des formes anthroponymiques grecques
raccourcies et hypocoristiques, on s’attendrait à en trouver aussi dans le
corpus des noms de femmes mycéniens, mais les exemples font défaut.
La tâche devient compliquée quand on doit analyser des formes à deux
syllabes, car même si les explications peuvent être plausibles, elles
restent sans confirmation faute de parallèles avec le grec alphabétique.
En effet, il y a des noms plus ou moins sûrs : ke-ra-so (MY V 659),
vraisemblablement *Κερασώ, de κερασός « cerise » 16, to-ti-ja (MY Fo
101.3) si l’interprétation de nom comme *Στορτία est correcte, ou le
sobriquet ka-ra-u-ja (MY Fu 711.8) s’il s’agit de ΓραFία 17.
Mais que dire de tu-zo (KN Ap 639.1) ? Pourrait-il avoir un rapport
avec tu-ka-na (KN Ap 639.10) ? Est-ce que sa-mi (KN Ap 639.10) pour-
rait être une forme raccourcie de sa-ma-ti-ja (KN Ap 639.8) ?

3.3. Différences entre les centres palatiaux


On ne reconnaît immédiatement qu’un très petit nombre de noms
de femmes mycéniennes. La plupart d’entre eux n’ont pas de corres-
pondants dans les sources postérieures, ce qui fait qu’on a affaire à des
formes reconstruites. Sur ce point, les noms de femmes ne s’éloignent
pas des noms d’hommes.
On constate aussi que les terminaisons fournies par les tablettes ne
sont pas les mêmes dans les différents centres. C’est ainsi qu’on n’a pas
d’exemples en -o et -u dans les textes provenant de Pylos. On a l’im-
pression que les données de Mycènes se trouvent à cheval entre Pylos
(moindre variété de suffixes) et Knossos (plus grand nombre de suffixes).
En revanche, c’est de Mycènes que provient le groupe le plus impor-
tant d’anthroponymes composés (cinq exemples) dont le caractère grec
est indéniable : a-pi-do-ra Ἀμφιδώρα (ΜΥ Oe 124), a-re-ka-sa-da-ra
Ἀλεξάνδρα, te-o-do-ra Θεοδώρα (MY V 659), a-ti-ke-ne-ja Ἀντιγένεια

16. F. Aura Jorro, Diccionario micénico, Madrid, 1985-1993, vol. I, s.v.


17. C. Varias, « The Personal names from the Knossos B-Tablets and from the Myce-
naean Tablets », dans J. Bennet et J. Driessen (éd.), A-NA-QO-TA. Studies Presented
to J. T. Killen, Salamanque, 2002 (Minos 33-34 [1998-1999]), p. 366.
étude des suffixes des noms féminins 453

(MY Oe 110), pi-ro-wo-na ΦιλοFοίνα 18 (MY V 659). Il y a deux formes


à Pylos, ke-sa-da-ra Κεσ(σ)άνδρα 19 (PY Fg 828) et pi-ro-pa-ta-ra Φιλο-
πάτρα (PY Vn 34+1191+1006). Quant à Knossos, une seule forme
semble attestée, pi-ra-ka-ra (KN 639.4), qui serait le féminin du mas-
culin Φίλαγρος 20.

3.4. Différences avec les anthroponymes des sources


alphabétiques
Quelques terminaisons attirent notre attention quand on compare les
données mycéniennes avec celles du grec alphabétique: c’est le cas de
‑e et -u, finales inconnues plus tard, malgré les exemples fournis par le
LGPN à cet égard. Sur le total de 33 exemples de féminins en -us, la plu-
part sont douteux ou bien sont masculins !
Des 19 exemples archaïques (vie-ive a. C.), on reconnaît comme
féminins uniquement un sobriquet qui provient du substantif féminin
γῆρυς « voix » : Γῆρυς (LGPN 1, Thasos, ive-iiie a. C. ; Érétrie, ive a. C.,
exemple douteux).
Le reste est ambigu, et il n’est pas facile de décider s’il s’agit de
noms masculins ou féminins : ainsi Βλέπυς (LGPN 1, Théra, vie a. C. ?) ;
Κίβυς, Λίβυς, Σάβυς, Φίλυς (LGPN 1, Styra, ve a. C.) 21.
À l’époque hellénistique, tous les exemples sont des masculins :
Θόρσυς 22; des acclamations de jeunes hommes, Μῦς ἡδύς (LGPN 1,
Thasos, m. ive a. C.); Μῦς καλὸ‹ν› πώγωνα ‹ἔ›χει 23; Σθόρυς (LGPN 1,
ca 390-386 a. C.) 24.
18. On ne dispose d’aucun Φιλοίνα / η mais on a quatre exemples du masc. Φίλοινος
(LGPN 1, Siphnos, iiie p. C.; LGPN 2, Paiania, ive a. C.; LGPN 3b, Larissa, ier a. C.;
LGPN 3b, Hyampolis, ier a. C.-ier p. C.).
19. Voir J. L. García Ramón, « Mycénien ke-sa-do-ro /Kessandros/, ke-ti-ro /Kestilos/,
ke-to /Kestor/ : grec alphabétique Αἰνησιμβρότα, Αἰνησίλαος, Αἰνήτωρ et le nom de
Cassandra », dans J.-P. Olivier (éd.), Mykenaïka. Actes du IXe colloque international
sur les textes mycéniens et égéens (Athènes, 2-6 octobre 1990), Athènes - Paris,
1992, p. 239-255.
20. Nous avons 126 exemples dans le LGPN.
21. Cf. aussi Πανθῦς (IG XII 6.2, 647, Samos, vie a. C.).
22. IC 2, XXIII, nº 37 (avec d’autres anthroponymes masculins).
23. L’inscription a été publiée par G. Dunst, « Die Inschriften con Korsiai », dans
Mélanges helléniques offerts à Georges Daux, Paris, 1974, p. 132 nº 4b, et la traduc-
tion est incontestable : « Μῦς a une belle barbe » (!).
24. Cf. aussi Στάχυς à Rhodes et Théra. Tardifs : Κλιτύς Μacédoine (imp.), Κοκκύδος
(gén.) Véleia (ier a. C.). Lecture douteuse : Μελάνδρυς (IC 2, XXIII, nº 52).
454 araceli striano

Les autres terminaisons attestées dans les tablettes peuvent avoir une
correspondance avec des suffixes féminins suffisament connus, mais les
difficultés que soulève la graphie syllabique doivent être soulignées. Un
exemple suffira pour illustrer ce point : est-on sûr que les 24 exemples
knossiens en -o doivent être interprétés comme des féminins grecs en
‑ώ ? Il est possible que la réponse doive être partiellement positive, mais
on doit aussi tenir compte du fait que des noms non grecs ont pu être
adaptés avec ce suffixe 25.

4. Les suffixes des anthroponymes féminins


dans les sources alphabétiques

Comme dans d’autres domaines du lexique, aux anthroponymes mas-


culins en -o- et -io- répondent les féminins en -ā et -iā. Il faut ajouter
l’ancien suffixe féminin *-ya dont le yod se combine avec la consonne
du radical en l’altérant. On distingue parfaitement ces suffixes féminins
primaires surtout dans les noms formés à partir d’anthroponymes mas-
culins composés. La finale masculine en ‑ος -ης, -εύς est remplacée dans
des formes comme Ξανθίππα, Διοδώρα, Λυσιμάχα, Θεογένεια, Ἀρίστεια,
etc., correspondants de Ξάνθιππος, Διόδωρος, Λυσίμαχος, Θεογένης,
Ἀριστεύς.
D’autres suffixes, comme -ίς, -ίδος, peuvent aussi apparaître : Λυσι-
μαχίς, Στραταγίς, Γλυκανθίς, Ἀμφιγονίς, Ἀρτιμιδωρίς, Δαμαγορίς, Κλη-
ναγορίς, correspondants féminins de Λυσίμαχος, Στράταγος, Γλύκανθος,
Ἀμφίγονος, Ἀρτεμίδωρος, Δαμαγόρας, Κληναγόρας.
Mais il semble que la typologie des suffixes est différente. Les finales
en -ā-,-iā et -ya ne figurent pas dans les formes raccourcies, tandis que
-ίς, -ίδος peut servir pour ces formations, comme on peut le constater
dans des exemples tels que Ναυσίς ou Καλλίς, formes raccourcies de
Ναυσικρίτη et Καλλιτύχη vel sim.
Il serait nécessaire tout d’abord de dresser une liste approximative des
suffixes qui font partie des anthroponymes féminins et d’analyser leur
distribution. La tâche n’est pas facile surtout dans le cas des sobriquets et
formes hypocoristiques : on ne sait pas toujours s’il s’agit de suffixes ou
bien de terminaisons fréquentes. On devrait peut-être dans quelques cas

25. C’est l’interprétation de Chantraine, Formation, p. 115 pour Λητώ.


étude des suffixes des noms féminins 455

faire des distinctions entre les différentes régions grecques. Il se pour-


rait que de simples terminaisons soient de vrais suffixes dans une région
déterminée. Le critère employé devrait s’appuyer sur la fréquence d’em-
ploi du suffixe, qui n’est pas toujours la même partout.
Une fois que les suffixes seront identifiés, on devrait observer leur
distribution dans les différentes formations anthroponymiques.

4.1. Établissement d’une liste de suffixes des noms de femme


On sait que certaines bases anthroponymiques peuvent nous fournir
un échantillon assez représentatif des suffixes. On se contentera de
dresser une liste en choisissant le cas de Φιλ-, très productif pour les
noms masculins, et on s’est demandé si ceci se produit aussi pour les
féminins formés sur la même base. La réponse est affirmative, et par
conséquent la liste peut nous servir pour un premier rapprochement des
formations féminines.
Voici l’énumération des exemples obtenus de la base de données du
LGPN :
Φίλ-η, Φίλ-α, Φιλ-ία, Φιλ(λ)-ώ, Φιλ-ίς, Φίλ-ε(ι)α, Φίλ-ιον
Φίλ-αινα, Φιλαινίς, Φιλαίνιον, Φιλαινώ
Φίλ-ιννα, Φιλίννιον, Φιλιννίς, Φιλιννώ
Φιλ-οῦς
Φιλ-ίνα, Φιλινώ
Φιλ-ίσκα, Φιλισκώ
Φίλ-υλλα, Φιλυλλίς
Φιλ-ικά, Φιλικώ, Φίλικον, Φιλικιανή
Φιλ-άκιον, Φιλακώ
Φιλ-ίδιον
Φιλ-άρι(ο)ν
Φιλ-έτις, Φιλετώ
Φίλ-ησις, Φιλησώ
Φιλ-υτώ
Φιλ-ίνθα
Φιλ-ιστίχα, Φιλιστίς de Φίλιστος
Φιλ-ητίς
Φιλ-ιτίς, Φιλιτία, Φιλίτιον, Φιλιτώ
Φιλ-ωτίς
456 araceli striano

Le corpus de cette base anthroponymique nous fournit des terminai-


sons que l’on reconnaît aisément. Il y en a toutefois quelques-unes que
l’on ne saurait considérer comme suffixes et dont l’interprétation semble
moins évidente. C’est ainsi que l’on devrait peut-être laisser de côté
Φιλ-υτώ ou Φιλ-ίνθα 26, presque inconnus.
On constate que les suffixes les plus fréquents sont -ώ, -ίς et -(ι)ον,
qui peuvent apparaître appliqués à la base simple Φίλη / Φίλα dans les
cas de Φιλώ, Φιλλώ (avec géminée expressive), Φιλίς et Φίλιον, Φίλον,
mais aussi se combiner avec d’autres suffixes et créer des formations suf-
fixales complexes comme Φιλαινίς, Φιλαίνον, Φιλαινώ à partir de Φίλ-
αινα ou bien Φιλίννιον, Φιλιννίς, Φιλιννώ de Φίλ-ιννα.
On essayera d’étudier la typologie de ces suffixes en nous interrogeant
sur leur possible distribution : est-ce que -ώ, -ίς et -(ι)ον peuvent s’appli-
quer à des sobriquets, à des anthroponymes composés, à des formes rac-
courcies et à des hypocoristiques ?
Regardons aussi la distribution d’autres suffixes qui apparaissent
aussi liés aux formations hypocoristiques, comme -αινα, -ιννα ou -υλλα :
ceux-ci peuvent-ils apparaître aussi dans la formation des sobriquets et
des anthroponymes composés ?

4.2. Méthode de classification des suffixes


On laissera de côté les terminaisons primaires pour ainsi dire, en
-ᾱ, -η, -ία, *-ya pour une raison de poids : aucune d’entre elles ne sert
à former, à elle seule, des formes raccourcies ou hypocoristiques. On
choisira tout d’abord dans la base de données du LGPN le groupe de
suffixes qui va être l’objet de l’étude. Ce seront en premier lieu les suf-
fixes féminins les plus fréquents : -ώ (2 731 exemples) et -ίς, (14 142
exemples). Ensuite on utilisera quelques suffixes employés secondaire-
ment pour former des noms de femmes, par exemple, -(ι)ον (1 545), qui
est absent de ces noms dans les corpora plus anciens, comme la langue
homérique ou les inscriptions plus archaïques. Finalement, on analysera

26. Le nom rhodien Φιλίτειος pourrait répondre à Φιλίτιος, cf. Πισικράτης dans la même
inscription (Lindos II, 378.49, 27 a. C.). On a trois exemples pariens de l’anthro-
ponyme féminin Φιλυτώ, créé à partir du masculin Φιλύτας / Φιλύτης, tandis que
Φιλίνθα est un hapax.
étude des suffixes des noms féminins 457

aussi la typologie de suffixes beaucoup moins fréquents, comme -ιλλα


(340), -αινα (202), -υλλα (190), -ιννα (145), -ίχα / -ίχη (166).
On groupera les exemples anthroponymiques de la façon suivante :
sobriquets
anthroponymes composés
type Άρσιν-, Άνδροκ-
Typologie des suffixes
premier / deuxième terme de composé type Άρχi-
des anthroponymes type Άλεξι-
combinaison avec d’autres suffixes
(suffixes complexes)
autres raccourcissements

Il est très probable qu’il faut introduire là les variables de la géogra-


phie dialectale 27 et de la chronologie des données, mais on se contentera
cette fois-ci d’observer le comportement des suffixes d’une manière glo-
bale, c’est-à-dire, en observant uniquement les résultats de nos requêtes
dans la base LGPN sur l’ensemble du corpus disponible. L’objectif
final de la recherche qui commence ici sera élaboré plus tard sous la
forme d’une histoire de chacun des suffixes tenant compte de toutes les
variables linguistiques : répartition dialectale, géographique, chronolo-
gique et typologique.

5. Suffixe -ώ

C’est une des terminaisons onomastiques de genre féminin les plus


fréquentes. On a vu qu’elle est apparemment connue dans les tablettes
mycéniennes provenant de Knossos et Mycènes, même si dans la plupart
des exemples on n’est pas capable de reconnaître la forme anthropony-
mique. Elle est aussi présente dans quelques anthroponymes homériques,
sobriquets dérivés d’adjectifs comme Ἀργώ, Πηρώ et Πρωτώ, ou de subs-
tantifs, Σπειώ, « Kurzformen » comme Φυλώ, Καλυψώ, hypocoristiques
27. C’est A. Morpurgo Davies qui a attiré l’attention sur ce point : « [I]t is also clear that
in Arcadia the ω-feminines fulfil part of the functions [...] fulfilled by the ι-feminine
in Attica; this explains both the numeric disproportion (so many more ω-names
in Arcadia than in Attica) and the characteristics of the Arcadian ι-stems (…) ».
Voir A. Morpurgo Davies, « The morphology of Personal names in Mycenaean and
Greek: some observations », dans S. Deger-Jalkotzy, S. Hiller, O. Panagl (éd.), Flo-
reant Studia Mycenaea. Akten des X. Internationalen Mykenologischen Colloquiums
in Salzburg vom 1.-5. Mai 1995, Vienne, 1999, p. 396.
458 araceli striano

tels que Μελανθώ. Par contre, l’origine de Τυρώ et peut-être Δωτώ (de
δώτωρ ?) reste douteuse 28. En tout cas, ce qui attire l’attention est le
manque de continuité de ces noms homériques dans les sources épigra-
phiques postérieures : la plupart sont absents des inscriptions. On voit
bien que face à ce que l’on constatait dans le corpus mycénien, l’origine
grecque des noms homériques est indéniable en dépit de leur absence de
survivance par la suite.
Voyons la situation que nous fournissent les inscriptions :
Sobriquets Composés 1er / 2e terme du composé Suffixes Autres
« Kurznamen » complexes
Δενδρώ Φιλαρετώ, Ἀλεξ- : Ἀλεξώ, Ἁγησώ, Ἀριστειδώ Βοστρώ
Χρυσιππώ Κτησώ, Νικησώ, Παυσώ (Βόστρυχος)
Μενεκρατώ,
Ξενοκρατώ
Κεφαλώ Αὐξησιλεώ Καλλ- : Καλλώ Γλυκιννώ Συμφώ
Τιμ- : Τιμώ (Συμφέρουσα)
Ἀριστώ Παρμενώ Ἀντιγώ, Νικομώ, Ἁγεμώ Καλ(λ)ιτώ Ἀφρώ
Ἀλυπώ Ἀνδροκκώ, Διοκκώ, Ἀλεξιτώ (Ἀφροδίτη)
Ἀρσιννώ, Κλεπώι a Λαμπιτώ
Τιμολλώ Φιλιτώ
Νυμφώ Μνησιππώ Φρασι- : Φρασώ Νικαρώ Ἰνώ (Ἴναχος)
Ἐλευθεριώ Καλλικλώ Σιμακώ
Ἀβασκαντώ Ἀμφιμεδώ Ἀγελλιώ
Πολεμώ Ἀγλανθιώ
Ἀμεινώ Ἀρισταγορώ
Πρωτώ Νικοτελώ
a.  Attesté dans une lamelle de Dodone, ce nom est une forme raccourcie de Κλε(ο)πάτρα, voir J.
Curbera, « The Personal Names », dans S. Dakaris, I. Vokotopoulou et A. P. Christidi, Τα χρηστήρια
ελάσματα της Δωδώνης των ανασκαφών Δ. Ευαγγελίδη, Athènes, 2013, vol. 2, p. 423.

On voit bien que le suffixe -ώ est productif dans les quatre formations
d’anthroponymes féminins. On a regroupé les noms Βοστρώ, Ἀφρώ, Ἰνώ
et Συμφώ à part parce qu’ils présentent un raccourcissement inconnu ail-
leurs comme on pourra le voir ci-dessous. On ne connaît pas de paral-
lèle pour les anthroponymes masculins, mais ce procédé pourrait être
archaïque, cf. Εἰδώ (Εἰδοθέα), Δηώ (Δημήτηρ) 29 et continue jusqu’à nos
jours, cf. Σμαρώ de Σμαράγδη.

28. Kamptz, HomPN, p. 126.


29. Chantraine, Formation, p. 115.
étude des suffixes des noms féminins 459

La vie du suffixe est particulièrement longue : on a des exemples sûrs


en grec mycénien (cf. ke-ra-so), dans la langue homérique, les inscrip-
tions archaïques (viie a. C.) et les plus tardives de notre ère. Les sobri-
quets et les formes raccourcies avec des suffixes complexes ou non sont
beaucoup mieux attestés que les formes composées, qui commencent à
apparaître sporadiquement à partir du ive a. C.

6. Suffixe -ίς

On a 18 exemples de féminins en -i dans les tablettes mycéniennes


des trois centres palatiaux, mais aucun d’eux n’est reconnaissable de
prime abord.
Le suffixe est peu représenté dans la langue homérique. Voici les
exemples : Βρισηίς, Κισσηίς, Χρυσηίς, Ἀκτορίς (Ἄκτωρ), Πρόκρις
(Προκρίτη, Πρόκριτος). Seul ce dernier pourrait être un exemple de
« Kurzname » avec -ίς 30. Le suffixe est beaucoup plus fréquent que -ώ :
le total des exemples fournis par le LGPN est sans doute le plus élevé de
tous.
En voici les exemples dans les inscriptions :
Sobriquets Composés 1er / 2e terme du composé Suffixes complexes
hypocoristiques « Kurznamen »
Ἀλυπίς Ἀριστοκλείς Ἁγησίς, Μνησίς Κλεωνίς
Ἀγαλματίς Ἀγαθοφανείς Ἁγίς, Φανίς Ἀρτεμωνίς
Ἀμιαντίς Ναυσίς Αἰσχυλίς
Ἀμφοτερίς -κρατείς, -θνενείς Καλλίς Ἀθηνυλλίς
Ἀμπελίς -γονίς Δωρίς Αἰθαλίς
Θηβαίς Ἀρισταρχίς Ἀριστοκίς Γλυκιννίς
Σεληνίς Ἀρχιανακτίς Φιληματίς
Ἀλεξανδρίς Φιλιστίς
Λυσιμαχίς
Ἀγαθωνίς

On a l’impression que le suffixe fournit une façon commode de


« féminiser » n’importe quel nom anthroponyme composé masculin. Le
suffixe a un usage assez différent de celui de -ώ où les formes composées
semblent plutôt rares. Ici, les séries de féminins en -κρατείς, -σθενείς,
-γονίς sont très bien représentées. Par contre, les exemples de diminutifs

30. Kamptz, HomPN., p. 152.


460 araceli striano

avec une consonne du deuxième élément du composé conservée (face à


-ώ) sont très rares : une seule forme dans ma liste, Ἀριστοκίς, qui rejoint
l’anthroponyme homérique Πρόκρις. On ne dispose d’aucun exemple tel
que Ἀφρώ vel sim.
On pourrait dire que -ώ et -ίς présentent une distribution complémen-
taire : -ώ pour les formes raccourcies, et -ίς pour les composés.

7. Suffixe -(ι)ον

On n’a pas d’exemples homériques avec cette terminaison, qui


semble être une création attique 31. On sait que le suffixe a servi à former
un grand nombre de diminutifs dans le vocabulaire du grec 32. À partir
de cet usage on comprend sa présence dans les noms de femmes. Le suf-
fixe neutre anthroponymique se répand un peu partout en Grèce, surtout
dans les îles de l’Égée où il est spécialement fréquent à Cos, mais aussi
en Asie Mineure. Il est peu présent dans d’autres régions : dans la liste
des anthroponymes des lamelles de Dodone 33, par exemple, il est attesté
une seule fois, dans Αὐτάριον, probable forme raccourcie de Αὐταρέτα,
Αὐταρίστα, vel sim.
En voici les différentes attestations épigraphiques :
Sobriquets Composés 1er / 2e terme du composé Suffixes complexes
hypocoristiques « Kurznamen »
Βουβάλιον Ἀπολλοφάνιον Δαμάσιον Ἀνθύλλιον
Σταγόνιον Λυκαίθιον Κτήσιον Μουσάριον
Βοίδιον Ὀνασιφόρον, Πείσιον, Μνήσιον, Ὀνήσιον Φιλαίνιον
Ὀνησιφόρον
Σύμφορον Φιλότροφον Φείδιον Κρινύλιον
Ἀφροδίσιον Φιλόκαλον Ναύσιον Μουσικόν
Γυμνάσιον Φιλόκιον Ὀλύμπιχον
Κλάδιον Χαρίτιον
Μαλθάκιον Φιλημάτιον

31. O. Masson, « Quelques noms de femme au neutre dans les inscriptions attiques »,
Horos 7 (1989), p. 45-52 = Id., OGS I, p. 475-481. Et voir ici la contribution de
Florian Réveilhac.
32. Chantraine, Formation, p. 65-70.
33. Voir note a du tableau de la page 458.
étude des suffixes des noms féminins 461

L’emploi du suffixe est à l’évidence commode puisqu’il peut s’em-


ployer apparemment dans toutes les formations anthroponymiques. Mais
les exemples des hypocoristiques sont très peu représentatifs et leur fré-
quence n’est pas importante. Il faut signaler aussi que les formes rac-
courcies semblent plus fréquentes dans les composés anthroponymiques
à premier terme en -σι-.

8. Suffixe -οῦς

La terminaison -οῦς dans les noms de femmes semble une créa-


tion morphologique secondaire et tardive limitée à quelques zones géo-
graphiques, mais ce qui nous intéresse est l’utilisation de -οῦς, qui ne
semble pas s’écarter de celui des autres suffixes étudiés 34. En voici les
différentes attestations épigraphiques :
Sobriquets Composés 1er / 2e terme du composé Suffixes Autres
hypocoristiques « Kurznamen » complexes
Παρθενοῦς Εὐκλοῦς Παυσοῦς Ἀθηναροῦς Ἀφροῦς
Βασιλοῦς Εὐτυχοῦς Σωσοῦς Ζωιδοῦς,
Ἡραιδοῦς
Στεφανοῦς Φιλιπποῦς Ἀλεξοῦς Πατρωνοῦς
Χαριτοῦς Τιμοῦς Σωτηροῦς
Ἰσχυροῦς Ἐπιγοῦς
Τρυφοῦς
Σποροῦς
Στρατοῦς

La section des hypocoristiques est à nouveau mal représentée. Il


est intéressant de noter que la plupart des exemples réunis ont un cor-
respondant en -ώ : Βασιλοῦς / Βασιλώ, Στεφανοῦς / Στεφανώ, Χαρι-
τοῦς / Χαριτώ, Τρυφοῦς / Τρυφώ, Στρατοῦς / Στρατώ, Παυσοῦς / Παυσώ,
Σωσοῦς / Σωσώ, Ἀλεξοῦς / Ἀλεξώ, Τιμοῦς / Τιμώ, Ἐπιγοῦς / Ἐπιγώ, Σωτη-
ροῦς / Σωτηρώ. Par ailleurs, -οῦς est le seul suffixe qui fournit un exemple
totalement comparable à Ἀφρώ, diminutif tardif de Ἀφροδίτη, Ἀφροῦς.
On sait que -οῦς sert à former aussi des anthroponymes masculins et que
son origine est obscure, mais il est évident que cette terminaison fémi-
nine est entièrement parallèle à -ώ.

34. Les exemples et la classification de ce suffixe proviennent de L. Dubois, art. cit.


462 araceli striano

La totalité des terminaisons analysées présente donc une typologie


semblable mais les différences de fréquence des formations sont notables.
D’autre part, on constate que les différentes bases anthroponymiques
n’admettent pas les mêmes suffixes, c’est-à-dire que ceux-ci ne sont pas
interchangeables à l’exception de -οῦς et -ώ. Finalement, le caractère
tardif et secondaire de certaines terminaisons envisagées n’empêche pas
que celles-ci aient un emploi comparable à d’autres plus anciennes.

9. Autres suffixes

On pourrait se demander si cette situation se répète dans certains suf-


fixes qui étaient combinés avec la base Φιλ-, par exemple, dans ceux de
-ιννα, -υλλα, -ιχα / -ιχη, -αινα, -ιλλα 35. Il me semble que la réponse est
négative puisque tous ne servent à former que des sobriquets, c’est-à-dire
qu’on ne dispose pas d’exemples d’hypocoristiques, de formes raccour-
cies ou de suffixes complexes avec ces terminaisons.

9.1. Suffixe -ιλλα


L’importance du suffixe -ιλλα est plus grande pour les anthroponymes
que pour les mots du lexique grec. La raison peut résider dans le fait qu’il
y a eu plusieurs convergences dans le cas du suffixe anthrononymique.
Les exemples les plus anciens proviennent d’Athènes et quelques-uns
sont des sobriquets, ce qui met en évidence la signification diminutive
du suffixe : Ῥόδιλλα, Ποτάμιλλα, Ἀνθέμιλλα, Χρύσιλλα. Plusieurs de
ces anthroponymes semblent former un couple avec les anthroponymes
masculins en -λεως / -λας : Ἀνάξιλλα / Ἀναξίλεως, Πράξιλλα / Πραξί-
λεως, Δέξιλλα / Δεξίλεως, Ἄρξιλλα / Ἀρξίλας, Ἡγήσιλλα / Ἡγησίλεως,
Φράσιλλα / Φρασίλας, Μνήσιλλα / Μνησίλεως, Κτήσιλλα / Κτησίλεως,
Λύσιλλα / Λυσίλεως, Σώσιλλα / Σωσίλεως. On a l’impression, par consé-
quent, que beaucoup de ces noms féminins attestés dans des inscriptions
archaïques d’Athènes sont à l’origine des hypocoristiques qui se sont
mêlés avec la terminaison -ιλλα. Ceci justifierait l’absence d’exemples
dans la section « composés hypocoristiques » qui devrait peut-être
inclure les exemples du type Ἀνάξιλλα / Ἀναξίλεως, etc.
35. On a choisi pour notre enquête les terminaisons qui nous ont fourni au moins une
centaine d’exemples.
étude des suffixes des noms féminins 463

À l’époque tardive et impériale, le suffixe entre en convergence avec


le -illa du latin, d’où une augmentation de sa fréquence.
Sobriquets Composés 1er / 2e terme du composé Suffixes
hypocoristiques « Kurznamen » complexes
Ῥόδιλλα Πράξιλλα, Ἀνάξιλλα (?) Λύσιλλα Εὐφρόνιλλα
Μύριλλα Μνήσιλλα
Ἀνθέμιλλα Τελέσιλλα
Χρύσιλλα Πράξιλλα, Ἀνάξιλλα
Νύμφιλλα Ἄρξιλλα
Βόιλλα Ἥγιλλα
Ποτάμιλλα Ἄρχιλλα, Mένιλλα
Φράσιλλα
Ναύσιλλα
Πύθιλλα

La différence la plus frappante avec le reste des suffixes mentionnés


serait l’absence presque absolue de -ιλλα dans les formations de suffixes
complexes.

9.2. Les suffixes -ιννα, -υλλα, -ίχα / -ίχη et -αινα


On analysera quelques autres suffixes plus (-υλλα, -ίχα / -ίχη et -αινα)
ou moins (-ιννα) connus dans la formation des mots du lexique, mais
assez bien représentés dans l’onomastique personnelle féminine. Je les
ai regroupés parce qu’ils ont un point commun qui les éloigne des précé-
dents : ils sont exclus de certaines formations anthroponymiques ; ainsi,
on ne les trouve jamais dans les anthroponymes composés, ni dans les
suffixes complexes. Certains s’ajoutent uniquement à la fin de quelques
sobriquets, d’autres aussi à quelques premiers membres de composés.
Pourtant ce ne sont pas des créations tardives ni exclusives des anthropo-
nymes, comme c’était le cas pour -οῦς, par exemple.
Suffixe -ιννα
La totalité des exemples sont des sobriquets : Μέλιννα, Φίλιννα,
Ἤριννα, Βασίλιννα, Λύκιννα, Γλύκιννα, Βόιννα, Γλαύκιννα, Κόριννα,
Ἅδιννα, Ἥδιννα, Μίκιννα, Πλάτιννα.
464 araceli striano

Suffixe -υλλα
Les noms formés avec ce suffixe se divisent en deux groupes : d’une
part, des sobriquets tels que Ἀρίστυλλα, Εὔθυλλα, Γλύκυλλα, Ἄνθυλλα,
Ῥόδυλλα, Ἀγάθυλλα, Ξάνθυλλα et de l’autre, des formes raccourcies
comme Φείδυλλα, Φαίνυλλα, Φάνυλλα, Τίμυλλα, Χαίρυλλα. On a un
seul exemple formé à partir d’un composé en -σι : Τιμήσυλλα. On n’a
aucun exemple d’hypocoristique ni de suffixe complexe 36.
Suffixe -ίχα / -ίχη
Il s’agit d’un suffixe particulièrement populaire en Béotie. On a
quelques exemples de diminutifs à premier élément en -σι-, Λυσίχα,
Σωσίχα, Ὀνασίχα, mais la plupart des exemples sont des sobriquets :
Μυρτίχα, Σαμίχα, Ὀλυμπίχα, Σωτηρίχα, Διωνυσίχα, Καλλίχα, Πυρρίχα.
Suffixe -αινα
La totalité des exemples est constituée par des sobriquets du type
Λέαινα, Νίκαινα, Λάκαινα, Σύθαινα, Μέλαινα, Γνάθαινα, Ἀρίσταινα,
Τρύφαινα.

Conclusion

Notre enquête a pu montrer que la typologie des suffixes anthro-


ponymiques est dépendante de plusieurs variables. Il nous semble que
chaque suffixe a ses particularités qui méritent d’être étudiées dans le
cadre précis de son environnement géographique et chronologique. Cette
petite histoire des suffixes pourra mettre en évidence aussi leur distribu-
tion selon les différentes bases morphologiques et lexicales des anthro-
ponymes féminins. On pourra peut-être constater quelques différences
dialectales en rapport avec la fréquence d’apparition des suffixes qui peut
éventuellement être différente dans le vocabulaire usuel des dialectes.
Une bonne partie des suffixes étudiés appartiennent à la langue familière,
à une langue qui n’est pas usuellement employée dans la rédaction des
documents publics, ce qui rendra la recherche pleine d’intérêt.

36. Voir ici même la contribution d’Audrey Mathys.


étude des suffixes des noms féminins 465

Références bibliographiques

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466 araceli striano

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T ROISI ÈM E PA RT I E

M O D E S D E S U F F I X AT I O N
A R É AU X E T D I A L E C TAU X
O U P H É N O M È N E S D E M O D E  ?
La suffixation des anthroponymes
en Cyrénaïque pré-romaine

Catherine Dobias-Lalou
Université de Bourgogne
Mission archéologique française
en Libye (Antiquité)

À
propos des anthroponymes de Cyrénaïque, comme en tant
d’autres domaines, les études pionnières sont dues à Oli-
vier Masson 1. J’y ai moi-même ajouté quelques travaux.
Aujourd’hui, les bilans deviennent possibles grâce à divers outils pré-
cieux qui facilitent la recherche. Depuis la parution en 1987 du tome I,
les ressources de l’entreprise LGPN se sont multipliées à travers son site
internet consultable en libre accès 2. Aussi, par souci d’allègement, je ne
préciserai les références que pour des noms qui ne figurent pas dans ces
ressources ou dont l’identification justifie une discussion particulière. Par
ailleurs, le lexique épigraphique de Silvia Maria Marengo offre un cha-
pitre spécial pour l’anthroponymie avec une documentation complète en
1989 3. Et maintenant le bon état d’avancement du triple projet de corpus
des inscriptions 4 et surtout la mise à jour pour publication en ligne de
1. Je pense notamment à trois articles d’O. Masson, « Remarques sur deux inscriptions
de Cyrène et Thèra », RPh 41 (1967), p. 225-231 ; « Libyca », Semitica 25 (1975),
p. 75-85 ; « Grecs et Libyens en Cyrénaïque, d’après les témoignages de l’épigra-
phie », AntAfr 10 (1976), p. 49-62.
2. Ce site (http://www.LGPN.ox.ac.uk/online/index.html) fournit en fichiers téléchar-
geables les index inverses non publiés dans l’édition imprimée des deux premiers
tomes du LGPN, ressource bien commode pour l’étude des suffixes. Les recherches
dans la banque de données produisent des résultats parfois améliorés par rapport à
l’édition imprimée du tome I (1987) et permettent aussi les comparaisons de rende-
ment avec les autres régions couvertes par les sept tomes déjà publiés.
3. S. M. Marengo, Lessico delle iscrizioni greche della Cirenaica, Rome, 1991.
4. Les inscriptions en prose de la période grecque (IGCyr) et les inscriptions métriques,
toutes périodes confondues (GVCyr), éditées par mes soins, seront mises en ligne
470 catherine dobias-lalou

la Prosopographia Cyrenaica, restée inédite, d’André Laronde 5 m’ont


permis d’affiner mes recherches pour offrir le bilan qui suit.
Pour contribuer au thème de réflexion proposé dans le présent col-
loque, il m’a semblé utile de définir à grands traits l’éventail des suf-
fixations attestées dans la région, afin d’insister particulièrement sur les
suffixes les plus caractéristiques et de discuter d’éventuels cas douteux.
En principe, je me suis limitée à la période pré-romaine, celle qui va de
la fondation de Cyrène dans le dernier tiers du viie siècle à la mise en
place du pouvoir romain à la fin du premier quart du ier siècle a. C. Mais
des faits ultérieurs pourront être évoqués lorsqu’ils permettent la mise en
perspective des faits anciens. Les suffixes sont étudiés ici dans le cadre
de leur emploi anthroponymique, c’est-à-dire uniquement si leur adjonc-
tion donne naissance à un anthroponyme. Si un suffixe (-τωρ, -μων par
exemple) sert à former un mot du lexique transposé en emploi anthropo-
nymique – un « sobriquet » au sens large –, il ne devrait pas relever de la
présente étude. Il en va de même des diminutifs en -ίσκος et -ιχος 6.

1. Suffixes en -α-

L’anthroponymie de Cyrénaïque offre un large échantillonnage de


suffixes issus du stock grec, dans le cadre préférentiel du système phono-
logique et morphologique dialectal. Ainsi, la conservation du vocalisme
a : hérité donne aux noms une coloration régionale, dans leur thème et
dans leur déclinaison : tous les masculins relevant de la première décli-
naison sont en -ας, génitif -α 7. On a donc dans les composés comportant

par l’université de Bologne (site expérimental https://igcyr.unibo.it/) ; les inscrip-


tions en prose des périodes romaine et byzantine (IRCyr), éditées par J. Reynolds,
seront mises en ligne par le King’s College de Londres (site provisoire : http://ircyr.
kcl.ac.uk/index.html).
5. François Chevrollier met à jour le manuscrit du regretté André Laronde, en lien avec
les corpus électroniques en préparation. Un portail commun InsLib donnera accès à
la prosopographie, aux corpus cyrénéens et au corpus tripolitain IRT dans son édi-
tion de 2009 (http://inslib.kcl.ac.uk/irt2009/).
6. Voir mon étude « Sur quelques noms nouveaux de Cyrénaïque », dans Onomatologos,
p. 98-99.
7. Les noms en -ας, -αντος seront évoqués plus bas à propos de leur rencontre avec les
noms libyques. Les noms cyrénéens en -λας également.
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 471

au second membre un substantif en -a : Λυσανίας, gén. Λυσανία 8. La


panoplie panhellénique des suffixes masculins en ā a connu un rende-
ment relativement modeste dans des hypocoristiques. Parmi les formes en
-άδας on relève les hapax absolus Χηριάδας et Χαιράδας 9. D’autres sont
peu fréquents ici et semblent venir d’ailleurs, comme Λαϊάδας, unique
à Cyrène, mais abondant à Delphes. Χαρτάδας et Πραξιάδας, mainte-
nant connus pour une dizaine d’individus chacun, ont les scores les plus
élevés. On dispose aujourd’hui de deux exemples d’Ἀρθμιάδας 10 et d’un
d’Ἀλκιάδας 11. Le seul véritable favori est bâti sur l’épithète divine Καρ-
νῆιος, avec les trois étapes de son développement phonétique : Καρ-
νηιάδας > Καρνηάδας > Καρνήδας. Il se distingue ainsi formellement
de la variante non épichorique, introduite avec succès en Cyrénaïque à
l’époque romaine Καρνεάδης 12.
Les formations en -ίδας ne sont ni totalement absentes, ni très nom-
breuses, hormis les banals Εὐκλείδας et Ἡρακλείδας. Sont sans parallèles
extérieurs deux noms du ive s. : Πολλίδας, dont les quatre occurrences
ne cachent peut-être qu’un seul individu 13, et Εὐοπίδας avec deux occur-
rences 14. Pour ce dernier, on peut penser à un hypocoristique du sobri-
quet non attesté fondé sur l’adjectif εὔοπτος. Une dérivation plus simple

8. Le sentiment de l’étymologie était resté bien vivant, comme le montre une épi-
gramme d’époque augustéenne qui joue sur le sens de Παυσανίας « qui met un terme
aux ennuis » (SEG 9, 63 ; 26, 1835).
9. Il convient d’expulser du LGPN 1 le prétendu *Ἀκαμαντιάδας, qui est un nom de
fête et se lit –δες, voir maintenant SEG 57, 2010.
10. Probablement le même individu, connu comme souscripteur vers 280 (SEG 48, 2055,
l.  16) et par son épitaphe (SEG 47, 2170), ainsi qu’un contemporain, également
connu par son épitaphe (SEG 47, 2182).
11. Nom de dédicant gravé sur un tesson au port de Cyrène (SEG 60, 1831, iiie s.).
12. On peut d’ailleurs se demander si la forme Καρνειάδας en P. IX, 71 remonte bien
à Pindare ou si elle ne résulte pas plutôt d’une réinterprétation de quelque copiste
qui, lisant *Καρνηάδας, l’aurait corrigée parce qu’il la comprenait comme résultant
d’un allongement métrique de Καρνεάδας (entrée sous laquelle cet emploi figure en
LGPN 1).
13. Aux deux occurrences recensées par le LGPN  1 d’un Πολλίδας, père et fils de
Κλέων s’ajoute une base votive inédite portant le nom du fils et un Πολλίδας père de
[Φ]υλῶχος, lecture rectifiée de SEG 46, 2198, l. 76. La datation conduit à supposer
pour le second l’appartenance possible à la même famille.
14. Outre l’occurrence recensée dans le LGPN 1, lecture vraisemblable Εὐοπ�[ίδας] en
SEG 9, 346.
472 catherine dobias-lalou

de ce dernier a produit, beaucoup plus tard, le nom du frère de Synésios,


Εὐόπτιος.
On passera rapidement sur les autres suffixes. Les formes en -ίας et
en -έας n’offrent pas de caractéristiques particulières. Les noms en -τας
ne relèvent pas de la suffixation anthroponymique, puisqu’ils transposent
dans l’anthroponymie des appellatifs ou des ethniques dérivés à l’aide
de ce suffixe 15. Quant à la suffixation en -nā- à l’œuvre dans Αἰσχίνας
et dans ce seul anthroponyme à Cyrène, elle n’a rien de proprement
cyrénéen.
Une question embarrassante est celle des hypocoristiques en -ΑΣ
bâtis sur des bases simples ou issues de troncation et j’ai moi-même
changé d’avis sur certains d’entre eux 16. Peut-il s’agir dès la période hel-
lénistique de noms en -ᾱς ou déjà de formes en -ᾶς ? La flexion, là où
un cas oblique était attesté, ne présentait pas, jusqu’à une date récente,
d’exemple de l’élargissement distinctif qui eût permis d’identifier la
seconde espèce sans hésitation. Toutefois on connaît maintenant un
éphèbe Εὐφρᾶς Εὐφρᾶτος (SEG 46, 2207, 40, entre 172 et 175 p. C.),
qui permet d’accepter la même lecture pour un homonyme contemporain
(SEG 37, 1686). Or la base tronquée sur laquelle est constitué ce nom est
typiquement cyrénéenne et cette suffixation, en offrant une variante nou-
velle d’un nom épichorique, allie tradition et modernité. Pour d’autres
exemples d’époque impériale, qui se rencontrent dans des milieux per-
méables aux influences extérieures, on ne devrait pas hésiter à transcrire
Ἀρετᾶς, Ἀριστᾶς, Δωσᾶς, Ἀλεξᾶς, Μενεστᾶς, Πτυλᾶς 17. Par ailleurs,
dès l’époque hellénistique, un petit groupe de sobriquets est attesté et

15. Pour le nom Γαλέστας, originaire de Grèce du Nord et répandu par les Macédoniens
jusqu’à Cyrène, voir S.  Minon, « Γαλέστας, Γαλαίτης et Γαλέτης », dans F.  Poli,
G. Vottéro (éd.), De Cyrène à Catherine : trois mille ans de Libyennes, Nancy, 2005,
p. 179-190.
16. Le classement que j’ai proposé naguère (« Anthroponymes grecs en –ΑΣ », dans
Dialectes grecs, p. 25-28) aurait dû être plus nuancé, compte tenu de la chronologie
et des contextes, alors qu’Εὐφρᾶς était déjà connu. Des hésitations comparables
se font jour dans le LGPN 1. Sur les noms en -ᾶς, la communication de L. Dubois
(p. 299-332) dans ce volume est une mise à jour précieuse.
17. J’ai relevé (loc. cit. note précédente) des noms théophores bâtis sur des noms
divins étrangers à la région. Par ailleurs, il convient de mettre à part Ἀντιπᾶς qui
au sanctuaire de Bu Daraj (SEG 9, 733) est probablement un visiteur venu d’Orient.
En outre, le patronyme ΒΥΖΑ d’un éphèbe à Taucheira à la haute époque impériale
(CIG 5306 b) est généralement transcrit Βυζᾶ, mais il pourrait aussi s’agir d’une
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 473

c’est ici le registre lexical qui plaide pour la transcription de ces génitifs
en Στραβᾶ, Σχιδᾶ, Ἀραχνᾶ 18. En revanche, ces différents arguments ne
valent pas pour d’autres noms, que je continue provisoirement à trans-
crire Πράτας 19, Κλήτας, Νίκας.
Un cas limite se présente avec les noms qui sont étymologiquement
des composés en -λας (< -λᾱϝος), gén. -λα (< -λάϝω) 20. Toutefois, l’ac-
cent récessif au génitif, garanti par la tradition littéraire pour le nom
dynastique Ἀρκεσίλας, montre que ces noms ont été complètement ali-
gnés sur les autres masculins en -ας, ce qui semble faire de -λας une sorte
de suffixe. Un nouvel exemple à ajouter à cette série est Θαρύλας, dans
une liste de noms récemment publiée par G. Paci 21.
Il arrive aussi au suffixe -ας d’être couplé avec le redoublement
expressif, notamment dans le nom typiquement cyrénéen Ἀρίμμας,
hypocoristique d’Ἀρίμναστος 22. Je peux y joindre un Λυκόμμας encore
inédit 23, dont la base de dérivation est probablement un nom bien répandu,
quoiqu’encore inconnu en Cyrénaïque, Λυκομήδης , à moins que ce ne
soit le plus rare Λυκόμαχος. Dans le même ordre d’idées, O. Masson a
montré pour deux noms cyrénéens le recours à la gémination expressive
de la liquide initiale des composés en –λας : ainsi Μενέλλας dans une
famille cyrénéenne en Égypte et Ὀρσίλλας à Cyrène même 24.

dorisation de Βύζης, un nom de la Grèce du Nord et de la Thrace, bien que l’idionyme


Φιλόδημος de l’éphèbe comporte un èta.
18. Στραβᾶ dans une liste de souscripteurs (SEG 20, 735 b, II, 65, vers 280) ; Σχιδᾶ dans
une liste de militaires un peu antérieure (SGDI 4834 b, 19).
19. Dans un contexte peu clair, Πράτα semble être un patronyme masculin (SECir 273,
iie / ier s.). On peut au moins affirmer que cette catégorie morphologique n’était pas
inconnue à Cyrène, puisque pour le nom d’origine macédonienne Μάγας, porté par
un éphémère roi de Cyrène, les sources littéraires garantissent la place de l’accent. Il
en va de même pour des noms panhelléniques comme Λίχας.
20. C. Dobias-Lalou, Le dialecte des inscriptions grecques de Cyrène, Paris, 2000, p. 50
et 84.
21. SEG 61, 1557 A, col.  I, l. 10. Sur la variante Θαρυ- du premier membre, voir
O. Masson « Notes d’anthroponymie grecque et asianique, V. Quelques noms crétois
au Mnemonion d’Abydos », BN 16 (1965), p. 159-160 (= OGS I, p. 62-63).
22. O. Masson, « Deux noms doriens chez Callimaque. Ἀρίμμας, Ἐχέμμας et quelques
noms en -μμας », RPh 50 (1976), p. 24-31 (= OGS I, p. 259-266), a bien montré que
ce nom n’avait rien de libyque.
23. Base portant le nom de Λυκόμμας Ἀστυκρά[τε]υς, ive / iiie s.
24. O.  Masson, « Quelques noms de Cyrénéens dans l’Égypte ptolémaïque », dans
J. Bingen, G. Cambier, G. Nachtergael (éd.), Le monde grec. Hommages à Claire
474 catherine dobias-lalou

Je voudrais m’arrêter encore sur deux noms en -ΑΣ. Le premier est


Ἀπονίκας, dont l’existence a fait débat aussi longtemps qu’on ne dispo-
sait que d’un graffito archaïque trouvé à Taucheira 25, lequel d’ailleurs
pourrait aussi avoir été incisé à Thèra, car le même plat porte dans une
autre zone deux lettres, dont un bèta typiquement théréen, tandis que le
graffito principal Ἀ̣πονίκας ἔγρ̣[απσε] ne présente pas de lettre distinc-
tive de l’un ou l’autre alphabet. O.  Masson se montrait sceptique sur
la lecture de L.  H. Jeffery, relayée par le premier éditeur, qui pour sa
part avait transcrit le nom sans accent et sans commentaire. Notre maître
penchait plutôt pour une lecture ἀπὸ νίκας, faisant du plat un butin de
victoire. Je m’étais laissée convaincre par ses arguments 26. Or nous dis-
posons aujourd’hui d’un second exemple de ce nom sur un sarcophage
de la période hellénistique 27. Ce nom apparaît comme exclusivement
cyrénéen, à moins qu’il ne soit commun à Thèra et Cyrène. Il doit être
mis en rapport avec Ἀπόνικος, lui-même isolé et attesté une seule fois à
Cyrène (SEG 20, 735 b II, l. 51). On voit bien par ce cas que le suffixe
*-ā- pouvait à l’occasion remplacer la voyelle thématique terminant un
composé, sans la troncation qui caractérise les hypocoristiques 28.
D’autre part, on peut hésiter sur la structure de Κυρβασίας nom
spécifiquement cyrénéen, commenté par O.  Masson, qui montrait,
après Bechtel 29, son rapport avec le nom d’un bonnet perse ou scythe

Préaux, Bruxelles,1975, p. 709-715 (= OGS I, p. 233-239). Une forme en -ίννας sera


signalée plus loin.
25. J. Boardman, « Evidence for the dating of Greek settlements in Cyrenaica », ABSA
61 (1966), p. 153-155.
26. C. Dobias-Lalou, « Pour une chronologie des inscriptions archaïques de Cyrène »,
RPh 44 (1970), p. 233-235, no 3. J’y retenais une date dans la première moitié du
vie s.
27. Transcription en majuscules, assortie de commentaires épigraphiques de J.  Rey-
nolds, par J. et D. Thorn, A Gazetteer of the Cyrene Necropolis, Rome, 2009, p. 79,
qui fournissent une localisation précise du sarcophage photographié, mais non
signalé, par J. Cassels, « The cemeteries of Cyrene », PBSR 23 (1955), pl. III b. Je
n’ai pas vu moi-même ce sarcophage, mais l’hésitation de J. Reynolds entre O et Ω
pour la 3e lettre n’est pas appuyée par la photographie de Cassels. D’autre part, les
noms gravés sur les sarcophages étant toujours au nominatif, il n’y a pas lieu d’envi-
sager ici un féminin *Ἀπονίκα au génitif.
28. Pour un échange inverse de suffixes, voir ci-dessous.
29. HPN 600 ; O. Masson « Quelques épitaphes grecques », BCH 99 (1975), p. 224. Aux
deux occurrences mentionnées par O. Masson à Cyrène et Ptolémaïs, on en ajoutera
une autre, qui probablement concerne le même personnage de Cyrène, dont le fils
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 475

κυρβασία, et rapprochait le nom d’un monétaire de Dyrrachion, gén.


Κυρβάσου. Il posait donc au nominatif respectivement Κυρβασίας et
Κύρβασος. Comme l’appellatif reste isolé, il est difficile de décider si
une base κυρβασ- a pu exister et par conséquent si le suffixe anthropony-
mique est ici -ίας ou -ας (voire déjà -ᾶς) 30.

2. Masculins et féminins

D’autres suffixes, sur lesquels je ne m’étendrai pas, ont fonctionné


pour former des noms courts : ce sont -ων- 31, -ητ- 32 et les thématiques
-ιο- 33, ou tout simplement -ο-. En effet la voyelle thématique -e / o- peut
se substituer à la voyelle -ā : qui terminait le thème d’un second membre
de composé, mais ce procédé n’est ni obligatoire (voir -αγόρας, -ανίας),
ni propre à l’anthroponymie : Κλεύδικος, est bâti comme ἄδικος. D’autre
part, la voyelle thématique peut parfois à elle seule fonctionner comme
un suffixe permettant la création d’un hypocoristique masculin. Je relève
ainsi Πρόϙλος dans l’une des plus anciennes inscriptions de Cyrène
(SEG 45, 2170) 34. Inversement, Μελάνθης 35 semble un hapax, mais était

était nomophylaque en 321 / 320, après la relecture due à A. Laronde, Cyrène et la


Libye hellénistique, Paris, 1987, p. 95-98, du diagramma de Ptolémée Ier (SEG 9,
1, l. 79).
30. Au reste, on pourrait arguer que le génitif Κυρβάσου ne répond pas nécessairement
à un nominatif en -ος.
31. Le choix des suffixes semble influencé aussi par des échos sonores sans rapport avec
la rigueur morphologique : Ἀρίστων doit probablement une part de son succès au
fait qu’il apparaissait vraiment comme une forme courte d’Ἀριστώνυμος. Κλέων est
plutôt en rapport avec Κλεώνυμος qu’avec le pourtant très fréquent Κλέαρχος.
32. On connaît Κράτης et Στράτης ; le génitif est en -ητος.
33. Ainsi, au lieu de bâtir un composé théophore en -δωρος sur le nom d’Ammon, on a
préféré, probablement pour éviter une succession de voyelles de timbre o, recourir
au plus simple Ἀμμώνιος, qui est devenu un nom extrêmement fréquent. S’agissant
d’Apollon, si Ἀπολλώνιος a un rendement très supérieur, Ἀπολλόδωρος, -φάνης et
autres ne sont pas inconnus.
34. Il convient de renoncer à l’hypothétique *Λᾶρος que je posais (Le dialecte des ins-
criptions grecques de Cyrène, Paris, 2000 , p. 43) pour expliquer le féminin Λάρα.
Ce nom transpose tout simplement l’adjectif λᾱρός « dont on profite bien, recons-
tituant », plutôt que « savoureux » selon la traduction traditionnelle, cf. A. Blanc,
« λᾱρῑνός, λᾱρός et ἀπολαύω : sémantique et étymologie », Glotta 76 (2000),
p. 162-167. Je remercie A. Alonso Déniz d’avoir attiré mon attention sur ce point.
35. J. Cassels, art. cit., p. 42.
476 catherine dobias-lalou

prévisible à l’origine de Μέλανθος, attesté dans diverses régions et résul-


tant de l’haplologie de *Μελαν-άνθης (HPN 55). Le couple -ος / -α offre,
comme dans le système adjectival, le procédé le plus simple de différen-
ciation masculin / féminin, permettant ainsi de créer des noms de femmes
composés en -βώλα -δίκα, -δώρα, -ίππα, -στράτα, -τίμα, -φίλα, qui s’op-
posent aux masculins par la voyelle suffixale et la place de l’accent. Du
côté des hypocoristiques du type Πρόκλος, l’hypocoristique féminin
Μνάστα correspond à Μναστοκλῆς, tous les deux étant presque exclusi-
vement cyrénéens 36.
D’une façon générale, les anthroponymes féminins sont en Cyré-
naïque infiniment moins nombreux que les masculins et presque exclu-
sivement constitués par dérivation à partir de ceux-ci. Sur des thèmes
athématiques, le morphème *-ja est à l’origine des formes en ‑κλεια et
-κράτεια et de noms comme Τρύφαινα, Λέαινα. Le féminin tiré du mor-
phème *-went-, peut-être avec le degré zéro *-wn̥ t-ja, est présent dans
Τιμᾶσσα 37. Ces formations n’ont rien de spécifique. On note par ailleurs
l’absence presque totale de certaines formations de féminins : on n’a
presque aucun diminutif neutre en -ιον 38. Les féminins en -ίδ- sont très
rares dans la région durant la période considérée, les noms en ‑i- étant
presque seulement des masculins. Trois exceptions apparentes peuvent
être écartées. Ainsi, à propos d’une dédicace aux dieux alexandrins, faite
à Canope par un certain Βαρθυβας – nom exclusivement attesté en Cyré-
naïque  – ὑπὲρ Πολιάνθους καὶ Βακχίδος, P.  M. Fraser a observé que
ces deux personnes étaient peut-être des Cyrénéens, ce que la fréquence
de Πολιάνθης en Cyrénaïque rend fort possible 39. Or le second nom est
inexplicablement rangé (LGPN 1, 98) sous l’entrée Βάκχις masculin. À
mon avis, Polianthès, peut-être Cyrénéen d’origine, et Bakkhis étaient

36. Quand Πρόκλος et Πρόκλα fonctionnent comme cognomina à l’époque romaine, ils
transposent bien sûr Proculus / a, mais conservent peut-être le souvenir de l’ancien
Πρόκλος grec.
37. Voir la contribution de C. Le Feuvre (p. 493-516).
38. Μάριον et Μάριν, noms de femmes juives à Apollonia et Taucheira au ier s. p. C.,
sont à considérer à part. Sous réserve d’une éventuelle relecture par J.  Reynolds,
le nom Κλεῦπιν à Ptolémaïs à l’époque impériale (CIG 5234, l. 9) pourrait être la
forme évoluée de Κλεύπιον, sur une base attestée dans la région (cf. annexe 1). À
Cyrène, la découverte toute récente d’une tombe a livré un nom Εὐίππιον dans un
contexte qui fait penser à une tombe d’enfant, mais doit encore être analysé.
39. Dédicace de Canope à Sarapis, Isis et Hèraklès du iiie s. (SEG 18, 649).
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 477

mari et femme, probablement les parents de Barthybas, mais rien n’in-


dique que la mère ait eu une origine cyrénéenne. Par ailleurs, depuis
l’editor princeps Robinson, on admet un féminin Νευσσίς dans une épi-
taphe du iiie / iie s. 40, et un cas identique est celui de ΞΑΝΘΙΣ, considéré
comme féminin depuis Oliverio (SEG 9, 212). Dans ces deux cas, le mas-
culin offre la meilleure cohérence avec les données régionales.  Enfin,
l’absence de féminins en -ίδ- dans la région et la forme non dialectale
du théonyme de référence conduisent à supposer avec vraisemblance
qu’Ἀρτεμωνὶς Κυρηναία enterrée à Athènes (SEG 37, 169, ca. 200) est
née et a reçu son nom en Attique.

3. Cas particuliers : masculin -ις et féminin -ώι

En revanche, la productivité des formations en -ις pour les mascu-


lins va de pair avec celle de -ώι pour les féminins. Ces deux suffixations,
sans être propres à la Cyrénaïque, ont marqué de leur empreinte l’ono-
mastique régionale. Leur singularité tient à leur rendement élevé et à la
persistance de leur flexion traditionnelle :
— pour les masculins, nominatif -ις, accusatif -ιν, génitif -ιος 41 ; le
datif n’est pas attesté ;
— pour les féminins, nominatif -ώι, accusatif -ω, datif -οῖ ; génitif ‑ος.
Dans les féminins, au nominatif, la diphtongue à premier élément
long résiste assez longtemps au nominatif, comme dans d’autres finales
grammaticales 42.
Ces deux suffixes servent à constituer des hypocoristiques de noms
composés ou simples. Un exemple parmi d’autres du goût pour ces deux

40. D. M. Robinson, « Inscriptions from the Cyrenaica », AJA 17 (1913), p. 166, no 23
et p. 504.
41. Il faut ajouter qu’à la période impériale une flexion en –ιδος apparaît parfois pour
les masculins. Le seul exemple vraiment sûr est le cognomen du prêtre éponyme
de l’année 178 / 179 p. C. nommé avec son patronyme et son papponyme Κοράνιος
Ἄλεξις Ἰαιλιανὸς Φιλοξένου τοῦ Ἀλέξιδος (SECir 9b). Cet exemple conduit à écarter
pour l’éphèbe Ἡρακλῆς Ἀλέξιδος (SEG 20, 742, II, 43) de 161 p. C. le soupçon qu’il
puisse s’agir d’un métronyme.
42. À partir du ier s. a. C., on commence à voir apparaître la flexion non-dialectale nom.
-ώ, gén. -οῦς, mais le nominatif -ώι connaît un regain de faveur dans les milieux
dirigeants au ier s. p. C.
478 catherine dobias-lalou

favoris est la formule onomastique d’une certaine Μεγὼι Νίκιος 43. Le


suffixe -ις était particulièrement adapté aux composés dont le premier
membre se terminait par -σι- et à ceux dont le second membre commen-
çait par -ιππος : la frontière morphologique pouvait alors être ressentie
de façon floue 44. Toutefois il ne s’agit que d’un facteur favorisant, car
d’une part les féminins en -ώι sont aussi facilement bâtis sur les mêmes
bases en -σ(ι)- et d’autre part ‑ις s’ajoute très bien à d’autres bases. Ainsi
Κάρνις répond à Καρνῆιος, épithète d’Apollon qui ne semble avoir
donné naissance à aucun composé théophore. Ces formations, alliées à
quelques autres, montrent une vitalité durable sur toute la période consi-
dérée, comme on peut le voir sur le tableau donné à l’annexe 1, où ces
deux suffixes sont comparés à d’autres, moins productifs. La formation
en ‑ώ(ι) produit aussi des sobriquets dérivés de mots du lexique. On
citera pour les féminins Μυρώ 45 et un nom plus rare Προτιμώι 46. Parmi
les masculins, Ἄκανθις n’est épichorique que par son suffixe. La classi-
fication se heurte parfois à la difficulté de départager les dérivés sur base
simple et les hypocoristiques dont la troncation coïncide avec la limite
entre les lexèmes de composés : on peut se poser la question pour Μεγώι
ou Στρατώι par exemple.
On trouve encore -ώ(ι) comme partie prenante d’un suffixe complexe
dans Φιλακώ et aussi, selon O. Masson, Μινακώ 47, qui relèvent d’une
formation diffuse dans le monde grec. On connaît par le lexique la colo-
43. Après révision, je date l’écriture de cette base du ive s. et précise sa provenance de
la nécropole nord.
44. En toute rigueur, on peut parler alors de suffixe zéro, puisque la voyelle i appartient
déjà au nom complet. C’est plutôt son insertion dans un système flexionnel qui fait
émerger le « suffixe » -i-.
45. Les trois exemples de Μυρώ mentionnés pour la Cyrénaïque (LGPN 1, 322) sont tous
d’époque impériale. Parmi eux, je suggère de lire SEG 27, 1154 ainsi : Μυρὼ Πτο-
λεμαίου ἁ νῦν Ἡώς, ἐτῶν ιγ᾿. Myrô aura changé de nom au moment de sa mort pour
devenir « Aurore ». Il existe maintenant deux occurrences du génitif Μυρός datant
de la période hellénistique, l’une lue dans une tombe de la nécropole ouest, voir D.et
J. Thorn, A Gazetteer of the Cyrene Necropolis, Rome, 2009, p. 305, l’autre exhumée
des archives de L. Gasperini par S. Antolini, qui l’a présentée au colloque d’archéo-
logie cyrénéenne d’Urbino en octobre 2015 (actes à paraître dans la série Cirene
“Atene d’Africa”).
46. Base encore inédite de la nécropole nord : Προτιμὼι Νικαίω (seconde moitié du
ive s.).
47. O.  Masson, « Notes d’anthroponymie grecque, IV. Les deux prêtresses Philylliô
(Alexandrie et Cyrène) », RPh 57 (1983), p. 188 (= OGS II, p. 412), n. 25.
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 479

ration « familière » du suffixe -ακ-, qui s’est assez naturellement associé


au suffixe de diminutif dans -ακιον (d’où -ακι du grec moderne), pro-
ductif également dans l’onomastique : ainsi Φιλάκιον à Athènes 48. Il
existe du reste une constellation de suffixes complexes se combinant à
-ακ- en vertu de sa valeur affective 49. Si Φιλακώ est bien une Cyrénéenne
morte à Athènes (IG II2, 9137), en revanche l’origine de Μινακώ fille
d’un Λιβύς, sans ethnique mentionné, n’est pas établie.
La formation des féminins en -ώ(ι) conserve une grande faveur à
l’époque impériale, mais cette productivité relative tient aussi au fait que
la proportion de noms féminins attestés croît avec le temps. Toute ten-
tative de statistique serait vaine. La concurrence des formes en –οῦς,
-οῦτος ne s’installe que très timidement, mais confirme la démonstration
menée sur le matériel de Grèce du Nord par L. Dubois 50.

4. Formations en -υ-

Un autre groupe a pour point de départ les adjectifs en -υς : Θράσυς est
employé en Cyrénaïque à côté des composés comme Θρασύμαχος. Des
formes élargies en -υλο- se retrouvent dans des adjectifs et des anthro-
ponymes : non seulement Κρατύλος, mais aussi Αἰσχύλος et Τανύλος,
dont les bases *αἰσχύ-, *τανύ- ne sont connues qu’indirectement 51. Le
doublet -υλλο-, dont l’origine *-uljo- est avérée grâce au mycénien et
dont la géminée produit un effet expressif, se trouve par exemple dans
Βάθυλλος 52. Des dérivations supplémentaires peuvent se greffer sur ces

48. Chantraine, Formation, p. 73 et 377-380.


49. Mais on peut douter de la valeur diminutive que prête à Τελλακώ (Rhénée)
O. Masson, « Les anthroponyme grecs à Délos », dans D. Knoepfler (éd.), Comptes
et inventaires dans la cité grecque, Neuchâtel - Genève, 1988, p.  77 (= OGS III,
p. 16) ; voir aussi p. 78-79 le très intéressant développement sur les noms en -ακος
dans les Cyclades.
50. L.  Dubois, « Des anthroponymes en -οῦς », dans Onomatologos, p.  397-421. Il
s’agit bien d’une formation récente, qui prend le relais de l’ancienne formation en
-ώ(ι).
51. Sur tout ce dossier, voir C.  de Lamberterie, Les adjectifs grecs en -ύς, Louvain,
1990, en particulier p. 195-197 et 116-122 ; sur la constellation de noms apparentés
à αἰσχρός, voir O. Masson « Quelques anthroponymes grecs et leur morphologie :
noms composés et noms simples », Verbum 18 (1995-1996), p. 283-284.
52. Un éphèbe de Cyrène à l’époque antonine seulement (SEG 46, 2207, l. 25). Les for-
mations en -υλλο- sont examinées dans ce même volume par A. Mathys (p. 333-378).
480 catherine dobias-lalou

formes, produisant Θρασυλλίων d’une part 53, Ἴθυλλις d’autre part 54. La


faveur dont jouissent ces formations entraîne leur extension à des radi-
caux qui n’ont pas de lien avec un adjectif en ‑ύς : le thème nominal
d’ἄστυ, constituant le premier membre de composés comme Ἀστύμαχος,
permet la formation des hypocoristiques Ἀστύλος et Ἄστυλλος. En face
de l’adjectif thématique σιμός, on a Σιμύλος, en face de φιλός, deux
noms féminins : Φίλυλλα 55 et Φιλυλλιώ 56.
Un dernier nom méconnu jusqu’ici me semble pouvoir s’expliquer par
le suffixe -υλος. Dans une tablette comptable où il est fait état de dépôts
(κατήνικε) intervient la mention de « dépôts supplémentaires » : ΧΑΥΛΩ
παρκατάβολας 57. Perplexe devant cette forme, le premier éditeur, L. Gas-
perini avait envisagé une graphie aberrante de l’appellatif καυλός, dont
on sait qu’il est spécialement employé pour désigner la tige de silphion.
Cette explication ingénieuse se heurte cependant à deux objections : une
confusion entre kappa et khi serait très suspecte et surtout l’accusatif plu-
riel doit être associé à ce qui suit en une phrase construite, de telle sorte
que, comme les dépôts mentionnés précédemment, celui-ci est de nature
monétaire et il est effectué par un individu ici nommé, représentant un
groupe de magistrats 58. L’anthroponyme isolé Χαῦλος peut s’expliquer
en rapport avec la base χαϝ- « béer », de la famille de χάος 59. On connaît
dans le lexique l’adjectif χαῦνος « béant, mou, flasque », qui a produit
des sobriquets (HPN 499). On peut imaginer qu’un adjectif en *-lo- ait
53. SEG 40, 1596, l. 9. C’est le document dont il va encore être question n. 54 et 57.
54. SEG 40, 1596, l.  4. Discussion philologique et morphologique, C.  Dobias-Lalou,
« Sur quelques noms nouveaux de Cyrénaïque », dans Onomatologos, p. 95-96.
55. C.  Dobias-Lalou, « Espace des dieux, espace des hommes, espace des vivants,
espace des morts dans les inscriptions de Cyrénaïque », dans A.  Inglese (éd.),
Epigrammata, 2, Tivoli (Rome), 2013, p. 181 et fig. 7 p. 421.
56. Pour cette dernière, la lecture a été établie par O.  Masson, grâce à un judicieux
rapprochement avec un autre exemple à Alexandrie : « Notes d’anthroponymie
grecque, IV. Les deux prêtresses Philylliô (Alexandrie et Cyrène) », RPh 57 (1983),
p. 185-188 [= OGS II, p. 409-412]).
57. L. Gasperini, « Le laminette plumbee iscritte dal ripostiglio dell’Agorà di Cirene »,
dans Giornata Lincea 1987, Rome, 1990, p.  17-33 (= Scritti di epigrafia greca,
p. 347-360), d’où SEG 40, 1596.
58. En d’autres termes, le génitif Χαύλω dépend de παρκαταβόλα dans un rapport
subjectif et non objectif.
59. Cette piste, suggérée par R. Arena, « Osservazioni sulla lingua delle due iscrizioni
cirenaiche », dans le volume cité n. 57, p. 37-38, n’avait pas dû emporter l’adhésion
de Gasperini, qui avait pourtant suscité le commentaire linguistique de son collègue.
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 481

existé dans le lexique, mais ne nous soit pas parvenu ; plus simplement,
la dérivation en -υλος a pu affecter le radical, avant ou même après l’ef-
facement de la semi-voyelle -w- 60.

5. Formations en -ινο-

Les noms en -ΙΝΟΣ peuvent avoir des origines diverses, entre les-
quelles le choix peut parfois sembler relever de l’arbitraire. La région
nous livre ΧΑΡΙΝΟΣ, ΦΙΛΙΝΟΣ et ΥΨΙΝΟΣ. Les deux premiers, avec
l’appui de la tradition littéraire, sont transcrits Χαρῖνος et Φιλῖνος, le pre-
mier étant du reste considéré depuis les grammairiens anciens comme un
sobriquet pourvu du suffixe de matière, fondé sur χαρά, quelque chose
comme « Joyeux », bien que l’adjectif correspondant ne soit pas formel-
lement attesté dans le lexique 61. Le troisième en revanche est enregistré
comme Ὕψινος (LGPN 1, 451) 62. Et de fait, on peut avec vraisemblance
le considérer comme l’hypocoristique en -ο- du composé plausible *ὑψί-
νοος, sinon comme son avatar phonético-morphologique normal 63. Enfin
dans ce groupe et avec une gémination expressive on a Θάλιννος, en rap-
port avec le composé fréquent Θαλίαρχος 64.

60. Phonétiquement et morphologiquement le dossier est parallèle à celui de la base


φαϝ-, étudiée par Ο.  Masson, « Nouvelles notes d’anthroponymie grecque, VIII.
Noms en Φαο- et –φαης », ZPE 110 (1996), p.  87-92 (= OGS III, p.  243-248).
Comme il le rappelle, le nom apparenté Φάος est attesté à Cyrène au ier s. p. C.
61. En réalité, Hésychios, s.v. χαρόνη recourt à cet adjectif qualifiant ἄμπελος, ce qui
prouve qu’à défaut d’être usuel il est transparent. L’anthroponyme, en Cyrénaïque,
connaît deux emplois. À celui, de date romaine, que donne le LGPN 1, 482, on en
ajoutera maintenant un du iiie s. a. C. : J. Reynolds, « Appendix: the inscriptions on
stone and lead », dans D. White (éd.), The extramural sanctuary of Demeter and
Persephone Final reports VIII, Philadelphie, 2012, no A  8, avec mes remarques,
Bull. épigr. 2013, no 480.
62. Avec un point d’interrogation, car l’upsilon initial a été restitué par Oliverio (d’où
SEG 9, 46, l. 36), mais aucune solution préférable n’apparaît pour une lacune qui est
à coup sûr d’une seule lettre.
63. La contraction o + o produit normalement en cyrénéen un ō : noté Ω (ainsi dans les
génitifs singuliers thématiques). Or, de même que le génitif du type féminin en -ώι
est en -ος, on peut imaginer que le cyrénéen ait éliminé le type répondant à l’att.
νοῦς en réduisant la longue sous la pression morphologique, les finales attendues
-ώς étant trop étrangères au système. L’hapax Ἄγκιθος pourrait peut-être relever du
même processus, doublé d’une dissimilation d’aspiration, à partir de *Ἀγχί-θοος.
64. Sur les rapports entre gémination expressive et expressivité de géminées résultant
de groupes consonantiques évolués, en particulier dans les formes en -υλλ- et -ινν-,
482 catherine dobias-lalou

6. Quel rendement ?

Des suffixes aussi nombreux auraient pu être mis à profit dans la


nomination à l’intérieur des familles, de manière à assurer à la fois conti-
nuité et renouvellement, par le recours à ce que Sophie Minon a appelé
ici « prolifération paronymique ». En fait on s’aperçoit qu’il n’existe
qu’un petit nombre d’exemples, qui sont pour l’essentiel datables de la
période romaine. Pour la période pré-romaine, je n’ai relevé que le cas du
sculpteur du iiie s. Ἀγάθω[ν Ἀγαθ]ο̣κ̣λεῦς 65 ; celui de deux souscripteurs
vers 280 : Ἀγαθοκλῆς Ἀγαθίνω et Φιλόξενος Φιλίσκω 66 ; un Φιλίσκος
Φιλοξήνω, assez proche dans le temps pourrait être apparenté au dernier
cité 67. On observe enfin le jeu entre deux suffixes différents pour le sous-
cripteur Λῦσις Λύσωνος 68. Par contraste, des noms composés comportant
un élément lexical commun, du type Κυδίμαχος Ζευξιμάχω, sont assez
fréquents. On voit donc que dans les stratégies familiales de nomination
les ressources lexicales ont été exploitées beaucoup plus volontiers que
les ressources suffixales. La suffixation permet surtout de produire des
noms courts qui conservent les éléments lexicaux les plus appréciés des
milieux dirigeants et d’offrir une coloration régionale par leurs finales
flexionnelles souvent dialectales.
Pour clore ce survol du matériel purement grec, on peut s’arrêter
un instant sur la famille des noms basés sur φίλός pour constater la
richesse de ses développements, dans lesquels la multiplicité des suf-
fixes engendre une constellation de formes. Les noms bimembres, au
nombre de dix-huit, n’offrent aucune originalité particulière ; sont spé-
cialement en faveur Φιλόκωμος et Φιλόξηνος – vite ramené à la forme
plus commune Φιλόξενος. Ils engendrent des hypocoristiques Φιλώ,

voir O. Masson, « Géminations expressives dans l’anthroponymie grecque », BSL


81 (1986), p. 227-229 (= OGS II, p. 559-561).
65. SEG 9, 125, dont la lecture a été rectifiée par E. Rosamilia, « Firme di scultori della
Cirenaica: un’analisi dell’ corpus », dans M.  Luni (éd.), Cirene greca e romana,
Rome, 2014, p. 96-98, no 8.
66. SEG 20, 735 b II, l. 86 et b I, l. 67.
67. G. Paci apud M. Luni, « Le nouveau sanctuaire de Dèmèter et la “ceinture sacrée” à
Cyrène à l’époque royale », CRAI 2011, p. 261, col. B, l. 3-4 (d’où SEG 61, 1557).
68. SEG 20, 735 a I, l. 49.
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 483

Φίλων. Ce dernier présente des dérivés Φιλωνάδας 69 et Φιλωνίδας 70. De


la forme simple sont tirés Φιλίσκος (où la valeur sémantique diminutive
est probablement vivace), Φιλῖνος, d’où est issu Φιλίννας, exclusivement
cyrénéen, enfin Φίλυλλα et Φιλυλλιώ pour le féminin. Une base Φιλυ-,
attestée ailleurs dans le nom Φίλυς, a servi à la formation du masculin
assez répandu Φιλύτας 71. Une formation plus rare intervient dans le nom
Φίληκις 72, à mettre en relation avec le crétois Φίληξ 73. En dépit d’une
certaine assonance, il ne doit pas être rapproché de Φιλακώ, dont nous
avons parlé plus haut. Enfin Φιλοτάσιος, connu maintenant aussi par
un exemple à Astypalée, est un sobriquet apprécié à Cyrène à l’époque
hellénistique 74.

7. Interférences libyques

Le stock déjà considérable des suffixes grecs a rencontré dans l’aire


cyrénéenne des noms d’origine libyque dont le thème présentait des
finales diverses et qui ont reçu une flexion grecque. O. Masson a donné
sur la question une étude pionnière, classant les noms libyques par leurs
finales -is, -an-, -r, -l, dont certaines sont justement absentes ou rarissimes

69. Patronyme d’un officier à Cyrène (SEG 46, 2198, l.  87), et aussi nom de deux
Cyrénéens en Égypte sous la forme ‑άδης.
70. Épitaphe du iiie s., SEG 47, 2189.
71. Aux quatre occurrences de LGPN 1, 472, je peux en joindre maintenant trois autres
à la suite de relectures : SEG 20, 735 d, l. 21 (vers 280) ; 47, 2191 (iiie / iie s) ; SECir
71, l. 6 (même datation).
72. SEG 40, 1596 : nom d’un prêtre d’Apollon sur la tablette comptable de la 2e moitié
du ive s.
73. Gortyne, ca 600 : ὁ Πίληκς (G.  Rizza et V.  Santa Maria Scrinari, Il Santuario
sull’Acropoli di Gortina, I, Rome 1968, p. 187-188), selon l’interprétation définitive
de C. Kritzas, « Επιγραφή χαλκής μίτρας Μουσείου Ηρακλείου », Krètika chronika
34 (2014), p. 61.
74. Le LGPN 1, 470, ne recense que les patronymes de deux militaires de la fin du ve s.
(SEG 45, l. 4 et 28), qui pourraient être des frères. On y ajoutera le père d’un com-
mandant des peltastes vers 335 (SEG 46, 2198, l. 96) et un souscripteur vers 280, que
je lis maintenant Φιλοτάσ[ι]ος Ἰάσονος (SEG 20, 735, I b, l. 15). Quant au Φιλοτά-
σεις Θευχρήστω de la liste d’El Gubba (SEG 9, 348, l. 36-37, iie / ier s.), il pourrait
constituer, sur ce document de la campagne, un exemple prématuré de la réduc-
tion -ιος > -ις, doublée d’un iotacisme. On remarquera que ce sobriquet, dérivé de
φιλοτᾱτ-, présente l’assibilation, comme par exemple Θευκρίσιος (voir sur ce point
C. Dobias-Lalou, op. cit., p. 62-63).
484 catherine dobias-lalou

en grec 75. Je rappellerai ici, pour quelques précisions, le matériel datant


de la période hellénistique, tout en étant consciente que nous ne raison-
nons plus ici sur des suffixes étymologiquement bien délimités dans un
ensemble linguistique connu.
Pour les noms en -is, l’insertion s’est faite sans difficulté : Αννικερις,
Ταβαλβις, Υρατθις, Μιτταχις ont dès l’époque hellénistique rejoint les
nombreux noms grecs en -ις à Cyrène et surtout dans les cités de Ptolé-
maïs et Taucheira 76.
Des noms en -r ont pu s’intégrer dans le système morphologique grec,
qui comprenait déjà un petit stock anthroponymique : quelques com-
posés en -άνωρ et un seul nom d’agent en -τωρ, Ἁγήτωρ 77. Mais ils y
faisaient figure de rareté par le vocalisme précédant la liquide : Αλαζειρ
est le nom d’un roi de Barkè au vie s., mentionné par Hérodote, avec des
occurrences sporadiques par la suite 78 ; un autre nom est connu par son
génitif Σεμηρος 79.
Les thèmes en -l- étaient tout à fait étrangers au grec, mais quelques
noms libyques sont tout de même entrés dans le répertoire régional : le
plus répandu est Βακαλ, singulatif d’un nom de tribu libyque bien attesté
par les sources littéraires ; un autre est Ιαλ, gén. Ιαλος, qui n’est attesté

75. O. Masson, « Grecs et Libyens en Cyrénaïque, d’après les témoignages de l’épigra-


phie », AntAfr 10 (1976), p. 49-62 (= OGS I, p. 285-298).
76. Υρατθις est attesté au génitif en -ιος (ajouter à LGPN 1, 451 l’occurrence de SEG 60,
l. 57, à Ptolémaïs). D’autres exemples d’époque augustéenne à Taucheira sont écrits
Υραθις. La graphie -τθ- pourrait passer pour un effort d’hellénisation. Toutefois, elle
se retrouve dans d’autres noms présumés libyques comme Ιτθαλλαμμων, si bien que
θ seul peut être une graphie négligente.
77. Au Cyrénéen enterré à Athènes (LGPN 1, 11) on peut ajouter aujourd’hui un
commandant d’unité (SEG 46, 2198, l. 121) et un citoyen de Ptolémaïs (SEG 60,
1844, l. 13).
78. Avec d’autres rendus graphiques que Z, cf. O. Masson, « L’inscription généalogique
de Cyrène (SGDI 4859) », BCH 98 (1974), p.  263-270 (=  OGS I, p.  211-218) ;
C. Dobias-Lalou, op. cit., p. 57-58.
79. Un prétendu *Καλανερ ou -ανηρ lu par Oliverio en deux occurrences, dont une
reprise par le LGPN  1, 242, mais mentionné avec circonspection par O.  Masson,
« Grecs et Libyens en Cyrénaïque, d’après les témoignages de l’épigraphie », AntAfr
10 (1976), p. 59 (= OGS I, p. 295), n’est plus d’actualité. Le premier passage est
totalement mutilé et dans le second je lis [Αἰγ]λάνωρ (SEG 9, 348, l. 142). Le nom
Μακκυρ à Ptolémaïs, signalé par Masson d’après les indications de J.  Reynolds,
aussi passé en LGPN 1, 296), est encore inédit. Les excellentes photos prévues pour
le corpus IRCyr permettront de le vérifier. Il échappe à notre chronologie.
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 485

qu’à Ptolémaïs, avec un premier exemple en 108 / 107 et trois autres


ultérieurement.
Des noms libyques en -an sont bien représentés à l’ouest dans l’an-
throponymie de l’Afrique proconsulaire et à l’est dans le cadastre de
Marmarique. À part le cas de Γιλδων, Γιλδωνος, dont la structure pho-
nétique et morphologique est plus profondément hellénisée 80, ils ont été
généralement transposés en -αν -αντος, sur le modèle des noms grecs en
-ας, -αντος 81. Le tableau à l’annexe 2 montre les sept noms attestés dès
l’époque hellénistique, essentiellement à Cyrène ou dans sa khôra. Avec
les graffitis éphébiques et les inscriptions funéraires d’époque impériale
de Ptolémaïs et Taucheira, leur nombre croîtra sensiblement. Le mieux
implanté dès le ive s. a. C. est Ιγισαν. D’autres noms, manifestement non
helléniques, apparaissent avec un nominatif ‑ας et un génitif -α, à com-
mencer par celui du prince libyen mentionné par Hérodote (III, 15) : Θαν-
νυρας, ou Ιθαννυρας dans certains manuscrits, à rapprocher de la forme
Ιτθαννυρας attestée épigraphiquement à partir de la fin du iie s. Un autre
cas permet de confronter la tradition littéraire et les témoignages épigra-
phiques : Αμησινας de Barka, olympionique en 460 et Αμαισιννας, main-
tenant attesté trois fois dans des inscriptions des ive et iiie s. 82. J’ai montré
ailleurs comment une osmose s’était opérée entre ces deux types. Il est fort
probable que ce sont tous des noms originellement en -an, à qui l’emploi
en milieu grec a conféré un nominatif -ας. Inversement, les noms grecs
comme Ἀρίμμας ont pu être transformés en des formes en ‑αν, -αντος,
appuyés par le modèle de Φιλοδάμας, dont on a un nominatif [Φ]ιλοδάμαν.
Ces noms, si peu nombreux qu’ils soient à l’époque hellénistique, sont
parfaitement intégrés dans la culture grecque des Cyrénéens : ils sont
portés par des citoyens des milieux dirigeants, assumant des charges de
haut rang dans la cité, et interviennent dans la succession des noms pas-
sant du grand-père au petit-fils au milieu de noms purement grecs. Leur

80. Bien avant les témoignages du ive s. p. C. qui font connaître gr. Γιλδων et lat. Gildo,
nous disposons maintenant du cas d’un officier cyrénéen Γιλδων vers 345 a. C. (SEG
46, 2198, l. 124). En revanche, à Taucheira au début de notre ère, ce nom est transcrit
Γιλδαν.
81. Je considère donc de façon plus résolue qu’O.  Masson que les formes en –ας
résultent d’une adaptation au grec de formes libyques en –an. Voir C. Dobias-Lalou,
« Anthroponymes grecs en –ΑΣ en Cyrénaïque », dans Dialectes grecs, p. 30-32.
82. SEG 46, 2198, l. 86 et 98 ; G. Paci apud M. Luni, art. cit., p. 261, col. B, l. 5 (d’où
SEG 61, 1557).
486 catherine dobias-lalou

entrée dans le stock onomastique a dû se faire par les mères, puisqu’on


sait que les enfants de citoyens grecs et de femmes libyennes devenaient
eux-mêmes citoyens : c’est la première disposition du diagramma de
Ptolémée Ier 83.
Il serait d’autant plus souhaitable de connaître les noms de quelques
unes de ces femmes. La récolte est malheureusement très maigre.
O.  Masson relevait 84 cinq noms, dont deux seulement datent de la
période pré-romaine. Comme j’en exclus Λάρα, il ne resterait pour notre
période que Φυλυσια, fille de Βαθυκλῆς, sur une base funéraire de la
seconde moitié du ive s. provenant du port de Cyrène (SEG 27, 1150). Le
père porte un nom grec et on ignore si des noms libyques féminins pou-
vaient réapparaître dans les familles comme les noms masculins. À vrai
dire, le classement comme libyque tient seulement à l’étrangeté du nom.
Or cet unicum pourrait recevoir une explication grecque. Étant donné le
goût local pour le nom masculin Φιλύτας, je me demande si nous n’au-
rions pas en réalité son dérivé en -ία, *Φιλυσία altéré par assimilation de
timbre vocalique dans la première syllabe 85. Au total, tout ce que l’on
peut constater sur les trois noms ultérieurement attestés et classés avec
grande incertitude comme libyques, c’est une finale en -α dans leur trans-
cription grecque. Autrement dit une annexion par le suffixe.

Conclusion

Pour conclure dans une perspective plus globale, on peut observer que
les suffixes examinés donnent naissance à des formes repérables comme
anthroponymes. Leur rendement est nul ou faible dans le lexique. Ils sont
généralement dépourvus de contenu sémantique, exception faite du sème
diminutif d’-ίσκος et –ιχος et dans la mesure où -ίδας et -άδας sont proba-
blement vides de sens. Leur fonction linguistique est donc classificatoire
au premier chef, notamment par l’indication du genre, et fréquemment
abréviative ou, à tout le moins affective, sans compter évidemment la
fonction pragmatique de désignation et d’interpellation.

83. SEG 9, 1, l. 2-3.


84. O. Masson, « Grecs et Libyens en Cyrénaïque, d’après les témoignages de l’épigra-
phie », AntAfr 10 (1976), p. 62 (= OGS I, p. 298).
85. Sur l’assibilation, voir ci-dessus n. 74 à propos de Φιλοτάσιος.
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 487

Annexe 1
hypocoristiques en -ις, -ώι, -έας et -ίας, -ων et -ίων

Les noms recensés s’inscrivent en principe dans les limites chronologiques


annoncées. Par exception, des noms féminins portés par des prêtresses d’Hèra au
ier s. p. C. ont été pris en compte. La première colonne fournit à titre d’exemple
un composé ayant pu servir de point de départ ; s’il n’est pas attesté en Cyré-
naïque, il est entre crochets.
Origine de -ις -ώι -έας, -ίας -ων, -ίων
la dérivation
Ἁγησίστρατος Ἅγησις et Ἇγις Ἁγησίας (Ἡγ- Ἁγησίων
littéraire)
[Ἀγώνιππος] Ἄγωνις
[Αἴνιππος] Αἶνις Αἰνίας
[Αἴσιμος]] Αἶσις Αἴσων
[Αἰσχροκλῆς] Αἰσχρίων
Ἀκέσανδρος Ἄκεσις Ἀκεσώι Ἀκέσων
Ἀλέξανδρος Ἄλεξις
Ἀλκίβιος Ἄλκις
Ἀμεινόβιος Ἀμεινίας
Ἀνάξανδρος Ἄναξις Ἀναξώι Ἀναξέας
Ἀνδροκλῆς Ἀνδρέας, Ἀνδρίας Ἄνδρων
Ἀρίσταρχος Ἄριστις Ἀριστέας Ἀρίστων
Ἀριστίων
Ἀρτεμίδωρος Ἀρτέμων
(non dialectal !) fém.
Ἀρτεμωνίς
[Ἀρτύμαχος] Ἀρτύμων
Ἀρτυμίων
Ἀρχίδαμος Ἀρχώι Ἀρχίας
Ἀφενοκλῆς Ἀφενώι
Βασιλοκρέων Βασιλώ
Βασώ
Δαμοτέλης Δᾶμις Δαμώ Δάμων
Δεινομένης Δεῖνις
Δεξίδαμος Δέξις
[Διόγνητος] Δίογνις
Δωρόθεος Δωρίων
Ἐξακέστας Ἔξακις Ἐξάκων
Ἐπάγαθος Ἐπαγώ
488 catherine dobias-lalou

Origine de -ις -ώι -έας, -ίας -ων, -ίων


la dérivation
[Ἐρασικλῆς] Ἔρασις
Ἑρμοκρέων Ἕρμων
Εὐφράνωρ Εὖφρις
Ζευξίμαχος Ζεῦξις Ζευξώ
Ζηνόδωρος Ζῆνις Ζήνων,
Ζηνίων
Θαλίαρχος Θάλων
[Θέανωρ] Θεανώ
[Θεμιστοκλῆς] Θεμίσων
Θεύμναστος Θευμίων
[Θαρσικράτης] Θάρσων
Θρασύμαχος Θρασέας Θράσων
[Ἰασικράτης] Ἴασις [Ἰασώι Ἰάσων
théonyme]
Ἱππόδαμος Ἵππις Ἱππίας
Καλλίμαχος Κάλλις Καλλώ[ι] ? Κάλλω[ν] ?
[Κλείδαμος] Κλειδώ
Κλεώνυμος Κλεώ Κλέων
Fém. Κλευπάτρα Κλεῦπις
Κρατισθένης Κράτις
Κρίνιππος Κρῖνις
Fém. Κριτόλα Κρίτων
Κυδίμαχος Κῦδις Κυδίας
Λεύκασπις Λευκίας
Λύσιππος Λῦσις Λύσων
Μεγακλῆς Μεγώι
Μένιππος Μένων
[Μιμνόμαχος] Μίμνις
Μνάσαρχος Μνᾶσις Μνασώι Μνασέας Μνάσων
Μνασίας
[Ναυσικράτης] Ναῦσις
Νίκανδρος Νῖκις Νικίας Νίκων
Νικίων
Ξάνθιππος Ξάνθις
Ξηνόφαντος Ξῆνις
[Οἰνοχάρης] Οἶνις
[Ὀρθαγόρας] Ὄρθων
Παραιβάτας Πάραιβις
Πάσιππος Πασέας
anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 489

Origine de -ις -ώι -έας, -ίας -ων, -ίων


la dérivation
Πατροφίλα Πάτρων
Πεισίστρατος Πεῖσις Πεισίων
Πολύμναστος Πόλυμνις
Ποσείδιππος Πόσειδις
Πραξικράτης Πρᾶξις Πραξίας
(et surtout
Πραξιάδας)
Πρατομήδης Πρᾶτις
Ῥόδιππος Ῥόδων
[Σθενοκράτης] Σθένων
Στασάνωρ Στᾶσις
Στρατοκλῆς Στρατώι Στράτων
Σωσίβιος Σῶσις Σωσίας
Τεισίμαχος Τείσων
Τεισίων
Τελέσανδρος Τελεσώι Τελεσίας Τέλων
Φαίνιππος Φαῖνις
Φείδιππος Φείδων
Φερονίκα Φερώι
Φιλοκλῆς Φιλώ Φιλείας Φίλων
[Φρασικλῆς ] Φράσων
Χαιρεσίλας Χαῖρις Χαίρων
Fém. Χαρμίππα Χάρμις
Ψαφώι Ψάφων

Références complétant le LGPN 1 : Ἄγωνις : SEG 40, 1596 ; 47, 2179b ;


C. Dobias-Lalou, dans A. Inglese (éd.), Epigrammata 3. Saper scrivere nel Medi-
terraneo antico, p. 78-79. Αἰσχρίων : SEG 47, 2193. Ζεῦξις : le génitif Ζευ[ξίδ]
ος en SEG 9, 330, passé dans les outils de référence, est sans fondement : lire
Ζεύ[ξι]ος. Ζηνίων : SEG 53, 2054. Θεανώ : J. Reynolds dans D. White (éd.),
Final reports. VIII, no A.2. Θρασέας : SEG 48, 2055 a, l. 33. Θεμίσων : ajouter
SEG 37, 1676. Θευμίων : remplace l’incertain Θευνίων. Ἵππις : ajouter SECir
29 et supprimer cette occurrence de l’entrée Ἱππίας. Καλλώ[ι] ou Κάλλω[ν] :
SECir 174 (ive / iiie s.). Κλειδώ : C. Dobias-Lalou, « Espace des dieux, espace des
hommes… », p. 180-181 et fig. 6 p. 421. Κράτις : SEG 60, 1844, l. 65. Ὄρθων :
SEG 60, 1844, l. 17 et 23. Πόσειδις : ajouter SEG 9, 102, l. 2 et supprimer cette
occurrence de l’entrée Ποσειδώνιος. Τείσων : la première occurrence mentionnée
est un Τεισίων. Φιλείας : J. Reynolds, dans D. White (éd.), Final reports. VIII,
no A.8 avec mes remarques, Bull.épigr. 2013, 480. Χαίρων : même référence que
la troisième occurrence d’Ἄγωνις ci-dessus.
490 catherine dobias-lalou

Annexe 2
noms libyques en -αν de date hellénistique

Αιαλαν Αιαλαντος a
Ανυσαν b
Αυγαντος c
Ελικαν
Εχθαπαν d
Ιγισαν Ιγισαντος
Μειραχαν e
Υξαν
a.  SEG 58, 1841. — b.  Le seul d’époque hellénistique (SEG 9, 348, l. 129) est écrit avec un seul
sigma. La forme avec deux sigmas se généralise à l’époque romaine, d’où l’entrée Ανύσσαν de
LGPN 1, 49. Comme le recommandait O. Masson, je préfère ne pas accentuer les noms d’origine
non-grecque. — c.  Bechtel posait un nominatif Αὔγας (HPN 89) avec des doutes sur le caractère
grec du nom. Omis dans le LGPN 1, il figure dans le LGPN online avec un nominatif Αυγάν. —
d. SGDI 4835, l. 13 après révision (Εχθατιάν ( ?) SGDI 4835 ; Ἐχθατίαν LGPN 1, 192). — e. SEG
9, 348, l. 143, d’après Oliverio : Μειρακαν. Déjà Μειράχαν pour le LGPN 1, 302.

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anthroponymes en cyrénaïque pré-romaine 491

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492 catherine dobias-lalou

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Un suffixe mort et ressuscité :
*-u̯ ent- dans l’anthroponymie

Claire Le Feuvre
Université Paris-Sorbonne

1.  Le suffixe possessif *-u̯ ent- est virtuellement absent dans l’anthro-
ponymie 1. En fait, on trouve quelques rares anthroponymes en *-u̯ ent- à
basse époque, qui sont clairement des poétismes, c’est-à-dire des adjec-
tifs homériques passés dans l’onomastique, par un effet de mode peut-
être. La substantivation d’un adjectif pour former un nom propre par
conversion est un procédé usuel, et les adjectifs en *-u̯ ent- n’avaient
guère de raison d’échapper à ce processus. On peut citer ainsi à date tar-
dive plusieurs Χαρίεσσα 2.
Dans les sources littéraires, on n’en trouve guère plus, et ce sont là
aussi des formes tardives. Lucien appelle une de ses courtisanes Ἰόεσσα
(Dial. Meretr. 12), transposition de l’adjectif homérique ἰόεις (Il. 23,
850, épithète du fer). L’épigramme 272 du livre VI de l’Anthologie (attri-
buée à Persès) a une Τιμάεσσα : τιμήεις, τιμήεσσα sont homériques, le
féminin est employé dans l’Odyssée pour qualifier Pénélope (Od. 18,
161), puis chez Théognis et Mimnerme comme épithète d’Hébé, ensuite
chez Callimaque comme épithète d’Héra ; τιμάεις se trouve chez Pin-
dare. Un anthroponyme masculin Τιμάεις est attesté en Ionie à Colophon,
vers 200 a. C. 3 – c’est une forme non ionienne. Il est à noter que ce sont

1. Je remercie pour leurs remarques A. Alonso Déniz, L. Dubois et S. Minon.


2. À Rhodes (ASAtene 2 (1916), 159, 73, inscription non datée), à Athènes (IG II2
5357, non datée), à Anazarbe en Cilicie (ier-iie a. C.), plusieurs exemples dans une
même inscription d’Icarie au ier p. C., à Samos au iie p. C.
3. D. Rousset, « La stèle des Géléontes au sanctuaire de Claros », CRAI 2014, 1, p. 16,
l. 100.
494 claire le feuvre

surtout des féminins, et qu’ils ont toujours la forme non contractée qui
est celle de la poésie épique et lyrique, indice de leur caractère littéraire.
À date haute, il n’y a pas d’anthroponyme en *-u̯ ent-, semble-t-il, ni
dans l’épigraphie ni dans les sources littéraires : il n’y en a par exemple
aucun chez Homère ni chez Hésiode. Le suffixe a pourtant été postulé
pour divers anthroponymes mycéniens. Ainsi pour ko-ma-we (PY An
519.10, PY JN 750.9) = *Komāwens « chevelu », admis par J. L. García
Ramón 4 : on comparera κομόωντες Ἀχαιοί et le terme ion.‑att. κομήτης
« qui porte les cheveux longs » (Hdt. 6, 19 ; Ar., Nub. 348), également
attesté comme anthroponyme (Κομήτης dans les Cyclades, Κομάτας à
Rhodes au ive s., à Cyrène au iiie s.). Ou encore a3-ta-ro-we (PY Cn
285.2) = Aithalowens « noir de fumée » 5. Ce dernier est un adjectif bien
attesté chez Homère, contrairement à *komāwens, mais ne s’applique
jamais dans le corpus homérique à un être humain (p. ex. κόνις αἰθαλό-
εσσα, Il. 18.23). Il convient de rester prudent sur l’identification de ces
anthroponymes étant donné les charmes de la graphie mycénienne, mais
l’existence de noms en *-u̯ ent- est largement admise par les mycénolo-
gues. Ce suffixe constitue donc un cas qui fait exception à ce que montre
J. L. García Ramón dans ce volume : une formation anthroponymique
existant apparemment au second millénaire mais disparue ensuite.
Le suffixe, presque totalement absent de l’anthroponymie au pre-
mier millénaire, est en revanche très présent dans un autre registre, il sert
à former de nombreux toponymes et hydronymes, masculins et fémi-
nins. La base est un nom concret, souvent un phytonyme (Πιτυοῦσσαι,
Οἰνοῦσσαι, Σελινοῦς, Ἀμαθοῦς). La valeur du suffixe « riche en x »,
« pourvu de x », est alors pleinement sensible. De ce fait, on le trouve
dans l’anthroponymie sous la forme de dérivés ethniques (Σελινούντιος,
Συρακούσιος), qui ne nous retiendront pas ici car le suffixe n’y est pas
employé en tant que suffixe anthroponymique. Avec degré zéro *-u̯ n̥ t-, on
a l’ethnique arcadien Ἑλισ-Fάσιοι (IPArk. 9, Mantinée, m. ive a. C.), le

4. J. L. García Ramón, « Mycenaean onomastics », dans Y. Duhoux et A. Morpurgo


Davies (éd.), A Companion to Linear B, 2. Mycenaean Greek texts and their world,
Louvain - Paris, 2011, p. 218, n. 8.
5. J. L. García Ramón, art. cit., p. 228.
un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 495

démotique attique Ἀναγυράσιοι sur le nom de dème Ἀναγυροῦς, Φλειά-


σιοι sur Φλειοῦς 6.
Ces noms sont également attestés en mycénien : sa-ri-nu-wo-te (PY
An 424.2) = dat. *Salīnwontei, mu-to-wo-ti (PY Eb 495) = loc. *Mur-
towonti, et pour l’ethnique à degré zéro ti-nwa-si-jo (PY Ea 810) =
Thinwasios – utilisé comme anthroponyme. L’utilisation du suffixe dans
les toponymes, ancienne, se retrouve dans d’autres langues indo-euro-
péennes, anatolien et indo-iranien notamment. Il n’y a pas de raison de
douter qu’il s’agisse d’un héritage en grec.

2.  Revenons aux anthroponymes. Le suffixe *-u̯ ent- a servi à former


quelques anthroponymes en indo-iranien. Ils sont peu nombreux, car le
suffixe était en concurrence avec d’autres suffixes possessifs, mais ils
existent. On peut citer par exemple pour l’iranien 7 :
—— *Farnax-uant- = *Farnah-uant- « riche en gloire », conservé en
persan moderne sous la forme Farrux, av. xvarǝnaŋvhant-, trans-
littéré sous la forme Φαρνακύᾱς (Ctésias, fr. 15, 12) ;
—— *Arta-vant-a- « pourvu du r̥ ta-, juste » (skr. r̥ tā́ vant-), translittéré
sous la forme Ἀρταΰντης (Hdt. 7, 68), fém. Ἀρταΰντη (Hdt. 9,
109), forme syncopée Ἀρτόντης (Hdt. 3, 128) ;
—— Arǝǰahuuant- (Yt. 13, 113) « pourvu de valeur » (arǝǰah-) ;
—— av. Bǝrǝzuuant- (et non Bǝrǝzauuant-) (Yt. 13, 119), v.p. *Bardu-
vant- = Br̥ d-uant- « haut », transcrit Μαρδόντης (Hdt. 7, 80) ;
—— *Vr̥ d-uant-a- / *Vr̥ z-uant-a- « actif, énergique », dans l’élamite
Mar-du-un-da / Mar-su-un-da, cf. av. vǝrǝzuuant- (Yt. 62, 10) ;
—— v.p. Asāvanta-, élamite Aš-ša-man-da = *Aspāvanta-, skr.
áśvāvant- « riche en chevaux », qui correspond peut-être à la
translittération Ἀσπάνδας (Ctésias, fr. 5, 109) ;
—— sur le modèle de ce dernier, l’avestique récent a un anthroponyme
Aršauuant- « riche en taureaux » (Yt. 13, 109) ;
—— jav. Uštavaiti « pourvue de ce qu’elle souhaite » (Yt. 13, 139), qui
est aussi attesté comme hydronyme en Yt. 19, 66f.

6. L. Dubois, « À propos d’une nouvelle inscription arcadienne », BCH 112 (1988),
p. 288-289, avec bibliographie.
7. Données de R. Schmitt, Iranisches Personennamenbuch, V, Vienne, 2011, p. 114-
115, 138, 390.
496 claire le feuvre

Côté indien, on trouve dans le RigVeda Kakṣīvant-, « unklar » pour


EWAia ; mais d’autres formations attestées après le RigVeda sont claires :
Kumārávant- « riche en fils » dans la prose védique du Maitrayani Samhitā,
et pour les féminins, en sanskrit épique une Gandhavatī- « parfumée » 8.
Il ressort de ces données que les anthroponymes en -vant- font réfé-
rence soit à une qualité abstraite (glorieux, plein de grandeur, juste), soit
à une possession concrète (riche en fils / en chevaux / en taureaux), mais
non à une particularité physique. En indo-iranien comme en grec, ce sont
des adjectifs qui sont devenus secondairement des anthroponymes par
conversion : áśvāvant- « riche en chevaux », r̥ tā́ vant- « juste » ne sont
attestés que comme adjectifs en sanskrit, mais comme noms propres en
iranien. Les féminins ont comme on s’y attend le degré zéro du suffixe,
skr. -vatī (Gandhavatī « parfumée »), av. -vaiti (Uštavaiti « pourvue de
ce qu’elle souhaite »).
Les anthroponymes en -vant- suivent la même règle que les adjectifs
en ‑vant- dont ils ne sont qu’un cas particulier : la base de dérivation est
toujours un substantif ou un adjectif substantivé, et c’est toujours une
base simple et non composée. Le suffixe n’est jamais employé avec une
fonction hypocoristique.

3.  Le grec ayant les mêmes principes de formation des anthropo-


nymes que l’indo-iranien, recourant lui aussi à la conversion d’adjec-
tifs qualificatifs en anthroponymes (du type Τίμιος, Φαῖδρος), et faisant
grand usage de suffixes possessifs dans l’anthroponymie (notamment
-ων, avec sa double origine, suffixe *-on- sur base adjective et suffixe
de Hoffmann sur base substantive), il n’y a aucune raison que le suffixe
*-u̯ ent- soit exclu de la formation des anthroponymes en grec. La seule
raison à son extrême rareté est qu’il est rapidement tombé en désuétude :
il est usuel en mycénien, fréquent chez Homère et productif en poésie,
mais il n’est plus vivant dans aucun dialecte grec du premier millénaire,
où il a été éliminé par d’autres suffixes à valeur possessive. Le seul
adjectif attesté en prose attique est χαρίεις, qu’on trouve une seule fois au
féminin, chez Platon (Theet. 174a6) qui l’emploie sous sa forme ionienne
χαρίεσσα, comme forme poétique, et non sous la forme qui serait pho-
nétique en attique χαρίεττα : c’est la base du nom de femme Χαρίεσσα.

8. J. Wackernagel, A. Debrunner, Altindische Grammatik, II, 2, Göttingen, 1954, p. 876.


un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 497

Or le procédé de conversion d’un adjectif en anthroponyme ne peut plus


fonctionner si la base adjective est sortie d’usage. Cependant, on connaît
le caractère conservateur de l’anthroponymie, et des noms archaïques
de ce type pourraient avoir subsisté alors même que leur base adjective
n’était plus usuelle.
L’attique a ainsi quelques adjectifs substantivés, dans μελιτοῦττα
« gâteau au miel » < *μελιτοϝετι̯α, οἰνοῦττα « gâteau au vin » < *ϝοι-
νοϝετι̯α, qui appartiennent au vocabulaire usuel et présentent la contrac-
tion et la forme attique en -ττ-, tandis que les adjectifs correspondants
sont uniquement poétiques, jamais contractés et ont toujours la forme
ionienne en -εσσα et jamais la forme attique en ‑εττα. La disjonction
entre l’adjectif, qui est un réemprunt à l’ionien homérique, et l’adjectif
substantivé, issu de la forme attique, est nette.

4.  On va donc passer en revue et discuter les quelques anthropo-


nymes dans lesquels on a proposé de retrouver *-u̯ ent-, en se limitant
aux anthroponymes féminins attestés avant le ive a. C. Il y en a… deux,
auxquels viendra s’adjoindre une troisième forme à date plus tardive.
Ces noms étant susceptibles de plusieurs analyses, il faut passer en revue
toutes les possibilités.
— Athènes, dédicace, 500-480 a. C. : ΝΙΚΑΤΤΑΝΕΘΕΚΕΝ ΤΑΘ[,
soit Νίκαττἀνέθεκεν τἀθ[εναιαι (IG I3 560). L’éditeur accentue Νίκαττα,
le LGPN a varié, retenant d’abord Νικᾶττα (LGPN 2) corrigé depuis en
Νίκαττα (LGPN 2a).
—  Rhodes, graffito sur vase, f. vie a. C. : ΝΙΚΑΣΑ ΥΨΕΧΙΔΑΣ
(TCam. 176). L’éditeur accentue Νίκασσα, le LGPN 1 Νικᾶσσα. Νικασσα
est un nom de femme bien attesté à Rhodes à l’époque romaine (IG XII,
1, 4, ier p. C.). On a aussi une ΝΕΙΚΑΣΣΑ à Lindos II, 395 (= TCam. 282,
28, 10 p. C.), prêtresse d’Athéna, identique à la ΝΙΚΑΣΣΑ de Lindos II,
392, la graphie ‹ΕΙ› n’étant qu’un fait d’iotacisme – la même inscription
a une autre graphie iotacisante, Λίνδιοι ἐτείμασαν. L’une des Νικασσα
est fille d’un Νικασίμαχος.
— Casos, ive-iiie a. C. : ΤΙΜΑΣΑ (IG XII 1, 1058). Le LGPN 1 donne
le nom sous la forme Τιμᾶσσα 9.

9. On a peut-être deux attestations dans une inscription de Nisyros du iie a. C. (SEG 36,
743, 3b), mais ce sont des restitutions.
498 claire le feuvre

On peut rapprocher une Τιμᾶσσα à Cyrène (SEG IX, 181, 22, ier p. C.),
un théonyme Τιμᾶσσα en Sicile, à Noto, au iiie a. C. (IGDS I, 101), qui
pourrait être le nom d’une nymphe, et enfin un ΤΙΜΕΣΣΑ à Amorgos au
iie a. C. (IG XII, 7, 36, l. 5 et l. 17-18), que l’éditeur accentue Τίμεσσα et
le LGPN 1 Τιμῆσσα. La graphie ‹Ε› ne peut représenter un -η-, réguliè-
rement noté ‹Η› dans l’inscription 10, mais seulement un -ε-, le Τιμῆσσα
du LGPN ne convient donc pas. La forme figure deux fois dans la même
inscription, avec la même graphie, ce qui exclut une faute de gravure.
La forme Τίμοσσα attestée à Thespies, dans une inscription non datée,
est à séparer des précédentes. Le SEG 39, 458C accentue Τίμοσσα, le
LGPN 3b donne Τιμῶσσα?, et la date des ive-iiie a. C. Il s’agit probable-
ment d’un participe présent Τιμάōσα. Comme la graphie ‹Ω› est réguliè-
rement employée à Thespies à partir du iiie a. C., la graphie ‹Ο› suppose
une inscription antérieure à l’adoption de l’alphabet ionien, d’où la date
proposée par le LGPN. On reviendra ci-dessous sur la question de la
géminée dans les anthroponymes féminins issus de la conversion de par-
ticipes présents.
— Χαρίασσα à Rhodes, ier a. C.-ier p. C. : ΧΑΡΙΑΣΣΑ (Maiuri, NSER
76, καὶ τᾶς γυναικὸς Χαριάσσας Ἁλικαρνασσίδος) 11.

5.  On commencera par traiter des formes ΝΙΚΑΣΑ et ΤΙΜΑΣΑ, en


examinant dans un second temps le ΝΙΚΑΤΤΑ d’Athènes.
5.1.  La première hypothèse est qu’il s’agisse de génitifs en -ᾱ <
-ᾱο de masculins *Νικᾱ́σᾱς, *Τιμᾱ́σᾱς. C’est ce que proposait Bechtel
(Kleine Onomastische Studien p. 65) pour ΤΙΜΑΣΑ. Elle se heurte à
plusieurs objections. La première est l’ordre des mots dans TCam. 176
ΝΙΚΑΣΑ ΥΨΕΧΙΔΑΣ. Le patronyme Ὑψεχίδας ou Ὑψηχίδας (cette
dernière forme est attestée à Samos (IG XII, 6), et ce serait alors pour
Rhodes un homérisme caractérisé, une forme tirée de ὑψηχής), pourrait
faire penser que ce ΝΙΚΑΣΑ est un nom d’homme, mais cela supposerait
une faute de gravure parce qu’aucun anthroponyme masculin à nominatif
en -ᾱ n’est connu dans le Dodécanèse – les masculins en -ᾱ à nominatif
asigmatique sont connus en béotien mais pas à Rhodes. Il convient donc
10. L’inscription a ‹ΕΙ› pour -ῃ (τεῖ πόλει, τεῖ βουλεῖ), représentant l’ancienne diphtongue
trimorique [ēi], mais pas pour un [ē] ancien. Le [ē�] récent est noté ‹ΕΙ› (εἶναι).
11. La femme est originaire d’Halicarnasse, voir LGPN 5b.
un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 499

de traiter Ὑψε / ηχίδας comme un nom et non comme le patronyme de


ΝΙΚΑΣΑ. On pourrait alors être tenté de considérer que Ὑψε / ηχίδας est
le nom et Νικᾱ́σᾱ le patronyme au génitif, mais le patronyme n’est nor-
malement pas placé devant le nom, ce qui rend cette hypothèse douteuse.
La seule lecture satisfaisante, si l’on s’en tient au texte écrit, est de consi-
dérer qu’on a là deux noms au nominatif, juxtaposés sans coordination,
type courant pour une inscription funéraire avec le nom d’un couple (ce
que fait le LGPN) ; ici, l’ordre des noms fait penser que la femme est
décédée avant son mari. Cela suppose un Νικασ(σ)α féminin, bien attesté
par ailleurs à Rhodes, à date plus tardive il est vrai (ier a. C.-ier p. C.). Une
autre possibilité, que me suggère A. Alonso Déniz, serait de voir dans
la forme un datif Νικασ(σ)ᾱι, avec élimination du iota en hiatus, donc
« pour Nikassa ». Quoi qu’il en soit, ce qui importe est que le nom est
bien un féminin.
Que le Νικασσα de Camiros soit bien un féminin n’exclut pas que
le ΤΙΜΑΣΑ de Casos soit pour sa part un masculin en -ᾱς et qu’il faille
disjoindre les deux formes. Mais cette hypothèse se heurte à une autre
objection : les hypocoristiques en -σᾱς de composés en -σι- sont un type
essentiellement ionien 12, et en tout cas inconnu dans le Dodécanèse
où l’on n’a que des hypocoristiques en -σίᾱς. Or il ne peut s’agir d’un
Ionien vivant à Casos, parce que dans ce cas le nom serait Τιμήσᾱς et
non *Τιμᾱ́σᾱς. Enfin, aucun *Νικᾱ́σᾱς ou *Τιμᾱ́σᾱς n’est attesté ailleurs
en Grèce : un Νικασσας thessalien (I. Thess. I, 50, Pharsale, fin du iiie s.
et I. Thess. I, 17, première moitié du iie s.) représente Νικᾱσίας avec
consonification secondaire du [i] et gémination consécutive du [s] 13, et
non *Νικᾱ́σᾱς. Un Νικήσας? donné par le LGPN 3a à Kyparissia, en
Messénie (IG V, 1, 1560, sans date) avec un point d’interrogation sur
le statut de nom propre, doit bien plutôt être simplement le participe,
« vainqueur », et non le nom du dédicant.
Il ressort de cet examen que Νικασ(σ)α et Τιμασ(σ)α sont bien des
féminins et non des masculins en -ᾱς. Le Τιμεσσα d’Amorgos est quant
à lui féminin sans ambiguïté et le nominatif Νικαττα d’Athènes ne peut
être qu’un féminin.

12. Masson, OGS I-II, p. 394. On a en fait quelques exemples de ce type ailleurs qu’en
Ionie, par exemple un Ἀκεσᾶς à Chypre au ve a. C.
13. Ce fait est déjà noté par Masson, OGS I-II, p. 397, n. 40.
500 claire le feuvre

5.2.  Une deuxième hypothèse est que Νίκᾰσσᾰ et Τίμᾰσσᾰ soient des
dérivés féminins en -ι̯α de masculins *Νίκᾰξ, *Τίμᾰξ. Elle se heurte aux
objections suivantes. Tout d’abord, il n’existe aucun *Νίκαξ, *Τίμαξ,
ce qui ne saurait surprendre vu que les noms en -αξ sont des sobriquets,
c’est-à-dire des dénominations plaisantes ou dépréciatives fondées sur
une particularité physique ou une analogie avec un objet concret, et qu’un
abstrait comme νίκη, τιμή ne se prête pas à former un sobriquet. Une
autre possibilité pourrait être envisagée, que de telles formes soient, non
des sobriquets, mais des hypocoristiques de Νικαγόρας, Τιμαγόρας qui
sont bien attestés : on peut comparer Κλέαξ (4 attestations), attesté à
Oropos aux ive et iiie a. C., à Érétrie au iiie a. C., hypocoristique de Κλε-
αγόρας (30 attestations). Or Νικαγόρας et Τιμαγόρας sont des noms très
fréquents (202 attestations pour le premier, 119 pour le second), mais
aucun hypocoristique en -αξ ne leur correspond. Il est donc douteux, si
la base hypocoristique *Νίκαξ, *Τίμαξ n’existe pas, qu’on ait affaire à
des dérivés de formes de ce type. De plus, il est exclu d’expliquer ainsi
le Τιμεσσα d’Amorgos.
Ensuite, à supposer même qu’il ait existé des *Νίκαξ, *Τίμαξ, on ne
connaît pas de féminin en ‑ασσα sur les sobriquets en -αξ ; les féminins
en -άνασσα ne sont pas formés sur un sobriquet, et les noms en -άνασσα
n’ont pas fourni le point de départ d’un suffixe -ασσα dans l’anthropo-
nymie – alors qu’on a un suffixe -ισσα productif à date tardive. Il y aurait,
d’après le LGPN 3a, un Χάραττα féminin à Ambracie, qu’on peut rappro-
cher de Χάραξ (six attestations dans le LGPN), qui est soit un sobriquet
soit un hypocoristique de composé en -αγος). Mais en fait, il s’agit sans
doute d’une erreur du LGPN : la forme est attestée au datif Χαράττῃ, dans
une lettre apocryphe de Speusippe à Philippe de Macédoine, et comme
l’a vu Jacoby (FGrH 69 F 1), il s’agit clairement d’un nom d’homme,
donc d’un Χαράττης masculin, qui reçoit d’Héraclès la charge d’admi-
nistrer Ambracie en attendant de la remettre aux fils d’Héraclès quand ils
seront en âge de régner. Le seul parallèle envisageable s’évanouit donc.
Les mêmes objections s’appliquent pour le Νικαττα d’Athènes.
5.3.  Une variante de l’hypothèse précédente serait que Νίκᾱσσᾰ et
Τίμᾱσσᾰ soient des dérivés féminins en -ι̯α de masculins *Νίκᾱς, -ᾱτος,
*Τίμᾱς, -ᾱτος. L’objection est identique : on ne connaît aucun *Τίμᾱς,
-ᾱτος ; et si l’on a à date tardive un datif Νίκητι dans une inscription de
un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 501

Cilicie (IK Anazarbe 425, ier-iie p. C.), il appartient sans doute au type à
[ē] Χάρης, -ητος, Χρέμης, -ητος, bien attesté, dont la voyelle suffixale
s’accordait avec la base Νίκη de la koinè. Le Νικαττα d’Athènes et le
Τιμεσσα d’Amorgos ne sauraient eux non plus avoir une telle origine.
5.4.  Une hypothèse différente verrait dans Νικᾱ́σ(σ)ᾱ et Τιμᾱ́σ(σ)ᾱ
des hypocoristiques féminins en -σᾱ de composés en -σι-, avec gémi-
nation expressive éventuellement 14. Elle est douteuse car les hypoco-
ristiques féminins de composés en -σι- sont en -σώ, dans le Dodécanèse
comme en ionien-attique, et non en -σᾱ : le type en -σᾱ est attesté en
Grèce centrale, mais pas dans le Dodécanèse. Une telle explication
est également exclue pour le Τιμεσσα d’Amorgos, et bien sûr pour le
Νικαττα d’Athènes qui suppose une palatalisation d’une vélaire ou d’une
dentale sourde.
5.5.  Peut-on alors voir dans ces formes les féminins de noms en
‑σσος ? Il n’existe pas de *Νίκασσος, *Τίμασσος : les quelques masculins
en -σσος sont d’un autre type, comme Νέοσσος (de νεοττός « nouveau-
né »), ou Δόρυσσος (du composé épique δορυσσόος), et les composés en
-σσόος n’ont jamais un abstrait comme τιμή ou νίκη en premier élément.
On peut donc exclure cette hypothèse.
5.6.  La dernière hypothèse voit dans ces formes des féminins d’ad-
jectifs en *-u̯ ent-, en ‑ϝετ-ι̯α ou -ϝατ-ι̯α, avec contraction. C’est en fait
la seule possible. Tout d’abord, l’une de ces formes est attestée dans
l’anthroponymie à l’époque hellénistique et romaine, pour le masculin
comme pour le féminin : nous avons déjà mentionné les noms Τιμάεσσα
(Anth. VI, 272), et un masculin Τιμάεις à Colophon (cf. 1.). La même
forme Τιμάεσσα est admise par L. Dubois 15 et C. Dobias 16 pour expliquer
les formes contractées Τιμᾶσσα en Sicile et à Cyrène (cf. 4.). L’adjectif
τιμάϝεσσα, forme de fondation de l’anthroponyme, est même attesté
épigraphiquement en pamphylien (πόλις τιμάϝεσα « cité honorée »,

14. S. Minon, « Sifflantes géminées anomales. À propos des formes éléennes ἀνταπο-
διδῶσσα et θεοκολέōσσα et des anthroponymes en -φῶσ(σ)α », dans L. Dubois et
E. Masson (éd.), Philokypros. Mélanges de philologie et d’antiquités grecques et
proche-orientales dédiés à la mémoire d’Olivier Masson, Salamanque, 2000, p. 236.
15. L. Dubois, Inscriptions grecques dialectales de Sicile, I, Rome, 1989, p. 108.
16. C. Dobias-Lalou, Le dialecte des inscriptions grecques de Cyrène, Paris, 2000, p. 47.
502 claire le feuvre

première moitié du ive a. C.) 17, dans une inscription non métrique et qui
ne semble pas dépendre du formulaire épique. Cela semble indiquer que
l’adjectif a survécu en dehors de la langue épique dans certains dialectes.
De même, l’adjectif νικάεις est attesté dans l’Anthologie (Anth. VII, 428,
attr. à Méléagre, iie-ier a. C.), et peut-être comme anthroponyme dans le
génitif Νικᾶντος (Nisyros, iie a. C., voir ci-dessous, 8.).
À Rhodes, le [w] intervocalique s’est amuï très tôt, et est absent dès
les premières inscriptions (oκλεος, ποιησα DGE 272, vie s.) 18, donc une
forme contractée dès la fin du vie s. serait possible, et la contraction de
[ᾱε] donne un [ᾱ]. Il n’y a donc pas d’objection à une lecture Νικᾶσσα <
*Νικᾱ-ϝετ-ι̯α ou *Νικᾱ-ϝατ-ι̯α pour l’attestation la plus ancienne.
Ensuite, cette explication est la seule possible pour le Τιμεσσα
d’Amorgos. En ionien-attique on a Τιμήεσσα : cette forme se contracte
en attique en Τιμῆσσα (graphie retenue par le LGPN 1), mais en ionien
on attend non une contraction, mais un abrègement en hiatus, soit Τιμέ-
εσσα, du type βασιλέες, νέες : cf. συγγενέες à Tènos, IG XII, 5, 868, l.
15 (iie s.) ; ἐσαγωγέας à Amorgos, IG XII, 7, 3, l. 28, première moitié du
ive  a. C. Certes, on pourra toujours objecter qu’à la frontière de mor-
phème, le traitement n’est pas toujours celui qu’on attendrait phonéti-
quement – à savoir la contraction –, mais en l’espèce, la longue dans
Τιμήεσσα  est présuffixale comme la longue dans βασιλῆες est prédé-
sinentielle, donc la même motivation morphologique peut avoir joué
pour empêcher la contraction. En position radicale, on a un Δεικράτος
pour Δηι- (ID 98, ca 375 a. C., l. 53), qui n’est pas imputable à une
confusion entre ‹Ε› et ‹Η› et suppose un abrègement en hiatus. Bechtel
(GD III, 48-49) cite aussi, pour les adjectifs en *-u̯ ent-, ἠχέεντα κύματα
(Archiloque, fr. 122, 8 West), χαιτέεσσα (Sémonide, fr. 7, 57 West) :
mais ces formes sont suspectes d’être une simple graphie pour noter la
scansion brève de la syllabe en hiatus et ne sont pas entièrement fiables.
En revanche, on peut citer un toponyme Πετρέεντος en Carie (Magnésie
108, l. 37, 47 et 62, début du iie s. p. C.), qui continue le πετρήεις
homérique, et surtout un toponyme [Π]οέσ[σ]ηι à Céos (IG XII, 5, 1076,
l. 40, fin ive-déb. iiie a. C.), qui recouvre un Ποιήεσσα continuant le
17. C. Brixhe, Le dialecte grec de Pamphylie. Documents et grammaire, Paris, 1976,
no 3.
18. Cf. C. D. Buck, The Greek Dialects. Grammar, Selected Inscriptions, Glossary,
Chicago, 1955 (3e éd.), p. 46.
un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 503

ποιήεσσα homérique : dans ce cas, il ne saurait s’agir d’un problème


métrique. La graphie Τιμεσσα ne peut guère recouvrir une haplographie :
ainsi qu’on l’a dit ci-dessus, la forme figure deux fois avec la même gra-
phie dans l’inscription, et ensuite la notation de la géminée ‹ΣΣ› montre
que la succession de deux graphèmes identiques n’était pas un problème.
Il est probable qu’elle recouvre une hyphérèse de Τιμέεσσα, comme [Π]
οέσ[σ]ηι recouvre une hyphérèse de Ποεέσσηι. L’hyphérèse concerne
surtout les séquences de trois voyelles – c’est le cas dans Ποιήεσσα –,
mais les séquences de deux voyelles peuvent la présenter aussi, notam-
ment en ionien : c’est l’explication traditionnellement admise pour l’ini-
tiale absolue, ὁρτή « fête », de ἑορτή, ἕρση « rosée », de ἑέρση, ἔλδομαι
« désirer » en face de ἐέλδομαι ; on mentionnera aussi les anthroponymes
en Θο-, de Θεο- (Θοκλῆς, Θοκλείδας, Θοκρίνης, LGPN 3b), Κλο-, de
Κλεο- (Κλόνικος, LGPN 2a) 19. On connaît enfin plusieurs cas où c’est la
voyelle accentuée qui subit une hyphérèse : en ionien-attique on a Παιών,
de παιέων (hom. παιήων) 20, ou encore θεῖον « soufre », de θέειον, et les
υἷος, υἷες homériques, de υἱέος, υἱέες, ainsi que le parfait ionien οἶκα,
de ἔοικα. Dans la plupart des cas, la place de l’accent variait en fonc-
tion de la quantité de la désinence, et l’hyphérèse a pu se produire quand
la voyelle était prétonique, et ensuite être étendue à tout le paradigme –
comme le propose Bechtel (DG III, p. 67) –, mais ce n’est pas le cas pour
παιήων, par exemple, ou pour υἱέες. Pour Τιμέεσσα, la voyelle était pré-
tonique aux génitif et datif Τιμεέσσης, Τιμεέσσῃ.
Si ce sont des anthroponymes en *-u̯ ent-, il faut alors accentuer
Νικᾶσσα (et non Νίκασσα ou Νικάσσα), Τιμᾶσσα. Pour Τιμεσσα, il est
difficile de savoir si l’hyphérèse a entraîné un recul de l’accent ou une
avancée comme dans Παιών. Si l’on admet que l’hyphérèse s’est pro-
duite quand la syllabe était prétonique, on admettra que l’accent des cas
obliques s’est étendu aux cas directs et l’on accentuera Τιμέσσα.

19. O. Masson, « Quelques noms grecs dialectaux », dans Dialectologica graeca, p. 230
(= OGS III, p. 165).
20. A. Alonso Déniz, « Linguistic notes on the Spartan ἀγωγή: βούα and βουαγός/
βοαγός », Glotta 88 (2012), p. 13. Pour le démotique ionien Τειχιεσσεύς (Didyma
368, ier p. C.), correspondant au toponyme Τειχιοῦσσα, de τειχιόεσσα « pourvue de
remparts » (homérique), l’hyphérèse peut s’être produite dans le dérivé en -εύς, à
accent suffixal.
504 claire le feuvre

Enfin, il y a une cohérence géographique nette. Le type semble


concentré dans la région de Rhodes : Χαριασσα à Halicarnasse / Rhodes
(ier a. C.-ier p. C.), Νικᾶσσα à Rhodes (vie et ier a. C.), Τιμᾶσσα à Casos
(ive  a. C.), Τιμεσσα à Amorgos (iie a. C.), géographiquement proche
même si elle ne fait pas partie du Dodécanèse – Amorgos est la plus orien-
tale des Cyclades. Il serait donc caractéristique du « dorien des îles »,
pour reprendre la terminologie de R. Schmitt 21. Le Τιμᾶσσα de Cyrène,
tardif, est cohérent avec cette localisation puisque Cyrène est une colonie
de Théra, dont le dialecte appartient au même sous-ensemble dorien que
celui de Rhodes. La forme attestée en Sicile provient de Neaiton, dans la
région de Syracuse, dont le dorien d’origine corinthienne appartient à un
groupe différent, mais on peut rappeler que la ville voisine de Géla est
une colonie rhodienne et qu’après sa destruction par les Carthaginois à la
fin du ve siècle, ses habitants se dispersèrent, il n’est donc pas exclu que
ce théonyme soit lui aussi lié à un contexte rhodien.

6.  On peut maintenant revenir sur le Νικαττα d’Athènes. De toutes les


hypothèses précédemment passées en revue, seule la dernière est com-
patible avec cette forme. C’est celle que retenait Masson 22 qui admettait
*Νικα-ϝετ-ι̯α en rapprochant Νικᾶσσα de Rhodes.
Avant de la tester, il convient toutefois d’évoquer une dernière pos-
sibilité, exclue pour les formes Νικᾶσσα, Τιμᾶσσα : c’est que ce soit un
*Νικᾱ́τᾱ paroxyton, avec gémination expressive, et donc un vrai [t] éty-
mologique. Que serait cette forme ? Ce ne pourrait être un adjectif verbal :
on n’appelle pas quelqu’un « vaincu ». Ce pourrait être le féminin d’un
nom en -τᾱς, non ionien-attique : mais les féminins de noms en -τᾱς sont
en -τις dans la majorité des dialectes et non en -τᾱ. Un *Νικᾱ́τᾱ féminin
de Νικᾱ́τᾱς est attesté en Thessalie à Larissa, dans une inscription en
koinè (Νικάτα Φιλήμονος χρηστὴ χαῖρε, Archaiologikè Ephemeris 1932,
Chron. 25, 8) : en Thessalie les féminins en -τᾱ sur des noms en -τᾱς
sont assez bien attestés, on a même sur thème en -s- des féminins en
-κρατᾱ sur -κράτης, mais ces formes ne sont guère anciennes, et il est
peu probable qu’on ait une telle forme thessalienne au début du ve a. C.
à Athènes. On peut enfin mentionner un Νικήτη (ΝΕΙΚΗΤΗ) en Lycie

21. R. Schmitt, Einführung in die Griechischen Dialekte, Darmstadt, 1977, p. 42-48.


22. Bulletin épigraphique, REG 107 (1994), p. 213.
un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 505

à l’époque impériale (TAM II, 984), mais il s’agit là d’une formation


tardive qu’on ne peut comparer à la forme athénienne. Une dernière
objection est qu’on n’a jamais de gémination expressive dans les anthro-
ponymes issus d’adjectifs verbaux ou de noms d’agent. Donc la géminée
de Νικαττα resterait inexpliquée.
Si Νικαττα est un adjectif en *-u̯ ent-, ce ne peut être une forme
attique, car l’attique aurait *Νικῆττα, mais seulement une forme d’un
dialecte conservant les [ᾱ] hérités. En l’occurrence, le seul dialecte ayant
à la fois le [ᾱ] hérité et une palatalisation en -ττ- est le béotien – en fait,
la palatalisation en -ττ- est attestée aussi en crétois, mais pour des rai-
sons géographiques, le béotien est un bien meilleur candidat : la Béotie
étant voisine de l’Attique, la présence d’une Béotienne à Athènes au ve s.
n’aurait rien pour surprendre, celle d’une Crétoise serait plus inattendue.
Il faut maintenant voir si une telle forme est plausible en béotien à cette
époque.
L’amuïssement du [w] intervocalique est acquis au vie a. C. en béo-
tien : cf. τοι παιδι (IG VII 3579, Thèbes, vie a. C.), τοῖ Ἀπόλōνι τοῖ
Πτōϊε̄ι (IG VII, 2729, Acraiphia, première moitié du vie a. C., avec à la
ligne suivante un ἐποίϝεσε), ἐπόεσε (DGE 440, Tanagra, vie a. C.). La
contraction de [α(ϝ)ο] en [ō] est acquise au ve a. C. : Σοσίμβροτος (IG
VII 2574a, Thèbes, première moitié du ve a. C.) ; celle de [ᾱ(ϝ)ο] en [ᾱ]
aussi : [Λ]ᾱκραρίδας (IThesp. 592, seconde moitié du ve a. C. d’après
G. Vottéro). Pour la contraction de [ᾱ(ϝ)ε] en [ᾱ] (type *hᾱϝέλιος), qui
est plus tardive, on n’en a pas d’exemple au ve a. C. ; Pindare n’a que la
forme contractée (ἁλίῳ N. 4, 13, ἅλιον O. 2, 62), mais c’est celle de la
langue conventionnelle de la lyrique dorienne, pas nécessairement celle
de son dialecte natal. Avec hiatus conservé, on trouve pour [ᾰ(ϝ)ε] plu-
sieurs occurrences de ἀϊθλον, dont au moins deux sont anciennes (CEG
I, 44, vie a. C.? ; LSAG2, 93, inscription que Jeffery date de la première
moitié du ve a. C.), mais il n’est pas certain que [ᾱ(ϝ)ε] et [ᾰ(ϝ)ε] aient le
même traitement. Enfin, la contraction de [ᾱ(ϝ)α] en [ᾱ] n’est pas attestée
non plus, mais elle a précédé celle de [ᾱ(ϝ)ε] parce que la contraction
entre voyelles de même timbre se fait plus tôt qu’entre voyelles de timbre
différent. Du reste, le nom est attesté à Athènes, or en attique il n’y a
plus de ϝ au ve a. C. et les contractions sont systématiques, donc si l’an-
throponyme béotien était [Nikaatta], une prononciation [Nika:tta] serait
attendue, et une graphie ΝΙΚΑΤΤΑ à plus forte raison.
506 claire le feuvre

Du point de vue phonétique, il n’y a pas d’obstacle à une lecture


Νικᾶττα (et non Νίκαττα), de *Νικᾱ-ϝετ-ι̯α ou, mieux, de *Νικᾱ-ϝατ-ι̯α
– et du point de vue morphologique, c’est la seule analyse possible (ci-
dessus). Ce serait le seul exemple de cette formation dans l’anthropo-
nymie hors du groupe dialectal du « dorien des îles » à date ancienne.

7.  On peut maintenant aborder la question de la réfection du voca-


lisme du suffixe féminin, qui est commune à tous les dialectes « du sud »
(mycénien, arcado-chypriote, ion.-att., pamphylien). La doxa admet
qu’elle est panhellénique et partagée par les dialectes « du nord », donc
éolien et dorien. On cite notamment le béotien χαρίϝετταν 23. L’adjectif
apparaît dans une inscription métrique du début du viie a. C. (CEG 1,
326, Thèbes ?) qui est la suivante :
[…] τὺ δὲ, Φοῖβε, δίδοι χαρίϝετταν ἀμοιβάν #
Ce qui correspond à la formule homérique […] δίδου χαρίεσσαν
ἀμοιβήν # (Od. 3, 58), dans la même position métrique, avec une diffé-
rence de mode verbal. L’inscription comporte des traits dialectaux nets,
le -ττ- géminé, le ᾱ conservé, le pronom τύ non assibilé, l’impératif δίδοι.
Cela étant, le χαρίϝετταν est d’une fiabilité relative : en effet, il est facile,
en partant d’une formule ionienne χαρί(ϝ)εσσαν ἀμοιβήν, de l’adapter
en béotien par deux transpositions très simples, le remplacement du η
par un ᾱ (ἀμοιβάν), et celui du -σσ- géminé par un -ττ- géminé (χαρί-
ϝετταν) : ce sont là des correspondances entre les deux dialectes bien
identifiées des locuteurs et que le dorien de pacotille des chœurs de tra-
gédie illustre abondamment. Quant au ϝ, il pouvait se trouver dans la
formule ionienne, maintenu artificiellement par la diction aédique, mais
il peut aussi avoir été introduit en béotien même, si l’adjectif χαρίϝεις y
était conservé comme il l’est en attique. La formule sous cette forme peut
donc avoir été générée à partir d’une formule ionienne par des règles
familières en synchronie, et rien ne garantit qu’elle correspond à une
forme béotienne authentique 24.

23. C. D. Buck, op. cit., p. 49 ; Chantraine, Formation, p. 270 ; Masson, OGS I-II, p. 335.
24. Si l’on considère que la source la plus proche est l’ionien d’Eubée, et qu’en eubéen
l’adjectif aurait aussi la forme χαρίϝετταν s’il était connu dans le dialecte, on
pourrait même supposer qu’il s’agit d’une transposition de l’ionien oriental χαρί-
(ϝ)εσσαν à l’ionien occidental χαρίϝετταν – cela semble néanmoins peu probable
un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 507

Il en va de même pour le κατὰ στονόϝεσσαν ἀϝυτάν # figurant dans


une inscription métrique de Corcyre (IG IX, 1, 868, viie-vie a. C.), qui
est la reprise de la fin de vers de l’Od. 11, 383 στονόεσσαν ἀϋτήν #, et
peut être généré par un simple remplacement du η par un ᾱ 25. Le terme
στονόϝεσσαν est clairement un homérisme dont on ne sait s’il avait un
équivalent dans le dialecte considéré. Le premier mot du vers est du reste
l’ionien πολλόν, qui n’est certes pas la forme épichorique à Corcyre.
Dans ce cas comme dans le précédent, on n’a pas affaire à un adjectif en
*-u̯ ent- employé de façon autonome, contrairement au τιμάϝεσα pam-
phylien, mais à une collocation épique Adj. + N déjà constituée, réuti-
lisée en bloc dans la même position métrique. Le témoignage aurait plus
de poids si les adjectifs n’étaient pas employés dans le syntagme même
que nous a transmis l’épopée.
Rappelons que l’épopée était largement diffusée dès cette époque :
il suffit de rappeler la coupe de Nestor (Pithécusses, viiie a. C.), qui fait
explicitement référence à un passage de l’Iliade. Ces deux formes ne sont
donc pas suffisantes pour assurer que le féminin des adjectifs en *-u̯ ent- a
vu son vocalisme refait dans tous les dialectes grecs. D’où l’intérêt de la
forme Χαρίασσα provenant d’Halicarnasse (LGPN 5b).
Masson mentionne ce Χαρίασσα 26, et pose la question du vocalisme
du suffixe en rappelant que -ϝασσα est le résultat phonétiquement attendu
du degré zéro hérité du suffixe au féminin, et que l’anthroponymie est
notoirement conservatrice. Mais avec son ordinaire prudence, il se
contente de mentionner la forme sans miser un sou sur son archaïsme. Il
n’est pas exclu que tel dialecte grec « du nord » (en l’occurrence, pour
Rhodes, dorien) ait conservé le degré zéro ancien dans les féminins, et
en particulier dans les anthroponymes : on pourrait penser à une opposi-
tion du type Πλάταια (ville de Béotie), avec degré zéro conservé dans le
toponyme, vs πλατεῖα avec vocalisme refait dans l’adjectif. On rappellera
que le degré zéro du suffixe *-u̯ ent- est encore attesté dans les dérivés de
toponymes (cf. 1.) même en grec « du sud », que les formes de participe

car, dans l’hypothèse d’une recension eubéenne de l’épopée défendue par Wathelet
et d’autres, on devrait avoir d’autres exemples du remplacement de -ττ- par -σσ-
pour « eubéiser » les formes, or on n’en a aucun. L’adaptation dialectale a donc dû
se faire entre ionien et béotien et non à l’intérieur du groupe ionien.
25. Le ϝ de ἀϝυτάν note un glide.
26. Masson, OGS I-II, p. 355.
508 claire le feuvre

féminin à degré zéro du type ἕκασσα, κατίασσα (*‑n̥ t-i̯ a) sont attestées à
Cyrène, dont la métropole, Théra, appartient au même ensemble dialectal
que le Dodécanèse. Dans ce cas, on aurait dans Νικᾶττα, Νικᾶσσα la
contraction de *-ᾱϝατι̯α, contraction entre deux voyelles de même timbre.
Mais vu la date probable de l’inscription en question (ier a. C.-ier p. C.),
on pourrait évoquer une autre possibilité, qui serait d’accentuer
Χαριᾶσσα propérispomène, en considérant qu’on a le même suffixe que
dans Νικᾶσσα et Τιμᾶσσα, c’est-à-dire une forme contractée de -ᾱ-ϝεσσα
ou -ᾱ-ϝασσα. Chez Homère, le suffixe est vivant sous deux formes,
qui incorporent toutes les deux la voyelle finale d’un thème vocalique,
-όϝεντ- et -ήϝεντ- (< -ᾱϝεντ-) : la distribution est fonction du mètre et ne
dépend pas de la forme de la base. On a ainsi δενδρήεντα sur une base
thématique, et non *δενδρεόεντα, et un toponyme Κυπαρισσήεις en Il.
2, 593 27. Les nouvelles créations se sont faites sur ce modèle, ainsi Ana-
créon a-t-il χαριτόεις en lieu et place de l’ancien χαρίεις. Il serait donc
envisageable que le suffixe complexe -ᾱ-ϝεσσα > -ᾶσσα ait été acclimaté
dans l’anthroponymie du Dodécanèse et ait conduit à la formation d’un
Χαριᾶσσα. Loin d’être un archaïsme remarquable, ce nom serait alors
une formation secondaire, analogique du type Νικᾶσσα, Τιμᾶσσα. Mais
en l’absence d’autre exemple indiquant une productivité de -ᾶσσα, on ne
peut que poser la question sans pouvoir y répondre.
On ne peut donc trancher la question du degré vocalique du suffixe
au féminin et du caractère pan-grec ou non de la réfection. Les formes
invoquées à l’appui d’un *-ϝετ-ι̯α pan-dialectal sont trop clairement des
emprunts à l’épopée pour qu’on puisse faire fond sur elles, et à l’in-
verse le Χαριασσα rhodien n’est peut-être pas une trace aussi claire
de *-ϝατ-ι̯α qu’il en a l’air. Si ces noms sont des emprunts directs à la
tradition homérique, il faut partir de -ϝεσσα et admettre qu’on a dans
Νικᾶσσα et Νικᾶττα les premiers exemples de la contraction [ᾱ(ϝ)ε]
dans les dialectes concernés. Mais ces adjectifs hérités de l’indo-euro-
péen ont pu passer dans l’anthroponymie à un stade ancien : le parallèle
des anthroponymes iraniens en -uant- (cf. ci-dessus, 2.) montre que cette

27. Une scholie bT à Il. 23, 741 a une variante Τίρυνθά τε τειχήεσσαν au lieu de la leçon
de la vulgate τειχιόεσσαν en Il. 2, 559, et de même Strabon, Geogr. 10, 4, 11 a une
variante Γόρτυνά τε τειχήεσσαν au lieu de τειχιόεσσαν en Il. 2, 646. La forme en
-ήεντ- est la forme ancienne, usuelle pour les thèmes en -s- (τελήεις), et remplacée
par la forme productive -ιόεντ- de même valeur métrique.
un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 509

conversion est ancienne, et si elle date d’une époque où le suffixe avait


au féminin la forme *-u̯ n̥ t-i̯ a dans la tradition poétique, il est possible que
cette forme soit conservée dans les anthroponymes, surtout si les adjec-
tifs correspondants avaient disparu de la langue vivante. Cela pourrait
expliquer que le béotien ait béotisé la formule homérique χαρί(ϝ)εσσαν
ἀμοιβήν en χαρίϝετταν ἀμοιβάν tout en ayant quelques anthroponymes
féminins du type *Νικᾱ-ϝατ-ι̯α, parce qu’adjectifs et anthroponymes sont
deux classes différentes, et que la conservation de *-ϝαττα dans la classe
des anthroponymes ne suffisait pas à faire introduire *‑ϝαττα à la place
de la forme ionienne ‑(ϝ)εσσα dans une citation homérique, d’où une
béotisation superficielle.
Pour résumer :
— le groupe « dorien des îles » a plutôt bien conservé le degré zéro
suffixal dans les féminins en ‑ι̯α en général,
— les formes χαρίϝετταν (Thèbes ?) et στονόϝεσσαν (Corcyre) ne suf-
fisent pas à prouver que le féminin a été refait avec le degré plein du mas-
culin dans tous les dialectes grecs,
– l’opposition Πλάταια vs πλατεῖα montre qu’un adjectif converti en
toponyme ou en anthroponyme n’a plus le même fonctionnement qu’un
adjectif resté adjectif,
— la contraction est acquise plus tôt entre voyelles de même timbre
qu’entre voyelles de timbre différent,
— le traitement d’une séquence [ᾰ(ϝ)ε] de type ἀϊθλον sans contraction
en béotien n’est guère en faveur d’une contraction pour [ᾱ(ϝ)ε].
Ces éléments pris ensemble constituent une fragile présomption en
faveur de l’hypothèse *‑ϝατ-ι̯α pour rendre compte des formes les plus
anciennes Νικᾶσσα et Νικᾶττα.

8.  On constate qu’en face des féminins, on n’a pas ou presque de mas-
culin en *-u̯ ent-, alors même que les premiers reposent sur les seconds.
Ce dernier point est manifeste dans le cas de Νικᾶσσα « pourvue de vic-
toire », qui n’est pas un nom de femme mais la féminisation d’un anthro-
ponyme masculin.
La raison première semble être que le suffixe était moins clairement
identifiable dans le masculin que dans le féminin. En effet, dans un dia-
lecte autre que l’ionien-attique, une forme en ‑ᾱϝενς, -ᾱϝεντος > -ᾶς,
-αντος devait passer à une flexion de participe. C’est ainsi que, toujours
510 claire le feuvre

dans le Dodécanèse, on trouve dans une inscription de Nisyros datant du


iie a. C. une forme Νικᾶντος :
Καλλιδίκ[ου τ]οῦ Ἀριστίων[ος] | καὶ Χαρμοῦς v τᾶς v Νικᾶντος (Wis-
senschaftliche Zeitschrift der Martin-Luther-Universität Halle-Witten-
berg 16:385,30).
Le nom peut recouvrir un Νικᾱ-ϝεντ-, ou simplement un nom en ‑αντ-
du type Βίας, Βίαντος (auquel cas il faut accentuer Νίκαντος). Ainsi les
masculins en -ᾱϝεντ- devaient-ils être absorbés par un autre type, après
la contraction.
En ionien-attique, on n’a pas de trace de masculins en -ηϝεντ- > ‑ηντ-
qui, du fait de leur nominatif en -ηϝενς > -ῆς, ont pu être recyclés dans
d’autres types flexionnels plus fréquents. De plus, malheureusement, les
anthroponymes sont plus souvent attestés au nominatif, cas qui en l’oc-
currence pour -ης, neutralise les oppositions morphologiques entre plu-
sieurs types flexionnels, qu’au génitif qui permet de distinguer le type,
pour ne rien dire du datif et de l’accusatif. Quant à d’éventuels mascu-
lins en -οϝεντ- > -ουντ- ou -ωντ- suivant les dialectes, ils étaient eux
aussi exposés à l’absorption dans le type participial (avec réfection du
Nom. -οῦς en -ῶν). On voit d’ailleurs une trace de ce processus, pour un
adjectif qui n’est pas un anthroponyme, dans les hésitations de l’exégèse
homérique : ainsi, en Il. 1, 157, au lieu de οὔρεά τε σκιόεντα (adjectif en
*-u̯ ent-), une scholie A nous apprend qu’Aristarque retenait une leçon
σκιόωντα (participe de σκιάω avec diectasis), née d’une réanalyse d’une
forme contractée σκιōντα.
Le problème, en fait, est qu’on ne pourrait trouver de trace non
ambiguë du suffixe qu’avant les contractions, c’est-à-dire à une époque
pour laquelle on a peu de textes, et en l’occurrence aucun anthroponyme
qui soit indubitablement une forme en *-u̯ ent-.
Le féminin n’était guère mieux loti : il devait être englobé dans la
même contraction que le masculin, et se confondre avec la flexion des
participes dans les dialectes à -σσ-, -οϝεσσα > -ουσσα (participe théma-
tique), -ᾱ-ϝεσσα > -ᾶσσα (participe athématique du type ἵστημι), parti-
cipes dont il ne se distingue que par la géminée 28.

28. Cela ne vaut bien sûr que pour les dialectes qui traitent le groupe -ns- par allongement
compensatoire.
un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 511

9.  Cela nous ramène à la question de la gémination expressive


dans les formations de participe. O. Masson 29 donne des exemples de
cette gémination « expressive », essentiellement les anthroponymes
en ‑φῶσσα, féminins de masculins en -φῶν, -φῶντος : Ἀστυφῶσσα à
Délos, ID 407 (ca 190 a. C., noté ΑΣΣΤΥΦΩΣΗΙ), Κλειφῶσσα à Mélos
(ier a. C. / ier p. C.), Ἀριστοφῶσ(σ)α à Athènes (IG II2 10799, fin ve-début
ive a. C., absent du LGPN 2a), Κτησιφῶσ(σ)α à Siphnos (Cyclades) à
date tardive, auxquels on peut ajouter en ionien littéraire le nom mytho-
logique Ἰοφῶσσα chez Phérécyde et Hésiode. Le masculin est un par-
ticipe et vient de -φαϝ-οντ-. Et un féminin *‑φαϝ-οντ-ι̯α ne devrait pas
avoir de géminée, d’où l’idée que cette dernière est expressive. Il faut
toutefois noter que cette géminée n’est pas systématiquement notée, loin
de là, et qu’il est difficile de savoir si une forme à ‹Σ› simple représente
un [s] ou une simplification de [ss]. Avec géminée assurée, on trouve
Πειθοῦσσα (Rhodes, époque hellénistique), Ἀρκοῦσσα (Délos, iie a. C.),
Τιμῶσσα (Thespies, accentué Τίμοσσα dans SEG 39, 458C, antérieur au
iiie a. C.). Ce type issu d’un participe présent avec gémination semble
inconnu en attique – il n’y en a aucun exemple dans le LGPN 2a. Mais
l’hypothèse d’une géminée expressive est peu satisfaisante : en effet, ce
procédé caractérise les hypocoristiques, or un participe n’est pas une for-
mation hypocoristique.
Taillardat, dans le DELG, donne ce qui est à mon sens la bonne expli-
cation aux formes de féminin en -φῶσσα : il faut partir d’une forme
ancienne avec degré zéro du suffixe de participe (du type ἔασσα, ἕκασσα)
*-φαϝ-ατ-ι̯α > -φαϝασσα, laquelle a subi deux réfections divergentes 30.

29. Masson, OGS III, p. 15. Les mêmes formes sont reprises par S. Minon, art. cit.,
p. 234, qui accepte l’explication par une gémination expressive pour les anthropo-
nymes, et explique différemment les formes de participe non converties attestées en
éléen et en thessalien.
30. L’hypothèse défendue par M. Peters, « Beiträge zur griechischen Etymologie », dans
L. Isebaert (éd.), Miscellanea linguistica graeco-latina, Namur, 1993, p. 104-105,
d’un *-bhoh2t-i̯ a féminin de -φως me paraît difficilement défendable dans la mesure
où ces noms en ‑φως sont spécifiques à la Crète et ne se trouvent pas dans les îles de
l’Égée, d’où viennent la plupart des formes en -φῶσσα, et où ces dernières forment
clairement couple avec des masculins en -φῶν, comme le note S. Minon, art. cit.,
p. 242-243. L’hypothèse défendue par E. Campanile, « Histoire et préhistoire d’une
formule poétique indo-européenne », EIE 21-24 (1987), p. 22, d’un *-bhh2-n̥ t-i̯ a
me paraît devoir être rejetée pour la même raison, le masculin en -φῶν supposant
*-φαϝων – je laisse de côté le nom de Perséphone qui ne vient pas d’un *-φαϝ-ν̥τ-ι̯α.
512 claire le feuvre

D’un côté une réfection en -φάϝεσσα, ce qui suppose une resegmenta-


tion en -φα-ϝασσα au lieu de -φαϝ-ασσα, et ensuite le même traitement
que pour les féminins d’adjectifs en *-u̯ ent-, d’où les formes Εὐρυφά-
εσσα (H.Sol. 2 et 4), correspondant à un masculin Εὐρυφῶν bien attesté
(14  occurrences dans le LGPN, la plus ancienne se trouvant à Thasos
au ve s.), Τηλεφάεσσα (Moschos, Europe 40 et 42, avec une variante
Τηλεφάασσα retenue par les éditeurs et que Taillardat considère comme
archaïque), correspondant à un masculin Τηλεφῶν attesté à Oinoé fin ive-
début iiie a. C. (IG XII 9, 245 B, 25), ainsi qu’un théonyme Πασιφάεσσα
mentionné dans un hexamètre cité par Aristote (Mirabilium ausculta-
tiones 843b29) et correspondant à un Πασιφῶν bien attesté (25 occur-
rences dans le LGPN, la plus ancienne se trouvant en Attique à la fin
du ve a. C.). Ce -φάεσσα n’existe qu’en poésie dans des noms mytho-
logiques, et cette réfection fixée par la tradition épique repose sur une
réanalyse morphologique secondaire, bien qu’ancienne : les adjectifs en
*-u̯ ent- ne figurent jamais en second élément de composé, ce type sup-
pose donc une réanalyse 31. Dans l’anthroponymie courante, la forme a
continué à être analysée comme un participe et, comme dans tous les par-
ticipes, le vocalisme a été aligné sur celui du masculin, donc [o], d’où,
après contraction, -φῶσσα en ionien, avec conservation de la géminée
de l’ancien degré zéro, ou ‑φῶσα avec alignement complet sur les par-
ticipes. Les féminins en ‑φῶσσα sont attestés dans les Cyclades, ou en
ionien littéraire : la seule exception est le Ἀριστοφῶσ(σ)α d’Athènes,
qui doit être un nom ionien d’origine si c’est bien une forme à géminée.
Or le couple masculin -φῶν, -φῶντος / féminin -φῶσσα est parallèle
au couple masc. ‑ᾶς, ‑αντος / fém. -ᾶσσα < -ᾱϝεντ-, -ᾱϝεσσα (comme le
couple masc. Νικαντ- / fém. Νικᾶσσα signalé plus haut), ou à un type
masc. -ōντ- / fém. -ōσσα < -οϝεντ-, -οϝεσσα : ils ont une forme à géminée
pour le féminin en face d’une flexion de participe en -nt- au masculin.
De même que la géminée des féminins en -φῶσσα, celle des féminins en
31. On voit apparaître plus tard, toujours en poésie, des adjectifs en -φάεσσα, qui sont
des formes secondaires tirées des composés en -φαής, clairement utilisées pour
leur valeur métrique, mais pouvant avoir été influencées par les noms en ‑φάεσσα.
M. Janda, Eleusis, p. 229, considère que les formes en -φάεσσα sont analogiques
(point sur lequel nous sommes d’accord) et que la seule forme ancienne est -φασσα :
je pense qu’il faut distinguer à l’origine les féminins en ‑φασσα (Φερσέφασσα) et
les féminins en *-φαϝασσα correspondant aux masculins en *-φαϝων ; -φάεσσα est
une réfection analogique à partir de *‑φαϝασσα et non de -φασσα.
un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- 513

-ᾶσσα est ancienne et non expressive si ce sont des adjectifs en *-u̯ ent-. Je
suggèrerais que c’est là qu’il faut chercher l’origine des formes à géminée
« expressive » de participes féminins convertis en anthroponymes. On
peut se demander si la gémination, plutôt qu’un trait expressif, n’est pas
en synchronie une marque du statut d’anthroponyme opposant ce der-
nier à la forme non marquée du participe, donc une marque secondaire de
la conversion, au même titre que le recul d’accent, d’autant que ce der-
nier est inopérant dans les participes qui ont déjà un accent récessif. Cette
marque serait issue en diachronie de formes où la géminée était phoné-
tique, continuant le degré zéro ancien d’un suffixe à dentale – suffixe de
participe pour ‑φῶν, -φῶσσα en ionien, suffixe *-u̯ ent- pour le type Νικᾶς,
‑αντος, fém. Νικᾶσσα en dorien (< Νικᾱϝεντ-), qui pouvaient fournir un
modèle de couple masculin en -nt- vs féminin en -ss-, modèle propre aux
anthroponymes, et susceptible d’être étendu par analogie aux participes
convertis en anthroponymes. L’absence de ce type en attique s’explique-
rait alors sans mal : en attique les féminins d’adjectifs en *-u̯ ent- étaient
en -ττα (μελιτοῦττα) et non en -σσα, et étaient donc nettement distincts
des participes. Ce modèle ne pouvait s’établir que dans des dialectes à
-σσ-, et à la condition que la séquence [ns] du participe y soit traitée par un
allongement compensatoire. En conséquence, le Τιμῶσσα de Thespies ne
serait pas un nom béotien, mais peut-être une forme ionienne ou dorienne.

10.  Il semble, au terme de l’étude, que voir dans Νικᾶσσα, Νικᾶττα,


Τιμᾶσσα, Τιμέσσα (Τίμεσσα ?) des fém. en *-u̯ ent- reste la seule solution
plausible. Il y a donc une trace ténue du suffixe dans l’anthroponymie au
premier millénaire avant l’époque hellénistique, au féminin seulement
parce que le masculin a été absorbé par les formations de participe après
les contractions.
Ces noms sont issus de la conversion des adjectifs poétiques τιμάεις
(homérique), νικάεις (hellénistique, mais sans doute plus ancien), χαρίεις
(homérique), et leur base est un substantif abstrait – type attesté égale-
ment en iranien. Toutefois, les anthroponymes présentent une contrac-
tion (ou une hyphérèse si c’est bien ainsi qu’il faut expliquer Τιμέσσα),
jamais faite dans les adjectifs épiques en ‑ϝεντ-, donc ils sont devenus
dans une certaine mesure indépendants de leur forme de fondation :
étant employés dans des contextes non métriques, ils pouvaient subir
l’évolution phonétique régulière qui était exclue pour les adjectifs
514 claire le feuvre

correspondants. En retour, la contraction les a éloignés de leur base. Il


s’est produit la même chose pour les toponymes en -ϝεντ-, régulièrement
contractés (Πιτυοῦσσαι, Οἰνοῦς), et les adjectifs substantivés assez tôt, du
type μελιτοῦττα en attique. En revanche, les Ἰόεσσα, Τιμάεσσα, Τιμάεις
non contractés attestés à partir de l’époque hellénistique sont repris direc-
tement à la tradition épique et constituent une deuxième vague de conver-
sions. On aurait donc affaire à deux strates, une première strate antérieure
aux contractions, attestée dans l’épigraphie, et une autre bien plus tar-
dive, pour laquelle on a des attestations littéraires et épigraphiques.
Ces formes ne nous permettent pas de trancher la question de la réfec-
tion ou non du féminin ‑ϝασσα en -ϝεσσα dans les dialectes « du nord »,
étant donné que la contraction de [ᾱε] aboutit à [ᾱ] comme la contraction
de [ᾱα], et que la forme tardive Χαρίασσα (Χαριᾶσσα ?) pourrait être une
innovation et non un archaïsme. Il me semble qu’un faisceau d’indices
peut appuyer l’hypothèse de la conservation du degré zéro ancien dans
les anthroponymes, mais ce n’est qu’une présomption.
En revanche, ce type pourrait fournir un point de départ pour rendre
compte du procédé de gémination dans les anthroponymes féminins
tirés de participes, comme marque secondaire de la conversion. Quoique
marginal, il aurait ainsi laissé une trace indirecte dans une autre forma-
tion anthroponymique, elle aussi peu développée, et qui ne doit pas être
considérée comme une formation expressive.

Références bibliographiques

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Ionic element in Coan onomastics?

Marina Veksina
Humboldt-Universität zu Berlin

F
eminine names in -ίη, -έη, -ρη found in the Doric islands of the
Aegean have received different interpretations by the grammar-
ians. 1 First to be suggested was a theory explaining the Ionic-
sounding forms by the presence of an Ionic population in Doric islands. 2
In the grammatical register to the Coan dialect, C. Gladis explained these
names as an imitation of the epic style. 3 Apparently unaware of Gladis’
suggestion, F. Bechtel preferred to see in the Rhodian Ἀγαθανόρη and
Coan Ἀρισταγόρη the results of the Doric contraction -εα > -η, and paral-
lelled these cases with the Rhodian Νικασικράτη and Coan Ἀναξιπόλη. 4
Slightly later, F. Hiller von Gaertringen, without referring to Bechtel,
interpreted in the same way Rhodian Τιμανόρη as well as Κλε(ι)ταγόρη
and Ξεναγόρη read in one inscription from Astypalaia. 5 Neither Bechtel
nor Hiller commented on the derivational model of the presumed longer
forms. This was done by A. Striano-Corrochano in 1994 (by that time
some more Ionic-looking names had become known): according to her
suggestion the formant -εια was transferred analogically from the femi-
nine names belonging with s-stems (‑κράτεια, -κλεια, -γένεια, -φάνεια)

1. This investigation was funded in 2014–2015 by the Swiss State Secretariat for
Education, Research and Innovation.
2. H. Barth, De Coorum titulorum dialecto, Basileae, 1896, p. 86, and R. Björkegren,
De sonis dialecti Rhodiacae, Uppsala, 1902, p. 26.
3. C. Gladis, “Grammatik und Wortresgister zu den Inschriften von Kalymna und
Kos”, in Sammlung der griechischen Dialekt-Inschriften, Bd. IV, Göttingen, 1910,
p. 511: “Vielleicht handelt es sich nur um eine durch die epischen Frauennamen
veranlasste Mode-Ziererei”.
4. Bechtel, HPN 376 and 260.
5. F. Hiller von Gaertringen, “Dorisch oder ionisch?”, ZVS 51 (1923), p. 27.
518 marina veksina

and both primary and secondary names in -εια underwent the Insular
Doric contraction. 6 By now the collection of the Ionic-looking names has
become much larger and this paper aims at reassessing previous theories
with focus on the Coan material.
It should be pointed out from the beginning that most of the Ionic-
sounding names are secured for Coan citizen-women (see appendices 1
and 2). 7 Thus, the theory ascribing these names to the presence of the
Ionic expatriates on the island should be left aside.
The contraction /ea/ > /ɛ:/ is indeed generally accepted for Aegean
Doric. 8 However, this contraction did not have the character of an uncon-
ditional phonetic law and its parameters need to be specified for each
sub-dialect. As far as the situation in Cos is concerned, we find e.g. the
contracted forms of the noun for “priestess” in the 3rd and 2nd c. BC, but
the uncontracted forms of this noun are far more frequent and are found
from the 4th c. BC down to the 2nd c. AD. 9 Of the adjectives of material
χαλκῆ is found only contracted, with examples confined to the 2nd c. BC
(accusative and dative), but for ἀργυρέα and χρυσέα only uncontracted
forms are attested. 10 Noteworthy is further the θυγατριδῆν attested in a
6. A. Striano Corrochano, “Sobre algunos antropónimos femeninos de Rodas y de
Cos”, in J. de la Villa Polo et al. (coord.), Quid ultra faciam?: trabajos de griego,
latín e indoeuropeo en conmemoración de los 25 años de la Universidad Autónoma
de Madrid, Madrid, 1994, pp. 87–92.
7. In what follows the numbers in italics refer to the inscription numbers in the Coan
corpus, IG Vol. XII, Fasc. 4. Inscriptiones Coi, Calymnae, insularum Milesiarum,
Berlin, 2010–. The small numbers refer to lines. Names of persons explicitely
indicated as foreigners have been left out of the account. Names attested in metrical
inscriptions have unless otherwise indicated been left out of the account.
8. R. Schmitt, Einführung in die griechischen Dialekte, Darmstadt, 1977, p. 46.
9. For the etymology of this word, see C. Dobias-Lalou, Le dialecte des inscriptions
grecques de Cyrène, Paris, 2000, pp. 48, 85, 206; Risch, Wortbildung, p. 135, in
particular note 120; for further references, cf. M. Meier-Brügger, Griechische
Sprachwissenschaft, Bd. II, Berlin, 1992, p. 24. In the Coan corpus I count 4
contracted nominatives (three of them in one inscription, 304, first half of the 2nd c.
BC, sacral regulation), and 2 contracted accusatives (3rd c. and 2nd c. BC); among
the uncontracted forms there are 13 nominatives and 9 accusatives, covering a period
from the 4th c. BC down to the 2nd c. AD. The only example with the doric vocalism
of the stem is the contracted nominative ἱάρη 5122; this dedication of the late 3rd c.
BC was found not in the city, but in the sanctuary of Demeter in Κυπαρίσσι.
10. On their etymology in *-ej- or with reduplication *-ejj-, see e.g. Chantraine,
Formation, p. 50. For ἀργυρέα there are two accusatives and one nominative attested
in the Coan corpus, with the examples scattered in time from the 3rd c. BC to the
ionic element in coan onomastics? 519

fragmentary honorary inscription of the 1st c. BC (991). 11 It should be


pointed out that none of the mentioned formations corresponds exactly
to the etymological conditions of feminine names in *-esja. The same
is true of the epicleses Ἀλσεία, Ἀργεία, Ἑλεία, which are only attested
in the dative and genitive, without contraction. 12 The feminine forms of
the adjective τέλειος are never found contracted either, although it can
be speculated whether the alpha in the nominative and the accusative
was short. 13 Turning to the realm of onomastics, there is no evidence
that the feminine names in *-esja ever tended to be contracted in Cos. Of
the two possible examples, Ἐμπεδοκράτη is found in a metrical epitaph
(12412, beg. of the 5th c. BC), and therefore cannot be indicative of the
dialectal usage, and for Μενεκράτη (2655, maybe hellenistic, funerary
stone) there is no possibility to check the reading and the dating, since
the stone is now lost. On the contrary, the uncontracted forms in -κράτεια
and -κλεια are quite well represented in Cos, as is clear from the fol-
lowing list of examples:
Εὐκράτεια 65316 (3rd c. BC, dedication), Ἑρμοκράτεια 17011 (2nd c.
BC, funerary stone), Ἀμφικρατείας 104215 (ca. 180 BC, catalogue);
Ἀρχίκλεια 30173 (end of 3rd c. BC, catalogue of women, the woman
is among metics), Ὀνασικλείας 46175 (ca. 180 BC, catalogue) 14,

2nd c. AD. For χρυσέα there is no accusative and the only nominative found is in
the metrical honorary inscription of the third or second century BC (837). Just as
with the noun for priestess I have left out datives and genitives, where the second
vowel is long, although potential complications through paradigm levellings are to
be expected.
11. On this formation, see Chantraine, Formation, p. 363 f.
12. All three are denominative from s-stems, but unlike the personal names in ‑κράτεια,
-κλεια, -γένεια etc. they are integrated into the system of adjectives in -ειος, -ειᾱ
(-ειη), -ειον, see Risch, Wortbildung, 129 f.
13. E. Nieto Izquierdo, “La metátesis de cantidad en el dialecto de Cos: ¿influencia del
jonio o desarrollo propio?”, Emerita 83.2 (2015), p. 349 f., gives τέλεα, τέλεαν. This
praxis is different from that of the IG corpus. The feminines in *‑wā would have the
long vowel, see e.g. E. Schwyzer, GG 1, p. 472, and the phonetic development from
τέλεια (*-esja) is explicitely denied by Nieto Izquierdo, art. cit., p. 350, fn. 12. No
τελήα or τελήαν are attested in Cos, which would have preserved the combination of
two long vowels. Τέληος is attested in Cos, cf. ἱερεῖον τέληον 30231, but because of
its late date (beginning of the 2nd c. BC) not accepted as dialectal by Nieto Izquierdo.
For the formation, cf. Risch, Wortbildung, p. 130, Schwyzer, GG 1, p. 282, p. 472,
Chantraine, Formation, p. 50.
14. 461 is census of the tribesmen of Isthmus.
520 marina veksina

Πυθοκλείας 46124 (ca. 180 BC, catalogue), Ἀγαθοκλήας 16444 (1st


c. BC–1st c. AD), funerary stone, certainly a woman), Ἀναξίκληαν
8402 (1st c. AD1, honorary inscr.). Herewith possibly also belongs – –
κλ̣ει̣ α – – 43118 from the catalogue of women (ca. 200 BC).
In the epitaph Μενέκλεα/χρηστὴ χαῖρε 1718 (2nd–1st c. BC) the
name is understood as showing the dropping of an intervocalic glide. For
Δαμοκρατεα 22131 (1st c. BC, funerary stone, Δαμοκρατέα in the corpus)
a similar explanation can be proposed (thus, Δαμοκράτεα). With Ἀριστο-
κλεα/Πυλαιμέδου 1610 (2nd c. BC, funerary stone; Ἀριστοκλέα in the
corpus) the possibility of a masculine is rather faint since compounds in
‑κλέας are alien to the Doric Aegean. Since the single non-Coan attes-
tation of the masculine Ἐπιφανέας is not certain, as it is a vocative only
followed by χαῖρε (LGPN 3a, Achaia, 1st c. BC–1st c. AD), a masculine
interpretation for Ἐπ[ιφ]α[ν]εα/χα[ῖρε] 1752 (1st c. BC–AD, tombstone;
Ἐπ[ιφ]α[ν]έα in the corpus) remains rather faint, too.
Τhe contraction is not attested in another old formation representing
an analogical extension of the formant -ειᾰ: 15 Ἀντιδα[μεί]/ας 104173–174
(ca. 180 BC, catalogue, certainly a woman), Ἀ̣ντιδαμείας 46235 (ca. 180
BC, catalogue, certainly a woman). The masculine pendant Ἀντιδάμας is
known in Cos, and other names in -δαμος and -δάμας are very popular in
Cos and quite well represented in the Aegean.
The name Ἑκαταία with the adjectival suffix 16 is quite popular in Cos
and a shorter form is not attested.
We can conclude that the feminine names with derivationally secured
terminations -εια/-αία do not show any tendency to contraction in Cos.
The two registered feminines in -κράτη do not have exact matches among
the Coan feminines in -κράτεια; whether they are due to contraction or
not, it remains that names in -κράτη and -κράτεια coexist and that the
latter type clearly prevails. These two unintersecting series of names can
be compared with masculine names in -ῆς and -έας, which are character-
ized by a complementary distribution of different stems between the con-
tracted and uncontracted type. 17 However, names in -κράτη should not

15. Risch, Wortbildung, p. 137.


16. Risch, Wortbildung, p. 126; Masson, OGS II, p. 430; Bechtel, HPN 527 f.;
M. Egetmeyer, Le dialecte grec ancien de Chypre, vol. I, Berlin, 2010, p. 362.
17. This phenomenon is observed in Cos as well as in Delos and Thasos, cf. Masson,
OGS III, p. 17, and OGS I, p. 94f. The Coan names of the contracted type are Νικῆς
ionic element in coan onomastics? 521

necessarily result from the contraction of ‑κράτεια: they can also be seen
as morphologically derived “short names” as e.g. epic names in ‑μήδη. 18
It may be suitable to consider the Coan material in a broader context,
and in particular with regard to the general situation in the Aegean. 19
Names in -κράτη and -κράτεια are attested in Rhodes, with the attesta-
tions of the former type starting in the 4th c. BC and those of the latter
type in the late 3rd c. BC. This chronology does not favour the possibility
of a contraction. The following pairs are attested:
Τιμακράτη (6 ex.: ca. 325 BC, 3rd c. BC?, 2nd c. BC, 1st c. BC,
hell.)/Τιμακράτηια (1 ex., late 3rd c. BC);
Βουλακράτη (2 ex.: 1st c. BC)  / Βουλακράτεια (2 ex.: 2nd c. BC,
hell.-imp.);
Νικασικράτη (1 ex., hell.) / Νικασικράτεια (3 ex.: 2nd c. BC, 1st c.
BC, imp.);
Φιλοκράτη (1 ex., hell., metrical)  / Φιλοκράτεια (1 ex., 2nd–1st c.
BC).
Thus in the attested pairs the names in -κράτη appear either earlier than
the corresponding one in -κράτεια or simultaneously with it. If indeed the
contraction has played a role here, 20 it may have created stylistic and/or
local variants, but it was not productive enough to eliminate the -κράτεια
type. The interpretation as “short names” is also possible, but in this case
the exclusively non-local vocalism should be explained. Indeed, both pos-
sibilities may have been at work here. The first attestations of ‑κράτη type
come from Ionic regions and date to the late 5th c. BC (Ephesos late 5th
c. BC, Thasos, Pantikapaion, Amorgos, Mykonos 4th–3rd c. BC). This
type is alien to Attica (one example in Oropos 4th–3rd c. BC is probably
due to an influence from Euboia), where the -κράτεια type was normal,
attested from the 5th c. BC on. Remarkably, in Ionic territories the first

(75174 the same person as 7632), Πραξῆς (7087, 1483), Φιλιστῆς (75211-212, 7076,
2906).
18. Risch, Wortbildung, p. 137, 230, analyzes names in -μήδη as “short names”
derived morphologically from the names in ‑μήδεια; but Kamptz, HomPN, p. 111
understands names in -μηδη as proper “Motionsfeminina”.
19. The following account is based on the data made available by the LGPN.
20. For some examples of contraction in the sequence /ea/ in Rhodes, see L. Martin Váz-
quez, Inscripciones rodias, Diss. Madrid, 1988, vol. 1, p. 83, 86, and A. Striano Cor-
rochano, art. cit., p. 89. However, the quoted instances of contraction do not fulfill
the same etymological conditions as names in -κράτεια.
522 marina veksina

examples of -κράτεια are found only as late as the 4th c. BC. This of
course can be a mere coincidence due to the lack of material, but also
undermines the possibility that the Ionic -κράτη type originated through
the contraction of names in ‑κράτεια. Instead, names in -κράτη can be
morphologically derivatives. Feminine names in -κράτα are a Thessalian
phenomenon, known from the 3rd c. BC on (cf. e.g. the pairs Aὐτοκρά-
τεια / Aὐτοκράτα and Δαμοκράτεια / Δαμοκράτα, both attested in Larisa
in hellenistic times), but their interpretation as “short names” analogous
to the Ionic short names in -κράτη may need some further specification.
In Thessalian the established type of patronymic adjectives in -ειος (not
only for names in -ης, but also extended to other stems 21) could cause
ambiguity in interpreting the names where -εια is derivationally moti-
vated. 22 Names in -κράτα as pendants for masculine ‑κράτης could have
been (occasionally) introduced as balancing means for the overloaded
system of feminines in -εια.
For the many names in -κλεια (over 80 in LGPN) no pendants in
‑κλη are ever found except for Παντάκλη (LGPN 5b, Caria, 3rd c. BC),
which would probably be better referred to Παντακλείη, IG XII (9) 451
(Euboia, 4th–3rd c. BC). For the good old Προκλῆς no Πρόκλεια is ever
found, indeed there is no special feminine pendant. But in imperial times
we have the pair of short names Πρόκλος / Πρόκλα (also found with the
Ionic variant Πρόκλη). Names in -κλα are late 23 and are mainly repre-
sented by Πρόκλα and Θέκλα. For Θέκλα no better interpretation can be
suggested than a short name for Θεόκλεια.
For the common names in -γένεια no secure pendants in -γένη are
ever found. 24 The formation in *‑genā is not securely attested, 25 and in
any case not found in South Aegean.

21. A. Morpurgo-Davies, “Thessalian patronymic adjectives”, Glotta 46 (1968),


pp. 85–106; C. J. Ruijgh, Études sur la grammaire et le vocabulaire du grec mycé-
nien, Amsterdam, 1967, p. 282.
22. Cf. the case of avoidance of two consecutive feminines in -εια: Δαμοκράτεια Δαμο-
κράτεος, IG IX 2 683b, quoted by A. Morpurgo-Davies, art. cit., p. 90.
23. The old Ἀμύκλα is a special case, see Bechtel, HPN 556.
24. Two names in -γένη are reported by the LGPN, both of them in Ionic territories, and
none can be secured as a feminine: Ἀριστογέν|---? TAM V (1) 786, 4–5; Ἀντιγένη[ς]
IG XII (9) 988, understood as masculine by Ziebart.
25. All three names in -γένα reported by the LGPN are dubious. One is late and can
represent both a masculine nominative and a feminine genitive; the reading is
ionic element in coan onomastics? 523

Names in -μήδεια are not known in the Doric Aegean and are in gen-
eral poorly attested: the short name Μήδεια (Athens, 4th BC), and Ξενο-
μήδεια (Smyrna, 2nd BC), are the only instances before imperial times.
Names in ‑μήδη are characteristically Ionic and Attic (8 ex., attested
from the 4th c. BC on). Outside Ionic-Attic territories, names in -μήδα
are known, and with the exception of the uncertain Cypriot Ἀταλομήδα 26
the oldest example is from Thessalia (Φρασιμήδα 5th c. BC).
Names in -φάνεια are attested in various regions from the 5th c. BC
on (in Insular Doric from the 4th c. BC down to imperial times, in Attica
from the 4th c. BC onwards, Ionic examples are later). Infrequent names
in -φάνη are Attic and Ionic (Attic examples start in the 6th c. BC, and
Φάνη is found in Eretria in the 4th–3rd c. BC). For the only two Insular
Doric examples (Φάνη 3rd c. BC, Θευφάνη 2nd c. BC, both examples
from Nisyros), chronology does not preclude the explanation by the con-
traction. No *‑φάνα is attested.
The formation *-damā is old, 27 but no feminine in -δάμα or -δάμη is
attested in the Aegean Doric. A Ἱπποδάμη is known in Attica in the 4th c.
BC. Νames in -δάμα appear here and there, in particular in Doric Pelo-
ponnese (the earliest example dates back to the 6th c. BC), but the most
significant concentration of names in -δάμα is found in Thessalia (8 ex.,
from the 4th c. BC on) and Boeotia (6 ex., from the 4th c. BC on), and
belonging with this Αeolic group are two examples in Ilion (3rd–2nd
c. BC). Names in -δάμεια are found in Thessalia and Boeotia from the
3rd c. BC on (less well represented here than those in -δάμα), the type
is represented in Attica (from the 4th c. BC on), Doric Aegean (Cos,
Thera, from the 3rd c. BC on) and in imperial times on the west coast of
Asia Minor. No *-δάμαια is attested anywhere. The formation ‑δάμεια is
already found in the epic language, representing the case of an analogical
extension of the termination -εια. 28
Names in -ρόδη are common in Rhodes (e.g. Ἁγησιρόδη, Ἁλιορόδη,
Ἀριστουρόδη) with the oldest example dated to ca. 325 BC (Φιλορόδη
insecure with the other example (Boeotia, 3rd–2nd c. BC); the reading is not secure
for the oldest example either (Dodona, 5th c. BC), cf. ε῏ ΚΛΕΟΓΕΝΑΙ[— —, as
given in É. Lhôte, Les lamelles oraculaires de Dodone, Geneva, 2006, p. 79.
26. M. Egetmeyer, op. cit., Rantidi 4.
27. But the 6th c. example from Cyprus is now interpreted as a masculine, see M. Eget-
meyer, op. cit., p. 343.
28. Risch, Wortbildung, p. 137, Chantraine, Formation, p. 87.
524 marina veksina

ILind 51 c I, 5). No *-ρόδεια or *-ρόδαια is found. The only known


example of -ροδεα is instructive. It is the tombstone of Πεισιρόδεα Τει-
σιμάχου, ILind 63 = Cl. Rh. 2 (1932) p. 198 no. 29 (ca. 300 BC). The
same woman is known to have made a dedication to Athena found on
the acropolis of Lindos (Πεισιρόδη Τεισιμάχου Ἀθαναίαι Lindos II 63,
ca. 300 BC). We are clearly dealing here with the phenomenon of the
short name used side by side with the full name for one and the same
individual. 29 The woman herself preferred the Πεισιρόδη in her dedica-
tion, whereas her relatives felt the full name was more appropriate on the
tombstone. Still, the full variant could be a backformation built upon the
name in -ρόδη, for otherwise the lack of ‑ροδε(ι)α variants for the other
names is not clear. Masculine counterparts are in ‑ροδος. In Rhodos, a
name in ‑ρόδα is attested only once (Τιμουρρόδα, 2nd BC), the only
other example for a compound in ‑ρόδα being Δαμορόδα (Cyrene, imp.),
otherwise the name Ῥόδα occurs in different regions from Hellenistic to
late times (3rd AD), including one example in the Rhodian Peraia.
Ἑκαταία was popular not only in Cos, but also in Thasos, and it is also
represented in Chios (in Thasos and Chios the specifically Ionic form
Ἑκαταίη is found in older times, whereas the form Ἑκαταία appears in
the 1st c. BC). A possible analogical formation, Ἑκατεία, is not known,
and the several instances of Ἑκατέα are late enough to be understood
as the result of a monophthongisation. 30 The simple theonym Ἑκάτα or
Ἑκάτη is not attested as a personal name, neither in Cos, nor anywhere
else.
Within the Aegean Doric the attestations of the short name Ἀρίστη
are confined to Cos (9 ex. in LGPN: from the 3rd or 2nd c. BC on), but
Ἀρίστα appears in Cos (1 ex., ca. 200 BC) and Rhodes (4 ex., 2nd c. BC)
as well. Ἀρίστεια is the extended form with several relatively old exam-
ples in Attica (3 ex. 4th c. BC) and one in Argos (6th c. BC), but none in
the Aegean. Ἀρίσταια is a hapax, only attested in Cos in the 2nd c. BC.
This formation apparently proceded from the Doric variant of the short
name.

29. R. Schmitt, “Morphologie der Namen: Vollnamen und Kurznamen bzw. Kosenamen
im Indogermanischen”, in Namenforschung. Ein internationales Handbuch zur
Onomastik 1, Berlin, 1995, pp. 419–427.
30. NS 57 (Lindos, 1st c. BC–1st c. AD), IErythrai 315 (1st–2nd c. AD), IK Laodikeia
Lyk. 116 (early imp.), P. Fraser, Rhodian Funerary Monuments, Oxford, 1977,
p. 118 n. 157 (Halicarnassos, Roman). Cf. L. Martin Vázquez, op. cit., p. 358.
ionic element in coan onomastics? 525

As can be seen from the given account, usually the earliest attesta-
tions of the shorter names are older than those of the longer (‑κράτη in
Ionic territories, in Rhodos and perhaps in Cos, ‑φάνη in Attica, ‑ρόδη
in Rhodos), sometimes both are approximately contemporary (‑μήδη in
Attica, ‑δάμη in Attica, possibly ‑κράτη in Cos, perhaps ‑κλη in Caria).
Often one member of the pair is simply unattested in a particular region
(there is only ‑κράτη in Attica, only ‑κλεια in most regions, only ­φάνη
in Nisyros, only Ἀρίστη and only ‑δάμεια in Doric Aegean, etc.). Thus,
there is no dialect for which it can be demonstrated that the names in ‑η
replaced those in ‑εια in course of time. The reality and the ancient char-
acter of the type in *‑ā is demonstrated by the names in ‑κράτα, ‑μήδα,
and ‑δάμα attested in various non Ionic-Attic regions, with a particular
concentration of the examples in Thessalia and Boeotia. The oldest
epigraphic examples of the names in ‑κράτη, ‑κλη, ‑φάνη, ‑μήδη, ‑αρίστη
are found in Ionic/Attic territories. Therefore, although a single explana-
tion can’t account for all cases of variation between longer and shorter
names, it is clear that the motives for this variation are to be looked for in
the spheres of morphological derivation and style. Analogical extension
of the formant ‑εια on one side and morphological creation of the short
names in ‑η/‑ᾱ besides the long names in ‑εια on the other side are inter-
twining processes already in the epic language and in historical Greek
the situation is no less complicated. At different stages of development
various dialects could introduce either short or extended variants, and
although both types are originally old, a particular variant could eventu-
ally receive a new interpretation within a particular dialect.
In what follows I first consider cases where for an Ionic-sounding
name in -η any pendant in -εια is only attested outside Cos (Ἀριστα-
γόρη, Κληναγόρη, Νικασαγόρη, Ἁλίη), taking together Bechtel’s Ἀνα-
ξιπόλη, and I further turn to the Coan names in -ίη, -έη, ‑ρη missing
any epigraphically attested pendant in -εια. The relevant Coan examples
are given in appendix 1 and appendix 2 respectively. The attestations
fall within a quite restricted chronological span (second part of the 3rd–
2nd c. BC) which may in itself indicate that we are dealing here with a
phenomenon of fashion.
Rare names in -πόλη are Ionic with the oldest examples found in
the Samian colonies (Perinthos 6th–5th c. BC, Nymphaion 4th c. BC,
Arkesine 4th c. BC). This particular link with Samos is intriguing and
526 marina veksina

it is tempting to think that the introduction of this type is a Samian spe-


cific feature. 31 This type was coined vis-à-vis names in -πολις, which
are extremely productive (over 1,000 attestations in LGPN, only 264 of
which are feminine) and are scattered all over the Greek-speaking world.
Their distribution is complex. The feminine names are found in Athens
from the 5th c. BC on, in Thessalia (from the 4th c. BC), Boeotia and
Megara, but not in the Peloponnese. In the Aegean the oldest examples
are from Ionic territories (e.g. Delos 6th c. BC, Euboia 5th c. BC, Thasos
5th–4th c. BC), whereas the attestations in Doric regions only start in the
3rd c. BC (Thera, Nisyros, Cos, Rhodes). 32 The Samian type unites the
advantages of having both a distinctively feminine and a slightly shorter
form. Names in -πόλε(ι)α are extremely rare and are confined to Thera
where they are not attested before the 2nd c. BC (Νικοπόλεια 2nd c.
BC, Ἀναξιπόλεα 2nd c. BC, Χαιροπόλεια 2nd c. AD). 33 The only name
in ‑πόλη in Doric Aegean is Ἀναξιπόλη, found in Cos (2nd c. BC). Its
explanation as a contracted form from Ἀναξιπόλεια is not corroborated
by the chronology and distribution of -πόλη and -πόλε(ι)α types. The
latter are likely to be back-formations to the names in -πόλη. The inhab-
itants of Thera are unlikely to have re-analysed the Ionic type as the
result of a contraction, because the contraction of feminines in ‑εια (from
*-esja and other) is not found in Thera. 34
The oldest examples of the type -αγόρη (Klazomenai 6th c. BC,
Sinope 5th c. BC, Apollonia Pontica 5th c. BC, Samos 5th c. BC, Ere-
tria 4th c. BC, Amorgos 5th–4th c. BC) represent the Ionic interpreta-
tion of the old formation which was very popular e.g. in Athens (attested
from the 6th c. BC on, naturally in the form -αγόρα), but originally was
not known in Insular Doric. Problematic is the archaic inscription found
in Astypalaia which yields Κλε̄ταγορηι καὶ Ξεναγο--. Hiller von Gaer-
tringen in IG XII 3, 241 suggested the stone was brought from some
31. No names in -πόλα are found. An example of Πόλα quoted in the LGPN, from an
imperial inscription from Thasos, must be an instance of a late spelling for Πῶλα
(lat. Paula). No names in -πολία or -πολίη are found.
32. The two oldest examples in Doric islands given in LGPN 1 as feminines are insecure:
IG XII Suppl. p. 211 no. 698, Thera, 5th c. BC, is the bare genitive Νικησιπόλεος,
and Νεόπολις on a casque (Crete, 7th–5th c.) should be a man’s name.
33. The name Πολέα (Delos, 2nd c. BC) designates a woman-dedicator whose prove-
nance is not known.
34. R. Domínguez Casado, El dialecto de Tera. Gramática y estudio dialectal, tesis
doctoral, Madrid, 2014, p. 138, 158 f.
ionic element in coan onomastics? 527

Ionic region, but later on 35 he preferred to see here an example of the
Doric contraction and gave the text Κλεταγορῆι καὶ Ξεναγο[ρῆι in IG
XII Suppl. p. 82 n. 241. The extremely rare names in -αγόρε(ι)α are
likely to be an Insular Doric isogloss since their attestations are confined
to Thera (2 ex.: 3rd c. BC, 3rd–2nd c. BC), Anaphe (1 ex., hell.), Cnidos
(1 ex., late 4th c. BC), Astypalaia (1 ex., 1st c. AD, metr.) and Amos (1
ex.: IK Rhod. Per. 351, ll.2f., 6th c. BC). 36 The oldest example is of par-
ticular interest as it is found at the end of a metrical epitaph where the
reading is difficult: ΗΩΜΙΔΕΑΛΗΩΝΟΣ καὶ ....α/γορέας φίλος hυιύς. 37
This part of the text gives the parents’ names and was intended to be met-
rical as unequivocally follows from the epic reminiscence φίλος hυιύς
concluding the line. However, the incorporation of the personal name
into the line was problematic, since the first vowel in -αγορ- is etymo-
logically short; -αγορέας should be read either with prolonged first α, or
with synizesis of the last two vowels. If at all any link is to be postulated
between the archaic ‑αγορη from Astypalaia and the metrical ‑αγόρεα
from the Rhodian Peraia, the longer type could be due to the reanal-
ysis of the Ionic type. Except for the doubtful Κλε̄ταγορηι, names in
-αγορη are attested in Insular Doric only from the 3rd c. BC on (Nisyros,
Cos, Rhodes, total of 16 ex. in LGPN 1); by contrast, the only example
of -αγορα in this region is in a late inscription from Melos (imperial
times). 38 Noteworthy are the complementary geographical distribution of
the -αγόρε(ι)α and -αγόρη types within Insular Doric territories, and the
non-intersecting first parts of compounds for both formations. 39 These
fine variations can reflect morphological selectivity as well as matters of

35. F. Hiller von Gaertringen, art. cit. (see note 5).


36. The Chian inscription of the 5th c. BC only consisting of Ἀθηναγορέας has been left
aside here for it can also represent the masculine name and is to be compared with
Τελεσαγορέας attested in Nisyros (AD 25 (1970) Chron. p. 518 no. 1, 4th c. BC).
37. This text according to IK Rhod. Per. 351. For the discussion of the text, see
W. Blümel, “Dialekte und Dialektmischung im südwestlichen Kleinasien”, in Dia-
lectologica Graeca, pp. 31–35. Suggestion for the name of the father is proposed
in R. Merkelbach, J. Stauber, Steinepigramme aus dem griechischen Osten, Bd. 1,
Berlin, 1998, p. 25, where the editors give the following text: ο Μιδεαλέωνος καὶ
[?Ἀναξ]/αγορέας φίλος υιύς.
38. No names in *-αγόραια are attested.
39. In the mentioned inscription from Astypalaia Ξεναγο-- (or Ξε̄ ναγο--) can conceal a
masculine name, therefore the Theran Ξειναγόρεια remains without a secure -αγόρη-
pendant in the Doric Aegean.
528 marina veksina

local style. As for the names in -πόλε(ι)α and ‑αγόρε(ι)α, the introduc-
tion of the -εια type in some regions within Insular Doric, in particular
in Thera, can represent a reconsideration of the type in -η, whereas other
regions simply adopted the Ionic form in ‑η. What served as a pattern for
this reconsideration—the properly Ionic variation of ‑εια/-η types (cf.
‑κράτη/‑κράτεια), or the associations with the epic diction, or perhaps
the synchronous interchange between word-final /ejja/, /ea/, /ɛ:/ in local
speech—cannot be decided with certainty.
The Calymnian hapax Ἁλιεία, Tit.Cal. 201 (1st c. AD), has been
referred to the Rhodian festival Ἁλίεια by Bechtel. 40 But the exclusively
Coan name Ἁλίη (3 persons, all 2nd c. BC) 41 is unlikely to be a con-
tracted or a short form thereof. Instead, it should be regarded vis-à-vis
the masculine name Ἁλίας attested in Cos (1 ex., ca. 200 BC). Halios is
known to have been worshipped together with Hamera in Cos. 42 Thus
Ἁλίη is either an Ionically or epically coloured form. Notable is in any
case the preservation of the Doric form of the stem.
For the names Ἁβροτίη, Δίη, Ζωβίη, Θευδοσίη, Κλειτοθέη, Μικο-
τέρη, Σιμοτέρη, Φιλίη (see examples in the appendix) extended forms
in -εια or -αια are not attested in the LGPN. An account based on a con-
traction is thus entirely excluded for them. Borrowing from Ionic and
imitation of the epic style are two possibilities that should not possibly
exclude each other. In any case it is the morphological marker that was
adopted, not the names themselves, for most of these Coan names are
never found in the Ionic outfit anywhere outside Cos. One exception is
Ζωβίη which is attested epigraphically (1 ex. in Apollonia-Sozopolis, 4th
c. BC, 1 ex. in Miletos, 3rd c. BC). The other exception concerns names
in -θέη: Μνησιθέη is found twice in Miletos (3rd c. BC and 2nd–1st c.
BC), and Ἀμφιθέη, Λευκοθέη, Εἰδοθέη, Πασιθέη are Homeric names. 43
The domestic counterparts of the trendy names are not usual in Cos. The

40. Bechtel, HPN 523.


41. *Ἁλία is not attested.
42. S. M. Sherwin-White, Ancient Cos: an historical study from the Dorian settlement
to the imperial period, Göttingen, 1978, p. 334 f., 362 f.; a thiasos of Haliastai is
known in Cos, ibid., p. 360 f. Cf. Bechtel, HPN 564–569.
43. Cf. Kamptz, HomPN, p. 100 f.
ionic element in coan onomastics? 529

only direct pendant is Μικοτέρα (1 ex., 2nd c. BC). But Ἀγωνιθέα and
Δωροθέα do not exactly double Κλειτοθέη, which can again represent an
example of selectivity in onomastic morphology.
It could be objected against a possible Ionic influence that, as is well
known, the Ionic dialect was quite early koineised. It is generally stated
that after the end of the fourth century BC only remnants of the dialect
are found in inscriptions. 44 However, onomastics was not so easily sub-
ject to the koineisation and specifically Ionic feminines are common in
Ionic territories long after the 4th c. BC. Thus in LGPN 5a and 5b names
in -ία, -έα, -ρα are far more numerous than those in -ίη, -έη, -ρη, but the
latter make a long list even if only attestations after the 4th c. BC are
included: Ἀγαθανόρη, Ἀπολλωνίη, Ἀρισταγόρη, Ἀρτεμισίη, Ἀσπασίη,
Εὐνοίη, Εὐνομίη, Ζωβίη, ῾Ηγησαγόρη, ῾Ικεσίη, Κλεαγόρη, Κόρρη,
Κυθέρη, Κυπάρη, Μαιανδρίη, Μελίη, Μητραδώρη, Μητροδώρη, Μνη-
σιθέη, Νικαγόρη, Παντιμίη, Τερψιχόρη, Χίη. 45 In the Ionic islands of
the Aegean we find the following names after the 4th c. BC: Ἀρή, Ἀρτε-
μισίη, Ἀσπασίη, Δαλματίη, Δικαίη, Εὐαγόρη, ῾Ηδυλίη, ῾Ημέρη, Ἠπίη,
῞Ηρη, Κλεαγόρη, Κλειναγόρη, Κόρη, Κυπάρη, Λαμπρή, Μνησιδώρη,
Νικαγόρη, Πυθαγόρη, Σατύρη, Σώστρη, Φιλτείη, Φρυγίη. In support of a
possible Ionic influence, it should be noted that occasional interferences
from the Ionic dialect are found in Coan inscriptions, cf. τό τε ἱρὸ[ν]|τᾶς
Ἀφροδίτας 30249 (corpus gives ἱ‹ε›ρό[ν]), ὁ ἱρεύς 32513 (1st c. BC). 46 To
possible instances of Ionic impact on Coan onomastics should be added
the name Μιννίων. 47 But some phenomena are likely to be common areal
developments rather than bare import from East Ionic into Insular Doric:
this is the case of the contraction /eo/ > /eu/ as well as the development
of two non coinciding series of masculines in -ῆς and -έας in Coan and
in Insular Ionic. 48

44. R. Schmitt, Einführung, p. 101; K. Stüber, Zur dialektalen Einheit des Ostionischen,
Innsbruck, 1996, p. 20.
45. Very late examples have been excluded from this list.
46. For scepticism about Ionic influence on Insular Doric, cf. E. Nieto Izquierdo, art.
cit., passim.
47. S. J. Curbera, “Onomastic notes”, in D. Bosnakis Ανέκδοτες επιγραφές της Κω,
Αθήνα, 2008, pp. 193–195.
48. On these names see note 17 above; cf. J. Niehoff-Panagiotidis, Koine und Diglossie,
Wiesbaden, 1994, p. 260 with fn. 35.
530 marina veksina

The phenomenon of epic reminiscences in onomastics is known, 49


although the virtually missing afterlife of homeric feminine names in his-
torical times has been noted. 50 But the fashion for the epically coloured
feminine names will not be surprising for the island where cultural life
and poetic activity flourished, for Cos was the place of birth or resi-
dence not only of many great poets, among them Philitas, known for his
Homeric studies, Theocritus, Herondas, 51 but also of less famous ones
including the two only epigraphically attested poetesses. 52
In the following appendices secure Coan citizen-women are left
unmarked; not quite secure cases or certain non-citizens are marked with
an asterisk*. 53

Appendix 1

Names in -αγόρη: *Ἀρισταγόρη | Ἐρίσιος 5131–2 (end of 3rd c. BC, dedication),


*Ἀρισταγόρη <Ἡ>ρακλείτου 43021 (ca. 200 BC, catalogue), *Ἀρισταγόρη
Ἱέρωνος 4317 (ca. 200 BC, catalogue), *Ἀρισταγόρη [– – – – 43117 (ca. 200 BC,
catalogue), Ἀρισταγόρη (d. of Παρμενίσκος) 9783 (ca. 190–160 BC, honorary
inscr.), Ἀρισταγόρης τᾶς Δορκυλίδα 46152 (ca. 180 BC, catalogue), Κλ[ην]-
αγό|ρης τᾶς Θ̣ε̣[υτιμί]δ̣α 104375f. (ca. 180–175 BC, catalogue), Νικασαγόρης τᾶς
Χαρμύλου 46145 (ca. 180 BC, catalogue)
Ἁλίη: Ἁλί|ης τᾶς Δαμοχάριος 10477f. (ca. 180–175 BC, catalogue) = Ἁλί|ης τᾶς
Δαμοχάριος 10474f. (ca. 180–175 BC, catalogue) = Ἁλίης τᾶς | Δαμοχάριος
104170f. (ca. 180–175 BC, catalogue) = Ἁ]λίης τᾶς Δα[μοχάριος] 46257 (ca. 180

49. Masson, OGS III, p. 226; Kamptz, HomPN, pp. 7–10; N. Kanavou, The Names of
Homeric Heroes: Problems and Interpretations, Berlin, 2015, pp. 156–168. For the
rise of popularity of epic onomastics in hellenistic and imperial periods, cf. ibid.,
p. 167.
50. N. Kanavou, op. cit., p. 165 f., although the formants -κλεια and -μαχη are usual.
51. For an overwiev, see S. M. Sherwin-White, op. cit., pp. 16–19.
52. 837 (3rd–2nd c. BC?), 845 (1st c. AD). As a sign of Coans’ devotion to the literature,
one can mention the foundation of a library at public expense in the early 2nd c. BC,
recorded in 433.
53. All sepulcral monuments have been marked as insecure.
ionic element in coan onomastics? 531

BC, catalogue), Ἁλίης τᾶς Μακαρέως 46129 (ca. 180 BC, catalogue), Ἁλίης
τᾶς | Σωκλεῦς 104470f. (ca. 180–175 BC, catalogue)
Ἀναξιπόλη: Ἀ̣ναξιπόλης 10424 (ca. 180 BC, catalogue), Ἀναξιπόλης 104441 (ca.
180 BC, catalogue), Ἀν[α|ξι]πόλης 462144–5 (ca. 180 BC, catalogue), Ἀναξιπόλη
1631 (2nd c. BC?, funerary stone)

Appendix 2

Ἁβροτίη: *Ἁβροτίη | Σίμου 30148f. (end of 3rd c. BC, catalogue) = *Ἁβροτίη


Σίμου 4318 (ca. 200 BC, catalogue)
Δίη: *Δίη | Διοδότου 1398f. (3rd c. BC, funerary stone, *Δίη | Δίωνος 30150f.
(end of 3rd c. BC, catalogue), *Δίη Ἀχελώιου 43015 (ca. 200 BC, catalogue),
Δίης τᾶς Διογένε[υς] 46246 (ca. 180 BC, catalogue), Δίης τᾶς Ἑκαταίου 104670
(ca. 180–175 BC, catalogue)
Ζωβίη: Ζωβίη | [Ἀ]γλαΐππου 43112f. (ca. 200 BC, catalogue) = Ζωβίης τᾶ[ς] |
[Ἀγ]λαΐππου 462152f. (ca. 180 BC, catalogue)
Θευδοσίη: *Θευδοσίη Θευδώρου 30163 (end of 3rd c. BC, catalogue), Θευδο|σίης
τᾶς Πολυμνάσ|του 104243–245, Θευδοσίης|τᾶς Θευγένευς 104524f., Θευδοσί|[η]ς
τᾶς Ἀπολλοδώρου 104661f. (ca. 180–175 BC, catalogue), *Θευδοσίη | χαῖρε
2171 (2nd c. BC, funerary stele), *Θευδοσίη | Μενίσκου 2194 (2nd–1st c. BC,
funerary stele)
Κλειτοθέη: Κλειτοθέης τᾶς Τι|μασικλεῦς 104120f., Κλειτοθέ[η]ς τᾶς | Ἀριστίππου
10451 (ca. 180–175 BC, catalogue).
Cf. Ἀγωνιθέας 46247, and Ἀ]γ̣ωνιθέας 46258 (c. a. 180 a., catalogue; unclear,
whether the same person), Δωρο/θέᾳ 27984–5 (1st c. BC–1st c. AD, boundary
tomb stone) = Δωρο/θέᾳ 27996–7 (1st c. BC–1st c. AD, boundary tomb stone),
Δωροθέα̣ς 29522 (1st c. BC, tomb stone)
Μικοτέρη: Μικοτέ|ρης τᾶς Σιμία 10456f., Μικοτέρης τᾶς Φιλί[σ]του 104770 (ca.
180–175 BC, catalogue), *Μικοτέρη Νικοστράτ[ου] 12554f. (2nd–1st c. BC,
funerary stone)
Cf. Μικοτέρας τᾶς Ἀριστοφάνευς 46142 (ca. 180 BC catalogue)
Σιμοτέρη: Σιμοτέρης τᾶς Ἀμφιδάμαντος 104236 (ca. 180–175 BC, catalogue),
*Σ]ιμο̣τέρη Νικαγόρα 43114 (ca. 200 BC, catalogue)
Φιλίη: *Φιλίης | τᾶς | Ἀρίστωνος 2319 (2nd–1st c. BC?, funerary stone)
532 marina veksina

Bibliographical references

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Stüber, K., Zur dialektalen Einheit des Ostionischen, Innsbruck, 1996.
Interactions analogiques
dans les flexions des anthroponymes masculins
en -ā- et en -s- à Thasos

Violeta Gomis García


Universidad Autónoma de Madrid

Analogy [specific sense] is the capacity of speakers


to produce meaningful linguistic forms that they may have
never before encountered, based on patterns they discern
across other forms belonging to the same linguistic system.
D. Fertig, Analogy and Morphological Change, Édimbourg, 2013, p. 12.

L
a tendance à la régularisation des langues entraîne un certain
nombre d’interactions entre les paradigmes morphologiques, tant
verbaux que nominaux 1. Et c’est valable notamment pour le grec
ancien. C’est ainsi que dans la flexion athématique des thèmes en sif-
flante, il est habituel qu’en koinè, par exemple, les noms masculins se
déclinent comme les masculins des thèmes en -ā, à cause de l’identité
phonétique du nominatif singulier, qui est en -ης dans les deux para-
digmes (comme Τηλεφάνης qui peut présenter un génitif Τηλεφάνου).
Cependant, on trouve parfois dans les inscriptions de Thasos 2,
quelques attestations du phénomène contraire, c’est-à-dire, des masculins

1. Ce travail a été rendu possible par le projet de recherche FFI2012-35721-C02-01,


financé par le ministère espagnol de l’Économie et de la compétitivité. Je voudrais
remercier les organisateurs du colloque pour leur invitation et, tout particulièrement,
les prof. Araceli Striano et Sophie Minon pour leurs suggestions et commentaires,
ainsi qu’Alcorac Alonso pour l’envoi de ses articles sous presse.
2. Il est nécessaire de rappeler, tout d’abord, que Thasos, île ionienne du Nord de l’Égée,
a été colonisée par les habitants de l’île de Paros, au viie siècle. Il s’ensuit que, à
536 violeta gomis garcía

en -ā déclinés comme des masculins en -s- (cf. les génitifs Φιλονίδεος,


Εὐαγόρεος…). Ce phénomène s’observe uniquement dans les noms
propres et mérite d’être étudié en détail en raison de son caractère peu
fréquent dans le reste des inscriptions du monde grec ; nous verrons alors
si cette particularité morphologique des inscriptions de Thasos est propre
à cette île pendant une période chronologique déterminée ou non, ou s’il
s’agit d’un phénomène lié à un contexte linguistique ou épigraphique
spécifique.

Contextualisation et analyse des données attestées


dans les inscriptions

Ce phénomène est connu depuis longtemps 3. La plupart des gram-


maires des dialectes du grec ancien le mentionnent comme un phéno-
mène analogique propre à l’ionien à cause de la proximité des deux
flexions et caractéristique des anthroponymes, et elles reproduisent sou-
vent les mêmes exemples épigraphiques 4, une liste qui a été notablement
enrichie grâce aux données fournies dans les grammaires consacrées à
un dialecte local ou régional (ionien des îles, eubéen, ionien oriental et
attique) 5. Pour cette raison et dans le but d’observer de manière exhaus-
tive le développement géographique et chronologique de ce phénomène,

l’époque archaïque, l’alphabet et le dialecte locaux de ces îles étaient très proches ;
cependant, il existe de petits particularismes linguistiques qui les distinguent, parce
que ni le contexte, ni l’histoire, ni les contacts ni les influences n’étaient exactement
les mêmes dans les deux îles.
3. Au moins depuis A. Fick, « Die Sprachform der altionischen und altattischen Lyrik
[I] », Beiträge zur Kunde der indogermanischen Sprachen 11 (1886), p.  270. Cf.
A. Alonso, « The dialect of Thasos and the transmission of Archilochus’ fragments »,
dans G. Giannakis, E. Crespo, P. Filos (éd.), Studies in Ancient Greek Dialects. From
Central Greece to the Black Sea, Berlin - New York (à paraître en 2017).
4. F. Bechtel, Die Griechischen Dialekte, III. Der ionische Dialekt, Berlin, 1924, p. 140
(et 97) ; A. Thumb, Handbuch der griechischen Dialekte, Heidelberg, 1909, p. 355 ;
C. D. Buck, The Greek dialects, Chicago, 1955, § 105d.
5. E. Knitl, Die Sprache der ionischen Kykladen nach den inschriftlichen Quellen,
Spire, 1938, § 81 ; P. Hualde Pascual, El dialecto jonio de la Dodecápolis: fonética
y morfología. Estudio intradialectal, Madrid, 1993 (thèse doctorale inédite, UAM),
306 sq. ; L. Threatte, The grammar of Attic inscriptions, II. Morphology, Berlin -
New York, 1996, p. 89, § 51.03125 ; M. L. del Barrio Vega, El dialecto de Eubea,
Madrid, 1987 (thèse doctorale inédite, UCM), p. 337.
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 537

mais aussi son contexte morphologique, et d’évaluer son importance du


point de vue dialectal et linguistique, j’ai fait une recherche systématique
à partir de la base de données en ligne du LGPN 6. De plus, j’ai complété
les données de Thasos avec les exemples des grammaires dialectales qui
font allusion à ce processus morphologique et à l’aide de sondages sur
PHI 7.
Pour présenter ces données de la manière la plus organisée possible
au long du travail on détaillera d’abord le paradigme complet des deux
flexions, pour rappeler le degré de ressemblance entre les deux. Comme
on le verra, le nominatif et le génitif sont les cas les plus attestés dans les
inscriptions, et c’est au génitif que s’observent, à travers les différentes
graphies, les interactions analogiques entre les deux flexions. On révisera
les données pour les deux changements analogiques, dans les deux sens :
des thèmes en -s- aux thèmes en -ā puis des thèmes en -ā, aux thèmes en
-s- (ce qui est précisément le transfert qui nous intéresse ici), d’abord à
Thasos, et ensuite, dans le reste de la Grèce. Ensuite, après avoir révisé
les formes, on essaiera d’interpréter ce phénomène et les contextes lin-
guistiques où il se produit. Avant de conclure, on commentera quelques
formes curieuses, dont l’interprétation difficile rend nécessaire de les
traiter à part.
Du point de vue du sens du transfert analogique, il faut faire une
remarque préliminaire d’ordre terminologique : nous parlerons de « trans-
fert inverse » pour faire référence au phénomène thasien (le changement
rare par lequel les anthroponymes faits sur des thèmes en -ā peuvent se
décliner aussi comme des thèmes en -s-, type gén. Εὐαγόρεος au lieu de
Εὐαγόρεω), par opposition au « transfert habituel » mieux connu dans les

6. Elle présente 4 627 anthroponymes au nominatif (août 2015). Il y a approximative-


ment 1 395 nominatifs en -ης et pour bien classer la forme et le cas qui apparaissait
sur la pierre, j’ai vérifié toutes les publications disponibles. Ensuite, j’ai laissé les
nominatifs à part et je me suis concentrée sur les génitifs (697) après avoir ajouté
quelques noms propres qui, en regardant le texte des inscriptions, n’étaient pas dans
la base de données ni recueillis, avec une entrée séparée, dans la première recherche.
7. J’ai donc laissé de côté les formes reconstruites (sauf celles qui étaient indubitables)
et les inscriptions nouvellement publiées, qui ne sont pas incluses dans ces bases de
données, sauf les données fournies par A. Alonso dans son article sous presse « The
dialect of Thasos and the transmission of Archilochus’ fragments » (op. cit.). Je suis
consciente que quelques exemples ont pu m’échapper.
538 violeta gomis garcía

inscriptions grecques, qui s’est généralisé en koinè (gén. Τηλεφάνου au


lieu de Τελεφάνους).
« Transfert habituel »
Thèmes en -ᾱ Thèmes en -s-
« Transfert inverse »
Thèmes en -ᾱ Thèmes en -s-

1. Motivation morphologique du phénomène :


la convergence des paradigmes

Bien que le phénomène se soit aussi produit dans des dialectes comme
le lesbien, le thessalien ou dans certaines régions doriennes, l’interaction
entre thèmes masculins en -ā et en -s- est directement mise en relation
avec le dialecte ionien-attique où se produit l’évolution de ‑ā à -ē ouvert
(ᾱ > η), qui rend possible la convergence phonétique au nominatif, condi-
tion nécessaire pour que se produise le rapprochement entre les deux
paradigmes.
Thèmes en -ᾱ Thèmes en -s-
NOM -ᾱς > -ης -ης
-εα > η
AC -ᾱν > -ην
-ην #
-ᾱο > -ηο -εος
GEN Ion. -εω Ion.  -ευς
Att. -ου # Att.  -ους

-ᾱι > ηι
Ion. or. -ηι
DAT -ει
Att. + -ηι /-ει
Ion. centr.

Fig. 1. — Graphies prototypiques des dialectes ioniens et attique 8.

Au datif, les formes peuvent être coïncidentes dans plusieurs variétés


d’ionien-attique, à cause du résultat abrégé du premier élément de la
diphtongue des thèmes en -ᾱ. À l’accusatif, l’analogie est très claire après
la contraction de l’hiatus des thèmes en -s- : la terminaison résultante
8. Le dièse (#) est utilisé pour les résultats analogiques.
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 539

n’étant pas sentie comme un vrai accusatif est recaractérisée par l’ad-
dition d’une nasale. Les attestations de datifs et d’accusatifs sont peu
nombreuses à cause de la typologie des documents, qui n’est pas très
variée : les inscriptions, très formulaires, présentent souvent beaucoup
d’anthroponymes qui nous ont été transmis au nominatif, avec le nom du
père au génitif (catalogues, inscriptions funéraires et votives, etc.). De
plus, les deux paradigmes qui nous intéressent ne sont pas représentés
dans tous les cas. Cependant, quand l’accusatif est attesté, il est fréquent
que les exemples des thèmes en -s- présentent la terminaison analo-
gique des thèmes en -ā : -ην ; à Thasos par exemple, on trouve l’anthro-
ponyme Ἀντιγένην 9. Ce transfert habituel est bien attesté dans d’autres
endroits de l’aire ionienne-attique. En revanche, l’analogie ou « transfert
inverse », c’est-à-dire la forme des thèmes en -s- comme terminaison
des thèmes originellement en -ā, n’est jamais attestée à l’accusatif dans
les documents épigraphiques, bien qu’elle apparaisse quelques fois chez
Hérodote, par exemple Λευτυχίδεα (Hdt. VI 65, 73, 85) ou δεσπότεα
(Hdt. I 91) 10.
Le génitif est donc le seul cas où la flexion de chaque paradigme se
distingue clairement, surtout à cause de la désinence athématique qui
présente une sifflante très caractéristique (-εος). C’est pourquoi l’ana-
logie qui se produit à ce cas s’avère la plus intéressante pour notre étude,
puisque la coïncidence phonétique entre les deux flexions dans ce cas ne
va absolument pas de soi 11.

9. IG XII (8) 267, 315-285 a. C. : c’est le seul exemple épigraphique d’accusatif des
thèmes en -s- à Thasos, et il atteste déjà la terminaison analogique des thèmes en -ā.
De même pour Ἑρμοκράτην LGPN 1, Thasos, ive-ve a. C.
10. Cf. F. Bechtel, op. cit., p. 140 ; A. Thumb. op. cit., p. 355 ; P. Chantraine, Morphologie
historique du grec, Paris, 1967, § 46 II.
11. La réalité phonétique qui est derrière ces graphies a été très débattue. Au vu de la
grande quantité de graphies (-ηο, -εω, -ω, -εο, -ευ...) et par conséquent, de l’ap-
parente quantité de réalisations phonétiques différentes possibles (hiatus, diphton-
gaison, avec ou sans synizèse [prononciation monosyllabique], avec métathèse de
quantité vocalique, etc.), plusieurs chercheurs ont consacré beaucoup de pages à
essayer de comprendre le processus phonétique (s’il existe) qui provoque cette mul-
tiplicité de graphies apparemment équivalentes, qui ne sont propres ni à ce contexte
morphologique ni aux dialectes ioniens-attiques. Ainsi : A. Alonso, « Some like it
short? <εο>, <ευ> and <ηυ> for <εω> in Doric », dans A. Panayotou et G. Galdi
(éd.), Ελληνικές διάλεκτοι στον αρχαίο κόσμο. Actes du VIe colloque international
sur les dialectes grecs anciens (sous presse) ; A. Striano, « A propósito de las formas
540 violeta gomis garcía

Le génitif des deux flexions est très bien attesté. On trouve à Thasos
plusieurs graphies pour le génitif des thèmes en -ā et pour les génitifs
des thèmes en -s-. Elles sont éparpillées plus ou moins à travers toutes
les époques, mais la représentation de chacune d’elles n’est, bien sûr, pas
toujours la même.
Graphies attestées dans les inscriptions
Gén. des thèmes en -ā Gén. des thèmes en -s-
(-ηο) -εο -εω -ου -εος -ους
-ευ -ω -ευς
Fig. 2. — Diversité des graphies attestées au génitif à Thasos.

χρηύνται y ἐποικοδομηῦν (χρέωνται y ἐποικοδομέων) procedentes de las laminillas


de Dodona », loc. cit. supra, (sous presse) ; A. Alonso, « Sinizesis y contacto silá-
bico en griego antiguo a propósito de la forma ática βορρᾶς », dans A. Bernabé et
al. (éd.), Presente y futuro de la Lingüística en España. La Sociedad de Lingüística,
30 años después. Actas del II Congreso de la Sociedad Española de Lingüística.
Madrid, 11-15, diciembre 2000, Madrid, 2002, p. 3-10 ; E. Passa, « L’antichità della
grafia EY per EO, EOY nell’epica: a proposito di una recente edizione dell’Iliade »,
Rivista di Filologia e di Istruzione Classica 129 (2001), p.  385-417 ; E.  Crespo,
« El origen de la flexión del tipo de Τυδέος, -έα en Homero », dans Actas del VIII
Congreso Español de Estudios Clásicos, I, Madrid, 1994, p.  87-92 ; J. Méndez
Dosuna, « Metátesis de cantidad en jónico-ático y heracleota », Emerita, revista de
lingüística y filología clásica 61, 1 (1993), p. 95-134 ; P. Hualde, « Hiato /eo/ y dip-
tongo /eu/ en el dialecto jonio de Asia Menor », Minerva. Revista de filología clásica
7 (1993), p. 43-56 ; et déjà auparavant, par exemple, E. Crespo, « La cronología rela-
tiva de la metátesis de cantidad en jónico-ático », Cuadernos de filología clásica 12
(1977), p. 187-219 ou O. Szemerényi, « The genitive singular of masculine -ᾱ-stem
nouns in Greek », Glotta 35 (1956), p.  195-208. — On explique difficilement la
métathèse de quantité de -ηο- à -εω-, puis la contraction en -ω- de certains dialectes ;
en revanche, la diphtongaison de -εο- à -ευ- est bien comprise. Le problème prin-
cipal reste le « saut périlleux » de /eͻː/ à /eo/ (qui suppose l’abrégement vocalique).
Les propositions des chercheurs pour l’interpréter sont variées et contradictoires :
de l’abrégement de l’hiatus long, avec convergence subsidiaire avec /eo/, résultant
d’une prononciation relâchée en certains contextes (cf. A. Striano, op. cit., § 4), à
l’explication par la « perte de syllabicité » de la deuxième voyelle du groupe, et non
la première comme c’est usuel, résultant d’une prononciation monosyllabique de
/eͻː/ en ionien (cf. J. Méndez Dosuna, op. cit., 111 note 30), ou encore par les pres-
sions analogiques interparadigmatiques (cf. P. Hualde, op. cit., p. 54). La question,
on le voit, reste problématique.
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 541

2. Les données de Thasos

a. Distribution des différentes caractéristiques de génitif


dans l’un et l’autre paradigme
À partir de la recherche faite sur l’ensemble du corpus, il apparaît que
les formes les plus usitées à Thasos, avant la généralisation des termi-
naisons contractes de la koinè (-ου et -ους), sont : d’une part, -εω (avec
métathèse de quantité) pour le génitif des thèmes en -ā, d’autre part, les
deux formes sans contraction avec diphtongaison de l’hiatus (‑εος et
-ευς) pour le génitif des thèmes en -s-. Les mêmes graphies se retrouvent
aussi dans les formes analogiques, comme on le verra dans les sections
suivantes.
Pour les génitifs masculins des thèmes en -ā, les formes sans contrac-
tion sont, en général, les plus anciennes et, apparemment, propres
au dialecte thasien. Elles sont présentes dès les premières inscrip-
tions, comme terminaison habituelle à l’époque archaïque à Thasos :
Λεπτινεω, Βρεν­τεω (ca 625-600) 12. Il y a des exemples aussi au ive s.
comme Ἀλ̣εξέω, Λευκαθίδεω Ἀριστέω et même une forme du iiie a. C. :
Ἀλκίδεω ou [Εὐ]αλκίδεω 13. Cependant, à partir du ive s., cette termi-
naison régresse dans les inscriptions. Les formes de génitifs contractes en
12. Il faut tenir compte de la particularité graphique des alphabets épichoriques de Thasos
et de sa métropole Paros,  qui utilisent <Ω> pour /o/ et /oː/ et <Ο> pour /ͻː/, voir
L. H. Jeffery, The Local Scripts of archaic Greece, A study of the origin of the Greek
alphabet and its development from the eighth to the fifth centuries B.C.2, suppl.
A. W. Johnston, Oxford, 1990, p. 37-38. Cette inscription de Thasos est la première
où est attestée la lettre oméga (non dans ces noms), ca 625-600 a. C. (les autres ins-
criptions archaïques de Thasos sont postérieures, de ca 550). Ensuite, on trouve cette
lettre à Paros, ca 600-550 (IG XII (5) 105), près de l’Asie Mineure (Samos), cette
fois pour /ͻː/, ca 600-575 (LSAG 341.02). Au vie s., oméga est un peu mieux
attesté dans d’autres régions de Grèce aussi.
13. Λεπτινεο et Βρεντεο, LSAG 307.61, LGPN 1, Thasos, ca 625-600 a. C. ; Μεγύλλεω,
LGPN 1, Thasos, ca 550-520 a. C. ; Λεαγόρεω, IG XII (8) 274, LGPN 1, Thasos, av.
510 a. C. ; Φιλωνίδεω, LGPN 1, Thasos, m. ve a. C. ; Δεξιάδεω, LGPN 1, Thasos,
ca 410 a. C. ; Ἀλ̣εξέω, SEG XIX 281, 2, LGPN 1, Thasos, ive a. C. ; Λευκαθίδεω,
LGPN 1, Thasos, f. ive a. C. ; Ἀριστέω, LGPN 1, Thasos, 360-330 a. C. ; Ἀλκίδεω ou
[Εὐ]αλκίδεω, BCH 91 (1967), p. 578, no 25, 2, Thasos, iiie a. C. Les formes Μεγύλλεω
(LGPN 1, Thasos, ca 550-520 a. C.), Λεαγόρεω, (IG XII [8] 274, LGPN 1, Thasos,
av. 510 a. C.), Φιλωνίδεω (LGPN 1, Thasos, m. ve a. C.) Δεξιάδεω (LGPN 1, Thasos,
ca 410 a. C.), et encore d’autres avec « transfert inverse », apparaissent dans des
catalogues écrits au ive s. a. C. qui présentent les noms des magistrats thasiens
542 violeta gomis garcía

-ου prennent alors le relais : Παυσανίου, Χαιρέου, Φιλωνίδου, Ἀλ]ε̣ξαν-


δρίδου, Νικάδου, etc. ; elles étaient déjà sporadiquement apparues avant
cette période, ainsi Ἀκίδου (ca 490-460) 14.
Pour les formes locales de génitifs des thèmes en -s-, la distribution
chronologique est presque la même : les formes en -εος (surtout -ευς,
typique du dialecte ionien) sont présentes jusqu’à la fin du iiie s. : Ἀμφι-
κράτεος, Ἐχεκύδεος, Δημοκρίνεος, Τηλεφάνεος, Εἰδομένευς, Λεωφά-
νευς, Κλεογένευς Δημάλκευς, Ἀριστοκράτευς, Π]α[γχά]ρευς 15, etc. Ces
formes coexistent depuis le ive s. avec les formes contractes en -ους (très
fréquentes aussi dans les inscriptions) : Δημοσθένο[υς, Φιλάνθους, Ἐπι-
κράτους, Δημοσθένους 16, et bien sûr, avec des formes analogiques résul-
tant du « transfert habituel », et ceci depuis le ive et surtout le iiie s. :
Ἐπικράτου, Θεοκρίνου, etc. 17
Thèmes en -ā
-εω -ου -εος -ευς -ους autres Total
(Thasos)
Suffixes -έᾱς 10 7 - 1 - - 18
-ίᾱς 1 14 - - - - 15

depuis le vie s. a. C. Nous ne pouvons savoir si le transfert s’était déjà produit à
l’époque où ont vécu ces personnes.
14. Παυσανίου, LGPN 1, Thasos, 390-360 a. C. ; Χαιρέου, IG XII (8) 294, 16, LSAG 1,
Thasos, iiie a. C. ; Φιλωνίδου, IG XII Suppl. p.  162 no  403, LGPN 1, Thasos,
iiie a. C. ; Ἀλ]ε̣ξανδρίδου, IG XII Suppl. p. 160 no 385b, LGPN 1, Thasos, ie a. C. ;
Νικάδου, IG  XII (8) 306, Thasos, f. ier a. C. ; Ἀκίδου (Ἀκί[δας?], Ἀ(λ)κίδης ? cf.
Εὐαλκίδης), LGPN 1, Thasos, ca 490-460 a. C. Le nom Ἀκίδης est un hapax. On
atteste aussi l’anthroponyme Πυλάδου, LGPN 1 (Hp. Epid. iii 17 case ια), Thasos,
ve-ive a. C. Pour ce nom on trouve aussi à Thasos : Πυ]λάδεω, LGPN 1 (Ét. thas. 3,
p. 330 no 125), Thasos, ve-ive a. C., et Πυλάδευς, IG XII (8) 287A, LGPN 1, Thasos,
360-330 a. C.
15. Ἀμφικράτεος, LGPN 1, Thasos, ca 550-520 a. C. ; Ἐχεκύδεος, SEG  XVIII 353,
LGPN 1, Thasos, ca 450 a. C. ; Δημοκρίνεος, LGPN 1, Thasos, ca 390-360 a. C. ;
Τηλεφάνεος, IG XII Suppl. p. 168 no 452, LGPN 1, Thasos, iiie a. C. ; Εἰδομένευς,
IG  XII (8) 273, LGPN 1, Thasos, av. 510 a. C. ; Λεωφάνευς, LGPN 1, Thasos,
f. ve a. C. ; Κλεογένευς, LGPN 1, Thasos, 390-360 a. C. ; Δημάλκευς, IG XII (8) 288,
Thasos, 315-285 a. C. ; Ἀριστοκράτευς, IG XII (8) 286, LGPN 1, Thasos, iiie a .C. ;
Π]α[γχά]ρευς, Ét. thas. 3, p. 279 no 36 III, ca 285-255 a. C.
16. Δημοσθένο[υς, LGPN 1, Thasos, ca 520-490 a. C. ; Φιλάνθους, LGPN 1, 390-360
a. C. ; Ἐπικράτους, IG  XII Suppl. p. 165 no  433, 6, LGPN 1, Thasos, iiie a. C. ;
Δημοσθένους, IG XII (8) 318, LGPN 1, Thasos, ier a. C.-ier p. C.
17. Ἐπικράτου, LGPN 1 (Ét. thas. 3, p. 262 sq. Cat. 1 VII, 22), Thasos, 360-330 a. C. ;
Θεοκρίνου, IG XII (8) 287 B, LGPN 1, Thasos, 315-285 a. C.
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 543

Thèmes en -ā
-εω -ου -εος -ευς -ους autres Total
(Thasos)
-ίνᾱς 1 - - - - - 1
-τᾱς 2 8 - 1 - - 11
-ίδᾱς 31 55 3 16 (3) 2 110
-κλείδᾱς 1 28 - 4 (1) - 34
-άδᾱς 3 14 1 5 - - 23
-αγοράδᾱς 1 7 - 1 - - 9
Lexèmes -αγόρᾱς 19 26 6 8 - - 59
autres 6 17 - - - - 23
Fig. 3. — Liste et distribution des formes thasiennes de génitifs
des thèmes en -ā 18.
Par conséquent, les exemples du « transfert habituel » sont très fré-
quents à partir du ive siècle et durant la période hellénistique, avec la
graphie contracte <ου> typique de la koinè (environ 120 attestations) 19,
tandis que trois seulement sont attestés pendant la période antérieure,
qui présentent alors la graphie sans la contraction dite « attique », <εω>
(avec métathèse de quantité) : Τηλεφάνεω (attesté deux fois, ive siècle)
et Εὐθυκλέω (ive)  20. Inversement, sur les 303 attestations de génitifs de
thèmes originellement en -ā (base de données du LGPN  en ligne), 46
présentent une terminaison analogique caractéristique des thèmes en -s-,
-εος ou -ευς, avec cette fois le « transfert inverse » 21.

18. Dans les cellules « autres » sont inclus des anthroponymes, qui ne font pas partie
de l’essai de classification et, en outre, ne sont pas très significatifs du point de vue
du sujet de l’étude : Βρέντεο, Ἁδίλεω, Παν[θοΐδεω], Βελλύρεω, Σκύ[θεω, Περ[δί]
κκ[ου], Ἀμύντου, Σεύθου, Μύσστου, etc., ou les génitifs Τιμαρχίδα et Χαρίδα (-ᾱς,
-ᾱ). Je présente ici les suffixes sous leur forme prototypique en -ā.
19. Cf. n. 17, et Θαρσυμένου, BCH 86 (1962), 582 no 2 I, 10, ive-iiie a. C. ; Σωσιγένου,
IG XII (8) 335, LGPN 1, Thasos, hell. ; Ἀπολλ[ο]φάνου, IG XII (8) 335, LGPN 1,
Thasos, hell. ; Πολυφείδου, IG XII (8) 306, LGPN 1, Thasos, f. ier a. C. ; Εὐκράτου,
IG XII Suppl. p. 168 no 458, LGPN 1, Thasos, imp. et. al.
20. Τηλεφάνεω, IG XII (8) 273, 4, LGPN 1, Thasos, av. 510 a. C. (document rédigé au
ive s.) ; Τηλεφάνεω, LGPN 1 (Ét. thas. 3, p. 262 sq. cat. 1 VII, 43), Thasos, 360-330
a. C. et Εὐθυκλέω, SEG XVIII 351, LGPN 1, Thasos, ca 315-285 a. C. Α. Alonso,
« The dialect of Thasos and the transmission of Archilochus’ fragments », loc.cit.
(sous presse), fait mention aussi d’un autre exemple : Δ]ημάλκεω (IG XII Suppl.
369.3, Thasos, ca 390-360 a. C.).
21. Ces désinences analogiques sont légèrement ombrées dans la partie centrale de la
fig. 3.
544 violeta gomis garcía

b. Le « transfert inverse »
Les totaux de la dernière colonne de la fig. 3 22 montrent qu’à Thasos
les suffixes anthroponymiques les mieux attestés des thèmes en -ā sont
en -ίδης (144), -άδης (32), -ῆς/-έᾱς (18), ‑ίης/-ίᾱς (15), -της (11) et que
le lexème -αγόρης est, de son côté, fort représenté (59) comme second
élément de composé. En revanche, les suffixes -ίης et -της (gén. -εω) ne
sont presque pas attestés à l’époque archaïque, ce qui explique que la ter-
minaison du génitif soit le plus souvent -ου. Cette terminaison contracte
du génitif est, en général, la mieux attestée à Thasos, à cause du nombre
et de la date des inscriptions, qui sont plus nombreuses aux époques plus
récentes.
Les quelques formes de génitif en -εω à l’époque archaïque sont celles
d’anthroponymes en ‑ίδης (32), -άδης (4), -ῆς (10) et -αγόρης (19) 23.
C’est seulement pour -ίδης, -άδης et -αγόρης que se rencontrent plusieurs
formes analogiques qui présentent le « transfert inverse » (23, 7 et 14 res-
pectivement : chiffres, à mon avis, assez significatifs, en dépit de l’ab-
sence possible de quelques anthroponymes, cf. notes 6 et 7).
La liste des anthroponymes de Thasos qui présentent ce « transfert
inverse » au génitif, visualisée dans l’encadré de la fig. 3, est la suivante :
-άδης : Ἀθηνάδεος, LGPN 1, Thasos, ca 550-520 a. C. ; -]ταδευς,
Ét. thas. 3, 262 sq. Cat. 1 III = BCH Suppl. 5 (1979), 116 III, f. ve a. C. ;
Ἀθηνάδεο[ς, LGPN 1, Thasos, ive a. C. ; Ἀλκιάδευς, LGPN 1, Thasos,
390-360 a. C. ; Τεισιάδ[ευς?, LGPN 1, Thasos, ive a. C. ; Πυλάδευς, IG
XII (8) 287 A et Ét. thas. 3, 272, no 34, ca 345-315 a. C. ; Τεισιάδευς, IG
XII Suppl. p. 153 no 353, LGPN 1, Thasos, ca 285-255 a. C. ; Ἀνταγορά-
δε[υς, IG XII (8) 284, LGPN 1, Thasos, ca 320 a. C.
-ίδης : Εὐαλκίδεος, Ét. thas. 3, 264, no 28 II, ca 460-430 a. C. ; Ληλα-
ντίδεος, LGPN 1, Thasos, ve-ive a. C. ; Ζεφυρίδεος, IG XII (8) 376,
LGPN 1, Thasos, f. ive a. C. ; Ἑκτορίδευς, IG XII Suppl. p. 165, no 431,
LGPN 1, Thasos, m. ive a. C. ; Θρασωνίδευς, SEG XVII 421, LGPN 1,
Thasos, m. ive a. C. ; Ἡγητορίδευς, LGPN 1, Thasos, 360-330 a. C., Θ]
εο[τ]ιμ[ίδε]ος?, Ét. thas. 3, 268 no 30 II, ca 390-360 a. C. ; Θεοτιμίδευς,

22. Sont déjà fournis dans le tableau les totaux concernant, d’une part en -ίδης et
-κλείδης, et d’autre part, ceux en -άδης et -αγοράδης, qui sont traités séparément.
23. On peut observer quelques exemples de cette graphie dans la section antérieure.
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 545

(deux fois) LGPN 1, 360-330 a. C. ; Ἀμφηρίδευς, LGPN 1, Thasos, ca


345-315 a. C. ; Φιλωνίδευς, IG XII Suppl. p. 159, no 379 ; p. 165, no 433,
3, LGPN 1, m. ive-iiie a. C. ; Θρασωνίδευς, LGPN 1, Thasos, ca 315-285
a. C. ; ῾Ηγητορίδευς LGPN 1, Thasos, ca 315-285 a. C. ; Θρασωνίδευς,
IG XII (8) 288, 13, LGPN 1, Thasos, 315-285 a. C. ; Φρασιη[ρ]ίδευς, IG
XII (8) 288, 315-285 a. C. ; Διοσκουρίδευς, LGPN 1, Thasos, 300-270
a. C. ; Ἀγλαΐδευς, IG XII (8) 288, LGPN 1, Thasos, 285-275 a. C. ; Διο-
σκουρίδευς, LGPN 1, Thasos, iie-ier a. C. ; Ἀριστείδευς, Ét. thas. 3, 262
sq. Cat. 1 VII, 360-330 a. C. ; Ὀνομακλείδευς, LGPN 1, Thasos, ve-ive
a. C. ; Μεγακλείδευς, LGPN 1, Thasos, 390-360 a. C. ; Ἀμφικλείδευς,
LGPN 1, Thasos, 360-330 a. C. ; Ἀμφικλείδευς, LGPN 1, Thasos, ca
345-315 a. C.
-αγόρης : Ἰσαγόρεος, LGPN 1, Thasos, ca 430-390 a. C. ; Νικαγό-
ρευς, LGPN 1, Thasos, ve-ive a. C. ; Ἱππαγόρευς, IG XII (8) 279, LGPN
1, Thasos, ve-ive a. C. ; Πυθαγόρευς, LGPN 1, Thasos, 390-360 a. C. ;
Φανα]γόρεος, LGPN 1, Thasos, 390-360 a. C. ; Λυσαγόρευς, LGPN 1,
Thasos, 360-330 a. C. ; Λυσαγόρευς, LGPN 1, Thasos, ive a. C. ; Πυθα-
γόρευς, IG XII (8) 287 A, Thasos, 345-315 a. C. ; Λυσαγόρευς, IG XII
(8) 286, LGPN 1, Thasos, f. iiie a. C. ; Ἀθηναγόρεος, IG XII Suppl. p.
153 no. 353, LGPN 1, Thasos, f. iiie a. C. ; Ἀθηναγόρεος SEG XXXI 799,
LGPN 1, Thasos, hell. ; Λυσαγόρευς, LGPN 1, Thasos, 300-270 a. C. ;
Εὐαγόρεος, IG XII Suppl. p. 165 no 429, LGPN 1, Thasos, ive-iiie a. C. ;
Ἀθηναγόρεος, IG XII Suppl. p. 171 no 486, LGPN 1, Thasos, f. iie a. C.
-ῆς (< -έᾱς) : Δημεῦς LGPN 1, Thasos, 360-330 a. C.
-της : Ἀρότευς LGPN 1, Thasos, ca 315-285 a. C. 24

c. Analyse linguistique
Voici donc les trois types morphologiques illustrés par nos documents :
α) les suffixes désinentiels en -ā, -άδης, -ίδης (et sa variante -είδης),
et le suffixe d’agent -της ;
β) le second élément de composé en -ā, -αγόρης ;
γ) le suffixe désinentiel en -ā masqué par une contraction vocalique,
formateur d’hypocoristiques qu’est -ῆς (< -έᾱς).
24. Pour ce nom voir Bechtel, HPN 519. Également originaire de Thasos, Ἀρότου IG IX
(2) 526, 1, Larissa, av. 196 a. C.
546 violeta gomis garcía

Si le lexique présente peu de composés en -αγόρᾱς, ils sont, en


revanche, très abondamment représentés dans les anthroponymes. Les
formations hypocoristiques en -έᾱς et les dérivés en -άδᾱς ou -ίδᾱς sont,
de leur côté, exclusivement associés aux formations anthroponymiques.
Il paraît donc raisonnable de mettre en rapport le phénomène ici étudié
avec cette catégorie parallèle au lexique.
Les anthroponymes les plus anciens qui attestent le transfert inverse
apparaissent à Thasos au ive siècle (Ἀθηνάδεος, Εὐαλκίδεος...), surtout
dans les catalogues, mais pas seulement (documents privés : inscriptions
funéraires et votives) 25. Apparemment, la généralisation du phénomène
s’est produite au ive siècle (Ἀλκιάδευς, Θρασωνίδευς, Μεγακλείδευς,
Πυθαγόρευς...). Mais à partir de la généralisation du grand attique et de
la koinè, le phénomène commence à régresser, bien qu’on en rencontre
des attestations (peut-être plus artificielles) en quelques autres points
du monde grec, notamment en zone dorienne (cf. 3). À Thasos on en
trouve encore des exemples au long du iiie s. (Τεισιάδευς, Ἀγλαΐδευς,
Λυσαγόρευς, Ἀθηναγόρεος...), le dernier datant du iie où ier s. a.  C. :
Διοσκουρίδευς.
Il apparaît au premier coup d’œil que la désinence la plus fréquente
pour ces formes analogiques est -ευς (surtout aux ive et iiie s.), même si
elle coexiste avec -εος à toutes les époques.
Il mérite enfin d’être signalé qu’à Thasos, les formes analogiques
contractes avec la désinence -ους ne se rencontrent quasiment pas (même
à l’époque hellénistique), mis à part quatre exemples assez tardifs. J’en
laisse de côté trois du ve s. dont l’interprétation est mal assurée : 1o Ἀμφο-
τερείους, attesté seulement à Thasos (quatre fois avec cet anthroponyme,
dont le nominatif devrait être Ἀμφοτερῆς) ; le génitif non analogique est
attesté sous la forme restituée Ἀμφοτερέ[ω]). 2o Διέους ou Διζους, dont
la lecture est très douteuse (un génitif Διζου, d’un nominatif tardif Δίζης
est par ailleurs attesté) ; 3o Μανέους, le génitif probable de l’hypocoris-
tique bien attesté en Grèce : Μάνης 26. Le quatrième, Ἡρακλείδους, n’est
25. Un autre exemple du « transfert inverse » serait Λυκάμβεος (Archil. 38 W), transmis
peut-être par une tradition thasienne, corrigé en Λυκάμβεω dans quelques éditions
du texte du poète parien du viie s. (cf. A. Alonso, « The dialect of Thasos and the
transmission of Archilochus’ fragments » loc. cit. (sous presse)
26. Ἀμφοτερείους, IG XII (8) 307, LGPN 1, Thasos, m. ier a. C. ; Διέους ou Διζους
LGPN 1 (BCH 97 [1973], p.  159, no  11), Thasos, imp. ; Μανέους, IG XII Suppl.
p. 169, no 467, LGPN 1, Thasos, imp.
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 547

problématique qu’à cause de sa chronologie 27. Il est frappant d’observer


des formes de koinè qui présentent ce « transfert inverse », mais nous
allons voir que le phénomène n’est, à cette période, pas propre à Thasos.

3. Les données du reste de la Grèce

Les exemples du « transfert habituel » (du type gén. Σωκράτου au lieu


de Σωκράτους) sont bien sûr nombreux dans l’ensemble du monde grec.
Avec la généralisation de la koinè, cette tendance à l’uniformisation des
deux flexions, déclinées toutes les deux comme des thèmes en -ā, avec
la graphie contracte de l’attique, s’est étendue ailleurs qu’à Thasos. Les
formes les plus anciennes commencent à apparaître à Athènes entre la fin
du ve et le ive s. (Εὐαιτέλου, Ἀντιφάτου, Καλλισθένου, Καλλικράτου) 28.
Mais sont aussi attestées quelques formes plus ou moins contemporaines
en -εω en d’autres terroirs ioniens qu’à Thasos. Se rencontrent ainsi à
Lampsaque l’anthroponyme [Ἀπο]λλοφάνεω (s.d.) et à Milet Δεξικράτεω
(ive-iiie a. C.), et en Eubée (Érétrie), au iiie a. C. , même des formes en
-ω 29 : Τιμοκλέω, Εὐκράτω, Δημοχάρω, Δημωφέλω, etc.
À côté de ces formes, se rencontrent aussi dans le reste de la Grèce,
bien que de manière sporadique, des anthroponymes qui présentent le
« transfert inverse », celui qui s’observe à Thasos de manière plus systé-
matique. Quelques exemples proviennent du nord de l’Égée, en différents
points de la Chalcidique 30 : Καλλιππίδεος, Φιλώνδεος, Ἀντιπατρίδεος
(Aphytis, 351-350 a. C.) ou Ἀντιοχίδευς (Kalindoia, ier p. C.), sur une
longue période ; d’autres, d’Ionie d’Asie Mineure, surtout aux ive et
27. Ἡρακλείδους, LGPN 1 (Ét. thas. 5, p. 225, no 389), Thasos, imp.
28. Cf. L. Threatte, The grammar of Attic inscriptions, II. Morphology, Berlin, 1996,
p. 154-167 (/oː/ en alphabet local).
29. [Ἀπο]λλοφάνεω, SGDI 5624, Lampsaque, s.d. ; Δεξικράτεω, M 123.10, Milet, ive-
iiie a. C. ; Τιμοκλέω, Εὐκράτω, Δημοχάρω, Δημωφέλω, et autres, IG XII 9, 249 B,
Érétrie, iiie a. C.
30. Καλλιππίδεος, Φιλώνδεος, Ἀντιπατρίδεος, SEG 51.795, Macédoine, Aphytis, 351-
350 a. C. ; Ἀντιοχίδευς, SEG  483, Macédoine, Kalindoia 68-98 p. C. ?, et al. De
même, Ἀντιοχίδευς, Meletemata 11, K12, mais le texte de cette inscription n’est pas
bien conservé. Il y a apparemment trois génitifs masculins en -ᾱ, mais les désinences
des trois sont totalement différentes : Ἀπελλᾶ, Ἀντιοχίδευς et Διοσκουρίδου. C’est
un document très tardif. Pour plus d’exemples de Chalcidique au ive s. (Εὐβουλί-
δεος, Ταυριάδεος, Ἡρακλείδεος...), voir A. Alonso, « The dialect of Thasos and the
transmission of Archilochus’ fragments », loc. cit. (sous presse), note 65.
548 violeta gomis garcía

iiie  siècles, de Chios et d’Érythrées (curieusement, des hypocoristiques


en -ῆς) 31: Ἀγγελέος, Ἀπελλέος, Ἀθενεῦς, Νικεῦς (à Chios), Ζηνεῦς,
Ἀναξεῦς (à Erythrées), et un exemple se rencontre aussi à Éphèse, Λεα-
γόρεος, et un autre à Pergame, Ἀπελλέος. Autres exemples, en Eubée :
Λυκίδεο[ς] (Érétrie, iiie a. C.) 32 ; plusieurs, à Athènes (avec la graphie
locale) 33 : Καλλιάδους (334/3 a. C.), Ἀλκιάδους (ca 350 a. C.), Ἀ]πελ-
λοῦς (ier-iie s.), Μανοῦς (ive a. C.), Ποσέoυς (ier-iie s.). Le phénomène
pourrait être même attesté dans quelques inscriptions des Cyclades,
même si les exemples sont restitués et douteux 34. Dans les différentes
régions qui viennent d’être mentionnées, l’interaction entre les para-
digmes est facile à comprendre.
L’explication va moins directement de soi, en revanche, dans le Dodé-
canèse, principalement à Rhodes et vraisemblablement plus sporadique-
ment à Cos (avec un seul exemple, peut-être sous l’influence de Rhodes :
Χαρμίδευς 35). Dans cette zone dorienne (avec maintien de ᾱ), le « trans-
fert inverse » s’observe à une époque plus tardive, à partir du iie siècle

31. Ἀγγελέος, SEG XV 540, Chios, ive a. C. ; Ἀπελλέος, SEG XIX 580 A, I, Chios,
ive a. C. ; Ἀθενεῦς, SEG XIX 580 C, II, Chios, ive a. C. ; Νικεῦς, SEG XIX 578, II,
Chios, iiie p. C. ; Ζηνεῦς, IEK 151, Érythrées, ca 340 a. C. ; Ἀναξεῦς, SEG XXXVII
919, Érythrées, ve / ive a. C. ; Λεαγόρεος, IEph 1442, Éphèse, s.d. ; Ἀπελλέος, OGIS
265, IvP I 5, Pergame, f. ive-m. iiie a. C. (cf. P. Hualde, op. cit.).
32. Λυκίδεο[ς], IG XII Suppl. p. 617, Érétrie, iiie a. C. Un autre exemple se rencontre
sur un verre, mais il pourrait s’agir d’un étranger : Ἀριστείδευς, AE 1913, p. 215-
217, nº 3, Chalcis, s.d., cf. M. L. del Barrio, op. cit., p. 337, 341 et 351.
33. Καλλιάδους, IG  II2, 1156.9, Athènes, 334-333 a. C. ; Ἀλκιάδους, IG  II2, 7277.3,
Athènes, ca 350 a. C. ; Ἀ]πελλοῦς, IG  II2, 6445.3*, Athènes, ier p. C. et IG  II2,
2090.96, Athènes, 165-166 p. C. ; Μανοῦς, IG III (3)109, Athènes, ive a. C. ;
Ποσέoυς, IG II2, 3546.1, Athènes, ca 100 p. C. et IG II2, 1756.22*, Athènes, ca 50
(cf. L. Threatte, op. cit). Il est difficile d’expliquer à Athènes les interactions avec
les hypocoristiques en -έᾱς, compte tenu des restrictions phonétiques (au contact
de ι, ε, ρ) dans l’évolution /a:/>/ε:/ noté η, mais il s’agit ici d’anthroponymes rela-
tivement peu anciens, et l’on peut supposer que, une fois que s’était répandue la
terminaison anthroponymique analogique des thèmes en -s- pour les génitifs des
thèmes en -ā >/ε:/ noté η, elle pouvait ensuite s’étendre analogiquement aux autres
contextes.
34. Μεγακλεί[δεος] IG XII (5) 212, Paros, ive a. C. ; Ἡρακλείδευ[ς, IG XII (5) 542,
Céos, ive a. C.. et Λεπάδευ[ς?, IG XII (5) 542, Céos, s.d. et sans contexte (noms
d’étrangers).
35. Χαρμίδευς, Inscr. di Cos ED 235, Cos, ca 180-170 a. C., cf. BE (1995) 448, SEG
43.548, SEG 50.764.
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 549

a. C., avec notamment la désinence contracte typique de la koinè 36 :


Ἀριαθοῦς, Φαρνακοῦς, noms certes d’origine perse adaptés morphologi-
quement au grec, à côté de Ἀριστείδευς, Ἀπελλεῦς, Μυωνίδευς, Θηρωνί-
δευς, Δ]αμολκεῦς, Ἀπολλωνίδευς, Βασιλείδευς, avec un -ευς qui était
dans cette île la désinence des noms en -s- 37. Il pourrait s’agir, dans ces
formes, d’une résurgence artificielle, d’une forme de maquillage hyper-
dialectal; peut-être les anthroponymes rhodiens en -ους pourraient-ils
s’interpréter à partir de ces interférences entre koinè -ou /dialecte -eu 38,
comme aussi, à Thasos, ῾Ηρακλείδους.
Quoi qu’il en soit, l’apparition d’exemples du « transfert inverse »
sur l’ensemble de la zone ionienne-attique, même sporadiques, apporte
la preuve que ce phénomène, d’une certaine manière attendu, pouvait se
produire dans les deux sens. Selon la zone géographique, l’un des deux
pouvait être très fréquent, mais l’un et l’autre étaient réguliers en ionien-
attique avant que se généralise le « transfert habituel » dans la variante
attique de la koinè.

4. Comparaison entre Thasos et le reste de la Grèce

Les données illustrant le « transfert inverse » montrent que la plu-


part des attestations du reste de la Grèce sont plus tardives que celles
de Thasos. On trouve dans cette île, comme je l’ai déjà mentionné, des
exemples des ive et iiie siècles, où le phénomène semble avoir été plus

36. Ἀριαθοῦς οu Ἀριαραθοῦς, LMV 1596, Rhodos, 130-112 a. C. ; Φαρνακοῦς, LMV
1021, Lindos, 100 p. C. Ἀριστείδευς, LMV 720, Lindos, 27 p. C. et LMV 1988, cf.
L. Martín Vázquez, Las inscripciones rodias, Madrid, 1988 (thèse doctorale inédite,
UCM), et ajouter (à partir du PHI) : Ἀπελλεῦς, Lindos II 151, Lindos, ca 197 a. C. ;
Μυωνίδευς, IG XII (1) 854, Lindos, s.d. ; Θηρωνίδευς, Lindos II 346, Lindos, 43
a. C. ; Ἀριστείδευς, Lindos II 378, Lindos, 27 a. C. ; Δ]αμολκεῦς, Ἀπολλωνίδευς,
N. Supp Epig. Rodio 154, Rhodos, ca 100-70 a. C. ; Βασιλείδευς, IG XII (1) 850,
Lindos, f. ier a. C.-ier p. C., IG XII (1) 201, Rhodos, ier a. C./.?, et al.
37. Voir par exemple C. D. Buck, The Greek dialects, Chicago, 1955, § 108.
38. Cf. note 36. À Rhodes, en zone dorienne comme en zone ionienne micrasiatique, le
locuteur aurait eu à sa disposition plusieurs possibilités d’associations morpholo-
giques : 1. Les formes dialectales anciennes sans contraction, avec leurs différentes
graphies ; 2. L’interaction entre paradigmes des thèmes en -ā et en -s- en koinè, dans
les anthroponymes, d’où la variété de désinences possibles au génitif d’un même
nominatif en -ης : -ίδεω, -ίδου, -ίδους, -ίδεος, -ίδευς, et aussi -ίδεο et -ίδευ, cf. 5.
550 violeta gomis garcía

fréquent 39, y compris dans d’autres zones ioniennes, comme Chios. Il


est donc probable que Thasos ait été le centre de ce développement, qui
serait devenu un trait linguistique spécifique de son dialecte. Les îles sont
des territoires particuliers, qui, du fait de leur isolement, peuvent avoir
une dynamique propre susceptible d’entraîner l’apparition de processus
linguistiques spécifiques 40.
Les attestations thasiennes permettent d’observer le caractère condi-
tionné de ce transfert. La convergence phonétique au moins au nomi-
natif entre les noms masculins des deux paradigmes en a été le préalable
nécessaire. Le transfert s’est d’abord produit lorsque le suffixe flexionnel
était précédé d’une consonne (-ίδης, -αγόρης) ; ensuite, après la contrac-
tion des hiatus en ionien dans ce contexte, il s’est étendu aux anciens
suffixés en -έᾱς 41. Le phénomène est limité aux anthroponymes, dont on
connaît la spécificité linguistique par rapport au lexique 42.
La productivité du phénomène a été longue : les derniers exemples
thasiens datent du iie-ier a. C. (Διοσκουρίδευς) et sont même un peu pos-
térieurs ailleurs : ier-iie p. C. (à Athènes). À partir du moment où la koinè
a été pleinement établie en Grèce, le « transfert inverse » paraît avoir
connu une résurgence (assez artificielle) en zone rhodienne. Ces formes,
avec quelques exemples tardifs de Thasos (comme ῾Ηρακλείδους) ou plus
anciens d’Athènes (comme Ἀ]πελλοῦς), qui sont difficiles à comprendre,
me font penser que les locuteurs disposaient de plusieurs terminaisons
39. La documentation épigraphique à cette époque est aussi plus nombreuse et, de plus,
de nombreux catalogues offrent beaucoup d’anthroponymes.
40. Cf. C. Díaz Alayón, « Los estudios del español de Canarias », Thesaurus 45, 1
(1990), p. 32.
41. Il faut noter le relatif retard dans cette île dans la contraction des voyelles en
hiatus, ou du moins dans sa répercussion graphique : l’hiatus se maintient en effet
longtemps graphiquement, par exemple, à la désinence du génitif des thèmes en
-s- (-εος), au moins dans certains anthroponymes de l’île, alors qu’il est vraisem-
blable que le correspondant phonétique était en tous contextes /eu/ (comparer avec,
en espagnol, mutatis mutandis, l’orthographe flottante des prénoms Leyre / Leire,
Evelyn / Evelin ou Xavi / Xabi, par exemple). Les premiers exemples de la contrac-
tion de l’hiatus au nominatif (-ῆς) datent, quant à eux, au moins du ve siècle. Il est
difficile de comprendre pourquoi, à Thasos, il n’y a presque pas de formes analo-
giques des anthroponymes hypocoristiques en -έᾱς, alors que, par exemple à Chios,
Érythrées ou Athènes, les formes de ce « transfert inverse » sont plus fréquentes.
42. Cf. A. Striano, « Aspectos de comportamiento lingüístico de los nombres propios:
el ejemplo del griego antiguo », dans A. Martínez Fernández et al. (éd.), Agalma:
ofrenda desde la Filología clásica a Manuel García Teijeiro, Valladolid, 2014,
p. 303-311.
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 551

différentes, certaines de coloration plus exotique (car déjà disparues ou


en voie de disparition) que d’autres, et qu’ils interprétaient les formes
analogiques comme formations réanalysées et possibles du point de vue
de la langue, associées initialement à quelques suffixes anthropony-
miques particuliers, puis utilisées avec moins de restrictions 43.
« Transfert inverse » et « transfert habituel », l’un ou l’autre plus ou
moins fréquents selon la zone géographique, sont les deux manifesta-
tions complémentaires du même phénomène d’analogie. La généralisa-
tion d’une terminaison ou de l’autre à l’époque hellénistique semble le
fruit d’un hasard régi par des facteurs qui nous demeurent opaques. La
flexion des thèmes en -s- par analogie des thèmes en -ā était plus fré-
quente que le transfert des thèmes en -ā aux thèmes en -s- dans le dia-
lecte qui était à la base de la formation de la koinè, le nouveau standard
de communication.

5. Une question subsidiaire : <εo> ou <ευ> au génitif


des anthroponymes masculins en -ā
en Ionie micrasiatique

Hualde 44 attire l’attention sur quelques formes ioniennes d’Asie


Mineure qui présentent une graphie <εo> ou <ευ> au génitif masculin
singulier des thèmes en -ā (étymologiquement en -ᾱο > ion.-att. ‑εω) :

43. L. Threatte (op. cit., 154-167) signale que le « transfert habituel » à Athènes appar-
tenait au langage familier ou parlé, mais qu’à l’écrit, on faisait un effort conscient
pour maintenir la forme grammaticalement correcte. Il en est bien sûr de même dans
le cas du « transfert inverse ».
44. P. Hualde, « Hiato /eo/ y diptongo /eu/ en el dialecto jonio de Asia Menor », Minerva:
Revista de filología clásica, 7 (1993), p. 53-54 ; El dialecto jonio de la Dodecápolis:
fonética y morfología. Estudio intradialectal, Madrid, 1993 (thèse doctorale inédite,
UAM), p. 306 sq. et 290 sq. et « Algunos problemas de morfología del jonio: rela-
ciones interparadigmáticas en la flexión nominal », Cuadernos de filología clásica:
estudios griegos e indoeuropeos 7 (1997), p. 173-175. L’auteur commente aussi les
exemples de Rhegion et deux formes des Cyclades. Pour ces derniers anthroponymes
il faut être prudent : Λαμπσαγορεο, IG XII (7) 141 (Amorgos) et Επικρατ[.]ο Acme
52, 1 (1989), p. 5-8 (Naxos) sont du ve s. et l’alphabet de cette époque n’est pas
encore tout à fait fixé en ce qui concerne la notation des voyelles longues. Il est donc
difficile de savoir quelle forme précise est attestée : -ηο, -εω ou -εο ?
552 violeta gomis garcía

a) désinence des thèmes en -ā en -εo : Παμφαίεο, IPr. 369.1, Thèbes


près de Mikalè : 550-540 a. C. 45 ; -]οτέλεο, IEK 153.15, Érythrées,
400-350 a. C.
b) désinence des thèmes en -ā en -ευ (alphabet local) : à Érythrées,
Χαλκίδευ, IEK 1.2, ve-ive a. C. ; Ἀρ]χηγετευ, IEK151.36, ive a. C. ;
Πανκρατίδευ, IEK 155.8, ive a. C. ; Φύλευ, IEK 562, ive a. C. ;
Ἀρίστευ, IEK 201 a. 21.25.37, 300-260 a. C., IEK 61, 1, IEK 26.1,
iiie a. C. ; Ἀπολλωνιδευ, Εὐκλειδευ, SEG 37.917, ve-ive a. C. ;
Ἀθήνευ, BMC Ionia 136, n.163, 200-133 a. C., et al. ; à Smyrne,
Πύθευ, Θάλευ, ISm. 687.25/26, iiie a. C.
c) désinence des thèmes en -s- en -ευ: Ἀριστομένευ, IEK 153.15,
ive a. C. ; Ἀστυκράτευ, I 201 A. 48, 300-260 a. C. ; Ἰητροφάνευ, I
161.22, 400-350 a. C.
Elle interprète ces formes en -εο (ou -ευ selon la graphie du dialecte)
dans le cadre du changement analogique, comme un croisement entre les
terminaisons originelles en -εω et les formes analogiques en -εος étant
donné que le résultat dialectal au génitif est /e+ͻː/ > /ͻː/, et non /eo/ ni la
forme diphtonguée /eu/ qui est selon elle impossible phonétiquement 46.
Il s’agit de formes toutes d’époque dialectale.
M. L. del Barrio présente le même type d’explication pour les formes
de Rhégion (colonie eubéenne), Λυκκίδεο (ca 425 a. C.) et Ἐμμενίδευ
(474-450 a. C.), en évoquant l’influence possible d’une île de dialecte
ionien, en particulier dans le cas de l’anse d’amphore qui porte le nom
de Ἐμμενίδης 47.
Les données de Thasos permettent d’ajouter quelques exemples : on
relève ainsi Λεωνίδευ 48 (ive a. C.), le seul exemple de cette île qui pré-
sente au génitif singulier cette graphie diphtonguée propre à l’ionien,
en face de Λεωνίδευς ou Λεωνίδεω, tous les deux fréquents. Comme ce
témoignage est unique, ce pourrait être un nom voyageur, qui viendrait

45. Le nom propre Παμφαίης, selon LGPN, est seulement attesté à Thasos. Voir Bechtel,
HPN 435.
46. Cf. note 11.
47. Λυκκίδεο, SGDI 5277b, Rhegion, ca 425 a. C. ; Ἐμμενίδευ, SGDI 5278, no  3,
Rhegion, 474-450 a. C. Cf. M. L. del Barrio, El dialecto de Eubea, Madrid, 1987
(thèse doctorale inédite, UCM), p. 337.
48. SEG XXXI 782, LGPN 1, Thasos, ive a. C.
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 553

d’Asie Mineure, par exemple. Le génitif Σοκράτευ 49 du ive s. (pour cette


fois un thème en -s-) pourrait s’interpréter de même.
Dans ce jeu d’analogies entre paradigmes, à Thasos et ailleurs dans
la zone ionienne, cette interprétation semble plausible ; néanmoins elle
paraît un peu insuffisante et laisse plusieurs questions sans réponse. Ainsi
à Thasos, le cas de Φιλ]ωνίδεω{ς}(époque hellénistique)  50, seul exemple
de la graphie <εως> au génitif des thèmes masculins en -ā, avec un sigma
gênant pour l’éditeur du texte qui a préféré l’éliminer, alors qu’il pourrait
s’agir d’une graphie artificielle ou hypercorrecte, analogue à Λεωνίδευ,
d’une forme de génitif qui pouvait s’écrire (et se décliner) à Thasos de
deux manières différentes (Φιλωνίδεω ou Φιλωνίδεος). L’absence de
données suffisantes ne permet certes pas d’affirmer que les graphies
-εο(ς),-ευ(ς) comme -εω(ς) recouvraient à Thasos une réalité phonétique
presque identique, mais sans aucun doute, les formes Λεωνίδευ et Φιλ]ω-­
νίδεως doivent être prises en compte dans l’étude de notre phénomène.
On sait que les étourderies des lapicides nous offrent parfois des informa-
tions dignes d’étude, en révélant des tendances phonétiques de la langue
parlée qui, sans eux, n’auraient eu aucune chance de parvenir à notre
connaissance.

Conclusion

On constate, grâce aux données fournies par les inscriptions, que le


mécanisme d’échanges entre thèmes en -ā et thèmes en -s- était bidirec-
tionnel, qu’il est tôt attesté, et sur une zone qui s’étend même au-delà du
domaine proprement ionien, à l’époque de la koinè, où il touche aussi
la région de Rhodes : la standardisation linguistique est responsable de
la généralisation de tels échanges. Ce phénomène est caractéristique du
domaine ionien-attique, où s’est produite l’évolution /a:/ > /ε:/ noté η,
ainsi que la contraction ionienne des hiatus (-/éa:s/ > ‑/ε:s/), qui sus-
cite la convergence phonétique au nominatif singulier, point de départ de
ces transferts. Au fil du temps, les restrictions (phonétiques et morpho-
logiques) associées deviennent plus flexibles et le champ d’action, plus
large.
49. À partir de A. Alonso, « The dialect of Thasos and the transmission of Archilochus’
fragments », loc. cit. (sous presse).
50. IG XII (8) 331, BCH 91 (1967) 21, Thasos, hell.
554 violeta gomis garcía

En ce qui concerne le changement analogique plus rare ou « transfert


inverse », par lequel les thèmes de substantifs en -ā peuvent se trouver
fléchis comme des thèmes en -s-, notamment au génitif, la documentation
disponible indique qu’il ne concerne que les anthroponymes, et seulement
parmi eux, quelques suffixés ainsi que les composés à second élément
-αγόρης. Le ive siècle semble avoir été partout la plus grande période de
productivité de ce transfert, même s’il est vrai que c’est la période pour
laquelle nous avons le plus de données. C’est à Thasos que dès l’époque
la plus ancienne, le phénomène a connu un développement et un enra-
cinement plus important qu’ailleurs, jusqu’à devenir peut-être un trait
dialectal caractéristique des locuteurs de cette zone, peut-être issu de la
langue orale.

Références bibliographiques

Alonso Déniz, A., « The dialect of Thasos and the transmission of Archilo-
chus’ fragments », dans G. Giannakis et al. (éd.), Proceedings of the Inter-
national Conference on Ancient Greek Dialects. The Linguistic Map of
Central and Northern Greece in Antiquity (sous presse).
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556 violeta gomis garcía

Synopsis de la distribution géographique et chronologique


des graphies

Tableau 1

Génitifs analogiques des thèmes en -ᾱ


(« transfert inverse », type Εὐαγόρεος)
s.
Total -εος -ευς -ους
a. C.
vie 1 Thasos : 1 – –
vie/ve – – – –
ve 4 Thasos : 2 Thasos : 2 –
Thasos : 3
ve/ive 5 Thasos : 1 A. Mineure : 1 –
(Érythrées)
Thasos : 4
Thasos : 20
Chalcidique : > 5
(Cyclades) : 1 (Céos)
ive > 38 (Aphytis) Athènes : 3
A. Mineure : 2 (Chios)
A. Mineure : 2
1 (Érythrées)
(Chios)
Thasos : 1
ive/iiie 10 A. Mineure : 1 Thasos : 8 –
(Pergame)
Thasos : 1
iiie 5 Thasos : 3 –
Eubée : 1 (Érétrie)
iiie/iie – – – –
hell. 1 Thasos : 1 – –
A. Mineure : 1
s.d. 1 – –
(Éphèse)
Thasos : 1 a. C.)
(iie-ier
Dodécanèse : 1 (Cos, iie
Thasos : 1 (imp.)
à a. C.)
Thasos : 1 (iie Dodécanèse : 2
partir > 19 > 10 (Rhodes, iie a. C.-
a. C.) (Rhodes, ier-iie p. C.)
du iie iie p. C.)
Athènes : 2 (iie p. C.)
Chalcidique : 1
(Kalindoia, ier p. C.)
noms propres en -ā- et en -s- à thasos 557

Tableau 2

Génitifs des thèmes en -ᾱ (et en -s-)


avec une terminaison problématique a
s. a. C. -εως -ευ
-εο
thèmes en thèmes en -ᾱ (thèmes en -s-)
thèmes en -ᾱ
-ᾱ
A. Mineure : 1
vie – (Thèbes près – –
de Mikalè)
vie/ve – – – –
A. Mineure : 1
(Erythrées)
ve – – –
Eubée : 1
(Rhegium)
A. Mineure : 3
(Érythrées) A. Mineure : 1
ve/ive – –
Eubée : 1 (Érythrées)
(Rhegium)
Thasos : 1
Thasos : 1
A. Mineure : 2
ive – – A. Mineure : 2
(Érythrées)
(Érythrées)
A. Mineure : A. Mineure : 1
ive/iiie – –
1 (Érythrées) (Érythrées)
A. Mineure :
iiie – – 2 (Érythrées) –
1 (Smyrne)
A. Mineure :
iiie/iie – – –
1 (Érythrées)
hell. Thasos : 1 – – –
s.d. – – – –
à partir
– – – –
du iie
a.  Il existe plus d’exemples à Érythrées : seuls sont ici inclus ceux qui sont mentionnés dans ce tra-
vail.
Sémantique des suffixes : connotations
patronymiques, le cas de la Thessalie

Richard Bouchon
Université Lyon 2, HISOMA (UMR 5189)

Bruno Helly
CNRS, HISOMA (UMR 5189)

I
l est bien connu que dans un groupe social le choix des noms pour
désigner chaque individu peut conduire à générer des homonymies
parfois nombreuses et faire difficulté 1. Les communautés des cités
thessaliennes dans l’Antiquité ont été confrontées, comme beaucoup
d’autres, à ce problème, d’autant plus fréquent qu’à l’époque classique
il semble que l’on désignait les personnes par un nom seul, comme on
le constate sur les abondantes séries d’épitaphes d’époque classique à
Larissa ou à Atrax. Ce à quoi l’on attachait, semble-t-il, la signification
la plus forte était l’appartenance à un ensemble familial dont tous les
membres étaient identifiés par un nom gentilice : ainsi Aleuas de Larissa
dit le Roux était-il d’abord un membre des Aleuadai, comme Ménon de
Pharsale était un des Ménonidai et Scopas de Crannon un des Scopadai 2.
Nous ignorons le plus souvent quel était le nom du père de chacun de ces
personnages, nous savons seulement que le souci de maintenir ce nom
se manifestait soit par la répétition du même nom d’une génération sur
l’autre, soit par le principe dit de papponymie, par lequel on attribuait au
fils, en général premier né, le nom de son grand-père paternel 3.

1. Cf. Dobias-Dubois, Intr., p. i-xvi.


2. Sur ces noms gentilices en Thessalie, cf. B. Helly, « La Thessalie des “siècles
obscurs” : un essai d’interprétation historique », dans Mélanges en l’honneur de
Madame Fanoula Dakoronia, à paraître.
3. Voir déjà sur ce point, dans l’introduction à ce volume même, I. Suffixation vs suf-
fixes ou « la vie des suffixes », p. 11-18.
560 richard bouchon – bruno helly

C’est dans le cours du ive a. C. que s’est généralisée dans les cités
thessaliennes la pratique d’associer explicitement, dans les documents
épigraphiques, au nom d’une personne, homme ou femme, celui de son
père. La référence patronymique qui s’est alors imposée dans le parler
des communautés thessaliennes a pris la forme d’un adjectif dérivé, dit
patronymique, formé avec les morphèmes -ιος, -ειος, -αιος, qui s’est
développé concurremment au suffixe qui marquait déjà l’appartenance
gentilice -ίδης / -ίδας, ou encore -ιάδης, -άδης. Ce n’est qu’avec la dispa-
rition du dialecte que s’est répandu en Thessalie l’usage du génitif adno-
minal pour le nom du père, plus rarement celui de la mère, et c’est plus
tard encore, sauf exception, que l’on y trouve les formules lexicales ὁ
νεώτερος, πρεσβύτερος, δίς, etc. ou d’autres suffixes, d’origine latine,
dont nous parlerons à la fin de cette étude.

1. L’emploi du suffixe -αιος, -ειος en thessalien

Ce suffixe est utilisé de manière très extensive en thessalien. Il sert


d’abord à exprimer l’appartenance, la possession, comme équivalent
d’un nom au génitif : θηκαία Αὐτονοεία (SEG 33, 472) fin ve-début ive s.
pour une épitaphe de Kiérion. Ces adjectifs en -αιος, -ειος sont donc
d’abord des adjectifs « ctétiques. » C’est ce qui explique l’emploi de ce
suffixe dans l’expression de la filiation, p. ex. Μένουν Ἀντιλάειος (SEG
45, 622) sur le nom Ἀντίλαος, etc. Ces mêmes formes sont juxtaposées
dans nombre de textes pour servir à l’expression de la possession et de
la filiation : un bel exemple est l’inscription gravée sur le cratère de Der-
véni Ἀστιούνειος Ἀναξαγοραίοι ἐς Λαρίσας Possession d’Astiôn, fils
d’Anaxagoras de Larissa (SEG 24, 571, ive a. C.), mais on la trouve dans
de nombreux textes dialectaux du iiie et du iie a. C., ainsi à Scotoussa τοῦ
κάπου Δαιμονείου τοῖ Πλειστοξενείοι, ou dans les déclarations d’affran-
chissement en dialecte (Larissa et Phères uniquement) du type Ἱλάρα
Ἀφθονειτεία ἁ φαμένα ἀπειλευθερούσθειν ἀπὸ Ἀφθονείτοι Λυσανιαίοι
τὸς γινομένος τᾶ πόλι κὰτ τὸν νόμον ἀργυρίοι στατεῖρας δεκαπέμπε (IG
IX 2, 553 ; 140-120 a. C.).
Dans l’expression de la paternité, les exceptions à l’emploi de l’ad-
jectif patronymique en ‑(α)ιος, ‑(ε)ιος s’expliquent par des situations
particulières. On a ainsi au ve s. les emplois de ὑιός ou de παῖς avec
le génitif du nom du père dans le décret de Téthonion pour Sotairos,
patronymiques, le cas de la thessalie 561

Ὀρέσσταο Φερεκράτε(ο)ς… Φιλονίκο hυιός (IG IX 2, 257), et encore


dans des dédicaces ou des épigrammes : dans l’épigramme pour Théo-
timos fils de Ménullos d’Atrax ὦ Θεότιμε Μενύλλου παῖ (SEG 34, 560) ;
au ive a. C. dans la dédicace de Métropolis Πειθόλα Φαρακίδα κύνα
Ἄπλουνι (SEG 52, 562), pour l’offrande d’une statue de chien dans le
temple d’Apollon Hékatombios ; ou encore au début du iie a. C. Πατρο-
κλέα τοῖ Ἀστοκλέα παιδός dans le décret de Larissa pour un Mamertin 4,
sans doute pour indiquer la classe d’âge du jeune Patrokléas, enlevé par
des soldats romains et réduit en esclavage pendant la Troisième guerre
de Macédoine.
En thessalien, on peut ajouter -ιος à tous les types d’anthroponymes,
y compris ceux qui sont en -δας, ce qui n’est pas le cas en Béotie 5 : on
trouve ainsi à Larissa Σατύρα Ϝασανδριδ[αία] (IG IX 2, 1227, liste de
noms de femmes datée du ive-iiie a. C.), ou Κλεομαχίδας Ἀτρεστίδαιος
(SEG 31, 577, l. 3, ca 136 a. C.), etc. En revanche l’adjectif en -(α / ε)ιος
n’est jamais substantivé pour désigner le groupe familial, à la manière
des formes gentilices en -άδας ou -ίδας, ou des formes du nomen latin,
avec dérivation ou non, mais, comme ailleurs en grec, -αῖος est utilisé
dans la fabrication d’anthroponymes, soit sur des noms de divinités ou
des épiclèses divines : Πετραῖος épiclèse de Poséidon, soit sur des subs-
tantifs abstraits ou des adjectifs dérivés comme Κρατεραῖος fréquent en
Pélasgiotide et Perrhébie sur κρατερός, ou encore Πτολεμαῖος, etc. et sur
des ethniques : Ἱστιαῖος, etc.
On trouve d’autre part quelques cas de dérivés en -αιος devenus idio-
nymes dont on ne peut reconstruire avec certitude sur quel modèle ils ont
été formés. Pour le nom Ἀσσαῖος connu à Pharsale dans IG IX 2, 234,
l. 39-40 de la fin du iiie a. C., et à Thèbes de Phthiotide dans IG IX (2)
109 a, 20, παρὰ Φίλωνος τοῦ Ἀσσαίου τοῦ ἀπελευθερωθέντος ἀπὸ…
que l’on date de ca 47 a. C. 6, on peut se demander s’il est dérivé de
Ἀσίας, nom courant en Thessalie, Ἀσσ-αῖος résultant de la palatalisation

4. A. Tziafalias, J. L. García Ramón et B. Helly, « Décrets inédits de Larissa. 2 », BCH
130 (2006), p. 436-438, l. 43.
5. Cf. G.  Vottéro, « L’expression de la filiation en béotien », dans Actes Pont-à-
Mousson, p. 217.
6. Cf. C. Habicht, « Beiträge zur Prosopographie der altgriechischen Welt. 8. Eine
Urkunde des phthiotischen Theben », Chiron 2 (1972) p. 118-120, pour l’attribution
et la date.
562 richard bouchon – bruno helly

et du redoublement de la consonne après semi-vocalisation de [i] > [j] 7,


ou, ce qui nous semble moins probable, d’un nom Ἄσσας dont on a une
attestation en Asie Mineure, Ἄσσ̣α̣ς père de Κενδας, à Limyra, datée du
ive-iiie a. C. 8 Un autre cas ambigu est celui du nom Ἀρναῖος qui sert de
patronyme à un Κλεομαχίδας Ἀρναίειος à Larissa, nom et patronyme
d’un stratège de la confédération vers 170 a. C. 9 S’agit-il d’un dérivé
de l’ethnique Ἄρνη, comme le pensait F. Bechtel, ou faut-il le rattacher
à ἀρναία et aux noms Ἀρνίας, Ἀρνείας et Ϝαρνείας ? Selon G. Vottéro 10,
« pour ces noms en Béotie et en Thessalie, il y a concurrence entre ϝαρήν
« agneau » et Ἄρνη ville de Béotie… On peut considérer soit qu’il y a
deux radicaux différents, celui de Ϝαρήν et celui de Arnè, la cité thes-
salienne ou béotienne ; les deux sont peut-être apparentés, mais on ne
connaît pas la forme béotienne du nom de la cité » qui pourrait garantir
le digamma dans le toponyme.

2. L’emploi des suffixes -άδας et -ίδας en thessalien

Comme nous l’avons dit, les suffixes -δας, -άδας et -ίδας sont large-
ment utilisés en thessalien principalement pour des noms collectifs dési-
gnant des « unités sociales ». Il s’agit de familles, γένος, telles que les
Aleuadai à Larissa, Skopadai à Crannon, etc. On en a un bon exemple
avec la mention, dans le décret de Larissa sur la vente des lots cava-
liers 11, des Ἀγαθοκλεάδαι de Larissa à la fin du iiie a. C., une famille
déjà connue au ve a. C., par une épinicie de Bacchylide, εὐδόξων Ἀγα-
θοκλεαδᾶν ἅτ’ ἀφνεῶν ἀνδρῶν, Epin. XIV, 1-3, ou les Κελαίνδαι à Atrax
7. Cf. J. L. García Ramón, « Geografía intradialectal tesalia: La fonética », dans Actes
de la première rencontre internationale de dialectologie grecque, Nancy, 1987
(Verbum 10), p. 136 : Αἰννα̣ῖον IG IX 2, ad 205, l. 13 et 14, arbitrage Mélitaia -
Péreia, fin iiie a. C., de Αἰνιαῖος par haplographie à partir de *Αἰνιαναῖος.
8. Cf. M. Wörrle, « Die griechischen Sepulkralinschriften von Limyra », dans J. Bor-
chardt et A. Pekridou-Gorecki (éd.) Limyra. Studien zu Kunst und Epigraphik in den
Nekropolen der Antike, Vienne, 2012, nº 34.
9. T. D. Axenidis, Η Πελασγίς Λάρισα, Athènes, 1948, vol. 2, p. 50, 2 ; H. Kramolisch,
Die Strategen des thessalischen Bundes vom Jahr 196 v. Chr. bis zum Ausgang der
römischen Republik, Bonn, 1978, p. 53 n. 67.
10. G. Vottéro, « Milieu naturel, littérature et anthroponymie en Béotie à l’époque dia-
lectale (viie-iie a. C.) », dans Dialectologica Graeca, p. 364.
11. A. Tziafalias et B. Helly, « Décrets inédits de Larissa organisant la vente de terres
publiques attribuées aux cavaliers », Topoi 18.1 (2013), p. 135-249.
patronymiques, le cas de la thessalie 563

explicitement désignés comme un γένος (I.Atrax, no 1, l. 6-7). Mais ces


formes peuvent désigner aussi des syngeneiai, comme celle des Basaidai
à Métropolis, etc., ou une unité appelée taga, à Larissa τᾶς Ἀγαθοκλεα-
δαίας ταγᾶς, ou encore des tribus, ainsi à Larissa, εἵλετο δὲ Ἀντιλαιδᾶν
(SEG 29, 530, l. 1) 12, ou à Atrax, Βουλεπαρίδας, Εὐμενίδας, Ὁδαίδας,
[Φυλού]νδας, Αὐρογιούνδας, Δαμούνδας, Κονθίδας, Ἀθαναίδας, Ἁγει-
μούνδας, Ῥινυούνδας, Ὀροβίδας (I. Atrax, no 1).
On trouve aussi l’emploi de ces formes dérivées de noms de groupes
familiaux ou civiques pour des noms de lieux. À Larissa, une dédicace
est faite Δὶ Ὁμολουίου | Ἀνδραγαθίδαι| οἱ ἐν Κυλλιάδαις (SEG 35, 608),
une section du cadastre 13 est appelée Ὀρτάδα Βοᾶτι (deux datifs singu-
liers), nom du « quartier » dérivé de l’anthroponyme Ὄρτας, suivi du
nom de la tribu Boas. On trouve encore, à Scotoussa (SEG 43, 311), un
lieu dit Miroundas ἀτ τοῖ προύτοι πύργοι τᾶς ἀκρᾶς τοῖ ποτέχεος (= koinè
τοῦ προσεχοῦς) τοῦ Μιρούνδα (B l. 33) et μὲς ποτ τὸν Μιρούνδαν (B l.
61), et sur le territoire de Mélitaia un τόπος Κυρσιλίδα (FD III 4, 351,
l. 11).
Cet emploi des anthroponymes en -δας dans la toponymie vient en
parallèle à celui des adjectifs formés sur les noms de lieu avec les suf-
fixes en -ιος et -(ι)κος, dans des adjectifs déterminatifs qui sont d’un
emploi courant en grec : on a ainsi ἡ Λαρισαία, Σκοτουσσαία (χώρα).
On trouve un exemple de la juxtaposition de ces deux suffixes dans les
dérivés (τὰ ἱππότεια) Λυταικά 14 et Λυταῖος 15, tous deux issus du topo-
nyme Λυταί, χωρίον Θεσσαλίας, διὰ τὸ λῦσαι τὰ Τέμπη Ποσειδῶνα καὶ
σκεδάσαι τὸ ἀπὸ τοῦ κατακλυσμοῦ ὕδωρ (Ét. Byz., p. 423) 16.
On constate encore que ces suffixes -άδας et -ίδας donnent des idio-
nymes, des noms de personne, dérivés d’anthroponymes, qui sont extrême-
ment fréquents dans les inscriptions thessaliennes d’époque hellénistique
et peuvent être suffixés en -αιος. On a ainsi la séquence Κλεομαχίδας /
Κλεομαχίδης pour un Larisséen stratège des Thessaliens en 181-180 a. C.

12. Cf. à Larissa l’épitaphe d’un Μένουν Ἀντιλάειος (SEG 45, 622).
13. A. Tziafalias et B. Helly, art. cit., p. 142, l. 128.
14. A. Tziafalias et B. Helly, art. cit., p. 161, l. 2-3.
15. L’adjectif Λυταῖος est une épiclèse de Poséidon chez Homère (Il. 17, v. 21) et chez
Bacchylide (Dithyrambes 18, v. 28-29) : Κρονίδα Λυταῖον σεισίχθονος τέκος. On a
aussi l’adjectif en -αιος dans la glose d’Hésychius Λυταίη· Θεσσαλή (λ 1461 Latte).
16. Faut-il écrire dans ce passage plutôt le nom commun τέμπη ?
564 richard bouchon – bruno helly

(IG IX 2, 526, l. 15, etc.), et un Ἀτρεστίδας Κλεομαχίδαιος stratège entre


179 et 170 a. C. (SEG 42, 510, l. 23). Dans quelques cas cependant, ce
n’est pas la forme d’adjectif qui est utilisée, mais le génitif adnominal.
On trouve à Koropé de Magnésie, aux vie-ve  a. C., l’épitaphe Δικαίιō
εἰμί | ϝετιιάδα à Koropé, épitaphe publiée de manière erronée et par-
tielle dans IG IX 2, 1206 et complétée par un fragment inédit 17, avec un
patronyme en -δας formé sur le thème de ϝέτος 18. Un autre exemple est
dans la dédicace déjà citée, celle d’un chien faite par Πειθόλα Φαρακίδα
κύνα Ἄπλουνι (SEG 52, 562) à Métropolis au ive a. C., où le patronyme
est dérivé du nom Φάραξ, connu à Atrax 19. Cet emploi occasionnel du
génitif pour ces anthroponymes en -άδας / -ης et -ίδας / -ης se rapproche
probablement de l’usage béotien. Selon G. Vottéro, en effet, la caracté-
ristique essentielle du système béotien « réside dans la distribution qu’il
présente entre adjectif en -ιος et génitif, et qui est propre au béotien. On
la trouve à date ancienne, pour exprimer l’appartenance. Ainsi rencontre-
t-on, accompagnés en général de εἰμί, des noms en -δας et ‑εας, ‑ιας
construits au génitif d’une part… » et « des noms en -ος, -α et ‑ης élargis
par un suffixe ‑ιος »  20.

3. Les suffixes -άδας et -ίδας peuvent-ils,


en thessalien, exprimer la filiation ?

Οn considère que ces formes suffixées -δας ne signifient pas l’ex-


pression d’une filiation directe, qu’elles ne portent aucune connotation
patronymique : pour reprendre la formule de G. Vottéro 21, « Pélopidas
n’est pas le fils de Pélops. » Ainsi Κλεομαχίδας ne serait pas le fils de
Κλεόμαχος. Cependant un certain nombre de rapprochements prosopo-
graphiques semblent montrer que les noms thessaliens suffixés en -άδας

17. A. Doulgéri-Indzésiloglou, Θεσσαλικές επιγραφές σε τοπικό αλφάβητο, Thessalonique,


2000 (accessible sur http://thesis.ekt.gr/thesisBookReader/id/25512#page/1/mode/
2up), p. 190, sous le no KO 3 (pour Koropè).
18. Cf. les noms en Ἐτεα- Ἐτεο-, avec fermeture de /e/ en /i/ comme dans le nom béotien
Ἐτίαρχος à Hyettos (IG VII, 2819, l. 5, et 2819, 3 ; SEG 26, 498, 11).
19. Cf. Ἀντόχου τοῦ Φάρακος, tage dans un décret de la fin du iiie a. C. (SEG 33, 448 =
I. Atrax, no 8).
20. G. Vottéro, « Filiation en béotien », art. cit., p. 226.
21. Cf. G. Vottéro, « Filiation en béotien », art. cit., p. 227 : « un nom comme Pélopidas
ne peut être pris pour un patronymique ».
patronymiques, le cas de la thessalie 565

et -ίδας peuvent exprimer la filiation. On trouve ainsi à Larissa une famille


dans laquelle le nom Agathokleidès sert clairement de patronyme : en
première génération on connaît un Ἀγάθων Ἀγαθοκλέους Λαρισαῖος qui
a été honoré de la proxénie par les Étoliens en 262 a. C. (IG IX 12 1, 17,
l.  21), mais deux générations plus tard apparaît un Agathokleidas fils
d’Agathon, ταγευόντουν Ἀγαθοκλείδα Ἀγαθουνείοι etc., dans le décret
pour Bacchios de Mytilène (ca 196 a. C.), et cinquante ans plus tard
encore, on a un Ἀγαθοκλείδης Ἀγαθοκλέους honoré comme juge par un
décret d’Acraiphia (IG VII, 4131, l. 14, peu après 146 a. C.). À Crannon,
la liste des Simanthidai (SEG 51, 711, face B l. 33-36), associe les noms
de Αὐτόβουλος Προξενίδαιος et de Πρόξενος Αὐτοβούλε[ι]ος : la suc-
cession Προξενίδαιος - Πρόξενος semble bien exprimer une filiation
et conduire à constater que Proxénos est probablement le fils d’Auto-
boulos et le petit-fils de Proxénidas. De même à Scotoussa, dans le décret
concernant les remparts de la cité (SEG 43, 311, l. 12-14), la succession
des noms Ὀρθαγόραν Φιλοκράτειον, Πολυκράτειν Νικοκράτειον, Ἁγεί-
σιππον Νικοκράτειον, [Φιλο(?)]κράτειν Ὀρθαγορί[δαιον] 22, semble indi-
quer que Philokratès est le fils d’Orthagoras, petit-fils de Philokrateis.
Cette particularité semble se retrouver à Démétrias dans les épitaphes
du iiie-iie a. C., bien que, comme cela a été la règle dans les cités fon-
dées par les rois de Macédoine, on y ait utilisé exclusivement la koinè.
Ainsi la stèle qui porte l’épitaphe d’Antimachos fils d’Antimachidès,
Ἀντίμαχος Ἀντιμαχίδου 23, datée de la fin du iiie ou du premier tiers du
iie  a. C. On doit rapporter à la même famille l’épitaphe d’un Ἐπικρα-
τίδ[η]ς Ἀντιμάχου χ[αῖρε], gravée sur l’épistyle d’un grand naïskos inédit
conservé au Musée de Volos, qui date de la seconde moitié du iie a. C. 24
22. Un autre décret de Scotoussa (SEG 43, 310, l. 11) nomme un tage Ἀστοκλέαο Ὀρθα-
γοραίοιο (génitifs), de la même famille : mais on a employé ici l’adjectif en -αιος.
23. A. S. Arvanitopoulos, « Η σημασία τῶν γραπτῶν στηλῶν Παγασῶν », Arch. Eph.,
1908, col. 4 et 7-8 ; Thessalika Mnemeia, p.174-176, no 24. On note qu’en 169 a. C.
un Antimachos exerçait le gouvernement de la cité de Démétrias (Antimachum quem
Demetriadi praeerat, Liv., 44, 13, 9 et 24, 9). Il ne s’agit pas, comme l’ont pensé à tort
F. Stählin, E. Meyer et A. Heidner, Pagasai und Demetrias, Berlin - Leipzig, 1934,
p. 26, n. 2, d’un Macédonien : le roi de Macédoine aurait installé « in der Akropolis
und Königsburg eine königliche Besatzung und einen Stadtkommandant ». Mais le
verbe latin praeerat ne soutient pas, à notre avis, cette interprétation. Cet Antimachos
était un Démétrien et il était l’épistate de la cité de Démétrias.
24. Sur le bandeau sous le champ de représentation, est gravée l’épitaphe de l’épouse
d’Épikratidès, Μνασύ(λ)λα Λέοντος.
566 richard bouchon – bruno helly

Le personnage est connu comme l’un des deux hiéromnémons des


Magnètes de l’année 117-116 a. C., au cours de laquelle a été repris le
dossier des pièces relatives à ce que l’on appelle maintenant « le scandale
de 117 25. » Ce fils d’Antimachos est hiéromnémon en même temps que
Dionusodôros fils d’Euphraios, qui est évidemment dérivé de Εὐφρᾶς et
que l’on retrouve à Démétrias même dans IG IX 2, 1109, l. 3 et 72, décret
de la cité de Démétrias sur le sanctuaire d’Apollon Koropaios daté vers
117 a. C. 26.
Sur le nom Antimachidès de cette épitaphe démétrienne, on peut faire
la supposition qu’il a été donné au fils d’un Antimachos : ce nom en -ίδης
semble bien reprendre pour le fils le nom du père Antimachos, comme
dans les inscriptions de la Thessalie continentale, en évitant, grâce à
cette dérivation, les difficultés que ne manquaient pas de créer, dans de
nombreux cas, l’homonymie. La même interprétation peut s’appliquer
aussi au nom Épikratidès, qui, si l’on suit les règles de la papponymie,
devrait être le fils cadet d’Antimachos et porter le nom d’un oncle du côté
maternel, qui s’appelait soit Épikratidès, soit plutôt Épikratès. On peut
ainsi construire le stemma suivant :
(Antimachos I ?)

(Antimachidès)

Antimachos (II) fils d’Antimachidès

(Antimachidès ?) et Épikratidès fils d’Antimachos ― Mnasulla fille de Léôn


On a, semble-t-il, procédé d’une manière analogue dans une autre
famille démétrienne, dans laquelle alternaient les noms de Stratôn, Stra-
tônidès et Stratonikos. Une stèle porte l’épitaphe de Στράτων  | Στρα-
τωνίδου que l’on peut dater de la fin du iiie a. C., et il est probable que
nous avons aussi la stèle funéraire de son épouse, Ἀρτεμισία | Στράτωνος

25. Cf. les documents FD III 4, 277 A, l.  31, repris par F. Lefèvre, CID IV, 119 B,
l.  11-12, avec commentaire p. 297 ; voir aussi F. Lefèvre, L’Amphictionie pyléo-
delphique : histoire et institutions, Athènes - Paris, 1998, p.  89, et A. Jacquemin,
D.  Mulliez et G. Rougemont, Choix d’inscriptions de Delphes, Athènes - Paris,
2012, p. 173-174.
26. Cf. F. Stählin, « Zur Chronologie und Erklärung des Inschriften von Magnesia und
Demetrias », MDAI(A) 54 (1929), p. 220.
patronymiques, le cas de la thessalie 567

| γυνή 27. On peut en rapprocher le naïskos de Stratonikos fils de Stratôn,


qui a été publiée par A. S. Arvanitopoulos 28 et qui date sûrement de la
période macédonienne à Démétrias, de la fin du iiie ou début du iie a. C.,
car à la suite de l’épitaphe inscrite sur l’épistyle, les noms Στρατόνικος
Στράτωνος, on a gravé en haut du champ de représentation l’épigramme
qui précise que ce Stratonikos était mort à Idoméné de Macédoine :
Ψυχὴν μὲν ἐν Εἰδομένῃ προελίνπανεν· ὀστέα δὲ ὧδε
μητρί τε καὶ ἀδελφῆι ἀνιηρὸν κῆδος ἵκανεν.
« Sa vie, il l’a laissée prématurément à Idoménè et ses os sont arrivés ici,
pour sa mère et pour sa sœur objets de deuil et d’affliction. »
De ce texte et de la représentation qui l’illustre nous pouvons conclure
que Stratonikos était un page royal, un παῖς βασιλικός, appelé au service
du roi de Macédoine : ses cendres ont été envoyées à Démétrias, sans
doute sur ordre du roi, et y ont été reçues par sa mère et par sa sœur. En
faisant silence sur le nom du père, l’épigramme fait bien comprendre que
celui-ci était déjà mort. La représentation peinte le montre dans une scène
de dexiôsis, où il est figuré à droite de Stratonikos, et assis précisément

27. La stèle de Stratôn et celle d’Artémisia ont été publiées par B. Helly, « Ateliers lapi-
daires de Thessalie », dans D. M. Pippidi (éd.), Actes du VIIe congrès international
d’épigraphie grecque et latine, Constantza, 9-15 septembre 1977, Bucarest - Paris,
1979, p. 72, n. 18 (SEG 29, 488) et n. 28 (SEG 29, 1979, 493).
28. A. S. Arvanitopoulos, art. cit., col. 51, pl. 3 (aquarelle de Gilliéron) ; Id., Θεσσαλικὰ
Μνήμεια, Athènes, 1909, p. 122-127, no 9 ; Id., Γραπταὶ Στηλαὶ τῆς Δημητριάδος,
Athènes, 1928, p. 143-146, no 1 avec photographies 166-168 et pl. 1 ; W. Peek, GVI,
1752 ; K. Mickey, Studies in the Greek Dialects and the Language of Greek Verse
Inscriptions, thèse inédite, Oxford, 1981, p. 141, no C 38 ; É. Cairon, Les épitaphes
métriques hellénistiques du Péloponnèse à la Thessalie, Budapest - Debrecen, 2009,
p. 228-231, no 72, texte, traduction et commentaire ; E. Santin, Epigrammi sepolcrali
di Tessaglia, diss. dott., université La Sapienza, 2005-2006, p. 156-157, no 55 ; V. von
Graeve, Die bemalten Grabstelen von Demetrias, thèse d’habilitation, université de
Francfort, 1975, p. 159-162, Kat Nr 9 (texte, traduction allemande, description et
date) ; Id., « Zum Zeugnisswert der bemalten Grabstelen von Demetrias für die grie-
chische Malerei, », dans La Thessalie. Actes de la table ronde 21-24 juillet 1975,
Lyon, 1979, p. 115 et pl. 5.3 ; F. Preusser, V. von Graeve et C. Wolters, « Malerei auf
griechischen Stelen. Technische und naturwissenschaftliche Aspekte eines archäolo-
gischen Materials », Maltechnik-Restauro, 1981, p. 23 et fig. 47-52 ; V. von Graeve
et F. Preusser, « Zur Technik griechischer Malerei auf Marmor », JDAI 96 (1981),
p. 125 et fig. 3 ; N. V. Sekunda et A. McBride, The Army of Aexander the Great,
Londres, 1984, p. 8-9, 37, pl. Bé ; N. V. Sekunda, The Antigonid’s Army, Gdańsk,
2013, p. 61-63, qui ne reprend pas le texte de l’épitaphe ni celui de l’épigramme.
568 richard bouchon – bruno helly

sous le patronyme Stratôn. Vêtu de blanc, il reçoit des mains de son fils
défunt des tablettes de bois, sur lesquelles était vraisemblablement trans-
crit le testament qu’il avait laissé à ce dernier, qui, suite à sa mort préma-
turée, ne peut que les lui restituer dans l’au-delà.
L’association de ces noms conduit ainsi à reconstruire le stemma de
la famille :
(Stratôn I ?)

Stratônidès

Stratôn II ― Artémisia

Stratonikos pais basilikos


Ces deux exemples démétriens paraissent bien correspondre aux
quelques exemples thessaliens que nous avons relevés ci-dessus pour
fonder notre hypothèse que les noms en -άδας et -ίδας ont pu avoir une
connotation patronymique et exprimer la filiation dans un contexte fami-
lial restreint, hors l’usage qui en était fait pour exprimer l’appartenance à
des unités civiques telles que genos, syngeneiai ou tribus. Il est possible
de considérer cet usage comme proprement thessalien, dans la mesure
où, dans un autre contexte, celui de la société thessalienne d’époque
impériale, il semble que nous pouvons en retrouver la pratique.

4. Présence résiduelle de l’adjectif patronymique


au ier a. C.

L’usage de la koinè est adopté par les Thessaliens pour les docu-
ments officiels dans le dernier quart du iie a. C. 29. Le recours au dia-
lecte s’estompe dès lors progressivement et de manière naturelle dans les
documents d’ordre privé. Par conséquent, dans le courant du ier a. C. on
constate la disparition de l’adjectif patronymique. Cependant certaines

29. Il s’agit là des décisions des cités, notamment de Larissa. Les documents émanant
du koinon thessalien sont en revanche rédigés en koinè dès la constitution de la
confédération en 196 a. C., car celle-ci comprend des peuples restés plus d’un
siècle dans l’orbite macédonienne (Perrhébie) ou étolienne (Malide, Achaïe) : voir
R. Bouchon et B. Helly, « The Thessalian League », dans H. Beck et P. Funke (éd.),
Federalism in Greek Antiquity, Oxford, 2015, p. 231-249.
patronymiques, le cas de la thessalie 569

exceptions manifestent une volonté persistante mais résiduelle de « faire


thessalien ». Ainsi, les attestations les plus récentes du dialecte dans des
documents publics sont à trouver dans les listes des « chasseurs de tau-
reaux » exposées à Larissa, à une époque où des communautés romaines
sont déjà bien présentes dans la cité 30, et plus récemment encore dans
la dédicace par la cité de Larissa (ὁ δᾶμος ὁ Λασσαίουν) de statues de
la famille impériale installées sur le bâtiment de scène du théâtre au
moment de l’avènement de Tibère, entre 14 et 19 p. C. 31. Cette résur-
gence dialectale après plus d’un siècle d’interruption ne donne pas lieu à
l’utilisation de l’expression de la filiation par dérivation en -ιος : aucun
Larisséen n’est mentionné dans ces dédicaces et la filiation au sein de la
domus Augusta est exprimée par l’emploi de παῖς accompagné du génitif.
En revanche, on peut se demander si la même formule de dérivation
n’est pas à l’œuvre dans l’usage de la forme σεβαστῆος, issue de Σεβαστὸς /
Augustus, qui a été forgée au plus tard en 10-11 p. C., dans ce même
contexte de résurgence dialectale, et sert à caractériser les Thessaliens dans
leur ensemble (ΘΕΣΣΑΛΟΙ ΣΕΒΑΣΤΗΟΙ sur les monnaies), certaines (?)
cités (Σεβαστῆα Μελίταια) et certains individus (ταμιεύοντος Φυλίωνος
τοῦ Φιλεταίρου Σεβαστήου) 32, marquant clairement la dépendance vis-
à-vis de la personne de l’empereur. On a pu supposer que cette épithète
s’était développée dans un contexte de crise vis-à-vis de l’autorité
romaine ayant entraîné une prise de position claire des (ou d’une partie
des) élites thessaliennes 33 : le recours au dialecte s’entendrait alors moins
comme une position proprement réactionnaire que comme une forme
de compensation dans un contexte de reprise en main par les autorités
impériales.
30. IG IX 2, 535, présence du Romain Q. Attius Sext. f. et de Ἀμούμειτος Φιλοξενί-
δαιος, dont le fils (ou l’arrière petit-fils ?) est vainqueur à l’épreuve d’épigramme
d’un concours organisé sous le stratège Hègèsias, vers 20 a. C. ; IG IX 2, 536, pré-
sence de Πραξίας Εἱρακλείδαιος, dont le monument funéraire est connu par ailleurs
mais reste inédit (archives thessaliennes de Lyon no GHW0857).
31. A. Tziafalias, R. Bouchon, L. Darmezin, B. Helly, « Larissa, Balbus Minor et la
domus Augusta : le théâtre de la cité au miroir de la politique diplomatique », dans
Αρχαιολογικό έργο Θεσσαλίας και Στερεάς Ελλάδας 4 2010. Πρακτικά επιστημονικής
συνάντησης. Βόλος 2010 (Proceedings of the 4th Archaeological Meeting of Thes-
saly and Central Greece [AETHSE]), Volos, 2015, p. 299-304.
32. Arch. Eph. 1917, no 312.
33. R. Bouchon, « L’ère auguste : ébauche d’une histoire politique de la Thessalie sous
Auguste », BCH 132 (2008) [2010], p. 427-471.
570 richard bouchon – bruno helly

5. Le suffixe -(ι)ανός, emprunté au latin :


connotations « gentilices »

Si la présence des Italiens a accompagné l’effacement de la suffixa-


tion en -ιος propre au dialecte, les pratiques onomastiques romaines ont
fini par être source d’imitation dans le monde grec, selon un mode qui est
bien connu, même s’il n’a pas encore donné lieu à une étude d’ensemble.
L’exemple le plus frappant est celui de la suffixation en ‑(ι)ανός 34. L’ad-
jonction d’un suffixe adjectival banal marquant une relation d’apparte-
nance est attestée dès l’époque républicaine dans le cadre de l’adoption
pour manifester le rattachement au lignage d’origine : la forme d’ad-
jectif issue de la dérivation du nom gentilice d’origine prend alors place
dans la nomenclature onomastique au rang de cognomen supplémen-
taire 35. À l’époque impériale, le même mécanisme sert à rendre visible le
lignage maternel, même si lui est peu à peu préférée la simple juxtaposi-
tion des noms gentilices, et même l’accumulation de formules onomas-
tiques complexes, les polyonymous names, auxquels il est fait recours
dans les documents officiels et valant quartiers de noblesse 36. En terme
de sociologie, ces phénomènes dans leur ensemble relèvent de stratégies
de distinction utilisées dans le cadre d’une compétition à caractère aris-
tocratique et ne concernent qu’à la marge le monde des affranchis et des
esclaves.
Une telle pratique, développée dans le cadre contraignant de la
nomenclature latine, s’est diffusée dans la partie hellénophone de l’Em-
pire en s’adaptant aux habitudes onomastiques locales ou communes aux
Grecs. On a insisté depuis longtemps sur la relation entre l’importance
de la romanisation et l’usage de ces formes de noms latinisés 37 : la plus

34. Le suffixe d’origine est -anus, mais -ianus s’est imposé par (fausse) analogie avec
les cognomina issus de gentilices du type Aemilius / Aemilianus : voir I. Kajanto, The
Latin Cognomina, Helsinki, 1965, p. 107-110.
35. L’exemple classique est celui du fils de Paul-Émile, appartenant donc à la gens
Aemilia, qui fut adopté par P. Cornelius Scipio Africanus et portait donc le nom de
P. Cornelius P. f. Aemilianus.
36. O. Salomies, Adoptive and Polyonymous Nomenclature in the Roman Empire, Hel-
sinki, 1992.
37. Cf. Dobias-Dubois, Intr., p.  v. Une étude préliminaire du phénomène en Asie
Mineure a été conduite par T. Corsten, « Names in ‑ΙΑΝΟΣ in Asia Minor. A preli-
minary study », dans Onomatologos, p. 456-463. Voir pour l’exemple de la Thrace
patronymiques, le cas de la thessalie 571

forte présence de citoyens romains, porteurs des tria nomina, la diffusion


même de la civitas Romana parmi l’élite des cités grecques passées sous
la domination de Rome, a entraîné un phénomène d’imitation au sein des
catégories de population restées en dehors de la citoyenneté romaine et a
priori des procédés de nomination de celle-ci. Ainsi ont été forgés assez
tôt des « seconds noms » grecs à partir du nom d’un parent, essentiel-
lement le père. Mais il semble que la connotation patronymique se soit
rapidement dégradée, le suffixe servant alors à construire des idionymes
(« premiers noms ») et prenant place, par effet de mode, parmi les plus
productifs à partir de la fin du iie p. C. : ainsi en est-il de la large diffu-
sion de noms très banals, tels Eutychianos, à une échelle moindre cepen-
dant que Ioulianos, construit sur le gentilice impérial Iulius et qui doit en
partie sa diffusion aux affranchis impériaux.
Un rapide coup d’œil aux listes d’éphèbes athéniens d’époque impé-
riale fait apparaître une tendance très nette : la présence d’anthroponymes
comprenant le suffixe -(ι)ανός reste assez marginale avant la Constitution
antonine 38, encore faut-il attendre une bonne génération après l’octroi
général de la civitas Romana pour que leur proportion devienne sensible
(exemple IG II2 2239 et 2245). Les cas les plus anciens remontent au
milieu du ier p. C.
Dans le cas de la Thessalie, le corpus des anthroponymes construits
par suffixation en -(ι)ανός est assez restreint, puisqu’il ne comporte
qu’une trentaine de cas. Un tiers d’entre eux font partie des noms gravés
sur les gradins du théâtre de Larissa à fin de réservation de places pour
D. Dana, « L’impact de l’onomastique latine sur les onomastiques indigènes dans
l’espace thrace », dans M. Dondin-Payre (éd.), Les noms de personne dans l’Empire
romain, Bordeaux, 2011, p. 37-87.
38. Dans la liste des éphèbes de l’année 163-164 p. C. (IG II2 2086), entièrement
conservée et qui comprend 150 individus donc 300 noms et patronymes, il n’y a
aucun exemple de noms formés en -ianos. Dans les listes de même époque, les
quelques individus qui portent de tels noms sont souvent, mais non exclusivement,
enregistrés parmi les éphèbes epengraphoi, en second lieu, par opposition aux prô-
tengraphoi qui faisaient partie de l’élite civique. Sur l’interprétation sociale contro-
versée de ces catégories, voir la présentation de la question chez É. Perrin-Samina-
dayar, « L’éphébie attique, de la crise mithridatique à Hadrien : miroir de la société
athénienne », dans S. Follet (éd.), L’hellénisme d’époque romaine : nouveaux docu-
ments, nouvelles approches, Paris, 2004, p.  87-103. Notons tout de même l’exis-
tence d’un Ἀθηνιανός (IG II2 2059, 136 / 137 ?) parmi les éphèbes exerçant la gym-
nasiarchie mensuelle, qui est aussi agonothète des Germanikeia. Son nom doit être
construit sur l’anthroponyme rare Ἄθηνις.
572 richard bouchon – bruno helly

les spectacles : la gravure de ces Topoinschriften est un phénomène qui


s’est prolongé depuis le début du iie p. C. jusqu’à la première moitié
du iiie  p. C. De manière significative, les noms en ‑(ι)ανός connus au
théâtre appartiennent à la dernière phase de gravure des Topoinschriften,
grosso modo contemporaine de la Constitution antonine. En revanche,
il n’y a aucun nom en -(ι)ανός dans les listes d’affranchis affichées
en place publique chaque année ou chaque semestre, certifiant par là
qu’ils avaient versé la taxe prévue par la loi : pourtant, entre les années
160 a. C. et 230 p. C., ce sont plus de 2 000 esclaves qui ont été enregis-
trés par les percepteurs des cités thessaliennes, dont un bon tiers pour les
iie et iiie p. C.
La documentation montre en effet qu’en Thessalie, la suffixation en
-(ι)ανός est tout d’abord utilisée dans le cadre le plus strict de la nomen-
clature romaine, produisant ainsi un cognomen gardant trace d’une
ascendance maternelle (ou moins prestigieuse) ou d’une adoption : c’est
l’hypothèse que l’on peut formuler pour le trésorier de la cité de Larissa
portant le nom de Πόπλιος Μέμμιος Αἰλιανὸς Πάμφιλος. Pour des rai-
sons que l’on ignore, une branche au moins de sa famille a décidé de ne
conserver que le pseudo-gentilice Aelianus, en tout cas de n’être désignée
que par celui-ci ou d’être désignée principalement par lui : ainsi Ailianos
Philiskos, stratège fédéral de la fin du iie p. C. (IG IX 2, 1268.9 39), dont
le topos apparaît dans le théâtre dans le 8e cuneus. Le gentilice obtenu
par choix sert de véritable « nom de famille » – en fait, sert vérita-
blement de gentilice : ainsi ce sont probablement des Ailianoi qui ont
réservé toute la 13e rangée du 4e cuneus du théâtre qui portent l’inscrip-
tion [Αἰ]λιανῶν. Pourtant, le gentilice officiel de la famille devait être
Memmius, mais un tel nomen était largement diffusé en Grèce conti-
nentale, puisque de nombreux pérégrins ont accédé au statut de citoyens
romains par le biais du gouverneur P. Memmius Regulus peu avant le
milieu du ier p. C. On voit là la souplesse d’usage de la nomenclature en
milieu hellénophone autorisant des stratégies de distinction entre plu-
sieurs branches. Le phénomène est identique pour la famille des Δομετι-
ανοί, qui a réservé la 20e rangée du 2e cuneus. Ils sont très certainement
issus d’Italiens membres de la gens Domitia installés en Thessalie au
39. B. Puech identifie, sans doute à tort, ce personnage avec le sophiste Philiscos connu
par Philostrate (VS 621-623) ; voir B. Puech, Orateurs et sophistes dans les inscrip-
tions d’époque impériale, Paris, 2002 p. 376-377.
patronymiques, le cas de la thessalie 573

ier a. C. : une stèle funéraire de Larissa porte les noms de Cn. Domitius
fils de Décimus et de sa fille Magna 40. Les Dometianoi n’affirment pour-
tant qu’un lien indirect avec les Domitii. A contrario, la question ne se
posait pas pour les membres d’une famille portant un gentilice extrême-
ment rare, à l’instar de celui des Graeceii, qui ont réservé leur rangée du
8e cuneus par leur gentilice seul Γραικηίων (et une seconde fois sous la
forme d’un simple monogramme). On peut par ailleurs comprendre le
cas des gradins réservés au nom des Aurelii (Αὐρηλίων), nom gentilice
extrêmement répandu, comme l’inscription dans l’espace du théâtre de
la première famille thessalienne à avoir porté ce nom gentilice, en l’oc-
currence par l’entremise de l’empereur Marc-Aurèle, avant que l’édit de
Caracalla n’en fasse le nomen le plus répandu dans l’Empire : on peut
montrer du reste que cette famille des premiers Aurelii de Larissa est
celle du sophiste Hippodromos, né au milieu du iie p. C. et titulaire de la
chaire impériale de rhétorique à Athènes vers 210 41 : à n’en point douter,
le père d’Hippodromos, Olympiodôros, était le seul Larisséen à porter le
nomen impérial dans les années 160.
Par ce biais, la Thessalie romaine retrouve sa capacité à exprimer
l’importance de la transmission au sein d’un groupe familial (relative-
ment) élargi, ou au contraire, est obligée d’en passer par l’usage de la
suffixation pour rendre compte d’un groupe familial moins vaste que
celui du gentilice commun à tous.
Par ailleurs, en marge du cadre de la nomenclature romaine, et par
processus d’imitation des cognomina issus de gentilices, la suffixation
en -ιανός a produit des idionymes à partir d’anthroponymes grecs. On
peut se reporter à un exemple pris dans la cité macédonienne voisine de
Béroia, dans la première moitié du iiie p. C. (EKM 96), un autel hono-
rifique portant une statue érigée par les synèdres du koinon provincial
en l’honneur d’Aurélios Dionysianos Markellianos Bassos : la mention
de son frère, en charge de l’érection du monument, et celle de son père
permet de reconstituer la transmission des noms dans le groupe familial,
à partir non pas du gentilice, qui permettrait de proclamer une double
ascendance, mais à partir du cognomen, qui porte donc une connota-
tion patronymique (et en l’occurrence papponymique) : les deux fils

40. Archives thessaliennes de Lyon no GHW01260.


41. Sur le personnage, voir en dernier lieu B. Puech, op. cit., p. 308-312.
574 richard bouchon – bruno helly

d’Aurélios Dionysianos Markellos portent, en plus de leur cognomen


Bassos ou Markellos, un second cognomen formé sur le patronyme Mar-
kellos, Markellianos ; ils ont par ailleurs hérité du second cognomen de
leur père Dionysianos, qui était peut-être formé sur l’idionyme de leur
grand-père. La question posée par ce texte est en définitive celle du nom
d’usage de ces personnages : le nom personnel, qui distingue les deux
frères, est bien le dernier cognomen. L’adaptation des Grecs aux règles
de l’onomastique latine a eu pour conséquence la fréquente disparition
de la mention de la filiation, qu’il était souvent difficile d’intégrer, pour
accompagner la forme la plus couramment utilisée du nom : la dérivation
adjectivale en -ιανός à partir du patronyme réintroduit l’idée de filiation
sur le modèle des pseudo-gentilices 42. Ces noms ont-ils pour autant pu
servir de noms d’usage ?
Au théâtre de Larissa, un père et son fils homonyme ont réservé
environ six places dans la 6e rangée du 10e cuneus (bloc de siège no 3
Εὐφράδου τόπος et blocs 1 et 2 Εὐφράδου ὑοῦ), puis, dans un second
temps, ces places ont été redistribuées à quatre autres personnes, men-
tionnées comme attendu au génitif : Μενεκράτους, Νείκωνος, Ζωσίμου,
Ζωσιμιανοῦ. On est fortement tenté de supposer que les deux derniers
sont liés par la parenté. À la différence du cas de Béroia, il ne s’agit pas
d’un document officiel pour un personnage qui possède donc la citoyen-
neté romaine, mais bien de la façon dont, dans la vie courante, ces deux
personnages souhaitaient être désignés : d’ailleurs Zôsimos et Zôsi-
mianos de Larissa n’auraient a priori pas manqué de préciser s’ils étaient
détenteurs de la citoyenneté romaine. Le nom Zôsimianos est, avec Euty-
chianos, le plus courant parmi les noms suffixés en -ιανός issus d’idio-
nymes grecs, et il a dû dans la plupart des cas se diffuser sans aucune
connotation patronymique. On est dans ce cas conduit à supposer que les
pérégrins ont réintroduit un système de fabrication d’anthroponymes à
connotation patronymique, par imitation du système gentilice romain qui
avait conduit en parallèle à fabriquer des pseudo-gentilices.

42. Voir les remarques de A. D. Rizakis, « Anthroponymie et société. Les noms romains
dans les provinces hellénophones de l’Empire », dans A. D. Rizakis (éd.), Roman
Onomastics in the Greek East: Social and Political Aspects. Proceedings of the
International Colloquium on Roman Onomastics. Athens, 7-9 September 1993,
Athènes, 1996, p. 11-29 (surtout p. 18-19). L’ouvrage comporte une bibliographie
complète sur la question.
patronymiques, le cas de la thessalie 575

Un autre exemple se trouve dans un cuneus plus central, celui de


la famille de Dôros : ainsi, dans la 19e rangée du 6e cuneus, un Δῶρος
Ὀρβανοῦ, qui apparaît une seconde fois (sur la même rangée d’un cuneus
adjacent) sous une forme abrégée, Δῶρος ΟὐρβανR, avec une sorte de R
final qui paraît être une forme d’abréviation qui reste inexpliquée. Il faut
sans doute rapprocher ce personnage d’un Ὀρβανιανός dont le topos est
situé dans le même cuneus 5, quelques rangées plus haut : l’étude épigra-
phique ne permet pas de déterminer comment s’organisaient les généra-
tions dans cette famille et si Urbanianus était le frère de Dôros (id est si
la suffixation a ici sa valeur pleine) ou bien s’il n’est qu’un membre de
la famille (valeur dégradée du suffixe). Dans tous les cas, il ne s’agit pas
d’une suffixation créant un second nom, dans le cadre d’une stratégie de
dénomination cherchant à préserver un maximum d’informations liées à
l’ascendance du personnage (une valeur patronymique), mais bien d’une
suffixation de nomination directe.

Conclusion

Les Thessaliens ont donc eu recours à trois systèmes de suffixation,


porteurs originellement d’une valeur d’appartenance, et employés avec
une connotation patronymique ou gentilice, puis simplement produc-
teurs d’idionymes, la suffixation n’ayant plus qu’une valeur dégradée et
s’insérant dans les stratégies de variations dans la fabrication de noms
au sein d’un groupe familial. On retiendra surtout qu’à plusieurs siècles
d’intervalle, les suffixes -δας et -ιανός fonctionnent pratiquement de la
même manière, qu’ils ont très largement perdu leur valeur patronymique,
sinon dans des situations particulières, et ont servi à désigner des groupes
gentilices, dans des contextes sociaux et institutionnels pourtant très dif-
férents. Au contraire, la suffixation en -ιος, systématiquement utilisée
pour désigner la relation de filiation à la haute époque hellénistique, ne
semble pas avoir produit d’idionymes, sinon très occasionnellement, ni
avoir servi à désigner des groupes gentilices, à l’exception peut-être des
Σεβαστῆοι du début de l’époque impériale, exception tardive et artificiel-
lement reconstruite.
576 richard bouchon – bruno helly

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Remarques sur le suffixe -ωνδας

María Luisa del Barrio Vega


Universidad Complutense de Madrid

1. L’emploi du suffixe -ωνδας pour former des anthroponymes, en par-


ticulier son origine et son étendue géographique, est un sujet abondam-
ment étudié depuis longtemps 1 : Schmidt en 1895, Solmsen en 1909,
Bechtel en 1921, Masson en 1974, Knoepfler en 1989, etc. 2 À l’aide des
répertoires modernes de noms propres grecs, en particulier les bases de
données du Lexicon of Greek Personal Names ainsi que les répertoires
postérieurs au Lexicon, il est maintenant possible d’effectuer une analyse
plus exhaustive et plus actualisée de ce suffixe. Une étude, basée préci-
sément sur les données du Lexicon, en a d’ailleurs été récemment faite
par F. Marchand 3.
Comme il a été déjà remarqué par de nombreux auteurs, le suffixe
‑ωνδας est surtout documenté en Grèce centrale, en particulier en Béotie
1. Ce travail fait partie du projet de recherche FFI2012-35721-C02-01 « Modos de
contacto interdialectal en griego antiguo », financé par le ministère espagnol de
« Economía y Competitividad ». Je remercie Alcorac Alonso de ses observations.
2. J. Schmidt, Kritik der Sonantentheorie. Eine sprachwissenschaftliche Untersu-
chung, Weimar, 1895, p. 27 ; L. Sadée, De Boeotiae titulorum dialecto, Halle, 1904
(Diss. Phil. Halenses, XIV 2) ; F. Solmsen, Beiträge zur griechischen Wortforschung.
Erster teil, Strasbourg, 1909, p. 98 sq. ; F. Bechtel, Die griechischen Dialekte, I. Der
lesbische, thessalische, böotische, arkadische und kyprische Dialekt, Berlin, 1921,
p. 265, § 56 et 57 ; O. Masson, « Excursus sur le nom du poète : Hérondas, plutôt
qu’Hérodas et les noms en -ώνδας, -ώνδης », RPh 48 (1974), p. 89-91 (= OGS I,
p. 197-199) ; D. Knoepfler, « Un législateur thébain chez Ciceron (De legibus, II xv
37) », dans M. Pierat, O. Curty (éd.), Historia testis : mélanges d’épigraphie, d’his-
toire ancienne et de philosophie offerts à Tadeusz Zawadski, Fribourg, 1989, p. 40 et
n. 9-11.
3. F. Marchand, « Rencontres onomastiques au carrefour de l’Eubée et de la Béotie »,
dans N. Badoud (éd.), Philologos Dionysios : mélanges offerts au professeur Denis
Knoepfler, Genève, 2011, p. 343-375.
580 maría luisa del barrio vega

et dans les régions voisines : en Phocide, Mégaride, Eubée et, moins fré-
quemment, en Thessalie. La présence de noms en -ώνδας dans des colo-
nies de quelques régions éloignées peut être expliquée par le fait qu’ils
existaient dans les métropoles qui les ont fondées. Un cas remarquable
est celui d’Héraclée du Pont 4, ainsi que Chersonèse et Callatis, colonies
d’Héraclée, où quelques exemples du suffixe -ωνδας sont attestés.
Il est connu que le suffixe -ωνδας présente différentes variantes :
‑ωνδας, -ωνδης (en Eubée), -ούνδας (en Thessalie) mais aussi, d’après
certains auteurs, -ονδας, dont nous parlerons plus bas.
L’étude de F. Marchand, citée plus haut, détaille plus précisément
la répartition géographique de ce suffixe. La Béotie est ainsi la région
où le plus grand nombre d’individus possédant des noms en -ωνδας (ou
ses variantes) est attesté (125 individus), suivie par la Phocide (70) et
l’Eubée (42).
Une autre information intéressante n’est pas seulement le nombre
d’exemples présents dans chaque région, mais aussi les chiffres relatifs,
à savoir la fréquence d’apparition en relation avec le nombre total des
anthroponymes attesté dans chaque région. En effet, si la Phocide pré-
sente seulement 70 individus face aux 119 documentés en Béotie, les
chiffres relatifs de ces deux régions sont très proches : 0,73 % pour la
Béotie et 0,68  % pour la Phocide. D’autre part, si seuls six anthropo-
nymes formés avec ce suffixe sont attestés en Mégaride, la proportion est
de 0,35 % du nombre total des individus documentés dans cette région,
chiffre très proche de celui de l’Eubée (0,47 %) 5.

2. Hypothèses sur la formation de -ωνδας

La question la plus problématique est sans doute la formation de ce


suffixe, pour laquelle différentes hypothèses ont été proposées.

4. Héraclée fut fondée selon la tradition par les Mégariens, associés à un contingent
béotien.
5. Cf. F. Marchand, art. cit., p. 355. Les régions qui ne présentent qu’un seul individu
(Crète, Délos, Céos, Naxos) n’ont pas été incluses par F. Marchand dans son tableau
récapitulatif des noms en -ωνδας (et ses variantes). Comme le faisait Masson pour le
nom Φειδώνδας attesté dans la Pergame éolienne (cf. art. cit., p. 91), on ne doit plus
utiliser ces témoignages isolés pour affirmer l’existence des noms en -ωνδας (ou en
-ωνδης) dans ces régions.
remarques sur le suffixe -ωνδας 581

2.1. -ωνδᾱς < -ων + -δᾱς


Selon l’hypothèse la plus commode, le suffixe -ωνδᾱς s’est formé
par l’addition directe du suffixe patronymique -δᾱς à des anthroponymes
en -ων. Cette hypothèse est admise, par exemple, par G.  Neumann 6,
F. Bechtel 7, suivi par Thumb-Kieckers 8, et plus récemment par J. Rau 9
et par G. Vottéro 10.
Cette hypothèse présente cependant quelques inconvénients. En effet,
pourquoi le suffixe -δας serait-il ajouté directement seulement à des
anthroponymes en -ων et pas à d’autres anthroponymes ? Par ailleurs,
certains noms en -ωνδας n’ont pas de nom en -ων qui leur corresponde
(cf. Ἐπαμεινώνδας, Κορδώνδας, Σκιρφώνδας, Στιώνδας…). Il faudrait
donc admettre que, après la formation des anthroponymes en -ωνδας,
cette finale a été interprétée comme un suffixe indépendant qui a été
employé pour former des anthroponymes nouveaux.

2.2. -ωνδᾱς < -ονδας < -ᾰδᾱς + -ον- des thèmes en nasale ;
-ωνίδᾱς < ‑ωνδᾱς + -ιδᾱς
Une version plus complexe de cette hypothèse a été proposée par
Solmsen en 1909 11.
En se basant sur la fréquente correspondance entre les noms en ‑αδας
et les anthroponymes en -ων, il propose les suivantes phases dans la for-
mation de -ωνδας :
6. G. Neumann, De nominibus Boeotorum propriis (diss.), Königsberg, 1908, p. 27 :
« Suffixum -δης licet apud omnes Graecorum gentes occurrat, a Boeotis propria
quadam ratione adhibebatur, qui nominibus exeuntibus in ‑ων non addebant -ιδης
(Σιμωνίδης, Τιμωνίδας), sed -δας littera ι eiecta (Κλεώνδας, Παγώνδας) ».
7. F. Bechtel, Die griechischen Dialekte, I, § 57, p. 171-172 : « Als Altertümlichkeit ist
auch der unmittelbare Antritt des Ableitungselements -δᾱ- an die konsonantischen
Stämme Εὐρον-, Κλεον-, Λεων-, Φρυνων- zu betrachten » ; cf. ibid., p. 265, § 56 ;
cf. Id., Die griechischen Dialekte, II, p. 118, § 42 et p. 185, § 34.
8. A. Thumb, E. Kieckers, Handbuch der griechischen Dialekte, I, Heidelberg, 1932,
p. 279, § 207.7.
9. J. Rau, « The Derivational History of the Greek Stems in -ád- », Harvard Working
Papers in Linguistics 12 (2007), p. 137-173. D’après ce dernier le suffixe -ωνδας /
-ονδας est un double hypocoristique formé selon l’analogie suivante: Ἄλκ-ι-ς : Ἀλκ-
ί-δης (sic, avec η) : : Κλέ-ων : x >> x = Κλεώνδας > Κλεόνδας.
10. Voir sa contribution dans ce même volume.
11. F. Solmsen, Beiträge zur griechischen Wortforschung. Erster teil, Strasbourg, 1909,
p. 103.
582 maría luisa del barrio vega

1) -ᾰδᾱς (< *-n̥ -d-eh2-s). On a d’abord un suffixe -ᾰδᾱς formé par


l’addition directe d’un suffixe -δ- à un thème en nasale au degré
zéro (n̥ > ᾰ), plus le suffixe de masculin des thèmes en -ᾱ. D’après
Solmsen, il s’agirait d’une formation parallèle à -ι-δᾱς, où le suf-
fixe dental à été ajouté à un thème en -ιος avec degré zéro : Κρό-
νιος (descendant de Κρόνος) > Κρον-ί-δας. Le suffixe -ᾰδᾱς fut
par la suite remanié en deux étapes :
2) -ᾰδᾱς et -ονδᾱς. Quand l’alternance vocalique originaire des
thèmes en nasale -ων / -ον- / -ᾰ- (< *‑n̥ -) s’est réduite à -ων / -ον-,
les patronymiques en -ᾰδᾱς ont subi l’influence du degré plein bref
de ces thèmes, et le suffixe -ονδας est apparu.
3) -ονδᾱς > -ωνδᾱς. Quand l’alternance vocalique des thèmes en
nasale s’est réduite plus encore, et que la voyelle longue s’est
étendue à tout le paradigme (-ων / -ονος > -ων / -ωνος), le suffixe
-ονδᾱς est devenu -ωνδᾱς.
4) -ωνδᾱς + -ιδᾱς > -ωνίδᾱς. Finalement, le suffixe -ωνίδᾱς est né de
l’interférence entre -ωνδᾱς et ‑ιδᾱς. Ainsi, selon l’hypothèse de
Solmsen, le suffixe -ώνδας est antérieur à -ωνίδας.
Cette hypothèse est critiquée par plusieurs auteurs, en particulier par
Szemerényi, qui se base surtout sur des arguments chronologiques. Or,
à notre avis, un autre argument à l’encontre de l’hypothèse de Solmsen
est que la variante -ονδας, avec o bref, admise par certains auteurs, ainsi
qu’une des étapes proposées par Solmsen pour aboutir au suffixe ‑ωνδας,
reste problématique, puisqu’il n’en existe pas d’exemple assuré.
En effet, on peut tout d’abord écarter les exemples de -ονδας docu-
mentés dans les inscriptions écrites en alphabet épichorique, puisqu’on ne
peut pas savoir s’il faut lire -ονδας ou -ωνδας 12. Par ailleurs, il faut aussi
écarter les exemples les plus récents, datant d’une époque où l’opposition
quantitative s’est déjà perdue, puisqu’ils peuvent être de simples erreurs
d’orthographe : par exemple, la forme Κρητόνδαι attestée à Naples (IG
XIV 743, iie p. C.), au lieu de Κριτῶνδαι, est probablement une erreur 13.

12. Cf. Χιλιō�νδας, Teiresias 1976, 3, 3a, Akraiphia, vi-ve s. a. C. ; Χαρō�νδας (2×), IG
VII 585, col. II, l. 6 et col. IV l. 7, Tanagra, 426 a. C. ; Αἐσχρō�νδας, IG VII 550,
Tanagra, s.d.
13. O. Szemerényi, Syncope in Greek and Indo-European and the Nature of Indo-
European Accent, Naples, 1964, p. 36-37.
remarques sur le suffixe -ωνδας 583

Enfin, d’autres exemples présents dans des inscriptions écrites en


alphabet ionien doivent être corrigés. Ainsi, Δρωπ̣όνδας [------] (IG VII
2812, Béotie, Hyettos, ca 205-200 a. C.) doit être corrigé en Δρωπίδας
Δ̣ρ̣ωπίδαο 14. La même chose pour Ἑρμαιόνδα̣[ς], dans IG VII 2947,
Coronée, ca 250 a. C., qui est corrigé en Ἑρμαιώνδας̣ 15 ; Κλεόνδας (IG
IX, 2, 516, Larissa 214 a. C.), qu’on a proposé de corriger Κλεο<ύ>νδας,
avec une erreur du lapicide, et enfin Χαρμόνδας, dont le génitif, attesté à
Locres Épizéphyrienne, doit probablement être aussi corrigé, puisque ce
nom se trouve dans deux inscriptions qui présentent d’autres erreurs 16.
On peut donc supposer que le suffixe -ονδας, avec o bref, n’existe
probablement pas.

2.3. -ώνδας est la variante syncopée de -ωνίδας


Selon une autre hypothèse, proposée déjà par Schmidt en 1895 17
et admise par plusieurs auteurs, ‑ώνδας seraitt la variante syncopée de
‑ωνίδας. La syncope s’est d’abord produite dans la forme du vocatif (avec
-ᾰ), où le ι n’est pas accentué à cause de l’accent récessif du vocatif :
-ών(ι)δᾰ > -ῶνδᾰ. Par la suite, la variante -ωνδα- s’est étendue à tout le
paradigme. Le principal défenseur de cette hypothèse est Szemerényi,
dans son ouvrage sur la syncope en grec ancien 18. L’objectif de Szeme-
rényi est de démontrer que :
1) en grec ancien (avant 300 a. C.) il y a de nombreux cas de perte de
voyelles brèves non accentuées (surtout i et u, mais aussi e et o ;
jamais la voyelle a) ;

14. Cf. R. Étienne, D. Knoepfler, Hyettos de Béotie et la chronologie des archontes


fédéraux entre 250 et 171 avant J.-C., Paris, 1976, p. 87-88 (= SEG 26.504 [1]).
15. Cf. P. Roesch, L. Darmezin, « Épitaphes de Coronée », ZPE 51 (1983), p. 135-156 :
cf. p. 150, nº 44 (= SEG 33.395).
16. Cf. Κρα. Φαίκωνος Χαρμόνδα, Polis ed Olympieion 6, Locres Épizéphyrienne,
ca 350-250 a. C. et Σωτ. Σίλωνος Χαρμόνδα, Polis ed Olympieion 17, Locres
Épizéphyrienne, ca 350-250 a. C.
17. J. Schmidt, Kritik der Sonantentheorie. Eine sprachwissenschaftliche Untersu-
chung, Weimar, 1895, p. 27 : « Natürlich ist nicht das betonte sondern das unbetonte
ι geschwunden in formen wie χλανιδίου, bei den patronymica in dem besonders
häufig gebrauchten vocat. -ώνιδᾰ ».
18. O. Szemerényi, op. cit., p. 41 : « The obvious linguistic solution is that -ονδας/
-ωνδας are syncopated from earlier -ονίδας/-ωνίδας. This vindicates Schmidt’s
suggestion that -ωνδ- arose in the vocatival form -ώνιδα. »
584 maría luisa del barrio vega

2) même s’il ne la favorise pas (à la différence de l’accent d’inten-


sité), l’accent de hauteur n’empêche pas la perte d’une voyelle aux
conditions suivantes : a) que la voyelle brève syncopée ne porte
pas l’accent ; b) que le mot ait au moins trois syllabes ; c) que la
voyelle se trouve entre deux consonnes simples dont au moins une
est une liquide ou une nasale.
La syncope peut aussi être favorisée par d’autres facteurs, comme la
fréquence d’usage du mot. Mais, même si ces conditions sont réunies, la
syncope peut ne pas se produire pour différentes raisons.
Certes, nombre des 44 cas possibles de syncope en grec ancien pro-
posés par Szemerényi sont assez incertains, mais plusieurs sont aussi
considérés par d’autres auteurs comme des exemples assurés de syn-
cope 19 : ἦλθον (< ἤλ(υ)θον), ἔσται (< ἔσ(ε)ται). C’est en particulier le cas
pour les formes thessaliennes : Λάσαν· τῆν Λάρισαν (Hsch.) ; Λασαίοις (=
Λαρισαίοις) 20 ; Λασσαίοι ( = att. Λαρισαίου) 21 ; Ἄπλουν (= Ἀπόλλων) 22 ;
Ἀσταγόρας, Ἀστόβουλος, Ἄστιππος, Ἀστοκράτεις (< Ἀρισταγόρας, Ἀρι-
στόβουλος, Ἀρίστιππος, Ἀριστοκράτης) 23. D’après Szemerényi, le suf-
fixe -ωνδας figure parmi les cas possibles de syncope en grec.
Ainsi, si l’hypothèse de la syncope dans la formation du suffixe
‑ωνδας est juste, nous pouvons reconstruire les étapes suivantes :
1) nom. Φιλωνίδας, voc. Φιλώνιδᾰ, acc. Φιλωνίδαν, etc.
2) nom. Φιλωνίδας, voc. Φιλῶνδᾰ (< Φιλών(ι)δᾰ), acc. Φιλωνίδαν,
etc.
3) nom. Φιλώνδας, voc. Φιλῶνδᾰ, acc. Φιλώνδαν, etc.
4) réinterprétation de Φιλώνδας comme Φιλ-ώνδας : la finale ‑ώνδας
devient alors un suffixe autonome.
5) formation d’anthroponymes nouveaux en -ωνδας qui ne corres-
pondent pas à des noms en ‑ωνίδας : Ἀσκώνδας, Διδασκαλώνδας,
Διογειτώνδας, Ἐπαμεινώνδας, Τυννώνδας, Φρυνώνδας, etc.

19. Cf. R. Thompson, « Syncope », dans G. K. Giannakis (éd.), Encyclopedia of Ancient


Greek language and linguistics, Leyde - Boston, 2014, vol. 3, p. 351.
20. Cf. IG IX, 2, 517, l. 19, Larissa, après 214 p. C. et SEG 55.605, l. 14, Larissa, iie a. C.
21. Cf. BCH 59 (1935), p. 37 (2), l. 3, Crannon, avant 141-140 a. C.
22. Cf. Ἄπλουνι (SEG 52.562, Métropolis, ive a. C. ; IG IX, 2 199, Érétrie, s.d.; etc.),
Ἄπλουνος (SEG 31.572, Crannon, ca 200 a. C.; IG IX, 2 517, Larissa, 214 a. C. ;
etc.).
23. Cf. Μ. Leumann, « Ἀστο- für Ἄριστο- auf thessalischen Inschriften », Glotta 18 / 1
(1929), p. 65-66.
remarques sur le suffixe -ωνδας 585

Si on admet la syncope en grec ancien, la question est de savoir jusqu’à


quelle époque la perte d’une voyelle brève atone était encore un chan-
gement vivant. Ceci pourrait expliquer l’apparition des deux variantes
du même nom dans une inscription funéraire d’Érétrie, Αἰσχρωνίδης
Αἰσχρώνδου 24 : les deux variantes, syncopée et non syncopée, semblent
coexister l’une à côté de l’autre, pour le père et pour le fils, respectivement.
Mais, à notre avis, c’est justement le contraire : la variante syncopée s’est
lexicalisée, elle est devenue un nom différent de la forme non syncopée
et est utilisée pour nommer le fils, évitant ainsi l’homonymie avec le nom
du père.
Un argument en faveur de l’hypothèse de la syncope est l’existence
en grec ancien d’autres cas connus d’influence du vocatif sur tout le para-
digme dans les anthroponymes : c’est le cas de l’accent des nominatifs
Φαῖδρος, Γλαῦκος, Ξάνθος, Πύρρος, Διογένης, etc. à la différence de
φαιδρός, γλαυκός, ξανθός, πυρρός, διογενής, dû à l’influence des voca-
tifs Φαῖδρε, Γλαῦκε, Ξάνθε, Διόγενες, etc. 25

2.4. Arguments contre l’hypothèse de la syncope


Le principal argument contre cette hypothèse est que, selon l’opinion
la plus répandue, la syncope n’est pas compatible avec l’accent de hau-
teur 26, mais il existe d’autres arguments contre cette interprétation. Par
exemple, il faut se demander pourquoi nous ne trouvons pas de syncope
dans d’autres anthroponymes en -ιδας, qui remplissent les mêmes
conditions que les noms en -ωνιδας (voyelle brève non accentuée entre
deux consonnes simples dont au moins une est liquide ou nasale, mot
avec au moins trois syllabes).
Mais quelques exceptions sont à noter. En effet, dans trois inscrip-
tions, deux béotiennes et une autre de Delphes, toutes les trois du iiie s.
a. C., on trouve le nom Ποιμένδας : Ποιμέ[νδας] (FD III 4:357[2],
Delphes, ca 265 a. C.) ; Λευκοδώρω Ποιμένδαο (BCH 99 [1975],
p. 77-82, l. 5, Copai, ca 260-250 a. C.) ; Ποιμένδαο Λευκοδωρίω̣ (ibid.,
p.  83-87, l. 4, Copai, ca 230 a. C.). Il faut ajouter un autre exemple,
24. AD 23, p. 132-144, no 29, sep. iiie a. C.
25. Cf. Schwyzer, GG I, p. 380 et 420. J. Kuryłowicz, L’accentuation des langues indo-
européennes, Wrocław - Cracovie, 1958, p. 116 sq.
26. Mais les choses ne sont pas claires. En effet, il y a des langues actuelles avec accent
de hauteur et syncope, comme le lituanien (cf. O. Szemerényi, op. cit., p. 282-283).
586 maría luisa del barrio vega

où le nom Ποιμένδας présente la graphie dialectale béotienne : en effet,


la lecture Λ[ε]υκόδωρος Πυμε[νίδα]ο de Dittenberger (IG VII 2782,
Copai, ca 230 a. C., l. 10), est corrigée par Te Riele 27 en Λ[ε]υκόδωρος
Πυμέ[νδα]ο. Les trois individus appartiennent certainement à la même
famille où alternent les Λευκόδωρος et les Ποιμένδας 28. Il est évident
que Ποιμενδας est la variante syncopée de Ποιμενίδας, nom documenté
à Mégalopolis (< Athènes) 29.
À Ποιμένδας il faut ajouter le nom Εὐμένδας dans une inscription
béotienne (Εὐμένδαο Ἐπωφέλιος, IG VII 2789, Copai, sans date). Le
génitif Εὐμενδαο de l’inscription avait été corrigé par l’éditeur, Ditten-
berger, comme Εὐμεν<ί>δαο. Mais, comme le montre Te Riele 30, cette
correction n’est pas nécessaire, puisqu’il s’agit d’une forme syncopée du
nom Εὐμενίδας 31.
La même chose s’est probablement produite avec d’autres noms
comme Φιλοξενίδας, Διογενίδας, etc. Ainsi, on pourrait reconstruire pour
ces noms une évolution identique à celle de Φιλώνδας. À savoir : 1) nom.
Φιλοξενίδας, vocatif Φιλοξένιδᾰ, acc. Φιλοξενίδαν ; 2) nom. Φιλοξε-
νίδας, vocatif Φιλοξένδᾰ (< Φιλοξέν(ι)δᾰ), acc. Φιλοξενίδαν ; et (peut-
être) 3) nom. Φιλοξένδας, vocatif Φιλοξένδᾰ, acc. Φιλοξένδαν. Mais,
pourquoi n’a-t-on pas interprété Ποιμένδας, Εὐμένδας, Φιλοξένδας,
Διογένδας comme Ποιμ-ένδας, Εὐμ-ένδας, Φιλοξ-ένδας, Διογ-ένδας,
etc., avec formation d’un suffixe -ένδας et par la suite une création de
nouveaux noms en -ένδας (*Φιλένδας, *Ξενένδας, etc.), comme cela s’est
produit pour -ωνδας ? À mon avis, l’analyse de Φιλώνδας (<  Φιλων(ί)
δας), Τιμώνδας (< Τιμων(ί)δας), etc., comme Φιλ-ώνδας, Τιμ-ώνδας, etc.,
était possible car la racine n’est pas touchée (l’analyse de Φιλ-ώνδας, Τιμ-
ώνδας était similaire à celle de Φιλ-ωνίδας, Τιμ-ωνίδας). Au contraire, pour
Εὐμένδας, *Φιλοξένδας, *Διογένδας (variantes syncopées de Εὐμενίδας,

27. G.-J. Te Riele, « Deux catalogues militaires de Copai », BCH 99, 1 (1975), p. 77-87.
28. Cf. Id., loc. cit.
29. Cf. IG II² 161, avant 353/2 a. C. : frag. a [προξενία Ποιμ]ενίδαι κα[ὶ ------ Μεγα]
λοπολίταις ; frag. b [Π]οιμενίδαν. Cf. Φιλοποιμενίδας Ἀ̣ν̣τίσκειος, SEG 26.672, l.
30, Larissa, 200-190 a. C.
30. Cf. Id., loc. cit.
31. D’autres noms comme Θεομένδης (IG XII Suppl., p. 115 no 235 II, 26, Céos,
iiie s. a. C.) ou Μελίνδης (IG XII, 9, 56, Styra, vie s. a. C.) pourraient être ajoutés au
dossier, mais leurs hypothétiques variantes non syncopées (*Μελινίδης? *Θεομε-
νίδης ?) ne sont pas attestées.
remarques sur le suffixe -ωνδας 587

Φιλοξενίδας, Διογενίδας) et d’autres noms similaires 32, on reconnaissait


toujours -εν- comme une partie des racines -μεν-, -ξεν-, -γεν- (cf. γένος,
ξένος, etc.), ce qui empêchait la création d’un suffixe -ενδας. Par ailleurs,
si les noms en -ωνιδας sont bien plus fréquents que d’autres anthropo-
nymes avec la même structure (les noms en -ενιδας, par exemple), il n’est
pas étonnant que les noms en -ωνδας soient bien plus fréquents.
Somme toute, comme cela s’est produit pour les anthroponymes en
-ωνιδας, la syncope de la voyelle brève atone du vocatif a aussi pu appa-
raître dans d’autres anthroponymes en -ιδας et s’étendre par la suite à
tout le paradigme. Mais, à la différence de ce qui arrive avec le suffixe
-ωνδας, la finale -ενδας (et d’autres finales similaires) ne s’est pas lexica-
lisée, et n’est pas devenue un suffixe productif indépendant.
Enfin, d’autres facteurs possibles empêchant la perte d’une voyelle
brève atone sont à envisager. Par exemple, pour certaines formes, la
perte d’une voyelle brève non accentuée aurait donné lieu à des groupes
consonantiques problématiques. Ainsi, la variante syncopée de Θεοτί-
μιδᾰ (vocatif de Θεοτιμίδᾱς) serait *Θεοτίμδᾰ, qui serait ensuite devenu
*Θεοτίνδᾰ (par assimilation), qui, à son tour, pourrait avoir donné lieu
à la création d’un nominatif *Θεοτίνδᾱς, acc. *Θεοτίνδᾱν, etc. Mais ni
la coexistence d’une variante syncopée *Θεοτίνδᾱς à côté de la variante
non syncopée Θεοτιμίδᾱς, ni l’analyse de *Θεοτίνδᾱς comme Θεοτ-
ίνδᾱς, avec la création d’un suffixe *‑ινδας, ne paraissent vraisemblables.
On pourrait dire la même chose pour des noms comme Παρνοπίδας,
Θεοπροπίδας, etc. : la syncope dans le vocatif aurait produit des formes
comme *Παρνόπδᾰ, *Θεοπρόπδᾰ, etc. qui seraient ensuite devenues
*Παρνόβδᾰ, *Θεοπρόβδᾰ, etc., à côté des variantes non syncopées Παρ-
νοπίδας, Θεοπροπίδας, etc., ce qui ne paraît pas vraisemblable.

3. Peut-on établir dans quelle région le suffixe


-ωνδας est né ?

Une autre difficulté étroitement rattachée à la formation du suffixe


‑ωνδας est d’établir dans quelle région il est né. Puisque c’est en Béotie
que les noms en -ωνδας sont les plus nombreux, la plupart des auteurs
s’accordent sur l’origine béotienne de ce suffixe. Mais il ne faut pas

32. Cf. Κλεοξενίδας, Πολυξενίδας, Τιμαγενίδας, Ἐπιγενίδας, Ἱππομενίδας, etc.


588 maría luisa del barrio vega

oublier que, comme nous l’avons vu, les chiffres relatifs de la Béotie
et de la Phocide sont très proches (0.73 et 0.68, respectivement). Les
exemples les plus anciens attestés en Béotie sont datés du viie siècle,
tandis que les plus anciens attestés en Phocide remontent au ve siècle
a. C. Concernant l’Eubée, dont les chiffres relatifs sont plus bas que ceux
de la Béotie et de la Phocide, les exemples de -ωνδης les plus anciens
sont attestés à Styra, sur les fameuses lamelles de plomb de 475 a. C.
Comme le montre F. Marchand 33, la Thessalie et Mégare n’en produisent
pas avant le ive siècle a. C. 34. Néanmoins, bien que d’une aide significa-
tive, ces datations ne sauraient être déterminantes pour établir la région
d’apparition de ce suffixe. En effet, l’étude des inscriptions est tributaire
de la manière aléatoire dont elles nous sont parvenues.
Un phénomène intéressant concernant cette question est la présence
dans ces régions de variantes de ‑ωνδας étrangères aux dialectes res-
pectifs. Les variantes -ωνδης de l’Eubée et du reste du territoire ionien-
attique ne présentent aucun problème, puisqu’elles sont les formes
dialectales attendues. On peut en dire autant de la variante dialectale du
thessalien, -ουνδας. Pour les formes -ωνδης, au lieu de ‑ωνδας, attestées
en Béotie, elle peuvent être dues à l’influence de la koinè. Les exemples
de -ωνδας présents en Eubée à la place de la forme dialectale -ωνδης sont
cependant plus difficiles à expliquer, puisqu’il s’agit d’individus qui ne
sont pas béotiens mais citoyens d’Eubée. Ils sont tous mentionnés dans
des inscriptions d’Érétrie du iiie siècle a. C., et pourraient être dus à l’in-
fluence béotienne. Les exemples pour lesquels le nom du père présente
un trait caractéristique du dialecte érétrien, comme le rhotacisme, tandis
que le nom du fils présente la forme ‑ωνδας (cf. Φιλώνδας Μνηριμάχου,
IG XII, 9 245, l. 320, Érétrie, iiie a. C.) sont encore plus remarquables.
Or, si l’on admet que -ωνδας est la variante syncopée de -ωνίδας,
nous serions tentée de penser que c’est en Thessalie, région qui fournit
un grand nombre d’exemples de perte d’une voyelle brève atone (voire
de toute une syllabe) 35 que ce suffixe serait né. Ainsi, nous pouvons
33. F. Marchand, art. cit., p. 354.
34. Concernant les colonies occidentales, on trouve Χαρώνδας à Catane, colonie
eubéenne, et Φιλώνδας à Sélinonte, fondée par des colons Mégariens de Mégara
Hyblaea, qui remontent au vie s. a. C.
35. Cf. les formes Λάσαν, Λασαίοις, Λασσαίοι, Ἄπλουν, Ἀσταγόρας, Ἀστόβουλος,
Ἄστιππος, Ἀστοκράτεις, etc., citées supra. Quelques-unes de ces formes avec syn-
cope sont attestées en Thessalie déjà au ve s. a. C.
remarques sur le suffixe -ωνδας 589

supposer que le suffixe -ωνδας a pu naître en Thessalie, pour ensuite


s’étendre à la Béotie, l’Eubée, la Phocide et d’autres régions de la Grèce
centrale, où il a eu un grand succès.

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Suffixes caractéristiques
dans l’onomastique personnelle de Béotie

Guy Vottéro
Université de Lorraine

0. Introduction

L’onomastique personnelle de Béotie à l’époque dialectale est riche


de près de 13 000 NP 1 et présente les caractéristiques suivantes :
—— à côté de quelques noms probablement d’origine obscure (= non
grecs ?, e.g. Σαρβαλος, Σαγυθιν-ος / -ιδας) et de quelques radicaux
très rares (e.g. Ϝαρμιχος, Φαρφōν < παρ(ά)φορος), c’est une ono-
mastique essentiellement grecque 2 avec des formations souvent
banales (e.g. ‑ιππος, -κλης …) ;
—— mais elle présente plusieurs spécificités :
–– elle s’est adaptée à l’environnement local et régional : dans le
choix des radicaux on peut établir une relation entre anthropo-
nymie et milieu naturel, environnement social et politique 3 ;
–– du point de vue de la suffixation, elle présente, à côté de suf-
fixes bien connus en grec et majoritaires, quelques caractéris-
tiques notables.

1. Abréviations particulières utilisées ici : NP = nom personnel ; AP = adjectif patrony-


mique ; GP = génitif patronymique ; un même NP apparaît généralement plusieurs
fois.
2. Je n’accentue pas les formes béotiennes, l’utilisation de la norme attique ne me
paraissant pas justifiée par les faits dialectaux observés.
3. Cf. G. Vottéro, « Milieu naturel, littérature et anthroponymie en Béotie à l’époque
dialectale », dans Dialectologia Graeca, p. 339-381, qui peut être facilement com-
plété par les remarques d’A. Morpurgo, « Après Michel Lejeune : l’anthroponymie
et l’histoire de la langue grecque », CRAI 145 (2001), p. 157-173, avec la notion de
« dialecte anthroponymique ».
592 guy vottéro

0.1. Démarche
La démarche suivie ici est née d’une réflexion à partir de constata-
tions simples :
—— inadéquation du vocabulaire traditionnel, e.g. -ιδας qualifié de
« suffixe patronymique » ; or, dans le dialecte béotien, on constate
que :
–– Pélopidas n’est pas le « fils de Pélops », mais d’ Ἵπποκλος
(Plut., Pélop. 3,1), cf. infra, 2, suffixe -ιδας ;
–– en fait on peut comparer un NP comme Ἀπολλων-ιδας (qui n’est
pas le « Fils d’Apollon ») à Ἀπολλων-ιος ; dans cette situation
-ιδας apparaît comme une variante combinatoire de -ιος (mais
ce dernier connaît d’autres emplois plus importants) 4 ;
—— il existe de nombreuses séries de NP qui posent la question des
diverses nuances apportées par les suffixes 5 :
–– Κεφαλος, Κεφαλ, Κεφων, Κεφωνιχος ;
–– Μενεστροτος, Μεννει, Μεννιδας, Οὐπερμενιδας ;
–– Φιθ, Φιθαδας, Φιθων, Φιθωνδας ;
–– Φιλλει, Φιλων, Φιλωνιχος, Φιλωνδας ;
–– Φρουνος / -α, Φρουνιδας, Φρουνιχος / -α, Φρουνισκος, Φρυνων ;
—— c’est par la comparaison des emplois qu’on peut essayer de pré-
ciser les valeurs fondamentales de chaque suffixe.
Sont donc étudiés ici les suffixes -ε(ι)(ς), -ιχος, -ιδας, -αδας, -ωνδας,
-ων, avec des éléments de comparaison apportés par -ιος et les suffixes
féminins -ω et -ις ; les conditions d’emploi de ces suffixes se recoupent
en effet au moins partiellement.

4. Cf. infra, 1.2, 7, et 2.3, suffixe -ιος .


5. On connaît en russe des variations de ce genre, avec des nuances de sens liées aux
suffixes pour une même personne, e.g. Natalia (officiel), usuel Natacha, très familier
Natakha / Nata, caressant Natachenka / Natusik, péjoratif Natachka… ou Vladimir
(officiel), usuel Volodia / Vova, familier Vovtchik / Volokha, caressant Vovotchka /
Volodietchka / Volodienka, péjoratif Vovka… Mais les conditions d’emploi sont
différentes en béotien : excepté chez Aristophane (cf. infra n. 21) il s’agit de per-
sonnes différentes, avec des noms tout à fait officiels (e.g. les magistrats Μιλλει,
« Molasson », pédonome à Thespies, ou Φρουνιχος, « Grenouillet », archonte à
Acraiphia, cf. infra, § 2.1).
onomastique personnelle de béotie 593

0.2. Éléments pris en compte


a) forme usuelle ;
b) variante(s) ;
c) statistiques : 1res attestations ; nombre de formes probables clas-
sées par période ; représentativité de chaque suffixe ;
d) aspects morphologiques (flexion…) ;
e) environnement phonétique et morphologique : présence d’une
géminée ? (si oui, existence d’une syllabe précédente longue ?),
autres particularités phonétiques (aspirée expressive…) ;
f) bases radicales rencontrées :
–– radicaux simples ou composés, formes tronquées, extension… ;
–– thématiques (théonymes, toponymes ou héronymes ? 6, sobri-
quets, termes laudatifs …) ;
–– présentation usuelle (dissyllabique, trisyllabique, quadrisylla-
bique …) ;
g) existence de correspondants féminins directs ? (-ω, -ις, -εια…) ;
h) catégories sociales rencontrées : quatre catégories peuvent être
établies à partir des textes socialement déterminés 7 :
–– les « notables » (e.g. stèle des cavaliers, Orchomène, IG 3206,
A-4epm ; liste de cabiriarques, Thèbes, IG 2428, A-3em ; « stèle
des magistrats » de Thespies, IThesp. no 84, A-3ef ; magistrats,
prêtres et prêtresses [e.g. BCH 50 (1926), p. 408 sq., no 28…],
leurs pères ; bénéficiaires d’inscriptions en vers 8, Monuments
Piot II (1895), p. 137-143 [= Jeffery no 1], Thèbes, E-8ef-7ed ;
IG 530, Tanagra, E-3em] ;

6. Il est souvent difficile de distinguer les deux réalités. Ainsi le nom Κερε / εισιχος
(attesté 5 fois à Thespies) renvoie a priori au toponyme Κερησσός situé sur le ter-
ritoire de Thespies, mais l’existence d’un NP comme Κερεσο-δοτος (Thespies, IG
1927, D-5e d) oriente plutôt vers un héronyme ou une divinité secondaire, comme
pour les noms de fleuves… ; pour les Grecs de l’Antiquité l’expérience du sacré était
à la fois diffuse et omniprésente.
7. C’est-à-dire permettant de préciser l’origine ou la fonction sociale d’un individu ;
cet aspect est en effet un des moyens d’aborder la question du sens des suffixes et de
déterminer quelle est leur diffusion dans la société.
8. Cf. G. Vottéro, « Boeotica epigrammata », dans J. Dion (éd.), L’épigramme de
l’Antiquité au XVIIe s. ou Du ciseau à la pointe, Nancy, 2002, p. 69-112.
594 guy vottéro

–– les « sans grade » (simples citoyens et leurs famille, cf. les


catalogues militaires, les listes de donatrices…) ;
–– les « esclaves » (cf. les actes d’affranchissement de la période
IV, dans Darmezin, p. 27-105, qui recense 117 individus, pour
80 noms différents 9 ;
–– les « indéterminé(e)s » (cf. la plupart des épitaphes, les
offrandes au Cabire [IG 3575-4126 ; Wolters-Bruns]…).
N.B. : les résultats obtenus ne peuvent être qu’indicatifs, compte tenu
de la répartition du corpus dans le temps et l’espace (cf. infra § 1), et
des usages onomastiques béotiens 10, mais, comme ils portent sur environ
12 500 entrées, ils sont vraisemblables ;
—— pour illustrer les résultats obtenus, on peut citer dès à présent
quelques situations un peu inat­tendues, e.g. Darmezin no  136
(Thespies, B-3epm 11) : Πιθθες (« Le Singe »), fils d’Aristocratès,
est un des garants de l’affranchissement de Φιλωνιδας (théorique-
ment « Fils de Philon »), l’esclave affranchi ; ou encore ibid. no 71
(Chéronée, 3ef-2ed) : Εὐκλιδας, esclave affranchi sous l’archon­tat
de [Διοκλι]δας (magistrat mentionné dans deux autres actes d’af-
franchissement contemporains, nos 60 : Διοκλείδου, et 76 : Διο-
κλίδου) ;
i) Conditions d’emploi (si elles sont connues, cf. Aristophane…) ;
j) origine (étymologie…) et évolutions possibles (suite à de nou-
velles habitudes articula­toires…).

9. C. Fragiadakis, Tyché 22 (2007), p. 9-33, donne un relevé plus complet que M. Dar-
mezin [187 entrées], mais descend jusqu’à une époque très tardive, e.g. iie s. apr.
J.-C. pour les nos 143, 160…, et d’origine diverse, e.g. tradition littéraire pour les
nos 47, 104, 185… Je ferai donc référence uniquement à l’ouvrage de Darmezin, qui
correspond mieux au cadre chronologique utilisé ici.
10. Par exemple, l’expression du patronyme ne devient usuelle qu’à partir du 4e am, et
uniquement dans les textes civiques, cf. Vottéro, « L’expression de la filiation en
béotien », Verbum 10 (1987), § 2.1 / 2, et 3.
11. Les abréviations chronologiques utilisées ici sont les suivantes : d = début, f = fin,
re
am = 1 moitié, m = milieu, pm = 2e moitié, 5ef / 4ed = fin ve / début ive s. Les
textes sont classés par catégories : A = textes civiques, B = actes d’affranchisse­ment,
C = signatures-dédicaces, D = épitaphes, E = textes poétiques, et accompagnés des
précisions suivantes : nom de la cité de prove­nance, source épigraphique, datation
approximative. Enfin, pour préciser la valeur propre de chaque anthroponyme men-
tionné, sont utilisées les abréviations suivantes : NP = nom personnel ; AP = adjectif
patronymique ; GP = génitif patronymique.
onomastique personnelle de béotie 595

0.3. Terminologie utilisée 12
—— hypocoristique : « (terme) qui exprime une intention caressante,
affectueuse, notamment dans le langage des enfants ou ses imi-
tations. Les procédés formels employés pour créer des termes
hypocoristiques sont par exemple les suffixes dits « diminutifs »
(fillette), le redouble­ment (chien-chien, fifille), l’abrègement des
prénoms (Mado, Alex), ou le choix de termes conventionnellement
hypocoristiques (fr. mon petit poulet, mon chou)… » (Mounin
1974), voir aussi l’étude du terme dans les sources antiques dans
l’introduction du présent volume ;
—— sobriquet : « surnom familier que l’on donne à une personne avec
une intention moqueuse ou plaisante, faisant référence à des parti-
cularités physiques ou à des traits de caractère de cette personne,
à son origine sociale ou géographique, à son métier, à une anec-
dote de sa vie ou encore formé sur un jeu de mots… » (définition
du CNRTL-ATILF) ;
—— expressivité : « trait linguistique inhabituel, limité à certains
contextes d’élocution 13, et qui se traduit par des particularités pho-
nétiques diverses, comme la réduplication de syllabes, la gémina-
tion de consonnes… » 14 ;
—— aspiration et gémination expressives : sera donc considérée
comme relevant de l’expressivité toute aspirée ou géminée pré-
sente dans un NP, alors qu’elle est absente du radical de base, e.g.
Φιθων (< πίθηκος), Μεννει (< μενε-…).

0.4. Corpus utilisé
—— le corpus dialectal béotien (cf. le répertoire de Vottéro 2001 + mise
à jour) ;

12. Dans sa conclusion aux travaux du colloque C. Le Feuvre avait fait remarquer fort
pertinemment que le vocabulaire utilisé dans les différentes communications man-
quait parfois de clarté. Je précise donc ici le sens des différents termes que j’emploie.
13. E.g. l’emploi en fonction de vocatif (cf. M.  Grammont, Traité de phonétique,
Paris, 1939, p. 382, J. Kuryłowicz, « La gémination consonantique dans les noms
propres », BSL 62 (1967), p. 2).
14. Le point commun est l’augmentation de l’énergie articulatoire.
596 guy vottéro

—— un choix de textes en koinè (dans certains cas en effet l’anthropo-


nymie peut survivre à la disparition du dialecte, au moins un cer-
tain temps) :
–– catalogues militaires (notamment de Thespies, fournissant des
listes de noms comparables aux équivalents dialectaux) ;
–– textes civiques caractéristiques (et en général assez facile-
ment datables), e.g. la « remise des comptes » de l’hipparque
Pompid[ès] à Thèbes (IG 2426, ca 170), le « palmarès des
Amphiaraia et Romaia » d’Oropos (IG 420 = IOropos 528, ca
60 a. C. ; à comparer avec le « palmarès des Charitesia » d’Or-
chomène, en pseudo-dialecte du ier s. a. C. ;
—— les versions livresques (notamment le volume 3b) et internet du
LGPN, outils indispensables pour les études sur l’anthroponymie
grecque, nonobstant les limites épistémologiques liées à ce type de
dictionnaire (cf. infra note 26).

1. Constatations générales

1.0. Données de base
1.0.1. Carte de Béotie
onomastique personnelle de béotie 597
598 guy vottéro

1.0.2. Liste et principales caractéristiques des cités 15


—— cités du bassin du Copais (= Nord - Nord-Ouest) :
–– périodes I-II 16 : Ariarte (13, dont « notables » —), Coronée
(23, dont « notables » —), Lébadée (12, dont « notables »
4), Chéronée (3, dont « notables » —), Orchomène (28, dont
« notables » —), Hyettos (1, dont « notables » —), Copai (3,
dont « notables » —), Acraiphia (70, dont « notables » 3) ;
total : 153, dont « notables » 7 ;
–– périodes III-IV : Ariarte (98, dont « notables » 18), Coronée
(340, dont « notables » 27), Lébadée (281, dont « notables »
37), Chéronée (363, dont « notables » 67), Orchomène (1674,
dont « notables » 365), Hyettos (767, dont « notables » 254),
Copai (432, dont « notables » 127), Acraiphia (957, dont
« notables » 243) ; total : 4912, dont « notables » 1138 ;
—— cités des plaines et plateaux du Sud - Sud-Est :
–– périodes I-II : Thèbes (299, dont « notables » 2), Mycalettos
(27, dont « notables » —), Anthédon (5, dont « notables »
—), Tanagra (195, dont « notables » —), Platées (10, dont
« notables » 1), Thespies (306, dont « notables » 3), Thisbé (8,
dont « notables » —), Siphai (—, dont « notables » —), Chorsia
(—, dont « notables » —) ; total : 850, dont « notables » 6 ;
–– périodes III-IV : Thèbes (842, dont « notables » 159),
Mycalettos (5, dont « notables » —), Anthédon (101, dont
« notables » 2), Tanagra (1375, dont « notables » 107), Platées
(136, dont « notables » 29), Thespies (3467, dont « notables »
507), Thisbé (256, dont « notables » 35), Siphai (20, dont
« notables » —), Chorsia (31, dont « notables » 9) ; total :
6233, dont « notables » 848 ;
—— textes sans provenance précise en Béotie ou trouvés hors de Béotie
(= in B. , ex B.) :

15. On peut distinguer deux grands sous-ensembles en Béotie : le bassin du Copais au


Nord et Nord-Ouest, et la région des plaines et plateaux du Sud et Sud-Est (cf. G. Vot-
téro, Le dialecte béotien (VIIe s.-IIe s. av. J.-C.), I. L’écologie du dialecte, Nancy,
1998, p. 11-49, et II. Répertoire raisonné des inscriptions dialectales, 2001, p. 24-61).
16. La périodisation des inscriptions béotiennes peut être établie ainsi : a) textes en
alphabet épichorique : période I = 8ef-5eam ; période II = 5em-4eam ; b) textes en
alphabet ionien-attique : période III = 4eam-3em ; période IV = 3epm-2eam (cf.
G. Vottéro, op. cit., II, p. 24-25).
onomastique personnelle de béotie 599

–– périodes I-II : in B. (76, « notables » —), ex B. (34, « notables »


2) ; total : 110, dont « notables » 2 ;
–– périodes III-IV : in B. (41, dont « notables » —), ex B. (106,
dont « notables » 74) ; total : 147, dont « notables » 74.

1.1. On observe donc les faits suivants


a) Répartition des NP dans le temps
Elle est très inégale :
—— périodes I-II : 9 % du total des NP ; les inscriptions sont alors bien
moins nombreuses, plus courtes et souvent plus fragmentaires
qu’ensuite ; les NP sont donc moins bien représentés, excepté dans
quatre cités (cf. infra, c) ;
—— périodes III-IV : 91 % du total des NP ; ces deux périodes, cor-
respondant aux inscriptions en alphabet ionien-attique, offrent les
textes les plus nombreux et les plus variés ;
—— in B., ex B. : les NP concernés sont peu nombreux (117 et 140
respectivement) et leur distribution est liée à la nature des ins-
criptions rencontrées, notamment des signatures-dédicaces d’arti-
sans ou d’artistes difficiles à localiser précisément (cf. in B. aux
périodes I-II), et des textes civiques provenant de l’Amphiaraion
d’Oropos (cf. ex B. aux périodes III-IV) ; les variations tempo-
relles observées ne sont donc pas très significatives.
b) Répartition des NP dans l’espace
Leur distribution est la suivante :
—— cités du bassin du Copais (= Nord - Nord-Ouest) : 41 % du total
des NP ;
—— cités des plaines et plateaux du Sud - Sud-Est : 57 % du total des
NP ;
—— in B. + ex B. : 2 % du total des NP.
Ainsi la zone du bassin du Copais fournit-elle moins d’inscriptions,
donc moins de NP, que l’autre zone ; cette situation paraît due à la pré-
sence autour du Copais de cités moins importantes qu’ailleurs, ainsi
qu’aux aléas de l’histoire de la région 17.

17. Cf. G. Vottéro, op. cit., II (tableaux des p. 62-66) et I, p. 51-122.


600 guy vottéro

c) Répartition des NP dans l’espace et le temps


—— cités du bassin du Copais : périodes I-II : 3 % des NP locaux ;
périodes III-IV : 97 % des NP locaux ;
—— cités du Sud - Sud-Est : périodes I-II : 12 % des NP locaux ;
périodes III-IV : 88 % des NP locaux ;
—— in B., ex B. : périodes I-II : 43 % des NP locaux ; périodes III-IV :
57 % des NP locaux.
Aux périodes I-II seuls les corpus d’Acraiphia, Thèbes, Tanagra et
Thespies 18 (avec respectivement 70, 300, 195 et 306 NP) peuvent per-
mettre des comparaisons avec les autres périodes.
d) Répartition des « notables »
—— cités du bassin du Copais : 1,4 % du total des NP ; périodes I-II :
4,6 % des NP locaux ; périodes III-IV : 23,1 % des NP locaux ;
—— cités du Sud - Sud-Est : 7 % du total des NP ; périodes I-II : 0,7 %
des NP locaux ; périodes III-IV : 13,6 % des NP locaux.
Le faible pourcentage observé pour les périodes I-II peut être expliqué
par le faible nombre d’inscriptions, mais aussi par le système politique
oligarchique en vigueur durant cette période (le changement d’alphabet
semblant coïncider avec l’établissement d’un régime d’inspiration
démocratique 19).
e) Corpus significatifs
—— les corpus locaux inférieurs à 200 NP (et même 300 NP) paraissent
peu significatifs, ils ne peuvent donc entrer que dans le décompte
par zone et le décompte régional des NP ; il s’agit de ceux d’Ariarte,
Mycalettos, Anthédon, Platées, Siphai, Chorsia ;
—— pour les périodes I-II, cf. supra ;

18. Orchomène n’apparaît pas ici, alors que son corpus global est plus important que
celui de Thèbes et que cette cité est très ancienne (les Orchoméniens prétendaient
en effet être les descendants des Minyens du IIe millénaire) ; peut-être cette situa-
tion est-elle due à la destruction de la ville en 364 par les Thébains et leurs alliés (cf.
G. Vottéro, op. cit., I, p. 81-90) ; on pourrait penser aussi au régime oligarchique très
conservateur de cette cité (ibid.).
19. Cf. G. Vottéro, « L’alphabet ionien-attique en Béotie », dans Le IVe siècle grec : his-
toire et historiographie. Études réunies par P. Carlier, p. 157-181, Nancy, 1996 / 2,
p. 174-180.
onomastique personnelle de béotie 601

—— les périodes III-IV fournissent le plus d’exemples statistiquement


utilisables, à la fois sur le plan global et pour l’étude de l’onomas-
tique des « notables » ; à ces périodes, les corpus locaux significa-
tifs sont ceux d’Orchomène, Hyettos, Acraiphia, Thèbes, Tanagra,
Thespies ; ceux de Coronée, Lébadée, Chéronée, Copai et Thisbè
peuvent apporter des précisions complémentaires.

1.2. Données statistiques simplifiées pour chaque suffixe


1) -ε(ι)(ς) : 133 exemples environ 20, dont 29 « notables » ; ce suffixe
est donc globalement peu représenté (1,1 % des NP ; 1,4 % des
« notables »), mais il est attesté dans tous les corpus locaux impor-
tants, et fréquemment dans les petits corpus ; il est connu dès la
période I à Acraiphia, Thèbes et ex B. (7 ex. en tout), mais la majo-
rité des exemples date des périodes III-IV ; il est mieux attesté
à Orchomène (2,5 %) qu’à Tanagra et Thespies (0,6 et 0,7  %),
Thèbes et Acraiphia occupant une position médiane (1,3 et 1,2 %) ;
en tant que tel, ce suffixe est attesté pour des « notables » dans les
principales cités, mais n’est relativement prisé qu’à Orchomène
(4,1 %) ; il est inconnu pour les esclaves ;
2) -ιχος / -α : 462 exemples, dont 47 « notables » ; ce suffixe est
mieux représenté que le précédent (3,7  % des NP ; 2,3 % des
« notables ») ; il est attesté dans la plupart des corpus locaux et
les variations d’un corpus local à un autre sont assez peu impor-
tantes ; il est connu dès la période I à Acraiphia, Thèbes, Tanagra,
Thespies et in B. (10 ex. en tout) ; en tant que tel, il est plus prisé
des « notables » à Acraiphia et Thèbes (4 et 3,7 %) qu’à Orcho-
mène, Tanagra et Thespies (de 1,9 à 1 %) ; il est inconnu pour les
esclaves hommes 21, mais est attesté pour 5 femmes à Chéronée

20. Cf. infra 2, suffixe -ε(ι)(ς), p. 605-606.


21. Dans les Acharniens, v. 861 / 954, l’esclave du marchand béotien s’appelle tantôt
Ἱσμηνίας, tantôt Ἱσμήνιχος ; il faut probablement y voir la volonté d’Aristophane
de renforcer la « couleur locale » du passage en utilisant à la fois un célèbre théo-
nyme / hydronyme béotien, et un suffixe béotien perçu comme tout aussi caracté-
ristique (cf. G. Vottéro, « Milieu naturel, littérature et anthroponymie en Béotie à
l’époque dialectale », dans Dialectologia Graeca, p. 339-340, § 0, et infra 2, suffixe
-ιχος / α).
602 guy vottéro

avec deux radicaux de même thématique (Σωσιχα et Σωτηριχα, cf.


infra, 2.1.2) ;
3) -ιδας : 702 exemples, dont 153 « notables » ; ce suffixe est globale-
ment assez bien représenté (5,7 % des NP ; 7,4 % des « notables ») ;
il est attesté dans la plupart des corpus locaux ; il est connu dès la
période I à Thèbes, Mycalettos, Tanagra, Thespies, in B. et ex B.
(31 ex. en tout) ; aux périodes III-IV, il est particulièrement fré-
quent à Lébadée, Orchomène, Hyettos, Copai et Acraiphia ; en tant
que tel, il est assez prisé des « notables » ; il est attesté à 3 reprises
pour des esclaves (cf. Darmezin, nos 22 et 71 [Chéronée] et no 138
[Thespies]) ;
4) -αδας : 80 exemples, dont 13 « notables » ; ce suffixe est peu
représenté (0,6 % des NP ; 0,6 % des « notables ») ; il n’est donc
pas attesté partout ; mais il est connu dès la période I à Acrai-
phia, Thèbes, Tanagra, Platées, in B. et ex B. (8 ex. en tout) ; il est
inconnu pour les esclaves ;
5) -ωνδας : 101 exemples, dont 25 « notables » ; ce suffixe est peu
représenté (0,8 % des NP ; 1,2 % des « notables ») ; c’est à Thèbes
qu’il est le plus fréquent : cette cité fournit le 1/4 de tous les
exemples (la moitié aux périodes I et II) ; rare aux périodes I-II
dans les autres cités, il est attesté à la période IV dans la majo-
rité des corpus locaux, et principalement dans les cités du bassin
du Copais ; ailleurs il n’apparaît qu’à Tanagra et Thespies ; c’est à
Acraiphia et Thèbes qu’il est le plus prisé par les « notables » ; il
est inconnu pour les esclaves ;
6) -ων : 1995 exemples, dont 352 « notables » ; ce suffixe est donc
très bien représenté (16,1 % des NP ; 16,4 % des « notables ») ;
il est attesté à toutes les périodes (e.g. 50 ex. en période I, 108
en I-II, principalement à Acraiphia, Thèbes, Tanagra et Thespies),
dans tous les corpus locaux, même petits ; en tant que tel, il est
prisé des « notables », mais il est aussi utilisé pour les esclaves
(7 ex. pour 5 entrées différentes) ; on observe également une évo-
lution historique remarquable (voir ci-dessous) ;
7) -ιος : 320 exemples 22, dont 31 « notables » ; étudié sous l’angle
des NP (et non des AP), ce suffixe est assez peu représenté (2,6 %
22. Ne sont comptabilisés ici que les emplois comme noms personnels ordinaires (NP), et
non les emplois en tant qu’adjectifs patronymiques (AP) qui sont une forme dérivée.
onomastique personnelle de béotie 603

des NP ; 1,4 % des « notables »), mais il est attesté à toutes les
périodes (dès la période I à Acraiphia, Thèbes et Tanagra + in B.),
dans tous les corpus locaux importants, et fréquemment dans les
petits corpus ; les variations entre I-II et III-IV sont insignifiantes ;
il est mieux représenté dans le corpus des cités du Sud - Sud-Est
que dans celles du bassin du Copais (3% ~ 2,1%), mais, pour les
« notables », c’est l’inverse (2,2% ~ 0,6%) ; il est assez fréquent
pour les esclaves (19 ex., pour 12 entrées) ;
8) -ισκος : 40 exemples environ, dont 2 « notables » ; ce suffixe est
donc très peu représenté (0,3 % des NP ; 0,1 % des « notables ») ;
il est dès lors impossible de faire une comparaison avec les autres
suffixes ; on notera les quelques éléments suivants : a) il est
presque inconnu en I-II (1 ex.), l’essentiel des exemples provient
des périodes III-IV, plus particulièrement des iiie-iie s. ; b) il n’ap-
paraît chez les « notables » qu’à la période IV ; c) son absence
pour les esclaves n’est pas significative étant donnée sa très faible
attestation.

1.3. Fréquence des suffixes


La fréquence des cinq premiers suffixes diminue à partir du iiie s. et
ils finissent par disparaître à plus ou moins brève échéance (cf. infra,
§ 2) ; en revanche -ων connaît une évolution inverse.
Cette situation peut s’expliquer d’abord par les liens existants entre
ces suffixes et le dialecte béotien :
—— -ε(ι)(ς) n’existe quasiment pas en dehors de la Béotie 23 ; il dispa-
raît avec le dialecte (pour le détail, cf. § 2.1.1) ;
—— -ιχος / -α ne présente pas de grandes spécificités linguistiques, mais
il est peu fréquent en dehors de la Grèce centrale, et plus particu-
lièrement de la Béotie ; il disparaît lentement (cf. infra, § 2.1.2) ;
—— -ιδας, -αδας et -ωνδας présentent une phonétique typiquement
béotienne (et dorienne) par la présence de a:, mais la transposi-
tion pour en faire des formes de koinè était facile, et, de fait, -ίδης,
-άδης et -ώνδης sont attestés ; or les listes fournies par le LGPN
montrent que les faits onomastiques ne se réduisent pas à une
23. D’après les relevés de la base en ligne du LGPN, il n’existe que deux entrées lexi-
cales de ce type hors de Béotie.
604 guy vottéro

simple substitution de voyelle : les NP en -ίδης, -άδης et -ώνδης


sont en forte diminution dans la région 24 ;
—— il en va bien différemment de -ων : à partir du iiie s., et plus par-
ticulièrement dans les textes du 3e pm-2e am, la fréquence de
ce suffixe augmente fortement (elle passe de 9,7 % à 16,7 % en
moyenne ; à Acraiphia : de 11,4 à 15,5 % ; à Thèbes : de 11,4 à 15,
8 %) ; c’est à Tanagra qu’elle est la plus faible (de 8,2 à 9,5 %), à
Thespies qu’elle est la plus forte (de 7,5 à 20,5 %) ; dans certains
catalogues militaires de Thespies (e.g. IThesp. nos 102, 117-119,
A-iie s.), on compte ainsi près de 30 % de noms en -ων.
Et, alors qu’il était quasi inconnu en I-II pour les « notables », ce suf-
fixe est utilisé couramment à partir du 4e m, et surtout du iiie s. (17 %) ; à
Thespies, la « stèle des magistrats » (IThesp. no 84, A-3ef) porte 64 noms
en -ων sur 198, soit plus d’un nom sur quatre. En comparaison, pour
l’ensemble des périodes I-II, on constate qu’aucun nom de « notable »
ne présente ce suffixe.
Autre élément de comparaison : les listes de noms de citoyens des
5epm-4eam (Thèbes, IG 2427, A-4eam ; Tanagra, IG 585, A-5epm, et
IThesp. no 484, A-5epm) comportent seulement 22 NP en -ων sur un total
de 260 NP (soit 8,5 %).
Le succès de ce suffixe ne peut pas s’expliquer par des raisons phoné-
tiques, puisque phonétique dialectale et koinè se rejoignent ici (cf. infra,
2.3 et 2.4).
—— Le suffixe -ιος subsiste avec la koinè (c’est un suffixe très ancien et
généralisé en grec), et, sous l’empire romain, il pouvait apparaître
comme l’équivalent exact du suffixe latin -ius, cf. Λευκιος trans-
crivant Lucius (e.g. Thespies, IG 1808, A-2eam).
—— Pour -ισκος les chiffres ne sont pas probants (cf. supra, § 1.2, 8).

24. Chiffres fournis par le LGPN en ligne pour le volume 3b : -ιδας : 1 796 occurrences
~ -ίδης : 372 ; -αδας : 336 ~ ‑άδης : 91 ; -ωνδας : 194 ~ -ώνδης : 14.
onomastique personnelle de béotie 605

2. Quelques caractéristiques notables 25

2.1. Forme usuelle et variantes


2.1.1.  -ε(ι)(ς) : la forme exacte de ce suffixe ne se laisse pas déter-
miner au premier abord, car il connaît des variations graphiques nom-
breuses 26, liées à l’évolution phonétique du dialecte et à des phénomènes
d’analogie.
On rencontre ainsi deux séries de formes :
—— une série à finale asigmatique : E / EI / H ;
—— une série à finale sigmatique : EΣ / EIΣ / HΣ.
Les variations E / EI / H sont banales en béotien : elles traduisent la
fermeture de *e: > e: > i:, acquise dès la fin du ve s. 27, la graphie H
apparaissant à une date tardive, vraisemblablement sous l’influence des
usages graphiques de la koinè. La présence de la sifflante finale, elle,
s’explique par l’influence analogique des thèmes en -s, la forme primi-
tive de ce suffixe étant vraisemblablement e­ : (cf. infra).
L’identification des NP comportant ce suffixe est parfois difficile.
Elle est facile dans un certain nombre de cas, quand les NP sont connus
sous deux, voire trois, formes : nominatif, génitif et / ou adjectif patrony-
mique, e.g. : Πτοιλλ / Πτοιλλει, Πτωιλλιος (GP), Πτοιλλιο(ς) (AP), cf.
infra.
Mais, à côté de ces exemples clairs, d’autres sont moins assurés, voire
incertains :
—— Βιουτη (NP masculin ; IG 1753, Thespies, A-3epm) : une forme
Βιοττεις est attestée à Hyettos (IG 2828, A-2eam), à côté de

25. Il n’était pas possible, dans la limite du nombre de pages imparti pour chaque contri-
bution, de présenter la totalité des faits. J’ai donc choisi les éléments les plus trans-
posables à d’autres corpus.
26. Et qui, pour des raisons liées à l’utilisation de l’outil informatique et à ses possibilités
de consultation, rendent ici le LGPN 3b difficilement utilisable sans contrôle systéma-
tique du texte des inscriptions. En effet plus de la moitié des NP en -ε(ι)(ς)… appa-
raît à une autre forme que celle du nominatif : génitif, GP, AP, rarement accusatif ou
datif ; il est donc impossible, sans faire de choix purement arbitraire, de reconstituer
la forme exacte du nominatif. Cela conduit naturellement à des chiffres d’attestation
approximatifs (cf. infra).
27. Cf. G. Vottéro, « À propos du signe ˫ en béotien », Verbum 18, nos 3-4 (1995-1996),
§ 3.
606 guy vottéro

Βιοττος (Orchomène, IG 3175, A-3em) ; il est donc probable que


Bιουτη est une variante tardive du premier, avec a) fermeture de
o > u au contact du i > j précédent, b) non-notation de la géminée
(cf. infra) et c) variante graphique H ;
—— Φαουλλιος (AP ; IG 3206, Orchomène, A-4epm) : dans IG VII et
dans LGPN III b, ce nom est classé sous Φαουλλος, car il existe à
Acraiphia (IG 2716, A-3epm) un Ἀθανιας Φαυλλω ; mais on ne peut
écarter un nominatif *Φαουλλει(ς), sur le modèle de Bραχουλλει(ς)
(attesté à Tanagra, Hyettos…, cf. IG 538, A-4em / 3em, IG 2818,
A-2ed), parallèlement à un génitif Bρoχουλλω (Chéronée, Dar-
mezin no 51, B-3ef / 2ed), les NP en -υλλει(ς) / -ιλλει(ς) paraissant
avoir été concurrencés par les formes en ‑υλλος / -ιλλος au iiie s.
(cf. infra § 2.4).
Au total, les NP en -ε(ι)(ς) représentent environ 70 entrées lexicales
pour 130 attestations ; sur ce total de 130 formes environ, plus de 60
sont inutilisables pour déterminer le nominatif exact (elles sont à un
autre cas…, cf. note 26), et il faut leur ajouter les formes incomplètes sur
la pierre (e.g. Ἐμπεδδε[ι], Lébadée, IG 3086, A-5epm ; Βραχυλλε[…],
Tanagra, IG 538, A-4em / 3em). Pour la soixantaine de formes claires, on
observe la situation suivante :
—— nominatif asigmatique : 47 ~ sigmatique : 13 ;
—— géminée présente : 53 ~ absente : 9 ;
—— les premières finales en -s assurées 28 se rencontrent à la période
III (Βουκαττης, Tanagra, IG 868, D-4em / 3em ; Βουκαττς, Orcho-
mène, IG 3270, D-4e-3e ?).
Si l’on accepte d’étendre ces constatations à la totalité des exemples,
on peut préciser les caractéristiques de ce suffixe :
—— il est constitué d’un élément vocalique *e: (> i: par évolution
phonétique) 29 ;
—— cette voyelle est précédée normalement d’une consonne géminée,
les formes sans géminée étant soit archaïques (e .g. Φιθ, in B.,
Glotta 18 (1930), p. 1-4 [C-6e], mais Θιθθ, Thèbes, AE 1920, 28,

28. Une épitaphe de Thespies présente Δρυμς (IThesp. no 535, D-5epm), que l’on est
tenté de rapprocher de [Δρ ?]υμμ (Thèbes, ΑΔ 26 (1971), chron. p. 220, D-5e), mais
la forme n’est pas assurée.
29. Élément d’origine obscure, faute de correspondant précis en grec.
onomastique personnelle de béotie 607

no 2, D-6ef / 5ed), soit tardives (e.g. Βιουτη, cité supra), c’est-à-dire


deux périodes où les géminées ne sont pas régulièrement notées
(usages graphiques dans le premier cas, évolution phonétique pour
le second) ;
—— les formes sigmatiques sont secondaires ; rares anciennement, un
peu plus nombreuses en IV, elles témoignent de l’influence analo-
gique des thèmes en -s, dont le suffixe -ε(ι)(ς) partage l’essentiel
de la flexion excepté au Nominatif (e.g. au iiie s. -EI, -EIN, -IOΣ,
-I pour -ε(ι)(ς), -EIΣ, -EIN, -IOΣ, -I pour *-ε:s) ;
—— autres particularités morphologiques : a) -ε(ι)(ς) peut être associé
à des suffixes à géminée comme -ull-, -ill-, e.g. Βραχυλλεις, Εἱρω-
ιλλει (Copai, IG 2781, A-3em) ; b) il n’a pas de forme propre de
féminin ; ses correspondants féminins sont principalement -ω et -ις
– rarement ‑εια –, avec lesquels il forme des couples, e.g. Ξεννει
(Tanagra, IG 537, A-4em / 3em) ~ Ξεννω (Acraiphia, BCH 22,
1898, p. 253, no 9, D-3eam), *Κεφαλλει(ς) (GP, Hyettos, Hyettos
p. 77-81, no 2, A-3ef) ~ Κεφαλλις (Orchomène, IG 3230, D-5ef),
Πτωιλλει (Copai, BCH 99, 1975, p. 77-82, no 1, A-3em) ~ Πτω-
ιλλεια (Thespies, IThesp. no 220, C-4em / 3em ; il ne s’agit pas ici
d’un AP, mais d’un NP) ; c) l’AP qui en dérive a généralement la
forme -ιος 30 au Nominatif, e.g. Πτοιλλιο(ς) (Thèbes, IG 2427, l.
8, A-4eam) ~ Πτοιλλε (ibid., l. 12), cette finale étant semblable à
celle du génitif du NP, e.g. Πτωιλλιος (Copai, IG 2787, A-3epm) ;
les exemples de cet adjectif aux autres cas sont rares 31, mais on en
a au moins un exemple sûr : Πουθιλλιω, AP de Πουθιλλει (Orcho-
mène, Ath. Mitth. 49, 1924, p. 125-131, no 19b, l.  4-5 et 12A-
3epm).
En vertu des caractéristiques définies ici, il faut envisager d’inté-
grer dans la catégorie des noms en -ε(ι)(ς) bon nombre de formes de
génitif en ΙΩ que LGPN rattache à des nominatifs thématiques en ‑os, cf.
Φαουλλιος (supra), Βροχχιω (Acraiphia, IG 2724b, A-3epm), Χαρυλλιω
(Copai, IG 2782, A-3epm)…

30. La graphie ΕΙΟΣ étymologiquement attendue est rare, e.g. Διογειτων Ποταμμειος
Ὀρχομενιος (ex B. [Étolie], IG IX 12, 25, l. 34, A-3epm), et, phonétiquement, corres-
pond exactement à ΙΟΣ, cf. n. 27.
31. Il en est ainsi de tous les AP, cf. G. Vottéro, art. cit., 1987, § 2.2.2.
608 guy vottéro

Ce suffixe étant attesté essentiellement en Béotie (cf. n. 23) et unique-


ment dans les inscriptions 32, on ne peut étudier sa valeur intrinsèque qu’à
travers les exemples rencontrés ; on constate donc qu’il correspond à :
—— des hypocoristiques : formes abrégées du deuxième élément de
composés, e.g. Καφισοττει (Lébadée, IG 3068, A-3epm ; cf. Καφι-
σοτιμος), Τιμολλει (Orchomène, IG 3175, A-3eam ; cf. Τιμολαος),
Ποταμμε[ι] 33 (Orchomène, Ath. Mitth. 49 (1924), p. 125-131, no
19b, A-3epm ; cf. Ποταμο-δωρος / -δοτος), ou du premier élément,
e.g. [Προ]ππει (Orchomène, IG 3206, A-4epm ; cf. Θεοπροπος),
Θαλλεις (IThesp. no 202, A-3epm ; cf. Δαμοθαλης, θάλος « jeune
pousse ») ;
—— des sobriquets formés à partir de termes d’origine diverse : noms
de mois ou de saison, e.g. Βουκαττει (Orchomène, IG 3180, A-3ef ;
cf. Βουκάτιος nom de mois béotien), Χιόννης (cf. infra et Χιονιος,
GP, Orchomène, IG 3174, A-3epm ; cf. χιών) ; noms de plantes,
e.g. Καλαμμ (Acraiphia, IG 2745, D-5ef / 4eam ; cf. κάλαμος),
Ἀκυλλ (Tanagra, IG 585, A-5epm ; cf. ἄκυλος « gland comes-
tible ») ; défauts physiques ou autres, e.g. [Κ]εφαλ (Thèbes, Wol-
ters-Bruns no 106, C-5eam, cf. Κεφαλλιος, GP, Hyettos, p. 77-81,
no 2, A-3ef / 2ed), Μιλλει (IThesp. no 102, A-2ed , cf. μιλός « mou,
indolent », DELG s.v.)… ;
—— des dérivés directs de théonymes ou toponymes (cf. n. 7), e.g.
[Κ]αφισσει (Acraiphia, SEG 3, 360, A-3ef ; cf. le lac Καφισις ou le
fleuve Καφισος), Πτωιλλει (Orchomène, IG 3180, A-3ef ; cf. l’épi-
clèse Πτωιος ou le mont Πτωιον) ; la valeur intrinsèque de ces NP
ne se laisse pas formaliser facilement, mais il me semble que la
notion de sobriquet est à écarter ici, étant donné la sémantique des
radicaux, et qu’il est préférable d’y voir des hypocoristiques.
Les noms en -ε(ι)(ς) peuvent être portés par des « notables », e.g.
Ἐμπεδδε[ι] (Lébadée, IG 3086, A-5epm, et IG 3086, A-4em / 3em),

32. Les textes littéraires ne le connaissent pas, mais dans certains cas on peut vérifier
qu’il s’agit de corrections vraisemblablement apportées par les copistes qui igno-
raient l’existence de tels NP (cf. le patronyme d’Épaminondas devenu Πόλυμνις ou
Κλέομμις selon les auteurs, Plutarque ou Pausanias).
33. Sur Καφισο- et le sens à donner à l’emploi de πόταμος, cf. G. Vottéro, art. cit., 1993,
§ 1.1.3.1 / 2.
onomastique personnelle de béotie 609

[Προ]ππει (Orchomène, IG 3206, A-4epm), Μιλλεις (IThesp. no 84,


A-3ef) ; ils rappellent des cognomina romains comme Nasica, Cicero…
2.1.2. -ιχος / -α : hormis la présence d’une aspirée, ce suffixe ne présente
pas de particularités phonétique ou morphologique : il s’ajoute au radical
sans difficulté (comme -ικος, -ισκος…), il est aisément identifiable et son
féminin (-ιχα) se forme sans difficulté ; la seule « bizarrerie » rencon-
trée est une forme d’époque romaine, [Δ]ομέστιχος (Thèbes, IG 2443 a,
A-iie s. apr. J.-C.), transposition du latin Domesticus ; la graphie ‹Χ› pour
‹Κ› attendu est surprenante et ne reçoit aucune explication phonétique
satisfaisante (à cette période, les occlusives aspirées se sont spirantisées
et ne peuvent donc être rendues par un [k] latin) ; il faut donc vraisem-
blablement y voir une volonté de « faire béotien », d’autres NP en -ιχος
étant présents dans ce catalogue.
De même l’adjonction du suffixe d’AP -ios / -ia ne pose pas de diffi-
culté 34, comme le montrent les exemples cités infra.
Le suffixe est attesté ailleurs qu’en Béotie (cf. LGPN) 35, mais il est
particulièrement fréquent dans la région : à partir du LGPN en ligne,
on peut estimer à 40% environ du total le nombre de NP béotiens en
-ιχος / -α).
Pour étudier la valeur intrinsèque de ce suffixe, nous disposons de
deux sources : a) la littérature, et plus particulièrement le témoignage
d’Aristophane (cf. supra n. 21) ; l’utilisation par le marchand béotien de
la forme Ἱσμήνιχος (au lieu d’Ἱσμηνίας donné initialement, v. 861) pour
appeler son esclave est interprétée par tous les traducteurs 36 comme un
diminutif affectueux, e.g. « mon petit Hisménias » (CUF) ; b) l’analyse
précise des bases lexicales auxquelles il est ajouté ; on constate ainsi qu’il
s’ajoute à :
—— des composés à valeur laudative, e.g. Εὐγειτιχο (Gén., Acrai-
phia-Proion, Ducat no 242, E-5eam, cf. γείτων 37) ; Ἐπιστα-
[σ]ιχος (Lébadée, IG 3067, A-3epm ; cf. les épistates ?) ; Εὐδαμιχω

34. Mais des problèmes phonétiques sont apparus à date tardive, liés à la séquence
ikh-ios > ikhjos, cf. G. Vottéro, art. cit., 1987 §. 2.2.3.
35. Cf. également L. Robert, Hellenica, XI-XII, p. 238-39.
36. Pour Chantraine, Formation, p. 404, le suffixe -ιχος à une valeur de « diminutif » et,
en béotien, de nom « familier ».
37. Sur l’importance de ce radical dans la région, cf. G. Vottéro, art. cit., 1993, § 2.2.1.
610 guy vottéro

(Tanagra, Roesch in Roller no 87 A, A-3epm) ; Eὐθυμιχος (Thèbes,


AE 1934-1935, p. 2, no 23, 5epm / 4eam) ; Θεοδωριχος (Orcho-
mène, IG 3179, A-3epm) ; Παμπειριχω (IOropos no 34, A-3ef) ;
—— des radicaux simples, d’origine diverse : a) théonymes ou assi-
milés 38, e.g. Ἀπελλιχος (IThesp. 484, A-5epm) ; Δαματριχιω
(AP, Orchomène, BCH 98, 1974, p. 177, no 2, A-3ed) ; Καβιριχα
(Thèbes, IG 2589, D-3epm) ; Μοεριχος (Tanagra, IG 585, A-5epm ;
cf. μοῖρα) ; [Ὁ]μολωιχος (Ariarte, BCH 121, 1997, p. 95-101,
face B, A-3em ; épiclèse de Zeus fréquente en Béotie) ; Μιτριχος
(Orchomène, IG 3259, D-4em / 3em ; cf. μίτρα « ceinture, bande-
lette… », ornement des cérémonies religieuses) ; Νιουμεινιχω
(Acraiphia, BCH 23, 1899, p. 201, no VIII, A-3epm ; cf. la nou-
velle lune) ; Ὀλυμπιχα (Thèbes, AE 1934-1935, p. 3 no 48, 5o s) ;
Τρεφωνιχος (Acraiphia, SEG 3, 360, A-3ef ; cf. le dieu Τρεφωνιος
honoré à Lébadée) ; b) toponymes / hydronymes / théonymes (cf.
supra n. 7), e.g. Ἱσμηνιχω (Thébain, Platées, IG 1672, A-3epm ;
rivière de Thèbes et épiclèse d’Apollon) ; Περμασιχος (Thes-
pies, Roesch 1982, p. 138, D-4eam ; cf. Περμησός nom d’un cours
d’eau célébré par Hésiode et présentant des caractéristiques inha-
bituelles 39) ; Σαμιχα (Tanagra, IG 660, D-5e ; cf. Σάμος ; très fré-
quent ; lié au culte du Cabire ?) ; à partir du iiie s. les NP formés sur
le radical Σωσι- et Σωτηρ- se répandent, e.g. Σωσιχα (Coronée, IG
3047, D-3epm) et Σωτηριχα (Platées, IG 1705, D-3e) ;
—— des noms simples à valeur laudative, e.g. Ἀμινιχος (Acraiphia,
SEG 3, 360, A-3ef) ; Ἀριστιχος (IThesp. no 88, A-3eam) ; Κλεϝιχα
(in B., IG 3466, C-5eam) ; Καλλιχα (Coronée, IG 2973, D-3epm) ;
—— des sobriquets, e.g. Fαρμιχω (Hyettos, IG 2809, A-3epm ; à rappro-
cher du latin uermis 40) ; Μαμμιχα (Tanagra, IG 641, D-5epm / 4eam) ;
Πιττιχα (Thespies, BCH 58, 1958, p. 129, no  147, D-4em / 3em ;
cf. πίττα « poix », infra § 2.2) ; Πουρριχιος (Anthédon, IG 4214,
D-4em / 3em, « le roux ») ; Στρομβιχω (Lébadée, IG 3486, D-5e ; cf.
στρόμβος « toupie, tourbillon ») ; Φα[υ]λ[λ]ιχα (Tanagra, IG 663,
D-5eam ; cf. l’adjectif φαῦλος « mauvais, méchant ») ; Φρουνιχος

38. Pour les théonymes typiquement béotiens, on se reportera à Schachter.


39. Cf. Théog. v. 5 ; G. Vottéro, op. cit., I, p. 17, 24, et 2016, § 1.2.3.
40. Étymologie proposée par F. Solmsen, Rhein. Mus. 53 (1898), p. 143-151.
onomastique personnelle de béotie 611

(archonte, Acraiphia, IG 4156, A-3epm, « grenouille ») ; Ṭ[υ]ννιχα


(Thèbes, IG 2640, D-4em / 3em ; cf. τυννός « petit ») ;
—— des formes tronquées : Περμιχω (IThesp. no 313, A-4eam ; cf.
supra Περμησός).
Le suffixe -ιχος / -α peut se combiner à d’autres suffixes, e.g. -ων :
[K]εφωνιχος (Orchomène, IG 3175, 3eam ; cf. infra Kεφων), Διωνιχα (ex
B., IG II2 8862, D-4epm), ou -ιδας : Τυννιχιδας (IThesp. no 51, A-3epm).
C’est peut-être ainsi qu’il faut expliquer la présence occasionnelle d’une
géminée devant le suffixe, e.g. Φιλλιχος (Mycalettos, Ure 1927, p. 103,
no  123.26, C-5e), sur le modèle de Φιλλει ? (Orchomène, IG 3182,
A-3epm) ou Ἐροττιχα (Lébadée, in B., AE 1920, p. 29, no 6, D-5em), sur
le modèle d’Ἐροττις ? (Coronée, IG 2950, D-4em / 3em ).
Ce suffixe a donc un très large éventail d’emplois. Si l’on combine
ces remarques avec la valeur transmise par Aristophane, on peut dire que
-ιχος / -α apporte aux bases lexicales auxquelles il est ajouté une nuance
de bienveillance ou de familiarité sans excès.
Les noms en -ιχος / -α peuvent être portés par des « notables », e.g.
Ὀλυμπιχω (Ariarte, Roesch 1982, p. 271-272, A-4epm), Μελαντιχω 41
(Copai, IG 2781, A-3em), Fαρμιχω (Hyettos, cf. supra).
2.1.3. -ιδας : pour ce suffixe on ne rencontre qu’une seule particularité
(en dehors du remplacement phonétique de -δας par -δης avec l’arrivée
de la koinè) : l’absence, assez rare toutefois, de -ς final au nominatif, e.g.
Ϙλιδα (Thèbes, IG 4124, D-5eam ; valant Κλειδας), Εὐγιτονιδα (Tanagra,
IG 3508, D-6ef), Νεστιδα (Anthédon, IG 4209, D-4em / 3em) ; comme
c’est une situation commune à tous les NP en -ας 42, il s’agit probable-
ment ici du souvenir d’une situation très ancienne (la désinence -s de
nominatif y étant analogique des thèmes en e/o).
Ce suffixe, très ancien en grec, a perdu en béotien son sens primitif de
filiation (comme dans la plupart des dialectes, dont l’attique) ; ainsi Pélo-
pidas n’est pas « fils de Pélops », il ne pourrait au mieux que prétendre
descendre lointainement de lui ; et encore n’est-ce pas du tout assuré 43.
41. Sur ce nom, cf. G. Vottéro, art. cit., 1993, p. 354-355.
42. On en rencontre une vingtaine d’exemples, e.g. πυθιονικα (IThesp. no 485, A-5epm),
Βυλια (Tanagra, IG 585, A-5epm).
43. Les liens entre la Béotie et Pélops se limitent, semble-t-il, à la légende de Laios,
réfugié à la cour de Pélops, et de ses amours pédérastiques avec le fils de ce dernier,
Chrysippos.
612 guy vottéro

Mais on a constaté depuis longtemps que ce suffixe est incompatible


avec le suffixe d’adjectif patronymique en ‑ios 44 ; il existe donc un lien
au moins historique entre ces deux suffixes.
Pour essayer de déterminer la valeur intrinsèque de ce suffixe, nous
disposons cette fois encore de deux sources : a) la littérature, et plus par-
ticulièrement le témoignage d’Aristophane dans les Nuées, v. 62-74 ;
le suffixe -ίδης renforce la coloration aristocratique de l’élément ἱππο-
exigé par la mère dans le NP de l’enfant, Φειδ-ιππ-ίδης 45 ; b) l’analyse
des bases lexicales auxquelles il est ajouté ; on constate ainsi qu’il entre
dans la formation de :
—— composés à valeur laudative ou porteurs de traditions aristocra-
tiques, e.g. Ἁνιοχιδας (Thèbes, IG 2431, A-4em / 3em ; cf. ἡνί-
οχος « conducteur de char »), Εὐγιτονιδα (cf. supra), Εὐφαμιδας
(Tanagra, IG 537, A-4em / 3em), Εὐθυνιδας (Thisbé, IG 3569,
D-3epm ; cf. θοίνη « banquet » 46), Μελανιππιδας (IThesp. no 97,
A-3epm), Ξενοκλιδαο (Chéronée, Darmezin no 94, B-3ef / 2ed),
Πειλεστροτιδας (Thébain, ex B., IG II2 8881, D-4epm) ; Στρεψιπ-
πιδαο (Lébadée, IG 3068, A-3epm ; clin d’oeil à Aristophane et à
son Strepsiade ?) ;
—— dérivés de théonymes ou assimilés, e.g. Ἀπολλωνιδας (Orchomène,
IG 3193, A-3epm), Γοργιδας (Thèbes, IG 2430, A-4em / 3em),
Σωτηριδας (Anthédon, Fossey no 106, D-2ed), cette catégorie de
NP étant finalement assez peu représentée ;
—— dérivés de radicaux simples, e.g. Ϙλιδα (cf. κλέος 47), Νεστιδα (cf.
Νέστος, fleuve de Thrace ?)… ;
—— sobriquets, e.g. Πυρριδας (Thèbes, IG 2428, A-3epm ; à côté de
Πυρρος), Θαλωνιδας (Copai, IG 2781, A-3em ; cf. supra Θαλλεις),
Σιμονιδα (Gén., Acraiphia, Guillon p. 54, A, 1, A-6ef / 5ed ; cf.
σιμός « au nez camus »), Τροχινιδας (Siphai, Hesperia 29, 1960,
p. 125, no 1, C-4epm ; cf. τροχός « roue »), Χιοννιδαο (Acraiphia,
SEG 3, 357, A-3epm ; cf. χιών), comprenant d’assez nombreux

44. Cf. G. Vottéro, art. cit., 1987, § 3.2.1.2 ; contrairement à ce que l’on peut observer
en éolien d’Asie, cf. R. Hodot, Le dialecte éolien d’Asie, Paris, 1990, p. 212.
45. Cf. les propositions de la mère : Ξάνθιππον ἢ Χάριππον ἢ Καλλιππίδην (v. 64).
46. Sur l’importance des banquets en Béotie, cf. G. Vottéro, art. cit., 1993, § 2.2.1.4, et
op. cit., I, p. 193.
47. Sur ce même radical on a tardivement Κλεις, Κλειτος (IThesp. no 55, A-3epm).
onomastique personnelle de béotie 613

noms d’animaux, e.g. Δορκειδας (Orchomène, IG 3206, A-4epm ;


cf. δόρξ « chevreuil »), Μαληκιδαο (Thèbes, IG 2407, A-4eam ;
cf. μάληκος, variété d’oiseau 48), Φρουνιδας (Tanagra, Roesch in
Roller no 87 A, A-3epm ; cf. φρῦνος) ;
—— formes qui paraissent tronquées, e.g. Μεννιδας (Thèbes, IG 2560,
D-5eam ; cf. Οὑπερμενιδας, Acraiphia, SEG 3, 361, A-3ef) ; Προπ-
πιδαο (Hyettos, IG 2815, A-3epm ; cf. supra [Προ]ππει) ;
—— il peut s’ajouter à d’autres suffixes, e.g. -ων : Θιωνι[δαο] (Lébadée,
IG 3066, A-3epm ; cf. Θεων, Orchomène, IG 31789, A-3epm ; et
Θιων, Thespien, Orchomène, Migeotte no 13, A-3ef).
En définitive, -ιδας n’a gardé qu’un lien très faible avec sa valeur pri-
mitive de suffixe patronymique (son incompatibilité avec -ιος), et son
rôle comme suffixe de relation est bien plus limité que -ιος ; en fait il
fonctionne généralement comme élément « amplificateur », destiné à
donner plus de corps au NP de base, et peut-être dans le même esprit que
le suggère Aristophane, donc « emphatique » : presque chacun de ces NP
en -ιδας a un correspondant plus court, e.g. Γοργιας, Εὐγιτων, Εὐφαμος,
Θοιναρχος, Μνασιλαος, Ξενοκλεις, Πολυτιμος, Ὑπερμενεις… (cf.
LGPN). Le point de départ de cette évolution est probablement l’usage
patronymique attesté chez Homère qui contribuait à allonger le radical
(e.g. Κρονίδης), mais il y a eu ensuite réinterprétation du procédé.
Les noms en -ιδας peuvent être portés par des « notables », e.g. Σιμο-
νιδα (Gén., Acraiphia, cf. supra), Δορκειδας (Orchomène, cf. supra),
Νικοκλειδαο (Anthédonien, Platées, IG 1672, A-3epm).
2.1.4. -αδας : ce suffixe est rare, mais on constate qu’il fonctionne exacte-
ment comme le précédent ; ainsi il n’est pas plus que lui compatible avec
le suffixe d’AP en -ιος, e.g. Πεδακλεις Καφισιαδαο (Orchomène, BCH
98, 1974, p. 175, no 1, A-4ef / 3ed), [---]λιαδας Κοιραταδαο (Tanagra, IG
537, A-4em / 3em), ces textes ne présentant aucun écart graphique.
Ce suffixe entre dans la formation de :
—— composés à valeur laudative ou porteurs de traditions aristocra-
tiques, e.g. Εὐρυβωταδας (Orchomène, IG 3206, A-4epm), Περι-
βωταδαο (Hyettos, IG 2810, A-3epm), formation limitée à ce
radical -βωτα- ;

48. Cf. Masson, OGS III, p. 144-145.


614 guy vottéro

—— dérivés de théonymes ou assimilés, e.g. Ὀλυμπιαδας (Thèbes, IG


2431, A-4em / 3em), Καφισιαδας (Orchomène, IG 3175, A-3eam ;
cf. supra n. 34), Σωσι[α]δας (Tanagra, IG 1412, D-3epm) ;
—— dérivés de toponymes / héronymes ?, e.g. Κρισαδαο (Gén., Ariar-
tien, Acraiphia, IG 2724b, A-3eam ; cf. Krisa, ville de Phocide),
Θειβαδας (Thèbes, IG 2430, A-4em / 3em ; cf. Thèbes) ;
—— dérivés de radicaux simples, souvent à valeur laudative, e.g.
Ἀμ[ιν]αδαο (Acraiphia, IG 4156, A-3ef ; cf. ἄμειν-), Fιφιαδας
(Thespien, Orchomène, Migeotte no 13, A-3ef ; cf. ἴφι) ;
—— sobriquets, e.g. [Κ]ονοπιαδ[α]ς (Thèbes, IG 3641, C-5em ; κώνωψ
« moustique »), Πιτθιαδας (Orchomène, IG 3182, A-3epm ; cf.
πίθηκος « singe »).
Dans la plupart des cas les NP en -δας ont des correspondants sans
élément -δας, e.g.
—— Καφισιαδας (Orchomène, IG 3175, A-3eam) et Καφισιαο (Gén.,
Acraiphia, IG 2720, A-3epm) ;
—— Σωσι[α]δας et Σωσιας (Tanagra, IG 1413, D-3ef / 2ed).
Les noms en -αδας peuvent être portés par des « notables », e.g.
Ϙυδαδας (Platées, IG 1670, E-5ed, et IG 3086, A-4em / 3em), Εὐρυβω-
ταδας (Orchomène, cf. supra), Fιφιαδας (Thespien, Orchomène, cf.
supra).
2.1.5. -ωνδας : ce suffixe est attesté ailleurs qu’en Béotie, mais il est par-
ticulièrement fréquent dans la région, notamment à Thèbes ; on constate
qu’il fonctionne exactement comme les deux précédents ; ainsi il n’est
pas compatible avec le suffixe d’AP en -ιος, e.g. Fαναξιων Σαωνδαο
(Orchomène, IG 3206, A-4epm, Ὀλυμπιαδας Στιλβωνδαο (Thèbes, IG
2431, A-4em / 3em), ces textes ne présentant aucun écart graphique ;
Ce suffixe entre dans la formation de :
—— composés à valeur laudative ou porteurs de traditions aristocra-
tiques, e.g. [Δ]ιογιτωνδα[ο] (Orchomène, IG 3176, A-3epm),
[Ἐμ]πεδιωνδα[ο] (Ariarte, Roesch 1982, p. 205-210, A-3epm ; cf.
ἔμπεδος « ferme »), Ἐπαμινωνδας (Hyettos, IG 2832, A-2eam ; cf.
ἐπ-αμειν-) ;
—— dérivés de théonymes ou assimilés, e.g. Ἑρμαιωνδαο (Hyettos, IG
2815, A-3ef / 2ed), Ἡ[ρ]αωνδας (Orchomène, IG 3249, D-3epm),
Σαων[δ]αο (Copai, BCH 94, 1970, p. 151-157, no 4, A-3epm) ;
onomastique personnelle de béotie 615

—— dérivés de radicaux simples, souvent laudatifs, e.g. Δαιτωνδαο


(Gén., Thèbes, IG 2407, A-4eam ; cf. δαίς « banquet »), Στιλ-
βωνδαο (Thèbes, IG 2431, A-4em / 3em ; cf. στίλβω « briller »),
Χαρωνδαο (Chéronée, Darmezin no 79, B-3ef / 2ed ; cf. χαίρω selon
HPN et DELG) ;
—— sobriquets, e.g. Χιλιονδας (Acraiphia, AAA 7, 1974, p. 331a, C-5e ;
cf. χεῖλος « lèvre » selon HPN 481), Ἑρπωνδας (Acraiphia, SEG
3, 360, A-3ef ; cf. ἕρπω « ramper »), Σιμωνδας (Tanagra, Roesch in
Roller no 87 A, A-3epm ; cf. σιμός) ;
—— radicaux d’étymologie inconnue, e.g. Fασκωνδαο (Lébadée, IG
3091, C-3epm).
Les noms en -ωνδας peuvent être portés par des « notables », e.g.
Σαων[δ]αο (Copai, cf. supra), Δαιτωνδαο (Thèbes, cf. supra), Σιμωνδας
(Tanagra, cf. supra).
L’explication de Szemerényi par une forme syncopée de *-ôn +
-idas 49 remontant à l’indo-européen est fragile ; certes une syncope n’est
pas impossible en béotien (les syncopes de voyelles accentuées selon les
normes attiques ne sont pas rares dans ce dialecte), mais il faudrait que ce
suffixe soit très ancien en grec, et c’est encore à démontrer : même si l’on
fait référence au béotarque bien connu dans l’histoire, un nom comme
Ἐπαμινωνδας peut-il être de date préhistorique ? C’est improbable ; il est
bien préférable d’y voir plutôt le résultat d’une combinaison de deux suf-
fixes, -ων + -δας (ajouté à un radical déjà composite, ἐπ-αμιν-ων-δας),
comme y invite l’observation des faits suivants : dans la plupart des cas
les NP en -δας ont des correspondants sans élément -δας, e.g.
—— Σαωνδαο (Copai, BCH 94, 1970, p. 151-157, no 4, A-3epm) et
Σαων (Acraiphia, IG 2716, A-3epm) ;
—— [Ἐμ]πεδιωνδα[ο] (Ariarte, Roesch 1982, p. 205-210, A-3epm) et
Ἐμπεδιων (Orchomène, Chiron 6, 1976, p. 23-24, no 26A, A-3em).
Certes, dans quelques cas, on est en droit de se demander si on n’a pas
affaire à une syncope, e.g.
—— Ποιμενδαο (Copai, BCH 99, 1975, p. 77-82, no 1, A-3em ; = *Ποι-
μενιδαο ?) ;

49. Cf. O. Szemerényi, Syncope in Greek and Indo-european and the Nature of Indo-
European Accent, Naples, 1964, p. 33-42, et voir ici même la contribution de M. del
Barrio.
616 guy vottéro

—— Φιλωνδας (Thèbes, BCH 94, 1970, p. 146-151, no 3, A-3epm), à


comparer à Φιλωνιδας (IThesp. no 44, A-3epm).
Toutefois, dès lors que l’existence d’un élément -δας indépendant est
possible, il faut envisager que Ποιμενδαο et Φιλωνδας ne sont pas néces-
sairement issus d’une syncope, mais peuvent être le résultat d’une inno-
vation naturelle.
Il apparaît donc vraisemblable de considérer que les finales -αδας,
-ωνδας (et on y ajoutera -ενδας) sont des combinaison de -α + δας, -ων
+ δας et -εν + δας.
2.1.6. -ων : il faut distinguer ici entre trois types de formation :
—— les NP en -ων / -ωνος, où -ων fonctionne comme un suffixe par-
ticulier ajouté à diverses bases lexicales, e.g. Βακχων, Μαχων…
(cf. infra) ;
—— les noms en -ων / -ονος, où -ων est primitif, comme Διο-γιτων
(Lébadée, IG 3081, B-3ef ; cf. γείτων « voisin ») ;
—— les noms en -ων / -οντος, où -ων est également primitif, comme
l’est vraisemblablement Λεων 50 (Thèbes, Wolters-Bruns, no 261,
C-5epm.
L’objet de cette étude porte donc uniquement sur le -ων / -ωνος, qui
apparaît aussi sous la forme ‑ωνιος d’AP.
Ce suffixe, très fréquent (cf. supra § 1.2, 6) entre dans la formation
de :
—— composés à valeur laudative, e.g. Καλλιφαōν (IThesp. no 485,
A-5eam ; cf. Καλλιφάης), Ἱπποτιωνος (Coronéen, Acraiphia, IG
2723, A-3eam ; cf. Ἱππότιμος), Καλλικωνος (Chéronée, Darmezin
no 18, B-3ef / 2ed ; cf. Καλλικύδης), Εὐκτειμων (Thespies, SEG 37,
385, A-3epm ; cf. κτῆμα), Εὐμαρων (IThesp. no 84, A-3ef ; cf. μάρη
« main »), Ἐμπεδιων (cf. supra) ;
—— dérivés de théonymes ou assimilés, e.g. Ἀσκλαπιων (IThesp.
no  484, A-5epm), Βακχων (IThesp. no 105, A-3ef / 2ed), Ἡρακων
(Tanagra, IG 1065, D-4em / 3em), Καφισιωνος (Orchomène,
Migeotte no 14, A-3epm), Ἑρμων et Πουθιωνιος (IThesp. no  88,

50. La flexion -ων / -οντος semble assurée par le NP Λεοντιάδας (attesté dans la lit-
térature, cf. les événements de 379 racontés par Plutarque, Pélop. 5-6, 11) et les
dérivés épigraphiques Λιοντιδας (Coronée, ZPE 51 (1983), no 17, D-4ef) et Λιοντιχος
(Orchomène, IG 3180, A-3ef).
onomastique personnelle de béotie 617

A-3eam), Πτωιων[ος] (Tanagra, IG 557, A-3epm), [Σ]αμων


(Coronée, SEG 3, 365, A-3eam ; cf. supra) ;
—— dérivés de radicaux simples, e.g. Ἀριστων (Tanagra, IG 537,
A-4em / 3em), Δαμωνιος (AP, Thèbes, Roesch 1982, p. 120, A-4em),
Fοικων (IThesp. no 484, A-5epm ; cf. οἰκία), Μαχων (Coronée, IG
2985, D-4em / 3em), Νεων (Lébadée, IG 3157, D-4em / 3em), Φιλων
(Lébadée, IG 3147, D-4em / 3em) ;
—— sobriquets, e.g. Ἀκριδιōν (Thèbes, Wolters-Bruns, no 153, C-5eam ;
cf. ἀκρίς « sauterelle »), Πλατων (IThesp. no 105, A-3ef / 2ed),
Ῥυνχōν (Thèbes, IG 2573, D-5epm / 4eam ; cf. ῥύγχος « groin »),
Σαρπιγγιων (Tanagra, IG 1380, D-4em / 3em ; cf. σάλπιγξ « trom-
pette »), Σιμωνος (Hyettos, IG 1811, A-3epm), Φαρφōν (Thèbes,
Wolters-Bruns, no 23, C-6e ; cf. παράφορος « fou »), Φρουνωνος
(Tanagra, IG 557, A-3epm).
Ce suffixe a donc des emplois larges et variés, mais on constate que
les composés en -ων sont rares, et il apparaît clairement que certains des
NP en -ων sont des formes tronquées, e.g. Ἐπαμωνος (Thèbes, BCH 94,
1970, p. 146-151, no 3, A-3epm ; cf. Ἐπαμινωνδας), [Μ]εγων (IThesp.
no 102, A-2ed ; cf. μέγας) ; il en est probablement de même pour Ἱππων
(IThesp. no 105, A-3ef / 2ed ; cf. les nombreux composés en ἱππο- rencon-
trés dans la région 51), Καφισιωνος, Πτωιων (ibid.), et bien d’autres NP.
C’est donc un aspect important de son fonctionnement, et, sur ce point, il
se distingue des précédents, excepté -ε(ι)(ς).
À partir du milieu du iiie s. ce suffixe devient très fréquent et il se
répand au détriment des autres : ainsi des noms symboliquement béotiens
comme Καφισο-δωρος / δοτος, Ἐπαμινωνδας, Πτωιοδωρος… peuvent-
ils être remplacés par Καφισιων, Ἐπαμων, Πτωιων…
Les noms en -ων peuvent être portés par des « notables », e .g. Ἐρα-
τωνος (Coronée, IG 2858, A-3em), Ἀριστιωνος (Thèbes, IG 2418,
A-3em), Πτωιων[ος] (Tanagra, cf. supra).

2.2. Particularités phonétiques


Il s’agit d’étudier ici trois particularités phonétiques rencontrées avec
plusieurs de ces suffixes :

51. Plus de 320 ex., cf. G. Vottéro, art. cit., 1993, § 2.1.1.1.
618 guy vottéro

La gémination expressive : elle semble être usuelle avec -ε(ι)(ς) (cf.


supra § 2.1.1), mais elle apparaît aussi avec le suffixe -ιδας, quand la
base radicale est courte ; on rencontre ainsi des paires minimales comme :
—— Κραττιδαο (IThesp. no 55, A-3epm) et Λακρατιδ‹ι›ας ou Καλλι-
κρατεις / -κρατεις (IThesp. no 98, A-3ef) ;
—— Μεννιδας (Thèbes, IG 2560, D-5eam) et Οὑπερμενιδας, Acraiphia,
SEG 3, 361, A-3ef), ainsi que peut-être :
—— Γοθθιδας (Tanagra, IG 585, A-5epm) et Πολιουγαθιδαο (Copai,
BCH 94, 1970, p. 151-157, no 4, A-3epm), en supposant pour le
premier une vélarisation de [a:].
Le processus de gémination ne suppose pas en effet nécessairement
que la voyelle précédente soit brève 52.
Une géminée peut également apparaître avec -ιχος, e.g. Μαμμιχα,
Φα[υ]λ[λ]ιχα…, mais c’est assez rare, et il n’est pas impossible que le
suffixe ait en fait été surajouté à une forme déjà géminée, e.g. Ἐροττιχα
~ Ἐροττις (cf. supra § 2.1.2).
En revanche les autres suffixes, -αδας, -ωνδας, -ων, -ιος et -ισκος, ne
présentent pas d’environnement géminé.
L’aspiration expressive : on la constate à date ancienne pour certains
radicaux, e.g.
—— Φιθ (in B., Glotta 18 (1930), p. 1-4, C-6e) ;
—— Φιθαδας (in B., Hesperia 35 (1958), p. 158, C-6ef / 5ed) ;
—— Θιθθ (Thèbes, AE 1920, no 2, D-6ef / 5ed ; cf. τιθήνη).
La loi de Grassmann ne paraît pas avoir joué dans ces exemples, mais
les NP de ce type ont disparu au cours de la période II.
La question peut toutefois se poser avec les NP suffixés en -ιχος / -α,
puisque le suffixe peut s’ajouter à une base comportant déjà une aspirée,
e.g. Eὐθυμιχος, [K]εφωνιχος (obtenu à partir de Kεφων), Φα[υ]λ[λ]ιχα,
Φιλλιχος…
Comme on ne remarque pas de flottement dans les graphies, il ne
semble pas y avoir eu de problèmes phonétiques. Et dès lors il est inutile
de supposer une dissimilation d’aspirées dans Πιττιχα (interprété dans ce
cas comme relevant du radical de πιθήκος), il peut s’agir d’un NP formé
sur πίττα « poix » (interprétation retenue ici, cf. supra § 2.1.2).

52. On rencontre par exemple une séquence V: + CC dans Παρναττιος (Thespies, IG


1751, A-4epm / 3eam), comparable à l’ionien Παρνησσός.
onomastique personnelle de béotie 619

La longueur des NP : on sait que la tendance de la langue parlée est


de raccourcir les noms (cf. Dédé, Alex…), et on peut le vérifier avec
certains des exemples présentés ici, e.g. Ποταμμει, Περμιχω, Ϙλιδα. Or
une grande partie des NP étudiés, notamment les composés en -ιδας et
-ωνδας, présente une longueur importante, e.g. Πειλεστροτιδας, Οὑπερ-
μενιδας, qui paraît volontairement recherchée. Il faut donc envisager
l’hypothèse que ces NP particulièrement longs ne sont que les formes
officielles de l’onomastique personnelle et qu’en privé on utilisait des
formes raccourcies, de type hypocoristique 53 ; mais nos sources ne per-
mettent pas de vérifier de tels faits.

2.3. Mise en perspective des suffixes étudiés


Comme le laissaient présager les séries de NP présentées en intro-
duction, ces suffixes ont des emplois assez larges et finalement assez
proches : dérivés de théonymes et assimilés, formes tronquées, valeur
d’hypocoristiques ou de sobriquets, même si des différences existent,
notamment pour la formation de composés (propre à -ιχος / -α et
-ιδας / -ωνδας). Leurs conditions d’emplois ne sont toutefois pas iden-
tiques, ainsi :
—— -ε(ι)(ς) sert principalement pour des hypocoristiques et des sobri-
quets ; il est très marqué dialectalement et localement, même s’il
est attesté chez les « notables » (notamment dans une cité connue
pour son conservatisme comme Orchomène) ;
—— -ιχος / -α et les suffixes en -das (-ιδας, -ωνδας) 54, ont des emplois
presque identiques, puisqu’ils apparaissent tous deux dans des
composés longs, mais ils ont chacun une nuance propre : le pre-
mier apporte une nuance de bienveillance, l’autre d’emphase ;
—— -ων recouvre assez fortement les emplois de -ε(ι)(ς), puisque ces
deux suffixes servent essentiellement à former des hypocoris-
tiques et des sobriquets sur base relativement courte, mais à une

53. Cf. les formes hypocoristiques (Épami et Dadasse) prises par le nom Épaminondas
dans le roman de F. Marcellin, Thémistocle-Épaminondas Labasterre, petit récit haï-
tien, Paris, 1901 (cf. G. Vottéro, « Grandeur et déchéance d’un héros : Épaminondas
le Thébain », dans J. Dion, Le paradoxe du héros ou d’Homère à Malraux, Nancy,
1999).
54. Pour -αδας la rareté des formes rend les observations difficiles.
620 guy vottéro

différence près : -ων n’est pas marqué dialectalement ; on peut


expliquer ainsi l’absence de ce suffixe chez les « notables » à date
ancienne (périodes I et II), mais aussi son succès croissant dès lors
que la Béotie s’ouvre sur l’extérieur et que, sur le plan linguis-
tique, la koinè remplace progressivement le dialecte ;
—— -ιος est un suffixe « généraliste », il intervient à différents niveaux
du lexique (adjectifs, appellatifs, AP…) ; comparativement aux
précédents, il est donc insuffisamment marqué, et trop banal ;
c’est peut-être ce fait qui explique l’emploi de -ιδας à la place de
-ιος dans des dérivés comme Ἀπολλωνιδας, variante plus empha-
tique (en même temps qu’on constate une certaine banalisation de
‑ιδας) ;
—— pour -ισκος, cf. supra p. 604.

2.4. Avec la disparition du dialecte


Le suffixe -ε(ι)(ς) disparaît à peu près en même temps que le dialecte,
et le processus était déjà bien entamé dès le iiie s. ; de fait il ne correspon-
dait à rien dans la koinè ; et on peut reconstituer certains processus qui
concourent à cette disparition :
—— concurrence des suffixes thématiques -ιλλος / -υλλος, e.g. Βραχυλ-
λεις et Βροχυλλος (cf. supra) par simplification morphologique ;
—— concurrence du suffixe -ων / -ωνος, e.g. Καφισσει, Ποταμμε[ι] et
Καφισιων. Ποταμων (cf. infra), par simplification morphologique
et phonétique liée à la perte des géminées ;
—— concurrence des NP en -εις (-ης) / -ειτος (-ητος), e.g. Μενεις / ‑ειτος
(~ Μέννει), Λιλεις / -ειτος, Φανης / -ητος, Χαρης / -ητος (~  Χαρ-
ρηος, probable génitif d’un *Χαρρης, avec graphie H tardive,
ex B., Mendez Dosuna, A-3ef), par réfection de la déclinaison avec
un élargissement dental (phénomène fréquent à partir de la koinè
et jusqu’en grec moderne).
On rencontre encore la trace de NP en -ε(ι)(ς) au ier s. a. C., mais ils
sont devenus exceptionnels ; on en a un bel exemple dans le « palmarès
des Amphiaraia et des Romaia » à Oropos (IOropos 528, = IG 420, ca 60
a. C.) avec le nom d’un acteur thébain récompensé du prix d’interpréta-
tion : Χιόννης Διογειτώνδου (on notera le conservatisme remarquable de
ses nom et patronyme).
onomastique personnelle de béotie 621

Le suffixe -ιχος / -α était moins marqué que le précédent (son aire d’at-
testation est plus large) et on constate qu’il a survécu un certain temps à
la disparition du dialecte dans l’écriture, puisqu’il apparaît encore dans
quelques inscriptions d’époque romaine, e.g. Καβίριχος Θεοδώρου (IG
3197, Orchomène, A-ier s.), [Δ]ομέστιχος (cf. supra). Mais les radicaux
rencontrés sont bien moins nombreux et variés ; il ne s’agit donc à cette
époque que d’une survivance.
Les suffixes -ιδας, -αδας et -ωνδας sont marqués phonétiquement
et, même s’ils pouvaient être facilement remplacés par -ίδης, -άδης et
‑ώνδης, ils vont disparaître également. Les raisons en sont moins claires,
mais il est vrai que nous ignorons tout des particularités articulatoires du
dialecte béotien (ce qu’on appelle couramment l’« accent ») ; or la com-
paraison aves les situations linguistiques modernes permet de supposer
des différences marquées entre les différentes régions (et dialectes) du
monde grec, que la généralisation de la koinè va faire disparaître pro-
gressivement, mais pas entièrement (cf. les variations régionales encore
observables dans la France actuelle) ; l’« accent » local se prêtait peut-
être plus facilement à la longueur des NP créés généralement par l’ad-
jonction de ces suffixes (cf. supra § 2.2).
Le succès du suffixe -ων ne peut pas s’expliquer par des raisons pho-
nétiques, puisque phonétique du dialecte et de la koinè se rejoignent
ici ; mais étant « non marqué » linguistiquement, il a pu se substituer
à d’autres suffixes bien plus marqués. Il apparaît ainsi comme une des
manifestations de la pénétration de la koinè.
On constate donc que les suffixes marqués dialectalement ont disparu,
plus ou moins rapidement selon leur degré de spécificité. Mais la substi-
tution a été progressive. Il ne faut pas imaginer une disparition brutale du
dialecte béotien (même si les textes écrits donnent parfois cette impres-
sion 55), mais un long processus de pénétration de la koinè, avant que le
dialecte ne tombe en désuétude et que les usages linguistiques locaux ne
disparaissent totalement.

55. Cf. G. Vottéro, « Koinès et koinas en Béotie à l’époque dialectale (viie au iie s. av.
J.-C.) », dans C. Brixhe (éd.), La koinè grecque antique, II. La concurrence, Nancy
1996 / 1, § 2.3.
622 guy vottéro

Conclusion

— L’onomastique béotienne de l’époque dialectale présente un cer-


tain nombre de particularités, tant du point de vue des radicaux utilisés
(sémantique) que des suffixes (morphologie) et de la phonétique, à côté
de formations banales en Grèce, qui sont largement majoritaires. Le béo-
tien relève de la langue grecque, mais en tant que dialecte il a ses usages
propres qui contribuent à le différencier des autres dialectes, et l’ono-
mastique y participe au même titre que la phonétique, la morphologie,
l’« accent » local…
— Ces particularités ne concernent pas une forte proportion de l’ono-
mastique, mais elles suffisent à donner une couleur locale indéniable ;
ainsi un Εὐγειτιχος a-t-il toutes les chances d’être béotien, tout comme un
Φρουνιδας, un Βουκαττει ou un Στιωνδας (sans oublier Ἐπαμεινωνδας) !
— Certains de ces suffixes ont pu avoir un rayonnement régional,
comme l’a montré A. Morpurgo Davies, qui évoque des zones dialectales
anthroponymiques, à propos notamment de la Grèce centrale.
— On peut légitimement se poser la question de l’existence de varia-
tions subdialectales à l’intérieur de la Béotie. Elles existaient nécessai-
rement (cf. l’organisation politique de la région…, G. Vottéro, op. cit., I,
chap. 3), mais force est de constater que ces variations portent non pas
sur l’existence ou non de telle ou telle caractéristique, mais sur la fré-
quence de celle-ci (de même que les faits phonétiques ou la sémantique
des NP 56).
— Enfin l’histoire des suffixes étudiés ici illustre l’histoire de la
disparition du dialecte béotien, par absorption et remplacement par la
koinè, même si l’anthroponymie peut conserver plus longtemps des traits
anciens. La pénétration de la langue commune a entraîné l’apparition de
nouveaux suffixes et de nouvelles modes onomastiques.

Références bibliographiques

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onomastique personnelle de béotie 623

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Étude sur la suffixation des anthroponymes
en grec ancien : le cas des hypocoristiques
et sobriquets en Argolide

Enrique Nieto Izquierdo


École pratique des hautes études, Paris

Objet de l’étude et questions préliminaires

Le but de ce travail est d’offrir au chercheur une étude systéma-


tique des suffixes employés en Argolide pour former des anthropo-
nymes « courts », c’est-à-dire des hypocoristiques et des sobriquets. Je
commencerai d’abord par donner des listes complètes commentées des
anthroponymes attestés dans cette région, classés par ordre alphabétique
des suffixes, sans éviter la discussion dans les cas problématiques (§ 1).
Ensuite, je donnerai des données statistiques concernant la fréquence des
suffixes et des racines employées par régions et dans l’ensemble de l’Ar-
golide (§ 2). Finalement, quelques paragraphes seront consacrés à l’étude
des deux suffixes qui posent le plus de questions : ‑εύς et -είας (§ 3) 1.
Il faut préciser d’abord que je considère comme hypocoristique tout
nom court dont le radical est attesté comme élément d’un anthroponyme
composé, peu importe si l’hypocoristique garde des restes des deux élé-
ments du composé (type Διο-γ-ᾶς < Διο-γένης) ou non (type Ἱππίας < p. ex.
Ἵππαρχος). Je considère donc comme sobriquets les noms courts dont le

1. Abréviations utilisées : Ar(gos), Ég(ine), Ép(idaure), H(ermione), Cal(aurie),


Cl(éonas), Ném(ée), Mét(hana), Myc(ènes), Tir(ynthe), Tr(ézène). Par ailleurs,
« par(tout) » indique que la forme se trouve au moins dans sept des villes relevées
plus haut. Cette étude fait partie du projet de recherche FFI2012-35721-C02-01
« Modalités de contact et interaction dialectale dans les inscriptions grecques ».
626 enrique nieto izquierdo

radical n’est pas attesté comme élément d’un composé (type Στράβων) 2.
Par ce distinguo, je ne prétends que séparer les noms raccourcis (défini-
tion formelle de l’hypocoristique, cf. l’introduction), d’autres qui n’ont
jamais été des composés (sobriquets), même si la distinction n’est pas
toujours facile à établir. Mon étude, en tout cas, ne portera que sur la suf-
fixation dans les noms non composés.
D’autre part, j’utilise la nomenclature traditionnelle « Argolide
occidentale » pour faire référence à Argos et ses alentours (Mycènes,
Tyrinthe, …) et « Argolide orientale » pour Épidaure et ses environs
(Trézène, Hermione, …), car cette nomenclature fonctionne à peu près
pour l’époque d’où proviennent nos exemples. Cependant, elle n’est pas
valable pour une étude diachronique et pour la préhistoire des dialectes
de l’Argolide, comme on le voit dans les conclusions de ma thèse de doc-
torat sur la question 3.

1. Les noms non composés en Argolide : étude


des suffixes

Les noms courts attestés en Argolide, tant les hypocoristiques que les
sobriquets, ne représentent que ca 8,7 % du total des anthroponymes. Ces
chiffres sont dans une certaine mesure attendus, car la plupart des ins-
criptions sont des documents officiels et les noms composés y sont pré-
férés. Sur le total, presque 7 % sont des noms courts masculins, ce qui
laisse moins de 2 % de noms courts féminins.

2. Je m’inspire des classifications de Bechtel, HPN et Masson, OGS I, p. xi-xiv, même


s’il y a des divergences entre celles-là et la mienne concernant la classification des
sobriquets. Pour d’autres critères plus éloignés du mien, cf. à titre d’exemple la clas-
sification de M. Egetmeyer, Le dialecte grec ancien de Chypre, Berlin - New York,
2010, p.  346-353 pour les anthroponymes chypriotes. Un bon résumé des princi-
pales théories et nomenclatures se trouve chez I. J. Hartmann, « What name? What
parentage? The classification of Greek names and the Elean corpus », dans Ead. et
A. Willi (éd.), Oxford University Working Papers in Linguistics, Philology & Pho-
netics 7, 2002, p. 57-60.
3. Cf.  E.  Nieto Izquierdo, Gramática de las inscripciones de la Argólide, Madrid,
2009, notamment p. 585-586.
hypocoristiques et sobriquets en argolide 627

1.1. Les suffixes des masculins


♦♦ -αιος : l’origine de ce suffixe, qui est employé depuis le ve a. C., se
trouve surtout dans des finales en ‑/a:/, auxquelles on ajoutait -ιος. En
Argolide on a trouvé les noms ῾Ερμαῖος (Ar Ég Ép H), Ἀρισταῖος (Ar
Ép), Τίμαιος (Ar Ép Mét), Θιαῖος / Θεαῖος (Ar Ép), Λυκαῖος (Ég) et
Καραῖος (H). Mais pour Ἀρισταῖος et Λυκαῖος au moins, le point de
départ est thématique, cf. ἄριστος et λύκος.
♦♦ -α(ν)ς, -αντος : le seul exemple clair est le génitif Φείδαντος à
Méthana (SEG 37, 320, iiie a. C.).
♦♦ -ᾱς, -α : dans les dialectes doriens deux types différents d’anthropo-
nymes se sont confondus dans cette catégorie : le premier est celui
des sobriquets originels qui suivaient la déclinaison des masculins en
‑ας, -α (ionien -ης, -εω) type Ar Βράχας Tr Δέρκας, attestés de bonne
heure (ve a. C.) ; le deuxième est celui des noms raccourcis tirés à
l’origine de composés du type Θερσ-άνωρ (Ar Θέρσας), Ἀπολλ-α-
γόρης (Ég Ἀπολλᾶς) ou Βρύ-ανθος (Ar Βρύας), dont la terminaison
-ας a été ensuite isolée comme suffixe (par exemple Ἀρτεμ-ᾶς, Σωτ-ᾶς
à Épidaure), aussi attestés dès la même époque (ionien nom.  -ᾶς,
gén. -ᾶ ou -ᾶδος) 4. Concernant ces derniers exemples, il faut signaler
que dans les formes doriennes je mets de façon conventionnelle un
accent paroxyton s’il s’agit d’un anthroponyme attesté à l’époque
archaïque ou classique (Ar Βρύας) mais périspomène s’il s’agit d’une
forme postérieure (Ép Πυρρᾶς < p. ex. Πύρρ-ανθος). Cependant, il
ne s’agit que d’une convention et rien ne nous garantit qu’il y ait eu
une différence accentuelle dans les deux types d’anthroponymes en
pays dorien. Étant donné que les deux catégories y sont attestées de
très bonne heure, je reprends les deux types ensemble dans mon ana-
lyse. Le catalogue se complète avec les noms suivants : Ép. Ἀρίστας,
Ἀριστρᾶς, Ἀπολλᾶς, Ἀσκληπᾶς, Δωρᾶς ; Tr Κομᾶς ; Ar Ép Ἀλεξᾶς.
♦♦ -έας : ce suffixe est très répandu dans la région. Il se joint à tout type
de lexème, c.-à-d. à des adjectifs comme Φιλέας (Ar H), Ἀριστέας
(Ar Ép), Πρατέας (Ar), à des substantifs comme Δαμέας (Ar Mic Ép),
à des racines verbales comme Ἀγέας (Ép), Μνασέας (Ar H), Δεξέας
(Ép), ainsi qu’à des noms et épithètes de divinités comme Ἀπελλέας

4. Voir ici même l’étude de Laurent Dubois.


628 enrique nieto izquierdo

(Tr) ou Πυθέας (Ar Ég Ép Cl). Le suffixe semble remonter à -έϝας 5 et


il est en usage depuis le vie a. C.
♦♦ -ετος : un seul exemple à Argos, daté du ve a. C. : Δέρκετος.
♦♦ -ήν : ce suffixe, plutôt caractéristique des colonies corinthiennes de
la Mer Adriatique 6, apparaît dans quelques exemples en Argolide,
dans des racines tant nominales (Δαμήν Ar, Καλλήν Ép) que verbales
(Λυσήν, Τεισήν Ép).
♦♦ -ης, -εος : le seul cas possible en est le gén. Κάλλεος (Ar), qui dans
le LGPN 3a est interprété comme provenant d’un nominatif Κάλλης.
Mais en réalité il peut aussi provenir de Καλλεύς, qui est aussi attesté
en Grèce (cf.  LGPN s.v.). Pour un exemple ambigu à nominatif en
-ΗΣ, cf. infra § 1.3b.
♦♦ -ης, -ητος : les cas sûrs de ce suffixe sont Κράτης à Argos (gén. Κρά-
τητος) et à Épidaure (acc. Κράτητα), Χρέμης à Argos (dat. Χρέμητι),
Χάρης à Épidaure (gén. Χάρητος) et Θάλης à Égine (gén. Θάλητος.).
En m’appuyant sur ces exemples-là, j’interprète de la même façon
les nominatifs Κράτης (H), Χάρε̄ς et Θάλε̄ς (Ég ; contra LGPN  3a
s.v. Θαλῆς).
♦♦ -ῆς < -έας : le seul exemple qu’on peut citer est Ἀπελλῆς (3 × ; H Tr),
mais il est problématique. Ainsi, des trois exemples repris dans le
LGPN 3a, deux sont de très basse époque et ne sont pas des formes
dialectales. L’exemple restant est d’époque dialectale mais il est
reconstruit 7.
♦♦ -ιάδας : à l’origine suffixe patronymique, il se rencontre à Épidaure
(Νικιάδας, Τιμιάδας) et à Argos (Λυσιάδας, Μνασιάδας, Πολλιάδας).
Attesté depuis le ive a. C., il est très proche du suffixe -ίδας, qui est
aussi patronymique à l’origine et est attesté dès la même époque :
Τιμαΐδας (Ép), Λεοντίδας (H).
♦♦ -ίας (ion. -ίης) : l’un des suffixes les plus répandus, attesté depuis
le vie  a. C., partout dans la région. Il s’ajoute à des racines ver-
bales (Ἀγίας Tr H Ar, Ἀλεξίας H Cal, Τεισίας Ég Cal Ar), nominales

5. Cf.  O.  Masson, « Variétés chypriotes syllabiques », Kadmos 29.2 (1990), p.  149-
150.
6. Cf. F. Bechtel, Die griechischen Dialekte, II. Die westgriechischen Dialekte, Berlin,
1923, p. 246. Cf. ici même la contribution de Nicole Guilleux, p. 67-98.
7. Cf. E. Nieto Izquierdo, op. cit., p. 215.
hypocoristiques et sobriquets en argolide 629

(Καλλίας Ég Ép Ar H Tr, ῾Ιππίας Ép) et même prépositionnelles


(Ἀντίας Ar Myc).
♦♦ -ιλ(λ)ος : depuis l’époque archaïque on a des exemples de ce suffixe,
de diminutif à l’origine, avec ou sans redoublement expressif de /l/.
Il affecte des dérivés surtout verbaux (῞Αγιλλος Ég, Μνάσιλλος Ép),
mais aussi nominaux (Μυρτίλος Ar Cl H).
♦♦ -ιος : attesté aussi de bonne heure, ce suffixe servait à l’origine à
former des adjectifs. Cette fonction première se trouve dans des noms
comme Λύκιος (Ép), Γνάθιος (Ar) ou Δέξιος (Ég Ép H). Ensuite, il
s’est répandu comme suffixe d’hypocoristique, comme dans Στράτιος
(Ar Ép).
♦♦ -ις, -ιος : un des suffixes les plus répandus, il sert depuis le vie a. C. à
tirer des noms courts de toutes sortes de radicaux ; cf. ῏Αγις, Γνάθις,
Μνᾶσις, Αἶχμις (Ar), ῎Αριστις (Cl H), Θέρσις, Λάμπις, Δεῖνις (Ég),
Δόρκις, Κάλλις, Λᾶκρις (Ép), Νῖκις (Ép H Tr), Πάντις (Tr Ép).
♦♦ -ιχος : ce suffixe est représenté par les hypocoristiques d’Argos Πόλ-
λιχος et Σύλιχος (depuis le ve a. C.).
♦♦ -ίων : ce suffixe est très répandu depuis la basse époque archaïque
(ve a. C.) avec toutes sortes de radicaux ; cf. Μνασίων, Σωτίων (Ar),
Λυσίων, Σαμίων, Πασίων (Ép), Ἀριστίων (Ar Ég Ép H), Ἀλεξίων,
Ἀναξίων (Ép Ar), Σωσίων (Ar H).
♦♦ -ος : le suffixe -ος sert à former depuis le ve a. C. des noms courts
de toutes sortes ; cf.  à Argos Μῖκος, Φαηνός, à Épidaure ῎Αλεξος,
Ξένος, ῞Ιππος, à Trézène Φάντος, Πύρρος, qui sont répandus dans les
deux parties de l’Argolide Γλαῦκος, Δᾶμος (Ar Ép), Σάμος (Ep Tr) et
Σῶσος, Σῖμος (Ar H).
♦♦ -υλ(λ)ος : ce suffixe complexe -υλ(λ)- +-ος, avec ou sans gémina-
tion expressive, est bien attesté depuis le ve a. C., surtout à Argos ;
cf. Δορκύλος (Ar Tr), Θρασύλος ~ Θράὑλλος, Κριθύλος, Δερκύλος,
Στράτυλλος, Δαμύλος, Μένυλλος, Σωσύλος (Ar), Κρατύλος (Ég),
Μικύλος, Τιμύλος (Ép), Σιμύλος (Ép H Ar).
♦♦ -ων, -ωνος : c’est le suffixe le plus répandu depuis la haute époque
archaïque jusqu’à l’extinction des dialectes (cf. infra § 2.1). Il est très
productif et s’ajoute à toute sorte de racines. Cf. en Argolide « occi-
dentale » Φείδων, Χάρων, Ἀντίων, Γάψων, Κύλων, Πράτων, Χρέμων,
Θέστων, Κόμων, Πίστων, Ἀρτέμων, Ἅβρων, Κρίτων, Μίντων (Ar),
Αἴσχρων (Myc Ar) ; en Argolide « orientale » Κάλων, Μίκων, Λάμπων
630 enrique nieto izquierdo

(Ég), Σίμων, Τύχων, Πύθων (Ég Ép), Λύσων, Ἕρμων, Πάτρων (Tr
H), Δείνων, Ἄκρων, Ἵππων (Ép), Δάμων, Κάλλων, Κράτων, Ὀνάσων
(Ép H), Πάσων, Κύδων (H), Λύκων, Ἀλέξων, Ἀσκλήπων (Tr) ; et
dans les deux Argolides Κλέων, Ξένων (Ar Ép H), Ἀρίστων, Νίκων,
Στράτων, Φίλων (Ép Ar Tr H), Αἴσων, Μνάσων, ῾Ιάρων, Δόρκων,
Θίων, Τέλων, Τίμων, ῾Ιέρων (Ar Ép), Ἀγάθων, Μένων, Εὔφρων (Ar
H), Δίων (Tr Ép Ar).

1.2. Les suffixes des féminins


♦♦ -α : équivalent de l’ionien-attique -η, il se trouve surtout dans des
dérivés substantifs et adjectifs. Cf. à Argos Φαηνά, ῞Αβρα, en Argo-
lide « orientale » Κλήνα, Σίμα (Ég), Φάντα (H), Φίλα (Mét), Λύκα
(Tr), à Argos et Hermione Μύρτα, Πίστα. Les premiers exemples
datent du vie a. C.
♦♦ -αία : version féminine du -αιος commenté plus haut, il ne se trouve
avec certitude qu’à Argos et Épidaure (Νικαία).
♦♦ -άς, -άδος : surtout employé pour faire des dérivés de noms de divi-
nités et de toponymes, son seul représentant en Argolide est le sobri-
quet Δορκάς (Ar ; iiie a. C.).
♦♦ -έα : on le trouve seulement à Hermione ; cf. Κρατέα (ier a. C.).
♦♦ -εια : le suffixe -ja s’ajoutait aux masculins en -es- pour former des
féminins, comme dans Ἐχεκράτεια (Ép) ou Μένεια (H). Une fois
isolée, la finale -εια et réutilisée comme suffixe indépendant pour
former de nouveaux anthroponymes, comme dans Ἀρίστεια, Φίλεια
(Ar) ou Τίμεια (H) 8. On trouve ce suffixe en Argolide depuis le
vie a. C.
♦♦ -ία : suffixe à l’origine adjectival, on le trouve seulement en Argolide
« orientale », depuis le ive a. C. ; cf. Φιλία (Ép H), Δινία (H), Πυθία
(Ég).
♦♦ -ίς, -ίδος : un des suffixes les plus répandus, on le trouve depuis le
ve a. C. dans toute l’Argolide ; cf. à Argos : ῾Αγηἵς, Φαεινίς, Χρυσίς,
Ἀρχίς, Ἀνθίς, Ὑμνίς, Ἐρπίς ; en Argolide « orientale » Μυρτίς (Ég),
Ἀθηναΐς, Δωρίς, Καλλίς (H), Ἀριστίς (Ép) ; et dans les deux régions :
Λυσίς (Ép Ar), Λεοντίς (Ar H).

8. Ce dernier corrigé à tort par Fraenkel ad IG IV, 735 en Τιμ<α>ία.


hypocoristiques et sobriquets en argolide 631

♦♦ -οῦς (gen. -οῦδος, -οῦτος) : le seul exemple possible est Μυρτοῦς


(Myc, époque hellénistique). Mais l’exemple est mal assuré, car il
pourrait aussi s’agir d’un génitif banal d’un nominatif Μυρτώ, ce der-
nier attesté à Égine (cf. infra).
♦♦ -υλλα : équivalent féminin du masculin -ύλ(λ)ος commenté plus haut ;
le seul exemple se trouve à Argos ; cf. Κρίτυλλα (iie a. C.).
♦♦ -ῦς, -ῦδος (-ῦος, -ῦ) : ce suffixe rare n’est attesté que dans Φιλιστῦς
(Myc, époque hellénistique), qui se trouve sur un peson à tisser. Le
LGPN 3a suggère qu’il peut s’agir du génitif d’un nominatif Φιλιστώ,
avec graphie <Y> au lieu de <OY> attendu. Mais, étant donné qu’il
n’y a pas d’exemple assuré de cet échange de graphies en Argolide
« occidentale 9 », je préfère retenir l’interprétation comme suffixe -ῦς.
♦♦ -ώ(ι) : un des suffixes les plus répandus, on le trouve depuis le
vie  a. C. dans toute l’Argolide et pour toute sorte de radicaux ; cf. à
Argos : Εὐφρώι, Ζευξώ, Ἀρτεμώ ; en Argolide « orientale » : Πεισώ,
Μυρτώ 10 (Ég), Κλειτώ, Γοργώι (nom douteux ; graphie ΓΟΡΓΟΙ)
Καλλώ, Ἀρχαιώι, Τιμώ, Ἀρχώ (Ép), Νικώ, Ἀγώ, Κλεώ, Σωσώ (H) ;
et, dans les deux régions : Δημώ (Ar H), Ἀριστώ (Ar H Ép), Δαμώ
(Ar Ép).
♦♦ Les noms féminins à genre neutre (-εον, -ιον, -ον) : comme j’ai essayé
de le montrer ailleurs 11, il existe un suffixe d’hypocoristique -εον en
Argolide « occidentale », qui constitue une innovation exclusive de
cette région ; cf.  à Argos Ἀρίστεον, Νίκεον, Δάμεον et à Argos et
Tirynthe Κάλλεον. Il s’agit d’une innovation récente datable de la fin
du ve a. C. En outre, d’autres suffixes plus banals à genre neutre sont
aussi attestés, mais à plus basse époque ; cf. -ιον à Argos (Δάμιον),
Épidaure (Νίκιον) et Argos et Hermione (Μόσχιον ; dès le ier a. C.) et
-ον à Argos (Γλαῦκον) et à Hermione (῎Αριστον, ῞Αβρον ; depuis le
iie a. C.).

9. Cf. E. Nieto Izquierdo, op. cit., p. 210.


10. Cf. supra pour la possibilité que ce nom se trouve aussi à Mycènes.
11. Cf. E. Nieto Izquierdo, « À propos des noms de femmes du type Κάλλεον », REG
128 (2015), p. 673-676.
632 enrique nieto izquierdo

1.3. Les exemples ambigus : nominatifs en -AΣ et -ΗΣ


a) Les nominatifs ambigus en -ΑΣ
♦♦ Ἀριστας, attesté deux fois à Épidaure (ive-iiie et iie-ier a. C.), tota-
lise une vingtaine d’occurrences dans le LGPN. Étant donné que Ἀρι-
στέας est aussi attesté à Épidaure, peut-être peut-on rapprocher les
deux formes par le moyen d’une contraction -έας > -ᾶς, d’où Ἀριστᾶς.
Mais cette hypothèse est pour le moment indémontrable à cause de la
rareté des exemples.
♦♦ Δαμᾶς, attesté à Hermione au iie-ier a. C., a été interprété comme
Δάμας dans le LGPN 3a. Cette forme contraste avec Δαμέας, attesté
à Argos, Mycènes et Épidaure aux ive-iiie s. a. C. et peut-être l’une
pourrait-elle être rapprochée de l’autre via une contraction -έᾱς >
‑ᾶς. En tout cas, le fait que ΔΑΜΑΣ ait presque deux cents occur-
rences dans le LGPN, mais qu’en Argolide il ne s’agisse que d’un seul
exemple, et même pas dans les mêmes localités que les noms en -έας,
fait difficulté pour l’hypothèse de la contraction.
♦♦ On trouve un nom ΤΙΜΑΣ dans une épitaphe hellénistique d’Épi-
daure sur laquelle on n’a aucune information : Τιμοστρατίς ΤΙΜΑΣ
(SEG 29, 381). Vu que le premier anthroponyme semble un féminin en
-ίς, on a supposé que le deuxième est un féminin Τιμάς, gen. Τιμάδος.
Il s’agirait donc de l’épitaphe de deux femmes. Mais il me semble que
d’autres possibilités sont aussi valables : une épitaphe « mixte », avec
un nom. masc. Τιμᾶς ou Τίμας ; unE épitaphe à métronymique, c.-à-d.
génitif Τιμᾶς. L’exemple est ambigu et rien ne garantit l’existence du
féminin Τιμάς, Τιμάδος en Argolide.
b) Les nominatifs ambigus en -ΗΣ
Le seul exemple correspondant à cette catégorie est ΤΕΛΗΣ (Épi-
daure, ca 370-360 a. C.). Étant donné que Τελέας est attesté trois fois
à Épidaure, on pourrait songer à une contraction -έας > -ῆς pour expli-
quer cet exemple isolé, c’est-à-dire Τελῆς. Mais cette explication ne me
paraît pas valable, surtout en raison de la chronologie des formes épi-
dauriennes. Ainsi, le nominatif ΤΕΛΗΣ est attesté au ive a. C., tandis
que les formes en -έας ne le sont que deux siècles plus tard. Étant donné
que -έας est l’un des suffixes les plus répandus en Argolide depuis la
haute époque archaïque (cf. infra § 2.1), on arriverait mal à comprendre
hypocoristiques et sobriquets en argolide 633

pourquoi les formes anciennes ne feraient leur apparition dans les ins-
criptions que beaucoup plus tard que leur avatar « contracté ». À mon
avis, c’est plus facile à expliquer si l’on sépare les exemples comme des
suffixes indépendants l’un de l’autre, -έας et -ης (génitif -ητος). Vu que
tous les exemples de Τέλης semblent provenir de l’Attique et de Mégare
d’après les indices du LGPN, il faudrait plutôt voir ici une influence
précoce des dialectes de ces aires dialectales, auxquels Épidaure s’est
ouverte de bonne heure 12.

2. L’emploi de suffixes dans les noms non composés


en Argolide : quelques chiffres

2.1. Représentation des suffixes masculins


Les trois suffixes de masculin les plus répandus en Argolide sont
-ων (20,7 %), -ίας (12,3 %) et -έας (10,4 %) 13. Ils représentent presque
la moitié des données (43,4 %). Les choses sont similaires si l’on tient
compte séparément des données de l’Argolide dite « occidentale » (-ων
23,3  %, -ίας 13,4  %, -έας 11,3  %) et « orientale » (-ων 22,6  %, -ίας
13,5 %, -έας 10,7 %).
Pour les autres suffixes, les chiffres sont moins homogènes, surtout
parce que les exemples se font plus rares, ce qui produit des données sta-
tistiques moins solides. Ce qui semble clair est que -ίων et -ις sont aussi
des suffixes très employés, avec des chiffres similaires (mais pas aussi
nets que dans le cas précédent) dans les deux Argolides. Ainsi, -ίων tota-
lise 8,4  % dans toute l’Argolide, 9,2  % en Argolide « occidentale » et
8,5  % en Argolide « orientale », tandis que -ις représente 7,3  % dans
toute l’Argolide, 6,3 % en Argolide « occidentale » et 6,2 % en Argolide
« orientale ». Les données pour le suffixe -ος sont similaires, même si les

12. Cependant, on ne peut parler que d’influence, étant donné que l’Argolide dite
« orientale » et Corinthe et Mégare ne partagent aucun trait exclusif qui nous per-
mette de parler d’une aire dialectale unique ; cf. E. Nieto Izquierdo, op. cit., p. 580-
584.
13. À la différence d’autres dialectes doriens comme le laconien, en Argolide -ίας ne
peut jamais provenir de -έας car le processus de synizèse /e/V > /j/V n’est attesté que
pour θεός (θιός) et ses dérivés ; cf. E. Nieto Izquierdo, op. cit., p. 558-559. Pour les
données laconiennes, cf. A. Striano, El dialecto laconio. Gramática y estudio dia-
lectal, Madrid, 1989, p. 21-27.
634 enrique nieto izquierdo

exemples en sont plus rares : 5,4 % (toute l’Argolide), 5,6 % (Argolide


« occidentale »), 5,6 % (Argolide « orientale »).
La différence la plus significative se trouve pour le suffixe -ᾱς. Le
chiffre global n’étant que de 7,6  %, l’Argolide « orientale » affiche
presque deux points de plus par rapport à ce chiffre global (9,1 %) tandis
que l’Argolide « occidentale » n’atteint qu’un faible 3,5 %. Le suffixe,
comme il a été expliqué plus haut, est attesté de bonne heure dans les
deux aires, la différence n’est donc pas due au critère chronologique mais
à une simple préférence pour le suffixe en Argolide « orientale » qu’on
ne trouve pas en Argolide « occidentale ». Ce goût semble tout à fait
récent car l’attestation de ce suffixe à Argos et ses environs est constante
à l’époque archaïque mais moins nette à plus basse époque, tandis qu’en
Argolide « orientale » la répartition est constante à toutes les périodes.
Il semble qu’à Argos on a choisi surtout d’autres suffixes dès l’époque
archaïque tandis qu’à Épidaure le suffixe -ᾱς s’est renforcé surtout sous
l’influence de la koinè, où il est spécialement productif 14. Il paraît aussi
que, comme on le verra (cf. infra § 3.1), la place qu’a le suffixe -ᾱς à Épi-
daure et ses alentours est occupée par -εύς en Argolide « occidentale ».
Quant à la combinaison entre un radical donné et les divers suffixes
possibles, on constate que dans l’ensemble du territoire la plupart des
racines ne se combinent qu’avec un suffixe (38,8 %) ou deux (33,3 %), ce
qui représente plus de la moitié des exemples. Les radicaux se combinant
avec trois suffixes différents (15,7 %) ou quatre ou plus (16,6 %) sont
beaucoup plus rares. Le suffixe le plus répandu quand on n’en a qu’un
seul est ‑ων (11,1 %), suivi de loin par -ίας (5,5 %), inégalement attesté
dans les deux Argolides : ainsi, à Épidaure et environs il est adjoint à
quatre radicaux différents, tandis qu’à Argos, seulement à deux. À l’in-
verse, -εύς s’adjoint à trois radicaux seulement attestés à Argos, mais à
un seul à Hermionè.

14. Cf. à propos des données de l’attique postclassique et de la koinè, M. Bueno, « Los
antropónimos en -ᾶς como rasgo de diferenciación dialectal dentro del jónico-ático »,
dans M. J. Barrios Castro et E. Crespo Güemes (éd.), Actas del X Congreso Español
de Estudios Clásicos (21-25 de septiembre de 1999), I, Madrid, 2000, p. 183.
hypocoristiques et sobriquets en argolide 635

2.2. Représentation des suffixes féminins


Dans le cas des suffixes de féminin, les données semblent un peu plus
confuses, car les exemples sont moins nombreux et, par conséquent, les
statistiques sont moins fiables que dans le cas des masculins. Néanmoins,
il semble sûr que les deux suffixes de féminin les plus utilisés en Argolide
sont -ώ(ι) 15 (36,8 %) et -ίς (gén. -ίδος ; 24,6 %), qui représentent à eux
deux plus de 50 % du total. Ils sont suivis de noms neutres en -ον dans
tous leurs avatars (-εον, -ιον, -ον ; 29,4 %) et des noms en ‑α (15,8 %),
mais les occurrences pour ces deux derniers sont rares et ces statistiques
peuvent évoluer facilement à la suite de nouvelles découvertes.
Quant à la distribution par région, la situation est similaire car les
quatre mêmes suffixes sont les plus attestés, même si leur ordre peut
varier un peu à cause sans aucun doute de la rareté des exemples. Ainsi,
en Argolide « occidentale » -ίς est le mieux attesté (27,3  %), suivi de
‑ώ(ι) et de -ον (toutes les variantes ; 21,2 %), tandis que -α ne représente
que 12,2 %. Dans le cas de l’Argolide dite « orientale » les chiffres sont
les suivants : -ώ(ι) (43,3 %), -ίς et -α (18,9 %) et -ον (toutes les variantes ;
10,8 %). Je rappelle que les exemples sont rares et qu’à la suite de nou-
velles découvertes les chiffres peuvent changer. Néanmoins, ce qui me
semble devoir être retenu est l’absolue dominance des deux premiers suf-
fixes, -ώ(ι) et -ίς, dans l’ensemble de l’Argolide.
Les statistiques concernant la distribution des racines et suffixes sont
aussi tributaires de la rareté des exemples. Ainsi, comme on peut s’y
attendre, la plupart des racines ne se combinent qu’avec un seul suffixe
(74,4 %). Seulement 11,6 % des exemples se combinent avec deux suf-
fixes, et 6,9 % avec trois ou plus.

15. Le nominatif en -ώι n’est attesté avec certitude qu’en Argolide « occidentale » ;
cf. E. Nieto Izquierdo, op. cit., p. 439.
636 enrique nieto izquierdo

3. Quelques suffixes particuliers

3.1. Un suffixe productif : le suffixe -εύς


Comme il a été montré par Morpurgo Davies 16, l’emploi anthropo-
nymique du suffixe -εύς est obsolète au premier millénaire. Ainsi, tandis
qu’à l’époque mycénienne ce suffixe représente 7,26 % du total des noms
propres attestés, dans les dialectes du premier millénaire les chiffres
tombent à 0,5 / 0,8 % du total selon les régions. Cette différence dans les
chiffres, comme Morpurgo Davies l’admet elle-même, est significative,
et montre que le suffixe -εύς a le plus souvent cessé d’être productif dans
cet emploi.
Or, ce n’est pas si net en Argolide : -εύς y semble au contraire être un
suffixe tout à fait productif, au moins dans le cas de noms courts.
Prenons d’abord les données globales de l’ensemble de la région.
En comptant le total des différents radicaux qui servent à former des
hypocoristiques masculins, ceux qui montrent un suffixe -εύς repré-
sentent 12,5  % (5,4  % du total des anthroponymes masculins, y com-
pris les noms plusieurs fois attestés). Ces chiffres sont les mêmes que
dans le cas d’autres suffixes sans aucun doute productifs, comme -ος
(cf. supra § 2.1). Si l’on tient compte des données séparément dans les
deux régions de l’Argolide, les chiffres se montrent encore plus signifi-
catifs. Ainsi, on peut constater qu’à Argos et ses environs le suffixe ‑εύς
se trouve dans 7,1 % des noms courts masculins attestés (avec plus de
données que d’autres suffixes productifs comme -ις et -ος), tandis que
dans l’Argolide dite « orientale » ce chiffre tombe à 3,4 %. Cela veut dire
que, tandis qu’à Argos et ses alentours le suffixe est en compétition avec
d’autres suffixes d’hypocoristiques et de sobriquets tout à fait productifs,
à Épidaure il ne l’est plus. Il semble évident que la position de produc-
tivité du suffixe -εύς, conservée à Argos, a été prise par le suffixe ‑ᾱς à
Épidaure (cf. supra § 2.1).
L’emploi spécifique du suffixe à Argos relève à la fois du conserva-
tisme et de la tradition mais aussi de l’innovation propre à un suffixe
vivant. Ce caractère bivalent est démontrable par les fait suivants :

16. Cf. A. Morpurgo Davies, « Greek Personal Names and Linguistic Continuity », dans


GPN, p. 35.
hypocoristiques et sobriquets en argolide 637

—— l’existence de noms à caractère exclusif provenant de la tradition


mycénienne. C’est le cas de Δεξεύς, qui n’est attesté qu’à Argos et
continue le mycénien De-ke-se-u 17. Cet hypocoristique a été sup-
planté à l’époque historique dans la plupart des régions par des
formes comme Δεξίας, attesté aussi à Argos mais beaucoup plus
tardif (iie a. C.).
—— L’existence de noms exclusivement argiens, mais de créa-
tion secondaire. C’est le cas de Τελλεύς à Argos (2 × ; ve a. C.),
d’Ἀγιεύς à Argos et Mycènes (vie et iie-ier a. C.) et du sobriquet
῾Αλικεύς à Argos (iiie a. C.) 18.
Le fait qu’il y ait quatre noms courts à caractère exclusif, dont trois
répétés à différentes époques, souligne l’emploi de ce suffixe comme un
autre trait fondamental à retenir pour l’histoire linguistique de la région 19.
Dans le cas de l’Argolide dite « orientale », les statistiques montrent
que -εύς a cessé d’être productif, mais les noms attestés révèlent qu’à une
époque précédente ce suffixe a dû être important. Ainsi, parmi d’autres
noms courts très répandus 20, on trouve l’unique Μιλτεύς à Épidaure et,
surtout, le nom Ἀρχεύς, qui ne se trouve qu’à Hermionè et à Égine (fin de
l’époque archaïque). Même si l’interprétation de ces données, si maigres,
est difficile, elles semblent témoigner d’une époque antérieure où dans la
région dite « orientale » le suffixe -εύς servait aussi à former des noms
courts.

3.2. Un suffixe fantôme : -είας


L’origine du suffixe masculin -είας est disputée. Ainsi, pour Masson 21
les différentes formes du type Φιλ-είας s’expliquent par l’extension ana-
logique amenée par une fausse coupure à partir d’autres anthroponymes

17. Cf. O. Masson, « Remarques sur les anthroponymes mycéniens et leurs correspon-


dants au premier millénaire », SMEA 2 (1967), p.  37 (=  OGS  I, p.  107). Par ail-
leurs le prétendu Δεξιεύς de Pamphylie n’est qu’un fantôme : il faut lire ΔέξιFυς ;
cf. O. Masson, « Notes épigraphiques », Glotta 39 (1961), p. 112.
18. Les autres noms courts en -(ι)εύς attestés en Argolide « occidentale » mais non
exclusifs de l’aire sont Ἀριστεύς, Συλεύς, Λεοντεύς.
19. À ajouter aux listes déjà existantes chez E. Nieto Izquierdo, op. cit., p. 569 et 580
concernant les traits de phonétique et morphologie.
20. Cf. Ἀνθεύς et Δωριεύς.
21. Cf. O. Masson, « Variétés », p. 149-150.
638 enrique nieto izquierdo

produits 1) soit à partir d’un allongement métrique qui remonte à la


langue épique (type Αἰνείας) ; 2) soit à partir d’autres processus particu-
liers des divers dialectes, comme le changement Ἑρμαίας > Ἑρμείας 22.
Pour Maquieira 23 il s’agit d’une fausse coupe à partir des anthroponymes
en -κλέας, qu’elle fait remonter à tort à *-κλείας. Pour Minon 24, qui s’oc-
cupe de l’exemple de Trézène dont il va ensuite être question, le suffixe
viendrait de -έας : un <Ι> se serait développé comme élément anti-hia-
tique pour stabiliser l’hiatus [ea]. À mon avis, la solution la plus logique
est tout simplement de postuler une fausse coupe à partir des anthropo-
nymes dont les radicaux finissent par <ε> et auxquels on ajoute le suffixe
-ίας. Cette explication cadre bien avec le fait que la plupart des exemples
de ce suffixe se trouvent dans des noms courts, où est beaucoup plus
plausible une rencontre phonétique -ε-ίας. C’est le cas de Ég Τερε-ίας,
qui peut être en relation avec τέρε-τρον « vrille » 25. Il faut évidemment
faire une différence entre ce dernier exemple et ceux dans lesquels -είας
est vraiment un suffixe.
Dans cette dernière catégorie, il n’y a en Argolide que deux exemples
du nom Τιμείας, mais il est très probable qu’il s’agit de fantômes. On va
examiner ces deux exemples séparément.
Le premier se trouve, partiellement reconstruit, dans une épitaphe de
Trézène ; cf. SEG 37, 310 (iiie a. C.) Δαμαρέτα Σικυωνίο[υ] Τ[ι]μεί[ου
γυνή] « Damaréta, femme du Sycionien Timeias / Timeios ». L’editor

22. À propos de ce processus, cf.  en dernier lieu A.  Striano, « Consideraciones en


torno al supuesto cambio del diptongo ai en ei en los dialectos griegos », dans Katà
Diálekton, p. 347-364.
23. Cf. H. Maquieira, « Meg. ἩρακλΕας. Influencia de los nombres en *-klewes en la
antroponimia griega », dans Quid ultra faciam? Trabajos de griego, latín e indoeu-
ropeo en conmemoración de los 25 años de la Universidad Autónoma de Madrid,
Madrid, 1994, p. 70-71.
24. Cf.  S.  Minon, « Variationnisme et épigraphie grecque antique », dans E. Dupraz,
W. Sowa (éd), Les langues d’attestation fragmentaire dans l’espace méditerranéen
au Ier millénaire avant notre ère : inscriptions, genres épigraphiques et analyse
socio-linguistique, Mont-Saint-Aignan, 2015, p. 291-292.
25. Je ne souscris pas à la lecture Ἁγνε[ί]α[ι de W. Peek, Inschriften aus dem Asklepieion
von Epidauros. Abhandlungen der Sächsischen Akademie der Wissenschaften zu
Leipzig, Philologisch-Historische Klasse 60.2, Berlin, 1969, nº  52 (A  l.  73). Non
seulement la forme se trouve privée de tout contexte mais par ailleurs les éditeurs
antérieurs (Hiller ad IG IV² 1, 118 et S. I. Charitonides apud SEG 15, 208) n’ont pu
lire quoi que ce soit.
hypocoristiques et sobriquets en argolide 639

princeps a reconstruit la finale -ου car il songeait à un nominatif -ειος


en s’appuyant sur une autre épitaphe de la même époque à Trézène ;
cf. IG IV, 807 Τιμείου, que Bechtel 26 interprétait à son tour comme une
réfection à partir des noms du type Αἴνειος. Ce sont les éditeurs des
LGPN qui ont mis en relief aussi la possibilité d’un nominatif -είας 27.
Quoi qu’il en soit, tant Τιμείας que Τίμειος seraient des raretés frap-
pantes qui feraient difficulté. Il ne semble pas non plus possible qu’une
évolution /ej/ > /e:/ > /i(:)/ puisse avoir amené une graphie hypercorrecte
des plus banals Τιμίας / Τίμιος de cette zone 28.
À mon avis, il y a eu une erreur d’interprétation et il s’agit dans les
deux cas d’hypocoristiques féminins. Ainsi, le Τιμείου de IG  IV, 807
est très probablement un génitif singulier d’un nom de femme *Τίμειον,
avec un suffixe -ειον dont on a quatre exemples, les deux plus anciens
provenant de l’Attique 29. D’un autre côté, dans SEG  37, 310 on peut
faire de Δαμαρέτα Σικυωνίο[υ] le nom du mari et compléter Τ[ι]μεί[ον
γυνή], « Timeion, femme du Sycionien Damarétas » 30. Comme on le
voit, d’autres possibilités restent ouvertes et rien ne garantit un suffixe
-είας ou -ειος dans ces formes.
L’exemple d’Égine apparaît dans une inscription trouvée à Lesbos,
où, parmi d’autres personnages, l’Éginète ΚαλλιΓ  -  -  Τιμεία est men-
tionné dans un contexte mutilé (SEG 26, 919, iiie a. C., l. 22) 31. La forme
me semble douteuse, car dans la photographie de l’estampage fournie
26. Cf. Bechtel, HPN 430.
27. Évidemment, on pourrait aussi reconstruire un génitif en -α, plus convenable pour
la morphophonologie d’un dialecte dorien, pour l’hypothétique nominatif en -είας,
étant donné que les cas à Trézène où la désinence de koinè -ου supplante la dési-
nence dialectale -α sont très rares et font toujours référence à des personnages étran-
gers. Ainsi, dans IG IV, 748 (369 a. C.) Φιλωνίδου (ll. 2 et 8-9) est le nom du père
d’un Platéen. De son côté, dans IG IV, 750 (287 a. C.) le êta de Ἀ̣σκληπιάδου (l. 16)
trahit l’origine extra-dialectale du personnage.
28. Le seul exemple trézénien de <I> au lieu de <EI>, [Κ]λισ[θένεος], est une lecture
très douteuse et, de plus, il date du milieu du iiie a. C. (E. Nieto Izquierdo, op. cit.,
p. 122).
29. Cf. LGPN 2 s.v. Δάμειον.
30. En tout cas, à ma connaissance Δαμαρέτας, même tout à fait possible comme anthro-
ponyme, n’est pas encore attesté dans les inscriptions grecques.
31. Les deux noms semblent avoir été ajoutés dans un deuxième temps avec d’autres
qui prennent place dans des colonnes improvisées et / ou sont écrits en plus petits
caractères, d’après la photographie de R. Hodot, « Notes critiques sur le Corpus de
Lesbos », EAC 5 (1976), pl. XIIb.
640 enrique nieto izquierdo

par Hodot 32 on ne voit que ΤΙΜΕΑ[. Étant donné que le banal Τιμέας est
un nom déjà atesté à Égine à cette époque-là, l’option la plus judicieuse
me paraît d’interpréter Τιμέα ou, au cas où la photographie serait trom-
peuse et où la lettre iota serait bel et bien écrite sur la pierre, Τιμέ{ι}α, en
admettant une erreur du scribe amenée par la chute de yod secondaire en
position intervocalique 33.

Références bibliographiques

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del I milenio, Madrid, 2008 <http://eprints.ucm.es/7894/1/T30236.pdf>.
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Egetmeyer, M., Le dialecte grec ancien de Chypre, Berlin - New York, 2010.
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Hodot, R., « Notes critiques sur le Corpus de Lesbos », EAC 5 (1976), p. 17-81.
Maquieira, H., « Meg. ἩρακλΕας. Influencia de los nombres en *-klewes en la
antroponimia griega », dans Quid ultra faciam? Trabajos de griego, latín e
indoeuropeo en conmemoración de los 25 años de la Universidad Autónoma
de Madrid, Madrid, 1994, p. 67-73.
Masson, O., « Notes épigraphiques », Glotta 39 (1960), p. 111-114.
—, « Remarques sur les anthroponymes mycéniens et leurs correspondants au
premier millénaire », SMEA 2 (1967), p. 27-40 (= OGS I, p. 97-110).
32. Cf. R. Hodot, op. cit., p. 62 et pl. XIIb.
33. Pour ce dernier processus en Argolide dite « orientale », cf.  E.  Nieto Izquierdo,
op. cit., p. 250-254. — Quant à la forme arcadienne Τιμείας (SEG 11, 1139, Alipheira,
l. 5), étant donné qu’elle se trouve dans une inscription métrique de tonalité épique
(cf. Ἀλίφοιο l. 2), elle doit être un allongement métrique afin d’adapter le rythme de
l’anthroponyme au premier pied de l’hexamètre, comme il arrive très souvent ; cf. à
cet égard en dernier lieu P. Guijarro, La lengua de las inscripciones métricas del
Peloponeso (s. VII-IV a. C.), Madrid, 2016, p. 412-413.
hypocoristiques et sobriquets en argolide 641

—, « Variétés chypriotes syllabiques », Kadmos 29/2 (1990), p. 144-156.


Minon, S., « Variationnisme et épigraphie grecque antique », dans E. Dupraz,
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ranéen au Ier millénaire avant notre ère : inscriptions, genres épigraphiques
et analyse socio-linguistique, Mont-Saint-Aignan, 2015, p. 275-304.
Morpurgo Davies, A., « Greek Personal Names and Linguistic Continuity »,
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2009 <http://eprints.ucm.es/8475/1/T30692.pdf>.
—, « À propos des noms de femmes du type Κάλλεον », REG 128 (2015),
p. 673-676.
Peek, W., Inschriften aus dem Asklepieion von Epidauros. Abhandlungen der
Sächsischen Akademie der Wissenschaften zu Leipzig, Philologisch- Histo-
rische Klasse 60.2, Berlin, 1969.
Striano, A., El dialecto laconio. Gramática y estudio dialectal, Madrid, 1989.
—, « Consideraciones en torno al supuesto cambio del diptongo ai en ei en los
dialectos griegos », dans Katà Diálekton, p. 347-364.
642 enrique nieto izquierdo

Appendice
classification des noms courts en argolide :
par radical, par genre et en fonction du nombre
de suffixes différents attestés

N.B. : un radical attesté avec deux suffixes différents de masculin mais un


seul suffixe de féminin sera classé dans la catégorie « un seul suffixe » pour le
féminin mais « deux suffixes » pour le masculin. Je joins un exemple de mot bâti
sur le même radical, lorsque nom et mot sont indiscutables.

1. Attestés avec un seul suffixe


1.1. Masculins
ἁβρός « gracieux » → Ἁβρ- : Ἅβρων (Ar).
Ἁγν- : Ἁγνε[ί]α[ς] (douteux ; Ep).
αἰχμή « point de lance » → Αἰχμ- : Αἶχμις (Ar).
ἄκρος « au point le plus éloigné » → Ἀκρ- : Ἄκρων (Ép).
ἀγαθός « courageux » → Ἀγαθ- : Ἀγάθων (H Ar).
αἶσα « destin » → Αἰσ- : Αἴσων (Ar Ép).
αἰσχρός « laid » → Αἰσχρ- : Αἴσχρων (Ar Myc).
ἀνάσσω « être anax, gouverner » → aor. ἀναξ- 34 → Ἀναξ(ι)- : Ἀναξίων (Ép
Ar).
Ἀσ- : Ἀσέας (Ép).
ἄστυ « ville » → Ἀστ- : Ἀστίας (Ép).
βραχύς « court » → Βραχ- : Βραχᾶς (Ar).
βρύω « fleurir » → Βρυ- : Βρύας (Ar).
δέξιος « droit » → Δεξ- : Δέξιος (H Ép Ég)
δῖος « divin » → Δι- : Δίων (Tr Ep Ar).
ἑ(ϝ)ορτά « fête » → Ἑϝορτ- : Ἑϝόρτιχος (Ar).
ἕρπω, ἑρπύζω « se glisser » → Ἑρπ- : Ἑρπέας (? ; Ar).
εὔφρων « joyeux » —> Εὐφρ- : Εὔφρων (Ar H).
ζεύγνυμι « atteler (les boeufs) » → aor. ζευξ- → Ζευξ- : Ζευξίας (Ep H).
ἁλικία « âge de la jeunesse » → Ἁλικ- : Ἁλικεύς (Ar).
θαλέω « fleurir » → Θαλ- : Θαλῆς (Ég).
ἱαρός ~ ἱερός « sacré »→ ῾Ιαρ- ~ ῾Ιερ- : ῾Ιάρων (Ép) ῾Ιέρων (Ar Ép).

34. Pour l’emploi des racines d’aoriste pour former des anthroponymes, cf. en dernier
lieu A. Alonso Déniz, Estudios sobre la aspiración de /s/ en los dialectos griegos del
I milenio, Madrid, 2008 p. 33-34.
hypocoristiques et sobriquets en argolide 643

Καραῖος (épithète de Zeus 35) : Καραῖος (H).


Κάριος « Carien » → Καρι- : Καρίων (Ég).
κλεινός « renommé » → Κλειν- : Κλεινίας (Ép).
κλειτός « célèbre » → Κλειτ- : Κλειτέας (Tr).
μέθυ « vin » → Μεθ- : Μέθυλλος (Ar) 36.
μοῖτος « grâce » (Hsch.) → Μοιτ- : Μοιτύλος (Ar).
παλάθα « un type de gâteau » → Παλαθ- : Πάλαθις (Ar).
παχύς « gros » → Παχ- : Παχᾶς (Ar).
πράσσω « faire » : aor. πραξ- → Πραξ- : Πραξίας (Tr H).
πείθω « convaincre » → aor. πεισ- → Πεισ- : Πεισίας (Ar).
πιστός « fidèle » → Πιστ- : Πίστων (Ar).
σαμβά (Hsch.) « sourcil » → Σαμβατ- (?) : Σαμβατεύς (H).
σαυκός « sec » (Hsch.) → Σαυκ- : Σαῦϙος (Ar).
τύχα « fortune » → Τυχ- : Τύχων (Ép Ég).
ὕμνος « hymne » → Ὑμν- : ῞Υμνος (Ar).
φαεινός « rayonnant » → Φαην- : Φαηνός (Ar).
ὠκύς « rapide » → Ὠκ- : Ὠκίας (Ar).
1.2. Féminins
ἄγω « conduire » → Ἀγ- : Ἀγώ (H).
Ἀθηναῖος « Athénien », Ἀθηνᾶ « Athéna » → Ἀθηνα- : Ἀθηναΐς (H).
ἄνθος « fleur » → Ἀνθ- : Ἀνθίς (Ar).
Ἄρτεμις « Artémis » → Ἀρτεμ- : Ἀρτεμώ (Ar).
ἀρχαιός « ancien » → Ἀρχαι- : Ἀρχαιώι (Ép).
γλαυκός « resplendissant » → Γλαυκ- : Γλαῦκον (Ar).
γοργός « féroce » → Γοργ- : Γοργόι (?) (Ép).
δεινός « terrible » → Διν- : Δινία (H).
δῆμος « peuple » → Δημ- (cf.) : Δημώ (Ar H).
δορκάς « cerf » → Δορκ- : Δορκάς (Ar).
δῶρον « cadeau » → Δωρ- : Δωρίς (H).
ἕρπω, ἑρπύζω « se glisser » → Ἑρπ- : Ἐρπίς (Ar).
εὔφρων « joyeux » → Εὐφρ- : Εὐφρώι (Ar).
ζεύγνυμι « atteler (les boeufs) » → aor. ζευξ- → Ζευξ- : Ζευξώ (Ar).
κλεινός « renommé » → Κλην- : Κλήνα (Ég).
κλειτός « célèbre » → Κλειτ- : Κλειτώ (Ép).
κλέος « gloire » → Κλε- : Κλεώ (H).
κράτος « pouvoir, force » → Κρατ- : Κρατέα (H).
κριτής « juge » → Κριτ- : Κρίτυλλα (Ar).

35. Cf. F. Bechtel, HPN 530.


36. Peut-être à mettre en relation avec le bizarre Μίθυλλος, attesté aussi à Argos.
644 enrique nieto izquierdo

λέων « lion » → Λεοντ- : Λεοντίς (Ar H).


λύκος « loup » → Λυκ- : Λύκα (Tr).
λύω « libérer » → aor. λυσ- → Λυσ- : Λῦσις (par).
μόσχος « veau » → Μοσχ- : Μόσχιον (Ar H).
ξένος « étranger » → Ξεν- (cf.) : Ξενώ (H).
πείθω « convaincre » → aor. πεισ- → Πεισ- : Πεισώ (Ég).
πιστός « fidèle » → Πιστ- : Πίστα (Ar H).
σῴζω « sauver » → aor. σωσ- → Σωσ- : Σωσώ (H).
ὕμνος « hymne » → Ὑμν- : Ὑμνίς (Ar).
φαντάζομαι « devenir visible » → Φαντ- : Φάντα (H).
φίλιστος « le plus aimé » → Φιλιστ- : Φιλιστῦς (Myc).

2. Attestés avec deux suffixes différents


2.1. Masculins
ἁγέομαι « guider » → aor. ἁγησ- → Ἁγησ- : Ἅγηἱς (Ar), Ἁγησίας (Ép H).
Ἀθηναῖος « Athénien », Ἀθηνᾶ « Athéna » → Ἀθαν- ~ Ἀθην- : Ἀθανίων
(H), Ἀθήναιος (Ép H).
αἶσχος « honte » → Αἰσχ- : Αἰσχίων (H), Αἶσχις (Ar).
ἀντί « face à » → Ἀντ- : Ἀντίων (Ar), Ἀντίας (Ar Myc).
Ἄρτεμις « Artémis » → Ἀρτεμ- : Ἀρτεμᾶς (Ép Mét), Ἀρτέμων (Ar).
Ἀσκληπιός « Asclépios » → Ἀσκληπ- : Ἀσκληπᾶς (Ép), Ἀσκλήπων (Tr).
ἄρχω « gouverner » → Ἀρχ- : Ἀρχεύς (Ég H), Ἀρχίας (Ép Ar).
αὐγή « lumière du soleil » → Αὐγ- : Αὖγις (Ar), Αὐγείας (Ar).
Γαψ- (?) : Γάψων (Ar), Γαψίας (Ar) 37.
γλαυκός « resplendissant » → Γλαυκ- : Γλαυκίας (par), Γλαῦκος (Ép Ar).
γνάθος « mâchoire » → Γναθ- : Γνάθις (Ar), Γνάθιος (Ar).
γοργός « féroce » → Γοργ- : Γοργίων (Ép), Γοργίας (H Ép).
κλέος « gloire » → Κλε- : Κλέων (par), Κλέας (Tr).
κόμη « cheveux » → Κομ- : Κόμων (Ar), Κομᾶς (Tr).
κριθή « orge » → Κριθ- : Κριθέας (Ar), Κριθύλος (Ar).
κριτής « juge » → Κριτ- : Κρίτων (Ar), Κριτίας (Cl).
κτάομαι « acquérir » → aor. κτησ- → Κτησ- : Κτήσων (Ép), Κτησίας (Ép).
κῦδος « gloire » → Κυδ- : Κύδων (H), Κυδίας (H Ar).
κυλλός « boiteux » → Κυλ(λ)- : Κύλων (Ar), Κυλλίας (Ar).
λάμπω « briller » → Λαμπ- : Λάμπις (Ég), Λάμπων (Ég).
λέων « lion » → Λεοντ- : Λεοντίδας (H) Λεοντεύς (Ar).
μίλτος « craie rouge » → Μιλτ- ~ Μιντ- : Μίντων (Ar), Μιλτεύς (Ép).
μόσχος « veau » → Μοσχ- : Μόσχος (Ném), Μοσχίων (Ar).

37. Peut-être en relation avec Hsch. γαπελεῖν· ἀμελεῖν ; cf. F. Bechtel, HPN 499.


hypocoristiques et sobriquets en argolide 645

μύρτος « myrte » → Μυρτ- : Μυρτίλος (Ar H Cl), Μύρτις (Ar).


ὀνίνημι « gratifier » → aor. ὀνασ- → Ὀνασ- : Ὀνάσων (Ép H), Ὀνασίων (Ar).
πᾶς « tout » → Παντ- : Πάντις (Ép Tr), Παντίας (Ar).
πατήρ « père » → Πατρ- : Πάτρων (Tr H), Πατρέας (Tr).
Σάμιος « de Samos » → Σαμ- : Σάμος (Ép Tr), Σαμίων (Ép).
συλῶ « dépouiller de ses armes un ennemi » → Συλ- : Συλεύς (Ar), Σύλιχος
(Ar).
σωτήρ « sauveur » → Σωτ- : Σωτᾶς (Ep), Σωτίων (Ar).
φαντάζομαι « devenir visible » → Φαντ- : Φάντος (Tr), Φαντίας (Ar).
φείδομαι « soigner » → Φειδ- : Φείδων (Ar), Φείδας (Mét).
χρεμ(ετ)ίζω « hennir » → Χρεμ- : Χρέμων (Ar), Χρέμης (Ar).
2.2. Féminins
ἁβρός « gracieux » → Ἁβρ- : Ἅβρον (H), Ἅβρα (Ar).
ἄρχω « gouverner » → Ἀρχ- : Ἀρχώ (Ép), Ἀρχίς (Ar).
σιμός « camus » → Σιμ- : Σίμα (Ég), Σιμία (H).
τιμή « honneur » → Τιμ- : Τιμώ (Ép), Τίμεια (H).
φαεινός « rayonnant » → Φαειν- ~ Φαην- : Φαεινίς (Ar), vs Φαηνά (Ar).
χρυσός « or » → Χρυσ- : Χρυσίς (Ar), Χρυσώι (Ném).

3. Attestés avec trois suffixes différents


3.1. Masculins
ἄνθος « fleur » → Ἀνθ- : Ἀνθεύς (Tr), Ἀνθέ[ας] (?) (Ép), Ἀνθᾶς (Ép).
δεινός « terrible » → Δειν- : Δεινίας (Ar), Δείνων (Ép), Δεῖνις (Ég).
δῶρον « cadeau » → Δωρ- : Δωρίων (Ép), Δωρᾶς (Ép), Δωριεύς (Ép).
Ἑρμᾶς « Hermès » → Ἑρμ- : ῞Ερμων (Tr H), ῾Ερμαῖος (Tr H Ar Ép Ég),
῾Ερμίας (H. Ép. Ar.).
ἵππος « cheval » → Ἱππ- : Ἵππων (Ép), Ἵππος (Ép), Ἱππίας (Ép).
κράτος « force, pouvoir » → Κρατ- : Κράτων (H Ép), Κρατύλος (Ég),
Κράτης (par).
μένος « force » → Μεν- : Μένων (Ar H), Μένυλλος (Ar), Μένης (Ar).
ξένος ~ ξῆνος « étranger » → Ξεν- ~ Ξην- : Ξένων (par), Ξένος (Ép),
Ξηνέας (Ar).
πάομαι « acquérir » → aor. πασ- → Πασ- : Πάσων (H), Πασέας (Ép),
Πασίων (Ép).
πρᾶτος « premier » → Πρατ- : Πράτων (Ar), Πρατίας (Ép), Πρατέας (Ar).
σιμός « camus » → Σιμ- : Σίμων (Ép Ég), Σῖμος (Ar H), Σιμύλος (Ar Ép H).
στρατός « armée » → Στράτ- (cf.) : Στράτων (Ar), Στράτιος (Ép Ar),
Στράτυλλος (Ar). Cf. aussi comme deuxième élément Ἀρι-στρ-ᾶς (Ép ; <
Ἀρί-στρατος).
646 enrique nieto izquierdo

σῴζω « sauver » : aor. σωσ- → Σωσ- : Σῶσος (Ar H), Σωσίων (Ar H),
Σωσύλος (Ar).
τίνω → aor. τεισ- « payer » → Τεισ- : Τεῖσις (Ép), Τεισίας (Ar Cal Ég),
Τεισήν (Ép).
χάρις « grace » → Χαρ- : Χάρων (Ar), Χαρίας (Ép), Χάρης (Ép Ég).
φίλος « cher » → Φιλ- : Φίλλις (Ar), Φίλων (par), Φιλέας (Ar H).
3.2. Féminins
δᾶμος « peuple » → Δαμ- : Δάμιον (Ar), Δαμώ (Ar Ép), Δάμεον (Ar).
κάλλος « beauté » → Καλλ- : Καλλίς (H), Καλλώ (Ép), Κάλλεον (Ar Tir).
φίλος « cher » → Φιλ- : Φίλα (Mét), Φίλεια (Ar), Φιλία (Ép H).

4. Attestés avec quatre suffixes différents ou plus


4.1. Masculins
ἄγω « conduire » → Ἀγ- : Ἆγις (Ar), Ἀγιεύς (Myc Ar), Ἀγεύς (Ar), Ἀγίας
(Tr H Ar), Ἀγέας (Ép), Ἄγιλλος (Ég).
ἀλέξω « repousser » → Ἀλεξ- : Ἄλεξος (Ép), Ἀλέξων (Tr), Ἀλεξίας (H),
Ἀλεξᾶς (Ar Ép), Ἀλεξίων (Ar Ép).
Ἀπέλλων ~ Ἀπόλλων « Apollon » → Ἀπελλ- ~ Ἀπολλ- : Ἀπελλέας (Tr),
Ἀπελλῆς (H Tr), Ἀπελλίων (Ar), Ἀπολλᾶς (Ég).
ἄριστος « le meilleur » → Ἀριστ- : ῎Αριστις (H Cl), Ἀρίστων (par),
Ἀρισταῖος (Ar Ép), Ἀριστεύς (Ar Ép), Ἀριστέας (Ar Ép), Ἀριστᾶς (Ép),
Ἀριστίων (Ép H Ar Ég).
δᾶμος ~ δῆμος « peuple » → Δαμ- ~ Δημ- : Δημέας (Ar), Δαμίων (Ép),
Δάμων (H Ép Ar), Δᾶμος (Ar. Ép.), Δαμέας (Ar Myc Ép), Δαμᾶς (ou Δάμας,
cf. δαμάζω « dompter ») [H], Δαμήν (Ar), Δαμύλος (Ar).
δέχομαι « accepter » → aor. δεξ- → Δεξ- : Δεξεύς (Ar), Δεξίας (Ar Ép),
Δεξέας (Ép), Δέξιλλος (Ar).
δέρκομαι ~ perf. δέδορκ- « voir clairement » → Δερκ- ~ Δορκ- : Δέρκας
(Tr), Δερκύλος (Ar), Δόρκις (Ep), Δόρκων (Ar Ep), Δορκέας (Ar), Δορκύλος
(Ar Tr).
θεός ~ θιός « dieu » → Θι- ~ Θε- ~ Θεσ- : Θιαῖος (Ar Ép), Θεαῖος (Ar),
Θίων (Ar Ép), Θέστων (Ar), Θέστιος (Ar).
θράσος ~ θέρσος « courage » → Θρασ- ~ Θερσ- : Θέρσις (Ég), Θρασέας
(Ar), Θέρσας (Ar), Θερσίων (Ar), Θρασύλος ~ Θράὑλλος (Ar).
κάλλος « beauté » → Καλ(λ)- : Κάλλις (Ép), Κάλλων (Ép H), Κάλων (Ég),
Καλλίας (par), Καλλέας (Ar), Κάλλης (Ar), Καλλίων (Ép), Καλλήν (Ép).
λύκος « loup » → Λυκ- : Λύκων (Tr), Λυκαῖος (Ég), Λυκίας (Ép), Λυκέας
(par), Λύκιος (Ép).
λύω « libérer » → aor. λυσ- → Λυσ- : Λύσων (Tr H), Λυσίας (par), Λυσέας
(Ép), Λυσίων (Ar Ép), Λυσήν (Ép), Λυσιάδας (Ar).
hypocoristiques et sobriquets en argolide 647

μικ(ρ)ός « petit » → Μικ- : Μίκων (Ég), Μῖκος (Ar), Μικίων (Ar Ép),
Μικύλος (Ép).
μνάομαι → aor. μνασ- « se souvenir »→ Μνασ- : Μνᾶσις (Ar), Μνάσων
(Ar Ép), Μνασίας (par), Μνασέας (Ar H), Μνασίων (Ar), Μνάσιλλος (Ép),
Μνασιάδας (Ar).
νίκη « victoire » → Νικ- : Νῖκις (Tr Ép H). Νίκων (par), Νίκαιος (Ép H),
Νικεύς (Ar), Νικίας (par), Νικέας (Ép Ar), Νικίων (Ar), Νικιάδας (Ép).
πολύ « beaucoup » → Πολ(λ)- : Πόλλις (Ar H), Πολέας (Ar Ép), Πολλιάδας
(Ar), Πόλλιχος (Ar).
πυνθάνομαι « apprendre » → aor. πυθ- → Πυθ- : Πύθων (Ép Ég), Πυθίας
(Ar), Πυθέας (Ar Ép Ég), Πυθίων (H).
πυρρός « rouge feu » → Πυρρ- : Πύρρος (Tr), Πυρρίας (Ép), Πυρρᾶς (Ép),
Πυρρήν (Ép).
τέλος « fin, but » → Τελ(λ)- : Τέλων (Ar Ép), Τελλεύς (Ar), Τελλίας (Tr),
Τελέας (Ép), Τέλης (Ép).
τιμή « honneur » → Τιμ- : Τίμων (Ép Ar), Τίμαιος (par), Τιμέας (H), Τιμείας,
(Tr Ég), Τιμειός (douteux ; Tr), Τιμύλος (Ép), Τιμιάδας (Ép).
4.2. Féminins
ἄριστος « le meilleur » → Ἀριστ- : Ἀρίστεον (Ar), Ἀρίστεια (Ar), Ἀριστώ(ι)
(Ép Ar H), Ἀριστίς (Ep), Ἄριστον (H).
μύρτος « myrte » → Μυρτ- : Μύρτα (Ar H), Μυρτίς (Ég), Μυρτώ (Ég),
Μυρτοῦς (douteux ; Myc).
νίκη « victoire » → Νικ- : Νίκιον (Ép), Νίκεον (Ar), Νικώ (H), Νικαία (Ép
Ar).
Résumés
par ordre alphabétique des noms d’auteurs

La diffusion du suffixe ‑(ι)άδ‑ dans le système dérivationnel


des anthroponymes féminins
Alcorac Alonso Déniz — CNRS, HISOMA (UMR 5189)
[alcorac.alonso@gmail.com]
Dans cette contribution, j’aborde la diffusion du suffixe ‑(ι)άδ‑ dans le sys-
tème dérivationnel des noms de femmes en grec ancien. L’analyse des données
montre que ‑(ι)άδ‑ n’est devenu important dans ce domaine du lexique grec qu’à
partir du ve a. C. et qu’il s’est constitué comme suffixe productif de manière pro-
gressive. Les différences attestées d’une région à l’autre du monde hellénique
ne semblent pas importantes du point de vue de sa diffusion. De vrais sobri-
quets, comme Δορκάς « Chevreuil », ont été populaires dans toute la période
d’étude, mais leur rôle dans la diffusion du suffixe ne semble pas déterminant.
L’expansion de ‑(ι)άδ‑ a été plutôt provoquée par la variation des ethniques fémi-
nins du type Τρωΐα/Τρωΐη vs Τρωιάς « troyenne », phénomène dérivationnel qui
pourrait remonter à l’époque mycénienne. Même si les détails précis du déve-
loppement sont difficiles à évaluer, c’est grâce à des couples où un pseudo-patro-
nyme masculin, comme Σαμιάδας/Σαμιάδης, correspond à un pseudo-ethnique
féminin, comme Σαμιάς, que ‑(ι)άδ‑ s’est étendu. Le suffixe intègre ainsi faci-
lement d’autres systèmes anthroponymiques : les théophores (masculin Ἀσκλη-
πιάδης vs féminin Ἀσκληπιάς), les noms raccourcis de composés (masculin
Νικιάδης vs féminin Νικιάς) et les dérivés de sobriquets (masculin Ἀλεξιάδας
vs féminin Ἀλεξιάς). Le suffixe atteint de ce fait une certaine extension et appa-
raît en alternance avec d’autres plus communs dans l’anthroponymie féminine,
comme ‑ώ ou ‑ίδ‑ (Τιμώ, Τιμίς, Τιμάς). Par ailleurs, depuis l’époque homérique
‑(ι)άδ‑ se substitue facilement aux terminaisons ‑α et ‑η, mais ce phénomène ne
deviendra vraiment productif dans le domaine de la dérivation anthroponymique
qu’à partir de l’époque romaine.
650 saga

Remarques sur le suffixe -ωνδας


María Luisa del Barrio Vega — Universidad Complutense de Madrid
(marisaba@filol.ucm.es)
L’emploi du suffixe -ωνδας pour former des anthroponymes, en particulier
son origine et son étendue géographique, est un sujet fort étudié depuis long-
temps. À l’aide des répertoires modernes de noms propres grecs, en particulier
les bases de données du Lexicon of Greek Personal Names, il est maintenant
possible d’effectuer une analyse plus exhaustive et plus actualisée de ce suffixe.
Comme il a été déjà remarqué par nombre d’auteurs, -ωνδας est surtout attesté
en Grèce Centrale, en particulier en Béotie, et dans les régions voisines. La ques-
tion la plus problématique est sans doute la formation de ce suffixe, pour laquelle
différentes hypothèses ont été proposées.
Selon l’hypothèse la plus simple, -ωνδᾱς se serait formé par l’addition directe
du suffixe patronymique -δᾱς à des anthroponymes en -ων. Selon une autre hypo-
thèse, -ώνδας serait plutôt la variante syncopée de -ωνίδας. La syncope se serait
d’abord produite dans la forme du vocatif (avec -ᾰ), où le ι n’est pas accentué
à cause de l’accent récessif du vocatif : -ώνιδᾰ > -ωνδᾰ. Par la suite, la variante
-ώνδα- se serait étendue à tout le paradigme ; plus tard, un nom comme Φιλώνδας
aurait été réinterprété comme Φιλ-ώνδας : la finale -ώνδας se serait ainsi lexi-
calisée et serait devenue un suffixe productif indépendant. Le principal argu-
ment contre cette hypothèse est que, selon l’opinion la plus répandue, la syncope
n’est pas compatible avec l’accent de hauteur. Par ailleurs, il faut se demander
pourquoi nous ne trouvons pas de syncope dans d’autres anthroponymes en
-ιδας, qui remplissent les mêmes conditions que les noms en -ωνιδας.
Une autre difficulté est d’établir dans quelle région le suffixe -ωνδας est né.
Puisque c’est en Béotie que les noms en -ωνδας sont les plus nombreux, la plu-
part des auteurs s’accordent sur l’origine béotienne de ce suffixe. Or, si on admet
que -ωνδας est la variante syncopée de ‑ωνίδας, nous serions tentés de penser que
c’est en Thessalie, région qui fournit un grand nombre d’exemples de la perte
d’une voyelle brève atone (voire de toute une syllabe), que ce suffixe serait né.

Les composés du type de Σθεν-έ-λαος : affixation à la jonction


et interprétation sémantique
Alain Blanc — Université de Rouen (alainblanc@club-internet.fr)
Le premier membre du nom Σθενέλαος peut être rapproché en synchronie du
substantif neutre σθένος « force » et du verbe σθένω « être fort ». On se demande
si Σθενε- peut représenter le thème sigmatique de σθένος, mais on répond néga-
tivement car les premiers membres correspondant à des neutres sigmatiques sont
soit en -εσ- (σακέσ-παλος), soit en -ο- (ἐπο-ποιός). On examine alors quel peut
résumés 651

être le sens de Σθενέλαος, si son premier membre représente le thème du verbe


σθένω. Plutôt qu’une forme factitive, on propose d’y voir une forme intransitive
suivie d’un second membre qui joue le rôle d’un complément de moyen. Des
explications du même ordre sont aussi proposées pour Ἐρχέλαος et Θαρρέδαμος.

Sémantique des suffixes : connotations patronymiques, le cas


de la Thessalie
Richard Bouchon — Université Lumière-Lyon 2 (richard.bouchon@mom.fr)
et Bruno Helly — CNRS, HISOMA (UMR 5189) [bruno.helly@mom.fr]
Il est bien connu que dans le dialecte thessalien l’expression de la relation
patronymique est caractérisée par l’emploi d’un nom suffixé en -αιος / -ειος,
c’est-à-dire d’un adjectif dont la forme est identique à celle des adjectifs ctétiques
et exprimant l’appartenance. On rencontre en parallèle des adjectifs suffixés en
-ίδας / -ίδης qui expriment eux aussi cette relation patronymique. On a ainsi un
double système que nous illustrons ici par quelques exemples : Ἀρνίας / Ἀρνιαῖος,
Κλεόμαχος / Κλεομαχίδας. Mais il est également attesté une superposition de ces
deux expressions, et l’on a ainsi les séquences Ἀρνίας / Ἀρνιαῖος / Ἀρνιαίειος
et Κλεόμαχος / Κλεομαχίδας / Κλεομαχίδαιος. Ce système se retrouve dans les
inscriptions en koinè, notamment à Démétrias, dans des cas tels que Στράτων /
Στρατωνίδης : on a ainsi l’épitaphe de Στράτων Στρατωνίδου, qui permet théori-
quement de remonter sur trois générations. Il semble bien que l’utilisation de ces
suffixes, dans le cadre de traditions conduisant à perpétuer le même nom dans
les mêmes familles corrélativement à celle de la papponymie, a pour but d’éviter
les confusions que ne manque pas de provoquer l’identité de noms pour le père
et pour le fils, mais le procédé finit par engendrer de nouveaux noms et de nou-
velles branches familiales.

Mots, noms et suffixes. Quatre notes


Jaime Curbera — Inscriptiones Graecae, Brandenburgische Akademie der
Wissenschaften, Berlin (curbera@bbaw.de)
Étude des quatre anthroponymes Gaulites, Ennes, Kaisarion et Oileus – leur
formation, leur étymologie… et leurs suffixes.

Hellénisation par suffixation : noms non grecs et suffixes grecs


Dan Dana — CNRS, UMR 8210 Anthropologie et histoire des mondes
antiques (ANHIMA) [ddana_ddan@yahoo.com]
Partout où des contacts entre Grecs et d’autres populations sont bien docu-
mentés, on peut observer la manière dont des interactions onomastiques se
652 saga

mettent en place, notamment au niveau micro-régional, par la suffixation de noms


non grecs à l’aide de suffixes grecs ou l’hellénisation d’anthroponymes étran-
gers. L’enquête se propose de rendre compte de cette appropriation mutuelle,
car ces noms jouent un rôle de passerelle entre des groupes qui coexistent et se
mélangent, témoignant ainsi d’acculturations en cours ou plus généralement de
modes régionales et d’évolutions sur la longue durée. On peut ainsi répertorier
des noms illyriens, thraces, micrasiatiques, syriens, égyptiens, et bien entendu
latins, qui ont connu une suffixation grecque aboutissant à l’enrichissement des
stocks onomastiques régionaux. Seront pris en compte la chronologie, le genre,
le type de suffixe et sa valeur, ainsi que le statut socio-culturel des porteurs de
ces noms hybrides.

Accentuation, suffixes et loi des appellatifs dans les anthroponymes


grecs antiques
Éric Dieu — Université Toulouse–Jean-Jaurès (dieu@phare.normalesup.org)
L’objet du présent article est d’évaluer l’extension, les limites et l’origine du
phénomène de récessivité accentuelle qui semble assez largement répandu dans les
anthroponymes en grec ancien, en face de noms communs (adjectifs ou substan-
tifs) présentant la même suffixation, mais dont l’accent n’est pas récessif. Un assez
long développement y est également consacré à quelques exemples d’un mou-
vement d’accent inverse vers la fin du mot, afin de déterminer s’ils s’expliquent
selon un même principe général, ou s’il s’agit de phénomènes bien spécifiques.

La suffixation des anthroponymes en Cyrénaïque pré-romaine


Catherine Dobias-Lalou — Université de Bourgogne–Franche-Comté,
Mission archéologique française en Libye (catherine.dobias@free.fr)
Après les études pionnières d’Olivier Masson sur l’anthroponymie cyrénéenne
et quelques autres travaux consacrés au même thème, le temps semble venu pour
un bilan, qui permettra aussi de mettre à jour sur certains points le LGPN 1.
D’un point de vue général, la Cyrénaïque présente un large échantillon des
suffixes du stock grec, principalement employés dans des hypocoristiques fondés
sur des bases dithématiques abrégées. On insiste particulièrement sur les divers
suffixes en -ας (avec le problème du départ entre -ας et -ᾶς), sur les relations
entre noms masculins et féminins, notamment représentées par l’opposition
typique entre masculins en -ις / -ιος et féminins en -ώι, avec le conservatisme au
moins graphique de la diphtongue au nominatif. Deux excursus sont consacrés à
la constellation des suffixes en -υ- et aux formations en ‑ινο-.
résumés 653

Le rendement de cette panoplie suffixale n’apparaît pas très élevé dans les
stratégies familiales de nomination.
La rencontre du grec avec la langue libyque peut se manifester par emprunt
pur et simple : Αννικερις, Βακαλ, Σεμηρ sont autant de noms qui ont permis à
O. Masson (1976) de classer les noms libyques par leurs finales -is, -an-, -r, -l,
dont certaines sont justement absentes ou rarissimes en grec. Cela a donné lieu
à des hybridations intéressantes, notamment dans les échanges entre -an libyque
et -ας / αντος voire -ας / -α du grec. Il semble utile de reconsidérer sous cet angle
les quelques féminins rassemblés par O. Masson.

Des noms en -ᾶς


Laurent Dubois — École pratique des hautes études, Paris
(duboislaurent1@wanadoo.fr)
Les noms en -ᾶς ont attiré l’attention des grammairiens depuis l’Antiquité :
ceux-ci en ont donné des analyses formelles et des analyses sémantiques souvent
justes mais partielles parce qu’elles ne se fondent que sur la koinè et les auteurs
classiques. Les Modernes ont repris ces analyses mais les ont amendées grâce
aux données nombreuses des découvertes épigraphiques. La valeur abréviative
du suffixe est attestée d’abord en pays ionien tandis que dans les autres régions
apparaissent très tôt des sobriquets munis du même suffixe. C’est en Égypte que
l’on peut observer le développement le plus vivace de ce type d’anthroponymes
suffixés, avec une flexion remarquable en -ᾶτος au génitif. Un rapide inventaire
très succinct montre que le suffixe a pu s’adjoindre à de nombreux radicaux.
L’auteur fait l’hypothèse que le suffixe existait déjà au IIe millénaire et qu’il fut
au Ier beaucoup plus banal qu’on ne l’a cru.

La suffixation des anthroponymes : du mycénien aux dialectes


du premier millénaire
José Luis García Ramón — Center for Hellenic Studies, Harvard University
(garcia.ramon@uni-koeln.de)
La variété des suffixes onomastiques assurément attestés en mycénien n’est
pas aussi riche que celle du grec alphabétique. C’est dû en particulier aux limi-
tations du matériel disponible et, plus précisément, aux déficiences du linéaire B
pour la notation des syllabes finales et des géminées, qui sont d’une grande
importance pour l’étude de l’anthroponymie grecque. En tout cas, et malgré les
différences que l’on peut constater entre le mycénien et le grec du premier mil-
lénaire, la continuité existe à plusieurs titres : les suffixes attestés en linéaire B
le sont aussi en grec alphabétique et en chypriote, et le système demeure, pour
654 saga

l’essentiel, le même aux deux périodes et constitue un microsystème qui leur est
commun. En partant de là, on essaye de montrer que la prise en considération
des données du premier millénaire peut être d’un apport décisif pour la trans-
littération de noms mycéniens (des composés tronqués et/ou des sobriquets),
lorsqu’ils semblent se dérober à tout essai d’interprétation et sont même impos-
sibles à identifier comme dérivés ou comme composés. Les limitations et les pos-
sibilités de cette approche sont rendues claires par quelques faits mycéniens qui
se continuent au premier millénaire, notamment pour les noms en ‑(C)a-ko (qui
peuvent être soit des dérivés à suffixe /-ako-/ : -ακο-, soit des composés à second
membre /°arkho-/ ou /°āgo-/ : °αρχος, °ᾱγος), pour les noms en -se-u /-sēus/ :
‑σεύς formés sur des lexèmes verbaux à aoriste sigmatique (type o-na-se-u :
Ὀνᾱσεύς, ῎Ονᾱσος, Ὀνᾱσ(ι)° à côté de l’aor. ὀνᾱσα-) ou sans formation sigma-
tique (e.g. e-ne-ke-se-u /Eneksēus/ à côté de l’aor. ἐνεγκο/ε-), et pour les com-
posés à second membre en -se-u /-sēus/ et ‑σος (e.g. Μορτόνασος, ῾Ιππόλυσος,
οu qo-wa-ke-se-u /Gwōwak-sēus/, Xάραξος), qui reflètent l’inversion de leurs
membres tels qu’ils apparaissent dans les types réguliers Ὀνασι°, Λυσι°, Ἀξι°
en face de °ονᾱτος, °λυτος.

Interactions analogiques dans les flexions des anthroponymes


masculins en -ā- et en -s- à Thasos
Violeta Gomis García — Universidad Autónoma de Madrid
(violeta.gomis@uam.es)
En ionien, les noms propres masculins suffixés en -ā- et en -s- se confon-
daient au nominatif, qui était pour les uns et les autres en -ης. Il en a résulté la
création de formes analogiques dans les deux flexions. Ainsi, à Thasos, on trouve
une série d’anthroponymes dont les génitifs témoignent d’analogies qui ont joué
dans les deux sens, comme Μεγακλείδ-εος, Ἀριστείδ-ευς, Φιλονίδ-ευς en face
de Ἀριστοφάν-ου, Μοιρηγέν-ου.
S’agit-il d’une particularité dialectale propre à Thasos ou y a-t-il d’autres
parallèles à ce phénomène dans sa métropole Paros ou dans les autres régions du
domaine ionien ? À partir de quand ces terminaisons analogiques se rencontrent-
elles à Thasos ? Les interactions entre paradigmes sont-elles un processus habi-
tuel dans les inscriptions thasiennes, dans les anthroponymes voire dans le reste
du lexique, ou s’agit-il d’un processus isolé ? Après avoir passé en revue toutes
les attestations des anthroponymes à Thasos, j’essaie de répondre à ces questions,
de reconstruire, si possible, ce processus analogique et de montrer la distribution
géographique et chronologique de ce phénomène dans les inscriptions grecques.
résumés 655

Les anthroponymes masculins en -ήν, -ῆνος : réflexions


complémentaires
Nicole Guilleux — Université de Caen-Normandie, CRAHAM, CNRS
(nicole.guilleux@wanadoo.fr)
Le présent texte prolonge une étude précédemment menée sur les anthro-
ponymes masculins en -ήν, -ῆνος, et intitulée « Productivité et concurrence
suffixale : Le cas des anthroponymes en -ήν, -ῆνος » (A. Blanc et D. Petit
[éd.], Nouveaux acquis sur la formation des noms en grec ancien, Louvain -
Paris, 2016, p. 283-304). Sur la base d’un corpus revu et étendu, on réexamine
l’usage du suffixe dans ce petit groupe d’anthroponymes, ainsi que leur répar-
tition géographique et leur usage prosopographique. Dans une optique diachro-
nique, l’hypothèse d’une origine du suffixe ‑ήν, -ῆνος, « vordorisch » selon
F. Solmsen (1909), mais à considérer désormais comme mycénienne, maintenant
que la documentation en linéaire B peut être exploitée, se trouve confirmée par
des indices supplémentaires. La coexistence, déjà signalée, de (u-)wo-qe-we et
u-wo-qe-ne constitue un exemple avéré de transfert aux thèmes en ‑ήν, ‑ῆνος d’un
thème en -εύς. On peut l’imputer à la conservation de l’accusatif singulier hérité,
-ήν, marque flexionnelle qui a laissé des traces indirectes, au premier millénaire,
sur une aire dialectale excédant de beaucoup l’arcado-chypriote. Ainsi, cet accu-
satif hérité à voyelle longue subsiste dans les thèmes en diphtongue Ζεύς, ναῦς
et βοῦς selon une répartition géographique incluant, il faut le noter, le dorien.
La survie de -ήν permet également de rendre compte des nombreux flottements
flexionnels et/ou suffixaux observables dans les thèmes en -εύς et les théonymes
Ζεύς et Ἄρης. Il semble même à l’origine d’un paradigme asigmatique incomplet
en -ής, -ήν… pour quelques anthroponymes comme Δίης et Ζώης identifiés par
Olivier Masson, et explique aussi la création des anthroponymes en ‑ης, -ητος.

Un suffixe mort et ressuscité : *-u̯ent- dans l’anthroponymie


Claire Le Feuvre — Université Paris-Sorbonne
(claire.le-feuvre@paris-sorbonne.fr)
Le suffixe possessif *-u̯ ent- n’est présent qu’à l’état de traces dans l’anthro-
ponymie au premier millénaire. Les rares formes qui présentent ce suffixe à date
ancienne ont une forme avec contraction, ce qui rend l’identification du type par-
fois difficile. À l’époque hellénistique, on voit apparaître de nouveaux anthro-
ponymes en -εντ- / -εσσα qui, eux, n’ont pas la contraction et sont des emprunts
au formulaire épique. À date ancienne, le type semble plus vivant qu’ailleurs
dans le « dorien des îles », où il est possible qu’il conserve le degré zéro suffixal
ancien au féminin *-ϝασσα. Les formes de masculin en -ϝεντ- se sont confon-
dues après les contractions avec les formes de participe, et la confusion du type
656 saga

en -ϝεντ- avec les participes pourrait avoir joué un rôle dans le développement
de la gémination « expressive » dans les anthroponymes féminins tirés de parti-
cipes présents, du type Πείθουσσα.

Anthroponymes et morphologie dérivationnelle : les anthroponymes


en ‑λος, ‑ιλ(λ)ος et ‑υλ(λ)ος et la gémination expressive
Audrey Mathys — CNRS, fondation Thiers, Lattice (UMR 8094)
et AOROC (UMR 8546) [mathys@phare.normalesup.org]
Dans les études portant sur la dérivation nominale en grec ancien, on ne
distingue pas toujours très nettement les procédés morphologiques propres aux
anthroponymes du fonctionnement de la suffixation dans le lexique, en particu-
lier lorsqu’il s’agit de former des diminutifs ou des hypocoristiques. L’examen
de l’exemple des anthroponymes en ‑υλ(λ)ος et en ‑ιλ(λ)ος fait apparaître les
dangers de cette démarche. En effet, dans les anthroponymes attestés en Attique
au ve et au ive s. avant notre ère, l’apparition de la géminée dite expressive et
le timbre de la voyelle de liaison dans les hypocoristiques fondés sur des com-
posés paraissent dépendre de la structure du radical. On examine les contraintes
phonologiques ou morphologiques expliquant ces allomorphes, qui n’ont pas de
réel équivalent dans le lexique.

Étude sur la suffixation des anthroponymes en grec ancien : le cas


des hypocoristiques et des sobriquets en Argolide
Enrique Nieto Izquierdo — École pratique des hautes études, Paris 
(enrique.nieto.1977@gmail. com)
Dans ce travail l’auteur fait une analyse complète des suffixes attestés dans la
région d’Argolide pour les noms dits « courts », c’est-à-dire les hypocoristiques
et les sobriquets. Dans une première partie on en relève tous les cas en les clas-
sant par le suffixe employé et en discutant les exemples ambigus. Ensuite sont
données des statistiques concernant l’usage de chacun des suffixes. Deux études
sur les deux suffixes qui posent le plus de questions, -εύς et -είας, viennent
conclure ce panorama.

La morphologie des anthroponymes grecs en contexte de contacts :


Grande-Grèce et Sicile
Paolo Poccetti — Université Roma Tor Vergata (paolopoccetti@tiscali.it)
Les contacts entre grec et langues italiques se reflètent dans les suffixes des
anthroponymes dans les régions de l’Italie méridionale et de Sicile affectées par
résumés 657

la colonisation hellénique. Le terrain privilégié de ce type de contact, stimulé


par la mobilité individuelle et le bilinguisme dès le début de la documentation,
est notamment représenté par les quatre morphèmes de base, hérités de l’indo-
européen, -yo-, -(V)lo-, -no-, -ōn-. Ces suffixes communs aux langues en question
se sont prêtés aux superpositions de valeur et de fonctions, à la combinaison
avec d’autres suffixes et à des croisements réciproques du côté grec comme
du côté indigène. Les langues locales, de leur côté, ont absorbé les variations
morphologiques de la langue source en l’adaptant à leur système. La convergence
formelle et fonctionnelle de ces suffixes et leurs combinaisons, amorcées en
Grande Grèce, se sont intensifiées à la suite de la latinisation. Ainsi les mélanges et
la superposition des suffixes pour former les anthroponymes deviennent le miroir
de l’unité du monde gréco-romain.

Les anthroponymes grecs en -ιον : étude morphologique et sémantique


Florian Réveilhac — Université Paris-Sorbonne, UMR 8167 Orient
et Méditerranée (florian.reveilhac@gmail.com)
Les anthroponymes en ‑ιον ont fait leur apparition au cours du ve s. a. C. en
Attique, puis se sont répandus dans l’ensemble du monde hellénique. Le suf-
fixe ‑ιον entre dans la formation de diminutifs de noms simples et de noms
composés, principalement féminins. Son association avec d’autres suffixes a, en
outre, donné lieu à des suffixes diminutifs complexes (‑ίδιον, ‑άριον, ‑ύλ(λ)ιον,
‑άκιον). L’emploi de cette finale de genre neutre dans l’anthroponymie procède,
à l’origine, d’un usage pragmatique à valeur hypocoristique et a été favorisé
par l’intégration d’appellatifs en -ιον dans l’onomastique. Les valeurs diminu-
tive, puis hypocoristique, constituent des développements attendus à partir des
valeurs primitives d’origine et de parenté du suffixe -ιον.

Remarques sur la suffixation des anthroponymes composés à premier


terme prépositionnel du grec ancien
Nathalie Rousseau — Université Paris-Sorbonne, UMR 8167 Orient
et Méditerranée (nathalie.rousseau@paris-sorbonne.fr)
Un certain nombre d’anthroponymes grecs, pourvus d’un premier terme pré-
positionnel et d’un second terme nominal, peuvent être rapprochés de plusieurs
types de composés ayant en commun cette même structure formelle, selon la
relation syntaxique qu’entretiennent les deux termes. Toutefois, anthropo-
nymes et composés du lexique diffèrent du point de vue morphologique, dans la
mesure où l’éventuel « suffixe de composition » n’y apparaît pas dans les mêmes
658 saga

conditions : en particulier, les anthroponymes qui reposent sur des syntagmes


prépositionnels, qu’ils aient été empruntés au lexique ou créés de manière auto-
nome, ne présentent pas les particularités morphologiques qui permettent de dis-
tinguer dans le lexique les formes hypostatiques des autres types de composition.

Étude comparative et diachronique des suffixes des anthroponymes


grecs féminins
Araceli Striano — Universidad Autónoma de Madrid
(araceli.striano@uam.es)
Les anthroponymes féminins constituent un corpus spécifique et clairement
délimité d’un point de vue morphologique et lexical. De plus, il est beaucoup
plus maniable que celui des noms masculins : nous avons de ce fait à notre
disposition un échantillon significatif dont les conclusions d’ordre linguistique
peuvent être d’une aide considérable pour être appliquées au corpus anthropo-
nymique grec dans sa totalité. L’étude que je présente ici s’en tient aux suffixes
caractéristiques de ces noms et à leur typologie. Nous avons à notre disposi-
tion la base de données du LGPN qui nous fournit les informations essentielles
pour pouvoir observer la présence ou l’absence des différents suffixes dans les
types de noms suivants : sobriquets, noms propres composés, hypocoristiques et
formes raccourcies, c’est-à-dire l’éventail des procédés de formation qu’avaient
les Grecs à leur disposition, identifiés et organisés par Bechtel dans dans ses
HPN, ouvrage qui demeure indispensable aujourd’hui.

Les Grecs d’Étrurie : l’adaptation des anthroponymes grecs


à l’étrusque.
Gilles Van Heems — Université Lumière-Lyon 2 (gvheems@gmail.com)
Grâce à la précocité de l’adoption de l’écriture en Étrurie, à l’intensité des
contacts que les Étrusques ont eus avec les Grecs et à leur riche production
épigraphique, le patrimoine épigraphique étrusque offre un outil précieux pour
quiconque veut travailler sur les contacts entre langues et notamment sur l’his-
toire du grec hors du monde hellénophone. Cette étude s’intéresse à un secteur
particulier des emprunts massifs faits par l’étrusque au grec : celui des anthro-
ponymes. À partir d’un corpus de formes exhaustif, on étudie la manière dont
l’étrusque a traité ces formes grecques et les a adaptées à son propre système lin-
guistique ; l’examen linguistique (synchronique et diachronique) de l’adaptation
des noms de personnes grecs à la langue et au système onomastique étrusques,
est doublé d’une étude socio-historique pour offrir un panorama complet sur la
longue et complexe histoire des rapports onomastiques entre Grecs et Étrusques.
résumés 659

Un élément ionien dans l’onomastique de Cos ?


Marina Veksina — Humboldt-Universität zu Berlin — Excellence Cluster
Topoi (marina.veksina@hu-berlin.de)
Cet article reconsidère les explications proposées jusqu’ici pour les noms
de femmes à finale de coloration ionienne -ίη, -έη et -ρη à Cos. On y montre
l’impossibilité d’invoquer une quelconque contraction du dorien insulaire, étant
donné que les noms de femmes coens en -εια ne montrent aucune tendance à la
contraction et que pour un grand nombre de ces noms la forme non contracte
correspondante n’est jamais attestée. On propose d’interpréter cette particularité
morphologique comme inspirée par la diction épique, voire confortée par les
contacts avec les voisins ioniens.

Suffixes caractéristiques dans l’onomastique personnelle de Béotie


Guy Vottéro — Université de Lorraine (guy.vottero@univ-lorraine.fr)
À partir de variations suffixales fréquemment observables dans l’onomas-
tique béotienne (par ex. Κεφαλος, Κεφαλε̄ , Κεφων, Κεφωνιχος ; Οὐπερμενιδας,
Μεννει, Μεννιδας ; Φιλλει, Φιλων, Φιλωνιχος, Φιλωνδας ; Φρουνος, Φρουνιχος,
Φρουνισκος, Φρυνων), l’auteur examine les conditions d’emploi de chacun des
suffixes ‑ε(ι)(ς), -ιχος, -ιδας, -αδας, -ωνδας, -ων, en prenant en compte leur fré-
quence et leur répartition sociale.
Abstracts
in alphabetical order of the author’s last name

The diffusion of the suffix ‑(ι)άδ‑ in the derivational system of feminine


personal names
Alcorac Alonso Déniz — CNRS, HISOMA (UMR 5189)
[alcorac.alonso@gmail.com]
In this paper I discuss the diffusion of the suffix ‑(ι)άδ‑ in the derivational
system of feminine personal names in Ancient Greek. The analysis of the data
shows that ‑(ι)άδ‑ only became important in this domain of the lexicon from
the 5th c. BC and that it gradually became a productive suffix. The differences
attested from one region to another of the Hellenic world do not seem impor-
tant from a diffusional perspective. Real nicknames like Δορκάς “Roe Deer”
were popular during all the period investigated, but their role in the spreading
of the suffix does not seem to be fundamental. Instead, the expansion of ‑(ι)άδ‑
was triggered by the variation of feminine ethnics like Τρωΐα/Τρωΐη vs Τρωιάς
“from Troy”, a derivational phenomenon that can be traced back perhaps to the
Mycenaean period. Although the exact details of the development are hard to
assess, ‑(ι)άδ‑ arguably spread thanks to pairs of personal names where a mas-
culine pseudo-patronymic, like Σαμιάδας/Σαμιάδης, corresponds to a feminine
pseudo-ethnic, like Σαμιάς. As a result, the suffix easily integrates with other
systems of personal names: theophoric (masculine Ἀσκληπιάδης vs feminine
Ἀσκληπιάς), abbreviated names from compounds (masculine Νικιάδης vs fem-
inine Νικιάς) and derivational by-forms of nicknames (masculine Ἀλεξιάδας vs
feminine Ἀλεξιάς). The suffix reaches eventually a certain extension and alter-
nates with other more widespread suffixes among feminine personal names, like
‑ώ or ‑ίδ‑ (Τιμώ, Τιμίς, Τιμάς). Additionally, ‑(ι)άδ‑ easily replaces the endings
‑α and ‑η since Homer, but this derivational operation will only become really
productive in Roman times.
abstracts 661

Remarks on the suffix -ωνδας


María Luisa del Barrio Vega — Universidad Complutense de Madrid
(marisaba@filol.ucm.es)
The use of the suffix -ωνδας in personal names, its origin and its geograph-
ical diffusion have been addressed several times. However, a more detailed and
updated analysis of this specific suffix can be made today with the assistance of
modern onomastic databases, particularly the Lexicon of Greek Personal Names.
As has been pointed out previously by many authors, -ωνδας is mainly docu-
mented in Central Greece, notably in Boeotia and in the neighboring regions.
Undoubtedly, the most problematic issue is the origin of the suffix, for which
several hypotheses have been proposed.
According to the simplest hypothesis, -ωνδας originated through the addi-
tion of a patronymic suffix -δας to personal names in -ων. An alternative view
assumes that the vowel loss occurred first in the vocative (with -ᾰ), where ι was
unstressed due to the characteristic recessive accent of the vocative : -ώνιδᾰ >
-ωνδᾰ. This syncopated variant eventually spread to the whole paradigm and
resulted in the extension of -ώνδας, which became an independent productive
suffix due to names such as Φιλώνδας, which were reinterpreted as Φιλ-ώνδας.
Opponents to this hypothesis contend that syncope is unexpected in a pitch
accent language. Moreover, other personal names in -ιδας do not exhibit a sim-
ilar syncopated form.
Additionally, this paper will address the question of the geographical area in
which the suffix ‑ωνδας first appeared. Since personal names ending in -ωνδας
are pervasive in Boeotian documents, most scholars agree that the suffix origi-
nated in Boeotia. However, if ‑ωνδας is in fact the syncopated variant of -ωνίδας,
Thessaly, where unaccented short vowels and light syllables tended to undergo
syncope, becomes more suitable a candidate as the starting point of the diffusion,

The compounds of the Σθεν-έ-λαος type: Junction affixation


and semantic interpretation
Alain Blanc — Université de Rouen (alainblanc@club-internet.fr)
The first member of the noun Σθενέλαος can be synchronically linked to the
neutral substantive σθένος “force” and to the verb σθένω “to be strong”. One may
ask whether Σθενε- can represent the sigmatic stem of σθένος, but the answer
is negative since the first members corresponding to sigmatic neuter stems are
either in -εσ- (σακέσ-παλος) or in -ο- (ἐπο-ποιός). Furthermore, this paper exam-
ines the meaning of Σθενέλαος in order to see whether the first member repre-
sents the stem of the verb σθένω. Rather than interpreting it as a factitive form,
662 saga

Σθενε- can be interpreted as a form conveying an intransitive meaning followed


by a second member playing the role of a complement of means. A similar expla-
nation is proposed for Ἐρχέλαος and Θαρρέδαμος.

The semantic of suffixes: patronymic connotations, in the case


of Thessaly
Richard Bouchon — Université Lumière-Lyon 2 (richard.bouchon@mom.fr)
et Bruno Helly — CNRS, HISOMA UMR 5189 [bruno.helly@mom.fr]
The Thessalian dialect in the Hellenistic times offers a double suffixation
system to express a patronymic meaning. The main one was built upon the adjec-
tivization of nouns by adding a -αιος/-ειος suffix, creating thus a very similar
form to the ctetic adjectives and bearing a general meaning of belonging. How-
ever, the addition of the suffix -ίδας/-ίδης to certain nouns or adjectives conveyed
a similar patronymic meaning. Some examples of this phenomenon are exposed
in this paper (Ἀρνίας/Ἀρνιαῖος, Κλεόμαχος/Κλεομαχίδας), as well as the pos-
sibility of a superposition of both systems in series such as Ἀρνίας/ Ἀρνιαῖος/
Ἀρνιαίειος or Κλεόμαχος/Κλεομαχίδας/Κλεομαχίδαιος. Quite revealingly, an
identical system is attested in Koine inscriptions of the Thessalian area, particu-
larly in Demetrias. Apparently, the use of theses suffixes were part of traditions
aiming at the perpetuation of the same name in the same families, in parallel
with papponymy, but the addition of a suffix prevented a certain confusion as
to the identity of the names that father and son bore. Additionally, this suffixa-
tion strategy led to the creation of new idionyms ensuring the expression of new
family branches. Furthermore, -ίδας and -ιανός work in a similar way, the former
in the Hellenistic time, the latter in the Roman Imperial era: both suffixes lost
their patronymic meaning, except in specific cases, and were used to designate
kinship groups. Thus, Thessalians developed three suffixation systems, which
originally conveyed the meaning of belonging, with a patronymic or kinship
connotation; the meaning of the suffixes eventually was blurred, and they essen-
tially became a productive way for the creation of idionyms, in a strategy of idi-
onymic variations amidst one family group.

Words, names and suffixes. Four notes


Jaime Curbera — Inscriptiones Graecae, Brandenburgische Akademie
der Wissenschaften, Berlin (curbera@bbaw.de)
A commentary of the personal names Gaulites, Ennes, Kaisarion and Oileus
—their formation, their etymology… and their suffixes.
abstracts 663

Hellenization by suffixation: non Greek names and Greek suffixes


Dan Dana — CNRS, UMR 8210 Anthropologie et histoire des mondes
antiques (ANHIMA) [ddana_ddan@yahoo.com]
Everywhere where the evidence on contacts between Greeks and other pop-
ulations is considerable, we may observe the ways of onomastic interactions,
especially at a micro-regional level, by the suffixation of non Greek names with
Greek suffixes or the hellenization of foreign names. This paper points to this
mutual appropriation, since these names are a bridge between coexisting and
melting groups, showing acculturations or more generally regional fashions and
longer evolutions. We may list Illyrian, Thracian, Microasiatic, Syrian, Egyptian,
and of course Latin names, concerned by a Greek suffixation that occasioned the
enrichment of regional onomastic stocks. The chronology, the genre, the type of
suffix and its value, as well as the socio-cultural status of the bearers of these
hybrid names will be considered.

Ancient Greek personal names: accentuation, suffixes and law


of appellatives
Éric Dieu — Université Toulouse–Jean-Jaurès (dieu@phare.normalesup.org)
Ancient Greek personal names often have recessive accentuation, whereas
adjectives or nouns with the same suffix are non-recessive. This paper aims at
assessing the extent and limitations of this phenomenon as well as its origins.
The occasional cases in which a non-recessive personal name contrasts with a
recessive adjective or noun shall also be carefully pondered in order to examine
if they follow the same general accentual rule or should rather be explained by
specific phenomena.

Suffixation of personal names in pre-Roman Cyrenaica


Catherine Dobias-Lalou — Université de Bourgogne–Franche-Comté
(catherine.dobias@free.fr)
After Olivier Masson’s pioneering studies on Cyrenaean onomastics and
some works done by others, this paper offers an up-to-date survey, which will
also offer an opportunity to supplement LGPN 1.
Generally speaking, this region offers a large sample of the Greek suffixes,
mainly used in hypocoristics based upon abbreviated double stem names. Spe-
cial attention is given to the various suffixes in -ας (with the problematic sorting
out between -ας and -ᾶς) and to the relations between men’s and women’s names,
namely the typical masculines in -ις, -ιος vs feminines in -ώι, which keep at least
664 saga

in the spelling the diphthong in the nominative. Two other topics are the mani-
fold suffixes in -υ- and the forms in -ΙΝΟ-.
The productivity of this wide range of suffixes is not very high in family
naming strategies.
Contacts with the Libyan language may result in merely borrowing native
names, such as Αννικερις, Βακαλ, Σεμηρ. O. Masson was able to sort out and
describe Libyan endings -is, -an, -r, -l, some of which are totally absent of Greek
onomastics or are very rarely found. Differently, a hybridisation process gave
way to exchanges between Libyan -an and Greek -ας/-αντος or even -ας/-α. In
this perspective, it seems useful to reconsider some women’s names gathered
by O. Masson.

Greek personal names in -ᾶς


Laurent Dubois — École pratique des hautes études, Paris
(duboislaurent1@wanadoo.fr)
Names in -ᾶς have attracted the attention of scholars since Antiquity.
Although the formal and semantic views of ancient grammarians are essentially
correct, their analysis is partial because they rely exclusively upon data of the
Koine and of classical authors. Modern scholars have improved old views by
introducing new epigraphic discoveries. The shortening function of the suffix is
first attested in Ionic areas, whereas nicknames in -ᾶς developed early in other
regions. Egypt particularly exhibits the most intense development of this kind of
personal names (with genitive in -ᾶτος). A short inventory shows that the suffix
could be added to many stems. The author argues that the suffix existed already
in the second millennium BC and that in the first millennium its use was much
more ordinary than usually thought.

Suffixation of personal names: from Mycenaean to the dialects


of the 1st millennium BC
José Luis García Ramón — Center for Hellenic Studies, Harvard university
(garcia.ramon@uni-koeln.de)
The variety of onomastic suffixes recognizable with certainty as such in
Mycenaean is not as rich as that attested in alphabetical Greek. This is especially
due to the limitations of the available evidence and, more precisely, to the defi-
ciencies of Linear B to note final syllables and geminates, which are important
issues for the study of Greek personal names. In any case, and in spite of the dif-
ferences, one may state that between Mycenaean and first millennium Greek,
there is a continuity in many respects: the suffixes attested in Linear B are in fact
attested in Alphabetic Greek and in Cypriot, and the essentials of the system are
abstracts 665

the same in both periods, and they constitute a microsystem which is common to
both. On the strength of this basic assumption, an attempt is made to show that
taking into consideration 1st millennium evidence may be of decisive help for the
transliteration of Mycenaean names (truncated compounds, and/or nicknames),
which seem to defy interpretation and even make it impossible to identify them
as derivatives or as compounds. The limitations and possibilities of this approach
are set forth in the light of some concrete items attested in Mycenaean which live
on in the first millenium: the nouns in -(C)a-ko (which may be either derivatives
with suffix /-ako-/: -ακο-, or compounds with second member /°arkho-/ or /°āgo-/:
°αρχος, °ᾱγος), the nouns in -se-u /-sēus/: -σεύς built on verbal lexemes having a
sigmatic aorist (type o-na-se-u: Ὀνᾱσεύς, Ὄνᾱσος , Ὀνᾱσ(ι)° beside aor. ὀνᾱσα-)
οr not (e.g. e-ne-ke-se-u /Eneksēus/ beside aor. ἐνεγκο/ε-), and the compounds
with second member in -se-u /-sēus/ and -σος (e.g. Μορτόνασος, ῾Ιππόλυσος,
οr qo-wa-ke-se-u /Gwōwak-sēus/, Xάραξος), which reflect an inversion of their
members in the regular types Ὀνασι°, Λυσι°, Ἀξι° et °ονᾱτος, °λυτος.

Analogical flectional interactions for the Thasian masculine personal


names in -ā- and -s-
Violeta Gomis García — Universidad Autónoma de Madrid
(violeta.gomis@uam.es)
Masculine personal names in -ā- and in -s- shared a similar nominative in
Ionic: -ης. Accordingly, the two paradigms often exhibit analogical forms. In
Thasos -εος is found in Μεγακλείδ-εος, Αριστείδ-ευς, Φιλονίδ-ευς, whereas -εω
appears in Ἀριστοφάν-εω, Μοιρηγέν-εω.
Is it a particular dialectal feature of this island or are there other parallels of
this phenomenon in its metropolis Paros or in other regions of the Ionian area?
Since when are these analogical terminations attested in Thasos? Are these inter-
actions into the paradigms a normal development in Thasian inscriptions, either
in personal names or in the rest of the lexicon? Or is it an isolated phenomenon?
In this paper I will try to answer to these questions after reviewing all the Tha-
sian onomastic data, to reconstruct, if possible, this analogical process and to
highlight the geographical and temporal distribution of the phenomenon in the
Greek inscriptions.

Masculine Personal Names in -ήν, -ῆνος: Further Thoughts


Nicole Guilleux — Université de Caen-Normandie, CRAHAM, CNRS
(nicole.guilleux@wanadoo.fr)
This paper is the continuation of a previous work on masculine personal names
in -ήν, -ῆνος entitled “Productivité et concurrence suffixale : le cas des anthropon-
666 saga

ymes en -ήν, -ῆνος” (A. Blanc et D. Petit [éd.], Nouveaux acquis sur la formation
des noms en grec ancien, Louvain–Paris, 2016, pp. 283–304). Relying on a revised
and increased corpus, I will examine the small set of masculine personal names
in which the suffix is used, and its geographical and prosopographic distribution.
From a diachronic perspective, the hypothesis of a so-called “vordorisch” origin—
according to Felix Solmsen—or a “Mycenaean” origin—now that Linear B tablets
can be read—is confirmed by additional evidence. The coexistence of Myc. (u-)
wo-qe-we and u-wo-qe-ne shows that at least one stem in -εύς had already been
transformed into a noun in -ήν, -ῆνος. This phenomenon is to be ascribed to the
inherited -ήν ending in the accusative singular of nouns in ‑εύς and it has left scarce
or indirect evidence in a dialectal area exceeding the borders of Arcado-Cyprian.
This old ending with its typical long vowel survives also in diphthongal stems such
as Ζεύς, ναῦς and βοῦς and its geographical distribution includes, not unsurpris-
ingly, even Doric dialects. The continuation of this ending also helps to understand
why nouns in -εύς and theonyms like Ζεύς and Ἄρης developed a high degree
of polymorphism in their inflection and exhibited different suffixes. Furthermore,
the ‑ήν accusative ending probably triggered an incomplete and asigmatic declen-
sion in -ής, -ήν… in personal names such as Δίης and Ζώης, identified by Olivier
Masson in 1957, and in the set of names in ‑ης, -ητος.

Death and revival of a suffix: *-u̯ent- in personal names


Claire Le Feuvre — Université Paris-Sorbonne
(claire.le-feuvre@paris-sorbonne.fr)
The possessive suffix *-u̯ ent- left only scanty traces in Greek personal names
in the first millennium. The few names displaying this suffix show a contracted
form, which makes it difficult to identify the suffix. The Hellenistic period wit-
nesses the emergence of new names in -εντ-/-εσσα, without any contraction, which
are borrowed from the epic language. As far as older formations are concerned, it
seems the type is better attested in the so-called “island Doric”, where it may have
preserved the old zero grade of the feminine *-ϝασσα. Masculine forms in -ϝεντ-,
after the contractions took place, merged with participle forms, and this merger
may have played a role in the development of the so-called “expressive” geminate
in feminine names drawn from present participles of the Πείθουσσα type.

Personal names and derivational morphology: personal names in ‑λος,


‑ιλ(λ)ος et ‑υλ(λ)ος and expressive gemination
Audrey Mathys — CNRS, fondation Thiers, Lattice (UMR 8094)
et AOROC (UMR 8546) [mathys@phare.normalesup.org]
abstracts 667

In works dealing with Ancient Greek noun formation, there is not always a
clear distinction between morphological phenomena affecting personal names
and the suffixation mechanisms in the lexicon, in particular when dealing with
the derivation of diminutives and hypocoristica. In this paper, the investigation
of the case of personal names in ‑υλ(λ)ος and ‑ιλ(λ)ος shows the dangers of
this approach. In hypocoristic personal names issued from compound attested
in Attic during the 5th and 4th c. BC, the occurrence of the so-called emphatic
geminate and the linking vowel seem to depend on the stem structure. We assess
the phonological and morphological constraints that conform these allomorphs
and that do not have a correlate in the lexicon.

Studies on the suffixation of personal names in Ancient Greek: the case


of the hypocoristics and nicknames in Argolis
Enrique Nieto Izquierdo — École pratique des hautes études, Paris
(enrique.nieto.1977@gmail. com)
In this paper the author makes a complete analysis of the suffixes attested in
the region of the Argolis in the formation of the “short” names, that is, the hypo-
coristics and the sobriquets. In the first part, the author classifies the examples
according to their suffix and discusses the ambiguous cases. In the second part,
statistics for the use of theses suffixes are shown. Two studies on the suffixes that
are more problematic, -εύς and -είας, are given in the final part.

Language contacts and morphology of Greek personal names


in Southern Italy and Sicily
Paolo Poccetti — Université Roma Tor Vergata (paolopoccetti@tiscali.it)
Contacts between Greek and local languages of ancient Italy are mirrored
by morphology of personal names attested in Southern Italy and Sicily in both
Greek and Italic epigraphy. Bilingualism and individual mobility, which both
literature and epigraphy show from the earliest texts on, favored exchange and
blending of morphemes and their functional values applied in specific contexts.
Moreover, local languages and Greek reciprocally absorbed variations that were
adapted to each system respectively. In particular four basic suffixes, namely
‑yo-, -(V)lo-, -no-, -ōn-, inherited from Indo-European, underwent overlapping
and cross‑linguistic adaptation with respect to both form and function. Combi-
nation with further morphological items yielded some new morphemes. Bilin-
gualism of the Roman society intensified such a convergence in derivatives of
personal names together with their functional values, so that it may be consid-
ered among the most significant aspects of the unity of the Greek-Roman world.
668 saga

Greek -ιον Personal Names: A Morphological and Semantic Study


Florian Réveilhac — Université Paris-Sorbonne, UMR 8167 Orient
et Méditerranée (florian.reveilhac@gmail.com)
Personal names in -ιον appear in Attic during the 5th c. BC, and then spread
out in the whole Hellenic world. One can find -ιον diminutives of simple and
compound names, which are mostly feminine names. The addition of -ιον to
other suffixes triggers some diminutive complex suffixes (‑ίδιον, ‑άριον, ‑ύλ(λ)
ιον, ‑άκιον). The creation of personal names in -ιον originates from a hypoco-
ristic pragmatic use, and was boosted by the use of ‑ιον common nouns as per-
sonal names. The diminutive and eventual hypocoristic values of ‑ιον developed
from the primitive notion of origin and parenthood.

Notes on Suffixation of Compound Personal Names with Prepositional


First Element in Ancient Greek
Nathalie Rousseau — Université Paris-Sorbonne, UMR 8167 Orient
et Méditerranée (nathalie.rousseau@paris-sorbonne.fr)
Greek personal names coined by means of a preposition and a nominal stem
may be associated with several composition types based on the same formal pat-
tern, depending on the syntactical relation between these two elements. However
personal names and compounds belonging to the lexicon differ as to their mor-
phology, in so far as the possible composition-suffix does not appear under the
same conditions. In particular, personal names based on prepositional phrases,
whether they are borrowed from the lexicon or independently coined, do not
show the morphological peculiarities that allow distinguishing prepositional
governing compounds from other composition types.

A comparative and diachronic study of feminin suffixes


in Greek personal names
Araceli Striano — Universidad Autónoma de Madrid
(araceli.striano@uam.es)
Female personal names constitute a specific corpus clearly delimited from a
morphological and lexical point of view. The linguistic analysis of feminine ono-
mastics, which provides a significant and more manageable corpus, unlike mas-
culine personal names, offers important results that can be applied to the corpus
of Ancient Greek personal names as a whole. The study presented here is con-
fined to suffixes characteristic of these names and to their linguistic behavior.
We have at our disposal the LGPN database that provides essential informa-
tion to observe the presence or absence of the different suffixes in the following
abstracts 669

contexts: nicknames, compounds, hypocoristics and abbreviated forms. We can


easily observe the variety of ways that the ancient Greeks had at their disposal
and that was first recognized and organized by F. Bechtel in his HPN, which still
remains a necessary starting point.

Greeks in Etruria: integration of Greek personal names in Etruscan


Gilles Van Heems — Université Lumière-Lyon 2 (gvheems@gmail.com)
Thanks to an early alphabetization, intense cultural contacts with Greeks and
a rich epigraphical corpus, Etruscan inscriptions are very useful for anyone inter-
ested in contact linguistics and especially in the history of the Greek language
out of the Greek-speaking world. This paper examines a particular area of the
intense linguistic borrowing of Etruscan to Greeks: personal names. Based upon
a catalogue that assembles all Etruscan personal names borrowed from Greek
or built upon a Greek name or word, it focuses on the ways and means through
which Etruscan integrated those foreign names into its own language and ono-
mastic system. Both linguistic (synchronic and diachronic) and socio-historical
aspects are dealt with, in order to offer a comprehensive view of the long and
complex history of onomastic relations between Greeks and Etruscans.

Ionic element in Coan Onomastics?


Marina Veksina — Humboldt-Universität zu Berlin – Excellence Cluster
Topoi (marina.veksina@hu-berlin.de)
This paper reconsiders the explanations proposed so far for the feminine
names in Cos that exhibit the termination -η. It is shown that a an insular Doric
contraction cannot explain these forms, since Coan feminine names in -εια do
not show tendency to contraction, and for many of the Coan names in -ίη, -έη,
-ρη no such form is ever attested. It is argued that this peculiar morphology was
inspired by the epic diction, possibly also supported by the contacts with the
Ionic neighbours.

Characteristic suffixes in personal onomastic of Boeotia


Guy Vottéro — Université de Lorraine (guy.vottero@univ-lorraine.fr)
From frequent suffixal variations, which can be observed in Boeotian ono-
mastics (i.e. Κεφαλος, Κεφαλε̄ , Κεφων, Κεφωνιχος; Οὐπερμενιδας, Μεννει,
Μεννιδας; Φιλλει, Φιλων, Φιλωνιχος, Φιλωνδας; Φρουνος, Φρουνιχος, Φρουνι-
σκος, Φρυνων), the author examines the conditions of uses of the suffixes -ε(ι)
(ς), -ιχος, -ιδας, -αδας, -ωνδας, -ων, taking into account their frequency and their
social distribution.
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Préfixes, suffixes et chaînes suffixales
identifiés dans les anthroponymes

Sophie Minon,
avec la collaboration d’Édouard Chiricat

Avertissement : le point de vue retenu ici est principalement synchro-


nique. Il s’agit de montrer les mécanismes qui sous-tendaient chez les
Grecs, créateurs et porteurs de noms, la fabrication en série de formes de
dérivés variées à partir de bases uniques et de bases composées éventuel-
lement tronquées.

a) Éléments préfixaux
N. B. 1 : ἀρε/ι- et ἐρε/ι- (HPN 65-66) sont absents de cette liste parce qu’ils ont été
considérés comme des éléments lexicaux plutôt que des préfixes, vu l’existence des
composés Ἀρί-μνηστος (HPN 65) et Ἀμφ-αρί-ōν (S. Minon 2013) ainsi que Ἐρέ-δαμος
(HPN 65) et Ἐρί-γυιος (ibid.), cf. Chantraine, DELG, s.v. ἀρι-, ἐρι-.
Ν. Β. 2 : l’occlusive sourde finale d’un préfixe élidé s’assimile en l’occlusive aspirée
correspondante au contact d’une voyelle aspirée suivante, variation que nous avons pris
le parti de ne pas indiquer.

α(ν)/ν-
(h)α-
αμφ(ι)-
αν(α)-
αντ(ι)-
απ(ο)-
δι(α)-
δυ(σ)-
εκ(σ) / εσ-, cf. Ἔσ-φαντος, Tégée, IG V (2) 35, 33.
εν-
επ(ι)-
688 saga

ευ-
κατ(α)-
μετ(α)-
παρ(α)-
πεδ(α)-, cf. Πεδ-άρετος, Arcadie, IG V (2) 549, 35.
περ(ι)-
ποτ(ι) / ποι-, cf. Ποτ-άγορος, Panormos, TCal  85, 51 ; Ποί-δικος, Κopai, IG VII
2781, 13.
προ-
προσ / πορσ(ι)-, cf. Πορσόπα, Aspendos, C. Brixhe, Pamphylie, no 46 (προσώπη) ?
Πορσίλος, Hiérapytna, Eus., ad. Od. γ444 (Πορσίαλος —  Schol. ibid., cf.
LGPN 1), < Πορτ(ι)- ?)
(κ)συν-
(h)υπερ-
(h)υπ[α / αι(?) / ο]-, cf. Ὑπαίας, Phocide, BCH 105 (1981), 812.
(h)υψ(ι)-

b) Suffixes en emploi dérivationnel


N. B. : (V), dans -(V)λ(λ)-, etc., indique que la voyelle initiale du suffixe varie et peut,
suivant les cas, appartenir au radical ou au suffixe, ce que rend clair la segmentation de
l’anthroponyme chaque fois donné en exemple. Des illustrations des différents timbres
identifiés pour ces suffixes seront fournies dans la dernière rubrique, qui récapitule les
principales chaînes suffixales.

α) Niveau 4 (anté-antépénultième) 1
-ων-, cf. Φιλ-ων-ιχ-ίδ-ης, Introduction, p. 17 et 21.
1. En dehors de la partie d) (cf. note 7), ont été exclus, comme constitutifs de dérivés
lexicaux employés comme anthroponymes eux-mêmes pourvus, le cas échéant,
de leurs propres suffixes dérivationnels : -� (ϝ)- au niveau 3, dans Ἀριστη-ίδ-ης >
Ἀριστε-ίδης (OGS III, 123, et cf. IG II2 49, 4, un Abydéen, pour la forme en -ηίδης),
dérivés de Ἀριστεύς, lui-même bâti à partir du nom d’agent ἀριστ-εύς ; -τορ- (type
Ἑκτορ-ίδ-ης, où -τορ- est constitutif du nom d’agent ἕκ-τωρ, d’où l’anthroponyme
Ἕκτωρ, interprété aussi par les Anciens comme hypocoristique possible du type
Ἐχε-μένης, Ἐχέ-πολις, cf. Kamptz, HomPN, p. 261) ; -τηρ- (Σωτηρ-ίδ-ιον, auprès
duquel existe de même σω-τήρ, d’où Σωτήρ ; -τερ- (Ἀμφοτερ-ίδ-ας, où -τερ- est le
suffixe à valeur oppositionnelle de l’adjectif ἀμφό-τερ-ος, voir ici É. Dieu, p. 252-
253) ; -(V)μ-, formateur de dérivés adjectivaux comme ἄλκιμ-ος (Chantraine, For-
mation, p. 152), d’où Ἄλκιμ-ος, Ἀλκιμ-ίδ-ης ; et -(V)ντ- (Βλεποντ-ίδ-ας, où le suf-
fixe est constitutif du participe actif masculin / neutre βλέπο̄̆ν; Ἀδείμαντ-ος, comme
l’adj. ἀδείμαντος, Γεροντ-ίδ-ας).
préfixes, suffixes et chaînes suffixales 689

β) Niveau 3 (antépénultième) 2
-ιδ-, cf. Ἀριστε-ιδ-ιαν-ός (LGPN 5a, 2 ex., imp.) 3.
-ᾱ�κ-, cf. e.g. Φειδ-ακ-ίδ-ας, fils de Φειδᾶς, Kéos (HPN 443) vs Μυρμηκ-ίδ-ης,
Milet (LGPN 5b).
-(V)λ(λ)-, cf. Νικ-υλ-ίδ-ας, Ténos, GVI  1284 ; Βραχυ-λλ-ίδ-ας, Lindos,
IG XII (1) 884, 9 ; Ὑβρι-λ-ίδ-ης, Athènes, Develin, AO, p. 55 ; crét. Πρατ-αλ-ίδ-ας
(OGS  I-II, 462) ; Μυστα-λ-ίδ-ης, Lys., Fr.  74. Voir ici pour -ιλ(λ)ος et -υλ(λ)ος,
A. Mathys, p. 333 sq., et le préambule de d) 4.
-ιν-, cf. Αἰσχ-ιν-άδ-ης, Pétrai, IG XII (9) 246A, 157.
-ίων-, cf. Ἀριστ-ιων-ίδ-ης, Athènes, IG I3 1146.
-ων-, cf. Φιλ-ων-ίδ-ης, Athènes, IG II2 2343, 2, Ἀγαθ-ων-ιαν-ός, SEG 43, 785,
A, 4, Éphèse, imp.
-ιχ-, cf. Σιμ-ιχ-ίδ-ας, Théocrite, Id. VII, 21.
γ) Niveau 2 (pénultième) 5
-αδ-, cf. Παντ-άδ-ᾱς (LGPN 3a), et voir ici A. Alonso Déniz, p. 434.
-ιαδ-, cf. Καρπ-ιάδ-ης (LGPN 2), et voir ibid.
-ιδ-, cf. e.g. Φιλ-ίδ-ιον, Athènes, IG II2 5128, et voir ici F. Réveilhac, p. 394 sq.

2. Ni au niveau 2, ni au niveau 3, nous ne croyons à l’existence d’un suffixe -(V)τ-,


dans des noms comme Γλαυκέτ-ης (HPN 108) ou Φιλωτ-άδ-ης (HPN 453, cf. 242,
s.v. Κλεώτας). Par ailleurs, un Πυρριτῖνος doit sans doute être segmenté : Πυρρι-τ-
ῖν-ος, cf. ὁ πυρρίας « serpent de couleur flamme », etc. ; en tout cas, l’anthroponyme
dérive plutôt d’un Πυρρί-ας que d’un Πύρρων vel sim., de sorte que -τ- paraît y tenir
lieu d’élargissement. Il pourrait en aller de même, niveau 2, pour Ἀγγέλι-τ-ος, cf.
ἀγγελία, ἀγγελικός, etc., sur *ἀγγέλ-yω , cf. déjà M. Casevitz, Mélanges Taillardat,
p. 49-53.
3. Les rares formes en -ιδ-ιαν-ός, d’époque impériale, qui paraissent être les seules à
présenter -ιδ- à ce niveau, confirment que, dans le seul domaine grec, le suffixe était
employé comme suffixe de niveau 2.
4. Pas de suffixe -ολ- : dans Πρωτολ-ίδ-ης, (AD 23 [1968], Mel. p. 109, no 62), le -λ-
est le plus souvent la forme tronquée du radical de λᾱός, voir les nombreux Πρωτό-
λαος, Πρωτο-λέως, Πρᾱτό-λᾱς, ou celle de λέων, cf. Πρωτο-λέων, père de Λέων
(SEG 39, 1137, 10, LGPN 5b). 
5. Pour le récapitulatif des chaînes suffixales, cf. infra. Ont été ici exclus les suffixes
dérivationnels formateurs de lexèmes employés comme anthroponymes, tels quels
ou dérivés eux-mêmes, soit les mêmes que notes précédentes et : -μᾰτ- (Κτημάτ-ιος
est fait sur κτῆ-μα, gén. -μα-τ-ος), -(V)μεν- (Φιλουμέν-η, comme φιλουμένη), -μον-,
suffixe de noms d’agents comme ἡγε-μών, d’où Ἡγέ-μων, Ἡγε-μόν-η, et -(V:)σ/(V)
ισ- (Πρέπουσ-α, comme πρέπουσα, Ἀστυμέλοισ-α, cf. ion.-att. μέλουσα). Ont été en
revanche inclus les suffixes, comme -ακ- dans Σιμ-άκ-ιον (il n’est pas attesté de nom
ou d’adjectif **σῖμαξ), qui ont pu servir concurremment dans les deux catégories,
lexicale et anthroponymique.
690 saga

-ε̄̆(ϝ)-, cf. Βαι-η-ίας, Cyrène, SEG  IX 46, 44 (OGS  III, 318), analogique de
Ἀριστή-ας, Télos, IG XII (3), 73, où le suffixe -ε‾�ϝ est d’origine lexicale, cf. note 1.
Voir aussi -(V)υ- et infra, c), -έας, -ίας.
-υθ-, cf. e.g. Γοργ-υθ-ίων, Mantinée-Antigoneia, IG V (2) 323, 76.
-(V)κ-, cf. e.g. Σιμ-άκ-ιον, Athènes, IG II2 1534B, voir F. Réveilhac, p. 406, et
le préambule de d).
-(V)λ(λ)-, cf. ici A. Mathys, p. 333 sq.
-αιν-, cf. Ξεν-αιν-ώ, Délos, IG XI (4), 1174, cf. c), N. B. 1, mais voir aussi le
préambule de d).
-(V)ν(ν)-, cf. e.g. Εὐ-κρατ-ῖν-ος, Kythnos, IG XII (5) 523.
-ων-, cf. Φιλ-ων-ίς, Syros, IG XII Suppl., p. 118, no 243.
-ιαν- (latin), cf. Σωτηρ-ιαν-ή, Amathonte, Athena 22 (1910), p. 144, no 4.
-(V)νδ- (asianique), cf. e.g. Ταρκ-όνδ-ας, Cilicie, IGAlexPtol 44, 3.
-(V)νθ- (pré-grec), cf. e.g. Σαβύλ-ινθ-ος, Molosse (Th. II 80, 6).
-(V)ρ(ρ)-, cf. Τυχα-ρ-οῦς, Thessalonique (L. Dubois 2010, 401), cf. D. Dana,
p. 207.
-(V)σκ-, cf. Φιλ-ίσκ-ος, Épidaure, IG IV (1)2 146 vs Φορύ-σκ-ος, IG I3 1186,
115.
-(V)υ-, cf. Κρατ-εύ-ας, Pydna, GRBS 43 (2002-3), p. 119, nos 5, 2, 8 (LGPN 4),
et voir -έας, d).
-ιχ-, cf. Μητρ-ίχ-η, Chios, Arch. Pap. 16 (1958), p. 170, no 2.

c) Suffixes « désinentiels » simples et complexes (tête suffixale,


niveau 1), avec leurs génitifs 6
N. B. 1 : sont donnés ici, non les suffixes flexionnels au sens strict, mais les suffixes
« désinentiels », qui peuvent déjà consister parfois en chaînes (associant en diachronie
deux suffixes ou un élargissement et un suffixe), en particulier pour les féminisations de
suffixes masculins ou épicènes. Ainsi :
— les 5 suffixés en *-ijV- : f. -ίᾱ/η, m. -ίᾱ / ης, f. -ιον, m. -ιος, avec notamment f.
-(V)ίᾱ/η, m. -(V)ῖος (cf. Ἀνυτ-αία, Πτολεμ-αῖος) ;
— les 5 féminins suffixés en *-ja, gén. en *-jās : -ε̄̆(ι)ᾰ (noms formés sur thèmes
sigmatiques, noms en -εύς et adjectifs en -ύς), -αινᾰ (<*-αν- jᾰ), -ιλλᾰ, -ισσᾰ (<*-ιτ-jα,
comme dans μέλισσα, -*ικ-jα, comme dans Φοίνισσα, Κίλισσα, d’où βασίλ-ισσα, Chan-
traine, Formation, p. 109), -ϝεσσᾰ, d’après le m. -ϝεντ-, exemples sous d) ;
— m. -έᾱς / -είᾱς (<-έ(ϝ)-ᾱς ou *-έσ-ᾱς, S. Minon, « Variationnisme », p. 291, n. 63) ;

6. Incluse la simple désinence -ς. Mêmes exclusions que notes précédentes ainsi que :
-ήρ m., -ῆρος, comme dans le panhell. Σπινθήρ, emploi du substantif σπινθ-ήρ
« étincelle » comme sobriquet ; -ᾱ�/ή, -ός et -όν dans -ικ-ᾱ�/ή, -ικός et -ικόν, chaînes
suffixales formatrices d’adjectifs ctétiques, passés du lexique à l’onomastique.
préfixes, suffixes et chaînes suffixales 691

— m. -(V)τᾱς, f. -(V)τις ;


— m. -(V)τος, f. -τᾱ/η ;
— les suffixés élargis avec *-w- : m. -ᾱ�/έ-(ϝ)ων (Chantraine, Formation, p. 169).
N. B. 2 : les doublets ᾱ/η distinguent la fermeture ancienne en [æː], puis [ε:] noté <η>,
caractéristique de l’ionien-attique, et l’/a:/ ailleurs conservé, noté <α> ; dans le cas de la
séquence -ίᾱ/η(ς), la rétroversion attique (i.e. [æː]>[aː]) a fait que la graphie <η> carac-
térise le seul dialecte ionien.

Légende : -ᾰ (nominatif) f. (genre), -ᾱ/ης (génitif).


-ᾰ f., e.g. -ᾱ/ης.
-ᾱ/η f., id.
-αινᾰ f., -αινᾱ/ης.
-α(ν)ς m. (et allogène -αν notamment « libyque », Cyrène, OGS  I, 292 et
C. Dobias-Lalou 1999, 31), -αντος.
-άς f., -άδος, voir A. Alonso Déniz, p. 419 sq.
-ᾱ/ης m., béot. et thess. -ᾱο, Géla -ᾱϝο (OGS II, 447), lesb. et dor. -ᾱ, arcad.
-ᾱυ, ion. -εω < -ηο, d’où ion. micrasiatique, etc. -εο, -ευ, att. -ου ; et -εος, -ευς,
-ους analogiques, Thasos, etc., voir ici V. Gomis, p. 535 sq.
-ᾶς : m., ancien -ᾶ (OGS I, 175), ion. récent -ᾶδος (ibid., 93), chypr. ᾶ(ϝ)ος
(ibid., 15 et 18).
— : f., m., -ᾶτος (Égypte, Chypre, imp., OGS  II, 378), pamph. -ᾶτ(ο)υς
(C. Brixhe, Grammaire, 105).
— : m., -ᾶνος (Macédoine, voir ici L. Dubois, p. 321).
-έᾱς / -ε(ί)ᾱς / έης (Hdt)> -ῆς m., non ion.-att. -έᾱ, att. -έου (L. Threatte,
GAI II, 82), ion. -έω (OGS III, 6), koin. -είου (comme pour poét. et att. Ἑρμείᾱς,
ibid., 77, <*Ἑρμᾱhᾱς, Chantraine, DELG, s.v.). Variantes dialectales moins répan-
dues, infra, d).
-ε̄  / -ει / -η(ς) béot. m., -ιος (G.  Vottéro, La Béotie antique, 407, et ici,
p. 605-609).
-ε(ι)ᾰ / -είη f., -ε(ί)ᾱ/ης, cf. secondaire Φιλτ-είη, à partir du gén. en -είης,
Thasos, Et. thas. 3, p. 380, no 142bis.
-εΐς f., -εΐδος (analyse remontant à Schulze de Ἀρτεμ-ε-ίς, cf. C. Brixhe, Gram-
maire, 255, n. 2 : fém. de -έ-ᾱς).
-έον arg. f., -έου : voir ici E. Nieto, p. 631 (pour l’accent, cf. d).
-εύς, récent -εούς (Égypte, OGS III, 261) m., chypr., béot., lesb. -ῆ(ϝ)ος, thess.,
béot. -εῖος, ion. ancien, att. -έως (d’où éphés. -έω), dor., ion. -έος, ion. récent, arg.,
még., rhod. -εῦς (C. D. Buck, GD, p. 92 et J.-L. Perpillou, Substantifs, 65).
-(ϝ)εσσᾰ f., -(ϝ)εσσᾱ/ης, à partir de m. -(ϝ)εντ-, cf. myc. ko-ma-we = *Komā-
wens : voir ici C. Le Feuvre, p. 494.
692 saga

-ήν m., -ῆνος, cf. les formes courtes de composés Δᾰμ-ήν, Παρμ-ήν, Τιμ-ήν, et
voir ici N. Guilleux, p. 67 sq.
-ης, béot., pamph.  -(ε)ις m., -ητος, béot. -ειτος, pamph. -(ε)ιτ(ο)υς
(C. Brixhe, 104).
-ης m., -εος [béot., crét. -ιος, ion. récent., rhod. -ευς, koin. micras. -ε(ί)ου(ς),
att. -ους, lesb. -οῦς, OGS I, 9], secondaire -ου (voir ici V. Gomis, p. 535 sq.), voire
lesb., crét. -η (OGS I, 9 et 335).
-(V)ίᾱ/η f., comme dans le tardif Ἁβροία (HPN 7, [LGPN 3b : accent à corr.]),
-(V)ίᾱ / ης.
-ίᾱς / ης m., béot. et thess. -ίᾱο, lesb. et dor. -ίᾱ, arcad. -ίᾱυ, ion. -ίεω, att.
-ίου.
-ιάς f., -άδος (pseudo-ethn. comme Δηλιάς, OGS  II, 415) : voir A. Alonso
Déniz, p. 419 sq.
-ιλλᾰ f., -ίλλᾱ / ης.
-ιον f., voire m. (OGS III, 272-273), -ίου, -ίω : voir ici F. Réveilhac, p. 379 sq.
-(V)ιος m., -ίου, -ίω, thess. orient. (Pélasgiotide) -ίοι(ο).
-ις m., voire f. (comme Χάρις), -ιος, -ιτος, chypr. -ιϝος (M. Egetmeyer 2010,
§ 432).
-ίς f., -ίδος.
-ισσᾰ f., -ίσσᾱ / ης.
-ιώ f., -ιοῦς (Βακχιώ, Thyrreion, hell. LGPN 3a).
-ίων, thess. -ίουν m., -ίωνος, thess. -ίουνος, voire -ίονος. Cf. ici J. Cur-
bera, p. 272-274.
-ον f., -ου, -ω, thess. orient. (Pélasgiotide) -οι(ο).
-ος m., id.
-οῦς f., m., -οῦτος, -οῦτους (pamph.), -οῦνος, -οῦδος vs -οῦ [centre de
l’Asie Mineure] (L. Dubois 2010, respect. : 399-401 [f.] ; 406 [m.]).
-ς m., comme dans -ανακ-ς > -αναξ, d’où Ἀγησι-άναξ (Rhodes, IG XII (1) 16),
Βύβ-αξ (IG XII 9 191B, 37), -(τ)ος.
-(V)τᾱ/η, f., -τᾱ / ης, cf. m. -(V)τος.
-(V)τᾱ / ης, m., béot. et thess. -τᾱο, lesb. et dor. -τᾱ, arcad. -τᾱυ, ion. -τεω,
att. -του. Voir infra, -ᾱ�τᾱς, -έτης, -ίτᾱς, -ύντᾱς et -(ι)ώτᾱς.
-(V)τις, f., -τιδος, chypr. -τιϝος (Νικαγόρατις (?), ICS 123), cf. m. -(V)τᾱ / ης.
-(V)τος, m., -του, -τω, thess. orient. (Pélasgiotide) -τοι(ο). Voir supra,
note 2, et d), pour ι-τος.
-υς m., -υος, chypr. -υϝος (É. Lhôte 2007, 278 et 280-282 : difficile à distin-
guer de -ῦς, -ῦδος, -ῦος ou -ῦ).
-ώ(ι) f., -οῦς, crét. -ῶς (OGS I, 48).
préfixes, suffixes et chaînes suffixales 693

-ων, thess. -ουν, pamph. -ω, m., -ωνος, voire -ονος, thess. -ουνος, sauf
pour les types empruntés au lexique Γέρ-ων, -οντος (SEG 52, 1184, Cyzique ?,
iie / ier  s.), d’où -ωντος (Ἐρύϙωντος, L.  Marangkou, A.  Matthaiou, Horos  2010-
13, 524, , voir OGS III, 209) et les participes, e.g. Παρμένων, -οντος (ΙG ΙΙ2 9838).
Cf. -ίων et d), -έων et -ύων.
-ᾱ�-(ϝ)ων > dor. -ᾱ�ν, ion.-att. -έων m., respect. -ᾱ�-ονος, -ᾶνος et -έωνος.
Cf. aussi d).
-ωρ, m., -ορος, comme dans Πλείστ-ωρ, forme courte de Πλειστ-αίνετος,
Πολύκτ-ωρ (Minon, IED, 596-597).
-ως ou ῶς m., -ῶτος, pamph. -õτυς, -ῶτυς, -õδυς (C. Brixhe, 106), -ωϝος
(Chypre, M. Egetmeyer 2010, § 438 et 539-541).

d) Chaînes suffixales et conglomérats désinentiels 7


(nombres indicatifs d’attestations sur environ 350 000 individus répertoriés dans les
LGPN 1à 5b) 8.

Certaines têtes de ces chaînes, voire certaines séquences élargies, peuvent être issues
de la grammaticalisation de lexèmes : ainsi en irait-il du suffixe formateur d’ethniques
en Grèce septentrionale -έστᾱς (Minon 2005, p. 187, n. 56, cf. Διον-έστας, Κορρ-έστης),
si l’on pouvait suivre A. Leukart, qui postulait, à partir de l’anthroponyme Ὀρέστας, ce
qui a été remis en question pour ce nom par C. Le Feuvre, Ὅμηρος…, p. 349, qu’il pou-
vait être formé de -στᾱ-ς, radical de ἵ-στη-μι, et pour -έτᾱς, qu’il était en rapport possible
avec (σ)ϝέτας « allié, concitoyen » (1994, p. 157-159) ; Chantraine avait mis en évidence
le même phénomène dans le lexique pour -ώδης (cf. ὄζω, Formation, p. 429-430, dont
« le sens… s’oblitère (…) [au point d’exprimer une] ressemblance, puis simplement une
qualité (…), [en alternance ou en concurrence] avec -είδης »), cf. l’anthroponyme Διώδης
(LGPN 2). Plusieurs autres éléments peuvent être ainsi ambivalents, comme -αιν-, -ᾱκ-,
-λ(λ)-ος, -τ-ος, susceptibles suivant les dialectes d’êtres issus respectivement des radi-
caux plus ou moins tronqués de αἶνος, ἄκος ou ἀκούω, λᾱός et τῖμος vel sim. ; suivant
les individus et le contexte, les anthroponymes qui les comportaient ont pu être inter-
prétés comme des composés tronqués plutôt que comme de simples dérivés : ainsi d’un
Ἄρχιλλος, père de Ἀρχέ-λαος (IΒouthrotos 101), susceptible d’être interprété Ἄρχι-λλ-ος
ou bien Ἄρχ-ιλλος.

7. Ont été inclus, dans dans cette seule partie d), les suffixes formateurs des bases lexi-
cales sur lesquelles sont bâtis les anthroponymes : ainsi -μ-ᾰ, -μ-εν-ος, -μ-εν-ᾱ/η,
-μ-ήν et -μ-ων, seulement sécables en diachronie (Chantraine, Formation, cf. § 118
et 129), -ο-ντ-ίδ-ᾱ/ης, -(α)ν-τ-ος, (α)ν-τ-ίδ-ᾱ/ης, -ᾱ/ησ-ᾰ, -ουσ-ᾰ, -ῶσ-ᾰ et -τερ-,
-τηρ-, -τορ-.
8. Les nombres extraits de la base de données du LGPN  en ligne ont été revus à la
baisse chaque fois qu’un des éléments des chaînes pouvait être analysé comme
radical plutôt que suffixal.
694 saga

En dehors de ces cas, la chaîne suffixale s’adjoint le plus souvent à une structure
monothématique, celle d’un nom simple ou d’un composé réduit à un seul de ses élé-
ments. Seules les séquences à valeur originelle filiative -ίδᾱ / ης et -(ι)άδᾱ / ης, et en
éolien -ιος, -ειος, -αιος (voir C. Dobias, L. Dubois, OGS I, Introduction, p. ii, et ici même,
pour le thessalien, R. Bouchon, B. Helly, p. 560-562), forment des dérivés à partir de
bases di- autant que mono-thématiques.

N. B. 1 : parmi les chaînes répertoriées, certaines peuvent comprendre, suivant les
noms, un élément constitutif de la base lexicale sur laquelle a été formé l’anthroponyme ;
dans les exemples correspondants, le suffixe de la base n’a pas été séparé de celle-ci par
un tiret, à la différence du ou des suffixe(s) constitutif(s) de l’anthroponyme, cf. e.g.
Φυλακ-ίδ-ας, fait sur φύλ-ακ-ς (>-αξ) vs Φιλ-άκ-ιον, sur φίλ-ος ; ont été distingués de la
même manière les cas où la voyelle initiale du suffixe peut être rattachée à la base, de ceux
où elle est devenue partie constitutive du suffixe anthroponymique, cf. e.g. Νικά-δης,
d’où Αἰολ-άδ-ας. La confrontation des deux types d’exemples éclaire sur l’origine de la
formation de certaines chaînes suffixales anthroponymiques.
N. B. 2 : l’astérisque * signale : a) les chaînes non strictement anthroponymiques
ou mixtes, illustrées par des noms qui associent toujours au moins un suffixe de base lexi-
cale à au moins un suffixe anthroponymique ; b) les chaînes purement lexicales dans
des lexèmes employés comme anthroponymes. La confrontation de ces chaînes avec les
autres permet d’apprécier la part de créativité dans la formation des chaînes purement
anthroponymiques.
N. B. 3 : les chaînes placées en tête de paragraphe sont celles dont la forte repré-
sentation peut notamment refléter le caractère primaire par rapport aux autres que l’on a
fait figurer en retrait ; vu la forte représentation masculine dans nos sources, elles sont la
plupart de genre masculin.

-άδ-ᾱς (ᾰ�, 1 121), fréquent en béotien, -ης (2 779), cf. Αἰολ-άδ-ας vs Βρησά-
δ-ας (OGS III 124), Νικάδης (LGPN  1, 2, 5a-b) ; semble avoir valeur de suf-
fixe pseudo-patronymique en Crète et en Chersonnèse Taurique, cf. Ἐσθλ-άδ-ας,
Κλεο-μυτ(τ)-άδ-ας (OGS I 32 ; ΙΙ 402-405). Voir aussi -ιάδ-ᾱ/ης et -ων-άδ-ης.
*-άδ-ιον (7), cf. Ἀρκάδ-ιον (LGPN 3a, 1 ex.), sur l’ethnique Ἀρκάς ou le topo-
nyme Ἀρκαδία.
*-άδ-ιος (101), cf. Fικάδ-ιος (LGPN 3a, 1 ex.), sur (ε)ἰκάς, -άδος.
*-αδ-ίων (79), cf. Ἑρμαδί-ων (LGPN  3a, 4, 5a-b), sur (τὸ) Ἑρμάδιον
vs  Τριακαδ-ίων (LGPN  2, 2 ex.), sur τριᾱκάς, -άδος « le trente du mois »,
Ἐνθαδ-ίων (LGPN 4), sur ἐνθάδε.
-αδ-ώ (8), parallèle à -ιδ-ώ mais plus rare encore, cf. Ἐρι-τ-αδ-ώ à Délos
(LGPN 1, cf. OGS III 15-16 : du composé Ἐρί-τιμος).

-α-ῖος (5 435), cf. Ἀγορα-ῖος, d’où Ἱππ-α-ῖος, Πτολεμ-α-ῖος (OGS III 150 et J. Cur-
bera, Glotta 2004, 8, n. 20). Voir -υλ-αῖος.
préfixes, suffixes et chaînes suffixales 695

-α-ίᾱ (233), -ίη (17), cf. Ἀθηνα-ία (LGPN, 1, 3b, 5b), Δικα-ίη (LGPN 1), d’où
Ἀνυτ-α-ία (LGPN 1).
*-α-ῖον (< 7), cf. Ἀθήνα-ιον (LGPN 2).
-α-ίων (< 160), cf. Ἀθανα-ίων (LGPN 4), d’où Φιλ-α-ίων (LGPN 1).
-ε-ιᾰ (< 2 000) -ε-ίη (6), supra, c) : cf. Γλυκε-ῖα (LGPN 1, 3a, 4, 5a-b), etc., d’où
Ξέν-ε-ια (LGPN 1 et 3a), Φιλτ-ε-ίη (LGPN 1) analogique du génitif en -είης.
*-ε-ιον (< 4), cf. Δάμε-ιον (LGPN 2).
-ε-ιος (> 500), cf. Ἀστε-ῖος (HPN 509, LGPN 1, 2, 3a-b et 4), etc., d’où Ἀριστο-
φίλ-ε-ιος (LGPN 1), avec l’accent récessif en composition.
-ε-ίων (< 20), cf. Πολλ-ε-ίων (LGPN 3a).
*-ο-ῖος 9 (66), cf. Ῥοδο-ῖος (LGPN 1) vs Παντ-ο-ῖος (LGPN 2, 3a-b), sur παντοῖος.
*-ο-ίᾱ (< 89) -ίη (4), cf. Ἁβρο-ία (LGPN 3b : accent à corriger, cf. HPN 7),
Ὁπο-ίη (LGPN 4).

-αιν-ᾰ (202), supra, c) : cf. Γνάθ-αιν-α (m. Γνάθων, HPN 481), Σκύθ-αιν-α (Frauen-
namen, 40 et 58, cf. Chantraine, Formation, §  84-85, m. Σκύθων, HPN  543),
récent -ίαινα (rarissime, cf. Ἰσχυρ-ίαινα en Égypte, iiie p. C., OGS III, 257).
-αίν-ιον, rarissime et récent, cf. (poét.) Γναθ-αίν-ιον [Frauennamen, 40] : voir
ici F. Réveilhac, p. 386.
-αιν-ίς (<30), cf. Μελαιν-ίς (LGPN 2, 3a) vs Μέλαιν-α (LGPN 1, 2, 3b, 5b),
d’où Φιλ-αιν-ίς (LGPN passim), ou composé, cf. Φιλ-αίνη (LGPN  1) vs  Φίλ-
αιν-ᾰ (LGPN 1, 4, 5b) ? A. Striano, p. 464 (Μέλαινα) et 455 (Φιλ-).
-αιν-ώ (4), cf. Φιλ-αιν-ώ (LGPN 3b et 4), ou composé ? A. Striano, p. 455.
-ακ-ς (ca 500, sans les composés en -αναξ), cf. Βύβ-αξ, Στράβ-αξ (<-ακ ou - ᾱκ +
-ς, OGS I, 48 et 184-186 et OGS III, 319, cf. Chantraine, Formation, § 310-314)
vs Φύλακ-ς (LGPN 1, 3a-b, 5a).
-ακ-ος (558), cf. Νούμ-ακ-ος, Πύρρ-ακ-ος (en usage dans les Cyclades, cf.
OGS III 78).
-άκ-ᾱ (< 20), -η (87), cf. Σιμ-άκ-α (LGPN 3a) vs Μαλθάκ-η (LGPN 1).
-ακ-ίδ-ᾱς (57), -ης (<  25), cf. Βεμβ-ακ-ίδ-ας (LGPN  3b, 1 ex.) vs Φυλακ-
ίδ-ας (LGPN 3a), Αἰακ-ίδ-ης (LGPN 5a) vs les composés à second élément -ακ-
comme Ἐξ-ακ-ίδας (LGPN 3a).
-άκ-ιον (11), rare, cf. Φιλ-άκ-ιον (OGS III 69) : F. Réveilhac, p. 406.
-ακ-ον, rarissime, cf. Μάν-ακ-ον (Frauennamen, 108, OGS III 69) vs Μίλακ-ον.

9. Pas de nom féminin dérivé en -ο-ιον : Λευκόϊον (LGPN 3a) est fait sur le composé
neutre λευκό-ϝιον « violette blanche, giroflée », comme le signale Laurent Dubois.
696 saga

-ακ-ώ (< 30), cf. Τελλ-ακ-ώ, Φιλ-ακ-ώ : suffixe expressif des noms féminins
(OGS III 16 et 91).
-άκ-ων (<  100, sans Δράκων, Ἡρά-κ-ων...), cf. Δειν-άκ-ων, Ξεν-άκ-ων
(KOS 271 et Bechtel, GD II, 337).

-αλ-ος (< 700, sans Ἄττα-λος, Ἅρπαλ-ος, Λάλος, etc.), cf. Μίκκ-αλ-ος (LGPN 1,
3b, 4, 5a).
-άλ-η (109), -άλᾱ (< 5), cf. Πουτά-λ-α (LGPN 3b, thess., cf. Πώτα-λ-ος, 3b et
4), d’où Σιμ-άλ-η (LGPN 2). 
-αλ-ίδ-ης, rarissime, cf. Μυστ-αλ-ίδ-ης (LGPN 2).
-άλ-ιον, rarissime, cf. Σιμ-άλ-ιον (LGPN 2).
-άλ-ιος, rarissime, cf. Σιμ-άλ-ιος (LGPN  3b) vs les noms latins Νατάλι-ος
(LGPN 2), Οὐιτάλι-ος (LGPN 5a et b).
-αλ-ον (< 10), cf. Σίμ-αλ-ον (LGPN 2) vs Μαμα-λ-ον (LGPN 5b).
-αρ-ος (< 500, sans Ἵλαρος, etc.), cf. Βάττ-αρ-ος (LGPN 1 et 5b).
-άρ-ιον (< 139), cf. Γναθων-άρ-ιον (LGPN 1, fict.) vs Ναννά-ρ-ιον (LGPN 2) :
F. Réveilhac, p. 399. Voir aussi -α-τ-ᾶς, -α-τ-άρ-ιον.
-άρ-ιος (rarissime, sans Μακάριος, Ἰκάριος, etc.), cf. Λυκ-άρ-ιος (LGPN 3a,
1 ex.).
*-αρ-ίων (< 100), cf. Ψυχαρί-ων, sur ψυχά-ρ-ιον, vs le composé Ἀμφ-αρί-ο̄ν
(S. Minon, RPh 84 (2010) [2013], 310 et 314-316).
-αρ-οῦς (< 60), cf. Τυχα-ρ-οῦς, Thessalonique, iie-iiie p. C. (L. Dubois 2010,
401).
-αρ-ώ (< 35), cf. Τιμα-ρ-ώ, Thessalonique, iie-iiie p. C. (L. Dubois 2010, 404).
-ᾱ�-(ϝ)ων (< 30) > dor. -ᾱ�ν (< 10), ion.-att. -έων (ca 20), supra, c) : cf. Μαχᾱ�-ων
(O. Masson, RPh 1974, 81, Kamptz, HomPN, § 60a-c1) vs Ἀλκμ-ᾱ�ων, Ἀλκμ-ᾱ�ν
(OGS I, 32, n. 8-9), Ἀλκμέων.
-ε-(ϝ)ων-ίδ-ης (ca 10), cf. Ἀλκμ-εων-ίδ-ης (LGPN 1, 2, 5a-b).
-έ-ᾱς (3 484 notamment <-ε̄̆(ϝ)-ᾱς, *-έσ-ᾱς), -ῆς (< 300 sans -κλῆς), -εύ-ᾱς
(<  50), -ή-ᾱς (<10), supra, c) : cf. Κρατ-έ-ϝας (SEG  54, 561, c.  425/400) et
Κρατ-εύ-ας avec une autre syllabation (LGPN  3b et 4), Ἀριστή-ας (LGPN  1,
1 ex.) vs Τελέ-ας (LGPN 1, 2, 3a-b, 5a-b, 23 ex.) et Φαν-ῆς (LGPN 5a, 24 ex.).
*-ε̄̆ (ϝ)-ίδ-ᾱς (< 265, sans -κλείδας), -ης (< 2 000, sans -κλείδης), cf. Αἰγε-ίδ-ας
(LGPN 1, 1 ex.), sur Αἰγ-εύς, et Ἀριστη-ίδ-ης (supra, b, α, note 1) vs Ἀριστε-
ίδ-ης (LGPN passim), sur Ἀριστ-εύς (Masson, OGS ΙΙΙ, 123). Cf. -ε̄(̆ ϝ)-ων-ίδ-ης.
*-ε(ϝ)-ιδ-ιαν-ός (4), cf. Ἀριστε-ιδ-ιαν-ός (LGPN 5a), supra, note 1.
préfixes, suffixes et chaînes suffixales 697

-ε-ΐς : Ἀρτεμ-ε-ίς (C. Brixhe, Grammaire, 255, n. 2).


-έ-ον (< 10) arg. Καλλ-έ-ον, accent analogique du masculin -έᾱς, ou récessif
Κάλλ-ε-ον  proposé par E. Nieto, p. 631.

-έ-ων (< 100, sans notamment Θέων, Κλέων, Κρέων, Λέων et leurs composés), cf.
Ἀνδρ-έ-ων (LGPN 1, 1 ex.), analogique de -έᾱς, vs Ἀρκέ-ων (LGPN 1, 2, 3b et
5a), sur le participe homonyme.

-ιαν-ός 10 (latin, 3 817), cf. T.  Corsten, Onomatologos, 456-463. Voir -ιδ-ιαν-ός,
-ων-ιαν-ός.
-ίαιν-ᾰ. Voir -αινα.
-ιαν-ά (latin, 7), -η (563), cf. Διογεν-ιαν-ά (LGPN 1), Ὀλυμπ-ιαν-ή (LGPN 1
et 5a). Voir aussi -ων-ιαν-ή.

-ίδ-ᾱς (5 381), -ης (8 586), cf. e.g. Ἀριστο-μηλ-ίδ-ας (LGPN 3a, 1 ex.) et Ἀκεστ-
ίδ-ης (LGPN 1 et 2). Et voir -άδ-ᾱς 11.
-ιάδ-ᾱς (585), -ης (2 314), cf. Πυθι-άδ-ης (LGPN  2), d’où Πολλ-ιάδ-ας
(LGPN 3a-b), cf. A. Alonso Déniz, p. 433 sq. Voir -άδ-ᾱς.
-ίδ-ᾱ, -η, rarissimes, cf. Φιλοκλε-ίδ-α (LGPN 3a), Ἡρακλε-ίδ-η (LGPN 5b).
-ιδ-εύς (29), cf. Βαοκ-ιδ-εύς (LGPN 5a, 1 ex., cf. OGS III, 181), et voir DELG,
s.v. βαυκός « câlin ».
-ιδ-ιαν-ός (4), cf. supra, b), note 3, Ἀριστε-ιδ-ιαν-ός vs Ἐλπιδ-ιαν-ός (LGPN 1,
3a, 4, 5a-b).
-ίδ-ιον (< 55), cf. Νικ-ίδ-ιον (LGPN 2 et 3b), Σωτηρ-ίδ-ιον (LGPN 3a, 1 ex.) :
F. Réveilhac, p. 394.
-ίδ-ιος (< 80), cf. Προσχ-ίδ-ιος (LGPN 1) vs Ἐλπίδ-ιος (LGPN 3a-b, 4, 5a-b). 
-ιδ-ώ, rarissime, cf. Νικ-ιδ-ώ (LGPN 3a, 1 ex.) vs Ἐλπιδ-ώ (LGPN 5b, 1 ex.).
*-ικ-ός (< 1 600, sans Νυμφ-ίδιος et -νικος, OGS III, 18), cf. Φιλικ-ός (LGPN 1,
2, 3a).
*-ικ-ᾱ� (ca 10) -ή (< 50), ctétique, cf. Φιλικ-ά (LGPN 3a), Ἁλικ-ή (LGPN 5b).

10. À la différence de lat. -ιανός, il n’est pas sûr que puisse être isolé un suffixe anthro-
ponymique grec -ανος, avec ses éventuels correspondants féminins. En effet, des
noms comme Ἵκανος (LGPN 1) ou Κοίρανος (LGPN 1, 3a, 4, 5a-b) sont des lexèmes
employés tels quels (ou à l’accent près) comme noms de personnes. Quant aux noms
isolés comme Ἀγρέανος (LGPN 2) vs Ἀγρέας (LGPN 3a) ou Ἀγύρανος (LGPN 3a)
vs Ἀγορᾶναξ (LGPN 1 et 5b), ils pourraient s’analyser aussi bien comme des formes
courtes de composés à second élément -αναξ.
11. Pour thess. -ίδ-α-ιος (e.g.  Fασανδρ-ίδ-αιος), seulement patronymique, voir
R. Bouchon, B. Helly, p. 561.
698 saga

*-ικ-ιανή (6), cf. Φιλικ-ιανή (LGPN 3b) : A. Striano, p. 455.


*-ικ-όν (< 8), cf. Φιλικ-όν (LGPN 2, 1 ex.) : A. Striano, ibid.
*-ικ-ώ (< 5, sans Νικώ), cf. Φιλικ-ώ (LGPN 1 et 3a) : A. Striano, ibid.
-ίκ-ων (< 100 sans Νίκων), cf. Ἀριστ-ίκ-ων (IG IX 12 1834) vs Ἀπελλ-ίκων
(LGPN 1, 2, 4, 5a-b, cf. OGS III, 276), à second élément fait sur ἱκέτης (HPN 218).

-ίλ-ος (< 1 000, dont le rare -ῑλ-ος) : cf. myc. o-wi-ro (*Ὀϝῑλος <  Ὀϝί-ιλ-ος ?),
Τρωί-λ-ος (LGPN 1, 2, 3a, 4, 5a-b) et Στροβ-ίλ-ος (LGPN 1, 2, 3a, 4) : J. Cur-
bera, p. 276 et A. Mathys, p. 364.
*-ίλ-ᾱ, -η, rarissimes, cf. Ζωί-λ-α (LGPN, passim), Ζωί-λ-η (LGPN 3b).
*-ιλ-εύς, rarissime, cf. Βηβιλ-εύς (LGPN 5b) : J. Curbera, p. 275.
-ιλλ-ᾰ (< 340), supra, c) : cf. Βρόχ-ιλλ-α (LGPN 3b) vs Ἁγήσιλλ-α (LGPN 1 et 3a),
hypocor. de Ἁγησί-λαος (LGPN, passim).
-ιλλ-ε(ι) (< 24) -εις (< 20), béotien, cf. Δορκ-ίλλ-ει(ς), Πτωί-λλ-ε(ι)(ς) vs
Πραξίλλ-εις, hypocor. de Πραξί-λαος : G. Vottéro, p. 608.
-ιλλ-ος (< 194), cf. Χόρ-ιλλ-ος (LGPN  2, 3b) vs Ἀνάξιλλ-ος (LGPN 2), sur
Ἀναξί-λαος : A. Mathys, p. 362.

*-ιμ-ος 12 (< 4 000, sans Σῖμος et les composés en -τιμος, adjectifs pour la plupart) :
cf. Ὠφέλ-ιμ-ος (LGPN 1, 3a-b, 5a) vs Αἴσι-μ-ος (LGPN 1, 2, 3a, 5a), Ζώσι-μ-ος
(LGPN, passim), Ὀνήσι-μ-ος (LGPN, passim).
*-ίμ-ᾰ (< 200, sans les composés en -τίμα), -η (< 500), adjectifs pour la plu-
part : cf. Ἁδί-μ-α (LGPN 1, 1 ex.) vs Ὠφελ-ίμ-η (LGPN 2, 5a), Ζωσί-μ-η (LGPN,
passim), Ὀνησί-μ-η (LGPN, passim), Χρησί-μ-α (LGPN 3b, 4).

-ιν-ος et ῖν-ος (< 2 000), cf. Fειάρ-ιν-ος (HPN 526 = LGPN 3b), Ἀρχ-ῖν-ος (LGPN,


passim) : É. Dieu, p. 233.
-ίν-ᾱ (763, dont -ῖν-ᾰ surtout latin, e.g. Κελεστ-ῖν-α, LGPN 3a, 5b), -η (< 534),
cf. Φιλ-ίν-ᾱ (LGPN 3a-b, 4, 5a-b), Μοσχ-ίν-η (LGPN 1, 2, 3b, 4, 5a-b), Μελιτ-
ίν-α (LGPN 1, 1 ex.).
-ιν-άδ-ᾱς (7), -ης (6), cf. Κορρ-ιν-άδ-ας (LGPN 3b), Αἰσχ-ιν-άδ-ης (LGPN 1
et 2).

12. Il ne semble pas que -ιμμος, -ᾱ (aucune occurrence de -ίμμη dans la base de données
du LGPN) puisse être considéré comme suffixe à part entière, pas plus du reste que
-ίμμας dans Ἀρίμμας ou Ἀριμμᾶς, hypocoristique de Ἀρι-μένης ou Ἀρί-μναστος, cf.
O. Masson, « Géminations expressives dans l’anthroponymie grecque », à propos de
Ἐχέμμας, BSL 81, 1986, 217-229 (= OGS II, notamment 556 et sur l’accentuation ici
même L. Dubois, p. 327).
préfixes, suffixes et chaînes suffixales 699

-ίν-ᾱς (449), -ης (< 400 sans -κρίνης), cf. Αἰσχ-ίν-ας (LGPN 1, 3a-b, 4), Αἰσχ-
ίν-ης (LGPN, passim).
-ίν-ιος (rarissime, en dehors de Δελφίνιος, Ἐλευσίνιος, Σαλαμίνιος, etc.), cf.
Σαφ-*ίν-ιος (LGPN 1, 1 ex.) vs Σελίν-ιος (LGPN 3a, 1 ex.).
-ιν-ώ (< 10), cf. Φιλ-ιν-ώ : A. Striano, loc. cit.
-ινν-ᾰ (< 145), cf. Φίλ-ινν-ᾰ (LGPN, passim), cf. A. Striano, p. 463.
-ίνν-ης (< 5, sans les hypocoristiques comme Πυθίνν-ης, LGPN 4), cf. Μικ-
ίνν-ης (LGPN 5b, 2 ex.).
-ίνν-ιον (3), cf. Φιλ-ίνν-ιον : A. Striano, p. 455.
-ινν-ίς (< 5), cf. Φιλ-ινν-ίς : ibid.
-ινν-ώ (19), cf. Φιλ-ινν-ώ : ibid.
-ινν-ος (14), cf. Κόρ-ινν-ος (LGPN 3b).
-ί-νθ-ᾱ (2), cf. Φιλ-ί-νθ-α (LGPN 3a) 13.
-ι-νθ-ος (2), cf. Σαβύλ-ινθ-ος (LGPN 3a).
-ί-σκ-ος (< 1 850), cf. Φιλ-ί-σκ-ος (LGPN, passim).
-ίσκ-ᾱ (93), -η (28), cf. Φιλ-ί-σκ-α, Μυρριν-ί-σκη (LGPN  2) : A.  Striano,
loc. cit. Voir aussi -ύ-σκ-ος.
-ισκ-ώ (1), cf. Φιλ-ι-σκ-ώ : A. Striano, loc. cit.
-ιχ-ος (< 1 600), cf. Εὐ-θύμ-ιχ-ος (LGPN 2 et 3b) : voir G. Vottéro, p. 609.
-ίχ-ᾱ, (< 166), -η (69), cf. Ματρ-ίχ-α (LGPN 2, 3b, 4), Μητρ-ίχ-η (LGPN 1, 2
3b, 4 5a-b).
-ιχ-ίδ-ας (21), -ης (26), cf. Σιμ-ιχ-ίδ-ας (LGPN 3a-b), Μυστ-ιχ-ίδ-ης (LGPN 2).
*-(V)μ-ᾰ(τ) (< 250, sans les noms en -μᾱ, comme dans Ἀγλω-τίμᾱ), cf. Ἀγάπημα
(LGPN 1, 4 5a-b).

*-(V)μεν-ός (< 550), cf. Ἀγαπωμεν-ός (LGPN 1, 2, 3a, 5a-b) : É. Dieu, p. 241-252.
*-(V)-μέν-ᾱ (ca 25), -η (ca 200), cf. Φιλουμέν-α (LGPN 1, 3a et 4), Φιλουμέν-η
(LGPN, passim).
*-μεν-ίδ-ᾱς (< 10 ; pas de -μεν-ίδ-ης attesté en dehors des composés à second
élément -μεν-), cf. Ἀρμεν-ίδ-ας (LGPN 3b), sur ἄρμενος.
*-(V)μεν-ώ (1, sans Μεν-ώ, Παρμεν-ώ, etc.) : Φιλουμεν-ώ (LGPN 2).

13. Dans l’état actuel de nos connaissances, sans attestation de -ίθ-α/η, -ιθ-ία, -ίθ-ιος, et
vu l’absence de nom dont l’élément -ιθ- puisse être considéré comme absolument
indépendant du radical (à la différence de Ὀρνιθ-ίων, LGPN 2), il ne nous a pas paru
pertinent de postuler son existence comme élément suffixal.
700 saga

*-(V)μ-ων, thess. -μουν (< 2 000, sans Ἀρτέμ-ων, Δάμ-ων, Δρόμ-ων, Ἕρμ-
ων, Σίμ-ων, etc.), cf. Αἰδή-μων (LGPN 1, 3a et 4), sur αἰδήμων, Εὐκτεί-μουν
(LGPN 3b, 1 ex.), sur εὐκτήμων.
*-(V)μ-ήν (32), exclusivement dans Ποι-μήν (LGPN 3a et 5b), mais Φιλο-ποίμην
(LGPN, passim), sur ποι-μήν.
*μέν-α (1) : Ποιμέν-ᾱ (LGPN 3b).
*-ο-ντ-ίδ-ᾱς (28), -ης (74), cf. Γερ-οντ-ίδ-ας (LGPN 1, 4), Γερ-οντ-ίδ-ης (LGPN 1,
2, 3b, 5a-b) vs Βλεπο-ντ-ίδ-ας (LGPN 3b), Εὐ-αγο-ντ-ίδ-ας (LGPN 3b).

*-ουσ-ᾰ (386, sans Μοῦσα), -ουσσᾰ (2), -οισᾰ (2), cf. Σώζουσ-α (LGPN 1, 2,
3a-b, 5b), Ἀρκοῦσσ-α (LGPN 1) et Ἀστυ-μέλοισ-α (LGPN 3a, 1 ex.). Pour l’in-
terprétation de la géminée, voir ici C. Le Feuvre, p. 511-513.
*-ᾱσ-ᾰ (< 17), -ησα (< 6), cf. Ἀρκέσασ-α (LGPN 2), Αἴνησ-α (LGPN 2).
*-ῶσ-ᾰ (< 70), cf. Τρυφῶσ-α (LGPN 1, 3a-b, 4, 5a-b).
-ισσ-ᾰ (75, dont 11 Βασίλισσα), cf. Φοῖνιξ, Φοίνισσ-α (LGPN 1 et 3a), d’où Φίλ-
ισσ-α (LGPN 1).
*-ᾶσσ-ᾰ (< 10), cf. Τιμᾶσσ-α (LGPN 1).
*-(ϝ)εσσ-ᾰ (< 10), supra c) : cf. Ἰό-εσσ-α (LGPN 2), Χαρί-εσσα (LGPN 1, 2,
5b) vs Χαρί-ασσα, voir C. Le Feuvre, p. 507-510.
*-ῆσσ-ᾰ (< 10), cf. Τιμῆσσ-α (LGPN 1).
*-ῶσσ-ᾰ (1?), cf. Τιμῶσσ-α ? (LGPN 3b).
*-τερ-ός (176), cf. Ἀμφοτερός (LGPN 1, 2, 4, 5a-b), ici É. Dieu, p. 238 sq.
*-τέρ-ᾱ (110), -η (5) : Ἁβροτέρ-α (LGPN 5a), Μικοτέρ-η (LGPN 1).
*-τερ-ίδ-ᾱς (2 ; -τερ-ίδ-ης n’est pas attesté), cf. Ἀστερ-ίδ-ας (LGPN 3a, 1 ex.).
*-τέρ-ιον (1) : Ἀγροτέρ-ιον (LGPN 4).
*-τέρ-ιος (27) : Ἀγροτέρ-ιος (LGPN 1).
*-τερ-ίων (12) : Καρτερ-ίων (LGPN 1).
*-τηρ-ίων (32), cf. Σωτηρ-ίων (LGPN 1, 2, 3a, 5a).
*-τηρ-ίδ-ιον (2), cf. Ἀστηρ-ίδ-ιον (LGPN 5a).
*-τορ-ίδ-ᾱς (48), -ης (74), cf. Ἁγητορ-ίδ-ας (LGPN 1, 3a), sur Ἁγήτωρ, épiclèse
de Zeus à Sparte (Xén., Lac. 13, 2), Ἑκτορ-ίδ-ης (LGPN 1), dérivé de Ἕκτωρ,
fait lui-même sur le nom d’agent ἕκτωρ.
*-τόρ-ιν-ος (3), cf. Ἁγε̄τορ-ῖν-ος (LGPN 3b), sur ἁ/ἡγήτωρ
*-τόρ-ιον (1) : Κλειτόρ-ιον (LGPN 2), id.
*-τόρ-ιος (14) : Κλειτόρ-ιος (LGPN 3a), sur le nom de cité Κλείτωρ.
*-τορ-ίων (3), cf. Ἀλεκτορ-ίων (LGPN 4), dérivé de Ἀλέκτωρ, fait sur ἀλέκτωρ.
préfixes, suffixes et chaînes suffixales 701

*-ᾱ-τος (< 1 000), -η-τος (< 1 500), cf. Ἄρα-τος (LGPN  1, 2, 3a, 4, 5a-b) vs
Εὐφίλη-τος (LGPN 1, 2, 3a, 4, 5a-b).
*-ᾱ-� τᾱ (< 50), -ᾱ-� τη (< 10), -ή-τη (< 75), cf. Ἀρά-τα (LGPN 1, 3a), Ἐπηρά-τη
(LGPN 2), Ἀγαπή-τη (LGPN 5a).
-ᾱ-� τᾱς (< 200), -ή-της (< 100), cf. Π(τ)ολεμ-ά-τας, analogique du parasyno-
nyme Μαχά-τας (OGS I 126), Μαχή-της (LGPN 4).
*-ᾱ-τις (< 10), cf. Ἀγαπα-τίς (LGPN  3a, gén. -τίδος) ou Ἀγάπα-τις
(accent. anal. de Ἀγάπητος), Εὐαγόρα-τις (LGPN 1, cf. OGS III, 51), contra
εὐεργέτις / εὐεργέτης, cf. Chantraine, Formation, p. 340, pour l’accent en général
analogique du masculin dans le lexique, à étendre peut-être à l’anthroponymie.
Ou formes tronquées de composés à second élément -τιμος (voir supra sous
-αδ-ώ), sauf Τιμ-αγόρα-τις (LGPN  1) ? Même question que pour Ἀγόρα-τος
(HPN 15), voir le préambule à cette partie.
-α-τ-ᾶς, -α-τ-ίων, -α-τ-άρ-ιον, rarissimes (Égypte), cf. Ἀσκλα-τ-ᾶς (Prei-
sigke, Namenbuch, s.n.), d’où Ἀσκλα-τ-ίων (ibid.), Ἀσκλα-τ-άρ-ιον (ibid.),
Ἀσκα-τ-άρ-ιον (OGS I, 301).

*-ε-τος (< 1 000), cf. Αἴνε-τος (LGPN 1-5a).


*-έ-τᾱ (< 200), -έ-τη (< 100), cf. Αἰνέ-τα (LGPN 3a), Ἀμφ-αινέ-τη (LGPN 3a).
*-έ-τᾱς (< 140), -έ-της (< 100, sans les radicaux -(σϝ)ετ- et -(ϝ)ετ- à suffixe
-ης sigmatique), cf. Ἀλκέ-τας (LGPN 1, 2, 3a et b), d’où Ἄλκε-τος (LGPN 3a,
1 ex.), ou Γλαυκέ-της (LGPN 2 et 3b),cf. supra, note 2.
*-έ-τις (< 10), cf. Ἀριστ-ηνέ-τις (LGPN 3b) et Chantraine, loc. cit. pour l’accent.

-ι-τος et -ῑ-τος (3 416, adjectifs verbaux pour la plupart), sauf Λάμπ-ι-τος


(LGPN 5b, 27 ex., surtout Milet) vs Ἴφι-τος (LGPN 3a-b, 5a-b, 6 ex.), Ἀγγέλι-τος
(HPN 11, LGPN 2, 1 ex.).
*-ί-τᾱ (< 200), -ί-τη (< 200), cf. Δαμο-κρί-τα (LGPN 1, 3a-b), Πυθο-κρί-τη
(LGPN 1).
-ί-τᾱς et -ί̄-τᾱς (< 200, sans -οίτας, etc.) 14, -ης (< 100), cf. Γλευκ-ί-τᾱς
(OGS I, 132, n. 78),Φιλ-ί-τας 15 (LGPN 1, 3a, 5a) vs Θερσῑ�-της (LGPN 4, 5a) :
cf. J. Curbera, p. 268.

14. L’existence d’une chaîne suffixale féminine -ιττ-άς paraît mal assurée : elle ne pour-
rait guère être postulée qu’à partir du seul nom Κοριττ-άς (2 ex. à Cos, ca 200 a. C.,
cf. A. Alonso Déniz, p. 436), plus vraisemblablement un sobriquet à géminée expres-
sive, comme Κοριττ-ίς / Κοριττ-ώ deux variantes du même nom dans le Mime  6
d’Hérondas, cf. ibid.
15. Analyse légèrement différente chez G. Redard, Les noms grecs en -της, -τις et prin-
cipalement en -ίτης, -ιτις. Étude philologique et linguistique, Paris, 1949, p. 195 et
notamment 203 : « Φιλί-τᾱς, dérivé de Φίλις ? ».
702 saga

*-ι-τ-ίδ-ης (2, -ιτίδᾱς non attesté), cf. Ἀλεξι-τ-ίδης (LGPN 1), Θουδι-τ-ίδ-ης


(LGPN 2) et supra, note 2.
*-ι-τ-ῖν-ος (< 16) -ιτ-ίν-η (< 100, 1 pour -α), cf. Πυρρι-τ-ῖν-ος (LGPN 1),
Μελιτ-ίν-η (LGPN 1, 2, 4, 5a-b), Μελιτ-ίν-α (LGPN 1), cf. ibid.
*-ί-τ-ιος (< 50), cf. Πυρρί-τιος (LGPN 1), cf. -ιτος.
-ί-τις (33), cf. Φιλ-ί-τις (LGPN  1, 5a-b), d’après Φιλ-ί-τᾱς et Φιλ-ί-της
(LGPN 5a).
*-ι-τ(τ)ώ(ι) (< 80 + 2), cf. Μενι-τώ (LGPN 1), d’après Μενί-τᾱς (LGPN 1, 3b,
5a-b) et Μενι-ττώ (LGPN 5b, 2 ex.), vs Θεμιτ-ώι (LGPN 1).

*-(ι)ώ-τᾱς (< 500), -της (< 100), cf. Ἀρι-ώ-της (?) (lecture assurée, LGPN 5a,
cf. Masson, REG 100 [1987], p. 237) vs Νασιώτας (LGPN 1 et 5b) sur νᾱ/ησ-
ιώτᾱ/ης, Φιλ-ώ-τας οu Φιλώτ-ας, sur φιλώτερος (LGPN, passim).

*-(α)ν-τ-ος (ca 1 300, pour la plupart composés en -φαν-τ-ος), cf. Ἀδείμαν-τ-ος


(LGPN, passim) sur ἀδείμαντος.
*-(α)ν-τ-ίδ-ᾱς (< 40, bases participiales pour la plupart), -ης (< 100, id.), cf.
Ἐκ-φαν-τ-ίδ-ᾱς (LGPN 1, 3a), Εὐ-φραν-τ-ίδ-ης (LGPN 1, 2, 4, 5b).

-υ-ος (ca  25), cf. Δάσυ-ος (LGPN  3b, cf. É.  Lhôte  2007, 276), d’où Φώτ-υ-ος
(LGPN 3a).
-ύ-ων (ca 30), cf. Ἰσχύ-ων (LGPN 2, 3b, 5a), d’où Θηρ-ύ-ων (LGPN 3a).
-(ο)ύ-ᾱς (-ούης non attesté), rare, cf. Φιλ-ύ-ᾱς (LGPN  3a), car -υ- le plus
souvent radical, comme dans Εὐρύ-ᾱς (É.  Lhôte 2007, 276), et Ἀγαθ-ού-ᾱς
(CIRB 1179, 49, iie p. C., L. Dubois 2010, 403).
*-ύ-α (1) : Πολύ-ᾱ (LGPN 3b).
-(o)υθ-ος (< 100), cf. Γόργ-υθ-ος (LGPN 3a), Γόργ-ουθ-ος (LGPN 3b).
-ύθ-ᾱ (7), -η (< 10), cf. Μικ-ύθ-α (LGPN 3a-b) et (Σ)μικ-ύθ-η (LGPN 2).
*-(o)ύθ-ων (< 5), cf. Κορ(ο)ύθ-ων (LGPN 3b).
-υθ-ίων (ca 30), cf. Γοργ-υθ-ίων (LGPN 3a).
-υνθ-ος (< 5), cf. Κάλ-υνθ-ος (LGPN 3b). Cf. -ίνθ-ᾱ.
-ύλ-ος (< 1 000, sans -αυλος, -βουλος, -δουλος, Παῦλος, -πυλος, -φυλος), cf. Φειδ-
ύλ-ος (LGPN 1 et 2) : A. Mathys, p. 344.
-ύλ-ᾱ (ca  50 sans Παῦλα), -η (ca  40), cf. Μικ-ύλ-ᾱ (LGPN  3b) vs Ἡδύλ-η
(LGPN 1, 2 et 4).
-υλ-α-ῖος (ni -υλ-αία, ni -υλ-αίη), rarissime, cf. Μικ-υλ-αῖος (LGPN 1).
-υλ-ίδ-ας, -ης, rares, cf. Αἰσχυ-λ-ίδ-ης (LGPN 1, 2, 3b, 5a-b), d’où Νικ-υλ-
ίδ-ας (LGPN 1).
préfixes, suffixes et chaînes suffixales 703

-(o)υλ-ίν-ᾱ (seulement 2 non latins), -η (< 15) : Ἡδυλ-ίν-η (LGPN 2 et 3b),


d’où Σιμ-ουλ-ίν-α (LGPN 3b).
*-υλ-ῖν-ος (ca 40 sans Παυλῖνος), cf. Σαυλ-ῖν-ος (LGPN 3b, 1 ex.).
*-ύλ-ιον (7), cf. Ἡδύλ-ιον (LGPN 1, 2 et 3a) : A. Mathys, p. 359.
*-ύλ-ιος  : non attesté (contra LGPN 3a) si tous les Ἀρχ-υλ-ίς des îles Lipari
sont à considérer comme des féminins, cf. L. Dubois, REG 118 (2005), 223 et
226.
*-υλ-ίς (ca 50), cf. Αἰσχυ-λ-ίς (LGPN 5b).
*-υλ-ις, rarissime, cf. m. Ἀρχ-ύλ-ις vs f. Ἀρχ-υλ-ίς (LGPN 3a).
*-υλ-ίσκ-ος (4 ; ni -υλίσκᾱ/η ni -υλισκώ), cf. Αἰσχυ-λ-ίσκ-ος (LGPN 3a-b).
*-υλ-ίων (ca 65), cf. Μικ-υλ-ίων (LGPN 1, 2, 3a et 4) : A. Mathys, p. 360.
*-υλ-ώ (5), cf. Ἁδυλ-ώ (LGPN 3a).
*-ύλ-ων (3) : Κοτύλ-ων (LGPN 5a-b), sur κότυλος « coupe ».
-υλλ-ος (< 500), cf. Τάχυ-λλ-ος (LGPN 2), d’où Δράκ-υλλ-ος (LGPN 2, 1 ex.) :
A. Mathys, p. 349.
-υλλ-ᾰ (ca 150), cf. Ἵππ-υλλ-α (LGPN 2 et 3b).
*-(o)υλλ-ε(ι)(ς) (6), cf. Ἰθιού-λλ-εις (LGPN 3b).
*-υλλ-ίδ-ας (7), -ης (2), cf. Βραχυ-λλ-ίδ-ας (LGPN 1, 3b, 5b), Ἑρπυλλ-ίδ-ης
(LGPN 5b, 1 ex.).
*-υλλ-ῖν-ος (1) : Βαθυ-λλ-ῖν-ος (LGPN 5a).
*-ύλλ-ιον (3), cf. Μεθύ-λλ-ιον (LGPN 5a).
-ύλλ-ιος (4), cf. Φιλ-ύλλ-ιος (LGPN 2).
-υλλ-ίς (ca 45 ; pas de masc. -υλλ-ις), cf. Γναθ-υλλ-ίς (LGPN 1).
-υλλ-ιώ (1) : Φιλ-υλλ-ιώ (LGPN 1, Cyrène, ier a. c.-ier p. C.). 
*-υλλ-ίων (3), cf. Θρασυ-λλ-ίων (LGPN 1).
-ύ-νδ-ᾱς : cf. -ών-δας.
*-υνν-ος, rarissime, cf. Δάτυ-νν-ος (OGS III, 235, LGPN 3b et Lhôte 2007, 277).
*-ύ-σκ-ος (13) : Φορύ-σκ-ος (LGPN 1, 2 et 3b).
*-υσκ-ίδ-ης (6) : Φορυ-σκ-ίδ-ης (LGPN 2). Voir aussi -ί-σκ-ος.
*-ύν-τᾱς (2, en dehors de Ἀμύν-τας) : Ἐχ-ύν-τᾱς (Lhôte  2007, 280, 2 ex.  De
*Ἔχυς ?).

-ύ-τᾱς (< 60), cf. Ἀνδρ-ύ-τᾱς (LGPN 3a-b, cf. Lhôte 2007, 279).


-ων-ίς (<  250, sans Ἀπολλων-ίς), cf. Φιλ-ων-ίς (LGPN  1, 2, 3a, 5b) vs Ἀγων-ίς
(LGPN 2 et 3a).
704 saga

-ών-ιος (< 200, sans Ἀμμών-ιος, Ἀπολλών-ιος et Ποσειδών-ιος), thess. -ούν-ιος


(12), cf. Ἀγρι-ών-ιος (LGPN 3b, 1 ex.) vs Φιλ-ούν-ιος (LGPN 3b).
-ων-ίᾱ (< 60, sans Ἀντων-ία, Ἀπολλων-ία), cf. Φιλ-ων-ία (LGPN 1, 1 ex.).
-ων-εύς (11), cf. Ἐτε-ων-εύς (LGPN 1, 4 et 5a).
-(ι)ών-ιδ-ᾱς (< 578), -ης (< 1 553), cf. Ἀριστ-ων-ίδ-ας (LGPN 1, 3a, 5a-b), Ἀγαθ-
ων-ίδ-ης (LGPN 1 et 2) et Ἀρχι-ων-ίδ-ας (LGPN 1, 1 ex.), d’où Ἀριστ-ιων-ίδ-ης
(LGPN 2, 1 ex.).
-ών-δ-ας (259, béot., eub.), thess. -ούν-δ-ας (7), -όν-δ-ᾱς (112), d’où épi-
rote -ύ-νδ-ας (2), cf. béot. Αἐσχρ-ο̄ ́ν-δας (LGPN 3b, 1 ex.) vs thess. Μεν-ούν-
δ-ᾱς (LGPN 3b, 1 ex.) vs asian. Ταρκ-όν-δ-ᾱς (LGPN 5b) vs épir. Φολύ-νδ-ᾱς
(É. Lhôte 2007, 275, 1 ex.). Pour -ών-δ-ᾱς, voir M. L. del Barrio, p. 579-590 et
G. Vottéro, p. 614-616.
-ων-άδ-ης (4 ; pas de -ωνάδας), cf. Φιλ-ων-άδ-ης (LGPN 1, Cyrène, fin iiie s.,
2 ex.).
*-ε-ων-ίδ-ᾱς (<10 sans Λεωνίδας), cf. Φιλεων-ίδ-ας (LGPN 1), sur le parti-
cipe φιλέων.

-ων-ιαν-ός (gr.-latin, 146), cf. Ἀγαθ-ων-ιαν-ός (LGPN 5a, 1 ex.), voir Introduc-


tion, p. 12.
-ων-ιαν-ή (gr.-latin, 14), cf. Πολεμ-ων-ιαν-ή (LGPN 4, 1 ex.).
-ών-ιχος (68), cf. Ἀγαθ-ών-ιχ-ος (LGPN 1, 3b) vs Εἰρών-ιχ-ος (LGPN 3b) : voir
G. Vottéro, p. 609-611.
-ων-ίχ-ᾱ (3h ; pas de -ων-ίχ-η), cf. Φιλ-ων-ίχ-α (LGPN 3b), ibid.
-ων-ιχ-ίδ-ης (1 ; pas de -ων-ιχ-ίδ-ας) : Φιλ-ων-ιχ-ίδ-ης (LGPN 2).
Index analytique
L’index analytique et l’index des noms et mots du grec et des autres langues, coor-
donnés par S. Minon, sont l’œuvre de tous, avec l’aide précieuse de G. Genevrois.

Abréviation orthographique : 16, 575. récessif : 17, 27, 227, 229-237, 244,
accent : 89, 92, 181, 227-262, 272, 299- 246, 252-257, 259, 262, 339, 473, 513,
300, 301, n. 7, 303-305, 308, n. 32, 583.
313, n. 45, 322, 324-329, 345, 364, périspomène : 96, 231, 234, 236, 271,
368, n. 101, 386, 427, 437, n. 60, 442, 299-303, 305, 324-327, 329, 508, 627.
n. 76, 476, 497-498, 503, 508, 510-511, acculturation : 202.
587, 627. adaptation d’anthroponymes étrangers ou
dans les anthroponymes français : 16. indigènes : 30, 125-154, 164-196, 201-
dans les anthroponymes indigènes : 220, 304, 306-307, 318, 454, 485, 506,
201, 490. 507, 549, 574. Cf. « bilinguisme » et
dans les appellatifs : 120. « contacts interlinguistiques ».
dans les dialectes grecs : 27, 621-622. adfixation : cf. « affixation ».
dans les diminutifs : 17. adjectif
dans les manuscrits : 300. composé : 250, 294.
des adjectifs : 230-231, 233, 235, 237, ctétique : 560, 690, 698.
261, 339. de matière : 414, 518.
des participes déadjectival : 420-422.
aoriste : 238, 241, 243-244, 246, déanthroponymique : 11.
262. dénominatif ou dénominal : 420, 426.
parfait : 238, 241, 243-246. déterminatif : 563.
présent : 241, 243-246, 262. déverbatif : 421.
déplacement : 87, 166, 169, 186, 188, diminutif : 340.
234, 238, 240, 242-243, 246, 248, 249, employé comme anthroponyme, cf.
250-254, 256-257, 261. « sobriquet »
en étrusque : 137-138. ethnique : 133, 153, 419.
et abrègement : 17. gradation : 358.
et gémination : 186, 188. indiquant un défaut physique : 334-
extension à partir des cas obliques : 335.
503. numéral : 169.
hauteur : 18, 28, 584-585. patronymique : 209, 310, 326, 522,
intensité : 18, 28, 584. 560, 568-569, 605, 612.
oxyton : 228, 231-262. poétique : 497, 513.
paroxyton : 186, 232-235, 246, 299- substantivé : 3, 256, 282, 288, 396,
301, 313, 325, 325-326, 329, 504, 627. 493, 496-497, 514, 561.
proparoxyton : 182, 186, 233. verbal : 112, 250, 336, 504-505.
706 saga

adjonction : cf. « suffixe ». composé :10, 19, 22, 80, 127, 144, 165,
adnomen : 166. 169, 173, 177-178, 182, 189, 217, 267,
affixation : 11-12, 17, 19, 21, 24-25. 214, 315, 327-328, 360-361, 364, 370,
allongement (morphologie) : 16. 373, 395, 440, 444, 453-454, 456-464,
allophonie : 184. 470, 473-480, 484, 544-546, 554, 609,
alphabet 612, 613-614, 616-617, 619, 625-627,
achéen : 172, 176. 520, 524, 528.
archaïque : 74. court : cf. « abrégé ».
attique : 547. cyrénéen : 469-490.
changement : 600. égyptien : 202, 208, 212-213, 216, 308,
épichorique : 582, 598. 318-321, 384, 389, 426.
eubéen : 137. égypto-grec : 218.
grec : 151, 172, 383. en Argolide : 625-647.
ionien : 46, 498, 583, 599. en Italie : 125-196.
parien : 536. en Sicile et Grande Grèce : 163-196.
thasien : 536, 541, 551. et effets de mode : 26, 79, 128, 202,
théréen : 474. 209, 219-220, 358, 448, 493, 526, 530,
analogie 571, 622.
dans la flexion nominale : 86, 90,
et milieu naturel : 591.
92-94 ; en étrusque : 140, 146, 520,
étranger : 94, 135, 138, 149, 160-161,
535-554.
164, 177, 201, 227, 242, 313, 314.
dans la place de l’accent : 233, 236,
féminin : 40, 43, 202, 206-208, 210,
244, 249, 251, 255.
213, 217, 234, 243, 314, 318, 320, 320,
dans les composés : 114-115, 118.
328, 374, 379-416, 419-444, 447-465,
dans les suffixes : 184, 246, 350, 422,
476, 479-480, 487, 497-498, 509, 514,
431, 437, 447-449, 508, 512-513, 524-
631, 696.
525, 570, 581, 605, 607, 611, 637, 690-
hybride : 195, 217-218.
691, 695, 697, 701.
anthroponyme hypocoristique : 35, 38, 61, 213, 219,
abrégé : 7, 10-11, 16-17, 23-24, 34-38, 308-309, 312, 318, 320-321, 325, 335,
50-56, 58-59, 61, 78-80, 82-83, 85, 337, 347, 356, 448, 452, 455-458,
94-95, 108, 119, 167, 180, 183, 186, 499, 501. Cf. « suffixe (valeur séman-
193, 210, 230-231, 239, 271-272, 275, tique) ».
300, 303, 308-316, 320-328, 335-336, illyrien : 69, 79, 84-85, 202, 205-206,
338, 345-347, 425, 434- 436, 440-441, 239.
443- 444, 448, 452, 455- 457, 459- indigène : 139, 172-174, 176, 178, 186,
462, 464, 475, 482, 486, 520, 525-526, 205, 207-208, 210, 214-215, 219-220,
593, 595, 608, 619, 625-627, 629, 636- 440.
638, 642. iranien : 60, 204, 207, 495-496, 509,
anatolien : 208, 216, 395. 513.
araméen : 228. libyque : 470, 473, 483-486.
bâti sur un seul lexème : cf. « mono- lydien : 400.
thématique », « sobriquet ». macédonien : 204, 213, 322, 326.
béotien : 591-622. monothématique : 24, 35, 37, 51, 309,
comme attribut : 3. 694. Cf. « sobriquet ».
index analytique 707

anthroponyme (suite) lexicale : 79, 392, 611.


mycénien : 86, 89, 105-106, 118, 276, verbale : 118, 256, 258.
326, 328, 368, 428, 430-431, 449-454, bilinguisme : 126-127, 140, 153, 163-164,
458-459, 494-495. 172, 175-177, 196.
noms d’esclaves : cf. « nom propre ».
Calque : 140, 143-144, 163.
noms d’hétaïres : cf. « nom propre ». celtique : 129, 170, 342.
raccourcissement : cf. « anthroponyme chaîne suffixale : cf. « suffixe ».
abrégé ». Cicéron (nom) : 171.
sabellique : 129, 133, 139, 141, 176, classe
182, 184-185, 192. d’âge : 561.
sanskrit : 342, 496. sociale : 216.
sarmate : 207. cognomen : 138, 152, 157-159, 164, 171,
scythe : 207, 239. 173, 184, 189, 196, 313, 384, 476, 592,
sémitique : 129, 208, 213, 319, 437, 594-595.
439. collocation : 45, 47, 49, 59, 60, 508.
simple : 17, 19, 21, 36, 214, 206, 217, Cf. « composition ».
219, 325, 390, 392, 395, 402, 404-405, comicité : 44.
407, 410, 213, 400, 413, 610. composé et composition
syrien : 202. à premier élément oσ(ι)- : 56, 59, 499,
thasien : 535-554. 501.
théophore : 127, 191, 205, 209, 212, à rection prépositionnelle : cf. « hypos-
213, 217, 310, 316, 320, 419, 423, 425- tatique ».
426, 436, 444, 472, 475, 478. abrégé : cf. « anthroponyme ».
thrace : 201-220. accentuation : 227, 235-236.
troncation : cf. « abrègement ». bahuvrīhi : 21, 60, 79, 97, 99-100, 231,
valeur laudative : 347, 593, 609-610, 235-236, 277, 279, 281-282, 284-285,
612-616. 293, 294.
variante anthroponymique : 79, 167. déterminatif : 22, 279-280, 286, 294.
Cf. « idionyme ». diathèse : 116-119.
apostrophe : 143, 381-382. diminutivé :17.
appellatif : 2, 4, 37, 41-42, 45, 59, 86, 99, hypostatique : 27, 396 3, 11, 35, 279-
100-104, 106-109, 113, 116-118, 120, 297, 292, 396, 413.
128, 131-133, 138, 139, 141, 144, 148, interversion des membres : 22-23, 34,
268-269, 276, 283, 336, 365, 382, 393, 57, 59-61, 110.
396, 400, 407, 620. irrationnel : 283-284, 290.
comme nom propre : 25, 472. oxymore : 22.
loi des appellatifs : 27, 227-262. possessif : cf. « bahuvrīhi ».
Cf. « nom commun ». premier élément : 99-121.
appropriation : 201, 218. rectionnel : 99-100.
sémantique : 115-120, 283, 295-296.
archaïsme : 36, 85, 116, 121, 274.
substantifs sigmatiques : 99-123.
aristocratie : 21, 125, 128, 150-151, 570,
thrace : 217.
612, 614.
traduction : 116-119.
arménien : 19, 245, 336.
tronqué : cf. « anthroponyme
Bahuvrīhi : cf. « composé et composition ». (abrégé) ».
base type τερψίμβρoτoς : 34, 51, 55-56, 59,
nominale : 24, 127, 338, n. 15. 61.
708 saga

condition sociale : 165, 170. du Nord-Ouest : 79.


contacts interlinguistiques : 77, 125-154, éléen : 49, 90, 511, n. 29.
163-196, 201-220, 448. Cf. « bilin- éolien : 89, 91, 506.
guisme ». épique : 86, 91, 294, 340, 494, 502,
continuité 517, 521, 524, 525, 527-530, 638, 640.
entre le grec homérique et le grec pos- eubéen : 536, 588.
térieur : 458. homérique : cf. « épique ».
entre le mycénien et le grec du Ier mil- ionien : 311, 691.
lénaire : 28, 33, 37, 38, 41, 50, 60. koinè ionienne-attique : 26, 168, 177,
copronymes : 211, n. 45. 308-309, 318, 415, 529, 535, 538, 541,
couleur locale : 601, 622. 543, 546-547, 549-551, 553, 568, 588,
créativité anthroponymique : 11. 604, 611, 620-622, 634, 639.
ctétique : cf. « adjectif ». laconien : 112, 326, 368, 633, n. 13.
lesbien : 442, 538.
Datif
macédonien : 23.
comitatif : 118.
mycénien : 33-61, 68-69, 86, 95, 102,
d’intérêt 119.
104-105, 181, 281-282, 295, 380, 419-
démorphologisation : 255-256, 339.
420, 479, 496, 506, 637.
(dé)nomination : 4, 482, 571, 575. Cf.
pamphylien : 91, 94, 271, 300, 501,
« paranomination ».
507.
dérivation : 5, 17, 18.
pseudo-dialecte : 596.
ethnique : 189.
thasien : 535-554.
expressive : 20.
théréen : 90, 508, 524, 526, 528.
hypocoristique : 6, 180.
thessalien : 511, 559-575, 588.
inverse : 240.
diathèse : 100.
désémantisation : 14, n. 45, 25.
diminutif : 6, 29, 167, 204-205, 307, 324,
dialecte(s)
460, 595.
accentuation : cf. « accent ».
de composé : 391-392, 394, 398, 399,
alexandrin : 307.
401, 402-404, 406, 410-411, 413.
arcadien : 26, 86, 89, 300, 328-329,
d’un nom d’animal : 274-275.
494, 506.
surdiminutivation : 17. Cf. « hypoco-
attique : 371, 496-497, 505-506, 511,
ristique » et « suffixe ».
513-514, 536, 547.
béotien : 300, 441-443, 505, 586, 591- Effet de Saussure : 246.
622. élargissement : 21, 206-207, 208, 214, 472,
chypriote : 26, 86, 300, 312, 326, 506. 690.
corinthien : 69, 74, 504. consonantique : 93-94.
cyrénéen : 112, 469-490, 504. dental : 620, 689.
d’Argolide : 625-640. dépréciatif : 20.
de Cos : 90, 517-532. nasal : 387.
de l’étrusque : 137, 142. suffixal : 167, 193.
des îles de l’Égée : 504, 506, 508-509, emprunt
520, 525, 526. au grec : 163-196 (Grande Grèce et
dorien : 76, 87-88, 90, 131, 173, 181, Sicile) ; 125-154 (au grec en étrusque).
275, 305, 313, 323, 326-327, 329, 538, au latin en grec : 570.
548-549, 627. enfant (vocabulaire d’) : 270-271.
index analytique 709

épiclèse : 50, 174, 423-424, 425, 433, 441, géographie dialectale : 75, 457.
443, 519, 561, 608, 610. germanique : 322, 342, 412.
ethniques : 11, 68-69, 80-82, 84-85, 95, glose : 20, 81-83, 428, 315, 325, 400.
133, 153, 159, 189-190, 269, 289, 303, grammairiens anciens : 1-2, 12, 27, 87, 145,
322, 419, 422-423, 425-433, 436, 439, 189-190, 228-230, 235, 237, 240, 255,
443-443, 472, 494-495, 561, 562. 261, 300-306, 347, 437, 481.
expressivité : 340, 367, 373, 381, 382, 390, grammaticalisation : 12-13, 17, 693.
406. graphie
Famille : 15, 28, 79, 111, 135, 204-206, amplifiée : 90.
209, 212, 216, 334, 346, 471, 473, 482, post-euclidienne : 111-112.
486, 562, 565-566, 568-569, 572-573, grec moderne : 22, 23, 268, 274-275, 282,
575, 586. 306, 326, 429, 478, 640.
famille anthroponymique : 5.
fantôme : 261, 325, 423, 428, n. 33. Cf. Hapax : 17, 22-23, 47, 143, 176, 286, 287,
« suffixe ». 288, 291, 294, 341, 390, 456, 471, 475,
finale complexe : cf. « suffixe ». 481, 525, 528, 542.
flexion(s) : 300, 304, 472, 477, 510, 607. haplographie : cf. « phonétique ».
adaptation : 164-165, 177-181, 192- hébreu : 228.
193, 387, 422, 483-484. hellénisation : 30, 79, 81, 173-174, 201-
convergence : 92-93, 95-96, 538, 540, 220, 484-485. Cf. « adaptation ».
550, 553. héronyme : 7, 11, 87-88, 126, 128, 189,
croisement : 535-554. 208, 309, 511-512, 593, 614.
innovation : 168. hittite : 341, 400.
pluralia tantum : 243, 247, 249, 251, homonymie : 5, 14-16, 84, 472, 559, 566,
255. 574, 585.
thématique : 178-180, 192, 280-282, homophonie : 140, 183, 189.
287, 296, 308, 369.
hybride : 164, 175, 195, 202, 217-220, 320,
uniformisation : 547.
411, 448.
variations : 87-95, 317-321, 430.
hydronyme : 189, 336, 494-495, 601, 610.
flottement
consonantique : 22, 205. hyperdialectalisme : 549.
graphique : 618. hypocoristique : définition du terme : 6-11,
fratrie (différenciation dans la) : 14. 595 ; 390 (Kosename).
à partir de noms composés : 193, 347-
Gémination : cf. « phonétique ». 353, 359, 361, 363-365, 391, 403, 460-
genre 464.
inanimé : 139, 139, 255-256, 257, 379,
à partir de sobriquets : 367, 471.
415.
abrègement : 333, 474, 478.
Cf. « suffixe féminin », « anthropo-
nyme féminin ». connotation : 15, 179-180, 202, 272,
gentilice 337, 381-382, 396-397, 400, 410-411,
étrusque : 127-133, 135-136, 139-143, 413, 416.
149-150, 153-154, 158-162. gémination : 29, 371-373, 473, 511.
Grande Grèce et Sicile : 166, 169-170, théophore : 212.
173-176, 181, 183-188, 191-192. troncation : cf. « anthroponyme
pseudo-gentilice : 572, 574-575. (abrégé) ».
Thessalie : 559-561, 570-575. Cf. « anthroponyme » et « suffixe ».
710 saga

hypostase : cf. « composé et composi- de Wheeler : 233, 239, n. 45, 244-246,


tion ». 339, n. 19, 368, n. 101.
des appellatifs : 227-262.
Idéogramme : 37, n. 5, 49, n. 46, 451.
des comparatifs : 29.
idionyme : 94, 127, 135, 153-154, 166, 208,
337, 472, 561, 563, 571, 573-575. Métaphore : 60, 83, 84, 93, 268, 405, 407,
imitation : cf. « calque ». 409-410, 426.
immigré : 152, 172-173. métèque : 148, 150, 313, n. 45.
(indo-)iranien : 19, 41, 60, 117, 245, 258, métonymie : 11, 268, 414.
413, 495-496. métronyme : 213, 477, n. 41, 632.
infixation : 17. « Motionsfeminina » : 42-43, 521, n. 18.
influences interdialectales : 26. mycénien : cf. « anthroponyme » et « dia­
interpellation : 165-166, 179, 486. lecte(s) ».
interversion : cf. « composé et composi- mythologie : cf. « héronyme ».
tion ».
intonation : 9. Néologisme : 120.
neutralisation morphologique : 510.
Koinè : cf. « dialecte(s) ». niveau de langue : 179, 620.
Kosename : cf. « hypocoristique ». nom commun : 2-4, 94, 237-238, 252.
Kurzname : cf. « anthroponyme (abrégé) ». abstrait : 10, 53, 55-56, 59, 240, 256-
Lallnamen : 207, 210, 219-220, 270-272, 257, 259-260, 328, 369, 407-408, 449,
275, 318, 327, 400, 423, 438, 439. 500-501, 513, 561.
Lallwörter : 270. collectif : 562.
langue d’animal : cf. « zoonyme ».
commune : cf. « dialecte (koiné) ». d’agent (nomen agentis) : 37, 102, 105,
familière : 170, 268, 397, 415, 448, 118-119, 139, 256, 260, 269, 281, 328,
465, 551. 393, 395, 484, 505 389, 390, 688-689,
orale : 555. 701.
populaire : 21, 177, 307, 317, 325, 341, de métier : 300-313.
386, 410. d’objet : 191, 324-325, 407, 412.
latin : cf. « anthroponyme » et « phoné- de parties du corps : 259, 259.
tique ». de parenté : 397.
lexème de plante : cf. « phytonyme ».
connotation péjorative : 21. Cf. « appellatif ».
distribution sociale : 34. nom propre
polysémie : 94. court : cf. « anthroponyme (abrégé) ».
valeur intensive : 22. d’esclave : 128, 135, 136, 145-147,
lexicalisation : 36, 146, 290, n. 55, 585, 158-162, 388, 390, 405, 407, 423, 425-
587. 426, 594, 601-603, 609.
lexique d’étranger : cf. « anthroponyme étran-
anatomique : 22. ger ».
familier : 325, 400. de femme : cf. « anthroponyme fémi-
médical : 93. nin ».
loi(s) de fête : 50, 61.
de Grassmann : 618. d’hétaïre : 379, 383-386, 388, 394,
de Stang : 90, n. 79. 399-400, 408, 410, 412, 426.
de Wackernagel : 106. de lieu : cf. « toponyme ».
index analytique 711

de vaisseau : 40. dissimilation : 111, 140, 443, 481, 618.


individuel : 131-132, 136, 140-141-143, du latin : 184.
145. épenthèse : 143.
parlant : 145, 292. gémination : 333-374, 562.
Onomastique : cf. « anthroponyme » et dans les Lallnamen : 272.
« nom propre ». expressive : 16, 29, 270, 341-344,
onomatopée : 260, 275. 358, 392, 400, 410, 436, 456,
orthographe 473, 479, 481, 501, 504-505,
faute : 582. 511, 513-514, 629, 702.
étrusque : 151. hypocoristique : 29, 272.
latine : 175. prosodie : 352-359.
sobriquets : 36, 40-41.
Papponyme : 477, n. 41, 559, 566, 573.
haplologie ou haplographie : 16, 193,
paradigme
accent : 254. 382, 440, 476, 503, 562.
alternance : 20. neutralisation : 138.
convergence : 92-93, 535-554. redoublement syllabique : 16, 595.
intégration (dans un) : 56. sabellique : 184.
réfection : 165, 168, 519, 582, 583, 585, syncope
587. étrusque : 137.
supplétisme : 57. grec : 355, 440-441, 553-587, 615-
variation : 90, 177. 616.
Cf. « flexion ». vocalisme étrusque : 137.
paranomination : 4-5. voyelle
participe : 510-512. abrègement : 502, 538, 540.
accentuation : cf. « accent ». allongement : 308, 325, 354-355.
féminin : 29, 498, 498, 508, 510-514. compensatoire : 103, 114, 442,
patronyme : 6, 94, 170, 179, 191, 193, 195, 510, 513.
329, 427, 430-431, 433-434, 444. hypocoristique : 343.
petit-fils : 486. métrique : 258, 471, 638, 640.
phonétique
Cf. « loi de Wackernagel ».
amuïssement de *s : 103, 109, 114-115.
anti-hiatique : 638.
aphérèse : 16, 355.
contraction : 89, 92, 96, 112, 231,
assibilation de *ti : 56.
271, 276, 304, 307-308, 471,
assimilation : 138, 252, 259, 254, 403,
486, 587. 481, 494, 497, 501-502, 505,
aspiration 508-510, 512-514, 517-523,
dissimilation : 481. 526-530, 538, 540-547, 549-
expressive : 593, 618. 550, 553, 632-633.
consonne de liaison : 336-338, 342, 345,
occlusive : 360. 356, 371.
palatalisation : 449, 501, 501, hyphérèse : 503, 513.
505, 561. iotacisme ou itacisme : 184, 440,
sourde aspirée : 23, 136, 178, 483, 497.
609 ; déaspiration : 178. métathèse : 179.
sonore : 23, 136. métathèse de quantité : 541.
sourde : 23, 136-138. quantité : 357, 387, 503, 539, 582.
712 saga

réduction : 181, 483. défaut physique : 299, 322, 334,


thématique : 108, 143, 182, 244, 319, 332, 608.
260, 294, 354-355, 474-475. difformité : 21, 24.
phytonyme : 83, 323-324, 408, 249, 408, infirmité : 21.
494, 608. classe d’âge : 269.
pléonasme : 22. tiré d’un nom d’oiseau : 81.
plurilinguisme : 79, 164. Spitzname : cf. « sobriquet ».
polarisation : 315-317. substantivation : 3, 238, 245, 250-251,
potamonyme : 11, 239, 593, 303. 258-259, 288, 396, 414, 421, 493, 496-
497, 514, 561.
pragmatique : 166-167, 170, 194, 380, 382,
substrat : 77, 86.
412-413, 416, 486.
suffixe(s)
préfixe : 9, 22, 99, 250, 320, 687-688.
adjonction : 6, 21, 25, 281, 310, 313,
pré-grec : 38, 55.
397, 470, 570, 609, 621.
prénom, praenomen alloglotte : 140.
allemand : 411. amplificateur : 613.
français : 16, 550, 595. caractère littéraire : 495.
en Grande Grèce et Sicile : 166, 173, chaîne suffixale : 12, 16, 18, 21, 25, 28,
179-180, 192. 35, 81, 272, 277, 381, 394-395, 399,
étrusque : 127, 130-133, 135, 139, 142- 686-704.
144, 148-149, 152, 161, 185. chez les comiques : 193, 301, 380, 382,
luxembourgeois : 411. 384-386, 397, 400, 407, 410, 416.
osque : 187, 189. chronologie de son usage : 77-78, 128,
préposition : cf. « composé et composi- 216, 326, 374, 394, 422-424, 457, 456,
tion ». 526, 542, 556, 582, 634.
présupplétisme : 56-57. classe suffixale : 226, 255.
préverbe : 19, 280, 285. coalescence : 142.
prononciation : cf. « phonétique ». combinaison (de) : 16, 20, 28, 164,
prosodie 171, 174, 178, 182, 190, 212, 396, 635,
étrusque : 138. 636, 654, 678.
grecque : 345, 352-355, 370- 373. complexe : 21, 23, 24, 29, 150, 162,
164, 167, 172, 199, 212, 228, 245, 298,
Recaractérisation morphologique : 539. 338, 392, 393, 396, 397, 398, 399, 401,
régionalisme : 23. 464, 478, 510, 603, 649, 680.
resuffixation : 27-28. concaténation  ou conglomérat : cf.
rythme : cf. « prosodie ». « chaîne suffixale ».
concurrence (entre) : 51, 86, 88, 183,
Sabellique : 169, 174. Cf. « anthropo- 190, 192, 193, 402, 495, 606, 620.
nyme ». convergence (de) : 171-172, 176-177,
sanskrit : 116, 118, 235, 281, 368. 181, 183, 186, 309, 352, 463.
scythe : 474. Cf. « anthroponyme ». croisement (de) : 182, 187, 195.
sobriquet : 267, 285-289, 390. d’agent : 544-545.
adjectif fonctionnant comme : 237, dans les composés : 281, 296-297.
496-497, 509. de Hoffmann : 230, 496.
en mycénien : 61. de sobriquet : 25, 34, 45, 50, 80-85, 95,
sémantique des sobriquets : 322-325. 164, 190, 192-193, 207, 230-231, 313-
péjoratif : 21. 315, 625-640.
index analytique 713

suffixe(s) [suite] 202, 206, 270, 275, 334, 411-


dénominatif : 369. 412, 415, 500.
dérivationnel : 131-132, 141-142, 193, expressivité : 19-20, 696.
393. familiarité : 7, 21, 305, 479, 611,
diffusion : 76, 167, 181, 186, 188, 189, 619.
191-192, 193-194, 401, 404, 447. hypocoristique (valeur) : 6-11
distribution complémentaire : 520, (défi­­nition), 16-17, 26, 85, 203-
528. 207, 218, 273, 322, 353, 274-
fantôme : 637-638. 275, 303, 315-316, 320, 322,
fausse coupe : 365, 637-638. 326, 328, 340-346, 350, 382,
féminin : 42, 206-208, 210, 232, 419- 387, 411, 415, 471-472, 475,
444, 447-465, 506, 592. 477, 487-489, 496, 500, 545-
546, 608, 619, 626-640.
flexionnel : cf. « flexion ».
individualisation : 37, 80, 184,
latinisation : 210, 219.
192, 230, 421.
neutralisation : 136.
mélioration (voire flagornerie) :
neutre : 207, 379-416, 448-449, 460,
9-10, 79, 166, 167, 172, 272,
476, 631, 635.
274-275, 381, 408, 412, 500,
patronymique : 13, 21, 26, 28, 82, 209, 595.
274, 382, 394, 433, 522, 559-575, 581, neutralité : 11, 164.
592. possession : 37, 230, 260, 493,
productivité : 30, 94, 180, 191, 193, 495-496.
211-212, 232, 254, 314, 317, 339, 342, variante : 7, 24, 87, 203, 207, 361, 402,
415, 422, 459, 478-479, 496, 500, 571, 436, 580, 583-585.
587, 629, 634, 636-637. vitalité : 92, 190, 193, 478.
provincial : 308. supernomen : 166.
(de) quasi-ethnique : 11, 322. surnom : cf. « sobriquet ».
réanalyse : 180, 427, 510, 512, 528,
Terminaison : cf. « flexion ».
551.
théonyme : 7, 11, 36, 42, 55, 68, 89, 91-92,
renouvellement (de) : 28, 170, 308,
94-95, 126, 128, 137, 138, 144, 165,
482.
170, 179, 189, , 206, 213, 217, 230,
résiduel : 328.
237-238, 252, 303, 305-336, 392, 477,
secondaire : 141.
498, 504, 512, 593, 608, 610, 612, 614,
superposition : 181, 184, 189, 196. 616, 619.
sursuffixation : 17. tokharien : 336, 341.
valeur sémantique : 26-27, 315-317, toponyme : 42, 49, 53, 69, 73, 105, 170,
407-415, 559-575. 174, 176, 190-191, 227, 231, 238, 241-
affectivité : 9-10, 16, 17, 164, 167, 243, 247-249, 251-252, 255, 289, 318,
170-171, 195-196, 206, 315, 337, 407, 430, 432, 441, 443, 494-495,
382, 400, 408-409, 412-413, 502-503, 507-508, 509, 514, 562-563,
415-416, 448-449, 479, 486, 593, 608, 610, 614, 630, 694.
595, 609, 611, 619. traduction : 127.
augmentation : 203-204. transfert morphologique : 535-554.
dépréciation, valeur péjorative ou transformation, transposition : cf. « adap-
négative : 9-10, 20-21, 45, 164, tation ».
166, 170-172, 185, 193, 195, troncation : cf. « anthroponyme (abrégé) ».
714 saga

Variation régionale : 23, 128, 202, 521-


522, 621.
védique : 51, 54, 117, 230, 235, 249- 251,
442.
vocatif : 17, 165-166, 254, 305, 396, 439,
583-587.
voyelle : cf. « phonétique ».
Zoonyme : 44, 81, 190-191, 252, 309, 322-
323, 325, 340, 347, 356, 365, 368-369,
371, 393, 408-409, 414, 421, 431, 612-
613.
Index des anthroponymes et des mots

a) Grec (voir aussi infra « Latin et grec latinisé »)

Ἀβάς : 438 ; ἀβάς : 270. Ἀγάθων : 24, 167, 267, 482, 586, 630, 642.
Ἀβασκαντώ : 458. Ἀγαθωνιανός : 12, 689, 704.
Αβδᾶς : 314. Ἀγαθωνίδης : 704.
Ἀβδίων : 213. Ἀγαθωνίς : 459.
Ἀβδοῦς : 207. Ἀγαθώνιχος : 15, 704.
ἀβής : 271. Ἀγακλέης, ἀγακλεής : 231.
Ἀβίς (?) : 439. ἄγαλμα : 412.
Ἅβρα : 630, 645. Ἀγαλμάτιον : 413.
Ἀβραάμ : 228. Ἀγαλματίς : 459.
Ἄβρακος : 45. Ἀγαπᾶτις : 701.
Ἁβροία (et non Ἅβροια) : 692, 695. Ἀγάπημα : 412, 699.
Ἅβρον : 631, 645. Ἀγαπήτη : 701.
ἁβρός : 45, 642, 645. Ἀγαπωμενός : 700.
Ἁβροτέρα : 700. Ἀγασίλλα(ϝ)ος, Ἀγάσιλλος : 335, n. 7.
Ἁβροτίη : 528, 531. Ἀγγελή : 248.
Ἅβρων : 629, 642. Ἀγγελῆς : 548 et n. 31.
Ἀβυδηνός : 73. Ἀγγέλιτος : 689, n. 2 (ἀγγελία, ἀγγελικός),
ἀγα- : 35, n. 1. 701.
Ἀγάθα / -η : 3, 12. Ἄγγελος : 269 ; ἄγγελος : 107, 248.
Ἀγαθανόρη : 517, 529. Ἀγγουλᾶς : 211.
Ἀγάθαρχος : 15. Ἀγέας : 627, 646.
Ἀγάθεις : 271. Ἀγέδαμος : 398-399.
Ἀγαθῖνος : 482. Ἁγειμούνδας : 563.
Ἀγαθίων : 24. ἀγείρω, inf. ἀγιρέμεν : 442.
Ἀγαθ(ο)- : 7, 12, 167, 642. Ἁγείσιππος : 565.
Ἀγαθοκλέαδαι, -κλεαδαῖος : 562-563. αγελάδα (gr. mod.) : 429.
Ἀγαθοκλέης / -ῆς : 565, 482. Ἀγέλαος : 107, 108, 399.
Ἀγαθοκλείδας / -ης : 565. ἀγελάς, ἀγέλη : 432.
Ἀγαθόκληα : 520. Ἀγελλιώ : 458.
Ἄγαθος : 3 ; ἀγαθός : 11, 267, 642. Ἁγεμώ : 458.
Ἀγαθούας : 12, 702. Ἁγεστίμα : 440.
Ἀγάθουν : 565. Ἁγτορῖνος : 700.
Ἀγαθοφανείς : 459. Ἀγεύς : 85, 646.
Ἀγάθυλλα : 464. Ἁγηἵς (Hαγhίς) : 630, 644.
716 ἁγηλατέω – Αἰγυπτᾶς

ἁγηλατέω : 107. Ἀγώ : 631, 643.


Ἀγήν : 69, n. 9, 71, 74-75, 79, 80, n. 39. Ἀγωνιθέα : 529, 531.
Ἀγησιάναξ : 692. Ἀγώνιππος : 487.
Ἁγησιάς : 434. Ἄγωνις : 487, 489.
Ἁγησίας : 487, 644. Ἀγωνίς : 703.
Ἁγησίλαος, Ἁγήσιλλα : 698. Ἀδείμαντος, ἀδείμαντος : 689, n. 1.
Ἁγησιρόδη : 523. ἀδελφίδιον : 382.
Ἁγησίς : 459. Ἅδησι- : 54, cf. Fαδησι-.
Ἅγησις, Ἁγησίστρατος, Ἁγησίων : 487. ἄδικος : 475.
Ἁγησώ : 458. Ἁδίμα : 698.
Ἁγητορίδας : 700. Ἅδιννα : 463.
Ἁγητορίνος : cf. Ἁγτορῖνος. Ἁδρίας : 211.
Ἁγήτωρ : 484 ; ἁγήτωρ : 700. Ἁδυλώ : 703.
Ἀγίας : 79, 628, 646. Ἄδωνις : 137, 144, 158.
Ἀγίδαμος : 398. ἀέθλιον, ἄεθλος : 414.
Ἀγιδώ : 398, 399, n. 122. ἀεξίγυιoς, ἀεξίφυλλoς : 52.
Ἀγιεύς : 637, 646. Ἄεξος : 53, 55, 59 ; ἀέξω : 52.
Ἅγιλλος : 629, 646, Ηαγίλλος : 357, n. 71. Αἐσχρνδας : 582, n. 12, 704.
Ἁγίς : 459. ἀετιδεύς : 277.
Ἇγις : 487, 629, 646.
ἀηδόνιος, ἀηδών : 414.
Ἀγίων : 79.
Ἀθαναίδας : 563.
Ἄγκιθος : 481, n. 63.
Ἀθαναίων : 695.
Ἀγκυλή, ἀγκύλη : 248, 252.
Ἀθανίας : 606.
Ἀγκυλίων : 359.
Ἀθανίων : 644.
Ἄγκυλος, ἀγκύλος : 233, 237, n. 40, 248,
Ἀθηναγορέας : 527, n. 36.
n. 69, 366.
Ἀθηναγόρης : 545, 546.
Ἀγλαΐδης : 545, 546.
Ἀθηνάδης : 544-546.
Ἀγλανθιώ : 458.
Ἀγλωτίμα : 699. Ἀθηναία, Ἀθήναιον : 695.
Ἁγνείας (?) : 638, n. 25. Ἀθηναῖος : 234, n.  26, 237, n.  40 (Ἀθή-
Ἀγοραῖος : 694. ναιος), 643-644.
Ἀγορᾶναξ : 697, n. 10. Ἀθηναΐς : 630, 643.
Ἀγόρατος : 701. Ἀθηναροῦς : 213, 461.
-αγόρη : 526-527, 530. Ἀθηνᾶς : 310.
ἅγος : 106. Ἀθηνῆς : 552.
-αγός : 46. Ἀθηνόδοτος : 310.
Ἀγραυλή, ἄγραυλος : 248, 252. Ἀθηνυλλίς : 459.
Ἀγρέανος, Ἀγρέας : 697, n. 10. Αἰακίδης : 695.
Ἀγριώνιος : 704. Αιαλαν, gén. -αντος (lib.) : 490.
ἄγρος : 108. Αἴας : 276, 414.
Ἀγροτέριον, Ἀγροτέριος : 700. Αἰγᾶς : 302.
Ἀγρυλή : 248, 252. αἰγάς : 431.
Ἀγύρανος : 697, n. 10. Αἰγεύς, Αἰγείδας : 696.
Ἀγχίθεος, ἀγχίθεος : 283, n. 20, 286, n. 38. Αἰγιάλεια : 429.
Ἀγχομενóς : 242. Αἰγιαλεύς, Αἰγιαλός : 430.
ἄγω : 47, n. 37, 50, 56, 61, 107, 391, n. 71, αἴγιλος : 368.
399, 643, 646. Αἰγυπτᾶς : 322.
Αἰδήμων – Ἀλεξήν 717

Αἰδήμων, αἰδήμων : 700. Αἴσων : 487, 630, 642.


Αἴϝᾱς : 144, Αἶχμις : 629, 642 ; αἰχμή : 642.
αἶζα : 431. **Ἀκαμαντιάδας : 471, n. 9.
Αἰθαλίς : 459. Ἄκανθις : 39, n.  9 (Ἄκανθος, ἄκανθα),
αἰθαλόεις (f. -εσσα) : 494. 478.
Αἴθων, αἴθων, αἰθός : 40. ἀκάτιον, ἄκατος : 414.
Αἰλιανός : 572. ἀκέομαι : 55, 241, n.  57 ; -εσσάμενος :
Αἰλιάς : 209. 241, n. 57.
Αἰμιλιάς : 209, 437, n. 56. Ἀκέσανδρος : 312, 487.
Αἰνείας, Αἴνειος : 639. Ἀκεσᾶς : 312, 499, n. 12.
Ἀινεισσάδας : 434. Ἀκεσίδαμoς, Ἀκεσεύς : 55.
Αἰνέτα, Αἴνετος : 701. Ἄκεσις : 487.
Αἴνησα : 700. Ἀκε(σ)σαμεναί, Ἀκε(σ)σαμενός : 241-242.
Αἰνησιάς : 434, 435, 441. Ἀκεστίδης : 697.
Αἰνησικράτη : 391. Ἀκεστίμα : 440.
Αἰνησίς : 435, 441 ; Αἰνήσιον, Αἰνησώ : ἀκεστός : 55.
435. ἀκεσφόρος : 46.
Αἰνιαῖος : 562, n. 7. Ἀκεσώ / -ώι : 55, 487 (Ἀκέσων).
Αἰνίας, Αἶνις : 487. Ἀκίδης : 542, n. 14.
αἶνος : 693. Ἀκκεπτοῦς : 211.
Αἰολάδας : 694. Ἄκ(κ)ης : 271.
Αἰόλος / Αἴολος, αἰόλος / αἴολος : 237, n. 40. ἄκος : 693.
αἶσα : 642. Ἀκουμενός : 242.
Αἴσιμος : 487, 698. Ἀκουτᾶς : 211.
Αἶσις : 487. Ἀκραγαντῖνος : 189.
Αἰσχινάδης : 689, 698. Ἀκραιφιεύς : 81.
Αἰσχίνας / -ης : 472, 699. ἀκρατής : 235.
Αἶσχις, Αἰσχίων, αἶσχος : 644. Ἀκριδίōν : 617.
Αἰσχρᾶς : 410. ἄκρις : 369.
Αἴσχριον : 392, 410. ἀκρίς : 617.
Αἰσχρίων : 487, 489. ἄκρος : 369, 642.
Αἰσχρόδωρος : 22. Ἄκρων : 630, 642.
Αἰσχροκλῆς : 487. Ἀκτορίς, Ἄκτωρ : 430, n. 42, 459.
αἰσχρός : 352, 392, 479, n. 51, 642. Ἀκύλλ, ἄκυλος : 608.
Αἶσχρος : 410. Αλαζειρ (lib.) : 484.
Αἰσχρύβα, Αἰσχρυβᾶς, Αἰσχρύβης : 20. Ἀλαλκομεναί : 241.
Αἰσχρυβίων : 19-23. Ἀλεγήνωρ, Ἀλεγηνορίδης, ἀλέγω : 108.
Αἰσχρώ : 410. ἀλείφω, ἀλειφεύς, ἀλείπτης ἄλειψις : 51.
Αἴσχρων : 79, 629, 642. Ἀλεκτορίων, Ἀλέκτωρ, ἀλέκτωρ : 700.
Αἰσχρ-ώνδης, -ωνίδης : 585. Ἀλεξάνδρα : 43.
Αἰσχυλίδης : 357, 360, 702. Ἀλεξανδρίς : 459.
Αἰσχυλίς : 459, 703. Ἀλέξανδρος : 215, n. 56, 216, n. 57, 281 et
Αἰσχυλίσκος : 703. n. 13, 320, 487.
Αἰσχύλος : 352, 357, n. 71 (Αἴσχυλλος). Ἀλεξᾶς : 52, 307, 320, 472, 627, 646.
Αἰσχυρᾶς : 319. Ἀλεξεύς : 52, 53 et n. 57.
Αἴσχυρος : 20. Ἀλεξήν : 71, 80, n. 39.
718 Ἀλεξῆς – Ἀμφιγονίς

Ἀλεξῆς : 541 et n. 13. ἀλοιφή : 51, n. 54.


Ἀλεξιάδας : 434. Ἀλσεία : 519.
Ἀλεξιάς : 434, 435, 441. ἀλυπιάς : 425.
Ἀλεξίας : 628, 646. Ἀλυπίς : 459.
Ἀλεξίδημoς : 52. ἄλυπος : 425, n. 23.
Ἀλεξίκακoς : 52. Ἀλυπώ : 458.
Ἀλεξίμαχος : 24. Ἀμαθοῦς : 494.
Ἀλεξίμβρoτoς : 52. Αμαισιννας (lib.) : 485.
Ἀλεξίς f. : 435, 441. Ἀμβρακία : 190 et n.  140, Ἀμβρακιεύς,
Ἄλεξις m. : 52, 477, n. 41. Ἀμβρακῖνος, Ἀμβρακιώτης.
Ἀλεξιτέλης : 52. ἀμείβω : 421.
Ἀλεξιτίδης : 702. Ἀμεινίας : 487.
Ἀλεξίτιμος : 52. Ἀμεινόβιος : 487.
Ἀλεξιτώ / -ώι : 52, 458. Ἀμεινώ : 458.
Ἀλεξίων / -ουν : 24, 629, 646. ἄμης : 271-272.
Ἀλεξομενός : 52. Αμησινας (lib.) : 485.
Ἄλεξος : 52, 53, 55, 59, 629, 646. Ἀμιαντίς : 459.
Ἀλεξοῦς : 461. Ἀμίνιχος : 610.
Ἀλεξώ : 52, 435, 458, 461. Αμ(μ)α, Αμ(μ)ας : 438.
ἀλέξω : 52, 646. ἀμμά, ἀμμάς : 430, 438.
Ἀλέξων : 630, 646. Ἀμμωναροῦς : 213.
ἅλιoς : 47. Ἀμμωνᾶς : 320.
Ἁλίας, Ἁλιεία, Ἁλίεια : 528. Ἀμμώνιος : 475, n. 33, 704.
Ἁλίη : 525, 528, 530, 531. ἀμνά, ἀμνάς, ἀμνίς : 431.
Ἁλικεύς : 637, 642. Ἄμνος : 276.
Ἁλική : 697. Ἀμοίβας : 328 ; ἀμοιβή : 328, 421 ; ἀμοι-
ἁλικία : 642. βάς : 421, 422.
ἁλινός : 47. Ἀμούμειτος : 569, n. 30.
Ἁλιορόδη : 523. ἀμπελεών : 231.
Ἀλκάθooς : 35. ἀμπέλιον : 408.
Ἀλκαῖος : 182. Ἀμπέλιον : 393.
Ἀλκαμένης : 308. Ἀμπελίς : 459.
Ἀλκᾶς / Ἄλκας : 308 et n. 32. Ἀμπελίων : 11.
Ἀλκέσιππος : 110. ἄμπελος : 393, 481, n. 61.
Ἀλκέτας, Ἄλκετος : 701. Ἀμύκλα : 522, n. 23.
Ἀλκήν : 71, 75, 80, n. 39. Ἀμύνανδρος, Ἀμυνᾶς : 312.
-αλκης, -αλκος : 46. Ἀμυνταροῦς : 213.
Ἀλκιάδας / -ης : 471, 544, 546, 548. Ἀμύντας : 703.
Ἀλκίβιος : 487. ἀμφάδιος, ἀμφαδόν : 396.
Ἀλκίδαμος / -δημος : 398. Ἀμφαινέτη : 701.
Ἀλκίδης : 541. Ἀμφαρίōν : 16, 687, 696.
Ἀλκιδώ : 398. Ἀμφηρίδης : 545.
Ἀλκιμίδης, ἄλκιμος : 688, n. 1. ἀμφίαλος : 281.
Ἄλκις : 487. Ἀμφιάναξ : 279.
Ἀλκμᾱ́ν / -μᾱ́ων / -μέων, Ἀλκμεωνίδης : 696. Ἀμφιάραος : 158.
ἄλλοθεν : 354. Ἀμφιγονίς, Ἀμφίγονος : 454.
ἀμφιδέξιος – Ἀντιγένης 719

ἀμφιδέξιος : 239, n. 44. Ἀνδρομένης : 110, 112.


Ἀμφιδώρα : 452. Ἀνδρύτας : 703.
Ἀμφιθέη : 528. Ἄνδρων : 487.
Ἀμφικλείδης : 545. ἄνεω : 270.
Ἀμφικράτεια : 519. ἀνήκεστος : 46.
Ἀμφικράτης : 542, n. 15. ἀνήρ : 35 et n.  2, 108, 281, n.  13, 291,
Ἀμφικτούων : 83. n. 58, 292.
Ἀμφιμεδώ : 458. Ἀνθᾶς : 645.
Ἀμφοτερῆς : 546. Ἀνθέμιλλα : 462, 463.
Ἀμφοτερίδας : 688, n. 1. ἄνθεμον : 109.
Ἀμφοτερίς : 459. Ἀνθεπῶλις : 109.
Ἀμφοτερός, ἀμφότερος, *Ἀμφοτεροδέ- Ἀνθεσίλαος : 121 ; Ἀνθεσίλας : 110.
ξιος : 238 et n.  44 (ἀμφοτεροδέξιος), ἀνθεσφόρος : 103.
240, 242, 243, n. 61, 252, 253, 700 et Ἀνθεύς : 85, 637, n. 20, 645.
688, n. 1. ἀνθέω : 109.
Ἀμώμητος : cf. Ἀμούμειτος. Ἀνθήν : 71, 74, 76, 80, n. 39.
Ἀναγυράσιοι, Ἀναγυροῦς : 495. -άνθης, -ανθος : 46, 403.
Ἄνακος, ἀνακής : 46. Ἀνθίππη, Ἄνθιππος : 292 et n. 61, 294.
ἀνακτάομαι : 48, 58. Ἀνθίς : 630, 643.
Ἀναξαγόρας : 560. ἀνθολογέω, ἀνθολογία : 103, n. 13.
Ἀνάξανδρος : 56, n. 68, 487. ἀνθονόμος : 103.
Ἀναξάνθης : 56, n. 68. ἄνθος : 101, 103, 109, 404, 643, 645.
Ἀναξᾶς : 312. ἀνθοφόρος : 103, n. 13.
Ἀναξέας : 56, n. 68, 487. Ἀνθράκιον : 384, 393, 405 (ἀνθράκιον).
Ἀναξῆς : 548. ἄνθραξ : 393, 405.
Ἀναξίκληα : 520. ἀνθρωπίσκος : 6.
Ἀναξίλαος : 698. Ἀνθύλη, Ἄνθυλλα, Ἀνθύλλιον, Ἀνθυλλίς :
Ἀναξίλας : 56, n. 68, 362. 404 et n. 147, 460, 464.
Ἀναξίλεως : 362, 462. Ἁνιοχίδας : 612.
Ἀνάξιλλα : 462, 463. Αννικερις (lib.) : 484.
Ἀνάξιλλος : 362, 364, 698. Ἀνουβᾶς : 320.
Ἀναξιπόλεα : 526. Ἀνουβίαινα, Ἀνουβίων : 212.
Ἀναξιπόλη : 517, 526, 531. Ἀνταγοράδης : 544.
Ἄναξις : 487. Ἄνταλλος : 293, 294.
(F)αναξίων : 614, 629. Ἀνταμένης : 348.
Ἄναξος : 56, n. 68, 59. Ἄντανδρος : 292, 295.
Ἀναξώι : 487. Ἀντέρως : 293, 294.
ἀνάσσω : 642. ἄντη : 348.
ἁνδάνω, ἁδήσω, ἥσατο : 54 ; ἁδεῖν : 117. Ἀντήνωρ, ἀντήνωρ : 11 et n. 34, 279, 282-
Ἀνδραγαθίδαι : 563. 283, 290-292 et notes, 295.
Ἀνδρέας, Ἀνδρίας : 487. ἀντί : 644.
Ἀνδρέων : 697. Ἀντίανδρος : 292, 295, n. 72.
Ἄνδριος : 380, n. 4. Ἀντίας : 629, 644.
Ἀνδροκκώ : 458. Ἀντίβιος : 294.
Ἀνδροκλῆς : 99, 487. Ἀντιγένεια : 42, 452.
Ἀνδρομάχα / -η : 137, 141, 158. Ἀντιγένης : 539.
720 Ἀντιγώ – Ἀργονιάς

Ἀντιγώ : 458. Ἀπελλᾶς : 169, 307, 310, 317, 319.


Ἀντιδάμας, Ἀντιδάμεια : 520. Ἀπελλέας : 89, 627, 646.
Ἀντίδημος : 294. Ἀπελλῆς : 89, 169, 548 et n.  31, 549 et
ἀντίδουλος : 291. n. 36, 628, 646.
Ἀντίδωρος, ἀντίδωρον, ἀντιδωρέομαι : Ἀπελλίδης : 169.
293-294. Ἀπελλίκων : 698.
Ἀντίθεος, ἀντίθεος : 285-287, 291 et n. 60. Ἀπέλλιν : 392.
Ἀντιλαιδαί : 563. Ἄπελλις : 169.
Ἀντίλαος : 560, 563, n. 12. Ἀπέλλιχος : 169, 610.
Ἀντιλᾶς : 294. Ἀπελλίων, Ἀπέλλων : 646.
Ἀντιλέων : 279, 283, 284, n. 23, 290, 292, Ἄπελος : 183, 185, 191.
294. Ἀπολλόδωρος, Ἀπολλωνίδης : 169.
Ἀντίλος : 39. Ἀπολλώνιος : 169.
Ἀντιμαχίδης : 565. Ἄπλουν : 584 et n. 22, 588, n. 35.
Ἀντίμαχος : 427, n. 31, 565. Ἀπολλαγόρης : 627.
ἀντίμισθος : 291. Ἀπολλᾶς : 307, 310, 627, 646 ; gén. -ᾶδος :
Ἀντίξενος : 294. 317 ; acc. Ἀπολλᾶν : 321.
Ἀντιοχίδης : 547. Ἀπολλόδωρος : 15, 307, 310, 475, n. 33,
Ἀντίοχος : 158. 531.
ἀντίπαις : 291. Ἀπολλοφάνης : 543, n. 19, 547, n. 29.
Ἀντίπαππος : 294. Ἀπολλοφάνιον : 460.
Ἀντιπᾶς : 311, 472, n. 17. Ἀπόλλων : 584, 646.
Ἀντιπατρίδης : 547, n. 30. Ἀπολλωνία : 436, 704 ; Ἀπολλωνίη : 529.
Ἀντίπατρος : 145, 158, 292-293, 295. Ἀπολλωνιάδης : 433.
Ἀντιφάτης : 547. Ἀπολλωνιάς : 423, 433, 436.
ἀντίφερνος : 291. Ἀπολλωνίδας / -ης : 549 et n. 36, 552, 612,
Ἀντίφημος : 294. 620.
Ἀντιφίλη, Ἀντίφιλος : 294 et n. 69. Ἀπολλώνιος : 158, 181, 475, n.  33, 592,
Ἀντίχαρμος : 294, n. 71. 704.
Ἀντίων : 629, 644. Ἀπολλωνίς : 703.
Ἄντοχος : 564. Ἀπολλωνίσκος : 274.
Ἄντυλλος : 348, 350, 353. Ἀπονίκας, Ἀπόνικος : 474.
Ἄντων : 348. Ἀπόντιος : 183.
Ἀντωνᾶς : 211. ἀπόπολις : 280.
Ἀντωνία : 704. Ἀππᾶς, gén. -ᾶτος : 319, n. 66.
Ἀντωνιάς : 209, 437. Ἄπφι(ο)ν, Ἀπφάριον : 401.
Ανυσαν, Ανυσσαν (lib.) : 490. Ἀπφίων : 272.
Ἀνυταία : 690, 695. Ἀράτα, Ἄρατος : 701.
Ἄξανδρoς : 56. Ἀραχνᾶς : 323, 473.
Ἀξίλεως : 362. Ἀργᾶς : 302.
Ἀξιóς, ἄξιος : 239, 243, n. 61. Ἀργεάδης : 433.
Ἀξίοχος : 56, n. 67. Ἀργεία : 519.
Ἀξίπολις : 56. ἄργεννος : 443.
Ἀξίωμα : 412. Ἀργέστης, ἀργεστής : 232.
Ἄξων : 56, 61. ἀργή : 443.
Ἀπελλαῖoς : 169. Ἀργονιάς : 419, 423, 441, 442.
ἀργός – Ἀρκαδία 721

ἀργός : 40, 443. Ἀρίστη : 158, 525.


Ἀργουνίς, Ἀργουνίων, *Ἀργύνα = Arguna, Ἀριστήας : 690, 696.
Ἀργύνειον, Ἀργύννιος, Ἀργυννίς, Ἀριστηίδης : 688, n. 1, 696.
Ἄργυννος : 441-443 et n. 82. Ἀριστήν : 71, 74, 76, 79.
ἀργυρέα : 518. Ἀριστήνετις : 701.
ἄργυρος, ἀργύριον, ἀργυρίδιον : 397, 414. Ἀριστῆς : 541 et n. 13, 552.
ἀργυρότοξος : 235, n. 34. Ἀριστίας : 167.
Ἀργώ : 40, 457. Ἀριστίκων : 698.
ἀρε/ι- : 687. Ἀρίστιμος : 440.
-άρετoς : 58. Ἀρίστιον : 410.
Ἀρετά(ϝ)ων : 41, n. 24. Ἀρίστιος : 181.
Ἀρετᾶς : 472. Ἀρίστιππος : 584.
ἀρετή : 41, n. 24, 401. Ἄριστις m. : 44, 181, 487, 629, 646.
Ἀρετιμιάς : 419, 439-441. Ἀριστίς f. : 630, 647.
Ἀρετοκλῆς : 440. Ἀρίστιχoς : 44, 610.
Ἀρετόφιλος : 440. Ἀριστίων : 79, 273, 487, 510, 617, 629,
Ἀρή : 529. 646.
ἀρήν : 49-50. Ἀριστιωνίδας / -ης : 689.
Ἄρης, gén.-ητος : 68, 89, 91-94. Ἀριστόβουλος : 348, 584.
Ἀρητάδης / -ας : 94. Ἀριστόδαμος / -δημος : 80, 348.
Ἀρθμιάδας : 471. Ἀριστοκίς : 459, 460.
Ἀριαράθης : 549, n. 36. Ἀριστόκλεα : 520.
Ἀρίδηλος : 337. Ἀριστοκλέας : 326.
Ἀρίμμας : 327, 473, 485, 698, n. 12. Ἀριστοκλείς : 459.
Ἀρίμναστος / -ηστος : 473, 687, 698, n. 12. Ἀριστοκλῆς : 80, 347, 383, n. 10.
Ἀρίστα : 328, 524. Ἀριστοκράτης : 584, 542.
Ἀρισταγόρας : 328. Ἀριστόμαχος : 414.
Ἀρισταγόρη : 517, 529, 530. Ἀριστομένης : 552.
Ἀρισταγορώ : 458. Ἀριστομηλίδας : 697.
Ἀρίσταια : 524. Ἄριστον : 631, 647.
Ἀρίσταινα : 464. ἄριστος : 401, 627, 646.
Ἀρισταῖος : 627, 646. Ἀριστουρόδη : 523.
Ἀρισταρχίς : 459. Ἀριστοφάνης : 6, 231, 347, 531.
Ἀρίσταρχος : 487. Ἀριστοφίλειος : 695.
Ἀριστᾶς / Ἀρίστας : 44, 328 et n. 97, 329, Ἀριστοφῶσ(σ)α : 511-512.
472, 627, 632, 646. Ἀριστρᾶς : 311 (Ἀρίστρατος), 627, 645.
Ἀριστέας : 44, 79, 487, 627, 646, 647. Ἀρίστυλλα : 464.
Ἀρίστεια : 454, 524, 630, 647, 668. Ἀρίστυλλος : 186 (Ἀριστύλος), 347-348,
Ἀριστείδας / -ίδης : 398, 548, n.  32, 549, 353.
688, n. 1. Ἀριστώ : 348, 458, 631, 647.
Ἀριστειδιανός : 689. Ἀρίστων : 44, 79, 193, 348, 475, n.  31,
Ἀριστειδώ : 398, 458. 617, 630, 646.
Ἀρίστεον : 631, 647. Ἀριστωνίδας : 704.
ἀριστερóς : 253 et n. 83. Ἀριστώνυμος : 475, n. 31.
Ἀριστεύς : 44, 85, 454, 637, n.  18, 646, Ἀριώτης : 702.
688, n. 1 (ἀριστεύς), 696. Ἀρκαδία : 138, 158, 694 (Ἀρκάδιον).
722 Ἀρκάς – Ἀσκλᾶς

Ἀρκάς : 426, 427, 429, 694. Ἀρτόντης : 495, cf. Ἀρταΰντης.


Ἀρκέσασα : 700. Ἀρτύλοχος, Ἄρτυλλος : 335, n. 7.
Ἀρκεσί-λαος, -λεως : 275 ; Ἀρκεσίλας : Ἀρτύμαχος, Ἀρτυμίων, Ἀρτύμων : 487.
473. Ἀρχαιώι : 631, 643 (ἀρχαιός).
Ἀρκέων : 697. Ἄρχανδρος : 46.
-άρκης : 235. Ἀρχέδαμος : 399, n. 121.
Ἀρκι-λεύς, -λεως, ἄρκιλος : 274-277. ἀρχεθέωρος : 111.
Ἀρκολέων : 22. ἀρχέκακος : 108.
Ἀρκοῦσσα : 511, 700. Ἄρχεκλος (?) : 178.
Ἀρκτεύς : 275. Ἀρχέλαος : 693.
ἄρκτος : 180, 275, 341. Ἀρχέλοχος : 108.
ἄρκτυλλος : 180 ; ἀρκτύλος : 184, 341 Ἀρχεπτόλεμος : 108.
(ἄρκυλλος). Ἀρχεύς : 85, 637, 644.
ἁρματοπηγός : 103, n. 16. Ἀρχέφυλος : 47.
Ἀρμένη : 242. Ἀρχηγέτης : 552.
Ἀρμενίδας, ἄρμενος : 699. Ἀρχήν : 71, 78, n. 33, 80, n. 39.
Ἀρναγόρας : 50, n. 48. Ἀρχιανακτίς : 459.
Ἄρναγος : 50. Ἀρχίας : 487, 644.
Ἀρναῖος, Ἀρναίειος, ἀρναία; Ἀρνείας : Ἀρχίδαμος : 399, n. 121, 487.
562. Ἀρχίκλεια : 519.
ἀρνέα, ἀρνειός, ἀρνεώς : 49, n.  46, 431 Ἄρχιλλα : 463.
(ἀρνηάς). Ἄρχιλλος : 362, 364, 693.
ἀρνεύω, ἀρνευτήρ : 49, n. 46. Ἀρχίλοχος : 362.
Ἄρνη, Ἀρνίας : 562. Ἀρχῖνος : 698.
Ἀρνίσκος : 37, 49. Ἀρχίς : 630, 645.
Ἀρξιλαΐδας : 362. Ἀρχιτέκτων : 284, n. 25.
Ἀρξίλας : 462. Ἀρχιωνίδας : 704.
Ἄρξιλλα : 462-463. ἀρχός : 132 ; -αρχος : 178.
Ἄρξιλλος : 362, 364. Ἀρχύλις m., Ἀρχυλίς f.  : 703.
Ἀρότης : 545. Ἄρχυλλος, Ἀρχύλλιον : 403.
Ἅρπαλος : 696. Ἀρχύτης : 232.
Ἅρπαξ, Ἅρπακος, ἅρπη : 45, n. 32. ἄρχω : 50, n.  49, 108, 399, n.  121, 403,
Ἀρποκρᾶς Ἀρποκρατίων : 320. 644-645.
Ἀρσίλοχος, Ἀρσάς, Ἀρσίας : 436. Ἀρχώ / -ώι : 362, 487, 631, 644.
Ἀρσιννώ : 458. Ἄρχων : 132, 362.
Ἀρταΰντη, Ἀρταΰντης : 495. Ἀσέας : 642.
Ἀρτεμᾶς : 627, 644. Ἀσία (top.) : 420.
Ἀρτεμείς : 691, 697. Ἀσία (anthrop.) : 432.
Ἀρτεμίδωρος : 454, 487. Ἀσιάς : 420, 424, 432.
Ἀρτέμιον : 392. Ἀσίας : 561.
Ἄρτεμις : 643, 644. Ἀσκλαῖος : 158.
Ἀρτεμισία / -η : 529, 566. Ἀσκλαπιάδας / -ης : 433, 639, n. 27.
Ἀρτεμώ : 631, 643. Ἀσκλαπιάς / -ηπιάς : 424, 433.
Ἀρτέμων : 487, 629, 644, 700. Ἀσκλαπίων : 616.
Ἀρτεμωνίς : 459, 477, 487. Ἀσκλάπων / -ήπων : 311, 630, 644.
Ἀρτιμιδωρίς : 454. Ἀσκλᾶς : 311 ; gén. -ᾶτος : 320.
Ἀσκ(λ)ατάριον – Βαοκιδεύς 723

Ἀσκ(λ)ατάριον, Ἀσκλατᾶς, Ἀσκλατίων : Αυλουπολις (thr.) : 202, n. 5.


701. αὐξάνω : 52.
Ἀσκληπᾶς : 311, 627, 644. Αὐξεντᾶς : 212, cf. Auxentius.
Ἀσκληπιοδώρα, Ἀσκληπιοδωράς : 437. Αὐξησιλεώ : 458.
Ἀσκληπιόδωρος : 311. Αὐξίας, Αὐξίων, Αὔξος : 52.
Ἀσκληπιός : 644. Αὐρηλιάς, Αὐρηλίων : 210-211.
Ἀσκώνδας : 584. Αὐτ-αρέτα, Αὐτ-άριον, Αὐτ-αρίστα : 460.
Ἀσπάνδας : 495, cf. v. p. Asāvanta-. Αὐτόβουλος : 565.
Ἀσπασίη : 529. Ἀυτοκράτα, Ἀυτοκράτεια : 522.
ἀσπίς, ἀσπίδιον : 397. Αὐτόνοος : 560.
Ἀσσαῖος : 561. Αὐτοψία : 449.
Ἄσσας : 562. αὐχήν : 69, n. 9.
Ἀσταγόρας : 584, 588, n. 35. ἀφανής : 231.
Ἀστεῖος : 182, 695. Ἀφενοκλῆς, Ἀφενώι : 487.
Ἀστερίδας : 700. Ἀφθόνειτος : 560.
ἀστέριον : 414. Ἀφροδισιάς : 424, 434.
Ἀστήρ : 11, 82. Ἀφροδίσιον : 460.
ἀστήρ : 414. Ἀφροδίτη : 458, 461.
Ἀστηρίδιον : 700. Ἀφρώ : 458, 460, 461 (Ἀφροῦς).
Ἀστίας : 642. Ἀχαιαί, Ἀχαιιάς, Ἀχαιιός : 420, 429, 431.
Ἀστίουν : 560. ἄχθος, ἀχθοφόρος : 103.
Ἄστιππος : 584, 588, n. 35. Ἀχιλ(λ)ής, Ἀχιλς, Ἀχιλλεύς : 87, 158,
Ἀστόβουλος : 584, 588. 177, 232.
Ἀστοκλέας : 561, 565, n. 22. Ἀψευδής : 231.
Ἀστοκράτεις : 584, 588, n. 35. Ἀψίθυλλος : 348.
ἄστυ : 480, 642.
Ἀστυκράτης : 473, n. 23, 552. Βάβης : 271-272.
Ἀστύλαος, Ἄστυλλος, Ἀστύλος : 180, 480. Βαβίων : 272.
Ἀστύμαχος : 480. Βαβύλαος, Βαβύλος : 275.
Ἀστυμέλοισα : 689, n. 5. Βαβυλών : 231.
Ἀστυφῶσσα : 511. Βαδύλα : 79.
ἀσφοδελός, ἀσφόδελος : 261. Βαθύδικος : 349.
Ἀταλομήδα : 523. Βαθυκλῆς : 347, 486.
Ἀτρεστίδας : 561, 564. Βαθυλλῖνος : 703.
Ἀττα : 327. Βάθυλλος : 175, 187, 347, 349-350, 479.
ἀτταγᾶς : 309. βαθύς : 349.
Ἀτταλίων : 204. Βαιηίας : 690.
Ἄτταλος : 158, 204, 696. Βακαλ (lib.) : 484.
Ἀττᾶς, gén. -ᾶτος : 319, n. 67. Βάκχις : 476.
Ἄτ(τ)ης : 271. Βακχιώ : 692.
Ἀττικίων : 193, 273. βάκχος : 144.
Ἀττικωνικοί : 193. Βακχυλᾶς, Βακχύλος : 315.
Ἀττινᾶς / Ἀττίνας : 327. Βάκχων : 616.
Αυγαντος (lib.) : 490. Βαλεριάς (lat.) : 211.
Αὖγις, Αὐγέας / -είας, αὐγή : 38, 644. Βαλλίων : 272.
Αὐλαί, αὐλή : 248, 252. Βαοκιδεύς : 697.
724 Βάρβακος – Βουμάγιρος

Βάρβακος, Βάρβαξ : 49, n. 47. βιός : 262, n. 109.


Βαρβατίων : 210. Βιόττεις, Βίοττος, Βιούτη : 605-606.
Βαρθυβας (lib.) : 476. Βιταλίων (lat.) : 210.
βάρος : 235. Βιτᾶς : 301 ; gén. -ᾶδος : 301 ; gén. -ᾶτος :
βαρυποτμώτατος : 360. 308.
Βαρωνᾶς : 315. Βιτιάς, Βιτίας : 423, 424, 435 et n. 53.
Βᾶς : 314. Βιττᾶς : 302, 303, 305.
Βασιλείδης : 549. Βιττίς : 435.
Βασίλιννα : 463. -βίων : 21.
Βασίλισσα : 700. βλάβη, βλάπτω : 257.
βασίλισσα : 690. Βλέπυς : 453.
Βασιλοκρέων : 487. Βλεποντίδας, βλέπω : 688 et n. 1.
Βασιλώ : 461 (Βασιλοῦς), 487. Βλύας : 328.
Βασσίων : 210. Βοᾶς, dat. -ᾶτι : 563.
Βαστᾶς : 269. Βοήγια : 50, 61.
Βασώ : 487. βοηγοί : 61.
Βατᾶς : 324 ; gén. -ᾶδος : 314. Βοιβᾶς : 302-304.
Βατιάς, Βατίς, Βατιώ : 435 ; Βατίων, Βοΐδιον, βοΐδιον : 395, n.  96, 396, 409,
βάτιον : 273. 460.
Βάτταρος : 400, 696 ; Βαττάρακος, βατ- Βοικήν : 71, 74.
τάρα, βατταρίζω : 49, n. 47. Βοιλήν : 74.
Βαττᾶς : 322 ; βάττος : 401. Βόϊλλα : 74, 463.
Βαυκίς, βαυκίδες : 234. Βόιννα : 463.
βαυκός : 697. Βοΐσκιον : 386.
Βέβιος : 215. Βοιώτιος : 181.
Βειθυς, Β(ε)ίθων (thr.) : 205, 216, n. 56. Βονιφᾶς (lat.) : 212.
*Βενδᾶς : cf. Mενδᾶς. Βοονγίων (thr.) : 199.
Βενδιδώρα : 216. Βōϙᾶς : 324.
Βενδίδωρος : 205, 214, 216 et n. 58, 217. Βορδῖνος : 23, n. 77.
Βενδιζητα (thr.) : 217. Βορέας : 304.
Βένδιον : 206, 214, 215, n. 56, 217. Βορεάς : 430, 434.
Βενδις (thr.) : 217. Βορκάς, Βορκεας (sém.), Βορκιος (sém.) :
Βενδιφάνης : 205, 216. 439 et n. 67.
Βενδοῦς : 207, 214, 217. Βορρᾶς : 302, 304.
Βενζης (thr.) : 217. Βοσπόριχος : 217.
Βενουστίων : 211, cf. lat. Venustio. Βόστρυχος : 458.
Βερενίκη : 23, n. 77. Βοστρώ : 458.
Βερενικίδης : 204. Βουβάλιον : 383, 460.
Βηβιλεύς : 275 (βηβήν), 276, 698. Βούδιον : 389 ; βούδιον : 396.
Βησαρίων, Βησᾶς, Βησίων, Βησοῦς : 213 ; Βουκάτιος : 608.
Βησσή : 248. Βουκάττει / -ες / -ης : 608, 622.
Βίας : 308, n. 32, 510. Βουκόλος : 269, 324.
βίβλος, βιβλίον : 414. Βουλα-κράτεια, -κράτη : 521.
Βιηγχις, Βιηγχίων (égypt.) : 213. Βουλεπαρίδας : 563.
Βιθαρίων : 203. βούλευμα, βουλευμάτιον : 415.
Βιθυς (thr.) : 204, 214, 216. Βουμάγιρος, Βουμᾶς : 324.
Βοῦς – Γναθυλλίς 725

Βοῦς : 11 ; βοῦς : 61, 68, 89, 90, 395, 396, Γελῷος : 182.
409. Γεμελλίων (lat.) : 210-211.
Βούταλος : 372, n. 105. Γεμινίων (lat.) : 211.
Βουτᾶς, Βούτης, βούτης : 324-325. γενεάρχης : 107, n. 24.
Βραχᾶς ou Βράχας : 304, 313, n. 45, 627, Γενέλεως : 109-110.
642. Γενοκλῆς : 104, 110.
Βραχύλλει(ς) / -ούλλει(ς) : 606-607, 620. γένος : 101, 109, 236, 587 ; -γένης : 46,
Βραχυλλίδας : 689. 177, 231.
Βράχυλλος : 192, 347, 349, 350. Γερμανοῦς (lat.) : 207.
βραχύς : 192, 349, 642. Γεροντίδας / -ης : 688, n. 1, 700.
Βρεντης ou Bρέντης : 541, n. 13. Γρυϝονς : 87.
βρέφος : 236, 400. Γέρων : 693.
Βρῆσα, Βρῖσα, Βρισεύς, Βρισηίς : 430 et γή, γήδιον : 396.
n. 41, 459 ; Βρησάδας : 694. Γηθιμένης : 121.
βροκός, βρόκων : 439 et n. 67. γῆρυς : 453.
Βρομιάς : 424, 434 ; Βρομίδας : 434. Γιλδαν, Γιλδων (lib.) : 485 et n. 80.
βροτός : 59. Γιλλίων : 272.
Βρόχει(ς) : 607 ; Βρόχιλλα : 698. Γλαυκέτης : 689, n. 2.
Βρύανθος : 627. Γλαυκίας : 644.
Βρύας : 627, 642 (βρύω). Γλαυκίδας / -ης, Γλαυκιδώ : 398 et n. 112.
Βύβαξ : 692. Γλαύκιννα : 463.
Βύζης, gén. -ζᾶ ? : 473, n. 17. Γλαύκιππος : 82.
Βυλία (masc.) : 611, n. 42. Γλαῦκον : 631, 643.
Βύττακος, βυσσακός, βυσσός, βύττος : 45. Γλαῦκος, γλαυκός : 3, n. 10, 137, 159, 585,
Βωκᾶς : cf. Βōϙᾶς. 629, 643.
βῶς, βῶν : 90. Γλαφορίδας : 442.
Βώτακος : 45. Γλάφυρον : 412.
βωτιάνειρα : 51, n. 51. Γλευκίτας : 701.
βωτίον : 45. Γλισᾶς : 302.
Βωτύλος : 352, 366. γλίσχρος, γλίσχρων : 231.
Γλυκανθίς, Γλύκανθος : 454.
γαβάθα : 268. Γλυκαρίων : 273, n. 14.
Γάϊος : 208 ; Γαιᾶς : 211. Γλυκεῖα : 695.
γαΐτα (gr. mod.) : 268. Γλυκέριον : 385-386.
γαίω : 52, n. 55. Γλύκιννα : 463 ; Γλυκιννίς : 459 ; Γλυ-
Γαιωνᾶς : 209. κιννώ : 458.
Γαλέστας : 472, n. 15. Γλύκυλλα : 464.
γάνυμαι : 52. γλυκύς : 192 ; γλυκύτερος : 355, n.  63,
Γαρυϝονς : 87, cf. Γρυoνς. 355, n. 65.
γαστήρ : 192, 230-231. Γλύκων : 192.
Γάστρων : 37, 192 ; γάστρων : 37, 230, Γνάθαινα : 386, 449, 464, 695.
n. 9, 231. Γναθαίνιον : 386, 387, 695.
Γαυλίτης, γαυλός, γαῦλος : 268-269. Γνάθιος : 629, 644 ; Γνάθιον : 392.
γαύρηξ, γαῦρος : 45. Γνάθις : 182, 629, 644.
Γαψίας : 644 ; Γάψων : 629, 644. γνάθος : 192, 392, 644.
γείτων : 609, 616. Γναθυλλίς : 703.
726 Γνάθων – Δεινομένης

Γνάθων : 182, 192, 449, 695 (Γνα- Δαμαγόρας, Δαμαγορίς : 454.


θωνάριον). Δαμαρέτα : 401, 638-639.
Γογγύλος : 357, n. 71 ; γογγύλος : 367. Δαμ-άριον / -ιν, Δαμ-αρίστα : 401.
Γοθθίδας : 618. Δαμᾶς ou Δάμας : 138, 144, 161, 632, 646.
Γονατᾶς : 302. Δαμασήν : 70, 71, 74, 77, 80, n. 39, 95.
Γοργάς : 423. Δαμασίλας : 59.
Γοργήν : 71, 79, 80. Δαμάσιον : 460.
Γοργίας : 613, 644 ; Γοργίδας : 612. δαμασίφρων, δαμασίχθων : 59.
Γοργίλος : 362. Δαμάτριχος : 610.
Γόργιππος : 362. Δαμέας : 627, 632, 646.
Γοργίων : 644. -δάμεια : 523, 525.
Γόργος, γοργός : 81, 362, 643. Δάμειον : 695.
Γοργοσθένης : 362. Δάμεον, Δάμιον, Δαμίων : 631, 646.
Γοργυθίων : 690, 702. Δαμήν : 71, 74, 76, 80, n.  39, 628, 646,
Γόργυθος, -ουθος : 20, 702. 692.
Γόργυψ : 19. Δαμῆς : 15.
Γοργώ / -ώι : 232, 362, 631, 643. Δᾶμις : 487.
Γόργων : 362. Δάμνιππος, Δαμνᾶς : 311.
Γραικηίων : 573. Δαμοθάλης : 608.
Γραικός : 153, 159. Δαμο-κράτεα (?) / -εια, -κράτα : 520, 522.
Γραίκουλος : 171. Δαμοκρίτα : 701.
γραφίον : 414. Δαμόλκης : 549.
Γυμνάσιον : 460 ; γυμνάς : 426. -δαμος / -δημος : 119-120, 520.
γυναικών : 231. Δαμοτέλης : 487.
Γυπᾶς : 323. Δαμοτίμα, Δαμοτίς : 441, n. 72.
Γύρακος, γυρός : 45. Δαμούνδας : 563.
Γυρτιάδης, Γυρτιάς, Γύρτων, Γυρτώνη : Δαμύλος : 629, 646.
433. Δαμώ : 487, 631, 646.
Δάμων : 15, 140, 161, 193, 487, 617, 630,
Δαβίδ (sém.) : 228. 646, 700.
Δάδιον : 210. Δανάη, Δαναίδες, Δαναός : 430, n. 40.
Δαζείων : 206, n. 17. Δάσυος : 702 ; Δάσων, δασύς : 192.
Δάζιμος : 172. Δασχάς (?), dat. Δασχαι : 439.
Δαζίσκος : 204, n. 12, 205. Δάτυννος : 703.
Δαζος (thr.) : 205-206. Δαυχνᾶς, Δαφνᾶς : 324.
Δαίμων : 560. δάφνη, δαφνών : 231 et n. 13.
Δαίς : 39, n. 8, 44 ; δαίς : 44, 615. *Δεβαβενδις : 217.
Δαίταρχoς, Δαίτας / -ης, Δαῖτις, Δαίτιχoς, Δεγιστίων : 203, 204.
Δαίτων : 44 ; Δαιτώνδας : 615. δέελος : 184.
δακνᾶς : 301-303, 316. Δεικράτος : 502.
δάκτυλος : 340. δειλακρίων : 273.
Δαλᾶς : 314 ; gén. -ᾶτος : 318. Δεινάκων : 696.
δαλής : 271. Δεινίας : 645.
Δαλιάδας : 433. Δείνιος : 181.
Δαλματίη : 529. Δεῖνις : 487, 629, 645.
-δάμα / -η : 523. Δεινομένης : 487.
δεινός – Δινταρίων 727

δεινός : 643. Δημάλκης : 542.


Δείνων : 630, 645. Δημάρατος : 311.
δεκάς : 421. Δημαρέτη, Δημάριον / -ιν, Δημαρίστη : 401.
Δεκμίων : 211. Δημαροῦς : 213.
δέκτης : 268. Δημάρχος : 311.
Δελφινᾶς : 310. Δημᾶς : 304, 306, 311, 315 ; gén.  -ᾶτος :
Δελφίνιος : 699. 320.
δέμω : 105. Δημέας : 304, 646.
δενδρήεις : 508. Δημήτηρ : 7, 458.
Δενδρώ : 458. Δημητριάς, Δημητριάδης : 433.
Δέντων : 204. Δημητροῦς : 212.
Δεξαμεναί, Δεξαμένη, Δεξαμενός : 241- Δημίδιον : 9, 381.
242 ; δεξαμενή : 242, 247, 251, 258. Δημοκλῆς : 351.
Δεξέας : 627, 646. Δημοκράτης : 351.
Δεξεύς : 35, 52-53, 637, 646. Δημοκρίνης : 542.
Δεξιάδας / -ης : 434, 541, n. 13. δῆμος / δᾶμος : 643, 646.
Δεξίας : 35, 52, 637, 646. Δημοσθένης : 99, 231, 315, 542.
Δεξιάς : 424, 434. Δημοχάρης : 547.
Δεξίδαμος : 487. Δημύλος : 315 (Δημυλᾶς), 351, 354
ΔέξιFυς : 637. (Δήμυλλος).
Δεξικράτης : 547. Δημώ : 351 (Δήμων), 631, 643.
Δεξίλεως, Δέξιλλα : 462 ; Δέξιλλος : 646. Δημωφέλης : 547.
Δεξίμαχoς : 52. Δηώ : 7, 458.
δεξίμηλoς : 52. Δί(ϝ)ης : 93, cf. Δίης.
Δέξιος : 629, 642 ; Δέξις : 35, 487. Διαβούλιον : 407.
δεξιός, δεξιτερóς : 253. Διάδηλος : 337.
Δεξίχαρις, Δεξώ : 35, 52. Διᾶς : 310.
Δέρκας : 627, 646. Διδαροῦς : 213.
Δέρκετος : 628. Διδᾶς : 320.
Δέρκιππος : 351. Διδασκαλώνδας : 584.
δέρκομαι : 646. Διεύς : 89, n. 76.
Δερκυλίδης : 360. *διϝ- : 286, n. 37.
Δερκύλος : 343, 351, 629, 646. Δίϝεις : 89.
Δέρκων : 351. Διζαλας (thr.) : 216, n. 57.
δεσπότης : 539. Διζαπολις (thr.) : 202, n. 5.
Δευκαλίων, Δεύκαλος, δευκής, -δεύκης : *Διζαρίων : 203, 204, 213-214.
40 et n. 15. Διζας (thr.) : 213-214.
δέχoμαι : 35, 52, 646 ; δεξάμενος : 238. Διζασσκος (thr.) : 205, 214.
Δηιλέων : 284, n. 23. Δίη : 528, 531.
Δηλία : 430, 432, 436. Δίης (mieux que Διῆς) : 88-89, 271, 531 ;
Δηλιάς : 423, 428, 432, 433, 436, 443, gén.  Διέος, Διείους, Διέους, Διήους,
692. Δίους : 89.
Δηλόπτιχος : 215, 217 (Δηλόπτης). Δικαῖος : 564 ; Δικαίη : 529, 695.
δῆλος : 184 ; δηλότερος : 354. Διλοπολις (thr.) : 202, n. 5.
Δημαίνετος : 311. Δινία : 630, 643.
Δημακίδιον : 9, 381. Δινταρίων (thr.) : 203-204, 213.
728 Διντας – Δωριάς

Διντας (thr.) : 213. Δομνίων : 210.


Διογᾶς : 205, 312, 327, 625. Δομνοῦς : 207, 211.
Διογείτων : 607, n.  30 ; Διογίτων : 616 ; Δόνακος, Δόναξ, δόναξ : 11, 45 et n. 32.
Διογειτώνδας : 584, 620 ; Διογιτών- Δόξα, Δοξάς : 437.
δας : 614. Δορικλείδης, Δορίμαχος : 362 ; Δόριλλος :
Διογένης : 231, 236, 312, 320, 585, 625 ; 362, 364.
διογενής : 231, 236, 585. Δορκάς : 423, 425, 432, 630, 643 ; δορ-
Διογενιανά : 697. κάς : 421, 643.
Διογενίδας : 586. Δορκέας : 646.
Διόγνητος, Δίογνις : 487. Δορκείδας, δόρξ : 613.
Διοδώρα, Διόδωρος : 454. Δορκεύς : 275.
Διοκκώ : 458. Δορκίλλει(ς) : 698.
Διοκλῆς : 179. Δόρκις, Δορκύλος, Δόρκων : 629-630,
Διοκλίδας : 594. 646.
Δίοκλος : 179. Δορύλαος : 362.
Διονέστας : 693. Δορυπολις (thr.) : 202, n. 5.
Δίοννος : 443. Δόρυσσος, δορυσσόος : 501.
Διονῦς : 306. Δουλαρίων : 203, 204, 213-214 (Δουλης,
Διονυσᾶς : 310 ; gén. -ᾶδος : 317. thr.), 216, n. 56.
Διονυσιάς : 424, 433 (Διονυσιάδας). δουρικλειτός, δουρικλυτός : 112, n. 36.
Διονύσιον : 392 ; Διονύσιος : 138, 161  > Δοῦρις : 162.
Διoνύσις : 181. Δουσάριος : 216, n. 57.
Διονυσόδωρος : 310. Δράκαλος : 337.
δῖος : 642. Δρακοντομένης, Δρακᾶς : 312.
Διὸς κοῦροι : 144. Δράκυλλος : 343, 349, 703.
Διοσκουριάς : 434. Δράκων : 204, 349, 696.
Διοσκουρίδης : 545, 546, 547, n. 30, 550. Δρίμακος : 36, 45.
διοτρεφής : 236. Δριμύλος : 36 ; δριμύλος : 340 ; δριμύς :
Διοφάνης : 138, 161. 36, 45.
δίς : 16, 560. Δριμώ, Δρίμων : 36.
Δισζαρίων : 213-214. Δρομεύς, Δρομέας : 38, n. 6.
Δίυλλος : 348, 353. Δρόμων : 700.
Δίφιλος : 161, 348. Δρούπακος : 45, cf. Δρώπακος.
Διώδης : 693. Δρουπύλος : 83, cf. Δρωπυλίων.
Δίων : 348, 630, 642. Δρύμς : 606, n. 28.
Διωνίχα : 611. Δρύων : 11.
Διωνυσίχα : 464. Δρώπακος : 45.
Διωνυτᾶς, gén. -ᾶτι : 319, n. 69. Δρωπίδας : 82, n. 50, 583.
δοκιμάζω, δοκιμή, δόκιμος : 240. **Δρωπόνδας : 583.
δολιχεγχής : 235. Δρωπούλος : 83.
Δολίχη, δολιχός : 255. Δρωπυλίων : 360, 366.
Δομεστικός (lat.) : 205 ; Δομέστιχος : 30, δρώψ : 45, 83, 366.
209, 609, 621. Δυναμένη : 242.
Δομετιανοί (lat.) : 572. δυσμενής : 235.
Δομιτιάς (lat.) : 211. Δωρᾶς : 627, 645.
Δομναροῦς : 207. Δωριάς : 423.
Δωριεύς – Ἔνδημος 729

Δωριεύς : 637, n. 20, 645. Ἑκτορίδης : 544, 688, n. 1 (Ἕκτωρ), 700
Δῶρις m. : 162. (ἕκτωρ).
Δωρίς f. : 459, 630, 643. Ἐκφαντίδας : 702.
Δωρίων : 487, 645. Ἑλαειλῖνος : 189.
Δωροθέα : 529, 531. ἐλασᾶς : 309.
Δωρόθεος : 22, n. 71, 487. ἐλαύνω : 50, 106.
δῶρον : 293, 643, 645. Ἐλάφιον : 393, 408-409 (ἐλάφιον).
Δῶρος : 575. ἔλδομαι : 503.
Δωσᾶς : 472. ἐλεᾶς : 309.
Δωτώ : 51, n. 51, 458. Ἑλεία : 519.
*Ἐλένα : 159.
ἔασσα : 511. Ἐλευθεραί : 248 (ἐλεύθερος) ; Ἐλευθε-
ἐάω : 258, n. 93. ριώ : 458.
Ἐγκόλπιος : 287 (ἐγκόλπιος), 294. Ἐλευσίνιος : 699.
ἐγχειρία : 105. Ἐλεφήνωρ, ἐλεφαίρω : 108.
Ἐγχειρίδιον : 395-396 (ἐγχειρίδιον, ἐγχει- ἐλθέμεν : 355.
ρίδιος), 407. Ελικαν (lib.) : 490.
ἐγχεσίμωροι : 36. Ἑλικωνιάδες, Ἑλικωνίδες : 431.
ἐγχέσπαλος : 36, 101. ἙλισFάσιοι : 494.
ἔγχος : 105, 235. ἑλκεχίτων : 121.
ἐέλδομαι : 503. ἑλκοποιός, ἕλκος : 103.
ἐέρση : 259, 503. Ἑλλάδιον : 393.
Ἑϝόρτιχος : 642. Ἕλλαν / -ην : 69.
Ἐθελήν : 71, 80, n. 39. Ἑλλάς : 420, n.  2 (Ἕλληνες), 423, 424,
εἱαμενή : 238, 242, 244, 247, 258-262. 428, 432.
Εἰδεσίλεως : 110. Ἐλλιμένιος : 288, 296 (ἐλλιμένιος).
εἰδεχθής : 107. ἐλλόγιμος, ἔλλογος : 286, n. 38.
Εἰδοθέα / -η : 458, 528. Ἐλπήνωρ : 108.
Εἰδόκριτος : 104. Ἐλπιδία, Ἐλπιδιάς : 437.
Εἰδομενή ou Εἰδομένη : 241, 567. Ἐλπιδιανός : 697.
Εἰδομένης : 104, 542. Ἐλπιδώ : 397, 697.
Εἰδώ : 458. Ἐλπίς, Ἔλπις, ἐλπίς : 234, 397-398.
Εἴελος : 185. ἔλπομαι : 108, 398.
(ε)ἰκάς : 694. ἐμβάς : 421.
εἵνεκα : 57-58. Ἐμμενίδης : 552.
Εἱρακλείδας : 569, n. 30. Ἐμπέδδει : 606, 608 ; Ἐμπεδ-ίων, -ιών-
εἰροκόμος, εἰροπόκος : 102. δας : 614-616.
εἶρος : 102. Ἐμπεδοκράτη : 519.
εἱρῳάς : 431. Ἔμπεδος : 286 ; ἔμπεδος : 287, 614.
Εἱρωίλλει : 607. Ἐμπεδοτίμη, Ἐμπεδοττίς : 441, n. 72.
Εἰρώνιχος : 704. ἐμπορίδια : 442.
ἕκασσα : 508, 511. Ἐμπόριον : 389.
Ἑκαταία / -η : 520, 524. ἐνάλειπτος : 51, n. 54.
Ἑκατόδωρος, Ἑκατᾶς : 310. Ἐνάς, Ἐνᾶς : 270.
ἔκδηλος : 280. Ἔνδηλος : 337.
Ἐκδίκιος : 289 ; ἔκδικος : 288-289, n. 51. Ἔνδημος : 286, 296 ; ἐνδήμιος : 287.
730 Ἔνδιος – Ἐρύϙωντος

Ἔνδιος : 286, n. 37 ; ἔνδιος : ibid. et 285, ἔπος, ἐποποιός : 103.


n. 29. ἕπω : 41.
ἐνεγκεῖν : 56. Ἐπώνυμος : 286 ; ἐπώνυμος : ibid. et 4.
ἕνεκα : 57, 58, 61. Ἐπωπεύς : 86.
Ἔνη, ἐνεός / ἐννεός : 270. Ἐρασικλῆς, Ἔρασις : 488.
Ἐνθαδίων, ἐνθάδε : 694. Ἐρατοσθένης, Ἐράτυλλος : 348.
ἔνθεος : 280, n. 3. Ἐρατώ : 346 ; Ἐράτων : 348, 617.
ἐνθύμιος : 282. Ἔρεβος : 101 ; Ἐρεβοδιφάω : 103.
Ἐνλόγιμος : 286, n. 38. Ἐρέδαμος : 116-117 (ἔρετο), 687 (ἐρε/ι-).
Ἐννέων, Ἔννης, Ἔννις, Ἐννίων : 270. Ἐρεχθς : 88.
Ἔννυχος : 288 (ἔννυχος, ἐννύχιος), 296. Ἐρίγυιος : 687.
ἔντεα : 102, n. 10, 105. Ἔρις : 159.
Ἔντιμος, ἔντιμος : 288. ἐρισθενής : 231.
Ἐξακέστας : 487 ; Ἐξάκεστος : 46. Ἐριταδώ, Ἐρίτιμος : 694.
Ἐξάκης, Ἔξακος : 46 ; Ἐξακίδας : 695 ; Ἔριφος : 276.
Ἔξακις, Ἐξάκων : 487. ἕρκος, ἑρκοθηρικός : 103.
Ἐξώπιος : 286 ; ἐξώπιος : 287, 296. Ἑρμάδιον, Ἑρμαδίων : 273, 694.
ἔοικα : 503. Ἑρμαίας : 638.
Εὀκτιμενός, Εὄκτιτος : 15. † Ἑρμαιόνδας : cf. Ἑρμαιώνδας.
ἑορτά / -ή : 503, 642. Ἑρμαῖος : 627, 645.
Ἐπάγαθος, Ἐπαγώ : 487. Ἑρμαιώνδας : 583, 614.
ἔπαθον : 252. Ἑρμανουβᾶς : 320.
Ἐπαμεινώνδας / Ἐπαμινώνδας : 581, 584, Ἑρμᾶς : 302, 303, 645 ; gén. -ᾶτος : 319,
614-615, 617 (Ἐπάμων), 622. n. 68.
ἐπεσβόλος : 102, 106, 114. Ἑρμείας : 638, 691.
Ἐπηράτη : 701. Ἑρμίας : 645.
ἐπήρετμος : 283. Ἕρμιον : 392.
Ἐπιγοῦς, Ἐπιγώ : 461. Ἑρμοκράτεια : 519.
Ἐπίδημος : 288 (ἐπιδήμιος, ἐπίδη / αμος), Ἑρμοκράτης : 539, n. 9.
296. Ἑρμοκρέων : 488.
ἐπιδιφριάς, ἐπιδίφριος : 420, n. 2. Ἑρμόννωφρις : 218, n. 64.
Ἐπιζεφύριοι : 289. Ἕρμων : 488, 616, 630, 645, 700.
ἐπιθαλασσίδιος / -ττίδιος : 282 (ἐπιθαλάτ- Ἐροττίς, Ἐροττίχα : 611, 618.
τιος), 396. Ἑρπέας : 642.
Ἐπίκουρος : 7. ἑρπήν, ἑρπήνη, ἑρπηνώδης, ἕρπης : 93.
Ἐπικράτης : 542. Ἐρπίς : 630, 643.
Ἐπίλυκος : 279. ἔρπος : 180.
Ἐπιμελεάς, Ἐπιμέλεια : 437. ἑρπύζω : 642, 643.
Ἐπιπολαί, ἐπιπολή, ἐπιπολῆς : 248. Ἑρπυλλίδης : 703.
ἐπίσκοπος : 280. ἔρπυλλος : 180, 346, n. 44.
Ἐπιστάσιχος : 609. ἕρπω : 615, 642-643.
Ἐπιφανέα (?), Ἐπιφανέας : 520. Ἑρπώνδας : 615.
ἐπιχθόνιος : 280. Ἐρραίνας : 35.
ἐπίχρυσος : 279, 280. ἕρση : 259, 503.
ἕπομαι : 41. ἐρυθρότερος / -ώτερος : 361.
Ἐπόνασος, ἐπόνασις : 59. Ἐρύϙωντος : 693.
Ἐρχέλαος – Ἔφιππος 731

Ἐρχέλαος (ἔρχομαι) : 116, 118 et n. 46. Εὐκρατῖνος : 690.


Ἐρχομενός : 241, et cf. Ὀρχομενός. Εὐκτείμων / -ουν : 616, 700 (εὐκτήμων).
Ἐρωτάριν, Ἐρώτι(ο)ν : 401. Εὐμάρης, Εὐμάρων : 40 et 616.
Ἐσθλάδας : 694. Εὐμενής : 231.
ἔσται < ἔσ(ε)ται : 584. Εὐμενίδας : 563, 586 (Εὐμένδας).
ἐσχάρα, ἐσχάριον : 400. Εὐμένιος : 181.
ἑταῖρος : 283. Εὔμορφος : 392.
ἔταλον : 341. Εὐναί, εὐνή : 247, 252.
Ἐτέαρχος, Ἐτεᾶς, Ἐτεϝάνωρ, Ἐτεϝᾶς ou Εὐνοίη : 529.
Ἐτέϝας, Ἐτεϝοκλέϝης : 326. Εὐνόμα, Εὐνομίς : 440.
Ἐτέοκλος : 336, n. 10. Εὐνομίη : 529.
ἑτέρωθεν : 354. Εὐοπίδας, Εὐόπτιος, εὔοπτος : 471-472.
Ἐτεωνεύς : 704. Εὐπάτρα : 436 (Εὐπάς), 437 (Εὐπατράς).
Εὐαγοντίδας : 700. Εὔπολις : 388.
Εὐαγόρατις : 701. Εὐπορία : 137, 159.
Εὐαγόρη : 529. Εὐριπίδης : 167, 381.
Εὐαγόρης : 536, 537, 545, 556. Εὐριπίδιoν : 9, 167, 381-382.
Εὔαισϙρος : 22. Εὐρύας : 702.
Εὐαιτέλης : 547. Εὐρυβωτάδας : 613-614.
Εὐάλκης, Εὔαλκος : 46. Εὐρυ-μάκης, Εὐρύ-μαχος : 178.
Εὐαλκίδης : 542, n. 14, 544, 546. Εὐρυμεναί : 241.
Εὐάνδρα : 159. Εὐρυφάεσσα, Εὐρυφῶν : 512.
Εὐαξίς, Εὔαξος : 61. Εὐσύης : 106.
εὐαπάτητος : 268. Εὔτροπος : 392.
Εὐβουλίδης : 547, n. 30. Εὐτυχᾶς : 308 ; gén. -ᾶνος : 321 ; Εὔτυχος :
Εὐγᾶς : 313, n. 45. 308 ; Εὐτυχοῦς : 461.
Εὐγείτιχος : 609, 622. Εὔφαμος, Εὐφαμίδας : 612, 613.
Εὐγένης : 42, 120 (Εὐγένεια, εὐγενής), Εὐφίλητος : 701.
284, n. 25, 313, n. 45. Εὐφράδης : 574.
Εὐγίτων, Εὐγιτονίδας : 611-613. Εὐφραντίδας / -ης : 702.
Εὐδάμιχος : 609. Εὐφράνωρ : 311, 488 ; Εὐφρᾶς : 311, 472,
Εὐδίακος, εὐδία : 45, n. 32. 566 ; gén. -ᾶτος : 319, n. 64, 472.
Εὔθοινος : 362. Εὖφρις : 488.
Εὐθυκλῆς : 543. Εὐφρόνιλλα : 463.
Εὔθυλλα : 464. Εὐφρόνιος : 311.
Εὐθύμιχος : 610, 618, 699. Εὐφρώι : 631, 643.
Εὐθυνίδας : 612. Εὔφρων : 630, 642 (εὔφρων).
Εὐίππιον : 476, n. 38. Εὐχέλαος : 119.
Εὐκλείδας / -ης : 471, 552. Εὐχήνωρ : 108 (εὔχομαι).
Εὐκλῆς : 137, 159, 178-179. † Ἔφαλος : 288, n. 47, cf. Κέφαλος.
Εὐκλίδας : 594. Ἐφέστιος, ἐφέστιος : 287.
Εὖκλος : 179. Ἔφηβος, ἔφηβος : 287.
Εὐκλοῦς : 461. Ἐφήμερος, ἐφήμερος, ἐφημέριος : 282,
Εὔκομος : 362. 285, 287, 296.
Εὐκράτεια : 519. Ἔφιππος, ἔφιππος, ἐφίππ-ιον, ἐφίππ-ιον,
Εὐκράτης : 543, n. 19, 547. -ιος : 286-287, 288, n. 45, 296.
732 ἐχέγγυον – Ἡγητορίδης

ἐχέγγυον : 108. Ζευξίμαχος : 488.


ἐχέθυμος : 108, 113, 121. Ζεύξιππος : 60.
Ἐχεκλέης : 100, 108. Ζεῦξις : 488-489 ; Ζευξώ : 488, 631, 643.
Ἐχεκράτεια : 630. Ζεύς : 68, 87, 89, 91, 95 ; nom. Ζήν : 87,
Ἐχεκύδης : 542. 90 ; Ζάν, Τάν, Ζής, Δήν : 90 ; voc. Ζεῦ ;
Ἐχεμένης, Ἐχέμμας, Ἐχέμμων : 108, 327. gén. Ζεός, Ζηνός, Ζανός, Ζάντος : 90 ;
Ἐχένηος : 108. acc. Δία, Ζῆνα, Τ(τ)ῆνα, Δῆνα, Ζᾶνα,
Ἐχέπολις : 688, n. 1. Ζέα, Ζάντα : 90 ; gén.  Διϝός, Διός :
Ἐχέπωλος : 108, 121. 90 ; dat. Διϝεῖ, Διϝί, Διί, Δί, Διεί, Ζηνί,
Ἐχϝαλιᾶς : 314. Ζανί, Ζεΐ : 90 ; nom. pl. Ζᾶνες : 90.
Εχθαπαν (lib.), † Εχθατιάν ou † Ἐχθατίαν : Ζεφυρίδης : 544.
490. Ζηλάδης, *Ζηλᾶς : 310.
ἔχθρ-η / -α, ἐχθρ-óς : 256. Ζηνᾶς : 205, 301-305 ; gén. -ᾶτος : 320.
ἔχιδνα, ἐχίδνιον : 414. Ζηνῆς : 548.
Ἐχίλαος, Ἔχυλλος : 348. Ζηνιάς : 434.
Ἐχύντας, *Ἔχυς : 703. Ζηνιβενδις : 217.
ἔχω : 108. Ζῆνις, Ζηνίων, Ζήνων : 488-489 ; Ζηνό-
δωρος : ibid. et 303.
Fαδησι- : 54, cf. Ἅδησι-. Ζιπᾶς : 314.
ϝανάσσω : 56, n. 68. Ζϝεις, Ζϝς, Ζώϝης : 89, 93, 271 ; gén.
Fαναξίων : 614. Ζεος : 89 ; gén. Ζώϝητος, Ζώϝειτους :
Fάριχος : 276. 94.
Fάρμιχος : 591. ζορκάς : 421.
Ϝαρνείας, ϝαρήν : 562. Ζωαγόρας : 362.
Ϝασανδρίδας : 561, 697, n. 11. Ζωβίη : 528-529, 531.
Ϝασίδαμος : 117. Ζώβιος : 362.
Fασκώνδας : 615. Ζωβίτας, Ζωβίττιον : 392.
Fειάρινος : 698. Ζωγένης, Ζωγᾶς : 311.
Ϝετιιάδας, ϝέτος : 564. Ζώης : 88 ; gén. -ητος : 94.
Ϝικάδιος : 694, cf. Ikadium. Ζωιδοῦς : 461.
Ϝιλιονς : 87. Ζωΐλα / -η : 698.
Ϝισύλος : 172. Ζωΐλος : 362.
Fιφιάδας : 614. Ζώπυρος, Ζωπᾶς : 311.
Fοίκων : 617. Ζωσαροῦς : 207.
Fοινίων : 193. Ζωσίμη : 698.
ϝοῖνος : 139. Ζωσιμιανός : 574.
Fόλχας : 172. Ζώσιμος : 215, n. 56, 574, 698.
ϝωφλήασι, ϝωφληκόσι (ὀφείλω) : 86, Ζωτικής : 210, n. 37.
n. 65.
Ἡγεμόνη, Ἡγέμων, ἡγεμών : 689, n. 5.
Ζαβδίων : 213. ἡγέομαι : 50, n. 49, 399.
Ζάς : cf. Ζεύς. Ἡγησαγόρη : 529.
ζειαί : 258. Ἡγησᾶς : 312.
ζεύγνυμι : 642-643 ; ζεῦγος, ζευγοποία : Ἡγησίλεως, Ἡγήσιλλα : 462 ; Ἥγιλλα :
103. 463.
Ζευξίας : 642. Ἡγητορίδης : 544 ; ἡγήτωρ : 700.
Ἡδιλεύς – Θεόκλεια 733

Ἡδιλεύς : 277. Θαλησικλῆς : 121.


Ἥδιννα : 463. Θαλίαρχος : 481, 488.
Ἡδύλη : 702. Θάλιννος : 481.
Ἡδυλίη : 529. Θάλλεις : 608 (θάλος), 612.
Ἡδυλίνη : 404, 703. Θάλων : 488.
Ἡδύλιον : 360, 404, 703. Θαννυρας (lib.) : 485.
Ἡδύλος : 232, 338, n. 15, 352, 404. Θαρνα : 79.
ἡδύς : 338, n. 15, 352, 404, 453. Θαρραλείδης : 114 (Θαρρελείδης), n. 42.
Ἡδύφιλος : 338, n. 15, 352. Θαρρέδαμος : 109, 114, 116, 119 et n. 47,
ἠθογράφος : 103. 120.
ἦθος : 103, 236 ; -ήθης : 235-236. θάρρος : 101, 109.
ἠϊκανός : 329. Θαρρυλίων : 360.
-ήκης : 235. Θαρσαγόρας : 107.
ἠλεός : 270. Θαρσεύς : 85.
ἦλθον < ἤλ(υ)θον : 584. θαρσέω : 109, 119, n. 47.
Ἡλιάς : 432, 433 ; Ἡλιάδας, 434 ; Ἡλιά- Θαρσήν : 71, 75, n. 23, 80, n. 39.
δες : 430. Θαρσι-, Θαρσο-, Θερσο- : 107.
Ἡμέρη : 529. Θαρσόμαχος : 104.
ἡνίοχος : 612. Θαρσυμένης : 543, n. 19.
Ἠπίη : 529. θαρσύνω : 119.
Ἡραιδοῦς : 461. Θάρσων : 488.
Ἡρακλείδας / -ης : 160, 471, 546, 547, Θαρύλας : 473.
n. 27 et n. 30, 548-550. Θαυβάριον, Θαυβαροῦς : 212-213.
Ἡρακλείδη : 697. Θεά : 40.
Ἡράκλειος : 182. Θεαίδητος, Θεαιδώ : 398.
Ἡράκλειτος : 160. Θεαῖος : 627, 646.
Ἡρακλῆς : 159, 179, 347, 477, n. 41. Θέαντος : 348.
Ἡρακύλον : 179. Θεανώ, Θέανωρ : 488-489.
Ἡράκων : 616, 696. Θέελλος : 343, 372.
Ἡρᾶς : 205, 306 (Ἡρέας), 310, 312, 320 ; Θειβάδας : 614.
gén. -ᾶτος : 320. θεῖον, θέειον : 503.
Ἡραώνδας : 614. Θέκλα : 522.
Ἥρη : 529. Θεμιστοκλῆς : 488 ; Θεμιστᾶς : 317.
-ήρης : 235, n. 35. Θεμίσων : 488-489.
Ἤριννα : 463. Θεμιτώι : 702.
Ἡρόδωρος : 306 ; Ἡρόστρατος, Ἡρο- Θεμόθεος : 348.
φάνης, Ἡροφᾶς, Ἡρόφιλος : 311-312. Θέμων, Θέμυλλος : 346, 348.
Ἡρύκαλον : 179. Θεναί : 247.
Ἥρυλλος : 347. Θεογένεια, Θεογένης : 454.
ἡρωίς : 431. Θεοδᾶς : 311.
Ἠσχρ- : 21, cf. Αἰσχρ-. Θεόδηλος : 337.
Θεοδότειος : 414.
θαλαμίας, θαλαμιή / -ά, θαλάμιος ou θαλα- Θεοδώρα : 440, 452.
μιóς, θάλαμος : 240 et n. 50. Θεοδώριχος : 610.
Θάλς : 628, 642 (θαλέω) ; Θαλέας : 45 ; Θεόδωρος : 22, n. 71, 303, 311, 621.
Θαλῆς : 552. Θεόκλεια : 99, n. 1, 522.
734 Θεοκρίνης – Ἰάς

Θεοκρίνης : 542. Θιόππαστος : 48, n. 38.


Θεόλαος : 372. θιός : 633, n. 13, 646, cf. θεός.
Θεολλίδης : 343. Θίων : 613, 630, 646.
Θέολλος : 372. Θιωνίδας : 613.
Θεόπροπος : 608 ; Θεοπροπίδας : 587. Θόα(ν)ς : 35.
θεός : 262, n. 109, 633, n. 13, 646, cf. θιός. Θοίναρχος : 613 ; θοίνη : 612.
Θεότιμος : 561 ; Θεοτιμίδας / -ης : 544, Θοινίλος : 362.
587. Θοκλῆς, Θοκλείδας, Θοκρίνης : 503.
Θεοφίλα / -η : 440. -θόος : 35, n. 2.
θέρμη, θερμός : 257. Θόρσυς : 453.
Θερμουθάριον : 212. θοσία (= θυσία) : 442.
Θερσάνωρ : 627. Θουδιτίδης : 702.
Θέρσας : 627, 646. Θρασέας : 488-489, 646.
Θερσήν : 71, 80, n. 39. Θρασίλεως : 275.
Θέρσις : 629, 646. θράσος : 646.
Θερσίτης : 701. Θρασυκλῆς : 347.
Θερσίων : 646. Θρασύλαος : 167, 186, 335.
Θερσόλοχος : 104. Θρασυλέων : 284, n. 23.
Θεσπιάς : 423, 426. Θρασυλέως : 349.
Θεστιάς : 430, 434 ; Θέστιος : 430, 646. Θρασυλλίων : 480, 703.
Θέστων : 629, 646. Θράσυλλος : 167, 186, 335, n. 7, 347, 349,
θετός : 250, n. 76. 350.
Θευγείτων : 348. Θρασύλος : 354, 629, 646.
Θευγένης : 348. Θρασύλοχος : 349.
Θευδᾶς : 303, 304. Θρασύμαχος : 479, 488.
Θευδοσίη : 528, 531. Θράσυς : 479 ; θρασύς : 192, 349.
Θευδωρίς : 441. Θράσων : 192, 349, 488.
Θευκρίσιος : 483, n. 74. Θρασωνίδης : 544-545.
Θέϋλλος : 343, 348. Θράὑλλος : 629, 646.
Θευμίων : 488, 489. Θριπύλος : 357, n. 71.
Θεύμναστος : 488. θυγατριδῆ : 518.
**Θευνίων : cf. Θευμίων. θυγάτριον : 415.
Θευφάνη : 523. θύλακος, θυλακίτης : 268-269.
Θευφιλίς : 440. Θυμίλος : 357, n. 71.
Θεώ : 40, 372. θυοσκόος : 103.
Θέων : 4, 372, 613, 697. Θωμᾶς : 301, 314.
Θεωνᾶς : 209.
Θέωρος, θεωρός : 234, n. 26. Ιαλ, gén. Ιαλος (lib.) : 484.
Θηβαίς : 459. Ἰάλμενος, ἰάλλω (ἰαλλόμενος, ἰηλάμε-
θηκαία : 560. νος) : 243.
Θῆρις : 39. Ἰαμενóς, ἰάομαι / ἰῶμαι, ἴαμαι, ἰαόμενος /
Θηρυλίδης : 360. ἰώμενος : 241, 243.
Θηρύων : 702. Ἰάονες : 420.
Θιαῖος : 627, 646. ἱάρη (nom.) : 518, n. 9.
Θίθθ : 627, 638. Ἱάρων : 630, 642.
Θιόδωρος : 83. Ἰάς : 420, 423-424, 432.
Ἰασικράτης – Ἰφικλῆς 735

Ἰασικράτης, Ἴασις, Ἰασώι, Ἰάσων : 488. ἱππίσκος : 274.


Ἰβειάς : 426. Ἱπποδάμη : 523.
Ιγισαν, gén. -αντος (lib.) : 485, 490. Ἱππόδαμος : 99, 120, 488.
Ἰδομεναί : 241. Ἵπποκλος : 592.
Ἱέραξ, Ἱέρακος : 406. Ἱπποκράτης : 23, n. 76, 147, 160.
Ἱερήν : 71, 78, n. 33, 80, n. 39 et cf. ἱρεύς. Ἱππό-λυσος, -λυτος : 60-61.
ἱερός / ἱαρός : 642. Ἱππομέδων : 99, n. 1.
Ἱέρων : 630, 642. Ἱππομένης : 110, 112.
Ἰητροφάνης : 552. Ἱππόξενος : 120.
Ιθαννυρας (lib.) : 485. Ἵππος : 629 ; ἵππος : 45, 49, 108, 165, 231,
Ἰθιούλλεις : 703. n. 13, 291, 349, 420, 645.
Ἴθυλλις : 480. -ιππος : 4, 14, n. 45, 284, n. 23, 347, 478,
Ἵκανος : 697, n. 10. 591.
Ἰκάριος : 696. Ἱππότιμος, Ἱπποτίων : 616.
Ἱκεσίη : 529. Ἱππόχαρμος : 351.
ἰκμάς, ἴκμη : 425. Ἵππυλλα : 703 ; Ἵππυλλος : 344, 349, 352-
Ἱλάρα : 560 ; ἱλαρή : 239. 353, 357 ; Ἱππύλος : 344, 350, 352.
Ἵλαρον : 412 ; Ἵλαρος : 696 ; ἱλαρóς : 239. Ἵππων : 349, 617, 630, 645 ; ἱππών : 231.
Ἴλιον, Ἰλιάς, Ἰλεύς, Ἰλιάδης : 276 et 433. ἱρεύς : 529.
ἱμάτιον, ἱματίδιον, ἱματιδάριον : 400 et 6. Ἰσαάκ (sém.) : 228.
Ιναροῦς : 213. Ἰσαγόρης : 545.
Ἰνιάς (nom fantôme) : 423. Ἰσαροῦς : 213.
Ἰνώ : 458. Ἱσᾶς : 310.
Ἰογένης : 318. Ἰσθμιάς : 420 (Ἴσθμια), n.  5, 423, 425-
Ἰόεσσα : 493 (ἰόεις), 514, 700. 426.
Ἰο-κλῆς, Ἰο-μήδη : 318. Ἰσιάς : 423-424, 433 (Ἰσιάδης).
ἰονθάς, ἴονθος : 420. Ἰσίδωρος : 212, 310.
Ἰοπᾶς, gén.  -ᾶτος, Ἰόπη, Ἰόππα, Ἰοππίς : Ἱσμήνιχος : 601, n.  21, 609 (Ἱσμηνίας),
318. 610.
Ἰουλιάδης : 209. ἴσος : 172.
Ἰουλίας : 211. ἵστημι : 510, 693.
Ἰουλιάς : 437, n. 56. Ἱστίαρχος, Ἱστιόδωρος, Ἱστιεῖος, Ἱστιήιος,
Ἰούλισσα : 210. Ἱστιαῖος : 183 et 561.
Ἰουστινᾶς : 211. Ἴσυλλος : 172.
Ἰοφῶσσα : 511. Ἰσχάς : 426, 432 ; ἰσχάς : 421, 423.
ἱππαγωγός : 50. Ἰσχόμαχος : 351.
Ἱππαῖος : 694. Ἰσχύλος : 351-352.
Ἵππακος : 45, 49. Ἰσχυρίαινα : 695.
Ἱππάλκης : 110. Ἰσχυροῦς : 461.
Ἵππαρχος : 625 ; ἵππαρχος : 46. Ἰσχύων : 702.
Ἱππᾶς : 311, 322. Ἰταλία : 432.
ἱππάς : 420. Ἴταμος : 40 (Ἰτάμη, ἰταμός), n. 19.
Ἱππεύς : 85, 232. Ιτθαλλαμμων (lib.) : 484, n. 76.
ἱππηγός : 50. Ιτθαννυρας (lib.) : 485.
Ἱππήν : 71, 74, 76, 80, n. 39. ἴφι : 614.
Ἱππίας : 488, 489 (Ἵππις), 625, 629. Ἰφικλῆς, Ἴφικλος : 336, n. 10.
736 Ἴφιτος – Καφισιάδας

Ἴφιτος : 701. Καλλισθένης : 547.


ἴχνος, ἰχνοσκοπέω : 103. Καλλίστιον : 386, 388, 411.
Ἰωναθᾶς : 319. Καλλιτίμα, Καλλίτιμος : 110 et n. 32.
Καλλιτύχη : 454.
Καβαλίς : 429, n. 37. Καλλιφάης, Καλλιφάōν : 616.
Καβαλλᾶς : 322 ; καβάλλης : 323. Καλλίχα : 464, 610.
Καβιρίχα : 610 ; Καβίριχος : 621. κάλλος : 109, 646 ; -κάλλης : 110.
καθάρυλλος : 340, 346, n. 44. Καλλώ / -ώι, Κάλλων : 458, 488-489, 630-
Καίλιος : 172. 631, 646.
Καῖσαρ : 272. κάλπη : 40, n. 16.
Καισαρίων : 24, 194, 272-274. καλύβη : 21.
Καίστιλλος : 211, cf. Caestius. Κάλυνθος : 702.
Κακᾶς : 313, n.  45 ; κακóς, κάκη : 240, Καλυψώ : 21 (καλύπτω, καλυφή), 177, 457.
256-257. Κάλων : 629, 646.
κακοήθης : 237, n. 39. κάμηλοι : 21, n. 70.
Καλ(λ)ιτώ : 458. Καμπανή : 188.
Καλάμμε, κάλαμος : 608. Κάνας : 329.
Καλήν : 71. Κανκαρας (phryg.), Κανκαρίων : 205.
Καλλ(ε/ι)- : 22, 100, 107, 109-111, 458, Κανναβᾶς : 323.
646. Καπιτᾶς, Καπιτίων : 210, 211.
Καλλαῖος : 310. Κάπων : 83.
Κάλλαισχρος : 22, 107. Καραῖος : 627, 643.
*Καλλᾶς : 310. Καριάς : 426 ; Κάριος, Καρίων : 643.
Καλλέας : 646. Καρνη(ι)άδας / -ήδας / -ε(ι)άδας / -ης : 471.
Καλλενίκα, Καλλένικος : 109-111 ; Καλ- Καρνῆιος : 471, 478 (Κάρνις).
λινίκη : 110, n. 31 ; Καλλίνικος : 111. Καρπαλίων : 40 (καρπάλιμος) ; Καρπᾶς :
Κάλλεον (Καλλέον ?) : 631, 646, 697. 41.
Καλλετίμα : 110-111. Καρπιάς : 434 ; Καρπιάδας / -ης : ibid., 689.
Καλλεύς : 85, 628 (gén. Κάλλεος ?) ou Κάρπος : 158, 229 ; καρπός : 40, n. 16, 41
Κάλλης (gén. Κάλλεος), 646. (Καρπυλλίδης), 234, n. 26.
Κάλλεχρος (?) : 110, n. 30. Καρρᾶς : 302.
Καλλήν : 72, 76, 78-79, 628, 646. Καρτερίων : 700.
Καλλίας : 629, 646 ; Καλλιάδης : 548. Καρτόνους : 104.
Καλλίβιος : 111. Κᾶρυξ : 131 (κᾶρυξ), 159.
Καλλικλώ : 458. κασαλβάς : 426, n. 26.
Καλλικράτης : 547. Κασία, Κασιάδης, Κασιάς : 432-433.
Καλλικρίτη : 111. Κασμένη : 242.
Καλλικύδης : 616. Καστιάvειρα : 37 (Κασσάνδρα, Κάστωρ),
Καλλίκων : 616. 51, n. 51.
Καλλίμαχος : 488. Κατακεκαυμένη : 242, 244.
Καλλίμενις : 112. Κατάρϝας (-ᾶς ?) : 328 (κάταρ(ϝ)ος, cf.
Κάλλιον : 167, 383, n. 10. aussi 35).
Κάλλιππος : 284, n. 23 ; Καλλιπίδας / -ης : καταφαγᾶς : 301, 302, 309.
78, 547. κατίασσα : 508.
Καλλίς : 454, 459, 630, 646. καυλός : 480.
Κάλλις : 488, 629, 646. Καφισιάδας, Καφισίας : 613-614.
Καφισίς – Κλειτοθέη 737

Καφισίς, Καφισός : 608. Κικέρων, Κικεράκιος, Κικερίσκος, Κικέρ-


Καφισίων : 616-617. κουλος : 171.
Καφισόδωρος : 617. Κιλικᾶς : 322.
Καφισότιμος, Καφισόττει : 608. Κίλισσα : 314, n. 46, 690.
Καφίσσει : 608, 620. Κίλλα, Κίλλης, Κίλλος : 84 (κιλλός) ; Κιλ-
Καχρυλίων : 83, n. 51 (κάχρυς), 360, 361. λήν : 68, n. 6, 72, 77, 83-84, 95.
Κεάδης : 433. Κίμων : 15.
Κέβης : 271. Κίρκα : 144.
Κέγχραμος, κεγχραμίς : 83, n. 51. Κισσηίς : 430, 459.
Κειλλήν (?) : 72, 74. Κισσῆς ou Κίσσης : 86 ; Κισσός : 430, et
κεῖμαι : 102. cf. *Κισσεύς.
κέκασμαι (καίνυμαι) : 37. Κιτιάς : 426.
κεκῆνας : 81. Κλάδιον : 460.
Κέλαδος : 196. Κλαζομεναί : 241.
Κελαίνδαι : 562. Κλαυσαμενóς : 242.
Κελεστῖνα : 698. Κλεαγένης : 326.
Κέλης : 94. Κλεαγόρας : 500 ; Κλεαγόρη : 529.
κεμάς : 421, 425. Κλέανδρος : 107 ; Κλεάνωρ : 38.
Κενδας : 562. Κλεάνθης, Κλέανθος : 46.
κενεός : 270. Κλέαξ : 500.
κέραμος : 354. Κλέαρχος : 475.
κερασός : 452. Κλέας : 326, 644.
Κερβίων : 210-211. Κλεαφάνης : 326.
Κέρδων : 159. Κλεεσθένεια, Κλεεσθένεις : 111.
Κερδώνυμος : 107. Κλεϝᾶς : 326.
Κερκεύς : 44 (κέρκoς). Κλεϝε-θοίνιος, Κλεϝε-κράτα : 109, 111,
Κερκιδᾶς : 302, 304-305, 316 (κερκίδες, 115.
κερκιδοποιική), 324. Κλεϝίχα : 610.
Κέρκων, Κερκύλας : 39-40 (κέρκος, κερ- -κλέης / -κλῆς : 166, 177-180, 231, 591, 696.
κίς), et n. 21, 44. κλέ(ϝ)ος : 103, 108-109, 111, 121, 231, 335,
Κεσάνδρα : cf. Κασσάνδρα, Καστιάνειρα. 612, 643, 644.
Κετρ(ε)ιπολις (thr.) : 202, n. 5. Κλεί-βουλος, Κλει-γένης : 112.
Κεφαλᾶς : 320. κλειδᾶς : 316, n. 50.
Κεφάλ / Κεφάλλει(ς) : 592, 607, 608. Κλείδας : 611, cf. Ϙλίδα.
Κεφαλή : 248 (κεφαλή). Κλεί-δημος : 112, 398 (Κλεί-δαμος et
Κεφαλλήν : 69. 488) ; Κλεί-δικος : 112.
Κεφαλλίς : 607. Κλειδώ : 488-489.
Κέφαλος : 288, n. 47, 592. Κλείεργος : 111.
Κεφαλώ : 458. Κλειναγόρη : 529.
Κέφων, Κεφώνιχος : 592, 611, 618. Κλεινίας : 643 (κλεινός).
Κηκήν : 72, 76, 81. Κλέϊς : 612, n. 47.
κῆρυξ : cf. κᾶρυξ. Κλεισθένης : 111.
-κήτης : 235. Κλείσοφος : 112.
Κιβᾶς : 314. Κλε(ι)ταγόρη : 517.
κίβδης : 271. Κλειτέας : 643.
Κίβυς : 453. Κλειτοθέη : 528-529.
738 Κλειτομάχα – Κορρέστης

Κλειτομάχα, Κλειτομαχίς : 441. Κόϊντος (lat.) : 208 ; Κοϊντίων : 210.


Κλειτόριον, Κλειτόριος, Κλείτωρ : 700. κοινών / -εών / -άν : 36, 41, n. 22.
Κλειτώ : 631, 643 ; Κλεῖτος : 612, n. 47 ; Κοίρανος : 697, n. 10.
κλειτός : 643. Κοιρατάδας : 613.
Κλειφῶσσα : 511. κοιτών : 231.
Κλεοβούλη : 104 ; Κλεόβουλος : 102, 106. Κόκκαλος : 83, n. 51.
Κλεογένης : 110, 542. Κόκκης : 271.
κλέομαι : 109, 112. Κοκκύς : 453, n. 24.
Κλεόμαχος : 564 ; Κλεομαχίδας / -ης : 561- Κοκκωνᾶς : 322.
564. κολακεία : 8-9.
Κλεομένης : 35, 120, 343. Κολωνóς, Κολωναί, κολωνóς, κολώνη :
Κλέομμις : 35, 343 (Κλέομις), 344, 358, 247, 251-252.
608, n. 32. Κομᾶς : 627, 644.
Κλεομυτ(τ)άδας : 694. Κομάτας, κομάω, κομήτης : 494 ; Κομη-
† Κλεόνδας : cf. Κλεο<ύ>νδας. τᾶς : 301, 302 (Κομητάς ms.).
Κλεοπάτρα / -η : 103-104, 159, 314, n. 46,  : 494.
320, n. 74 (Κλεοπᾶς), 458. Κομίλος : 362, 364.
Κλεο<ύ>νδας : 583. Κομιτᾶς, Κομιτοῦς (lat.) : 211.
Κλεουπώ, Κλευπώ : 204 : 436. Κόμμης : 271.
Κλεπώι : 458. Κόμων : 362 (Κομώ), 629, 644.
Κλταγόρη (?) : 526. Κονθίδας : 563.
Κλεύας : 38, 326. Κοννᾶς : 317.
Κλεύδικος : 475. Κονοπιάδας : 614.
Κλευπαροῦς : 213. κόντιλος : 275 ; κοντίλος : 368.
Κλευπάτρα : cf. Κλεοπάτρα. Κόνων : 231.
Κλεῦπιν, Κλεύπιον : 476 et n. 38. κοπιδᾶς : 316, n. 50.
Κλεῦπις : 488. Κoπρεύς, κόπρoς : 36.
Κλεώ : 488, 631, 643. Κόρακος : 49, n. 47 ; κόραξ : ibid. et 405,
Κλέων : 230, 326, 471, n. 13, 475, n. 31, n. 159.
488, 630, 644, 697. Κορβουλίων : 211.
Κλεώνυμος : 475, n. 31, 488. Κορδύβη, κορδύλη, Κορδυλίων, Κορ-
Κλεώτας : 689, n. 2. δύπη, Κορδυπίων, Κόρδυπος, κορ-
Κλήνα : 630, 643. δύς : 20-21.
Κληναγόρας, Κληναγορίς : 454 ; Κληνα- Κορδώνδας : 581.
γόρη : 525. Koρεῖος : 184.
Κλήτας : 473. Κόρη : 529.
κλίσιον, κλίσις : 413-414. κόρθιλος : 275, 368.
Κλιτύς : 453, n. 24. κορίζομαι : 8.
Κλονᾶς : 314 (κλόνος). Κόριννα : 463 ; Κόριννος : 699.
Κλόνικος : 503. Κοριττάς, Κοριττίς, Κοριττώ : 436, 701,
-κλος : 165, 178. n. 14.
Κλυμένη Κλύμενος κλύμενος : 242-243. Κορνᾶς (lat.) : 211.
κλυτός : 243. Κορνουτίων (lat.) : 210.
κόγχη, κογχύλη, κογχύλιον : 340-341, 414. κόρος : 8.
Κοδρατίων (lat.) : 211. Κόρραγος : 50.
κοῖλος : 368. Κορρέστης : 693.
Κόρρη – κυρτός 739

Κόρρη : 529. κρύπτω, ἐκρύβην, ἐκρύφην : 21.


Κορρινάδας : 698. Κρωβύλος : 351, 366.
κορυδαλλός : 341. κτάομαι : 47, 58, 644.
Κορύθων / -ούθων : 702. Κτημάτιος : 689, n. 5 (κτῆμα, cf. aussi 616).
Κοσμᾶς : 306. Κτησάρετoς : 58.
Κόσυβος : 83. Κτήσαρχoς : 47, 58.
Κότυλος, κότυλος, κοτύλη, Κοτυλᾶς, Κτησίλεως, Κτήσιλλα : 462 ; Κτησίφιλoς :
Κοτύλων : 41, cf. aussi 324 et 703. 58 ; Κτησιφῶσ(σ)α : 511 ; Κτησίας :
Κουαρτίων, Κουϊντίων (lat.) : 210. 47, 644 ; Κτήσιον : 460.
κράνος, κρανοποιός : 103. Κτησώ : 458 ; Κτήσων : 79, 644.
-κράτα / -η : 504, 520-522. κτητικόν : 6.
Κρατέα ou Κράτεα : 630, 643. Κτιμένη : 241, n. 55, 242.
Κρατέϝας : 696. Κυαμᾶς : 323.
-κράτεια : 521-523. Κυᾶς, gén. -ᾶτος : 319, n. 67.
Κρατεραῖος : 561. κύβδα, κύβος : 21.
Κράτερμος : 107. Κυδεύς, Κυδέας, Κύδας : 44.
κρατερός : 561. Κυδήνωρ : 107.
Κρατεύας : 696. Κυδίμαχος : 482, 488 ; Κυδίας : ibid. et
-κράτης : 58, 177, 504. 644 ; Κῦδις : 44, 488 ; Κύδιχoς : 44.
Κράτης : 94, 475, n. 32, 628, 645. Κυδρᾶς : 311.
Κρατίλος : 132. Κύδων : 44, 630, 644.
Κρατισθένης, Κράτις : 488-489. Κυθέρη : 529.
Κρατόξενος : 104. Κύκλωψ : 159.
κράτος : 235, 643, 645. κύλα : 82, n. 50.
Κραττίδας : 618. Κυλλάνα, Κυλλήνη : 68 ; Κυλλήν : ibid.,
Κρατύλος : 352-353, 356, 479, 629, 645. 74.
Κράτων : 352, 630, 645. Κύλλαρος : 401.
† Κρητõνδαι : cf. Κριτῶνδαι. Κυλλιάδαι : 563.
Κρέων : 697. Κυλλοποδίων : 272.
Κριθέας Κριθεύς κριθή : 44, 644 ; Κρι- κυλλός : 74, 401, 644.
θύλος : ibid. et 629 ; κριθοχύτας / -αι : Κυλωΐδας : 82, n. 50.
429, n. 35. Κύλων : 629, 644.
Κρίθων : 44. κύμβη : 21, 268.
Κριναγόρας, Κρινᾶς : 311. Κυμινᾶς, κυμινοπώλης : 316, 323.
Κρίνιππος, Κρῖνις : 488. Κύναγος κυναγός κυναγέτας κυναγέτις :
Κρινόδαμος : 311. 50.
Κρινύλιον : 403 (Κρίνυλλα, κρίνω), 460. Κυπάρη : 529.
Κρισάδας : 614. Κυπαρισσήεις : 508.
Κριτίας : 644 ; κριτής : 643-644. κύπελλον : 21.
Κριτόλα : 488. κύπτω : 21.
Κρίτυλλα : 631, 643. Κυρᾶς : 301-303.
Κρίτων : 488, 629, 644. Κύρβασος Κυρβασίας κυρβασία : 474-475.
Κριτῶνδαι : 582 Κυρίακος, κύριος : 45.
Κρονίδας / -ίδης : 563, n. 15, 613. Κυριλ(λ)άς, Κύριλλα : 437.
Κρόνιος : 582. Κυρσιλίδα : 563 ; Κυρσίλος : 362, 365.
Κρονίων : 193, 274. κυρτός, κυρτώματα, κύρτωσις : 23 et n. 75.
740 Κυτατταρῖνοι – Λεωνίδης

Κυτατταρῖνοι : 189. Λαρισαία : 563.


κυφός : 21, 23. Λάσα, Λασσαίοι : 584, 588, n.  35, cf.
Κύψελις : 76 ; Κύψελος : 81, 372, n. 105. Λαρισαία.
Κώθων : 349 ; Κώθυλλος : ibid., 353, 366. λαύω : 105.
Κωκυλίων : 360, 366, 367 (κωκύω, κωκυ- Λαχανᾶς : 324 ; λαχανᾶς : ibid. et 301,
τός). 313, 321, 302, 303, 315 ; λαχανο-
Κωλωταρᾶς, Κωλωτάριον, Κωλώτης : 7. πώλης : 301, 315, 324.
Κωνάς Κωνέας κῶνος : 439 et n. 68. Λάχης : 94, 271, 272.
κώνωψ : 614. Λεαγόρης : 541, n. 13, 548, n. 31.
Κῶς : 433. Λέαινα : 464, 476.
λέβης : 271.
Λάβης : 94. λέγω : 421, n. 6.
Λαγείταρρα : 50. λεῖος : 38, 48 (λείαξ), 238 (λεία).
Λαγένης : 110, n. 29. λείπω : 244, 245.
λαγέτας : 50. Λείριον : 408.
λαγιδεύς : 274, 277. λελυκώς, λελυμένος : 246.
Λᾶγος : 50. Λεονταροῦς : 213.
Λαέρτης : 119. Λεοντᾶς : 322.
Λαήν : 72, 80, n. 39. Λεοντεύς : 637, n. 18, 644.
Λαϊάδας : 471. Λεοντιάδας : 616, n. 50.
λαιóς : 253. Λεοντίδας : 628, 644.
Λάκαινα : 464. λεοντιδεύς : 277.
Λακρατιδίας : 618. Λεόντιος, Λεόντις m. : 182 ; Λεοντίς f. :
Λᾶκρις : 629. 630, 644.
λάλημα : 412. Λεπαδεύς (gén ?) : 548, n. 34.
Λάλος : 696. Λεπιδᾶς : 209, 314.
Λαμαχίππιον : 381. Λεπτίνης : 541.
Λάμητος, Λαμητῖνοι : 189. Λεσβία, Λεσβιάδες, Λεσβίδες : 431.
Λαμία, Λαμιάδης, Λαμιάς : 432-433 : 432. Λευκαθίδης : 541.
Λαμπάς : 423, 426, 427 (Λαμπᾶς), 432 ; Λευκάς : 431.
λαμπάς : 421, 422. Λεύκασπις : 488.
Λαμπ<ί>ας : 427. Λεύκη, λεύκη : 255-257, n. 91.
Λαμπίδης, Λαμπιδώ : 398. Λευκίας : 488.
Λάμπις : 427, 629, 644. Λεύκιος : 604.
Λάμπιτος, Λαμπιτώ : 458, 701. Λεύκιππος : 82.
Λαμπρή : 529. Λευκόδωρος : 586.
Λαμπροκλῆς, Λαμπρᾶς : 312. Λευκοθέη : 528.
Λάμπων : 175-176, 427, 629, 644 (λάμπω, λευκό(ϝ)ιον / Λευκόϊον : 695, n. 9.
cf. aussi 421) ; Λαμπώνιος : 175. Λεῦκος, λεῦκος, λευκός : 230, 252, 255,
Λάνθης : 110. n. 88, 256-257, n. 91, 431.
λαός : 107-108, 335, 689, n. 4. Λευτυχίδης : 539.
-λαος / -λας / -λεως : 39, 58, 100, 104, 113, λεχεποίης : 108.
118, 119, 186, 275, 335, 346, 364-365, Λεωγένης : 110.
462, 473. Λέων : 616, 636, 689, n.  4 ; λέων : 290-
λαπάρη / λαπάρα, λαπαρός : 256. 291, 644, 665, 689, n. 4.
Λάρα : 475, n. 34 (λαρός), 486. Λεωνίδας / -ης : 552-553, 704.
Λεωφάνης – Μαμαλον 741

Λεωφάνης : 542. Λύλης : 271.


Λεωφείδης : 110. Λύρα, λύρα, Λύρακος : 410 et 45, n. 32.
λήγω : 12. Λύριον : 410.
Ληλαντίδης : 544. Λυσαγόρης : 545, 546.
Ληνιάς, Ληνίς : 436. Λυσανίας : 470, 560.
λίαξ : 48. Λυσάνωρ : 43.
Λίβανος, Λιβᾶς : 320. Λυσέας : 646.
Λίβυς : 453. Λυσήν : 72, 75-76, 80, n. 39, 95, 628, 646.
Λίγυρον : 412. Λυσίας : 7, 646 ; Λυσιάδας : 628, 646.
Λιγυστῖνος, Λιγύστιος : 160. Λυσίλεως, Λύσιλλα : 462-463.
λίθαξ : 6. Λυσιμάχα, Λυσιμαχίς, Λυσίμαχος : 454.
λιθάς, λίθος : 420. Λύσιππος : 7, 60, 488.
Λίλεις : 620. Λῦσις : 39, 482, 488, 644 ; Λυσίς : 630.
Λιοντίδας : 616, n. 50, cf. Λέων. Λυσίχα : 464.
Λίπαρος, λιπαρός : 83. Λυσίων : 629, 646.
Λίσας : 328. Λύσων : 482, 488, 630, 646.
Λιχᾶς (?) : 313, n. 45. Λυταί, Λυταικά, Λυταῖος : 563.
Λίχας / -ης : 328, 473, n. 19. -λυτος : 60.
λίχνος : 328. Λυχνᾶς : 324.
λογάς : 421, n. 6, 425. λύω : 644, 646.
Λογγίων : 210. λωγάς : 425.
Λογῖνα, Λόγος : 190.
λοιδορημάτιον : 6. Μάγας : 473, n. 19.
Λοκροί : 289. Μαγνοῦς : 207.
Λοπάδιον : 385, 387, 407. μαδάω, μαδαρός : 41.
Λουκᾶς : 209-211, 301 ; gén. -ᾶτος : 319 ; Μαδύης : 41.
Λουκιάς : 209 ; Λουκίων : 210. Μαδύλος : 41.
Λουπαρίων : 211. Μαιανδρίη : 529.
λουτρών : 231. Μαίη, Μαιάς, Μαιαδεύς : 430 et n. 43,
λόχος : 108, 335. 438.
Λύκα : 630, 644. μαινάς, μαίνομαι : 421-422.
Λύκαιθος : 392 ; Λυκαίθιον : ibid. et 460. Μακάριος : 696.
Λυκαίνιον : 388, 393 ; λύκαινα : 393. Μακελλῖνοι : 189.
Λυκαῖος : 627, 646. μάκελλον : 187.
Λύκανδρος : 145, 160. Μάκης : 178.
Λυκάριος : 696 ; Λυκαροῦς : 213. Μακκυρ (lib.) : 484, n. 79.
Λυκᾶς : 322 ; Λυκέας : 646 ; Λυκεύς : 85 ; Μάκρον : 255 ; μακρός : 358, 360, 371.
Λυκήν : 72, 80, n. 39 ; Λυκίας : 646. μαλακίων : 273.
Λυκίδης : 548. Μαλέας, Μαλεύς : 45.
Λύκιννα : 463 ; Λυκῖνος : 191. μάληκος, Μαληκίδας : 613.
Λύκιος : 629, 646. Μαλθάκιον, μαλθακός : 406 et n.  160,
Λυκίσκος : 191. 460 ; Μαλθάκα : ibid. et 695.
Λυκκίδης : 552. Μαλιάδας : 433.
Λυκομήδης, Λυκόμμας : 473. Μαλιώ : 435.
Λύκος : 191 ; λύκος : 627, 644. Μαλχίων : 213.
Λύκων : 630, 646. Μαμαλον : 696.
742 Μαμερτῖνος – Μενάλκης

Μαμερτῖνος (lat.) : 191. -μέδεια : 42.


Μαμμαρεῖος : 183. μέθη : 393.
Μαμμάριον : 390, 399, 400. μέθυ : 405, 643.
Μάμμης : 271. Μεθύλλιον, Μέθυλλος : 349, 393, 405-
Μαμμίχα : 610, 618. 404, 643, 703.
Μάνακον : 695. μεθύω : 349.
Μάνης ou Μανῆς : 546, 548. Μείδιον, μειδιάω, μεῖδος : 394 et n. 84.
Μαντα (thr.), Manta, Μανταροῦς, Μαντοῦς, Μειδοκλέης, Μειδόκριτος, Μειδόνικος :
Μαντώ : 207-208, 213-214. 104.
Μαραθών, μάραθος, μάραθον : 231, n. 13. Μειδοκράτης : 351.
Μαρδόντης (iran.) : 495, cf. av. Bǝrǝ­ Μειδύλος, Μειδυλίδης : 351, 360.
zuuant-. Μείδων : 351.
μάρη : 40, 616. μειρακύλλιον : 6.
Μαριάς (sém.) : 437. † Μειρακαν : 490, cf. Μειραχαν.
Μαρικᾶς : 302, 313, n. 45. Μειραχαν (lib.) : 490, n. e.
Μάρι(ο)ν (sém.) : 476, n. 38. μείωσις : 6, 9.
Μάρκελλα, Μαρκελλάς, Μαρκελλῖνoς, Μέλαινα : 464, 695 (Μελαινίς).
Μαρκελλίων, Μαρκία, Μαρκίων (cf. Μελάνδρυς : 453, n. 24.
Marcion), Μᾶρκος, Μαρκώ : 175, 208- Μελάνθης < *Μελανάνθης, Μέλανθος :
211, 216. 475-476.
Μαρμάριον, μάρμαρος : 393. Μελανθώ : 458.
Μάρων : 40. Μελανιππίδας : 612.
Μας : 438. Μελάντιχος : 611.
Μασας : 438 et n. 63. μέλας : 429, n. 38.
Μασταροῦς : 207. Μελέαγρος : 108.
Μάτι(ο)ν : 210. Μέλης : 94.
Ματρίχα : 699. Μελίη : 529.
Ματροδώρα : 437. † Μελιθήν : 68, cf. Μελιθήριος.
Ματρωνιλᾶς : 438. Μελιθήριος : 68.
Ματυλαῖoς : 183, 185. Μελίνδης : 586, n. 31.
Μαχαιρᾶς, μαχαιρᾶς, μαχαιροποιός : 309, Μέλιννα : 463.
324.  : 173.
Μαχάτας / -ήτης : 701. Μέλισσα, Μελισσαῖος, Μελισσεύς,
Μαχάων : 41, 696. Μελισσίας, Μελισσίς, Μελισσίων,
-μάχης, -μαχος : 178, 327. Μέλισσoς : 173 ; μέλισσα / μέλιττα :
Μάχων : 616-617. ibid. et 690.
Μεγακλείδης : 545-546, 548 et n. 34. Μελιτίνα / -η : 702.
Μεγακλῆς : 351, 488. μελιτοῦττα : 497, 513, 514.
Μεγαλοκλῆς, Μέγαλλος : 372. μέλος, μελοποιός : 103.
Μεγαπένθης : 3, n. 11. μέλουσα : 689, n. 5.
μέγας : 35, n. 1, 617. Μελπομένη : 242.
Μεγᾶς, gén. -ᾶτος : 319. μέλω : 108.
μέγεθος, -μεγέθης : 235-236. Μέμμιος : 572.
Μεγυλλῆς : 541, n.  13 ; Μεγύλος : 351, Μέμνων : 160.
352, 353. Μεναί : 247.
Μεγώι : 478, 488 ; Μέγων : 617. Μενάλκης, Μέναλκος : 46.
Μενᾶς – Μικύθα 743

Μενᾶς : 311. μένω : 108, 109, 112-114, 116.


Μενδᾶς, Μενδίδειον, Μενδίδωρος, Μενδις Μενώ : 699.
(thr.), cf. Βένδ- : 205, n. 15 et 214. Μένων : 348, 362, 488, 630, 645.
Μενέβουλος, -βωλος : 112. μέρουλα : 187.
Μενεδάϊος : 112 ; μενεδήϊος : 108, 113. Μεσταρώ : 208, 214.
Μενέδημος, Μενεθάλης : 112. Μεταγένης, μεταγενής : 285.
Μένεια : 630. Μετάπατρος : 295.
Μένεις : 620. μετάφρενον : 282 et n. 15.
Μενεκλέα ou Μενέκλεα : 520. Μήδειος : 38 ; Μήδιος : 38, 41 ; Μήδεια :
Μενεκράτης : 112, 165 (Μενεκράτη, cf. 523 ; -μήδεια : 42, 521, n. 18, 523.
aussi 519), 362, 574 ; Μενεκρατώ : -μήδη : 521, n. 18, 523, 525 ; -μήδης : 108.
458. Μηδοκρίτα : 104.
Μενέλαος : 99, n. 1, 108, 109, 113-114, 116, Μῆδος : 38.
348, 362, 365 ; Μενέλλας : 473. Μήδυλλος : 41.
Μενέμαχος : 112. μῆκος : 236 ; -μήκης : 178, 235, 236.
Μενεπτόλεμος : 112. Μηλιάς : 423, 433, 435 (Μηλίς).
Μενέπτολις : 112. Μηνᾶς : 301, 302, 304-305, 310, 312 ;
Μενέσανδρος : 110, 112-113, 121. gén. -ᾶτος : 319.
Μενεσθένης, Μενεσθεύς : 108. Μηνιάς : 423, 424, 434.
Μενέσιππος : 110, 112. Μηνόδωρος : 306, 310.
Μενεστᾶς : 472. Μηνόθεμις : 312.
Μενέστροτος : 592. Μηνοφίλα, Μηνοφιλάς : 437.
Μενέχαρμος : 112. Μήστωρ, μήστωρ : 238.
Μενέψοφος : 112. Μητραδώρη : 529.
-μενή, -μενός : 238, 240, 241-242, 244, Μητρᾶς : 301, 302, 303, 304-305, 310.
246, n. 66, 249, 251-252, 262. Μητρίχη : 690, 699.
Μενήν : 72, 80, n. 39. Μητροδωράς : 437 et n. 60, 438 ; Μητρο-
Μένης : 94, 645. δώρη : 529 ; Μητρόδωρος : 303, 310.
Μένιλλα : 463 ; Μένιλλος : 362, 364-365. Μήτρων : 139, 160.
Μένιππος : 488. Μίδα(ι)ος, Μίδας, Μιδᾶς, gén.  -ᾶδος,
Μενίσκος : 205. -ᾶτος : 317 et n. 53-54.
Μενίτας, Μενιττώ, Μενιτώ : 702. Μιθροῦς : 207.
Μέννει : 592, 595. Μίκα : 40, n. 16 ; Μικᾶς : 309, 314.
Μεννίδας : 592, 613, 618. Μίκιννα : 463 ; Μικίννης : 699.
μενοεικής : 102. Μικίων, Μικκίων : 40, n. 16 (Μίκκα, Μικ-
μενοινή, μενοινάω : 240. καλίων, Μίκκαλος et cf. 696), 647 ;
Μένοιτος : 108. Μίκ(κ)ιον : 392, 410.
Μενοκράτης : 104. μικκός : 20, 40, n. 16, 270, 340, 392.
Μενοπτόλεμος : 104. μικκύλος : 340.
μένος : 101, 102, 109, 112, 113-114, 235, Μικόλος : 442 et n. 76.
645 ; -μένης : 42, n. 26, 108, 327. Μῖκος : 352, 410, 629, 647.
Μένουν : 560, 563, n. 12. Μικοτέρα /-η : 529, 531, 700.
Μενούνδας : 704. μικρός : 20, 40, n. 16, 410 ; μικρότης : 6.
Μένυλλος : 348, 357, n. 71, 365, 561, 629, Μικύθα / -η : 427, n. 29, 702 ; Μίκυθος : 20
645. et n. 63.
744 Μικύλα – Μύστα

Μικύλα, Μικυλαῖος : 702 ; Μικυλίων : Μοέριχος : 610.


360, 703 ; Μικύλος : 20, 352, 442, 629, Μοιρόδοτος, Μοιρᾶς : 311.
647. Μοιτύλος, μοῖτος : 643.
Μίκων : 352, 629, 647. Μοκαπολις (thr.) : 202, n. 5.
Μίλακος, (σ)μῖλαξ, (σ)μῖλος : 45 ; Μίλα- Μολπαγόρας : 308, 311 ; Μολπᾶς : 308,
κον : 695. 309, 311, 325 ; gén. -ᾶδος : 317, 318,
Μίλλει : 592, n.  5, 608 (μιλός / μιλλός) ; n. 61, -ᾶτος : 318.
Μίλλεις : 609. Μόνικος, Μόνιχος : 39.
Μιλτεύς : 637, 644 ; Μιλτιάδης : 39, n. 9. Μορτόνασος, μορτός : 59-60.
Μιλτοκύθης : 39, n. 9 ; μίλτος : 39, 644. Μόρυλλος : 348, 366.
μιμνήσκω : 55. Μόρφιον : 392.
Μίμνις : 488. Μοσχάρι(ο)ν : 10, 401, 409 (μοσχάριον et
Μιμνόμαχος : 488. n. 188).
Μινακώ : 478-479. Μόσχι(ο)ν : 390 et n.  60, 409 et n.  186
Μιννιάς, Μιννίς, Μιννώ : 436 ; Μιννίων : (μοσχίον, cf. aussi n. 188), 631, 644 ;
529. Μοσχίνη : 690 ; Μόσχος : 409, 644
Μίντων : 629, 644. (Μοσχίων).
Μιρούνδα : 563. Μουνας : 438.
Μισγομεναί : 241. Μουνδίων : 211.
Μισθόδικος, μισθός : 39 et n. 9.
Μοῦσα : 700.
Μίτριχος, μίτρα : 610.
Μουσάριον, Μουσικόν : 460.
Μιτταχις (lib.) : 484.
μπεμπέ (gr. mod.) : 275.
Μιτύλος : 276.
μυΐσκος : 274.
Μιχαήλ : 228.
μύκη, μύκης : 93 et n. 92, 271.
μνάομαι : 393, 647.
Μύλλος, μυλλός : 335, 341.
Μνάσαρχος : 488.
Μύννιον : 383.
Μνασίλαος : 613.
μυριάς : 425.
Μνάσιλλος : 629, 647.
Μνασεύς : 55, 85 ; Μνασήν : 72, 80, n. 39. Μύριλλα : 130, 463.
Μνασέας, Μνασίας, Μνασιάδας, Μνᾶσις, Μυρμηκίδης : 689.
Μνασίων : 488, 627, 629, 647. Μυρρίνη, Μυρρινίδιον, Μύρριον, μύρρα :
Μνασώ / -ώι : 55, 488 ; Μνάσων : 488, 381-382 ; μυρρινών : 231 ; Μυρρινί-
630, 647. σκη : 699.
Μνάστηρ, Μναστήρας : 393-394. Cf. Μνή- Μύρσος, Μυρσύλος : 352.
στηρ. Μύρτα / -η : 363, 630, 647 ; Μυρτάλη : 425.
Μναστοκλῆς, Μνάστα : 476. Μυρτίλος : 188 (Μύρτιλλος), 363, 366,
Μνάσυλλα : 565, n. 24. 629, 645.
Μνεῖαι Μοῦσαι : 55, n. 65. Μύρτιον : 393 ; Μυρτίς f. : 630, 647 ;
Μνηρίμαχος (érétrien pour Μνησι-) : 588. Μύρτις m. : 645 ; Μυρτίχα : 464.
Μνησιδώρη : 529. μύρτος : 363, 393, 645, 647 ; Μυρτοῦς :
Μνησιθέη : 528. 631, 647 ; Μυρτώ : 363, 631, 64.7.
Μνησίλεως, Μνήσιλλα : 462-463. Μυρώ : 478.
Μνήσιον : 391, 460. Μῦς : 25, 453 et n. 23.
Μνησιππώ : 458. Μυσθαρᾶς, Μυσθαρίων, Μυσθᾶς : 320.
Μνησίς : 459. Μύσκελλος, Μύσκελος, Μύσκων,
Μνησιστράτη : 391 ; Μνησίστρατoς : 55. Μύσϙος : 178, 188-189.
Μνήστηρ, μνηστήρ : 393. Μύστα, Μυσταρώ : 208, n. 26.
Μυσταλίδης – Νικησώ 745

Μυσταλίδης : 689, 696. νέομαι : 116, 118.


Μυστιχίδης : 699. Νεομήνιος, Νεομᾶς : 311.
Μύσχελος : 178, 188. νέος : 16, 45, 270.
Μυσχεύς, Μυσχίδης, Μύσχων, μύσχoν : Νέοσσος, νεοττός : 501.
44, 82. Νέσσανδρος : 118.
Μύττιον : 383 ; μυττός : 270. Νεστίδας, Νέστος : 611-612.
Μυωνίδης : 549. Νέστωρ : 118, 119.
μωκός, μῶκος, μωκάομαι : 260-261. Νευσσίς : 477.
Μωμω : 204. Νέων : 372, 617.
μωρίων : 273. Νήδυμος, Νηδυμιανός : 15.
Νηΐς, Νηιάδες : 431.
Νάκιον, Νάκος, Νακοῦς, Νακώ, νάκη : Νημερτής : 231.
405. νήπιον : 16, n. 52 (νηπίαχος), 293.
Νανάς : 423, 438 (Νανα, Νανας) ; Ναν­- Νηρεύς, Νηρηίδες : 430, n. 42.
(ν)ᾶς, gén. -ᾶτος : 314, n. 46, 317-318 ; Νησιάς, Νησιάδης : 433.
Νάννα : 400, n. 129, 438 ; νάννα : 270, νησιώτης : 702.
438, n. 62. νηττάριον : 8 et n. 30, 9.
Νανίς : 400, 438, n. 62. Νιγερίων, Νιγρίων : 211.
Ναννάριον : 385, 399, 696. Νικαγόρας : 500 ; Νικαγόρη : 529 ; Νικα-
Ναννελαῖος : 183, 185. γόρατις : 692.
Νάννιον : 383-384, 386-387, 399-400 et Νικάδας / -ης : 434, 542, n. 14, 694.
n. 129 ; νανίον : 400, 438, n. 62. νικάεις : 502, 513.
Νανονις (osq.) : 176, 185. Νικαία, Νίκαιος : 630, 647.
νᾶνος : 438, n. 62. Νίκαινα : 464.
Νασιώτας, νασιώτας : 702. Νίκανδρος : 488.
Νατάλιος : 696. Νικαρέτη : 401.
Ναυβάτης : 269. Νικαρίστη, Νικάριον, Νικάριν : 401 ;
ναῦς : 68, 89, 90, 108. Νικαρώ : 458.
Ναυσήν : 72, 80, n.  39 ; Ναύσιον : 460 ; Νίκαρχος : 351.
Ναυσίς : 454, 459 ; Ναῦσις : 488. Νικᾶς (< Νικάεις ?), gén.  -ᾶντος : 502,
Ναυσικράτης : 488. 510, 513 ; Νικᾶς, gén. -ᾶ / -ᾶδος : 311 ;
Ναυσικρίτη : 454. Νικάς : 424, 434 ; Νίκας : 473.
Ναύσιλλα : 463. Νικασαγόρη : 525, 530.
Ναύτης, Ναυτίλος : 269 ; ναυτίλος : 368. Νικασίας : 499.
Νεhε- : 119. Νικασικράτη : 517, 521 (Νικασικράτεια).
Νέαλλος, Νεαγένης, νεαγενής, νεηγενής : Νικασίμαχος : 497.
372. Ν(ε)ικᾶσσα : 497, 498-504, 508-509, 512,
νεανισκάριον : 275. 513.
νέαξ : 45. Νικᾶττα : 497, 498-501, 504-506, 508-
Νεικαροῦς : 213. 509, 513, Νικάτα : 504.
Νείκων : 574. Νίκεον : 631, 647 (Νικέας, Νικεύς et
Νειλαροῦς : 213. cf. 85).
νέκυς, νεκάς : 420. Νικήν : 72, 78, n. 33, 80, n. 39.
Νεμεάς : 423, 425, 426. Νίκης : 500-501.
Νεμωνᾶς : 211. Νικῆς : 520, n. 17, 548, n. 31.
νενός, νέννος : 270. Νικησώ : 458.
746 Νικήτης – Ὀλόσσηιος

Νικήτης, νικητής : 232 ; Νικήτη : 504-505. Ξενᾶς : 311 ; Ξένεια : 695 ; Ξενήν : 72, 80,
Νικηφόρος : 145, 160. n. 39 ; Ξενώ : 348, 644 ; Ξένων : 348,
Νικιάδας / -ης : 434 (Νικιάς), 628, 647 ; 630, 645.
Νικίας : 16, 488, 647. Ξέννει, Ξεννώ : 607, cf. Ξηνέας, Ξῆνις.
Νικίδας / -ης : 395 et n. 89, 398 ; Νικίδιον : Ξενόκλεις, Ξενοκλίδας : 612-613.
394, 395, 697 ; Νικιδώ : ibid. et 398. Ξενοκρατώ : 458.
Νίκιον : 631, 647 ; Νῖκις : 478, 488, 629, Ξενομήδεια : 523.
647 ; Νικίων : 488, 647. ξένος : 587, 644, 645 ; -ξενος : 120.
Νικοκλείδας : 613 ; Νικοκλῆς : 311. Ξένος : 629, 645.
Νικοκράτεις : 565. Ξενόφιλος : 311, 348.
Νικόλαος : 180, 186. Ξενοφῶν : 348.
Νικόμαχος, Νικομᾶς, Νικομήδης : 306 ; Ξένυλλος, Ξενύλος : 344, 348, 351, 353.
Νικομώ : 458. Ξηνόφαντος : 488 ; Ξηνέας : 645 ; Ξῆνις :
Νικοπόλεια : 526. 488.
-νικος : 58, 104. ξίφος, ξιφοδήλητος : 103.
Νικοτελώ : 458. Ξύλλας : 172.
Νικύλος : 351-352 ; Νίκυλος : 180, 186 ;
Νικυλίδας : 689. Οβας (pamph.) : 314.
Νικώ : 351, 631, 647 ; Νίκων : 351, 488, Ὁδαίδας : 563.
630, 647. Ὀδυσσεύς : 232.
Νινναροῦς : 213. Ὄϝιλος : 276, 698.
Νίννιον : 400, n. 129. ὄζω : 13, 693-694.
Νιουμείνιχος : 610. οἶκα : 503.
Νόημα : 412. οἰκίδιον : 276.
Νόιλλα : 187-188 et n. 122. Ὀϊλεύς : 276.
Νομέας, Νομᾶς, Νόμας : 304 ; νομάς : Οἰμᾶς, gén. -ᾶτος : 319.
421, 425. Οἰνάδης, Οἰναῖος : 310.
νοσημάτιον : 6. οἰνάριον, οἴναρον : 400.
Νουία, Νουίλα (osq.) : 187-188. οἰνάς : 420, 425, οἰνάδες : 420, n. 3.
Νούμακος : 696. *Οἰνᾶς : 310.
Νύμμελος : 185. Οἰνεύς, Οἰνέας : 36, 38.
Νυμϕόδωρος Νυμφᾶς : 311, gén.  -ᾶτος : οἴνη : 420, n. 3, 431.
317  ; Νυμφῆς : 328, n.  98 ; Νυμφώ : Οἰνίλος : 363.
458 ; Νύμφιλλα : 463. Οἶνις : 488.
Οἰνοπίων : 363.
Ξάνθη, Ξάνθος, ξανθός : 230, 285. οἶνος : 36, 400.
Ξανθίδιον : 381. Οἰνοῦς : 514.
Ξάνθιππος : 15, 82, 284, n. 23, 454 (Ξαν- Οἰνοῦσσαι : 494 ; οἰνοῦττα : 497.
θίππα), 488, 612, n. 45. Οἰνοχάρης : 488.
Ξάνθις : 477, 488. ὄϊος : 276.
Ξάνθυλλα : 464. οἰοχίτων : 235, n. 34.
Ξειναγόρεια : 527, n. 39 ; Ξεινύλος : 353. οἶτος : 108.
Ξεναγόρας : 391 et n.  71 (Ξενάγιον) ; ὄκρις : 369.
Ξεναγόρη : 517, 527. ὄκταλλος : 341.
Ξεναινώ : 690. ]ολεας : 46.
Ξενάκων : 696. Ὀλόσσηιος : 183, lat. Volusius.
Ὀλυμπία – παίγνιον 747

Ὀλυμπία : 437. Ὀρέστης / -ας : 104, 115, 162, 232, 561,


Ὀλυμπιάδας / -ης : 434, 614 ; Ὀλυμπιάδες : 693.
430. Ὀρθαγόρας : 488, 565 (Ὀρθαγορίδας).
Ὀλυμπιανή : 697. Ὄρθων : 488-489.
Ὀλυμπιάς : 420, 423-425, 434. Ὄρμενος : 241, n. 55, 243.
Ὀλύμπιος : 181, 420. Ὀρνιθίων : 699, n.  13 ; ὀρνίθιον : 414,
Ὀλυμπίχα : 464, 610 ; Ὀλύμπιχον : 460 ; 415 ; Ὀρνιθᾶς : 319 ; ὀρνιθᾶς : 309.
Ὀλύμπιχος : 611. ὀρνιθόπουλον (gr. mod.) : 274.
Ὀλυτς : 88. ὄρνις : 44, 93, 368, n. 98, 414-415.
Ὁμολώϊχος : 610. Ὀρνιτᾶς : 319.
Ὀνάσανδρος : 59. Ὀρνιχᾶς : 323 ; Ὀρνιχίδας : 17.
Ὀνασιάς, Ὀνασίς : 436 ; Ὀνασίχα : 464 ; ὄρνυμι, ὀρνύμενος, ὀρσάμενος ὄρμενος :
Ὀνασίων : 645. 243.
Ὀνασίκλεια : 519. Ὀροβίδας : 563.
Ὄνασίμβροτος : 59. ὄρος : 42 et n. 25, 102.
Ὀνασι-μένης, -μᾶς : 312 et n. 42 ; Ὀνάσι- Ὀρσέλαος : 99 ; Ὀρσίλλας : 473.
μος : 83, 312. Ὄρτας, Ὀρτάδας : 563.
Ὀνασίτιμoς : 52. ὁρτή : 503.
Ὀνασιφόρον : 460. ὄρτυξ : 19.
Ὄνασος, -ονασος : 52 (Ὀνασώ), 53, 55, Ὀρφς, Ὀρφεύς, Ὀρφήν, Ὄρφης : 87 et
59 ; Ὀνάσων : 630, 645. n. 69.
Ὀνήσανδρος : 59. ὄρχις : 44, 269, 369 ; ὀρχίλoς : 44 et n. 29,
Ὀνησίας, Ὀνησᾶς : 52. 275, 368-369.
Ὀνήσιμος, Ὀνησίμη : 698 ; Ὀνησιμής : ὀρχίτης : 269.
210, n. 37. Ὀρχομενός : 241, 607, n. 30.
Ὄνησις, Ὀνησίων, Ὀνήσων : 52 ; ὄνησις : Ὀσθίλος (lat.) : 357, n. 71.
59 ; Ὀνήσιον : 460. ὀστρακᾶς : 301-302, 315 (ὀστρακοποιός).
Ὀνησιφόρον : 460. Οὐαλεντᾶς, Οὐαλεντίων (lat.) : 211.
ὀνίνημι : 645. Οὐαλεριάς (lat.) : 211, 438.
ὄνομα : 2 et n.  5, 4, 6, 190, n.  142, 302, Οὐενέληιος (lat.) : 184.
347, 354, 426 ; -ατα : 5, 300-302, 305 ; Οὐιτάλιος (lat.) : 696.
ὀνομάζω : 1, 2, 171-172. Οὐλιάδης : 209.
Ὀνομακλείδης : 545. Οὐλίξης : 177.
ὀνομασία : 4. οὕνεκα : 57, n. 69.
Ὀνύχιον, ὄνυξ : 393. Οὐολόσιος : 183.
Ὀπάων : 41 ; ὁπάων / ὀπάων : 36, 41. Οὐπερμενίδας : 592, 613, 618.
Ὁποίη : 695. Οὐράνιος : 181 ; Οὐρανίων : 274.
ὀπί : 43. οὐσία : 2.
ὀπτίλ(λ)ος : 368. ὀφίδιον : 276.
Ὀπώρα : 285, n. 29. ὄχος : 56.
ὀπώρεια : 42 et n. 25.
Ὀρβανός, Ὀρβανιανός : 575. Παᾶς : 319.
ὀργίλος : 184, 334, n. 3, 339, n. 19, 368. Παγγαῖον : 407.
Ὀργομεναί : 241, n. 55. Παγχάρης : 542.
Ὄρειοι, Ὀρειάς, ὀρειάδες : 426 et n. 25. πάθη : 257 et n. 92.
ὀρεσκῷος : 102. παίγνιον : 388.
748 παιδάριον – Πεδακλεῖς

παιδάριον : 8-9 (παιδιά, παιδίον et 396) Παρμενίσκος : 167, 205, 530, 692.
273 (παιδαρίων et n. 15). Παρμενώ : 458, 699.
πάϊλλος : 340, 343, n. 37. Παρμένων : 167, 693.
Παιών : 503. Παρμήν : 72, 80, n. 39, 692.
Πακύλα, Πάκυλλος : 187. Παρνάττιος : 618, n. 52.
πάλα : 45. Παρνοπίδας : 587.
Πάλαθις : 643 (παλάθη / -α et 415). παρονομασία : 4 et n. 15.
Πάλακος : 45, n. 32. Παρόραμα : 412.
παλάσιον : 415. παρώνυμα, παρωνυμία, παρώνυμος : 4, 5,
παλλακή, παλλακῖνος : 190 et n. 142. 12.
Πάμιλλος : 361, n. 79. παρώρεια, -ος : 42.
Παμπείριχος : 610. πᾶς : 645.
Παμφαίης : 552 et n. 45 ; Παμφᾶς : 311. Πασάρετoς : 58.
Πάμφιλος : 311, 572. Πάσαρχoς : 47 et n. 38, 58.
Παναροῦς : 213. Πασέας : 488, 645.
Πανδάμασος : 59. Πασιθέα : 528.
Πανδίων, -ονίς : 430, n. 42. Πάσιππος : 488.
Πανίσκος : 274. Πασιφάεσσα, -φῶν : 512.
Πανκρατίδης : 552. Πασίφιλoς : 58.
πανοῦργος : 20. Πασίων, Πάσων : 630, 645.
Παντακλεία, -κλα : 522. πάσχω : 257.
Παντάς, Παντάδας : 434, 689. Παταγᾶς : 314, 317.
Παντεύς : 39, n. 10. † Παταρήν : 74, n. j.
Παντιμία : 529. πάτερ : 254, n. 86, 273, n. 15 (et πατέριον,
Πάντις : 39, 629, 645 (Παντίας). πατερίων).
Παντοῖος : 182, 695 (παντοῖος). Πατερήν : 72, 80, n. 39.
Πάντυλλα : 39, n. 10. Πατρέας : 645.
Παντώι : ibid. πατρίδιον : 382, 397 (πάτριον).
Πανφάνης : 311. Πατροκλέας / -έης / -ῆς, Πάτρoκλoς : 35,
πάομαι : 645. 80, 165-166, 335-336 et n. 10, 561.
Πάπελος : 185. Πατροφίλα : 489.
Πάπης : 271. Πάτρων : 489, 630, 645.
Πάπι(ο)ν : 210. Πατρωνοῦς : 461.
παππίδιον : 382. πατρωνυμικός : 6.
Παππίων : 272. Παῦλα, Παῦλος, Παυλῖνος : 702-703 ;
παρ(ά)φορος : 617. Παυλάς : 209, 437, n. 56.
Παραιβάτας, Πάραιβις : 488. Παυσανίας : 320, 471, n. 8, 542.
Παράλιος : 287 ; παράλιος : 282. Παυσᾶς : 320 ; Παυσήν : 72, 79, 80, n. 39 ;
Πάραλος : 286, 287 ; Πάραλοι : 289 ; Παυσοῦς, Παυσώ : 458, 461.
πάραλος : 282. Πάχας / Παχᾶς : 643.
Παραμύθιον : 407. Πάχης : 94.
Παραποτάμιοι : 289. παχύς : 41, 47, 184, 643 ; παχυλῶς : 41,
παραστάς : 421. 342, 356.
Παρθενοῦς : 461. πέoς : 44.
Παριάς : 426. πεδά : 295.
παρκαταβολά : 480 et n. 58. Πεδακλεῖς : 613.
Πεδάπατρος – -πόλε(ι)α 749

Πεδάπατρος : 295. πίθος : 48, 269 (πιθίτης).


Πεδάρετος : 688. Πινακᾶς : 324 ; Πινακιδᾶς : 301-302
Πειθιάς, Πειθιάδης : 434. (πινακιδᾶς et 316, πινακίδες).
Πειθόλα : 561, 564. Πίναξ, πινάκιον : 388.
Πειθοῦσσα : 511. Πινδαροῦς : 213.
πείθω / πείθομαι : 117, 643, 644. Πιπερᾶς : 323.
Πειλεστροτίδας : 612, 619. Πίστα, -ός : 630, 643-644.
Πειρίθooς : 35. Πίστανδρος : 60, n. 74.
Πεισιρόδα, -εα : 524. Πίστων : 629, 643.
Πεισίστρατος, Πεῖσις, Πεισίων : 489, 460 Πιτθιάδας : 614.
(Πείσιον), 643 (Πεισίας). πίττα : 45, 610, 618.
Πεισώ : 631, 644. Πίττακος : 45, n. 32.
πελειάς : 252, 420, n. 2, 431 (πέλεια). Πίτταλος : 372, n. 105.
Πλς : 88. Πιττίχα : 610, 618.
πελιóς : 252. Πιτυοῦσσαι : 494, 514.
Πελλᾶς, gén. -ᾶτους, -ᾶτυς : 319. Πλακίτας, πλακοῦς : 269.
πεμπάς : 421. Πλάταια, πλατεῖα : 507, 509.
πενθερά, πενθεράς : 431. Πλάτιννα : 463.
Πενθίλος : 232. Πλάτιον : 392 (πλατύς et 230).
πέπαμαι : 47. Πλάτων : 142, 160, 230-231, 617.
Περγασή : 248. Πλειάς : 423.
Περδικκᾶς, πέρδιξ : 322. Πλεισταίνετος : 693.
Περιβωτάδας : 613. Πλειστιάς : 434.
περικαλλής : 280. Πλειστόξενος : 560.
Περικλῆς : 99, 147, 149, 160, 231, 279. Πλστιάδης : 434.
Περιμήδης : 35. Πλείστωρ : 693.
περιστερóς, -ά : 252. πλοῦταξ : 45.
Περμάσιχος : 610. Πλουταροῦς : 213.
Περμησός : 610-611. Πλούταρχoς, Πλουτᾶς, Πλουτεύς : 36.
Πέρμιχος : 611, 619. Πλοῦτος : 237 (πλοῦτος et 36, 45).
Περσέπολις : 99, n. 1. Πλωτεινάς : 437, n. 56.
Περσεύς : 138, 162 ; Περσς : 88. Πλωτιάς, Πλωτινάς : 211.
Πεταλᾶς : 314 ; Πέταλος : 337 ; πέταλον : Πνᾶς : 319.
184, 314. Πνυταγόρας, Πνυτάριον : 402.
πετάννυμι : 184. Πόεσσα < Ποιήεσσα : 502-503.
Πετραῖος : 561. πόθεν : 354.
Πετρέεντος, πετρήεις : 502. Ποίας : 329, n. 102.
Πετρῖνοι : 189. Ποίδικος : 688.
Πετρωνᾶς : 211. Ποιῆς : 328, n. 98.
Πηλεύς : 160. ποικίλος : 339, n. 19, 368.
Πηλιάς : 420 (Πήλιον), 430. Ποιμήν, acc. Ποιμένα : 69, 700 (ποιμήν).
Πηρώ : 40 (πήρα, -ός), 457. Ποιμένδας : 585-586 (Ποιμενίδας et n. 29),
Πιακῖνοι : 189. 615, 616.
Πιέριον, Πιερίς : 39, n. 13. Ποκᾶς : 319.
πίθηκος : 173, 595, 614, 618. Πόλα : 526, n. 31 (πόλα et 94).
Πίθθες : 594. -πόλε(ι)α : 94, 526, 528.
750 Πολέα – πρόβατον

Πολέα (Πόλεα?) : 526, n. 33. Ποταμόδοτος Ποταμόδωρος ποταμός :


Πολέας : 647. 608 et n. 33 ; Ποτάμων : 620.
Πολεμώ : 458 ; πόλεμος : 54, 108. Ποτιδᾶς : 305 et n. 23.
Πολεμωνιανή : 704. Πουθίων : 616 ; Πουθίλλει : 607.
Πολιάνθης : 476. -πουλος (gr. mod.) : 274.
Πολιουγαθίδας : 618. Πουλύας : 15.
πόλις : 94, 280, 501 ; -πολις : 59, 202, 526. Πουπλᾶς, Πουπλίων : 210-211.
Πολλείων : 695. Πουρεινίδας : 72, 76, 82-83.
Πολ(λ)ήν : 72, 76. Πουρρίχιος : 610.
Πόλλης : 154, 160. Πουτάλα : 696.
Πολλητίδας : 94. Πραξεύς, Πραξέας : 53 et n. 58 ; Πραξῆς :
Πολλιάδας : 15 (Πολλίδας et 471 et n. 13), 520, n. 17.
628, 647, 697. Πραξίας : 53, 151-152 et n. 95, 160, 489,
Πόλλις : 647 ; Πόλλιχος : 629, 647. 569, n. 30, 643 ; Πραξιάδας : 471, 489.
Πολλίων : 161. Πραξίδαμος : 53.
Πολύα : 702. Πραξικράτης : 489.
Πολυδεύκης : 91 (Πολυδευκεύς), 137, 161. Πραξίλαος, Πραξίλλεις : 698.
Πολυκράτεις : 565. Πραξίλεως, Πράξιλλα : 462-463.
Πολύκτωρ : 693. Πραξινόα : 391.
Πολύλαος : 348 et n. 51, 350 (Πόλυλ(λ)ος Πρᾶξος, Πραξ(ι)ώ : 53 ; Πρᾶξις : 489 ;
et 366). Πράξιον : 391.
Πολυλλίδης : 359. Πρασιᾶς, πρασᾶς : 323.
Πολύμναστος : 489 ; Πόλυμνις : 489, 608, πράσσω : 643.
n. 32. Πραταλίδας : 689.
Πολυξένα : 425 ; Πολυξενίδας : 587, n. 32. Πράτας : 473 et n. 19.
πολύρρην, πολύρρηνος : 49. Πρατέας : 627, 645 (Πρατίας).
Πολυτίμα / -η : 441, n.  72 (Πολυττίς) ; Πρατεύς : 44.
Πολύτιμος : 613. Πρατῖνoς, Πρατίνας : 169.
Πολυφείδης : 543, n. 19. Πρᾶτις : 489.
Πολυχάρης : 15. Πράτιχoς : 44, 169.
ποντίλος : 368. Πρατόλας : 689, n. 4.
Ποπλᾶς : 209 et n. 29, 211, 314. Πρατομάκης : 178.
Πόπλιος : 71, 572. Πρατόμαχος : 178.
-πορις : 202. Πρατομήδης : 489.
Πορσίαλος, Πορσίλος : 688 ; Πορσόπα : Πρᾶτυς, Πρατύλoς : 169.
688. Πρατώ : 169 ; Πράτων : 193, 629, 645.
Πορτῖνος, πόρτις : 23, n. 77. Πραΰλος, Πραΰλιον, Πραΰλιος : 405.
Ποσείδιππος, Πόσειδις : 489. Πρεπέλαος : 120.
Ποσειδώνιος : 489, 704. Πρέπουσα : 689, n. 5.
Ποσῆς : 548 et n. 33. Πρηξᾶς : 312.
Ποσθαλίων, Ποσθεύς, Πόσθων, πόσθη : Πρίαμος, Πριαμύλλιον : 8.
40, n. 17, 44. Πριγκιπίων (lat.) : 211.
Ποτάγορος : 688. Πριμιγᾶς, Πριμάς : 210-211 ; Πριμίων :
Ποταμία, -ιάς : 437. 175, 195, 210-211.
Ποτάμιλλα : 462-463. Πριμογένεια : 175.
Ποτάμμει : 607, n. 30, 608, 619, 620. πρόβατον : 275.
Πρoθoήνωρ – Πυρρῖνος 751

Πρoθoήνωρ, Πρόθοος : 35, n. 2. Πυθέας : 628, 647.


Πρόθυμος, πρόθυμος : 282 et n. 15, 286. Πυθεύς : 85.
Πρόκλεια, Προκλῆς : 522 (Πρόκλα, Πρό- Πυθήν : 73, 74, 75, 80, n. 39.
κλος / -ϙλος et 476 et n. 36). Πυθῆς : 552.
Προκλίων : 210-211. Πύθια : 420, n. 5.
Προμαθεύς : 160. Πυθία : 630.
Προμθς : 88. Πυθιάδης : 434, 687.
Προμένης : 279. Πυθιάς : 420, n. 5, 423-424, 425, 426, 434,
Πρόμνησος : 59. 435.
πρόνοια : 19. Πυθίας : 647.
Πρόξενος : 284, n.  25, 286 (πρόξενος), Πύθιλλα : 463.
565 (Προξενίδας). Πυθίννης : 699.
Πρόππει : 608, 613 (Προππίδας). Πύθιον : 391.
προσηγορία : 4 ; προσηγορικός : 2. πυθιονίκα : 611, n. 42.
προσκτάoμαι : 58, n. 71. Πυθίς : 435.
προσώπα : 688. Πυθίων : 647.
Προτιμώι : 478 et n. 46. Πυθόδαμος, Πυθοδᾶς, Πυθόδοτος : 311.
Προύνικος : 269. Πυθόδηλος : 337.
Πυθοδώρος : 270.
πρόφρων : 280, 282.
Πυθόκλεια : 520.
Πρωταροῦς : 213.
Πυθοκρίτα : 701.
Πρώταρχoς : 36.
Πυθονίκα : 391.
Πρώτας : 44.
Πυθώ : 435 ; Πύθων : 630, 647.
Πρωτεύς : 36, 44 (Πρωτέας et 169, Πρω-
Πυκέλειος : 172, 183, 185.
τίων, Πρῶτις).
Πυλάδης : 542, n. 14, 544.
Πρωτίας : 169.
Πυμένδας : 586, cf. Ποιμένδας.
Πρωτoγένης : 165.
πυνθάνομαι : 647.
Πρωτόλαος / -λεως : 689, n. 4. πῦρ : 39, 259-260.
Πρωτολέων, Πρωτολίδης : 689, n. 4. Πυραίχμης : 39, n. 11.
Πρῶτος : 238 ; Πρωτώ : 457-458 ; Πρώ- Πυργοτέλης : 94.
των : 44, 169 ; πρῶτoς / πρᾶτος : 36, πυρή / -ά : 259-260 et n. 99.
169, 238, 645. Πυρήν : 72, 82 (πυρήν), 83.
πρωτότυπος : 6, 9. Πύρης : 94, 271.
Πτōίλλ / -ει : 605, 607-608. Πυριβάτης, Πυρικλῆς, Πυριλάμπης, Πυρι-
Πτολεμαῖος : 204, 205 (Πτολεμᾶς) et λίων, Πύριλλος : 39, n. 11.
n. 11, 272, 561, 690, 694. Πύριππος : ibid. et 82.
Π(τ)ολεμάτας : 701. Πῦρις : 39.
Πτολλᾶς : 320 ; Πτολλαροῦς : 213. πυρός : 82 ; πυροφόρος : 103, n. 16.
Πτυλᾶς : 472. Πύρρακος : 695.
Πτωίλλεια : 607 ; Πτωίλλε(ι)(ς) : 698. Πύρρανδρος : 325.
Πτωιόδωρος : 617. Πύρρανθος : 325, 627.
Πτώιον, Πτώιος : 608 ; Πτωίων : 617. Πυρρᾶς : 325, 627, 647.
Πυγμαλίων : 40 et n. 17, 313 (Πυγμᾶς, cf. Πυρρήν : 73, 75, 80, n. 39, 647.
πυγμή). Πυρρίας : 191, 647, 689 (πυρρίας), n. 2.
Πυθαγόρα : 529 ; Πυθαγόρης : 545-546. Πυρρίδας : 612.
Πυθᾶς : 303, 304, 310. Πυρρῖνος : 191.
752 Πυρριτῖνος – Σελινοῦς

Πυρριτῖνος : 689, n. 2, 702 (Πυρρίτιος). Σαβύλινθος : 690, 699.


Πύρριχος : 167, 191 ; Πυρρίχα : 464 ; πύρ- Σάβυς : 453.
ριχος : 16, n. 52. Σαγυθῖνος : 591.
Πύρρος, cf. πυρρός : 16, 137, 161, 167, *Σακεσ-, σακέσπαλος, σακεσφόρος : 102.
191, 230, 238, 585, 612, 629, 647. σάκος, σακοδερμηστής : 103.
Πύρρων : 689, n. 2. Σάλακος, Σάλαξ, Σάλαρος, Σάλιος, Σαλ-
Πυτίκκα : 191. λᾶς, Σάλλιον, Σάλλιος, σαλός, σάλος :
-πωλιδ- : 109. 84.
πωλικός : 37, n. 5. Σαλαμίνιος : 699.
Πωλλάς : 211 (Πωλλιττᾶς), 437, n. 56. Σαλλήν : 73, 79, 83, 84.
Πῶλος : 154, 160 ; πῶλος : 37, n. 5, 108. σάλπιγξ : 617.
Πώταλος : 696. Σαμάκιον : 406.
Σαμβᾶς : 320.
Ϙλίδα : 611, 612, 619. Σαμβατεύς : 643.
Ϙόραξ : 49, n. 47. Σαμία, Σάμιος : 432, 645 ; Σαμιάς : 432-
Ϙυδάδας : 614. 433 ; Σαμιάδας / -ης : 433 ; Σαμίχα :
Ϙύλλαρος : 401. 464, 610 ; Σαμίων : 629, 645.
Σάμος : 629, 610, 645.
Ῥαικαῖος / Ῥακαῖος : 184. Σάμων : 617.
ῥάκος, ῥακόδυτος : 103. Σαννᾶς : 322.
ῥᾶνα : 49, n. 45. Σαπφώ : 232.
Ρασκουπολις (thr.) : 202, n. 5. Σαραπιάς : 423-424, 434 ; Σαραπίων : 137,
Ῥαχᾶς : 314. 159, 212 ; Σαραποῦς, Σαραπᾶς : 320.
ῥεμβάς : 425. Σάρβαλος : 591.
Ῥηγῖνος : 189. σάρδιον : 414.
ῥηματικός : 6. Σαρπιγγίων : 617.
ῥηματίσκιον : 275. Σασαμᾶς : 323.
ῥήν : 49, n. 45. Σασμᾶς : 314.
Ῥηναεύς, Ῥηναία, ῥῆνιξ : 49, n. 45. Σάτυρος : 81, 161 ; Σατύρα : 529, 561 ;
Ῥινυούνδας : 563. Σατυρήν : 73, 81 ; Σατυρίων : 272.
Ρίνων, ῥίς : 44. Σαυλῖνος : 703.
Ῥόδα, -ρόδα, -ρόδεα : 523-524. Σαῦϙος, σαυκός : 643.
Ῥοδάρι(ο)ν : 401. Σαυρίτας, σαύρα : 269.
Ῥοδία, Ῥοδιάς : 432. Σάων, Σαώνδας : 614-615.
Ῥόδιλλα : 462, 463. Σεβαστῆοι : 575.
Ῥόδι(ο)ν : 393, 401. σεβαστῆος : 569.
Ῥόδιππος : 489. Σεβηρᾶς : 210, 211.
Ῥοδοῖος : 435 (Ῥοδοιάς), 695. Σείρακος : 45, n.  32 (σειρά et 269) ; Σει-
ῥόδον : 393. ρίτης : 269.
Ῥόδυλλα : 464. Σεκοῦνδα, Σεκουνδῖνα : 175.
Ῥόδων : 489. Σεκουνδίων : 175, 195, 210, 211.
Ῥοτύλος : 183, 185. Σελένιον : 387.
Ῥουφᾶς : 209 et n. 29, 314. Σεληνίς : 459.
Ῥουφίων : 210, 211. Σελίνιον : 383 et n. 11.
Ῥοῦφος : 215. Σελίνιος : 699.
Ῥύνχōν, ῥύγχος : 617. Σελινοῦς, Σελινούντιος : 494.
Σεμηρος – Σούνιον 753

Σεμηρος (lib.) : 484. Σῖμος : 230, 352, 406, 629, 645, 698.
Σενεκίων : 211. σιμός : 40, n. 17, 45, 202 (et σῖμος), 230,
Σεραπιάδης : 434 ; Σεραπιάς : 424 ; Σερα- 252 (σῖμος) 352, 402, 406, 412, 480,
πίων : 137, 159, 194. 612, 615, 645.
Σεργίων, Σεργοῦς : 211. Σιμοτέρα : 528, 531.
Σεργωνᾶς : 209, 211. Σιμουλίνα : 703.
Σερουιλίων : 211. Σιμυλίων : 193.
Σεσμᾶς : 314. Σιμύλος : 352, 357, 480, 629, 645.
Σευθάριον, Σευθης, Σευθοῦς (thr.) : 206- Σιμώ : 436.
207 et n. 22, 214. Σίμων : 230, 352, 617, 630, 645, 700.
(σ)ϝέτας : 693. Σιμώνδας : 615.
Σήσαμος, σήσαμον : 83, n. 51. Σιμωνίδης : 581, n. 6, 612-613.
Σθενέδαμος / -δημος : 113-116, 119. Σιναρᾶς : 314.
Σθενέλαος : 99-101, 109, 113-114 (Σθενέ- Σίρακος, Σίραχος, Σίρων, σιρός : 48.
λας, Σθενελαΐδας, cf. Σθενόλας) 115, Σισύμβριον, σισύμβριον : 408.
119, 372. Σιττᾶς : 323.
Σθένελος : 114 (Σθενελίδης), 189, 344, Σιττυρᾶς : 317.
372, 373. σκαιóς : 253.
Σθένιος : 189. σκάφος : 268 ; σκαφίτης : 269.
Σθέννων : 348, 443. Σκεπαρνᾶς, σκέπαρνος : 324.
Σθενόδημος : 104. σκεῦος, σκευή, σκευοποιός : 103, n. 15.
Σθενοκράτης : 104, 489. Σκίνδαξ, Σκίνδιον, σκινδακίζω : 390.
Σθενόλας : 104. Σκιρφώνδας : 581.
σθένος : 100, 108, 109, 113-114, 121, 189 ; Σκίρων : 161.
-σθένης : 39, n. 10, 104, 113, 177. Σκόπας : 328.
Σθένυλλος : 344, 348. Σκορδᾶς : 324, n. 87.
Σθένων : 489 ; σθένω : 100, 109, 114-115, Σκοτουσσαία (γῆ) : 563.
119. σκόφος : 442.
Σθόρυς : 453. Σκύθαινα, Σκύθων : 695.
σίαλος : 341. Σκύθης : 178.
Σικελός : 184. Σκυλακεύς : 275.
σίλλος : 341. σκυλόπουλον (gr. mod.) : 274.
Σίμα : 630, 645. Σκυμνóς : 239, 240, 242, 243, n. 61, 251.
Σιμάδς : 436. σκύμνος : 239, 242, 243, n. 61.
Σιμάκα : 695 ; Σιμάκιον : 406, 689, n.  5, Σκυρθανας (illyr.) : 79.
690 ; Σίμακος : 45 ; Σιμακώ : 458. Σκύτας : 178.
Σιμάλα, -άλιον, -άλιος, -αλον : 696 ; σκῦτος, σκυτοτόμος : 102.
Σιμαλίων : 40, n. 17. Σμαράγδη, Σμαρώ (gr. mod.) : 458.
Σιμάριον : 402. (Σ)μικύθα, Σμικυθίων, Σμίκυθος : 427,
Σιμάς : 436. n. 29, 702.
Σιμία : 645. Σμικύλος : 352 ; Σμικυλίων : 360.
Σιμίας : 389, 531. (σ)μῖλαξ, (σ)μῖλος : 45.
Σίμιον (?) : 389 et n. 47. Σμινθεύς, Σμίνθιος : 174.
Σιμιχίδας : 689. Σόλων : 231.
Σιμίων : 272. Σουλπᾶς : 210.
Σῖμον : 412. Σούνιον : 407.
754 Σουπερίων – Συρακούσιος

Σουπερίων : 210. Στράτης : 475, n. 32.


Σουσαρίων, Σουσας (thr.), Σουσίων : 203, Στράτιον : 391 et n. 66.
204, 213. Στράτιος : 629, 645.
Σουχᾶς : 319, 320. Στρατόκλεια : 391.
Σόφιλλος : 15, 363 et n. 85, 364. Στρατοκλῆς : 489.
Σοφοκλῆς : 231, 363 et n. 85. Στρατονίκα : 425.
σοφός : 354. Στρατόνικος : 567.
Σόφων : 363, 364. στρατός : 645 ; -στρατος : 39, n. 10, 391,
Σπαρτακίων / -τοκίων : 203-204, 215. n. 66.
Σπειώ : 457. Στρατοῦς : 461.
σπέργυλος : 363. Στράτυλλος : 629, 645.
Σπινθήρ / -είρ, σπινθήρ : 82, 690, n. 6. Στρατώ / -ώι : 461, 478, 489.
σποδελός, σποδός : 261. Στράτων : 489, 566 (Στρατωνίδης), 567,
Σποργίλος : 363, 370. 630, 645.
Σποροῦς : 461. Στρεψιππίδας : 612.
Σπουρκίων : 210, 211. Στρίμπων : 176.
σπυρίδιον, σπυρίς : 397. Στροβιλίων : 182.
-στᾱ : 102, 115. Στροβίλος : 184, 363 (στροβιλός, στρόβι-
Σταγόνιον : 460. λος, στρόβος), 364, 698.
Σταμένα : 242. Στροβύλος : 184.
Στασάνωρ, Στᾶσις : 489. Στρογγυλίων, στρογγύλος : 360, 366 et
Στάχυς : 453, n. 24. n. 92, 367.
στέλεχος, -στελέχης : 103 (στελεχόκαρ- Στρογιήν : 73, 82.
πος), 235-236. Στρόμβιχος : 610 (στρόμβος et 366).
στέμμα : 412. Στρομβυλίων : 360, 366.
Στεμφύλιος : 360. στροπά : 82.
στενός : 355, 358. Στροπήν : 73, 76, 82.
Στεφανοῦς, Στεφανώ : 461. Στρούθιον, Στρούθειν, στρουθός : 389, 393.
στῆθος : 22. στυφελός : 261.
στηλίτης : 269. Σύβαρις : 432.
Στησαμενóς : 241. Συβλιαγοῦς : 207.
Στιβάς : 425. συγκριτικός : 6.
Στιλβώνδας, στίλβω : 614-615. Σύθαινα : 464.
Στιλπαί, Στίλπας, Στιλπίων, Στίλπων : 176 συλάω : 645.
et n. 56. Συλεύς : 637, n. 18, 645.
Στιώνδας : 581, 622. Σύλιχος : 629, 645.
στόμφαξ, στόμφος : 45. σύμβολον : 133.
στονόεις, fém. στονόϝεσσα : 507, 509. Σύμμαχος : 279, 285.
Στορπικά, Στόρπας, στορπά : 82. Συμφέρουσα, Συμφώ : 458 ; Σύμφορον :
Στράβαξ : 695. 460.
Στραβᾶς : 314, 326, 473 et n. 18. συναλοιφή : 304.
στραβός : 37, 230, 261. συνδουλίων : 273 et n. 15.
Στράβων : 37, 231, 326, 626 ; στράβων : συνέριθος : 280.
37, 231. σύνθετος : 250, n. 76.
Στραταγίς, Στράταγος : 454. Συνίστωρ : 286, n. 36.
στραταγός / -ηγός : 107. Συρακούσιος : 494.
Συρᾶς – τειχομαχέω 755

Συρᾶς, gén. -ᾶδος : 317. Σωτηροῦς, Σωτηρώ : 461.


Συριες (osq.) : 173. Σωτιάς : 434 (Σωτιάδης), 436 (Σωτία).
Σύριον : 393. Σώτιμος : 311, 399 (Σωτίμα).
συριστί : 319, n. 71. Σωτίων : 629, 645.
Συρίων : 203, 214. Σωφροσύνα : 449.
Σφυρᾶς : 314.
Σχιδᾶς : 473 et n. 18. Ταβαλβις (lib.) : 484.
σχοινίλος : 368. Ταδιογᾶς, gén. -ᾶτος : 320.
Σχοινίων : 274. Τάνταλος : 161.
Σῳζομενóς : 241-242. Τανύλος : 479.
Σώζουσα : 700. τάπης : 271.
σῴζω : 644, 646. Ταποσειριάς : 426.
Σωκλῆς, Σῶκλος : 336, n. 10. Ταραντῖνος : 189.
Σωκρᾶς : 311, 325, 327. Ταρκόνδας : 690.
Σωκράτης : 2, 165, 166, 311, 381, 547, Ταρουλας : 215, n. 56.
553. Τας : 438.
Σωκρατίδιον : 9, 166, 381. Τασουχᾶς : 212 (Τασουχάριον), 320.
Σωπᾶς : 320, -ᾶνος : 321. Τασταροῦς : 213.
Σωσήν : 73, 76, 80, n. 39. Τατα, Τατας : 438.
Σωσίας : 306, 489, 614 (Σωσιάδας).
Ταταίη : 172.
Σωσίβιος : 489.
.
Σωσιγένης : 543, n. 19.
Τατιανής : 210.
Σωσίλαος : 80.
Τατιάς : 424.
Σωσίλεως : 462.
Τάτι(ο)ν, Τατάριον : 210, 401 ; Ταταροῦς :
Σωσιλήν : 73, 80, n. 39.
207 ; Τατάσιον : 210.
Σώσιλλα : 462.
Τάττης : 271.
Σωσιμᾶς, gén. -ᾶτος : 319, n. 68.
Ταυριάδης : 547, n. 30.
Σῶσις : 489.
Σωσίχα : 464, 602, 610. Ταῦρος : 137, 161.
Σωσίων : 629, 646. Ταχύδημος, Ταχυκλῆς, Τάχυλλος, ταχύς :
Σῶσος : 629, 644. 350, 703.
Σωσοῦς : 461. Τειμήν : 74, 79.
Σωστρήν : 73, 80 (Σώστρατος), n.  39 ; Τείσαρχoς : 48.
Σώσ­τρα : 529. Τεισήν : 73, 80, n. 39, 646.
Σωσύλος : 629, 646. Τεισιάδης : 544, 546.
Σωσώ : 461, 631, 644. Τεισίας : 628, 646.
Σωτᾶς : 311, 437, 627, 645 ; Σωταροῦς : Τεισικράτεια : 391.
213. Cf. Σωτηροῦς. Τεισίμαχος, Τεισίων, Τείσων : 489 ; Τεί-
Σώταρχος : 60, n. 74. σιον : 391.
Σωτέχνα : 399. Τεῖσις : 646.
Σωτήρ, σωτήρ : 311, 395, 449 (Σώτειρα), Τεῖτος : 74.
688, n. 1. τειχήρης : 106, 107.
Σωτηριανή : 690. Τειχιεσσεύς, τειχιόεσσα, Τειχιοῦσσα : 503,
Σωτηρίδας / -ης : 394, 395 et n. 90, 612. n.  20 ; τειχήεσσαν (v.l. τειχιόεσσαν) :
Σωτηρίδιον : 393-394, 395, 688, n. 1, 697. 508, n. 27.
Σωτηρίχα : 464, 602, 610. τειχομαχέω, τειχοποιός, τεῖχος, τειχοφύ-
Σωτηρίων : 700. λαξ : 103 et n. 14.
756 τεκνίδιον – Τίτελος

τεκνίδιον : 382. Τιμαγόρατις : 701.


Τελαμών : 161, 414. Τιμάεις, Τιμάεσσα : 493, 501, 514.
τέλεα : 519, n. 13. Τιμαΐδας : 628.
τελέαρχος : 107, n. 24. Τίμαιος : 627, 647.
Τελέας : 647, 696. Τιμακράτη, Τιμακράτηια : 521.
Τελέβουλος, Τελέδαμος, Τελεκλίδας, Τιμανόρη : 517.
Τελέμβροτος, Τελένικος, Τελέστρα- Τιμαρέτα / -η : 440.
τος : 109, 113. Τιμάριον : 386, 401 (Τιμάριν).
τέλειος, τέληος : 519, n. 13. Τιμαρίστα : 401.
Τελέσανδρος, Τελεσίας : 489. Τιμαρώ : 440, 696.
Τελεσίβουλος, Τελεσίδημος, Τελεσικλῆς, Τιμᾶς : 311, 325, 632.
Τελεσίμβροτος, Τελεσίνικος, Τελεσί- Τιμάς : 423, 436, 632 (Τίμας).
στρατος : 113. Τιμᾶσσα : 476, 497-498, 500-506, 509,
τελεσίκαρπος, τελεσιουργός, τελεσσί- 513, 700.
φρων : 113, n. 39. Τιμέας : 640, 647.
Τελέσιλλα : 463. Τίμεια : 640, n. 33.
τελεσφόρος : 102. Τιμείας (?), *Τίμειον, Τιμειός (?) : 638-
Τελεσώι : 489. 639, 647.
τελέω, τελέσαι : 109, 113. Τίμεσσα : 498-499, 500-504, 513.
τελήεις : 508, n. 27. τιμήεις, τιμάεις, τιμήεσσα, τιμά(ϝ)εσσα :
Τελῆς : 632. 493, 503-504, 508, 513-514.
Τελλακώ : 479, n. 49, 696. Τιμήν : 73, 80, n. 39, 692.
Τελλεύς : 85 (Τελλεΐδας), 637, 647 (Τελ- Τιμήσαρχος : 48.
λίας). † Τιμῆσσα : 498, 502, 700, cf. Τίμεσσα.
Τελλήν : 73, 74, 75, 76, 80, n. 39. Τιμήσυλλα : 464.
Τέλλος : 372. Τιμίας : 639 ; Τιμιάδας : 628, 647.
τέλος, -τελής : 46, 109, 113, 121, 647 ; Τίμιος : 496, 639.
Τέλων : 489, 630, 647. Τιμίς : 436.
τέμαχος, τεμαχοπώλης : 103. Τιμόκιον : 391.
Τερείας, τέρετρον : 638. Τιμόκλεια : 392 ; Τιμοκλῆς : 547.
Τερτιάς : 209, 211, 437, n. 56. Τιμοκράτης : 311 ; Τιμοκράτη : 392.
τερψίμβρoτoς : 34, 51, 55, 59, 61. Τιμόλαος : 372 (Τιμολείδης, Τίμολλος,
Τερψιχόρη : 529. Τιμολλώ et 458), 608 (Τιμόλλει).
τεῦχος, τευχοφόρος : 103. τῖμος : 693.
Τηλεκλῆς, Τήλεκλος : 147, 161. **Τίμοσσα : cf. Τιμῶσσα.
Τηλεφάασσα, Τηλεφάεσσα : 512. Τιμοστρατίς : 632.
Τηλεφάνης : 535, 538, 542. Τίμυλλα : 464.
Τηλεφῶν : 512. Τιμύλος : 629, 647.
Τιβεριάς : 211. Τιμώ : 372, 436, 458, 461 (Τιμοῦς), 631 ;
τιθήνη : 618. Τίμων : 372, 630, 647.
τίκτω : 417, n. 6. Τιμωνίδας : 581, n. 6 ; Τιμώνδας : 586.
Τίμα : 436. Τιμῶσσα : 498, 511, 513, 700.
Τιμάōσα : 498. τίνω : 646.
Τιμάγιον, Τιμαγόρα : 391. Τισαμενός / Tεισαμενóς : 3, n. 11, 242.
Τιμαγόρας : 500. Τίτελος : 172.
τόκος – Φαῖδρος 757

τόκος, τοκάς : 421. Τυχής : 205 ; gén. -ῆδος : 437 ; Τύχων : 630,


Τολόβα, τολύπη : 23, n. 77. 643 ; Τυχαροῦς : 207-208 (Τυχαρώ),
τόμος, τομός : 256, 260, n. 102. 690 ; τύχη, -α : 19, 643.
τόξον : 235, n. 34.
Τορκος (thr.) : 200, 204, 213-214 (Τορ- Ὕβαιθος : 22, n. 74.
κίων). ὑβός, ὕβος ou ὗβος : 20, 21-23, 261 ; ύβος
Τραγίσκος, τραγάκια : 276 et n. 21. (gr. mod.) : 22.
Τρέλλος : 372, n. 105. Ὑβριλίδης : 371, 689.
τρέμω : 304. ὕβωμα, ὕβωσις : 23, n. 75 et 79.
τρεσᾶς : 301, 302, 303, 304, n. 16, 316. ὕει : 258, n. 93.
τρέφος, τρέφω : 236. υἱύς, υἱέος et υἷος : 503, υἱέες et υἷες : 503.
Τρέφων, Τρεφώνιχος : 610. Ὕμνος, Ὑμνίς : 643-644 (ὕμνος et 35).
τρέω : 304. Υξαν (lib.) : 490.
τριακάς, Τριακαδίων : 694. ὑοβοσκός : 103, n. 16.
Τριβουνᾶς : 211. Ὑπαίας : 688.
Τρίβων : 83. Ὕπαιθος : 22.
τριηρίτης : 269. Ὑπεράκριοι : 289.
τριπόδισκος : 37. Ὑπερήνωρ : 282, 295.
ὑπερθετικός : 6.
Τρίπυλος : 357, n. 71.
ὑπέρθυμος : 295, n. 73.
Τριχᾶς : 313.
Ὑπερίων : 194.
Τρόπιον : 392.
Ὑπερμένεις : 613.
Τροφιμᾶς : 308 (Τρόφιμος), 315 ; dat.
ὑπό : 23.
-ᾶτι : 319.
ὑποδμώς : 280, n. 4.
Τροχᾶς : 314.
ὑποκορίζομαι, ὑποκόρισμα, ὑποκορισμός :
Τρόχεις : 39.
6-10.
Τροχίλoς : 44 (Τροχιλλᾶς), 363, 364. ὑποκοριστικ-ός : 6-7, 177, 301-303, 347,
τροχίλος : 44, 339, n.  19, 340, 363, 369 -ον : 8, 301.
(τρόχιμος). ὑπώρεια : 41.
Τροχινίδας : 612. Υραθις et Υρατθις (lib.) : 484.
τροχός : 39, 369 (τρόχις), 612. ὑσμίνα : 41.
Τρύφαινα : 449, 464, 476. Ὑστάσπης : 60.
Τρυφώ, Τρυφοῦς : 461. Ὑψηχίδας : 497-499 ; ὑψηχής : 498.
Τρύφων : 194 (Τρύφιον, Τρυφίων), 231, (h)υψ(ι)- : 688.
449. Ὕψινος : 481.
Τρυφῶσα : 437 (Τρυφωσάς), 700. Ὑψιπύλα : 7, 99.
Τρῳάδες, Τρωιάδες, Τρωιαί : 431. Ὑψοκλῆς : 104.
Τρωϊάς : 424, 425, n. 18. Ὑψώ : 7.
Τρωΐλος : 232, 363, 698.
Τυδεύς, Τύδης : 87. Φαβατίων : 211.
Τυννίχα, Τυννιχίδας : 611. φαγᾶς : 303, 316.
τυννός : 270, 611. Φαεινίς : 630, 645 ; φαεινός : 643.
Τυννώνδας : 584. Φαενίκης : 109, 113.
Τυρήν : 73-74, 75, n. 22, 79, 81, 84. -φαϝασσα : 513.
Τύρος : 75, n. 22, 81 ; τυρός : 40. Φαηνά : 645 ; Φαηνός : 643.
Τυρώ : 40, 458. Φαῖδρος, φαιδρός : 169, 230 (Φαίδρα),
τυφλός : 335. 255, 496, 585.
758 Φαίνιππος – Φιλεωνίδας

Φαίνιππος, Φαῖνις : 489. φείδομαι : 108, 645.


Φαίνοψ, φαίνομαι : 108. Φειδοστράτη : 391.
Φαίνυλλα : 464. Φείδ-υλλος : 344, 349, 353 ; -υλλα : 464.
Φακᾶς : 314. Φειδύλος : 344, 351, 353, 702.
Φαλᾶς : 313. φειδωλός : 334, n. 3.
φαλλός : 271 (φάλης), 313 (φαλός). Φείδων : 192, 349, 351, 489, 629, 645.
Φαμενóς : 241. Φέρακος : 46.
Φανᾶς : 313, n. 45. Φερᾶς : 319.
-φάνης : 104, 349 ; -φάνεια : 517, 523. φερέγγυος : 108.
Φάνη : 523 ; Φάνης : 620 ; Φανῆς : 696. Φερεκλῆς, Φέρεκλος : 108.
Φάνιον : 385, 386, 388, 391. Φερεκράτης : 561.
Φανίς : 459. Φέρης : 94.
Φανοστράτη : 391. φερόμενος < *φέρομενος : 244, 246.
Φάντα : 630, 644 (φαντάζομαι). Φερονίκα, Φερώι : 489.
Φαντίας : 645. φέρω : 56, 108, 355.
Φάντος : 629, 645. φερώνυμον : 3, n. 11.
Φάνυλλα : 464. Φηλικίων (lat.) : 211.
Φάνυλλος : 344 (Φανύλη), 349 (Φανώ). Φήρ : 102.
Φαο-, Φαυ- : 104, n.  17, 113, 349, 481, φθάνω : 53, n. 59.
n. 60. φθίνω, φθεισήνωρ : 54.
φάος : 103, n. 12 (φαοσφόρος), 109. Φθιάς : 431.
Φάος : 481, n. 60. φθισίμβρoτoς : 54.
Φαούλλεις : 606, 607 ; Φάουλλος : 606. Φθιώτιδες : 431.
Φάραξ : 564, n. 19 ; Φαρακίδας : 561, 564. Φιδιτᾶς : 301.
Φαρνάκης : 204 (Φαρνακίων), 549. Φιθάδας, Φίθ : 592, 618.
Φαρνακύας : 495. Φίθων : 592 (Φιθώνδας), 595.
Φάρφōν : 591. -φιλoς : 58.
Φασσᾶς : 323. Φίλα / -η : 40, 141, 160, 162, 455-456, 630,
Φάττιον : 10, 393 (φάττα), 403. 646.
φαττίον : 9, 408. Φίλαγρος : 453.
Φαύδαμος : 104. Φιλαίθα, Φιλαίθιον : 392.
Φαυλλίχα : 610, 618. Φίλαινα, Φιλαινίς, Φιλαινώ : 455-456, 695
Φάϋλλος : 349, 606 ; φαῦλος : 610. (Φιλαίνη).
Φαυστάς, Φαυστίων, Φαυστώ : 211. Φιλαινέτη : 392.
Φάων : 349. Φιλαίνιον : 392, 455-456, 460.
Φειδαγόρας : 312. Φιλαίων : 695.
Φειδᾶς : 312, 689 (Φειδακίδας). Φιλάκιον : 406, 455, 479, 694 ; Φιλακώ :
Φείδας : 645. 455, 479, 483, 696.
Φειδέλαος : 119. Φιλάνθης : 46 (Φίλανθος), 542.
Φειδεσίλεως : 110. Φιλαρέτα : 401 ; Φιλαρετώ : 458.
Φειδίας : 306. Φιλάρι(ο)ν : 401, 455.
Φείδιον : 391, 460. Φιλᾶς : 311.
Φειδιππίδη : 381. Φίλε(ι)α : 455, 646.
Φειδιππίδης : 4, 120, n. 49, 167, 290, n. 54. Φιλέας : 627 ; Φιλείας : 489, 657.
Φειδιππίδιoν : 167, 381-382. Φιλέτις, Φιλετώ : 455.
Φείδιππος : 108, 120, n. 49, 489. Φιλεωνίδας (φιλέων) : 704.
Φίλη – Φιλωνίδας 759

Φίλη : 40, 141, 162, 456. Φιλοκάλλης : 110 ; Φιλόκαλον : 460.


Φίληκις : 483. Φιλόκιον : 460.
Φιλημάτιον : 167, n.  10, 195, 387, 413 Φιλοκλείδα : 697.
(Φίλημα), 459 (Φιληματίς), 460, cf. Φιλοκλῆς : 489.
Philematin. Φιλοκράτεια, -κράτη : 521 ; Φιλοκράτης :
Φίληξ : 483. 565.
Φίλης : 94. Φιλόκωμος : 482.
Φίλησις, Φιλησώ : 455. Φιλομήτωρ : 272.
Φιλητᾶς : 302, 308. Φίλον : 456.
Φιλητίς : 455. Φιλόνικος : 162, 561.
Φιλητός : 308. Φιλοξενίδας : 569, n. 30, 586, 587.
Φιλία / -η : 453, 528, 531 (Φιλίη), 630, Φιλόξενος / -ξηνος : 120, 482.
646. Φιλοπάτρα : 453 ; Φιλοπάτωρ : 272, 311
Φιλιάς : 425, 434-435 (Φιλιάδης). (Φιλοπᾶς).
Φιλίδιον : 455, 689. Φιλοποίμην, Φιλοποιμενίδας : 586, 700.
Φιλικά, Φιλικιανή, Φιλικόν, Φιλικός, Φιλορόδη : 523.
Φιλικώ : 455, 697-698. Φιλόστρατος : 17.
Φιλίνα, Φιλίνθα, Φίλιννα, Φιλίννιον, Φιλοτάσεις : cf. Φιλοτάσιος : 483, 486,
Φιλιννίς, Φιλιννώ, Φιλινώ : 455-456, n. 85.
698-699 ; Φιλίννας : 483. Φιλότροφον : 460.
Φιλῖνος : 39, 191, 481, 483. Φιλουμένη : 689, n. 5.
Φίλιον : 456 ; Φίλιος : 191. Φιλουμενώ : 699.
Φίλιππος : 10 ; Φιλιπποῦς : 461. Φιλούνιος : 704.
Φίλις : 701, n. 15 ; Φιλίς : 435, 455-456. Φιλοῦς : 455.
Φιλίσκα, Φιλισκώ : 455, 699. Φιλτᾶς ou Φίλτας : 312, 325 (Φιλταγόρας).
Φιλίσκος : 482, 690. Φιλτείη : 529, 691.
Φίλισσα : 699. Φιλτιδώ : 3.
Φιλίστα : 436. Φιλύας : 702.
Φιλιστᾶς : 312, 325. Φίλυλλα : 455, 481, 483.
Φιλιστίς : 436 (Φιλιστιάς), 455 (Φιλιστίχα, Φιλύλλιος : 359, 703.
Φίλιστος), 459. Φιλυλλίς : 455.
Φιλιστῦς : 631, 644 (φίλιστος). Φιλυλλιώ : 480, 482, 703.
Φιλιστώ : 631. Φίλυλλος : 349.
Φιλίτας / -ης : 701 ; Φιλιτίς / Φιλίτις : 455 / Φίλυς : 349, 453, 483.
702. Φιλύτας / -ης : 456, n. 26, 483, 486.
Φιλίτειος, cf. Φιλίτιος : 456, n. 26. Φιλυτώ : 455.
Φιλιτία, Φιλίτιον : 455. Φιλώ : 40, 435, 455, 482, 489.
Φιλιτώ : 455, 458. Φίλων : 79, 191, 483, 489, 561, 592, 617,
Φίλλει : 592, 611. 630.
Φιλλιπάριν : 402. Φιλωνάδας : 483, 704.
Φίλλις : 646. Φιλώνδας / -ης : 547, 588, 590, 592, 594,
Φίλλιχος : 611, 618. 616.
Φιλ(λ)ώ : 40, 456. Φιλωνία : 704.
Φιλοδάμαν (nom.), Φιλοδάμας : 485. Φιλωνίδας / -ης : 483, 536, 541, n. 13, 542,
Φιλόδημος : 473, n. 17. 545, 553, 584, 594, 616, 639, n.  27,
Φίλοινος : 453. 689.
760 Φιλωνίς – Χάρης

Φιλωνίς : 690. Φυλάκιον : 383, n. 7, 406.


Φιλωνίχα : 704. Φύλακος : 46 (φυλακός), 406.
Φιλωνιχίδης : 17, 21, 688. Φύλαξ : 269, 695 ; φύλαξ : 46, 269, 405,
Φιλώνιχος : 17, 592. n. 159, 406, 694.
Φιλωτάδας : 689, n. 2. Φύλαρχος : 47.
Φιλώτας, φιλώτερος : 702. Φυλή : 248 ; Φυλεύς : 87 ; Φυλῆς : 552 ;
Φιλώτιον : 167. Φύλης : 87.
Φιλῶτις : 137, 162. Φυλλάριον : 402.
Φιλωτίς : 455. Φυλούνδας : 563.
Φλαβιανίς : 210. Φυλυσια < *Φιλυσία : 486.
Φλακκίων : 211. Φυλώ : 457.
Φλαουιανής : 210. Φυλῶχος : 471, n. 13.
-φλεγέθης, φλεγέθω : 236. Φυσέας, Φύσων : 47.
Φλειοῦς, Φλειάσιοι : 495. Φύσκα, φύσκα, Φυσκίων, φυσκών οu
Φοίβα : 137. φύσκων : 47.
Φοῖνιξ : 133, 700 (Φοίνισσα). Φώκριτος : 104.
Φολύνδας : 704. Φωκύλος : 357, n. 71.
Φορνεικᾶς : 315. -φῶσα, -φῶσσα : 511-512.
Φορυσκίδης : 703. φωσφόρος : 103.
Φόρυσκος : 690. Φώτυος : 702.
Φούσκιλλος : 209, 211.
Φράξος : 53, 59. Χαβᾶς, χαβός : 314.
Φρασιηρίδης : 545. Χαιράδας : 471.
Φρασικλῆς : 489. Χαιρέας : 306, 542.
Φράσιλλα : 462 (Φρασίλας), 463. Χαιρεσίλας : 489.
Φρασιμήδα : 523. Χαιρήν : 73, 80.
Φρασσαμενός (φράσσω) : 53. Χαιρητίδης : 94.
Φρασώ : 458. Χαῖρις : 489.
Φράσων : 489. Χαιροπόλεια : 526.
φράτηρ, φράτρα / φρήτρη : 259. Χαίρυλλα : 464.
φρήν : 280-282. χαίρω : 615 ; χήρατo : 54.
Φρόνησις : 449. Χαίρων : 489.
Φρόντις ou Φροντίς, φροντίς : 234-235. χαλιμάδες : 426, n. 26.
Φρουνίδας : 592, 613. χαλκῆ : 518.
Φρουνίσκος : 592. Χαλκίδης : 552.
Φρούνιχος : 592, 610. χαλκοβαρής : 235.
Φροῦνος : 592. χαμαιευνάς : 420, n. 2, 428.
Φρούνων : 617. χαμαιεύνη et χαμεύνα : 416, 431.
Φρυγίη : 529. χάος : 480.
φρυγίλος : 368. χαρά : 481.
Φρύνων : 581, 592. Χάραξ : 500 ; Χάρακος (χάραξ, χαράσσω) :
Φρυνώνδας : 584. 61 ; Χάραξoς : 34, 57, 60-61.
φυγάς : 421 (φυγεῖν), 422, 426. † Χάραττα : cf. Χαράττης.
φύζα, φυζακινός : 47. Χαράττης : 25, 500.
Φυλάκα, Φυλακίνη, Φυλακίων : 46-47. Χάρης : 94 (Χαρητίδης), 501, 620, 628,
Φυλακίδας : 695. 646 (Χαρίας).
Χαρίασσα – ψωμᾶς 761

Χαρίασσα ou Χαριᾶσσα : 498, 507, 508- χιτών : 235, n. 34.


510, 514. χλαινισκίδιον : 275.
Χαρίεσσα : 493, 496, 700. Χοῖραξ, Χοίρακος : 49.
χαρί(ϝ)εις : 496, 506, 508, 510, 515, Χοιρίδιον : 409.
χαρί(ϝ)εττα : 496, 506, 507, 509. Χοιρίλος : 347, 363, 370 ; χοιρίλος : 276.
Χαρίνικος : 16. Χοῖρος : 11, 347, 363.
Χαρῖνος : 480. χοῖρος : 49, 409-410 (χοιρίον, χοιρόθλιψ et
Χάρις : 692 ; χάρις : 52, 61, 646. n. 194), 463.
Χαρίσανδρoς Χαρίσιoς : 52 ; Χάρισος : Χοιρώ : 363.
52-53, 59. Χοισκᾶς : 324.
Χαρίτιον : 460. Χοροκλῆς, Χορώ, Χόρων : 363 ; Χόριλ-
χαριτόεις : 508. λος : 363, 364, 698.
Χαριτοκλῆς : 351. Χρειστιμίδας : 440.
Χαριτοῦς : 461. χρεμετίζω, χρεμίζω : 645.
Χαριτύλος : 351, 353. Χρέμης : 94, 351, 501, 645 ; Χρεμᾶς : 323.
Χαριτώ : 351 (Χαρίτων), 461. Χρεμύλος : 352, 353.
Χαρμήν : 73, 74, 77, 80, 95. Χρέμων : 351, 629, 645.
Χάρμης, Χαρμοκλῆς : 80. Χρησίμα : 698.
Χρύση : 87, n. 68, 430.
Χαρμίδης : 548.
Χρυσηίς : 430 (Χρυσεύς), 458.
Χαρμίππα, Χάρμις : 489.
χρυσιδάριον : 6.
Χάρμιππος : 80.
Χρύσιλλα : 462, 463.
Χαρμόνδας : cf. Χαρμώνδας.
Χρυσιππώ : 457.
Χαρμύλος : 351.
Χρυσίς : 630, 645 (Χρυσώι, cf. χρυσός).
Χαρμώ : 510 ; Χάρμων : 80.
χωλός : 335.
Χαρμώνδας : 583.
χώρα : 396, 443.
Χαροιάδης : 435.
χῶρος : 48, 396 (χωρίδιον, χωρίον).
χαρόνα : 481, n. 60.
Χαρτάδας : 471. Ψακαδίας, ψακάδιον, ψακάζω, Ψακᾶς,
Χαρύλλει(ς) : 607. ψακάς, Ψακελίας, ψάκελον, ψάκα-
Χάρων : 629, 646. λον : 427.
Χαρώνδας : 588, n. 34, 615. Ψακάς : cf. Psacas.
Χαῦλος, χαῦνος : 480. Ψακύθη : 20, 427, n. 29.
χεῖλος : 615. Ψαμματᾶς : 312 (Ψαμμήτιχος), 321, n. 78.
Χεναλεξᾶς : 312. Ψαρᾶς : 323 ; ψαράς (gr. mod.) : 308.
χερόνιπτρον : 103, n. 16. Ψαφώι, Ψάφων : 489.
Χερσήν : 73, 75, 80. ψεκάς : 425, 427, n. 31.
χηνᾶς, χηνοτρόφος : 316, 320, 323. ψευδάγγελος : 106-107.
Χηριάδας : 471. ψίαξ : 428.
χθών : 281. ψίθυρος : 348.
Χίη: 529. ψόλος : 39, 46 (ψολόεις).
Χιλιώνδας : 582, n. 12, 615. Ψόλων : 46.
Χιμαιρεύς : 275 ; χίμαιρα, χιμαιράς, χιμαι- Ψύλλακος (ψύλλα) : 49.
ρίς : 431. Ψυχαρίων, ψυχάριον : 273, 696.
Χιόννης : 608, 620 ; Χιοννίδας, (χιών) : ψωλός : 40.
612. ψωμᾶς (gr. mod.) : 308.
762 Ὠκίας – ko-wi-ro

Ὠκίας, ὠκύς : 643. e-ke-a, e-ke-si-jo : 36.


Ὠλήν : 69 (ὠλένη), 73, 74, 77, 83. e-ke-ra2-wo : 105.
-ώλης : 236, n. 35. e-na-ri-po-to : 51.
Ὠλίξης : 177. e-ne-ka : 57.
Ὡρίων : 212. e-ne-ke-se-u : 34, 54-56, 58, 61.
Ὡττικίων : 191. e-qi-ti-wo-e : 54.
Ὠφελίμη, Ὠφέλιμος : 698. e-ru-ta-ra, e-ru-to-ro : 36.
ὠχρός, ὦχρος : 261. e-te-do-mo : 105.
e-te-wa-o : 326.
Chypriote e-te-wo-ke-re-we-i-jo : 414.
ka-li-yo : 383. e-ti-ra-wo : 119.
mi-ṣị-ṭọ-se : 39. e-to-wo-ko : 102.
po-la-ka-te-se : 50. e-re-de / e-re-wi-jo : 86.
so-to-zo-wo : 22. i-je-re-ja : 58, 451.
i-pe-me-de-ja : 42.
Mycénien i-ta-mo : 40.
a-da-ra-ko[ : 46, 50. ka-e-sa-me-no ; ka-e-se-u / ka-e-se-we : 53.
a-di-ri-jo : 380. ka-jo : 52.
a-ka : 35, 55. ka-nu-se-u : 52.
a-ka-to-wa : 35. ka-pa-ra2-de : 429.
a-mu-ta-wo : 41. ka-pa-ri-jo : 40.
a-nu-wa-to : 40. ka-pu-ro : 41.
a-pi-do-ra : 452. ka-ra-u-ja : 452.
a-re-ka-sa-da-ra : 43, 452. ka-ri-se-u / ka-ri-si-jo : 52.
a-re-ke-se-u : 52. ka-ta-wa : 35, 328.
a-re-ke-tu-ru-wo : 414. ka-ta-wo : 35.
a-re-ki-si-to : 52. ka-to, *ka-te-u : 37.
a-re-pa, a-re-pe-se-u, a-ro-po : 51. ka-wa-do-ro : 52.
a-si-wi-ja : 432. ka-ke-we : 429.
a-ta-no / -no-ro : 11, 295. ka-pa-ra2 / ka-pa-ra2-de : 429.
a-ti-ke-ne-ja : 42, 452. ke-ki / ke-ki-de : 39, 40.
a-ti-ro : 39. ke-ki-jo, gén. ke-ko-jo : 40 et n. 21.
a-we-ke-se-u : 52. ke-ku-ro : 40.
a3-ta-ro-we : 494. ke-ra-so : 452, 459.
a3-to : 40. ke-re-wa / ke-re-we  : 38, 105, 326.
a3-za : 431. ke-sa-da-ra, ke-sa-do-ro : 37, 43 (-ra), 54
a-no-me-de : 429. (-ro), 453.
au-ke-wa : 38. ke-ti-de : 43.
da-te-wa : 44. ke-to : 37, 54.
da-wa-no : 39. ki-ni-di-ja : 429.
de-ka-sa-to : 52. ko-ma-we : 494, 709.
de-ke-se-u : 35, 52, 637. ko-pe-re-u : 36.
de-u-ka-ri-jo : 40. ḳọ-ro-ki-ja[ : 429.
di-ri-mi-jo : 36. ko-tu-ro2 / ko-ṭụ-ro2-ne : 40.
di-we / di-wo : 89. ko-we : 271.
do-e-ra : 39, 58, 451. ko-wi-ro : 368.
ko-wo – to-wa-no 763

ko-wo : 429. po-ka-ta-ma : 58.


ko-ri-si-ja : 428. po-ki-ro-nu-ka, po-ki-ro-qo : 368.
ku-na-ke-ta-i : 50. po-ma-ko : 46.
ku-ru-so-jo : 58. po-ri-ko : 37.
ma-di / ma-di-je : 38. po-ro-te-u, po-ro-u-te-u : 36.
ma-du-ro : 38, 41. po-so-ra-ko : 40, 46, 50.
ma-ka-ta : 38. po-so-re-ja : 39.
ma-ka-wo : 41. po-so-ri-jo : 39, 46.
ma-na-sa : 55. po-so-ro : 39.
ma-ra-si-jo : 429. po-ti-ni-ja : 432.
ma-re-wa / ma-re-wo : 45. po-ti-ro : 368.
]ma-ro, ma-ro-ne : 40. pu-ra-ko : 46, 50.
me-to-re / me-to-re-i, me-to-re-ja-de : 42. pu-ri : 39.
mi-ka-ri-jo / mi-ka-ri-jo-jo : 40. pu-ro : 58.
mi-ti, mi-to-we-sa : 39. pu-za-ko, pu2-ṣị-ja-ko : 47.
mo-ni-ko : 39. qa-sa-ko : 48, 50, 58.
mu-to-wo-ti : 495. qa-ti-ja : 47.
na-si-jo : 380. qe-re-ma-o : 49.
na-wi-ro : 39. qe-re-wa, qe-ri : 39.
ne-e-ra-wo : 116, 118. qe-ta-se-u / qe-te-se-u : 53.
o-ke-u : 44. qi-si-ja-ko : 48, 50.
o-ki-ra / o-ki-ro : 43-44. qo-wa-ka-se-u : 50, 61.
o-ko : 43. qo-o : 90.
o-na-se-u : 52. ra-wa-ke-ta : 50.
o-pa-wo-ne-ja : 41. re-ke-to-ro-te-ri-jo / re-ke-e-to-ro-te-ri-jo :
o-po-re-i : 42-43. 104-105.
o-qa-wo-ni : 41. re-u-ko : 230, 255.
o-re-ne-a : 83. re-wa-ko : 38, 48, 50.
o-re-ta : 102. ri-su-ra : 43.
ọ-te-se-u : 53. ru-si[ : 39.
o-to-wo-<we->o, o-to-wo-we-i, *o-to-wo- ru-ta2-no : 43.
wi-je-ja (?), o-to-wo-wi-je, o-tu-wo-we, sa-ma-ti-ja, sa-mi : 452.
o-two-we-o : 42. sa-ri-nu-wo-te : 495.
o-wi-ro : 276, 698. si-ra-ko : 48, 50.
pa-ku-ro2 : 41. si-to-ko-wo : 429.
pa-ra-jo : 49. su-we-ro-wi-jo : 105-106.
pa-ra-ke-se-we : 53. ta-re-u, ta-re-wa : 45.
pa-ti : 39. te-o-do-ra : 452.
pe-ra-ko : 46, 50. te-o-jo : 39, 451.
pe-ri-me-de, pe-ri-mo : 35. te-qa-ja : 428, n. 34.
pe-ri-to, pe-ri-to-wo : 35. ti-nwa-si-jo : 495.
pi-ra-ka-ra, pi-ro-pa-ta-ra, pi-ro-wo-na : ti-ri-po-di-ko : 37.
453. to-ro-ki-no : 39.
pi-ri-no : 39. to-ti-ja : 452.
pi-we-ri-di, pi-we-ri-ja-ta, pi-we-ri-si : 39, to-wa : 35.
n. 13, 428 n. 34. to-wa-no : 35.
764 tu-ka-na – skr. karṇá-

tu-ka-na : 452. we-re-ne-ja : 49.


tu-ka-te-qe : 42. we-to / we-te-i : 101.
tu-ro2 : 40. we-we-si-jo : 36.
tu-zo : 452. wo-na-si : 420, 431.
u-wo-qe-ne : 86. wo-ne-wa : 36, 38.
(u-)wo-qe-we : 86. wo-ne-we : 49.
wa-di-re-u : 277. wo-no : 420.
wa-ni-ko : 37, 49, 276. wo-ro-ne-ja : 49.
we-re-na-ko : 49, 50. zo-wa : 49.

b) Autres langues
Indo-européen *k̂ ens- : 37 (*k̂éns-tor-), 54.
*bhér-o-mh1no-s : 246. *ḱlewe- : 111.
*-bhh2-n̥ t-i̯ a / *-bhoh2t-i̯ a : 511, n. 30. *k̂n̥ d-ti° : 51, n. 51.
*deh3-ti° : 51, n. 51. *lei̯ ku̯ - / *le-liku̯ -m̥ h1nó-s : 245.
*dek̂- : 52. *leiu̯o- : 48.
*deu̯ k- : 40, n. 15. *mr̥ -mh1no- : 245, n. 64.
*dhegu̯ hh2- : 53, n. 59. *ni-sd-o- : 19.
*dheighes- + h2(e)res- : 106. *-o-mh1nó- / *-ό-mh1no- : 246.
*dhers- : 116. *seh2- : 60.
*dhh1-tό-s : 250, n. 76. *(s)k̂end- : 51.
*enek-m̥  : 57. *smeid- : 394.
*gau̯-i̯ o/e- : 52, n. 55. *suh2-i̯ e/o- : 258, n. 93.
*g̑ her-(H)- : 52, n. 56. *u̯i-s(h2)to- : 60.
*gu̯ i̯ eH- / *gu̯ iH-ό- : 262, n. 109. *u̯ r̥ h1en- : 49.
*h2ár-to- : 41, n. 24.
*h1n(e)k̂- : 57, 61. Anatolien
*h1u̯ eh2- : 258, n. 93. Alakšanduš (hitt.) : 281, n. 13.
*h2ék-es- : 55. ênaś (lyd.) : 270.
*h2ek̑ ri- : 369. kari tii̯ e/a- (hitt.) : 52, n. 56.
*h2ek̑ -ro- : 369.
Nan(n)a- (lyd.) : 400, n. 129.
*h2enti-h3ku-o : 19.
tada/i-, tadiya- (louv. hiér.) : 414.
*h2eu̯ g-s- : 52.
warša- (hitt.) : 259.
*h2lek-s- : 52.
*h2ok̑ ri- : 369.
Sanskrit
*h2 r̥ g̑ r-ó- : 443.
*h2 r̥ g̑ un-ih2 / *h2 r̥ g̑ un-o- : 442. árjuna, árjunī- : 442.
*h2r̥ -tó- : 41, n. 24. ávasā- : 60.
*h2u̯ erséh2 / *h2u̯ ersό- : 259. áśri- : 369.
*h2u̯ og-s- / *h2u̯ eg-s- : 52. áśvāvant- : 495, 496.
*h2u̯ όrso- : 259. asitá-, ásita- : 250, 251.
*h3neh2- : 52. úttara-, uttarā́ t : 253, n. 81.
*Hi̯ eu̯ h2- : 258. r̥ tá-, r̥ tā́ vant- : 41, n. 24, 495, 496.
*Hi̯ udh- : 41, n. 23. Kakṣīvant- : 496.
*Hi̯ udh-mó- : 41, n. 23. karṇá-, kárṇa- : 260, 261.
Kumārávant- – lat. Achilles 765

Kumārávant- : 496. aṣ̌a-, aṣ̌auuan- : 41, n. 24.


kr̥ tá- : 250, n. 76. Uštavaiti : 495, 496.
kṣinā́ ti, kṣinóti, kṣīyate, kṣe-ṣ- : 54, n. 62. *kapauta-tara- : 252.
Gandhavatī : 496. xvarǝnaŋvhant- : 495.
cāy-, cāyamāná-, cā́ yamāna- : 251, n. 79. Bǝrǝzuuant- : 495.
jyā́ - : 262, n. 109. yaog- : 60.
támas-, tamasá- : 260. Yuxtāspa- : 60.
trasádasyu, trásati : 117, n. 45. vaxš- : 52.
trāyamāṇā́ -, trā́ yamāṇa- : 249, 251. vǝrǝzuuant- : 495.
dákṣiṇa-, dakṣiṇā́  : 253, n. 81. *Vištāćpa- : 60, n. 75.
dagh- : 53, n. 59. saŋhaiti, sǝnghaitī : 37.
dadhárṣa, dhr̥ ṣánt-, dhr̥ ṣṇóti : 116, n. 44. haēniia- : 413.
dā́ tivara- : 51, n. 51. hūkǝrǝta- : 249.
dāś- : 52.
Dasyus : 117, n. 45. Vieux perse
diśáti, diśámāna- : 244. a-ra-ta-a-va-a : 41, n. 24.
nīḍá- : 19.
Asāvanta- : 495.
pitā́ , pítar : 254, n. 86.
Aš-ša-man-da (élam.) : 495.
puṣṭigú- : 51, n. 51.
*Barduvant- = Br̥ duant- : 495.
peśalá- : 368.
Mar-du-un-da / Mar-su-un-da (élam.) : 495.
práhita- : 250, n. 76.
Vīštāspa- : 60 et n. 76.
bahulás : 342.
br̥ háddiva-, br̥ haddivā́ - : 250.
Pehlevi
bhárati, bhárate, bháramāṇa- : 246.
Bhānudattas, Bhānulas : 342. kapōtar : 252.
yáva-, yávasa- : 258.
yúdh-, yudhmá-, yodh : 41, n. 23. Perse moderne
rakṣ, rakṣijana- : 52. Farrux : 495.
riricāná-, riricé : 245. kabōtar : 252.
vakṣ : 52.
varṣá-, varṣā́ - : 259. Tokharien
visā- : 60. eṅkastär, eṅtär, eṅksate : 57.
śáṃsati, śáṃstar- : 37. ṣañ ṣarsa : 57.
sána-, sanā́ t : 253, n. 81. suwaṃ : 258, n. 93.
sahásrapad- : 235, n. 34. swiñc : 258, n. 93.
sita- : 250.
sukr̥ tá-, súkr̥ ta- : 249, 250 et n. 76. Arménien
sénya- : 413.
srāmá- : 261. marmin, gén. marmnoy : 245, n. 64.
srā́ ma- : 260.
hari- : 52, n. 56. Phrygien
hitá- : 250, n. 76. Aristé : 73.

Avestique Latin et grec latinisé


arǝǰah- : 495. Acerronius : 176.
Arǝǰahuuant-, Aršauuant- : 495. Achilles / Aciles / Agiles : 88.
766 Adelphasium – Martianinus

Adelphasium : 385. Enna, Ennius : 270.


Agalma : 412. Eucheir : 150, n. 88.
agniculus : 276. Eugrammus : 150, n. 88.
Agrippa, Agrippīna : 191. Fabullus : 171, n. 24, 185.
Alleius : 183. famulus : 133.
Alypias : 425. Felicio : 210, n. 40.
Anaios : 174, 182. Fouri, Fourius : 182.
Annaeus, Annaius, Anneius : 182, 183. Frontinus, Fronto, Frontonianus : 193.
Antipater : 145. Gaio : 209.
antīquus, ante : 19. gallina, gallus : 190.
Aquillia, gén. -iaes : 168. Gentianis : 210.
Aulus : 139, 145. Gildo (lib.) : 485, n. 80.
auricula : 13. Glycerium : 385, 387 (Glycerion).
Auxentius : 212. Graeculus : 185, 195 (Graeculio).
Barba, acc. -anem : 168. Graecus : 153, 185.
Barbatio : 211. Grāius : 153.
Bassion : 210, n. 40. Hector, acc. -ora / -orem : 177.
Bathilius, Batullus : 175, 187. Heiuleius : 186.
Bendia (thr.) : 217, cf. Βενδ- / Μενδ-. Hercules, gén. -ī / -is : 179.
Bitho (thr.) : 205, cf. Βε(ι)θ-. Histius : 183.
Boedion : 395, n. 96, 409. Icmas : 425.
Bonifatius : 212. Ilios : 276.
Caestius : 211. Isteius : 183.
Calliope, -enis : 168. Iulius : 209 (Iulianus), 571.
Calypso, acc. -onem : 177. Lalema : 412.
Capito, Capitonianus : 193. Lamponius : 175, 176.
catēna, Catilina : 141. Laurotiche : 449, n. 7, 465.
Cato, catus : 192. Lepidus : 209.
Celadio : 196. leuis : 48.
Cemas : 425. Logas : 425.
censeo : 37. Lucianis : 210.
Cicero : 192 (cicer), 609. lucidus : 185.
Cinnamio, Cinnamus : 194. Lucius : 209, 604.
Communio : 210, n. 40. Lycaro : 208.
Crocotium : 385. macellum : 187.
Cymina : 316, 323. Maecenas : 141, 193 (Maecenatianus).
Diocles, Dioclus : 178. Mamercus : 139.
Diopus : 150, n. 88. Manta : 208, cf. thrac. Μαντα.
docēre : 52. Marcellus : 186, 191 (Marcellīnus).
Domesticus : 209, 609. Marci : 182.
Dominio : 210, n. 40. Marcio, Marcion : 212.
Domitius : 195, n. 183. Marcipor : 145.
Durisio (thr.) : 203. Marcius : 141, 182.
Ecphantus : 150, n. 88. Marculus : 186.
Eleusium : 385. Maro : 140.
Enchiridium : 395, n. 98. Martianinus, Martianus: 193.
Matilius – urna 767

Matilius : 185. Primigenius, Primio : 210 et n. 40.


Melissaeus : 173. Primus : 194.
merulus : 187. Procella : 186.
mest- (thr.) : 208, cf. Μεσταρώ. Proculus : 186, 476.
Minerua : 144. Psacas : 425 (Psekas), 428.
munus, munusculum : 180. Publius : 209.
Myrias : 425. Quintus : 139, 145 (Quintipor).
Naepor : 145. qurois : 144.
Nanonius : 185. regina, rex : 190.
nas : 44. Rhembas : 425.
nas(s)iterna : 141. Romanio : 210, n. 40.
Nasica : 609. Romulus : 184.
Naso : 44, 192 (nasus). Rufio : 195.
Neres : 88. Rufulus : 171, n. 24, 195.
Nicepor : 145, 146, 160. Rufus : 195, 209.
nidus : 19. Rutelna : 185.
Nomas : 425. Rutilus, Rutulus : 148.
Novellus, Novellius, Novelledius : 188. scaena : 141, 146.
Numerius : 139. Scipiades : 209, n. 30.
ocris : 369. Scribonius : 140.
Oenas : 425. Secunda, gén. -es : 168 ; Secundus : 194.
Olipor : 145. Selenio : 387.
Ovicula : 277. Severus : 210.
Pacidius : 191. Sicilia, Siculus : 184.
Pacilius : 187 (Pacilus), 191 (Pacius). spurcus : 211, n. 45.
Paconius : 191. Spurius : 139.
Paculus : 187, 188. Stemma : 412.
Pacuvius : 182. Stenelus : 189 (Sthenius).
Paebion (thr.) : 203, 221. Stercoria, Stercorilla, Stercorius : 211,
Paegnium : 388. n. 45.
Papuleius : 186. Stibas : 425.
paruolus, paruus : 342. Stremponius : 175, 176.
pater, paterculus : 180. subulo : 140.
Peles : 88. Sulpicius : 210.
Perses : 88. Sycecale : 449, n. 7.
persona : 141. Syrio (thr.) : 203, 214.
Petro(n) : 192. Teles : 88.
Philaenium : 385. Tricisma : 449, n. 7.
Philematium, Philematio : 167, 195, 387 Trimalchio : 195.
(Philematin, Pilematio), 413. triumphus : 146.
Pinacium : 388. Tulliola : 185.
Planciades : 209, n. 30. Turus : 75, n. 22, 81.
Poenulus : 133, 184 (Poenus). Tyche, gén. -enis : 168.
Pompius, Pompo(n) : 192. uermis : 610.
Pomponius : 176, 192. Ulixes : 88.
porculus, porcus : 342. urna, urnela (fal.) : 180.
768 uxorius – angl. Ritchie

uxorius : 413. Minatos, Minaz, Minis (o.) : 191.


Veneria, -ies : 168. Nurtia, Nurtins (ombr.) : 191.
Venoleius : 182, 184. Núvellum, Núvis (o.) : 188.
Venustio : 211. Paakul, Pakul, Πακολ (o.) : 180, 185, 187.
Veraniolus, Veranius : 171, n. 24, 180, 185. Paapis (o.) : 186.
Visuleius, Visullius : 173. Pakis (o.) : 180, 182 (Pakkviis [o.]), 185.
Vitalio : 210, n. 40. Pitakiis (o.) : 173.
Volscus, Volsculus : 184. Smintiis (o.) : 173.
Volusius : 183. Steniklum (o.) : 180 (Stenis [o.]), 189
(Stenel [o.], Stenios [o.]).
Espagnol Tryhpíu (o.) : 194.
chico, chiquitico, chiquitín, chiquitito : 16. Vesulliais (o.) : 173, 174.
Σκλαπονιες (o.) : 176.
Français Φοινικις (o.) : 173.
Alex : 619.
Gaulois
Bretagnol, Bretagnon : 322.
chou, chout-(t)e choupet(te), choupi­ -rix : 165.
net(te) : 16. Teutalus, Teutomatus : 342.
Dadasse, Epami (< Epaminondas) : 619,
n. 53. Gothique
Dédé : 619. barn, barnilo : 342.
Jean, Jean-Baptiste, Jeanbat, Jeannot : 7. ga-dars : 116, n. 44.
Jessica, Kévin : 208, n. 28. wahsjan : 52.
Maurice, Mau-mau, Momo, Mice, Miss,
Mimi : 16. Vieux haut allemand
Papounet : 9. Wolfhart, Wolfilo : 342.
Toine, Toinou, Tony : 16.
Allemand
Italien Mädchen, Magd : 411.
gavetta : 268. Mitarbeiterin : 280.

Sabellique Anglais
Aadirans, Aadiriis (o.) : 191. baby, Billy, bunny : 271.
Anaes (pél.), Anies (o.) : 183. cadge : 268, n. 3.
Dekis (o.) : 182. daddy : 271.
Euklo- (o.) : 179. doggie : 271.
famel (o.) : 133. John, Johnny : 16.
Heiis (o.) : 186. kid : 276, n. 21.
Her(a)klo- (o.) : 179. Mary : 271.
Hereiis, Heriis (o.) : 182, 183. maund, maunder : 268, n. 3.
Húsidiis, Húsinies (o.) : 191. Mickey : 271.
Lukidel (o.) : 185. mommy : 271.
Mamereks (o.) : 139. mug, muggins : 269.
Melíssaiis (o.) : 173. Ritchie : 271.
lit. dręsù – étr. murila 769

Lituanien certu : 159.


dręsù : 116, n. 44. clauce : 137, 159.
erž̃ ilas : 44, n. 29, 369. clepatra : 159.
tė́ vas, tėvẽlis : 342. (tinas) cliniiaras : 144.
craci, cracia, cracina, cracnei, craica,
Letton craicie, craiciie, *creica : 159.
creice : 153, 154, 159 (creici, creicia).
Erzelis : 44, n. 29.
creicna : 141, 159.
cuclnie : 135, 159 (et cuclni).
Vieux slave
cuinte : 139.
zъlъ < *-o- « mauvais » : 369. cutu : 140.
zъlь < *-i- « mal » : 369. θanaχvil, θanχvil : 127, n. 9.
θesan, θesanθei : ibid.
Russe eivas : 144.
Natalia, Nata, Natacha, Natachenka, elnei : 159.
Natachka, Natakha, Natusik : 592, n. 5. eris : 143, 159.
Vladimir, Volodia, Volodienka, Volodie­ eucle : 137, 159.
tchka, Volokha, Vova, Vovka, Vovo­ eupuria : 137, 146, 159.
tchka, Vovtchik : ibid. evantra : 159.
evas : 144.
Étrusque ferclite : 160.
aiva : 142. hercle : 159, 179 ; herclite, herclna : 159-
aivas : 140, 144. 160.
amφare, amφiare, anφare : 158. hipucrate : 147, 148, 152, 160.
antipater : 145, 146, 158. karθazie : 133.
antrumacia : 137, 141, 158. kraiku : 142 (kraikaluś, kraike), 159 (krai-
antuce : 158. kalu).
ap(u)lu / aplun, aplunie : 140. kraitiles : 132 et n. 21.
aplu, apluni, aplunia : 158. la(r)θ : 143, 148 (et larθai).
arista : 146, 158. laris : 143 (larisal), 153, 154.
arnθ : 151, 152.  : 148.
arχaza : 138, 158. lautni : 135, 144, 147.
arχusna : 132. laθialuś : 142, 143.
asklaie : 158. lecstinei, lecstini, lecsutini : 160.
Ataiun : 194. lecusta, lecusti : ibid.
atale : 158. lestinei : ibid.
atiuce : 158. licantre : 145, 160.
atunes : 137, 144, 158. lupu : 140.
atunis : 143, n. 44. mamarce, mamerce : 139.
avile, avle : 139. marc(e)na : 141.
aχapri : 148. maru : 140.
aχilena, aχle : 158. matulna : 185.
carpe, carpnate, carpnati, carpnti, carpu- mempru, memru : 160.
nie : 158. menerva, menrva : 144.
carucra : 131, 142, 159. metru : 139, 151, 160.
cerca : 144. murila, murina : 130.
770 nicipur – ĕnnō

nicipur : 145, 146, 160. velcialu : 142, n. 56.


*numesie : 139. velθur : 149.
papa : 144. velχa : 144.
*paχa- : 144. vinun : 139, 140.
pele, pelie : 160. zarapiu, zerapiu : 137, 159, 194.
perecele : 147, 149, 160. ziχu : 140.
pesna, pisna : 144. φerse : 138, 162.
platunalu : 135, 140, 160. φila : 141, 146, 162.
platunaluś : 142. φilunice : 162.
*praxias, πραξιας : 151, 152, 160. φilutis : 137, 143, 162.
prumaθne, prumaθnei, prumaθni : 160. φuipa : 137.
puinel : 133, 184.
pule : 141, 153, 154, 160. Arabe
pulena : 135, 141, 153, 154, 160. hajm : 268.
puliu : 161.
pultuce : 137, 161. Tigrigna
pure : 137, 161.
ĕnnō : 270.
qutum, qutun : 140.
racus, rakaluś : 142.
rutile : 148, 152, 185 (rutelna).
sature : 161.
scirunie : 161.
σeθre : 139.
sminθe : 137 (śminθi, śmin­θinei et 161),
174 (sminθinal).
spurie : 139.
śuplu : 139.
tama : 144, 161(et tame).
tames : 138.
tamun : 140, 161.
tantle, tantlna : 161.
taure : 137, 161.
telicle : 147, 149, 161.
telmu : 161.
tinas : 144.
tinscvil, tinścvil : 127, n. 9.
tinusi : 138, 161.
tiple : 161.
titele, titelna : 185.
titlaluś, titleś : 142.
tiφane : 138, 161.
tiφile : 161.
tlamun/us : 140, 143.
turis : 143, 162.
uprium : 194.
urste : 162.

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