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Comment s'inventer un père écrivain: Albert Camus chez

Maïssa Bey

Mireille Rosello

Expressions maghrébines, Volume 14, Numéro 1, été 2015, pp. 7-21 (Article)

Published by Coordination Internationale des Chercheurs sur les Littératures


Maghrébines
DOI: https://doi.org/10.1353/exp.2015.0001

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https://muse.jhu.edu/article/657661

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Comment s’inventer un père
écrivain : Albert Camus chez Maïssa
Bey
Mireille Rosello
Universiteit van Amsterdam

Au début de ce travail de recherche, il y avait Maïssa Bey et les textes


littéraires auxquels elle renvoie, implicitement ou explicitement, dans ses
livres. Quid, par exemple, de la place de Camus dans ces récits ? La
difficulté, à ce stade de la réflexion, était que les questions qui se
posaient avaient du mal à se libérer de métaphores contraignantes. Il est
extrêmement difficile de parler du passé littéraire d’un auteur
contemporain, et surtout d’un auteur algérien, qui se trouve être une
femme, et francophone, sans invoquer l’origine, la filiation ou la
généalogie. Les mots dont nous nous servons pour parler du rapport entre
ses textes et ceux qui l’ont précédé sont empêtrés, sans le savoir ou sans
le vouloir, dans le filet sémantique de la famille hétéronormative, elle-
même modèle de la nation allégorisée1. Comment ne pas voir en Camus
un « père » littéraire ? Or, lorsque les auteurs algériens francophones
envisagent d’écrire, il semble que la première contrainte, peut-être la
première malédiction, est de devoir adopter une figure métaphorique
adéquate et de leur propre écriture et de leur propre rôle pour se référer à

1
Certes, quelques modèles font exception. La théorie postcoloniale, par exemple, a
popularisé la figure de l’auteur de l’ancienne colonie qui « répond » au colonisateur dans
sa langue, la langue « adverse », comme le dit Assia Djebar (Ashcroft et al 2002 : 243).
Malek Alloula (1981) a préféré imaginer un « retour à l’envoyeur » de cartes postales
dont il soulignait, pour « eux » ou pour « nous », la violence coloniale.

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d’autres œuvres. La métaphore, un moyen de transport, ralentit plutôt


qu’elle ne facilite l’expression du rapport à l’autre (écrivain). Dans une
nation indépendante qui cherche son identité, ce type de relation ne va
pas de soi.
Et lorsque je dis qu’ils ou elles doivent « adopter » une métaphore, je
suis consciente de l’ambiguïté ironique de cette allusion à l’enfant que
l’on n’a pas enfanté. De vieux automatismes linguistiques s’imposent,
culturel capital que certains ont aimé confondre avec le génie ou « l’uni-
versalité » de la langue française (Rivarol 1784). La France, mère patrie,
n’aurait qu’une (seule) langue et une culture dont nous sommes les
enfants plus ou moins légitimes. Mais du coup, l’Algérie indépendante
n’aurait aussi qu’une langue, et cette langue ne pourrait pas être le
français. Si bien que les Algériens francophones sont les enfants d’un
divorce acrimonieux. Les Algériennes qui écrivent sont des femmes
dévoilées. L’Algérie souffre de ne pas s’accepter enfant hybride ou, au
contraire, elle a besoin de retrouver ses racines et ses filiations arabes, ou
berbères, ou musulmanes, ou pré-coloniales et pré-islamiques. Autant de
formulations auxquelles on peut croire ou ne pas croire, mais que l’on
peut difficilement prétendre ne pas comprendre. Ces concepts bornent
toute conversation. À l’origine (de l’écriture) seraient toujours une sorte
d’accouplement, de naissance, et une histoire de nom de famille. Dans le
cas de l’Algérie décolonisée et de son ancienne métropole, l’accou-
plement est aussi un viol, ou une mésalliance. Il précède de peu une
séparation qui est une déchirure et un conflit. La naissance n’aura peut-
être pas lieu parce qu’un avortement sera venu mettre un terme à
l’impossible ou l’impensable (nation). Quant au nom du père, il va
évoquer l’horreur de la bâtardise, l’honneur de la tribu et le corps de la
femme, lieu de toutes les peurs et de toutes les hantises.
Se demander quel rapport littéraire Bey a établi entre son écriture et
celle des auteurs qu’elle cite revient donc à se demander quel type de
famille elle a accepté ou refusé d’imaginer. Comment choisit-elle de
redéfinir la filiation et dans quelle mesure peut-elle détourner à son
avantage le principe métaphorique qui nous oblige à penser en termes de
famille décomposée par la violence ?
Comme Bey, nous héritons de l’idée de l’héritage littéraire et de
grands récits de l’influence. Curieusement, la métaphore de la parenté est
très rarement évitée ou même remise en cause. La question de l’origine
de l’écriture chez Bey m’ayant donné envie de relire les textes déjà
anciens d’Harold Bloom et celui des critiques féministes qui ont accueilli
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sa thèse avec prudence, il est vite devenu évident que si je me laissais


moi-même influencer par cet héritage critique, je serais tentée de caser
Bey dans l’une des catégories « d’anxiété » déjà répertoriées. Lorsque
Bloom (1973) définit « l’angoisse de l’influence » à la fin du siècle
dernier, il adapte un modèle freudien, alors hégémonique, qui rendait
tout à fait plausible l’hypothèse selon laquelle les poètes considèrent
ceux qui les ont précédés comme un père avec lequel ils sont en conflit.
L’idée est toujours immédiatement compréhensible et la métaphore du
parricide s’ajoute à toutes ces images qui facilitent mais aussi limitent
notre pensée. Et une des limites évidentes de la théorie de Bloom était
que la catégorie des « poètes » est toujours plus large que celle de « fils »
et plus étroite que celle d’« auteur ». Comme les critiques féministes de
Bloom l’ont très vite fait remarquer, les pères ont parfois des filles, les
parents sont parfois des mères et les poètes sont parfois des femmes. La
figure du poète masculin usurpe un universel qui fait main basse sur
toutes sortes de paramètres.
Pour autant, il semble peu probable que le cheminement historique
de la critique de Bloom puisse nous éclairer sur les textes de Bey. Les
textes de Sandra Gilbert et Susan Gubar (1979), qui mettaient l’accent
sur les héritages féminins, ne sont pas mieux à même de nous aider à
comprendre la genèse d’une écriture algérienne au XXIe siècle. Faudrait-
il s’efforcer d’oublier la figure du père et chercher à construire Bey
(exclusivement) comme l’héritière des femmes qui écrivaient avant elle ?
Nous faut-il supposer que le rapport entre Bey et Camus n’est pas
pertinent parce qu’elle souffre sans doute de la même « anxiety of
authorship » qu’Emily Dickinson, Charlotte Brontë ou Elisabeth
Browning ? Introduire, au sein de la catégorie « poète », la précision du
genre revient, à terme, à souligner les limites de toute étiquette. À partir
du moment où je considère l’hypothèse selon laquelle la filiation avec
Camus se fait de façon différente de celle d’avec Colette2, à partir du
moment où je me demande si je dois construire Bey comme l’héritière de
Colette ou d’Assia Djebar, je commence implicitement une liste qui
déstabilise d’avance toute théorie de l’influence.
2
Lors d’un entretien avec Colette Valat, Bey suggère que Colette était une des sources
d’inspiration quand elle a écrit son premier roman: « il se trouve que j’ai inséré dans ce
texte une scène assez particulière, je pense inspirée par Colette, et qui a beaucoup
dérangé tous les lecteurs et lectrices. Il s’agit d’une scène d’avortement. Si vous voulez,
je suis entrée en littérature avec fracas car j’ai osé, dès le départ, casser un tabou, celui du
silence autour de cette chose-là qu’est un avortement» (Valat 2010 : 45).
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Les critiques qui se sont penché(e)s sur « the anxiety of authorship »


ont d’ailleurs eu vite fait de récuser tout idéalisme essentialiste et de
souligner l’inefficacité des solidarités féministes qui globalisent à partir
d’un centre tout puissant. La figure de la « sœur » solidaire et
bienveillante, autre métaphore familiale (Morgan 1984), n’a jamais trop
convaincu les féministes de la troisième vague qui reprochent aux
occidentales de ne pas tenir compte de leur propre processus d’exclusion
(Mohanty 2003 ; Moraga et Anzaldúa 1981 ; Spivak 1999). Cette liste
des paramètres toujours manquants ou à découvrir contient les catégories
qui seront, après coup, considérées comme l’identité à libérer : genre,
nationalité, langue, classe, sexualité et, plus généralement, ce qui est
encodé comme non-normatif et abject. Chaque génération (encore une
image de filiation) repousse cette frontière et les critiques post-coloniaux
ne font pas exception.
Dans le cas de Bey, je me propose de renverser le processus
chronologique qui insiste tour à tour sur certaines composantes de
l’identité. On peut certes décider de privilégier a priori un aspect de la
trajectoire de l’auteur pour déterminer précisément de quelle angoisse
son écriture souffre : son anxiété littéraire est-elle celle d’une femme,
d’une Algérienne, d’une francophone, ou précisément celle d’un sujet
écrivain qui réclame une marge de latitude par rapport à ces
positionnements ? Mais plutôt que de me demander de quel père ou de
quelle mère littéraires Bey a hérité, je voudrais demander aux textes
comment on peut inventer une ascendance en fonction de l’héritage que
l’on veut pouvoir faire sien. Quelle identité Bey construit-elle en
choisissant son père ou plutôt en l’inventant ?
Ainsi, dans l’œuvre de Bey, le « père » n’est-il pas une figure
shakespearienne comme chez Bloom. Ici, le père est d’abord et toujours
le grand absent, tué par l’armée française et mort sous la torture, en
héros. Il est donc aussi celui qui abandonne la petite fille et l’oblige à se
construire sans lui. Entendez-vous dans les montagnes (2005) est entière-
ment consacré à ce personnage fantôme qui hante les romans, notamment
Bleu blanc vert (2006) et Au commencement était la mer (1996), et les
nouvelles3. Certes, le père freudien n’a rien à voir avec le père
biologique. Cependant, l’universalisation du Père n’est possible que si
j’oublie que Freud lui-même a dû extrapoler à partir de figures

3
Voir notamment « le cri » vu par les yeux de la petite fille au moment où sa mère
apprend la mort de son époux (Bey 1998 : 15-21).
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paternelles qui ont dominé son imaginaire. De même que Judith Butler a
pu reprendre la question de George Steiner, et demander ce qu’il serait
advenu si le père de la psychanalyse avait choisi Antigone plutôt
qu’Œdipe4, un futur impensé de l’histoire littéraire et culturelle apparaît
si l’on se dit que Freud aurait pu avoir un père moudjahid tué par le
colonisateur dont il parlait la langue. Dans le cas de Bey, les éléments
qui nous aident à fabriquer des mythes de l’influence ne sont donc pas
radicalement nouveaux : les pères, les mères et les frères jouent un rôle
primordial. Mais ces éléments apparemment familiers sont réorganisés
par des formes de citations ou d’allusions qui nous forcent à prendre
conscience que Bey recrée un puzzle tout à fait personnel avec ces
éléments pré-découpés.
Par exemple, comment décrire le rôle d’Albert Camus dans les récits
de Bey ? Je voudrais rapprocher ici deux portraits qui nous laissent
imaginer une figure de père à la fois modèle et trahi, ou plutôt désiré en
tant qu’alter ego, mais aussi traité comme celui dont la mort libère de
certaines contraintes, et surtout que l’on peut inventer avant de s’en
réclamer.
Mon premier exemple est tiré d’Au commencement était la mer, le
premier roman publié par Bey en 1996. Le « je » est une jeune femme,
Nadia. Sa chambre à coucher est aussi un endroit où elle lit et écrit, son
« île » comme elle dit (Bey 2012 : 136). Elle a placé un objet au-dessus
de son lieu de travail, si bien que ce qu’elle voit de son bureau et de son
lit est un portrait de Camus : « Sur le mur, au-dessus du bureau, Camus,
figé dans une éternité noire et blanche, plisse les yeux dans un sourire qui
se veut rassurant » (120).
Il y a, au mur, l’image d’un homme muet et immobile. Il a donc déjà
deux points en commun avec le père mort, qui n’a plus rien à dire et dont
le pouvoir ne peut être que symbolisé par le type de souvenir que l’on
veut bien garder de lui. La photographie « noire et blanche » nous
rappelle que le medium choisi pour représenter ce visage l’ancre dans le
passé révolu. Et le choix du mot « figé » transforme le personnage en
statue ou en être humain désormais incapable de se mouvoir. Camus
n’est pourtant ni indifférent ni surtout hostile. Il est un témoin dont le

4
Voir Steiner 1996 et Butler 2000 : « In George Steiner’s study of the historical
appropriations of Antigone, he poses a controversial question he does not pursue : What
would happen if psychoanalysis were to have taken Antigone rather than Oedipus as
its point of departure » (Butler 2000 : 57).
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sourire discret (seuls les yeux sourient), aurait une intention très claire
pour la narratrice : ce sourire se « veut » rassurant. Rassurant suppose
que l’homme ne juge pas, qu’il espère que tout se passera bien mais en
même temps, la phrase suggère qu’il n’y croit pas lui-même et souhaite
encourager la jeune fille dans ce qui doit être une épreuve.
Le père biologique n’a donc pas été choisi comme figure tutélaire. Sa
mort prématurée est due ici à un accident et la jeune fille lui a préféré un
« Roumi » algérien. Le texte (ou du moins le récit que fait la narratrice)
suggère cependant qu’il n’y a ici aucune volonté de trahison : en fait
c’est la jeune femme qui a été trahie « par son père, par la mort de son
père ressentie comme un abandon inacceptable » (41).
Dans le roman, le père n’est donc jamais oublié. Mais son influence
est à présent multiple et surtout inventée par chaque membre de la
famille. Le lien que chacun entretient avec l’idée de son souvenir est
différent. Le texte nous donne à voir des façons d’honorer le père qui
pourraient aussi être interprétées comme des trahisons. Dans la pièce
commune, la photo du père fait pendant à celle de Camus dans la
chambre de la jeune fille, accréditant la thèse qu’ils sont, quelque part,
interchangeables ou du moins inscrits dans le même paradigme.

La photo de son père est accrochée au mur. Juste au-dessus d’un meuble, dans
la salle à manger. Au milieu. Présent à tous les repas. Le cadre est doré et le
verre, sur le visage de son père, met des reflets aigus. Un cadre soigneusement
épousseté chaque jour par le chiffon attentif de sa mère. Effacée la clarté de ses
yeux. Effacé aussi le sourire, à peine un pli aux commissures des lèvres.
(103)

Le sourire rassurant de Camus est remplacé par un sourire « effacé ». Les


yeux ne voient plus et seul le reflet du verre protecteur produit du sens :
quelque chose « d’aigu », susceptible de blesser. Certes, la mère est
loyale. Tous les jours, elle époussète le cadre. Mais le récit n’a visible-
ment que peu de tendresse pour cette forme de mémorisation : ce n’est
pas la mère qui est attentive, c’est le « chiffon ». Appeler cet époussetage
systématique une « attention » rend hommage au quotidien de la
ménagère, mais souligne aussi la dimension étriquée de son rituel. Quoi
de plus désespérant que de se livrer chaque jour à cette tâche de Sisyphe
non reconnu ? Visiblement, l’activité transforme la mère en objet
informe, un chiffon. De plus, elle est peut-être responsable d’avoir usé
(effacé) ce que la photo aurait pu conserver : un regard, un sourire.
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L’héroïne ne se détourne pas de la figure du père, et elle ne le


remplace pas tout à fait : elle ajoute, ou superpose, à la photo du salon
celle d’un écrivain qui est né comme elle en Algérie, qui comme elle
parle et écrit le français. Mais là encore, il est sans doute prudent de ne
pas s’en tenir aux étiquettes. Que représente Camus pour Nadia et que
retient-elle de l’œuvre littéraire lorsqu’elle fait de lui son témoin ? À
quelle figure de Camus fait-elle référence ? Est-ce l’auteur dont Edward
Said écrit, en 1993, trois ans avant la publication d’Au commencement
était la mer, que « Camus’s writing is informed by an extraordinarily
belated, in some ways incapacitated colonial sensibility, which enacts an
imperial gesture within and by means of a form, the realistic novel, well
past its greatest achievement » (176) ? La narratrice voit-elle d’abord
l’écrivain, ou l’homme né sur le même sol, faisant abstraction de la
critique post-coloniale qui l’a accusé d’avoir déshumanisé « l’arabe »
dans L’Étranger (Margerrison et al. 2005 ; Carroll 2007) ? Ou au
contraire entend-elle se réapproprier une généalogie littéraire, veut-elle
réclamer comme père littéraire l’auteur que traite avec affection et
respect une autre héroïne littéraire nationale, Assia Djebar (1995) ? Au
commencement était la mer ne nous en apprendra pas beaucoup plus sur
la façon dont la narratrice définit le Camus qu’elle a choisi pour témoin
privilégié.
Il est pourtant clair que Maïssa Bey a littéralement son mot à dire sur
Camus. Et le titre de l’essai qu’elle a publié en 2004 (L’Ombre d’un
homme qui marche au soleil) rappelle la scène du meurtre dans
L’Étranger5. Mais même dans ce texte visiblement conçu comme un
hommage, Bey choisit le Camus qui l’intéresse, j’irais même jusqu’à dire
qu’elle invente le Camus qui lui convient le mieux pour le placer en
position de témoin privilégié. Alors que la plupart des controverses
soulevées autour de la parole de Camus tournent autour de la fameuse et
malheureuse formule où il semblait préférer sa mère à la justice, Bey se
contente de repérer l’adoration qu’il avait pour elle et s’intéresse
beaucoup plus aux relations amoureuses qu’il a entretenues, une fois
devenu écrivain. Se référant souvent à la biographie d’Olivier Todd,
Albert Camus : Une vie (1996), elle insiste sur les rapports que Camus

5
L’auteur affirme cependant dans une note : « L’expression est empruntée à Giorgio de
Chirico (cité par Paul Éluard) : Il y a bien plus d’énigmes dans l’ombre d’un homme qui
marche au soleil que dans toutes les religions passées, présentes et futures » (Bey 2004b :
17). L’intertextualité du titre est donc non-dite.
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entretenait avec « la » femme ou plutôt avec les femmes de sa vie.


Pourtant, il est difficile de voir dans ce livre une lecture féministe à la
Gilbert et Gubar. Camus est bel et bien imaginé comme un prédécesseur
auquel Bey rend hommage, et elle ne semble pas s’irriter du fait que le
portrait qu’elle fait de Camus la place, en tant que femme, dans une
position ambiguë. Le héros de L’Ombre d’un homme qui marche au
soleil est un écrivain gêné, dans sa tâche de créateur, par les femmes (ou
ses enfants) qui l’empêchent d’écrire. Elle peint Camus comme un
séducteur vite passionné, vite lassé. Le mariage est « plus asphyxiant
qu’un garrot » (Bey 2004b : 141). Les « servitudes et les charges du
quotidien » lui sont insupportables (79).
Mais visiblement, Bey s’identifie plus à Camus lui-même qu’à la
« femme obstacle », encore moins aux enfants « obstaclons » (Valat
2009 : 33). Elle ne cherche pas à dé-sexualiser ou universaliser la
relation au prédécesseur en ne s’attachant qu’au style ou aux images, à la
forme des textes ou aux références algériennes, par exemple. Cependant,
le sexe biologique du père littéraire est nettement moins important que le
fait qu’il ait connu, comme les personnages féminins de Bey, des
difficultés à concilier son œuvre et sa famille. Bizarrement, le thème
féministe par excellence de la femme obligée de choisir entre son rôle de
mère et sa carrière est ici réécrit comme le propre du créateur sans genre
dont Camus serait l’exemple. On retrouve, dans Bleu blanc vert, l’idée
selon laquelle le mariage, même heureux, devient vite source d’ennui et
de frustration, empêchant l’héroïne de s’épanouir. Camus est donc
surtout utile dans la mesure où il approuve, implicitement, le choix que
font souvent les héroïnes de l’œuvre de Bey : elles refusent de se voir
dicter une féminité contraignante. S’il faut trahir le père, qui, à son tour
peut devenir obstacle ou « obstaclon », la liberté est à ce prix. D’ailleurs,
c’est déjà ce que fait Bey l’écrivaine, sans doute sans même le savoir,
dans cet essai qui se veut un portrait admirateur. Racontant sa rencontre
avec sa première femme, elle attribue, à Camus, la remarque suivante :
« C’est à peu près à cette époque qu’il prononcera ce jugement assez
caustique sur les femmes : ‘Elles nous inspirent le désir de faire des chefs
d’œuvres mais nous empêchent toujours d’en venir à bout’ » (Bey
2004b : 72).
L’ennui, c’est que la citation n’est pas facile à attester. Il est fort
possible que Bey l’ait simplement empruntée à la biographie d’Olivier
Todd sans éprouver le besoin de vérifier la référence. Todd, dûment cité
dans le recueil de Bey, n’est pas mentionné ici, si bien qu’il est difficile
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de savoir exactement où se situe le glissement6. Car la remarque « caus-


tique » que Todd prête à Camus sort tout droit du Portrait de Dorian
Gray d’Oscar Wilde. La version française mise en ligne par le projet
Gutenberg nous permet de resituer le passage dans son contexte : nous
avons affaire à une discussion au sujet du rôle des femmes entre Lord
Henry (effectivement « caustique ») et Dorian :

– Si, interrompit Dorian ; vous admettez, Harry, que les femmes donnent aux
hommes l’or même de leurs vies.
– Possible, ajouta-t-il, mais elles exigent invariablement en retour [de la toute
petite monnaie]. Là est l’ennui. Les femmes comme quelque spirituel Français
l’a dit, nous inspirent le désir de faire des chefs-d’œuvre, mais nous empêchent
toujours d’en venir à bout7.

Il est d’autant plus amusant, dans la situation critique où cette recherche


de « source » nous conduit, de remarquer que le trait d’esprit est attribué
à un « Français spirituel » que Lord Harry ne nomme pas. Camus se voit
donc ici, anachroniquement, attribuer la paternité d’une pensée sur le
rapport entre la créativité et les femmes. En tant qu’influence littéraire, il
est donc à la fois trahi et idéalisé. Il serait un « spirituel Français»… si
seulement il était l’auteur de la boutade. Mais il serait aussi un misogyne
irritant, et on se demande s’il mériterait l’admiration de Bey. La défense
de l’œuvre littéraire, et plus largement du « chef-d’œuvre », nomme son
ennemi (les femmes, qui font « obstacle »). Et j’aimerais suggérer que
cette fausse citation correspond à la position ambiguë de Bey face à cette
formule. L’auteur adhère, reconnaît la source de frustration. Mais elle le
fait à la fois en tant que femme trahie par sa propre culture et en tant
qu’auteur (masculinisé parce qu’universalisé) qui ne reproche pas à ce
père algérien de la reléguer (en tant que femme) au rôle d’obstacle. Cette

6
En général, Bey cite l’édition française publiée par Gallimard en 1996 mais, dans ce
cas, aucune note ne renvoie à un numéro de page. L’allusion semble toutefois trop proche
de la version originale pour que la ressemblance soit une coïncidence. Todd écrit : « Also
in October, he wrote his friends that he was being invited out to many social occasions,
although he did not know why, and would utter a few paradoxes and be done with it, such
as a maxim he had invented about women : ‘They inspire in us the desire to create
masterpieces, and prevent us from finishing them’ » (1997 : 57).
7
J’ai légèrement modifié la traduction. Voir aussi Wilde : « – You must admit, Harry,
that women give to men the gold of their lives. / – Possibly –, he sighed, – but they
invariably want it back in such very small change. That is the worry. Women, as some
witty Frenchman once put it, inspire us with the desire to do masterpieces and always
prevent us from carrying them out » (2005 : 168).
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sorte de schizophrénie de l’influence lui permet de récuser la position


subalterne qu’elle affirme occuper en tant que femme arabe, sans
toutefois suggérer que le colon français pourrait la sauver de son sort. Si
« dévoilement » il y a, c’est celui d’une femme qui affirme préférer
comme modèle paternel non pas le père de famille ou le patriarche
représentant d’une nation, d’une tribu, d’une religion ou d’une culture,
mais l’écrivain qui doit toujours trouver l’espace de sa liberté. Mener à
bien un chef-d’œuvre empêche l’auteur de mener d’autres projets à
terme.
Dans Au commencement était la mer, cette généalogie compliquée
où genre, nationalité, histoire et littérature se mêlent donne lieu à une
scène bien particulière, celle qui a fait dire à Bey qu’elle était entrée en
littérature avec « fracas » (Valat 2010 : 45). Le portrait qui regarde la
jeune fille d’un œil « rassurant » est bel et bien celui d’un séducteur,
mais il ne cherche justement pas à la séduire. Il cherche à l’aider à
devenir ce qu’elle est. Or, dans le roman, « devenir ce qu’elle est »
revient, à ce moment-là, à refuser de mener à terme une grossesse
inavouée et non désirée.
Nadia est allée voir une infirmière, Khalti Khadra, qui a accepté de
placer une sonde (Bey 2012 : 115). Mais lorsque le processus se
déclenche, Nadia est seule, terrifiée, et de longues pages décrivent
crûment et précisément ses souffrances jusqu’au moment de la
délivrance, littérale et figurative. Difficile à lire, cette description cruelle-
ment méticuleuse a pour premier et seul témoin ce portrait de Camus qui,
au moins, représente une présence bienveillante. La terreur et la honte
n’ont pas lieu d’être face à ce portrait souriant qui n’aide pas vraiment,
mais au moins n’aggrave pas les souffrances de Nadia. Le choix que la
narratrice fait de lire l’éternité figée de Camus comme un point de repère
« rassurant » contraste avec la peur qu’elle a d’être découverte, de devoir
parler. D’un côté, toute l’œuvre de Bey est une tentative pour mettre fin
au silence (Bey 2004a ; Batalha 2012), mais les personnages féminins
eux-mêmes sont sans cesse tentés de se taire, de se protéger par le non-
dit. Ainsi, au moment même où Nadia raconte son avortement, elle
oppose les « femmes de l’autre côté de la Méditerranée », dont elle
suppose qu’elles ont droit à la parole, et celles dont la vie est faite de
silence obligatoire : « Des femmes peuvent raconter cela dans les livres.
D’abord avoir le courage de le faire puis celui de le dire. Non, pas ici. De
l’autre côté de la mer. Les femmes ici ne racontent pas. Depuis toujours,
elles se taisent. Elles se terrent » (Bey 2012 : 113).
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Camus est celui qui appartient aux deux rives et qui sert de passeur
de mots, la seule forme de liberté que Nadia revendique, mais une liberté
dont le roman nous avertit qu’elle est interdite, peut-être passible de
mort. À la fin du récit, lorsque Nadia raconte à son frère ce qu’il lui est
arrivé, il essaiera, une dernière fois, désespérément, de la faire taire :
« Elle court, lève les bras au ciel. Et c’est alors, alors seulement, que son
frère lui jette la première pierre » (147).
Certes, on peut difficilement voir dans ce dénouement une victoire
de la liberté d’expression. La « première » pierre semble donner raison à
l’imagination de Claire Etcherelli qui commence sa postface par ces
mots : « Cette forme drapée de noir qui va bientôt s’affaisser, lapidée par
son propre frère» (151). Mais le fait est que le texte de Bey n’a pas laissé
Djamel avoir le dernier mot. La fin du récit voit Nadia debout, en train de
courir devant son frère.
Camus, l’écrivain dans son cadre, n’était pas là pour servir de maître,
de modèle ou même de leader politique, mais pour marquer la place d’un
père idéal dont la parole servirait de garantie au désir de liberté de sa fille
littéraire. C’est une figure à la fois idéalisée mais aussi trahie, inventée
après coup pour les besoins de la cause, qui est de servir de témoin du
présent qu’il n’a pas connu. Le père du portrait sait que sa fille a mis un
terme à une histoire possible, sous ses yeux, seule et sans aide. Il est
donc complice mais aussi impuissant. Il sait qu’il aurait pu être l’obstacle
qui aurait empêché sa fille de mener à bien son chef-d’œuvre.
Djamel, d’ailleurs, ne s’y était pas trompé. Après tout, ce jeune
homme perdu, qui cherche vainement sa voix parmi ceux qui prêchent,
est aussi en manque de père, et il n’a pas su, comme sa sœur, réinventer
un lien unique avec l’idée de l’héritage. Il ne fait qu’obéir aux vivants
qui parlent plus fort que les portraits. À première vue, la forme que prend
sa relation au père est l’antithèse de celle qu’a choisie sa sœur : il semble
tuer tous les pères possibles, le sien et celui que Nadia s’est inventé et
approprié :

À la porte de sa chambre, Nadia s’arrête, atterrée. Les photos accrochées au-


dessus du bureau ont disparu. À leur place des taches plus claires sur les murs
nus.
Elles sont par terre, les photos, déchirées. Ses cahiers, ses cours éparpillés dans
toute la chambre. Sur le lit, deux petites poupées gisent, écartelées avec une
violence délibérée.
[…] Très vite elle comprend.
18 Expressions maghrébines, vol. 14, nº 1, été 2015

Ainsi Djamel a décidé de passer aux actes. Puisqu’il ne peut pas la contraindre,
elle. Il faut qu’il l’atteigne. Là où cela fait le plus mal.
Détruire, disent-ils, tout ce qui est illicite : les photos, les livres, l’art, la beauté
[…].
Dans la salle à manger, en face d’elle lorsqu’elle s’assoit, elle lève les yeux et
découvre une tache plus claire à l’endroit où était accrochée la photo de son
père.
(136-137)

Djamel, lui aussi, trahit le père en abolissant définitivement son image.


Ou plutôt, en traçant, à la place de son portrait, une « tâche plus claire »
qui est une autre forme de vide. Alors que Nadia « se vide lentement de
cette vie qui l’a un jour habitée », elle est capable de se demander : « La
vie, ça ? Non, plutôt la mort... » (121). Djamel, au contraire, ne se pose
pas de questions. Tout ce qui peut faire récit, mais donc tout ce qui peut
prêter à confusion et faire débat, se transforme en débris éparpillés. Les
photos, les livres et les cahiers sont mis dans la même catégorie : ce que
l’on refuse en bloc, sans chercher à se réapproprier quoi que ce soit, au
nom d’une autre forme de fidélité que Nadia ne peut voir que comme une
forme de trahison nihiliste. Si la jeune femme a dû avoir recours à la
faiseuse d’anges, elle est bel et bien devenue une faiseuse d’histoires.
Paola Martini explique que le roman aurait dû s’appeler ainsi8. Faire des
histoires serait la réponse que Maïssa Bey oppose aux formes
« d’anxiété » que les théoriciens envisagent lorsqu’ils cherchent à
imaginer la généalogie des écrivains. Si l’angoisse n’a pas disparu, si la
mort reste au centre de tous les textes, l’écriture elle-même ne renonce
pas à se chercher un père rassurant que l’on peut invoquer au moment
même où l’on refuse ses valeurs. Dans Bleu blanc vert, le narrateur
appelle cette stratégie de récriture la « guerre des mots » : au début du
roman, en 1962, l’enfant est confronté à un nouvel instituteur qui vient
d’être nommé pour remplacer au pied levé les enseignants qui ont
précipitamment quitté le pays. Déterminé à apprendre à ses élèves les
valeurs de l’indépendance, il interdit l’utilisation du stylo rouge (pour
8
Elle précise, dans la première note : « Le premier titre confirmait la prégnance de la
figure de la protagoniste, Nadia, et en exaltait sa qualité d’habile conteuse : pas seulement
d’histoires imaginaires pour entretenir ses frères, mais de mensonges aussi pour réussir à
vivre des moments de liberté. Avec ces mots, Maïssa Bey décrit la protagoniste à Martine
Marzloff : ‘Un personnage féminin très proche d’une part de ce que j’ai été, et d’autre
part semblable à bien des jeunes filles que je côtoie journellement. Volonté de dire, avec
toute la liberté que peut donner l’alibi de la fiction, la réalité vécue par les femmes en
Algérie’ » (Martini 2011).
Comment s’inventer un père écrivain… 19

éviter de rappeler les couleurs du drapeau français sur les cahiers) et il


impose l’oubli : « Il a dit qu’on devait maintenant oublier la France. Le
drapeau français. Et La Marseillaise » (2006 : 14). Mais pour le jeune
Algérien curieux et ravi d’apprendre, « l’oubli » ne va pas de soi : « Mais
moi, je me souviens encore des paroles. À l’école du village, on la
chantait tous les matins. En saluant le drapeau. Le drapeau français, bien
sûr » (ibid.). Jusqu’ici, nous pourrions nous demander si le passage est
nostalgique de l’enseignement colonial, attaché à démontrer que les
nouveaux maîtres ne sont pas moins contraignants que les anciens, et si
l’enfant ne peut que faire l’impasse sur tout ce qui a précédé afin
d’apprendre le nouveau code : « Parce que maintenant on est des Arabes
à 300%. C’est Ben Bella, notre nouveau chef historique, qui l’a dit : nous
sommes Arabes, Arabes, Arabes » (17). Mais visiblement, l’humour des
calculs statistiques (300% d’identité) et la sottise bornée du nouvel
instituteur ne prêchent pas en faveur de cette forme de décolonisation de
l’esprit. D’autant que l’enfant n’a pas attendu les nouveaux maîtres pour
découvrir (avec ses camarades) les secrets de ce qu’il appelle « la guerre
des mots ». Ensemble, ils saluaient effectivement le drapeau français :

Mais on avait, entre nous, changé quelques mots. Par exemple, au lieu de dire
« Le jour de gloire est arrivé » nous, on disait « La soupe est prête, venez
manger ». Sur le même air. Mais doucement. Personne ne comprenait ce qu’on
chantait. C’était notre façon à nous de résister. C’était la guerre des mots. Je ne
sais plus qui en a eu l’idée.
(14)

Dans Au commencement était la mer, la guerre des mots a bel et bien eu


lieu et Nadia l’a gagnée, avec l’aide (involontaire) d’un père littéraire qui
a assisté, sans le savoir et dans le cadre d’une intertextualité
anachronique, à la mort d’une certaine filiation mais aussi à la naissance
d’une faiseuse d’histoires.

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Comment s’inventer un père écrivain… 21

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