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Dans le cours 2, nous avons introduit une série de variables comptables (ou variables ex post) qui permettent de mesurer

les flux
monétaires qui ont circulé entre le acteurs macroéconomiques.

Dans ce cours, nous allons changer de point de vue: nous parlerons des programmes des agents, donc de variables ex ante.

Il est très important de faire la différence entre les deux types de variables, surtout parce que (hélas) en macroéconomie on utilise les
mêmes symboles pour les indiquer.

Les variables ex ante (ou programmées, souhaitées etc.) font référence à la phase qui précède les échanges de biens et de services:
chaque vendeur a un programme sur la quantité de biens qu’il voudrait vendre, chaque acheteur a un programme sur la quantité de
biens qu’il voudrait acheter.

Les variables ex post (ou comptables, réalisées etc.) mesurent par contre, après les échanges, ce qui s’est passé.

Ainsi, par exemple, nous avons vu que la consommation nationale mesure ex post combien ont dépensé les ménages au cours d’une période qui est
terminée pour les achats de biens de consommation finale. Par contre, la demande de consommation est la variable ex ante qui indique combien veulent
dépenser les ménages pour l’achat de biens de consommation finale pour la période qui commence. Les deux variables sont différentes, mais on utilise le
même symbole C dans les deux cas: c’est à vous de comprendre si on parle de consommation réalisée (consommation nationale) ou de consommation
programmée (demande de consommation).

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Les deux variables ex ante les plus importantes sont l’Offre Globale (OG) et la Demande Globale (DG).

L’Offre Globale indique la valeur globale de tous les biens qui sont mis en vente au cours d’une période, donc la valeur des biens que les
agents de la macroéconomie souhaitent vendre.

La Demande Globale indique la valeur globale des biens que les agents de la macroéconomie souhaitent acheter au cours de la période.

Dans sa dimension monétaire, la demande globale nous dit quelle est la dépense totale prévue pour les achats par les agents de la
macroéconomie.

On dira que le marché des biens est en situation d’équilibre économique quand la valeur des biens mis en vente est identique à la
dépensé totale prévue pour les achats (OG=DG).

Ce qui caractérise la situation d’équilibre économique, est la possibilité pour tous les acteurs de réaliser leur programme: les acteurs qui
veulent vendre des biens trouveront un acheteur, les acteurs qui veulent acheter des biens trouveront un vendeur.

Par contre, des situations de déséquilibre sont possibles:

- Quand la valeur des biens mis en vente est supérieure à celle des achats prévus (OG>DG) les marchés des biens est en situation
d’excès d’offre: les vendeurs ne pourront pas réaliser leur programme (tous les biens mis en vente ne seront pas vendus)

- Quand la valeur des biens mis en vente est inférieure à celle des achats prévus (OG<DG) les marchés des biens est en situation
d’excès de demande: les acheteurs ne pourront pas réaliser leur programme (les achats prévus ne seront pas tous effectués)

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Lorsqu’on considère les variables ex ante – c’est-à-dire quand on prend en compte les programmes des agents – trois situations sont
donc possibles:

+ Equilibre économique: OG=DG. C’est la seule situation dans laquelle tous les programmes pourront se réaliser.

Par exemple, si la valeur totale des biens mis en vente au cours d’une période est 1000um (OG=1000), et qu’au cours de la même période la dépense totale
prévue pour les achats est 1000um (DG=1000), les vendeurs et les acheteurs pourront réaliser leurs programmes respectifs: la valeur des biens échangés
sera 1000um.

+ Excès d’offre: OG > DG. Dans un déséquilibre de ce type, les programmes des vendeurs ne pourront pas entièrement se réaliser.

Par exemple, si la valeur totale des biens mis en vente au cours d’une période est 1000um (OG=1000), et qu’au cours de la même période la dépense totale
prévue pour les achats est 800um (DG=800), une partie des biens destinés à la vente ne seront pas vendus: la valeur des biens échangés sera 800um, et les
programmes de vente ne se traduiront pas entièrement dans la réalité.

+ Excès de demande: OG < DG. Dans un déséquilibre de ce type, les programmes des acheteurs ne pourront pas entièrement se
réaliser.

Par exemple, si la valeur totale des biens mis en vente au cours d’une période est 1000um (OG=1000), et qu’au cours de la même période la dépense totale
prévue pour les achats est 1200um (DG=1200), une partie des achats prévus ne seront pas réalisés: la valeur des biens échangés sera 1000um, et les
programmes d’achat ne se traduiront pas entièrement dans la réalité.

On voit alors que la valeur des grandeurs comptables (ex post), qui mesurent après coup ce qui s’est passé dans la réalité, ne
coïncide par forcément avec la valeur des grandeurs programmés (ex ante): c’est seulement en situation d’équilibre économique que
tous les programmes peuvent être réalisés (et que donc, la valeurs de toutes les variables comptables est égale à celle des variables
programmées)
3
Nous savons que l’ensemble des agents de l’économie sont regroupés en quatre grandes catégories (chaque catégorie correspond à un
acteur de la macroéconomie): les ménages, les entreprises, l’Etat et le reste du monde.

Deux de ses acteurs sont vendeurs sur le marché des biens et services (les entreprises et le reste du monde), alors que tous les quatre sont
des acheteurs sur ce marché.

Marché des biens et des services


Acteur Programme de vente Variable Programme d’achat Variable
Ménages - - Biens de consommation finale que Demande de consommation (C)
les ménages souhaitent acheter
Entreprises Biens produits par les Pib (Y) Biens d’équipement que les Demande d’investissement (I)
entreprises de l’économie entreprises souhaitent acheter
Etat - - Biens que l’Etat souhaite acheter Demande publique (G)
Reste du monde Biens produits à l’extérieur et Importations (M) Biens que le reste du monde Demande extérieure (X)
mis en vente dans l’économie souhaite acheter

Il faut faire attention notamment aux variables qui correspondent aux programmes de dépense. On parle d’une variable de
demande chaque fois qu’il s’agit de dépenses prévues: ainsi, la dépense pour les achats prévue par les ménages correspond à la
demande de consommation (qui peut différer de la consommation nationale, variable comptable qui mesure après coup la dépense
effectuée); la demande d’investissement est la dépense prévue par les entreprises (qui peut différer de l’investissement national,
variable comptable); la demande publique est aussi une grandeur ex ante qui peut être différente des dépenses publiques réalisées
par l’Etat; et la demande extérieure, dépense prévue par le reste du monde, ne se traduit par forcément ex post dans une valeur
identique des exportations (grandeur comptable).
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Nous avons dit que l’Offre Globale indique la valeur des biens qui sont mis en vente au cours d’une période. Parmi ces biens,
certains sont produits par les entreprises de l’économie (Y), d’autres sont importés du reste du monde (M).

OG = Y + M

La Demande Globale correspond à la dépense totale prévue pour les achats par l’ensemble des acteurs macroéconomiques. Elle
a donc quatre composantes: demande de consommation (C), demande d’investissement (I), demande publique (G) et demande
extérieure (X).

DG = C + I + G + X

Nous savons que trois situations sont possibles: équilibre (OG=DG), excès d’offre (OG>DG) et excès de demande (OG<DG).

Donc, comme conséquence des programmes des agents, la valeur de l’offre globale (Y+M) peut être différente de celle de la
demande globale (C+I+G+X). Pourtant, nous savons (cours 3) que ex post on retrouvera toujours que Y+M = C+I+G+X : cette
égalité comptable est toujours respectée. Pour comprendre comment cela est possible, il faut se rappeler que les mêmes
symboles indiquent des choses différentes si on regarde la situation avant les échanges (si on parle donc des programmes des
agents) ou après les échanges (grandeurs réalisées).

Le déséquilibre économique est possible (variables ex ante): la valeur des biens mis en vente peut être différente de la valeur
des achats prévus. Par contre, l’équilibre comptable (variables ex post) est forcément respecté: la valeur des biens qui ont été
vendus est forcément identique à la valeur des biens qui ont été achetés.

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Pour comprendre, considérons le cas simple d’une économie fermée sans intervention de l’Etat.

Pour simplicité, supposons Se = 0 (ce qui implique que tout le Pb, dans sa forme monétaire, devient un revenu pour les ménages: R = Y ; et
que l’épargne nationale coïncide avec l’épargne des ménages: S = Sm)

Dans cette situation, les seuls biens à vendre sont produits par les entreprises de l’économie. L’offre globale est alors égale au Pib.
OG = Y

Du coté des acheteurs, on a seulement les ménages (qui souhaitent acheter des biens de consommation finale) et les entreprises (qui
souhaitent acheter des biens d’équipement). La demande globale est alors égale à la somme de la demande de consommation et de la
demande d’investissement.
DG = C + I

Considérons les programmes de deux acteurs qui composent l’économie.

Les entreprises veulent vendre des biens pour une valeur Y, et veulent acheter des biens d’équipement pour une valeur I (demande
d’investissement).

Les ménages ont reçu un revenu national R = Y: ils veulent dépenser pour les achats C (demande de consommation) et épargner S
(épargne prévue par les ménages, qui est aussi égale, en l’absence de financement, à l’épargne nationale programmée). On aura alors que
l’épargne programmée est la partie du revenu national que les ménages n’ont pas l’intention de dépenser:
S=Y–C

où C est la demande de consommation, c’est-à-dire la dépense prévue par les ménages

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Bien évidemment, l’investissement programmé par les entreprises (combien les entreprises veulent dépenser pour l’achat de biens
d’équipement) et l’épargne programmée par les ménages (la partie du revenu national que les ménages ne veulent pas dépenser)
peuvent être différents.

Mais si dans une économie fermée sans Etat, S ≠ I, alors il y aura déséquilibre économique: OG ≠ DG.

Cela est simple à démontrer. Nous savons que S = Y – C. Donc Y = C + S (le revenu est soit destiné à la dépense, soit destiné à l’épargne).
Mais dans une économie fermée, DG = C + I. Alors, si S ≠ I, Y ≠ DG. Et comme OG = Y, alors on aura OG ≠ DG.

En particulier, si l’épargne programmée par les ménages est plus importante que l’investissement programmé par les entreprises, sur le
marché des biens il y aura excès d’offre:

S>I C+S>C+I Y>C+I OG > DG

Si l’épargne programmée par les ménages est moins importante que l’investissement programmé par les entreprises, sur le marché des
biens il y aura excès de demande:

S<I C+S<C+I Y<C+I OG < DG

Et c’est seulement quand l’épargne et l’investissement programmés sont au même niveau que le marché des biens sera à l’équilibre:

S=I C+S=C+I Y=C+I OG = DG

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Il faut rappeler que, dans une économie comme celle que nous sommes en train de considérer (fermée et sans intervention de l’Etat),
du point de vue comptable on retrouvera toujours l’épargne et l’investissement au même niveau: S = I est toujours vrai, quand S est
l’épargne nationale (épargne réalisée, qui peut être différente de celle programmée) et I est l’investissement national (investissement
réalisé, qui peut être différent de la demande d’investissement, c’est-à-dire de l’investissement programmé). De même, du point de
vue comptable on retrouvera toujours Y = C + I, quand C est la consommation nationale (consommation réalisée, qui peut être
différente de la demande de consommation) et I est l’investissement national.

Il faut donc toujours avoir à l’esprit si on parle de grandeurs ex ante (programmées) ou ex post (comptables).

Economie fermée sans intervention de l’Etat


Programmes des agents Grandeurs comptables
Si S > I, alors Y > C + I (excès d’offre)
S = I toujours vrai
Si S < I, alors Y < C + I (excès de demande)
Y = C + I toujours vrai
Si S = I, alors Y = C + I (équilibre économique)

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Considérons une économie fermée sans intervention de l’Etat, dans laquelle l’épargne programmée est supérieure à la demande
d’investissement (S>I). Pour simplicité, supposons que tous les profits soit distribués (Se=0), ce qui a comme conséquence que tout le Pib
devient un revenu pour les ménages (R=Y) et que l’épargne nationale coïncide avec l’épargne des ménages (S=Sm).
Le schéma montre pourquoi un excès de l’épargne sur l’investissement (dans les programmes des agents) implique un excès d’offre. Le
revenu national, qui est le revenu dont disposent les ménages, est égal au Pib (R=Y): il est destiné pour partie à la dépense (demande de
consommation) et pour partie à l’épargne (épargne programmée). Les biens qui sont à vendre ont une valeur mesurée par le Pib (OG=Y):
cela implique que la valeur des biens à vendre qui ne sont pas demandés par les ménages est identique à celle de l’épargne programmée. Si
la demande d’investissement est inférieure à l’épargne programmée (S>I), une partie des biens à vendre ne seront demandés par personne:
le marché des biens est en excès d’offre.
Du point de vue comptable on retrouvera l’égalité entre épargne réalisée et investissement national car les biens non vendus seront stockés
et entreront donc dans l’actif du bilan des entreprises: c’est une forme d’investissement non prévu qui ramène I à la hauteur de S.

Exemple. Supposons Y = 100. Sous l’hypothèse Se=0 , le revenu national sera R = 100. On aura aussi OG = 100.
Les ménages décident de repartir leur revenu de la façon suivante: 70 pour la dépense, 30 pour l’épargne. On aura alors demande de consommation C = 70,
épargne souhaitée S = 30.
Cela implique qu’il y a des biens offerts qui ne sont pas demandés par les ménages qui valent 30.
Supposons maintenant que les entreprises veulent dépenser 20 pour l’achat de
biens d’équipement. La demande d’investissement sera I = 20.
On voit que dans ces conditions (S>I) il y a forcément excès d’offre sur le marché
des biens (OG=Y=100 ; DG = C+I = 90). Des biens d’une valeur de 10 sont mis en
vente mais ne trouveront par d’acheteur.
Du point de vue comptable, les acheteurs pourront réaliser leurs programmes
(l’excès d’offre pose un problème aux vendeurs). Donc les ménages dépenseront
70 et épargneront 30, comme prévu. Par contre dans l’investissement national
on retrouvera la valeur des biens d’équipement achetés par les entreprises (20)
et la valeur des biens stockés par les entreprises (10): donc l’investissement
réalisé sera égal à 30: l’investissement réalisé est supérieur à la demande
d’investissement (les entreprises n’ont pas réalisé leur programme). 9
Du point de vue comptable, on retrouvera alors S=I et Y = C+I.
Toujours dans une économie fermée sans intervention de l’Etat, considérons maintenant le cas d’une épargne programmée inférieure à
la demande d’investissement (S < I). Le schéma montre pourquoi une telle situation implique un excès de demande.
Le revenu national, qui est le revenu dont disposent les ménages, est – sous l’hypothèse Se=0 – égal au Pib (R=Y): il est destiné pour
partie à la dépense (demande de consommation) et pour partie à l’épargne (épargne programmée).
Les biens qui sont à vendre ont une valeur mesurée par le Pib (OG=Y): de nouveau, cela implique que la valeur des biens à vendre qui ne
sont pas demandés par les ménages est identique à celle de l’épargne programmée.
Si la demande d’investissement est supérieure à l’épargne programmée (S<I), la valeur des biens demandés par les entreprises est
supérieure à la valeur des biens qui ne sont pas demandés par les ménages. Du coup, la valeur des biens à vendre (OG) n’est pas
suffisante pour satisfaire toutes les demandes d’achat (DG).
Du point de vue comptable on retrouvera l’égalité entre épargne réalisée et investissement national car une partie de la demande ne
sera pas satisfaite. Soit les ménages dépensent moins que prévu, ce qui fait remonter l’épargne au niveau de l’investissement; soit les
entreprises dépensent moins que prévu, ce qui fait baisser l’investissement au niveau de l’épargne.
Exemple. Supposons Y=100. Sous l’hypothèse Se=0 , le revenu national
sera R=100. On aura aussi OG=100.
Les ménages décident de repartir leur revenu de la façon suivante: 80
pour la dépense, 20 pour l’épargne. La demande de consommation sera
donc C = 80, l’épargne souhaitée S = 20. Supposons que la demande
d’investissement soit I = 40.
Dans ces conditions (S<I) il y a forcément excès de demande sur le marché
des biens (OG=Y=100 ; DG = C+I = 120). Des achats prévus d’une valeur de
20 ne pourront pas être réalisés.
Du point de vue comptable: si les ménages renoncent aux achats, on aura
que l’investissement réalisé est 40 (comme prévu), la consommation
nationale 60 et l’épargne réalisée 40. Si les entreprises renoncent aux
achats, l’investissement réalisé sera 20, alors que les ménages réaliseront
leur programme (la consommation nationale sera 80 et l’épargne
réalisée 20).
Dans tous les cas, du point de vue comptable, on retrouvera S=I et Y = C+I. 10
Toujours dans une économie fermée sans intervention de l’Etat, le dernier cas de figure à considérer est celui d’une épargne
programmée identique à la demande d’investissement (S = I). Comme le montre le schéma, dans une telle situation le marché
des biens sera en équilibre du point de vue économique (OG=DG).
La valeur des biens qui ne sont pas demandés par les ménages est identique à celle de l’épargne programmée (S); mais la dépense
prévue pour les achats par les entreprises, c’est-à-dire la demande d’investissement (I), correspond exactement à la valeur de ces
biens.
La situation d’équilibre est la seule dans laquelle tous les programmes peuvent se traduire dans la réalité: les programmes de vente
(OG) sont compatibles avec les programmes d’achat (DG), les programmes d’épargne (S) sont compatibles avec les programmes
d’investissement (I). Toutes les grandeurs comptables (ex post) auront alors la valeur des variables programmées (ex ante). En
particulier, l’épargne réalisée sera celle prévue, l’investissement aussi, en donc on retrouvera l’égalité entre épargne réalisée et
investissement national.

Exemple. Supposons Y=100. Sous l’hypothèse Se=0 , le revenu


national sera R=100. On aura aussi OG=100.
Les ménages décident de repartir leur revenu de la façon suivante:
70 pour la dépense, 30 pour l’épargne. La demande de
consommation sera C = 70, l’épargne programmée S = 30.
Supposons que la demande d’investissement soit I = 30.
Dans ces conditions (S=I) le marché des biens sera en équilibre
(OG=Y=100 ; DG = C+I = 100). Dans ces conditions, les ménages
pourront réaliser leur programme (la consommation nationale sera
70, l’épargne nationale sera 30), les entreprises aussi (tous les biens
mis en vente seront vendu, et l’investissement national sera 30).

Du point de vue comptable: tous les programmes seront respectés,


et donc on retrouvera encore (comme chaque fois) S=I et Y = C+I.

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Il faut donc différencier la situation du marché des biens du point de vue économique – qui fait référence aux programmes des agents, et
donc aux variables ex ante – de la situation comptable, c’est-à-dire des rapports entre les grandeurs qu’on mesure ex post, après les
échanges, et qui rendent compte de ce qui s’est passé.
Du point de vue comptable, la situation est toujours en équilibre: la valeur des biens vendus est forcément identique à celle des biens
achetés, et pour chaque acteur macroéconomique le total des ressources est forcément identique au total des emplois.
Par contre, du point de vue économique, il y a équilibre seulement quand les programmes des différents acteurs sont compatibles et peuvent
donc se traduire dans la réalité. Mais du point de vue économique il peut y avoir aussi déséquilibre, c’est-à-dire incompatibilité entre les
programmes. Dans ce cas, une partie des programmes des acteurs macroéconomiques ne pourront pas se réaliser, et certaines variables
auront une valeur comptable différente de la valeur qui correspondait aux programmes.

Le tableau généralise les situations possibles du point de vue économique et comptable dans une économie ouverte avec Etat. Nous savons
que dans ce cas, OG = Y + M et DG = C + I + G + X. Et nous savons aussi que du point de vue comptable on retrouvera toujours Y = C + I + G + X.

RAPPEL. Dans les programmes des agents (partie jaune du tableau), C correspond à la demande de consommation, I à la demande d’investissement, G à la
demande publique, X à la demande extérieure. Dans les grandeurs réalisées (partie bleue du tableau), C correspond à la consommation nationale, I à
l’investissement national, G aux dépenses effectuées par l’Etat pour l’achat de biens et services, X aux exportations. Les symboles sont les mêmes mais ils
indiquent des variables différentes, et les valeurs des variables ex ante (partie jaune) peuvent être différentes des valeurs des variables ex post (partie bleue).

Economie ouverte avec intervention de l’Etat


Programmes des agents Grandeurs comptables
Y + M > C + I + G + X (excès d’offre)
Y + M < C + I + G + X (excès de demande) Y + M = C + I + G + X toujours vrai

Y + M = C + I + G + X (équilibre économique)
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Les déterminants de l’équilibre économique

La théorie macroéconomique se concentre sur les déterminants de l’équilibre économique.


D’une part, il faut considérer que n’importe quelle économie est toujours en situation d’équilibre comptable: de dire que les égalités
comptables sont respectées ne fait pas avancer dans la compréhension des choses. D’autre part, identifier le Pib qui correspond à
l’équilibre économique, c’est-à-dire le Pib pour lequel OG = DG, permet de dire vers quel niveau d’activité se dirige la dynamique de
l’économie. En effet, même si les économies fonctionnent la plupart du temps en déséquilibre (excès d’offre ou excès de demande), le Pib
qu’on appelle « d’équilibre » (et qu’on note Yeq) fonctionne comme un attracteur de la dynamique.

Supposons par exemple d’avoir identifié Yeq = 300. Si nous constatons, dans la réalité, Y = 330 , nous pouvons dire deux choses: que sur le marché des biens il y
a excès d’offre, et que pour cette raison le Pib aura tendance à baisser. Si nous constatons que Y = 290, nous pouvons dire que sur le marché des biens il y a
excès de demande, et que le Pib aura alors tendance à augmenter. C’est vert le Pib d’équilibre (Y=300) que la dynamique va se diriger.

Identifier le Pib d’équilibre permet aussi de donner une interprétation théorique à l’existence du chômage. Pour cela, il faut d’abord définir
une grandeur importante, le Pib de plein emploi (qu’on note YPE):

Le Pib de plein emploi YPE indique le niveau de production correspondant à l’utilisation complète des facteurs de production (K, L) au
mieux de connaissances techniques.

Le Pib est au niveau de plein emploi quand la production des entreprises exige l’utilisation de tout le travail disponible, de tout le capital
existant, et l’absence de gaspillage dans l’utilisation des facteurs de production. C’est donc le niveau d’activité le plus élevé dont
l’économie est capable compte tenu de la disponibilité des facteurs et des techniques de production disponibles : le Pib ne peut pas
dépasser le niveau de plein emploi.

La présence de chômage involontaire indique que le Pib n’est pas au niveau YPE : si les chômeurs étaient occupés, la production
augmenterait. 13
Les déterminants de l’équilibre économique dans l’analyse classique

D’abord un rappel: selon la théorie classique, les entreprises


embauchent tant que la productivité marginale du travail (qui à
partir d’un certain niveau d’utilisation du travail est décroissante,
parce qu’on raisonne à stock de capital constant) est supérieure au
salaire réel. Autrement dit, le profit augmente tant que la hausse
de la production liée à l’utilisation d’un travailleur supplémentaire
est supérieure à la rémunération de ce travailleur calculée en
unités de produit.

Le profit est donc maximal pour la quantité de travail L* pour


laquelle Fm(L)=w/p. Si le salaire réel baisse, L* augmente (la
demande de travail des entreprises augmente).

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Les déterminants de l’équilibre économique dans l’analyse classique

La théorie classique – à laquelle Keynes s’oppose – considère qu’une économie ne peut pas être à l’équilibre si elle n’est pas au plein
emploi. Pour le dire autrement, pour la théorie classique il existe un seul produit d’équilibre, qui coïncide avec le produit de plein emploi.

L’idée des économistes classiques est simple: en situation de sous-emploi, et notamment quand il y a du chômage involontaire, le salaire
réel a tendance à baisser. La baisse du salaire réel suffit à motiver les entreprises à embaucher et à augmenter la production: c’est le
mécanisme que nous avons étudié en microéconomie, fondé sur la comparaison entre salaire réel et productivité marginale du travail.
La hausse de la production et donc de l’offre va entraîner une distribution supplémentaire de revenus qui permettra à la demande
d’augmenter aussi. C’est la « loi de Say », du nom de Jean-Baptiste Say (économiste classique), qui garantit que la demande ne pose jamais
de problème: si l’offre augmente, la demande augmentera aussi. Le schéma classique est donc le suivant:

Baisse du Les entreprises, qui utilisent Hausse de la Hausse de la


Sous-emploi Chômage involontaire
salaire réel le travail jusqu’à Fm(L)=w/p, production (Y) et de demande globale
(Y<YPE) (LS>LD)
(w/p) embauchent (hausse de LD) l’offre globale (loi de Say)

Si l’économie est en situation de sous-emploi (c’est-à-dire qu’elle produit moins de ce qu’elle pourrait, car les facteurs de production ne
sont pas complètement utilisés), elle ne peut donc pas être en équilibre: la « main invisible » du marché produira une hausse de la
production qui va se poursuivre jusqu’au plein emploi. Le Pib de plein emploi correspond donc, selon les classiques, à la seule situation
stable, donc au seul produit d’équilibre.
Salaire réel Niveau de la
Plein emploi Marché du travail en Utilisation du facteur travail Niveau de Y stable
(w/p) demande globale
(Y=YPE) équilibre (LS=LD) par les entreprises stabilisée (équilibre)
stabilisé stable (équilibre)

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Les économistes néoclassiques adhèrent au schéma classique. Nous avons vu qu’ils expliquent la persistance du chômage, et le fait
que l’économie puisse se retrouver bloquée en situation de sous-emploi, par le fonctionnement non concurrentiel du marché du
travail. Dans ces conditions, l’existence d’un excès d’offre sur le marché du travail ne provoque pas de baisse du salaire réel: du coup, la
« main invisible » ne fonctionne pas.
Baisse du
Sous-emploi Chômage involontaire
salaire réel
(Y<YPE) (LS>LD)
(w/p)

Nous avons déjà vu (cours nr 1) , que la persistance du chômage peut aussi s’expliquer, dans la théorie néoclassique, par le chômage
frictionnel (mauvaise circulation de l’information sur le marché du travail) et par le chômage structurel (formation de la main d’œuvre
non adaptée aux exigences des entreprises).

Mais dans tous le cas, la persistance du chômage involontaire est liée, pour la théorie néoclassique, au fonctionnement non efficace,
c’est-à-dire non concurrentiel, du marché du travail.

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L’interprétation keynésienne du chômage est totalement différente. Pour Keynes, le
mécanisme classique de convergence au plein emploi ne fonctionne pas car la baisse du
salaire réel ne suffit pas à convaincre les entrepreneurs à embaucher. Avant d’embaucher,
un entrepreneur se pose la question: si j’augmente la production, est-ce que je trouverai
des nouveaux clients pour vendre une plus grande quantité de biens ? Au niveau agrégé
(c’est-à-dire pour l’ensemble des entreprises), c’est la demande globale anticipée – c’est-à-
dire les prévisions formulées par les entrepreneurs sur le niveau futur de la demande – qui
joue un rôle décisif: s’ils anticipent une demande faible, les entrepreneurs n’embaucheront
pas même si le salaire réel devait baisser.

Baisse du Les entreprises embauchent (et augmentent la


Sous-emploi Chômage involontaire
salaire réel production) seulement si elles anticipent une
(Y<YPE) (LS>LD)
(w/p) demande suffisamment élevée

Demande
globale
anticipée

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Les déterminants de l’équilibre économique dans l’analyse keynésienne

Le rôle de la demande, qui est totalement négligée par la théorie classique, est donc central dans l’analyse keynésienne.

Dans l’analyse classique, les entrepreneurs décident combien de travail utiliser (et donc combien produire) en comparant la
productivité marginale du travail au salaire réel: ils comparent donc la quantité de produit supplémentaire que rapporte une unité de
travail supplémentaire au coût de cette unité de travail mesuré en unités de produit. Si par exemple un paysan de plus rapporte 3
tonnes de blé (productivité marginale) et qu’il coûte l’équivalent de 2 tonnes de blé (salaire réel), il sera embauché. La demande ne
pose jamais de problème, car la loi de Say assure que si toutes les entreprises se comportent de cette façon, la hausse de la production,
et donc de l’offre et du revenu, impliquera une hausse équivalente de la demande.

Pour Keynes, les entrepreneurs ne raisonnent pas comme ça. Chaque entrepreneur, avant d’embaucher, se pose la question de la
demande qui s’adressera à sa production: il formule donc un pronostic sur la demande, et sur cette base il décide combien produire (il
faut considérer qu’entre le moment où l’entrepreneur décide combien produire, et donc combien de travail utiliser, et le moment où la
production est mise en vente, il y a du temps qui se passe: c’est pour cela que les entrepreneurs sont obligés de se fonder sur un
pronostic). Par exemple, il n’est pas certain qu’un paysan qui permettrait d’augmenter la production de 3 tonnes de blé et qui coûte à
l’entreprise l’équivalent de 2 tonnes sera embauché: il faut encore que l’entrepreneur pense qu’il trouvera un client pour ces trois
tonnes supplémentaires. Si l’entrepreneur est convaincu qu’il n’arrivera pas à les vendre, il n’embauchera pas le paysan.

Du coup, si les entrepreneurs sont pessimistes, et qu’ils anticipent une demande faible, il ne produiront pas beaucoup. Si la production
est faible, le chômage sera élevé, les revenus distribués seront faibles , et la demande qui se manifestera sur les marchés – que Keynes
appelle la demande effective – sera faible aussi. Les entrepreneurs pourront se dire alors qu’ils avaient raison d’anticiper une demande
faible: ils continueront à ne pas embaucher, et le chômage restera élevé.

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Le mécanisme que Keynes appelle de la demande effective, et qui est décrit par le schéma, peut donc aboutir à des équilibres très
différents. Dans l’analyse keynésienne il n’y a pas un seul équilibre vers lequel va converger l’économie grâce à la « main invisible » des
marchés, mais une multiplicité d’équilibres possibles, qui dépendent de la demande anticipée par les entrepreneurs.

Pronostics Demande
entrepreneurs effective

Niveau du Pib et
Demande Demande
du taux de Revenu national
anticipée chômage Globale

Si le pronostic se révèle
exacte, alors l’économie est à
l’équilibre

Donc si la demande anticipée est élevée, les entreprises embaucheront, le chômage sera faible et la production forte. Du coup, les
revenus distribués par les entreprises (salaires et dividendes) seront importants, et la demande effective sera élevée, ce qui permettra
aux entreprises de vendre leur production.
Mais il est possible aussi que la demande anticipée soit faible, le chômage élevée, et au bout du processus on retrouvera une demande
globale faible: cette situation peut se traduire dans une situation d’équilibre avec chômage, que Keynes appelle équilibre de sous-emploi
(un type d’équilibre qui, on l’a vu, n’existe pas dans la théorie classique). 19
Pour Keynes donc la persistance d’un chômage de masse peut s’expliquer par une situation d’équilibre de sous-emploi.
Tant que les entrepreneurs sont convaincus que la demande sera faible, ils n’embaucheront pas, la Pib et le revenu national
seront faibles et la demande globale restera faible, confirmant ainsi les anticipations des entrepreneurs.

La solution au problème ne se trouve pas alors pour Keynes dans une plus grande concurrence sur le marché du travail: c’est
une différence importante entre l’analyse (néo)classique et l’analyse keynésienne. Au contraire: si une plus grande
concurrence sur le marché du travail provoquait une baisse des salaires réels, la demande pourrait s’affaiblir davantage et le
chômage augmenter.

Pour Keynes, la solution au problème du chômage se trouve sur le marché des biens: il faut soutenir le niveau de la
demande globale pour convaincre les entrepreneurs à embaucher.

Les politiques de soutien de la demande peuvent être très diverses (hausse des dépenses publiques, baisse des impôts,
soutien à la demande d’investissement, recherche de nouveaux marchés à l’extérieur…): on les analysera plus tard dans ce
cours.

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