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Outils Maths d’Aide à la Décision

Chapitre I
Les Choix en gestion
où l’on présente la perspective de l’analyse
formelle des choix rationnels en Gestion, quelques
problèmes classiques d’optimisation et un
panorama des techniques mathématiques
abordées dans ce cours

Automne 2020 Université de Tours - A. Chassagnon


Plan du cours

1) Introduction

2) Exemples classiques de programmes optimaux


1 Choix individuel simple
2 Choix optimal de production de la firme en CPP
3 Choix optimal de production de la firme en monopole
4 Contrat de travail
5 Régulation d’un monopole public

3) Liste des savoirs à acquérir pour l’optimisation


Choix guidés par la rationalité et/ou les sentiments

En économie-Gestion, on considère des agents qui influencent leur


environnement immédiat ou plus lointain, par les choix qu’ils font.

Les processus de choix sont complexes dans la réalité. On peut


d’abord remarquer que beaucoup de choix font appel à l’habitude,
et à un savoir qu’il n’est pas toujours nécessaire de questionner.

Cependant, si l’on veut en préciser les mécanismes, ces choix font


souvent appel aux sentiments ou aux analyses rationnelles et aux
calculs lucides des décideurs. Sans préjuger l’importance de l’instinct,
ce cours étudie plus particulièrement la rationalisation des choix.

La Gestion comme l’Économie étudient de manière formelle les choix


rationnels individuels et collectifs. Ces sciences humaines ont pour cela
recours aux mathématiques, à des mathématiques appliquées
La place du conflit

Le choix rationnel a souvent des aspects conflictuels.


Le programme d’un individu rationnel

L’individu a (1) des objectifs qu’il poursuit, mais, il doit les pour-
suivre étant donné (2) un ensemble de contraintes définies par son
environnement. Ces contraintes limitent ses choix cad (0) les va-
riables qu’il dont il peut disposer.

L’analyse économique représente le comportement de l’agent


économique à travers le type de programme tripartite suivant :

Programme ou Analyse du choix

maximiser un objectif traduit par un nombre, une fonction


par le choix du niveau adéquat de certaines variables
s.c. tout en respectant des contraintes (équations ou inégalités)
Exemple liminaire

Un gosse dispose de 10 euros qu’il doit dépenser en bonbons, soit


en caramels, soit en fraises. Un caramel coûte 0,5 e, tandis qu’une
fraise coûte 1 e. Il n’aime pas les fraises et aime les caramels, Plus
précisément, le bien-être de ce gosse est représenté par U(c, f ) =
c − f , où c désigne le nombre de caramels qu’il aura acheté, et f , le
nombre de fraises. On précise que le gosse perd tout ce qu’il n’aura
pas dépensé.

Que pensez-vous qu’il fait ?


Exemple liminaire

Un gosse dispose de 10 euros qu’il doit dépenser en bonbons, soit


en caramels, soit en fraises. Un caramel coûte 0,5 e, tandis qu’une
fraise coûte 1 e. Il n’aime pas les fraises et aime les caramels, Plus
précisément, le bien-être de ce gosse est représenté par U(c, f ) =
c − f , où c désigne le nombre de caramels qu’il aura acheté, et f , le
nombre de fraises. On précise que le gosse perd tout ce qu’il n’aura
pas dépensé.

Que pensez-vous qu’il fait ?

Immédiatement, de façon intuitive : il achète 20 caramels.


Exemple liminaire - le programme

Vous apprendrez dans ce cours à traduire ce petit problème en


un programme formel, puis à résoudre ce programme. Ici, il s’agit
d’identifier les trois élément du programme, (i) les variables de choix
(ii) l’objectif et (iii) les contraintes.

(i) On denote c le nombre de caramels achetés par le gamin, f , le


nombre de fraises
(ii) L’objectif (à maximiser) du Gosse est c − f
(iii) La contrainte : que ce qu’il dépense n’excède pas son budget,
à savoir : 0, 5c + f ≤ 10

MAXc,f c −f
Programme du Gosse
s.c. 0, 5c + f ≤ 10
Exemple liminaire - Résolution du programme

On a maintenant un problème mathématique, qui a une formulation


éloignée du problème initial. On doit trouver deux nombres c et f qui
maximisent l’objectif c −f en respectant la contrainte 0, 5c +f ≤ 10.
On a par ailleurs l’intuition que l’on devrait trouver c = 20 et f = 0
comme unique solution de ce problème.

L’analyse de ce programme particulier se fait en deux étapes, dans


la première on démontre que f = 0, dans la seconde, que c = 20.

La méthode suit l’intuition, cad le design du problème. On commence ici


par la fraise, chère et non valorisée. Probable donc qu’elle sera choisie en faible
quantité. D’où la recherche de l’argument qui conduit à la conclusion f = 0.
Curieusement, ces types d’arguments sont les plus difficiles à développer.
Exemple liminaire - Résolution (détails)

f =0 On démontre qu’il est absurde de penser que f > 0. En effet, si (c, f )


avec f > 0 est la meilleure solution pour le Gosse de dépenser ses euros,
il est naturel de se demander s’il n’est pas possible de trouver un autre
panier avec moins de f , toujours réalisable. Par exemple (c, f − 1) ou
(c + 2, f − 1). Sans aucun doute, ces deux paniers améliorent l’objectif
du Gosse, ce qui démontre, par l’absurde, que le panier (c, f ) avec f > 0
ne pouvait pas être optimal, et donc, qu’à l’optimum f = 0.
MAXc c
C = 20 Sachant f = 0, le programme du Gosse s’écrit :
s.c. 0, 5c ≤ 10
MAXc c
Ou encore, lorsque l’on transforme la contrainte :
s.c. c ≤ 20
le nombre c le plus élevé, compatible avec la contrainte est c = 20

Notez en particulier le conflit qu’il y a entre la contrainte et l’objectif , dans la


dernière version du Programme, ; dans la contrainte c doit être plus petit qu’un certain
seuil. Dans l’objectif, c doit être le plus élevé possible. C’est la struture habituelle d’un
programme en économie
Choix optimal de la firme en CPP

Une firme produit une quantité q d’un bien et le vend au


prix p sur un marché en CPP. Pour produire cette quantité q,
elle doit dépenser C (q) (par exemple C (q) = q 2 , un des cas
où la production n’est pas linéaire). Quelle est la production
optimale de la firme ?

Ce problème classique donne des éléments pour aborder la question


très importante de la taille de la firme. Plusieurs savoirs y sont
rattachés, que vous devez tous maitriser facilement.

Ecrire et maîtriser le Programme optimal de la firme


Retenir et interpréter les Conditions Premières
Connaître le chemin intuitif d’analyse du choix de la quantité
en fonction de la fonction de coût
Ecrire le Programme de la firme en CPP

Pour répondre à cette question, on prend soin d’écrire le profit


de la firme, profit qui dépend de la quantité produite et de la
quantité vendue : les recettes moins les coûts.

(i) On denote q la quantité produite par la firme. Notez que c’est


aussi la quantité vendue sous l’hypothèse de Concurrence pure
et parfaite.
(ii) L’objectif (à maximiser) de la firme est π(q) = pq − C (q)
(iii) La contrainte, ex post : on ne retiendra que les firmes pour
lesquelles le profit est positif ou nul π(q) ≥ 0. Cette
contrainte ne joue pas de rôle dans la recherche de l’optimum.

MAXq pq − C(q)
Programme de la firme en CPP
s.c. π(q) ≥ 0
Résolution du programme de la firme en CPP - Tableur à l’aide - sans
contrainte

Cas particulier C (q) = q 2 et p = 10

On réalise un tableur, colonne 1, on incrémente q de 1 à 13 seconde


colonne, on calcule pour chaque valeur de q la valeur du profit 10q − q 2 ,
et on regarde pour quelle valeur la fonction est la plus grande. On obtient :
Valeurs de q Profit correspondant
1 9
2 16
3 21
4 24
5 25
6 24
7 21
8 16
9 9
10 0
11 -11
12 -24
13 -39
Résolution du programme de la firme en CPP
Cas particulier C (q) = 12 q 2
Le profit de la firme est la fonction π(q) = pq − 12 q 2
la dérivée de la fonction profit est π 0 (q) = p − q
La dérivée s’annulle lorsque p = q
cad lorsque q = p Cette valeur conduit à l’optimum du profit
Le profit maximal est alors π(p) = p 2 − p 2 /2 = p 2 /2

La représentation de la fonction profit, lorsque p = 1, et q ∈ [0, 2]

π(q)

1
2

q
1
Conditions premières de la firme en CPP

Définition

On appelle conditions premières d’un programme, les conditions


qui caractérisent la solution optimale

Ici, en reprenant le programme de la firme (dans sa version générale


avec c = C (q), la condition première est l’équation qui caractérise
la quantité q qui annule la dérivée de la fonction de profit.

Le profit de la firme est la fonction π(q) = pq − C (q)


la dérivée de la fonction profit est π 0 (q) = p − C 0 (q)
La dérivée s’annule lorsque p = C 0 (q)
C’est la condition première

Attention, pour établir qu’on a vraiment une condition première, on doit


vérifier que la condition obtenue caractérise bien un optimum. Ici dans l’exemple,
c’est vrai car la dérivée seconde est négative, ce sont les conditions secondes.
Interprétation des Conditions Premières
Souvent, pour un problème d’ordre général, on introduit un concept,
qui sert l’interprétation des conditions premières

Définition

On appelle coût marginal d’une firme, le coût de production de


la dernière unité produite. Quand la fonction de coût est connue
pour différents niveaux de production, le coût marginal est égal
à sa dérivée : Cm = C 0 (q) où q est la q ième et dernière unité
produite.

Le comportement d’une firme en CPP revient à choisir le plan de pro-


duction tel que son coût marginal égale le prix de vente du produit.

La quantité p − Cm est en fait le profit marginal, c’est à dire l’ac-


croissement du profit dû à un accroissement élémentaire de la quantité de
production.
Intuition du positionnement optimal de la firme en
CPP

Dans la vie d’un Gestionnaire, certains se rappellent qu’on devrait


avoir vérifiée cette égalité du prix et du coût marginal pour toute
entreprise en situation de concurrence pure et parfaite.

Cependant, il est plus probable que les Gestionnaires n’en retiennent


qu’un principe de bonne gestion, qui se rapproche du bon sens :

Règle(s) de comportement de la Firme

La firme modifie sa production si cela lui permet d’augmenter son profit


La firme modifie sa production si le profit marginal qui en résulte est positif
Une firme augmente sa production si la recette augmente plus que le coût
Choix optimal du Monopole

Une firme produit une quantité q d’un bien et le vend au prix


p, qu’elle décide sur un marché où elle est seule. Pour étudier
le parallèle avec le cas précédent, on suppose que la firme
est caractérisée par sa fonction de coût C (q). Quelle est la
production optimale de la firme ?

Ce problème aborde la question de la taille de la firme et de sa


tarification, quand elle est en mesure de dicter les prix. Trois étapes
de l’analyse :

Ecrire et analyser le Programme optimal de la firme


Analyser les Conditions Premières per se et dans une
démarche comparative (avec CPP par exemple).
Connaître le chemin intuitif d’analyse du choix de la quantité
en fonction de la fonction de coût
Ecrire le Programme du monopole

Pour répondre à cette question, on prend soin d’écrire le profit


de la firme, profit qui dépend de la quantité produite et de la
quantité vendue, la quantité produite étant elle même déter-
minée par la demande des ménages.

(i) On denote q la quantité produite par la firme, p le prix de


vente. Notez que q = D(p), cad que la firme ne vend que ce
qui est demandé, mais tout ce qui est demandé.
(ii) L’objectif (à maximiser) de la firme est π(q) = pq − C (q)
(iii) La contrainte est que la firme ne peut pas vendre plus que la
demande du marché.

MAXp,q pq − C(q)
Programme du Monopole
s.c. q ≤ D(p)
Résolution du programme du Monopole

Cas particulier C (q) = 12 q 2 et D(p) = 2 − p - par substitution


Le profit de la firme dépend de p [pas immédiat à imaginer]
π(p) = p(2 − p) − 21 (2 − p)2 [(évent.) π(p) = (2 − p)( 12 + p)]
la dérivée de la fonction profit est π 0 (p) = 4 − 3p
La dérivée s’annule lorsque p = 4/3
Optimum du profit lorsque p = 4/3 et q = 2/3
Le profit maximal est alors π(4/3) = 4/3 ∗ 2/3 − 1/2 ∗ 2/3 ∗ 2/3 = 2/3

On représente la fonction profit, π(q) = 2q − 23 q 2 , et q ∈ [0, 2]

π(q)
2
3
1
2

q
2 1
3
Conditions premières du monopole

Conditions premières : qui caractérisent la solution optimale

On le programme du monopole avec c = C (q), q = D(p). Les


conditions premières caractérisent les variables q et p qui annulent la
dérivée du profit (Calcul soit à partir de π = π(p) ou de π = π(q)).
Le profit de la firme est la fonction π(p) = pD(p) − C (D(p))
la dérivée de la fonction profit est π 0 (q) = D(p) + pD 0 (p) − D 0 (p)C 0 (D(p))
Soit encore, en remettant la variable q, π 0 = q + D 0 (p)(p − Cm )
Considérons ε l’érascité-prix de la demande, ε = −D 0 (p) pq
q p − Cm 1
π 0 = 0 ⇐⇒ = p − Cm ⇐⇒ =
−D 0 (p) p ε
Interprétation des Conditions Premières

On doit remarquer trois éléments dans la condition première


p − Cm 1
= ,
p ε

(i) : p ≥ Cm , voire,

(ii) : p > Cm si l’élasticité-prix de la demande n’est pas infinie, puis,

(iii) : la différence entre le prix du monopole et le coût marginal est


d’autant plus grande que l’élasticité-prix de la demande est petite.

Le monopole propose un coût supérieur à son cout marginal. Il s’arrête


de produire (bien) avant que le coût de la dernière unité produite soit Égale
au prix de vente. Il peut d’autant plus augmenter les prix que les clients
sont indifférents, cad que leur élasticité-prix est petite.
Intuition du positionnement optimal du Monopole

Le positionnement du monopole, sa stratégie optimale, nécessite qu’il soit plus


savant et plus clairvoyant sur les conditions du marché, et en particulier de
connaître la demande, ce qui n’était pas nécessaire en CPP.

Règle(s) de comportement du Monopole

Produire peu et profiter de cette rareté pour augmenter les prix


Être attentif à l’évolution de la demande quand les prix augmentent

Exercice : En repartant d’une firme dont le coût est C = 12 q 2 , et qui


produirait 100 en CPP, tenter d’analyser combien elle produirait en monopole si
l’élasticité-prix de la demande du marché est constante égale à 0,8 ?
Contrat de travail

Une firme (le principal) souhaite déléguer à une tierce per-


sonne (l’agent) le soin d’exécuter une tâche en étant intéressé
à son résultat.
Si le principal ne souhaite pas accomplir lui-même la tâche,
il ne peut pas non plus contraindre l’agent à la réaliser coûte
que coûte, ce qui viderait le problème de son sens. Il doit
donc passer un accord avec l’agent spécifiant, outre la tâche
à accomplir, les modalités de rétribution de l’agent, accord
que ce dernier est libre d’accepter ou de refuser. Une fois
formalisé, cet accord prend la forme d’un contrat entre les
deux parties.

Notez qu’il s’agit là encore ici de quantités et de prix : le principal demande


à l’agent de fournir une certaine quantité de travail, qu’on note ici ` en
contrepartie d’une rémunération horaire w qui est le prix.
Exemple : Version simple du contrat de travail

Les deux variables de choix sont ` et w

L’utilité du Principal est U(w , `) = f (`) − w

L’utilité de l’agent est V (w , `) = u(w ) − `

On suppose que Principal, a la main son programme est :

MAXw,` f (`) − w
Programme du Principal
s.c. u(w) − ` ≥ 0

La manière dont on écrit ce programme est très dépendant de la


manière dont on écrit la contrainte. On voit ici une «contrainte de
réservation de l’agent», cad l’utilité nette minimum qu’il doit recevoir
avec le contrat. On suppose que s’il ne travaille pas, w = 0, u(0) = 0
et l’effort est ` = 0.
Exemple : Calcul du contrat de travail dans un cas particulier

Supposons que la productivité soit quadratique f (`) = `2 ,



que l’utilité soit concave, u(w ) = w ,

CALCULER LE CONTRAT DE TRAVAIL OPTIMAL POUR L’EM-


PLOYEUR

CALCULER LE CONTRAT DE TRAVAIL SI ON RAJOUTE UNE


HYPOTHESE REGLEMENTAIRE DU TYPE ` ≤ `¯
Exemple : régulation d’un monopole public

Un principal veut faire produire un bien à un agent. q unités produites lui


rapportent q et le coût de l’agent est de θ1 q 2 .

résolution

le principal (en situation de monopole) donne un transfert t = θ1 q 2 à l’agent


1 2
et reçoit alors le paiement π = q − 2θ q
θ θ
le principal choisit q = θ donne t = et gagne π ∗ =
∗ ∗
2 2

Interpréter le coefficient θ après avoir réalisé la statique comparative.

Ecrire le Programme du Principal et expliquer pourquoi/comment sa contrainte


est saturée, comprendre comment cette propriété est essentielle pour la détermi-
nation du contrat optimal.
Savoirs mathématiques annexes à la gestion

Dérivation, représentation d’une fonction de une variable,


résolution d’équations simples, réaliser des calculs simples
Ecrire les fonctions qui modélisent les valeurs économiques,
faire des graphes dans des repères adaptés
Ecrire les conditions premières sous la forme la plus parlante
[par exemple Cm = p est plus parlant que p − C 0 (q) = 0]
Reconnaître et/ou vérifier que ces conditions correspondent
bien un optimum local.
Repérer facilement la concavité ou la convexité d’une fonction
Savoir représenter les contraintes, maitrise des graphiques
dans plusieurs dimensions, Réfléchir les contraintes qui sont
saturées, celles qui ne le sont pas.
Théorème de Lagrange
Savoirs mathématiques utilisés dans ce chapitre

Dérivées (1)0 = 0, (x )0 = 1, (x 2 )0 = 2x ,
1
(x a )0 = x a−1 , (ln(x ))0 = , (e x )0 = e x ,
x

Règles Dérivation (u + v )0 = u 0 + v 0
(uv )0 = u 0 v + uv 0
(u ◦ v )0 = (u 0 ◦ v ) × v 0

Factorisation (ab+ac)=a(b+c)

À SAVOIR ABSOLUMENT, répéter s’il le faut

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