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Jean Yanne remet en question la classification du cinéma en 7e art, le réduisant à un

spectacle mercantile. Pour moi, l’art est la transmission d’un message et l’innovation pour atteindre
le plus grand nombre et toucher notre humanité. Le cinéma correspond à cette définition par
certains aspects.

Tout d’abord, il se place dans la lignée du conte de fées, du roman, du théâtre ou même de
l’essai. La technologie a permis cette évolution de sa mise en œuvre. 
En effet, le réalisateur met en avant son regard sur la société, innove et raconte une histoire.
Par exemple, dans le documentaire de François Ruffin,  Merci patron (2016), nous suivons les
aventures du réalisateur à la recherche de Bernard Arnault. Il fait tout pour parler au PDG de
LVMH. Dans sa quête, une rencontre modifiera le cours des choses et le placera du côté des
victimes de la délocalisation. Ce documentaire-comédie permet de rire des puissants et est un
exemple de l’utilisation du cinéma pour porter un message qui dénonce un système défaillant.
De la même manière, dans l’Odyssée moderne Star Wars (1977), George Lucas nous offre une
relecture d’un récit écrit comme un mythe puisqu’il s’est appuyé sur les travaux de J. Campbell, Le
Héros aux mille et un visages (1949). La saga se présente alors comme la continuité de l’art de la
transmission orale de la Grèce archaïque.
De plus, les œuvres cinématographiques permettent également de nourrir notre héritage
culturel commun. C’est le cas dans les biopics.
Ainsi, dans Le jeune Karl Marx, une tranche de vie du philosophe nous est montrée. Nous le
suivons de son départ d’Allemagne jusqu’à la publication du Manifeste du parti communiste. En
faisant revivre l’homme le temps du film, Raoul Peck met en évidence un sujet toujours actuel : la
lutte des classes.
Enfin, l’art permet de vivre des expériences humaines pendant lesquels nous nous sentons en
harmonie avec nos semblables et avons un même sentiment d’appartenance.
C’est ce que j’ai ressenti lors d’une séance animée du Rocky Horror Picture Show (1975). Cette
comédie musicale iconique de la culture queer, est aussi une expérience en salle : on crie, on danse,
on jette du riz, de l’eau… Le film permet la communion et s’il n’est pas très drôle en lui-même, il le
devient grâce à la joyeuse troupe de l’ensemble des spectateurs.

Le cinéma se pose donc bien comme un art à part entière même si, par certains aspects, il se
présente également comme un produit permettant la production de richesses.

Ainsi, dans certaines grosses productions, tout en restant critique, il n'est plus intimiste et se
donne à voir. En effet, les moyens sont donnés pour raconter des récits épiques et des odyssées
grandioses aux confins du Far West ou même de l’univers, tout en soumettant une réflexion.
Dans Django (2009), hommage de Tarantino aux Westerns spaghetti, le récit prend des allures
épiques dans lequel les protagonistes, un chasseur de prime et Django, esclave affranchi, cherchent
la femme de ce dernier, prisonnière d’un esclavagiste. Le spectateur est embarqué dans cette épopée
abolitionniste.
Ce cinéma-là peut également se poser en lanceur d’alerte.
En effet, dans Matrix (1999), à la jonction entre le XXe et le XXIe siècles, le héros, Néo, lutte aux
côtés de la Résistance contre les machines. Ce film spectaculaire nous alerte sur les dangers de la
technologie et la surveillance de masse.
De plus, le cinéma est non seulement un récit moderne, mais il commence en plus à être une
vitrine, une bande démo. Les acteurs et les réalisateurs sont célèbres et ont déjà fait leurs preuves.
L’acteur se retrouve propulsé, comme un bon produit rentable.
Dans Babylone (2023), les spectateurs ont pu retrouver des acteurs populaires évoluant dans un
Hollywood en pleine révolution du film parlant, les désirs de gloire se mêlant à l’ambiance
fantasque de l’entre-deux guerres. Mais finalement, ce qui se présente comme un « making of » de
Singing in the rain n’apporte pas grand-chose de plus, si ce n’est un beau spectacle.
De même, Fight club  (1999) critique la société de consommation et esquisse un trait d’humour sur
une « bureaucratisation de l’anarchie » avec le Projet Chaos, véritable entreprise. Cependant, bien
que très réussi avec des acteurs très convaincants, ce film n’est qu’une adaptation de l’œuvre
éponyme de Chuck Palahniuk.

Malheureusement, dans cette ruée vers l’or, à l’inverse de l’art de Baudelaire, l’or se
transforme en boue.

En effet, à la fin du XXe siècle, les gens veulent du divertissement et la publicité est
omniprésente. Là où elle peut servir la narration en ancrant le personnage dans le réel, elle utilise
désormais le film, véritable coquille vide, comme encart publicitaire. D’ailleurs, cette dynamique
est largement dénoncée dans Le Truman show, (1998). Le cinéma produit de l’argent !

De plus, certains films, particulièrement rentables, sont produits à la chaîne.


Chez Marvel, par exemple, une trentaine d’adaptations des comics est sortie depuis 2008. Au début,
les réalisateurs et la production (Disney) cherchaient le compromis entre l’histoire naïve et la
morale. Mais la formule s’épuise depuis quelques années, l’originalité se fait rare mais le public est
toujours au rendez-vous. Il en va de même pour Star Wars, les films se répètent sans égaler la
trilogie originale, illustrant avant tout la mercantilisation de l’industrie. Agissant comme des
publicités devant lesquelles le public s’agglutinerait devant le produit présenté. Ce que vous voyez à
l’écran, vous pouvez l’acheter !

Le cinéma devient une machine à argent tel le système capitaliste décrit par Karl Marx. Cet
argent prolifère grâce à la marchandise. Dans le cinéma moderne, les produits du 7e art ont tendance
à être cette marchandise, de moins bonne qualité, grâce à laquelle les profits augmentent.
Cette problématique, dénoncée par Jean Yanne, peut être résumée par les paroles de sa chanson
Chobizenesse « … comme son nom l’indique, c’est du spectacle et c’est du fric ».

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