Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
C.E.M.S. Air: Cycle D'enseignement Militaire Du 2ème Degré Des Officiers de Réserve
C.E.M.S. Air: Cycle D'enseignement Militaire Du 2ème Degré Des Officiers de Réserve
C.E.M.S. Air
Intervention
____________________________
2
EN HOMMAGE
à Madame Caroline AIGLE, première femme pilote de chasse, 1 524 heures de vol dont 124
de nuit, qui a été fauchée durant l'été 2007 par un cancer de la peau, à l'âge de 33 ans.
Derrière une volonté hors du commun, une exceptionnelle intensité humaine qui représente, à
mes yeux, l'un des meilleurs exemples contemporains d'engagement au service de l'Armée de
l'Air.
"L'expérience instruit plus sûrement que le conseil" disait André GIDE (*).
_____________________________
INTRODUCTION
Les conflits contemporains en montagne sont une réalité, comme nous l'avons vu au
Cachemire, da ns le Caucase ou en Afghanistan. Ce théâtre d'opérations difficiles ne permet
pas toujours d'exploiter avec une efficacité totale la suprématie technologique. L'observation
satellitaire et aérienne, la maîtrise du ciel sont des éléments fondamentaux comme dans tout
type de conflit mais rien ne permettra d'éviter le contact au sol des troupes engagées ; contact
dans lequel le "faible" se sent rétabli dans une certaine égalité de chances dans son
affrontement au "fort", du fait de l'hostilité du milieu. Pire, celui-ci tentera d'attirer l'autre
dans cet espace.
Un autre exemple peut être cité. En 1992, la Somalie sombre dans les conflits claniques.
Une coalition internationale composée de troupes françaises intervient, notamment à
Mogadiscio, dans le cadre d'une opération baptisée "Restore Hope". Les partisans du général
AYDIID provoquèrent la mort de 24 soldats de la force d'interposition. Une des techniques
employées par l'adversaire consistait à entourer les unités de l'O.N.U. avec une foule
bruyante, composée en majorité de femmes et d'enfants qui manifestait son mécontentement,
voire son hostilité mais sans agression physique. La pression de la foule contre les cordons de
soldats se faisait de plus en plus forte, afin de permettre aux insurgés de pouvoir se saisir de
pièces d'équipement (combiné radio, armement…). L'unité encerclée devait alors faire des tirs
de semonce, ce qui provoquait un mouvement de panique des personnes rassemblées au
milieu de laquelle se trouvaient des tireurs. Ceux-ci prenaient pour cibles prioritaires les chefs
de l'unité agressée qu'ils avaient pu facilement identifier pendant la phase de "négociation"
avec la foule*.
_____________________________________
* source : extraits d'un article du commandant du bataillon interarmes de Somalie, lors
de l'opération ONUSOM II, le Col de SAQUI de SANNES, publié dans les cahiers du
RETEX, n° 4, joints à la revue Objectif Doctrine, n°29).
5
Les affrontements en Côte d'ivoire, pour certains d'entre eux, présentent le même
schéma (opération Licorne qui a débuté le 26 septembre 2002). Les solutions dégagées lors
des évènements de Mogadiscio, sont transposables en partie. L'expérience acquise en Somalie
dans la gestion de la population utilisée comme bouclier pour des tireurs et la prise en compte
de l'angoisse que dégage la présence de cette foule hostile pour les troupes méritait que ces
éléments soient connus des militaires engagés en Côte d'Ivoire.
"L'expérience instruit plus sûrement que le conseil" disait André GIDE et Blaise Pascal
qui le précédait nous a rappelé que deux choses instruisaient l'homme : l'instinct et
l'expérience.
Le militaire n'échappe pas à ce déterminisme. Savoir tirer les leçons du passé pour gérer
le présent et construire l'avenir fonde la démarche des retours d'expérience. Cette dernière
traduit la capacité de l'homme engagé dans l'action à tirer toutes les leçons de ses actions
antérieures.
Nos responsables militaires ont donc intégré cette approche. La division emploi de
l'état-major des armées a repensé un système plus performant de retour d'expérience intitulé
RETEX dans son acronyme, qui se veut mieux adapté au format professionnel de nos armées
et aux nouvelles contraintes opérationnelles comme notamment la dimension interarmées et
multinationale des actions militaires engagées aujourd'hui.
Cette volonté de l'Etat-major des Armées s'est déclinée au sein des différentes armées.
L'Armée de l’Air a donc mis en place depuis septembre 2002, au sein du Commandement de
la Défense Aérienne et des Opérations Aériennes (C.D.A.O.A.), une unité dépendant d'un
général chef d'état-major dont le nom est Préparation, Retex et Evaluation.
Cette démarche n'est pas propre à la France. Au sein de l'OTAN, le processus RETEX
est intégré dès la planification des interventions et il a sa place dans la conception des ordres
comme dans la conduite des opérations. Une des illustrations de ce processus de retour
d'expérience se retrouve dans l'organisation de la KFOR lors de son action au Kosovo. Une
cellule RETEX en français ou "lessons learned" en anglais, a été mise en place et était
articulée autour d'un officier désigné dans cette unique fonction au sein du HQ/KFOR.
_________________________________
* Source, article paru en mars 2003, tiré du numéro 19 de la revue du Centre de formation du
Ministère de la défense.
6
L'existence d'une procédure de retour d'expérience, RETEX, ne doit pas nous interdire
de réfléchir à la meilleure manière de la penser et de l'organiser.
Pour que l'expérience acquise par chaque aviateur soit le trésor de toute l'Armée de
l'Air (*), il nous faut donc répondre aux deux éléments de la définition de l'expérience.
L'ensemble des expériences individuelles de nos camarades aviateurs doit être collecté dans
un recueil organisé (I) afin de pouvoir en tirer une cohérence, une probabilité de conséquences
et ainsi intégrer ce retour d'expérience dans un processus de décisions (II).
A) L'information collectée
L'observation des situations de crise, la collecte de l'information provenant des
engagements de nos forces pourraient sembler une tâche matérielle simple par nature mais
celle-ci est primordiale car elle aura une influence directe sur la qualité de l'analyse qui s'en
suivra. En effet, les sources d'information sont multiples et il faut être attentif à chacune
d'elles pour constituer un panel le plus large possible d'éléments de comparaison.
________________________________
* L'expérience de chacun est le trésor de tous (Gérard de Nerval, 1808 - 1855).
S'agissant de l'Armée de l'Air, son histoire est récente (une des premières dates liées à
l'aéronautique militaire peut être fixée vers 1909 lors de la commande par le général
ROQUES de cinq aéroplanes pour les besoins de l'Armée). Malgré tout, le principe de la
rationalisation d'une démarche ne doit pas être bloqué par cet élément temporel. Le principe
demeure. Le recours aux actions passées pour en dégager des tendances lourdes, des points de
convergence est nécessaire *.
Il peut être cité l'exemple de la crise de Suez, en 1956, dans laquelle l'Armée de l'Air est
engagée aux côtés des forces anglaises. Le général BROHON a commenté l'opération
Mousquetaire qui a permis la neutralisation par la destruction de l'aviation égyptienne qui
était, à l'époque, la première puissance aérienne du Proche-Orient. En moins de deux jours,
cette aviation fut anéantie offrant aux troupes anglaises et françaises une supériorité aérienne
totale. L'élimination préventive de l'aviation ennemie par le recours aux chasseurs-
bombardiers en vue d'acquérir la maîtrise du ciel deviendra l'un des principes fondamentaux
de la stratégie aérienne, principe décliné plus tard par les israéliens en 1967.
La notion d'avion bi-missions (avion de défense aérienne mais pouvant servir appui sol
ou avion multirôle de ravitaillement en vol et de transport, programme MRTT) nécessite une
logistique adaptée, souple d'emploi avec une compétence élargie pour les pilotes et le
personnel d'appui.
__________________________________
* Voir, par exemple, le mémento : la conduite du retour d'expérience (la REX) par la
Direction de la Défense et de la Sécurité civile dépendant du Ministère de l'intérieur et de
l'aménagement du territoire.
9
Pour cela, il ne sera cité que l'apport des O.N.G. présentes sur un site en crise. Partant
de différentes constatations, pour le militaire, consistant à penser :
- qu'il doive comprendre et dominer son environnement. Celui-ci est un des facteurs de
l'action militaire ;
- que l'environnement est à prendre au premier degré d'environnement physique mais
aussi au deuxième degré, d'environnement humain et politique ;
- qu'une action de force conduite sans participation des organisations humanitaires peut
facilement transformer les militaires en force d'occupation auprès de la population ;
- que les O.N.G. sont entrées dans le jeu des acteurs de crise et que les responsables
politiques les intègrent dans leurs paramètres ;
De ce fait, par leur présence physique au moment d'une crise ou comme l'un des outils
de gestion de situation post-conflit, un lien est souhaitable entre les O.N.G. et la contribution
éventuelle qu'elles peuvent apporter à la force militaire en matière d'information au sens large
; cet échange avec les O.N.G. se limitant à la notion d'informations partagées *.
b) L'information recherchée
L'information fournie par les conflits passés ou présents peut paraître
insuffisante ou parcellaire.
Cette information sera alors recherchée lors d'opérations bien réelles mais
qui n'ont d'autres buts que de tester en grandeur nature un processus d'actions pour mieux
l'exécuter plus tard ou lors de phases d'entraînement
1) L'action test
L'action qui sera citée au titre d'une démarche d'apprentissage, recherchée pour son
retour d'expérience sera l'opération JUBILLE du 19 août 1942. A cette époque, les alliés
projettent un raid sur le port de DIEPPE, vaste opération de reconnaissance en force, destinée
d'une part à inciter les Allemands à réduire leur pression sur le front de l'Est et d'autre part à
tester de nouvelles techniques et de nouveaux équipements. Ils mettent donc sur pied
l'opération JUBILLE.
JUBILLE avait pour objectif de prendre Dieppe et ses environs, de détruire des objectifs
précis avant de réembarquer pour l'Angleterre. Cette opération fut un échec sur le plan de
l'action car sur les 6 086 hommes constituant la force d'assaut, 3 000 hommes seulement ont
pu réembarquer et regagner l'Angleterre. Le raid aérien précédant l'assaut fut insuffisant, la
puissance de feu de l'ennemie ayant été sous-estimée. Malgré tout, la leçon de JUBILLE,
durement acquise servira lors des opérations futures comme pour le débarquement en
Normandie et l'opération Overlord ou pour le débarquement en Provence, opération Dragoon.
La nécessité d'un fort bombardement aérien en cas d'assaut sur une côte fortifiée fut retenue.
___________________________________
* Revue Doctrine, numéro spécial du 26 février 2005, page 26 : "Il s'agit d'un lien
délicat qui ne peut s'institutionnaliser. On peut toujours cependant, à l'échelle individuelle, se
parler, collaborer ponctuellement et mêler préoccupation humanitaire et patriotisme".
10
Les pertes éprouvées au cours du raid de DIEPPE représentent une partie du tribut versé
en échange de l'expérience retirée. Celle-ci a permis de mener à bien les grandes opérations
futures en versant moins de sang que les prévisions les plus optimistes ne l'espéraient.
Aujourd'hui, cette action test peut prendre la forme de la participation de la France à une
opération internationale en tentant de plaider pour occuper la place de la nation-cadre, leader
de la mission.
2) L'entraînement comme source de RETEX
L'importance de l'entraînement n'est plus à démontrer en matière militaire comme dans
d'autres domaines. Nous retiendrons cette affirmation comme un postulat en rappelant le vieil
adage bien connu : "On s'entraîne comme on se bat pour se battre comme à l'entraînement".
Les deux relatives nouveautés dans ce domaine sont l'influence du contexte interarmées et la
prise en compte de la coopération internationale qu'il faut intégrer dans l'entraînement, ce qui
augmente sensiblement le coût d'un entraînement grandeur nature.
La démarche RETEX étant maintenant largement identifiée par les Forces, les phases
d'entraînement viennent à leur tour compléter, enrichir la documentation d'une base de
données de type RETEX.
Afin de limiter les coûts de ces exercices, nous voyons apparaître une nouvelle formule
d'entraînement par le biais du "téléentraînement" ou entraînement au moyen d'un système
informatique de simulation. Le salon militaro-industriel international de la simulation en est
l'illustration commerciale la plus visible. L'arrivée de la simulation, à base d'informatique,
facilitera l'indexation des informations et donc l'enrichissement d'une base de données à
vocation RETEX.
La collecte d'informations, si elle puise dans de multiples sources, serait inutile sans un
classement de celle-ci permettant une exploitation dynamique.
Enfin, la collecte d'informations ne doit pas se heurter à la crainte d'exposer ses erreurs.
La peur des conséquences des décisions et actions pourrait entraver le recueil d'informations.
Le fait de vouloir limiter la perte de temps pour refuser une démarche de retour d'expérience
peut masquer celle d'exposer ses erreurs. C'est pourquoi, la pratique des observateurs neutres
par définition, rattachés à une mission RETEX est importante.
a) Le niveau de collecte
Ce niveau de collecte est multiple. Il est possible d'en repérer habituellement quatre.
Le P.C. regrouperait, à son tour, les informations transmises pour une analyse faite par
l'Etat-major de l'Armée de l'Air qui pourrait se poursuivre par une transmission à l'Etat-major
des armées.
Le milieu civil applique à ce fait analysé une cotation entre ces deux paramètres,
cotation qui va déterminer le niveau de diffusion de cette information et son niveau de
traitement.
Le niveau du retour d'expérience est donc à mettre en place pour lui offrir un traitement
adéquat en fonction de sa gravité et de sa nouveauté.
topique est l'organisation des études de notaire où certains clercs ont accompli 35 ans de
carrière. Leur stabilité leur permet de connaître l'ensemble des clients et une très grande partie
des problèmes qu'ils peuvent soulever.
Le recours à une base de données est indispensable. Néanmoins, cette base de données
bien que classique dans sa conception, à savoir, un référentiel de date, de lieu ou de thèmes
doit être adaptée à son objectif. C'est ainsi que la réalisation d'un diagramme causes-
conséquences, par exemple, pourrait y avoir sa place.
L'existence même de ce référentiel aura une influence sur la manière de recueillir les
données pour en faciliter le tri. Une standardisation de la chaîne de collecte s'imposera d'elle-
même.
La diffusion de ce que l'on peut appeler une bonne pratique doit être mise en place (A)
et cette diffusion ne doit pas seulement donner un éclairage sur le passé des engagements pour
suggérer des améliorations possibles, elle doit être une des justifications, un des moteurs à
l'évolution de notre doctrine de combat et nous pousser à anticiper les difficultés à venir (B).
a) Sa doctrine
Le processus de RETEX, s'il est estimé indispensable par le commandement militaire,
doit être érigé en une véritable culture de management avec pour corollaire imposé une
organisation permanente et cohérente incluant du personnel formé à tous les niveaux afin de
s'assurer d'une bonne qualité des résultats.
13
Cet élément de culture d'entreprise pour reprendre une expression du monde civil, doit
être formalisé au plan national mais aussi au plan international. Le rôle de la France dans
l'OTAN devrait faciliter cette coopération.
Pour ne retenir qu'un exemple d'inflexion de la doctrine militaire, il sera rappelé les
enseignements tirés de la guerre liée à l'invasion du Koweït en 1990-1991. Cette guerre et les
premières opérations en Bosnie ont révélé l'inadaptation de la conscription à la projection des
forces et ont déclenché le processus de la professionnalisation des armées.
Le service miliaire qui était pourtant l'un des mythes fondateurs de la République
française dont la création remontait au 5 septembre 1798 a été suspendu, jusqu'à nouvel ordre,
par une loi du 28 octobre 1997.
Cette suspension n'est donc pas uniquement le résultat d'une recherche d'économie
budgétaire mais la volonté de l'adaptation de nos forces à des contraintes différentes qu'une
démarche RETEX avait permis de détecter et surtout de confirmer.
Cette relation interactive implique donc deux flux. La mise à jour des enseignements
liés à une approche RETEX exige une bonne communication des forces vers l'élément
centralisateur et un retour de cet élément centralisateur vers les forces. Cette communication
demande une présence de responsables RETEX à de multiples échelons, qu'ils soient en état-
major, au sein de P.C ou en unité. L'approche RETEX aura une influence sur les structures de
commandements.
D'un point de vue plus matériel, la simple mise à jour et le partage en réseau d'une base
de données RETEX pour ses informations à vocation opérationnelle mérite un investissement
en temps et en finances. La compatibilité des réseaux utilisés en matière internationale par les
différentes armées, leur interopérabilité et la standardisation des procédures nécessiteront une
attention particulière.
Une analyse RETEX sur la récupération de pilotes abattus en territoire ennemi donne
potentiellement lieu à l'utilisation de moyens provenant de plusieurs armées. Un RETEX
limité en partie à l'Armée de l'Air aurait peu de sens en terme d'enseignement pour une
opération de secours de ce type.
14
d) Les équipements
La présence de l'Armée de l'Air sur des sites très différents, Afrique, Pays de l'Est,
Moyen Orient déclenche des demandes d'équipements adaptés à l'évolution des techniques. La
confrontation avec les armées étrangères suggère des idées mais aussi peut-être des envies
notamment en matière d'équipement personnel de l'individu.
Sur un aspect plus général, l'on peut citer le choix délibéré de certains pays de s'équiper
de dispositifs sol-air efficaces plutôt que d'avions de supériorité aérienne plus coûteux.
Face à la grande mobilité des systèmes sol-air, des armées ont décidé de mettre en
place, des systèmes de détection pertinents. La défense sol-air utilisée par les serbes, d'origine
russe, en est un témoignage. Son efficacité a malheureusement été démontrée.
Si ce constat est exact, il doit inciter les armées à se doter, par exemple, de drones
pouvant compléter les moyens de renseignements embarqués sur avion de reconnaissance.
Des appels d'offres sont susceptibles d'être préparés.
Il faut reconnaître que, parfois, des industriels devancent le besoin des armées. Je citerai
une illustration étrangère en la personne de la société General ATomics Aeronautical Systems
qui a développé un drone, le predator C Avenger, qui bénéficie directement des retours
RETEX de la guerre au Kosovo.
La relation, forces armées, industriel avec un enseignement lié à un RETEX est là,
parfaitement claire.
Ce retour d'expérience, s'il permet d'agir sur le court et moyen terme doit avoir
également une influence sur le long terme, sur la recherche opérationnelle qui déterminera,
demain, le choix des systèmes d'armes ou le choix des structures d'unité.
a) La réflexion prospective
Les réflexions d'aujourd'hui considèrent que les forces devront savoir faire porter leurs
efforts sur les villes, principaux théâtres d'opérations dans le futur. Les armées étrangères y
ont été confrontées comme Tsahal dans les territoires palestiniens mais aussi l'armée française
en Bosnie ou en Afghanistan.
La place de l'aviation dans ce combat est à déterminer. L'unité d'emploi de demain sera
peut-être la section appuyée d'hélicoptères et d'avions. Le RETEX effectué à ce jour pourra
15
aider utilement les états-majors concernés à élaborer une politique d'engagement, un choix de
structures pour les unités ainsi qu'un choix de politique de soutien.
La gradation des moyens employés doit faire comprendre à l'adversaire qu'il peut être
anéanti mais qu'il peut aussi entrevoir une sortie honorable. La conception de cette gradation
n'est pas que technique, elle est aussi humaine, psychologique. Les informations provenant
d'un RETEX permettront vraisemblablement de dégager, d'identifier des tendances lourdes et
d'arrêter le dosage à retenir pour certaines actions de destruction qui auront un objectif
immédiat de gain militaire mais aussi un objectif secondaire de proportionnalité avec le
devenir de la région concernée.
b) La veille technologique
Le terrain urbain des opérations a notamment incité le commandement à numériser le
champ de bataille pour suivre au mieux les opérations, localiser l'ennemi et éviter les tirs
fratricides. Cette numérisation de champ de bataille est utilisée également par les forces
américaines qui ont servi d'aiguillon à certains de nos industriels.
L'avantage de la numérisation n'a de sens que si celle-ci est partagée entre les
différents acteurs et notamment les forces aériennes. Une des prémisses à cette numérisation a
eu pour domaine les opérations de fouille de localités ou d'objectifs en zone urbaine.
Le RETEX fait ressortir les avancées technologiques des autres armées et leur intérêt
pour le champ de bataille. Ces informations doivent déclencher une réflexion et une action
pour l'équipement des armées de demain.
Conclusion
Pour certains, l'esprit humain ne peut rien créer, s'il n'est fécondé par l'expérience et la
méditation, ses connaissances sont les germes de ses productions.
Si l'on retient cette proposition, il ressort que garantir un retour d'expérience efficace pour
optimiser la préparation des unités de l'Armée de l'Air au combat, nécessite notamment :
- la collecte d'informations dans différentes directions,
- leur classement et indexation,
- leur analyse et la prise en compte de celles-ci dans une doctrine d'emploi et dans la
planification des actions que cela soit d'un point de vue opérationnel ou d'un point de vue
16
prospectif pour aider nos unités à s'adapter en permanence aux défis auxquels nous devons
faire face.
La démarche est en cours, elle doit être poursuivie et amplifiée. Le général ABRIAL rappelait
dans l'une de ses interventions que si nous dormons sur nos lauriers et n'agissons pas pour
maintenir notre avantage, le prix à payer pourrait être très élevé pour redécouvrir ce vieux
principe*.
Alors, bien évidemment, le RETEX à lui seul, serait insuffisant à nous offrir l'avantage.
L'expérience est une lanterne qui éclaire le passé disait un auteur célèbre. La variété des
combats obligera parfois un chef à s'affranchir de toute procédure pour agir avec sa
conscience, sa propre expérience mais aussi son instinct face à une situation aux paramètres
inconnus.
André GIDE pensait que "Toute théorie n'est bonne qu'à condition de s'en servir pour passer
outre" et que "Le monde ne sera sauvé, s'il peut l'être, que par des insoumis **".
** André GIDE, son Journal publié de 1943 à 1953, maximes tirées des Feuilles de route.