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La déesse de l’éventail noir.

La lune d'hiver brille ci bas


sur les arbres givrés et les temples glacés
Je m'assieds seul avec ma coupe de vin
Et chante des louanges à la mort et à la vie
Un homme peut chanter à ses coupes et à la lune
Car qu'y a-t-il d'autre à la vie, oui ?
J'aimais ma femme et mon enfant
Mais maintenant ils sont allés en enfer.

Ma chanson dérive et s'estompe comme l'automne


Et une nouvelle chanson s'élève de la vallée
C'est une chanson de femme muette
Et douce La voix s'élève comme le vol d'un oiseau
La voix chante, Viens à moi , viens à moi
Viens à moi, et Je dois y aller
Qui pourrait nier une voix aussi douce et aiguë ?
Qui pourrait refuser son doux plaidoyer ?

Elle se tient seule dans son temple,


Seule au sommet d'une estrade ornée de bijoux
Sa beauté ferait exploser le ciel
Ses yeux sont des mares vert foncé

Une tunique en soie qu'elle porte


de couleur jaune et noire comme une guêpe
Et dans sa ceinture, elle a glissé son dard
Six faucilles , tranchantes comme une dent de dragon

Son visage elle se cache derrière un éventail


De métal sombre, aussi noir que l'obscurité
Ma dame, enlevez votre éventail
je me régalerais de votre beauté
L'éventail s'agite mais ne tombe pas
Elle minaude derrière l'éventail et dit
Tu ferais de telles demandes à un dieu ?
Sa voix est comme du velours de fer déchiqueté
Je n’eus su que vous étiez déesse, ma Dame
Dites-moi comment je peux vous vénérer
Dis-moi comment je peux te louer
Ma vie n'a été qu'un prélude pour toi
Elle minaude, et ses yeux m'emprisonnent
Personne ne peut dire mon nom, roucoule-t-elle
Mais tu peux me servir, pour toujours et à jamais
Des chansons de joie baragouinent derrière mes lèvres
Une déesse doit être choyée, dit-elle
Aimée, adorée et vénérée
Elle doit être nourrie d’offrandes sacrées
Amenez-moi des enfants pour ma congrégation.

Le devoir et l’amour guide mes actes


Je quitte le temple à la hâte
Dans la forêt, un enfant cueille des baies
Et se méfie de mes demandes enjouées
Grace à promesses de gourmandises
Je maitrise l’enfant farouche et méfiant
Je l’emmène au temple de ma reine
Et personne n’entend le petit cueilleur crier
La lutte du garçon cesse alors qu'il contemple la Déesse
Une joie tranquille le tient fermement alors qu'elle le prend dans ses bras
Elle se détourne de moi, lève une faucille de sa ceinture
Et enlève son éventail. L'enfant crie un instant
La tête de l'enfant était ouverte avec la faucille
Puis jetée une fois la cervelle arrachée
Derrière son éventail, la Déesse sirotait
« Je n'aime point plus qu’on m’offre des lys gris d'un enfant »

Après plus de temps passé à parler et à adorer ma Déesse


Même cette vision horrible a été oubliée
Bien qu’elle cachait toujours tout sauf ses yeux derrière son éventail.
Bientôt, je deviendrai son amant favori en lui dévouant mon culte
Il n'y a pas de gloire plus grande que la déesse de l'éventail noir
Sa beauté et sa sagesse sont plus vastes que le nombre d' étoiles la nuit
La déesse de l'éventail noir est le sens de toute vie et de toute mort
Rien ne doit lui être refusé, et non le sacrifice est trop grand

Si l' Empereur vient à vous et demande votre maison et votre femme


Vous les abandonnez toutes les deux pour sa gloire et son honneur
Combien plus la Déesse mérite-t-elle, alors qu'elle est plus grande que l'Empereur ?
Elle aime ses lys gris, alors avec joie j'assiste à la moisson

Pourquoi le Sheng aurait-il des enfants alors que j'ai perdu les miens ?
Il n'a jamais été un homme honorable
S'il y avait équilibre, il aurait perdu ses enfants
Mais grâce à la Déesse, il peut y avoir de nouveau justice

La maison du Sheng était calme, même les serviteurs et les chiens dormaient
Personne ne m'a entendu entrer, personne n'a entendu me laisse
Un enfant assoupi dans mes bras, un bébé dans mon sac
Toute gloire et louange à la Déesse de l'Éventail Noir !

Assise sur des lys , la Déesse me regarde avec des yeux verts sans fin
"Votre fidélité doit avoir une récompense , et votre amour doit avoir une réponse"
Elle prend ma main, la dessine derrière son éventail, et l'embrasse Doucement
à l'abri des regards, elle m'embrasse et suce mes doigts

Nos étreintes reproductrices m’extasient

La femme est morte, abattue de ma lame


Elle aurait dû se rendre lorsque j’ai nommé ma Déesse
La fille est proche de la mort et pourrait mourir avant l’arrivée au temple
Le garçon gît étourdi et pleurant et vivra jusqu'aux lèvres de ma bien-aimée

Ma Déesse attend mon retour, salive de ma récolte


Mon cœur s’emballe de fierté et de désir à penser qu’elle me requiert
Elle se rassasie de Lys gris et écoute mes pas revenants
Je monte mon coursier aussi vite que le vent, pour elle qui m’attend.
Et enfin, apparemment satisfaite de mes loyaux services
la Déesse me fait une promesse :
Tu verras mon visage , digne petit homme
Pour toi, mon éventail noir sera mis de côté
Tu verras la pleine gloire de ta Déesse
Ton extase ne connaîtra pas de limites.

Liu change le format de la dernière section du livre - il écrit les deux dernières pages dans
une encre brune délavée que les traducteurs n'ont heureusement pas essayé de reproduire .
Liu l'a écrit peu de temps après que la déesse ait tenu sa promesse et l'ait laissé voir son
visage.

Ses yeux sont restés les mêmes, si verts et profonds


Si riches et charmants, pouvaient-ils encore me mettre en transe
Ses yeux sont restés les mêmes, mais quand l' éventail noir est tombé
Tout le reste à son sujet est métamorphosé.

J’étais concentré sur son éventail et ses yeux, mais maintenant je la vois enfin
Devant mes yeux, elle se dilate, comme une limace et gonflée, immense et hurlante
Sa douce bouche se transforme en cinq gueules aux crocs accrochés
Ses bras deviennent comme un serpent venimeux, en quête de sang

Le festin aux dents de dragon s'élevant au-dessus de moi, son propre temple trop petit
Ses bouches ouvertes et cinq voix gloussaient comme des filles , léchant l'air
"Dis à ta déesse que tu l'aimes , Liu Chan-fang" me nargue- t- elle.
Je l'aime , je l'aime , je l'aime , je l'aime , je l'aime

Je vacille entre les extrêmes du dégoût et du désir


J’ai fui le temple de la déesse, prenant seulement mon livre de poèmes
Et l'une des faucilles de la ceinture de la déesse.
Après mon périple de folie à travers le désert ,
je me retourne dans les ruines de son ancienne maison.
Elle reste encore ma déesse et le plus grand amour de ma vie
Mais elle est aussi la plus grande bête, plus terrible que les tigres ou les dragons
Elle a dévoré mon âme tout comme elle a les lys gris que j'ai récoltés
Toute ma vie, toute ma vie l'art est perdu pour sa beauté et pour son mal

Ainsi ai-je pris la faucille de la Déesse et ouvert mon ventre


Ma plume est plongée dans mon propre réservoir et ma propre encre rouge, rouge
Comme mon cœur a saigné pour la gloire de ma Déesse
Maintenant laisse mon cœur saigne pour commémorer ses horreurs

Avec ces mots, mon poème est complété


Avec ces mots, je meurs
Toutes louanges et adoration à ma Déesse
Ma Déesse de l'Éventail Noir

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