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Y¢ Université V2 Gustave Eiffel Quelle territorialité pour l'économie circulaire ? Interprétation des typologies de proximité dans la gestion des déchets Jean-Baptiste Bahers, Mathieu Durand, Héléne Beraud DANs FLUx 2017/3 (N°109-110), PAGES 129 A141 EDITIONS UNIVERSITE GUSTAVE EIFFEL ISSN 1154-2721 DOT10.3917/fluxa.109.0129 Article disponible en ligne al'adresse hetps:/wun.cairn.infojrevue-flux-zo17-3-page-129.htm O CAIRN Om MATIERES A REFLEXION Découvrirle sormmaire de ce numéro, suive la revue par email, 'abonner. Flashez ce QR Code pour accéder la page de ce numéro sur Cairn.info, Distribution électronique Carn info pour Université Gustave Eifel ‘Attrbution Pas €Utlsation Commerciale. International CCBY.NC-4.) Flux? 109-110 Juillet Décembre 2017, pp. 129-141 Quelle territorialité pour économie circulaire ? Interprétation des typologies de proximité dans la gestion des déchets Jean-Baptiste Bahers Mathieu Durand Heél8ne Beraud [fctinie orl, cones srr spurte idabat public autour des questions de maitrise des flux de rmatiére dans le cadre de la transition socio-écologique, n'est pas encore totalement définie scientifiquement (Buclet, 2015 ; Aunsperger, Bourg, 2016). Lun des aspects faisant notamment Vobjet d'une absence ce matrse est la question ce sa teritoria- lité. Uéconomie citculaire peutelle &te considérée planétate, ou doitelle nécessairement étre mise en oeuvre 3 V échelle locale ? Si cette question n'est pas encore posée publi- ‘quement, lle fat déja objet de positions bien tanchées chez les acteurs duu domaine. une des facons de comprende les cenjeux de la teritorialité de "économie circulate est de cibler Van des trois grands domaines qui la composent (1), le plus plus structuré: la gestion des déchets (2). el ancien et Lobjectf de la gestion des déchets a pendant ws long- temps 66 de les reléguer au plus loin cles villes (Gouhier, 2000 ; Berdier, Deleuil, 2010 ; De Oliveira, 2013). Aujourd’hui, les logiques spatiales se complexifient, avec notamment Vobli- gation dappliquer un « principe de proximité » (loi sur les déchets de 1992). Pour autant, rien nindique ni Véchelle ni les modalités de cette proximité. Elle semble ére 3 géomé- trie ees variable en fonction du type dacteur qui la prend en charge, du type de déchets et de la structuration des flies object aifiché § cote proximité est environnement limiter les exportations de nuisances), mais aussi socio-économique ltirer profit de mratiéres premitres de récupération, de rae tidves premigres urbaines (3) pour dynamiser une économie locale) Cet article cherchera done & comprende 'opérationnali- sation du principe de proximt gestion des déchets, afin d’analyser Ia fagon dont économie circulaire doit chercher & se l'approprier Pour cela, il détail- lera le cadke théorique qui sous-tend le développement de la « proximité » ainsi que la méthodologie utilisée pour com- prendre son degré d’application. Ensuite, i proposera une ana- Iyse cle interpretation de ce principe par les professionnels du secteur afin, en troisiéme section, de constituer une typologie de la proximité (4, en fonction des acteurs de la Les ENJEUX DE LA DIMENSION TERRITORIALE DE U'ECONOMIE CIRCULAIRE Le concept d’économie circulaire fut imporé par Dominique Bourg en France dans le cadre d/un doctorat sur le développe- ment de ce sujet en Chine (Fan, Bourg, Erkman, 2006). Vacte cde naissance politique de cette idée se stue dans les ateliers du Grenelle de 'Eavironnement de 2007 (5), confirm rence environnementale de 2013, et dont a definition officielle sonlé- cst inserite dans la loi sur ls transition énergétique en 2015. La dimension teritorile de l'économie ctculaire est alors évo- _quée dans ce texte afin imviter 3 « Ia coopération entre acteurs Geonomiques 3 l'échele terttoriale pertinente dans le respect dupancipe de proximité |soulignés par nous] » (6). Pour autant, aucune mention nest fate de léchelle tertoriale & laquelle les flux de matiére (au premier rang desquels les matiéres pre- migres de récupération) devaient tre mattisés. Pour Union Européenne, la dimension tertorale disparait complétement 129 Flux n® 109-110 Juillet ~ Décembre 2017 au profit de Vefficience dans Iullisation des ressources de ma- née 3. maximiser Ia croissance économique européenne 7) (8). On peut alors placer l'économie citculaire dans un cadre scientifique plus large, afin e'interroger les enjeux territoriaux. sous-jacents & cette notion (Durand et al, 2015), Un débat ancien sur lautonomie territoriale Enparalléle l'économie citculaire, il existe un second concept avec lequel les frontgves sont souvent flues, celui d’écologie industrielle et tertoriale, pafois compris dans une acceptation opérationnelle (fa mise en ceuvre de symbioses industrielles) fou dans un registee de champ scientifique (unqua, Brullot, 2015). La premiere est pour les définitions officielle rangaises incluses dans économie circulate, comme une statégie d'ap- plication, La seconde acceptation concerne des travaux cient fiques ayant cherché 8 le structurer depuis les années 1970, qui -mantrent au contraire que l'économie citculaire fait doublon aver cette notion (Buclet, 2075). Sans entrer ici dans le détail de ces superpositions conceptuelles, nous noterons simple- ment qu [a dimension teritoriale de I’écologie industielle est, lle, clarerent identifige. Cet dailleurs ce qui a valu, dans Ia littérature francaise, lajout du qualificatif de « teritoriale » dans les années 2000. Cette volonté de matrise locale des flux. cent en résonance avec l'idée dautosufisance terrtoriale, introduite par les travaux pionniers ayant par la suite donné naissance a Vdée de ville durable (Morris, 1982). Emelianoff (2007) relate que les premiéres réflexions sur la ville durable cherchaient 8 stimuler la capacité 8 satistare localement les besoins fondamentaux + et A ne pas exporter les cols de déve- loppement. idiée était alors e’organiser des communautés ten- dant vers Vautosuffisance en termes d’approvisionnements en matigres premiéres, notamment alimentaires et énergétiques. Il sfagissait 6galement de ne pas aller au-deld de fe capacité clo charge de I’environnement en termes dle ception de rejts G6mis parla ville. La mise en couvre dle ce concept sur un ter- titoiee limité dans sa dimension spatiale permet d’en mattser ensemble des enjeux et des interactions complexes. inter land qui s‘organise autour de la ville se limite alors 4 cet es- pace offrant une capacité de charge théorique sufisante. Ainsi, le terttoite urbain serait en capacité de s'approvisionner et de se céfaite de ses rejets en s‘appuyant sur son environnement naturel et rural proche. Au-dela de la facilité fonetionnelle & eavaller 8 échelle d'une ville, une délimitation arificielle de espace tlle quimaginée ii, permet de maser es hax eles acteurs de fagon raisonnée 130. towne deb srintftren. One Cependant, cette premigre vision de la ville durable comme structuration temitoriale célimitée des flux de matiéres révéle rapidement des limites en mettant de cBté la complexité des imerdépendances & toute les échelles.Ainsi les logiques <économico-commerciales visant & développer un libre mar- ‘ché s‘opposent de fagon irontale& toute tentative de limitation de la capacité d’échange de matiére. Ces idées vont done 3 rencontre de toute tentative de contrainte tettoriale, Ensuite, Vielée de sécurisation des approvisionnements alimentaires, ‘consolidée depuis le XIX'sidele, impose une insertion directe dans les lux internationaux, notamment pour les matiéres ali mentaires Enfn, la spécialisation technologique permettant de produire des biens de consommation ou de tater des déchets spécifiques est contrainte 3 des économies «échelle. Len- semble de ces aspects rend assez rapidement caduque Midée autosuffisance (errtoriale compléte et améne & une gestion avteritoriale des thax Pourtant, la prise en compte de la proximité dans les flux cde matiéres semble prendre de importance face Vatfirmation ‘de nouveaux enjeux sociaux et environnementaux, revenant ainsi aux définitions initiales de la ville durable. La dynamique nouvelle de mise en place de circuits courts alimentaires ou «fagro-écologie permet de promouvoir la notion ce proximité dans les flux de matires (par exemple, avec Vidée de « per maccircularité »—Amsperger, Bourg, 2016). Les acteurs low caux ont done souvent un regard bienveillant sur conomie irculaire, qui privlégie le recycle et la valorisation des dé- ‘chets.D'une pat celle-ci peemet delimiter impact potenticl lement négatif des déchets sur leur environnement (limitation es transports de matires nuisibles, limitation des émissions de gaz & effet de serte, limitation du prélevement de matidees premidres, etc) Due part elle fvorise un impact posit sur environnement, & ravers utilisation locale le matiéres de ré- ‘cupération, & lopposé de lenfouissement Par ailleurs, la recherche de conséquences socio-écono- rriques positives est toujours plus prisée grice & la création emplois que peut engender une é€onomie locale dyna- rique s‘appuyant en partie sur ces matiéres de récupération et ‘sur l'activité du recyclage et du réemploi. Venjeu socio-écono- rmique revét une importance e’autant plus grande que la gestion dela proximité permet de trer profit des déchets réutlsables et recyclables pour tenter de stucturer une économie locale et de ‘eréer ces emplois non délocalisables. En effet, il ne sagit pas seulement de titer les déchets & proximité, mais également Bahers, Durand, Beraud - Déchets : quolle territoriaité pour 'économie circulaire ? de permettre & des activités industrielles et agricoles proches des villes de se développer pour transiormer et utiliser cette rmatigre de récupération, qualifiée de « matiére secondaire » (ou de « matigre premigre urbaine » (Bares, 2008). La ville est, alors percue comme une grande consommatrice de ressources quelle ne puise aujourethui plus lacalement. Ces matériaux pourraient trés bien étre fournis par les flies locales de valo- risation dls déchets. Ces questions de recherche, qui interrogent la proximité dans la gestion des matidres premiéres urbaines et leur mise cen valeur locale, restent pour le moment tes peu abordées « Dans ce sens, il est possible dinterroger le concept de proxi- rmité spatiale et sociale; la gouvernance cles flux, impliquant le réle des modes de vie et pratiques urbaines dans V’échange cde matidees; et le re des acteurs locaux et tertoriaux. A ce. jour, ce champ de recherche est incomplet» (9) Batles, 2010, p. 452). Depuis, certains auteurs, notamment dans la litérature en écologie industrielle et teritariale, ont analysé le rile de Ia proximité dans des démarches de symbioses industrielles (Beaurain, Brullot, 2011 ; Buclet, 2011), au sein cle teritoires portuaires (Shiller etal, 2014) ou d'un programme national dléchange de déchels et ressources au Royaume-Uni (lensen etal, 2011). Il sagit dans ces travaux de comprendre quels types de proximités (géographiques, organisationnelles ou institutionnelles)favorisent et faciltent les coopérations éco- romiques entre acteurs, notamment au travers d'échanges de marchandlises. Au contraire, Gregson et al. (2015) utlisent no- tamment la proximité spatiale pout faire la ertique de ces dé= marches incapables de garder tous leurs déchets sur leur teei= tolte et de les transformer en ressources. économie circulaire selon ces auteurs est donc une extension morale chu marché cles déchets soutenue par des discours de modemisation éco- logique. La remise en cause des grands réseaux urbains tend {6galement & promouvoie des « écocycles urbains durables » = posant sur des cycles courts, la relocalisation du métabolisme Urbain et une volontédautonomie (Coutard, 2010), Antériorité de la dimension territoriale dans la gestion des déchets, Sila dimension teritoriale de Féconomie circulaite nest & ce stade pas appréhendée, elle est de facon plus ancienne pour la gestion des déchets, Pune des composantes dela premire notion. La politique de gestion des céchets préne en effet cle- puis les annges 1990 un rapprochement des tertitoires de pro- duction des déchets avec les terttotes de traitement, au nom «du principe de proximité. Ce principe est un élément majeur du processus de teritoralisation de la politique des bichets. I est mobilisé avec plusieurs abject Il apparait dans la loi sur les déchets de 1992 (10) dans un objectif de limitation du transport des déchets et de leurs risques inhérents. Ce texte impose la réalisation de plans & Iréchelle départementale pour les déchets non dangercux et & échelle régionale pour les déchets dangereux. Ces plans ont pour objectis organiser et de planifer le traitement des dé- chets & ces deux échelles. « Chaque département [ou région dans le cas de lle-de-France] doit prévoir une fore autonomie tertitriale en matiére dinstallations de traitement. Le “tourisme des déchets", fréquemment dénoncé tant & un niveat interna- tional, que transfrontalier ou national, devrait dés lors const- tucr une exception » (Buclet, 2012, p. 67). Outte les aspects cenvironnementaux, invoquer le principe de proximité permet également de définir « un tertoire e’appartenance, et impli- citement un tertote d/acceplation des nuisances résultant de Félimination de “nos” déchets » (Rocher, 2006). I sagit alors de responsabiliser le citoyens & la gestion ce leurs déchets, la proximité permettant leur appropriation (Méry, Mibaa, Tore, 2009 ; Nicourt, Girauit, 2006 ; Rocher, 2006, 2008). Venjew dela Kegitimité dans les discours des acteurs peut également &ire central pour comprendre insertion tertoriale des in- frasiructures de traitement des déchets (Matias Mendes, 2015). Les échelles diépartementales trégionales n'apparaissent alors plus comme les mieux adaptées & la mise en place de cette proximité de gestion, « On lui préfre des formes plus souples telles que des “bassns d'activités, des “communauté de des- tin" (CGP, 2003) ou encore des teritoires itermédiaires (ADE- ME, 2008} » Rocher, 2008). Depuis quelques années, le déchet nest de nouveau (11) plus seulement vu comme une nuisance, mais comme une ressource (Bahers, Caputso, Gossart, 2015; D’Arras, 2008). Une gestion de proximité permetrait ainsi de reinjecter dans économie locale les déchets produits sur le territore via des ilies de recyclage. Plusicurs visions de la proximité en fonction du type de dé= chets, dela filidve de gestion ou de échelle étude coexistent, Des considérations économiques, de gouvernance sont & pprendee en compte dans la localisation des sites de traitement, Ce choix dépasse les seules questions de gouvernance et les fenjeux de proximité. Il est lié 3 des logiques économiques {économie céchelles, concurrence) ou techniques (procédé ume Given Ones 197 Flux n® 109-110 Juillet ~ Décembre 2017 spécifiques pour certains déchets). Certains travaux ont aussi mobilisé la grille d'analyse socio-économique de la proximité (12), notamment les travaux de Bazin, Beckerich, Delaplace (2009). Ces derniers, concernant l'étude des filiéres de DEEE (Déchets ¢’Equipements Electriques et Electroniques) et VHU (Wéhicules Hors d'Usage) en France, ont ainsi monteé que organisation spatiale des activités dltes de collecte de ces déchets privilgie la « proximité géographique des marchés » (Bazin, Beckerich, Delaplace, 2009}, de méme que les activités cde démantélementidéconstuction qui nécessitent une main= dlceuvte importante et peu qualifée. En revanche, les activ ‘és de traitement spécifique des DEEE et VHU, une fois tids et regroupés, s‘appuient sur « a proximité organisée [...] sur dls lieux différents répondant & une logique ce concentration dle flux de matidres devenuies homogines grice au tri» (Bazin, Beckerich, Delaplace, 2009). En eet, ces entreprises saffran- chissent plus facilement cles contraintes logstiques, car cst la spécificité de out et la performance de la transformation qui influent sur la circulation des flux. Aujourd’hui, le législateur ne définit pas précisément la proximité. La directive européenne cde 2008 sur les déchets déclare que « le traitement des dichets doit permette elimination ou la valorisation des déchets dans rune des installations appropriées “les plus proches" » (Di- rective 2008/98iCE, article 16). Varticle L541-1 du Code de Environnement afirme qui faut « organiser le tansport des déchets et Ie limiter en distance et en volume », Aucune infor: mation n’est donc donnée sur I’échelle teritoriale & laquelle ‘applique ce principe (Méry, Mba, Torre, 2009). Enfin, les filgves & Responsabilité Elargie du Producteur qui sont organisées par les professionnels, et non plus par les collectvités, prenaent peu en compie le principe de proxim! {6 ahers, 2014). Les éco-organismes saffranchissent souvent cle cette question spatiale et sociale Is établissent des contats aver des prestatares logistiques et de traitement choisis seu- lement selon des eritéres de respect de la réglementation et dle colts de transport et de traitement. Les filgres s‘organisent donc autour de grands péles de traitement sans lien avec les chelles de planification, et sans prendee en compte les spéci= ficitésteritorales Cette planification teritoriale évolue ailleurs, Apres avoir A essentiellement mise en ceuvre & Yéchelle départementale {pour les déchets ménagers et les déchets du bstiment et des travaux publics, alors que la gestion des déchets dangereux est planitige & Wéchelle régionale), elle va maintenant ére 132, towne dehomintfiren.Oned organisée & léchelle des nouvelles régions, Ceci s'inserit dans Ia réforme territoriale & Yoeuvre aujourd'hui, amenant [a créa- tion de grandes régions et le renforcement généralisé de leurs prérogatives, Cest le résultat de la loi NOTRe (Nouvelle org3- risation teritoriale de la République), publiée en aod 2015. La Région est maintenant le teritoire en charge de l'ensemble de la planification teritoriale. Lobjectf est mulkple. Il s'agit dune part, de metie en cohérence les différents documents de planification (économique, énergétique, environnementale, des transports, etc.) en les réalisant 3 une méme échelle et dans lun processus concer I sagite'autre part, concernant les dé- chels, de reconnaite que l'échelle départementale n’éait plus adaptée & Ia diversification des filiéves, 3 a mutkplication des acteurs, Vagrandissement des aires de chalandise des centres de stockage des léchets et aux questionnements récurrents au- tour de la valorisation énergétique. ‘Méthodologie : quatre approches pour étudier la proximité ‘in apprehend fa fagon dont le principe de proximité est appliqué en France, il est nécessaire de mieux connate les flux de déchets circulant sur le tettoire. Des méthodologies ‘complexes permettent alors dappréhender le métabolisme un tertoire donné afin identifier les exuoires des déchets et Ja matiée premiéze de récupération approvisionnant I'6co- Le texte présenté ic ne s‘attarde pas sur les lux de déchets (13), mais la perception de la notion dle proximité cher les ac~ tuts des déchets. Lobjectif est ce croser le discours des ac- tears du teritoire avec les politiques publiques menées, ainsi auiavec les pratiques des entreprises et des organismes impli ‘qués. Aurdela de la constuction d’ndicateurs quanitatfs spa tilisés correspondant & analyse des fx, les résultats ce este recherche résident dans analyse empirique de Vopérationnali- sation d'une économie circulaire locale dans les plans action publique et les pratiques des acteurs. Les interrogations sont par exemple nombreuses sur la fagon dont la planification ter ritoriale de la gestion des déchets permet de prendte en compte la notion de proximité des échanges de matires. Pour cela, 57 entretens (14) semi-directifs ont &é rélisés entre 2013 et 2018, avec des gestionnaires de déchets (collectivités locales ‘ou entreprises), des industrels(recyclage ou élimination), des eo-organismes, es services de tat, des instances en charge de la planiication (départements, régions, observatoires) ou ‘encore des associations et des observateurs, Bahers, Durand, Beraud - Déchets : quolle territoriaité pour I’économie circulaire ? UNE PERCEPTION VARIABLE DE LA NOTION DE PROXIMITE Le principe de proximité s'applique avec une géométie va- viable en fonction des types de céchets (Durand, Bahers, Be- ‘aud, 2016). Cerains sont pour Fessentil gétds lcalement comme les putescibles, les pondérex ou les déchets uli DD'autres ont tendance & parcourir de grandes distances tes que les déchets dangereux, ceux & fore valeur ajoutée, ou faisant objet defiliées de ResponsabilitéElarge du Producteur (15). Quelle que soient les logiques spatales «application de ce principe de proximits, on retrouve toujours des logiques simi- Iaies. La proximitéy apparat alors selon une typologiecom- plexe en fonction de crtéres propres& chaque acter, chaque situation et chaque priorié La proximité peut éve définie en fonction de plusieurs crittres, privilégiés différemment en fonction des acteurs, des contextes et des types de déchets. Ces critéres signifient qu'il ya.en réalté plusieurs proximités qui peuvent étre déliies de fagon distincte en fonction des contextes. La législation res- tant ts floue dans le domaine, il est done important de bien strueturer cette typologie afin de comprendre Ia fagon dont sSlexprime cette proximité et éventuellement la fagon dont on peut la gérer. La perception de la proximité est donc variable fen fonction des acteurs des déchets impliqués et du contexte (16), Chacun va l'appréhender selon ses propres contraints, techniques, économiques, en termes de communication ou enjeux de territoire, La proximité : une image de marque 1a proximité est tout 'abord une image de marque aie valoir pour les entreprises et pour les collectvités locales: «La proxic mits cet image qu‘on peut renvoyer et qu’on promeut » (Res: ponsable de centre de recyclage, 2014), Elle stexprime par les relations de confiance avec les riverains et par un ancrage ter- ‘orial fort. Les entreprises ont ainsi la volonté de communiquet et de promouvoir cette dimension valorsante: « commerciale- ment, on communique beaucoup sur le “site de proximité” sur des marchés de proximité géographique, & "heute des “bi- lans carbone", de la proximité environnementale » (Directeur centre de traitement, 2015). Cee image est souvent associée 3 la. dynamisation socio-économique du tertoite :« Iaproximité, est image de la société. On veut faire bénéficier de la matiére aux locaux et facilte Vintégration de la société dans le paysage local » (Responsable centre de traitement, 2015). Cette vision de fa proximité, mise en avant par des ges- tionnaires de sites locaux {parfois des entreprises), s‘oppose 8 [a stralégie de développement national et international des grands groupes qui possécient plusieurs sites. Ce sont essentie!= lement les entreprises qui n’ont qu'une seule exploitation, qui _mobilisent cet argument. Ainsi, ils contournent la limite d'une ‘nique implantation en démonteant leur ancrage loca. I s'agit «une stratégie commerciale « par bon sens, conviction, d'une part pour économiser des cots et pour Vimpact carbone. C'est. ‘du marketing » (Responsable centre de traitement, 2015). Cette teprésertation de lenteeprise locale est donc importante pour valoriser son identité. Cest par exemple pour cela que la mul= tinationale du déchet Sita s'est associée avec Ventreprise cle ‘cupération et de valorisation des déchets sarthoise Passenaud en 2012 (a parts égales) dans la création du nouveau centre du tri du Mans : Valor Pile 72 Une meilleure acceptation sociale des infrastructures dans la proximité La période du NIMBY (Not in My Back Yard) a lissé des traces dans la culture des entreprises de traitement tele nest pas en- core achevée. Ains, des dispositfsréglementaites ont &é eréés par les services de Etat, comme les enquétes publiques et les ‘Commissions Locales d'information et de Surveillance (CLIS), ‘devenues parla suit les Commissions de Suivi des Stes (CSS). Les entreprises ont appris & sen accommacier et & construire ‘un mécanisme dacceplation sociale de leurs infrastructures, afin de transformer la contrainte lige 8 la proximité spatiale ‘Ce mécanisme se matérilise d'une part par des rencontres 6 auliéves, car eles relations avec les rverains, c'est mainten le lien de proximité, on va les voir réguliérement » (Directeur centre de traitement, 2015). DYautee par, cette acceptation se traduit par des échanges plus iréquents plus ou moins posts « Laproximité c'est 150 métres, ce sont nos voisins. Dés qu'il Ya une mauvaise oxeur ils sont la pore, ou pire & fa maire. La préfecture a mis en place un jury de nez et une réunion publique tous es eois mois, Les relations s’améliorent és que les nuisances sont fines, enfin ga prend du temps » (Respon- sable centre de traitement, 2015}. Ces industels n’héstent pas 8 uliliser ces disposits de concertation pour améliorer leurs relations avec les habitants riverains Enfin, certaines sociétés n’hésitent pas 8 co-construire des activités avec leurs riverains en subventionnant des associa- tions environnementales locales pour le suivi des impacts in dustrels. Cela sfexprime par « une grande proximité avec les ome Given one 138 Flux n® 109-110 Juillet ~ Décembre 2017 "lverains en intégrant leurs compétences » (Responsable contre traitement, 2014), Malgré ces dispositis, i existe toujours de ‘nombreux (reins sociaux 3 implantation de sites de traitement 2 proximité ces habitations, Méme si certains moxteles éco- rnomiques imposent des distances faibles entre installations et centres urbains comme pour les déchets du BTP par exemple, ily a « souvent des conflis avec les aménageurs et es élus qui souhaiteraient éloigner ces activités des centres urbains » (Inge inleur centre de recyclage de déchets du BTP, 2014), Les réseaux humains : quand la proxi des marchés commerciaux i engendre La proximité s‘exprime aussi par les interconnaissances entre professionnels des déchets, Les échanges et les partenariats ités par le mouvement d'un collaborateur d'une société une auive : «jai wavaillé 11 ans chez X avant détre responsable d'agences chez Y. Et mon principal client aval fest X. Mes collectivités clientes chez X sont devenues mes clients chez Y» (Responsable centve de recyclage, 2015), ‘Quoiqu’étant dans une situation ce concurrence souvent fore, les acteurs du déchet se connaissent § l'échelle ’un teritoire «Avec certains concurents, on fonctionne 3 Ia complimenta- sit, Véchange » (Responsable centre de recyclage, 2018). Les réseaux sociaux et professionnels stucturent ainsi une proxic rité entre individus et entre institutions: « le monde est petit, tout le monde se connait, ou au moins apprend 3 se connaftre paar un tiers, ou par le parcours professionnel » (Responsable centre de traitement, 2015). Certains réseaux ad hoc comme les réseaux entreprises, d'éco-actvités ou d’écologie indus- trclle favorisent ce rapprochement. Les processus communs, tels que la construction de documents de planifcation terto- riale& laquelle tous es acteurs du déchet sont conviés, invitent également a cette interconmassance Cotte proximité entre professionnels permet «'ére plus réactis sur les marchés, ¢'échanger de bonnes pratiques et de mutualiser des moyens. Il s'agit par exemple de répondre 2 des appels dofres en consortium dlentreprises ou de créer ‘une activité commune comme le recyclage de matelas 3 Rennes ~ co-portée par une entreprse d‘nsertion et un groupe industriel Le lien de confiance entre partenaires et clients est souvent mis en avant par les entreprises. Pour certains acteurs intexrogés, privés comme publics, biti cette confiance semble {tre presque aussi important que d’@tre compstitfs sur les coats de traitement. Ainsi, les nouvelles perspectives commerciales dle Véconomie circulaire seraient « du business écologique et 134. towne deb srintftren. One économique, lié 3 fa confiance entre clients plutét que des re lations sur le cott» (Responsable centre de traitement, 2015). I ‘aut és lors « entetenir surtout un lien important avec les par- tenaites[..] sur un maillon de la chaine ou un autre » Respon- sable centre de traitement, 2014), Cette relation de confiance se construit également sur des valeurs de proximité avec les partenaires, car cerlaines sociétés se revendiquent comme «une entreprisefamiliale et dont Ia richesse est située dans la pproximité avec nos clients, » (Responsable entrepise cle col- lecte des déchets, 2015). Si Vencadrement swt des marchés publics a largement assaini ce genre de relation entre presta- taices et commandlitaies, le lien humain reste un facteur impor: tant de collaboration, Cette relation interpersonnelle reste co- pendant largement contrainte parla concurrence économique ‘d'une part, et les marchés publies autre part La proximité comme une contrainte Si a proximité sest construite comme une contrainte per iettant delimiter les risques sanitaires et environnementaur, celle dévie progressivement vers une force permettant de déve- lopper une économie locale. I existe toutefois de nombreux freins avant datteindre une économie citculaire qui intogre fe de proximité. Malgté les contraintes économiques «et environnementales du transport des déchets, les entreprises ‘en affranchissen facilement lorsque les flux sont massifiés et 8 haute valeur ajoutée. Les entreprises connaissent bien ce pa- radoxe :« La proximité est indispensable pour toute typologie ‘de déchets. Ensuite, plus on trie, moins elle est importante » {Responsable centre de traitement, 2014). Cette massification des flux conduit aussi & un mouvement de concentration de sociétés pour augmenter leur capacitécinvestissement au dé- triment des « petits acteurs locair [1 qui ot développé des savoirfaite locaux » (Responsable centre de traitement, 2014) D’autve part, les longues distances & parcourir ne sont pas systématiquement synonymes de charges onéreuses et les entreprises trouvent cles stratégies pour baisser ces cots, ‘comme la « reverse supply chain (logistique inverse) [...] qui permet un fret de retour pour avoir Ia capacité de reprendre tun déchet localerent [J pour diviser le codt de transport par ‘deux » (Responsable centre de recyclage, 2014). Enfin, toutes les sociétés ne militent pas pour une proximité dy traitement, notamment les groupes qui possécent des installations spéci- fiques : «la gestion ce proximité n’est pas toujours acceptable conomiquement [...] et il ne faut pas entraver Ia libre c! ‘culation des marchandises » (Directeur de la FNADE, 2014) Bahers, Durand, Beraud - Déchets : quolle territoriaité pour I’économie circulaire ? La logique de marché reste le principal critére de gestion des déchets, qu'il 'agisse d’élimination ou de rachat des matiéres de récupération ‘TYPOLOGIE DE L/INTERPRETATION DE LA NOTION DE PROXIMITE Les ilées évoquées dans la section précétlente permettent de structures plusieuts types de proximités en fonction des acteus, clos déchets ot des terttotes, Certaines viennent compléter des typologies deja largement établies par I'Geole de la proximité francaise notamment: Gilly, Torre, 2000 ; Torre, Beuret, 2012) autres types de proximités sont spécifiques a V’étude de cas développée ici. La typologie établie ici peut également ée ceroisée aver des registres plus larges, dfinis par elautres aus teurs concemant Ia perception des enjeux autour des déchets dle la part des populations européennes (Cireli, Maccaglia, 2015 ; Cite, Maccaglia, Melé, 2017) approche proposée ici reprend cette idée d'une typologie des proximités, mais en les appliquant & une entée diférente qui est celle dela distance parcourue par les déchets avant leur traitement final, I sagt de s'appuyer sur le sens légal du principe de proximité tl que défini dans la legislation francaise et européenne, afin, parla suite, de penser le teritore sur lequel s‘applique extension ‘conceptuclle de la gestion des déchets: économie circulaire Six types de proximités ont ainsi 6 identiiés (ef figure ciedessous ‘Typologie des proximités par rapport aux flux de déchets HH Terie de production du déchet Les registres de proximité ar rapport aux flux de déchets HB 1 proximite spatiale HB 1 proximiteinterpersonnette [a 1 proximite onganisationnee HB 1 proximiteenvironnementate [Be a proxinité portico administrative TE proximitsocio-conomique La proximité spatiale : mesurer la distance La proxinvté spatiale permet de mesurer la distance (Cilly, Torre, 2000). Elle vise & identifier le parcours des flux (17) de déchets el en mesurer la distance parcourue. Iles alors, dans Vabsolu, possible ce défini un kilométrage précis parcour par chaque type de déchets pair de son liew de production, pour estimer sls sont gérés dans une proximité définie ne s'agit 8 que d'une application basique du principe uniquement expri- mé en nombre de kilométres, éventuellement modulable selon lestypes de déchets es déchets puvescibles par exemple géxés sous quelques klomtres, alors que les métaux vot facilement parcours des miles de kilomtves) La proximité relationnelle : es relations humaines toujours présentes La proximité relationnelle correspond 3 Vappartenance 3 un réseau dinterconnaissance évoqué dans la section préeé- dente, ainsi qu’a la similtude dans les cackes cognitits (Tore, leweruebpume Given Ores 135 Flux n® 109-110 Juillet ~ Décembre 2017 Beuret, 2012). Quoique n’ayant pas offciellement sa place dlans les marchés publics et les appels doffres de gestion des déchets (afin d’éviter tout risque de corruption ou de mal- versation), ces interrelations humaines tiennent toujours une certaine place dans la gestion des déchets selon les acteurs imerrogés. Tout en sinscrivant cans un cadre juridique et éco- nomique tes containt, la connaissance entee plusieurs per sonnes peut alors avoir un réle dans le choix d'un exutoire final pour un déchet. Cette proximité n’est pas exclusive des relations commerciales entre acteurs professionnels, qui sont au contrite renforcées par ces échanges entre inclvids d'or. ganisations différentes, La proximité industrielle: priorité aux enjeux techniques et d’économie d’échelle Laproximité industrielle peut se décliner selon deux modalités La premiére conceme la stucturation des files industelles ct entrepreneurales. A l'éhellefrangaise, les entreprises dh déchet sont en effet aujoud nui regroupées en tois ou quate stands consortiums (sous forme de filisies ou de partenarats statégiques), ayant ainsi une maivise de ensemble du cycle, depuis ls collacte jusqu'aux diférents modes de traitement dies déchets. Les centes de ivi d'un grand groupe industiel vont généralement privlégier les enteprises de recyclage ou les centese'enfouissement du méme groupe ou d'enteprises avec lesquelles il existe un partenariat Il s'agit d'une logique Economique, La proximité incustille est ict sructurée en fonction de logiques économico-instttionnelles, minimisant Ia simple distance ene deux installations pour privilégier le partenariat économique La proximité industrielle peut également éte structure par ire technico-industrelle spécifique. Certains types de déchets ou de matériaux particulers nécessitent en eff cenvoyés vers un centee cle démantélement donné ou indus dle rocyclage spécitique. C son colt investissement ou fonctionnement,satechnicité etla faiblesse des gisements, peut are plus ou moins diss le tertitoite. Les déchets peuvent done paris avoir besoin de re d'nstallation, en fonction de parcourie de grandes distances pour trouver installation tech= niquement adaptée & leur élimination/alorisation. La proxi- mité incustrielle amine alors souvent & négliger la proximité spatiale, puisqu’elle peut nécessiter des infrastructures trés spé= Cialisées (dans le recyclage de matériaux 4 forte valeur ajoutée cu I'élimination des déchets dangereux par exemple) et done loignées. 136 La proximité environnementale : la difficile mesure de Vimpact environnemental La proximité environnementale est davantage basée sur Vo misaton des transports et du traitement final, en lien avec des réthodes d’évauation environnementale comme le bilan ear bone. Les analyses cempreinteenvironnementale (18) ralisées sur es villes Gudiées montrent que, contrairement & ce qui était imaginé intalement il my a pas de lien systématique entre la proximité environnementale et la proximité spatiale. En effet, certains déchets peuvent parcourir plusieurs millers de kilo- rntres pour étre valorisés par une technologie qui permet de ré- duire Fimpact environnemental global du matériau (par rapport 3 une extraction de matiére premire dans le milieu nature), Au contraire, pour d'autres types de déchets, Ia proximité environ- rementale impose la proximité spatiale. laut dans tous les cas avoir connaissance de cet éeart entre Vimpact environnemental du transport et celui du traitement. Ce rappor sexprime de fax ‘pon tres diférente en fonction des types de ches (19). La proximité politico-administrativ des contraintes trés réglementées La proximité politique reprena la fagon lant les acteurs publies sfemparent de cet enjeu, au tte du développement socio-éco- romique et de la prise en compte des intértscitoyens locaux. Cette proximité politique nest pas forcément en lien avec les proximités évoquees précéclemment. Elle a pourtant son impor tance, puisqu’elle est portée par des acteurs—représentant la population ~inluents dans ’éaboraton des politiques locales de gestion des déchets. La proximité politique conduit & une tion des infrastructures essares pour gérer les déchets. Elle permet également 'aller vers optimisation de la valorisation des déchets (notamment gre au ti), mais sue tout la réduction des déchets, De nombreuses actions locales peuvent ére menées sous effet d'une impulsion citoyenne, La proximité politico-administative a un powoir conteai- _gnant important, puisqu’elle s'appuie sur des juridictions aux compétences légalement définies. I s'agit en premier lieu des callectivités locales en charge de la gestion des déchets (col- lecte, transport et traitement). Quil s'agisse de Communauté de communes, de Commysnaués dl agglomeration ou urbaines, ‘ou de syndicatsintercommunau, leurs choix permettent, dans tune certaine mesure, de mettre en application le principe de proximité, Si leur action est trés cadrée par le code des mar chés publics d'une par (qui iterlt le favoritisme c’entreprises locales), par les conventions signées avec les éco-organismes Bahers, Durand, Beraud - Déchets : quolle territoriaité pour I’économie circulaire ? autre part, elles peuvent tout de méme tenter de privlégier les exutoires de proxinit La seconde échelle tertoriale en capacité de mettre en place une proximité politico-administatve, est le département (Uiou la région. I 'agit des instances on charge des dlférentes planifications tertoriales de gestion des déchets, Comme indi ‘qué précédemment, avec les récentes évolutions de structura- tion territorial en France, avec Ia création de grandes régions elle renforcement généralisé de leurs prérogatives (20), les RE gions récupérent ensemble de la planification teritoriale, hier, ten grande parte, de la responsabilité des départements La proximité socio-économique volonté de développer le territoire local Le demier type de proximité vise & stimuler le tissu socio-éco- rnomique local grice & exploitation des déchets, Quil s'agisse de collect, de ti, de valorisation et méme de prevention, les déchets permettent le développement d'une économie circu laire locale Elle améne par exemple les producteurs de déchets (collectivités, mais aussi certaines entreprises) mettre en avant lune structure de économie sociale et solidaire connue et an- ‘rée localement, et non une grande entreprise pergue comme Gloignée du teritoire. Venjeu est la exéation locale d'emplois. La baalle est alors intense dans cerains domaines comme les Deéchets d'Equipements Electriques et Electroniques (DEE) par exemple. Les éco-organismes, structures agréées par Eat, sais pilotées par les entreprises productrces apparels dlec- ‘eoniques,cherchen ins & captr de grands gisemonts le DEEE dans des usines de tecyclage nationales. A Tinwers, les acteus de l'économie sociale et solidaire,historiquement présents sur ce secteur et récemment concuencés par Mémergence des éco-organismes, cléferdent leur implantation locale, souvent soutenus par les calletvités locales. La proximitésocio-éco- omique ent alors en concurrence avec a proximitéindus- tele. Chaque logique met ainsi en avant des représentatons dlfrenciges dans Vappropriation et Vutilisation du principe de proximité CONCLUSION : QUEL TRANSFERT ‘VERS UECONOMIE CIRCULAIRE [Nous l'avons évoqué en introduction de ce texte, la question des déchets est difficilement apprchendable de fagon iso ge aujourd'hui, puisque ces objets ne sont que le résultat da fonctionnement d'un systéme teritoral. La notion d'économie Circulate les replace ainsi dans un cadre plus large, objet rest pas dlenter ici dans les débats relatis& la pertinence de cette notion et Yefficacité de sa définition (Ghisellini, Cialani, gia, 2016 ; Desvaux, 2017). Is'agitplutt cle partirdu constat ‘que dans toutes les définitions données, la dimension terito- riale est és peu présente. Nous faisons done le choix de nous restreindee ici 3 la défintion officielle francaise de l'économie Circulate proposée par YADEME (2014), structurée autour de sept piliers (voir note (1). Cotte défnition est diférente de celle des promoteurs associatifs ou de I'Union Européenne (voir plus haut, mals FADEME est un acteur incontournable et prescrip- ‘eur de disposiis d'action sur les questions environnementales fen France. Nous esquissons alos ic une interprtation possible dle la typologie des proximités présentée précédemment, arti- cculée avec chacun cles autres pliers de économie circulate, LLapprovisionnement durable en ressources, premier des sept pliers selon 'ADEME, ne mentionne pas de principe de proximité dans son acceplation. On peut considérer que les cenjeux techniques et les économies dl échelles sont les princ= pales logiques mises en avant. Ainsi, la proximité industrielle pourrait révéler cette statégie oi Von privilégic les fides structurées, La proximité spatiale peut étre importante dans Vapprovisionnement en matériaux pondléreux ou putrescibles, tout en intégrant des crtéres environnementaux de limitation des transports et des impacts liés& Vexploitation des cariéees. La proximité politica-administrative peut étre itexprétée dans le cadre des schémas régionaur cles cariéres (21), Les approches dites « produit » comme I'éco-conception, _quivisent & rédluite les impacts environnementaux tout au long ‘du cycle de vie des produits, ne semblent a priori pas s’aticu- ler 8 une dimension teritoriale. Seule Ia proximité industrielle peut avoir un poids (quoique limité) dans les logiques des en- ‘reprises en faisant de la recherche et développement, vers des filldresstucturées pour optimiser les Economies c’échelles, Lécologie industrielle et territoriale est paris considérée 8 elle seule comme étant Ia dimension teritoriale de économie tulaire. La grille complate des proximités serait pertinente |} mobilser, avec selon les cas une place privilgiée pour la pproximité spatiale (indispensable & toute mutuaisation de flux) ‘ou relationnelle et politico-administrative (afin de permetre une collaboration pérenne} (22) économie de fonetionnalité, cherchant & remplacer la propriété d'un produit matéxel par Vusage d'un service, s'ins- crit lairement dans un terttore spatialement limité, dans une soos Given Ove 137 Flux n® 109-110 Juillet ~ Décembre 2017 perspective de rapprochement entre fabticant et consomma- teur (Buclet, 2014). Ainsi, les proximités spatiales et relation. ‘elles sont les plus A méme de révéer la teritoralité de ces dé marches, économie dle fonctionnalité ala particularié selon les initiatives de erGer des échanges intespersonnels 3 I'échelle une ville ou d'un quartier, voire de favoriser la proximité so- cio-économique visant & dynamiser les acteurs locaux, La consommation responsable vise en premier lieu 3 sou tenir achat d’éco-produts et nest pas identiige en tant que telle dans une perspective de territorialisation clans Ia céfinition donnée par VADEME. C'est sans compler sur les circuits cours alimentaires (ou autres) qui font florés dans les discours institu sionnels. I faudait probablement analyser cete statégie sous rangle de la proximité socio-économique pour montrer en ‘quoi ancrage local est source dle développement économique cet de préservation des ressources, Leallongement de la durée d'usage au travers du téemploi, dl la r6paration ot de la réuilisation ne mentionne une Aou- velle fois pas d’échelle tertariale adéquate pour la mettre en ceuvre. Cependant, il est difficile d’imaginer que, sans proxi- mité spatiale, cette sratégie soit effciente d'un point de vue cenvironnemental. C'est sans doute avec cette démarche que Vranalyse des proximités socio-économiques, au tavers d'un Geosysttme dacieurs de économie sociale et solidaire, serait la plus intéressante & réalser. Les enjeux résclent notamment dans le développement d'une écologie « arisanale » et teri toriale, Les relations identifies ici mériteront d'étre développées| individuellement dans des travaux & venir afin d'avoir une vi- sion plus globale des enjeux de la trsitoialité de économie Circuito. I s'agia alors einterroger les acteurs afin de com= prende leur logique d'appropriation. En effet, nous avons mon- {t6 que pour [a gestion des déchets en Europe, sila proximit cst Iégalement un des principes de base, elle est pour autant laissée 8 la libre interprétation des acteurs du domaine, n’of frant ainsi aucun moyen réel cle mise en application, ni meme appréhension commune. Entre la nécessité de prendre en compte les riverains dun centre denfouissement, le dévelop- pement de économie sociale et solidaire locale, es logiques cle grands groupes industriels ou encore la spécificité technique de Vdlimination des déchets dangereux, le principe de proxi rmité ne s‘applique jamais & la méme échelle, Des contraintes spécifiques aux types de déchets et & fa position de chaque acteur en font une proximité & géométrie variable 138. towne desir ftren. One Inégrant la gestion des déchets dans acception plus large économie circulare, il est important de clarifier les attentes teritoriales sur cette demire notion. Si application du prin- Cipe de proximité dans la gestion des déchets est da impase faite, est'ce que la simple mention dune économie circulaire peut permettre de le renforcer ? Cette économie circulaire a elle vocation & sappliquer & échelle locale, ou peutelleéte, sur certains flux, considérée comme étantplanétate? Les im pacts environnementaux relatis aux clstances parcourues par les flux de matiéres pendent énormément de leur caractére pondércux, putescible, dangereux, etc. Pour autant, les enjeux socio-économiques sont en grande part présents aux écelles locales. Toutes les opérations amont au statut de déchets (éeo- logie industrielle et tenitoriale, économie de fonctionnalté prolongement de la durée de vie des produits... ont vocation & imterroger le caractére testi de Véconomie cirulaire. Jean-Baptiste Bahers est ingénieu et dacteur en aménagement ‘du tertoire Il est enceigant-chercheur en &valuation cenvitonnementale et écologie tertoviate Ecole des Meters de environnement (EME) de Rennes est chercheur permanent au Taboratire E50 (Espaces et Socétés)(UMR 590). Ses travaux concerment la feritoiasation des poltiques européennes et fransaises en mater d’économie circulate, analyse des fléres écovindusvieles et fe développement de I écologi mdustele et terrtviale. is intresse également 2u développement théorique du ‘champ du métabolisme urbain et ertoralen France et en Europe. Jeanbapiistebahersecole-eme fr Mathieu Durand est Mate de Conférences en Aménagement du teritoire au Mans Universit, chercheusr au Inboratore FSO (spaces et Société) do CNRS (UMR 6590) et & IFLA (nsttat Frangais d'ftudes Andines). Responsable du Master « Management ft Ingénievie der Déchets~ Economie Circulare». i mene des projets de recherche sur la spatialsation de a gestion des déchets fen France, en lien avec YADEME, les collectives locales et ls entreprises it développe également des recherches en Amérique Late, avee diverse univers et avec VAFD, af de comprende ‘en ques un modele low-tech peut savérer replicable vers les pays du nod. Mathieu. Durand univ lemans fr éline Beraud est docteur en Génie urban, Ele est Mate de Cantérences au département Génie urbain de Université Pais Et ‘Marne-lavalée et chercheur au Lab’Usba. Ele a soutenu sa these ‘2073 sur la « Réslonce da service de gestion des déchets ux inondstions » au LEESU [Universit Pari st. Ses vavaux ‘inscrivent dans le domaine de 'écologietertarale et dela téslhence,et portent sur le service de gestion des déchets et son ale dant lefonctionnement des vile. Felene.beraucdw pm r Bahers, Durand, Beraud - Déchets : quolle territoriaité pour I’économie circulaire ? Notes (1) Selon fa déinton de YADEME, "économie circulice est composée de tors grands secteurs(euxemémes dvisgs en Sep pliers): Vofte des acteurs économiques (approvsionne- rent durable, éeo-conception, écologe industrelle et tera fale, économie de fntionnalit, la demande des consomma- ‘eur consommation responsable allongement dela duree de vie des produits) et a gestion des déchets recyclag). i cote ctntion ext eniquée (Desvaux, 2017, elle fat aujourd hu figure de rélérence pour les acters opéationels qui seront interroges parla suite cans cet article {2)'Un ae de ses domaine, bien anténeur dans sad nition, a également une dlmensiontertorale ts marque Fécologi Industrie t Terrtorale. I ext cependant moins lar gement appliqué que I gestion cles déchets (3) Le premier terme est utilisé par! ADEME, le second par Baris 2003). (3) Co exe est iss clu projet de recherche MUEED (Méta- bolsme Libain, Empreinte Environnementale et politiques de zestion des Dechets), nance par le programme “Déchets et Societe” de YADEME et mene par Unwersté du Maine (UMR FSO CNRS), Fcole des Mins de Environnement (UME ESO CNRS), tI Universté le Parissst Marne! aValiee (Laura, Equipe Genie Urbain (6) En 2007, danse rappor du groupe 6 « Promouvoir des modes de lévlonperent ecologies favorable +s compé titel Pemplor »:«Fenjeu Gconomique dela poltique en- vironnementafe |. qu fase notamment pls de place + une Economie iru, fondge sur reduction ete reyclage des déchets, et plus genéralement sar une utisation pls eficace des ressources» (6) LOLn 2015-992 du 17 aot 2015 relative la vansi- sion énergsique pour la croissance verte (7) Furopean Commission, 2014, The Circular Economy: connecting erating and conserving value En ligne! (conse {e'25 septembre 2017) Disponible lacresse htpiec euro- pa-ewenvronmentcirculareconomy! (8) European Commission, 2013, Closing the logp ~An EU action plan for the Circular Economy” (En ligne (conslté le 35 sepembre 2017) Disponible 4 Fackese: psec europa, eulproriiajobsgrowlhrandsnvestmenVowardsciteuareeo- nomen (3) In this way itis possible to question the concepts of proximity, both spatial and social the governance of flows, Including the role of lifestyle and urban practices in rateial txchanges; and the ole of local and tertorial stakeholders “To date this eld of itercscipliary research i fragmentary » (10) Loin? 92-646 du 13 juillet 1992 relative 3 Ielimina- tion des déchets ainsi qu’aux installations clasées pour la pro- tection de environnement {11) Le déchet a été consid exclusivement comme une ressoutce jasq’a la fin du XIX*siécle ol était géneralement ‘injecté dans économie locale (amendement des teres agr- oles, ecyclage,réulisation, et) (Bales, 2005). {72} Nous aisons référence au corpus théorique dense des tudes de la proximité dans le développement économique territorial, notamment ls efets de Ia proximité spatiale dans emergence de systemes products locaux (voir notamment Pecqueur Zimmermann, 2004). 103) Ce travail d'identfication des fx est la base du pro- jet de recherche MUEED. II fait objet autres publications {Ourand etal, 2016). {14) Léchantillon constitu visit 3 un équiibre enve les difrents acteurs des déchets (collectives locales, enteprises presiataires, 6co-organismes, secteur de l'économie sociale et Solidaire, observatoies regionaun et services de ta). Les en- twetions ont 6 réalisés unvformément auprés des acteurs des tris terains écuiés Rennes, Le Mans, SIETREM de Lagny-su ‘Marne, ainsi que d!acteurs nationaux (comme les éeo-orgae nisms) {13} Ces éléments ne pewent pas are céveloppés ic Is feront Yobjet de publications diferentes 176) Lor des enitetins talsés, chaque acteur peut ain- si percevoir la proximité selon clitérentes modalté, parois contradictoires Pune avec Tutre, en fonction du sujet qu'il vogue ou di moment de son intervention 107) Ces flux de déchets ont &é ident MUEED (Durand eta, 2016). (18) Ces analyses d'empreinteenvironnemental, réalisées dans le cadre ds projet MUEED, front Fabjet de publications (19) Les résultats issus du projet MUEED ont permis de dé terminer une empreinte environnementale des figres afin de faire cette diteence. (20) Cest le réstltat de la loi NOTRe (Nowwelle organisae tion tertile dela Republique), publige en a0uk 2015 (21) La planiication relative atx caries a sbi fa méme Gévolution que celle des déchets, en passant depuis la loi ALUR publigeen ras 2014 de chlledpaementle 3 Fécele ‘égionale (22) cf Les articles porant sur Féologie industrielle et tre ritorale dans ce méme numéro thématique de Ia revue Fux {2017/3-4, N* 108-110): Hampikian; Beaurain, Mailefer et Varle ; Herbelin et Bucket is par le projet ume Given ovr 139 Flux n® 109-110 Juillet ~ Décembre 2017 BietiocRaPiic ADEME, 2014, Economie citculire : notions, Rélérent: Alain Geldron Ansstxcar, C, Bours, D, 2016, Vers une économie authenti ‘quement circulate: Réflexions sur les fondements dn in- sicatour de circulant, Revue de FOFCE, 20161, vol. 145, p. 91-125, DOLI0.3917/reot.145.0091 Books |B, 2014, Métabolisme temtrial et litres de técups ration-tecyclage: le cas des déchets d’équipements elec: trques et électroniques (EEE) en Midi-Pyrenées, Déve- fonpement durable. En lignel, Vol. 5,n°1 | Fever 2014 DOI: 10.4000/developpementurable 10159 Bases J-B., Carunso L, GossattC., 2075, Réseaux et environ- ‘nomen regards crises sur les lgres de gestion des D&- chets equipement Eletiques et Electoniques & Toulouse et 4 Milan, Hux, 2015/1 (N* 99) p. 32-46 Busts, 2005, Linvention des déchets urine + France 1790: 1920, Seysiel : Champ Valon, Basus S, 2010, Society, energy andl materials: the contribution ‘of urban metabolism studies to sustainable urban develop- ‘ment asues, journal of Evironmenial Planning and Mans: gement, N*53, p. 439-455. 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