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Déposé à la SACD

NEIL ARMSTRONG SUR LA LUNE

par Michel Fustier


(toutes les pièces de M.F. sur : http://theatre.enfant.free.fr )

PERSONNAGES:
Dieu
Un ange.
Le président des Etats-Unis
Neil Armstrong.

L'HISTORIEN DE SERVICE - Les fusées mises au point en Allemagne par Werner von Braun à la fin
de la guerre de 1940 ont donné à l'humanité l'idée que la pesanteur pouvait être vaincue. Aussi
dans les années soixante, Russes et Américains rivalisèrent-ils pour la conquête de l'espace.
Jusqu'à ce que les Américains aient décidé, pour s'imposer, d'envoyer un homme sur la lune.
Leur aventure fut une aventure collective, même si le souvenir s'en est cristallisé autour de Neil
Armstrong. La pièce commence par un dialogue de Dieu avec l'un de ses anges, l'un et l'autre
très concernés par tout ce qui va se passer dans le ciel...

-1-
UN ANGE - Je me le suis toujours demandé… Seigneur, pourquoi exactement avez-vous fait la lune?
DIEU - Pourquoi j'ai fait la lune, mon cher ange…? Je ne sais pas. Mais est-ce que j'ai besoin de
raisons pour faire les choses?
UN ANGE - Vous savez comme ils sont, les hommes… Ils sont rationnels, ils veulent des raisons.
DIEU - Faut-il vraiment que je leur en donne? Jusqu'à présent, la lune… une affaire de poètes":
"C'était dans la nuit brune,
Sur le clocher jauni, la lune,
Comme un point sur un i…"
UN ANGE - Cela ne leur suffit plus, la poésie. Je répète, à quoi sert la lune?
DIEU - Eh bien d'abord, ils en ont tiré pas mal de déesses, Astarté, Séléné … J'en oublie… Suis pas
jaloux, n'allez pas croire! Et puis, comment n'y ai-je pas pensé plus tôt? c'est quand même la
lune qui fait monter les marées …
UN ANGE - Oui, c'est une raison, mais ils le savent depuis longtemps…. Soit dit entre parenthèses, si
vous aviez pu mettre les marées à des heures régulières, ça leur aurait simplifié la vie.
DIEU - Je ne peux pas faire n'importe quoi… Et puis, la lune, elle éclaire aussi la nuit!
UN ANGE - Pas toutes. Il y a des nuits sans lune.
DIEU - Oui, il y a eu des ratés… Je sais… Mais vraiment, quoi d'autre? Et après tout, encore une fois,
ce n'est pas à moi de trouver des raisons à ce que j'ai fait.
UN ANGE - J'ai là quelqu'un qui a trouvé une raison nouvelle… Puis-je le faire entrer?
DIEU – Une raison nouvelle! Qui est-ce?
UN ANGE - Le Président des États-Unis.
DIEU - Ce pays où l'on croit encore en moi et où l'on m'invoque à tort et à travers?
UN ANGE - C'est bien ça… Ce sont de grands enfants.
DIEU - Eh bien, qu'attendez-vous, faites-le entrer.

-2-
LE PRESIDENT DES ETATS-UNIS – Je suis le président des États-Unis. …Seigneur Dieu, nous
voulons la lune pour y aller!
DIEU – Pour y aller… Vous êtes fous!
LE PRESIDENT – Mais non! Nous autres Américains, qui avons pourtant les pieds sur terre, nous
voulons désespérément aller sur la lune.
DIEU - Expliquez-moi ça.
LE PRESIDENT - Vous n'êtes pas sans savoir que notre monde, qui est aussi le vôtre, a été
dernièrement agité de terribles guerres. Et aujourd'hui encore, nous en menons une
particulièrement stupide et meurtrière au Vietnam… Très respectueusement, c'est de votre faute,
toutes ces guerres.
DIEU – C'est vraiment trop facile de dire ça!
LE PRESIDENT - Vous nous avez enfermés sur un trop petit territoire. C'est pour cela que nous nous
battons entre nous. Très respectueusement encore une fois, il nous faudrait de l'espace.
DIEU - Il vous faudrait l'Espace, vous voulez dire?
LE PRESIDENT - Vous comprenez vite.
DIEU - Et avant de conquérir tout l'Espace, vous voudriez commencer par la lune?
LE PRESIDENT – C'est bien ça… Oui. Refaire la concorde entre les peuples en les occupant à une
conquête qui serait pacifique… Il n'y a personne sur la lune!
DIEU - Ne cherchez-vous pas accessoirement à imposer au monde la supériorité américaine?
LE PRESIDENT - J'allais le dire: vous ne cessez de me devancer! …Entre nous, les Américains sont
devenus tellement puissants qu'il faut absolument leur permettre de le démontrer. Sinon, ils
risquent de faire des dégâts. Laissez-les jouer avec la Lune… C'est moi, leur président, qui vous
le demande…
DIEU - Est-ce un ultimatum? …Mais après tout qu'est ce que je risque?
LE PRESIDENT - Je vous promets qu'ils diront qu'ils y sont allés en votre nom et par amour de
l'humanité.
DIEU - Hypocrites! Eh bien, allez-y… Et au fait, qu'en pense le pape?
LE PRESIDENT - Oh, lui… De toute façon, bien que je ne sois pas protestant, quand j'ai envie de
parler à Dieu je le fais directement.

-3–
L'HISTORIEN DE SERVICE – Forts de cette permission, les Américains se mirent au travail et
désignèrent Neil Armstrong comme le premier homme à aller sur la lune
LE PRESIDENT - Alors, mon cher Armstrong, j'apprends que vous avez été choisi pour… (geste vers
le haut)… aller dans la lune!
NEIL ARMSTRONG - Oui, Président. Mais je ne veux pas y aller sans savoir où je vais mettre les
pieds.
LE PRESIDENT – Naturellement. C'est prévu: programme Gemini, programme Apollo. Gros crédits!
NEIL ARMSTRONG - Bien. J'enverrai d'abord un de nos astronautes faire une petite sortie dans
l'espace… (jumelles, il regarde) Ca y est, ça marche!
LE PRESIDENT - Il est vraiment sorti de la cabine, il a vraiment marché dans le cosmos?
NEIL ARMSTRONG - Oui. Mais on recommence pour être plus sûrs… (jumelles) Tout va bien!
Maintenant, faisons le tour de la lune: on va aller regarder la face cachée, il paraît que c'est
tellement calme. (jumelles… un temps)
LE PRESIDENT - Ca fait déjà quatre jours qu'ils sont partis… Vous êtes certain qu'ils vont revenir.
NEIL ARMSTRONG - (jumelles) Les voilà. C'est bon… Maintenant, on va aller repérer l'endroit où
nous allons alunir… (jumelles) Là-bas, vous voyez, dans la mer de la Tranquillité (il passe les
jumelles)
LE PRESIDENT - Oui, je vois. Très poétique! (il rend les jumelles) Mais vous ne croyez pas qu'il
faudrait faire encore un petit essai… pour voir comment ça se passe en orbite au dessus de la
lune.
NEIL ARMSTRONG - Naturellement! Après avoir débarqué, il faut être sur de pouvoir rentrer.
LE PRESIDENT - C'est essentiel. Cher ami, nous tenons beaucoup à vous revoir ici!
NEIL ARMSTRONG - C'est gentil, merci. Allons-y (jumelles). Ca y est, ça a marché une fois… On
va faire encore un coup d'essai.
LE PRESIDENT – (soudain pressé) Non, non, nous n'avons plus le temps… Les Russes se sont lancés
eux aussi et ils menacent de nous devancer!
NEIL ARMSTRONG - Bien, alors j'y vais. Nous serons les premiers… (serrant la main du président)
J'espère vous revoir bientôt.
LE PRESIDENT - J'irais moi-même vous saluer à votre retour sur terre. Tenez, à l'occasion vous
planterez là-haut le drapeau américain (il le lui remet). Comme ça pas d'ambiguïté. On saura que
c'est nous.

-4–
L'HISTORIEN DE SERVICE – Malgré toutes les assurances données par le Président, Dieu ne peut
pas s'empêcher d'être un peu inquiet... Il prie humblement le Président de venir le voir...
LE PRESIDENT - Vous m'avez fait demander, Seigneur?
DIEU - Oui. Puisque je peux donc m'adresser à mes amis, aussi bien protestants que catholiques, sans
passer par le Pape, j'en profite. Mais j'ai des scrupules: vous êtes un homme si occupé.
LE PRESIDENT – Mon Dieu, mon Dieu, je vous en prie…
DIEU – Je voulais vous dire… Je vous ai vu passer d'ici. Enfin pas vous, mais votre vaisseau spatial.
Compliments! En vérité, j'avais abandonné la Terre à l'homme et je m'étais réservé le Cosmos…
Mais maintenant, vous y êtes venus!
LE PRESIDENT - Oui, les orbites elliptiques, l'inertie, l'attraction, la vitesse de libération… Nous
avons découvert tous vos secrets. Vous n'êtes pas vexé au moins?
DIEU - Non, non… Si je vous ai créés plus malins que je ne le pensais, ça me fait plutôt plaisir et de
toute façon, il vous reste encore beaucoup à apprendre. Mais maintenant, j'aimerais… enfin,
quelles sont vos intentions?
LE PRESIDENT - Concernant l'Espace.
DIEU - Naturellement. Concernant l'Espace!
LE PRESIDENT - Vous savez, l'homme n'a pas d'intentions… Simplement il se sent poussé, poussé
toujours plus avant. Il faut qu'il aille hardiment fouiller partout dans l'univers comme dans son
bien… Nous ne réfléchissons pas. Sûr que ce serait plus raisonnable de s'arrêter, mais…
DIEU - Je ne vous demande pas d'être raisonnables, ce serait inhumain. (il se lève) Je voudrais
simplement vous déclarer solennellement… Je vous ai donc laissé la Terre, à vous les hommes,
pour vous y battre tant que vous voulez, je n'y peux rien. Mais que du moins vous n'alliez pas
faire la guerre dans le ciel. Et je vous le dis, c'est un nouveau commandement : "Paix dans le ciel
aux hommes de bonne volonté!" En tant que Dieu, c'est bien le moins que je puisse faire.
LE PRESIDENT – Nous connaissons bien, les commandements, Seigneur…
DIEU – Oui, je sais, vous autres américains, vous les connaissez. Mais celui-là, tâchez de le respecter.

RAPPEL HISTORIQUE

En I957, les Russes avaient envoyé dans le ciel un satellite, le Spoutnik, qui se mit à tourner au dessus de la terre en émettant
le premier bip-bip de l'Histoire. Le 12 avril 1961 ils récidivèrent et, grâce à une fusée Vostok, ils mirent en orbite,
Gagarine, le premier homme dans l'espace.
Nous sommes en pleine guerre froide et les Américains, qui en sont au stade des essais spatiaux, sont très mortifiés pas les
succès russes. D'autre part le moral de la nation, enlisée dans la guerre de Vietnam, est au plus bas… Pour toutes ces
raisons le Président John Fitzgerald Kennedy prononce un grand discours devant le congrès (25 mai 1961)
dans lequel il annonce que dans les dix ans qui viennent les États-Unis se donnent pour objectif d'envoyer un
homme dans la lune.
La NASA, agence américaine de l'espace (National Aeronautics and Space Administration) procède méthodiquement et,
essai après essai, acquiert progressivement les connaissances nécessaires à la conquête de la lune. Le I6 juillet 1969
trois astronautes, Michael Collins, Edwin Aldrin et Neil Armstrong, prennent place dans la cabine d'Apollo 11 .
Première étape, l'orbite terrestre, puis départ pour la lune et mise en orbite autour de la lune. Là, pendant que Michael
Collins reste en orbite, ses deux compagnons descendent vers la lune, où Neil Armstrong pose pour la première fois
un pied d'homme. Le monde entier aura suivi leur exploit à la télévision.
On peut considérer que la conquête de la lune a commencé au XVIIe siècle, lorsque Kepler et Newton découvrirent
les lois qui régissent le mouvement des corps célestes. Ces lois sont : pour KEPLER: 1 - Les orbites des planètes
sont elliptiques, le soleil étant l'un des centres. 2 - Les surfaces balayées en des temps égaux sont égales. 3 - Les
carrés des périodes de révolution des planètes sont proportionnels aux cubes de leur distance moyenne au soleil. Pour
NEWTON: deux corps quelconques s’attirent en raison directe de leurs masses, et en raison inverse du carré de la
distance qui séparent leurs centres de gravité.
Et pourquoi faire intervenir Dieu dans la pièce? Et bien d'abord parce que Dieu est souvent considéré comme "le grand
horloger" qui a réglé les mouvements de l'univers et que c'est dans les rouages de cet univers que l'homme, par la
conquête spatiale, est venu pour la première fois mettre les doigts. Ensuite parce que ce même Dieu est très présent à
l'esprit des Américains, non seulement en tant qu'individus, mais en tant que Nation. Dieu figure en effet dans la
constitution américaine et, lors de la conquête spatiale, il arriva plus d'une fois que tel ou tel l'implore ou le
remercie officiellement... Dès lors, il n'était pas inconvenant de le mettre en scène.

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