Leçon littéraire :

Les intrigues dans le roman d’Aragon, « Aurélien »

Introduction :

Dans notre leçon littéraire, nous abordons les intrications de l'intrigue dans le roman
d'Aragon intitulé "Aurélien". Tout d'abord, nous nous interrogeons sur la nature même de
l'intrigue et sa définition. Ensuite, nous analysons quelle intrigue spécifique se déploie dans
ce roman d'Aragon.

Tout d’abord, L’intrigue, selon le dictionnaire Littré, est un assemblage des événements, des
actions et des circonstances qui sont amenés par le hasard ou les desseins contradictoires
des personnages et qui donnent l’impression d’un enchevêtrement. Étymologiquement, le
terme "intrigue" est emprunté au français à partir du latin "intricāre", qui signifie "emmêler"
ou "enchevêtrer". Le mot "intricāre" est formé à partir du préfixe "in-" (qui indique une
action vers l'intérieur) et de "tricāre" (qui signifie "entrelacer" ou "tresser"). L'idée sous-
jacente est celle d'un enchevêtrement d'événements, de situations ou de personnages qui
crée une complexité narrative.

Ensuite, Aristote dans sa Poétique, considère l'intrigue (ou "mythos" en grec) comme l'une
des six parties essentielles de la tragédie. Selon Aristote, l'intrigue est l'organisation
structurée des événements de l'histoire, comprenant les actions, les péripéties et le
dénouement. Pour lui, l'intrigue doit être bien construite, avec une série d'événements qui
se déroulent de manière logique et cohérente. Au contraire, l'intrigue surréaliste abordée
par André Breton, l'un des fondateurs du mouvement surréaliste. Dans son ouvrage
manifeste intitulé "Le Manifeste du Surréalisme" publié en 1924, Breton évoque
l'importance de l'intrigue surréaliste dans la littérature et l'art. Breton décrit l'intrigue
surréaliste comme une exploration de l'inconscient et une tentative de capturer les
associations libres de la pensée. Il défend l'idée que l'intrigue surréaliste doit échapper aux
schémas narratifs traditionnels, en laissant place à l'automatisme mental et à l'imagination
débridée. L'intrigue surréaliste est ainsi capable de créer des situations et des rencontres
inattendues, des événements illogiques et des transformations surprenantes. Breton
encourage les écrivains surréalistes à se libérer des contraintes de la logique et de la
rationalité, à explorer les profondeurs de l'inconscient et à révéler les forces cachées de
l'esprit. Il affirme que l'intrigue surréaliste doit être imprévisible, énigmatique et capable de
provoquer des émotions intenses chez le lecteur.
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Les intrigues dans le roman d’Aragon, « Aurélien »

D'autres auteurs du mouvement surréaliste, tels que René Char, Paul Éluard, Louis Aragon et
Philippe Soupault, ont également abordé l'intrigue surréaliste dans leurs œuvres, explorant
les possibilités de l'écriture automatique, les associations d'idées et les jeux linguistiques
pour créer des intrigues surprenantes et déroutantes.

Dans le roman "Aurélien" de Louis Aragon, l'intrigue surréaliste s'entremêle avec la réalité,
les rêves, passé et présent, et en jouant avec la perception du temps et les perceptions du
personnage principal. Elle explore les méandres de l'amour et de la folie, en utilisant des
images évocatrices et des associations d'idées surprenantes. Cette intrigue vise à capturer
l'essence des émotions et des tourments intérieurs, plutôt que de se conformer à une
structure narrative traditionnelle.

Pour ce faire, il sera question de voir : En quoi les différentes intrigues entrelacées dans le
roman "Aurélien" d'Aragon contribuent-elles à la construction d'une vision complexe de la
condition humaine et de l'expérience amoureuse ?

Dans un roman surréaliste, il est courant de trouver non seulement une intrigue principale,
mais également des intrigues multiples qui se croisent, se connectent où se divergent. Dans
ce sens, nous allons aborder dans un premier temps les tournements de l’intrigue
amoureuse parce que ce roman est avant tout un roman d’amour. Dans un deuxième temps,
nous discuterons les perspectives de l’intrique politique sachant que ce roman est un roman
de guère et du réalisme social à l’époque d’entre guerre. Finalement, l’intrigue qui importe
dans ce roman est une intrigue poétique et symbolique englobant tout aspects
métaphoriques.
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Les intrigues dans le roman d’Aragon, « Aurélien »

Plan de la leçon :

I. Une intrigue amoureuse : Une quête d'amour illusoire et

inaccessible
1. L’amour complexe : entre éclat et absence
2. Passion jalouses et désespoirs amoureux
3. L’amour fou : L’image du dadaïste Paul Denis
II. Une intrigue sociale et politique : les tensions et les conflits de
l’époque
1. L’ascension sociale d’Edmond : une stabilité recherchée avec la
fortune de Blanchette.
2. Aurélien ou La perte de repères dans une société en évolution
3. Les répercussions de la guerre et les conflits familiaux
III. Une intrigue poétique et symbolique : Les dimensions
métaphoriques du roman
1. Le Temps Suspendu : Mémoire et Dérive
2. Le mythe de Bérénice : une Antigone de l’amour et de la
résistance.
3. Le masque symbole de l’obsession de la mort
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I. L'intrigue amoureuse : Une quête d'amour illusoire et inaccessible

Tout d’abord, l'impossibilité du couple est un thème central dans le roman "Aurélien"
d'Aragon. Ainsi, Il est intéressant de noter que l'écriture de ce roman coïncide avec les
problèmes de couple qu'Aragon lui-même a rencontrés avec sa femme Elsa Triolet en
1943. Les tensions de leur relation, ainsi que les dangers de la clandestinité pendant la
Seconde Guerre mondiale, ont sans doute influencé la représentation de l'impossibilité
du couple dans le roman. Dans ce sens, nous allons étudier la représentation de l’amour
complexe. Ensuite, nous indiquerons l’amour en passion et désespoir. Enfin, nous
évoquerons la question dont l’auteur confère une importance celle de la quête de
l’absolu.

1. L’amour complexe : entre éclat et absence

L'éclat représente l'intensité et la passion qui caractérisent le début d'une relation

amoureuse. Lorsque Aurélien rencontre Bérénice, il est immédiatement captivé par sa
beauté et son mystère. Leur amour naissant est empreint de désir ardent et d'une
profonde attraction. Cependant, malgré cet éclat passionné, l'absence se fait également
sentir tout au long du roman. Les deux amants sont constamment séparés par des
circonstances extérieures, tels que la guerre et les contraintes sociales. Cette distance
physique et émotionnelle crée une sensation d'absence persistante dans leur relation. Ils
sont confrontés à des rencontres manquées, des séparations et des obstacles qui les
empêchent de vivre pleinement leur amour. Sur ce, le narrateur décline cet état dans les

derniers chapitre en constatant que :"Il n'était plus amoureux de cette femme, il n'était
pas occupé d’elle, il aurait pu le jurer. Mais elle avait laissé pour toujours sur sa vie une
nostalgie dont il demeurait le prisonnier. Il s'infligeait de retrouver les traces de cet
incompréhensible amour » (673). Cette citation met en évidence la persistance d'un
amour passé et l'écho d'un éclat amoureux qui continue d'influencer la vie du
protagoniste. Malgré le fait qu'Aurélien ne soit plus amoureux de cette femme, il ressent
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toujours une nostalgie profonde envers elle, ce qui le maintient captif de son empreinte.
L’absence de cet amour est également présente dans la citation. Bien que l'amour lui-
même se soit dissipé, l'absence de cette femme et de l'intensité qu'ils partageaient
persiste dans la vie d'Aurélien. C'est cette absence qui alimente sa nostalgie et le
maintient prisonnier de ses souvenirs. Il est captivé par cette relation passée, cherchant à
comprendre pourquoi cet amour était si puissant et pourquoi il en reste marqué. C’est
cette combinaison d'éclat et d'absence qui rend l'amour si complexe et intriguant,
poussant le protagoniste à se questionner sur les mystères de cette relation passée et sur
les traces qu'elle a laissées dans sa vie.

2. Passions jalouses et Désespoirs amoureux :

On peut observer les éléments d'un mélodrame qui s'entremêlent dans l'œuvre
d'Aragon, notamment à travers la relation entre Bérénice et Blanchette. La jalousie
intense de Blanchette envers Bérénice, combinée à son amour secret pour Aurélien,
engendre une série de rebondissements dramatiques, illustrant ainsi le caractère
tumultueux. Un moment marqué par une confrontation violente et tragique, révèle les
extrêmes auxquels les personnages sont prêts à se soumettre au nom de leur amour et
de leurs désirs inexprimés. Le narrateur nous dévoile les arrières pensés de Blanchette en
soulignant que :« Le but de Blanchette était de la séparer d'Aurélien » (p : 376). Cette
déclaration met en lumière la profonde jalousie qui consume Blanchette et souligne son
intention délibérée de séparer Bérénice et Aurélien. On peut voir la jalousie comme une
manifestation intense des passions amoureuses, mais également comme un vecteur du
désespoir qui découle de la crainte de perdre l'être aimé. Cependant, derrière cette
volonté de séparer Bérénice et Aurélien se cache également un sentiment de désespoir.
Blanchette est consciente de la fragilité de sa position et de l'incertitude inhérente aux
affaires du cœur. Son désir de possession totale et sa crainte de perdre Aurélien la
poussent à agir de manière impulsive et destructrice. Ainsi, la jalousie de Blanchette et
son désir de séparer Bérénice et Aurélien témoignent des tourments passionnels et des
désespoirs amoureux qui jalonnent l'histoire d'Aurélien et Bérénice.

3. L’amour Fou : L’image du dadaïste Paul Denis

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L'amour fou, telle une énigme déconcertante, se dévoile dans le miroir déformé de la
relation entre Bérénice et le dadaïste Paul Denis. Tel un tableau cubiste aux contours
flous, cette passion intense transcende les limites du raisonnable pour se perdre dans les
dédales de l'irrationnel. Paul Denis, tel un provocateur de l'âme, incarne le souffle
subversif du dadaïsme, une personnalité énigmatique empreintes de non-conformisme
qui exerce sur elle une attraction magnétique. En sa présence, les règles sociales
s'effritent, laissant place à un élan imprévisible et audacieux. Leur amour se nourrit de
cette énergie libératrice, érigeant l'amour fou. Cet amour se délecte de l'excès, de la
fusion absolue des âmes, sans se soucier des limites qui séparent la vie de la mort.
Comme le montre la voix du narrateur : « Puis, il en venait à la mort de Paul Denis,
dénonçait le battage que ses petits copains voulaient en faire. En réalité, il ne s’agissait
pas du tout de la défense des nègres ni de tout ce romantisme frelaté, vieux comme
locomotive. Paul Denis, s’était suicidé pour une femme, tout le monde le savait mais
on ne le disait pas, parce qu’on trouvait ça démodé ». Cette mort tragique de Paul
Denis, dissimulée derrière un voile de silence, révèle la puissance dévastatrice de l'amour
fou qui l'animait pour Bérénice. Les discours superficiels sur la défense des opprimés ou
sur un romantisme désuet ne parviennent pas à saisir l'essence profonde de son geste.
Paul Denis, emporté par les flammes intenses de sa passion, a trouvé dans la mort le seul
moyen de se libérer de l'emprise de cet amour dévorant. En prenant la décision ultime
de se donner la mort, Paul Denis a franchi les limites de l'existence terrestre pour se
perdre dans l'éternité d'un amour impossible. Son geste désespéré, bien que démodé
aux yeux de la société, est le témoignage poignant de l'intensité de ses émotions, de sa
totale dépendance envers Bérénice. Il a préféré s'éteindre plutôt que de vivre dans un
monde qui ne pouvait combler le vide béant laissé par leur amour inassouvi. De ce fait, la
mort de Paul Denis, motivée par son amour fou pour Bérénice, est une manifestation
puissante de la dévotion inconditionnelle et de la quête d'absolu qui caractérisent ce
type d'amour. C'est un acte qui transcende les conventions sociales et les jugements de
la société, témoignant de la profondeur des émotions et de la détresse qui peut
accompagner l'amour fou.

Pour finir, L'intrigue amoureuse dans "Aurélien" met en évidence la quête d'absolu des
personnages. Ils cherchent un amour qui dépasse les limites de la réalité quotidienne, un
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amour pur et idéalisé. Cependant, cette quête d'absolu se heurte à la réalité imparfaite
et aux compromis inévitables de la vie. Les personnages sont confrontés à leurs propres
limites et à la difficulté de concilier leurs idéaux avec la réalité du monde qui les entoure.

II. L'intrigue sociale et politique : Les tensions et les conflits de l'époque

Ensuite, L'intrigue sociale et politique d'Aurélien met en évidence les tensions entre les
différentes classes sociales de l'époque. Les personnages évoluent dans un contexte où
la bourgeoisie et le prolétariat s'opposent. Les différences de statut social, de privilèges
et d'accès aux ressources créent des frictions et des conflits qui influencent les relations
entre les personnages. Les aspirations individuelles se heurtent aux réalités sociales et
politiques. De ce fait, nous aborderons, dans un premier temps, l’accession sociale
évoquée par l’image d’Edmond. Dans un deuxième temps, nous insisterons sur l’idée de
la perte de repères dans une société en mutation. Finalement, nous apercevrons les
répercussions de la guerre et les conflits familiaux.

1. L’ascension sociale d’Edmond : une stabilité recherchée avec la fortune de

Blanchette.

Edmond met en évidence son désir ardent de parvenir à une stabilité financière en
s'associant avec Blanchette, une femme fortunée. Edmond, conscient des opportunités
que la richesse peut offrir, poursuit cette relation avec l'objectif de sécuriser sa position
sociale et de jouir des privilèges que la fortune de Blanchette lui offre. L’importance de
cette intrigue réside dans la manière dont elle met en lumière les rapports de pouvoir et
les dynamiques sociales qui existent au sein de la société. Edmond utilise sa relation avec
Blanchette comme un moyen d'ascension sociale, mais il est également conscient des
attentes et des pressions qui découlent de cette alliance. La stabilité recherchée par
Edmond est à la fois une source de sécurité et de contraintes, illustrant ainsi les
compromis auxquels les individus peuvent être confrontés lorsqu'ils aspirent à une
meilleure position sociale. Edmond est conscient que : « Le monde de la vraie richesse.
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Toute spirituelle… (…) Pour la richesse, c'est la même chose : on peut avoir de l'argent
tant qu'on veut, le tout est d'être riche en dedans. Edmond était riche en dedans. Il
pouvait s’abandonner. Se recréer d'autres malheurs. Il avait surmonté la malédiction
divine : Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front. » (175). Par cette citation, Edmond
exprime une conception particulière de la richesse, qui va au-delà de l'accumulation
d'argent et des biens matériels. Il évoque un "monde de la vraie richesse" qui est de
nature spirituelle. Selon lui, la richesse véritable réside dans l'enrichissement intérieur,
dans la plénitude d'être et dans la capacité à s'abandonner à ses émotions et expériences.
Pour Edmond, il importe peu d'avoir de l'argent en abondance, car la véritable richesse
réside dans l'intériorité. Il affirme qu'être riche en dedans est essentiel. En mentionnant la
"malédiction divine" selon laquelle l'homme doit gagner sa subsistance à la sueur de son
front, Edmond semble souligner le poids des contraintes et des attentes sociales liées à
l'acquisition de biens matériels. Dans cette interprétation, on peut voir une critique de la
société matérialiste et une invitation à reconsidérer la valeur de la richesse intérieure.
Edmond incarne cette idée en étant capable de trouver un sens et une satisfaction dans
sa vie, indépendamment de sa situation financière. L'auteur, à travers ce passage, semble
reconnaître la dimension complexe de la nature humaine et la recherche d'une richesse
plus profonde et plus durable que celle matérialiste.

2. Aurélien ou La perte de repères dans une société en évolution

Dans le roman, l'intrigue sociale est également marquée par les mouvements
politiques de l'époque, tels que le communisme et le fascisme. Les personnages sont
confrontés aux idéaux et aux convictions politiques qui divisent la société. Ces idéologies
politiques influencent les choix et les engagements des personnages, créant des
alliances, des conflits et des tensions au sein du récit. Dans cette société en évolution, les
repères traditionnels et les valeurs établies sont remis en question. Les anciennes
structures sociales et les normes préexistantes perdent de leur pertinence, laissant place
à de nouvelles idées, idéologies et modes de vie. Aurélien se trouve confronté à une
multitude de possibilités, mais aussi à un profond sentiment de confusion et
d'incertitude. Il s’agit de : « Le fait qu’Aurélien aimait peu qu’on lui parlât de la guerre
et qu’il craignait la féconde de ceux qui l’avaient faite comme la curiosité malsaine des
autres. Il n’aurait pas expliqué la conséquence logique de ces choses, mais la politique
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de l’après-guerre l’ennuyait à peu près de la même façon. » (P : 42). Cet extrait éclaire
le désintérêt d'Aurélien pour la guerre et la politique de l'après-guerre, ce qui peut être
interprété comme une manifestation de sa perte de repères dans une société en
mutation. Aurélien éprouve un certain désintérêt et même une aversion envers les
discussions sur la guerre. Cela peut être compris comme une réaction à la violence et aux
traumatismes qu'il a pu vivre ou observer pendant cette période de conflit. Sa réticence à
aborder le sujet révèle peut-être sa volonté de se distancer de ces expériences
traumatisantes et de chercher un refuge dans d'autres aspects de sa vie. Son désintérêt
pour la guerre et la politique témoigne de sa difficulté à trouver un sens et une
orientation clairs dans ce nouvel ordre social. Aurélien dans une situation, un ancien
combattant, un homme qui est revenu qui n’a pas trouvé sa place dans la société.

3. Les répercussions de la guerre et les conflits familiaux :

L'intrigue sociale explore aussi les répercussions de la guerre sur les personnages et
leurs relations. Le roman se déroule dans une période marquée par les séquelles de la
Première Guerre mondiale, et la menace d'une nouvelle guerre plane. Les personnages
sont confrontés à la peur et à l'instabilité politique, ce qui affecte leurs interactions et
leurs perspectives d'avenir. Les traumatismes de la guerre et les conflits politiques
exercent une pression sur les relations amoureuses et sociales des personnages, créant
des obstacles supplémentaires à leur bonheur et à leur épanouissement. Les
répercussions de la guerre et de la violence politique dans "Aurélien" sont profondes et
influencent le développement des personnages et le contexte social dans lequel ils
évoluent. La relation entre Aurélien et sa sœur Armandine est caractérisée par un fort
conflit et des tensions palpables tout au long du roman. Leur relation complexe révèle les
dynamiques familiales et les conflits intérieurs qui peuvent se produire au sein d'une
fratrie. Dès le début de l'histoire, on peut percevoir une rivalité latente entre Aurélien et
Armandine. Ils semblent se disputer l'attention et l'affection de leur mère, ce qui crée
une atmosphère de compétition entre eux. Cette rivalité se manifeste à travers des
confrontations verbales acerbes et des attitudes de méfiance réciproque. Armandine, en
particulier, exprime ouvertement son mépris envers Aurélien. Elle le juge sévèrement et
remet en question ses choix de vie, sa passivité et son manque d'ambition. De son côté,
Aurélien ressent une certaine animosité envers sa sœur, la percevant comme une figure
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dominante et autoritaire.Aurélien à sa sœur Armandine : " J'ai fait huit ans de service ,
tu sais , j'ai vécu dans un monde dont ni toi ni Jacques ne vous faites la plus petite idée.
La guerre..." (P :204). Aurélien déclare à sa sœur Armandine qu'il a vécu dans un monde
dont elle et Jacques ne se font pas la moindre idée, en mentionnant spécifiquement la
guerre, il met en avant les répercussions profondes de la guerre sur sa vie et sa
perception du monde. Cette déclaration exprime le poids émotionnel et psychologique
de l'expérience de la guerre sur Aurélien, ainsi que son sentiment d'isolement par
rapport aux membres de sa famille qui n'ont pas partagé cette même réalité. La guerre
est un événement traumatisant qui perturbe profondément la vie des individus. Elle
engendre des bouleversements tant sur le plan physique que psychologique, et ses
répercussions se font ressentir longtemps après son achèvement. Aurélien, ayant passé
huit ans de service militaire, a probablement été confronté à la violence, à la mort et à la
destruction. Ces expériences ont laissé une empreinte durable sur sa personne,
influençant sa vision du monde et ses relations avec les autres.

En somme, le contexte politique de l'époque, marqué par des tensions internationales

et des mouvements sociaux, crée une atmosphère particulière tout au long du roman.
Aragon fait référence à des événements historiques tels que la montée du fascisme, les
grèves ouvrières et les débats politiques de l'époque. Ces événements en arrière-plan
renforcent l'atmosphère de tumulte et d'incertitude qui entoure les personnages. Les
différences politiques et sociales deviennent ainsi un obstacle supplémentaire à la
relation entre Aurélien et Bérénice, complexifiant davantage leur histoire d'amour.
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III. L'intrigue poétique et symbolique : Les dimensions métaphoriques du roman

Les symboles jouent également un rôle important dans l'intrigue d'Aurélien. Ils
représentent des idées abstraites ou des aspects profonds de la condition humaine. Par
exemple, le personnage de Bérénice peut être interprété comme le symbole de l'amour
idéalisé et inaccessible, tandis que le personnage d'Aurélien représente la quête de cet
amour et la recherche de sens dans un monde troublé. L'intrigue poétique et symbolique
d'Aurélien permet à Aragon d'explorer des thèmes universels tels que l'amour, la
passion, la mort, la quête de soi et la condition humaine. Les symboles et la poésie
offrent des couches de signification supplémentaires, incitant le lecteur à une réflexion
plus profonde et à une interprétation subjective de l'histoire. Le roman incarne des sens
métaphoriques et figurées tel la symphile du temps et le mémoire. Puis, nous avons le
mythe de Bérénice et enfin, nous approchons au masque de l’inconnue de la Seine

1. Le Temps Suspendu : Mémoire et Dérive

Le roman explore également la dimension temporelle, mêlant passer et présent.

Aurélien est hanté par des souvenirs de sa jeunesse et de son amour perdu pour
Bérénice. L'intrigue joue avec les notions de mémoire, de nostalgie et de regrets,
donnant au récit une dimension introspective et réflexive. L’auteur la confirme en
dévoilant que : « Il y avait plus de quatre mois qu'Aurélien filait à la dérive. Le bateau
de l'île Saint-Louis semblait emporté dans un courant de la durée, sans but, sans
raison apparente, échouant à tous les bancs de sable pour repartir dans des
tourbillons de mémoire. De l'absence physique ou de cette présence imaginaire, qui se
confondaient, laquelle était à Aurélien plus que l'autre pénible ? » (P :600). Cet extrait
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met en évidence l'état de dérive d'Aurélien, symbolisé par le bateau de l'île Saint-Louis
emporté dans un courant de la durée. Il suggère une perte de repères et une absence de
but dans sa vie. Aurélien se trouve pris entre l'absence physique de la personne aimée
et la présence imaginaire qui se confondent, créant une confusion et un tourbillon de
souvenirs. La métaphore du bateau dériveur souligne la sensation d'être emporté sans
direction précise, naviguant d'un banc de sable à un autre. Cela reflète l'état d'instabilité
émotionnelle et existentielle d'Aurélien, qui se trouve confronté à des souvenirs du
passé et à des tourbillons de mémoire. Il est pris entre l'absence de la personne aimée
et son imagination qui lui rappelle sa présence, ce qui rend difficile de distinguer quelle
situation est la plus pénible pour lui. En explorant la dualité entre l'absence physique et
la présence imaginaire, Aragon met en évidence la complexité des émotions et des
tourments intérieurs d'Aurélien. Cette réflexion sur la souffrance et la difficulté de faire
face à la perte est une manifestation de l'impact de la mémoire, de la nostalgie et du
temps dans l'intrigue poétique d'Aurélien. Cela renforce également le thème de la
recherche d'un sens dans une réalité mouvante et instable.

2. Le mythe de Bérénice : une Antigone de l’amour et de la résistance.

Tout d'abord, le mythe d'Antigone est souvent associé à la résistance face à l'autorité
et à l'oppression. De la même manière, Bérénice refuse de se soumettre aux
conventions sociales et aux abus politiques. Le mythe d'Antigone est souvent associé à
la tragédie et à la douleur, et c'est également le cas de Bérénice. Son amour avec
Aurélien est empreint de mélancolie, de souffrance et d'inaccessibilité. Son destin est
tragique, marqué par la séparation, la mort et la résignation. Sa quête amoureuse
devient alors une quête de résistance contre les forces qui les séparent. Ainsi, en
établissant un parallèle entre Bérénice et Antigone, on perçoit l'importance de Bérénice
en tant que symbole de l'amour passionné et de la résistance face aux contraintes et aux
adversités. Son personnage incarne l'idéal de l'amour véritable et la lutte pour la liberté
individuelle, tout en étant confronté à la tragédie inhérente à la condition humaine. « La
scène tragique où Bérénice est tuée par une balle allemande dans une voiture sous le
feu ennemi » (la fin du roman) évoque des parallèles avec le mythe d'Antigone, en tant
que symbole de l'amour et de la résistance. En outre, Antigone est connue pour son
courage et sa détermination à défendre ses valeurs et ses croyances, même face à
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l'oppression et à la mort imminente. De la même manière, Bérénice, en choisissant de
rester aux côtés d'Aurélien malgré le danger de la guerre, incarne une forme de
résistance et de loyauté envers leur amour. Le mythe d'Antigone est également
imprégné de la thématique de la mémoire et de l'héritage familial. Dans le roman, la
mort de Bérénice dans ces circonstances terribles peut être interprétée comme une
manière de préserver la pureté de leur amour et de laisser une trace mémorable de leur
histoire, tout comme Antigone se fait le gardien des valeurs familiales et de la mémoire
de ses ancêtres. Enfin, le destin tragique de Bérénice, tout comme celui d'Antigone,
suscite la réflexion sur les sacrifices et les choix difficiles que l'amour et la résistance
peuvent entraîner. Leur mort symbolise à la fois la beauté et la cruauté de ces forces
puissantes qui peuvent transcender les limites de la vie humaine.

3. Le masque symbole de l’obsession de la mort :

Dans le roman, le masque de la noyée est une référence centrale qui rythme et dirige le
récit. Le personnage d'Aurélien est fasciné par ce masque et cherche désespérément à
découvrir l'identité de la noyée. Cette quête le conduit à rencontrer Bérénice, qui ressemble
étrangement à la femme représentée sur le masque. La relation entre Bérénice et le masque
devient alors très importante dans l'histoire d'amour entre les deux personnages. Bérénice
est confrontée au masque fatidique, ce qui déclenche un premier drame irréparable dans
leur histoire d'amour : elle détruit volontairement ou involontairement le masque et le
remplace par son propre masque. Finalement, après la mort de Bérénice, elle sera
remplacée par son vrai masque mortuaire, réalisant ainsi à la lettre la mort que Aurélien a
poursuivie sans relâche à travers le masque de l'Inconnue de la Seine. « Le masque blanc,
mortuaire, ce rappel funèbre de l'amour... » (P : 424). La présence du masque blanc
mortuaire dans le roman d'Aurélien souligne l'obsession de la mort qui imprègne l'état
d'esprit du personnage. Le masque symbolise la confrontation d'Aurélien avec sa propre
mortalité et sa fascination pour la fin inéluctable de toute chose, y compris de l'amour.
L’obsession de la mort peut être interprétée comme une manifestation de la mélancolie et
du désespoir d'Aurélien face aux épreuves de la vie. Il est hanté par la notion de la fin et par
la réalité de la mort qui plane au-dessus de lui, influençant ainsi sa perception des relations
et de l'amour. Le masque blanc, en tant qu'objet funéraire, renforce cette obsession en
représentant la présence constante de la mort dans la vie d'Aurélien. Il agit comme un
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rappel tangible de la fragilité de l'existence et de la temporalité des expériences humaines, y
compris des relations amoureuses. La fascination d'Aurélien pour le masque mortuaire peut
également refléter sa recherche de sens et de compréhension dans un monde chaotique et
éphémère. Il est en quête de réponses sur la nature de la vie et de la mort, sur le sens de son
existence et sur la valeur de l'amour face à l'inéluctabilité de la disparition. Ainsi, la présence
du masque blanc mortuaire dans le roman d'Aurélien met en évidence l'obsession de la mort
qui teinte son état d'esprit, sa vision du monde et sa perception des relations humaines.
C'est un symbole puissant qui renforce le caractère tragique de l'histoire et la nature
éphémère de l'amour dans un contexte de désespoir et d'échec.

Pour conclure, Le roman d'Aragon "Aurélien" traite de l'intrigue romantique, de l'intrigue

sociale et politique ainsi que de l'intrigue poétique et symbolique de manière complexe et
profonde. L'amour s'y manifeste comme une quête d'absolu, mais aussi comme un
sentiment complexe mêlant éclat et absence. Les personnages font face à des obstacles et
des tensions qui rendent leur amour illusoire et inaccessible. La jalousie, la passion de la
jalousie et le désespoir de l'amour jouent un rôle central dans le développement des
intrigues amoureuses.

Parallèlement, les intrigues sociales et politiques mettent en lumière les tensions et les
conflits de l'époque. Différentes classes sociales s'opposent et les aspirations individuelles se
heurtent aux réalités sociales et politiques. Le progrès social et la recherche de stabilité sont
des thèmes importants du roman, illustrant les compromis auxquels sont confrontés les
personnages.

L'échec et la défaite sont des éléments omniprésents dans l'intrigue symbolique du roman.
Les personnages sont confrontés aux épreuves de la guerre et aux conflits familiaux, ce qui
met en évidence les conséquences dévastatrices de ces événements sur leur vie et leurs
relations.

Dans l'ensemble, "Aurélien" est un roman qui explore les complexités des relations
amoureuses et les tensions sociales et politiques de l'époque. Il soulève des questions sur
l'amour, la quête d'absolu, les aspirations individuelles et les compromis nécessaires dans
une société en mutation. L'écriture raffinée et réaliste d'Aragon donne vie à ces thèmes,
offrant aux lecteurs une réflexion profonde sur la condition humaine.
Leçon littéraire :
Les intrigues dans le roman d’Aragon, « Aurélien »