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Apokalypse et handicap, ou comment devenir dépressif

en quelques lignes.
… mon rêve était des plus agréables : nous étions en train de nous marier, ma
compagne et moi, quand l’enfer se déchaîna. Je venais de lui passer la bague au
doigt et je m’apprêtai à l’embrasser quand soudainement une vive lueur rouge
apparut, et un mur de flammes s’abattit dans la salle. Un mur de flammes ayant
la forme d’une tête démoniaque…
C’est à ce moment-là que je me suis réveillé, couvert de sueur et tremblant de
fièvre, en train de hurler et de me tordre de douleur dans mon lit, comme si mon
corps était devenu fou. Comme si l’incroyable machinerie qui le faisait
fonctionner peinait à fonctionner, comme si mon corps allait mourir. Ma
compagne, couchée à mes côtés, subissait la même torture que moi.
Cette souffrance ne dura que quelques minutes, mais j’eu l’impression de vivre
une éternité en Enfer sous les coups des suppôts de Satan, plongé dans une
sorte de coma qui nous déconnectait de la réalité mais qui nous laissait tout de
même percevoir la douleur. J’eu quelques moments de lucidité pendant lesquels
j’entendis mes voisins hurler de la même manière que nous… Et si j’avais été
Dieu, j’aurai entendu toute l’Humanité hurler de douleur…

Il y eut un énorme rugissement puis la douleur s’arrêta brusquement, nous


laissant affaler sur nos matelas et perclus de douleurs, comme après une journée
particulièrement sportive. Il nous fallu dix bonnes minutes pour que la douleur
dans notre corps se calme, et que nous puissions nous lever afin de nous habiller
–sommairement- et sortir dans la rue…
Il est étrange de voir que les Humains ne sont pas si différents que ça les uns des
autres… Tout le monde, sans exception, sortit dans la rue pour voir ce qui se
passait… Et bien ils ne furent pas déçus, ce furent sûrement les meilleurs effets
spéciaux qu’ils virent de leurs misérables vies...
Une gigantesque tornade rougeâtre s’élevait dans le ciel à quelques dizaines de
kilomètres de là où nous nous étions réunis, une tornade remplie d’éclairs et dont
plusieurs « filaments » de plusieurs kilomètres de diamètre partaient. Bien que le
jour ne se soit pas encore levé, nous pouvions voir que le ciel était rempli de
nuages noirs comme le charbon, et nous sentions que quelque chose volait dans
notre ciel, et que cela n’était pas seul…

Malheureusement pour nous, tout cela était réel, et nous fûmes violement
ramené à la réalité. Un cri strident retentit, jetant la panique au sein de notre
groupe et en clouant certains au sol. Les créatures que nous avions senties dans
le ciel, se mirent alors à nous tomber dessus, enlevant certains d’entre nous dans
les airs dans des cris de terreur, en clouant d’autres sur le sol avant de les
déchiqueter ou bien en les propulsant loin dans les airs… Les manières dont ces
rejetons de l’Enfer nous massacrèrent étaient bien trop nombreuses et horribles
pour que je puisse vous en faire une liste complète… De toute manière, je ne me
souviens de pas grand-chose…
Je fis parti de la catégorie des gens cloués au sol par le cri : celui-ci retentissait
dans mon crâne, le mettant à mal et me déchirant les tympans. A genoux en
plein milieu de la rue, je me tenais la tête en hurlant à m’en écorcher la gorge, ne
pouvant absolument plus faire le moindre geste. Je priai pour que tout cela
s’arrête, pour que la douleur cesse, pour que quelqu’un me tue…
Quelque chose vint alors se loger dans ma gorge. Un moucheron sans doute,
perturbé par ce qui passait au dehors. Toutefois, il vint se loger au fond de ma
gorge et me fit m’étouffer. Cela fit trop pour mon corps, qui s’écroula sans
connaissance sur le goudron alors que le monde autour de moi s’effondrait
aussi…

Je repris connaissance plusieurs heures après. Le jour s’était levé depuis


quelques heures déjà, et le spectacle de la rue ravagée et parsemée de cadavres
pas toujours entiers –la rue qui m’avait vue grandir et devenir l’homme que
j’étais- était encore plus terrorisant qu’en pleine nuit…
Je me trouvais adossé au mur de ce qui était encore il y a quelques heures, la
devanture d’un magasin de chocolat –très bon d’ailleurs. Ma compagne se
trouvait à côté de moi, m’essuyant du mieux qu’elle pouvait le sang sur mon
visage et tentant de panser mes blessures. Elle-même n’était pas dans un
meilleur état, mais je n’étais pas en mesure de bouger pour le moment… Bien
que mentalement exténué, je vis tout de suite que quelque chose n’allait pas,
mais je ne pu trouver quoi, mon cerveau ne pouvant fournir un tel effort.
Dommage car cela aurait sauvé des vies…
Ma compagne s’éloigna pour aller fouiller la vitrine d’un magasin situé de l’autre
côté de la rue, alors que je tentais de récupérer quelques forces pour pouvoir me
lever et penser. C’est alors que j’aperçus une créature démoniaque marcher sur
la façade de l’immeuble abritant le magasin. En plein sur ma compagne…
A présent complètement conscient –mais pas encore capable de bouger- grâce à
l’adrénaline, je me mis à crier un avertissement pour ma compagne. Elle ne
remarqua même pas que j’avais parlé. Pensant ne pas avoir crié assez fort,
j’hurlais aussi fort que plus tôt, alors que je soufrai dans mon lit. Toujours aucune
réaction… Continuant de crier, je tentais d’attirer son attention par des gestes,
mais rien que je ne pu faire ne fonctionna …
La créature arriva et se jeta sur elle, devant mes yeux impuissants. Cette
engeance du mal la déchira, mais –et sur le moment, je ne m’en aperçus pas- je
n’entendis aucun cri. Je ne vis que son corps être réduit à l’état de lambeaux
sanguinolent avant d’être mâché et avalé. Puis la créature dirigea son regard
vers moi, et un sourire malfaisant apparut sur ses lèvres. Ma compagne était
morte à cause de moi, à cause de mon impuissance. La créature se rapprocha de
moi à pas lents. Elle était morte par ma faute. Comme un prédateur sadique qui
s’amuse avec sa proie avant de la mettre à mort. Je n’avais pu la sauver. Je ne
pouvais plus détourner mon regard de ses restes. Et je ne pensais même pas à
m’enfuir, inconscient du danger qui me guettait. La seule chose à laquelle je
pensais était que j’avais perdu ma moitié… Et qu’elle était morte par ma faute.

Alors que la créature allait me donner le coup de grâce, il y eut un éclat de sang
et elle s’écroula lourdement au sol. Des gens accouraient tout autour de moi pour
m’aider et sécuriser le périmètre. Complètement déconnecté de la réalité, je les
vis me parler, tenter de communiquer avec moi. Mais pourquoi faisait-il cela,
n’avait-t-il pas compris que tout était vain ? Pourquoi m’avait-il sauvé de cette
créature ? Nous allons tous périr, l’Humanité va disparaître, alors autant ne pas
souffrir plus que mesure. J’aurai disparu comme ma compagne, décoré par une
quelconque créature, mes restes pourrissant à l’air libre et mes os nettoyés par
les charognards…
Tout ces gens n’avaient-ils pas encore compris que nous n’avions aucune
chance ? A quoi pourrai-je servir dans ce monde ? Sans ma compagne, sans
pouvoir parler, ni entendre –car à présent, je savais pourquoi je n’avais pu la
sauver… Mes cordes vocales et mes oreilles venaient de me lâcher…-, je n’étais à
présent qu’un fardeau inutile, un sac à viande inutile et tout juste bon à attirer les
ennuis.
Après avoir essayé pendant un certain temps de communiquer avec moi, les
gens abandonnèrent et me mirent debout. On m’expliqua par geste que je devais
les suivre, qu’ils allaient se réfugier dans un endroit sûr, que seul je n’étais pas
en sécurité… Ces idées me firent sourire, tellement elles étaient fausses… Il est
drôle de voir comment l’Homme peut s’accrocher à une utopie, même quand la
vérité est évidente et sous ses yeux.
On me donna une arme à feu chargée et on me fit signe de venir avec le gros de
la troupe. Cette arme était mon salut, ma délivrance. Ma décision fut prise en un
quart de seconde.

Je pointais le canon vers mon visage et pressais la détente. La balle quitta le


canon de l’arme et vint se loger dans mon crâne. Un coup parfait, qui me tua
quasiment instantanément. Alors que je m’effondrais par terre, les autres
accoururent tout autour de moi, pour essayer de me sauver.
Alors que je sentais une partie de moi s’élever dans les airs, j’eus la certitude que
je me dirigeais vers un monde meilleur, que j’allais rejoindre ma compagne. Que
je quittais un monde de douleur et de déception, le monde dans lequel j’avais
vécu pendant de si nombreuses années… Je n’eus aucun regret à partir, laissant
derrière moi ce groupe de gens qui m’avait sauvé, et qui m’avait tué en même
temps…

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