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La protéinurie est l'anomalie urinaire la plus fréquente au cours des maladies rénales.
Mécanisme : les protéines retrouvées dans les urines ont avant tout une origine plasmatique,
mettant en jeu la filtration glomérulaire puis la réabsorption tubulaire.
Le passage sélectif des molécules protéiques dépend des 3 facteurs qui déterminent la
perméabilité de la paroi capillaire
la taille des molécules ( restriction de taille), c'est à dire leur poids moléculaire
et leur encombrement stérique, dont le passage se fait au niveau de la
membrane basale glomérulaire et de la membrane de filtration épithéliale.Les
protéines dont le poids moléculaire est égal ou supérieur à 70.000 ne passent
pas dans l'ultrafiltrat : l'hémoglobine (P.M. 68.000) passe, alors que l'albumine
(P.M. 70.000) ne passe pas dans les conditions normales. Celles dont la taille
est supérieure à 42 Å ne passent pas (albumine = 36Å).
la charge électrique (restriction de charge) des protéines : les constituants de la
paroi capillaire ont une nature polyanionique électronégative, qu'il s'agisse de
la membrane basale elle-même ou des mucoprotéines qui recouvrent les
cellules épithéliales ou endothéliales. Cette électronégativité va s'opposer au
passage des protéines, en particulier de l'albumine, également négative.A poids
moléculaire identique, le passage d'une molécule cationique est plus important
que celui d'une molécule neutre; par exemple le passage l'IgG plasmatique, qui
est neutre ou cationique, n'est pas limité par sa charge.
l'hémodynamique intrarénale : la filtration glomérulaire dépend du débit
sanguin rénal, de la pression hydrostatique dans le capillaire (variant avec la
pression artérielle et la vasomotricité dans les artérioles afférente et efférente),
de la pression oncotique du plasma qui dépend de la concentration en protéines
, enfin du coefficient d'ultrafiltration de la paroi capillaire. Le ralentissement
du sang dans les capillaires ou une brusque diminution de la filtration
glomérulaire favorisent la diffusion des protéines
Réabsorption tubulaire : la plus grande partie des protéines qui franchissent la barrière
glomérulaire va être réabsorbée au niveau du tube proximal, avec probablement endocytose
puis dégradation lysosomiale. Les produits de dégradation sont libérés dans les capillaires et
dans l'interstitium : il est possible qu'ils jouent un rôle dans les lésions interstitielles des
glomérulonéphrites avec protéinurie importante. Cette réabsorption est peu sélective et l'urine
finale a à peu près la même composition protéique que l'ultra-filtrat glomérulaire.
Le dosage de la protéinurie doit être effectué sur les urines de 24 heures. La technique de
précipitation par l'acide sulfosalicylique et mesure néphélémétrique prend en compte toutes
les classes de protéines, et permet d'évaluer leur débit exprimé en g/24h, mg/min, ou mg/mol
de créatinine pour limiter les erreurs dues aux variations de concentration des urines. Le
dosage de la protéinurie est un paramètre important pour le pronostic de certaines
glomérulopathies, celles avec protéinurie abondante de type néphrotique, > 10 gr/24 h, étant
en général de moins bon pronostic.
L'analyse qualitative de la protéinurie est interessante, car la nature de protéines urinaires est
un bon reflet du type de lésion rénale. Les différentes techniques d'électrophorèse permettront
d'identifier les protéinuries glomérulaires sélectives (>80% d'albumine) ou non sélectives
(albumine < 80% + globulines), les tracés tubulaires ( cf. plus loin)), le pic étroit des
fragments d'immunoglobulines et chaines légères monoclonales des dysglobulinémies.
Le rythme d'élimination de la protéinurie doit être précisé : alors que les protéinuries
permanentes ont une signification pathologique, une protéinurie intermittente, notée à un
examen et non retrouvée ultérieurement, est en général en rapport avec un trouble fonctionnel
d'origine hémodynamique et de pronostic bénin.
ORIGINE PLASMATIQUE
1. Protéinurie physiologique
2. Protinurie hémodynamique
3. Protéinurie glomérulaire
4. Protéinurie tubulaire
5. Protéinurie par surcharge
ORIGINE TISSULAIRE
Protéinurie physiologique : chez le sujet normal, l'urine définitive comprend une faible
quantité de protéines : 80 ±25 mg/24h. Cette protéinurie "physiologique" est composée pour
60% de protéines d'origne plasmatique (protéinurie non sélective avec à côté de l'albumine
des globulines, IgG, IgA, IgD, chaines légères libres d'immunoglubulines, fragments Fc de
chaines lourdes d'IgG, beta2- et alpha2- microglobulines,transferrine) et pour 40% de
protéines d'origine rénale locale (protéine tubulaire de Tamm-Horsfall) ou uro-génitale (IgA
sécrétoire de l'urètre, déchets tissulaires du tractus uro-génital). Cette protéinurie
physiologique n'est pas détectée par les techniques usuelles d'étude de la protéinurie : toute
protéinurie dépistée doit être considérée comme une anomalie qu'il importe d'évaluer
complètement.
Mais c'est surtout le cas de la protéinurie orthostatique, survenant chez 2 à 5% des adolescents
, surtout longilignes, à croissance rapide. Absente dans l'échantillon d'urines prélevées le
matin au réveil, elle est présente en postion debout, de type non sélectif; son taux est en
général < 1 gr/24h; elle est intermittente dans 80% des cas, mais peut être permanente pendant
plusieurs mois, voire années. Pour retenir le diagnostic, elle doit être isolée : pas d'antécédents
uro-néphrologiques personnels ou familiaux, pas d'autre anomalie biologique; une exploration
radiologique est en général considérée comme inutile. Le pronostic est en effet bénin, la
protéinurie disparaissant progressivement une fois le développement pondérostatural terminé.
Un suivi au long cours a montré que cette protéinurie était toujours présente chez 50% des
sujets 10 ans après la première constatation, chez 17% à la vingtième année.Pour certains
auterus, la protéinurie orthostatique serait en rapport avec de très discrètes lésions
glomérulaires; pour la majorité, elle serait la conséquence de troubles hémodynamiques
entrainés par une plicature d'une veine rénale ou la compression entre aorte et artère
mésentérique supérieure.
soit à une diminution de la barrière due aux charges électronégatives, avec passage
sélectif d'albumine : la cellule épithéliale du capillaire serait altérée, avec diminution
de la synthèse du recouvrement polyanionique; la sélectivité due à la taille des
molécules est à peu près préservée. C'est le cas du syndrome néphrotique à lésions
glomérulaires minimes.C'est également le cas des syndromes néphrotiques
congénitaux, où il existerait une anomalie génétique à l'origine d'une synthèse
anormale en protéoglycans anioniques.
soit à une diminution de la barrière règlant le passage des molécules selon leur taille :
des lésions structurelles de la paroi avec de larges pores ou cavités dans la paroi
permettent le passage non sélectif de protéines de grande taille, comme l'IgG.Le rôle
des antigènes, anticorps et complexes immuns circulants cationiques est alors
important, venant se fixer aux sites anioniques de la paroi.
Protéinurie tubulaire : les protéines de faible poids moléculaire, en général < 30.000, sont
filtrées par le glomérule et sont réabsorbées en presque totalité par le tube proximal. En cas
d'atteinte tubulaire, ces protéines, qui ne sont pas décelées par les bandelettes colorées, sont
nettement décelées sur les tracés électrophorétiques : post-gammaglobulines, ß2-
microglobuline, retinol-binding-protein, chaines légères d'immunoglobulines. L'association
des ces protéines tubulaires avec de l'albumine, réalisant un type mixte, peut être due à la
présence de lésions glomérulaires associées ( néphropathies tubulointerstitielles, rejet de
greffe).
Protéinurie de surcharge : les reins sont normaux, mais les tubes ne peuvent plus réabsorber
les protéines de faible poids moléculaire présentes en grande quantité dans le plasma et qui
ont été normalement filtrées par les glomérules : hémoglobinurie en cas d'hémolyse,
myoglobinurie en cas de rhabdomyolyses , surtout la protéinurie du myélome. Dans ce dernier
cas, les chaines légères d'immunoglobulines kappa et lambda excèdent la capacité de
réabsorption des tubes; elles ont également une toxicité tubulaire, favorisant la diminution de
la réabsorption.Une lysozymurie, qui peut être détectée par les bandelettes colorées, est notée
en cas de leucémie aigue monocytaire ou myélocytaire.