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Outiller pour des communications égalitaires, pour que chacun puisse occuper
une place sociale et professionnelle selon les différents moments des contacts
(stage en alternance, recrutement éventuel, relations au sein de l’entreprise)
devient donc un objectif pédagogique au même titre que les objectifs
techniques rattachés à l’apprentissage d’un métier.
L'expérimentation
- Objectifs
- Modalités
Mise en œuvre
L'équipe du XXX(1) a proposé des alternances entre formation des apprentis et
rencontres avec les enseignants pour, d'une part, prolonger la réflexion
pédagogique et aménager les temps d'intervention en fonction des contraintes
professionnelles des apprentis et, d'autre part, adapter le traitement des
contenus en fonction des problématiques ayant émergé lors des échanges.
Evaluation interne
L'évaluation s’est faite, dans un premier temps, à la fin de chaque séance sous
la forme d'un tour de table visant à faire le point sur ce qui a été appris,
compris, élucidé, interrogé. Un compte-rendu de séance a été établi après
chaque intervention, ainsi que des réunions régulières avec l'équipe
pédagogiques du CFA.
Evaluation externe
Un cabinet expert est chargé d'évaluer l'impact de l'action dans le but de
mesurer en quoi cette démarche contribue aux changement de regards dans
les espaces de formation et d'insertion.
Le débat qui a suivi le jeu a fait émerger une réflexion sur les rapports
égalitaires suscités par les règles du jeu de Distinction : respect du temps de
parole et du rôle de l'arbitre, place de chacun des joueurs, question du choix
d'une réponse pouvant éventuellement provoquer des réactions négatives,
écoute indifférenciée, etc. De plus, confrontés à des difficultés à argumenter ou
à gérer leurs émotions, certains joueurs se sont réfugiés dans des propos
circulant au quotidien entre eux. Par exemple, pour exprimer son désaccord
avec un ami dans un situation imaginaire, un jeune évite une réponse : « Si on
me parle mal, je cogne.... », « je lui mets un balle dans la tête, c'est pas
possible ! ». Ceci a permis à l'intervenant de réfléchir ensuite à la façon
d'outiller les étudiants pour produire du discours élaboré.
Les jeunes apprentis ont poursuivi la discussion et une jeune femme a énoncé
que « si la discrimination est souvent associée à l'origine, l'exclusion de l'autre
peut aussi se manifester à travers d'autres critères ». Cette réflexion a amené
les participants à contextualiser la thématique des discriminations en relation
avec la sphère politique mais leurs échanges ont évolué vers une prise de
conscience en fin de séance : « Nous pouvons tous être discriminants ».
- Séances suivantes
A partir des objectifs définis lors des réunions de préparation d'une part et des
constats issus de la première séance d'autre part, les contenus ont été abordés
à travers les fiches pédagogiques du Guide Plus d'égalité dans la diversité, un
défi pour la formation (voir schéma 2).
Nous avons ensuite demandé au groupe ce qui, d'après eux, avait changé
depuis la première séance cinq mois auparavant :
- « on se connait mieux, c'est plus facile de discuter ensemble »
- « on est mieux préparé à ce que l'autre ne soit pas forcément d'accord
avec vous »
- « on est capable d'entendre des points de vue différent »
En mai 2008, à la question : « Selon vous, quels changements ont été observés
dans le groupe d'apprentis concernés par la formation ? », l'enseignant a
répondu : « Une plus grande tolérance et moins d'ostracisme, l'entraide et les
échanges sont plus courants ».
La même question posée aux apprentis en fin d'année recueille les réponses
suivantes :
Nicolas : « J'ai appris qu'on pouvait ne pas juger selon les différences, j'ai
réfléchi à ça »
Trézo : « Moi aussi, j'ai compris que les différences, ça permet de savoir plus
de choses sur les autres et de ne pas trop les juger même si on n'est pas
d'accord »
Janine : « J'ai appris une autre vision de la discrimination, que ce n'est pas
forcément négatif, par exemple si je regarde un handicapé dans la rue, ça veut
pas dire que je le respecte pas ou que j'ai pitié, je le regarde c'est tout, comme
quelqu'un d'autre »
Samantha : « Moi, j'ai compris que si on évite de juger les autres, ça peut
éviter les conflits, on vit plus en paix quand on ne juge pas »
Nicolas ajoute que le fait d'avoir joué à Distinction en début d'année, lorsqu'ils
ne se connaissaient presque pas, les a beaucoup rapprochés et que c'était plus
facile après de travailler ensemble, ce qui est confirmé par l'ensemble des
participants.
Synthèse
Tout au long des séances de formation , les questions en lien avec la
discrimination liée au racisme, à l'égalité hommes-femmes ou au handicap ont
fait l'objet d'un traitement spécifique et ont permis de s'interroger, d'analyser
et de décrypter certains concepts, d'envisager de nouvelles façons de
communiquer, de témoigner collectivement de la progression des réflexions.
Cependant, des problématiques nouvelles apportées par les apprentis lors des
séances ont interrogé la notion de diversité en dehors des questions liées aux
origines ou à l'égalité garçons/filles. Pour illustrer ce propos, on notera la
réponse d’un enseignant à la question sur les changements attendus par la
formation-action :
- « Pour vous, quels étaient les changements attendus par la mise en
place de modules Égalité dans la diversité ? »
- « La cohésion et l’émulation pour forger un esprit de groupe dans une
section de plusieurs nationalités différentes ».
Cette réponse montre que la diversité est une notion qui véhicule l'idée selon
laquelle elle concerne essentiellement les questions liées aux origines, à la
nationalité, au racisme, à la discrimination... Cette vision peut être réductrice
car elle évacue les autres aspects de la diversité, notamment celui qui prend
en compte l'égalité comme principe et impose l'application des outils
nécessaires à sa mise en œuvre.
Les jeunes apprentis font face à cette situation en développant des stratégies
de repli à l'intérieur du groupe : la classification dichotomique NOUS/EUX étant
alors activée. Les frontières ainsi posées, elles se conçoivent aussi comme
étant « à traverser ». La mise en place de passerelles se fait notamment en
situation de passage du dedans au dehors, dans les va-et-vient entre CFA et
lieu de travail mais aussi lors des échanges dans les groupes de travail
« Autour de l'égalité... », dans les groupes théâtre proposé par leur enseignant,
où se donnent à voir stéréotypes et représentations auxquels ils font face,
desquels ils sont acteurs.
Si ces espaces ont existé, dans le cas de cette expérimentation, comme un lieu
de « réparation », ce n'était pas l'objectif initialement visé. Ce glissement vers
un objectif redéfini en fonction de la progression des travaux menés dans le
groupe permet d'avancer l'hypothèse que seul un travail conjoint des équipes
et de l'institution encadrant l'action de formation en garantit l'efficacité.