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Le scénario
Cette scission de la profession fait suite à l’annonce de la fermeture du site du Nouvel Ex,
le titre issu de la fusion des deux principaux news en 2014. En revanche, Le Parisien, qui
avait conservé une version papier, continuera à paraître sous forme de lettre
confidentielle en papier pour ses lecteurs âgés, cultivés et aisés. La Lettre du Grand
Paradoxalement, les ancêtres payants sans web et sans pub (Le Canard enchaîné ,
Charlie-Hebdo) ont brillamment survécu. Et une poignée de groupes cartonnent encore
avec, à leur tête, le pôle BFM d’Alain Weil qui a imposé le modèle du journaliste
quadrimédia (papier, web, radio, TV). Grâce à sa une renouvelée en permanence sur ses
supports numériques dont le fameux PaperPhone d’Apple, Citizen Weil a rentabilisé ses
journalistes en réinventant l’économie d’échelle.
Certes, les derniers groupes médias ne touchent qu’une cible restreinte encore
intéressée par l’info. Mais une cible qui a le pouvoir et l’argent. On paye donc encore cher
les emplacements publicitaires dans ces environnements. Et tant pis si 95 % du magot
publicitaire se retrouve dans les mouvances de la principale régie planétaire, Goosoft
dont les sites satellites n’emploient aucun journaliste…
Article
RENDEZ-VOUS
"La dilution des propagateurs : quelle est la valeur de l'opinion dans un monde sans
journalistes", une agora organisée le 21 mai par Newzy, Syntec conseils RP et le Celsa
Université Paris-Sorbonne.
Contact : juline.benatar@groupement-syntec.org
À lire :
Le site des assises du journalisme, Journalisme.com
La masse du user generated content (le contenu fabriqué par les internautes) crée sa
richesse. C’est l’effet longue traîne : 1000 petits sites propagateurs d’infos à 1000
visiteurs uniques chacun valent dix fois plus que dix sites d’infos à un million de lecteurs.
Sur Dailymotion , les utilisateurs produisent 96 % des vidéos vues. Même si vous vous
appelez TF1, allez vous battre contre ça.
Certes, les optimistes du deuzéro affirment qu’on aura toujours besoin de journalistes
pour hiérarchiser l’info. À condition que le bon peuple ait envie qu’on hiérarchise à sa
place ! Ecoutons plutôt le consultant presse Francis Lambert : « J’ai vu, dans des focus
groups de lecteurs, naître une nouvelle génération capable de construire un
raisonnement en hypertexte. Sur le web, ils hiérarchisent leur info. Ils n’ont besoin ni de
journaux ni de journalistes pour cela. Aujourd’hui, les journalistes sont en compétition
avec leurs lecteurs ! » Avec ironie, le consultant médias Laurent Durgeat résume ce
paradoxe qu’on pourrait appeler « le lecteur m’a tuer » : « Vous avez bien alphabétisé les
gens qui n’ont plus besoin de vous pour cimenter leur pensée. » Nous voilà consolés !
Les tenants du néojournalisme expliquent malgré tout que tout cela n’est pas très grave
et que le métier va survivre car les journalistes collaboreront avec ces contributeurs
gratuits. Gratuits jusqu’à quand ? Sur un même site, les articles « sérieux »de journalistes
font souvent beaucoup moins de clics qu’un internaute déconneur ou une vidéo gratos de
Paris Hilton seins nus...
Non seulement l’information est produite par des amateurs, mais elle attire moins les
annonceurs.« Pour la première fois depuis l’apparition des mass media au XIXe siècle, la
publicité, source principale de revenus pour la presse imprimée, pourrait bientôt se
passer de l‘information pour véhiculer ses messages », écrivent Vincent Giret et Bernard
Poulet dans la revue Le Débat (2).
Les ventes ne prenant pas le relais de cette chute, on assiste aux premières fêlures chez
les enfants gâtés de la presse. Pour la première fois, ces derniers mois, les journalistes
du Point , de L’Express et de Prisma ont fait grève pour leurs salaires. Cette évaporation
des revenus pubs, c’est le nœud du drame des journalistes. Ils ignorent le plus souvent
ce qu’ils valent et bien peu connaissent les subtilités du CPM (coût pour 1000). Un
journaliste qui écrit une page pour un magazine papier vaut encore cher. Celle que vous
êtes en train de lire est imprimée à 250 000 exemplaires et vue par deux à trois fois plus
de lecteurs. Les commerciaux vendent les emplacements autour de ma prose à environ
100 euros les 1000 exemplaires, c’est le CPM (élevé) de Newzy qui correspond à son
lectorat de cadres sup. Sur le Net, je vaux déjà trois fois moins cher (j’ai un CPM de 30
euros). Et encore, toujours grâce à mon visitorat CSP+, je ne suis pas complètement
bradé. Sur les sites d’info continue, les CPM tournent autour de 5 euros… À ce tarif, on
peut nourrir un journaliste si sa page est vue 100 000 fois ! Mais pour faire un tel score
sur le Net, il a intérêt à filmer Paris Hilton sans string. « Les médias n’ont pas tenu leurs
tarifs en France et ont accepté des conditions qui ne peuvent pas faire vivre leurs
journalistes », explique Emmanuel Parody, publisher chez Cnet (4).
Pour être rentable, le « journaliste » doit mettre en forme, agréger ou modérer des
contenus gratuits. Sur aufeminin.com par exemple, on trouve 6 428 684 messages (27
février à 09h55) sur le forum « Attendre un bébé » ! Ce sont six millions de pages
produites gratuitement : Internet a inventé le consommateur-producteur gratuit et heureux
de l’être.
Bien sûr, il reste encore quelques « rédacteurs ». Mais à quoi servent-ils ? Des sites
d’informations comme Boursorama ou le Journal du net , ce sont d’abord des produits
d’appels pour vendre des services bancaires chez l’un ou des formations chez l’autre
(Benchmark Group). D’ailleurs, même s’ils font bien leur job, les journalistes de ces sites
n’ont pas de carte de presse. C’est ce que Vincent Giret et Bernard Poulet (2) appellent
le journalisme tête de gondole. D’essentiel, le journaliste devient accessoire…
Bien sûr il restera des niches. Et quelques vedettes sauront vivre de leur notoriété. «
Certains journalistes sont devenus des marques », souligne Philippe Cohen. Le pugnace
Jean-Michel Apathie et son accent pittoresque est le symbole de ces nouvelles stars
radiotéléblogueuses. Mais pour une vedette combien de galériens ? Les médias
s’inspirent du modèle social de l’édition. Des dizaines d’éditeurs se payent sur la bête…
Bien sûr, affirment de nombreux acteurs du web, il y a un plan B. « Les bons journaux et
les bons journalistes survivront », tance Christophe Agnus qui dirige le pôle « digital »
chez Mondadori. On n’est pas obligé de le croire. Mais on doit l’écouter, lui et les tenants
d’une mutation heureuse.
(1) Notre métier a mal tourné, par Philippe Cohen et Élisabeth Lévy, 19 ?, Éditions Mille
et Une Nuits.
(2) La fin des journaux, par Vincent Giret et Bernard Poulet, n°148, janvier-février 2008,
de la revue Le Débat, 16,50 ?.
(3) New Media, New Journalism ?, étude de l’Observatoire mondial des médias de l’AFP.
à lire sur www.mediawatch.afp.com
(4) Voir son blog. http://ecosphere.wordpress.com/
À lire :
Le site des assises du journalisme
Journalisme.com
Bien. Il restera des journalistes en 2020. La question est de savoir combien, pour
quel métier et dans quels « supports ». Pour cela, il faut observer les labos de R&D
des marques médias qui cherchent à réinventer de nouveaux modèles
économiques. « Nous sommes en train d’assister à la dégénérescence d’anciens
modèles industriels et à la naissance d’autres », résume Emmanuel Parody, du
groupe CNET Networks . Newzy fait partie de ces exploreurs avec un mensuel
papier gratuit dont la diffusion est ultra-ciblée, des magazines payants thématiques
et deux sites web, l’un où les journalistes côtoient les contributeurs (newzy.fr) et
l’autre plus axé sur les services (newzy executive ). Mais de vénérables institutions
sont aussi à la pointe dans ce domaine, comme l’AFP dont la vision mondiale
permet de tester
différents contenus et contenants sur tous les continents.
La réponse est toujours oui pour Emmanuel Parody. L’homme qui dirige le pôle
Business-News du groupe CNET Networks France prend ses propres sites comme
exemple. « Nous n’avons jamais tenté de faire du clic avec Britney Spears sur ZDnet
car nous vendons une audience cohérente, un support crédible. Avec nous, les
annonceurs touchent les bonnes personnes. » Résultat : «Nous faisons partie des deux
ou trois rédactions qui ont un CPM beaucoup plus cher que les autres sur le Net. »
Mais le modèle économique de CNET, c’est aussi la mutualisation de contenus par des
rédactions situées en Australie, en Corée, à Taiwan et en Allemagne. Un modèle
économique valable sur un secteur comme les nouvelles technos.
Ailleurs, on cherche encore. Et l’achat récent de sites comme aufeminin par Springer ou
doctissimo par Lagardère sonne comme un aveu. Les groupes payent très cher des sites
où les journalistes ont une présence anecdotique.
La qualité n’est pas toujours une qualité dans le nouveau monde des médias. Alors, il
faut inventer d’autres modèles.
Fuel a d’autres projets interactifs dans ces cartons. Et l’AFP a plus d’une filiale dans son
sac. Au Japon sur afpbb.com , un site créé en partenariat avec la Soft Bank, l’AFP ne
propose que des photos. Les sites 100 % visuels sont unes des pistes prometteuses
pour la presse ; ainsi www.tenbyten.org raconte l’info autrement en cent mots et cent
photos. En France, des projets encore plus spectaculaires sont en préparation.
Il n’est peut-être pas trop tard. Tout le monde ne se fait pas doubler par les pure players.
Avec les téléchargements, 01net a su renouveler le 01 papier. En Allemagne, le site du
Bild ne se contente pas de mettre en ligne le making of des séances photos de ses
fameuses gretchen en une, c’est aussi un véritable hypermarché en ligne.
(5) Voir son blog : http://blog.ronez.net et aussi les projections des étudiants du mastère
sur les médias en 2028 sur http://medias2028.cupoftea.fr/
(6) À écouter en podcast sur http://atelier.ning.com
Tony Kuttner est éditeur chez Fuel, la R&D de l’AFP à San Francisco.
Votre widget en anglais, Deadline, fait un tabac sur Facebook. Quelle est l'idée,
convertir les digital natives à l’info ?
Tony Kuttner : En partie, comme vous le dites, nous espérons amener les digital
natives à s'intéresser à l'actualité. Je crois que les jeux sont une excellente manière d'y
À lire :
Le site des assises du journalisme
Journalisme.com