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Aix Marseille Université

Institut de Management Public et Gouvernance Territoriale


École Doctorale d’Économie et de Gestion d’Aix-Marseille
Centre d’Études et de Recherche en Gestion d’Aix-Marseille

Mobilisation collective des professionnels et représentations


sociales de la performance organisationnelle : le cas des
enseignants-chercheurs dans les universités françaises

Thèse présentée et soutenue publiquement


par

Christelle ZELLER

En vue de l’obtention du Doctorat ès Sciences de Gestion

le 7 décembre 2015

Membres du Jury :

Directeur de Thèse : Madame Corinne GRENIER,


Professeur senior, HDR, KEDGE Business School
Chercheure affiliée au CERGAM (IMPGT), Aix-Marseille Université

Rapporteurs : Monsieur Jean-Michel PLANE


Professeur des universités, Université de Montpellier
Madame Véronique CHANUT
Professeur des universités, Université Paris II Panthéon Assas

Suffragant : Monsieur Robert FOUCHET


Professeur des universités, IMPGT, Aix-Marseille Université
L’Université n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans
cette thèse. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur.
À mon fils
Mobilisation collective des professionnels et représentations sociales de la performance
organisationnelle : le cas des enseignants-chercheurs dans les universités françaises
Résumé
La littérature a souligné à quel point la mobilisation collective des professionnels envers la
performance de leur organisation pose question. En effet, les auteurs sont partagés sur la
compatibilité entre engagement envers l’organisation et engagement envers la profession.
Cette thèse cherche à comprendre la mobilisation collective des professionnels envers la
performance de leur organisation, en interrogeant leur représentation sociale de la
performance organisationnelle. Notre étude, de nature qualitative et exploratoire, interroge les
enseignants-chercheurs des universités françaises, confrontées depuis plusieurs années à
d’importantes réformes inspirées du New Public Management. Ces réformes ont mis en place
un management basé sur la performance. Des logiques managériales ont alors pris place aux
cotés des logiques professionnelles préexistantes. Les résultats révèlent que les enseignants-
chercheurs définissent la performance de l’université comme étant les publications
scientifiques et l’insertion professionnelle des étudiants. Face à cette représentation largement
partagée de la performance de l’université, deux groupes s’opposent : un premier groupe,
majoritaire, est favorable au concept de performance, et un deuxième groupe, minoritaire est
défavorable. Dès lors, quatre profils de mobilisation collective émergent des résultats,
révélant ainsi des hybridations identitaires distinctes. Ainsi, l’identité professionnelle des
enseignants-chercheurs évolue. Ils s’identifient davantage à leur établissement et intègrent ses
besoins. Toutefois, des résultats émergents soulignent, d’une part, que ces quatre profils de
mobilisation sont plus ou moins soutenus par une forte motivation au service public. D’autre
part, les profils les plus mobilisés ont un besoin fort de reconnaissance organisationnelle.
Mots-clés : mobilisation collective, représentations sociales, engagement organisationnel,
engagement professionnel, enseignants-chercheurs.
Professional’s collective mobilization and social representations of the organizational
performance: the case of French university’s academics
Abstract
Literature emphasized how much the professional’s collective mobilization towards the
performance of their organization is problematic. In fact, the authors have divided opinions
about the compatibility between the professional commitment and the organizational
commitment. This thesis seeks to understand the professional’s collective mobilization to
their organization performance by asking the social representation of the organizational
performance. Our study of quantitative and exploratory nature question the academics of the
French University who are facing, since previous years, significant reforms inspired from the
New Public management. These reforms implemented a management approach based on the
performance. Therefore, the managerial logics took a place beside the prevailing professional
logics. The results reveal that the academics defined the performance of the university as
being the scientific publications and the student’s integration into the workplace. In the face
of this representation widely shared about the performance of the university, two opposing
groups: the first one, the majority group, is favourable to the concept of the performance, and
the second one, in the minority, is unfavourable. From then on, four different profiles of
collective mobilization emerge from the results, thus, revealing different identity
hybridizations. So, the academics’ professional identity evolves. They identify more to their
institution and integrate its needs. However, the emerging results stress, on one hand, that
these four mobilization profiles are, more and less, supported by a strong Public Service
Motivation. On the other hand, the most mobilized profiles need a high organizational
support.
Keywords: collective mobilization, social representations, organizational commitment,
professional commitment, academics.
Remerciements

Mes remerciements les plus chaleureux vont tout d’abord à ma directrice de recherche,
Corinne Grenier, pour l’orientation qu’elle a donnée à cette recherche doctorale, mais
également pour la patience et la compréhension qu’elle a eues à mon égard tout au long de ces
dernières années.
J’exprime également toute ma gratitude aux professeurs Véronique Chanut et Jean-
Michel Plane, qui ont accepté d’être rapporteurs de cette thèse.
Au professeur Robert Fouchet, grâce à qui j’ai eu la chance d’intégrer la formation
doctorale à l’IMPGT : ainsi, pour son soutien, sa disponibilité, et les précieux conseils qu’il
m’a donnés lors de nos échanges, j’adresse mes sincères remerciements.
Il m’est impossible de ne pas mentionner, ici, les doctorants qui m’ont entourée au
quotidien, et avec qui j’ai partagé des souvenirs inoubliables : Charline, Marc et Johan, sans
oublier Marius, Anne-Gaëlle et Anne, avec qui j’ai noué de réels liens d’amitié. J’adresse des
remerciements particuliers à Émilie, qui a toujours été présente lorsque j’ai eu besoin d’elle.
Et bien sûr, Sarah, qui est avant tout une amie de longue date : avec qui j’ai tout partagé
pendant cette formation doctorale.
J’adresse mes remerciements à tous les membres de l’équipe de recherche, en
particulier Jean-Rodolphe Lopez, Jacques Bourdon, Olivier Keramidas, Christophe Alaux,
Sophie Lamouroux, Émil Turc, Solange Hernandez, Bruno Tiberghien, Khaled Sabouné et
Djelloul Arezki, pour avoir fait évoluer cette recherche grâce à nos échanges. Merci aussi à
l’ensemble du personnel de l’IMPGT.
J’exprime également ma gratitude aux personnes qui ont contribué à faire évoluer cette
recherche, grâce à nos discussions : Véronique Steyer, Bernard Dizambourg et Denis
Abecassis.
Je remercie aussi sincèrement les universités qui ont accepté que cette recherche
doctorale se déroule chez elles. Derrière le terme « université », il y a des hommes et des
femmes, enseignants-chercheurs, enseignants, secrétaires, responsables administratifs… qui
m’ont ouvert leur porte.
Je suis profondément reconnaissante envers ma sœur Alison, sans qui cette thèse
n’aurait jamais pu voir le jour. J’adresse également mes remerciements à mes sœurs Manon et
Moy-lan, pour leur aide dans la rédaction de ce rapport.
À mes amies, Loubna et Chahrazed, pour le temps qu’elles ont passé à relire le
rapport, j’adresse mes sincères remerciements.
Ma reconnaissance va également à mes parents, Ellena et Alain, pour leur soutien sans
faille jusqu’au dernier jour.
Enfin, à Ishak, pour avoir sacrifié tant de week-ends, de soirées et de vacances, pour
avoir tout assumé dans les moments où seule la thèse semblait compter pour moi, dans le seul
but de me voir réaliser ce projet qui me tenait tant à cœur : merci.
Sommaire

INTRODUCTION GÉNÉRALE ....................................................................................................................... 13


1. Contexte ........................................................................................................................................................ 14
2. Définition de la performance ........................................................................................................................ 17
3. Terrain de recherche : les EC au sein des universités françaises confrontées à l’introduction de la notion de
performance organisationnelle .......................................................................................................................... 19
4. Une recherche exploratoire hybride et abductive.......................................................................................... 20
5. Questions de recherche ................................................................................................................................. 21
6. Principaux résultats et pistes futures de recherche ........................................................................................ 22
7. Plan de la thèse ............................................................................................................................................. 23

PREMIÈRE PARTIE : REVUE DE LITTERATURE ................................................................................... 25


CHAPITRE 1 : L’UNIVERSITÉ, UNE ORGANISATION PLURALISTE EN PLEINE MUTATION .... 27
Section 1 : L’autonomie des acteurs professionnels dans un contexte de performance organisationnelle ....... 28
Section 2 : Les modèles de fonctionnement de l’université .............................................................................. 35
Section 3 : Vers une possible réconciliation entre acteurs professionnels et organisations ? ........................... 43
CONCLUSION DU CHAPITRE 1 .................................................................................................................... 46
CHAPITRE 2 : LA MOBILISATION COLLECTIVE DES PROFESSIONNELS, ENTRE
ENGAGEMENT ORGANISATIONNEL ET ENGAGEMENT PROFESSIONNEL .................................. 48
Section 1 : La mobilisation collective : une action collective dirigée vers un objectif partagé ........................ 48
Section 2 : La mobilisation collective : un concept comportemental unique .................................................... 64
Section 3 : Les fondements psychologiques de la mobilisation collective ....................................................... 73
CONCLUSION DU CHAPITRE 2 .................................................................................................................... 80
CHAPITRE 3 : LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES COMME GUIDES DE LA MOBILISATION
COLLECTIVE .................................................................................................................................................... 82
Section 1 : Les représentations sociales : donner une signification à la situation pour savoir comment agir ... 83
Section 2 : Différentes conceptions des phénomènes cognitifs collectifs en organisation ............................... 99
CONCLUSION DU CHAPITRE 3 .................................................................................................................. 107
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE .............................................................................................. 109
PRÉSENTATION DES QUESTIONS DE RECHERCHE ........................................................................... 111

DEUXIÈME PARTIE : CHOIX ÉPISTÉMOLOGIQUES ET MÉTHODOLOGIQUES DE LA


RECHERCHE ................................................................................................................................................... 112
CHAPITRE 4 : PROBLÉMATISATION DE LA RECHERCHE ET FONDEMENT
ÉPISTÉMOLOGIQUE..................................................................................................................................... 114
Section 1 : Problématisation de la recherche .................................................................................................. 115
Section 2 : Inscription paradigmatique de la recherche .................................................................................. 122
Section 3 : Un positionnement épistémologique interprétativiste ................................................................... 125
CHAPITRE 5 : UNE MÉTHODOLOGIE QUALITATIVE FONDÉE SUR L’ÉTUDE DE CAS
MULTIPLES ..................................................................................................................................................... 133
Section 1 : Une étude de cas multiples ........................................................................................................... 133
Section 2 : Méthode d’analyse du matériau recueilli ...................................................................................... 166
CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE .............................................................................................. 182

TROISIÈME PARTIE : RÉSULTATS ET DISCUSSION ........................................................................... 183


CHAPITRE 6 : ANALYSE INTRA-CAS A ................................................................................................... 185
Section 1 : Description de l’Université A ....................................................................................................... 185
Section 2 : Réponses aux QR .......................................................................................................................... 192
Section 3 : Synthèse : Dans quelle mesure la RS de la performance que les professionnels élaborent oriente-t-
elle leur mobilisation collective envers l’organisation ? ................................................................................. 226
CHAPITRE 7 : ANALYSE INTRA-CAS B.................................................................................................... 231
Section 1 : Description de l’Université B ....................................................................................................... 231
Section 2 : Réponses aux QR .......................................................................................................................... 236
Section 3. Synthèse : Dans quelle mesure la RS de la performance que les professionnels élaborent oriente-t-
elle leur mobilisation collective envers l’organisation ? ................................................................................. 260
CHAPITRE 8 : SYNTHÈSE ET TRANSITION VERS LA DISCUSSION ................................................ 264
Section 1 : Comparaison du contexte des deux cas étudiés ............................................................................ 264
Section 2 : Réponses aux QR .......................................................................................................................... 265
Section 3 : Réponse à la problématique .......................................................................................................... 271
CHAPITRE 9 : DISCUSSION ......................................................................................................................... 281
Section 1 : Retour sur le cadre théorique de la recherche ............................................................................... 283
Section 2 : La profession d’EC : entre logique organisationnelle et logique professionnelle ......................... 288
Section 3 : L’hybridation des identités professionnelles................................................................................. 294
Section 4 : Une théorisation du changement (LRU) fondée sur des valeurs publiques encourageant la
mobilisation collective .................................................................................................................................... 296
Section 5 : Gestion des Ressources Humaines et enseignants-chercheurs ? ................................................... 299
CONCLUSION DE LA TROISIÈME PARTIE ............................................................................................. 306

CONCLUSION GÉNÉRALE .......................................................................................................................... 307

Bibliographie....................................................................................................................................................... 314
Table des matières ............................................................................................................................................... 351
Table des tableaux ............................................................................................................................................... 356
Table des figures ................................................................................................................................................. 357
Table des encadrés .............................................................................................................................................. 358
Annexes............................................................................................................................................................... 359
INTRODUCTION GÉNÉRALE

13
1. Contexte

Cette recherche porte sur la mobilisation collective des enseignants-chercheurs (désormais


EC) dans les universités françaises. Le pouvoir politique à la tête de l’État pousse les
établissements d’enseignement supérieur et de recherche à se réformer pour être plus
compétitifs et performants. Pour cela, le courant du New Public Management (désormais
NPM) y introduit des logiques managériales et place la question de la performance des
organisations publiques au centre des réformes. Ce mouvement de réforme tente de les
structurer en organisations avec un pouvoir décisionnel central fort, alors que les universités
sont des organisations pluralistes avec des pouvoirs dispersés. Musselin (2008a) suggère alors
que le NPM pousse les universités à passer du modèle de l'hébergement (pour personnel
hautement qualifié) au modèle de l'employeur. Les universités (tout comme les hôpitaux) sont
des exemples typiques d’organisations publiques et pluralistes (Denis, Langley et Rouleau,
2007), dont la performance repose principalement sur le travail des professionnels1 qui les
composent, parce que les activités de ces derniers constituent le cœur stratégique de
l’organisation (Mintzerg, 2010 ; Solle, 2008 ;). Ces organisations sont donc amenées à
compter sur la mobilisation collective (Tremblay et Wils, 2005) de ces professionnels pour
améliorer leur performance organisationnelle. En effet, la mobilisation collective des
membres de l’organisation est reconnue par la littérature comme étant un puissant facteur de
performance organisationnelle (Podsakoff et Mackenzie, 1994). La mobilisation collective se
définit comme des conduites adoptées collectivement et volontairement par les membres
de l’organisation, orientées vers les priorités organisationnelles (Tremblay, Chênevert,
Simard, Lapalme, et Doucet, 2005).

Néanmoins, les universités sont portées, depuis leur création, par des professionnels
possédant leur propre cadre institutionnel. Ces derniers sont soumis à une autorité basée sur
l’expertise alors qu’une organisation est caractérisée par une autorité fondée sur la position
hiérarchique (Thornton, 1970). Les professionnels ont d’ailleurs manifesté leur opposition aux

1
Les professionnels sont soumis à un autocontrôle par une régulation autonome alors que les autres métiers sont
astreints à un contrôle hétéronome par le marché, les bureaucraties ou l’État (Paradeise, 2008). La gestion des
professionnels en organisation est donc complexe. Parsons (1951) propose trois caractéristiques qui distinguent
les professions des autres métiers : 1) un savoir pratique qui articule une compétence à la fois fondée sur le
savoir théorique acquis pendant une longue formation et sur l’expérience ; 2) une compétence spécialisée qui
s’appuie sur la spécialisation technique de la compétence et qui restreint l’autorité du professionnel au seul
domaine légitime de son activité ; 3) un intérêt détaché qui permet une neutralité affective envers le client.

14
réformes managériales, qu’ils ont accusées de remettre en cause leur autonomie (autonomie
entendue au sens d’une autorégulation par la profession, Paradeise, 2008) et les principes et
valeurs du service public (Bezes et al. 2011). Dans le secteur de la santé, les professionnels
ont lancé en 2009 le Mouvement de défense de l'hôpital public afin de s'opposer à une série de
réformes : le plan Hôpital 2007, la tarification à l'activité (T2A), et la loi Hôpital Patient
Santé Territoires (HPST) du 11 mars 2009 (Bezes et Demazière, 2011). Dans le secteur de
l’enseignement supérieur et la recherche, le collectif Sauvons la recherche (SLR), qui réunit
chercheurs, scientifiques et littéraires se mobilise depuis 2003 pour s'opposer à la loi
d'orientation et de programmation pour la recherche et l'innovation. Dès lors, la mobilisation
collective des acteurs professionnels dans le sens de la performance de leur organisation2
pose question. En effet, les EC sont habitués à rechercher la performance individuelle ou
la performance de l’équipe en matière de recherche 3 mais leur mobilisation collective
dans le sens de la performance de leur organisation demeure encore incertaine et
faiblement intégrée dans leurs logiques professionnelles. En effet, alors que la littérature
souligne à quel point la mobilisation collective est essentielle pour atteindre la performance
organisationnelle, les auteurs attirent l’attention sur le fait que les professionnels sont marqués
par un individualisme4 très important. Minzberg (2010 : 331) suggère que l’autonomie dont
ils disposent les encourage « à ignorer les besoins de l’organisation ».
Par conséquent, dans un contexte où les universités sont soumises à une injonction à la
performance organisationnelle, comment expliquer que les EC, en tant que professionnels, se
mobilisent collectivement envers cette performance ?

Deux courants s’opposent dans la littérature. D’une part, un courant dominant met en
relief l’incompatibilité entre logiques professionnelles et logiques managériales dans la
mesure où les professionnels sont soumis à une autorité basée sur l’expertise alors qu’une
organisation est caractérisée par une autorité fondée sur la position hiérarchique. Les
professionnels qui rejoignent une organisation doivent alors choisir entre un engagement qui

2
Nous entendons par organisation l’établissement universitaire dans son ensemble et non pas une composante,
un département, un laboratoire, etc.
3
Avant les réformes, les EC étaient habitués à une certaine logique de performance individuelle en matière de
recherche à travers la publication d’articles, le classement des revues, etc. Les réformes introduisent une notion
de performance organisationnelle, qui dépasse la performance individuelle et qui ne se restreint pas qu’à la
recherche. C’est cette performance organisationnelle qui intéresse notre recherche.
4
Nous entendons individualisme au sens de Bichon (2005b : 10) : « l’émancipation des individus, c’est-à-dire le
développement de leur autonomie et de leur différence vis-à-vis des normes ou des valeurs collectives ».

15
va à leur organisation ou un engagement qui va à leur profession5. D’autre part, plusieurs
études suggèrent qu'un professionnel peut afficher à la fois un engagement envers sa
profession et son organisation. Par ailleurs, un courant émergent constate l’apparition de
formes de professionnalisme et d’organisation hybrides où la frontière entre logiques
managériales et logiques professionnelles n’est pas si marquée (Besez et al., 2011,
Noordegraaf, 2011). Il s’agirait davantage d’une redistribution de l’autonomie que de sa perte
(Paradeise, 2011). Cette littérature est toutefois peu développée. L’opposition entre ces deux
ensembles de travaux souligne l’ambiguïté qui existe lors de la présence conjointe de logiques
managériales et logiques professionnelles en organisations. Formulé autrement, le couple
autonomie-hétéronomie laisse apparaitre les problématiques qui peuvent naître lorsque les
professions exercent dans une organisation. Comme le souligne Paradeise (2008 : 292) : « la
question de la compatibilité entre profession et organisation tenait aux problèmes de
compatibilité entre régulation autonome par la profession et hétéronome par l’organisation ».
Cette question de l’engagement est essentielle dans la mesure où il agit comme une
préparation à la mobilisation collective : c’est « un état d’esprit […] qui pousse un individu
vers une ligne de conduite (Meyer et Herscovitch, 2001 : 303).

Même s’il est difficile de nier les tensions existantes entre professions et management,
nous suggérons que les deux situations mises en avant par la littérature (incompatibilité et
hybridation) peuvent coexister au sein d’une même organisation. Notre hypothèse est qu’il
existe des situations variées en fonction de la représentation que les professionnels ont de
la performance organisationnelle. Pour comprendre comment les membres d’une
organisation donnent une signification aux situations qu’ils rencontrent, ainsi que le lien entre
cette signification et leurs comportements, nous mobilisons les travaux s’inscrivant dans une
approche cognitive. Ces travaux cherchent à saisir des représentations collectives qui auraient
une influence sur les comportements adoptés par les membres de l’organisation. Cette
approche permet de comprendre les raisons qui poussent les professionnels à se mobiliser
collectivement pour leur organisation. Nous nous intéressons en particulier à la
représentation de la performance organisationnelle, performance organisationnelle pour
laquelle les EC sont appelés à se mobiliser collectivement. La théorie retenue pour analyser
cette perception est la théorie des représentations sociales (désormais RS) (Moscovici, 1961).

5
Les auteurs français opèrent différents choix sémantiques lorsqu’ils traduisent les termes « involvement » et
« commitment ». Ici, le terme d’engagement signifie « organizational commitment », à l’instar d’auteurs
francophones tels que Rojot, Roussel et Vandenberghe (2009).

16
Cette théorie porte sur le « sens commun » d’un objet, ici la performance organisationnelle.
C’est en effet le sens commun, cette pensée profane que nous avons tous sur les objets qui
nous entourent (que ce soit des situations, des phénomènes, des catégories de personnes, etc.),
qui guide nos conduites au quotidien (la pensée profane s’oppose à la pensée ou connaissance
scientifique, qui répond à une logique de démonstration, une logique de la pensée
mathématiques). Nous interrogeons donc les RS de la performance de l’université comme
vecteur de mobilisation collective des professionnels. Nous suggérons que les RS,
partagées et construites collectivement, de la performance de l’université (vue comme
« l’objet source de mobilisation »), influencent la mobilisation collective des
professionnels et en est une condition d’émergence. Garreau (2009) souligne que les RS
n’agissent pas de manière directe sur les conduites, elles agissent par l’intermédiaire des
attitudes. Par conséquent, nous interrogeons la manière dont les RS de la performance de
l’université orientent la mobilisation collective des professionnels, par l’intermédiaire de
l’engagement envers la profession et l’engagement envers l’organisation, qui sont des bases
psychologiques de la mobilisation collective.

Dès lors, au moment où les universités sont amenées à mettre en place une gestion
basée sur la performance et ainsi, à encourager la contribution des EC à cette performance,
nous formulons la problématique suivante :

Dans quelle mesure les RS de la performance, que les professionnels élaborent,


orientent-elles leur mobilisation collective envers l’organisation ?

2. Définition de la performance

Perçue comme étant « le mot d’ordre des sociétés occidentales » (Heilbrunn, 2004), la notion
de performance relève pourtant d’une multitude de définitions (Guenoun, 2009).
Partant du constat que le sens de la performance organisationnelle est loin de faire
l’unanimité, autant du côté des théoriciens que des praticiens, Morin, Savoie et Beaudin
(1994) se sont lancés dans un recensement complet de toutes les approches et tous les critères
de la performance organisationnelle. Leur inventaire laisse apparaître qu’il existe quatre
grandes approches théoriques de la performance organisationnelle, à savoir une conception

17
économique de la performance, une conception sociale de la performance, une conception
systémique de la performance et une conception politique. La conception économique de la
performance considère qu’une organisation est performante lorsqu’elle atteint les objectifs
fixés avec autant ou moins de ressources ; la conception sociale de la performance considère
que l’organisation peut atteindre des résultats économiques tout en prenant en compte l’aspect
humain de l’organisation ; la conception systémique de la performance considère qu'une
organisation est performante lorsqu'elle est pérenne et que sa pérennité dépend de son
adéquation avec son environnement : c'est un système dit ouvert ; la conception politique de
la performance considère qu’une organisation est performante lorsqu’elle prend en compte
l’intérêt de tous les acteurs de l’organisation. Morin et al. (1994) suggèrent d’envisager la
performance d’une organisation comme un élément multidimensionnel, intégrant les quatre
approches à la fois.
Pour Lebaron (2008 : 2-3), la définition de la performance d’une université est à
rapporter à ses fonctions sociales « manifestes » officiellement définies6, comme la
transmission, la production et la valorisation de connaissances, la dynamisation de
l’« économie de la connaissance », l’insertion professionnelle des étudiants, l’ « égalité des
chances », entre autre, et à ses fonctions « latentes », telles que celles qui visent à la
reproduction de la structure sociale, l’intégration et la socialisation des jeunes scolarisés, la
production de « bien-être » collectif, la contribution à la vie sociale, etc. Lebaron (2008)
souligne alors la difficulté liée à la mesure de « ces performances ».
La notion de performance a été introduite dans les universités françaises par plusieurs
éléments. En premier lieu, elle a été introduite par le biais de la Loi organique relative aux lois
de finances (LOLF, votée en 2001). Depuis l’application de la LOLF, le projet de loi de
finances est fondé sur les résultats attendus et obtenus. Dans un deuxième temps, la Loi
relative à la liberté des universités (LRU) en 2008 a prolongé la LOLF en permettant aux
universités de gérer leur budget de manière autonome. En parallèle de la LRU, un nouveau
modèle d’allocation des moyens : le modèle « SYMPA » (Système de répartition des Moyens
à la Performance et à l’Activité), a été créé en 2009, pour remplacer l’ancien système
d’allocation San Remo (Système Analytique de Répartition des Moyens) instauré en 1994. Le
modèle SYMPA prévoit de répartir les moyens fixés par la loi de finances aux universités en
fonction de leur performance7, évaluée par l’Agence d’évaluation de la recherche et de

6
Cf. missions contenues dans la loi LRU, en Annexe 1.
7
Dans la pratique, le modèle SYMPA a cessé de fonctionné depuis 2011 par faute de moyens financiers. Un
nouveau modèle, nommé « MODAL » a été proposé en 2014 et est en cours de discussion.

18
l’enseignement supérieur (AERES, créée en 2007, remplacée en 2014 par le Haut Conseil de
l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur).
L’introduction de la performance dans le secteur public suggère que les actions
publiques et leurs effets peuvent être rapprochés des dépenses engagées (Ughetto, 2004).
Guenoun (2009 : 198) souligne la « révolution cognitive » de ce nouveau mode de gestion
orienté vers l’atteinte des résultats, dans des organisations dont la base du mode de gestion est
traditionnellement de se conformer aux normes juridiques. Il met en avant la nécessité
d’élargir la conception de cette notion de performance telle qu’elle est utilisée dans le secteur
privé dans la mesure où le secteur public présente des caractéristiques spécifiques. La sphère
publique fait face à des impératifs peu considérés par la sphère privée, à savoir la satisfaction
de l’intérêt général et la préservation du bien-être de la population. Face à cet objectif de
satisfaction des intérêts et besoins des citoyens, la qualité prend une place essentielle dans la
performance des organisations publiques. Dès lors, une organisation publique ne recherche
donc pas uniquement le profit mais est attachée à des finalités se situant à l’extérieur de
l’organisation (Burlaud, 1995), ce qui a comme conséquence d’accorder une définition plus
large à la performance.

3. Terrain de recherche : les EC au sein des universités françaises


confrontées à l’introduction de la notion de performance organisationnelle

Ce terrain est pertinent pour deux raisons : d’une part, le métier d’universitaire est en phase de
forte transition (Chatelain-Ponroy, Mignot-Gérard, Musselin, et Sponem, 2012a ; Dahan et
Mangematin, 2010), à l’instar des médecins (Ashburner and Fitzgerald, 1996), et, d’autre part,
les EC sont archétypaux d’acteurs professionnels fortement attachés à la défense de leur
autonomie. Pour répondre à la problématique de recherche, nous avons mené une recherche
qualitative basée sur l’étude de deux cas : l’Université A et l’Université B.

19
4. Une recherche exploratoire hybride et abductive

Nous avons suivi une démarche d’exploration hybride, qui permet « d’enrichir ou
d’approfondir des connaissances antérieures » (Charreire-Petit et Durrieu, 2007, p.73). Cette
démarche conduit à faire des allers-retours entre théorie et observations pour donner du sens
aux observations empiriques (Charreire-Petit et Durrieu, 2007). Notre démarche sera ainsi
principalement abductive. Nous synthétisons ici nos allers-retours entre matériau et littérature.
Nous avons débuté la recherche avec un cadre théorique large : la mobilisation
collective et les RS. Nous avions une « hypothèse » de départ : que les RS orientent la
mobilisation collective des EC. Nous rejoignons Wolcott (1982 : 157, cité par Miles et
Huberman, 2003 : 93) : il est « impossible de s’immerger dans un terrain sans avoir l’idée de
ce que l’on recherche tout comme il est stupide de ne pas rendre cette quête explicite ». Nous
avons ainsi mobilisé des concepts et intégré la littérature concernant notre objet de recherche
(Charreire-Petit et Durrieu, 2007). Puis nous avons enrichi notre cadre conceptuel au gré des
allers-retours successifs entre le matériau et la littérature d’une part, et au fil des découvertes
faites dans la littérature d’autre part (Dumez, 2010). Initialement, la problématique consistait
à s'intéresser à la signification de la performance pour les EC et à comprendre la mobilisation
collective. Au fur et à mesure, la problématique s'est précisée et le concept d'engagement a été
affirmé. Dès lors, la structure classique finale de la thèse reflète de manière artificielle la
façon dont la recherche a été conduite. Nous avons effet introduit le concept d’engagement
dans le cadre théorique et les questions de recherche au début de la phase empirique. C’est
notre retour sur la littérature qui nous a alors permis de placer le concept d’engagement dans
le modèle de recherche.

20
5. Questions de recherche

Pour rappel, la problématique de la recherche est formulée de la façon suivante :


Dans quelle mesure la RS de la performance que les professionnels élaborent oriente-t-
elle leur mobilisation collective envers l’organisation ?

Nous répondrons à cette problématique en suivant quatre étapes :


La première étape consiste à définir quels type de comportements de mobilisation
collective sont adoptés et pourquoi.
La deuxième étape consiste à définir le contenu de la RS de la performance
organisationnelle.
La troisième étape appréhende la manière dont les RS de la performance
organisationnelle influencent les attitudes qui préparent au comportement (ici
l’engagement envers l’organisation et l’engagement envers la profession qui préparent à la
mobilisation collective).
La quatrième étape est de comprendre comment l’engagement organisationnel et
l’engagement professionnel influencent la mobilisation collective (et donc les types de
comportement que les EC adoptent).

Figure 1 : Le processus individuel de mobilisation collective

Le lien entre mobilisation collective et


performance organisationnelle est le postulat de la
thèse posé par la littérature et non interrogé dans
nos travaux

Représentations Engagement Mobilisation Performance


Sociales collective organisationnelle
organisationnel
de la performance individuelle
organisationnelle collective
organisationnelle
professionnel

3ème étape 4ème étape


2ème étape
1ère étape

21
Par conséquent, la problématique de la recherche sera traitée en suivant ces quatre
étapes. La problématique sera donc traitée en suivant les quatre questions de recherches
suivantes (les questions de recherche 1 et 2 décrivent respectivement les concepts de
mobilisation collective et de RS et les questions 3 et 4 analysent les relations entre concepts :
entre RS et engagement d’une part, et entre engagement et mobilisation collective d’autre
part) :

Question de recherche 1 : Quels types de comportements (envers l’organisation et envers la


profession) les EC adoptent-ils dans le cadre de leur mobilisation collective ?
Question de recherche 2 : Quelle est la RS de la performance organisationnelle ?
Question de recherche 3 : En quoi la RS de la performance organisationnelle élaborée par les
EC influence-t-elle leur engagement envers l’organisation et leur engagement envers la
profession ?
Question de recherche 4 : En quoi l’engagement envers l’organisation et l’engagement envers
la profession influencent-ils la mobilisation collective des EC ?

6. Principaux résultats et pistes futures de recherche

Les résultats soulignent une RS de la performance de l’université assez homogène, dont le


noyau central est composé de l’insertion professionnelle des étudiants et des publications
scientifiques. Face à cette RS partagée, les EC se divisent en deux groupes : ceux favorables
au concept de performance de l’université (que nous appelons « conception pragmatique de la
performance »), et ceux, défavorables au concept de performance de l’université (que nous
appelons « conception philosophique de la performance »), minoritaires. Ils ne remettent pas
en cause les éléments qui composent le noyau central de la RS mais rejettent le terme
« performance ».
À l’intérieur de ces deux groupes, les résultats révèlent quatre profils de mobilisation
collective. Certains EC ont un profil à dominante organisationnelle (profil 1 : conviction
identitaire/organisationnel), reposant sur une conception pragmatique de la performance de
l’université et un engagement organisationnel. A l’opposé, d’autres EC, minoritaires, ont un
profil à dominante professionnelle, fondé sur une conception philosophique de la performance
de l’université et un engagement professionnel (profil 3 : rejet identitaire). Puis, entre ces

22
deux profils opposés, se trouvent les « majoritaires », qui s’engagent à la fois envers leur
établissement (engagement organisationnel) et envers leur profession, et ont ainsi une
mobilisation collective renforcée (profil 2 : conviction identitaire/organisationnel et
professionnel). Dans le cas A, ce double engagement ne génère pas de tension, mais un
certain épuisement. Dans le cas B, ce double engagement génère un conflit, car les EC ont
l’impression d’être « sacrifiés ». Enfin, un dernier groupe d’EC ont un profil hybride : une
mobilisation organisationnelle et un engagement professionnel, tous deux fondés sur une
conception philosophique de la performance de l’université (profil 4 : bricolage identitaire).

En piste de recherche, il serait intéressant d’interroger cette problématique dans une


démarche processuelle, à l’aune des théories du changement. Ainsi, nous envisageons un
retour sur le terrain afin d’interroger à nouveau les EC que nous avions rencontrés en 2012 et
en 2013 pour prendre connaissance de l’évolution des représentations et des comportements
quelques années après l’application de la loi LRU. Par ailleurs, nous envisageons également
d’aborder les représentations par la théorie du sensemaking (Weick, 1995) afin de révéler le
processus de construction de sens de la performance de l’université.

7. Plan de la thèse

La thèse est structurée en trois parties (figure 2). La première partie propose un cadrage
théorique sur l’articulation entre RS de la performance organisationnelle et mobilisation
collective des professionnels envers l’organisation, à travers une revue de la littérature. Cette
première partie est divisée en trois chapitres (chapitres 1, 2 et 3). La deuxième partie,
divisée en deux chapitres (chapitres 4 et 5), expose et justifie les choix opérés en termes
d’épistémologie et de méthodologie. Enfin, la troisième partie est empirique. Elle est divisée
en quatre chapitres. Les trois premiers chapitres (chapitres 6, 7 et 8) présentent les résultats
de la recherche, afin de répondre à la problématique de la thèse, et le dernier chapitre
(chapitre 9) est consacré à la discussion des résultats. Enfin, la conclusion générale présente
les contributions théoriques et méthodologiques, les implications managériales, les limites
théoriques et méthodologiques et les pistes de recherche.

23
Figure 2 : Structuration de la thèse

Première partie : Revue de littérature


Cadrage théorique sur l’articulation entre RS de la performance organisationnelle et mobilisation collective
des professionnels envers l’organisation

Chapitre 1. Les EC, des Chapitre 2. La mobilisation Chapitre 3. Les


professionnels au sein d’une collective des acteurs représentations sociales :
organisation pluraliste en professionnels, entre justifient et guident les
pleine mutation engagement professionnel et conduites
Explication du rapport engagement organisationnel La représentation de la
conflictuel qui existe entre les La mobilisation collective ne se performance organisationnelle
professionnels et les décrète pas. Elle prend sa source élaborée par les professionnels
organisations et présentation dans l’engagement des acteurs. explique et guide la mobilisation
d’éléments qui remettent en collective des acteurs.
cause cette analyse classique.

Deuxième partie : Choix épistémologiques et méthodologiques de la recherche

Chapitre 4 : Problématisation de la recherche Chapitre 5 : Une méthodologie qualitative


Présentation des questions de recherche fondée sur une étude de cas multiples
Justification du positionnement épistémologique Justification du choix de la méthode des cas et de la
interprétativiste méthode de recueil des données
Méthodes d’analyse du matériau recueilli

Troisième partie : Résultats et discussion

Chapitre 6. Résultats de l’analyse intra-cas A Chapitre 7. Résultats de l’analyse intra-cas B


Présentation des résultats du Cas A Présentation des résultats du Cas B

Chapitre 8. Synthèse et transition vers la discussion


Analyse comparative des résultats des cas A et B

Chapitre 9. Discussion
Discussion des résultats au regard du cadre théorique de la recherche et d’autres concepts explicatifs

Conclusion
Contributions théoriques et méthodologiques
Implications managériales
Limites théoriques et méthodologiques
Pistes de recherche

24
PREMIÈRE PARTIE : REVUE DE LITTERATURE

25
La revue de littérature est décomposée en trois chapitres. Le premier chapitre vise à décrire
les caractéristiques des professionnels, dont les EC font partie, et des organisations
pluralistes, dont les universités sont des archétypes. La caractéristique principale des
professionnels est leur autonomie de contrôle. Leurs activités sont soumises au contrôle des
pairs mais pas au contrôle des organisations dans lesquelles ils exercent. Pourtant les réformes
du NPM introduisent progressivement la notion de performance dans ces organisations,
accompagnée de logiques managériales. De nombreux auteurs ont alors souligné le malaise
professionnel que génère l’introduction de logiques managériales aux côtés de logiques
professionnelles. Pourtant, les professionnels sont appelés à tenir compte des besoins de leur
organisation en se mobilisant collectivement pour améliorer sa performance.
Le deuxième chapitre vise à comprendre les mécanismes de mobilisation collective
et ses manifestions comportementales. La mobilisation collective nécessite un engagement
envers l’organisation et non plus uniquement envers la profession. La littérature est partagée
concernant la compatibilité de ces deux engagements. Pour certains (Blau, 1987 ; Gouldner,
1957), le professionnel qui rejoint une organisation doit choisir entre un engagement envers sa
profession ou un engagement envers l’organisation, les deux types d’engagement étant
incompatibles à cause d’une différence irréductible de valeurs. Pour d’autres (Lee, Carswell et
Allen, 2000 ; Mathieu et Zajac, 1990) les deux engagements sont complémentaires lorsque les
valeurs professionnelles et les valeurs organisationnelles se rejoignent. Dans le contexte de
notre étude, nous abordons les deux engagements sous l’angle de la compatibilité.
Le troisième chapitre vise à expliquer les liens entre RS et mobilisation collective.
Si ce lien est affirmé dans la littérature, le sens de la causalité reste ambigu. La littérature sur
la théorie des RS nous amène à suggérer que la signification donnée à la performance de
l’organisation est élaborée par les acteurs et que les RS de la performance de l’organisation
orientent la mobilisation collective envers l’organisation par l’intermédiaire de l’engagement
organisationnel.

26
CHAPITRE 1. L’UNIVERSITÉ, UNE ORGANISATION
PLURALISTE EN PLEINE MUTATION

La littérature dominante suggère que les professionnels qui rejoignent une organisation
doivent choisir entre une implication qui va à leur organisation ou une implication qui va à
leur profession, les deux types d’implication étant incompatibles. Par ailleurs, des logiques
managériales ont petit à petit été introduites dans ces structures, s’installant aux côtés des
logiques professionnelles. Ces logiques marchandes et managériales sont présentées par
certains auteurs comme mettant à mal le professionnalisme (Freidson, 2001) car l’autonomie
des professionnels serait menacée. Par exemple les indicateurs quantitatifs de performance
sont perçus comme une menace car ils augmentent le contrôle du travail professionnel.
Beaucoup ont alors parlé de déclin de l’autonomie, voire de déclin des professions (Freidson,
2001). L’autonomie est-elle une exigence irraisonnée de la part des professionnels ? Si notre
position est de réaffirmer que le travail professionnel possède des caractéristiques objectives
nécessitant une autonomie, en particulier dans le domaine de la production scientifique, nous
verrons que tout un courant de la littérature réfute ces caractéristiques et considère que
l’autonomie n’a aucune légitimité. Nous verrons également que si depuis leur création, les
professions ont un rapport conflictuel avec les organisations qui les emploient, elles ont aussi
un rapport particulier avec l’Etat, ce qui renforce leur méfiance vis-à-vis des réformes
(section 1).
Ce conflit entre valeurs professionnelles et exigences managériales a suscité ce que
Guérin, Wils et Lemire (1996 : 63) appellent « le malaise professionnel », qui met également
à mal les organisations : « le malaise professionnel handicape de nombreuses organisations à
l’heure de la mobilisation des employés et de la lutte pour les gains de productivité ». Pour
comprendre comment les universités s’inscrivent dans le changement de mode de gestion
introduit par les réformes, et comment se comportent les acteurs qui composent ce type
d’organisation, nous présenterons la littérature qui a analysé le mode de fonctionnement si
particulier de ces organisations (section 2).

Même s’il est difficile de nier les tensions existantes entre professions et management,
nous souhaitons souligner dans cette revue de littérature que plusieurs auteurs (Bezes et al.,
2011, Noordegraaf, 2011) proposent de dépasser cette analyse binaire en soulignant

27
l’émergence de formes de professionnalisme et d’organisation hybrides, où la frontière entre
logiques managériales et logiques professionnelles n’est pas si marquée et où il s’agirait
davantage d’une redistribution de l’autonomie que de sa perte (Paradeise, 2011). La littérature
appelle en effet à de nouvelles formes organisationnelles, capables de répondre aux besoins
du travail professionnel, de définir et mettre en avant les valeurs professionnelles, tout en
invitant également les professionnels à développer des compétences organisationnelles
(Noordegraaf, 2011) (section 3).

Section 1 : L’autonomie des acteurs professionnels dans un contexte de


performance organisationnelle

« Dès leur naissance, au XIIe siècle, les universités qui ont été créées par les corporations,
refusent l’intervention de l’État et de l’Église » (Solle, 2008 : 144). Toutes les professions
disposent d’une certaine autonomie vis-à-vis de l’État et vis-à-vis des organisations qui les
emploient. Nous proposons un éclairage des caractéristiques des acteurs professionnels, en
nous référant à la sociologique des professions (1.1), avant de définir ce que nous entendons
par autonomie (1.2)

1.1. Caractéristiques des professionnels

Dubar et Tripier livraient en 1998, lors de la première édition de leur ouvrage, le premier
manuel de Sociologie des professions en France. La sociologie du travail et la sociologie des
professions sont pourtant des disciplines anciennes et à part entière dans le monde anglo-
saxon. Cela s’explique par le fait que de nombreux pays anglo-saxons possèdent une
législation qui discerne les « professions », en accordant à leurs membres des droits
particuliers (se rassembler en association autonome et reconnue, interdire l’exercice de
l’activité aux non-membres, organiser la formation), des autres activités nommées alors
« occupations », dont les membres ont uniquement le droit de se syndiquer. Certains auteurs
traduisent alors le terme occupations par métiers (Champy, 2011, par exemple), alors que
d’autres conservent le terme occupations (Paradeise, 2008, par exemple).

Précisons ce que les chercheurs entendent par le terme profession. Deux difficultés
apparaissent dans la définition de ce terme : d’une part, les termes et concepts (profession,
28
groupe professionnel, métier, emploi, etc.) employés par les sociologues français ne sont pas
harmonisés, d’autre part, les termes anglais tels que professions, occupation, expertise ne
reflètent pas le même sens que leurs homonymes français. Par ailleurs, la sociologie anglo-
saxonne n’offre pas de consensus au sujet du terme profession.
Champy (2011 : 26) propose une définition d’une profession (au sens
8
fonctionnaliste ) : « Les métiers auxquels ont été octroyés, en général entre la fin du XIXe et
le milieu du XXe siècle, des avantages dérogatoires aux formes de régulation des activités que
constituent le marché et les logiques hiérarchiques des administrations et des États ». Deux
caractéristiques apparaissent essentielles aux professions : le haut niveau de compétence et
l’orientation vers la collectivité des activités. Les professionnels ne sont donc pas soumis au
contrôle du marché, des administrations et des États, contrairement aux métiers : « avoir un
métier […] c’est être détenteur d’un patrimoine [de savoirs et de savoir-faire] dont on pense, à
tort ou à raison, qu’il a une valeur sur un marché du travail qui transcende celui de
l’entreprise » (Champy, 2011 : 106).
La sociologie des professions nomme « processus de professionnalisation » le passage
du « métier » à la « profession établie ». Selon Dubar et Tripier (2008) (cités par Robelet,
2008 : 59), la professionnalisation décrit « les étapes qui font d’une activité une « profession »
entendue comme une activité de travail organisée collectivement, reconnue par l’Etat et
fondée sur l’exercice pratique d’un savoir intellectuel acquis par apprentissage ».
Dubar et al. (2011 : 9) proposent six caractéristiques communes à toutes les
professions, qui ont fait consensus aux États-Unis (selon un article de Flexner, 1915) :
« 1. Les professions traitent d’opérations intellectuelles associées à de grandes responsabilités
individuelles.
2. Leurs matériaux de base sont tirés de la science et d’un savoir théorique…
3. qui comportent des applications pratiques et utiles
4. et sont transmissibles par un enseignement formalisé.
5. Les professions tendent à l’auto-organisation dans des associations ;
6. et leurs membres ont une motivation altruiste. »

Dans le même ordre d’idée, Parsons (1951) propose trois caractéristiques qui
distinguent les professions des autres métiers : un savoir pratique qui articule une compétence
à la fois fondée sur le savoir théorique acquis pendant une longue formation et sur

8
Nous verrons plus loin que fonctionnalistes et interactionnistes ne partagent pas la même conception des
professions, en particulier en ce qui concerne la nécessité de leur autonomie.

29
l’expérience, une compétence spécialisée qui s’appuie sur la spécialisation technique de la
compétence et qui restreint l’autorité du professionnel au seul domaine légitime de son
activité, un intérêt détaché qui permet une neutralité affective envers le client.

1.2. Définition de l’autonomie

L’autonomie dont disposent les professionnels a fait l’objet de nombreuses études. Au sens
classique, l’autonomie consiste en une régulation autonome, par opposition aux prescriptions
hiérarchiques. A son propos, deux courants s’affrontent : les fonctionnalistes, se rattachant au
paradigme des faits sociaux, estiment que l’autonomie est une protection nécessaire liée aux
fonctions professionnelles, et les interactionnistes, se rattachant au paradigme de l’action
sociale, considèrent que l’autonomie est une protection qui résulte de luttes débouchant sur la
captation d’un segment de marché du travail (Paradeise, 2008).
Les fonctionnalistes voient dans le travail professionnel des caractéristiques
objectives, qui les distinguent d’autres métiers et qui justifient le fait qu’elles soient étudiées
de manière spécifique. L’autonomie est selon eux l’une des conditions à respecter pour
contribuer à la production scientifique, dans la mesure où la science est un domaine autonome
de la société (Merton, 1973).
Les interactionnistes réfutent cette distinction de nature de travail et étudient les
activités considérées comme des professions de la même manière que celles des autres
métiers. Selon ces derniers, la différence entre professions et autres métiers ne résulte que
d’une représentation sociale, un jugement de valeur et de prestige, permettant de rendre
légitime les inégalités de statut. Les activités et les résultats scientifiques ne possèdent pas de
caractéristiques les distinguant des activités et des résultats qui ne sont pas scientifiques, et
sont donc perçus comme des constructions sociales (Musselin, 2008b). Selon la perspective
interactionniste, la légitimité des professions est constamment mise à l’épreuve.
Dès lors, pour Parsons (1951), l’autonomie découle des attributs des valeurs
professionnelles (accomplissement, universalisme, spécificité fonctionnelle, neutralité
affective). Pour Freidson (2001), l’autonomie fonde « la troisième logique », « une alternative
d’organisation du travail » et « de régulation des rapports aux côtés de l’État ». Si Freidson a
été l’un des premiers à suggérer qu’il fallait limiter le pouvoir de l’expertise dans une société
démocratique, il soulignait à la fin de sa vie l’importance de l’autonomie professionnelle

30
fondée sur le savoir (Herzlich, 2006). L’autonomie devient nécessaire lorsque les prestations
fournies par les professionnels ne peuvent être standardisées.
A l’opposé, Larson (1977) suggère que le pouvoir dont disposent les professionnels est
un pouvoir de marché acquis par une conquête de monopole de marché. Becker (1970 : 92)
considère que les professions sont simplement « des métiers qui ont été suffisamment
chanceux dans les luttes politiques du monde du travail actuel pour gagner et conserver ce
titre honorifique. Partant de cela, il n’y a pas de vraie profession ni d’ensemble de
caractéristiques nécessairement associées à ce titre. Il y a seulement des catégories de travail
qui sont regardées par le public comme des professions, et d’autres qui ne le sont pas ».
Pour Hughes (1958), les professions établies sont comparables à d’autres activités mais ont
réussi à obtenir une reconnaissance sociale leur permettant d’avoir une licence individuelle
« permission spéciale de poursuivre une activité » et un mandat qui les autorise à dire « à la
société ce qui est bon et juste sur des aspects cruciaux de la vie » (1958 : 78, cité par
Paradeise, 2008 : 290). Johnson (1972) considère que la professionnalisation n’est qu’un
processus politique visant à augmenter l’autocontrôle d’une profession et n’aboutit en rien à
accroitre le savoir.
Enfin, Paradeise (2008 : 290) souligne que : « Indépendantes ou salariées, associatives
ou bureaucratiques, anciennes ou émergentes, dominantes ou subordonnées, les professions
n’écrivent pas seules leur histoire : elles se disputent des territoires définis par un travail
concret lié à un savoir changeant, dans un contexte complexe et largement contingent.
L’autonomie est donc conquise, et toujours soumise à évaluation par la concurrence entre les
occupations candidates à la professionnalisation, prêtes à s’engouffrer dans les brèches
ouvertes par le décalage des services professionnels établis par rapport à la demande sociale
potentielle ».

Paradeise (2008) souligne la différence entre l’autonomie qui porte sur l’action et celle
qui porte sur le contrôle. L’autonomie d’action n’est pas propre aux professions. Elle est
diffusée par les principes du management à tous les niveaux hiérarchiques, à travers les
notions de compétences, d’organisation par projet, ou de responsabilité par exemple. Ce qui
différencie les professions établies est l’autonomie de contrôle. Celles-ci sont soumises à un
autocontrôle par une régulation autonome alors que les autres occupations sont astreintes à un
contrôle hétéronome par le marché, les bureaucraties ou l’État. Paradeise (2008) nuance
toutefois les usages de ces notions d’autonomie et d’hétéronomie en précisant que
l’occupation exclusive d’un segment de marché par une profession repose sur un mixte

31
d’autonomie et d’hétéronomie, dans le sens où une profession a besoin de la reconnaissance et
de l’attestation de cette autonomie par l’État ou les tribunaux.

L’ensemble de cette littérature met en lumière les rapports étroits entre État et
profession. À nouveau la littérature sociologique offre une lecture de ces rapports, à l’aune
des grands courants théoriques dans lesquels leurs auteurs s’inscrivent.
Alors que les fonctionnalistes et les interactionnistes accordent à l’État un rôle très
limité dans le processus d’institutionnalisation des professions, Durkheim avait, avant eux
(début du XXe siècle), pensé le fait professionnel en relation étroite avec l’État, et proposait
une intervention directe de l’État sur l’organisation des professions. Sans utiliser la notion de
professions de manière distincte d’autres concepts tels que « corps professionnel »,
« groupement professionnel » ou « corporation », etc. Durkheim procède toutefois à une
sociologie des professions « avant l’heure » (Robelet, 2008 : 252).
Les approches qui ont fondé la sociologie anglo-saxonne des professions sont à étudier
à la lecture des grands courants théoriques dans lesquels leurs auteurs se sont inscrits.

Le tableau 1 synthétise les grandes approches sociologiques de la relation État-


professions, des premiers travaux de Durkheim jusqu’aux apports les plus récents.

32
Tableau 1 : Les grandes approches sociologiques de la relation État-professions, selon Le Bianic (2008)
Approche Relation État-Profession Explication de la thèse
L’objectif est de doter les individus d’une morale collective dont sont dépourvues la plupart des activités de travail.
Les groupements professionnels prennent une dimension régulatrice et socialisatrice permettant de contrer les tendances
des sociétés modernes à l’individualisme.
L’État reste le premier niveau de régulation mais l’objectif du modèle d’organisation corporatiste est d’imbriquer
Approche
différents niveaux de régulation, différents « milieux moraux » pour mieux encadrer les actions économiques des individus
Durkheimienne
L’État doit être régulateur « face à la perte du lien social engendrée par la concurrence et le libéralisme ».
(début XXe)
des professions Les groupements professionnels doivent être liés aux autres organes de la société.
Deux menaces sont à considérer :
- l’isolement des groupes les uns par rapport aux autres et l’isolement des membres de l’action régulatrice de l’État ;
- l’absorption par l’État.
L’État ne doit pas prendre en charge les activités des professions ni se servir d’elles comme relais dans la mise en œuvre
de ses politiques. Ex : la perte d’autonomie des professions dans les régimes totalitaires : l’Allemagne nazie.
Auteur de référence : Durkheim
Les professions sont plus à mêmes de prendre en charge des problèmes par nature collectifs rencontrés dans les sociétés
Approche modernes (comme la santé, l’éducation, l’aide sociale).
fonctionnaliste Les professions sont des Elles ont un caractère public car elles sont animées par des valeurs morales et collectives. Elles apportent paix et harmonie
(1ère moitié du substituts de la sociale face aux forces du marché et de la bureaucratie.
XXe) bureaucratie d’Etat et sont Les professions « préservent et perpétuent la tradition. Elles engendrent des modes de vie, des habitudes de pensée, des
indépendantes de celui-ci. normes de jugement ». « La famille, l’église et les universités, certaines associations savantes, et surtout toutes les grandes
professions, se tiennent comme des rochers contre lesquels les vagues formées par ces forces battent en vain. » Carr-
Saunders et Wilson (1933 : 497)
Auteurs de référence : Carr-Saunders et Wilson (1933), Greenwood (1957), Parsons (1968), Marshall (1939)
L’Etat s’intègre dans la
Approche construction des
interactionniste professions à travers les Les enjeux de pouvoir sont restreints à la sphère du travail quotidien.
(1950-1960)9 relations qui s’établissent Le concept de profession dans notre société est un jugement de valeur et de prestige.
entre professionnels et
acteurs publics.
Auteurs de référence : deuxième École de Chicago (Hughes, Becker, etc.) Becker (1970), Hughes (1996)
Vision marxiste Un Etat calculateur et L’Etat joue un rôle dans la naissance de nouvelles professions car elles démultiplient les actions de l’État. L’objectif est de
10
(1970-1985) cohérent qui veut accroitre reproduire les rapports de classe et le système capitaliste. En retour, les professions assoient leur légitimité et leur statut

9
Ce courant est inspiré davantage de la micro-sociologie et de la psychologie sociale que des traditionnels questionnements micro-sociologiques. Il s’inspire des travaux des
fonctionnalistes mais les dépasse.

33
son pouvoir sur la société au sein de la société.
civile.
Le développement des
professions va de pair
avec le capitalisme et la
construction d’un État
fort.
Auteur de référence : Johnson (1995)
Un État inerte, objet de
captation de groupes
Approches néo-
professionnels qui
wébérienne
cherchent à asseoir leur Des segments de l’administration veulent parvenir à leurs propres fins. Les professions veulent établir leur monopole et
(depuis une
monopole de façon acquérir une position dominante dans leur écologie. Le professionnalisme existe car il est adossé à un système socio-
vingtaine
individuelle. politique de légitimation. Les professions sont autonomes sur le plan des actes techniques, mais pas nécessairement dans la
d’années)
Alliances entre groupes définition de ses orientations socio-économiques.
d’intérêt au sein des
professions, de l’opinion
publique et de l’État.
Auteurs de référence : Freidson (2001), Abbott (1998, 2003)
Les professions sont des
parties de l’appareil
Approche
étatique. L’État et les
foucaldienne
professions se rapportent à « Les professions participent à l’essor du contrôle de l’État sur les populations au moyen de savoirs institutionnalisés ».
un même phénomène :
l’essor de la
gouvernementalité11.
Auteur de référence : Michel Foucault (1980-1990)

10
Cette vision nuance l’approche fonctionnaliste et élève d’un niveau la critique interactionniste. Les néo-wébériens et les néo-institutionnalistes critiquent le manque d’assise
empirique. Le recul des marxistes sur la scène politique dans les années 1980 a précipité le recul de cette approche.
11
Johnson (1995 : 8-9) définit la gouvernementalité : « l’Etat est un ensemble de procédures, de tactiques, d’institutions, de calculs, de connaissances et de technologies, qui
ensemble constituent une forme particulière de gouvernement (…) La gouvernementalité est cette forme de gouvernement des hommes et des choses qui s’appuie sur des
institutions, des procédures, des calculs, des analyses, des réflexions, des tactiques. »

34
Les rapports complexes existant entre professions et État contribuent à favoriser une
certaine méfiance des professions vis-à-vis des réformes et des pouvoirs publics, accusés de
vouloir affaiblir les professions en dénonçant leur autonomie.
Les professionnels ont également le même type de rapport conflictuel avec les
organisations qui les emploient. L’université est l’archétype d’une organisation
professionnelle en pleine mutation qui doit gérer la dualité entre autonomie des professionnels
et contrôle organisationnel des activités professionnels. C’est ce que nous exposons dans la
section ci-après.

Section 2 : Les modèles de fonctionnement de l’université

Le couple autonomie-hétéronomie laisse apparaître les problématiques qui peuvent naître


lorsque les professions exercent dans une organisation, comme c’est le cas au sein de
l’université : « la question de la compatibilité entre profession et organisation tenait aux
problèmes de compatibilité entre régulation autonome par la profession et hétéronome par
l’organisation » (Paradeise, 2008 : 292). Nous présenterons dans un premier temps les
caractéristiques des organisations dans lesquelles les professions exercent (2.1), puis nous
approfondirons le cas particulier des universités (2.2).

2.1. Les organisations pluralistes

Les évolutions récentes réinterrogent la question de l’autonomie des professionnels, mais


surtout, obligent les organisations professionnelles à gérer la dualité autonomie/contrôle. Ces
organisations possèdent des caractéristiques qui les rendent difficile à gérer. Les universités,
tout comme les hôpitaux sont des organisations dites « pluralistes » (Organizations with
Dispersed Powers ou pluralistic organizations ou complex organizations) (Denis et al., 2007 ;
Mainardes, Raposo et Alves, 2011), caractérisées par des aspects organisationnels
inhabituels : par des missions diverses et ambiguës, par une structure organisationnelle
plurielle, avec des pouvoirs diffus et distribués à travers toute la hiérarchie de l'organisation.

35
Etzioni (1964) définit ces organisations comme des organisations complexes (complexité
organisationnelle), c’est-à-dire des organisations qui font l’objet de pouvoirs dispersés.

Ces organisations possèdent trois niveaux : un niveau technique, un niveau


administratif et un niveau institutionnel. Chacun de ces niveaux comprend des responsables
dotés de pouvoirs (Thompson, 1967). Le flux de pouvoir se trouve horizontalement,
verticalement et diagonalement à travers les hiérarchies organisationnelles (pouvoirs
dispersés) (Clegg, 1989). Par ailleurs, le pouvoir, entendu comme « la capacité d’une
personne A d’obtenir qu’une personne B fasse quelque chose qu’elle n’aurait pas fait sans
l’intervention de A » (Dahl, 1957, cité par Le Flanchec et Plane, 2009 : 103), est à distinguer
de l’autorité, en ce sens qu’il ne peut pas être conféré à un individu, il s’acquiert par
l’expérience, les connaissances et les capacités, quel que soit le niveau hiérarchique (Le
Flanchec et Plane, 2009).
Ces aspects donnent lieu à un système de gestion très spécifique (Weick, 1976). Gérer
ces organisations est un défi pour les managers dans la mesure où les professionnels qui
représentent le cœur de l’organisation et ont tendance à prendre eux-mêmes des décisions
concernant leurs activités.

L’étude de la structure de ces organisations pluralistes a donné lieu à une littérature


fragmentée (Mainardes et al., 2011). Ainsi, la littérature fournit plusieurs modèles de
fonctionnement (tableau 3) que nous détaillons ci-après.

Tout d’abord, le modèle de la bureaucratie professionnelle (Blau, 1973 ; Corson,


1975 ; Maassen et Potman, 1990 ; Mintzberg, 2010) a reçu beaucoup d’attention dans la
littérature. Selon ce modèle, le mécanisme de coordination des activités repose sur la
standardisation des compétences. Le travail et les comportements sont donc normalisés par
les compétences. L’activité du professionnel, ici l’enseignant, est centrée sur ses clients, ici
les étudiants, avec qui il est proche. L’université est une organisation qui s’appuie sur les
compétences et le savoir de ces opérateurs pour fonctionner en ce sens que le pouvoir repose
sur la compétence professionnelle. Une partie importante du pouvoir sur le travail
opérationnel se trouve donc en bas de la structure, dans le centre opérationnel. La partie clé de
ce type d’organisation est, par voie de conséquence, le centre opérationnel, constitué par les
professionnels. Mintzberg (2010) suggère que le pouvoir du professionnel résulte de deux
éléments : d’une part la complexité du travail, qui ne permet pas d’être supervisé par un

36
supérieur hiérarchique ou standardisé par des analystes, et d’autre part, les services du
professionnel qui sont généralement très demandés.
Les éléments essentiels permettant ce type de coordination par les qualifications sont
la formation et la socialisation. L’organisation recrute des spécialistes très formés et
spécialisés : les professionnels. Chaque professionnel « sait ce qu’il peut attendre des autres
parce qu’il l’a appris » (2010 : 310). Ceci n’est possible que grâce à la formation initiale
généralement longue et qui se poursuit tout au long de la carrière, complété par la
socialisation, permettant aux arrivants d’assimiler les normes, les valeurs, les comportements
inhérents au groupe qu’ils vont rejoindre. La formation est un paramètre de conception central
dans une bureaucratie professionnelle dans la mesure où les connaissances et les aptitudes
requises sont complexes et non rationalisées, ce qui impose au professionnel de passer du
temps à les apprendre. Cette coordination par la standardisation des qualifications octroie aux
professionnels une large autonomie dans la mesure où ils contrôlent leur propre travail et sont
relativement indépendants par rapport à la ligne hiérarchique et aux collègues, avec qui ils ne
travaillent pas directement.
L’exécution des activités étant complexes, les analystes de la technostructure ne
peuvent pas rationaliser ces activités, et donc, les évaluer. Mintzberg (2010) met en avant une
certaine « résistance à la rationalisation » de l’activité de la part des professionnels. Un
système de planification et de contrôle ne peut, en principe, pas être mis en place dans une
bureaucratie professionnelle et est mal accepté par les opérateurs. En effet, selon Mintzberg
(2010), ceux-ci voient dans l’évaluation de leurs activités par des analystes, une atteinte à leur
autonomie. Or, la nouvelle gestion des universités orientée vers l’atteinte de résultats va
impliquer, entre autre, la mise en place d’indicateurs pour mesurer ces résultats. Le travail des
professionnels doit être évalué afin de mettre en place un système de pilotage par la
performance. Le seul type de contrôle accepté par les professionnels est l’évaluation par les
pairs, préalablement élus. La structure du centre opérationnel est démocratique dans la mesure
où les professionnels contrôlent leur propre travail et soumettant également les décisions
administratives qui les concernent (décider d’une promotion par exemple) au contrôle
collectif des pairs. Ainsi, pour avoir un minimum de pouvoir dans une bureaucratie
professionnelle, les administrateurs en poste doivent être des membres de la profession12.

12
Soulignons qu’une évaluation des enseignants par les étudiants a été rendue obligatoire depuis l’arrêté Bayrou
1997 (publié au JO du 15-4-97 et au BO n° 16 du 17 avril 1997) et qui n’est pourtant toujours pas appliquée
systématiquement, ou produisant des résultats peu exploités réellement.

37
Mintzberg (2010) souligne également que l’autonomie dont disposent les
universitaires engendre une identification faible avec l’organisation. L’identification se fait
plus avec la profession qu’avec l’organisation. L’auteur précise que lorsque « le professionnel
ne dispose pas de l’autonomie dont il pense avoir besoin, il est tenté d’aller ailleurs » (2010 :
315).
Les travaux sur la socialisation professionnelle (Dubar, 2010) permettent de mieux
comprendre les raisons qui poussent les professionnels à accorder leur loyauté aux pairs plutôt
qu’à leur organisation. La socialisation du professionnel passe par un groupe professionnel
qui choisit et forme ses membres à travers une longue formation (Hughes, 1955). Durant cette
formation, les futurs professionnels s’identifient à un « groupe de référence » qu’ils souhaitent
rejoindre avec une certaine frustration, et non plus à leur « groupe d’appartenance ». Cette
« identification anticipée » encourage l’adoption, par avance, de normes, valeurs et modèles
de comportements des membres du groupe de référence (Dubar, 2010). Selon Becker (1960),
cette identification au groupe de référence explique le degré d’engagement dans les tâches et
dans la future carrière.
Mintzberg (2010) liste quelques raisons qui amènent les professionnels à rejoindre
une organisation : ils peuvent y partager des ressources (les professeurs partagent des
laboratoires par exemple) ; ils peuvent apprendre les uns des autres ; pour avoir des clients ;
ces clients ont souvent besoin des services de plusieurs professionnels en même temps : les
étudiants ont besoin de plusieurs enseignants pour un même diplôme.
De l’autonomie découle le fait que si stratégie il y a dans une bureaucratie
professionnelle, elle ne peut être qu’individuelle. En effet, le concept de stratégie dans une
structure unique et avec des décisions communes à toute l’organisation, n’a pas beaucoup de
sens dans une bureaucratie professionnelle (Mintzberg, 1978). Pour éclairer ce point, l’auteur
revient sur la difficulté à mesurer les résultats et surtout, sur le malaise qui existe à se « mettre
d’accord sur les objectifs » (2010 : 322). L’autonomie « encourage aussi beaucoup d’entre
eux à ignorer les besoins de l’organisation » (2010 : 331). Les professionnels de ce type de
structure n’estiment pas faire partie d’une équipe et ils ne sont pas loyaux envers
l’organisation. Pourtant aujourd’hui, les réformes mises en œuvre par les gouvernements et
touchant les bureaucraties professionnelles, l’université en particulier, responsabilisent les
professionnels sur l’utilisation des ressources et nécessitent la mobilisation de tous pour
améliorer la performance globale.
Toutefois, les vertus autrefois attribuées aux bureaucraties (la présence de règles et de
procédures permettant une dépersonnalisation des agents évitait toute corruption, ainsi que

38
toute intrusion du pouvoir politique ou managérial) sont largement remises en causes (Solle,
2008). On leur reproche principalement de générer des dysfonctionnements, largement mis en
avant par Crozier (1963). La littérature remet en cause la pertinence de maintenir l’application
de ce modèle bureaucratique aux universités, dans un contexte environnemental changeant et
de modernisation des services publics (Solle, 2008). En effet, les universités évoluent
aujourd’hui dans un environnement changeant et subissent des pressions externes et internes.
C’est donc surtout le contexte dans lequel s’inscrivent ces organisations qui les rendent
obsolètes (Solle, 2008).

Ensuite, le modèle dit collégial (Goodman, 1962 ; Millett, 1962) souligne que
l’organisation est composée de plusieurs groupes, comme par exemple les professeurs ou les
étudiants dans les universités, qui partagent des objectifs communs et dont la culture forte
influence les décisions politiques prises par le management de l’organisation. La base de
l’organisation est constituée des professionnels, qui disposent de l’autorité (Mainardes et al.,
2011).

Puis, le modèle politique développé par Baldrige (1971) et repris par Pfeffer et
Salancik (1974) met l’accent sur les conflits d’intérêts qui parcourent les différents groupes
présents dans l’organisation. Ce modèle souligne que ces groupes poursuivent leurs propres
objectifs et leurs propres stratégies. Ces rapports de pouvoir sont donc à prendre en compte
lors de l’étude des prises de décision au sein de ces organisations (Musselin, 2012).

Enfin, Cohen, March et Olsen (1972), Cohen et March, (1974) et suivi par Ellström
(1983) proposent le modèle de « l’anarchie organisée ». Ce modèle met l’accent sur la
rationalité limitée de la prise de décision des acteurs. Les auteurs vont alors souligner que ces
organisations n’ont pas de but partagés et cohérents. La participation des acteurs aux prises de
décision n’est pas continue. Le modèle décisionnel caractéristique de ces « anarchies
organisées » est celui dit de la « poubelle » (garbagecan model).
Dans le même ordre d’idées, Weick (1976), Douglas et Weick (1990) développent le
concept de « Loosely Coupled Systems », selon lequel la nature de la tâche détermine la
structure organisationnelle. Il y a une haute résistance au changement et au contrôle. Les
processus de changement ont tendance à être ambigus et problématiques dans la mesure où les
structures organisationnelles ne sont pas clairement définies.

39
2.2. Le cas particulier des universités

Parmi toutes les organisations pluralistes, les universités font l’objet d’une attention
particulière dans la littérature. Ainsi, au cours des années 1990, se développe le concept
d’ « université entrepreneuriale » (Clark, 1998, 2004 ; Marginson et Considine, 2000 ;
Slaughter et Leslie, 1997) sous l’influence de l’ouvrage de Clark (1998).

Selon Meister-Scheytt et Scheytt (2005), l'université présente un degré


particulièrement exceptionnel de complexité. Les universités interagissent avec beaucoup,
sinon tous, les sous-systèmes de la société et sont influencés par un grand nombre de facteurs
tels que la politique, l'économie, la culture, l'éthique, la morale, la science, l'art, la religion,
parmi d'autres (Luhmann, 1987).

Selon plusieurs auteurs (Brunsson et Sahlin-Andersson, 2000 ; Musselin, 2006,


2008b ; Krücken et Meier, 2006 ; De Boer, Enders et Leysite, 2007 ; Whitley, 2008), les
universités se transforment en organisations, c’est-à-dire qu’elles passent de communautés
collégiales d’universitaires à des organisations à structure hiérarchique. Les universités
tendent à passer du modèle de l'hébergement (pour personnel hautement qualifié) au modèle
de l'employeur (Musselin, 2008a). Auparavant, « les universités étaient avant tout des
espaces hébergeant (dans des conditions plus ou moins satisfaisantes) des universitaires
auxquels elles n'offraient pas grand-chose et auxquels elles ne demandaient en revanche
quasiment rien » (Musselin, 2008a : 75). Trois raisons laissent à penser cela : l'autonomie
(délégation de la gestion du personnel aux universités) ; le développement des procédures
d'évaluation pointant les performances individuelles des universitaires ; l'utilisation
croissante des techniques de gestion (pour certains auteurs les universitaires sont en train de
devenir des « professionnels administrés »). Dans ce contexte, les dirigeants universitaires
sont amenés à devenir des gestionnaires et à piloter l’université dans son ensemble de manière
stratégique. Les universités deviennent productrices d'action publique, alors qu'auparavant les
stratégies découlaient des décisions des universitaires eux-mêmes ou des orientations des
autorités publiques. L’auteure souligne l’instauration d'une relation employeur/employé entre
chaque institution et son personnel. Musselin (2008a) souligne sur ce point un paradoxe : les
évolutions que connaissent les universités françaises transforment certes la nature de
l’affiliation des universitaires à leur institution mais dans le même temps, la stabilité
institutionnelle est devenue suspecte. On obtient donc un schéma contradictoire qui vise à

40
renforcer l'affiliation des universitaires à leur institution et dans le même temps à encourager
la mobilité et la flexibilité. Cette tendance devrait s'accroître dans les prochaines années selon
l’auteure. Des affiliations multiples se développent lorsque l'emploi ordinaire n'assure pas un
revenu suffisant.
Selon Musselin (2008a), Des techniques de gestion empruntées au secteur productif
(fiches de temps par exemple) ont été introduites afin de mieux contrôler les activités
accomplies et le temps passé à les réaliser. Cela affecte le choix et le travail des universitaires
qui ont ainsi une meilleure vision de la tâche qui a un meilleur indicateur de performance.
Auparavant, les universitaires contrôlaient eux-mêmes l'organisation de leur temps et la
répartition de ce temps entre les différentes tâches.
Les universitaires sont censés non seulement apporter leur contribution à la science et
au développement de leur discipline mais également à la performance globale de leur
université ou organisation, performance globale qui est encouragée par les accréditations type
equis dans les Ecoles de Management (qui demandent à l'ensemble du personnel de se
conformer aux critères d'accréditation) et les classements internationaux type Shanghai qui
évaluent la performance globale.
L'évaluation des activités de recherche est devenue obligatoire en France alors
qu'avant seuls les candidats volontaires à une promotion subissaient une évaluation. Rien ne
les obligeait à soumettre des articles aux revues, ni à assister aux conférences.
D'autres formes d'évaluation se sont développées, pour tenter de discipliner les
comportements et de limiter la libre utilisation du temps et des ressources : contrôle accru de
l'exécution des tâches d'enseignement, suivi plus strict des dépenses, mécanismes incitatifs
d'affectation du budget, etc. La plupart des universitaires sans grande renommée
internationale subiront, selon Musselin (2008a), plus de contraintes dans leurs activités
quotidiennes d'enseignement ou de recherche et seront plus engagés dans les missions
collectives. L'évaluation externe par les pairs est renforcée et utilisée par les responsables
universitaires comme instrument légitime de changement.
L’auteure constate que le besoin grandissant d’individualiser le profil des universités
et d’impliquer les universitaires dans la mission de l’université va nécessiter l’émergence
d’une identité organisationnelle des universitaires.
Musselin (2008a : 155) suggère que « le pouvoir traditionnel de confrérie qui
préservait leur autonomie » est ébranlé dans la mesure où les priorités de l’enseignement et de
la recherche sont fixées par des normes gestionnaires. Elle identifie également une série de
mesures de contrôle de l’agenda professionnel (prescription de portefeuilles de tâches, contrat

41
d’exécution, fiches de temps, etc.) ainsi que des techniques de management sur le lieu de
travail (« présence attendue des professeurs sur leur lieu de travail, affectation du personnel à
des tâches et des projets spécifiques à l’intérieur d’un budget temps établi » (2008a : 155)) qui
affecte la liberté des universitaires.

Tableau 2 : Les modèles de fonctionnement de l'université


Modèle Auteurs de référence
Collégial ou clan Goodman, 1962 ; Millett, 1962 ; Ouchi, 1980
Blau, 1973 ; Corson, 1975 ; Maassen et Potman, 1990 ;
Bureaucratie professionnelle
Mintzberg, 2010
Politique Baldrige, 1971 ; Pfeffer et Salancik, 1974
Cohen et March, 1974; Cohen, March et Olsen, 1972 ;
Anarchie organisée
Douglas et Weick, 1990; Ellström, 1983 ; Weick, 1976
Modèle de marché (plus présent dans le secteur Cameron et Ettington, 1988 ; Ouchi, 1980
privé)
Clark, 1998, 2004, 2005 ; Etzkowitz, 2003, 2004 ;
Université entrepreneuriale
Marginson et Considine, 2000 ; Slaughter et Leslie, 1997
Brunsson et Sahlin-Andersson, 2000 ; De Boer, Enders et
Construction des universités en organisations à
Leisyte, 2007 ; Krücken et Meier, 2006 ; Musselin, 2006,
structure hiérarchique
2008a ; Whitley, 2008

Si le modèle traditionnel de la bureaucratie professionnelle permettait aux EC de


disposer d’une très grande autonomie et d’ignorer les besoins de l’établissement qui les
emploie (Mintzberg, 1978), les universités évoluent sous la pression des réformes vers un
modèle « entrepreneurial » (Clark, 1998). Dès lors, se pose la question de la compatibilité
entre un engagement des professionnels (en termes de sentiment d’appartenance et de lien
psychologique) envers cette nouvelle organisation, qui s’apparente de plus au plus aux
modèles hiérarchiques des organisations privées, et un engagement envers la profession, qui
repose sur des valeurs professionnelles d’autonomie. Ces deux engagements sont-ils
conciliables ? C’est à cette question qu’est consacrée la troisième et dernière section de ce
premier chapitre.

42
Section 3 : Vers une possible réconciliation entre acteurs professionnels et
organisations ?

Nous verrons dans un premier temps que la question de la compatibilité entre professions et
organisations ne se pose pas de la même manière selon les professions (3.1), puis nous
verrons qu’une réconciliation est possible, grâce aux valeurs communes aux professions et
aux organisations (3.2).

3.1. Des situations différenciées selon les professions

Même s’il est difficile de nier les tensions existantes entre professions et management,
tensions qui ont amené plusieurs auteurs à parler de « déclin des professions » (Freidson,
2001), selon Dubar Tripier et Boussard (2011), il serait délicat de parler de déclin de toutes
les professions. Certaines professions, telles que les professions de coordination par exemple,
connaissent une progression dans la hiérarchie sociale, alors que certaines autres connaissent
effectivement un déclin, telles que « les professions associées à une logique de « production »
étroites ou de services, notamment dans le champs de l’État providence » (Duran et Le
Bianic, 2008 : 26-27.
Dès lors, plusieurs auteurs suggèrent que cette opposition ne rend plus compte de la
complexité des relations entre les acteurs professionnels et les organisations qui les emploient
(Bezes et Demazière, 2011 ; Noordegraaf, 2011). Bezes et Demazière (2011) dressent une
liste d’éléments qui remettent en cause l’analyse classique de l’opposition entre professions et
organisations.
Tout d’abord, il convient de souligner que l’application du NPM varie selon les pays
dans lesquels il est mis en œuvre, arborant des formes et temporalité spécifiques suivant qu'il
est implanté dans les pays d'Europe continentale (Allemagne, France, Pays-Bas), scandinaves
(Suède, Danemark) ou nord-américains (États-Unis, Canada).
Ensuite, il y a une nécessité de réinterroger les rapports entre professions et
organisations : est-ce toujours une recherche d'indépendance contre une recherche de contrôle
? Les professions ne sont pas des entités isolées, équivalentes, homogènes, immuables et
stabilisées. On ne peut pas considérer l’ensemble des diverses professions sous l'angle
principal de leur autonomie. En effet, elles sont trop différentes au plan du niveau de
complexité des tâches à accomplir, l'importance accordée aux problèmes à résoudre, le degré

43
d'ésotérisme des savoirs à mobiliser, le prestige du statut social, l'exclusivité des compétences
spécialisées, l'autorité morale des leaders, le poids des institutions professionnelles… (Bezes
et Demazière, 2011). Elles ne sont donc pas affectées de la même manière par les réformes.
Même au sein d'un même secteur, le secteur hospitalier par exemple, les impacts du NPM
sont différents selon le groupe professionnel : les médecins conservent davantage leur
autonomie que les infirmières. Par ailleurs, plusieurs éléments modèrent les tensions entre
NPM et professions : la valeur de service public en est un exemple.

Les professions sont également traversées par des divisions internes qui impliquent
qu'elles ne sont pas forcément « soudées » autour d'intérêts communs. Ainsi, Paradeise (2011)
a mis en avant à quel point un groupe professionnel est segmenté dans ses valeurs, ses
références de qualité, ses pratiques, ses intérêts. S’intéressant en particulier aux EC, Paradeise
(2011) a souligné qu’ils se distinguent en fonction des disciplines. Par exemple, les EC des
différentes disciplines de Sciences Humaines et Sociales n’utilisent pas les mêmes critères
pour juger la production scientifique (Lamont, 2009 ; cité par Paradeise, 2011), ou encore,
une étude comparative menée par Becquet et Musselin (2008) a montré que des historiens,
gestionnaires, physiciens et biologistes ont une vision différente de la valorisation des
activités d'enseignement et de recherche et se distinguent dans leurs pratiques, allant des
pratiques les plus individuelles (leur coût étant évalué selon le temps passé), aux plus
collectives (avec une division du travail précise et des dispositifs coûteux). Les auteures
observent alors diverses formes de coopération, autant internes qu'externes. Par ailleurs, le
statut universitaire des EC ne leur apporte pas les mêmes perspectives de carrière interne et
d'accès à des marchés de prestations externes, ce qui contribue à les distinguer davantage, de
même que la pondération entre tâches d’enseignement, de recherche, d’administration, la
pratique d’activités externes (clinique, consultation, exercice du métier d’avocat, par exemple)
(Paradeise, 2011).

Par ailleurs, les réactions des professionnels face aux changements imposés de
l'extérieur ne sont pas uniquement collectives et protestataires mais également individuelles ;
certains s’approprient les changements, d’autres y résistent, d’autres encore y sont indifférents
ou s’en détournent. Plus vraisemblablement, les acteurs professionnels sont non seulement
associés ou enrôlés, mais souvent renforcés et rétribués pour leur contribution à la mise en
œuvre des changements (Bezes et Demazière, 2011).C'est notamment le cas des acteurs

44
professionnels qui portent les logiques managériales, en occupant des fonctions de pilotage et
de contrôle au sein de ces organisations.
La littérature a mis en avant l’opposition entre professionnels, centrés sur la
connaissance, et managers, axés sur l’animation des hommes. Ainsi, ces derniers privilégient
une orientation organisationnelle et « valoriseraient plutôt la loyauté à leur organisation,
l’accroissement de leur pouvoir et les objectifs de leur entreprise » (Roger et Roger, 2001 :
2). Toutefois, la littérature récente (Bezes et al., 2011 ; Gangloff, 2009 ; Noordegraaf, 2011 )
propose de dépasser cette analyse binaire en soulignant l’émergence de formes de
professionnalisme et d’organisation hybrides où la frontière entre managers et professionnels
n’est pas si marquée et où il s’agirait davantage d’une redistribution de l’autonomie que de sa
perte (Paradeise, 2011). La littérature appelle en effet à de nouvelles formes
organisationnelles, capables de répondre aux besoins du travail professionnel, de définir et
mettre en avant les valeurs professionnelles, tout en invitant également les professionnels à
développer des compétences organisationnelles (Noordegraaf, 2011). Ainsi, les universitaires
conservent les fonctions d'autorité politique et de gestion des ressources. Dès lors, au lieu
d’une opposition pure entre profession et management, les auteurs observent plutôt une
hybridation des rôles professionnels et managériaux (Grenier et al., 2014, Kitchener, 2000),
ou une superposition ou une coexistence des deux fonctions (Grenier, Bernardini-Perinciolo et
Zeller, 2014 ; Ferlie et Geraghty, 2005), concernant les acteurs professionnels qui portent les
logiques managériales, en occupant des fonctions de pilotage et de contrôle au sein de ces
organisations.

3.2. Une possible réconciliation entre valeurs professionnelles et organisationnelles

La littérature dominante suggère que les professionnels qui rejoignent une organisation
doivent choisir entre un engagement qui va à leur organisation ou engagement qui va à leur
profession, les deux types d’engagement étant incompatibles (Etzioni, 1964 ; Gouldner,
1954 ; Parsons, 1947), plusieurs études suggèrent qu'un professionnel peut afficher à la fois
un engagement envers sa profession et son organisation. Cherchant à dépasser cette analyse,
certains travaux suggèrent que le degré du conflit entre profession et organisation varie selon
le degré d'orientation professionnelle de l'acteur (Gangloff, 2009 ; Thornton, 1970). Par
conséquent, un professionnel très engagé dans les valeurs de la profession montrera une
résistance plus forte tout en cherchant à être soutenu par ses pairs à l'intérieur comme à
l'extérieur de l'organisation (Gangloff, 2009). Plus le contrôle organisationnel imposé aux

45
professionnel sera lourd, plus la pression exercée sur eux sera importante et générera le
conflit, plus se creusera le fossé entre valeurs professionnelles et valeurs organisationnelles
(Freidson, 1994).

Dès lors, afin de favoriser une double appartenance à la fois à l’organisation et à la


profession, la littérature recommande de valoriser le professionnel comme étant un membre
de sa profession (Thornton, 1970), d’instaurer un système de socialisation des professionnels
au contact des managers (Abernethy et Stoelwinder, 1995 ; Comerford et Abernethy, 1999,
Fablet, Serval et Zeller, 2015), ou encore de faire en sorte que les buts de l’organisation et
ceux des professionnels se rejoignent autour de valeurs communes telles que l’excellence
technique, l’innovation (Roger et Roger, 2001), la qualité des services, l’orientation vers le
client, la compétitivité et la survie économique (Abernethy et Stoelwinder, 1995 ; Comerford
et Abernethy, 1999). L’objectif est de favoriser une culture organisationnelle fondée sur les
buts et valeurs des professionnels, et les associer aux processus de gestion de l'organisation. Il
appartient alors aux gestionnaires d'adopter un discours acceptable par les professionnels car
les processus de gestion doivent être légitimes aux yeux des professionnels (Gangloff, 2009).

Un ensemble de travaux relativise la théorie de l’incompatibilité entre engagement


professionnel et engagement organisationnel. Cette littérature ne nie pas les conflits existants
entre profession et organisation mais suggère qu’un professionnel peut être engagé à la fois
envers sa profession et son organisation sous certaines conditions. Ces conditions sont de
fonder la culture organisationnelle sur les buts et valeurs professionnels et d’associer les
professionnels au processus de gestion de l’organisation.

CONCLUSION DU CHAPITRE 1

Les EC sont des professionnels disposant d’une forte autonomie de contrôle de leurs activités
et soumis à des valeurs et des logiques professionnelles. Ils exercent leurs activités
professionnelles au sein d’organisations pluralistes en pleine mutation. En effet, les réformes
du NPM poussent ces organisations à évoluer vers un modèle « entrepreneurial » avec une

46
hiérarchie forte, et introduit la notion de performance. Par conséquent, des logiques
managériales prennent place aux côtés des logiques professionnelles.
Même s’il est difficile de nier le rapport conflictuel qui existe entre les professionnels
et les organisations qui les emploient, nous avons souligné dans ce premier chapitre les
éléments qui remettent en cause la théorie de l’incompatibilité entre engagement
professionnel et engagement organisationnel. Les professionnels sont donc appelés à prendre
également en compte les besoins de leur organisation en se mobilisant collectivement pour
améliorer sa performance. Le chapitre suivant explore ce concept de mobilisation collective.

47
CHAPITRE 2. LA MOBILISATION COLLECTIVE DES
PROFESSIONNELS, ENTRE ENGAGEMENT ORGANISATIONNEL
ET ENGAGEMENT PROFESSIONNEL

Le chapitre 2 explique le concept de mobilisation collective. L’objectif de la mobilisation est


d’adopter des comportements orientés vers les priorités organisationnelles (section 1). Il
s’agit d’un concept francophone ayant fait l’objet de peu de recherches mais dont la portée est
intéressante dans la mesure où il synthétise et dépasse d’autres concepts comportementaux
(section 2).
La mobilisation collective ne se décrète pas par l’organisation. Les professionnels
peuvent être très mobilisés, mais pas forcément en direction des priorités organisationnelles, à
savoir la performance organisationnelle en ce qui concerne notre recherche. Dès lors, c’est en
s’intéressant aux fondements psychologiques de leur mobilisation collective que l’on
comprendra l’orientation de leurs comportements (section 3).

Section 1 : La mobilisation collective : une action collective dirigée vers un


objectif partagé

La mobilisation est un concept est un terme apparu dans la littérature francophone en gestion
des ressources humaines dans les années 1990. Le terme « collectif » ne sera ajouté que dans
les années 2000. C’est un concept comportemental qui provient en grande partie des avancées
américaines concernant le comportement humain en organisation. C’est en effet outre-
Atlantique que le domaine du comportement organisationnel est le plus développé. Les
premières études dans ce domaine remontent aux années 70 (Bourion, Bournois, Laroche et
Plane, 2012). Le concept a donc évolué et s’est enrichi au fil des années. Aujourd’hui, le
terme « mobilisation » est fréquemment employé mais le sens n’est pas univoque. Nous
tentons donc de définir un terme qui ne bénéficie pas d’un consensus. Pour cela, nous verrons
dans premier temps qu’il existe plusieurs approches de la mobilisation collective (1.1) Dans
un deuxième temps, nous clarifierons les éléments qui composent la définition de la
mobilisation collective (1.2).

48
1.1. Plusieurs approches de la mobilisation collective : instrumentale ou compréhensive,
individuelle ou collective

Nous verrons dans un premier temps que la mobilisation collective est à la fois un processus
(l’action de mobiliser) et le résultat de ce processus (ou état : être mobilisé ou dans une
conception instrumentale : « avoir des ressources humaines mobilisées ») (1.1.1.). Dans un
second temps, nous exposerons les principales définitions de la mobilisation (1.1.2). Dans un
dernier temps, nous verrons qu’il existe également deux façons d’envisager la mesure de la
mobilisation collective : une façon collective qui mesure la mobilisation au niveau groupal (la
mobilisation est collective parce qu’elle concerne tous les membres du groupe) et une façon
individuelle qui mesure la mobilisation au niveau individuel (la mobilisation est collective
parce que les comportements adoptés se dirigent vers une œuvre collective, un individu est
donc mobilisé collectivement) (1.1.3).

1.1.1. Une conception instrumentale (processus) ou compréhensive (état) de la mobilisation


collective

La mobilisation collective appréhendée en sociologie désigne « le processus par lequel un


groupe mécontent assemble et investit des ressources dans la poursuite de buts propres »
(Oberschall, 1973 : 28), on parle alors de « mobilisation des ressources ». Dans ce dernier cas
de figure, c’est-à-dire lorsque la mobilisation est étudiée comme un processus, elle est une
activité à finalité instrumentale (Lapeyronni, 1986) : on s’intéresse alors à « comment
mobiliser ». La même vision instrumentale se retrouve dans les études en gestion stratégiques
des ressources humaines (GSRH) avec la notion de « mobilisation des ressources humaines
(RH) ». Les ressources à mobiliser pour que l’organisation atteigne ses buts sont donc les
employés. La mobilisation est alors un moyen prescriptif d’amener l’ensemble du personnel à
atteindre un but organisationnel. Les hommes en entreprise sont considérés comme une
ressource dont dispose l’entreprise et qu’elle doit diriger dans le bon sens (Aït Razouk, 2007).
Ce qui va particulièrement intéresser ces auteurs est l’étude du lien entre les pratiques dites
« mobilisatrices » et la performance de l’organisation. Ils étudient alors le processus de
mobilisation : « comment mobiliser » les membres de l’organisation en se focalisant sur les
pratiques de ressources humaines, souvent nommées « pratiques mobilisatrices ». Ces études
ne décrivent pas comment les individus se mobilisent et quelles formes prend cette

49
mobilisation (quelles conduites sont adoptées). Le terme « collectif » est peu présent dans ces
études en GSRH, elles évoquent simplement « la mobilisation des RH » ou « la mobilisation
du personnel ».
La mobilisation collective appréhendée en sociologie a classiquement une résonnance
contestataire mais ne bénéficie pas d’un consensus quant à ce qu’elle recouvre. Chazel (1975)
souligne que la mobilisation collective a d’abord été étudiée comme des conduites permettant
le passage à la modernité, les auteurs (notamment Deutsch, 1953) utilisant alors le terme
« mobilisation sociale ». La mobilisation collective renvoie alors à un état, qui peut se
mesurer à un niveau collectif (et non pas à un niveau individuel) par des indicateurs tels que
des taux (Deutsch, 1966, cité par Barraud-Didier, 1999) (par exemple, on parlera d’une forte
mobilisation si le mouvement a concerné un taux de population élevé). En gestion, Wils,
Labelle, Guérin et Tremblay (1998), Tremblay et Wils (2005) et Bichon (2005) vont
s’intéresser à l’état de mobilisation et essayer de décrire les conduites (modalités d’action). Ils
vont également ajouter le terme « collective ».
Pour Bichon (2005a, 2005b), l’état de mobilisation correspond à une approche
individuelle de la mobilisation, qui revient à s'intéresser à ce que signifie « se mobiliser »
pour le personnel. Le processus de mobilisation, quant à lui, correspond à une approche
managériale qui constitue un ensemble de pratiques de gestion, il s’agit d’une démarche
essentiellement holiste, descendante, visant à mobiliser le personnel dans le sens des priorités
organisationnelles. Son point de vue s’oppose à celui de Barraud-Didier (1999). En effet,
l’auteure suggère que la mobilisation ne peut pas être individuelle. Elle concerne l’ensemble
du personnel et ne peut donc pas être appréhendée à un niveau individuel.
Les auteurs qui étudient le processus de mobilisation ont tendance à s’intéresser aux
pratiques de mobilisation et les auteurs qui étudient l’état de mobilisation ont tendance à
s’intéresser à l’individu mobilisé collectivement. Ces deux approches sont résumées dans le
tableau 1.

50
Tableau 3 : Les deux approches de la mobilisation collectives, exprimées par les auteurs
Approche Approche compréhensive Approche instrumentale
Auteurs (état de mobilisation) (processus de mobilisation)
Barraud-Didier « avoir des ressources humaines
processus de mobilisation
(1999 : 8) mobilisées »
« source de la mobilisation » (à savoir
Guerrero et Sire « description des comportements et des pratiques de GRH et de management
(2001) performances des salariés mobilisés » pouvant améliorer la mobilisation des
salariés)
approche managériale (un ensemble de
pratiques de gestion, une démarche
Bichon s’intéresser à ce que signifie « se
essentiellement holiste, descendante, visant à
(2005a, 2005b) mobiliser »
mobiliser le personnel dans le sens des
priorités organisationnelles)
à la fois « l’état de mobilisation d’un
individu ou d’un groupe (c'est-à-dire
leurs attitudes et comportements de
Wils et al. « processus organisationnel de
mobilisation) » et le « processus
(2008 : 11) mobilisation »
individuel de mobilisation (c'est-à-dire le
processus psychologique expliquant
comment on arrive à cet état »),

Notre recherche s’inscrit dans la première approche, que nous avons nommée
« approche compréhensive » dans la mesure où elle s’attache à comprendre et à décrire ce
qu’ « est » un EC mobilisé collectivement à l’égard de la performance de son organisation.

1.1.2. Principales définitions de la mobilisation collective et inscription des auteurs dans les
deux approches

La première définition de la mobilisation (le mot collectif n’apparait pas encore) que nous
avons trouvée dans la littérature est attribuée à Louart et Beaucourt (1992 : 55). Les auteurs
présentent la mobilisation comme « un moyen de faire converger les efforts individuels »
(tableau 4). Ils envisagent donc la mobilisation comme un processus et à un niveau individuel.

En 1997, Grisé, Asselin, Boulianne, et Lévesque, (1997 : 162) envisagent la


mobilisation comme « tous les efforts des individus pour exploiter les capacités des
ressources humaines ». Le terme « capacités » renvoie ici à la notion de compétences. Ainsi,
pour Grisé et al. (1997), la mobilisation représente les efforts accomplis par les individus pour
mettre en œuvre leurs compétences. Le niveau est également individuel.

51
En 1998, Wils, Labelle, Guérin, et Tremblay proposent une définition de la mobilisation
fondée sur une étude menée auprès de professionnels en gestion des ressources humaines et
de membres de l’Association des professionnels en ressources humaines du Québec
(APRHQ) et de l’Ordre professionnel des conseillers en relations industrielles du Québec
(OCRIQ). Ils se sont attachés à décrire les comportements d’une personne mobilisée : « une
personne qui déploie volontairement des efforts au-dessus de la normale pour améliorer
continuellement son travail, pour l’aligner stratégiquement (c’est-à-dire sur les priorités
organisationnelles) et pour le coordonner au sein de son équipe de travail en coopérant » Wils
et al. (1998 : 32). Ces efforts sont regroupés en trois dimensions : une dimension individuelle
qui consiste à fournir des efforts d’amélioration continu (travail de qualité) ; une dimension
collective qui consiste à fournir des efforts de coordination spontanée (travail d’équipe) et une
dimension organisationnelle qui consiste à fournir des efforts d’alignement stratégique (travail
avec valeur ajoutée dans le sens des priorités organisationnelle)13. La dimension collective fait
son apparition, ainsi qu’une dimension organisationnelle. Ainsi, certains comportements de
mobilisation ont une dimension collective dans le sens où ils bénéficient aux membres de
l’équipe de travail et certains comportements ont une dimension organisationnelle parce qu’ils
bénéficient à l’organisation.

Barraud-Didier (1999) définit la mobilisation comme « la mise en commun d’efforts en


vue d’atteindre un objectif organisationnel primordial ». L’accent est mis sur le but à
atteindre. Les efforts de mobilisation sont orientés vers un objectif organisationnel, ce qui
rejoint la dimension organisationnelle du concept de Wils et al. (1998). Barraud-Didier (1999)
concentre ses recherches sur les pratiques de mobilisation, qui font partie du processus de
mobilisation. L’auteure définit les pratiques de mobilisation comme « les actions de GRH,
imposées par l’environnement de l’entreprise et précédées d’une situation de crise, destinées à
développer l’implication organisationnelle et l’engagement au travail des salariés en vue de
rendre l’organisation globalement plus performante » (1999 : 9), « les pratiques de
mobilisation représentent dès lors un sous-ensemble de pratiques de GRH ; il s’agit de
pratiques de GRH destinées à augmenter le niveau d’implication du salarié dans son
organisation et dans son emploi » (1999 : 9). La définition de Guerrero et Sire (2001 : 86)
prend également en compte un but organisationnel à atteindre : « Mobiliser les RH dans
l’entreprise c’est agir sur l’attachement du salarié dans le but de développer des attitudes et

13
Nous reviendrons sur les dimensions dans la partie 2.2. Les dimensions de la mobilisation collective : des
comportements orientés vers une œuvre collective.

52
des comportements individuels qui concourent à la réalisation des objectifs de
l’organisation ». Cette étude, ainsi que celle de Barraud-Didier, Guerrero, et Igalens (2003)
s’inscrivent dans la même approche prescriptive que celle de Barraud-Didier (1999).

Plus tard, Tremblay et Wils (2005 : 38) suggèrent une définition dans la même veine
que celle de Wils et al. (2008), après un travail rigoureux de recensement des concepts
proches dans la littérature14 : « Une masse critique d’employés qui accomplissent des actions
(faisant partie ou non de leur contrat de travail, rémunérée ou non) bénéfiques au bien-être des
autres, de leur organisation et à l’accomplissement d’une œuvre collective ». Leur approche
de la mobilisation collective, envisage que la mobilisation est « collective » car, d’une part,
une majorité des membres du groupe est mobilisée individuellement (phénomène de masse).
D’autre part, la mobilisation est « collective » car les comportements adoptés s’orientent vers
une œuvre collective (le but poursuivi pour l’organisation). L’étude de Tremblay et Wils
(2005) pose ainsi la question de la taille du groupe, alors que celle de Wils et al. (1998) ne la
pose pas et se concentre à décrire les comportements d’une personne mobilisée.

Bichon (2005a) reprend la définition de Wils & al. (1998) et Guerrero & Sire (2001).
Les définitions de Bichon (2005a) et Guéry (2009) précisent toutes les deux le caractère
volontaire de l’adoption des comportements de mobilisation. Bichon (2005a, 2005b)
s’intéresse à l’état de mobilisation dans une approche individualiste (plus particulièrement
aux efforts de collaboration). Dès lors, il cherche à comprendre, à travers le discours des
répondants, ce qui les pousse à adopter des conduites de mobilisation collective. Il va mettre
en avant dans sa thèse (Bichon, 2005a) que les pratiques de GRH individualisées permettent
l’émergence de conduites de mobilisation collective à travers une étude de cas approfondie de
la société Cap Gemini, un des leaders mondiaux du secteur des SSI. La problématique
centrale de sa thèse est de démontrer comment les pratiques d’individualisation de la GRH
permettent une mobilisation collective alors que la littérature présente l’individualisation des
pratiques de GRH et le travail collectif comme incompatibles. Les salariés sont des ingénieurs
en informatique qui fonctionnent en équipe de projet, l’adoption de comportements de
mobilisation collective est donc un facteur clé de succès pour l’organisation. Selon l’auteur,
l’adoption de conduites de mobilisation collective se justifie par la combinaison de logiques
instrumentales (mais les conduites sont de court terme) et identitaires de la collaboration. La

14
Nous reviendrons sur ces concepts dans la partie 2.1. Les fondements du concept de mobilisation collective.

53
logique est instrumentale car c’est à travers la collaboration qu’ils atteindront leurs objectifs
de carrière personnels. En ce qui concerne le métier d’ingénieur en informatique, l’intérêt
pour la carrière est d’apprendre :
« La coopération entre les gens n’est pas totalement naturelle. Il faut que chacun y ait
un intérêt. En gros, l’intérêt des gens, c’est d’apprendre. Il faut que chacun amène quelque
chose. Sinon, autrement, celui qui savait le plus s’appauvrit. Donc il faut toujours trouver…
Mais on n’y arrive pas toujours ! L’idée est de mettre les gens sur des projets dans lesquels ils
amènent quelque chose, mais dans lesquels aussi ils apprennent quelque chose. Lorsque les
gens n’apprennent plus rien, ils se lassent et ça ne les intéresse plus » (un Skill Group
Manager) (Bichon, 2005b : 372).
La logique est identitaire parce qu’un individu forge son identité par la reconnaissance
des autres :
« Je pense qu’on est dans des métiers où la complexité de notre travail fait qu’en retirer
une reconnaissance sociale, c’est difficile en dehors de… Moi, je ne peux pas aller raconter
facilement ce que j’ai fait dans ma journée et me dire : « Tiens, là-dessus, j’ai fait un truc qui
est vraiment bien ». Le travail d’équipe permet aussi d’avoir cette émulation et cette critique
quant à son efficacité qu’on n’a pas aussi facilement quand on travaille seul. Pour moi, c’est
surtout ça : la prise de recul et être confronté à des gens qui ne sont pas spécialement d’accord
» (un collaborateur) (Bichon, 2005b : 267). Ainsi, ils produisent des efforts envers le groupe
afin de parvenir à leur but personnel.
En reconnaissant chaque individualité au sein du collectif, la société Cap Gemini
encourage les conduites de mobilisation collective :
« Le fait d’individualiser la GRH alors que le travail se fait en équipe ne me paraît pas
trop être un paradoxe. Non. Je vais prendre une analogie avec le sport. Dans une équipe de
rugby, il y a un entraîneur pour les arrières et il y a un entraîneur pour les avants. Dans une
équipe de foot, il y a un entraîneur pour le goal. Le goal ne fait pas le même entraînement que
l’avant-centre ou que le tireur de coup franc qui va s’entraîner. Il y a un côté individualiste :
chacun va travailler ses compétences pour être plus fort dans ce qu’il amène à l’équipe. Et
après, il y a le rôle de l’entraîneur qui est de faire que toutes ces individualités marchent bien
ensemble. […] Qu’on travaille sur les compétences individuelles de chacun pour faire une
meilleure équipe, ça, ça ne me choque pas. Au contraire même, parce que c’est de là que vient
la force collective » (un Skill Group Manager).

54
La démonstration de Bichon (2005b) nourrit notre réflexion sur la compatibilité
entre l’autonomie des professionnels et l’appel à la mobilisation collective. Les
professionnels peuvent s’apparenter aux ingénieurs en informatique par le haut niveau de
compétences et l’autonomie dans le travail. Nous pouvons ainsi supposer qu’autonomie et
mobilisation collective envers une organisation ne sont pas incompatibles et que cette
situation peut se gérer par l’organisation.

Tableau 4 : Définitions de la mobilisation collective classées par approche « processus » et


approche « état »
Approche compréhensive (état) Approche instrumentale (processus)
Guery (2009 : 2) Barraud-Didier, Guerrero et Igalens (2003 : 3)
« La mobilisation des salariés, en tant qu’état, « Mobiliser les RH consisterait alors pour l’entreprise
correspond au déploiement délibéré par chacun à rassembler et utiliser les intelligences, les idées et les
d’eux de comportements orientés vers les motivations de l’ensemble de ses salariés ».
objectifs fixés par les dirigeants de
l’organisation ». Guerrero et Sire (2001 : 86)
« Mobiliser les RH dans l’entreprise c’est agir sur
Bichon (2005a : 51) l’attachement du salarié dans le but de développer des
« Nous désignons par « mobilisation collective » attitudes et des comportements individuels qui
l’acte manifesté volontairement et concourent à la réalisation des objectifs de
intentionnellement par le salarié, qui se traduit l’organisation ».
par des efforts déployés à l’égard des autres
membres de son collectif de travail ». Barraud-Didier (1999 : 31)
« La mise en commun d’efforts en vue d’atteindre un
Tremblay et Wils (2005 : 38) objectif organisationnel primordial ».
« Une masse critique d’employés qui
accomplissent des actions (faisant partie ou non Louart et Beaucourt (1992 : 55)
de leur contrat de travail, rémunérée ou non) La mobilisation est « moyen de faire converger les
bénéfiques au bien-être des autres, de leur efforts individuels, en les intégrant à une dynamique
organisation et à l’accomplissement d’une œuvre globale qui réponde aux objectifs de l’organisation ».
collective ».

Wils et al. (1998 : 32)


« Un(e) «employé(e) mobilisé(e) est une
personne qui déploie volontairement des efforts
au-dessus de la normale pour améliorer
continuellement son travail, pour l’aligner
stratégiquement (c’est-à-dire sur les priorités
organisationnelles) et pour le coordonner au sein
de son équipe de travail en coopérant. ».

Grisé et al. (1997 : 162)


« La mobilisation représente en fait tous les
efforts des individus pour exploiter les capacités
des ressources humaines ».

55
La plupart des recherches ont étudié la mobilisation de manière instrumentale,
cherchant principalement à établir des liens statistiques entre des pratiques mobilisatrices et la
mobilisation. Le courant de GSRH a enrichi la littérature à ce niveau. Très peu d’études
relèvent de la première approche. Ainsi, la littérature ne fournit pas de base théorique assez
stable pour appliquer ce concept à l’identique dans le cas des professionnels.

Notre recherche s’inscrit dans l’approche compréhensive. C’est en comprenant et


décrivant les comportements que les EC adoptent et pourquoi ils les adoptent que l’on sera
en mesure de proposer des pistes pour soutenir et encourager cette mobilisation collective.

1.1.3. Une conception individuelle et une conception collective de mesure de la mobilisation


collective

Pour Barraud-Didier (1999), la mobilisation ne peut concerner que l’ensemble du personnel


(conception collective). Dès lors, elle ne s’appréhenderait pas à un niveau individuel
(conception individuelle). Ainsi, les tenants de la première conception collective (Barraud-
Didier, 1999 : Morin, Guindon, et Boulianne, 1996) vont avoir tendance à élaborer une
échelle de mesure visant à évaluer le degré de mobilisation de l’ensemble des RH. Morin et
al. (1996) retiennent les critères « taux de rotation du personnel » et « taux d’absentéisme »
pour mesurer la mobilisation (cité par Barraud-Didier, 1999). Ainsi, ces auteurs vont
considérer qu’il y une forte mobilisation collective si les taux de rotation du personnel et
d’absentéisme sont faibles par exemple.
Les tenants de la conception individuelle (Bichon, 2005a, 2005b ; Tremblay et al., 2005
2005 ; Tremblay et Simard, 2005; Tremblay et Wils, 2005; Wils et al., 1998) mesurent la
mobilisation collective en retenant comme unité d’analyse l’individu mobilisé collectivement.
Bichon (2005a ; 2005b) propose une échelle de mesure de l’orientation collective de la
mobilisation à partir d’entretiens semi-directifs approfondis. Selon nous, envisager la
mobilisation d’un point de vue individuel intègre pleinement le collectif en tant qu’orientation
des efforts vers une œuvre collective d’une part, et en intégrant l’existence d’un phénomène
de masse d’autre part. Pour comprendre comment, pourquoi, et décrire les conduites, il
semble incontournable de retenir l’individu comme unité d’analyse, mais dans un contexte
d’orientation collective des comportements.

56
Tremblay et Wils (2005) soulignent qu’il existerait plutôt « une dynamique
mobilisatrice » (2005 : 43) avec à sa source des individus motivés et mobilisés
individuellement et lorsqu’une masse critique est atteinte, alors il y a mobilisation
collective. Cette approche à laquelle nous adhérons, permet de sortir du dilemme
individu/collectif mis en avant par Barraud-Didier (1999).
Devant le manque de connaissances existantes sur les comportements de
mobilisation collective, en particulier concernant les acteurs professionnels, nous
inscrivons notre recherche dans une approche compréhensive, c’est-à-dire celle qui
s’intéresse à ce qu’ « est » la mobilisation collective. En effet, n’inscrivant pas notre
réflexion dans une approche prescriptive et instrumentale qui considèrerait que
l'organisation structurelle prévaut sur les individus qui la composent, nous considérons
que la mobilisation collective ne peut se décréter.

1.2. Des caractéristiques du concept à clarifier

La partie suivante a pour objectif de clarifier les éléments de définitions que nous avons
relevés dans la littérature. Premièrement, nous expliquerons ce que les auteurs entendent par
des efforts « au-dessus de la normale » (Wils et al., 1998 : 32) qui peuvent dépasser le contrat
de travail, ne pas être rémunérée (Tremblay et Wils, 2005), et qui sont déployés
volontairement par l’individu (Bichon, 2005 ; Wils et al., 1998), de manière délibérée (Guéry,
2009) (1.2.1). Deuxièmement, nous clarifierons le terme « masse critique » (Tremblay ET
Wils, 2005). Enfin, nous questionnerons la durabilité des comportements de mobilisation : les
acteurs peuvent-ils être mobilisés au quotidien ou est-ce une force de réserve pour
l’organisation ? (1.2.3).

1.2.1. Des conduites volontaires qui dépassent les rôles prescrits par l’organisation

La première sous-partie interroge la liberté d’action des acteurs en organisation (1.2.2.1) et la


deuxième distingue les comportements prescrits par l’organisation de ceux qui dépassent le
rôle prescrit (1.2.2.2).

57
1.2.2.1. La liberté d’action des acteurs

L’une des questions fondamentales, lorsque l’on étudie la mobilisation collective des acteurs
en organisation, est : les comportements de mobilisation collective sont-ils librement adoptés
par les acteurs ou sont-ils prescrits par l’organisation ? La réponse à cette question dépend
selon nous en grande partie de la position paradigmatique du chercheur : est-ce que les
individus qui constituent une organisation sont considérés comme passifs et déterminés par la
structure de l’organisation, ou sont-ils libres de leur choix ?

Pour Cefaï (2007 : 40), l’agir ensemble est un comportement volontaire. L’auteur
précise que le comportement collectif « n’est pas l’effet d’une structure sociale, dont les
individus seraient des vecteurs inconscients ». Allport (1924) suggère néanmoins que les
conduites individuelles peuvent converger plus facilement grâce à un stimulus commun. Ces
conduites ne peuvent donc pas être prescrites, mais peuvent être encouragées. Ainsi, ce qui
pousse les individus à agir ensemble c’est la cause qui les réunit (Neveu, 2005) et l’atteinte
d’un but partagé (Cefaï, 2007). Notre recherche étudie comment la RS de la performance
organisationnelle (la cause qui réunit) élaborée par les professionnels, oriente leur
mobilisation collective envers l’organisation. En comprenant ce qui réunit les acteurs, les
organisations sont en mesure de soutenir et d’encourager leur mobilisation collective.

Ainsi, la mobilisation est un comportement discrétionnaire qui peut se définir comme


« un comportement qui est adopté à l’initiative de l’employé, c’est-à-dire une conduite qui va
au-delà des attentes affichées de l’organisation » (Bichon, 2005b : 58). L’employé qui met en
œuvre une action bénéfique à l’organisation ne le fait pas parce que l’organisation le lui a
prescrit ou parce qu’il reproduit des modes opératoires mais parce qu’il adopte des
comportements discrétionnaires (Bichon, 2005b). Bichon (2005b), en voulant attirer
l’attention sur cette liberté dont dispose un individu d’adopter des comportements de
mobilisation collective, préfère plutôt parler de « conduite » (p. 51) que de comportement,
afin de mettre l’accent sur le libre arbitre de l’individu dans le déploiement de ses efforts
envers l’organisation ou le groupe. « La mobilisation collective d’un employé correspond
donc, selon nous, à l’ensemble des conduites individuelles orientées vers le collectif de
travail, la notion de conduite allant beaucoup plus loin que le terme de comportement en
exprimant une autonomie de choix et une intentionnalité. Alors que les comportements
peuvent être objectivables ou résulter d’apprentissages conditionnés, les conduites sont

58
discrétionnaires en ce sens qu’elles proviennent d’une liberté d’action de l’individu. En effet,
l’idée de conduite se réfère à un sujet acteur et auteur de son comportement. » (Bichon,
2005b : 46).

Nous l’avons souligné, la particularité des travaux de Bichon (2005a, 2005b) sur la
mobilisation tient au fait qu’il place sa réflexion du côté de l’individu, inscrivant ses travaux
dans le paradigme individualiste, et se détachant ainsi des perspectives purement
organisationnelles qui prônent une démarche prescriptive et descendante. En ce sens, notre
réflexion se rapproche de la conception de Bichon (2005a). Selon lui, « il ne suffit pas
d’insérer les salariés dans des équipes de travail pour qu’ils acquièrent spontanément des
comportements de mobilisation collective. Si une structure spécifique favorise
l’établissement de la coopération, elle ne crée pas par elle-même ces pratiques coopératives,
chaque individu restant maître de son degré d’engagement collectif » (2005a : 50).

1.2.2.2. Des comportements « dans le rôle » ou « hors rôle »

Les comportements attendus par les organisations de la part de leurs membres sont nommées
dans la littérature « performance individuelle » ou « performance au travail ». Ces termes font
références à des comportements qui permettent à l’organisation d’atteindre ses objectifs.
Campbell (1990 : 402) définit la performance individuelle au travail comme « un ensemble de
comportements ou d'actions qui sont pertinents pour les objectifs d'une organisation et
pouvant être mesurés en termes de niveau de compétence ». Motowildo (2003 : 39) précise
que ces comportements sont intentionnels, et donc discrétionnaires : « La performance au
travail est définie comme la valeur totale attendue par l'organisation des épisodes de
comportements discrets qu'exerce un individu pendant une période de temps donnée ».

De nombreuses études ont montré que les membres des organisations, qu’elles soient
privées, à but non lucratif ou publiques, ne se contentent pas de prendre en charge les tâches
inscrites dans leur contrat (comportement prescrit, ou in-role performance), mais vont au-delà
des comportements prescrits en cherchant à satisfaire les buts organisationnels (extra-role
performance) (Simon, 1991). Katz et Kahn (1966) précisent que ces comportements, qui vont
au-delà de la tâche, contribuent à l'amélioration du fonctionnement et de la performance des
organisations. Katz (1964) souligne la fragilité du système social d’une organisation qui ne

59
dépendrait que de modèles de comportement prescrit. L’auteur énonce trois types de
conduites au-delà du rôle : coopérer avec les autres, protéger l'organisation d'un danger
imprévu, suggérer des améliorations organisationnelles. Borman et Motowidlo (1997) vont
plus loin en estimant que les comportements au-delà de la tâche contribuent davantage à la
performance des organisations que les comportements dans le rôle, car pour fonctionner, les
structures de travail des organisations contemporaines ont besoins de conduites orientées vers
l'entraide, la coopération, et le soutien aux objectifs de l'organisation.

Ainsi, depuis les années 80, la littérature anglo-saxonne a développé une série de
concepts relativement proches, qui rendent compte des comportements qu’adoptent les
acteurs en organisation, en prêtant particulièrement attention à ceux qui vont au-delà du rôle
prescrit (nommés extra-role performance, extra-role behaviors, ou performance hors-rôle,
performance hors tâche) (Van Dyne, Cummings et Parks, 1995, proposent le concept
intégrateur de « comportements hors rôle). Par opposition, les comportements prescrits (in
role performance, comportements dans le rôle, ou performance à la tâche) sont ceux contenus
dans les descriptions de poste. Les comportements dans le rôle sont spécifiques à chaque
emploi alors que les comportements hors rôle sont censés être relativement similaires dans
toutes les organisations, qu'elles soient publiques ou privées (Dyne et al., 1995).

A partir des travaux de Morrison (1994), Organ (1997) reconnait qu’il est difficile de
distinguer les comportements qui répondent au rôle de ceux qui vont au-delà du rôle, en
particulier pour les acteurs eux-mêmes. Ainsi, Morrison (1994) a souligné que 18 des 20
items censés mesurer les conduites hors rôle étaient considérés par une majorité des
répondants comme étant des comportements dans le rôle. Il ajoute que ces comportements
varient donc d'un employé à l'autre et entre les employés et les responsables. Organ (1997)
souligne que les concepts de rôle ou de poste sont flous. Katz et Kahn (1966) apportent un
éclairage sur ce concept de rôle à travers leur théorie des organisations. Ils suggèrent que le
rôle transmis par l’organisation de manière plus ou moins institutionnalisée (qui définit ce
qu’il faut faire ou ne pas faire) ne correspond pas au rôle que reçoit l’individu. Cette
distinction entre rôle transmis et rôle perçu est due, d’une part, à des différences de
perception, et d’autre part, à des différences de conception entre celui qui transmet le rôle et
celui qui le reçoit (le tenant du rôle forme sa propre conception de son rôle en fonction de ses
capacités et comportements et sur les conditions d’appartenance à l’organisation, Rojot,

60
2005). C’est bien le rôle reçu qui va influencer la performance et le comportement du titulaire
du poste.

Si les comportements prescrits des EC se rapportent aux obligations de service prévues par
décret15, c’est surtout leur conception personnelle du rôle qui peut nous aider à comprendre
leurs conduites de mobilisation collective.

1.2.2. Quelle taille du groupe pour parler de mobilisation collective ?

Quand peut-on parler de collectif ? Le sociologue américain Granovetter (1978) est le premier
à s’intéresser à la taille du groupe dans une situation de mobilisation collective. Il propose le
modèle de la masse critique selon lequel une minorité active et très motivée peut donner lieu à
une masse critique permettant à une action collective de prendre forme et de parvenir à son
but. Selon Olson (1965), plus le groupe est petit, plus la mobilisation collective est facilitée.
Pour rappel, Tremblay et Wils (2005 : 38) définissent la mobilisation collective comme « une
masse critique d’employés qui accomplissent des actions (faisant partie ou non de leur contrat
de travail, rémunérées ou non) bénéfiques au bien-être des autres, de leur organisation et à
l’accomplissement d’une œuvre collective ». Les auteurs ajoutent qu’un acteur qui rassemble
toute ses énergies pour une tâche individuelle n’est pas un acteur mobilisé, mais que si la
majorité des membres d’un groupe rassemble ses énergies pour accomplir une œuvre
collective, alors chacun des acteurs est mobilisé. Ils considèrent que la mobilisation est
collective et bénéfique à l’organisation lorsqu’elle concerne tous les niveaux infra-
organisationnels : l’équipe de travail, le service, l’établissement. Une poignée d’individus
mobilisés dans un service ne représente pas pour autant un groupe mobilisé. Il faut que la
synergie créée pour s’orienter vers une œuvre collective se répande à un niveau agrégé.

Ainsi, si l’on se réfère aux travaux de Granovetter (1978), ce n’est pas la taille du
groupe qui fait la mobilisation collective mais la motivation des acteurs. En revanche, pour
Tremblay et Wils (2005), une poignée d’individus, même très motivés, ne constitue pas un

15
Décret n° 84-431 du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-
chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de
conférences. Le décret prévoit que l’université d’appartenance fixe la liste des activités parmi les trois grands
domaines suivants : activités pédagogiques ; animation, encadrement ou valorisation de la recherche ; autres
activités ou activités mixtes. Cf. Annexe 2.

61
groupe mobilisé, il n’y a mobilisation collective que si la majorité des acteurs est mobilisée,
à un niveau global de l’organisation. La synthèse des apports de Granovetter (1978), Olson
(1965) et Tremblay et Wils (2005) nous permet de conclure ce que nous entendons par
mobilisation collective, à savoir une masse critique assez motivée et mobilisée pour générer
une dynamique, une synergie pour accomplir les objectifs de performance
organisationnelle, dans chacun des niveaux de l’organisation. Selon nous, la taille ne doit
pas être un critère exclusif, il faut s’intéresser à la dynamique mobilisatrice créée par ce
groupe. A-t-il la capacité d’entrainer d’autres membres avec lui ? Un petit groupe est plus à
même de créer du sens autour de l’action à entreprendre et les membres d’un petit groupe
ont plus de facilités à coordonner leurs actions et à s’entraider. Ce petit groupe constitue le
noyau de la dynamique de mobilisation collective.

1.2.3. Une mobilisation ponctuelle ou durable

Enfin, il reste à définir si la mobilisation collective est relative à un événement ponctuel ou si


elle peut s’inscrire dans un quotidien et durer dans le temps. Se référant à l’origine militaire
du terme « mobiliser », qui signifie « mettre sur le pied de guerre »16, Barraud-Didier (1999)
suggère que la mobilisation collective répond à un événement extraordinaire et ne peut pas
durer dans le temps. Néanmoins, selon Cefaï (2007), même un mouvement protestataire peut
durer dans le temps et acquérir une stabilité institutionnelle. Ainsi, nous rejoignons
Sainsaulieu (2012 : 462-463) qui suggère que la mobilisation collective « relève de la
répétition ordinaire du quotidien aussi bien que de l’événement extraordinaire
(exceptionnel ou périodique) et s’inscrit dans le cadre prescrit du travail (et non dans
l’espace public) ».

La première partie de ce chapitre éclaire le concept de mobilisation collective à plusieurs


niveaux :
1) La finalité de la mobilisation collective est d’atteindre les objectifs de
l’organisation. Dès lors que les acteurs partagent le sens des objectifs poursuivis par
l’organisation, ils adoptent de manière volontaire des comportements qui peuvent dépasser les
rôles prescrits par l’organisation. Notre problématique interroge en quoi la représentation

16
Selon le Dictionnaire historique la langue française, sous la direction d’Alain Rey, Le Robert (première
édition : 1992)

62
sociale de la performance organisationnelle, affichée comme un objectif poursuivi par
l’université, oriente la mobilisation collective des EC. Quelle signification la performance
organisationnelle a-t-elle pour les EC ? Sont-ils mobilisés collectivement envers
l’organisation au nom de cette performance organisationnelle ? ;
2) La mobilisation peut être abordée par son côté « état » ; il s’agit alors d’étudier les
formes que prend la mobilisation collective en termes de comportements. Nous avons nommé
cette approche, dans laquelle nous inscrivons notre recherche, « l’approche compréhensive »
de la mobilisation collective. Elle peut être également appréhendée par son côté « processus »,
qui fait référence à un ensemble de pratiques organisationnelles destinées à mobiliser les
acteurs, dans une vision prescriptive. Nous avons nommé cette approche, dans laquelle nous
ne nous inscrivons pas, « l’approche instrumentale » de la mobilisation collective La finalité
de la mobilisation collective est clairement d’amener le personnel à mettre toute son énergie
dans la réalisation des objectifs de l’organisation ;
3) Elle peut être étudiée à un niveau collectif (l’ensemble du groupe est mobilisé) ou à
un niveau individuel (un acteur mobilisé collectivement). Nous retenons comme unité
d’analyse l’EC dont nous étudions la mobilisation collective ;
4) Il y a deux conceptions de la taille d’un groupe mobilisé. Barraud-Didier (1999)
suggère qu’il y a mobilisation collective lorsque l’ensemble des membres du groupe est
mobilisé. Tremblay et Wils (2005) supposent qu’il y a mobilisation collective lorsqu’une
masse critique est mobilisée, définie comme une majorité des membres, à travers tous les
niveaux de l’organisation. Nous n’envisageons pas que tous les acteurs d’une organisation
puissent être mobilisés et nous ne retenons pas le critère de la majorité comme un critère
exclusif. Ainsi, la motivation et la capacité à générer une dynamique collective des acteurs
sont pour nous les éléments qui déterminent la mobilisation collective, quelle que soit la taille
du groupe.

Nous définissons la mobilisation collective comme un ensemble d’acteurs très


motivés qui fournissent des efforts volontairement, compris ou non dans leurs rôles
prescrits, et orientés vers l’amélioration continue de leur travail, vers le collectif et vers
l’amélioration de la performance de leur organisation.

63
Section 2 : La mobilisation collective : un concept comportemental unique

Depuis le début des années 1980, la littérature anglo-saxonne a développé une série de
concepts relativement proches, qui étudient les comportements qu’adoptent les acteurs en
organisation, en prêtant particulièrement attention à ceux qui vont au-delà du rôle prescrit. Le
concept de mobilisation collective développé par Tremblay et Wils (2005) se fonde en grande
partie sur ces concepts. L’apport majeur de Tremblay et Wils (2005), et complété par Bichon
(2005), est la notion d’orientation des comportements. En effet, Bichon (2005) souligne qu’un
acteur peut être très mobilisé à l’égard de son équipe de travail et/ou de ses collègues en
général (orientation collective de la mobilisation), ou afin de satisfaire son intérêt personnel
(orientation individuelle de la mobilisation) mais ne pas adhérer aux buts poursuivis par son
organisation (orientation organisationnelle). En cela, selon Tremblay et Wils (2005), et nous
les rejoignons, il est possible de parler de mobilisation collective uniquement lorsque les
acteurs adoptent des comportements pour accomplir une œuvre collective. Ainsi, ce que nous
étudions, ce sont les comportements des professionnels orientés vers l’amélioration de la
performance organisationnelle de l’organisation. Dès lors, la problématique de la thèse
questionne la signification de cette notion de performance organisationnelle pour des
acteurs professionnels peu habitués aux logiques managériales.

Nous exposerons dans un premier temps les concepts qui ont servi de base à la
construction du construit de mobilisation de Tremblay et Wils (2005) (2.1), puis nous
détaillerons les différentes dimensions qui forment ce construit de mobilisation collective, et
que nous retenons (2.2).

2.1. Les fondements du concept de mobilisation collective

Cinq concepts seront présentés. Tout d’abord, nous présenterons le concept de mobilisation
(Wils et al., 1998), qui a eu le plus de succès dans les études francophones (2.1.1.). Nous
verrons ensuite quatre concepts qui ont eu un grand succès dans les recherches anglo-
saxonnes : « les comportements de citoyenneté organisationnelle » (2.1.2), « les
comportements prosociaux » (2.1.3.), « la spontanéité organisationnelle » (2.1.4) et « la

64
performance contextuelle ». Ces quatre concepts sont l’œuvre d’une poignée de chercheurs
qui ont enrichi et ont fait évoluer ces concepts et leurs dimensions au fil des années.

2.1.1. La mobilisation

Nous présentons en premier lieu l’étude de Wils et al. (1998), qui a l’avantage de présenter les
dimensions de manière très compréhensive, car elle les regroupe en trois catégories : la
dimension individuelle, la dimension collective et la dimension organisationnelle (plus tard,
les résultats de Guerrero et Sire (2001) fourniront, peu ou prou, les mêmes dimensions) :
- La dimension individuelle décrit une personne mobilisée comme un individu qui fait
preuve d’amélioration continue de la qualité de son travail, une « personne qui cherche à
améliorer son service », qui a « le souci de développer ses compétences », qui « suggère des
solutions ou de nouvelles initiatives », etc. (Wils et al., 1998 : 13-14) ;
- La dimension collective décrit une personne mobilisée comme individu qui
coordonne son travail avec celui des autres, une « personne qui a le sens de l’équipe », qui
« participe aux décisions », etc. (Wils et al., 1998 : 14-15) ;
- La dimension organisationnelle décrit une personne mobilisée comme un individu
qui aligne son travail sur les priorités de l’organisation, une « personne qui travaille dans le
sens des objectifs de l’entreprise », qui « recentre ses efforts sur les objectifs », etc. (Wils et
al., 1998 :14).

Figure 3 : Les dimensions de la mobilisation, d'après Wils et al. (1998)

Efforts d’amélioration continue (travail de qualité) Dimension individuelle

Efforts de coordination spontanée (travail en équipe) Dimension collective

Efforts d’alignement stratégique (travail avec valeur ajoutée dans le Dimension organisationnelle
sens des priorités organisationnelles)

65
2.1.2. Les comportements de citoyenneté organisationnelle (OCB)

Tout d’abord, il est important de souligner que le concept d'OCB se fonde sur les théories de
l'échange social (Coyle-Shapiro et Shore, 2007) qui suggèrent que ces conduites volontaires
sont motivées par une relation entre l'employé et son organisation17.
Les premiers travaux sur le concept de comportement de citoyenneté organisationnelle
(Organizational Citizenship Behavior, OCB) ont été menés par Smith, Organ et Near (1983),
mais c’est sur la base des travaux d’Organ (1988) que les études suivantes se sont
développées (notamment les travaux notoires de Podsakoff, Ahearne et Mackenzie,1997, et
Podasakoff et MacKenzie, 1994).
Organ (1988) définit le concept par des « conduites individuelles de type
discrétionnaire, non directement ou explicitement reconnus par le système formel de
récompense contribuant au bon fonctionnement général de l’organisation qui ne relèvent pas
du rôle ou des tâches prescrites de l’emploi occupé, c’est- à-dire des termes spécifiques du
contrat passé entre un employé et son organisation ; ces comportements relèvent plutôt d’un
choix personnel, de sorte que leur omission n’implique pas de sanction » (traduction : Paillé,
2007 : 60).
Notons que la plupart des recherches sur l'OCB portent sur l’orientation individelle des
comportements et non sur l’orientation organisationnelle, qui intéresse notre recherche.

2.1.3. Les comportements prosociaux

Brief et Motowidlo (1986) sont les premiers à proposer ce concept, mais c’est George (1991)
qui le développera. Brief et Motowidlo (1986 : 711) définissent le comportements prosocial
comme « un comportement qui est (a) accompli par un membre de l’organisation, (b) orienté
vers un individu, un groupe ou l’organisation avec qui il interagit pendant qu’il mène son rôle
organisationnel et (c) accompli avec l’intention de promouvoir le bien-être de l’individu, du
groupe et de l’organisation vers le ou laquelle il est dirigé » (traduction : Desrumaux, Léoni,
Bernaud et Defrancq, 2012 : 61).
Les conduites peuvent donc s’orienter vers deux cibles : l'individu (un collègue, un
client, un dirigeant, etc.) et l'organisation. Un acte prosocial envers un individu peut être un

17
Nous reviendrons sur cette relation dans la partie « 3. Les fondements psychologiques de la mobilisation
collective », lorsque nous aborderons en particulier l’attachement affectif qui existe entre un acteur mobilisé et
son organisation.

66
acte antisocial envers d'autres et envers l'organisation. Dès lors, certains comportements
prosociaux sont bénéfiques à l'organisation et d'autres peuvent lui nuire. L’une des
illustrations est lorsqu'un acteur aide un collègue à accomplir des objectifs personnels
incompatibles avec les objectifs organisationnels.

2.1.4. La spontanéité organisationnelle

La spontanéité organisationnelle (organizational spontaneity, George et Brief, 1992)


s'apparente à l'OCB et aux comportements prosociaux. George et Brief (1992 : 311)
définissent ce concept comme « des conduites hors du rôle adoptées volontairement et qui
contribuent à l'efficacité organisationnelle».
Le terme « spontanéité » est utilisé par les auteurs pour souligner le caractère
volontaire de l'adoption des conduites. Les auteurs ont établi cinq dimensions : aider ses
collègues, protéger l’organisation, formuler des suggestions constructives pour l’organisation,
s’améliorer de manière continue, propager une image positive à l’extérieur.

2.1.5. La performance contextuelle

Afin de ne pas restreindre les comportements en organisation aux seuls comportements


prescrits par le rôle, Borman et Motowidlo (1993) ont proposé le concept de performance
contextuelle (qui sera également nommé performance citoyenne ou performance de
citoyenneté, citizenship performance), qu’ils définissent comme « des conduites qui ne
soutiennent pas le noyau technique lui-même, mais l'organisation dans un sens plus large,
dans son environnement social et psychosocial, avec lequel le noyau technique doit
fonctionner » (1993 : 73).
Le mot « contextuel » s'explique par le fait qu'il faut prendre en compte l'organisation
dans son ensemble « social et psychologique » et ne pas la réduire uniquement à des tâches
techniques. Les conduites au-delà du rôle proposées par Borman et Motowidlo (1993)
participent à la performance de l'organisation par leur influence sur le contexte
psychologique, social et organisationnel du travail. En premier lieu, les conduites qui ont un
effet sur le contexte psychologique sont celles qui s'appliquent aux collègues, notamment en
leur apportant de l'aide et en les encourageant à adopter eux-mêmes des conduites contribuant
au bon fonctionnement de l'organisation. Dès lors, c'est le contexte social et organisationnel
du travail qui en sera positivement influencé. Ensuite, un second ensemble de conduites qui a

67
un effet sur le contexte psychosociologique relève de l'aptitude à adopter des conduites
valorisées et attendues par l'organisation, comme le fait de développer ses compétences, de
s'adapter aux changements d'emploi, ou de faire preuve d'initiative.
La première conceptualisation de la performance contextuelle a été présentée par
Borman et Motowidlo (1993, 1997) mais Coleman et Borman (2000) proposent trois
dimensions plus globales. Selon Coleman et Borman (2000), la performance contextuelle est
un concept multidimensionnel englobant notamment : les comportements de citoyenneté
organisationnelle (organizational citizenship behavior, Organ, 1997 ; Smith et al., 1983), les
comportements prosociaux (prosocial organizational behavior, Brief et Motowidlo, 1986) et
la spontanéité organisationnelle (George et Brief, 1992).

2.2. Les dimensions de la mobilisation collective : des comportements orientés vers une
œuvre collective

À partir d’une synthèse de la littérature sur l’ensemble des concepts comportementaux,


Tremblay et Wils (2005) proposent douze dimensions de la mobilisation collective (figure 4).
La première dimension, qui a trait au respect du contrat de travail, est une condition
essentielle à la mobilisation collective, notamment parce que le non-respect du contrat de
travail à un niveau individuel nuit à la mobilisation collective de tout le groupe. Deux types
de comportements y sont associés : la performance dans le rôle prescrit et les
comportements de conscience professionnelle et d’éthique. Être performant dans les tâches
prescrites est primordial, car un employé peu compétent et ne maîtrisant pas les tâches
habituelles liées à son poste ne sera pas en mesure d’apporter son aide à ses collègues.
Manquer d’éthique et de conscience professionnelle dans son travail (en bâclant le travail, en
volant, etc.) rend la tâche des collègues plus difficile, constitue une entrave aux efforts de
coordination et démotive les autres membres du groupe à fournir des efforts. Ce
comportement est également présent dans le concept de performance contextuelle (Coleman
et Borman, 2000) et dans l’OCB (Organ, 1988). Dans le même ordre d’idée, Barraud-Didier
(1999 : 8) propose une dimension de la mobilisation collective qu’elle nomme « résultat » et
qui se mesure par « les efforts au-delà des exigences » et « la productivité des salariés ». On
retrouve également dans l’étude de Rondeau, Lemelin et Lauzon (1993, cité par Barraud-
Didier, 1999) une dimension nommée « efficacité des employés (niveau de productivité,

68
qualité des produits et services, coûts de production) » qui se rapproche des comportements
décrits ici.

Une deuxième catégorie de comportements prend sa source dans la motivation


individuelle. Il s’agit, d’une part, de personnes qui font preuve de dévouement dans le
travail, qui ne comptent pas leurs heures et qui en font souvent plus que les tâches prescrites.
Il s’agit de comportements au-delà du rôle qui sont absolument volontaires. Ce comportement
est présent dans le concept de comportements prosociaux (Brief et Mtowidlo, 1986 : 711)
sous la forme « fournir des efforts supplémentaires » et « accomplir de manière bénévole des
missions supplémentaires ». L’étude de Rondeau et al. (1993, cité par Barraud-Didier, 1999)
évoque également des efforts au-delà des exigences (disponibilité, initiative, attention portée
aux coûts et conséquences de ses actions). D’autre part, ces personnes fortement motivées
individuellement adoptent des comportements d’amélioration des compétences. Ce sont des
comportements qui ne font pas partie du contrat de travail et qui sont bénéfiques à l’individu
et à l’organisation.

La troisième et dernière catégorie repose sur une forte motivation collective. Les
acteurs ne se soucient plus seulement de leur propre intérêt, mais se préoccupent d’interagir
avec les autres. Huit classes de comportements s’inscrivent dans cette catégorie :
- L’aide apportée aux autres : les acteurs partagent leurs connaissances et leurs
compétences, prennent en charge un nouvel arrivant, ou encore soulagent un collègue
débordé. Ce type de comportement connait un consensus dans la littérature puisqu’il fait
partie de tous les principaux concepts de comportements positifs : le concept de performance
contextuelle (Coleman et Borman, 2000), les comportements hors du rôle (George et Brief,
1992 ; Van Dyne et al., 1995), la spontanéité organisationnelle (George et Brief, 1992), les
comportements de citoyenneté organisationnelle (Smith et al., 1983 ; Brief et Motowidlo,
1986 ; Organ, 1988) et les comportements prosociaux (Brief et Motowidlo, 1986). Smith et al.
(1983), Organ (1988) et (Coleman et Borman, 2000) définissent ce comportement comme de
l’altruisme, ce qui revient à aider une personne dans une situation donnée (collègues, associés,
clients, dirigeants).
- La facilitation interpersonnelle : les acteurs écoutent, encouragent, facilitent et
soutiennent les autres. La facilitation interpersonnelle renforce l’esprit d’équipe. Ce
comportement est présent dans les concepts de performance de citoyenneté (Coleman &
Borman, 2000), et de performance contextuelle (parmi les dimensions proposées par (Van

69
Scotter et Motowidlo, 1996). Dans le même ordre d’idée, Barraud-Didier (1999 : 8) propose
une seconde dimension de la mobilisation collective (pour rappel, la première était la
dimension « résultat ») qu’elle nomme « relation inter-personnelle » et qui se mesure par le
« le climat de travail ». Dans le même ordre d’idée, on trouve chez Rondeau et al. (1993, cité
par Barraud-Didier, 1999) une dimension nommé « collaboration manifestée par les employés
(qualité du climat de travail, suggestions apportées, entraide au travail) » qui rejoint ce
comportement de facilitation interpersonnelle.
- La coordination avec les autres : les acteurs pensent aux autres avant d’agir et
réfléchissent à l’impact de leurs actions sur celles des autres, coordonnent leurs actions avant
d’agir, etc. Ce comportement apparaît uniquement dans le concept de mobilisation développé
par Wils et al. en 1998.
- L’esprit sportif : les acteurs acceptent les contraintes, règles et procédures
organisationnelles de manière positive, sans dramatiser et sont solidaires à l’égard des
décisions prises. Ce comportement est présent parmi trois concepts, soit en abordant
explicitement l’esprit sportif (sportmanship, OCB, Organ, 1998), le conformisme
(compliance, performance contextuelle, Coleman et Borman, 2000) ou le respect des règles,
politiques et procédures organisationnelle (comportements prosociaux, Brief et Motowildo,
1986).
- L’amélioration continue : les acteurs proposent et mettent en place des solutions
constructives et adhèrent aux changements. Ce comportement est présent dans les concepts de
mobilisation de Wils et al. (1998) sous la forme d’amélioration individuelle continue et
amélioration organisationnelle continue. Il est également présent, dans le concept de
comportements prosociaux (Brief et Motowidlo, 1986) lorsqu’il s’agit de « suggérer des
améliorations procédurales, administratives ou organisationnelles », et dans le concept de
spontanéité organisationnelle (George et Brief, 1992) lorsqu’il s’agit de « s’améliorer de
manière continue » et de « formuler des suggestions constructives pour l’organisation ».
- La participation à la vie civique interne : les acteurs participent à des manifestations
réalisées par l'organisation (comme les salons professionnels par exemple) ou des réunions,
prévues ou non, obligatoires ou non. Ce comportement est présent uniquement dans le
concept d’OCB (Organ, 1988) ;
- La loyauté organisationnelle : les acteurs défendent l’organisation lorsqu’elle est
critiquée, diffusent une image positive en interne et en externe de l’organisation, de ses
produits et services. Ce comportement est expliqué sous le terme « loyauté » uniquement dans
le concept de performance contextuelle (Coleman et Borman, 2000). Il a été rapporté par

70
George et Brief (spontanéité organisationnelle, 1992) sous l’idée de protéger l’organisation et
propager une image positive à l’extérieur.
- L’orientation vers les clients (ou les usagers dans le cas des administrations
publiques) : les acteurs délivrent un service exemplaire et avec courtoisie, tout en cherchant à
améliorer le service fourni aux clients ou usagers. Ce comportement est présent uniquement
dans les comportements prosociaux (Brief et Motowidlo, 1986).

Figure 4 : « Comportements et dynamique mobilisatrice » (Tremblay et Wils, 2005 : 43)

Comme le soulignent Tremblay et Wils (2005), le concept de mobilisation collective


se rapproche de la définition des comportements prosociaux de Brief et Motowidlo
(1986) dans la mesure où il s’agit de comportements bénéfiques à un individu, à un groupe ou
à une organisation. La mobilisation collective se rapproche également de la performance de
citoyenneté de Coleman et Borman (2000), qui englobe trois catégories de
comportements très proches des trois dimensions de la mobilisation collective : les
comportements de citoyenneté interpersonnelle, de citoyenneté organisationnelle et de
citoyenneté dans les tâches ou l’emploi. Néanmoins, la mobilisation collective s’en distingue
dans la mesure où les comportements prosociaux et la performance de citoyenneté n’intègrent
pas l’existence d’un phénomène collectif, qui dépasse la somme des comportements
individuels. En effet, le phénomène collectif selon Tremblay et Wils (2005) signifie deux
71
choses : d’une part la mobilisation de la majorité des membres de l’organisation, et d’autre
part, une orientation des comportements vers une œuvre collective.
En effet, si les concepts comportementaux que nous venons de décrire sous-entendent
que des conduites peuvent être orientées vers des cibles différentes (soit les individus,
collègues, dirigeants, clients ou usagers, soit l’organisation, soit les deux), l’apport majeur de
Wils et al. (1998) en termes de compréhension des comportements en organisation a été
d’expliciter clairement trois dimensions : la dimension individuelle (fournir des efforts
d’amélioration continue), la dimension collective (fournir des efforts de coordination
spontanée), et la dimension organisationnelle (fournir des efforts d’alignement stratégique).
Néanmoins, l’orientation des comportements de mobilisation collective (orientation
individuelle, orientation collective et orientation organisationnelle) développée par Tremblay
et Wils (2005) peut facilement se confondre avec les dimensions de la mobilisation
(dimension individuelle, dimension collective, dimension organisationnelle) décrits par Wils
et al. (1998). Pour mieux saisir la notion d’ « orientation de la mobilisation collective »,
citons un passage de (Neveu, 2005 : 6) :
« L’opération escargot de chauffeurs routiers qui bloquent un périphérique
produira un résultat comparable au bouchon suscité par les vacanciers qui se
précipitent en voiture vers les plages. La différence est cependant claire entre une
action concertée, liée à des revendications, et un résultat imprévu, parfois
imprévisible, découlant de l’addition de milliers de départs en vacances
individuels ».
Ainsi, l’addition de milliers de départs en vacances individuels correspond à la somme des
comportements individuels, alors que l’opération escargot correspond à l’orientation
collective (dirigée vers une œuvre commune, ici la performance organisationnelle). À
première vue le résultat est le même : un bouchon, mais en réalité les comportements
individuels ne bénéficient pas systématiquement et durablement à l’organisation. Dès lors,
sans interroger les acteurs sur leur engagement, il est impossible de savoir ce qui les pousse
réellement à être mobilisés.

La revue de la littérature révèle que la mobilisation collective telle que l’on


conceptualisé Tremblay et Wils (2005) est unique. En effet, le concept proposé par Tremblay
et Wils (2005) est issu d’une synthèse rigoureuse de tous les comportements organisationnels
développés dans la littérature, en particulier anglo-saxonne. Ils proposent ainsi douze

72
dimensions qui permettent de saisir tous les comportements positifs en organisation, qu’ils
soient dans le rôle ou hors du rôle.
Par ailleurs, la littérature ne propose pas clairement de distinction entre les
« dimensions » de la mobilisation et les « orientations » de la mobilisation collective. Ce flou
peut rendre le concept difficile à saisir. Dès lors, nous proposons de différencier :
- d’une part les dimensions du concept que nous retenons, qui sont des « manifestations
comportementales de l’état de mobilisation » (Tremblay et Wils, 1998 : 31), à savoir : la
performance dans le rôle prescrit, les comportements de conscience professionnelle et
d’éthique, le dévouement dans le travail, l’amélioration des compétences, l’aide apportée aux
autres, la facilitation interpersonnelle, la coordination interpersonnelle, la coordination avec
les autres, l’esprit sportif, l’amélioration continue, la participation à la vie civique interne, la
loyauté organisationnelle et l’orientation vers les usagers ;
- d’autre part l’orientation de ces conduites, en d’autres termes, les cibles de ces conduites, à
savoir l’orientation individuelle (améliorer la qualité de son propre travail), l’orientation
collective (diriger ses efforts vers ses collègues) et l’orientation organisationnelle (aligner ses
efforts vers les buts de l’organisation).
S’intéresser à l’orientation des conduites de mobilisation collective nous semble
incontournable dans l’étude de la mobilisation collective dans une organisation pluraliste. En
effet, les efforts peuvent s’orienter vers plusieurs cibles.

Section 3 : Les fondements psychologiques de la mobilisation collective

Le concept de mobilisation collective est souvent confondu avec l’implication, l’engagement


ou encore la motivation. Si les trois concepts que nous venons de citer se distinguent de la
mobilisation collective, ils y sont liés dans la mesure où ils représentent des bases
psychologiques de la mobilisation collective. Dans un premier temps, nous expliquerons en
quoi ces concepts se distinguent de la mobilisation collective (3.1), puis nous nous attarderons
sur l’engagement, qui agit comme une prédisposition à l’adoption de conduites de
mobilisation collective (3.2).

73
3.1. Des concepts liés mais à distinguer

Si la mobilisation collective est un concept comportemental, et, de ce fait, observable


(Keramidas, 2005), elle repose néanmoins sur un volet psychologique qui constitue les
« bases affectives de l’état de mobilisation » (Wils et al., 2008 : 17).

Ainsi, selon Bichon (2005), la mobilisation est à distinguer du processus


psychologique qui conduit à cet état. Les bases psychologiques de la mobilisation sont des
attitudes qui poussent l'individu à fournir intentionnellement ces efforts ; des croyances ; des
valeurs, des motivations… (tableau 5). Bichon (2005 : 52) définit l’attitude comme étant un
« état mental prédisposant à l'action » alors que la mobilisation, qu’il nomme conduite, est
une « action proprement dite, ensemble d'activités directement observables » (2005 : 47). Le
tableau 6 récapitule les principaux états psychologiques à ne pas confondre avec la
mobilisation, à savoir : la motivation, l’implication au travail, l’engagement et le pouvoir
d’agir.

Tableau 5 : Les bases psychologiques des trois orientations de la mobilisation collective,


Bichon (2005 : 51)

Attitude
Orientation Conduite (base psychologique
de la mobilisation)
Efforts d’amélioration continue Implication au travail
Individuelle
(travail de qualité) (work involvement)
Efforts de coordination spontanée Engagement collectif
Collective
(travail en équipe) (esprit d’équipe)
Efforts d’alignement stratégique
Implication organisationnelle
Organisationnelle (travail avec valeur ajoutée dans le
(organizational commitment)
sens des priorités organisationnelles)

Tableau 6 : Les principaux concepts à ne pas confondre avec la mobilisation collective

Attitude Description

La motivation se différencie de la mobilisation dans le sens où elle exprime les


besoins d’un individu, elle est intériorisée et donc, non observable (Keramidas,
2005), alors que la mobilisation est un comportement, avec un souci d’interagir
avec les autres (Tremblay et Wils, 2005). La motivation est cependant liée aux
Motivation comportements. Roussel (2009 : 166) souligne que malgré les diverses
définitions existantes, la motivation au travail revêt quatre caractéristiques
principales : 1) « le déclenchement du comportement » : la motivation donne
l’énergie requise pour exécuter le comportement ; 2) « la direction du
comportement » : la motivation oriente le comportement vers les objectifs fixés ;
3) « l’intensité du comportement » : la motivation régule l’énergie à dépenser en

74
fonction des objectifs à atteindre ; 4) « la persistance du comportement » : la
motivation assure la continuité des efforts fournis nécessaires à
l’accomplissement régulier d’objectifs.

Engagement L’engagement organisationnel relève de l’attitude de l’individu envers son


organisationnel18 organisation. Il se définit comme une relation psychologique entre un individu et
organizational son organisation (Allen et Meyer, 1990) et influence les comportements au
commitment travail.

Implication au travail Corrélée avec l’engagement organisationnel (Vandenberghe et al., 2009),


job involvement l’implication au travail « exprime plutôt le degré d’identification d’une
ou personne à son travail en particulier » (Plane, 2014 : 101). L’implication se situe
work involvement au niveau des attitudes d’un individu envers son travail en particulier.

Ce concept revêt deux aspects (Tremblay et Simard, 2005) : 1) un aspect


structurel qui envisage le pouvoir d’agir comme des pratiques que l’organisation
Pouvoir d’agir met en place dans le but d’octroyer à l’employé plus de pouvoir, de contrôle et
Empowerment d’autorité au travail ; 2) et un aspect psychologique qui renvoie à « un ensemble
de cognitions liées à la capacité des individus d’agir sur les événements »
(2005 : 66).

3.2. Mobilisation collective, engagement organisationnel et engagement professionnel

Un acteur peut être très mobilisé à l’égard de son équipe de travail et/ou de ses collègues en
général (orientation collective de la mobilisation), afin de satisfaire son intérêt personnel
(orientation individuelle de la mobilisation), mais ne pas adhérer aux buts poursuivis par son
organisation. Par conséquent, seule une étude de ses motivations et de son engagement, qui
sont des attitudes qui prédisposent à des conduites de mobilisation collective, peut révéler
l’orientation (individuelle, collective ou organisationnelle) de sa mobilisation collective. Nous
verrons dans une première sous-partie que la mobilisation collective repose sur un lien affectif
fort entre les acteurs et l’organisation (3.2.1). Nous expliquerons dans une seconde partie le
concept d’engagement (commitment), une attitude qui détermine l’orientation
organisationnelle de la mobilisation collective (3.2.2).

3.2.1. La mobilisation collective repose sur un lien affectif fort

Selon Wils et al. (2008), il semble que l’employé mobilisé perçoive un lien affectif avec
l’organisation, ce qui explique les efforts qu’il déploie volontairement. À contrario, une

18
Nous approfondirons l’engagement organisationnel dans la partie suivante « 3.2. Mobilisation collective,
engagement organisationnel et engagement professionnel ».

75
personne démobilisée ressent un lien forcé, qui reflète une relation purement économique et
contraignante. Les auteurs proposent une relation entre ces liens, affectif ou forcé, et le mode
de gestion : un type de gestion traditionnel basé sur le contrôle entraînerait un lien forcé alors
qu’un modèle renouvelé qui cherche à mobiliser les compétences tout en les dirigeant vers les
buts de l’organisation susciterait un lien affectif.
L’étude révèle que le lien affectif repose sur trois bases psychologiques :
- un attachement au travail (basé sur un idéal professionnel) ;
- un attachement à la mission de l’organisation (basé sur une intériorisation des priorités
organisationnelles) ;
- un attachement aux autres membres de l’organisation ou à la culture de l’organisation (basé
sur une identification aux valeurs des différents groupes avec qui l’on travaille).

Les travaux de Guerrero et Sire (2001) parviennent aux mêmes conclusions : la


mobilisation se nourrit de la relation psychologique existant entre l’organisation et ses
salariés, une relation psychologique basée sur un attachement au travail, un attachement aux
valeurs de l’organisation et un attachement au groupe de travail.
Mintzberg (2010) souligne pourtant que les professionnels s’identifient peu à
l’organisation qui les emploie, mais à la profession à laquelle ils appartiennent.

Le concept d’engagement organisationnel, qui joue un rôle primordial dans


l’adoption de conduites de mobilisation collective, en prédisposant « à des conduites de
mobilisation » (Bichon, 2008 : 63), reflète particulièrement la relation psychologique entre
un individu et son organisation (Meyer et Allen, 1997).

3.2.2. L’engagement organisationnel, une attitude qui détermine l’orientation


organisationnelle de la mobilisation collective

L’engagement organisationnel se définit comme un lien psychologique entre une personne et


son organisation (Meyer et Allen, 1991). L’engagement organisationnel agit comme une force
stabilisante ou obligeante qui offre une direction au comportement ; il s’agit d’ « un état
d’esprit (…) qui pousse un individu vers une ligne de conduite » (Meyer et Herscovitch,
2001 : 303). L’engagement organisationnel influence les comportements dans le rôle et hors
rôle d’un individu (Gellatly, Meyer et Luchak, 2006).

76
Le modèle de Meyer et Allen (Allen et Meyer, 1990 ; Meyer et Allen, 1991) est le plus
étudié et validé jusqu’à présent (Vandenberghe, Landry et Panaccio, 2009). Focalisés sur la
relation d’un individu avec son organisation, en particulier son intention de quitter
l’organisation, Meyer et Allen (1991) identifient trois formes d’engagement : l’engagement
affectif désigne le désir qu’éprouve l’individu de rester dans l’organisation parce que les
ressources qu’il perçoit de son organisation (récompenses pécuniaires, soutien, autonomie,
sécurité de l’emploi, conditions de travail avantageuses, etc.) engendrent chez lui un
sentiment d’obligation réciproque (Vandenberghe et al., 2009) ; l’engagement calculé, qui
traduit le besoin de rester pour des raisons calculées, c’est-à-dire lorsque quitter l’organisation
couterait plus cher (en termes financier et psychologique) que d’y rester ; et l’engagement
normatif, qui se manifeste par le ressenti d’une obligation de rester et qui répond à des
pressions normatives de l’organisation intériorisées par l’individu, de sorte que son
comportement s’aligne sur les buts et objectifs de l’organisation (Vandenberghe et al., 2009).
Si la littérature identifie la forme affective de l’engagement comme étant la plus à
même de générer des conduites de mobilisation, il n’en reste que l’engagement calculé en est
un frein (Meyer, Becker et Vanderberghe, 2004).

Plusieurs éléments rendent l’organisation abstraite pour les employés : la


complexification du travail et de son environnement, ou encore l’importance croissante
donnée à l’équipe de travail (Ben Mansour, Chiniara, et Bentein, 2009). Par conséquent,
l’organisation s’envisage comme une entité composée de plusieurs sous-entités en interaction
et pour lesquelles un individu peut être plus ou moins engagé (Reichers, 1985). Dès lors, les
comportements en organisation ne découlent pas uniquement du seul niveau d'engagement
organisationnel (Vandenberghe et al, 2009 ; Cohen, 2003) mais également d'autres cibles
d'engagement.
Les travaux se dirigent alors vers un engagement multi-cibles (Becker, Billings,
Eveleth et Gilbert, 1996). Le terme de cible se réfère à un individu, groupe d’individus ou
activités, internes ou externes à l’organisation (Reichers, 1985), pour lesquels une personne se
sent « psychologiquement engagée » (Meyer et Allen, 1997 : 92). Ainsi, Meyer et Allen
(1997) appliquent leur modèle tridimensionnel aux différentes cibles identifiées dans la
littérature, à savoir « l’organisation, la profession, le supérieur hiérarchique, le groupe de
travail, le projet, le client et le syndicat » (Meyer et al., 2004 : 993-994). L’engagement
multiple se définit alors comme « une force liant un individu à une ligne de conduite
pertinente pour une ou plusieurs cibles » (Meyer et Herscovitch, 2001 : 301).

77
Par ailleurs, il s’avèrerait que plus la cible est proche de l’individu et présente au
quotidien, plus l’effort sera orienté vers cette cible (Tremblay et Simard, 2005). Cependant,
« on ne sait pas encore avec exactitude s’il existe des cibles d’attachement (comme
l’organisation versus l’équipe de travail) plus mobilisatrices que d’autres » (Tremblay et
Simard, 2005 : 112 ). Dès lors, nous comprenons mieux qu’un professionnel puisse être très
mobilisé pour ses activités purement professionnelles, qu’elles soient dans ou en dehors de
l’organisation, et très peu envers l’organisation, si celle-ci n’est pas présente, au moins
symboliquement dans le quotidien du professionnel.

Arrêtons-nous en particulier sur l’engagement à la profession. L'engagement à la


profession (Meyer, Allen et Smith, 1993) fait référence à deux concepts différents : le concept
de professionnalisme, qui nous intéresse, et le concept de « carrière ». Le concept
d'engagement à la profession désigne ainsi deux situations différentes, ce qui n'a pas facilité
sa conceptualisation.
L’engagement à la profession se définit comme « la motivation d'un individu à
travailler dans une carrière qu'il a choisi » (Hall, 1971 : 59, cité par Blau, 1985 : 277). Cette
définition englobe donc à la fois les professionnels et les autres métiers. Dès lors, plusieurs
termes désignent le même concept : career commitment (engagement à la carrière, Blau,
1985, 1988, 1989 ; Aranya et al., 1981 ; Hall, 1971), occupational commitment (engagement
envers l'occupation, Meyer et al., 1993) et professionnal commitment (engagement
professionnel, Wallace, 1993, 1995). L'engagement envers la profession contribue à
l'adoption de comportements de citoyenneté organisationnelle (Meyer et al., 1993).

Contredisant les tenants de l'approche de l'incompatibilité entre engagement à la


profession et engagement à l'organisation (Etzioni, 1964 ; Gouldner, 1954 ; Parsons, 1947),
plusieurs études suggèrent qu'un professionnel peut afficher à la fois un engagement envers sa
profession et son organisation (Aranya et Ferris, 1984 ; Bennis, Berkowitz, Affinito et
Malone, 1958 ; Glaser, 1963 ; Gunz et Gunz, 1994 ; Thornton, 1970 ; Wallace, 1995). Somers
et Birnbaum (2000) soulignent que les acteurs possédant simultanément un fort niveau
d'engagement envers leur organisation et leur profession sont ceux qui ont les attitudes au
travail les plus positives (attitudes mesurées par les concepts de satisfaction au travail,
d’implication au travail et de congruence entre les valeurs personnelles et organisationnelles).
Néanmoins, leur étude ne portait pas sur les comportements.

78
Dès lors, un engagement envers l’organisation et un engagement envers la
profession peuvent exister côte à côte. Ces résultats sur l'engagement multiple nuancent
l'approche conflictuelle profession/organisation présentée dans le chapitre 1. Toutefois, les
études s’intéressant à la fois à la compatibilité entre engagement professionnel et
engagement organisationnel, et leur lien avec la mobilisation collective sont peu
nombreuses.
Notons l’étude de Fablet, Serval et Zeller (2014) qui suggère que les professionnels
(les consultants d’une SSII dans le cas de l’étude citée) s’engagent facilement envers
plusieurs cibles et se mobilisent. Ainsi, ils accomplissent un travail de qualité, fournissent des
efforts au-delà de ce qui est demandé et sont performants. Pour mobiliser des professionnels
de manière ponctuelle, l’engagement ne doit pas nécessairement être affectif, ni même orienté
vers l’organisation. Toutefois, pour que la mobilisation collective soit durable, un engagement
affectif envers l’organisation semble nécessaire. L’étude suggère que le manque
d’engagement affectif envers l’organisation est directement attribuable à un déficit de
socialisation des professionnels. Les auteures soulignent que les managers sont à même de
contribuer à la socialisation des professionnels, en faisant le pont entre eux, centré sur leur
métier et leurs clients, et l’organisation, avec ses but et valeurs. Dans le cas des consultants
étudiés par cette recherche, le manager n’étant pas issu de la profession de consultant, n’est
pas considéré comme un pair, ce qui le rend peu légitime à exercer ce rôle d’agent
socialisateur. Dans le cas de l’université, l’autorité est souvent incarnée par un directeur, qui,
même s’il est l’un de leur pair, est perçu désormais comme un acteur du management et non
plus comme un acteur professionnel.

Les lignes qui précèdent mettent en avant l’importance des liens affectifs entre les
individus et leur organisation, traduits par leur engagement, alors que la littérature traitant
de l’engagement des professionnels envers l’organisation qui les emploie souligne un lien
ambigu entre la profession et l’organisation.

79
CONCLUSION DU CHAPITRE 2

La revue de la littérature sur la mobilisation collective nous a amenée à retenir une définition
large, fondée sur les travaux de Tremblay et Wils (2005). Nous définissons la mobilisation
collective comme un ensemble d’acteurs très motivés qui fournissent des efforts
volontairement, compris ou non dans leurs rôles prescrits, et orientés vers l’amélioration
continu de leur travail, vers le collectif et vers l’amélioration de la performance de leur
organisation.

Le contexte particulier des organisations professionnelles et pluraliste nous oblige à


repenser le concept de mobilisation collective tel qu’il est envisagé dans les organisations
privées. Les professionnels sont traditionnellement présentés comme une population
autonome et peu attachée à l’organisation qui les emploie. Toutefois, nous avons pu souligner
plus haut que le modèle dit de « l’hébergeant » (Musselin, 2008) tend à évoluer vers un
modèle d’organisation plus classique et réinterroge les liens entre les professionnels et leur
« employeur ».

La littérature traitant de l’engagement des professionnels envers l’organisation qui les


emploie souligne un lien ambigu entre la profession et l’organisation, les professionnels étant
impliqués envers leur profession et s’identifiant faiblement à l’organisation (Mintzberg,
2010). Un professionnel peut être très mobilisé à l’égard de sa profession, ou afin de satisfaire
son intérêt personnel, mais ne pas adhérer aux buts poursuivis par son organisation. Par
conséquent, seule une étude de ses motivations et de son engagement, qui sont des attitudes
qui prédisposent à des conduites de mobilisation collective, peut révéler l’orientation
(individuelle, collective ou organisationnelle) de sa mobilisation collective. C’est pourquoi
notre étude questionne, d’une part, l’influence de la représentation sociale de la
performance organisationnelle sur l’engagement, et, d’autre part, l’influence de cet
engagement sur la mobilisation collective. C’est ainsi que nous souhaitons répondre à la
problématique générale. Pour rappel, cette dernière vise à comprendre dans quelle mesure
la représentation sociale de la performance organisationnelle que les professionnels
élaborent, oriente-t-elle leur mobilisation collective ?

80
Le chapitre suivant s’attachera à comprendre dans quelle mesure les RS orientent les
comportements des individus.

81
CHAPITRE 3. LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES COMME
GUIDES DE LA MOBILISATION COLLECTIVE

« Lorsque les personnes se mobilisent


c'est qu'elles adorent ou détestent l'objet
source de mobilisation » (Pecly Wolter et
Rouquette, 2010 : 480).

Lorsque l’on s’intéresse à l’étude de la signification d’un objet pour des individus, et le lien
que cette signification entretient avec ses comportements, la revue de la littérature nous
conduit très rapidement vers la théorie de représentations sociales ; ces représentations que les
acteurs se font de la situation expliquent et guident leurs conduites. « Comprendre, expliquer,
prévoir les conduites sociales ne peut aboutir que dans la mesure où les systèmes de
représentation des sujets sont analysés et identifiés. » (Guimelli, 1994 : 131-132).
Plusieurs ensembles de travaux abordent les représentations. Un premier ensemble de
travaux, ceux des psychologues sociaux français (Moscovici ; l’école d’Aix composée
d’Abric, Guimelli, Flament, Moliner, etc. et l’école de Genève, dont Doise est le principal
auteur, sont incontournables car ce sont eux qui développent le concept de représentation
sociale. Selon Abric (2011), ce n’est pas la situation qui guide la conduite mais la
représentation (créée) que s’en fait l’individu. « Les éléments du contexte (ici le destinataire)
véhiculent une représentation de la situation, une signification. Et c’est cette représentation de
la situation qui détermine le niveau d’implication du sujet, sa motivation et l’amène à
mobiliser plus ou moins et de manière différente ses capacités cognitives » (Abric, 1989 :
213). Dès lors, pour comprendre la mobilisation collective, il faut comprendre les
représentations collectives de la performance pour laquelle les EC sont appelés, directement
mais surtout indirectement, à se mobiliser. Nous présentons ce premier ensemble de travaux
dans la section 1 de ce chapitre.

82
Les chercheurs en sciences de gestion adoptent de plus en plus une perspective
cognitive19 et intègrent la notion de représentations dans leurs théories, en particulier dans
l’étude de la stratégie en organisation20, que ce soit l’étude de la prise de décision stratégique
par le manager ou l’étude du changement stratégique (par exemple; Gioia et Thomas, 1996 ;
Gioia, Thomas, Clark, et Chittipeddi, 1994 ; Thomas, 2001).
Trois conceptions différentes des phénomènes cognitifs collectifs jalonnent la
littérature dominante (Allard-Poesi, 1997, 1998). Nous présentons dans la deuxième partie de
ce troisième et dernier chapitre de littérature la conception cognitive de l’organisation, la
conception sociocognitive, et la conception issue des travaux de Weick (section 2).

Section 1 : Les représentations sociales : donner une signification à la


situation pour savoir comment agir

C’est la « pensée naïve », la « pensée naturelle », le « sens commun » de la performance


organisationnelle qui intéresse notre recherche, cette pensée profane que nous avons tous sur
les objets qui nous entourent (que ce soit des situations, des phénomènes, des catégories de
personnes…) et qui guide nos conduites au quotidien, par opposition à la pensée ou
connaissance scientifique, qui répond à une logique de démonstration, une logique de la
pensée mathématiques. Nous disposons de définitions de la performance, d’indicateurs, de
discours scientifiques, mais ces éléments ne permettent pas de comprendre les conduites des
acteurs envers cette performance. C’est en saisissant le sens commun de la performance
organisationnelle que l’on comprendra la mobilisation collective (1.1). Nous présenterons
ensuite les principaux travaux qui ont fondé la théorie des représentations sociales (1.2).
Enfin, nous approfondirons la relation entre les représentations sociales et les conduites des
acteurs (1.3)

1.1. Du sens commun aux représentations sociales

Le sens commun se rapporte aux connaissances et aux croyances qui ne relèvent pas
des connaissances et des discours scientifiques mais plutôt à des « bavardages » qui semblent

19
L'étude de la cognition en psychologie était appliquée au niveau individuel, puis aux niveaux groupal et
organisationnel, ce qui a donné naissance à la perspective cognitive de l'organisation.
20
Voir Narayanan et al. (2011) pour une revue complète de la perspective cognitive en stratégie.

83
n’avoir aucun intérêt. C’est pourtant ces croyances a priori insignifiantes qui méritent
l’attention du chercheur dans la mesure où elles permettent aux individus de savoir comment
agir et d’évaluer les répercussions de leurs comportements.
La pensée naturelle dispose de quatre caractéristiques (Haas, 1999) :
1) elle se fonde sur l’expérience sensible. Haas (1999) illustre cette caractéristique par la
différence entre le poids et la masse : les individus ne connaissent pas forcément la différence
comme le scientifique, mais ils veulent simplement savoir si l’objet est lourd et pour cela, ils
se fondent sur l’expérience (qui y-a-t-il dans le carton que je dois porter ?) ;
2) la pensée naturelle se manifeste dans la communication sociale ;
3) elle s’exprime à travers le langage de tous les jours ;
4) elle satisfait à une logique propre qui ne répond pas aux canons de la logique formelle.
Ainsi, la pensée naturelle n’est ni illogique, ni irrationnelle.

Cette pensée de sens commun est caractérisée par le fait qu’elle est axée sur la
communication, elle se construit dans un échange, dans un dialogue, dans une interaction et
est marquée par la controverse. Dès lors, les chercheurs s’intéressent aux interactions entre les
acteurs pour déceler les représentations sociales de l’objet étudié21.

Rouquette (1973 : 298) propose la notion de « pensée sociale » pour caractériser la


pensée naïve qu’il définit de la manière suivante : la pensée sociale « caractérise la pensée
naturelle dans la mesure où elle « prend pour objets privilégiés les « autres », les relations
entre les individus, les thèmes et les croyances du domaine collectif ».
La pensée sociale peut se manifester de différentes manières et selon diverses échelles
de temps. La rumeur, la mémoire collective et les représentations sociales sont des formes de
la pensée sociale.
Rouquette (1996) propose un modèle architectural des relations qui pourraient exister
entre ces concepts (figure 5). Pour créer ce modèle il va partir de deux critères : le degré de
consensualité (consensus plus ou moins fort) et le degré de stabilité (stabilité plus ou moins
forte). Le plus stable et le plus consensuel dans une société est l’idéologie. Par exemple, le
nationalisme est une idéologie (Delouvée, 2013). A partir de l’idéologie découlent des
représentations sociales. Une représentation sociale est moins partagée, moins collective, elle
est sociale, relative à des groupes (les jeunes, les médecins, les malades, etc.). Par exemple, la

21
Weick s’est particulièrement intéressé aux dynamiques de la construction de sens à l’œuvre dans les
interactions en organisation. Pour approfondir cette question, voir Allard-Poesi (2003).

84
représentation sociale de l’étranger (Delouvée, 2013). Elle peut évoluer, se transformer,
disparaître. L’attitude découle de la représentation collective et représente la relation affective
entre un individu et un objet (j’aime/je n’aime pas). Les attitudes sont individuelles mais
peuvent être partagées. Par exemple, la représentation sociale de l’étranger peut être
bienveillante : « acceptation dans le pays d’accueil » (Delouvée, 2013 : 134), ou négative :
« rejet et comportement discriminatoire envers l’étranger Delouvée, 2013 : 134). En-dessous
de l’attitude se trouve l’opinion. L’opinion est très mouvante, peu stable et nécessite donc
d’être sondée régulièrement. Par exemple, une opinion serait : « l’altérité de l’étranger peut
nous apporter quelque chose de positif » (Delouvée, 2013 : 134). La RS se situe à
l’articulation entre l’idéologie d’un côté et l’attitude de l’autre.

Figure 5 : Le modèle de l'architecture de la pensée sociale, d'après Rouquette (1996)

consensus fort / stabilité élevée

idéologie

représentation représentation
sociale sociale

attitude attitude attitude

opinion opinion opinion

consensus faible / stabilité forte

Les RS désignent donc la construction d’une théorie naïve à propos d’un objet. Elles
aident ainsi les individus à lire le monde à le comprendre. Les individus ont besoin de créer
des théories explicatives à propos de ce qui les entoure.
Une représentation contribue à savoir comment agir, quelle conduite et quelle pratique
adopter vis-à-vis de l’objet en question. Ainsi, c’est une théorisation naïve du monde qui
permet à l’individu de savoir comment se comporter. Pour Durkheim (1898), le sens commun

85
est un ensemble de pré-notions. C’est parce qu’il guide les conduites quotidiennes que le sens
commun a un grand intérêt pour le chercheur.

1.2. La théorie des représentations sociales en psychologie sociale

Nous présentons la théorie des RS en trois parties. Tout d’abord nous présenterons les
principales définitions des RS (1.2.1). Ensuite, nous expliquerons comment les RS s’élaborent
et quelles sont leurs fonctions (1.2.2). Enfin, nous expliquerons comment les RS sont
structurées (1.2.3).

1.2.1. Définition : une construction collective de la réalité à travers les interactions

À l’origine, les représentations sont étudiées au niveau individuel par la psychologie


cognitive. La représentation mentale se définit d’une manière très large comme la
connaissance que l’individu a d’un objet.

C’est Durkheim (1898) qui introduit la notion de représentation collective, en


soulignant que la pensée individuelle est déterminée par les facteurs sociaux (Durkheim,
1898). Selon Durkheim (1898), là où les représentations individuelles sont propres aux
individus et donc instables, les représentations collectives sont partagées par l’ensemble de la
société et sont résistantes dans le temps (Lo Monaco, 2008). Enfin, Moscovici (1961),
propose une conceptualisation des représentations collectives, en s’inspirant de Durkheim. Il
va alors introduire le concept de « représentations sociales ». C’est sur la base des travaux de
Moscovici (1961) que vont se fonder les auteurs s’intéressant aux représentations, reprenant
alors le terme « représentations sociales », au dépend du terme « représentations collectives ».

Le tableau 7 présente les définitions données par les principaux auteurs de ce champ
de recherche. L’approche de Moscovici se distingue néanmoins de celle de Durkheim en
considérant que les représentations ne peuvent pas être partagées par tous les membres d’une
société au même moment (Lo Monaco, 2008). Elles peuvent donc porter sur des objets divers
en fonction des groupes sociaux qui les ont construites (Hidalgo, 2012).

86
Tableau 7 : Les principales définitions des représentations sociales

Auteur(s) Définition
« des systèmes d’interprétations d’événements et du monde, elles sont par-là,
Moscovici et Vignaux (1994,
vecteurs essentiels des opinions, jugements et croyances, visant à assurer la
p. 27)
pertinence et la régularité de nos liens et des conduites en collectivité ».
« l’ensemble des connaissances, des croyances, des opinions partagées par un
Guimelli (1994, p. 12)
groupe à l’égard d’un objet social donné »
« une forme de connaissance socialement élaborée et partagée ayant une visée
Jodelet (1989, p. 53) pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble
social »
« des systèmes de valeurs, des idées, et des pratiques dont la fonction est
double : en premier lieu, établir un ordre qui permettra aux individus de
s’orienter et de maîtriser leur environnement matériel, ensuite faciliter la
Semin (1989 : 263)
communication entre les membres d’une communauté en leur procurant un
code pour désigner et classifier les différents aspects de leur monde et de leur
histoire individuelle et de groupe » (Moscovici, 1961 ; Moscovici, 1973, p.
XIII ; cf. aussi Harlé et Lamb, 1983, p. 593). »
« le produit et processus22 d’une activité mentale par laquelle un individu ou
Abric (1987 : 87) un groupe reconstitue le réel auquel il est confronté et lui attribue une
signification spécifique. »
« un corpus organisé de connaissances et une des activités psychiques grâce
auxquelles les hommes rendent la réalité physique et sociale intelligible,
Moscovici (1961 : 27-28)
s'insèrent dans un groupe ou un rapport quotidien d'échanges, libèrent les
pouvoirs de leur imagination. »

Les représentations sociales désignent donc la signification que les individus attribuent
à un objet. Cet objet, qui désigne le phénomène appréhendé, peut être un concept (le vrai, le
faux, le juste), un objet physique (les chevaux), un objet social (la culture), une catégorie
d’individus (les professeurs) (Mannoni, 2012), un événement (un changement
organisationnel), une idée.
Précisément, la représentation est constituée d’un ensemble organisé d’opinions,
d’attitudes, de croyances et d’information se rapportant à un objet (Abric, 1989). Les
représentations permettent aux acteurs de comprendre la réalité et d’orienter leurs conduites23.

Le premier élément important à retenir de l’ensemble de ces définitions est que la


réalité n’est pas objective mais interprétée. Pour Abric (1989, 2011), cette réalité n’est pas
objective, mais appropriée, restructurée et représentée par l’individu ou le groupe, qui
l’intègre dans son système de valeurs en fonction de son expérience passée, de son système de
norme et du contexte social et idéologique. Dès lors, c’est cette réalité appropriée qui
constitue pour l’individu ou le groupe la réalité. En cela, ce ne sont donc pas les

22
Nous précisons : « produit » parce qu’elle est élaborée par la mentalité collective et « processus » parce qu’elle
organise la pensée (Mannoni, 2012).
23
Ce sera l’objet de la sous-partie « 1.3. Lien entre représentations sociales et conduites ».

87
caractéristiques objectives de la situation qui déterminent les comportements mais bien la
représentation que les acteurs se font de la situation.

Plusieurs travaux soulignent cela. Nous en restituons quelques-uns24.


Des expérimentations ont souligné que la représentation de la situation détermine les
comportements coopératifs. Dans le cadre d'un jeu expérimental, les individus sont placés
dans une même situation d'interaction conflictuelle, avec les mêmes consignes et le même
contexte (Abric, 2011). Par exemple, l'expérimentation d'Apfelbaum (1969) suggère qu'un
individu sera moins coopératif si son partenaire est non réactif. Ainsi, la représentation d'un
partenaire réactif ou non réactif influence les types de comportements de coopération.
L'expérimentation d'Abric et Vacherot (1976) souligne qu'une même tâche peut générer des
comportements différents : si cette tâche est présentée comme un jeu, les individus adoptent
des comportements plus compétitifs que lorsqu'elle est présentée comme un problème.
Les représentations déterminent également les relations intergroupes (Abric, 2011)
comme le suggèrent les études expérimentales de Doise (1976) et Sherif (1969), ainsi que la
structure et la performance des groupes (Abric, 1971).
D'autres études, menées dans des conditions réelles, suggèrent également que les
représentations sociales influencent les comportements. Par exemple, l'étude de Morin (1989)
suppose que les représentations sociales déterminent les réactions aux conditions de travail en
entreprise, celle de Guimelli (1994), que les représentations sociales déterminent le choix
professionnel. L'étude de Jodelet (1989b) illustre particulièrement le fait que les
comportements sont déterminés par les représentations sociales et non par la réalité objective.
L'auteure constate des pratiques d’hygiène non justifiées face à des malades mentaux de la
part du personnel soignant. Elle suggère que ces comportements intentionnels de protection
prennent appui dans des croyances partagées mais non verbalisées au sujet du caractère
supposé contagieux de la maladie mentale. Ce n’est donc pas la nature d’un objet, d’une tâche
ou d’un problème qui détermine le comportement à adopter mais la représentation de la
situation et du contexte.
Cette notion de réalité appropriée se retrouve chez Garreau (2009 : 49), pour qui, si la
signification de la situation s'impose à l'acteur, il est en revanche « pleinement agissant dans
la construction du sens ». L’auteur illustre son propos à l’aide de l’exemple suivant : un
arbitre donne un carton rouge : tout le monde comprend la signification de cette situation

24
Pour approfondir cet aspect, se référer à la synthèse d’Abric (2011).

88
(l'arbitre exclut le joueur) mais la signification donnée à la situation par les acteurs varie (en
fonction des expériences passées, un contexte, etc.). Dès lors, si la signification de l’objet
« performance de l’organisation » communiquée par les institutions (l’université, l’État, les
agences d’évaluation de la performance) peut être comprise, la signification donnée à la
performance de l’organisation est construite par les acteurs, qui s’approprient et restructurent
cette signification en fonction de leurs expériences passées, de leurs systèmes de valeurs et de
normes et du contexte social et idéologique (Abric, 2011). C’est cette signification ainsi
construite qui va guider et justifier les conduites de mobilisation collective.
Jodelet (1989a) précise d’ailleurs qu’une représentation sociale ne peut pas être
donnée, imposée aux acteurs. L’auteure suggère que même lorsqu’une représentation est
imposée par une idéologie dominante ou qu’une représentation se rapporte à une condition
définie par la structure sociale, le fait de partager cette représentation engendre une
dynamique sociale qui la rend spécifique. Lorsque les acteurs adhèrent aux formes de pensée
d’un groupe d’appartenance, ils affirment un lien social et une identité.

Le deuxième élément à retenir est que les acteurs donnent une signification à la
réalité, de manière collective, à travers leurs interactions. La théorie des représentations
sociales relève de l’approche socio-cognitive, pour qui l’interaction est le processus de
construction sociale de la réalité. Ainsi, la représentation est une « forme de connaissance
socialement élaborée et partagée » (Jodelet, 1989a : 53). Moscovici (1961) souligne que « les
représentations sociales sont générées collectivement, au fil des interactions à travers
lesquelles se mettent en place les processus de communication à propos de l’objet » (cité par
Guimelli et Abric, 2007 : 49). Weick (1969, 1995) développe également cette idée25.

1.2.2. Elaboration et fonctions des représentations sociales

Lorsqu’il propose le concept de représentation sociale, Moscovici (1961) suggère qu’elle


s’élabore selon deux processus fondamentaux : l’objectivation et l’ancrage.
L’objectivation consiste à rendre réel un schéma conceptuel, en matérialisant les
notions abstraites, en les mettant en images (Jodelet, 1998). « Objectiver c’est résorber un
excès de significations en les matérialisant (et prendre ainsi une distance à leur égard). C’est

25
Nous y reviendrons dans la partie « 2.3 Perspective weickienne des phénomènes collectifs en organisation ».

89
aussi transplanter au niveau de l’observation ce qui n’était qu’inférence ou symbole »
(Moscovici, 1961 : 108).
Alors que l’objectivation crée une connaissance, l’ancrage incorpore un objet et sa
représentation dans un système de pensée préexistant (Hidalgo, 2012). Il s’agit d’un
« enracinement social de la représentation et de son objet » (Jodelet, 1998 : 375), avec les
valeurs cognitives spécifiques que la représentation incarne (Mannoni, 2012). L’ancrage agit à
la fois en amont et en aval de la représentation. En amont, cette étape permet l’inscription de
la représentation dans des univers de sens et de savoir. En aval, l’ancrage donne une valeur
fonctionnelle au contenu de la représentation afin que ce contenu devienne disponible pour
son usage dans le groupe (Mannoni, 2012).

Les définitions que nous avons citées plus haut laissent apparaître que les
représentations sociales ont quatre fonctions : une fonction de savoir, une fonction identitaire,
une fonction d’orientation et une fonction justificatrice.

- fonction de savoir :
Elle permet d’appréhender la réalité, de l’expliquer et de l’interpréter. Elles permettent aux
acteurs d’obtenir et d’assimiler des connaissances par rapport à la situation, qui soient en
accord avec le leur système de valeurs. Par ailleurs, en fournissant un cadre de référence
commun, elles favorisent la communication sociale, ce qui permet au savoir de sens commun
de circuler, d’être partagé par les acteurs. Les représentations sociales permettent donc
l’échange social.

- fonction identitaire : elle définit l’identité et permettent la sauvegarde de la spécificité des


groupes :
Elle détermine les identités personnelles et sociales. En partageant des idées, un langage, les
membres d’un groupe affirment un lien social et une appartenance, tout en se distinguant des
autres groupes par comparaison sociale (Abric, 2011). En ce sens, les groupes exercent une
influence sur la pensée de leurs membres (Jodelet, 1989). Par ailleurs, la collectivité va faire
référence aux représentations pour exercer un contrôle social sur ses membres, notamment
dans les processus de socialisation (Abric, 2011).
Doise (1976) s’est particulièrement intéressé à cette fonction identitaire des représentations, à
travers l’étude des relations entre groupes. Ainsi, il précise que le lien de causalité entre
l’appartenance d’un acteur à un groupe et le degré de partage des idées avec les membres du

90
groupe n’est pas simple dans la mesure où chaque individu possède plusieurs groupes
d’appartenance. Doise (1989) se rapporte aux travaux sur les groupes de référence (Hyman,
1942), pour expliquer que certains groupes jouent un plus grand rôle d’ancrage des opinions
et des croyances que d’autres. Il donne l’exemple suivant : « les soldats noirs originaires du
Sud se sentaient relativement moins privés par la vie militaire que les Noirs du Nord, les
premiers se comparant aux Noirs civils du Sud dont le sort était peu enviable et les seconds se
comparant aux Noirs du Nord dont les conditions de vie étaient plus favorables » (Doise,
1989 : 250).

Les travaux sur la socialisation professionnelle (Dubar, 2010) mobilisent également


les recherches sur les groupes de références pour expliquer pourquoi les professionnels
accordent leur loyauté aux pairs plutôt qu’à leur organisation. Ainsi, Hughes (1958) explique
que la socialisation du professionnel est confiée à un groupe professionnel qui choisit et forme
ses membres par le biais d’une longue formation, et qu’au cours de cette formation les futurs
professionnels s’identifient à un groupe de référence qu’ils désirent rejoindre avec une
certaine frustration, et non plus à leur groupe d’appartenance. C’est une forme d’
« identification anticipée » qui favorise l’adoption, par avance, de normes, valeurs et modèles
de comportements des membres du groupe de référence (Dubar, 2010). Selon Becker (1960),
cette identification au groupe de référence défini le niveau d’engagement dans les tâches et
dans la future carrière.

Les deux dernières fonctions sont liées. Elles dépendent du moment où on pose la
question : avant le comportement ou après le comportement.

- fonction d’orientation :
Les représentations guident les comportements et les pratiques (Abric, 2011). Nous
présentons cette fonction d’orientation des conduites dans les grandes lignes puisque ce point
fera l’objet d’une sous-partie.
Le terme « pratiques » est couramment employé dans les travaux sur les représentations
sociales. Ce terme fait référence à une notion assez large. Ainsi, l’ouvrage dirigé par Abric
(2011) relate des études sur les pratiques professionnelles des infirmières (Guimelli, 2011),
sur les pratiques commerciales des artisans (Mardellat, 2011), sur les pratiques des jeunes
face à la prévention du SIDA (Morin, 2011).

91
Abric (2011 : 63) les définit comme « des comportements globaux qui évoluent pour
s’adapter aux changements des circonstances externes ». Selon Jodelet et Moscovici (1990 :
287), ce sont « des systèmes d’action socialement structurés et institués en relation avec des
rôles ». Les représentations guident les conduites des acteurs pour trois raisons. En premier
lieu, elles définissent la finalité de la situation. En deuxième lieu, la représentation est un
système d’anticipations et d’attentes qui va filtrer et interpréter les informations pour rendre la
réalité cohérente au regard de la représentation. Ainsi, pour Abric (2011 : 23), la
représentation « ne suit pas, ne dépend pas du déroulement d’une interaction, elle la précède
et la détermine ». Par ailleurs, des travaux26 ont montré que les pratiques peuvent modifier les
représentations. En troisième et dernier lieu, les représentations sont prescriptives des
conduites et des pratiques dites « obligées » (Abric, 2011 : 23), dans la mesure où elles
délimitent ce qui est licite ou non dans un contexte social donné.

- fonction justificatrice : elles permettent a posteriori de justifier les prises de position et les
comportements
Elle donne un sens a posteriori aux conduites adoptées dans une situation. Elles rendent
légitimes les conduites et les prises de position. Ainsi, selon Moscovici (1976 : 47) : « si une
représentation sociale est une « préparation à l’action », elle ne l’est pas seulement dans la
mesure où elle guide le comportement, mais surtout dans la mesure où elle remodèle et
reconstitue les éléments de l’environnement où le comportement doit avoir lieu. Elle parvient
à donner un sens au comportement, à l’intégrer dans un réseau de relations où il est lié à
son objet. Fournissant du même coup les notions, les théories et le fonds d’observations qui
rendent ces relations stables et efficaces ». Ainsi, la mobilisation collective est forcément liée
à son objet : la performance.

1.2.3. La structure des représentations sociales : un double système qui permet leur stabilité

Abric (2011) est l’un des premiers auteurs à étudier la structure des représentations sociales.
Selon lui, toute représentation sociale serait définie par deux éléments : un noyau central et un
système périphérique.

26
Voir l’ouvrage coordonné par Abric (2011).

92
Le noyau central est l’élément fondamental de la représentation car il donne la
signification et détermine l’organisation de la représentation. Tout ce qui relève du système
périphérique est contextuel, dépend de l’environnement, et des caractéristiques individuelles.
Les éléments du noyau central sont indépendants du contexte immédiat mais relèvent du
contexte sociologique, historique et idéologique dans lequel née et se développe la
représentation sociale. Au niveau fonctionnel, le noyau central a un rôle structurant dans la
mesure où il détermine la signification de la représentation, son organisation interne et son
architecture. Il stabilise et maintient la représentation dans le temps. Le système périphérique
va protéger le système central afin qu’il ne disparaisse pas en lui permettant d’intégrer des
informations et des pratiques différenciées.
Pour résumer, le noyau central a deux fonctions essentielles : une fonction
génératrice dans la mesure où il créée ou transforme la signification des autres éléments qui
constituent la représentation ; et une fonction organisatrice qui unifie et stabilise la
représentation car il détermine la nature des relations qui lient les autres éléments entre eux
(Abric, 2011).

Les éléments périphériques assurent trois fonctions. Premièrement, ils assurent une
fonction de concrétisation dans la mesure où ils proviennent de l’ancrage de la représentation
dans la réalité. A ce titre, ils rendent la réalité compréhensible et transmissible en intégrant
des éléments de la situation dans laquelle prend forme la représentation et en traduisant cette
réalité avec des termes concrets. Deuxièmement, les éléments périphériques assurent une
fonction de régulation en permettant à la représentation de s’adapter aux évolutions du
contexte. Les nouvelles informations ou transformations de l’environnement s’intègrent dans
la périphérie de la représentation. Si des éléments nouveaux remettent en cause les
fondements de la représentation, c’est-à-dire les éléments du noyau central, les éléments
périphériques vont avoir pour rôle de leur donner un sens mineur, de les réinterpréter dans le
sens de la signification centrale ou de leur donner un statut d’exception, de conditionnalité
(Flament, 2011). Dès lors, si le noyau central dispose d’une forte stabilité, les éléments
périphériques sont mouvants et évolutifs. Le but étant de protéger et maintenir la
représentation. C’est ce qu’Abric (2011) a nommé une « fonction de défense » de la
représentation. Flament (1987) qualifie les éléments périphériques de « pare-chocs », dans la
mesure où la moindre transformation du noyau central aurait pour effet de boulerverser
complètement la représentation,

93
« La transformation d’une représentation s’opérera donc dans la plupart des cas par la
transformation de ses éléments périphériques : changement de pondération, interprétations
nouvelles, déformations fonctionnelles défensives, intégration conditionnelle d’éléments
contradictoires. C’est dans le système périphérique que pourront alors apparaître et être
supportées des contradictions » (Abric, 2011 : 33-34).

L’existence de ce double système implique que deux représentations sociales d’un


même objet ne peuvent être considérées comme différentes qu’à la condition qu’elles se
structurent autour de systèmes centraux distincts. Deux groupes d’individus peuvent donc
avoir la même représentation d’un objet de par son noyau central, mais avoir des schèmes
périphériques différents, en fonction du contexte, notamment en ce qui concerne les pratiques
individuelles. « C’est l’existence de ce double système qui permet de comprendre une des
caractéristiques essentielles des représentations sociales qui pourrait apparaître comme
contradictoire : elles sont à la fois stables et mouvantes, rigides et souples. Stables et rigides
parce que déterminées par un noyau central profondément ancré dans le système de valeurs
partagé par les membres du groupe, mouvantes et souples parce que nourries du vécu et de la
situation spécifique, et l’évolution des relations et des pratiques sociales dans lesquelles
s’insèrent les individus ou les groupes » (Abric, 2011).

En résumé, les RS sont des connaissances élaborées et partagées collectivement. Elles se


construisent dans l’interaction et ont pour principales fonctions d’orienter et de justifier les
conduites des individus.

1.3. Lien entre représentations sociales et conduites

Un vaste débat est à l’œuvre concernant les relations entre représentations et conduites. D’une
manière générale, le lien entre cognition et action est plus complexe qu’il n’y parait. Saisir les
représentations collectives (par le biais d’une carte par exemple) ne permet pas forcément
d’anticiper l’action. Très souvent les acteurs légitiment et rationalisent leurs actions a
posteriori : « la pensée est souvent un produit de l’action » (Laroche et Nioche, 2006 : 99).
Dans le même ordre d’idée, Weick (1995) souligne qu’il est difficile de garantir que l’un
précède l’autre mais qu’il est possible d’affirmer que l’un ne va pas sans l’autre. Concernant
ce lien entre sens et conduites, Weick (1995) suggère qu’il est plus difficile de changer les

94
conduites que de changer les représentations à l’égard des conduites, les représentations étant
mobilisées pour justifier les actes. Il cite Kiesler’s (1971 : 17) : « les conduites explicites,
comme une décision irrévocable, fournissent le pilier autour duquel l’appareil cognitif
s’enroule ». Les représentations font sens des actions contraignantes et irrévocables, ainsi que
les circonstances qui ont généré ces actions, même si rien n’était clair au moment où l’action
s’est déroulée. Pour Weick (1995), les actions entreprises sont aussi importantes que les
représentations dans la construction collective de la signification d’un objet. Rappelons que
pour Weick, sens et action sont interreliés, la signification étant d’ailleurs souvent construite
après que l’action se soit déroulée.
Si de nombreux auteurs évoquent l’influence des RS sur les conduites (tableau 8), peu
d’études approfondissent ce lien.

Tableau 8 : Principales définitions de la relation entre représentations sociales et conduites

Auteur(s) Définition
« La représentation fonctionne comme un système d’interprétation de la réalité qui
régit les relations des individus à leur environnement physique et social, elle va
Abric (2011 : 18) déterminer leurs comportements ou leurs pratiques. La représentation est un guide
pour l’action, elle oriente les actions et les relations sociales. Elle est un système de
prédécodage de la réalité car elle détermine un ensemble d’anticipations et
d’attentes ».
Les représentations déterminent « les attitudes, les jugements, les conduites relatifs à
Guimelli (1999 : 106)
[un] objet ».
« On reconnaît généralement que les représentations sociales, en tant que systèmes
Jodelet (1989 : 53) d’interprétation régissant notre relation au monde et aux autres, orientent et
organisent les conduites et les communications sociales ».
« Si une représentation est une « préparation à l’action », elle ne l’est pas seulement
dans la mesure où elle guide le comportement, mais surtout dans la mesure où elle
Moscovici (1976 : 47)
remodèle, reconstitue les éléments de l’environnement où le comportement doit avoir
lieu ».

Abric (2011) propose à la fin d’un ouvrage qu’il a dirigé intitulé « Pratiques sociales et
représentations » un ensemble d’éléments théoriques et d’hypothèses synthétisant l’ensemble
de la connaissance sur ce lien. Nous reprenons ces éléments et essayons d’en tirer des
conclusions qui peuvent enrichir la compréhension du lien entre la signification de la
performance et la mobilisation collective.
Ainsi, pour de nombreux auteurs, si les études parviennent à démontrer un lien entre
pratiques sociales et représentations, elles ne peuvent affirmer laquelle influence l’autre,
comme le souligne le passage suivant de Mardellat (2011 : 196) : « La question fondamentale
ici est de savoir si les pratiques induisent les représentations ou si un changement de

95
perception, à la suite d’une formation par exemple, est susceptible d’influencer le
comportement ».
Abric (2011 : 263) essaie de répondre à ces questions : « sont-ce les pratiques sociales
qui déterminent les représentations ou l’inverse ? Ou les deux sont-elles indissociablement
liées et interdépendantes ? ». Son raisonnement et les conclusions qu’il propose prennent
appui sur différentes recherches présentées dans l’ouvrage.
Abric (2011) propose une analyse critique de la conception radicale qui suppose que
ce sont exclusivement les pratiques qui déterminent les représentations. Cette conception
trouve sa source d’une part dans l’approche de la sociologie marxiste qui stipule que « tant les
idéologies que leurs correspondants institutionnels sont directement issus et déterminés par le
mode de production qui régit une société donnée » (Abric, 2007 : 264), et d’autre part, dans
certains travaux de la psychologie sociale illustrés par Beauvois et Joule (1981, cités par
Abric, 2011). Pour ces derniers, les conduites des individus ne découlent pas de leurs
croyances, de leurs représentations ou de leur système de valeurs mais sont conditionnées par
leur environnement social. La représentation est donc issue d’un processus de rationalisation
qui va mettre en adéquation les attitudes et les opinions avec les conduites « imposées » par le
contexte de pouvoir, présent dans l’environnement. Cette approche de « l’homme soumis »
(Abric, 2011 : 265) s’applique exclusivement aux situations de conflits consécutifs aux
contradictions entre opinions et conduites.
Selon Abric (2011), cette conception devient radicale lorsqu’elle considère que la
représentation est exclusivement une rationalisation des pratiques, excluant ainsi les facteurs
culturels liés à l’histoire du groupe et à sa mémoire collective, les facteurs liés au système de
normes et de valeurs, et les facteurs liés à l’activité de l’individu qui intègrent les processus
de construction ou de réappropriation de la réalité.

Les représentations et les pratiques sont en fait à considérer comme un système dans
lequel ils s’engendrent mutuellement. Abric (2011 : 279-280) cite Autes (1985) qui résume
parfaitement cette idée : « On ne peut pas dissocier la représentation, le discours et la
pratique. Ils forment un tout. Il serait tout à fait vain de chercher si c’est la pratique qui
produit la représentation ou l’inverse. C’est un système. La représentation accompagne la
stratégie, tantôt elle la précède et elle l’informe, elle la met en forme ; tantôt elle la justifie et
la rationalise : elle la rend légitime ».

96
Abric (2011) propose néanmoins d’approfondir la connaissance de la relation entre
pratiques et représentations. À partir de plusieurs études, il suggère que la nature des liens
entre pratiques et représentations soit directement déterminée par la nature de la situation à
travers deux caractéristiques : la part de l’autonomie de l’acteur, « c’est-à-dire sa place et les
relations qu’il entretient dans le système de pouvoir ou de contraintes auquel il est confronté »
(2011 : 280), et « la présence d’éléments fortement reliés à des affects ou à la mémoire
collective » (2011 : 280). Il va alors formuler trois hypothèses :

« H1 : Les représentations déterminent les pratiques sociales dans les situations où la


charge affective est forte et où la référence – explicite ou non – à la mémoire collective est
nécessaire pour maintenir ou justifier l’identité, l’existence ou les pratiques du groupe »
(2011 : 280). L’auteur illustre cette hypothèse en faisant référence à une étude menée par
Jodelet (1989) sur des pratiques d’hygiène non justifiées face à des malades mentaux. Ces
comportements intentionnels de protection prennent appui dans des croyances partagées mais
non verbalisées au sujet du caractère supposé contagieux de la maladie mentale. Abric nomme
ces comportements des « pratiques signifiantes » (2011 : 280). Cette situation se caractérise
par une charge affective forte et des croyances fermement ancrées dans la mémoire collective.

« H2 : Les représentations jouent également un rôle déterminant sur les pratiques dans
les situations où l’acteur dispose d’une autonomie – même relative – par rapport aux
contraintes de la situation ou celles résultant des relations de pouvoir » (2011 : 280). L’auteur
qualifie ce type de situation de « situation non contraignante » c’est-à-dire une situation
« dans laquelle l’acteur est confronté à un ensemble de choix possibles, sans que certains de
ces choix apparaissent comme incontournables » (2011 : 282). Ni les normes sociales, ni le
pouvoir d'une autorité ou d'une institution, ni même des caractéristiques objectives de la
situation n'obligent l'adoption d'une conduite. Cela ne signifie pas qu’il n’y a aucune
contrainte sociale mais que celles-ci admettent des conduites différentes de la part des acteurs.
Les conduites adoptées dans ce type de situation résultent non pas de caractéristiques
objectives de la situation mais de représentations de la situation. Ce qui amène Abric (2011) à
conclure plus les situations sont complexes ou ambiguës, plus les représentations auront un
rôle important dans les conduites des acteurs. De nombreuses pratiques du quotidien peuvent
être qualifiées de pratiques non contraignantes, comme les pratiques de prévention par
exemple, ou certaines situations de travail en groupe.

97
« H3 : Dans les situations à forte contrainte – sociale ou matérielle –, les pratiques
sociales et les représentations sont en interaction. Dans ces situations, la mise en œuvre de
certaines pratiques est susceptible d’entraîner des transformations complètes des
représentations » (2011 : 284). Les pratiques déterminent les représentations dans le cas où
l’environnement physique ou matériel ou le contexte de pouvoir impose aux acteurs des
pratiques en contradiction avec leur système de normes et de valeurs ou en contradiction avec
leurs pratiques antérieures. Ils vont alors construire des représentations conformes à leurs
pratiques. Abric (2011) nuance cette hypothèse en procédant à un retour sur les travaux de
Flament (2011). Flament (2011) suggère que la situation peut être perçue par les acteurs
comme « réversible » ou « irréversible ». Une situation réversible est perçue comme
temporaire et exceptionnelle, et ne transformera pas la représentation en profondeur. Seuls les
éléments périphériques seront modifiés, et non pas le noyau central. Dans le cas d’une
situation irréversible, les acteurs considèrent qu’il est impossible de revenir à des pratiques
anciennes. Comme la nouvelle situation est contraignante et irréversible, l’autonomie de
l’acteur est très limitée par l’environnement et il ne peut pas conserver son système antérieur
de représentation dans le cas d’une contradiction avec la nouvelle situation. Nous retrouvons
en quelque sorte le processus mis en avant par Beauvois et Joule (1981) : pour rétablir
l’équilibre cognitif, l’acteur va modifier sa représentation afin qu’elle se conforme aux
pratiques nouvelles. C’est le cas des pratiques se rapportant à une idéologie (exemple apporté
par Ibanez, 1989) : à force de mettre en œuvre ces pratiques, les acteurs finissent par intégrer
dans leurs représentations sociales l’idéologie à laquelle les pratiques se rapportent.
Abric (2011) précise que le terme « contraintes de la situation » peut faire référence à
de multiples situations, allant de l’apparition d’un événement grave pour la population
(l’apparition du SIDA par exemple, étudié par Morin, 2011), à la modification de la politique
d’une entreprise (introduction d'un projet de mise en place de l'informatique, dans le cas
étudié par Singéry, 2011).

Ainsi, si tous les auteurs s’accordent à dire que RS et conduites sont liées, ils ne sont
pas d’accord sur le sens de la causalité. Certains ne se prononcent pas, en estimant qu’il est
difficile d’étudier ce lien à travers le discours des individus (Weick, 1995), d’autres
suggèrent que les RS agissent comme une préparation à l’action (Moscovici, 1976 ; Jodelet,
1989), d’autres encore suggèrent que ce sont les conduites qui influencent les RS (Laroche
et Nioche, 2006) et d’autres supposent que RS et conduites sont en interaction (Autes,
1985).

98
En résumé, les RS sont des connaissances, des croyances a priori insignifiantes, mais
qui méritent l’attention du chercheur dans la mesure où elles permettent aux individus de
savoir comment agir et d’évaluer les répercussions de leurs comportements. La littérature
révèle que l’existence du lien entre RS et conduites fait preuve d’un consensus mais pas
concernant le sens de la causalité. Ainsi, il est difficile de savoir si les RS précèdent les
conduites ou l’inverse. Nous disposons toutefois d’une série hypothèses formulées par Abric
(2011) qui suggèrent que le sens de la causalité dépend du contexte.
Par ailleurs, les RS s’inscrivent toujours dans un univers de sens et de savoir (ancrage)
et permettent de matérialiser des notions abstraites (objectivation). Elles sont composées d’un
noyau central stable qui donne la signification à la représentation et d’un système
périphérique plus mouvant, qui dépend du contexte.
Enfin, la littérature souligne que les RS sont partagées par les membres du groupe.
Elles sont en effet élaborées collectivement, dans l’interaction entre les acteurs, à travers la
communication. Néanmoins, nous nous interrogeons sur la signification du terme
« partagées » car la littérature souligne à quel point les universités sont des systèmes
complexes, composés d’acteurs dont les intérêts ne convergent pas nécessairement (Mériade,
2011). Dès lors, les EC peuvent-ils attribuer la même signification à la performance de
l’université ? C’est à cette question que nous tenterons de répondre dans la seconde section de
ce troisième chapitre.

Section 2 : Différentes conceptions des phénomènes cognitifs collectifs en


organisation

La littérature est divisée concernant les phénomènes collectifs en organisation. D’une part,
certains auteurs comme Mériade (2011) suggèrent que les intérêts des EC ne convergent pas
nécessairement et d’autre part, la littérature dominante en sciences de gestion envisage les
intérêts des membres de l’organisation comme étant convergents. Bettenhausen et Murnighan
(1985), par exemple, suggèrent que l'interaction de groupe sera bien coordonnée si les
définitions de la situation des membres sont semblables. Selon Cannon-Bowers, Salas et

99
Converse (1993), les représentations partagées sont supposées améliorer les compétences de
l'équipe de travail et l'efficacité de l'équipe. Dès lors, les acteurs pourront mieux coordonner
leurs activités avec celles des autres. Par ailleurs, les équipes qui partagent des représentations
sont censées avoir des attentes communes sur les tâches et l'équipe, leur permettant de prévoir
plus exactement le comportement et les besoins en ressources des membres (Cannon-Bowers
et Salas, 1990).
Des auteurs se sont alors interrogés sur la signification du partage des représentations27
dans un contexte organisationnel (par exemple Cannon-Bowers et al. 1993 ; Allard-Poesi,
1997, 1998 ; Klimoski et Mohammed, 1994 ; Mohammed, Klimoski et Rentsch, 2000). Ainsi,
partager fait référence, soit à une représentation cognitive qui serait identique parmi les
membres du groupe (par exemple la connaissance commune), soit à une configuration
distribuée des représentations, ou soit à une configuration de chevauchement des
représentations parmi les membres du groupe (Cannon-Bowers et al. 1993).

Trois conceptions différentes des phénomènes cognitifs collectifs jalonnent la


littérature dominante (Allard-Poesi, 1997, 1998). Nous présenterons en premier lieu la
conception cognitive de l’organisation (2.1) qui considère que la pérennisation et la
transmission des systèmes d’idées se fait de l’organisation ou le groupe vers les membres.
Ensuite, la conception issue des travaux de Weick (2.2), pour qui le partage de croyances par
les membres d’une organisation n’est pas nécessaire à l’action organisée, les croyances
n’étant qu’un artefact social transitoire qui n’est pas réapproprié par la plupart des acteurs
après les interactions. Enfin, la conception sociocognitive (2.3) envisage les représentations
sociales en tant que constructions établies et manifestées par les interactions entre les
membres d’un groupe.

2.1. Perspective cognitive

Les schémas individuels des membres d'une même organisation finissent par converger au gré
des expériences qu'ils partagent et par la confrontation aux représentations des autres. Puisque

27
Nous écrivons volontairement « représentation » et non « représentation sociale » pour ne pas trahir la pensée
des auteurs. En effet, Allard-Poesi (1997, 1998) traite de représentation collective par exemple, Klimoski et
Mohamed (1994, 2000) de team model.

100
les individus sont exposés aux mêmes situations, ils créent des représentations identiques de
la réalité (Porac, Thomas et Baden‐Fuller, 1989).
Cette perspective cognitive de l'organisation postule que les représentations des
acteurs se conforment à celles de la majorité ou du groupe, en se fondant sur deux théories :
celle de la comparaison sociale de Festinger (1954) et celle de l'influence normative de
Deutsch et Gérard (1955) (Allard-Poesi, 1998).

En se fondant sur la théorie de la comparaison sociale, la perspective cognitive


suggère que les individus qui doutent de la validité de leurs croyances car elles ne sont pas
directement vérifiables, les comparent à celles des autres membres du groupe pour s'assurer
de leur conformité avec la réalité. Dès lors, en cas de désaccord, ils vont modifier leurs
attitudes et opinions. C'est cette théorie qui fait dire aux tenants de l'approche cognitive dans
les organisations qu'il existe un schéma collectif au sein d'une organisation (Allard-Poesi,
1997).
La théorie de l'influence normative postule également que les individus se conforment
aux croyances et aux normes du groupe mais dans le but de ne pas être considéré comme
déviant, et ainsi de ne pas se faire sanctionner par le groupe, ou exclure. Cela serait d'autant
plus vrai lorsqu'ils doivent exprimer publiquement leurs opinions.
A travers la socialisation et la communication, les autres membres de l'organisation, et
surtout les managers, vont avoir un rôle important dans le partage des croyances et des
représentations, et dès lors, dans la motivation et la mobilisation (Pfeffer, 1981; Smircich et
Stubbart, 1985 ; cités par Allard-Poesi, 1997 : 19).
Ainsi, selon la perspective cognitive, les individus sont contraints par le groupe, qui
est lui-même influencé par des facteurs organisationnels.

Les travaux s’inscrivant dans une approche cognitive se sont attachés à comprendre
comment les membres d’une organisation donnent une signification aux situations qu’ils
rencontrent, quel est le lien qui lie cette vision et les comportements des acteurs, et plus
généralement le lien qui lie cette vision et la performance de l’organisation. Ces travaux
cherchent à saisir des représentations collectives qui auraient une influence sur les
comportements adoptés par les membres de l’organisation, ces comportements s’orientant
alors vers les objectifs de l’organisation (Allard-Poesi, 2003). La perspective cognitive des
représentations collectives semble donc présenter un intérêt pour appréhender la mobilisation
collective. Ces travaux ont toutefois été largement critiqués, d’une part, à cause de leur

101
approche de la culture organisationnelle. S'il y a en réalité plusieurs approches du concept de
culture organisationnelle, dépendant des hypothèses ontologiques des auteurs (à l'égard du
statut de la réalité sociale ainsi que de la nature humaine)28, la littérature dominante envisage
la culture organisationnelle de manière fonctionnaliste, où chaque membre de l’organisation
apprend les rôles attendus d’eux, en intériorisant des systèmes de valeurs (Rojot et Chanut,
2009). Ces approches dominantes, sur fond behavioriste, « alimentent une vision folklorique
de la culture observable à travers des mythes, des rites, des éléments de langage et des
symboles qui donnent sa marque à l’entreprise » (Rojot et Chanut, 2009 : 78). D’autre part, ils
sont critiqués en ce qui concerne la compréhension de la manière dont émergent ces
représentations collectives. Ces travaux n’apportent effectivement pas de réponse aux
questions de la nature et du processus d’émergence des systèmes d’idées partagés par les
membres de l’organisation (Allard-Poesi, 2003).

2.3. Perspective weickienne

Weick (1969, 1995) propose d’étudier le processus de construction collective de sens en


plaçant les interactions et les interrelations au centre de ce processus. Il positionne la question
du sens collectif dans un champ plus large d’élaboration d’un système d’actions organisées.
Pour comprendre la conception des phénomènes cognitifs collectifs développée par Weick, il
est essentiel de présenter la théorie du sensemaking, qui a fait le succès de ses travaux.

La théorie du sensemaking consiste selon Weick (1969, 1995) à construire le sens


d’une situation29. Le sensemaking est occasionné par un changement dans l’environnement,
une interruption dans l’organisation qui va perturber l’activité, poussant ainsi les acteurs à
chercher des raisons à cette perturbation, à faire sens de ce qui trouble l’activité afin de rester
en action (Weick, 2003). Cette interruption, aussi diverse qu’elle puisse être, engendre une
équivocité (ou ambiguïté). Il y a équivocité lorsque plusieurs facteurs peuvent avoir entraîné
la situation sans savoir lequel a été déterminant et lorsque plusieurs interprétations peuvent
donc exister pour une même situation (Vidaillet, 2003). Des cadres tels que les idéologies, les
principes organisationnels, les paradigmes de travail, les théories de l’action et les traditions

28
Voir Rojot et Chanut (2009) pour une explication claire des fondements du concept de culture
organisationnelle et des différentes conceptions qui jalonnent la littérature et voir Smircich (1983), pour une
revue détaillée, quoique peu récente, des différentes approches organisationnelles.
29
Certains auteurs traduisent sensemaking par « fabrication du sens » (Steyer, 2013), d’autres par « élaboration
du sens » (Koenig, 2003 ; Allard-Poesi, 2003), d’autres par « construction du sens » (Vidaillet, 2003).

102
héritées influencent la recherche d’explications. La construction du sens va se nourrir de ces
cadres. Le processus de sensemaking consiste alors à trouver des mots pour fournir une
explication possible de la situation, il s’agit de créer une nouvelle interprétation, un nouveau
sens, afin de continuer l’action. C’est pour cette raison que le vocabulaire utilisé par les
acteurs est d’une grande importance, permettant l’explication analogique, tout en gardant
cependant à l’esprit que la métaphore n’est pas le sensemaking ((Mallet, 2009). Les membres
de l’organisation vont confronter, échanger, synthétiser leurs différents cadres de référence.

Weick (1995) recense sept dimensions ou propriétés du processus de sensemaking :


(1) Le processus de sensemaking se fonde à partir de l’identité de l’individu, « sensemaking
begins with a sensemaker » (Weick, 1995 : 18) ;
(2) le processus de sensemaking est rétrospectif : l’individu fait sens d’actions passées,
« people can know what they are doing only after they have done it » (Weick, 1995 : 24) ;
(3) les acteurs mettent en scène (enact) leur environnement30 ;
(4) le sensemaking est un processus social puisque le sens se créé collectivement, dans
l’interaction avec ses interlocuteurs ;
(5) le processus de sensemaking est continu, « Sensemaking never starts. The reason it never
starts is that pure duration never stops » (Weick, 1995 : 43) ; (6) le sens se construit à partir
d’indices (cues) extraits du flux continu (d’informations, d’événements, d’activités, etc.) qui
entoure les acteurs ;
(7) le processus de sensemaking est davantage guidé par la plausibilité du sens créé que par
son exactitude.

La construction collective du sens se développe au cœur des interactions entre les


individus. C’est par le biais des activités de communication quotidienne que les individus
parviennent à coordonner leurs comportements et à agir ensemble. Par cette communication,
ils aboutissent à des attentes compatibles avec des questions d’intérêts communs (Allard-
Poesi, 2003).

30
A propos du terme « enactement », Vidaillet (2003 : 178) précise : « Plusieurs traductions ont été proposées :
mise en scène (Koenig, 1987), promulgation (Laroche, 1996), activation (Koenig, 1996a). Par enactment, Weick
entend un double processus. D’une part, il désigne le fait que les individus contribuent à créer l’environnement
dans lequel ils se trouvent, puisque, par le processus de sensemaking, ils contribuent à créer l’objet de leur
observation. D’autre part, en retour par les actions qu’ils initient dans cette réalité « décrétée », les individus
reçoivent des stimuli comme « résultat de leur propre activité » (Weick, 1995a, p. 32). Ce processus est
susceptible de leur faire oublier le caractère construit de cette réalité, qui, par les signes tangibles et concrets
qu’il est possible de lui associer, se met à exister de manière propre ».

103
Les travaux de Weick sont à rapprocher de l’interactionnisme symbolique, dont
l’influence est notable (Koenig, 2003 ; Mallet, 2009). Allard-Poesi (2003) souligne
néanmoins que Weick n’envisage pas le comportement comme étant déterminé uniquement
par des facteurs personnels, ne laissant aucune place aux facteurs situationnels et leurs
interactions. Le système d’actions organisées et l’élaboration collective de sens se situent au
cœur de « l’interaction réciproque des définitions de la situation et des modes d’interactions
activées » (Allard-Poesi, 2003 : 94).

Il s’agit pour Weick de reconnaître que l’individu crée le monde et que le monde le
crée à son tour (Mallet, 2009). Dès lors, le cadre de la construction de sens « donne une place
aux contextes d’indétermination, de confusion, d’incertitude, de faible couplage et
d’ambiguïté, dans lesquels les individus agissent comme si leurs croyances étaient plausibles,
ce qui entraîne alors des événements qui peuvent être interprétés comme confirmant ces
croyances » (Weick, 2003 : 2). Ainsi, l’enactment reflète ce paradigme.

Un deuxième point distingue l’approche de Weick de l’approche cognitive : il


considère que le processus collectif de construction de sens n’implique pas qu’un sens
collectif soit donné aux actions et situations, « construction collective du sens (collective
sensemaking) ne signifie pas construction d’un sens collectif (collective or shared meaning) »
(Allard-Poesi, 2003 : 92).
Weick développe l’idée selon laquelle les deux individus en interaction ne sont pas
obligés de connaître leurs motivations respectives, ni de comprendre le comportement de
l’autre, le seul impératif étant de le prévoir. Ainsi, pour Weick, lorsqu’un groupe se forme, les
individus ne partagent pas nécessairement des besoins, des valeurs ou des objectifs, mais
pensent pouvoir tirer un bénéfice de cette organisation. Ils ont alors la même vision que les
autres membres des moyens à mettre en place pour y arriver. Il y a donc convergence sur les
moyens à mettre en œuvre, mais pas forcément sur les objectifs à atteindre. Certains objectifs
pourront converger au cours du temps, afin de préserver le groupe, ceci étant favorisé par
l’aspect rétrospectif du sens.
Dès lors, l'action coordonnée est possible même si les acteurs ont des représentations
différentes de la réalité à partir du moment où ils ont une vision commune des moyens à
entreprendre pour satisfaire leurs intérêts particuliers. Un accord temporaire peut être trouvé
grâce à la communication (à travers les métaphores, les argumentations logiques) dépassant
ainsi les différences d'interprétations entre les acteurs. Dès lors, les acteurs peuvent donner un

104
sens différent aux événements (causes et effets) et aboutir toutefois à un accord si leurs
interprétations ont les mêmes conséquences comportementales.

Gray (1985) rejoint les conclusions de Weick, en soulignant que les membres d'une
organisation peuvent partager des objectifs, à travers ce qu'ils nomment une « valorisation
commune ». Ils donnent l'exemple suivant : « si tous les départements d'une université
pensent qu'une nouvelle direction va travailler dans le sens de leurs intérêts, une
compréhension collective de cet événement peut se former » (Gray, 1985 : 87-88).
Weick ne développe pas davantage les phénomènes cognitifs collectifs, s’attachant
surtout à comprendre le processus de construction de sens dans l’interaction entre les acteurs.

En résumé, les différences majeures entre la perspective cognitive et la perspective


« weickienne » sont telles que : pour la perspective cognitive, le partage de croyances entre
les membres d'une organisation leur permet d'agir collectivement, alors que pour Weick ce
n’est pas une condition préalable. Weick (1969, 1995) suggère même que le fait de
communiquer les buts poursuivis aux membres peut entraîner des conflits et nuire à
l'action collective.

2.2. Perspective sociocognitive

Pour la perspective sociocognitive, il n'est plus question de se réduire à la seule conformité de


l'individu au groupe, mais à une influence sociale qui mêle conflit et négociation, et qui, dès
lors, peut également aboutir à la normalisation, à l'innovation et au changement (Allard-Poesi,
1997).
Alors que les psychologues cognitivistes anglosaxons considèrent que les processus
cognitifs sont principalement intra-individuels, le concept de représentation sociale développé
dans les études francophones les considèrent comme interindividuels (Codol, 1969).
Le social ne s'impose pas à l'individu, celui-ci est pleinement producteur de la réalité,
ne serait-ce qu'à travers le discours dont il est le créateur. De même que l'aspect cognitif ne
relève pas du seul niveau intra-individuel, le langage par exemple contraint la cognition.
Ainsi, il est question d'une réelle interaction entre les niveaux cognitif et social.

105
Rappelons que selon Abric (2011), les individus ne réagissent pas aux caractéristiques
objectives de la réalité mais à la représentation qu'ils en ont.
Une conception consensuelle de la réalité se construit à travers les interactions grâce à
la communication (Jodelet, 1989 : 47).
L'influence sociale n'est pas envisagée, selon cette approche, tel un mécanisme de
conformité cognitive et comportementale des acteurs au groupe ou à l'organisation, comme la
perspective cognitive l’envisage. Les représentations sont construites par les interactions, en
fonction de mode de résolution de conflits sociocognitifs (Allard-Poesi, 1997, 1998).
Cette perspective remet en cause le rapport de dépendance entre minorité et majorité,
avancé dans la perspective cognitive. Minorité et majorité sont considérées comment étant
récepteur et émetteur potentiel d'influence sociale. Dès lors, une minorité ou même un
individu peut apporter des nouveaux modes de pensées ou des nouveaux comportements, ou
peut transformer des visions préexistantes.

Se rapprochant de la perspective sociocognitive, Allard-Poesi (1997, 1998) développe


toutefois sa propre conception des phénomènes cognitifs collectifs en introduisant la notion de
grilles de lecture transverses aux problèmes traités durant les interactions. Ses travaux
suggèrent que si les individus n'aboutissent pas à un consensus sur le contenu des croyances
qui constituent leurs représentations, ils parviennent néanmoins à interpréter de la même
façon le problème car ils ont des grilles de lecture similaires du problème à traiter.
L’élaboration de ces grilles de lecture et de dimensions structurantes communes aux
représentations grâce aux interactions, sont pour Allard-Poesi (1997, 1998) le signe de
l’émergence de constructions collectives de la réalité, qui vont au-delà de simples croyances
partagées. Allard-Poesi suggère que les croyances initiales des membres d'un groupe
n'expliquent que très peu les représentations collectives. Celles-ci se construisent dans
l'interaction (discussion, réunion, etc.).

Ces trois conceptions des phénomènes cognitifs collectifs se rejoignent en suggérant


que les représentations se construisent collectivement à travers les interactions, en particulier
grâce à la communication. Néanmoins, la perspective cognitive de l'organisation postule que
les représentations et les comportements des acteurs se conforment à ceux de la majorité ou
du groupe, ce que rejette la perspective sociocognitive. La perspective sociocognitive ne

106
résume pas non plus les croyances à des artefacts sociaux transitoires qui prennent place dans
les interactions, comme la perspective weickienne le suggère.
Pour notre part, nous inscrivons notre réflexion dans l’approche sociocognitive car
selon nous les représentations se construisent dans les interactions entre acteurs. Nous
prenons une distance avec la perspective cognitive car nous envisageons qu’une minorité ou
même un acteur peut contribuer à la construction collective de la RS de la performance
organisationnelle. A l’instar d’Allard-Poesi (1997, 1998), nous ne limitons pas les croyances à
de simples artefacts sociaux au sein des interactions. Nous avons largement souligné le poids
des croyances dans les interactions et dans l’adoption de conduites collectives. Il nous semble
néanmoins difficile d’envisager l’existence d’un consensus sur le contenu des croyances qui
constituent la représentation de la performance organisationnelle pour que la mobilisation
collective soit possible. Dès lors, nous rejoignons Allard-Poesi (1997, 1998) lorsqu’elle
suggère l’existence de grilles de lecture transverses aux problèmes traités durant les
interactions. Pour Cannon-Bowers et al (1993), les représentations en organisation
n'impliquent pas des croyances identiques, mais plutôt le fait que les membres ont des
modèles compatibles qui les guident vers des attentes communes. Par conséquent, pour
qu’une mobilisation collective puise prendre forme, les croyances qui forment la
signification de la performance organisationnelle peuvent être différentes d’un acteur à
l’autre, ou d’un groupe d’acteur à l’autre, mais il doit exister des grilles structurantes
communes aux représentations, construites durant les interactions, ainsi que des attentes
communes.

CONCLUSION DU CHAPITRE 3

Nous avons vu dans ce troisième et dernier chapitre de littérature que les RS sont des
systèmes d’interprétation d’un objet, élaborés et partagés par les membres d’un groupe. Ces
systèmes d’interprétation sont des connaissances et des croyances qui relèvent du sens
commun et non du discours scientifique. Si ces croyances paraissent a priori insignifiantes, ce
sont elles qui guident pourtant les conduites des acteurs. En cela, la RS de la performance
organisationnelle oriente la mobilisation collective. Une des hypothèses centrales de la théorie

107
des RS est que la réalité n’est pas objective mais interprétée. Dès lors, si la signification de
l’objet « performance de l’organisation » communiquée par les institutions (l’université,
l’Etat, les agences d’évaluation de la performance) peut être comprise, la signification
donnée à la performance de l’organisation est construite par les acteurs, qui
s’approprient et restructurent cette signification en fonction de leurs expériences passées, de
leurs systèmes de valeurs et de norme et du contexte social et idéologique (Abric, 2011).
C’est cette signification ainsi construite qui va guider et justifier les conduites de mobilisation
collective.

Par ailleurs, toute RS est composée d’un noyau central qui donne la signification à
l’objet et d’un système périphérique (Abric, 2011). Les éléments de signification de la
performance organisationnelle contenus dans ce noyau central sont des éléments largement
partagés par les professionnels. C’est grâce à ce partage d’un noyau de sens commun
entre les membres d’un même groupe que les conduites collectives sont possibles.
Enfin, si tous les auteurs s’accordent à dire que RS et conduites sont indissociables, la
littérature fournit peu d’études sur le lien entre les deux. Il est ainsi impossible d’affirmer
avec certitude si ce sont les RS qui précèdent les conduites ou l’inverse. Dès lors, nous
sommes simplement en mesure de présupposer que les RS de la performance de
l’organisation orientent la mobilisation collective des professionnels. En effet, puisque
l’attitude découle de la RS et représente la relation affective entre un individu et un objet, et
que cette relation affective agit comme une prédisposition à l’action, nous posons
l’hypothèse que les RS de la performance de l’organisation orientent la mobilisation
collective envers l’organisation par l’intermédiaire de l’engagement organisationnel
et/ou professionnel (qui est l’attitude qui représente la relation affective entre les
professionnels et l’organisation).

108
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE

Nous synthétisons dans la figure 6 le cadrage théorique de la thèse.

Figure 6 : Synthèse de la première partie

SYNTHESE DE LA PREMIERE PARTIE : REVUE DE LITTERATURE

Chapitre 1 : Les EC, des professionnels au sein d’une organisation pluraliste en pleine mutation

- caractéristiques des professionnels : autorégulation par la profession, valeurs et logiques professionnelles


- caractéristiques des organisations pluralistes : pouvoirs dispersés à travers toute la hiérarchie, gestion
complexe des professionnels due aux problèmes de compatibilité entre régulation autonome par la
profession et hétéronome par l’organisation
Implication pour la thèse :
Même s’il est difficile de nier le rapport conflictuel qui existe entre les professionnels et les organisations
qui les emploient, nous soulignons dans ce premier chapitre des éléments qui remettent en cause cette
analyse classique.

Chapitre 2 : La mobilisation collective des acteurs professionnels : entre engagement professionnel et


engagement organisationnel

- des conduites volontaires qui englobent et dépassent les rôles prescrits par l’organisation
- des conduites orientées vers l’atteinte des priorités organisationnelles
- la mobilisation collective suppose un engagement organisationnel fort
- l’engagement organisationnel peut être compatible avec l’engagement professionnel, sous certaines
conditions
Implication pour la thèse :
Peu d’études ont porté sur la mobilisation collective dans le secteur public, en particulier concernant des
acteurs professionnels. La littérature est peu étayée sur les moyens de concilier engagement organisationnel
et engagement professionnel. Cette conciliation est pourtant primordiale pour que la mobilisation collective
soit possible.

Chapitre 3 : Les représentations sociales : justifient et guident les conduites

- ce n’est pas la situation objective qui explique et guide les conduites mais la représentation (créée) que
s’en font les acteurs
- les représentations sociales renvoient à la pensée naturelle, naïve, qui prend forme dans les interactions
entre les acteurs, à travers la communication sociale et à travers le langage de tous les jours
- un noyau central stable et partagé, des éléments périphériques évolutifs et contextuels
Implication pour la thèse :
Comprendre, expliquer, prévoir les conduites en organisation ne peut aboutir que dans la mesure où les
systèmes de représentation des acteurs sont analysés et identifiés. Nous suggérons que c’est la
représentation de la performance organisationnelle élaborée par les professionnels qui explique et guide
leur mobilisation collective.

109
Nous présentons dans la figure 7 les relations entre les principaux concepts du cadre théorique
de la thèse.

Figure 7 : Relations entre les principaux concepts du cadre théorique

L’attitude découle de la L’engagement organisationnel


représentation collective et agit comme une force
représente la relation affective stabilisante ou obligeante qui
entre un individu et un objet offre une direction au
(Rouquette, 1996). comportement (Meyer et
Herscovitch, 2001).

Représentations Engagement Mobilisation


Sociales collective

individuelle
Organisationnel
de la performance collective
organisationnelle
organisationnelle
professionnel

Un lien psychologique entre une


personne et son organisation et entre une
personne et sa profession (Meyer et
Allen, 1991)

L’ensemble des connaissances, des Un ensemble d’acteurs très motivés qui


croyances, des opinions partagées par un fournissent des efforts volontairement,
groupe à l’égard d’un objet social donné compris ou non dans leurs rôles
(Abric, 2011) prescrits, et orientés vers l’amélioration
continu de leur travail (orientation
individuelle), vers le collectif
(orientation collective) et vers
l’amélioration de la performance de leur
organisation (orientation
organisationnelle) (Tremblay et Wils,
2005).

110
PRÉSENTATION DES QUESTIONS DE RECHERCHE

Rappel de la problématique générale :

Dans quelle mesure les RS de la performance que les professionnels élaborent orientent-
elles leur mobilisation collective envers l’organisation ?

QR1 Quels types de comportements (envers l’organisation et envers la profession) les EC


adoptent-ils dans le cadre de leur mobilisation collective ?

QR2 Quelle est la RS de la performance organisationnelle ?

QR3 En quoi la RS de la performance organisationnelle élaborée par les EC influence-t-elle


leur engagement envers l’organisation et leur engagement envers la profession ?

QR4 En quoi l’engagement envers l’organisation et l’engagement envers la profession


influencent-ils la mobilisation collective des EC ?

111
DEUXIÈME PARTIE : CHOIX ÉPISTÉMOLOGIQUES ET
MÉTHODOLOGIQUES DE LA RECHERCHE

112
Cette deuxième partie expose les choix méthodologiques et empiriques opérés pour répondre
à la problématique de la thèse :

Dans quelle mesure la RS de la performance que les professionnels élaborent oriente-t-


elle leur mobilisation collective envers l’organisation ?

Dans un premier temps (Chapitre 4), nous expliquerons la problématisation de la


recherche (1), l’inscription paradigmatique de la recherche (2), et nous exposerons notre
positionnement épistémologique interprétativiste (3).
Dans un deuxième temps (Chapitre 5), nous justifierons et détaillerons la
méthodologie qualitative par étude de cas que nous avons retenue (1), ainsi que la méthode
d’analyse du matériau recueilli (2)

113
CHAPITRE 4. PROBLÉMATISATION DE LA RECHERCHE
ET FONDEMENT ÉPISTÉMOLOGIQUE

Les recherches en sciences de gestion relèvent de plusieurs hypothèses concernant le statut


ontologique de la réalité sociale (la question de la réalité objective ou subjective) ainsi que de
plusieurs hypothèses au sujet de la nature humaine (la question du déterminisme vs le
volontarisme) (Burrel et Morgan, 1979 ; Morgan et Smircich, 1980 ; Ritzer, 1975 ; Van de
Ven et Astley, 1981).
Nous préciserons dans ce chapitre les hypothèses auxquelles nous souscrivons et qui
ont guidé nos réflexions à travers les lectures. Nous n'avons pas restreint nos lectures aux
courants s'inscrivant dans nos hypothèses, mais nous avons essayé de les lire à travers nos
propres conceptions de la réalité et de la nature humaine.
Ainsi, dans un premier temps, nous retraçons notre processus de problématisation de
la recherche (section 1). Dans un deuxième temps, nous expliquons notre vision du monde
social (section 2). Enfin, nous précisons notre posture épistémologique (section 3).

114
Section 1 : Problématisation de la recherche

Nous expliquons dans un premier temps que nos questionnements partent d’un
problème concret (1.1) et dans un deuxième temps nous déclinons notre problématique en
questions de recherche (1.2).

1.1. Points de départ de nos questionnements

Allard-Poesi et Maréchal (2007) suggèrent cinq points de départ de questionnement : la


théorie, l'approche méthodologique, un problème concret, une opportunité de terrain ou un
domaine d'intérêt général.
Notre questionnement part d'un problème concret. Les premières universités françaises
accédaient aux RCE en application de la loi LRU lorsque nous étions en Master recherche (en
2009). Notre mémoire de Master recherche étudiait déjà la mobilisation collective des
enseignants-chercheurs. Les réactions, vives mais très contrastées, qui ont entouré cette vague
de réformes d'envergure (réforme du statut des EC, LRU, proposition d'un niveau système
d'allocation des moyens aux universités) ont retenu notre attention. Certains EC faisaient
grève pendant que d’autres attendaient avec enthousiasme les bénéfices de ces réformes. Nous
nous sommes alors très rapidement questionnés sur la signification de ces réformes pour les
acteurs chargés de les appliquer, en particulier les EC, et notamment sur la signification du
terme « performance d’une organisation publique », qui était réaffirmé avec force par ces
réformes. En plus de réaffirmer avec force le terme de performance, l’Etat contraignait, à
travers ces réformes, les universités à mettre en place de manière autonome une gestion basée
sur la performance (dans la mesure où l’allocation des moyens aux universités se ferait
désormais sur la base de leur performance).
Par ailleurs, nous portons un intérêt tout particulier à l'étude des comportements et des
attitudes des individus en organisation, en particulier des professionnels dans les organisations
publiques en mutation. L'ouvrage d'Emery et Giauque « Paradoxes de la gestion publique »
(2005) a marqué nos esprits parce qu'il replace « l'humain » à sa place dans les organisations
publiques. L'approche humaniste que les auteurs développent rejoint particulièrement notre
conception de la place de l'Homme en organisation, et notamment la prise en compte du
facteur « humain » dans la mise en œuvre des réformes.

115
D’un point de vue théorique, nous découvrions le concept de mobilisation collective
(Tremblay et Wils, 2005), qui nous a immédiatement semblé porteur. Ce concept était
néanmoins peu traité par la littérature. Les études sur les attitudes et les comportements des
individus en organisation portaient essentiellement sur les comportements de citoyenneté
organisationnelle (OCB), l’engagement organisationnel (organizational commitment) et la
motivation au travail. Si l’apport de ces concepts est essentiel dans la compréhension des
comportements des individus en organisation et à la formation du concept de mobilisation
collective, ils ne permettent pas de prendre en compte l’orientation collective et
organisationnelle de ces comportements.
Enfin, peu de recherches étudiaient la mobilisation collective des professionnels,
encore moins dans les universités.

1.2. La formulation de notre problématique et des questions de recherche qui la


déclinent

Afin de répondre à la problématique qui guide la recherche « Dans quelle mesure les RS de
la performance que les professionnels élaborent orientent-elles leur mobilisation
collective envers l’organisation ? », nous élaborons les quatre questions de recherche
(dorénavant QR) suivantes :

QR1) Quels types de comportements (envers l’organisation et envers la profession) les


EC adoptent-ils dans le cadre de leur mobilisation collective ?

Cette première question de recherche permettra de comprendre ce que signifie se mobiliser


(collectivement) du point de vue des acteurs concernés, à savoir les EC, ainsi que du point de
vue des décideurs (toute autorité formelle). L’objectif sera également de renforcer le concept
de mobilisation collective. Dans ce but, il s’agira de décrire les types de comportements : les
« efforts » fournis, relevant de la mobilisation collective.

La sous-question de recherche qui suit relève de ce qui est attendu des universitaires de la
part de l’institution :

QR1.1 : Quels types de comportements sont attendus des professionnels au nom de


cette mobilisation collective ?

116
La deuxième sous-question formulée ci-dessous se positionne au niveau opérationnel en
essayant de décrire les comportements que les professionnels estiment être des
comportements de mobilisation collective :

QR1.2 : Comment se manifestent ces comportements ?

La mobilisation collective étant composée de conduites dans le rôle et hors du rôle, la


troisième sous-question vise à déterminer quelles sont ces conduites.

QR1.3 : Quelles sont les conduites dans le rôle et hors du rôle selon la perception des
acteurs ?

La mobilisation se définie comme un phénomène collectif. Dès lors, dans une organisation
pluraliste, avec une structuration spécifique, à quoi correspond ce collectif ? A quel niveau se
construit la représentation sociale de la performance nécessaire à l’action collective ? Nous
formulons alors :

QR1.4 : Quel est le niveau groupal de référence de la mobilisation collective ?

Les deux sous-questions de recherche qui suivent s’intéressent aux dispositifs envisagés par
l’organisation pour encourager la mobilisation collective.

QR1.5 : Quels sont les dispositifs de gestion prévus pour encourager la mobilisation
collective des professionnels dans le cadre de ce nouveau mode de gestion de
l’université ?

QR1.6 : Comment réagissent les professionnels face à ces dispositifs ?

QR2) Quelle est la RS de la performance organisationnelle ?

Cette deuxième question de recherche s’intéresse à la signification que donnent les


professionnels à la performance organisationnelle. Dit autrement, nous analyserons le
contenu de la RS (quel est le noyau central de la RS ?).

117
QR2.1 : comment les EC définissent-ils la performance d’une université ?

Nous avons souligné dans le chapitre 3 que pour qu’une mobilisation collective puisse
prendre forme, les croyances qui forment la signification de la performance
organisationnelle peuvent être différentes d’un acteur à l’autre, ou d’un groupe d’acteur à
l’autre, mais il doit exister des grilles structurantes communes aux représentations,
construites durant les interactions, ainsi que des attentes communes. Dit autrement, nous
nous intéressons à la structure de la RS (comment les différents
éléments/cognèmes/catégories thématiques qui composent la RS s’organisent ?). Dès lors :

QR2.2 : Quelles sont les grilles structurantes communes aux représentations de la


performance organisationnelle des acteurs ?

QR3) En quoi la RS de la performance organisationnelle élaborée par les EC influence-


t-elle leur engagement envers l’organisation et leur engagement envers la profession ?

La littérature n’établit pas un lien direct entre la signification donnée à un objet et le


comportement des individus à l’égard de cet objet. La signification donnée à l’objet active des
attitudes, qui, à leur tour, influencent les comportements (Garreau, 2009). Au regard de la
littérature présentant la relation ambiguë, parfois conflictuelle, qu’entretiennent les
professionnels avec leur organisation, nous nous demandons si la RS de la performance
organisationnelle élaborée par les EC influence leur engagement envers l’organisation et leur
engagement envers la profession.

QR3.1 : les professionnels sont-ils engagés envers l’organisation ?

QR3.2 : les professionnels sont-ils engagés envers la profession ?

QR3.3 : les professionnels sont-ils engagés envers les deux (engagement multiple) ?

QR4) En quoi l’engagement envers l’organisation et l’engagement envers la profession


influencent-ils la mobilisation collective des EC ?

118
Nous avons souligné qu’un professionnel peut être très mobilisé pour ses activités purement
professionnelles, qu’elles soient dans ou en dehors de l’organisation, et très peu envers
l’organisation. Pourtant, Somers et Birnbaum (2000) soulignent que les acteurs possédant
simultanément un fort niveau d'engagement envers leur organisation et leur profession ont les
attitudes au travail les plus positives. Néanmoins, les liens entre engagement organisationnel,
engagement multiple, engagement à la profession et mobilisation collective sont peu étudiés.
Dès lors, nous formulons la série de sous-questions de recherche suivantes :

QR4.1a : les professionnels engagés envers l’organisation adoptent-ils davantage de


conduites de mobilisation collective ?

QR4.2b : les professionnels engagés envers la profession adoptent-ils davantage de


conduites de mobilisation collective ?

QR4.3c : les professionnels engagés envers les deux adoptent-ils davantage de


conduites de mobilisation collective ?

QR4.3 : Existe-t-il un conflit/une opposition entre l’engagement envers la profession et


l’engagement envers l’organisation ?

Le tableau 9 synthétise l’ensemble des questions et sous-questions de recherche. Pour rappel,


la problématique ou question de recherche générale est la suivante : Dans quelle mesure les
RS de la performance que les professionnels élaborent orientent-elles leur mobilisation
collective envers l’organisation ?

119
Tableau 9 : Questions et sous-questions de recherche

QR1 Quels types de comportements (envers l’organisation et envers la profession) les EC adoptent-ils
dans le cadre de leur mobilisation collective ?

QR1.1 Quels types de comportements sont attendus des professionnels au nom de cette mobilisation
collective ?

QR1.2 Comment se manifestent ces comportements ?

QR1.3 Quelles sont les conduites dans le rôle et hors du rôle selon la perception des acteurs ?

QR1.4 Quel est le niveau groupal de référence de la mobilisation collective ?

QR1.5 Quels sont les dispositifs de gestion prévus pour encourager la mobilisation collective des
professionnels dans le cadre de ce nouveau mode de gestion de l’université ?

QR1.6 Comment réagissent les professionnels face à ces dispositifs ?

QR2 Quelle est la RS de la performance organisationnelle ?

QR2.1 Comment les EC définissent-ils la performance d’une université ?

QR2.2 Quelles sont les grilles structurantes communes aux représentations de la performance
organisationnelle des acteurs ?

QR3 En quoi la RS de la performance organisationnelle élaborée par les EC influence-t-elle leur


engagement envers l’organisation et leur engagement envers la profession ?

QR3.1 Les professionnels sont-ils engagés envers l’organisation ?

QR3.2 Les professionnels sont-ils engagés envers la profession ?

QR3.3 Les professionnels sont-ils engagés envers les deux (engagement multiple) ?

QR4 En quoi l’engagement envers l’organisation et l’engagement envers la profession influencent-ils la


mobilisation collective des EC ?

QR4.1a Les professionnels engagés envers l’organisation adoptent-ils davantage de conduites de


mobilisation collective ?

QR4.1b Les professionnels engagés envers la profession adoptent-ils davantage de conduites de


mobilisation collective ?

QR4.1c Les professionnels engagés envers les deux adoptent-ils davantage de conduites de mobilisation
collective ?

QR4.2 Existe-t-il un conflit/une opposition entre l’engagement envers la profession et l’engagement envers
l’organisation ?

120
Le cadre conceptuel issu de notre revue de littérature et les questions de recherche qui
s’y rapportent sont représentés par la figure 8.

Figure 8 : Modèle de la recherche

Le lien entre mobilisation collective et performance


organisationnelle est le postulat de la thèse posé par la
littérature et non interrogé dans nos travaux
QR2 Quelle est la RS de la QR1 Quels types de comportements
performance organisationnelle ? (envers l’organisation et envers la
profession) les EC adoptent-ils dans
le cadre de leur mobilisation
collective ?

Représentations Engagement Mobilisation Performance


Sociales organisationnelle
collective
de la performance organisationnel individuelle
organisationnelle collective
organisationnelle

professionnel

Objet de recherche

QR3 : En quoi la RS de la performance QR4 : En quoi l’engagement envers l’organisation


organisationnelle élaborée par les EC et l’engagement envers la profession influencent-
influence-t-elle leur engagement envers ils la mobilisation collective des EC ?
l’organisation et leur engagement envers la
profession ?

Problématique générale :

Dans quelle mesure les représentations sociales de la performance organisationnelle que les
professionnels élaborent orientent-elles leur mobilisation collective ?

121
Dans une démarche de compréhension de la mobilisation collective des professionnels
envers l’organisation, nous présumons des liens d’influence entre la RS de la performance
organisationnelle et l’engagement (professionnel et organisationnel) d’une part, et
l’engagement (professionnel et organisationnel) et la mobilisation collective d’autre part.

Section 2 : Inscription paradigmatique de la recherche

S’intéresser à l’action collective en organisation et aux liens qui unissent les individus et
l’organisation obligent le chercheur à inscrire sa recherche dans un référentiel paradigmatique
(Emery et Giauque, 2005) dans la mesure où la conception que l’on se fait de l’homme
influence celle que l’on se fait du lien social (Bichon, 2006). Deux paradigmes s’affrontent
traditionnellement : le paradigme des faits sociaux, paradigme auquel se rattache le
fonctionnalisme et le paradigme de l’action sociale, auquel se rattachent l’individualisme et
l’interactionnisme.

Le paradigme des faits sociaux prend sa source dans la pensée holiste durkheimienne,
ce qui amène bon nombre d’auteurs à le qualifier de « paradigme holiste ». C’est un
paradigme positiviste et déterministe qui considère que les structures sociales s’imposent aux
individus et façonnent leurs comportements, leurs croyances. Ainsi, pour comprendre un
phénomène collectif, le chercheur n’étudiera pas le niveau individuel, considérant que les
acteurs ne sont pas conscients des contraintes extérieures qu’ils subissent. Les causes de ce
phénomène seront recherchées au niveau de la société (ou d’une organisation qui s’impose à
eux). La théorie fonctionnaliste est née de ce paradigme et c’est une des théories qui a eu le
plus de considération dans l’histoire de la sociologie (Coenen-Huther, 1982 ; cité par
Champy, 2011), mais également en sciences de gestion. Le paradigme des faits sociaux a
dominé la sociologie américaine des années 1920 jusque dans les années 1960 avant que ne se
développe le paradigme de l’action sociale.

Parce qu’il place l’individu au centre de l’analyse et de la compréhension des


organisations et considère que tout phénomène social résulte de comportements individuels, le
paradigme de l’action sociale est individualiste (méthodologique). Il est donc souvent nommé

122
« paradigme individualiste ». Ainsi, pour comprendre un phénomène social (des
comportements collectifs par exemple), il faut étudier le sens que les acteurs donnent à leur
comportement individuel, source du phénomène. L’interactionnisme issu de ce paradigme,
construit en critique au fonctionnalisme, est le courant qui a eu le plus de poids en sociologie
à partir des années 1970 et qui a nourri, à l’instar du fonctionnalisme des années 1920 à 1960,
la sociologie des professions. L’individualisme privilégie donc les intérêts et la valeur de
l’individu par rapport à ceux du groupe alors que l’holisme considère l’individu comme
subordonné aux obligations du groupe (Bichon, 2006).

Si ces deux paradigmes ont permis l’émergence d’une riche production scientifique, de
nombreux auteurs estiment que les programmes qu’ils proposent progressent aujourd’hui à la
marge. Une nouvelle approche émerge, qui déplace le regard du chercheur sur les relations
sociales, afin de traiter dans un même cadre les dimensions individuelles et collectives de la
vie sociale (Corcuff, 2011). La nature et le fonctionnement des faits sociaux, des
organisations et des acteurs en leur sein peuvent s’expliquer par la relation permanente entre
actions individuelles et structures sociales qui se nourrissent l’une de l’autre. Cette conception
paradigmatique du social est plus nuancée par rapport aux positions aujourd’hui perçues
comme extrêmes des paradigmes individualiste et holiste qui peuvent facilement tendre soit
vers une sur-socialisation en ce qui concerne l’holisme, soit vers une sous-socialisation dans
le cas de l’individualisme (Emery et Giauque, 2005). Ce paradigme considère les faits sociaux
comme des constructions sociales, ce qui pousse Emery et Giauque a nommé ce paradigme
« constructivisme ». Parce que la relation entre les individus et les collectifs est au centre de
ce nouveau mode de raisonnement, Corcuff (2011) nomme cette conception le
« relationnalisme » et Champy (2011) « holisme compréhensif ».
De nombreux raisonnements sociologiques semblent se fonder sur cette conception du
monde social, mais la polarisation entre holisme et individualisme peut expliquer que ces
raisonnements n’ont pas donné lieu à un paradigme explicite, érigé en troisième paradigme
(Corcuff, 2011). Ainsi, Champy (2011) relève dans un article de Mauss et Fauconnet (1901),
pourtant durkheimiens, les prémisses de cette troisième approche paradigmatique : « la
conception du social présentée par Mauss et Fauconnet repose sur un va-et-vient entre le
niveau des institutions et celui des représentations et actions individuelles, sans lesquelles on
ne peut saisir les évolutions de ces institutions » (Champy, 2011 : 17). Champy note
également que les travaux de Berger (2006) se rapprochent de cette conception : « il est tout à
fait exact de dire que la société est un fait objectif, qu’elle nous contraint et même qu’elle

123
nous crée. Mais il est aussi exact de dire que, par les significations engagées dans nos actions,
nous contribuons à le changer » (Berger, 2006 : 168 ; cité par Champy, 2011 : 18). Champy
fait en troisième lieu référence à la théorie de la structuration de Giddens (1984) : « Selon
Giddens les acteurs interviennent dans un monde social fortement structuré et leurs activités
prennent en compte cette structuration, qui est donc une contrainte […]. Mais les acteurs ne
sont pas pour autant déterminés, comme le supposent habituellement ces traditions. Ils sont
capables d’apprendre, d’opérer des choix, de justifier leurs actions selon une démarche
réflexive, ces thèmes de la liberté et de l’apprentissage dans l’action constituant un héritage de
la tradition sociologique de l’action ». Les réflexions sociologiques menées par Piaget sur le
de ce qu’il nomme le « tout social » vont également dans ce sens : « Le tout social n’est ni
une réunion d’éléments antérieurs, ni une entité nouvelle mais un système de rapports dont
chacun engendre, en tant que rapport même, une transformation des termes qu’il relie »
(Piaget, 1965 : 29).
Nous rejoignons Emery et Giauque (2005), lorsqu’ils considèrent que l’individu
comme n’étant totalement autonome de ses choix (à l’instar des tenants de l’approche
individualiste), sans pour autant accepter l’idée du déterminisme social (Durkheim). En fait,
lorsqu’un individu fait des choix plutôt que d’autres, il agit en conformité avec un univers de
structures sociales (règles, coutumes, tradition, rôles…) qu’il interprète et reconstruit dans
l’action et dans ses relations sociales (Corcuff, 2011). L’individu possède à la fois la
dimension d’acteur dans la mesure où il a la capacité d’orienter les faits sociaux, et aussi la
dimension d’agent parce qu’il est toujours limité dans ses possibilités de choix. Notre propre
conception du lien social rejoint donc ce paradigme que nous nommons « relationniste », à
l’instar de Corcuff (2011).

S’il nous semble important de préciser notre inscription paradigmatique, c’est parce
qu’elle a des répercussions à trois niveaux (Emery et Giauque, 2005 : 27) :
- un niveau ontologique « relative à la forme et à la nature de la réalité, et à ce que l’on
peut connaître de cette réalité » ;
- un niveau épistémologique « qui a trait à la nature de la relation entre celui qui tente
de connaître (le chercheur) et ce qui peut être connu (le terrain de la recherche) »
- et un niveau méthodologique « qui fait référence à la manière dont le chercheur peut
tenter d’appréhender ce qu’il pense pouvoir connaître ou découvrir par son travail de
recherche ».

124
Dès lors, notre cadre théorique reste critique par rapport aux courants traditionnels en
Sciences de Gestion (école classique, relations humaines) qui considèrent que l'organisation
structurelle prévaut sur les individus qui la composent et considèrent le salarié comme passif
(Bichon, 2005b). Nous prenons donc de la distance avec l’approche fonctionnaliste qui selon
nous ne correspond pas à la réalité des organisations contemporaines inscrites dans une
société individualiste (Bichon, 2005b). Ainsi, si la mobilisation collective se décrète
difficilement, les décideurs ont cependant la possibilité de créer un environnement favorable à
l'émergence de cette mobilisation.
Nous détaillons dans la partie suivante ces trois implications à travers la présentation
de notre posture épistémologique interprétativiste.

Section 3 : Un positionnement épistémologique interprétativiste

Comme le souligne Dumez (2010), un chercheur qui pratique l'étude de cas se sent contraint
de préciser sa « posture épistémologique », pour justifier qu'elle peut produire de la
connaissance. Nous n'échappons pas à ce sentiment. Nous allons donc dans un premier temps
présenter les trois postures dominantes en Sciences de l’organisation (3.1), puis notre
positionnement (3.2).

3.1. Les trois paradigmes dominants en Sciences de l’organisation

Les sciences de l’organisation ont pour objectif de décrire le plus fidèlement possible
l’organisation et son fonctionnement. Comme toutes sciences, elles disposent de présupposés
épistémologiques qui permettent de contrôler la démarche de recherche, d’accroître la validité
de la connaissance qui en découle et de lui offrir un caractère immuable (Perret et Séville,
2007). Le chercheur doit mener une réflexion épistémologique et l'expliquer pour pouvoir
rendre sa recherche légitime (Wacheux, 1996).

Il va pour cela répondre à une série de trois questions (Perret et Séville, 2007). Il peut
s’inspirer des réponses offertes par les trois grands « paradigmes » épistémologiques en

125
sciences de l’organisation qui ont été identifiés par Perret et Séville (2007). Nous reprenons
ces trois questions et y positionnons les différents paradigmes.

- Quelle est la nature de la connaissance produite ?


Le chercheur doit s’interroger sur sa vision du monde social, sur la nature du lien
sujet/objet et sur la nature de la réalité qu’il pense pouvoir appréhender.

Les postulats positivistes avancent que l'observateur et l'observé sont indépendants. En


cela, le chercheur, qui se contente d'observer l’objet (le réel), ne modifie par la nature de
l'objet. On dit que le positivisme adhère à une hypothèse réaliste. Le positivisme suppose
alors que la connaissance est objective et soutient une vision déterministe du monde social.
L’homme est conditionné par l’environnement.

Pour l’interprétativisme, il s’agira de comprendre la réalité à travers l’interprétation


des acteurs. En cela, observateur et observé sont dépendants. Le terme « réalité » doit
d’ailleurs être utilisé avec prudence car son statut est précaire. Le chercheur ne pouvant y
accéder directement, l’interprétativisme laisse la question de l’existence de la réalité en
suspens. On dit alors que l’interprétativisme soutient une hypothèse relativiste.
L’interprétativisme suggère alors que l’environnement est créé par les acteurs eux-mêmes, à
travers leurs actions et leurs pensées.

Pour le constructivisme, la réalité est construite en interaction entre le chercheur et les


acteurs. L’interprétativisme et le constructivisme se rejoignent sur l’interdépendance entre
l’observateur et l’observé et sur la vision du monde social. Les constructivistes les plus
modérés rejoignent également les interprétativistes sur la question du réel : cette question
reste en suspens. L’approche la plus radicale du constructivisme avance que la réalité est une
invention.

- Comment la connaissance scientifique est-elle engendrée ?


Il s’agit de s’interroger sur le chemin de la connaissance empruntée. Les moyens
d’accéder à la connaissance vont différer :

Pour le positivisme, le chercheur accède à la connaissance par un processus


d’explication, en mettant au jour les lois qui « régissent » la connaissance.

126
L’interprétativisme accède donc à la connaissance à travers la compréhension que les
acteurs donnent à leurs pratiques. Le chercheur va orienter son attention vers les intentions,
les motivations, les raisons, les croyances des acteurs.
Pour le constructivisme, la connaissance est co-construite par les acteurs et le
chercheur. Il n’y a donc pas de chemin de la connaissance pré-établie mais un projet de
recherche qui se construit chemin faisant.

- Quels sont la valeur et le statut de cette connaissance ?


La valeur de connaissance produite est jaugée à l’aune d’une série de critères de
validité qui ne sont pas identiques en fonction de la posture épistémologique.
Le positivisme évalue la validité des connaissances produites par des critères qui vont
distinguer les connaissances scientifiques de celles qui sont non scientifiques. Ces critères
sont immuables et universels, ils peuvent donc s’appliquer à toutes les sciences, quel que soit
le champ disciplinaire. Ces critères sont la vérifiabilité, la confirmabilité et la réfutabilité.
Le principe de vérifiabilité envisage qu’une proposition sera considérée comme vraie
seulement après sa mise en pratique, c’est-à-dire qu’elle ait été vérifiée empiriquement.
Le principe de confirmabilité considère que la vérité n’est pas certaine mais probable
car il est impossible de s’assurer qu’une proposition est vraie dans toutes les circonstances où
elle s’applique.
Enfin, le principe de réfutabilité stipule qu’on ne peut pas affirmer qu’une théorie est
vraie, par contre, on peut affirmer qu’elle n’est pas vraie. On dit alors que la théorie est réfutée.
Tant qu’elle n’est pas réfutée elle est considérée « corroborée. Ainsi, le positivisme considère
qu’une théorie est scientifique si elle est réfutable, c’est-à-dire si elle admet que certains
résultats peuvent l’infirmer.
Au vu de ces trois critères à respecter, le seul mode de raisonnement scientifique que le
positivisme admet c’est un raisonnement qui répond à la logique formelle, c’est-à-dire le
raisonnement déductif (Perret et Séville, 2007). C’est pour cette raison que la démarche
méthodologique la plus fréquemment utilisée est la démarche hypothético-déductive qui
consister à proposer une ou plusieurs hypothèses et à les confronter ensuite à la réalité, dans le
but de juger la pertinence de l’hypothèse initialement formulée (Charreire Petit et Durieux,
2007).

127
L’interprétativisme admet comme critère de validité le caractère idiographique des
recherches et l’empathie du chercheur.
Une recherche idiographique étudie les phénomènes dans leur situation. Elle doit donc
fournir une description détaillée du phénomène étudié, en insérant des aspects historiques et
contextuels (Perret et Séville, 2007).
Le principe d’empathie a trait à la capacité du chercheur de se mettre à la place d’autrui
et de se rendre compte des sentiments d’autrui. L’objectif du chercheur interprétativiste est
d’accéder aux réalités telles qu’elles sont vécues par les acteurs, et de les « donner à voir »
(Perret et Séville, 2007 : 24).
Parce que les méthodes qualitatives permettent une compréhension fine des phénomènes
dans leur contexte spatial et temporel, elles sont particulièrement adaptées à la posture
interprétativiste. Néanmoins, les méthodes quantitatives ne sont pas exclues.

Le constructivisme, tout comme l’interprétativisme, rejette l’universalité des critères de


validité avancés par les positivistes, ainsi que la primauté de la logique déductive (Perret et
Séville, 2007). Les critères de validité de la connaissance pour le constructivisme sont toutefois
encore discutés. Perret et Séville (2007) en proposent deux : le critère d’adéquation (ou de
convenance) développé par Glaserfeld (1988) et le critère d’enseignabilité avancé par Le
Moigne (1995).
Le principe d’adéquation consiste à admettre qu’une connaissance est valide à partir du
moment où elle convient à une situation donnée (Glaserfeld, 1988).
Les critères de connaissance enseignable consistent à s’assurer que les connaissances
soient reproductibles, intelligibles et constructibles (Le Moigne, 1995).
Les critères définis par le constructivisme n’imposent pas l’utilisation d’une méthode
particulière. Dès lors, plusieurs modes de raisonnement sont admis : le raisonnement déductif,
l’analogie, la métaphore, etc. (Perret et Séville, 2007).

3.2. Le choix de notre posture interprétativiste

Nous expliquons dans un premier temps notre rapport au réel qui justifie que nous adoptons
une posture interprétativiste (3.2.1). Ensuite, nous démontrerons la manière dont nous
produisons des connaissances (3.2.2), et les critères qui valident cette connaissance (3.2.3).

128
3.2.1. Statut de la connaissance

Nous estimons que la connaissance se créée à travers la compréhension du sens que les
acteurs donnent à la réalité. Ce qui nous préoccupe, c’est de comprendre la réalité à travers les
interprétations qu’en font les acteurs. En ce sens, notre positionnement épistémologique est
interprétativiste (Perret et Séville, 2007). Nous interprétons les comportements des acteurs en
identifiant les significations locales et contextuelles que les acteurs donnent à leurs
comportements. Nous considérons qu’est « réel » ce que les acteurs perçoivent comme tel.
Nous pensons qu'il n'y a pas d'unité de la science en matière d'épistémologie et de
méthodologie (Dumez, 2010). La raison principale étant que l’objectivité est bien plus
difficile à atteindre dans les sciences sociales que dans les sciences naturelles. Cette
objectivité est difficile à atteindre car il est impossible d'éliminer tout jugement (Dumez,
2010).

3.2.2. Élaboration de la connaissance

Notre étude de la situation repose sur une analyse fine des connaissances et des informations
que possèdent les acteurs dans une situation donnée. Par conséquent, la généralisation que
nous souhaitons atteindre n’est pas statistique mais descriptive (Lincoln et Guba, 2000). La
généralisation descriptive est un concept proposé par Lincoln et Guba (2000) en opposition au
sens classique de la généralisation, entendue comme une prédication et un contrôle des
événements/comportements. Cette généralisation statistique est souvent présentée comme
étant le but de la science (Lincoln et Guba, 2000). Notre objectif n’est pas de prédire les
comportements de mobilisation collective mais de les comprendre, dans le contexte dans
lequel ils s’inscrivent. Dès lors, la généralisation descriptive vise à donner au lecteur la
possibilité de suivre la manière dont les interprétations du chercheur ont été élaborées à partir
du matériau empirique mobilisé (Avenier et Thomas, 2012). L’objectif de la généralisation
descriptive est alors de fournir autant d'informations nécessaires pour que la connaissance
produite puisse être transférée vers un autre contexte.
D’un point de vue méthodologique, notre intérêt porte sur l’étude de la relation entre
les discours et les actions des acteurs. C’est pourquoi nous retenons une démarche qualitative.
Nous prenons soin d’expliquer clairement les éléments qui conduisent à nos interprétations.
Nous rejoignons Dumez (2010) lorsqu’il suggère que le cœur du travail scientifique est de

129
relier le cadre conceptuel au matériau empirique, d'où l'expression « empirisme logique ». En
effet, pour Dumez (2010 : 6), le principe d’empirisme logique avancé par le positivisme
devrait être compris dans les démarches qualitatives « comme une relation forte entre
(données) et cadre analytique (logique) ». Dumez (2010) déplore que trop souvent, la revue de
littérature des recherches qualitatives n’aboutit pas à un cadre analytique rigoureux,
permettant de conduire une véritable discussion des concepts et des auteurs, ces concepts de
permettant pas d’éclairer le matériau parce qu’ils ont été mal définis « spécifiés ». Ce que
nous retenons du principe d’empirisme logique, c’est que notre cadre analytique doit être
rigoureux et cohérent, c’est-à-dire qu’il ne doit pas juxtaposer les écoles de pensées, les
théories ou concepts d’origines diverses incohérents entre eux (Dumez, 2010).
Par ailleurs, nous élaborons la connaissance en essayant de mettre au jour certaines
régularités (patterns) temporairement stables que présentent les activités humaines (Yanow,
2006). Cela signifie que nous tentons de révéler des « causalités » des comportements de
mobilisation collective, mais qui n’ont aucune vocation prédictive. Les relations causales que
nous présentons restent le fruit de notre interprétation et de celle des acteurs, et sont
« locales ». Dès lors, nous prenons soin d’expliciter clairement ces interprétations afin que les
causalités révélées par notre étude conduisent à des hypothèses plausibles pouvant être
étudiées dans d’autres contextes.

3.2.3. Critères de validité

Les critères de validité que nous retenons sont d’une part les principes d’idiographie et
d’empathie développés par Perret et Séville (2007).
Le principe d’idiographie est opérationnalisé par une description détaillée de contexte
général de réforme des universités dans lequel s’inscrit notre problématique. La présentation de
ce contexte général fait l’objet d’une partie. D’autre part, nous débutons l’analyse de chacun
des deux cas par une description détaillée du contexte du cas. Cette description sera d’autant
plus précise que les cas étudiés sont anonymes, sur la demande des acteurs interrogés. Ainsi,
nous fournissons un historique de la création de l’université, les principaux événements ayant
marqué son évolution et le contexte régional dans lequel s’inscrit l’université (des éléments
importants concernant la ville d’implantation, la région, etc.). Par ailleurs, de nombreux
verbatim et encadrés jalonneront la présentation des résultats afin de rendre compte des
expériences des acteurs et de permettre au lecteur de retracer les interprétations que nous
proposons et d’en évaluer la cohérence. Enfin, nous discuterons des résultats à l’aune du cadre

130
théorique que nous avons proposé et de résultats d’études antérieures. Nous proposerons
plusieurs interprétations possibles de nos résultats.
Le principe d’empathie est opérationnalisé par notre capacité à nous approprier le
langage et les terminologies propres aux acteurs afin d’atteindre les réalités telles qu’ils les
vivent (Perret et Séville, 2007).

D’autre part, nous retenons les critères de validité communicationnelle, de validité


pragmatique et de validité transgressive proposés par Sandberg (2005) et synthétisés par Djabi
(2014) dans le tableau suivant.

Tableau 10 : Les critères de validité de l'approche interprétative, Djabi (2014)

Critères de validité de la connaissance


Implication méthodologique
selon Sandberg (2005)
Recueil de données
- multiplier les points de vue
- dialoguer avec les participants sous la forme d’une conversation
Validité communicationnelle - demander aux participants de préciser le sens de leurs propos
S’assurer que la connaissance produite est Analyse de données
partagée par une « communauté - assurer une cohérence interprétative des données analysées entre
interprétative » afin de vérifier la elles en vérifiant que l’ensemble du matériau empirique
cohérence de nos interprétations correspond bien à l’interprétation que nous en faisons
- confirmer, challenger, corriger nos interprétations en dialoguant
avec la communauté scientifique et avec les interlocuteurs du
terrain de recherche
Recueil de données
- demander aux participants d’illustrer leurs discours par des
Validité pragmatique
exemples, des situations concrètes
Réduire l’écart entre ce que les individus
- éventuellement, réaliser des observations - la manière la plus
disent faire et ce qu’ils font réellement
poussée de vérifier la validité pragmatique des interprétations
produites est de les vérifier en vivant l’expérience étudiée
Analyse de données
Validité transgressive - analyser les contradictions, tensions dans le matériau empirique
Prendre conscience de nos cadres - prendre conscience de nos biais interprétatifs en tant que
implicites qui guident l’analyse du chercheur
matériau - analyser l’ensemble des données du matériau comme
importantes

3.2.4. Une recherche exploratoire hybride et abductive

La circularité des résultats est un des principaux risques de la recherche qualitative que
Dumez (2013 : 32) définit comme « le risque de se focaliser sur les seuls faits venant
confirmer la théorie ». C’est ce qui se passe lorsque le chercheur aborde le matériau avec des
cadres théoriques prédéfinis. La tentation de ne voir dans le matériau que ce qui confirme ces

131
cadres théoriques est alors très grande. Pour éviter le risque de circularité, Dumez (2013)
suggère tout d’abord que le cadre théorique ne doit pas être trop contraignant, surtout au début
de la recherche.
Nous avons suivi une démarche d’exploration hybride, qui permet « d’enrichir ou
d’approfondir des connaissances antérieures » (Charreire-Petit et Durrieu, 2007, p.73). Cette
démarche conduit à faire des allers-retours entre théorie et observations pour donner du sens à
nos observations empiriques (Charreire-Petit et Durrieu, 2007). Notre démarche sera ainsi
principalement abductive. Nous synthétisons ici nos allers-retours entre matériau et littérature.
Nous avons débuté la recherche avec un cadre théorique large : la mobilisation
collective et les RS. Nous avions une « hypothèse » de départ : que les RS orientent la
mobilisation collective des EC. Nous rejoignons Wolcott (1982 : 157, cité par Miles et
Huberman, 2003 : 93) : il est « impossible de s’immerger dans un terrain sans avoir l’idée de
ce que l’on recherche tout comme il est stupide de ne pas rendre cette quête explicite ». Nous
avons ainsi mobilisé des concepts et intégré la littérature concernant notre objet de recherche
(Charreire-Petit et Durrieu, 2007). Puis nous avons enrichi notre cadre conceptuel au gré des
allers-retours successifs entre le matériau et la littérature d’une part, et au fil des découvertes
faites dans la littérature d’autre part (Dumez, 2010). Initialement, la problématique consistait
à s'intéresser à la signification de la performance pour les EC et à comprendre la mobilisation
collective. Au fur et à mesure, la problématique s'est précisée et le concept d'engagement a été
affirmé. Dès lors, la structure classique finale de la thèse reflète de manière artificielle la
façon dont la recherche a été conduite. Nous avons effet introduit le concept d’engagement
dans le cadre théorique et les questions de recherche au début de la phase empirique. C’est
notre retour sur la littérature qui nous a alors permis de placer le concept d’engagement dans
le modèle de recherche.

132
CHAPITRE 5 : UNE MÉTHODOLOGIE QUALITATIVE
FONDÉE SUR L’ÉTUDE DE CAS MULTIPLES

Dans ce chapitre, nous expliquerons le choix de l’étude de cas multiples (section 1) ainsi que
le choix de la méthode d’analyse du matériau recueilli (section 2).

Section 1 : Une étude de cas multiples

Notre étude se veut exploratoire dans la mesure où peu de travaux ont exploré la
relation conceptuelle entre RS de la performance organisationnelle, engagement et
mobilisation collective, dans une organisation pluraliste. Notre étude vise à comprendre les
manifestations conceptuelles observées, sans a priori.
Nous exposerons dans cette partie les raisons qui nous ont amenés à retenir l’étude de cas
multiples (1.1). Nous présenterons en détail les deux cas retenus et le contexte et les
justifications du choix des cas (1.2) Enfin, nous exposerons les raisons du choix de l’entretien
semi-directif comme méthode de recueil des données primaires, ainsi que les données
secondaires collectées (1.3).

1.1. La méthode des cas

1.1.1. Description de la méthode des cas

La méthode retenue est l’étude de cas. Le chercheur peut parfois avoir du mal à définir le
« cas ». De façon abstraite, Miles et Huberman (2010 : 55) définissent le cas comme « un
phénomène donné qui se produit dans un contexte délimité. Le cas est, en fait votre unité
d’analyse ».
L’étude de cas est une stratégie de recherche à part entière, parmi d’autres stratégies
telles que l’ethnographie ou la Grounded Theory (Hlady-Rispal, 2002). La particularité de

133
l'étude de cas est qu'elle est ouverte sur l'utilisation de catégories conceptuelles qui guideront
la recherche et l'analyse des données.
Un des principaux fondateurs de cette méthode, Yin (2003), définit l’étude de cas
comme une enquête empirique qui explore en profondeur un phénomène contemporain dans
son contexte réel, lorsque les frontières entre phénomène et contexte ne sont pas clairement
apparentes, et que de multiples sources de données sont employées.
La force de l’étude de cas réside en effet dans la possibilité dont dispose le chercheur
de comprendre l’interaction entre un phénomène et son contexte (Dubois et Gadde, 2000).

Une stratégie de recherche par étude de cas peut être retenue pour atteindre plusieurs
objectifs. Tout d’abord, dans une visée descriptive, pour tester une théorie, générer une
théorie (Eisenhardt, 1989), et également dans une visée compréhensive à partir d’une situation
spécifique (Hlady-Rispal, 2002). C’est le cas de figure du chercheur qui souhaite élaborer un
modèle de recherche réplicable dans d’autres situations à partir de la détection de régularités à
travers l’étude de phénomènes au sein de situations différentes. Cette démarche de recherche
est notamment appropriée lorsque le chercheur s’attache à explorer et comprendre des
situations où le phénomène nouveau est peu étudié et peu connu, où l’ancrage conceptuel est
limité, et lorsque la prise en compte du contexte est déterminante pour l’élaboration du
processus de compréhension (Ayerbe et Missonier, 2006 ; Hlady-Rispal, 2002). D’autre part,
l’étude de cas est utilisée pour tester ou réfuter une théorie (Koenig, 2005). Cela peut
notamment être le cas lorsque qu’un chercheur va tenter de valider une théorie existante et
largement développée sur un cas extrême, par exemple.

C’est la visée compréhensive et contextualisée de l’étude de cas qui a motivé notre


choix de retenir cette méthode. L’étude de cas est en effet particulièrement appropriée pour
saisir le sens subjectif et intersubjectif d’une activité humaine, à partir des perceptions des
différents acteurs concernés (Hlady-Rispal, 2002). Puisque notre approche interprétative
envisage que le comportement des acteurs ne peut se comprendre qu’à travers les
significations qu’ils lui donnent, l’étude de cas est particulièrement appropriée. Cette méthode
est pour ces raisons très utilisée par les chercheurs interprétatifs (Wacheux, 1996 : Giroux,
2003). Ainsi, l’étude de cas nous offre l’accès à une diversité de données différentes pour une
analyse en profondeur de l’objet de recherche. Cette méthode est la plus appropriée dans le
cadre d’une approche compréhensive de la mobilisation collective des EC, dans un contexte
mouvant de réformes. Cette situation a été peu étudiée par la littérature et qui plus est, les

134
résultats qui s’approchent de notre problématique sont contradictoires. L’étude de cas nous
permettra de parcourir de manière approfondie la mobilisation collective, son lien avec les RS
et les attitudes des acteurs, à travers leurs interprétations et dans un contexte spatial et
temporel délimité.

1.1.2. Le choix d’une étude de cas multiples

Une étude peut comprendre un ou plusieurs cas (Miles et Huberman, 2010). La


compréhension de la mobilisation collective des EC en lien avec leur RS de la performance
organisationnelle, au sein des universités françaises, est appuyée ici sur l’étude de deux cas
concrets. Nous exposons ici les raisons qui nous ont conduits à opter pour l’étude de cas
multiples.
L’étude de cas unique est pertinente dans le cas des études critiques, extrêmes, ou
révélatrices afin d’appréhender un phénomène rare ou difficile d’accès, ou encore pour tester
une théorie existante (Yin, 2003). L’étude de cas multiples, quant à elle, nous permettra
d’étudier une même problématique au sein de contextes différents (Yin, 2003). L’étude de cas
multiples offre une meilleure compréhension des processus et des résultats de chaque cas, et
fournit une bonne représentation de la causalité « locale » (Miles et Huberman, 2003).
L’étude de cas multiple permet ainsi d’extraire des régularités et des dissemblances, qui
seront discutées à la lumière des différents contextes. Cette caractéristique confère à l’étude
de cas multiples une meilleure validité externe que l’étude de cas unique. À travers l’étude de
cas multiples, nous souhaitons identifier les éléments de représentation de la performance de
l’université partagés par les deux cas retenus, ainsi que les éléments qui diffèrent. Nous
souhaitons détecter des régularités concernant les raisons qui poussent les EC à se mobiliser
pour l’université, et les types de comportements qu’ils adoptent alors.

Comme le soulignent Mils et Huberman (2003), les cas peuvent contenir des mini-cas
en leur sein (Yin, 1984). Ils donnent l’exemple de l’étude d’une école qui peut comprendre
plusieurs classes spécifiques, ou l’étude d’un service hospitalier qui peut intégrer différentes
relations spécifiques patients-médecin. Les cas que nous avons retenus rejoignent ce cas de
figure. S’il nous a paru évident d’étudier des établissements universitaires, il nous a fallu
ensuite retenir des composantes en particulier. Nous précisons nos choix dans la partie
suivante.

135
1.2. La définition des cas retenus

Cette partie vise à détailler le contexte institutionnel mouvant dans lequel nos cas s’inscrivent
(1.2.1), les critères de choix des cas et les caractéristiques des cas retenus (1.2.2), ainsi que la
technique d’échantillonnage et les caractéristiques détaillées de l’échantillon (1.2.3).

1.2.1. Présentation du contexte institutionnel

Le mouvement de réforme que connaissent les universités françaises s’inscrit dans un


contexte mondial d’économie fondée sur le savoir (OCDE, 1996).
Nombreux sont ceux qui voient dans la mondialisation l’avènement de la société du
savoir (Rinne et Koivula, 2005), voire l’avènement de l’économie du savoir (économie fondée
sur le savoir), qui place le savoir au cœur de la croissance économique (Rinne et Koivula,
2005). Dans ce cadre, les universités sont amenées à coopérer de manière plus intense avec le
monde marchand ainsi qu’avec l’État. Les universités ne se limitent pas à transmettre la
connaissance mais participent pleinement à la créer (Biot-Paquerot, 2006). L’émergence de
concepts gestionnaires (contrat, réglementation, transparence, emploi) dans le quotidien de la
science illustre cette évolution (Rinne et Koivula, 2005). Ce sont ces éléments qui
expliqueraient l’avènement du paradigme de l’université entrepreneuriale, largement
développé par Clark (1998). Si les universités restent les premières productrices du savoir,
l’intérêt pour le savoir fait croître la part produite en dehors de l’université (Rinne et Koivula,
2005).

Liée au savoir, l’éducation voit également son importance croître et est assortie de
multiples enjeux. L’offre de formation délivrée par les universités est considérée comme un
des « enjeux stratégiques du XXIème siècle » (Biot-Paquerot, 2006 : 2), non seulement pour
les Etats, à travers les techniques développées constituant un enjeu stratégique, économique et
militaire et « le contrôle de la transmission des savoirs entre les membres d’une
communauté » (id.), mais également pour l’économie toute entière (les individus prennent
conscience de l’importance d’obtenir des diplômes certifiant leurs compétences, les industries
sont préoccupées par le développement du niveau de connaissance afin d’améliorer
l’efficacité au travail, etc., Biot-Paquerot, 2006). L’arrivée de l’éducation marchande, qui plus
est sans frontière, est un élément que les universités doivent également prendre en compte.

136
Les universités doivent rivaliser avec les grandes écoles sans avoir « les mêmes moyens
matériels, ni la possibilité de choisir leurs étudiants » (Descombes, 2009 : 345).
Enfin, les universités françaises se trouvent au cœur d’une stratégie européenne
d’enseignement supérieur (Biot-Paquerot, 2006), largement initiée par la Déclaration de
Lisbonne en 2000 qui fixe à l’Union Européenne « un nouvel objectif stratégique pour la
décennie à venir : devenir l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus
dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une
amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale »31.
Le rôle reconnu aux universités dans « l’Europe de la connaissance » est grand : « création
de la société du savoir-faire, compétitivité économique et cohésion sociale » (Rinne et
Koivula, 2005 : 104).
Mondialisation, société du savoir, concurrence, Espace Européen de la Recherche
(EER) sont autant d’éléments qui font pression sur le modèle universitaire depuis quelques
années.

Les principales réformes mises en œuvre au sein des universités françaises concernent
la LOLF, la LRU, et la loi ESR

L’application de la LOLF32 dans les universités doit permettre une meilleure maîtrise
des dépenses publiques et introduit une logique de performance. Dans cette perspective de
nouvelle gestion publique orientée vers l’atteinte des résultats et prolongeant ainsi la LOLF, la
LRU requiert une restructuration des établissements universitaires et une transformation du
mode de pilotage les conduisant à l’autonomie budgétaire. A ce titre, les universités se voient
dotées d’un budget global, augmentant ainsi leurs responsabilités, notamment dans le
domaine de la gestion des ressources humaines, dans la mesure où elles auront la charge de la
modulation des obligations de service des enseignants-chercheurs, de l’attribution des primes
aux personnels, du recrutement des contractuels, de la création de dispositifs d’intéressement,
etc.33 Le budget global nécessite « des compétences nouvelles en comptabilité, en contrôle de
gestion, en gestion des ressources humaines, ainsi que de nouveaux systèmes
d’information »34. Afin de permettre aux universités de parvenir au mieux au nouveau

31
Conseil Européen, « Conclusions de la présidence », sommet de Lisbonne, 23-24 mars 2000.
32
Loi organique relative aux lois de finances
33
Ces éléments sont issus du portail du Gouvernement www.nouvelleuniversite.gouv.fr consulté le 14/01/2015
34
« Les clés de la réforme des universités » (2007), Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche,
p.19

137
pilotage par la performance, la LRU entend donc augmenter leur marge de manœuvre en leur
accordant plus de responsabilités. Cette autonomie budgétaire vise à « libérer les énergies »35
des universités et leur permettre de mener à bien leurs missions. Rappelons les missions de
l’université telles qu’elles sont énoncées dans la LRU : elles concernent « la formation
professionnelle et continue, la recherche scientifique et technologique, la diffusion et la
valorisation des résultats, l’orientation et l’insertion professionnelle, la diffusion de la culture
et l’information scientifique et technique, la participation à la construction de l’Espace
européen de l’enseignement supérieur et de la recherche, la coopération internationale »36.
Ainsi, consolidant la logique gestionnaire de la LOLF orientée vers l’atteinte d’objectifs, la
LRU vise trois objectifs : rendre l’université plus attractive, améliorer la gouvernance, faire
que la recherche universitaire soit visible à l’échelle internationale. Concernant l’attractivité
de l’université, l’objectif de la loi est de conduire 50 % des jeunes vers un diplôme de
l’enseignement supérieur.
La gouvernance, quant à elle, est rénovée, redéfinissant ainsi les rôles, les missions, les
compétences ou la composition de certains organes. Cette gouvernance rénovée, octroyant
plus de marge de manœuvre au président de l’université, doit permettre de faciliter la prise de
décision, de simplifier les procédures, de clarifier les missions afin de rendre l’université plus
réactive. La nouvelle gouvernance consolide également l’implantation de l’université dans
son environnement territorial et socio-économique dans la mesure où elle permet aux
collectivités territoriales de participer à la définition des politiques de formation, de
recrutement et d’insertion professionnelle et associe les partenaires économiques au
développement de l’université en leur accordant une place au conseil d’administration de
l’université (deux acteurs dont au moins un cadre dirigeant ou chef d’entreprise).

Enfin, le dernier objectif de visibilité internationale vise à placer les universités


françaises en tête de liste des classements internationaux. En élargissant les compétences des
universités, la LRU souhaite notamment leur donner les moyens de faire face à la concurrence
internationale.

D’autres dispositifs sont venus affermir le mouvement de réforme des universités


françaises, renforçant la volonté de replacer l’université au centre du système d’enseignement

35
« Les clés de la réforme des universités » (2007), Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche,
p.19.
36
Article 1 de la Loi Relative aux libertés et responsabilités des Universités.

138
supérieur et de recherche. Ces dispositifs concernent notamment le Grand Emprunt (emprunt
qui prévoit d’investir 35 milliards d’euros dans l’enseignement supérieur et la recherche). Le
Grand Emprunt est attribué à des projets de création de « campus d’excellence »,
d’« équipements d’excellence », ou de « laboratoires d’excellence », et « permettra d'investir
dans les projets et les équipes les plus remarquables »37. En ce qui concerne le terme de
campus d’excellence, la Ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche affirme qu’
« il n’y a pas de modèle unique et absolu en la matière » mais avance qu’un « campus
d’excellence devra sans doute rassembler un large éventail de formations, allant jusqu’au
doctorat et arrimé à une recherche de très haut niveau »38.
Les appels à projets dans le cadre des laboratoires d’excellence ont pour finalité
d’encourager « l’émergence de projets scientifiques ambitieux et visibles à l’échelle
internationale »39
Les équipements d’excellence concernent tous les domaines de la recherche. Des
bibliothèques numériques ou des bases de données numériques sont des exemples
d’équipements d’excellence dans le domaine des Sciences humaines et sociales40.
Le Gouvernement entendait lancer avec le Grand Emprunt une « dynamique des
laboratoires d’excellence » et affirme sa volonté d'investir « massivement dans la durée dans
des projets scientifiques et technologiques innovants, qui seront à terme source de croissance
et de progrès pour l'ensemble de notre économie » 41.
S’ajoutant à la concurrence internationale, une logique de compétitivité est ainsi
introduite entre les universités au niveau national dans la mesure où ce sont « les projets et les
équipes les plus remarquables » qui obtiendront les fonds. Ce système d’appels à projets
ouvre donc à une concurrence nationale pour l’obtention de ressources.

La réforme budgétaire des universités prend donc appui sur la LRU mais repose
conjointement sur un deuxième volet, qui introduit pour la première fois la mesure de la
performance dans la gestion des universités. Il s’agit du nouveau modèle d’allocation des
moyens (2009, appliqué fin 2014) : le modèle « SYMPA » (Système de répartition des
Moyens à la Performance et à l’Activité), qui remplace l’ancien système d’allocation San
Remo (Système Analytique de Répartition des Moyens) instauré en 1994. San Remo était

37
Portail du Gouvernement www.nouvelleuniversite.gouv.fr consulté le 14/01/2011
38
Portail du Gouvernement www.nouvelleuniversite.gouv.fr consulté le 14/01/2011
39
Portail du Gouvernement www.enseignementsup-recherche.gouv.fr consulté le 14/01/2011
40
Portail du Gouvernement www.nouvelleuniversite.gouv.fr consulté le 14/01/2011
41
Discours de Valérie Pécresse, 2 avril 2010, Colloque annuel de la Conférence des présidents d’Universités

139
basé sur une estimation des besoins en heures d’enseignement, en emplois administratifs et
techniques (IATOS) et en crédits de fonctionnement. Le modèle SYMPA introduit la
performance dans la gestion car il prévoit d’allouer aux universités les moyens fixés par la loi
de finances, en fonction de leur activité et de leur performance. A l’instar de la LRU, ce
deuxième volet a pour objectif d’encourager les universités à remplir au mieux leurs missions,
ansi qu’à atteindre leurs critères de performance.42
Les indicateurs de performance pris en compte dans le calcul de l’allocation des moyens sont
définis par une autorité administrative indépendante mise en place en 2007 (l’Agence
d’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur (AERES), qui a été remplacée
en 2013 par le Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur
(HCERES)43).
Les universités françaises connaissent donc une évolution dans leur mode de gestion
puisqu’elles vont, pour la première fois, gérer seule leur budget et rendre des comptes sur leur
performance.

En 2013, une nouvelle loi est votée : la loi relative à l’enseignement supérieur et la
recherche. Elle ne remet pas en question les grands principes de la LRU, comme l’autonomie
par exemple. Elle apporte des changements dans la gouvernance de l’université : elle modifie
la composition du conseil d’administration en augmentant notamment le nombre de
représentants des étudiants et personnes en formation continue et le nombre de personnels
administratifs. Elle transforme également le conseil scientifique en commission recherche, le
conseil des études et de la vie étudiante en commission formation et leur accorde, en plus de
leur rôle consultatif, des compétences propres.
Un changement majeur concerne la coordination territoriale : il est demandé à chaque
établissement public d’enseignement supérieur de rejoindre un ou plusieurs établissement(s)
sur un territoire donné sous forme de fusion d’établissements, de communauté d'universités et
d’établissements ou d’une association à un établissement public à caractère scientifique,
culturel et professionnel. Un seul contrat pluriannuel d’établissement est alors signé entre le
Ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la recherche et les établissements ainsi
rassemblés. Sont ainsi créées les Communautés d’universités et d’établissements (COMUE),
des nouveaux types d’établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel.

42
Informations issues du rapport d’information du Sénat, 7 juillet 2009
43
Dans le cadre de la nouvelle loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche (2013)

140
Les pôles de recherche et d'enseignement supérieur, les réseaux thématiques de recherche
avancée et les établissements publics de coopération scientifique, créés par la loi de
programme pour la recherche de 2006, disparaissent.

Selon Solle (2008 : 147), les universités ont jusqu’alors fonctionné sans se préoccuper
de leur performance dans la mesure où la question de la performance « paraissait, par essence
même, réglée à l’avance et régie par le respect des procédures ». Ne souhaitant pas rester figé
dans une opposition entre bureaucraties professionnelles et nouvelles administrations, Solle
(2008) souligne simplement que ce type de structure bureaucratique était la mieux adaptée au
contexte d’après-guerre. Le contexte a évolué, c’est pourquoi ces organisations ne peuvent
plus fonctionner en l’état. La question de la performance, au centre du NPM, se pose donc au
sein des universités.

Solle (2008 : 138) constate « une appropriation progressive d’un langage


managérial ». En effet, il remarque des comportements au sein de l’université, comparables à
ceux que l’on trouve sur un marché concurrentiel, par nature régi par le management et la
question de la performance. L’auteur cite la création de nouveaux « services universitaires »
(Solle, 2008 : 150), tels que la création de nouveaux diplômes et cursus pédagogiques plus
souples permettant de choisir des modules « à la carte », une adaptation des formations aux
nouveaux segments d’utilisateurs (formation initiale et continue par exemple), ou encore la
recherche de nouveaux modes de financement, pouvant entraîner l’autofinancement
comme :la collecte de la taxe professionnelle, les ressources propres de la formation continue,
voire la création de fondation, etc.). Enfin, l’autonomie engendrée par l’autofinancement
permet de développer de nombreux atouts (développement des diplômes et des filières, qui
attirent ainsi de prestigieux intervenants par exemple), qui concourent à bâtir une solide image
de marque. Ainsi, l’auteur voit dans ces éléments « une stratégie mercatique similaire à celle
d’une entreprise œuvrant dans un milieu concurrentiel » (Solle, 2008 : 150).

1.2.2. La sélection des cas

Les deux critères de choix des cas sont la réplication littérale d’une part et la
réplication théorique d’autre part. La réplication littérale est retenue lorsqu’on suppose
trouver des résultats similaires alors que la réplication théorique devrait, selon la théorie,

141
conduire à des résultats différents (Royer et Zalowski, 2007). Les objectifs de notre recherche
nous amène à retenir la réplication théorique. Les deux cas sélectionnés l’ont donc été dans le
but de trouver des résultats différents. Selon Yin (2003), deux ou trois cas sont suffisants.
Nous donnons dans cette partie tous critères qui nous ont conduits à sélectionner l’Université
A et l’Université B.

Becquet et Musselin (2004) soulignent que les enseignants-chercheurs (EC) se


distinguent en fonction des contraintes institutionnelles (types d'établissement et les choix
individuels en termes de carrière) et de l’appartenance disciplinaire et de leur statut
professionnel (professeur, maître de conférences). Dès lors, nous faisons varier les
contraintes institutionnelles en retenant deux composantes différentes dans deux
établissements différents, ainsi que l’appartenance disciplinaire, que nous avons tout de même
réduit aux sciences humaines et sociales et aux disciplines littéraires afin de ne pas comparer
des situations trop disparates. Enfin, nous faisons varier le statut professionnel en interrogeant
des professeurs et des maîtres de conférences avec des fonctions et des responsabilités
administratives variées, ainsi et des doctorants.

1.2.2.1. Types d’établissement retenus

Les réformes poussent les universités à se réunir pour les rendre visibles à
l’international (loi LRU puis ESR). Il était attendu par le gouvernement et des experts de ce
champ que les universités accédant aux Responsabilités et Compétences Elargies (RCE)
permises par la LRU lors de la première vague (janvier 2009) seraient les plus importantes,
car largement en compétition avec des organisations étrangères (par exemple pour recruter et
retenir des meilleurs chercheurs, pour remporter des appels à projets à un niveau international,
ou encore attirer les meilleurs étudiants et tisser un réseau partenarial académique). Ces
universités devaient trouver avec cette loi l’autonomie nécessaire pour poursuivre leur
stratégie (Grenier et Zeller, 2014). Pourtant, plusieurs universités, ne répondant pas à ce
portrait-type, ont souhaité devenir autonomes dès la première vague de lancement de la loi
LRU (1er janvier 2009) pour démontrer qu’elles existent car elles se sentaient menacées par
les universités françaises à proximité. Elles répondent aux caractéristiques des établissements
les plus récents (« les nouveaux entrants » dans le champ), qui s’emparent habituellement plus
activement des réformes en cours, sont les plus dynamiques et innovants afin d'y fonder leur

142
petite niche. Par leur profil, ces universités sont en quelque sorte prédestinées à être « les bons
élèves du ministère » et à l'avant-garde des mutations contemporaines de l'université (Faure,
Soulie, et Millet, 2005). Cette loi porte un discours d’excellence et de performance et engage
un nouveau mode de management axé sur les résultats. Ces universités comptent alors sur la
mobilisation collective de leur personnel, en particulier de la communauté universitaire, pour
atteindre leur performance. Nous avons donc retenu deux universités autonomes depuis le 1er
janvier 2009 pour observer des EC confrontés, encore plus que les autres, à la notion de
performance organisationnelle.

Les universités ont été choisies de telle manière qu'elles présentent des situations
contrastées, par leur ancienneté et leur taille. Malgré ces différences, elles ont en commun
d’avoir accédé aux RCE pour des raisons similaires : la menace d’un regroupement avec les
universités voisines.

Le tableau 11 synthétise brièvement les caractéristiques des cas retenus.

Tableau 11 : Caractéristiques des cas retenus

Nombre d’universitaires
Nombre Nombre de
(enseignants, enseignants- Ancienneté
d’étudiants composantes
chercheurs, doctorants)
Cas A 7 700 4 450 20 ans
Cas B 17 000 9 900 45 ans

1.2.2.2. Disciplines retenues

Rappelons les trois configurations disciplinaires traditionnellement établies (Faure et al.,


2005) :
 sciences et mathématiques : disciplines plutôt orientées par un travail de terrain, et de
gestions de thèses et de projets
 sciences humaines et sociales : disciplines orientées vers un travail de terrain et
d'analyses de données de première main : STAPS, sciences de l'éducation, sociologie,
psychologie, géographie et aménagement, anthropologie, information-communication,
sciences politiques

143
 disciplines littéraires et historiques : disciplines orientées vers un traitement de
données de deuxième main (analyses de texte, d'archives) : lettres, langues, histoire,
droit. L'économie gestion, ainsi que l'art constituent des positions à part, plus proches
du traitement de données de 2ème main propre aux disciplines littéraires et
historiques, que du travail de terrain des autres sciences humaines et sociales

Dans le souci de limiter les comparaisons de situations très disparates, nous avons
retenus des EC en sciences humaines et sociales (géographie, sociologie) et dans les
disciplines littéraires (droit, gestion, histoire, lettres). En effet, d’une part, les logiques
collectives sont plus déjà très présentes dans les disciplines scientifiques ; d’autre part, la
prise en compte de situations trop dissemblables aurait rendu l’analyse peu lisible. Par
conséquent, nous avons choisi d’étudier les disciplines où la mobilisation collective envers la
performance organisationnelle soulève le plus de questionnements, afin de répondre au mieux
à la problématique de la thèse. Rappelons que notre problématique interroge la mobilisation
collective envers la performance organisationnelle de professionnels autonomes et peu
habitués à des logiques collectives et organisationnelles. Les disciplines littéraires sont les
catégories qui se sentent les plus menacées par les évolutions récentes et qui sont aussi les
plus opposées aux valeurs et attitudes dont elles sont porteuses (comme on avait pu le
percevoir lors des mouvements de 2009) (Chatelain-Ponroy et al. 2012a). Nous justifions les
choix opérés dans les lignes qui suivent.

En effet, l'identité professionnelle des universitaires s'est construite autour de principes


propres aux disciplines. Trois types d’activités structurent le travail des EC : les activités de
recherche, les activités d’enseignement et les activités administratives. Ces trois activités,
même si elles portent le même nom, ne recouvrent pas les mêmes réalités d’une discipline à
l’autre concernant leur mise en œuvre journalière. Dès lors, elles orientent l’organisation
quotidienne du métier et conditionnent ainsi les comportements des EC (Faure et al., 2005).
Par ailleurs, la perception des tâches de travail varie en fonction des disciplines et
l’identification du travail dans le rôle et hors rôle est difficile à cause de l'absence de repères
réglementaires. L’activité de recherche collective et l'enseignement se font en un lieu et à une
date précis, ce qui génère des contraintes et détermine ensuite le comportement des EC.
Tout d’abord, en ce qui concerne la recherche, celle des disciplines littéraires et SHS
est une recherche solitaire. Quant aux disciplines dites « dures », la recherche est collective
car elle se fait en laboratoire (manipulation, expérimentation, programme informatique), avec

144
une présence sur site plus importante, mais surtout parce que leur recherche se fait
essentiellement sur projet, ce qui réclame de faire intervenir une équipe pouvant se partager le
travail. Ainsi, les disciplines scientifiques génèrent davantage de relation d’interdépendance
entre les collègues (y compris avec les doctorants et les étudiants avancés en recherche qui
inscrivent leurs recherches dans la problématique de leur directeur de recherche), que dans les
disciplines littéraires et de SHS (Becquet et Musselin, 2004). En histoire et en gestion, des
petites équipes de recherche peuvent se former sur la base d’affinités (Becquet et Musselin,
2004). En histoire, ces équipes permettent des échanges sur l'avancement des travaux que
chacun mène de façon individuelle. En gestion, les EC ont plutôt tendance à travailler seuls
sauf lorsqu'ils doivent traiter une commande importante : à ce moment, ils constituent une
petite équipe. Par ailleurs, les relations avec l’environnement économique et institutionnel ne
sont pas les mêmes d’une discipline à l’autre. Là encore, la fracture se fait entre les disciplines
dites « dures » et les disciplines sociales. D’un côté, les physiciens et les biologistes ont
d’importants besoins de financement pour leur recherche (Becquet et Musselin, 2004). Leur
recherche dépend donc d'un agenda imposé de l'extérieur. Ils doivent parfois renoncer à
certaines de leurs thématiques. A l’opposé, les historiens sont les plus coupés de
l'environnement économique et institutionnel. Il existe peu voir pas d'appel d'offres
s'adressant directement aux historiens ou avec un volet historique (sauf en histoire
contemporaine). Cette absence de financement et de commandes offre aux historiens une
grande autonomie de choix de leurs sujets de recherche (Becquet et Musselin, 2004).

Concernant l’enseignement, Becquet et Musselin (2004) soulignent que là encore, les


physiciens et les biologistes travaillent en équipe car la préparation des expérimentations
nécessite un travail collectif qui est mis en œuvre dans le cadre d'équipes pédagogiques
constituées de MCF et divers autres intervenants (ATER44, chargés de cours, moniteurs, etc.)
(Faure et al., 2005). Chez les historiens et les gestionnaires, le travail collectif en matière
d’enseignement n’est pas indispensable. En gestion en particulier, il n’y a pas de réelle
coordination de l’enseignement. L'enseignement n'est pas perçu de la même manière par les
différentes disciplines. Selon le rapport de Becquet et Musselin (2004), les physiciens et les
biologistes, par exemple, considèrent que l'activité est envahissante alors que les gestionnaires
acceptent de doubler leurs services pour répondre à la demande de formation (et ainsi
augmenter leur salaire). Les heures d’enseignement en gestion vont de 200 à 600 heures

44
Attaché Temporaire d’Enseignement et de Recherche

145
(Faure et al., 2005). Cette situation de sous-encadrement se retrouve également en lettres et en
droit (Becquet et Musselin, 2004). A l’opposé, les physiciens et les biologistes sont en
situation de sur-encadrement et consacrent donc moins de temps à l’enseignement que les
autres disciplines. L’autre particularité des historiens et des gestionnaires est que
l’enseignement est très découpé (en période chez les historiens : antique, médiévale, moderne
et contemporaine ; en domaines chez les gestionnaires : stratégie, finance, marketing, etc.).

Enfin, la dernière distinction concerne le travail administratif. Une précision doit être
amenée concernant ce qui recouvre le travail « administratif ». Becquet et Musselin (2004)
distinguent trois types de tâches administratives :
1- l’administration de l'enseignement (direction des diplômes et des départements) ;
2- l’administration de la recherche (direction des laboratoires et des équipes, gestion
des programmes de recherche et des contrats) ;
3- les mandats dans les commissions de spécialistes et les conseils de département,
d'UFR et centraux. Les mandats sont considérés comme moins contraignants que les
directions de départements, de diplômes et de recherche.
Faure et al. (2005) suggèrent que les tâches administratives sont moins légitimes en
sciences parce que la recherche est plus présente. Dans le même temps, Becquet et Musselin
(2004) rapportent que les sciences sont confrontées à davantage de tâches administratives (à
cause des modalités de fonctionnement de la recherche et de l'augmentation de la dépendance
économique).
Nous avons donc interrogé des EC exerçant des responsabilités administratives
variées.

L’Université A est une université pluridisciplinaire hors santé, composée de :


- trois Unités de Formation et de Recherche (UFR) : UFR Droit et Gestion, UFR Sciences
Fondamentales et Sciences pour l’Ingénieur et UFR Lettres, Langues, Arts et Sciences
Humaines ;
- un Institut Universitaire de Technologie (IUT).
Les deux composantes que nous avons retenues pour l’étude sont l’UFR Droit et
Gestion et l’UFR Lettres, Langues, Arts et Sciences Humaines (UFR LLASH). Elles
regroupent à toutes les deux 60 % de l’effectif estudiantin (2012) et 32 % des EC (2012) de
l’Université A.

146
Tableau 12 : Cas A - Répartition des effectifs estudiantins par composante (2012)

Cas A
Composantes Effectif estudiantin45 Effectif EC46
UFR Droit et Gestion 35 % 15 %
UFR Langues, Lettres, Sciences Humaines 25 % 17 %
UFR Sciences Fondamentales 20 % 50 %
IUT 20 % 16 %

L’Université B est une université pluridisciplinaire dont santé, composée de :


- cinq Unités de Formation et de Recherche (UFR) : Faculté de Médecine ; Faculté de Droit ;
Faculté Arts, Lettres, Langues ; Faculté Sciences Humaines et Sociales ; Faculté de Sciences
et Techniques ;
- trois instituts : deux IUT et un IAE ;
- une école d’ingénieurs.
Les deux composantes que nous avons retenues pour l’étude sont la Faculté de Droit et la
Faculté de Sciences Humaines et Sociales (SHS). Elles regroupent à toutes les deux 17 % de
l’effectif estudiantin (2012) et 18 % des EC (2012) de l’Université B.

Tableau 13 : Cas B - Répartition des effectifs estudiantins par composante (2012)

Cas B
Composantes Effectif estudiantin 47 Effectif EC48
UFR Droit 9% 8%
UFR Sciences humaines et sociales 8% 10 %
UFR Arts, Lettres, Langues 13 % 18 %
UFR Sciences et techniques 11 % 24,6 %
UFR Médecine 16 % 0,8 %49
Ecole d’ingénieurs 3% 7,5 %
IUT 1 13 % 14 %
IUT 2 4% 5,6 %
IAE 9% 10 %
Autres (ED, IFSI…) 14 % 1,5 %

45
Répartition des effectifs estudiantins par composante en 2012
46
Répartition des effectifs EC par composante en 2012
47
Répartition des effectifs estudiantins par composante en 2012
48
Répartition des effectifs EC par composante en 2012
49
+ 90 enseignants hospitalo-universitaires

147
1.2.2.3. Statuts retenus

En plus des activités propres au métier d’EC, une distinction s’opère également au niveau de
la division du travail entre Maitres De Conférences (MCF) et Professeurs (PR). Néanmoins,
cette division n’a pas la même intensité chez tous les EC. Les résultats de Becquet et
Musselin (2004) soulignent que la division du travail entre MCF et PR se fait en fonction de
trois éléments. Premièrement, la division du travail s’opère en fonction des caractéristiques (la
culture organisationnelle par exemple) des UFR ou départements, dépassant ainsi les
appartenances disciplinaires. Deuxièmement, elle se fait en fonction des activités (de
recherche et d’enseignement). Troisièmement, elle s’opère en fonction des choix personnels
(la perception du rôle, les choix d’avancement de carrière, la situation personnelle). Dès lors,
nous retenons comme unité d’analyse la composante afin de prendre en compte la division du
travail dans le contexte de la culture organisationnelle de la composante de rattachement.
Nous interrogerons des MCF, des PR dans chaque composante, mais également des
doctorants. En effet, le discours des individus en cours de socialisation est intéressant au
niveau des représentations sociales.

1.3. La méthode de recueil des données primaires et secondaires

1.3.1. Le choix de l’entretien semi-directif

La méthode des cas repose sur l’exploitation de plusieurs sources de données


(Wacheux, 1996). Les études de cas combinent habituellement des données telles que des
archives, des entretiens, des questionnaires et des observations. Les données peuvent être
qualitatives (ex des mots), ou quantitatives (ex des nombres), ou les deux (Eisenhardt, 1989).
Nous avons recueilli des données primaires et des données secondaires.

Nous avons besoin d’une méthode qui permette de recueillir les représentations
sociales des acteurs sur l’objet étudié (la performance de l’université) et leur articulation avec
la mobilisation collective et l’engagement.

Les psychologues sociaux ont développé toute une série de technique de recueil et
d’analyse pour l’étude des représentations sociales. Il existe deux grandes méthodes qui

148
permettent de recueillir les représentations sociales des acteurs : la méthode interrogative et la
méthode associative.
La méthode interrogative fait appel soit à un mode d'expression verbal, en utilisant la
technique de l'entretien ou du questionnaire ; soit à un mode d'expression figuratif, en utilisant
des planches inductrices (les répondants s'expriment librement à partir de dessins élaborés par
le chercheur) et des dessins et graphiques.
La méthode associative fait appel à un mode d'expression verbal, basé sur des
associations libres ou des cartes cognitives.
Chacune de ces méthodes et techniques de recueil diffère dans sa portée.
Thamain (2010) synthétise dans un tableau les techniques de recueil et leurs limites.

La communication étant reconnue comme essentielle à la formation des


représentations sociales (Moscovici, 1976), Negura (2004) souligne que l'entretien individuel
se révèle être un outil de choix pour y accéder. Blanchet et Gotman (2007 : 30) soulignent que
l’entretien individuel est une méthode adaptée aux enquêtes sur les représentations et les
pratiques : « ces enquêtes, qui visent la connaissance d’un système pratique (les pratiques
elles-mêmes et ce qui les relie : idéologies, symboles, etc.), nécessitent la production de
discours modaux et référentiels [les auteurs précisent en note de bas de page : un discours
référentiel est un discours qui décrit l’état des choses], obtenus à partir d’entretiens centrés
d’une part sur les conceptions des acteurs et d’autre part sur les descriptions des pratiques ».
L’entretien fournit un matériau plus riche que le questionnaire pour interpréter la
nature des relations que le répondant établit entre les éléments, ce que ne dirait pas la réponse
à un questionnaire qui associerait simplement deux mots sans expliquer la nature des relations
qui les lient (Piermattéo et Guimelli, 2012).

Reprenons une à une les principales limites de l’entretien synthétisées par Thamain
(2010) (tableau 14), à savoir : la complexité du discours, le fait que la pensée discursive soit
limitée, le fait que le discours du répondant soit sujet à des biais discursifs, et que la méthode
d’analyse de contenu soit tributaire d’interprétations. Dans notre cas, la complexité du
discours a été réduite par une analyse minutieuse, combinant plusieurs techniques, et
partiellement assistée par le logiciel Nvivo 1050. Par ailleurs, pour limiter les biais discursifs,
liés au fait que les répondants ne vont pas oser exprimer des éléments qu’ils perçoivent

50
Nous détaillerons cela dans la partie « 2. Méthode d’analyse du matériau recueilli ».

149
comme étant non acceptables par leur groupe d’appartenance ou par l’enquêteur (Flament,
2011), nous avons appliqué la technique de « la consigne de substitution », que nous
présenterons dans la prochaine partie51. Enfin, le fait que l’analyse de contenu soit tributaire
d’interprétations n’est pour nous pas une limite, dans la mesure où nous notre positionnement
épistémologique est interprétativiste.

Tableau 14 : Méthodes de recueil des représentations sociales : avantage et limites (Thamain,


2010 : 201)

Méthode Expression Technique Avantages Limites


de recueil de recueil
Outil majeur de recueil Pensée discursive limitée

Situation d’interaction Complexité du discours


finalisée
Discours sujet à caution :
Entretien contrôle, scotomisation,
etc.

Verbale Méthode d’analyse de


contenu tributaire
d’interprétations
Analyse quantitative Sélection des thèmes par le
chercheur
Identification des facteurs
Questionnaire explicatifs Limite l’expression

Interrogative Standardisation

Favorise l’expression par Sélection des thèmes par le


rapport aux entretiens chercheur
classiques
Analyse du contenu
Planches
complexe
inductrices
Forte interprétation par le
chercheur et par le sujet
Figurative
interrogé
Accès aux « idées spatiales » Applicable avec certains
prolongeant la pensée types de sujet (enfants)
discursive
Dessins et
graphiques
Accès à la structure par
corrélation

Réduction des limites Ne couvre qu’une forme


discursives d’association
Associations
Associative Verbale Caractère spontané : moyen Interprétation
libres
contrôlé par le discours

Accès à la structure par

51
« 2. Méthode d’analyse du matériau recueilli. 2.2.3. Technique de traitement de l’effet de masquage ».

150
corrélation
Complète l’association libre Nécessite un traitement
préalable des résultats
Carte Hiérarchisation des produits par l’association
associative associations libres libre

Technique prometteuse

Par ailleurs, l’entretien individuel nous semble le plus adapté pour comprendre le
processus de mobilisation d’un individu, pour explorer les facteurs liés à cette mobilisation et
pour nous rendre compte de l’acception de la notion de performance. L’entretien individuel
nous permettra aussi de voir s’il existe des différences individuelles parmi les EC interrogés.
« Les entretiens individuels sont adaptés lorsqu’on cherche à explorer des processus
individuels complexes (compréhension, évaluation, décision, appropriation, immersion,
imagerie mentale, etc.) ou des sujets confidentiels, touchant à l’intimité de l’individu ou
encore tabous » (Gavard-Perret, Gotteland, Haon, Jolibert, 2008 : 90).
En effet, la mobilisation est un processus individuel complexe, faisant intervenir des
conditions organisationnelles et des conditions psychologiques, comme nous l’avons vu lors
de la revue de littérature.
Parmi les trois types d’entretiens individuels possibles (entretien directif, entretien
semi-directif ou entretien non-directif), nous avons opté pour des entretiens semi-directifs,
nous permettant d’aborder les éléments issus de la littérature et dans le même temps,
permettant de faire émerger tout nouvel élément que nous n’aurions pas abordé au travers de
la littérature. L’entretien semi-directif est un mode de recueil très largement répandu en
sciences de gestion, car il offre la possibilité d’aborder des thèmes précis. Le chercheur
indique un thème sur lequel le répondant doit s’exprimer. A la différence de l’entretien non
directif, le chercheur garde à l’esprit un certain nombre de questions ou de sous-questions
auxquelles le répondant devra répondre à un moment donné. Il s’agit donc d’adapter le degré
de directivité de l’entretien en fonction de la profondeur du matériel verbal que nous
souhaitons recueillir (Bardin, 2003). Evrard, Pras et Roux (2003 : 96) soulignent que « plus
on pose de questions directes, moins on a de réponses, car ces réponses ne seraient que des
réponses de surface qui ne renverraient qu’à la seule logique de la personne qui questionne ».

151
1.3.2. Le plan d’entretien

Le plan d’entretien est constitué du guide d’entretien (ensemble organisé des thèmes que le
chercheur souhaite explorer) et des stratégies d’intervention du chercheur visant à maximiser
l’information obtenue sur chaque thème (Blanchet et Gotman, 2007). Le plan d’entretien fait
donc le lien entre le travail de conceptualisation de la recherche et sa mise en œuvre concrète
(Blanchet et Gotman, 2007). Le guide d’entretien traduit les hypothèses de recherche en
indicateurs concrets et reformule les questions de recherche en questions d’enquête adressées
aux répondants. Le guide d’entretien est plus ou moins formalisé en fonction de l’objet
d’étude (multi-dimensionnalité), de l’usage de l’enquête (exploratoire, principale ou
complémentaire) et du type d’analyse que l’on envisage de faire (Blanchet et Gotman, 2007).
Il faut établir la consigne de départ, les axes thématiques et anticiper les relances. Le guide
d’entretien a été soumis à un chercheur pour validation et a été testé auprès d’un EC en
Sciences de Gestion, membre de notre centre de recherche.
En tant que doctorant, nous avions l’avantage d’être assez habitués au vocabulaire et
aux codes verbaux du milieu étudié. Cela nous a permis d’anticiper la formulation des
relances du guide d’entretien principal (Blanchet et Gotman, 2007). Il a néanmoins fallu nous
adapter, au gré de l’enquête, aux interlocuteurs provenant de disciplines autres que les
Sciences de Gestion.

Nous décrivons ci-après le guide d’entretien que nous avons utilisé. Le guide
d’entretien des membres de la direction (Président et vice-présidents) était légèrement
différent. Il intégrait des questions concernant la stratégie de l’établissement. Suivant notre
logique abductive, le guide d’entretien était au début de l’enquête peu structuré et a évolué au
cours des entretiens. Pour minimiser le risque de circularité, nous n’avons pas interrogé les
répondants sur les liens entre variables. Le guide d’entretien a connu trois formes principales.
Tout d’abord, les orientations concernent en premier lieu l’engagement organisationnel et
l’engagement professionnel qui se sont très rapidement affirmés en tant que concepts
importants après quelques entretiens sur le terrain A. Au départ, nous interrogions les EC sur
« la manière dont ils considèrent » leur établissement, leur composante, leur profession, etc.
Ensuite, des questions identitaires ont émergé lorsque nous avons opéré à un premier
traitement des résultats du cas52. Nous avons donc ajouté un thème lié aux questions

52
Dans le cadre d’une publication dans une revue et d’une communication dans une conférence.

152
identitaires. Nous présentons en couleur bleu les thèmes qui ont été ajouté après les premiers
entretiens et en vert ceux que nous avons ajouté à l’issu de l’enquête sur le terrain A.

Après une rapide présentation de notre parcours, de notre discipline (Sciences de


Gestion, spécialité Management Public53), l’objectif de la recherche (une thèse qui cherche à
comprendre la mobilisation collective des EC pour améliorer la performance de l’université)
nous demandions au répondant de se présenter puis nous formulions la consigne suivante :

La notion de performance a progressivement été introduite dans la gestion des


universités.
Pouvez-vous me dire « qu’est-ce que la performance de l’université » pour vous ?

 Histoire de l’établissement
Exemple de question : Pouvez-vous me raconter l’histoire de l’Université X ?

REPRESENTATIONS SOCIALES DE LA PERFORMANCE DE L’UNIVERSITE

 Perception de la performance de l’université


Exemple de question : comment définiriez-vous la performance de l’université ?

 Consigne de substitution
Exemple de question : D’après vous, comment d’autres EC définissent la performance de
l’université ? Répondez en vous mettant à leur place.

 Parler de performance
Exemple de question : Est-ce que vous discutez de performance entre vous ? de manière
formelle et/ou informelle ? Y-a-t-il des personnes qui s’impliquent plus dans la démarche de
performance ?

 Situation avant/après les réformes

53
Nous avons souvent expliqué ce qu’était le Management Public en tant que discipline scientifique.

153
Exemple de question : Les réformes mises en œuvre par l’Etat ces dernières années (LOLF,
l’accession aux Responsabilités et Compétences Elargies (autonomie)) ont-elles changé
quelque chose dans votre quotidien ?
Aborde-t-on le terme « performance » plus facilement/plus régulièrement depuis ?

MOBILISATION COLLECTIVE

 Efforts attendus par la direction de l’établissement dans le cadre d’une


mobilisation collective vers une amélioration de la performance de l’université.
Exemple de question posée : Selon vous, qu’attend-on de vous (en termes de comportement)
dans le cadre d’une mobilisation collective vers une amélioration de la performance de votre
université ? et de votre UFR ?

 Description d’un EC mobilisé pour la performance de l’université


Exemple de question posée : Pouvez-vous me décrire un EC mobilisé, c’est-à-dire
quelqu’un qui fournit volontairement des efforts pour améliorer la performance/le
fonctionnement54 de l’université ?
Y en a-t-il dans votre entourage ?
Quels types de comportements amélioreraient selon vous la performance de l’université,
l’UFR, votre équipe de travail ?

 Motivations55
Exemple de question : qu’est-ce qui vous pousse à déployer tous ces efforts ?

 Moyens d’encourager la mobilisation collective


Exemple de question posée : Existe-t-il des dispositifs prévus par la présidence ou par l’UFR
destinés à encourager votre mobilisation ? Perception de cette démarche

54
Lorsque nous avions décelé une vision très négative de la performance lors des réponses aux premières
questions, nous remplacions le terme « performance » par autre terme utilisé par le répondant (excellence,
qualité la plupart du temps) ou, à défaut, par le terme fonctionnement. Si nous ne faisons pas cette adaptation, le
répondant restait fermé et l’entretien tournait court.
55
Le thème de la motivation doit systématiquement être abordé à la suite du thème précédent afin de faire
réfléchir les répondants sur les raisons qui les poussent à adopter les comportements qu’ils viennent de décrire.
Cela nous permettra de reconstituer les liens entre concepts.

154
ENGAGEMENT

 Relation psychologique avec l’établissement et ses composantes


Exemple de question posée : Comment considérez-vous l’université, l’UFR, votre équipe
de travail, etc.

 Engagement
Etes-vous prêt à vous impliquer56 et vous mobiliser de la même manière pour ces
différentes entités ? Pourquoi ?

IDENTITE PROFESSIONNELLE

 Sens donné au métier d’EC


Exemple de question posée : Quel sens donnez-vous à votre métier ?

 Les valeurs57 professionnelles perçues


Exemple de question posée : Quelles sont les valeurs de l’Université ?

 Sens donné au fait d’être EC


Exemple de question posée : Quel sens vous donnez au fait d’être EC ?

 Satisfaction vis-à-vis de la profession


Exemple de question posée : Qu’est-ce que vous plait dans le fait d’être EC ? Qu’est-ce qui
vous plait moins ?

56
Pour être fidèle au vocabulaire employé par les répondants, nous utilisions le terme « implication » et non
« engagement ».
57
Les valeurs renvoient à une compréhension partagée par les membres d’un même groupe (d’une organisation,
d’une institution, d’une profession, etc.) des attributs centraux et stables distinguant groupe des autres.

155
1.3.3. Description des données primaires et secondaires recueillies

1.3.3.1. La définition de la population

Les données primaires ont donc essentiellement été recueillies à l’aide d’entretiens semi-
directifs, et, dans une moindre mesure, par des périodes d’observations non participantes.
A cette fin, des bureaux nous ont été prêtés sur les deux terrains.

Une population étudiée dans le cadre d’une recherche peut être constituée de plusieurs
sous-populations, chacune pouvant apporter des informations spécifiques (Blanchet et
Gotman, 2007).
La population que nous avons étudiée est découpée en plusieurs sous-populations.
Nous avons interrogé, d’une part, des EC qui répondent aux critères de définition de la
population (corps, discipline, responsabilités administratives variées) et qui constituent le
cœur de notre question de recherche, et d’autre part, des EC membres de l’équipe
présidentielle (Président, vice-présidents). La première sous-population répond à notre
question de recherche.
La deuxième sous-population est interrogée en tant que responsable, son discours est
sur le même plan que la première sous-population mais ne sera pas traitée de la manière
identique dans les résultats (puisque cette population ne répond pas au critère de discipline).
Nous avons donc interrogé des acteurs en position fonctionnelle (Président de l’Université
A58, et vice-présidents).
Les entretiens réalisés avec les première et deuxième sous-populations constituent les
données primaires. Tous ces entretiens ont été enregistrés et intégralement retranscrits. La
durée moyenne d’un entretien est de 1 heure et 7 minutes pour un total d’heures
d’enregistrement de 54 heures et 55 minutes et 902 pages de retranscription.
Enfin, une troisième sous-population est composée de personnels administratifs
(Directeurs Généraux des Services, responsables administratifs de composantes, etc.) et
d’autres personnels enseignants (Professeurs agrégés, professeurs associés). Ces personnes
ont été interrogées pour leur statut d’informateur afin d’avoir accès à des données ou des
informations particulières afin de comprendre le contexte du cas. Elles ont soit été
sélectionnées par nos soins, soit elles ont été conseillées par des répondants à cause de leur

58
Le Président de l’Université B n’a pas pu nous recevoir.

156
rôle important. Dans le cas A par exemple, de nombreux responsables de formation du
département « Gestion » sont des professeurs agrégés mais ne peuvent pas faire partie de la
population centrale car ils ne répondent pas au statut d’EC. Les entretiens de cette troisième
sous-population n’ont pas tous été retranscrits et constituent des données secondaires.
Les enquêtes qualitatives n’ont pas pour objectif de sélectionner un échantillon
représentatif (Apostolidis, 2005). Au contraire, nous cherchons l’hétérogénéité qualitative des
EC interrogés. Ainsi, nous cherchons des personnes appartenant à des statuts professionnels
différents (Professeurs, Maîtres de Conférence, Doctorants), ayant des âges et des anciennetés
différents, et ayant des rôles différents (en termes de responsabilités : direction de laboratoire,
direction de département, direction de composante, membre des différents conseils centraux,
aucune responsabilité).

1.3.3.2. Les techniques d’échantillonnage retenues

Deux techniques de recrutement différentes ont été appliquées selon les cas. Concernant le cas
A, nous avons appliqué la technique de boule-de-neige. Cette technique consiste à interroger
au départ quelques personnes qui possèdent les caractéristiques recherchées et de leur
demander d’indiquer d’autres personnes au profil similaire ou opposé. Pour chaque
composante de chaque université, nous avons démarré la prise de contact lors des « Journées
Portes Ouvertes ». En effet, en dehors de ces événements, il est difficile de trouver des EC sur
les lieux. Soit parce qu’ils donnent des cours, soit parce qu’ils font leur recherche à domicile,
soit parce qu’ils sont en déplacement professionnel, etc.
Concernant le cas A, les premières personnes interrogées ont été mis en contact par
opportunisme (Miles et Huberman, 2003). Nous avons cessé les entretiens lorsque nous
avions atteint la saturation des données et l’hétérogénéité qualitative (N=21).
Concernant le cas B et la composante Droit, nous avons opté pour la mise en relation
par des contacts institutionnels dans un premier temps, puis nous avons appliqué la technique
de boule-de-neige. Ainsi, le directeur de la composante a envoyé un mail à tous les membres
de la composante. Neuf personnes ont accepté de nous recevoir. Leur profil était
suffisamment varié et la saturation des données a été atteinte. Concernant la composante SHS,
nous avons tout d’abord rencontré des acteurs sélectionnés sur la base de leur profil (éléments
recueillis sur le site internet de l’université) puis nous avons procédé par boule-de-neige.
Nous avons atteint la saturation des données et l’hétérogénéité qualitative à 27 entretiens.

157
Dans les deux cas, à la fin de chaque entretien, nous avons posé la question suivante :
« connaissez-vous des EC qui ont une vision opposée à la vôtre ? ». Cette technique
d’échantillonnage vise une variation maximale recommandée par Guba et Lincoln (1989),
« une quête délibérée de contre-exemple ou de variations (Miles et Huberman, 2003 : 61).

La saturation sémantique suppose d’une part que les quatre derniers entretiens
n’apportent aucune nouvelle information et que la population soit suffisamment diversifiée,
c’est-à-dire qu’elle comporte au moins une observation sur chaque modalité de critère
(Romalear, 2005).
L’ensemble de ces entretiens est synthétisée dans les tableaux 15 et 16.

Tableau 15 : Cas A - Synthèse des entretiens

Cas A
Président 1
Vice-Président 1
DGS 1
UFR Droit et Gestion UFR LLASH
Professeur 3 2
MCF 6 3
Doctorant 1 2
Enseignant 3
Directeur composante 1 1
Responsable administratif 1 1

Légende : Données primaires

Tableau 16 : Cas B - Synthèse des entretiens

Cas B
Vice-Président 3
DGS 1
Responsable administratif 1
UFR Droit UFR SHS
Professeur 2 4
MCF 4 6
Doctorant 2 3
Directeur composante 1 1
Responsable administratif 2 2
Ingénieur d’études 1
Directeur UMR 1

Légende : Données primaires

158
Dans la mesure où les deux terrains étaient éloignés géographiquement de notre
domicile, nous avons réalisé plusieurs séjours de quelques jours. Sur le terrain A, un bureau
nous a été prêté dans les locaux de la composante Droit-Gestion. Nous pouvions imprégner
les lieux, notamment rejoindre la salle « machine à café » régulièrement pour discuter avec
des EC. Nous avions sur chaque terrain noué des liens avec une personne « ressource » qui
avait de nombreuses relations dans les deux composantes investiguées ainsi qu’au niveau de
la direction centrale. Cette technique s’est avérée être très « efficace » afin de rencontrer des
personnes, être mise en contact, recevoir des mails et des documents, déjeuner avec des EC,
participer aux discussions de groupe lors de la Journée Portes Ouverte par exemple.
Sur le terrain B, nous sommes entré en relation avec deux personnes ressources, avec
qui nous avons pu prendre le train, recevoir des mails, et qui nous ont présentés au reste de
l’équipe. Nous avons également pu obtenir un bureau (qui se trouvait cette fois-ci au sein de
Centre de recherche en Droit). Nous avons aussi assisté à un conseil d’UFR (de Droit) et un
conseil de laboratoire (du Centre de recherche en Droit).
Le tableau 17 synthétise l’ensemble des données recueillies.

Tableau 17 : Synthèse des données recueillies

Cas A (entre mars et juin 2012) Cas B (entre février et juin 2013)
Données 21 Entretiens semi-directifs 27 Entretiens semi-directifs
primaires 5 Professeurs 6 Professeurs
9 MCF 10 MCF
5 Doctorants 5 Doctorants
2 Directeurs de composante 2 Directeurs de composante
1 Vice-Président 3 Vice-Présidents
Président 1 Directeur UMR DROIT
Observation non participante Observation non participante
 1 « Journée Portes Ouvertes » (en mars 1 « Journée Portes Ouvertes » (en février
2012) 2013)
 Discussions informelles individuelles 1 Assemblée Générale de laboratoire (en
et collectives (dans les couloirs, devant juin 2013)
la « machine à café », etc.) (entre mars 1 Conseil de faculté de Droit (en juin
et juin 2012) 2013)
Discussions informelles individuelles et
collectives (dans le train, dans le tram,
dans les couloirs, etc.)
(entre février et juin 2013)
Données 7 Entretiens semi-directifs 6 Entretiens semi-directifs
secondaires 1 PRAG (assesseur du doyen) 1 ingénieur d’études de l’UMR RELI
1 Professeur associé (responsable de 1 responsable administratif Service
formation) Financier et Comptable
1 Professeur agrégé (responsable de 2 responsables administratifs d’UFR
formation) 1 responsable administrative des
2 responsables administratifs d’UFR Relations Extérieures
1 Vice-Président 1 DGS
1 DGS
Documents externes Documents externes

159
Contrat quadriennal 2012-2017 Contrat quadriennal 2012-2015
Rapports d’évaluation AERES 2008 Rapports d’évaluation AERES 2010
(Etablissement, Formation, Recherche) (Etablissement, Formation, Recherche)
Communiqué de presse (01/2015) Bilan sociaux (2011, 2012, 2013)
Articles de presse (11/2011) Bilan d’activité 2010
Effectifs étudiants (de 2008 à 2015) Organigramme
Bilans sociaux (2011, 2012, 2013) Présentations de l’université 2012
Chiffres clés Effectifs étudiants (de 2008 à 2015)
Historique
Organigramme 2012
Documents internes Documents internes
Préparation du projet d’établissement Passation de pouvoir 2006
2012-2017 (octobre 2010) Panorama de presse 2013
Déclaration de candidature du président Echanges de messages électroniques
Documents supports de campagne (mars-juin 2013)
présidentielle (15/03/2012, 22/03/2012,
29/03/2012, 2/04/2012)

1.3.4. Caractéristiques de l’échantillon

1.3.4.1. Caractéristiques de l’échantillon du Cas A

Chaque répondant est présenté de la manière suivante :

Identifiant du répondant (An) / discipline (DROIT, GESTION, HIST, GEO, LETTRES,


ANTRHO) / statut (PR, MCF, DOCTO) / responsabilités administratives et collectives s’il y a
lieu (ADMENS, ADMRECH, DIRCOMP, MAND) / unité de recherche de rattachement (EA
DROIT, EA GESTION, CENTRE HIST, UMR ENV, EXTERNE).

Les répondants A20 et A21 font partie de la deuxième population. Leur discours n’est donc
pas traité de la même façon.

Tableau 18 : Cas A - Liste des sigles de dénomination des répondants

Code Signification
DROIT Droit
GESTION Gestion
HIST Histoire
GEO Géographie
LETTRES Lettres
ANTRHO Anthropologie
PR Professeur
MCF Maître de conférences

160
DOCTO Doctorant
PRESIDENT Président de l’université A
ADMENS Administration de l’enseignement (responsabilité de formation, direction de département)
ADMRECH Administration de la recherche (direction de centre de recherche ou d’un axe de recherche,
direction d’école doctorale)
DIRCOMP Direction de composante (département ou UFR)
MAND Mandat (élu dans un conseil représentatif)
EA DROIT Equipe d’accueil en droit (32 chercheurs)
EA GESTION Equipe d’accueil en gestion (20 chercheurs)
CENTRE HIST Centre de recherche en histoire (50 chercheurs)
UMR ENV Unité mixte de recherche sur l’environnement (60 chercheurs)59
EXTERNE Laboratoire externe à l’Université A

Tableau 19 : Cas A - Dénomination des répondants

Dénomination des répondants


A1 / PR / DROIT / ADMENS ADMRECH MAND / EA DROIT
A2 / MCF / GESTION ADMENS / MAND / EA GESTION
A3 / MCF / GESTION / DIRCOMP MANDAT / EA GESTION
A4 / DOCTO / HIST / CENTRE HIST
A5 / DOCTO / HIST CENTRE HIST
A6 / MCF / DROIT ADMENS / EA DROIT
A7 / MCF / GEO / ADMENS / UMR ENV
A8 / MCF GESTION / EA GESTION
A9 / PR / GESTION ADMENS MAND / EA GESTION
A10 / DOCTO / DROIT EA DROIT
A11 / PR / DROIT / EXTERNE
A12 / MCF DROIT / ADMENS / EA DROIT
A13 / MCF / GEO / DIRREC MAND / UMR ENV
A14 / MCF / GESTION / ADMENS / EA GESTION
A15 / PR / HIST / ADMENS / CENTRE HIST
A16 / PR / ANTHRO DIRCOMP / CENTRE HIST
A17 / PR / LETTRES DIRCOMP / UMR CNRS/ENS LETTRES
A18 / MCF / LETTRES ADMENS / CENTRE HIST
A19 / PR / DROIT DIRCOMP / EA GESTION
A20 / PRESIDENT
A21 / VICE-PRESIDENT

La première population comprend 7 Professeurs Répartition par statut

des universités (PR), 9 Maîtres de Conférences (MCF)


3
et 3 doctorants (DOCTO). DOCTO
7 PR
Les Professeurs sont majoritairement des
hommes : 6 hommes contre 1 femme, et les Maîtres de
9 MCF
Conférences des femmes : 6 femmes pour 3 hommes.

59
Chiffres 2012, doctorants non compris

161
Répartition par sexe Au total, la population compte 11 hommes
et 8 femmes.
L’âge moyen de l’ensemble de la
8 population est de 46,26 ans. L’âge moyen des
FEMMES
11
HOMMES
Professeurs est de 54,57 ans, celui des Maîtres de
conférences est de 46,22 ans et celui des
doctorants est de 27 ans.

6 disciplines sont représentées, en majorité le Répartition par discipline

Droit et la Gestion.
ANTHRO
LETTRES 1
2 GESTION
UFR Droit et UFR LLASH 5
gestion N = 11 N=8 GEO 2
Professeur Droit : 3 Histoire : 1
N=7 Gestion : 1 Lettres : 1
Anthro : 1 HISTOIRE
MCF Gestion : 4 Géographie : 2 3
N=9 Droit : 2 Lettres : 1 DROIT 6
Doctorant Droit : 1 Histoire : 2
N=3

Répartition par responsabilité La plupart des acteurs interrogés ont des


responsabilités administratives. 12 répondants
AUCUNE
5 ont des responsabilités d’administration de
l'enseignement (ADM ENS) (direction de
ADM diplômes et de départements) : 5 sont des
MANDAT ENS 12
4
professeurs et 7 sont des Maîtres de
ADM
RECH 2 conférences. 2 répondants ont des
responsabilités d’administration de la
recherche (ADM RECH) (direction des
laboratoires et des équipes, gestion des programmes de recherche et des contrats) : 1
Professeur et 1 Maître de conférences. 4 répondants ont des responsabilités de mandat (élus
aux conseils centraux, conseils de département ou d’UFR) : 2 Professeurs et 2 Maîtres de
conférences. 5 répondants n’ont aucune responsabilité, mais parmi eux figurent les 3
doctorants.

162
Tous les répondants sont associés à Répartition par unité de recherche

une unité de recherche rattachée à


EXTERNE
EA
l’Université A, sauf 2 qui sont rattachés à des 2
GESTION
UMR ENV 4
unités de recherche sous tutelle de 2
l’Université Nord (EXTERNE). Les
répondants sont répartissent 5 unités de
EA DROIT CENTRE
recherche. 2 unités sont des Unités Mixtes de 4 HISTOIRE
5
Recherche (UMR), et 2 sont des Equipes
d’Accueil (EA).

1.3.4.2. Caractéristiques de l’échantillon du Cas B

De la même manière que pour le Cas A, chaque répondant est présenté de la manière
suivante :

Identifiant du répondant (Bn) / discipline (DROIT, SOCIO, HIST, GEO, SCIENCES PO /


statut (PR, MCF, DOCTO) / responsabilités administratives et collectives s’il y a lieu
(ADMENS, ADMRECH, DIRCOMP, MAND) / unité de recherche de rattachement (UMR
DROIT, UMR TERRI, UMR SOCIO, UMR POL, EXTERNE).

Les répondants B3, B16, B26 et B27 font partie de la deuxième population.

Tableau 20 : Cas B - Liste des sigles de dénomination des répondants

Code Signification
DROIT Droit
SOCIO Sociologie
HIST Histoire
GEO Géographie
SCIENCES PO Sciences politiques
PR Professeur
MCF Maître de conférences
DOCTO Doctorant
VP Vice-Président de l’Université B
ANC PS Ancien Président de l’Université B

163
ADMENS Administration de l’enseignement (responsabilité de formation, direction de
département)
ADMRECH Administration de la recherche (direction de centre de recherche ou d’un axe
de recherche, direction d’école doctorale)
DIRCOMP Direction de composante (département ou UFR)
MAND Mandat (élu dans un conseil représentatif)
AERES Expert auprès de l’Agence d’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement
Supérieur
EC CNRS DIR UMR DROIT Enseignant-chercheur du Centre National de la Recherche Scientifique et
Directeur de Unité mixte de recherches sur le droit
EXTERNE Laboratoire externe à l’Université A
UMR DROIT Unité mixte de recherches sur le droit (86 chercheurs60)
UMR POL Unité mixte de recherches sur l’action publique (115 chercheurs)
UMR SOCIO Unité mixte de recherches en sociologie (82 chercheurs)
UMR TERRI Unité mixte de recherches sur la société, l’environnement et le territoire (16
chercheurs)
UMR RELI Unité mixte de recherches en histoire religieuse (6 chercheurs)

Tableau 21 : Cas B - Dénomination des répondants

Dénomination des répondants


B1 / PR / DROIT / DIRCOMP/ UMR CNRS DROIT
B2 / MCF / HIST / DIRCOMP / UMR CNRS RELI
B3 / PR / VP
B4 / PR / DROIT / DIRCOMP / UMR CNRS DROIT
B5 / PR / HIST / DIRCOMP MAND / UMR POL
B6 / MCF / SOCIO / ADMRECH/ UMR SOCIO
B7 / DOCTO / DROIT / UMR CNRS DROIT
B8 / DOCTO / DROIT / EXTERNE
B9 / PR / HIST ADMENS / UMR CNRS TERRI
B10 / PR / HIST / ADMENS / UMR CNRS RELI
B11 / PR / DROIT / ADMENS DIRREC / AERES / UMR CNRS DROIT
B12 / MCF / HIST / UMR CNRS RELI
B13 / MCF / DROIT / VP / UMR CNRS DROIT
B14 / MCF / HIST / MAND / UMR CNRE RELI
B15 / DOCTO / SOCIO / UMR SOCIO
B16 / EC CNRS / DIR UMR DROIT
B17 / DOCTO / UMR SOCIO
B18 / PR / GEO / ANC PRS / UMR CNRS TERRI
B19 / MCF / DROIT / DIRCOMP ADMENS / UMR CNRS DROIT
B20 / DOCTO /SOCIO / UMR SOCIO
B21 / MCF / SCIPO / ADMRECH, UMR POL
B22 / MCF / DROIT / UMR CNRS DROIT
B23 / MCF / DROIT / ADMENS ADMRECH DIRCOMP MAND/ UMR CNRS DROIT
B24 / MCF / HIST / ADMENS ADMRECH / UMR CNRS TERRI
B25 / MCF / SOCIO / ADMENS / UMR POL
B26 / PR / VP
B27 / MCF / VP

60
Chiffres 2013, doctorants non compris

164
La population interrogée comprend 7 Répartition par statut

Professeurs des universités (PR), 11 Maîtres de


5
Conférences (MCF) et 5 doctorants (DOCTO). DOCTO
7 PR
Les Professeurs sont majoritairement des
hommes : 6 hommes pour 1 femme.
11 MCF

Répartition par sexe Au total, la population compte 12


hommes et 11 femmes.
L’âge moyen de l’ensemble de la

11
population est de 45,83 ans. L’âge moyen des
12
FEMMES
HOMMES Professeurs est de 53,14 ans, celui des Maîtres
de conférences est de 48 ans et celui des
doctorants est de 30,8 ans.

5 disciplines sont représentées, en majorité le Répartition par discipline

Droit et l’Histoire. SCIENCES


PO 1
UFR Droit UFR SHS GEO 1 SOCIO 5
(N=9) (N=14)
Histoire : 3
Professeur
3
N=7 Géographie : 1
DROIT 9
Sociologie : 2
MCF
4 Sciences po : 1 HISTOIRE
N=11 7
Histoire : 4
Doctorant Sociologie : 3
2
N=5

Répartition par unité de recherche Tous les répondants sont associés à une unité de
recherche rattachée à l’Université B. Les
UMR UMR
POL 3 SOCIO 4 répondants se répartissent dans 6 unités de
UMR
TERRI 3 recherche, toutes des Unités Mixtes de Recherche
UMR
RELI 4 (UMR).

UMR
DROIT 9

165
La plupart des acteurs interrogés ont des Répartition par responsabilité administrative

responsabilités administratives. 12 répondants


ont des responsabilités d’administration de AUCUNE
6
l'enseignement (ADM ENS) (direction de ADM ENS
10
diplômes et de départements) : 5 sont des
MANDAT
professeurs et 7 sont des Maîtres de 3

conférences. 2 répondants ont des ADM


RECH 5
responsabilités d’administration de la
recherche (ADM RECH) (direction des
laboratoires et des équipes, gestion des
programmes de recherche et des contrats) : 1 Professeur et 1 Maître de conférences. 4
répondants ont des responsabilités de mandat (élus aux conseils centraux, conseils de
département ou d’UFR) : 2 Professeurs et 2 Maîtres de conférences. 5 répondants n’ont
aucune responsabilité, mais parmi eux figurent les 3 doctorants.

Section 2 : Méthode d’analyse du matériau recueilli

En suivant les recommandations d’Ayache et Dumez (2011), nous apporterons tout au long de
cette partie des réponses à trois questions liées :
1) Comment le codage a-t-il été mené concrètement en donnant de réelles illustrations
concrètes de ce qui a été fait ?
2) Comment la technique de codage adoptée a-t-elle affronté et géré le risque de circularité ?
3) En quoi cette technique de codage a-t-elle permis de mettre au jour dans le matériau
quelque chose d'inattendu et d'original par rapport aux questions de recherche ayant orienté le
travail ?

La première étape de l’analyse de contenu consiste à dénombrer les unités d’analyse


dans chacune des catégories et à calculer leur fréquence, afin d’évaluer l’importance de
l’unité d’analyse. Nous aurons recours à cette approche quantitative, mais qui sera
systématiquement couplée à une analyse qualitative, dont l’objectif est d’apprécier
l’importance des thèmes dans le discours plutôt que de la mesurer (Allard-Poesi, Drucker-
Godar, Ehlinger, 2007). Nous comptons les fréquences afin de déterminer des critères

166
communs et non pas en vue d’une généralisation statistique. Ainsi, nous rappelons notre
posture qui est de considérer qu’une catégorie est « importante » en fonction de sa valeur dans
le discours plutôt que du nombre de fois qu’elle apparait (Allard-Poesi et al. 2007).
Cependant, la fréquence révèle les catégories qui sont les mieux partagées par les répondants.
C’est en ce sens que le calcul des fréquences nous intéresse mais l’interprétation des résultats
ne peut reposer uniquement sur des calculs de fréquences.

Le codage a été fait en deux étapes. Tout d’abord, un codage ouvert et axial a été
appliqué à l’ensemble du corpus, avec l’appui du logiciel Nvivo 10 (2.1). Ensuite, une analyse
de contenu spécifique, suivi d’une analyse structurale, ont été menées pour identifier les
représentations sociales de la performance de l’université (2.2).

2.1. Analyse de contenu thématique verticale

2.1.1. Les techniques de codage utilisées : codage multiple et multithématique

Notre positionnement interprétatif nous amène à considérer :


- D’une part, que le codage doit être perçu comme une interprétation parmi de multiples
autres possibles (Ayache et Dumez, 2012). Aussi, nous prendrons soin d'exposer les
cheminements et de rapporter les matériaux qui nous ont amenés à telle ou telle explication,
afin que le lecteur puisse faire sa propre interprétation ;
- D’autre part, que deux chercheurs codant indépendamment le même matériau ne peuvent
pas parvenir à un même découpage en unités de sens et à un même étiquetage (Ayache et
Dumez, 2011). Par conséquent, le double codage n’a pas beaucoup de sens pour nous.

Le codage est un outil au service du travail scientifique fondamental qui consiste en


une exploration rigoureuse et systématique des ressemblances/différences (Ayache et Dumez,
2011). En suivant les recommandations d’Ayache et Dumez (2011 : 34) nous n’abordons pas
le matériau avec des cadres théoriques prédéfinis, afin d’éviter de ne « voir dans le matériau
que ce qui confirme ces cadres théoriques » (la circularité des résultats). Nous gardons
également à l’esprit que « les petits faits inexpliqués contiennent toujours de quoi renverser
toutes les explications des grands faits » (Ayache et Dumez, 2011 : 34). Par conséquent, si

167
nous présentons des fréquences au service de la comparaison, la quantification ne joue qu’un
rôle secondaire dans l’interprétation des résultats.

Nous suivons la méthode de codage multiple et multithématique proposée par


Ayache et Dumez (2011). Après une première lecture des entretiens, cette démarche consiste
à démarrer le codage avec des thèmes en nombre suffisant, et assez hétérogènes, pour
quadriller le matériau et ne pas structurer prématurément l'analyse. Ces thèmes sont issus à la
fois des cadres méthodologiques formels permettant de découper le matériau (par exemple, les
changements engendrés par les réformes), des théories (par exemple, la mobilisation
collective), et du matériau lui-même (par exemple, le sens donné à la profession). Les six
thèmes retenus sont :
- La mobilisation collective ;
- L’engagement ;
- Le sens de la performance ;
- Les réformes ;
- Parler de la performance ;
- Les motivations.

Vient ensuite l’étape du recoupement des thèmes entre eux, de manière à ce que les
extraits d'entretiens se retrouvent dans des thèmes différents. L’hétérogénéité des thèmes
amène le chercheur à regarder le même extrait d'entretien selon des systèmes de
ressemblances/différences divers, c’est-à-dire selon des manières de voir différentes.
Prenons l’exemple de deux thèmes que nous avons retenus : « Parler de performance » et
« Avant/Après réformes ». Il y a un recoupement entre ces deux thèmes lorsque les
répondants disent qu’ils parlent plus de performance depuis la LRU.
Le matériau est ensuite découpé en unités de sens qui sont regroupées par thème (cf.
Annexe 3 : Grille de codage).
La dernière étape consiste à procéder à un codage multinominal qui vise à identifier
des sous-thèmes par différence spécifique avec le thème général. L’objectif est de faire
apparaitre des pattern de la relation, des sortes de motifs récurrents. Par exemple, la
mobilisation collective peut être définie par les EC de l’équipe de direction ou les EC de la
« périphérie ». Nous avons donc un code binominal : « Mobilisation collective/définie par les
EC » ou « Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction ». Ces deux types de
répondants définissent la mobilisation collective selon son orientation : individuelle,

168
collective ou organisationnelle. Nous ajoutons un nom et nous obtenons un code trinominal :
« Mobilisation collective/définie par les EC/organisationnelle ». Les deux types de répondants
définissent la mobilisation organisation par plusieurs dimensions. Nous ajoutons un quatrième
nom au code : « Mobilisation collective/définie par les EC/ organisationnelle/ Participation à
la vie civique ».

2.1.2. Méthode d’analyse causale qualitative

Le but de notre recherche est de comprendre la mobilisation collective des


professionnels envers la performance de leur établissement universitaire. Notre objectif est
alors de mettre en évidence les mécanismes qui expliquent la mobilisation collective dans le
contexte bien précis que nous étudions. Notre cadre théorique nous a amené à l’hypothèse que
la RS de la performance de l’université peut orienter la mobilisation collective. Néanmoins,
nous rejoignons Dumez (2013 : 32) lorsqu’il considère qu’ « en aucune manière, les
propositions théoriques ne devraient être considérées en sciences sociales avec le formalisme
de la grande théorie. Elles devraient juste suggérer un jeu de relations, une histoire
hypothétique portant sur le pourquoi des actions, des événements, des structures et des
pensées qui se sont produits ». Nous tentons de reconstituer le lien entre la mobilisation
collective et ses causes possibles.

Pour cela, les résultats sont analysés en utilisant plusieurs tactiques permettant de
déterminer des liens de cause à effet entre les variables selon Miles & Huberman (2003).
Miles et Huberman (2003) soulignent que contrairement à ce qu’affirme le point de vue
conventionnel, l’analyse qualitative est un instrument très puissant pour établir la causalité.
En effet, elle examine le contexte de près, peut identifier des mécanismes, et dépasser
l’association simple (Miles et Huberman, 2003).
Deux voies nous amènent à déterminer un lien causal (Miles et Huberman, 2003). La
première voie est le caractère répété du lien entre X et Y dans les deux cas étudiés (Miles et
Huberman, 2003). Cependant cette répétition ne laisserait supposer qu’une association. La
deuxième voie, quant à elle, dispose d’une force explicative du lien de causalité entre X et Y :
il s’agit des explications données par les répondants eux-mêmes. En effet, le texte d’un
entretien peut déjà contenir des informations sur la nature des relations entre les éléments.

169
Pour conclure, nous affirmons, à l’instar de Miles et Huberman (2003), que la
causalité est locale, liée à des événements de proximité spécifiques et chronologiques. Nos
explications seront toujours formulées à la lumière des éléments contextuels.

Nous présentons à présent les différentes étapes de l’analyse causale (Miles et


Huberman, 2003).

Première étape : Construction des matrices


Au préalable, nous avons construit des matrices qui permettent à l’analyste et au lecteur
d’avoir sur une seule feuille toutes les réponses de tous les répondants.
Il existe plusieurs formats de présentations des données, en fonction de ce que le chercheur
cherche à découvrir : des diagrammes conceptuels, des matrices « liste de contrôle », des
formations chronologiques tels que des tableaux d’incidents critiques et des matrices
chronologiques par exemple, etc. En ce qui concerne notre recherche, nous présentons les
résultats sous forme de matrice par rôle, afin d’identifier des profils-type.
Nous avons ensuite entré les données sous forme d’ « étiquettes ». Une étiquette correspond à
une catégorie thématique (par exemple l’étiquette « PRAG » correspond à la catégorie
thématique « conception pragmatique »). Nous ferons régulièrement référence aux tableaux
en annexes qui synthétisent toutes les verbatim, afin que le lecteur puisse prendre
connaissance des verbatim qui ont permis le regroupement thématique.
Dans le corps du texte, nous avons sélectionné des verbatim qui représentent typiquement le
discours des répondants. Par ailleurs, nous renvoyons régulièrement le lecteur aux annexes
pour prendre connaissance des verbatim qui ont permis de rédiger cette partie et qui ne
peuvent pas figurer dans le corps du texte, pour des raisons de lisibilité.

Deuxième étape : repérer les relations entre variables


La première tactique d’analyse des données « repérer les relations entre variables » est une
lecture ligne après ligne afin d’identifier un profil de chaque répondant et de vérifier une
première fois la relation entre les réponses aux différentes questions (par exemple le
répondant An a une conception pragmatique de la performance organisationnelle et nous fait
part d’un engagement organisationnel mais ne mentionne pas d’engagement professionnel. Il
conçoit la mobilisation collective sous une orientation organisationnelle).

Troisième étape : confirmer les relations entre variables

170
La deuxième tactique « contraste/comparaisons » est une lecture colonne après colonne qui
permet de comparer les réponses aux questions sur les RS, l’engagement et la mobilisation.
La tactique utilisée est le comptage. En effet, nous aurons régulièrement recours à des
fréquences, non pas pour généraliser nos résultats, mais pour identifier des profils d’EC afin
de formuler des hypothèses concernant les liens entre les variables que nous étudions. Cette
deuxième analyse permet de confirmer les relations entre variables identifiées lors de la
première étape de l’analyse « repérer les relations entre variables ». Le dernier tableau de
synthèse réunira le maximum de données qu’il est possible pour le chercheur de manier et
pour le lecteur d’assimiler afin de répondre à la problématique générale de la thèse : « Dans
quelle mesure la RS de la performance que les professionnels élaborent oriente-t-elle
leur mobilisation collective envers l’organisation ? » Par exemple, l’analyse par
comparaison nous permettra de nous rendre compte que lorsque les répondants ont une
conception pragmatique de la performance organisationnelle, ils mentionnent majoritairement
un engagement organisationnel, souvent affectif. Puis l’analyse par contraste nous permettra
d’observer que les répondants qui n’ont pas une conception pragmatique mais philosophique,
n’ont soit pas d’engagement organisationnel, soit un engagement organisationnel uniquement
normatif (« je me sens obligé »).

Quatrième étape : repérer des variables intervenantes


Cette quatrième étape permet d’affiner l’analyse selon le discours des répondants. Par
exemple, A19 a une conception philosophique de la performance organisationnelle mais
présente un engagement organisationnel. C’est le cas également pour A1 et An (tactique :
compter). Une des explications que nous pouvons proposer en nous rendant compte que leur
engagement est normatif est que les EC ayant une conception philosophique de performance
et qui ont des responsabilités administratives importantes ressentent un engagement obligé
envers l’organisation. Dans leur conception première de leur profession, l’université
« n’existe pas en soi », un engagement envers elle n’aurait donc pas de sens. Néanmoins, leur
rôle au sein de l’université les amène à la matérialiser car ils participent à des réunions, sont
confrontés à des échanges avec les autorités gouvernementales qui concrétise l’existence de
l’université en tant qu’organisation. Dès lors, ils se rendent comptent qu’ils sont obligés
moralement d’être engagés, à cause de leur rôle important.

171
2.2. Analyse des représentations sociales

Plusieurs auteurs ont avancé l’idée que l’étude des représentations sociales ne doit pas se
limiter à une seule méthodologie (Abric, 2011, Abric, 2005, Apostolidis, 2005). En suivant
les recommandations émises par Apostolidis (2005), nous avons opéré une triangulation
méthodologique, qui consiste dans notre cas à combiner différentes méthodes d’analyse du
même phénomène particulier (Denzin, 1978). Cette triangulation méthodologique permet de
vérifier l’exactitude et la stabilité61 des résultats (Apostolodis, 2005), et augmente ainsi la
fiabilité du codage (Allard-Poesi, Drucker-Godar et Ehlinger, 2007) et la validité des résultats
Apostolidis (2005).
Dès lors, étudier une RS revient, d’une part, à reconstruire les schémas cognitifs des
répondants. Pour cela, le chercheur doit s’intéresser aux liens entre les différents éléments
cognitifs et à la nature de ces liens (2.1.1). D’autre part, l’étude d’une RS consiste à révéler
son noyau central (les éléments incontournables et non négociable d’une RS) et son système
périphérique (les éléments souvent présents mais pas incontournables) (2.1.2).

2.2.1. Analyse du contenu de la RS de la performance organisationnelle

L’analyse du contenu des RS de la performance organisationnelle s’est faite entretien


par entretien (Blanchet et Gotman, 2007) et s’est déroulée en quatre étapes, selon les
recommandations de Negura (2006). Nous avons rédigé une fiche individuelle pour chaque
répondant dans laquelle se trouve l’analyse du contenu de la RS de la performance
organisationnelle, l’engagement et la définition de la mobilisation collective. Ces fiches nous
permettent de reconstituer les liens de causalité entre variables en fonction de chaque individu
(en annexe 4 la fiche individuelle du répondant A1).

Nous illustrons ces quatre étapes avec l’analyse de l’entretien du répondant A1.

1) En premier lieu, nous avons déterminé les unités de bases (cognèmes, catégories
thématiques, items, etc.) dépourvues de tout jugement de valeur ou composante affective, il

61
La stabilité est un critère de fiabilité du codage qui se définit comme « l’étendue avec laquelle les résultats du
codage sont les mêmes lorsque les données sont codées par le même codeur à plusieurs reprises » (Allard-Poesi
et al., 2007 : 499).

172
s’agit des opinions (Negura 2006). Les verbatim seront regroupées sous la forme de concepts
qui regrouperont des mots ou des morceaux de phrases (tableau 22).

Tableau 22 : Catégories thématiques associées à l'objet « performance de l'université »,


citées par le répondant A1
Catégories
Verbatim
thématiques
je préfère à performance la notion de qualité
Qualité
ce n’est pas la performance mais la qualité
la qualité de ce qu’on produit j’ai horreur de ce terme parce que là encore on est dans des Qualité
termes qui font référence à l’entreprise à la consommation Consommation
l’université pour moi ce n’est pas une entreprise Public/privé
quand on regarde les classements quand on regarde les pôles d’excelle etc. il y a bien
aujourd’hui cette notion de concurrence qui est mise en avant par le gouvernement par les
Concurrence
autorités publiques bien évidemment et on est obligé de réagir par rapport à ça mais je
trouve ça détestable
pour moi la performance je pense à la pression Pression
il y a une culture du chiffre Indicateur
je suis assez gênée par tous ces concepts qui viennent de l’entreprise et qu’on veut
Public/Privé
appliquer à l’université

2) Ensuite, nous avons évalué la composante affective (direction) (ou valence, Piermattéo et
Guimelli, 2012) des unités de base.. Ainsi, le chercheur distingue non plus seulement la
simple présence d'un thème (les opinions), mais aussi sa connotation évaluative représentée
par une direction (les attitudes). L’attitude est positive ou négative et est notée par les signes +
ou -. Le point 0, qui sépare ces deux directions opposées, indique la neutralité. Il y a donc
trois catégories d’attitudes marquant la direction : la favorable, la défavorable et la neutre.
Ce codage est réalisé par l’interprétation de la signification du texte (le verbatim),
associée à la catégorie thématique analysée. Les expressions telles que « ça me déplait »,
« c’est terrible » (A1), « c’est frustrant » (A13), « me fait peur » (A10, A11), « me laisse
perplexe » (A11), etc. (attitude négative), « je trouve ça passionnant » (A7) (attitude positive)
permettent au chercheur d’évaluer l’attitude du répondant à l’égard de l’objet.

3) La troisième étape vise à évaluer l’indice de polarité et de neutralité:


Indice de polarité (P) = Nb catégories positives – Nb catégories négatives
N total de catégories analysées
L’indice varie entre -1 et +1 : si P est compris entre -1 et – 0,05, cela indique que la
plupart des catégories sont connotées négativement; si P est compris entre -0,04 et + 0,04,
cela indique que les catégories positives et les catégories négatives ont tendance à être égales ;

173
si P est compris entre + 0,05 et + 1, cela indique que la plupart des catégories sont connotées
positivement (De Rosa, 1995).
Ces indices de polarité permettent de révéler la manière dont les répondants
considèrent les éléments qu’ils associent à l’objet de RS, mais surtout, ils rendent compte des
écarts qui peuvent exister entre certains répondants. Certains peuvent avoir une opinion
favorable de l’objet de RS, d’autres une opinion défavorable, ou neutre.
Cette méthode permet de relever les éléments qui sont des opinions neutres et ceux qui
sont des attitudes chargées affectivement.

Dans un premier temps, nous avons évalué l’indice de polarité de la RS de la


performance organisationnelle pour chaque répondant (tableau 23).

Tableau 23 : Evaluation de l'attitude des répondants envers l'objet « performance de


l'université », par répondant

Répondant Catégorie Favorable Neutre Défavorable Indice de polarité


thématique + 0 - (P)
(a)
Répondant 1 (b) P1
(x)
(a)
Répondant 2 (b) P2
(x)
Répondant n… (x) Pn

Le répondant A1 a associé cinq catégories (ou thèmes) à la performance de l’université :


« Concurrence », « Public/Privé », « Qualité », « Indicateur », « Pression » (tableau 24). Tous
les thèmes sont connotés négativement sauf « Qualité » qui est connoté positivement. Ce qui
donne :
(1-4)/5 = - 0,67
Nous en concluons que le répondant A1 a une attitude très défavorable envers la performance
de l’université.

174
Tableau 24 : Evaluation de l'attitude du répondant A1 envers l'objet « performance de
l'université »
Favorable Neutre Défavorable Indice de polarité
Catégorie thématique
+ 0 - (P)
Qualité   
Consommation   
Public/Privé   
- 0,67
Concurrence   
Pression   
Indicateur   

Dans un deuxième temps, nous avons évalué l’indice de polarité de chaque catégorie
thématique (tableau 25), tous répondants confondus, afin d’avoir une idée des catégories
chargées affectivement et celle qui ne le sont pas.
Par exemple pour la catégorie « Qualité » : 11 répondants ont mentionné cette
catégorie. Huit en ont une opinion neutre et trois une opinion positive. Ce qui donne :
(3 – 0)/11 = 0,27
Nous en concluons que cette catégorie associée à la performance de l’université est assez
favorable. Dit autrement, elle génère une attitude assez favorable de la part des répondants.

Tableau 25 : Evaluation de l'attitude des répondants envers l'objet « performance de


l'université », par catégorie thématique
Catégorie Favorable Neutre Défavorable Indice de polarité
thématique + 0 - (P)
(a) (nombre de répondants ayant une Pa
attitude favorable envers la
catégorie thématique)
(b) Pb
(x) Px

4) Déterminer les liens entre les catégories thématiques.

Déterminer les liens entre catégories thématiques revient à reconstruire les schémas cognitifs
des répondants, c’est-à-dire d’établir leur carte cognitive. La carte cognitive représente « la
représentation des croyances d’une personne ou d’une organisation concernant un domaine
particulier » (Allard-Poesi et al., 2007).
En nous inspirant des travaux d’Allard-Poesi (1999) et d’Allard-Poesi et al. (2007) et des
discours des répondants, nous avons codé les liens suivants :

175
- Lien d’influence ou de causalité positive, noté /+/ : induit, entraîne, conduit à, cause, a pour
conséquence… ; « du coup sa performance n’est pas perçue et donc du coup elle n’a pas une
visibilité » => « Si une université est mal gérée par exemple, ou ne communique pas
suffisamment sur ce que font ses enseignants-chercheurs ou ce qu’elle peut faire en terme de
formation bah du coup sa performance n’est pas perçue » (A2) =>communication /+/visibilité
- Lien d’influence ou de causalité négative, noté /-/ : empêche, nuit à, est dommageable à,
réduit, est nuisible à, entrave…
- Lien de différence, noté /≠/ : est différent de, ne ressemble pas à… : « l’université pour moi
ce n’est pas une entreprise » (A1) => Université /≠/ entreprise
- Lien d’appartenance, noté /∈/ : appartient à : « je suis assez gênée par tous ces concepts qui
viennent de l’entreprise et qu’on veut appliquer à l’université » (A1) => performance /∈/
entreprise

Tableau 26 : Carte cognitive du répondant A1

Catégories Liens entre catégories


Verbatim
thématiques thématiques
je préfère à performance la notion de qualité
Qualité Performance /≠/ qualité
ce n’est pas la performance mais la qualité
la qualité de ce qu’on produit j’ai horreur de ce terme Qualité Production /=/ entreprise
parce que là encore on est dans des termes qui font
référence à l’entreprise à la consommation Consommation Production /=/ consommation
l’université pour moi ce n’est pas une entreprise Public/privé Université /≠/ entreprise
quand on regarde les classements quand on regarde
les pôles d’excelle etc. il y a bien aujourd’hui cette
notion de concurrence qui est mise en avant par le
Concurrence Classement /+/ concurrence
gouvernement par les autorités publiques bien
évidemment et on est obligé de réagir par rapport à ça
mais je trouve ça détestable
pour moi la performance je pense à la pression Pression Performance /=/ pression
il y a une culture du chiffre Indicateur Performance /=/ indicateur
je suis assez gênée par tous ces concepts qui viennent
Public/Privé performance /∈/ entreprise
de l’entreprise et qu’on veut appliquer à l’université

2.2.2. Analyse de la structure de la RS de la performance organisationnelle (noyau central


et système périphérique)

L’étude de la RS de la performance de l’université que nous proposons repose d’une


part sur une analyse de contenu que nous venons de présenter, et d’autre part sur l’analyse
structurale selon la méthode de Vergès (1992). La méthode de Vergès (1992) permet
d’aboutir à un tableau, appelé « le carré de Vergès » qui permet au chercheur de visualiser en

176
un coup d’œil les croyances centrales (noyau central) des répondants associées à l’objet de
représentation et les croyances conditionnelles (système périphérique). Ce tableau permet de
réaliser une première tentative d’interprétation de la représentation sociale, mais nécessite
complété par d’autres études, notamment l’analyse de contenu et les cartes cognitives.

Pour rappel « les croyances centrales d’une RS se définissent comme des croyances
consensuelles et « non négociables » au sens où elles sont nécessairement associées à l’objet
de RS considéré alors que les croyances périphériques sont des croyances « conditionnelles »
i.e. fréquemment mais non nécessairement associées à ce même objet (cf. Flament, 1994) »
(Tafani et Bellon, 2007 : 256). Pour résumer, si le noyau central de la RS est remis en cause,
l’individu n’associera plus la RS à l’objet étudié. Par exemple, si le noyau central de la RS
d’une organisation publique est de ne pas faire de profit, une organisation qui ferait du profit
ne serait pas considérée comme une organisation publique, et ceci est non négociable puisse
que faisant partie du noyau central.

Selon Verges (1992), deux critères doivent être pris en compte pour l'analyse de la
structure des RS :
- la fréquence de la catégorie thématique (en nombre de répondants)
- le pouvoir que la catégorie a d'organiser la signification de la représentation (ce n'est pas
parce qu'il y a consensus des répondants sur le fait que chaque entreprise possède une
hiérarchie que cela constitue la représentation de l'entreprise, il faut que l'élément hiérarchie
attribue une signification à la RS de l'entreprise). Les éléments qui nouent de nombreuses
relations sont plus « structurants », plus générateurs de significations que les autres. Ce sont
alors les éléments centraux de la représentation. En effet, les éléments de définition de l’objet
qui apparaissent en premier sont considérés comme ceux qui sont socialement les mieux
partagés et qui font un consensus au sein du groupe d’appartenance.
Les catégories thématiques qui reviennent dans ces deux groupes Constituent le noyau central
de la représentation sociale.

L’outil le plus répandu et le plus efficace pour révéler la structure d’une RS (ce qui est
communément appelé l’approche structurale) est la méthode des associations libres proposée
par (Verges, 1992). Le chercheur demande au répondant d’associer n mots ou expressions à
l’objet de représentation sociale étudiée (entre 3 et 5 mots). Par la suite, il lui demande de
hiérarchiser ces mots ou expressions du plus important pour caractériser au moins important.

177
Un thème est considéré avec une fréquence forte lorsque celle-ci est supérieure ou
égale à la fréquence moyenne de tous les autres éléments. Sa fréquence est considérée comme
faible lorsqu’elle est inférieure à la fréquence moyenne. Une catégorie est considérée comme
importante, lorsque son rang d’apparition dans le discours est supérieur ou égal au rang
moyen d’importance. A l’opposé, une catégorie est considérée comme faible si son rang est
inférieur au rang moyen d’importance.

Nous nous inspirons de cette méthode des associations libres (Verges, 1992).
Néanmoins, puisque nos données sont recueillies à l’aide d’entretiens, nous aurons recours à
une analyse thématique qui prend en compte l'ordre d'apparition de chaque thème dans le
discours. Tout comme l'analyse des associations de mots, l'analyse d'un entretien permet de
caractériser les relations entre les éléments. L’entretien fournit un matériau beaucoup plus
riche pour établir des relations entre les éléments (Piermattéo & Guimelli, 2012).

Importance

Grande Faible
Case 1 Case 2
Forte
ZONE DU NOYAU 1ÈRE PERIPHERIE
Fréquence
Case 3 Case 4
Faible
ELEMENTS CONTRASTES 2E PERIPHERIE

Case 1 : noyau central. Ce que doit être la performance.


Case 2 : les éléments périphériques les plus importants
Case 3 : « zone des éléments contrastés. Thèmes énoncés par peu de personnes mais qui les
considèrent comme importants. Peut révéler l’existence d’un sous-groupe minoritaire porteur
d’une représentation différente, c’est-à-dire dont le noyau central serait constitué par
l’élément (ou les éléments) présents dans cette case, en sus du noyau central repéré dans la
case 1. Mais on peut trouver ici, bien entendu, un complément de la première périphérie »
(Abric, 2007).
Case 4 : deuxième périphérie : éléments peu présents et peu importants dans le champ de la
représentation.

178
Afin de compléter l’analyse, en plus de la fréquence de la catégorie thématique, nous
rechercherons également le nombre d’évocations pour chaque catégorie thématique, c’est-à-
dire le nombre d’occurrences.

Nous reprenons l’entretien du répondant A1 pour illustrer notre technique de codage :

Verbatim Catégories thématiques Rang


quand on regarde les classements quand on regarde les pôles d’excelle
etc. il y a bien aujourd’hui cette notion de concurrence qui est mise en
Concurrence 1
avant par le gouvernement par les autorités publiques bien évidemment
et on est obligé de réagir par rapport à ça mais je trouve ça détestable
l’université pour moi ce n’est pas une entreprise Public/privé 2
je préfère à performance la notion de qualité
Qualité 3
ce n’est pas la performance mais la qualité
la qualité de ce qu’on produit j’ai horreur de ce terme parce que là
encore on est dans des termes qui font référence à l’entreprise à la Qualité
consommation
il y a une culture du chiffre Indicateur 4
pour moi la performance je pense à la pression Pression 5
je suis assez gênée par tous ces concepts qui viennent de l’entreprise et
Public/Privé
qu’on veut appliquer à l’université

Nous remarquons que les catégories « Qualité » et « Public/Privé » sont évoquées deux fois
chacune (occurrence = 2).

2.2.3. Technique de traitement de l’effet de masquage

Les études mettent en avant l’existence d’un biais discursif (Flament, 2007). Il existe des
éléments d’une représentation, nommés « zones de masquage » [réf], qui ne sont pas
complètement exprimées dans des conditions normales d’enquête, que ce soit par
questionnaire ou par entretien (Flament, Guimelli et Abric, 2006).

Ces « zones muettes » sont masquées car elles comportent des éléments sensibles d’un
point de vue normatif. Les répondants ne vont pas oser exprimer des éléments qu’ils
perçoivent comme étant non acceptables par leur groupe d’appartenance ou par l’enquêteur.
Ainsi, l'étude de Flament et al. (2006) révèle qu'une enquêtrice prénommée
« Yamina » n'obtient pas les mêmes RS de l'islam qu'une enquêtrice prénommée « Céline ».

179
Les difficultés que nous avons rencontrées pour obtenir des entretiens nous ont donné
l’impression que le sujet était tabou. Notre impression s’est rapidement confirmée lorsque
nous prenions contact avec les acteurs. Plusieurs acteurs s’imaginaient que, parce que nous
réalisons une thèse en Management Public, nous « défendons » l’application de la
performance à l’université (cf. Annexe 5, pour prendre connaissance d’un échange de
message électronique que nous avons eu avec un répondant). Un acteur du terrain B nous a
clairement expliqué que l’ensemble de ses collègues ne souhaitait pas nous rencontrer car le
sujet ne lui plaisait pas. Ils avaient discuté, en groupe, de notre présence et de notre
sollicitation. Certains ne donnaient aucune suite à notre message électronique. D’autres
répondaient qu’ils n’avaient rien à dire sur ce sujet ou qu’ils ne souhaitaient pas s’exprimer.

Il convient donc d'utiliser certaines méthodes supplémentaires pour révéler ces zones
de masquage de la RS, afin de se rapprocher le plus possible de la pensée des répondants.

L'hypothèse centrale est que le masquage/démasquage de ces aspects masqués par le


répondant dépend de sa perception de l'enjeu de la situation par rapport aux normes
impliquées dans la situation.

Dès lors, les études ont révélé qu’en variant la consigne, l'intensité des effets de
masquage ou de démasquage peut varier (Flament et al., 2006). Une consigne « normale »
demande à l'enquêté de donner son opinion personnelle, comme dans les enquêtes habituelles.
Cette consigne normale donne accès au contenu explicite (Abric, 2007). Dans un deuxième
temps, une consigne « de substitution » demande à l'enquêté de répondre comme le ferait un
autre groupe.

Guimelli et Deschamps (2000) ont révélé des zones muettes en appliquant cette
technique. Ainsi, ils ont demandé à 72 étudiants leur opinion personnelle (consigne normale)
sur « Les Gitans ». Les Gitans apparaissent alors, de manière assez positive, comme
« nomades » et « musiciens ». Lorsque les chercheurs ont demandé aux mêmes étudiants de
répondre « comme le feraient les Français en général » (consigne de substitution), les Gitans
sont alors décrits comme des « voleurs » (pour 64% des enquêtés, contre seulement 26%
d'entre eux en condition de consigne normale).

180
Il y aurait ainsi deux facettes d'une même représentation sociale, deux ensembles
« praxeo-discursifs » (Milland et Flament, 2010 : 218) relatifs à un même objet et qui se
comportent tous deux comme deux RS bien constituées. Ces deux facettes se révèlent lorsque
la même population est placée dans deux conditions différentes.

D'un point de vue méthodologique, il est donc essentiel de recueillir l'attitude des
individus à l'égard de l'objet étudié, c’est-à-dire calculer l’indice de polarité évoqué
précédemment.
La consigne standard est censée permettre de recueillir les éléments de la RS qui
participent à l’image positive de l’objet, tandis que la consigne de substitution recueille, quant
à elle, les éléments de la RS qui participent à l’image la plus négative de l’objet. L’indice de
polarité permet également d’évaluer l’importance d’une facette de la RS pour les répondants.
Une facette associée à une valence négative traduit l’importance que revêt cette facette pour
les répondants, alors que facette associée à une valence neutre n’a que peu de poids pour
rendre compte de ce qu’est l’objet (Flament et al., 2006).

Cette approche par les zones de masquage apporte une conception moins monolithique
de l'approche structurale et considère qu'une même population peut avoir des images
multiples, voire concurrentielles d'un même objet.

181
CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE

La figure 9 synthétise le contenu les éléments présentés dans cette deuxième partie.

Figure 9 : Synthèse de la deuxième partie

SYNTHESE DE LA DEUXIEME PARTIE : CHOIX EPISTEMOLOGIQUES ET


METHODOLOGIQUES DE LA RECHERCHE

Chapitre 4 : Problématisation de la recherche et fondement épistémologique

- point de départ de la recherche : un problème concret ; la mobilisation collective des EC envers la


« performance » de l’université ;
- rappel de la problématique : Dans quelle mesure les RS de la performance que les professionnels
élaborent orientent-elles leur mobilisation collective envers l’organisation ?
- quatre QR ont émergé à l’issue de la revue de littérature :
QR1) Quels types de comportements (envers l’organisation et envers la profession) les EC
adoptent-ils dans le cadre de leur mobilisation collective ?
QR2) Quelle est la RS de la performance organisationnelle ?
QR3) En quoi la RS de la performance organisationnelle élaborée par les EC influence-t-elle leur
engagement envers l’organisation et leur engagement envers la profession ?
QR4) En quoi l’engagement envers l’organisation et l’engagement envers la profession influencent-
ils la mobilisation collective des EC ?
- une inscription dans paradigme des faits sociaux relationniste qui considère qu’un individu agit en
conformité avec un univers de structures sociales mais qu’il interprète et reconstruit ces structures dans
l’action et dans ses relations sociales ;
- une posture épistémologique interprétative qui vise une approche compréhensive de la mobilisation
collective.

Chapitre 5 : Une méthodologie qualitative fondée sur l’étude de cas

- une étude de cas multiples fondée sur deux Universités pluridisciplinaires, restées anonymes ;
- une méthode de recueil des données primaires basée sur l’entretien semi-directif ; 48 entretiens ont été
menés, enregistrés et retranscrits ;
- une méthode d’analyse des données fondée sur l’analyse de contenu ;
- la RS de la performance de l’université a été analysée dans son contenu (définition des éléments qui la
compose des liens entre ces différents) et dans leur structure (organisation de ces éléments ; noyau central et
système périphérique).

182
TROISIÈME PARTIE : RÉSULTATS ET DISCUSSION

183
La troisième partie de la thèse est consacrée à la présentation et la discussion des résultats.
Elle est articulée en quatre chapitres. En suivant la méthode des cas, les chapitres 6 et 7
présentent respectivement l’analyse du Cas A et l’analyse du Cas B, en suivant l’ordre des
questions de recherche pour chaque cas. Le chapitre 8 est une synthèse qui confronte les
résultats des deux cas et opère une transition vers le chapitre 9. Le chapitre 9 propose alors
une discussion des résultats de la recherche au regard du cadre théorique que nous avons
exposé en première partie et au regard d’autres théories et concepts.

184
CHAPITRE 6 : ANALYSE INTRA-CAS A

Nous présentons dans ce sixième chapitre les résultats de l’étude du Cas A. Après une
description détaillée du contexte de l’Université A (section 1), nous présentons les résultats
en suivant l’ordre des questions de recherche que nous avons formulées à l’issue de la revue
de littérature62 (section 2), puis nous terminons par une synthèse des résultats, qui vise à
répondre à la problématique générale de la thèse (section 3).

Section 1 : Description de l’Université A

L’Université A est une université pluridisciplinaire hors santé, composée de :


- trois Unités de Formation et de Recherche (UFR) : UFR Droit et Gestion, UFR Sciences
Fondamentales et Sciences pour l’Ingénieur et UFR Lettres, Langues, Arts et Sciences
Humaines ;
- un Institut Universitaire de Technologie (IUT).
Si l’université est transdisciplinaire, les sciences « dures » dominent en nombre d’EC
(230 contre 150 en SHS en 2013), en budget alloué à la recherche, et en reconnaissance
scientifique (par le CNRS notamment). L’effectif estudiantin des SHS représente 60 % de
l’effectif total, sans compter les étudiants inscrits à l’IUT (18 % toutes disciplines
confondues). Le redéploiement des postes fait l’objet de tensions et de refus de la part des
« Sciences dures », malgré le volontarisme du président. En 2012, les postes ne bougeaient
plus. Malgré le levé de boucliers des syndicats, le président a pris la décision de fermer des
formations par manque d’effectif étudiant.

Elle compte environ 330 enseignants et EC, 80 PRAG, 230 BIATOS, 80 contractuels
de soutien et sept chercheurs.

62
Le lecteur peut se référer à la page 117 pour consulter la formulation détaillée des questions et sous-question
de recherche.

185
L’université a la caractéristique particulière d’accueillir 42% de boursiers alors que le
taux national est de 34,8 % en 201263.

La situation géographique de l’Université A est très agréable. Elle est située dans une
petite ville, la Ville A (75 000 habitants en 2012). La Ville A est dotée d’un riche patrimoine
historique et urbain. Les étudiants forment une part importante de la population : 12 000
étudiants en 2013, dont plus de la moitié sont à l’Université A. La tranche d’âge 15-29 ans
dépasse de 10 points celle du département.
Si le chômage structurel est important et de longue date, la ville est dynamique et
affiche une croissance de l’emploi supérieur à celle des communes comparables. La ville est
chère, et affiche un manque de logement universitaire.
Sur les deux premières années d'études, les étudiants proviennent majoritairement de
la région. Ensuite, les proportions s'inversent à mesure que grimpe le niveau. La provenance
est alors nationale et international pour les masters, les doctorats et certaines licences
professionnelles.

 Concurrence des universités voisines

L’université A est entourée, à 150 km au nord, par l’Université Nord, plus grande et
plus ancienne, disposant d’une très forte notoriété ; et au sud, d’une très grande université
également. L’Université A se sent menacée par la présence de ces universités, en particulier
par l’Université Nord, accessible au train depuis la ville A, et à qui elle était rattachée dans le
passé (figure 10).

63
Source : Repères et références statistiques, Ministère, édition 2012

186
Figure 10 : Contexte géographique de l'Université A

Académie A Ville Nord-Moyenne

Université Nord

Ville A (75 000 hab.)

Université A
7 700 étudiants

Ville Sud-Grande

Université Sud-
Grande

Légende :

Université A Académie dans laquelle se situe l’Université A

Ville dans laquelle se situe l’Université A Distance en kilomètres

Université voisine Transport ferroviaire

Ville voisine

 Une création récente et chaotique

L’Université A a été créée il y a une vingtaine d’années à partir d’une volonté


politique, devant la nécessité de créer une université supplémentaire dans la région. Le maire

187
de la ville A voyait également dans cette université un facteur de dynamisme pour la ville.
Elle bénéficie du soutien financier des collectivités territoriales depuis sa création.
Les formations et les bâtiments ont été créés mais elle restait sous la tutelle de
l’Université Nord. Six ans plus tard, elle devient une université de droit commun. C’est donc
une jeune université et de taille modeste, qui s’est développée très vite et a absorbé de
nombreuses réformes : LMD en 2004 vague B, LRU en 2009, ESR en 2014. Elle a également
contribué activement à créer un PRES en 2009. Aujourd’hui ce PRES est une COMUE
composée de trois universités et de deux écoles nationales supérieures. L’université A créée
sa fondation en 2009 également, qui compte 21 partenaires.
Beaucoup de répondants sont arrivés à la création de l’université. Ils ont été recrutés
par l’université de tutelle, l’Université Nord, et ont été chargés de mettre en place et de
développer toutes les formations. C’était un vrai choix de leur part de prendre part à la
création d’une université
Si aujourd’hui l’Université A se porte très bien, cela n’a pas toujours été le cas. Son
existence a été remise en cause car elle fonctionnait mal. Sur la période 2004-2008, elle
perdait des étudiants dans un contexte national où toutes les universités de France étaient
touchées par les conséquences d'un creux démographique (moins de jeunes se trouvant en âge
d'accéder à l'enseignement supérieur). Sa situation est très critique. Un administrateur a alors
été nommé pour envisager les modalités de sa fermeture, peu après sa création. Mais c’était
trop tard.

 L’élection du Président actuel, un tournant dans l’histoire de l’Université A

L’histoire de l’Université A connaît un tournant avec l’élection de l’actuel Président


en 2008 (qui réalise au moment de l’étude son deuxième mandat). Le Président, à l’époque
candidat, présente le passage au RCE comme un moyen de sauver l’université. Il a été élu en
2008 sur ce projet, sans opposition. Le passage aux RCE a été réalisé dès 2009 en dépit des
recommandations de l'IGAENR, mais avec une forte adhésion du personnel (enseignant et
administratif). Dès lors, l’application de la loi LRU en 2009 n’a rencontré que peu de
résistance auprès des EC. La réforme du statut des EC au même moment a rencontré peu de
résistance, comparativement à la mobilisation qu’ont pu connaître d’autres universités
françaises.
« On n’a pas été très perturbé à l’Université A au niveau de la prise d’autonomie, de la même
manière qu’on n’a pas été très très perturbé au moment de la mise en place à peu près à la même
période, du changement de statuts des enseignants chercheurs. Il y a eu un peu de grève, on a pas

188
eu de bris de glace, pas de chaises jetées dans les vitres, il n’y a pas eu de grève longue et dure, le
président n’a pas été pris en otage dans son bureau » (A3).

Le Directeur Général des Services (DGS) nous confie qu’au moment de la loi LRU, il
y avait une volonté construite par la présidence de précéder le souhait du ministère en se
portant volontaire pour accéder aux RCE dès la première vague de sa mise en application.
Selon le DGS, la plupart des EC et des personnels administratifs partageaient la volonté de
faire réussir cette « petite université qui pourrait se sentir menacée parce que c’est une petite
université ».
Quatre ans après le passage aux RCE, le nombre d’étudiants a progressé de 20 %,
alors que la dynamique nationale est à la stagnation, voire la diminution, en particulier dans la
région où se trouve l’université A. Le président explique cette progression en partie grâce aux
bons taux d'intégration professionnelle des étudiants. En 2012, 86 % des diplômés de masters
2 professionnels accèdent à leur premier emploi au maximum trois mois après leur fin
d'études.

 Une université qui se veut « professionnalisante »

En effet, l’Université A Elle est qualifiée d’université « professionnalisante » car plus


de la moitié des formations sont des formations professionnelles et « de proximité ». A ce
propos, le maire souligne que l’Université A a réussi à développer ses niches d’excellence
tout en facilitant l'accès aux études pour les enfants des familles de l'agglomération. Elle
affiche en 2012 l’un des meilleurs taux de réussite, taux d’insertion professionnelle et taux
d’évolution du nombre d’étudiants inscrits de toutes les universités françaises.
L'université a mis en place un bureau d'aide à l'insertion professionnelle destiné à
accompagner les étudiants à trouver un emploi.
Le Président affirme vouloir proposer un nouveau modèle d’université, alliant
excellence scientifique, université de proximité et insertion professionnelle. Ainsi,
l’investissement de l’équipe présidentielle (reposant en particulier sur le tandem
Président/Directeur Général des Services) pour collaborer avec le milieu socio-économique
est reconnu par les acteurs économiques locaux, les collectivités territoriales et l’AERES. Les
experts de l’AERES notent en 2011 un pilotage de l'offre de formation qui correspond aux
besoins économiques locaux, des possibilités financières, des compétences humaines
présentes dans l'établissement et de la stratégie de positionnement décidée par les instances de
l’Université A.

189
 Une stratégie de différenciation

La stratégie en termes de recherche repose sur une démarche de différenciation afin de


construire une identité et d’affirmer un positionnement spécifique par rapport aux grandes
universités voisines, d’autant plus qu’étant située dans une petite ville, elle dispose d’une
faible notoriété au-delà de la communauté urbaine.
La thématique de recherche privilégiée depuis le contrat quadriennal 2008-2011 est
une thématique qui se veut en phase avec les grandes problématiques sociétales, à savoir le
développement durable. Ce thème a une résonnance particulière dans la Ville A, qui porte une
image de ville écologique.
Deux pôles de recherche pluridisciplinaire (mais à dominante sciences « dures » :
sciences chimiques et technologies) ont reçu des évaluations relativement favorables de la
part de l’AERES en 2011.
Cette stratégie de recherche se décline par une politique de recherche incitative.
L'allocation des crédits de recherche est décidée sur critère de performance des Unités de
Recherche en se basant sur le principe du modèle SYMPA : pourcentage d'EC publiants,
évaluation AERES du laboratoire et domaines disciplinaire concernés. En parallèle des crédits
récurrents, une part importante et croissante des moyens (passant de 100 000 à 300 000 € de
2008 à 2011) est distribuée au titre de soutien aux initiatives, en particulier sous forme de
projets de recherche qui s’inscrivent dans la thématique stratégique affichée par l’université et
d'allocations post-doctorales.

 Un mode de management participatif

La stratégie développée a fait l'objet d'une concertation entre la présidence et les


différentes instances de l'université A (composantes et directeurs d'études). En effet, depuis
l’élection de l’actuel président en 2008, un bureau a été mise en place, dont les réunions sont
hebdomadaires, regroupant l’équipe présidentielle, composée du Président, du DGS, des vice-
présidents, et des chargés de mission, des directeurs des composantes et de l’IUT, et l’agent
comptable. Les décisions et les projets concernant l’université sont discutés lors des réunions
de cette équipe. Les directeurs de composantes que nous avons interrogés apprécient ce mode
de gouvernance qui permet de les associer au pilotage de l’université :

190
« Il y a une volonté de travailler en commun d’avoir cette vision commune sur nos atouts aussi
sur nos faiblesses […]. Donc ça c’était un gros progrès et c’est vrai qu’on partage des choses,
qu’on anticipe beaucoup, je crois que ça contribue d’une certaine façon à une certaine
performance » (A19, Directeur de composante).

Par ailleurs, le président est également régulièrement invité (accompagné du DGS) dans
les composantes afin de répondre directement aux questions que se posent les EC.
« À l'université de A, on a mis en place pas mal d'instances qui permettaient de faire passer,
d'apprécier, d'évaluer et de recueillir l'avis précisément sur des dossiers à de multiples niveaux. Je
pense aux réunions présidentielles qui sont hebdomadaires. Il y a des comités de suivis de l'offre
de formation, il y a une commission de moyen, il y a effectivement différents conseils auxquels…
qu'on y soit élu ou pas, appelle par notre présence. Moi en tant qu'invité et toutes les, et différentes
commissions qui également sont là pour arriver à faire la synthèse des propositions des différentes
UFR des pôles plus aujourd'hui l'IUT et puis il y a les réunions internes à l'UFR, c'est-à-dire
celles qui ont lieu les jeudis ici, les directeurs de départements essentiellement, les responsables
administratifs. Il existe aussi les conseils de l'UFR et puis on a mis ici en place une commission
qui permet également de discuter avec le personnel [administratif] surtout les problèmes qu'il
rencontre, sur aussi les attentes » (A16, Directeur de composante).

Ce mode de management participatif permet aux directeurs de composantes de se faire


les relais de la gouvernance auprès des responsables des formations pour assurer l'application
de ces directives des décisions prises la Présidence.

 Les composantes étudiées

Parmi les quatre composantes que regroupe l’Université A, nous avons étudié la
composante Droit-Gestion et la composante LLASH.
La composante Droit-Gestion est une UFR composée d’une faculté de droit et d’un
institut de gestion. Elle compte moins de 1 800 étudiants et 35 EC. La faculté de Droit était la
première composante installée dans la ville A, sous tutelle de l’Université Nord-Grande.
L’institut de gestion a rejoint physiquement le campus universitaire depuis peu (moins de dix
ans). Auparavant, il était situé de l’autre côté de la ville. La cohabitation de ces deux
disciplines au sein d’une même UFR se passe bien, probablement car l’institut possède son
propre directeur et le doyen ne s’impose pas dans la gestion de l’institut. Géographiquement,
les deux bâtiments sont situés à 100 mètres l’un de l’autre. L'UFR de Droit est associé à
quatre structures de recherche, dont une en partenariat avec l’Université Nord-Grande.
L’UFR LLASH est composée de trois départements ayant chacun un directeur :
Langues étrangères appliquées, Lettres modernes, Sciences humaines et sociales. Elle compte
moins de 1 900 étudiants et 40 EC. Elle est associée à trois structures de recherche, dont une
en partenariat avec une grande université d’une académie voisine.

191
Section 2 : Réponses aux QR

2.1. Types de comportements (envers l’organisation et envers la profession) que les EC


adoptent dans le cadre de leur mobilisation collective (QR1)

2.1.1. Point de vue des dirigeants

Le Président nous confie compter sur la mobilisation de tous les EC pour adhérer aux projets
entrepris pour l’université A (loyauté organisationnelle). En effet, dans le cadre de l’accès aux
Responsabilités et Compétences Élargies, communément appelé « l’autonomie », l’équipe de
direction de l’université entreprend de nombreuses évaluations, audits et enquêtes, qui sont
des démarches managériales apportant un surcroit de travail aux EC, et qu’il faut expliquer :

Encadré 1 : Cas A - Une nouvelle démarche managériale


A20, Président
« On revendique une démarche managériale au sein de l’établissement, c’est-à-dire on
définit une stratégie et derrière on met en place des moyens au service de cette stratégie. […]
Aujourd’hui je crois que sur mes trois UFR il y a vraiment une conception commune de ce
que doit être le fonctionnement de l’université et la démarche managériale. Voilà, les directeurs
d’UFR il n’y a pas de soucis, on n’a pas encore effectivement diffusé, les collègues le
comprennent, ils comprennent bien ce que l’on veut faire, de là à vous dire qu’il l’on accepté c’est
pas encore le cas mais c’est en train de basculer, parce que là pour tout vous dire, dans le
contexte actuel, on vient de se permettre de baisser… de geler 25% de nos crédits et ça n’a
provoqué quoi que ce soit, aucune réaction vive, il y a du dialogue, il y a de la discussion. Donc ça
veut dire que culturellement, ça y est, on commence un petit peu à échanger et à admettre ce
principe managérial, même si le mot a longtemps heurté, il n’apporte plus aujourd’hui… enfin en
interne, quand je l’emploie, parfois je vois un petit peu des regards inquiets, des regards hostiles
mais voilà, voilà un petit peu où on en est. […]
On a eu plusieurs fois des visites, soit parce que je les ai demandées, soit parce que j’ai
accepté que ça se fasse chez moi, de l’inspection générale, sur la partie RH, sur la partie
budgétaire, je crois qu’on a à peu près répondu à tout le monde, à la cour des comptes, il y a eu
tout le monde, donc à chaque fois effectivement, c’était dans le cadre du passage à l’autonomie,
comme on a été l’une des premières universités, on fait partie de la petite vingtaine d’université,
on a un tout petit peu de recul par rapport à ça donc c’est vrai qu’on est souvent sollicité. Mais on
n’a pas toujours eu d’ailleurs les retours d’enquêtes. On se prête volontiers à l’exercice mais on
n’a pas forcément de retour. […]
On a beaucoup expliqué, je veux dire il y a eu beaucoup d’informations, vous savez les
enseignants, enfin je sais de quoi je parle puisque j’étais enseignant-chercheur pendant
longtemps, dès lors qu’on est impliqué dans certaines activités qui ne sont pas dans le cadre, c’est
considéré comme des choses… c’est de la perte de temps, on le fait, on ne le fait pas, on ne se pose
pas trop de questions, donc ça aussi c’est un vrai problème, c’est comment amener les collègues à
se sentir concerner par toutes ces enquêtes-là, pour leur faire comprendre qu’on est dans des
démarches qualité, on est plus dans des démarches qualités que d’évaluation, le mot évaluation
gêne tout le monde, on est plus dans des démarches qualité, de savoir ce qui va ou ce qui ne va
pas. »

192
A16, directeur de composante souligne qu’il y une volonté très forte de la part de l’équipe
dirigeante d’améliorer la performance de l’Université A mais qu’il est difficile d’atteindre
cette performance sans la mobilisation collective des EC :
« Donc la performance c'est initialement une définition critique des objectifs. Après, voir comment
on utilise les moyens et ces moyens sont une évaluation des résultats et avec bien sûr toutes les
procédures d'évaluations de l'existant, évaluation du projet, évaluation des applications etc. On a
fait beaucoup ça sur les formations et puis on se heurte toujours toujours, sur la plupart des
projets, précisément aux aspects qui consiste à mobiliser des forces et des bonnes volontés pour
pouvoir s'investir dans la réalisation de ces projets et s'il y a des difficultés c'est là. Donc ce n'est
peut-être pas une vision critique sur l'aspect politique, il y a un dynamisme très très fort c'est-à-
dire en fin de compte en terme d'intention, dont on sait qu’elles ne doivent pas rester des
intentions » (A16).

2.1.2. Description des dimensions et orientations de la mobilisation collective

D’une manière globale, 12 répondants soulignent que travailler collectivement leur apporte
satisfaction et/ou est bénéfique pour l’établissement.

Les trois orientations de la mobilisation collective identifiées dans la littérature (efforts


d’amélioration continue, efforts de collaboration spontanée, efforts d’alignement stratégique)
se retrouvent dans le discours des répondants.
L’orientation individuelle de la mobilisation collective, à savoir les efforts d’amélioration
continue, est présente à travers les dimensions :
- dévouement dans le travail (5/19) :
« je bosse à la maison » (A2), « je fais des heures supplémentaires » (A4) ;

- amélioration continue (4/19) :


« un enseignement et une recherche de qualité » (A1), « quelqu'un qui travaille sur des projets de
diplôme, sur des projets de formations, sur des projets d'amélioration d'information des étudiants,
qui produit des idées, quelqu'un qui réfléchit sur les modalités pédagogiques, quelqu'un qui
s'investit dans la pédagogie, quelqu'un qui veut créer des diplômes » (A11) ;

- rôle prescrit (3/19) :


« faire des TD, faire des cours, essayer de les faire bien » (A10) ;

- amélioration des compétences (1/19) :


« se tenir au courant de tout ce qui est recherche dans son domaine » (A18).

193
L’orientation collective, c’est-à-dire les efforts de collaboration spontanée, implique les
dimensions suivantes :
- facilitation interpersonnelle (8/19) :
« essayer de le faire partager, participer aux initiatives du collectif » (A18), « discuter avec le personnel
[administratif], surtout les problèmes qu'il rencontre » (A16) ;

- coordination avec les autres (6/19) :


« s'il est responsable de formations [l’EC mobilisé] par exemple de mettre en place des réunions,
de faire le point régulièrement sur les étudiants, sur la formation, sur des choses comme ça »
(A14) : « essayer de m'adapter au discours et d'avoir une ligne de conduite en fait » (A10) ;
« créer du collectif ça veut dire par exemple tous les supports sont communs, chacun puise
dedans, enrichi, il y a une diffusion de l’information » (A8) ;

- travail en équipe (4/19) :


« privilégier le travail d’équipe plutôt que le travail individuel » (A2) ;

- aide apportée aux autres (1/19) :


« filer un coup de main à un prof » (A5).

La dernière orientation, l’orientation organisationnelle, qui consiste à fournir des efforts


d’alignement stratégique, est présente dans les discours à travers les dimensions suivantes :

- participation à la vie civique (10/19). Cette dimension regroupe plusieurs types d’efforts
effectués en direction de l’organisation. D’une part, on y trouve les « responsabilités
administratives » (A14) qui servent à faire vivre l’université : « diriger des départements, être
responsables des formations, aller au CEVU, aller au CA à faire vivre l’université tout
simplement on a besoin de nous pour la faire vivre » (A17), c’est-à-dire les « responsabilités
de direction » (A16) de l’enseignement (de formation, de composante, de département, etc.)
ou de la recherche (de centre de recherche : « s’engager dans les entités administratives, qui
organisent des manifestations scientifiques » (A11)), et des responsabilités de mandats (les
organes de représentations). La dimension organisationnelle recouvre également des efforts
type « corriger les examens, surveiller les examens » (A12), « moi je me mobilise quand il y a
les journées portes ouvertes » (A18), « être présent aux réunions » (A13) ;
- orientation vers les usagers (4/19) :
« Être solidaire avec les étudiants » (A1), « aider les étudiants » (A4), « il y en a d'autres qui sont
mobilisés sur l'étudiant, la vie de l'étudiant, les différentes difficultés qu'ils rencontrent à
l’Université A » (A12) ;

- loyauté organisationnelle (2/19) :

194
« être solidaire avec l’université afin qu’elle fonctionne pour le mieux » (A1).

- amélioration continue (2/19) :


« Alors c’est moi qui ai mis en place personnellement [un système de documents partagés qui
permet de suivre l'insertion professionnelle des étudiants], à titre expérimental et en parallèle
j’anime un groupe de travail à l’université sur ce sujet » (A7)

Pour résumer, certains types d’efforts sont entrepris dans une intention (c’est-à-dire une
orientation) précise. Par exemple, lorsqu’un EC explique être dévoué dans son travail,
l’orientation de ces efforts est souvent individuelle. Par contre lorsqu’il dit participer à la vie
civique de l’université, ses efforts sont explicitement tournés vers l’organisation :
« Cette mobilisation je la fournis parce que j’estime que c’est important pour les étudiants et aussi
pour l’institution, pour qu’elle ait une meilleure image » (A2) ;
« J’ai envie que ça marche la maison, de travailler pour l’entreprise Université A » (A18).

Il est important de nuancer ce qui vient d’être dit. Par exemple, s’il est clair qu’aligner ses
recherches sur les axes stratégiques de l’université est un effort relevant de la dimension
organisationnelle, assister aux « Journées Portes Ouvertes » peut être un effort conduit au nom
de la performance de l’université en termes d’attraction des étudiants (orientation
organisationnelle), mais également au nom du bon fonctionnement de la composante ou de la
survie des diplômes (orientation organisationnelle ou collective ?), pour rendre service à des
collègues qui ne peuvent pas venir (orientation collective) ou au nom de la conscience
professionnelle et de la mission de service public (logiques professionnelles et valeurs
publiques).

Ainsi, nous proposons un regroupement des dimensions les plus souvent associées aux
orientations. Les dimensions et les orientations correspondantes sont synthétisées dans le
tableau 27.

Tableau 27 : Cas A - Dimensions et orientations de la mobilisation collective (QR1)

Mobilisation collective
Orientation
Orientation individuelle Orientation collective
organisationnelle
- Dévouement dans le travail
- Facilitation interpersonnelle - Participation à la vie civique
- Amélioration continue
- Coordination avec les autres - Loyauté organisationnelle
Dimensions - Rôle prescrit
- Travailler en équipe - Orientation vers les usagers
- Amélioration des
- Aide apportée aux autres - Amélioration continue
compétences

195
En admettant que l’occurrence d’un élément dans un discours reflète l’importance que le
répondant accorde à cet élément, il apparait que les répondants n’accordent pas une
importance identique aux trois orientations de la mobilisation collective lorsqu’ils la
définissent. Certains accordent plus d’importance à l’orientation organisationnelle, d’autres à
l’orientation collective, et d’autres à l’orientation individuelle64.
L’orientation de la mobilisation est répartie de la manière suivante : la majorité des
répondants focalise son discours sur l’orientation collective de la mobilisation (9/19), un peu
plus d’un tiers sur l’orientation organisationnelle (6/19), et une minorité donne la priorité à
l’orientation individuelle (4/19).

2.1.3. Niveau groupal de référence de la mobilisation collective

La mobilisation collective s’envisage plus aisément à un autre niveau que l’Université : pour
certains ce sera la composante, entendue comme l’UFR ou le département, pour d’autres le
laboratoire, voire même la profession :
« elle n’existe pas en soi l’université, c’est qu’une somme d’individualités, après c’est à chacun
de faire sa place et de se donner les moyens » (A7).

L’orientation organisationnelle est floue. Les enseignants-chercheurs ont divers points


d’attachement (composante, laboratoire, université, profession) et il est difficile de les
différencier en termes d’orientation des efforts. C’est pourquoi, afin de comprendre et
d’expliquer la mobilisation collective des EC, il est indispensable de les interroger sur leurs
intentions, leurs motivations et leur engagement. En effet, pour les EC, l’ « organisation »
peut faire référence à l’établissement universitaire, et/ou à composante, au département, au
centre de recherche, ou même à la profession ou l’équipe de travail. Le terme « université »
peut également renvoyer à toutes ces entités, et à la profession universitaire. Pour parler de
l’organisation telle que nous l’entendons dans la recherche, les EC emploient le mot
« établissement ». L’établissement est matérialisé par les locaux de l’administration centrale
et dirigé par l’équipe Présidentielle (le Président et les vice-présidents). Par conséquent, nous
emprunterons le vocabulaire des répondants afin de rester fidèle à leur interprétation. Dès
lors, lorsque nous parlerons d’engagement organisationnel il s’agira de l’engagement
envers l’établissement. Nous les avons donc interrogés sur l’entité envers qui ils fournissent

64
Le logiciel Nvivo 10 fournit la part du discours consacré à chaque élément codé, ce qui nous a permis d’établir
des comparaisons entre les trois orientations par répondant.

196
leurs efforts de mobilisation collective. Les résultats sont synthétisés par répondant dans le
tableau 28.

Tableau 28 : Cas A – Description de la mobilisation collective, matrice par répondant (QR1)


Mobilisation collective
Répondants
Dimensions Orientations Niveau groupal
Amélioration continue
A1 / PR / DROIT / Collective +++
Facilitation interpersonnelle
ADMENS ADMRECH Individuelle ++ UFR
Loyauté organisationnelle
MAND / EA DROIT Organisationnelle +
Orientation vers l’usager
A2 / MCF / GESTION Dévouement dans le travail
Individuelle ++
ADMENS / MAND / EA Travailler en équipe Département
Collective +
GESTION Vie civique
A3 / MCF / GESTION / Organisationnelle +++
DIRCOMP MANDAT / EA Amélioration continue Collective ++ Ensemble
GESTION Individuelle +
Dévouement
A4 / DOCTO / HIST / Amélioration continue Individuelle +++
CENTRE HIST Travailler en équipe Collective ++ UFR
Facilitation interpersonnelle Organisationnelle +
Orientation vers l’usager
Amélioration continue
Composante et
A5 / DOCTO / HIST Coordination Collective ++
centre de
CENTRE HIST Aide aux collègues Individuelle +
recherche
Facilitation interpersonnelle
A6 / MCF / DROIT Collective ++
Dévouement Equipe de travail
ADMENS / EA DROIT Individuelle +
A7 / MCF / GEO / Dévouement Organisationnelle ++
NSP-2
ADMENS / UMR ENV Amélioration continue Individuelle +
A8 / MCF GESTION / EA Coordination
Collective Université
GESTION Facilitation interpersonnelle
A9 / PR / GESTION
ADMENS MAND / EA Rôle prescrit Individuelle NSP-2
GESTION
A10 / DOCTO / DROIT EA Rôle prescrit Collective ++ Centre de
DROIT coordination Individuelle + recherche
Amélioration continue
Individuelle +++
A11 / PR / DROIT / Coordination
Collective++ Profession
EXTERNE Travail en équipe
Organisationnelle+
Vie civique
A12 / MCF DROIT / Orientation vers l’usager Organisationnelle ++
Université
ADMENS / EA DROIT Vie civique Collective +
A13 / MCF / GEO / Profession
Facilitation interpersonnelle Collective ++
DIRREC MAND / UMR
Vie civique Organisationnelle +
ENV
Dévouement Collective +++
A14 / MCF / GESTION /
Coordination Individuelle ++ NSP-2
ADMENS / EA GESTION
Vie civique Organisationnelle +
A15 / PR / HIST / Facilitation interpersonnelle Collective ++
NSP-2
ADMENS / CENTRE HIST Vie civique Organisationnelle +
A16 / PR / ANTHRO Rôle prescrit Organisationnelle +++ NSP-1
DIRCOMP / CENTRE Facilitation interpersonnelle Collective ++
HIST Vie civique Individuelle +
A17 / PR / LETTRES
Travailler en équipe Collective ++
DIRCOMP / UMR Département
Vie civique Organisationnelle +
CNRS/ENS LETTRES

197
Amélioration des compétences
Facilitation interpersonnelle Organisationnelle +++
A18 / MCF / LETTRES
Coordination Collective ++ Département
ADMENS / CENTRE HIST
Vie civique Individuelle +
Loyauté organisationnelle
A19 / PR / DROIT
Vie civique Organisationnelle NSP-1
DIRCOMP / EA GESTION
A20 / PRESIDENT NC
A21 / VICE-PRESIDENT NC
NSP : Ne Sais Pas
NSP-1 : Question non posée à l’informateur
NSP-2 : Question posée, laissé sans réponse (a dévié de la question)
NSP-3 : Réponse ambiguë
NC : Non Concerné par l’étude

2.1.4. Comment encourager la mobilisation collective

« Je ne sais pas comment on pourrait mettre ça en place [des outils de mobilisation], mais il
faudrait y réfléchir, enfin je sais qu’il y a la volonté d’y réfléchir à l’Université A, ça serait
d’avoir une sorte de pendant la prime d’excellence scientifique, la prime d’excellence
scientifique elle récompense finalement un investissement particulièrement fort, individuel, voir
aussi parce que dans les critères d’évaluation, la PES, la prime d’allocation scientifique, il y a
aussi l’investissement collectif, dans la direction d’un laboratoire, dans la direction d’un projet de
recherche etc… Donc c’est pris en compte, donc on pourrait avoir un pendant qui serait une sorte
de de prime pour un travail pédagogique particulièrement marqué, donc ça après, ça serait, on
donnerait la prime d’excellence scientifique et d’excellence pédagogique, et ça je pense que ça
peut-être une bonne idée » (A19)

Les thèmes les plus fréquemment cités par les EC appartiennent au champ de la gestion
des ressources humaines, entendue comme « un corps de connaissance et un ensemble
d’activités déployées dans les organisations, interdépendantes de ces connaissances. Ces
activités regroupent aussi bien des discours sur des sujets tels que le recrutement, la
rémunération, la formation, etc. et des pratiques issues de ces sujets » (Bournois et Brabet,
1993, cité par Pichault et Nizet (2013 : 11). Le thème le plus fréquemment cité concerne la
reconnaissance : 17 répondants abordent ce thème (tableau 29). Il est souvent lié de manière
négative à la mobilisation collective dans les discours. La catégorie « reconnaissance » est
découpé en deux sous-catégories : la reconnaissance pécuniaire (RP) et la reconnaissance non
pécuniaire (RNP).

198
Tableau 29 : Cas A - Synthèse des verbatim sur les moyens d'encourager la mobilisation
collective (QR1)
Catégorie Fe65 Occ66 Explication
Reconnaissance non 14 48 Manque de reconnaissance des efforts de mobilisation
pécuniaire (RNP) collective, manque de reconnaissance des activités
d’enseignement.
Reconnaissance pécuniaire 12 21 Salaire jugé peu équitable par rapport à d’autres professions et
(RP) par rapport aux EC d’autres pays et du système privé français
Primes peu discriminantes entre les EC mobilisés et les autres
Leadership/ 5 9 La mobilisation collective est portée par le directeur de
management composante et/ou un leader
Espace de mobilisation 3 4 Réunir autour de la recherche, de l’enseignement, partager les
ressources
Accompagnement dans le 2 2 Accompagnement/soutien à la pédagogie (à travers des ateliers)
travail et à la recherche de la part de l’établissement
Projet d’établissement 1 1 Financement des projets de recherche pour stimuler la
publication
Feed back formatif 1 1 Evaluation des enseignements par les étudiants

Le manque de reconnaissance pécuniaire est abordé en termes d’un défaut d’équité


salariale, et en termes de primes peu encourageantes, qui nuisent à la mobilisation collective.

Primes peu encourageantes :


« Je ne peux pas cumuler des primes pour plusieurs fonctions, est-ce que ça incite les gens à avoir
plusieurs fonctions ? » (A1) ;
« La question de la performance aussi, c’est la question des récompenses et donc du système
indemnitaire, si vous êtes performant vous devez être récompensé » (A9).

En termes d’équité salariale, les EC comparent leur rémunération en interne et soulignent que
les efforts de mobilisation collective ainsi que la performance individuelle sont peu, voire pas
récompensés, ce qui ne distinguent pas les EC mobilisés et performants de ceux qui ne le sont
pas :
« C’est aussi le revers du métier, c’est-à-dire qu’on a le sentiment qu’il y a peu de
reconnaissance par rapport à ce que l’on peut faire. C’est-à-dire que celui qui joue au tennis et
que celui qui va avoir en charge des responsabilités de formations, ou publier, ou faire des
recherches significatives etc…. Globalement de toute façon il n'y a pas beaucoup de récompense
entre guillemets […]. De toutes façons celui qui fait du tennis, ou celui qui donne à son institution
entre guillemets il y a pas grand écart » (A14).

Les répondants qui abordent ce thème comparent également leur rémunération en externe : à
des EC à l’étranger ou dans le privé (écoles de commerce), mais également à d’autres
métiers :

65
Fe = Fréquence
66
Occ =Occurrence

199
« J’entendais un camionneur qui était payé 2 400 euros. Moi ils ont pris une partie d’ancienneté
avec cinq ans d’ancienneté, je ne fais même pas ça 2 100 et quelques. Dans la société où on a l’air
de dire que c’est ça qui est la réussite etc… et bien ça montre que la société ne nous considère
pas » (A18).

Ainsi, les EC qui estiment que d’autres personnes sont mieux rémunérées (que ce soit en
interne, en externe ou des personnes appartenant à d’autres métiers) et en déduisent que la
société ne les estime pas. Ce sentiment de manque de reconnaissance est un thème qui prend
beaucoup de place dans les discours (fréquence : 14 ; occurrence : 48).

Le manque de reconnaissance se ressent à plusieurs niveaux. Tout d’abord, huit EC


abordent un manque de reconnaissance des résultats de leur travail en particulier les activités
d’enseignement et les activités administratives, au profit des activités de recherche :
« Sur l'aspect de l'enseignement, de la pédagogie ou de l'administratif, surtout l'administratif, rien
de comparable [avec la PES], donc les collègues qui s'investissent administrativement dans le
travail de coordination pédagogique etc. sont… on va dire presque laissés pour compte, et au bout
du compte ce n'est pas la peine de s'investir administrativement ou faire de l'enseignement
pédagogique etc., parce que si je me consacre entièrement à la recherche je pourrais avoir une
reconnaissance de cette PES intéressante sur le point de vue financier et de la reconnaissance de
carrière » (A16).

Ensuite, huit EC ressentent un manque de reconnaissance de leur mobilisation collective :


« Les gens qui sont eux dans la dimension… plus on va dire un peu plus enfin… d’une idéologie
collective passent très vite pour des pigeons, pour des sacrifiés, ça leur colle à la peau, et en même
temps ce sont des gens qui en général n’ont pas beaucoup finalement de considération ni de la
part de la structure ni de la part des collègues et voilà c’est le mal nécessaire » (A13).

Six EC soulignent un manque de reconnaissance existentielle :


« On en a marre d'être pris pour des fainéants, des gens à qui on ne peut pas faire confiance. Je
trouve que c'est aberrant. Je trouve qu’on est dans un système… dans un système j'ai envie de
dire… je pense qu'on a été dans une politique où globalement on est sans arrêt suspecté et c'est
odieux. Je trouve que c'est odieux parce que je veux dire… on est des gens qui, bien sûr on va
toujours trouver des cas particuliers, avec des gens qui… bien sûr on va toujours trouver
l'enseignant qui… en général d'ailleurs des gens qui sont plutôt des gens qui ont des problèmes
par ailleurs, que ce soit des problèmes psychologiques… enfin on va trouver quelques gens qui
abusent entre guillemets du système mais moi la plupart des gens, des collègues que je vois en
général, ce sont des gens qui se donnent dans leur métier, qui ne sont pas des gens tirs-au flan et
on est dans un système où globalement… je ne sais pas… on est sans arrêt en train de nous
renvoyer cette image que globalement on fait mal notre boulot, qu'on en fait pas assez. Mais c'est
tout le discours actuel » (A13).

Enfin, deux EC en Droit regrettent le manque de reconnaissance des recherches collectives,


alors que ces recherches collectives permettent de créer un climat favorable à la mobilisation
collective :
« Nous [les EC en Droit], on travaille encore de manière individuelle, et ce travail individuel on
peut le dire aujourd’hui c’est le seul qui soit valorisé au niveau des instances nationales, je pense
au Conseil National des Universités. Si vous présentez un dossier, par exemple un dossier

200
d’avancement, si vous n’avez que des ouvrages collectifs, votre recherche n’est pas reconnue. Il
faut que les articles soient individuels, que l’ouvrage soit individuel, l’ouvrage collectif n’est pas
reconnu encore en Droit » (A1).

Ils ressentent un manque de reconnaissance de la part de leur université d’appartenance.


Certains comparent une fois encore leur situation à l’université aux conditions existantes dans
le secteur privé :
« Je me paie moi-même mes colloques et je pars à Porto sur mes propres deniers, je pars en
Pologne, je suis prise à des colloques internationaux dans des comités de lecture, enfin tout ce
qu’on demande-là, classé bien comme il faut. Voilà c’est moi qui paie. Personne ne participe, je
n’ai jamais eu cette question à me poser quand je travaillais dans les entreprises privées, au
contraire on aurait été content que mon travail justifie cette reconnaissance en international
même si elle n’est pas encore grandiose, voilà » (A18).

Cette comparaison avec le secteur privé est particulièrement présente chez les EC provenant
de disciplines telles que la Gestion, où il existe une réelle concurrence :
« Si j’attendais que l’université m’aide à atteindre ses objectifs, très clairement je n’y arriverais
pas et là je pense qu’il y a quelque chose qui pour moi pose problème parce que dans le domaine
dans lequel j’enseigne, la gestion, il y a une concurrence très forte entre l’université et les écoles
de commerce. Les écoles de commerce donnent les moyens aux enseignants-chercheurs de faire de
la recherche et donc d’être performants dans ce domaine-là, en leur donnant notamment des
moyens financiers et en leur donnant des relations avec des entreprises pour avoir des terrains
faciles pour faire leurs recherches. Donc ça pour moi c’est vraiment là où ça pèche au niveau de
l’université parce que, d’une part, on est moins payé que dans les écoles de commerce, parce
qu'en école de commerce quand vous faites de la recherche vous êtes en plus incité à en faire
parce qu’on vous donne de l’argent au regard des publications que vous faites, c’est pas du tout le
cas à l’université et qu’en plus on vous donne voilà plus de moyens pour arriver à faire ces
recherches. Là, aujourd’hui, moi si j’arrive à faire de la performance c’est parce que j’ai trouvé
moi-même des moyens de financements, j’ai développé des projets avec par exemple avec
l’ADEME, ou avec des acteurs locaux sur des problématiques qu’ils peuvent avoir, et donc ça
veut dire que c’est moi qui ai donc développé tous ces efforts pour arriver à atteindre mes
objectifs » (A2).

Ce manque de reconnaissance engendre chez certains une certaine démobilisation (5/19) :


« Dans la structure [l’université] on n’est pas reconnu, on n'est pas reconnu, ils n’en voient pas
l’intérêt, ils pensent que ce n’est pas si intéressant que ça [les initiatives que nous leur proposons].
C’est bien une volonté aussi de cette performance individuelle, de la mettre au crédit au final de
l’université, moi j’ai l’impression qu’au final je suis dans cette démarche-là, est-ce-que c’est vu
comme ça j’en sais rien. Je pense que pour la faculté non ce n’est pas vu comme ça parce qu’on a
du mal à reconnaître ce que font ses alter-ego, ça c’est un vrai problème. […] Quand il [le Plan
Licence] a été mis en place à l’université A, on a été parmi l’un des pôles qui se sont lancés, donc
quelques collègues et moi. On a essayé de faire des choses d’innover etc., de faire des bilans…
enfin bref de jouer le jeu quoi… définir un cadre, le budgétiser, obtenir le budget adéquat ou pas.
A partir de ça, de produire des actions, d’en faire un bilan, moral, intellectuel, financier. Et on a
l’impression que tout ce travail qui a été fait, a été noyé dans la structure universitaire, qui elle-
même n’a pas fait remonter les informations au ministère. Officiellement on nous a soutenu quand
il fallait dire à tout le monde qu’on nous soutenait, et en réalité voilà, on a même fait l’inverse
mais enfin bon… Donc du coup, oui, démobilisation de point de vue-là » (A6).

Ils ressentent également ce manque de reconnaissance des activités d’enseignement et des


activités dites « administratives » de la part des instances nationales. Dès lors, lorsque les EC

201
fournissent des efforts concernant ces types d’activités, ils le font au nom de leur motivation
individuelle. Ainsi cette mobilisation collective n’est pas encouragée, ni par l’université, ni
par la communauté d’universitaires :
« Mais au niveau macro une université va être jugée davantage sur sa dimension recherche que sa
dimension formation parce que si vous avez des labos labélisés CNRS etc. c’est parce que vous
êtes performant en termes de recherche et pas en termes de formation. Et c’est ça qui va vous
donner une certaine aura, une certaine réputation, et qui va faire que vous allez attirer des gens
comme peut l’être le MIT aux USA et d’autres universités très connues de par le monde. […] On
n’est pas en fait évalué sur la performance de la prise en charge de cette dimension
administrative. Aujourd’hui par exemple, je suis coresponsable ici du master en marketing de j’ai
une rétribution financière par rapport à cette fonction mais si je mets en œuvre des choses qui sont
intéressantes pour les étudiants, qui sont originales, au-delà de la satisfaction personnelle que ça
peut m’apporter, je n’aurais aucune gratification du fait d’avoir mis en œuvre c’est choses-là,
donc c’est quelque chose qui relève simplement de ma volonté et donc cette mobilisation je la
fournie parce que j’estime que c’est important pour les étudiants et aussi pour l’institution, pour
qu’elle ait une meilleure image voilà » (A12).

Toutefois, ce manque de reconnaissance est un problème qui a déjà été soulevé au


niveau national. Une des solutions mise en place est la modulation des services67 qui permet
aux EC de « moduler » leurs services en décidant de consacrer plus d’heures de service à
l’enseignement (et les activés administratives connexes) ou à la recherche (et les activités
administratives connexes). Ainsi, ce référentiel d’équivalences horaires, a été bien accueilli
par les EC que nous avons rencontrés.

« Le projet de loi… comment ils appellent ça… de modulation des services, ce n’est pas quelque
chose qui est bien vu par les syndicats, alors qu’il faut être réaliste, moi je dis oui j’attends ça, ça
me paraît beaucoup plus sain et clair quoi, de donner la possibilité… mais à ceux qui le veulent,
de plus se forcer sur l’un des secteurs mais à condition que si on force sur l’enseignement il y ait
de la reconnaissance… mais je ne sais pas si ça c’est pas prévu » (A7).

Au niveau de l’Université A, A19, directeur de composante, souligne qu’il y a une volonté de


mettre en place un système interne de reconnaissance. Néanmoins, la mise en place est
difficile par manque de temps (encadré 2).

67
Le référentiel d’équivalences horaires a été établi en application du II de l’article 7 du décret 84-431 modifi2
et de l’arrêté du 31 juillet 2009. Il est mis en place depuis la rentrée 2010 et décliné dans tous les établissements.
Le référentiel vise à valoriser les activités pédagogiques des EC. Voir annexe 2.

202
Encadré 2 : Cas A - Le système de reconnaissance des responsabilités collectives
A19, directeur de composante
Pour ceux qui s’investissent dans l’équipe décanale, il y a des primes. Elle n'est peut-être
pas suffisante. Quand on voit le travail abattu par certains, on peut effectivement en douter.
Pour un assesseur, c’est 48 heures équivalent TD, on le décharge s'il le souhaite, plutôt que de
toucher la prime. Généralement les collègues préfèrent continuer à avoir leurs services complets,
donc faire leurs 192 heures équivalent TD et toucher la prime.
Cet investissement collectif est reconnu pour ce qui est des charges administratives par des
primes peut-être pas suffisantes. Bon, la prime de doyen est plus importante que celle des
assesseurs, bon j’ai aussi une décharge, il y a, on a travaillé aussi sur le référentiel enseignant-
chercheur, pour que des tâches nouvelles puissent entrer dans le service. Il y a ce qu’on appelle
aussi des PRP, des primes de responsabilités pédagogiques, donc les responsables, ceux qui
prennent des responsabilités de diplômes ont quand même des primes, on a essayé de faire en
sorte que ça ne soit pas saupoudré… enfin identifier des vraies fonctions, pour que les primes
soient plus importantes.
L’investissement, peut-être que ce n’est pas assez reconnu… l’investissement des collègues
dans les charges collectives. On pourrait convoquer comme ça, un certain nombre de critères,
pour dire, effectivement, ici valoriser cet investissement collectif plus sur le terrain pédagogique
que de la recherche, on crée comme ça quelque chose d’attractif. L’équipe présidentielle actuelle
avait avancé ça dès 2008, on n’a pas eu le temps de le mettre en place au regard de tous les
dossiers qu’il y avait à traiter pendant le mandat qui s’est écoulé. C’est certainement quelque
chose qui va revenir sur le tapis.

Enfin, nous remarquons qu’il s’agit de besoin de reconnaissance individuelle, et non pas
collective. Les répondants souhaitent que la reconnaissance ne soit plus égale mais équitable.
Ils soulignent également qu’une individualisation de la reconnaissance sera favorable à la
mobilisation collective :
« mettre en avant l’individualité dans le collectif » (A5) ;

« de toutes manières les intérêts collectifs ça n’existent pas il y a des moments où les intérêts
particuliers rencontrent une dimension collective » (A13) ;

« le fait de travailler pour soi peut servir au collectif, généralement c’est souvent ce qui ce passe
d’ailleurs le problème c’est que les choses ne sont pas si simples que ça et qu’il y a toujours cette
idée de la carotte, si je fais ça qu’est-ce que ça va me rapporter » (A4) ;

« on peut très bien ne pas vouloir bosser en équipe, bosser que pour sa pomme et de manière
détournée participer à la performance de son labo ce n’est pas incompatibles » (A5).

Pour résumer l’ensemble des propos recueillis sur ce thème, le manque de


reconnaissance se situe à plusieurs niveaux : un manque de reconnaissance pécuniaire et
un manque de reconnaissance en termes de carrière de la part de l’université (mais qui
dispose de très peu de marges de manœuvre au regard du système indemnitaire en
place) ; et un manque de reconnaissance de la part de la profession (représentée au
niveau national par des instances telles que le CNU par exemple). Ce manque de
reconnaissance concerne en particulier les efforts de mobilisations collective,
matérialisés par la prise de responsabilités administres (c’est-à-dire la participation à la

203
vie citoyenne) et par la prise d’initiatives pédagogiques (c’est-à-dire les efforts
d’amélioration continue).

Leadership

Nous avons réuni sous l’étiquette « leadership », d’une part les verbatim des
répondants qui soulignent que le leadership est un moteur de mobilisation collective. D’autre
part, les verbatim qui soulignent que le leadership du président en particulier et sa volonté
stratégique claire à vouloir sauver l’université ont généré une dynamique mobilisatrice.

D’une part, le leadership dépend du statut de l’EC (professeur), de sa renommée


scientifique, mais également de sa mobilisation :

« Ca [la mobilisation collective] dépend beaucoup du leader, ça ne dépend que de l’énergie du


leader, si vous avez, il y a des facs ou vous avez un grand prof qui a ses plans et qui arrive à
fédérer son clan par sa personnalité et par la culture, par son savoir, par ce qu’il a créé. Voilà, là
vous arrivez à trouver cette dynamique collective mais sinon il va falloir passer par des choses
plus subtiles » (A8) ;

« Ce sont les personnes qui ont le plus de responsabilités [les leaders] en ce moment et qui sont
les deux grands moteurs, ce sont aussi les deux seuls professeurs des universités en histoire
moderne et contemporaine attention et qui participent pleinement à la vie du laboratoire donc la
recherche tourne autour de leurs axes de recherche et un projet obtenu par un va attirer l’autre
dans cette direction pour sublimer et pour améliorer la performance globale » (A5).

D’autre part, le leadership est associé au dynamisme et à l’investissement du Président.


Ainsi, les EC se sont lancés « à corps perdus dans cette LRU » (A12), que le Président
présentait comme la seule façon de sauver l’université A, qui sortait par ailleurs « d’un
mandat totalement calamiteux de l’ancien président qui avait totalement coulé l’université »
(A12) à cause d’une mauvaise gestion. Dans ce contexte, l’identité de l’établissement s’est
forgée à travers le « slogan du président actuel : c’est une nouvelle génération d’université »
(A18).
L’ambition du Président était de modifier radicalement l’image que pouvaient avoir les
étudiants, les professeurs, les entreprises, de l’Université A, de construire l’identité de
l’université grâce à « une certaine dose d’innovation » et « une quasi obligation d’en faire un
peu plus que les autres » (A16). Ainsi, l’idée de s’engager dans un changement pour éviter de
disparaître a poussé la communauté universitaire à « se mobiliser pour une œuvre commune »
(DGS).

204
Certains EC mentionnent la « vision très claire » de la Présidence sur les moyens de la rendre
plus « efficiente » (A3). Dès lors, le Président donne des « consignes » qui sont bien acceptées
par les EC que nous avons rencontrés.
Plusieurs répondants ont une attitude très positive envers le Président, son équipe et les choix
qu’il a opérés :
« par rapport à la réforme des universités, on a eu de la chance quand on parle d'équipe… pour
moi on a eu la chance d'avoir un bon président avec X, qui au moment du passage… a fait des
choix, qui ont été très discutés, mais de muscler par exemple une équipe administrative pour gérer
justement cette autonomie. Ca été très mal perçu pour moi dans un premier temps, ça été un choix
vraiment… un choix excellent puisqu'il a permis vraiment d'armer cette fac pour qu'elle ait les
moyens de son autonomie » (A13).

Management de proximité :

Les répondants qui abordent ce thème considèrent que le directeur de composante porte la
mobilisation collective. Ce sont en particulier les directeurs de composantes qui estiment
qu’ils ont un rôle primordial à jouer pour encourager la mobilisation collective de leurs
collègues, en communicant, en étant bienveillant, etc. :

« En premier lieu le directeur de l'UFR il a intérêt lui à être de bonne position autrement il aurait du mal
à dialoguer avec tout le monde » (A16) ;

« Quand je fais les emplois du temps je dis voilà, il faut que les critères de chacun soient
respectés. Déjà aucun n’a les mêmes critères. Certains ont des enfants en bas-âge, certains ont
des enfants plus grands, d’autres n’ont pas d’enfants, d’autres font du sport, d’autres font des
activités, du théâtre et ça tombe rarement en même temps et je me dis un truc tout bête, c’est que si
les gens dès le départ on respecte leurs vœux pour l’emploi du temps ces gens se sentiront mieux
ils viendront travailler de façon volontaire plutôt que de se dire on m’a obligé à venir à 8h, de
coller mon gosse à la crèche à 7h30, sachant que la crèche n’ouvre qu’à 8h, il faut trouver
quelqu’un pour le garder de 7h30 à 8h, si c’est un bébé il faut le lever à 6h30… Ca entraine toutes
sortes de trucs et on arrive au boulot on est énervé parce que la nuit qui a précédé est déjà
tellement énervante qu’on arrive énervé au boulot alors que vous dites tu veux commencer à 9h
d’accord tu commenceras à 9h tu poses ton gosse à 8h30 à la crèche tu n’es pas énervé tu n’as
pas eu de stress et généralement l’enseignant travaille beaucoup mieux c’est aussi une notion de
plaisir d’aller au travail parce que ça se partage. Je sais que tout le monde va arriver en étant
plus détendu plus gai, en étant plus heureux de venir au travail parce que le travail ne suscite pas
des soucis. Le travail au départ ne devrait pas susciter des soucis des gênes, des choses comme ça
parce que ce n’est pas le but du travail, d’autant plus que ça marche très bien comme ça aussi,
parce que si encore ça améliorerait la performance ça n’améliore pas la performance » (A17).

Par ailleurs, trois répondants estiment que l’existence d’ « espaces de mobilisation »


permettrait de soutenir la mobilisation collective, en permettant aux EC de se réunir et de

205
dialoguer en faisant des ponts entre les enseignements et les recherches de chacun, en
partageant des ressources, etc., ce qui créé un climat favorable à la mobilisation collective.

Enfin, deux répondants nous font part de leur opinion favorable concernant
l’accompagnement qu’a mis en place l’université A, pour aider les EC dans leur manière
d’enseigner et dans leur recherche. Un répondant souligne que les projets d’établissement
stimulent la recherche et participent ainsi à la mobilisation collective. Un répondant estime
que les évaluations des enseignements faites par les étudiants soutiennent la mobilisation en
permettant de s’améliorer.

206
Tableau 30 : Cas A - Synthèse des verbatim sur les moyens d'encourager la mobilisation collective, par répondant

Répondant Description des thèmes


RP : avoir un système de rémunération plus incitatif, qui évite aux EC d’avoir recours à des activités libérales (avocat) + Les
fonctions administratives ne sont pas assez récompensées.
A1 / PR / DROIT / ADMENS
RNP : le travail collectif en recherche est peu reconnu en Droit.
ADMRECH MAND / EA DROIT
Espace de mobilisation : inciter les EC peu produisants à intégrer une recherche collective
Management de proximité/leadership : le directeur d’UFR mobilise les énergies
RP : le salaire est peu équitable en externe car les EC qui travaillent dans des écoles de commerces sont récompensés pour
A2 / MCF / GESTION ADMENS / leurs publications et leurs recherches sont financées.
MAND / EA GESTION RNP : il n’y a pas de reconnaissance de la fonction « enseignement » ni de la fonction administrative de l’EC. Seule la
fonction « recherche » est prise en compte par les instances nationales.
A3 / MCF / GESTION / DIRCOMP Accompagnement : aider les EC à la pédagogie en les formant aux ressources numériques
MANDAT / EA GESTION
A4 / DOCTO / HIST / CENTRE RP: pour moi la meilleure façon de mobiliser c’est d’y associer un aspect financier
HIST RNP : les efforts orientés vers la vie civique (Journées Portes Ouvertes) ne sont pas reconnus donc les EC ne les font pas.

Reconnaissance : le centre de recherche intègre les doctorants dans les projets de recherche, il considère les doctoraux comme
A5 / DOCTO / HIST CENTRE étant égaux aux EC. C’est intéressant.
HIST Leadership : deux professeurs sont réellement moteurs de la mobilisation collective, donc la recherche du laboratoire tourne
autour de leurs axes de recherche.
RNP : L’université n’a pas soutenu les initiatives que nous avons prises lors de la mise en place du Plan Licence (faire des
A6 / MCF / DROIT ADMENS / EA bilans, établir des budgets, etc.), ce qui a généré une démobilisation
DROIT Accompagnement : l’université a mis en place une équipe qui aide les EC pour leur recherche : conseils sur les financements,
les thèmes de recherches, diffusion de la recherche, etc.
RP: la modulation des services permet de s’impliquer davantage dans l’enseignement que dans la recherche.
A7 / MCF / GEO / ADMENS /
RNP : la seule activité de l’EC qui est reconnue est la recherche, comme s’il n’était que chercheur, ce qui est faux. J’aimerais
UMR ENV
une reconnaissance de l’implication dans l’enseignement.
RNP : il faut se battre pour que ce ne soit pas que les activités de recherche qui soient reconnues
A8 / MCF GESTION / EA
Espace de mobilisation : permettre un partage des ressources pour l’enseignement afin de travailler collectivement
GESTION
Leadership : la mobilisation collective dépend beaucoup du leader
A9 / PR / GESTION ADMENS RP : le système indemnitaire devrait mieux récompenser les plus performants
MAND / EA GESTION
A10 / DOCTO / DROIT EA DROIT RNP : en tant que doctorant, si on s’implique trop dans le laboratoire, la thèse va en pâtir, alors il ne vaut mieux pas le faire.
A11 / PR / DROIT / EXTERNE Feed back formatif : L’évaluation par les étudiants est très positive
A12 / MCF DROIT / ADMENS / EA RP : Récompenses peu discriminantes : elles ne permettent pas de distinguer les EC les plus mobilisés des autres car « au final
DROIT tout le monde peut avoir une prime » => manque d’équité
A13 / MCF / GEO / DIRREC RP : le budget alloué à la recherche n’est pas assez élevé

207
MAND / UMR ENV RNP : les EC mobilisé pour le collectif ne reçoivent pas beaucoup de considération de la part de la structure et des collègues
Projet d’établissement : les projets d’établissement suscitent la mobilisation collective
RP : je n’attends rien de l’université parce qu’elle n’a pas grand-chose à donner. Il n’y a pas de différence de reconnaissance
A14 / MCF / GESTION / ADMENS entre celui qui se mobilise et celui qui n’est jamais là.
/ EA GESTION Espace de mobilisation : il faut mettre en place des espaces qui permettent de générer de la cohésion : faire des ponts entre les
enseignements et les recherche, repas, machine à café, etc.
A15 / PR / HIST / ADMENS / RP : les projets de recherche sont moins bien financés en France qu’à l’étranger
CENTRE HIST
RP : les composantes n’ont pas la possibilité de mettre en place des récompenses. Seule la recherche est récompensée, les
collègues qui s’investissent dans l’enseignement et dans les tâches administratives sont laissés pour compte.
RNP : les EC qui assument des responsabilités administratives sont en recherche de reconnaissance et souffrent de l’absence
A16 / PR / ANTHRO DIRCOMP /
de cette reconnaissance
CENTRE HIST
Management de proximité : comme le directeur d’UFR ne dispose d’aucune marge de manœuvre financière, il doit essayer de
convaincre ses collègues de se mobiliser et leur offrir une forme de reconnaissance informelle en termes de cordialité au
travail, d’écoute, de communication, etc.
RP: le salaire est inéquitable par rapport à ce que les EC gagnent à dans le système privé et à l’étranger
RNP : certains EC français n’ont même pas un bureau pour accueillir les étudiants et se retrouver entre collègues. Ça ne donne
A17 / PR / LETTRES DIRCOMP /
pas envie de s’impliquer.
UMR CNRS/ENS LETTRES
Management de proximité : en tant que directeur de département j’essaie de faire en sorte que les collègues prennent du plaisir
à venir travailler, j’arrange leur emploi du temps selon leurs voeux par exemple. Les gens heureux sont plus performants
A18 / MCF / LETTRES ADMENS / RP : le fait qu’un camionneur a un salaire plus élevé qu’un EC montre que la société ne nous considère pas.
CENTRE HIST RNP : l’université ne reconnait pas mon investissement, elle n’évalue même pas mon travail.
A19 / PR / DROIT DIRCOMP / EA RP : les primes pour les charges administratives ne sont pas assez élevées au regard du travail abattu
GESTION RNP : on pourrait revaloriser les activités administratives et d’enseignement
A20 / PRESIDENT Leadership : les outils de mobilisation collective ne servent à rien s’ils ne sont pas accompagnés d’une certaine pédagogie.

208
2.1.5. Taille du groupe mobilisé

Dix répondants reconnaissent que le degré de mobilisation collective n’est pas de même
niveau pour tous. Ils pensent que la mobilisation collective ne concerne qu’un noyau dur
d’EC, sur qui repose le bon fonctionnement de l’université :

« Il y a vraiment un noyau de collègues et puis il n’y a pas de secret ce sont les collègues qui
sont là avec lesquels on peut discuter » (A1) ;

« C'est toujours sur les mêmes que les tâches collectives reposent » (A12).

2.2. RS de la performance organisationnelle (QR2)

2.2.1. La performance, un mot tabou

Avant de présenter l’analyse de la représentation sociale de la performance de l’université,


nous soulignons que la plupart des répondants rapportent que le terme « performance » est un
mot peu utilisé par les EC. Le mot « performance » est souvent remplacé par d’autres mots
dans les discussions, tels que le mot « excellence » (A19) ou le mot « amélioration » (A14)
par exemple. Certains nous confient que le terme performance est plus facilement abordé dans
les discours informels que formels :
« […] Des discours formels non, pas vraiment, il y a plus des discours informels mais entre
enseignants. C’est-à-dire, par exemple, il y a eu effectivement l’année dernière, l’enquête du
ministère de l’enseignement supérieur qui est sortie sur l’insertion professionnelle des étudiants,
qui publiait tous les ans, et le master X de l’Université A est sorti deuxième sur toute la France.
On en a parlé entre nous, entre certains, d’accord, entre certains personnels, entre certains
enseignants on s’est passé des articles là-dessus, Le Point par exemple avait fait une chronique là-
dessus. On en a discuté etc. Mais de façon institutionnelle pas trop, après c’est plus des éléments,
moi j’ai communiqué là-dessus auprès des étudiants, c’est-à-dire que je l’ai dit aux étudiants des
masters, je l’ai dit en licence 3ème année quand on présentait les masters. Je communique là-
dessus parce qu’il y a parfois de la part des étudiants un sentiment, un complexe d’infériorité par
rapport à des IAE, par rapport à des écoles de commerce, par rapport à Sup de Co. Et ce qui à
mon avis n’a aucun sens quand on voit la qualité de la formation ici, donc je me dis voilà ça c’est
des choses qui peuvent rassurer les étudiants. Moi je parle à mes étudiants, je sais que certains le
font, maintenant je n’ai pas perçu d’information officielle là-dessus quoi » (A14).

Le Président lui-même nous confie ne pas utiliser ce mot car il génère des ambiguïtés.
Pourtant, c’est bien de performance qu’il s’agit :
« Je ne l’utilise pas [le mot performance], alors si je l’utilise peu ce n’est pas parce que c’est un
tabou, je vous dis je parle de management ici et quand mes collègues me parlent et qu’on me

209
demande de me définir, je me sens aujourd’hui comme un manager, je le dis sincèrement, alors à
tort ou à raison, peu importe, donc ce n’est pas par rapport à un tabou, c’est simplement parce
que je trouve que ce n’est pas le mot le plus approprié, on peut l’utiliser mais il y a tellement de…
il n’est pas défini donc quand on dit performance, personne ne sait de quoi on parle, il y a des
gens qui imaginent le pire et c’est souvent de ça que viennent les ambiguïtés et les malentendus.
Voilà donc je pense qu’il est préférable de… voilà de… temps en temps… on fonctionne sur la
performance ça c’est clair » (A20).

Les EC participant à la vie civique de l’établissement se rendent compte que c’est bien la
performance qui est au cœur des discussions, mais de manière indirecte :
« […] de manière indirecte bien sûr. C’est sous-jacent aux conseils de faculté par exemple, quand
on a des commissions recherche, quand on a des réunions pédagogiques au sein de la faculté bien
sûr que c’est implicite mais ce n’est jamais dit de cette manière-là » (A1).

A19, directeur de composante, situe l’arrivée du terme performance dans les discours des
dirigeants de l’université avec la LOLF, puis la LRU et le modèle SYMPA. A19 pense que
certains de ces collègues, qui ne sont pas impliqués dans le fonctionnement de
l’établissement, n’ont néanmoins jamais entendu ce mot :
« Est-ce que d’ailleurs certains collègues ont déjà entendu le mot performance à propos de leurs
activités, leurs facultés, l’université ? Je n'en suis pas certain, donc quand on parlait du modèle
SYMPA, quand je parle à certains collègues, je pense qu’ils ne sont pas… ils ne le connaissent
pas… ou pas bien. Certains, je pense même que certains n’ont même pas idée que ce modèle
existe. Alors évidemment à un certain niveau d’implication dans l’établissement, on commence à
se confronter à ce type de concept, on voit émerger effectivement de manière surprenante à mon
sens le concept de performance, bon moi c’était il y a quelques années quand on a commencé à
m’expliquer ce que c’était le modèle SYMPA » (A19).

En effet, le Président souligne qu’il est plus facile d’aborder des termes managériaux avec les
directeurs de composantes qu’avec l’ensemble des EC (encadré 1).

Dès lors, les EC ont l’impression qu’il existe une fracture au niveau de la communauté
d’universitaires en ce qui concerne la définition de la performance de l’organisation. A12, par
exemple, estime partager sa vision de la performance avec certains collègues, mais que
d’autres collègues ne s’intéressent pas à la performance de l’université, et n’ont donc pas le
sens du service public :
« […] mes collègues certains, les autres ils s'en foutent, pourvus qu'on ne mette pas en cause leur
emploi du temps, leur petit pré-carré, leur machin. Ils n'ont pas un sens du service public eux
franchement développé » (A12).

Selon de nombreux répondants, ils existent également une fracture entre les EC et les
membres de la direction centrale :
« Eux [les membres de la direction centrale] ils sont dans une vision totalement différente. D'abord
parce qu'ils sont aux manettes donc ce sont eux qui négocient avec le ministère et qui voient
comment il faut se positionner et ensuite parce qu'ils s'y croient beaucoup plus que moi » (A12).

210
Dès lors, les réunions et conseils sont autant d’occasions pour exprimer sa propre vision de la
performance (mais toujours sans citer le mot explicitement). En effet, la représentation de la
performance doit être partagée, ou au moins expliquée et comprise par les EC qui proviennent
d’autres disciplines (en particuliers les sciences dites « dures » dont les membres ont un
fonctionnement collectif différent) mais avec qui il faut prendre des décisions communes,
concernant les critères d’évaluation des EC par exemple :

« Il y a le CS [Conseil Scientifique] là où il y a des discussions et puis après à chaque fois qu'on


peut, on fait passer des messages, parce qu’on ne raisonne pas comme eux. Par exemple, il y avait
un moment très très fort, il y a un moment qui est très important à l'université c'est les promotions
des collègues. Quand on est élu au Conseil d'Administration, on gère les promotions des
collègues, donc de tous, profs, maître de conf. sachant que les maîtres de conf. s'occupent des
maîtres de conf. et les profs, les maîtres de conf. et les profs. Donc au départ il a fallu bien se
mettre d'accord sur les évaluations, sur la manière notamment d'évaluer la recherche, parce qu'on
ne parle pas des mêmes choses, eux ils font que des papiers collectifs, nous on dit si on fait des
papiers collectifs l'attribuer à l'autre et pas à nous donc non. Donc il a fallu s'expliquer un peu,
pour qu'après mais bon ils comprennent enfin ils comprennent, ils enregistrent on va dire. Après
ça leur paraît insensé parce que ce n'est pas leur mode de fonctionnement mais nous leur mode de
fonctionnement on n'y comprend rien, quand on voit les thèses qu'ils soutiennent c'est minable
parce que là il y des enjeux très très forts sur ces histoires de thèses en trois ans » (A12).

Pour résumer, la proximité permet aux EC d’avoir une grille d’interprétation commune de la
performance de l’université, sans avoir à aborder explicitement le terme. Par exemple, A14,
considère que la performance de l’université se définie par l’insertion professionnelle des
étudiants. Dès lors, les actions de mobilisation collective qu’A14 entreprend dans le sens de la
performance de l’université vont concerner l’insertion professionnelle :
« Je travaille avec un cercle de personnes proches, et je pense qu’on partage cette vision, on a une
vraie sensibilisation à l’insertion professionnelle des étudiants, et à ce que les formations soient en
adéquation avec les entreprises. Les personnes que je côtoie régulièrement avec lesquelles je me
sens bien pour travailler sont les personnes qui partagent cette vision avec moi, sans qu’on en ait
vraiment parlé, ça se fait assez naturellement » (A14).

2.2.2. Contenu de la RS

Les résultats révèlent l’existence de deux facettes de performance : une facette exprimée
de manière explicite et une facette que les répondants expriment très souvent de manière
masquée.
Les éléments de RS de la performance que les répondants évoquent de manière
explicite, c’est-à-dire lorsque nous leur demandons simplement « qu’est-ce qu’évoque pour
vous la performance de l’université ? », sont associés à un indice de polarité positif ou neutre.

211
Cela signifie que l’attitude des répondants à l’égard de ces éléments est favorable ou neutre.
Par contre, lorsque nous changeons la consigne en leur demandant « selon vous, qu’est-ce que
les autres EC pensent de la performance de l’université ? », ils évoquent des éléments dont
l’indice de polarité est négatif
Prenons l’exemple du répondant A11. A la question explicite, il évoque, dans l’ordre :
- « délivrer un enseignement de qualité et produire une recherche de qualité » (catégorie
thématique : qualité ; rang : 1)
- « contribuer à l’enseignement des étudiants » (catégorie thématique : enseignement ; rang :
2)
A la consigne de substitution, il répond que ses collègues pensent comme lui, mais
que, par contre, la conception politique au niveau national est différente. Il évoque alors, dans
l’ordre :
- « au niveau national il y a une pression très nette sur la réussite en licence et cette pression
n’est pas raisonnable » (catégorie thématique : pression ; rang : 1)
- qu’il est inquiet de « la façon dont la performance prend une forme quantitative, notamment
de plus en plus les enseignants chercheurs sont considérés, et c'est le terme officiel, il faut
produire un certain nombre d'articles ou de contributions dans des revues » (catégorie
thématique : indicateur ; rang 2)
- finalement, à la fin de sa réponse, il remet en question le terme performance en lui-même : «
la performance à mon avis n'a grand sens ni pour moi ni vraiment pour les collègues
[…] quand on parle de performance quand on accole performance avec entreprenariat-
morphisme avec le fait que l'université doit ressembler à une entreprise être gérée par une
entreprise tout ça me laisse évidemment perplexe » (catégorie thématique : privé/public ;
rang : 3)

La facette explicite exprime l’idée centrale qu’une université est performante


lorsqu’elle fournit des services de qualité aux usagers en matière de recherche et
d’enseignement (11/19), qu’elle contribue à l’insertion professionnelle des étudiants (9/19),
qu’elle génère des publications scientifiques (7/19), qu’elle contribue à l’enseignement des
étudiants (6/19) et qu’elle fasse de la recherche (5/19). Nous nommons cette facette « la
conception pragmatique » de la performance de l’université.
- Qualité (de la recherche et de la formation) :
« La performance d’une université, deux grands axes pour moi, ce qu’elle est capable de faire, en
terme de qualité d’enseignement pour les étudiants parce que si on n'a pas d’étudiants je ne vois
pas comment on fait pour être une université, c’est le nerf de la guerre […] » (A18) ;

212
« fournir une recherche scientifique qui soit de qualité » (A4).

- Insertion professionnelle des étudiants :


« L’un des premiers éléments qui me vient à l’esprit c’est l’intégration et l’insertion
professionnelle des étudiants, pour moi une université performante c’est une université qui va être
capable et en mesure de fournir au marché de l’emploi des étudiants qui sont en bonne adéquation
avec les attentes du marché de l’emploi. Et donc d’être capable de proposer des formations qui
soient à même d’insérer professionnellement, rapidement et de bon niveau nos étudiants » (A14).

- Publications scientifiques :
« La performance, c’est aussi, bon il y a cette question-là, on pourra en reparler, c’est aussi, c’est
lié aussi à l’évaluation des enseignants-chercheurs, moi je relirais les deux dossiers parce qu’on
demande à nos enseignants-chercheurs à une époque d’être publiant, aujourd’hui produisant,
donc si on est produisant c’est qu’on a peut-être une certaine performance scientifique » (A19).

- Enseignement :
« Une performance qui est spécifique à l’enseignement c’est-à-dire pouvoir transmettre des
savoirs » (A5).

La facette masquée est composée d’éléments chargés affectivement de manière


négative. Rappelons que les indices de polarité proche de -1 et +1 peuvent révéler des
opinions stéréotypées. Cette seconde facette de la RS de la performance de l’université a pour
idée centrale que la performance est en contradiction avec l’université car service public et
entreprise privée sont opposés (Privé/public, 9/19), que la performance exerce une mauvaise
pression (5/19) sur les EC, une concurrence (3/19) entre les universités et entre les EC, et
que les indicateurs (4/19) de performance utilisés sont peu pertinents et ne reflètent pas la
qualité de la recherche. Tous ces éléments liés à la performance génèrent du stress chez les
EC. Les répondants favorables à cette conception négative ne cherchent pas à définir la
performance de l’université mais expriment des opinions négatives très fortes à son égard : la
recherche de la performance engendre la concurrence entre les universités, une évaluation
systématique et peu pertinente, tout cela générant de la pression et du stress chez les EC. Nous
nommons cette facette « conception philosophique » de la performance de l’université.

- Privé/public :
« On a l'impression d'être tiraillé entre la façon de gérer l'université et qui s'apparente souvent
voilà la manière de gérer l'entreprise […].Cette façon de gérer un petit peu comme une entreprise,
de toutes façons n'est pas censée en être une, enfin une université ce n'est pas une entreprise, on
n'est pas là pour faire du profit on n'est pas face à des clients, on a une toute autre mission. En fait
donc je pense que c'est vraiment ça qui peut qui me faisait vraiment peur » (A10).

213
- Pression :

« Pour moi la performance et je pense à la pression […] c’est terrible une société comme ça moi
je suis très humaniste » (A1) ;

- Concurrence :

« Quand on réfléchit en terme de performance, on réfléchit aussi en terme de concurrence et donc


dans un univers qui devient non plus service public mais un univers qui devient concurrentiel pour
exister, pour rester université et pas simplement pour devenir université de proximité qui n’aurait
plus que des BAC+3 » (A9) ;

- Indicateur :

« Je ne suis pas sûr que cette pression au chiffre soit tout à fait pertinente. D'abord parce que on
sent bien que l'impératif des espèces de classement Shanghai dont on rebat les oreilles et qui à
mon avis portent défaut de conception et puis cette méthode quantitative on sait très bien qu’elle
conduit notamment des enseignants qui pour faire leur quota vont prendre un article et le diviser
en trois. Ils vont le couper en trois pour faire un espèce de feuilleton qui vont publier dans trois
revues différentes et puis pour rester dans les classements de Shanghai » (A11).

Les répondants se répartissent en trois groupes face à ces deux facettes : ceux qui
adhèrent à la conception philosophique de la performance organisationnelle, ils énoncent la
facette pragmatique et masquent la facette philosophique (A1, A9, A10, A11, A13, A19),
ceux qui adhèrent à la conception pragmatique et n’énoncent pas du tout la facette
philosophique (A3, A7, A8, A14, A16, A18, A20), et ceux qui adhèrent à la facette
pragmatique mais ont conscience qu’il existe une deuxième facette philosophique qu’ils ne
partagent pas et qu’ils ne masquent pas (A2, A4, A5, A6, A12, A15, A17). Le tableau 31
synthétise les catégories thématiques citées par chaque répondant.

Nous présentons dans le tableau 31 toutes les catégories thématiques citées par les
répondants pour définir la performance de l’université ainsi que la valeur affective (indice de
polarité) qu’ils accordent à ces catégories.

214
Tableau 31 : Cas A - Catégories thématiques associées à la RS de la performance organisationnelle, par conception

Conception pragmatique Conception philosophique


Catégorie thématique Fréquence totale Fréquence en Fréquence Fréquence en Fréquence
P Rang68 P Rang70
effectifs (n=19) en %69 effectifs (n=19) en %71
Qualité 58% 0,3 2 11 58%
Insertion professionnelle 45% 0,1 2 9 45%
Publication 37% 0,2 2,4 5 26% 0 2,5 2 11%
enseignement 32% 0,5 1,7 6 32%
Réussite des étudiants 21% 0 1,8 4 21%
Recherche 26% 0,5 2,2 5 26%
Nombre d’étudiants 16% 0,5 1,5 2 11% -1 2 1 5%
indicateur 42% 1 4 1 5% -1 2,3 4 21%
visibilité 11% 0 2,5 2 11%
Tabou 21% 0 5 2 11% 0 1,5 2 10%
Evaluation 10% -1 1,5 2 10%
Classement 32% 1 3 1 5% - 0,7 2 3 16%
Concurrence -1 1,7 3 16%
Pression - 0,8 1,8 5 26%
Privé/public - 0,8 1,8 9 47%
Efficacité72 0 1 1 5%
Efficience 0 2 1 5%
Budget
Formation citoyenne 1 2 1 5%
Production de connaissance 0 4 1 5%
Plaisir
Administratif -1 1 1 5%
Individuel 0 4 1 5%
Contrats (de recherche) 0 2 1 5%

68
Moyenne théorique des rangs = 2,6
69
Fréquence moyenne = 23 %
70
Moyenne théorique des rangs = 1,8
71
Fréquence moyenne = 18 %
72
Les catégories en italique n’ont été évoquées que par un seul répondant.

215
Au regard des éléments qui ont été masqués par les répondants, nous avons dû adapter
l’analyse structurale. Nous présentons alors un tableau pour chaque conception : la conception
pragmatique (tableau 32) et la conception philosophique (tableau 33), qui déterminent le
noyau central (pour rappel : case 1 : ce que « doit » être la performance, fréquence forte et
grande importance), la première périphérie (case 2 : les éléments périphérique les plus
importants : fréquence forte et importance faible), la zone des éléments contrastés (case 3 :
fréquence faible mais importance forte) et enfin, la deuxième périphérie (éléments peu
présents et peu importants dans le champ de la représentation, fréquence faible et importance
faible).

Tableau 32 : Cas A - Analyse structurale de la conception pragmatique de la performance de


l'université

Importance
Grande (<2,6) Faible (>2,6)
Case 1 Case 2
Qualité (58%)
Insertion professionnelle (45%)
Forte (>23%)
Enseignement (32%)
Publication (26%)
Fréquence Recherche (26%)
Case 3 Case 4
Réussite (21%) Tabou (11%)
Faible (<23%) Nombre d’étudiants (11%) Indicateur (5%)
Visibilité (11%) Classement (5%)

Tableau 33 : Cas A : Analyse structurale de la conception philosophique de la performance


de l'université

Importance
Grande (<1,8) Faible (>1,8)
Case 1 Case 2
Forte (>18%) Privé/public (47%) Indicateur (21%)
Pression (26%)
Fréquence Case 3 Case 4
Concurrence (16%) Classement (16%)
Faible (<18%)
Évaluation (10%) Publication (11%)
Tabou (10%) Nombre d’étudiants (5%)

216
Tableau 34 : Cas A - Synthèse des catégories thématiques associées à la RS de la performance de l’université, par répondant

Eléments masqués (consigne « de substitution ») Eléments explicites (consigne « normale »)


Répondant
Facette philosophique Facette pragmatique
A1 / PR /
DROIT /
ADMENS Privé/public Concurrence Consommati Indicateur
Pression (-) Qualité (+)
ADMRECH (-)73 (-) on (-) (-)
MAND / EA
DROIT
A2 / MCF /
GESTION
Classement Evaluation Enseigneme Publication
ADMENS / Recherche (0) Visibilité (0) Tabou (0)
(-) (-) nt (0) (+)
MAND / EA
GESTION
A3 / MCF /
GESTION /
DIRCOMP Publication Classement Insertion pro
Réussite (0) Réussite (-)
MANDAT / (0) (0) (+)
EA
GESTION
A4 / DOCTO
/ HIST /
Insertion pro Classement Indicateur
CENTRE Evaluation (- Qualité (+)
(0) (+) (+)
HIST )

A5 / DOCTO
/ HIST Administrati Enseignement Collective Individuelle
Qualité (+) Tabou (0)
CENTRE f (-) (+) (0) (0)
HIST
A6 / MCF /
DROIT Classement
Pression (-) Publication (0) Contrats (0) Qualité (0)
ADMENS / (-)
EA DROIT
A7 / MCF / Enseignement Recherche Insertion pro

73
Le signe ou le zéro entre parenthèses après le nom de la catégorie correspond à l’attitude qui lui est associée. (0) = attitude neutre ; (1) = attitude positive ; (-) = attitude
négative.

217
GEO / (+) (+) (0)
ADMENS /
UMR ENV
A8 / MCF
GESTION / Enseigneme Publication Insertion pro
Privé (0) Qualité (0)
EA nt (0) (0) (0)
GESTION
A9 / PR /
GESTION Production
Insertion pro Publication
ADMENS Privé/public Réussite (0) connaissance
(0) (0)
MAND / EA (-) (0)
GESTION
A10 /
Nombre
DOCTO / Privé/public
d’étudiants (+) Réussite (-)
DROIT EA (-)
DROIT
A11 / PR /
Privé/public Qualité (0) Publication Enseigneme
DROIT / Pression (-)
(-) (0) nt (0)
EXTERNE
A12 / MCF
DROIT / Privé/public Concurrence Insertion pro
Visibilité (0)
ADMENS / (-) (-) (0)
EA DROIT
A13 / MCF /
GEO /
Concurrence Privé/public Enseigneme Publication
DIRREC Pression (-) Recherche (+)
(-) (-) nt (+) (0)
MAND /
UMR ENV
A14 / MCF /
GESTION /
Privé/Public Insertion pro
ADMENS / Tabou (0) Qualité (0)
(0) (0)
EA
GESTION
A15 / PR /
HIST / Formation
Insertion pro Indicateur (-
ADMENS / Qualité (0) citoyenne
(0) )
CENTRE (+)
HIST

218
A16 / PR /
ANTHRO
Efficience
DIRCOMP / Efficacité (0)
(0)
CENTRE
HIST
A17 / PR / Indicateur (- Réussite (+) Qualité (0) Insertion pro Plaisir (+)
LETTRES ) (0)
DIRCOMP /
UMR
CNRS/ENS
LETTRES
A18 / MCF / Pression (0) Tabou (0) Qualité (0) Enseigneme Recherche
LETTRES nt (0) (0)
ADMENS /
CENTRE
HIST
A19 / PR / Privé/Public Publication (0) Nombre Réussite (0) Qualité (0) Insertion
DROIT (-) d’étudiants pro (0)
DIRCOMP / (0)
EA
GESTION
A20 / NC
PRESIDENT
A21/ VP NC

219
2.2.3. Réactions face aux réformes

12 répondants ont discours favorable au réforme, en particulier la LRU. Sept ont un discours
défavorable.
Neuf critiquent le peu de moyens donnés aux universités pour accéder pleinement à leur
autonomie, ou émettent des craintes pour le futur, notamment au moment où il y aura un
nouveau Président :
« J’ai quand même des craintes pour l’avenir. Le risque avec l’autonomie c’est que si les
personnes qui sont à la tête de la structure deviennent moins bonnes, s’il y a des changements et
que du coup que l’équipe dirigeante devient moins performante, la structure risque de souffrir.
Actuellement on est tombé sur des gens de qualité qui gèrent leur affaire. L’autonomie c’est bien à
condition que les personnes qui soient en charge de ça fassent du bon boulot. Ma crainte c’est à
long terme… on peut légitimement se demander, est-ce ça va toujours fonctionner de la meilleur
manière ? Parce qu’ils [les membres de l’équipe présidentielle] dépensent de l’énergie
importante, on a l’impression qu’ils vont obtenir des résultats dans la négociation qu’ils peuvent
avoir, à la fois au niveau du ministère et puis au niveau de la gestion locale. C’est tout un travail,
c’est un nouveau travail qui est demandé aux universités. Bon c’est on peut être optimiste en
disant bon c’est bien parti ici comme dans toute structure dans une entreprise il y a des bons et
des mauvais gestionnaires. Donc là on tombe sur des problèmes qui sont difficiles à prévoir »
(A7).

L’autonomie de l’Université est globalement bien perçue parce que les répondants disent
avoir confiance en l’équipe dirigeante. Il est même regretté qu’elle ne soit pas plus large afin
de moins dépendre de l’État.

2.3. Lien entre RS de la performance organisationnelle et engagement envers


l’organisation et engagement envers la profession (QR3)

Les EC interrogés font par d’un engagement essentiellement organisationnel (12/19), allant
d’un engagement organisationnel affectif très fort : « s’impliquer pour l’établissement c’est
passionnant » (A15) à un engagement normatif (sentiment d’obligation) « c’est difficile
d’obtenir un investissement de personnes nouvelles, de collègues sur des tâches collectives, je
me voyais mal quitter la direction de la faculté, donc après, le mandat expirera dans un peu
plus de deux ans, donc en septembre 2014, ce n’est pas tout de suite, je compte faire mon
mandat j’ai été élu pour ça », en passant par une volonté de « s’investir dans le projet de
l’établissement » (A3). Soulignons que l’engagement affectif est assez peu fréquent.

220
Sept répondants mentionnent un engagement professionnel. Parmi eux, quatre font
part d’un engagement à la fois professionnel et organisationnel (A2, A14, A16, A18). Seul
A10 mentionne un engagement uniquement professionnel.

A1 est un cas intéressant. Un professeur en Droit, appartenant à l’Université A depuis sa


création en 1995. Il a beaucoup de responsabilités : Directeur-adjoint d’une Ecole Doctorale,
assesseur du doyen, membre du CEVU, directeur de plusieurs masters. Il est très attaché au
Président de l’Université et le soutient dans ses actions. Si certaines de ses décisions ne lui
conviennent pas, il lui en fait part mais sans remettre en cause la politique menée
globalement. Ainsi, il fait preuve d’une grande loyauté envers l’Université A et envers le
Président. Il estime que les décisions prises par le Président vont profiter à l’Université A,
même s’il s’agit d’accéder à l’autonomie et de jouer le jeu de la performance :
« Il faut résister ! Il faut résister ! Ah oui ah oui ! Et j’ai l’impression qu’actuellement l’Université
A résiste aussi, et bon bah bien sûr il y a une règle du jeu il y a des choses qui sont incontournable
mais on peut quand même les aménager. Et pour moi bah c’est pour ça que je suis sur la liste
officielle entre guillemet, je ne suis pas d’accord avec tout ce que fait l’équipe présidentielle
depuis qu’elle a été loin de là mais je considère quand même que tout ce qui a été fait c’était pour
l’Université A c’était pour résister aussi à un certains nombres de choses qui nous ont été
imposées. Et c’est que l’autonomie c’est un peu hypocrite parce que j’ai l’impression qu’on a
jamais été autant botte entre guillemet de l’État aujourd’hui. Qu’est-ce qu’on met derrière les
mots ? Qu’est-ce qu’on met derrière autonomie ? Qu’est-ce qu’on met derrière responsabilité ? Et
je pense que là il y a un travail de résistance et actuellement je considère que ce travail de
résistance il est fait tout à fait correctement par l’Université » (A1).

Dès lors, l’engagement envers l’organisation s’explique par le contexte d’un EC qui était
présent à la création de l’Université, qui s’est battu pour qu’elle existe, qui a participé au
recrutement des collègues, dont certains sont encore en place. Ce type de profil correspond à
un EC pour qui engagement professionnel et engagement organisationnel se confondent.
L’université est alors une organisation purement professionnelle qui résiste aux tentatives
d’introduction de logiques managériales par l’État. A4, A11 et A13 rejoignent également ce
profil. Ils ont en commun d’avoir une vision philosophique de la performance de l’université.
Nous pourrions donc qualifier cet engagement d’engagement institutionnel,
s’apparentant à un engagement envers la profession (si l’on considère que la « profession
universitaire » prend forme au sein de l’ « institution université »). Les verbatim qui suivent
illustrent cet engagement institutionnel :
« J’ai beaucoup donné on va dire durant dix ans dans ce collectif. Quelque part ne pas continuer
à jouer le collectif c’est renier les valeurs qui ont fait que j’ai choisi d’abord l’université publique
[…]. Il faut faire vivre sa fac. Pour l’université je me suis investi, ça m’a passionné » (A13) ;
« L’institution université est extrêmement importante » (A1).

221
Lorsque les répondants ont une conception pragmatique de la performance
organisationnelle, ils mentionnent toujours un engagement organisationnel. Par contraste, les
répondants qui n’ont pas une conception pragmatique mais philosophique, n’ont soit pas
d’engagement organisationnel, soit un engagement organisationnel clairement normatif (« je
me sens obligé »). Le seul répondant affichant une vision plutôt philosophique et un
engagement organisationnel a des responsabilités de direction importantes (A19, directeur de
composante). Par conséquent, nous supposons que la vision philosophique est liée à un
engagement professionnel et peu organisationnel (dans sa forme affective), alors que la
vision pragmatique est liée à un engagement organisationnel ou aux deux. Le tableau ci-
dessous synthétise ces résultats.

Tableau 35 : Cas A – Lien entre RS de la performance organisationnelle et engagement,


matrice par répondant (QR3)
Répondant RS Engagement
A1 / PR / DROIT / ADMENS ADMRECH Engagement professionnel +
PHILO
MAND / EA DROIT Engagement institutionnel
A2 / MCF / GESTION ADMENS / MAND / EA Engagement professionnel +
PRAG
GESTION engagement organisationnel
A3 / MCF / GESTION / DIRCOMP MANDAT /
PRAG Engagement organisationnel
EA GESTION
A4 / DOCTO / HIST / CENTRE HIST
PRAG Engagement institutionnel
A5 / DOCTO / HIST CENTRE HIST PRAG Engagement organisationnel
A6 / MCF / DROIT ADMENS / EA DROIT PRAG Engagement organisationnel
A7 / MCF / GEO / ADMENS / UMR ENV PRAG Engagement organisationnel
A8 / MCF GESTION / EA GESTION PRAG Engagement organisationnel
A9 / PR / GESTION ADMENS MAND / EA
PHILO NSP-2
GESTION
A10 / DOCTO / DROIT EA DROIT PHILO Engagement professionnel
A11 / PR / DROIT / EXTERNE PHILO Engagement institutionnel
A12 / MCF DROIT / ADMENS / EA DROIT PRAG Engagement organisationnel
A13 / MCF / GEO / DIRREC MAND / UMR Engagement professionnel +
PHILO
ENV Engagement institutionnel
A14 / MCF / GESTION / ADMENS / EA Engagement professionnel +
PRAG
GESTION engagement organisationnel
A15 / PR / HIST / ADMENS / CENTRE HIST PRAG NSP-1
A16 / PR / ANTHRO DIRCOMP / CENTRE
PRAG Engagement organisationnel
HIST
A17 / PR / LETTRES DIRCOMP / UMR
PRAG Engagement organisationnel
CNRS/ENS LETTRES
A18 / MCF / LETTRES ADMENS / CENTRE Engagement professionnel +
PRAG
HIST engagement organisationnel
A19 / PR / DROIT DIRCOMP / EA GESTION PHILO Engagement organisationnel
A20 / PRESIDENT NC
A21 / VICE-PRESIDENT NC
NSP : Ne Sais Pas
NSP-1 : Question non posée à l’informateur
NSP-2 : Question posée, laissé sans réponse (a dévié de la question)
NSP-3 : Réponse ambiguë

222
NC : Non Concerné par l’étude

2.4. Lien entre engagement envers l’organisation et engagement envers la profession et


mobilisation collective des EC (QR4)

Les EC qui font part d’un engagement professionnel et organisationnel à la fois sont
ceux qui font part des trois orientations de la mobilisation collective : individuelle, collective
et organisationnelle.
Leur engagement envers la profession les pousse à des efforts de mobilisation
individuelle tels que le dévouement dans le travail de recherche et d’enseignement (travailler
à la maison pour finir un article par exemple) et leur engagement envers l’organisation les
pousse à entreprendre des actions directement orientées vers l’organisation telles que la
participation à la vie civique (assister aux réunions, participer à la Journée Portes Ouvertes,
etc.). Lorsqu’ils font part d’un engagement essentiellement organisationnel, ils vont prioriser
l’orientation organisationnelle de la mobilisation collective, au détriment de l’orientation
individuelle, c’est-à-dire au détriment de la carrière d’EC. A8 et A12 disent avoir fait le choix
de laisser de côté leur carrière d’EC pour se consacrer à l’organisation :
« Notre soucis c'est que faire carrière il faut être égoïste, donc ça commence mal, si n’on est
pas égoïste, on ne fait pas carrière donc moi j'ai pris le parti de ne pas faire carrière c'est-à-
dire vraiment d'être plus impliquée que la moyenne dans les instances collectives qui me
rapportent en terme de carrière zéro ça veut dire qu’en termes de recherche je suis toujours en
train de courir après le temps, voilà » (A12).

« Je ne fais pas de recherche, je renonce à ma carrière individuelle. C’est un choix. Mais je sais
très bien que si je veux être crédible, il va falloir que je fasse un minimum en recherche » (A8).

Lorsque l’EC cumule engagement professionnel et engagement organisationnel, cela ne se fait


pas sans malaise. A2, fortement engagé et mobilisé envers la profession et l’organisation en
est l’exemple typique :
« Par exemple, là en ce moment je suis dans une situation où j’ai accepté beaucoup de… enfin je
suis sur un gros projet ADEME qui me demande beaucoup de temps, parallèlement je suis sur
d’autres projet à thème avec d’autres collègues sur d’autres université. Et parallèlement, je suis
aussi sollicitée, par exemple, il y a de nouvelles élections début avril à l’université et on m’a
demandé de faire partie de la liste du conseil scientifique, j’ai accepté et je me suis rendue compte
que cette acceptation a peut-être été l’élément de trop. Parce que du coup c’est des réunions en
plus, c’est du temps en plus qui n’est pas consacré à mes projets de recherche et voilà je siège
aussi au conseil d’UFR et j’ai aussi des réunions en interne ici. J’ai d’autres choses que je dois
gérer aussi, et du coup ça veut dire quoi soit vous gérez moins bien le reste et au bout d’un
moment moi ça me pose un problème de mal faire mon travail. Et voilà, je n’ai pas envie que ce

223
soit au dépend de l’enseignement ou de ma recherche. Et voilà, à un moment donné c’est ce qui va
faire que je vais dire non ce n’est pas possible, ce n’est pas de la mauvaise volonté vis-à-vis de
l’institution mais c’est plus le fait que je ne veux pas en fait voilà je ne veux pas que ça porte
atteinte à mon travail qui est principal, qui est la formation et la recherche » (A2).

Intervention d’une variable émergente : la motivation au service public

En plus de l’engagement, des résultats émergents suggèrent qu’une autre variable


intervient dans la relation entre engagement et mobilisation collective : il s’agit d’une
motivation intrinsèque liée au service public (MSP). Cette motivation au service public
influence les comportements de mobilisation collective envers l’organisation, selon les
répondants, peu importe qu’ils aient une conception philosophique ou pragmatique de la
performance organisationnelle :
« Pourquoi je m’investis par exemple pour faire tourner la boutique ? est-ce que c’est par rapport
à la notion de service public… » (A13).

Ces résultats ont émergé des réponses à la question « qu’est-ce qui vous pousse à entreprendre
ces efforts [de mobilisation collective] ? ».

Cette motivation est décrite sous différents angles. Tout d’abord, elle se manifeste comme un
intérêt porté aux personnes en difficulté, en particulier les étudiants :
« mobiliser des fonds pour les étudiants en difficulté » (A11)

Ensuite, cette motivation au service public se manifeste à travers l’intérêt que portent les EC
aux politiques publiques. Ils aiment en débattre entre eux et pendant l’entretien :
« Le New Public Management c'est aussi un côté RGPP, c'est-à-dire il faut un ratio efficacité
coût, ça me fait penser d'ailleurs à l'autonomie des collectivités locales et pour exactement les
même raisons ça consiste beaucoup à débudgétiser des dépenses publiques nationales en les
mettant à la charge des collectivités locales sans forcément leur transférer les ressources
appropriées c'est le même genre d'autonomie. D'ailleurs ils ne voteront pas sur la loi de la
décentralisation de 2004, ça s'appelle liberté responsabilité locale et la loi d'autonomie sur les
universités s'appelle liberté et responsabilité des universités il y a aussi des mots qui trompent
pas » (A11).

De plus, la motivation au service public prend forme à travers la volonté d’être utile à la
société, de contribuer à l’intérêt général :
« Pour moi l’institution l’université est extrêmement importante, la notion de service public,
l’impression d’être vraiment utile, utile en société » (A1).

Par ailleurs, elle se manifeste également à travers certains sacrifices personnels que les EC
consentent au nom du service public :

224
« Au mois d’avril je fais une conférence là dans un musée…je fais une conférence… bon bref je
reçois un mail de la conservatrice en chef qui me dit bon bah voilà pour votre conférence
l’association des amis du musée… je ne sais pas quoi… vous paie 150 €. Moi j’ai refusé, j’ai
renvoyé un mail en disant écoutez c’est très gentil mais non merci, pas de souci, déjà que faire une
conférence grand public pour moi c’est de l’intérêt général et puis en plus de ça moi je me refuse
de taper dans la caisse d’une association » (A4).

Enfin, les EC mentionnent un attachement à des valeurs publiques, en particulier l’égalité de


traitement des étudiants :
« L’autre raison, c’est plus une raison idéologique qui est liée au fait que j’ai toujours privilégié
le travail à l’université parce que j’ai envie de donner du savoir à des personnes qui n’ont pas
nécessairement les moyens de se payer une école de commerce » (A2) ;
« Assurer un enseignement de qualité qui concourt à l'ascension sociale du plus grand nombre
parce qu'il faut aussi que ce soit une ascension sociale démocratique, un enseignement
démocratique, on n’est pas les grandes écoles, on n’est pas, on ne fait pas de sélections à l'entrée
donc c'est aussi un enseignement de type démocratique et je pense que cet aspect est important »
(A11).

D’une manière globale, 17 répondants évoquent spontanément au moins un des éléments


(symbolisé par + dans le tableau 36) de la motivation au service public ci-dessus. Sept EC
évoquent quatre éléments différents (++++) et le répondant A18 en évoque cinq.

Tableau 36 : Cas A - Lien entre engagement et mobilisation collective (QR4), matrice par
répondant

Répondant Engagement Mobilisation MSP


Collective +++
A1 / PR / DROIT / ADMENS Engagement professionnel
Individuelle ++ ++++
ADMRECH MAND / EA DROIT + engagement institutionnel
Organisationnelle +
A2 / MCF / GESTION ADMENS / Engagement professionnel Individuelle ++
++++
MAND / EA GESTION + engagement organisationnel Collective +
Organisationnelle +++
A3 / MCF / GESTION / DIRCOMP
Engagement organisationnel Collective ++
MANDAT / EA GESTION
Individuelle +
Individuelle +++
A4 / DOCTO / HIST / CENTRE HIST
Engagement institutionnel Collective ++ +++
Organisationnelle +
Collective ++
A5 / DOCTO / HIST CENTRE HIST Engagement organisationnel
Individuelle +
A6 / MCF / DROIT ADMENS / EA Collective ++
Engagement organisationnel +
DROIT Individuelle +
A7 / MCF / GEO / ADMENS / UMR Organisationnelle ++
Engagement organisationnel +
ENV Individuelle +
A8 / MCF GESTION / EA GESTION Engagement organisationnel Collective +
A9 / PR / GESTION ADMENS MAND
NSP-2 Individuelle
/ EA GESTION
Collective ++
A10 / DOCTO / DROIT EA DROIT NSP-3
Individuelle +
Individuelle +++
A11 / PR / DROIT / EXTERNE Engagement institutionnel Collective++ ++++
Organisationnelle+
A12 / MCF DROIT / ADMENS / EA Engagement organisationnel Organisationnelle ++ ++++

225
DROIT Collective +
A13 / MCF / GEO / DIRREC MAND / Engagement professionnel Collective ++
++++
UMR ENV + engagement institutionnel Organisationnelle +
Collective +++
A14 / MCF / GESTION / ADMENS / Engagement professionnel
Individuelle ++ ++++
EA GESTION + engagement organisationnel
Organisationnelle +
A15 / PR / HIST / ADMENS / CENTRE Collective ++
NSP-1 ++++
HIST Organisationnelle +
Organisationnelle +++
A16 / PR / ANTHRO DIRCOMP / Engagement professionnel
Collective ++ +
CENTRE HIST + engagement organisationnel
Individuelle +
A17 / PR / LETTRES DIRCOMP / Collective ++
Engagement organisationnel ++
UMR CNRS/ENS LETTRES Organisationnelle +
Organisationnelle +++
A18 / MCF / LETTRES ADMENS / Engagement professionnel
Collective ++ +++++
CENTRE HIST + engagement organisationnel
Individuelle +
A19 / PR / DROIT DIRCOMP / EA
Engagement organisationnel Organisationnelle +
GESTION
A20 / PRESIDENT NC
A21 / VICE-PRESIDENT NC
NSP : Ne Sais Pas
NSP-1 : Question non posée à l’informateur
NSP-2 : Question posée, laissé sans réponse (a dévié de la question)
NSP-3 : Réponse ambiguë
NC : Non Concerné par l’étude

Section 3 : Synthèse : Dans quelle mesure la RS de la performance que les


professionnels élaborent oriente-t-elle leur mobilisation collective envers
l’organisation ?

Pour résumer, la technique de codage par comparaison/contraste suggère que les répondants
qui ont une conception plutôt philosophique ont tendance à avoir un engagement
professionnel. Il est possible d’avoir également un engagement organisationnel mais
uniquement lorsqu’ils ont un rôle de direction important (directeur de composante/de
laboratoire et/ou accumulation de plusieurs responsabilités fortes : membres des comités de
direction), à ce moment leur mobilisation collective est basée sur un engagement
organisationnel normatif (« il faut le faire »).
La vision pragmatique est liée à un engagement organisationnel, plutôt affectif, et
pour qu’il y ait mobilisation collective forte il faut un engagement organisationnel affectif.
Cela confirme ce qui a été dit dans la littérature (mais pour d’autres populations).

226
Les EC ayant une vision pragmatique de la performance de l’université ont un
engagement organisationnel et font part d’une mobilisation collective dont les efforts
sont essentiellement orientés vers l’organisation (participation à la vie civique,
orientation vers l’usager, etc.).
Les EC ayant une vision philosophique ont un engagement professionnel et font part
d’une mobilisation collective dont les efforts sont essentiellement orientés vers le collectif
(facilitation interpersonnelle, coordination, aide apportée aux autres etc.).

Par contre, il est possible d’avoir également un engagement professionnel fort.


Cela contredit la littérature dominante qui avance la thèse du conflit. Toutefois, ces résultats
sont à nuancer : si certains EC affichent à la fois un engagement professionnel et un
engagement organisationnel, ils font également part du malaise qu’ils ressentent. D’autres ont
d’ailleurs clairement fait un choix entre les deux engagements (systématiquement lorsqu’ils
disent avoir fait un choix, ils nous confient privilégier l’engagement organisationnel que
professionnel et le ressentent comme un sacrifice).

Par ailleurs, les résultats laissent apercevoir que certains EC concilient parfaitement
valeurs publiques et valeurs managériales/privées. Nous avons clairement identifié une
attitude positive envers les valeurs publiques à travers la variable émergente de motivation au
service publique. L’attitude positive envers les valeurs marchandes/managériales/privées se
mesure également aisément à travers l’attitude que les répondants ont envers le management
basé sur la performance. Ce management fondé sur la performance introduit une allocation
des moyens fondée sur les résultats et non plus sur l’égalité (système public traditionnel),
mise en concurrence des EC (pour le financement des projets de recherche), récompense des
EC les plus performants (à travers les primes, etc.).
A ce moment, c’est au nom des valeurs de service public que les EC adoptent des
comportements de mobilisation pour la performance de l’organisation.

Les EC qui font part d’un engagement professionnel et organisationnel à la fois,


ce que nous appellerons le double engagement, sont ceux qui font part des trois
orientations de la mobilisation collective : individuelle, collective et organisationnelle. Ils
ont en commun d’avoir une conception pragmatique de la performance
organisationnelle
227
Quatre répondants affichent une vision pragmatique de la performance
organisationnelle, un engagement organisationnel mais ne citent pas les trois orientations de la
mobilisation collective. Ils n’en citent que deux. Ces quatre cas pourraient nous amener à
réfuter le lien que nous venons de suggérer. Néanmoins, un retour au discours de ces
répondants nous permette d’apporter des explications, au moins pour trois d’entre eux.
A6 ne fait pas part d’efforts orientés vers l’organisation lorsqu’il décrit la mobilisation
collective. L’ensemble de son discours nous permet de suggérer qu’il ressent un manque de
reconnaissance de la part de l’Université, qui restreint l’orientation organisationnelle, alors
que par le passé il a été très mobilisé :
« Dans la structure on n’est pas reconnu, on n'est pas reconnu, ils n’en voient pas l’intérêt, ils
pensent que ce n’est pas si intéressant que ça […] Donc du coup oui démobilisation sur ce point de
vue-là » (A6).

A7 est un EC qui se sent mobilisé car il entreprend plusieurs initiatives pour améliorer les
formations de l’université. Il est par ailleurs assez isolé car plutôt orienté vers la formation
que vers la recherche. Il se définit lui-même ainsi. De ce fait, il n’a que peu d’occasion de
travailler avec des collègues et se sent « à part », ce qui peut expliquer l’absence d’orientation
collective dans sa définition de la mobilisation.
« J’ai l’impression que ce qui est beaucoup plus favorisé, c’est la recherche, à la fois par le pouvoir
public et à la fois la majorité des collègues » (A7).

A12 est un EC qui préfère travailler de manière collective qu’individuelle. Le travail


individuel lui apporte peu de satisfaction. Ce qui peut expliquer que l’orientation individuelle
soit absente de son discours.

228
Tableau 37 : Cas A – Lien entre RS de la performance organisationnelle, engagement et mobilisation collective, matrice par répondant

Mobilisation collective
Répondant RS Engagement Niveau MSP
Orientations Dimensions
groupal
A1 / PR / DROIT /
Collective +++ Amélioration continue/Facilitation
ADMENS Engagement professionnel
PHILO Individuelle ++ interpersonnelle/Loyauté UFR ++++
ADMRECH MAND / + engagement institutionnel
Organisationnelle + organisationnelle/Orientation vers l’usager
EA DROIT
A2 / MCF / GESTION
Engagement professionnel Individuelle ++ Dévouement dans le travail/Travailler en
ADMENS / MAND / PRAG Département ++++
+ engagement organisationnel Collective + équipe/Vie civique/orientation usager
EA GESTION
A3 / MCF / GESTION
Organisationnelle +++
/ DIRCOMP
PRAG Engagement organisationnel Collective ++ Amélioration continue Ensemble
MANDAT / EA
Individuelle +
GESTION
A4 / DOCTO / HIST / Individuelle +++ Dévouement /Amélioration
CENTRE HIST PRAG Engagement institutionnel Collective ++ continue/Travailler en équipe/Facilitation UFR +++
Organisationnelle + interpersonnelle/Orientation vers l’usager
Amélioration continue/Coordination/Aide Composante
A5 / DOCTO / HIST Collective ++
PRAG Engagement organisationnel aux collègues/Facilitation et centre de
CENTRE HIST Individuelle +
interpersonnelle/vie citoyenne recherche
A6 / MCF / DROIT
Collective ++ Equipe de
ADMENS / EA PRAG Engagement organisationnel Dévouement +
Individuelle + travail
DROIT
A7 / MCF / GEO /
Organisationnelle ++
ADMENS / UMR PRAG Engagement organisationnel Dévouement/Amélioration continue NSP-2 +
Individuelle +
ENV
A8 / MCF GESTION /
PRAG Engagement organisationnel Collective Coordination/Facilitation interpersonnelle Université +
EA GESTION
A9 / PR / GESTION
ADMENS MAND / PHILO NSP-2 Individuelle Rôle prescrit NSP-2
EA GESTION
A10 / DOCTO / Collective ++ Centre de
PHILO NSP-3 Rôle prescrit/coordination
DROIT EA DROIT Individuelle + recherche
Individuelle +++ Amélioration
A11 / PR / DROIT /
PHILO Engagement institutionnel Collective++ continue/Coordination/Travail en Profession ++++
EXTERNE
Organisationnelle+ équipe/Vie civique

229
A12 / MCF DROIT /
Organisationnelle ++
ADMENS / EA PRAG Engagement organisationnel Orientation vers l’usager/Vie civique Université ++++
Collective +
DROIT
A13 / MCF / GEO /
Engagement professionnel Collective ++ Profession
DIRREC MAND / PHILO Facilitation interpersonnelle/Vie civique ++++
+ engagement institutionnel Organisationnelle +
UMR ENV
A14 / MCF / Collective +++
Engagement professionnel Dévouement/Coordination
GESTION / ADMENS PRAG Individuelle ++ NSP-2 ++++
+ engagement organisationnel Vie civique
/ EA GESTION Organisationnelle +
A15 / PR / HIST /
Collective ++
ADMENS / CENTRE PRAG NSP-1 Facilitation interpersonnelle/Vie civique NSP-2 ++++
Organisationnelle +
HIST
A16 / PR / ANTHRO Organisationnelle +++
Engagement professionnel Rôle prescrit/Facilitation interpersonnelle NSP-1
DIRCOMP / CENTRE PRAG Collective ++ +
+ engagement organisationnel Vie civique
HIST Individuelle +
A17 / PR / LETTRES
Collective ++ Travailler en équipe
DIRCOMP / UMR PRAG Engagement organisationnel Département ++
Organisationnelle + Vie civique
CNRS/ENS LETTRES
Amélioration des compétences/Facilitation
A18 / MCF / Organisationnelle +++
Engagement professionnel interpersonnelle
LETTRES ADMENS / PRAG Collective ++ Département +++++
+ engagement organisationnel Coordination/Vie civique
CENTRE HIST Individuelle +
Loyauté organisationnelle
A19 / PR / DROIT
DIRCOMP / EA PHILO Engagement organisationnel Organisationnelle Vie civique NSP-1 +
GESTION
A20 / PRESIDENT NC
A21 / VICE- NC
PRESIDENT
NSP : Ne Sais Pas
NSP-1 : Question non posée à l’informateur
NSP-2 : Question posée, laissé sans réponse (a dévié de la question)
NSP-3 : Réponse ambiguë
NC : Non Concerné par l’étude

230
CHAPITRE 7 : ANALYSE INTRA-CAS B

De la même manière que nous avons organisé le chapitre précédent, nous présentons dans ce
septième chapitre les résultats de l’étude du Cas B. Après une description détaillée du
contexte de l’Université B (section 1), nous présentons les résultats en suivant l’ordre des
questions de recherche que nous avons formulées à l’issue de la revue de littérature 74 (section
2), puis nous terminons par une synthèse des résultats, qui vise à répondre à la problématique
générale de la thèse (section 3).

Section 1 : Description de l’Université B

L’Université B est une université pluridisciplinaire dont Santé. Elle dispose de neuf
composantes, dont cinq UFR, un IAE, deux IUT et une école d’ingénieurs. Son offre de
formation se répartit en quatre domaines : Arts, Lettres, Langues ; Droit, Economie, Gestion ;
Sciences humaines et sociales ; Sciences, Technologie, Santé.

Elle compte environ 900 universitaires (enseignants, EC et doctorants) dont 380 EC


(2012) qui représentent 25 % de l’effectif total (enseignants et personnels administratifs), et
17 000 étudiants (2012).

L’Université B est située dans une région industrielle qui connait un recul
démographique lié aux difficultés économiques que connaissent les industries de la région
depuis le début des années soixante-dix. La ville B fait partie des plus grandes communes de
France avec une population d’environ 170 000 habitants (2012). Cette perte démographique
se fait principalement au profit des communes voisines.
65 % des étudiants de l’Université B proviennent du département B. 80 % proviennent
de la région, 15 % du reste de la France et 5 % de l’étranger.

74
Le lecteur peut se référer à la page 117 pour consulter la formulation détaillée des questions et sous-question
de recherche.

231
 Un contexte universitaire très dense

L’université s’inscrit dans un contexte universitaire très dense, que nous présentons
dans la figure 11. L’académie B dont elle dépend compte également une autre université, très
importante en nombre d’étudiants, l’Université Nord-Grande, qui se trouve dans une grande
ville très attractive. L’Université B est entourée, à l’ouest par une université de taille
moyenne, et à l’est par deux autres universités (une de taille relativement identique à
l’Université B et une moyenne). Parmi ces université avoisinantes, l’Université B se sent
particulièrement menacée par l’Université Grande-Nord. L’Université B propose une offre de
formation variée. De plus, elle se trouve à 60 km de distance et est reliée à la Ville B par une
ligne ferroviaire.

Figure 11 : Contexte géographique de l'Université B

Ville Nord-Grande
Ville Nord-Est-Moyenne
Ville Nord-Ouest-Moyenne
Université Nord-
Grande
Université Nord-
Université Nord- Est
Ouest

60 km
Ville B (170 000 hab.)
Ville Est-Moyenne

Université B
17 000 étudiants
Université Est

Académie B

232
Légende :

Université B Académie dans laquelle se situe l’Université B

Ville dans laquelle se situe l’Université B Distance en kilomètres

Université voisine Transport ferroviaire

Ville voisine

 Une création controversée

L’Université B a été créée il y a 45 ans, avec beaucoup de difficultés. Après avoir été
sous la tutelle de l’Université Nord-Grande, elle devient une université de plein exercice sous
la pression de quelques élus locaux. En effet, le Ministère n’était pas favorable à sa création,
ainsi que le rectorat, et les autres universités de la région, surtout l’Université Nord Grande,
car l’offre de formation existait déjà. La création de l’Université B s’est donc opérée en
opposition à l’Université Nord Grande. Certains préfèrent parler de « démarcation » (B3)
plutôt que d’opposition, qui est un terme un peu réducteur.
Les relations entre la Ville Nord-Grande et la ville B ont également toujours été
complexes, avec d’un côté la ville riche, Nord-Grande, et de l’autre la « cité minière » donc
plutôt ouvrière, la ville B. L’identité de l’Université B s’est donc construire dans ce contexte.
La première génération d’EC, qui était présente à la création de l’Université B, reste plutôt
réticente à tout rapprochement avec l’Université Nord-Grande.
Pourtant, 40 ans plus tard, l’Université B est un membre un fondateur actif du PRES
qu’elle a rejoint en 2008, aujourd’hui COMUE, qui regroupe une vingtaine d’établissements,
dont l’Université Nord-Grande, qui est l’établissement le plus important en nombre
d’étudiants. Le Président de l’Université B est très impliqué dans ce PRES et en prend la
direction en 2013. Les experts de l’AERES saluent la décision de rallier le PRES alors
l'université B s'est constituée par autonomisation vis-à-vis de l'Université Nord-Grande.

 Une recherche prestigieuse

L’Université B compte une trentaine d’unités de recherche, dont une vingtaine Unités
Mixtes de recherche (UMR). Parmi ces UMR, deux sont particulièrement reconnues et

233
prestigieuses, dans le domaine des sciences physiques et dans le domaine du Droit.
L’Université B est associée à 6 écoles doctorales (ED), comptant 500 doctorants, pour une
production d’environ 60 thèses par an (2012).

La stratégie du Président de l’Université B est de se rapprocher de l’Université Nord-


Grande, mais tout en affirmant sa différence afin de continuer d’exister. Cela implique de
proposer une offre de formations différente de celle proposée par l’Université Nord-Grande
afin de ne pas voir certaines filières disparaître pour rester une université de proximité. L’idée
développée par la Présidence est « tout seul on va plus vite mais en général à plusieurs on va
plus loin » (B27, Vice-Président).
En matière de recherche, cela implique, d’une part, d’être spécialisé, et d’autre part, de
s’impliquer fortement dans des projets commun avec l’Université Nord-Grande, afin d’être un
acteur de taille. Toutefois, si le Président défend la une stratégie de spécialisation auprès des
instances nationales, il n’impose pas d’axes de recherche à l’ensemble des EC. Il investit en
effet sur les axes forts que sont les sciences physiques en accordant des promotions aux jeunes
EC en sciences physiques, « qui font tourner la machine » (A27), afin que les EC des autres
domaines disciplinaires soit libres du choix de leurs recherches.

 Une identité assumée d’université de proximité

L’université B assume et défend pleinement sa vocation d’offrir une formation


supérieure à une population de proximité, souvent défavorisée. 42 % des étudiants perçoivent
une bourse sur critères sociaux, quand la moyenne nationale s’élève à 34,8 %75.
De nombreux EC évoquent des problèmes graves de discipline, et des difficultés sociales,
familiales et économiques, qui nécessitent une attention et une prise en charge particulière des
étudiants. Les EC évoquent alors le rôle d’ascenseur social de leur établissement. Ils
souhaitent maintenir une offre de formation de proximité, pour ces étudiants qui ne feraient
pas d’études supérieures si l’Université B n’existait pas car ils ont les plus grandes difficultés
à se rendre dans la ville Nord-Grande pour y étudier, même si elle se trouve à une
cinquantaine de kilomètres de la ville B : « il faut leur [les étudiants] expliquer comment on
va à Nord-Grande, quand on organise un truc à Nord-Grande. Il faut leur donner le plan, le
numéro du bus parce qu’ils sont flippés » (B6).

75
Source : Repères et références statistiques, Ministère, édition 2012

234
Par ailleurs, à cause de l'idée que l’Université B peut disparaître, elle a développé la
nécessité de s’adapter au marché de l’emploi local.

Malgré les difficultés sociales et économiques que rencontrent les étudiants, le niveau
d’exigence académique reste très élevé, ainsi que le niveau général des étudiants. Une
attachée temporaire d’enseignement et de recherche en Droit ayant enseigné auparavant dans
une grande faculté de Droit très prestigieuse nous confie que le niveau d’exigence est
beaucoup plus élevé à l’Université B.
D’autres EC en histoire nous expliquent que les étudiants du département d’histoire
obtiennent de bons résultats au CAPES. Ils ajoutent qu’ils sont sensibles à la nécessité
d’adapter l’enseignement au profil des étudiants, mais sans baisser les exigences.

 Des acteurs divisés face à la LRU

L’histoire de l’Université B est marquée par l’application de la LRU en 2009.


L’application de loi LRU s’est faite à peu près au même moment que l’entrée dans le PRES.
La période 2007-2009 est donc une période de grands changements pour l’Université B, qui a
marqué les esprits. Les acteurs ont donc du mal à « dé-corréler » les effets de l’un et de l’autre
changement (A3).
Si la volonté du Président était de se faire reconnaître en tant que « petite université »
(B21) en développant l’idée que « dès qu’il y a une réforme, il faut y aller » pour « toujours
être le meilleur élève » et « être sûr de ne pas se faire couper la tête » (B21), les réactions des
acteurs furent très diverses. Les acteurs étaient très divisés, que ce soit les étudiants, le
personnel administratif ou les enseignants. Ainsi, le mouvement de mobilisation était assez
important et « ça a été une période assez violente, et je pense qu’il y a des traces après aussi
entre collègues, entre… enfin… les relations de travail » (B21). B25 nous confie y avoir
« perdu une amie ».
Le mouvement de mobilisation a commencé dès janvier 2009 avec des premières
réunions, des premières Assemblées Générale, et donc très vite, un mouvement de grève a pris
forme et de blocage de l’Université par les étudiants, qui a duré assez longtemps, jusqu’au
mois d’avril (B21). Plus le mouvement durait, plus la situation de venait tendue, devant la
crainte que les étudiants ne puissent pas passer leurs examens, devant les postures qui
commençaient à diverger de plus en plus entre ceux qui voulaient une réforme mais pas de
cette manière, ceux qui étaient totalement contre l’autonomie, etc. La position des EC qui

235
avaient des responsabilités institutionnelles était difficile à assumer. Le directeur de l’UFR
SHS devait s’assurer de la sécurité de tous dans un contexte de blocage, recevait des mails des
parents qui n’étaient pas contents, qui s’inquiétaient parce qu’ils payaient un logement à leur
enfant, et qui voyaient les semaines défiler, et que leur enfant n’avait pas un cours (B21).

 Les deux composantes étudiées

Nous avons étudié les facultés de Droit et SHS, toutes deux situées sur le campus
universitaire, à 500 mètres du bâtiment de l’Administration centrale.
La faculté de Droit compte moins de 1500 étudiants et 30 EC.
La faculté SHS compte moins de 1900 étudiants et 38 EC. Elle est divisée en six
départements ayant chacun un directeur : Information et Communication, Sociologie,
Géographie, Patrimoine, Histoire, Sciences de l’éducation.

Section 2 : Réponses aux QR

2.1. Types de comportements (envers l’organisation et envers la profession) que les EC


adoptent dans le cadre de leur mobilisation collective (QR1)

2.1.1. Point de vue des dirigeants

L’équipe de direction de l’université souligne le besoin croissant de mobilisation collective de


la part des EC, à cause du contexte de réforme des universités françaises :

« J’aimerais d’abord commencer par vous dire qu’il y a certainement besoin d’une mobilisation
collective dans le cadre des nouvelles lois. Nous sommes une université qui a opté pour les
responsabilités et compétences élargies, ce qu’on appelle en un seul mot l’autonomie, et en même
temps nous intégrons un pôle de recherche et d’enseignement supérieur où nous sommes
relativement petit par rapport à nos partenaires donc à côté de grandes universités et d’autres
institutions, des écoles d’archi, etc. etc. donc c’est vrai qu’il y eu besoin de concevoir une
stratégie globale tandis qu’auparavant on était plutôt sur une réussite individuelle ce n’est pas
facile parce qu’on n’est pas habitué à ce type de conception. La conception de l’établissement est
en général réservée à la gouvernance, à l’équipe de direction, et quand vous descendez dans la
structure les gens cherchent des optimums locaux par composante, par département, par
laboratoire, donc pour évoluer vers une conception plus universelle de la performance » (B26,
Vice-Président).

236
Pourtant, l’équipe de direction reconnait la difficulté qu’elle rencontre à encourager cette
mobilisation collective :

« Il y a peu d’initiatives de type bottom-up. La communauté universitaire ne s’est pas réunie pour
concevoir une stratégie d’établissement. C’est plutôt des initiatives top-down, c’est-à-dire des
initiatives émanant de la direction centrale. En matière de qualité par exemple, hier le conseil de
l’administration de l’université a approuvé une charte de l’audit interne, cette charte a été
construite par deux personnes, le directeur général des services et moi-même. Nous l’avons
soumis au président de l’université qui a suggéré des modifications ici et là, on a abouti après
quelques mois de travail à un projet de charte qui a été soumis au conseil d’administration qui l’a
approuvé à l’unanimité mais là, la communauté d’enseignants-chercheurs est quasiment absente,
elle est représentée par les élus du conseil mais elle n’agit pas comme un ensemble d’individus,
elle agit par représentation » (B26, Vice-Président).

« C’est là qu’on est relativement fragile, parce qu’on ne peut pas grand-chose par rapport à ceux
qui disent non. On ne peut pas grand-chose par rapport à ceux qui abandonnent au-delà d’un
certain temps […] Il ne faut pas lâcher. Je pense qu’il faut s’y tenir quoi. C’est un travail
permanent, la mobilisation collective. Elle n’est pas actée à un moment, c’est fait, c’est bon, on y
va. C’est un travail permanent, permanent, permanent, permanent » (B13, Vice-Président).

Concernant les comportements de mobilisation collective à proprement parlé, être


mobilisé c’est tout d’abord accomplir le travail prescrit, c’est-à-dire dans le rôle. Néanmoins,
il souligne la difficulté qui existe concernant la définition de ce travail dans le rôle :
« Le forfait de base, c’est qu’il [l’enseignant-chercheur mobilisé] assume les missions de
l’enseignant-chercheur. Alors, le problème des missions de l’enseignant-chercheur, c’est que si on
regarde les textes, les enseignants-chercheurs assument toutes les missions des universités. Donc,
ça veut dire qu’ils doivent s’occuper de faire de la recherche, de faire de l’enseignement, de la
diffusion de savoir de l’insertion professionnelle… Enfin, il y en a 7 ou 8 critères comme ça. Alors
par contre, le texte ne dit pas qu’ils doivent assumer toutes les missions des universités tout le
temps et simultanément » (B3, Vice-président).

Ensuite, un EC mobilisé accomplit des actions qui vont au-delà du travail prescrit, c’est-à-dire
des actions hors-rôle, comme le dévouement dans le travail :

« Quelqu’un qui s’implique dans son établissement, c’est quelqu’un qui assume sa part du
système. C’est-à-dire qu’assumer sa part du système, ce n’est pas faire 192 heures et rentrer chez
soi » (B3, Vice-Président).
« C’est un collègue qui accepte de réaliser un certain nombre de tâches qui vont, bien
évidemment, au-delà du cours et de la recherche » (B13, Vice-Président).

Ces actions concernent également la participation à la vie civique interne. En premier lieu,
les vice-présidents citent les responsabilités administratives liées au pilotage des formations,
au fonctionnement des facultés, à l’organisation de la recherche et à la participation aux
différents conseils représentatifs. La mobilisation collective pour la performance de
l’université concerne également la participation aux événements de type forums de
l’enseignement supérieur, journées des métiers, et Salons de l’étudiant (B3 et B13, vice-

237
présidents). La mobilisation collective se traduit également par des efforts d’amélioration
continue : « organisation de nouvelles formations », « imaginer des choses nouvelles »,
« proposer des partenariats » (B3, Vice-président). Enfin, la mobilisation collective peut
également se traduire par des efforts orientés en particulier vers les usagers : « s’impliquer
très concrètement auprès des étudiants, en étant senior référent par exemple » (B3, Vice-
président).

2.1.2. Description des dimensions et orientations de la mobilisation collective

11 répondants font part de la difficulté de la mobilisation collective dans le cadre de la


profession d’EC, en particulier dans leurs disciplines. Certains nous confient ne pas être à
l’aise avec le travail de recherche en équipe, ce qui limite les efforts de coordination propre au
concept de mobilisation collective :
« Je ne suis absolument pas doué – j’ai dirigé un centre de recherche – je ne suis absolument pas
doué pour le travail de recherche en équipe » (B11)
« Je n'aime pas le travail en commun comme vous l'avez compris, j'aime le travail en
collaboration, j'aime les échanges et je n'aime pas cette idée je dirais de travail du collectif dans
nos disciplines » (B12).

Le travail d’EC en SHS est un travail solitaire, que ce soit en recherche ou en enseignement,
ce qui limite les interactions propices au climat de mobilisation collective. Beaucoup le
déplorent, et en souffrent.
« Alors pour l’enseignement, c’est bien malheureux. Je trouve qu’on est vraiment séparés les uns
des autres, mais ce serait bien qu’on puisse… On est vraiment séparé les uns des autres » (B22).

Après avoir livré leur sentiment sur ce paradoxe, presque tous les répondants ont décrit
un EC mobilisé pour la performance de son université (même si le terme « performance » a
souvent fait l’objet de débat). Soit ils ont décrit ce qu’ils faisaient en tant qu’EC mobilisé, soit
ils ont décrit un EC mobilisé idéal.

Les résultats correspondant aux orientations décrites dans la littérature : individuelle,


collective et organisationnelle. Des dimensions sont très présentes : participation à la vie
civique (11/23), performance dans le rôle prescrit (8/23), dévouement dans le travail (6/23), ,
facilitation interpersonnelle (6/23), coordination avec les autres (4/27), amélioration continue
(3/23), loyauté organisationnelle (3/23), aide apportée aux autres (3/23), orientation vers les

238
usagers (2/23). La dimension la moins citée est esprit sportif (1/23). Conscience
professionnelle et éthique, et amélioration des compétences ne sont pas évoqué.

Certaines orientations sont plus ou moins marquées dans les discours des répondants.
Ainsi, six répondants accordent plus d’importance à l’orientation individuelle, neuf à
l’orientation collective et huit à l’orientation organisationnelle.

2.1.3. Niveau groupal de référence de la mobilisation collective

Pour beaucoup d’EC, ce qui incarne l’université est soit le laboratoire, soit la faculté. Dès lors,
lorsqu’ils décrivent la performance d’une université, ils la décrivent spontanément en fonction
de leur cible d’attachement principal, c’est-à-dire soit la faculté, soit le laboratoire. Rappelons
que le terme « université » ne se réduit pas à l’établissement. Leurs efforts de mobilisation
sont dirigés vers d’autres cibles que l’établissement.

« J’effectue mon travail en termes de recherches donc si vous voulez que je parle de performance,
ça ne concernera pas des machines administratives que sont les universités » (B10) ;

« J’ai toujours été plus attiré par les responsabilités au niveau de la fac qu’au niveau
universitaire. J’ai toujours participé à nombre de conseils de l’université mais je n’ai jamais émis
le moindre intérêt pour des responsabilités au niveau de l’université parce que vraiment ça ne
m’intéresse pas […]. Moi je sais qu’autant je me suis beaucoup investi au niveau de la
composante, autant je me suis jamais beaucoup intéressé à la gestion de l’université sauf pour y
défendre les intérêts [rires] de ma composante quoi. Mais il faut dire, bon moi, la politique de
l’université, je n’ai jamais beaucoup eu envie de m’investir là-dedans quoi » (B1).

Ils sont prêts à se mobiliser dans le sens de la performance (sens construit) de la faculté
ou du laboratoire. Dix EC ressentent un conflit entre ces différentes entités. Ainsi, ils font part
d’un grand malaise dans la direction de leurs efforts de mobilisation collective. Plusieurs EC
perçoivent un conflit entre les niveaux infra-organisationnels.

« Alors là, c’est précisément un des grands clivages entre les universitaires. Les uns estiment
appartenir d’abord à l’Université, les autres d’abord au Centre de recherche, les autres d’abord à
la faculté. Et c’est très net. Donc, j’estime appartenir d’abord à la faculté.
Je crois que dans la faculté… enfin, pour moi en tout cas, il y a une sorte de communauté
intellectuelle… Je crois qu’il y a aussi, il faut le dire, une sorte de communauté culturelle »
(B11) ;

« Moi, je suis vraiment l’enseignant-chercheur qui s’implique dans son département, dans les
masters de sa Faculté, voilà. Plus que dans les Conseils centraux. Vous êtes allée, là-bas ? Au
bunker ? […] Non mais… Là, il y a quand même… Enfin… ça, c’est un avis tout à fait personnel.
Mais lorsqu’on a une Université qui est fermée dans ses conditions… On ne peut même pas
prendre l’escalier, parce que sinon on va être bloqué, je me dis que là, il y a un problème

239
d’ouverture. Comme si… enfin, l’ouverture d’esprit n’y est plus non plus, parce qu’on peut faire
de l’informatique, parce qu’on peut faire de la sécurité, on fait du sécuritaire. Qu’est-ce qu’on va
aller voler là-bas, on s’en fout » (B14).

Il est difficile pour eux de répondre à la fois aux objectifs de performance de leur composante,
de leur laboratoire et de leur université. Ils doivent donc opérer des arbitrages. Ils le font en
fonction de la reconnaissance qu’ils vont obtenir en termes de carrière, et au nom d’une
motivation particulière liée au service public.

« Je pense que la vie d’un universitaire qui veut réussir sa carrière - et ça me paraît absolument
inutile moi - réussir sa carrière c’est quand même surtout au niveau de la recherche, c’est
participer à des séminaires, à des colloques, etc., en fait c’est difficilement conciliable avec la
création d’une équipe permanente, si vous voulez. Au niveau d’une composante, il faut que le
Doyen, il soit vraiment en contact avec ses collègues et qu’il échange beaucoup avec eux ou qu’il
les fasse échanger […]
Je pense qu’en ce qui concerne les responsabilités, ben je ne sais pas moi, je pense que c’est
simplement parce que je m’intéresse aux étudiants […] pour moi effectivement, je pense qu’avoir
des responsabilités administratives c’est aussi développer mes convictions » (B1).

Toutefois, B13, membre de la direction centrale nuance les propos de ses collègues (que nous
lui avons rapportés) en soulignant que toutes ces sous-unités forment un tout et constituent
l’université :

« Mais le labo c’est l’université ! On a une politique scientifique, il y a un conseil scientifique. Si


l’université n’existe pas, il n’y a pas de labo ! En sciences sociales des labos dans le domaine
scientifique il y en aura dans les entreprises évidemment pour la recherche pour la recherche
appliquée pour un tas de choses mais pour les sciences sociales s’il n’y pas d’université il n’y a
pas de labo. Il y en a quelques un au CNRS d’accord mais c’est tout donc en fait c’est
extrêmement lié la formation et la recherche. S’il n’y a pas d’étudiants il n’y a pas d’université et
s’il n’y a pas d’université il n’y a pas de labo. Mais voilà le statut de fonctionnaire d’Etat fait
effectivement que certains collègues peuvent tourner un petit peu en roule libre mais ils ne sont
pas si nombreux en tout cas à l’université B je pense. Je ne constate pas forcément des réalités
telles qu’elles sont ressenties par un certain nombre de collègues » (B13).

Ainsi, au-delà d’un conflit entre les cibles d’engagement, c’est un conflit entre les
différentes sous-unités qui composent l’établissement. Les EC se sentent poussés, parfois
malgré eux, à faire un choix entre une carrière plutôt enseignante et endossent des
responsabilités d’administration de l’enseignement dans leur composante, ou une carrière de
recherche, et endossent alors des responsabilités d’administration de la recherche dans leur
laboratoire. Certains se ménageront du temps pour exercer des responsabilités de mandat au
niveau universitaire parce que leur engagement organisationnel et leur mobilisation collective
envers l’établissement est forte (orientation organisationnelle). Le malaise se manifeste
surtout au niveau des tâches collectives qui ne génèrent pas de reconnaissance au niveau de la

240
carrière. Lorsque les EC s’impliquent dans ces tâches, ils ont l’impression d’être fortement
mobilisés envers l’établissement, au détriment de leur profession. Le conflit n’est pas posé en
termes de contrôle mais en termes de reconnaissance organisationnelle et professionnelle.
Encadré 3 : Cas B - Profil « enseignant » vs profil « chercheur »
B16, directeur CNRS de l’UMR DROIT

Monter en puissance des centres de recherche…


Avec les stratégies nationales qui ont été mises en œuvre et les systèmes d’évaluation qui ont été
mis en œuvre, on a en quelque sorte fait remonter la place des labos dans les stratégies des
universités. Mais ça… C’est en cours, disons. Donc du coup, il a fallu faire des labos un peu plus
serrés, qu’il y ait des modes de fonctionnement un peu plus… qu’il y ait des modes de
fonctionnement ! Déjà. Qu’il y ait quelques règles de fonctionnement. Mais pour beaucoup de
disciplines, c’est assez nouveau. Et c’est même éventuellement contesté. Parce qu’il y a une sorte
de concurrence… C’est ressenti, ça peut être ressenti comme une forme de concurrence entre ce
qui se passe à la Faculté et ce qui se passe dans le Centre de recherche. Parce que « Je fais bien
mon boulot d’enseignant, donc ne m’embêtez pas avec la recherche. Pour certains. […] Il y a une
coopération au mieux et concurrence au pire entre le labo et la Fac. Dans nos disciplines [Droit],
il y avait la Fac, et puis un labo de recherche, puisqu’il en faut bien un. Et les labos de recherche,
ils sont en train de monter en puissance par rapport aux facultés. Mais ça n’est pas sans…
douleur.
Les recrutements des EC : coopération obligée entre centre de recherche et composante…
Il y a une procédure de recrutement, il faut créer un comité… il faut faire un profil de poste, il faut
créer un comité de sélection et cetera. Donc normalement, avec les nouveaux textes, le
responsable de l’UFR et le responsable du labo doivent se mettre d’accord sur le profil de…
Enfin, profil de recrutement… Il y en a 2 du coup. Il y en a 1 chercheur… Il y en a 1 pour le labo,
1 pour la fac. On est supposé trouver quelque chose qui est compatible. Et ensuite, les deux
doivent se mettre d’accord sur le comité de sélection, c’est-à-dire les personnes qui vont siéger
dans le comité pour recruter. Ensuite, il y a un appel d’offre pour la France entière. Mais
évidemment, le comité de sélection, il est recruté en fonction des personnes qu’on a envie de
sélectionner, ce qui n’a rien d’illégitime. Mais encore faut-il du coup arriver à se mettre d’accord
sur les personnes qui vont faire partie du comité de sélection. Et ça, ça suppose d’être à peu près
d’accord sur les personnes, ou au moins sur le profil des personnes qui vont être recrutées. Donc,
il y a une sorte de coopération obligée, et cette coopération obligée, ça peut être très conflictuel.
Les recrutements : priorités du centre de recherche vs priorités de la composante…
Typiquement, là où ça coince le plus - et là, c’est vraiment demander aux universités de faire la
quadrature du siècle - c’est les questions de recrutement. C’est stratégique, puisque quand on
recrute quelqu’un, on va le garder quand même 10, 20, 30 ou 40 ans. Donc, c’est important qu’il
corresponde aux besoins. Mais il y a des besoins des facultés d’un côté, ils ont besoin d’avoir un
cours d’un spécialiste de telle discipline pour de tels enseignements, licence 2, licence 3, master 1
etc. Et puis, il y a les priorités du laboratoire. Et les priorités du laboratoire, ça peut être assez
éloigné des priorités de la faculté. On est sensé se mettre d’accord. Oui, mais enfin, si on n’a pas
les mêmes besoins, c’est assez compliqué. Donc, dans certaines universités ou dans certaines
disciplines, c’est clairement le labo qui choisit. Et d’autres, c’est clairement la faculté qui choisit.
Et on essaie de faire rapprocher des opinions qui sont parfois éventuellement complètement
divergentes.
De l’enseignant-chercheur à l’enseignant ou le chercheur…
Ces deux profils ne sont pas forcément compatibles… Dans le recrutement, on peut recruter
quelqu’un dont on sait qu’il est très investi dans la pédagogie, dans l’enseignement, dans le
fonctionnement de la faculté, l’UFR… ou on peut recruter quelqu’un dont on sait qu’il a plus le
profil chercheur qui ne fait pas d’heures complémentaires, mais qui a des contrats de recherche
en cours. Donc, on voit bien que les profils professionnels, bien qu’ils soient tous enseignants-
chercheurs, on voit bien que les profils professionnels peuvent être très différents.
[…] J’ai envie de quelqu’un qui se présente dans les bureaux ici, qui participe à nos séminaires,
qui apporte sa connaissance aux autres membres du labo, qui ait un mode de fonctionnement…
Qui participe à la production de connaissances du centre de recherche. Et pour ça, il faut qu’il
soit là.
Voilà… Pour travailler sur… Pour être responsable de telle année et s’occuper des étudiants en
désirance, pour travailler sur les maquettes et s’assurer que les enseignements soient compatibles

241
avec les objectifs poursuivis etc. Donc, ils seront plus investis dans l’enseignement. Et les deux, ça
fait beaucoup, sachant qu’en plus, les enseignants, en plus de l’enseignement, ils ont la charge
administrative du fonctionnement de l’Université. Puisque c’est eux qui siègent dans les… qui sont
doyens, qui siègent dans le Comité de faculté, qui siègent dans le Comité de laboratoire etc. Donc,
qui ont une fonction administrative de… pour faire fonctionner la faculté ou pour faire fonctionner
le labo. Et ils ne peuvent pas être partout. Ils ne peuvent pas être partout.

Les résultats concernant la description de la mobilisation collective sont présentés dans le


tableau 38.

Tableau 38 : Cas B – Description de la mobilisation collective (QR1), matrice par répondant

Mobilisation collective
Répondant
Orientations Dimensions Niveau groupal
B1 / PR / DROIT / DIRCOMP/ Collective ++ Facilitation interpersonnelle /
UFR
UMR DROIT Organisationnelle + vie civique
B2 / MCF / HIST / DIRCOMP / Individuelle ++
Rôle prescrit / dévouement UFR
UMR RELI Organisationnelle +
B3 / PR / Vice-Président NC
B4 / PR / DROIT / DIRCOMP / Individuelle ++ Centre de
Rôle prescrit / vie civique
UMR DROIT Organisationnelle + recherche
B5 / PR / HIST / DIRCOMP Individuelle ++ Rôle prescrit / dévouement /
Université
MAND / UMR POL Organisationnelle + loyauté
B6 / MCF / SOCIO /
Organisationnelle Vie civique Equipe de travail
ADMRECH/ UMR SOCIO
Collective +++
B7 / DOCTO / DROIT / UMR Aide apportée aux autres / Centre de
Individuelle ++
DROIT coordination / vie civique recherche
Organisationnelle +
B8 / DOCTO / DROIT / Individuelle ++ Rôle prescrit/dévouement/vie
Université
EXTERNE Organisationnelle + civique/éthique
B9 / PR / HIST ADMENS /
Organisationnelle Amélioration continue Université
UMR TERRI
B10 / PR / HIST / ADMENS / Coordination / facilitation
Collective Profession
UMR RELI interpersonnelle
B11 / PR / DROIT / ADMENS
Individuelle ++
DIRREC / AERES / UMR Dévouement/vie citoyenne UFR
Organisationnelle +
DROIT
Amélioration continue /
Collective ++ facilitation interpersonnelle Centre de
B12 / MCF / HIST / UMR RELI
Individuelle + /orientation usagers/aide recherche
apportée aux autres
B13 / MCF / DROIT / VP /
Organisationnelle Dévouement / vie civique Université
UMR DROIT
Individuelle +++
B14 / MCF / HIST / MAND /
Collective ++ Esprit sportif Département
UMR RELI
Organisationnelle +
Collective +++ Rôle prescrit/facilitation
B15 / DOCTO / SOCIO / UMR
Organisationnelle ++ interpersonnelle/aide apportée NSP-2
SOCIO
Individuelle + aux autres/vie civique
B16 / EC CNRS / DIR UMR
NC
DROIT
B17 / DOCTO / UMR SOCIO NSP-2 Equipe de travail
B18 / PR / GEO / ANC PRS / Collective ++
Coordination NSP-1
UMR TERRI Organisationnelle +
B19 / MCF / DROIT / Organisationnelle loyauté UFR

242
DIRCOMP ADMENS / UMR
DROIT
B20 / DOCTO /SOCIO / UMR
Collective Facilitation interpersonnelle NSP-2
SOCIO
B21 / MCF / SCIPO / Organisationnelle
Vie civique TOUS
ADMRECH, UMR POL
B22 / MCF / DROIT / UMR
Organisationnelle Vie civique UFR
DROIT
Dévouement/travail en
B23 / MCF / DROIT / ADMENS
Collective ++ équipe/orientation vers les Centre de
ADMRECH DIRCOMP MAND/
Individuelle + usagers recherche
UMR DROIT
B24 / MCF / HIST / ADMENS
Collective ++ Centre de
ADMRECH / UMR CNRS Coordination/vie civique
Organisationnelle + recherche
TERRI
Rôle prescrit/facilitation
B25 / MCF / SOCIO / ADMENS Organisationnelle ++ Centre de
interpersonnelle/ loyauté/vie
/ UMR POL Collective + recherche
civique/amélioration continue
B26 / PR / Vice-Président NC
B27 / MCF / Vice-Président NC
NSP : Ne Sais Pas
NSP-1 : Question non posée à l’informateur
NSP-2 : Question posée, laissé sans réponse (a dévié de la question)
NSP-3 : Réponse ambiguë
NC : Non Concerné par l’étude

2.1.4. Comment encourager la mobilisation collective

Certains EC regrettent que leur mobilisation collective ne soit pas encouragée par l’Université
B. B21 souligne qu’il existe des mécanismes d’incitation pour rechercher des financements à
l’extérieur mais ne perçoit pas cela comme un soutien à la mobilisation collective :
« On n’est pas poussé aujourd’hui à se mobiliser collectivement. Si… Enfin… On est plus poussé,
par exemple, à aller chercher des financements. A aller chercher des financements, à se mobiliser
pour aller chercher des financements pour différents guichets, les ANR, les guichets européens,
tous les guichets possibles et imaginables. Mais pour moi, ce n’est pas forcément de la
mobilisation collective. Enfin, c’est de la mobilisation collective pour trouver des sous, mais pas
pour chercher ou pour enseigner » (B21).

B26, vice-président, nous confie se sentir assez démuni face à cette question. L’équipe
de direction souhaite encourager la mobilisation collective des collègues mais ne sait pas
comment s’y prendre. La réflexion porte essentiellement sur la reconnaissance des activités
pédagogiques et administratives dans l’évolution de la carrière. Les pistes envisagées par la
Présidence de l’université correspondent bien aux attentes des EC que nous avons rencontrés.
« Ce serait intéressant d’avoir des suggestions dans la matière parce que c’est un problème qui n’a
pas de solution unique et qui se pose aujourd’hui dans toute l’Europe. Je suis en contact assez
étroit avec la plus grande université portugaise qui n’est pas celle de Lisbonne mais celle de Porto
où il y a un effort énorme pour essayer de réglementer, de cadrer le mieux possible la prise en
compte de l’activité recherche, de l’activité pédagogique et de l’activité administrative. Et ce n’est
pas résolu, c’est toujours en évolution, toujours en discussion. C’est vrai que traditionnellement la

243
promotion dans nos carrières universitaires repose essentiellement sur la recherche. Donc le travail
qui reste à faire c’est plutôt de définir des indicateurs permettant de valoriser la partie pédagogique
et la partie consécration à l’administration » (B26).

B3, vice-président, regrette le manque de marge de manœuvre dont dispose l’Université B


puisque la politique indemnitaire (encadré 4) et la politique de promotion sont encadrées par
le statut de fonctionnaire (encadré 5). Dès lors, il est difficile de reconnaître l’implication des
EC :
« L’échelle de l’établissement, c’est très important. Par pour évaluer, mais pour reconnaître. Je
crois que si localement, on n’est pas capable de reconnaître l’investissement des personnes qui
investissent, l’investissement des gens, ça ne sert absolument à rien. On sera passé à côté, c’est…
enfin, je trouve ça même, quelque part… pas très honnête, comme façon de fonctionner. S’en
remettre toujours à l’extérieur en disant qu’il y a des instances quasiment divines suprêmes qui
décident de ça… par contre, nous localement, on ne peut pas savoir, nous on ne sait pas. Ben non,
c’est faux, on sait ! On sait, parce que… Parce qu’effectivement, sur le terrain, ben… Je crois
qu’il faut… ça doit être pris en compte à un moment ou à un autre au travers de procédures
transparentes, au travers de commissions locales, et puis… Mais on doit pouvoir prendre en
compte le critère de l’implication des gens dans l’évaluation et progression de carrière. […]
Après, on soutient un principe de réalité qui dit que tout ce qui relève de la politique indemnitaire
avec la politique de promotion est strictement encadré. Et donc, on est dans le cadre défini par la
réglementation. Voilà, pour le coup, on se rappelle qu’on a beau être université autonome, on
n’en reste pas moins une université autonome avec un degré d’autonomie qui est proche de
zéro. Et que toutes ces questions-là sont strictement encadrées » (B3).

Encadré 4 : Cas B - La politique indemnitaire nationale (2013) 76

Les indemnités et primes sont votées dans le cadre réglementaire des statuts. Elles sont également liées à
l’exercice de certaines fonctions, activités ou responsabilités. Les principales primes du personnel enseignant
sont les suivantes :
- la Prime de Recherche et d’Enseignement Supérieur (PRES) : prime versée à tous les Professeurs des
universités, Maîtres de Conférences, enseignants-chercheurs associés à temps plein et ATER affectés dans un
établissement d’enseignement supérieur. Son montant est identique pour tous les enseignants : 1 245 € (taux
2012/2013, hors charges) ;
- la prime d’enseignement supérieur : prime versée aux personnels titulaires du premier et second degré en
fonction dans les établissements d’enseignement supérieur relevant du ministre chargé de l’enseignement
supérieur. Son montant est identique à celui de la PRES ;
- la Prime d’Excellence Scientifique (PES) peut être attribuée aux enseignants-chercheurs dont l’activité
scientifique est jugée d’un niveau élevé par les instances d’évaluation et s’inscrivant dans la politique de
recherche de l’établissement. Les taux annuels sont de 7 000 € pour le niveau 1 et de 4 500 € pour le niveau 2 ;
- la Prime de Charges Administratives (PCA) : prime versée aux enseignants titulaires et personnels assimilés
qui exercent des responsabilités particulières au sein de l’établissement. Son montant correspond à celui de
l’heure complémentaire, soit 40,91 € (taux du 1er octobre 2011 hors charges). Les fonctions ouvrant droit au
bénéfice de la PCA et le taux maximum d’attribution de cette prime sont arrêtées par le Président après avis du
CA ;
- la Prime de Responsabilités Pédagogiques (PRP) : prime versée aux enseignants titulaires et personnels
assimilés qui exercent des responsabilités pédagogiques particulières au sein de l’établissement. Son montant
correspond à celui de l’heure complémentaire, soit 40,91 € (taux du 1er octobre 2011 hors charges). Cette prime
doit être comprise entre 12 et 96 h ETD. Les fonctions ouvrant droit à cette prime sont arrêtées par le Président,
sur proposition du CA, après avis du CEVU ;
- la prime d’administration : prime versée au Président de l’Université et au Directeur de l’IUT. Son montant
est fixé par décret ministériel, soit 18 418 € pour les Présidents d’université et 7 335 € pour les Directeurs
d’instituts (taux 2012/2013 hors charges). Une majoration de 50% pour le Président de l’Université et de 25%

76
Source : bilan social 2013 de l’Université B.

244
pour le Directeur de l’IUT est appliquée lorsque l’établissement est passé aux Responsabilités et Compétences
Élargies (RCE).

Encadré 5: Cas B - La politique nationale de promotion 77

Pour les enseignants-chercheurs, l’avancement de grade s’effectue au choix suivant trois voies :
- voie d’avancement dite « nationale » : le Conseil National des Universités dispose au niveau national d’un
contingent d’avancement de grade. Cette instance les attribue au choix aux agents remplissant les conditions
réglementaires et sur évaluation de leur dossier ;
- voie d’avancement dite « locale » : l’Université dispose d’un certain nombre de possibilités d’avancement de
grade et ce sont les instances de l’établissement qui les attribuent aux agents remplissant les conditions
réglementaires et sur évaluation de leur dossier ;
- voie d’avancement dite « spécifique », réservée aux enseignants-chercheurs assurant certaines fonctions
(présidents d’université, directeurs d’UFR, ...).

Ainsi, le système en place offre essentiellement une reconnaissance en termes de promotion


de carrière. Dès lors, seuls ceux qui demandent une promotion verront leurs activités être
évaluées et récompensées :
« Quelqu’un qui ne demande rien, il n’a rien. Quelqu’un qui ne demande rien, il n’est jamais
évalué, il n’a pas… A moins qu’il n’y ait jamais de promotion non plus ! Mais tel que le système
est fait, celui qui ne demande rien, il n’a rien. Mais personne ne lui dit rien » (B3).

Parmi les 27 EC interrogés, le thème du manque de reconnaissance est celui qui apparait le
plus fréquemment (fréquence = 14 ; occurrence = 20). Dix évoquent la reconnaissance non
pécuniaire comme étant un moyen d’encourager la mobilisation collective et trois évoquent la
reconnaissance pécuniaire (tableau 39). Quatre EC font part d’un manque d’espace de
mobilisation collective, quatre de l’avancement de carrière, deux du leadership, un de
l’accompagnement pédagogique, un du projet d’établissement, un du feed back. Enfin, B13,
vice-président, souligne que le recrutement permet d’annoncer le projet de l’établissement et
d’encourager le futur EC à s’inscrire dans ce projet.

Tableau 39 : Cac B - Synthèse des verbatim sur les moyens d'encourager la mobilisation
collective

Répondant Description du thème


B1 / PR / DROIT / DIRCOMP/
NSP-2
UMR DROIT
B2 / MCF / HIST / DIRCOMP
NSP-2
/ UMR RELI
RNP : reconnaissance locale (au niveau de l’Université) de l’investissement
B3 / PR / Vice-Président
à travers une évolution de carrière
RP : Je compare ma situation à un EC suisse. Demain si on m’offre un poste
B4 / PR / DROIT / DIRCOMP /
en Suisse, j’aurais du mal à dire non : je serai payé cinq fois plus.
UMR DROIT
Feed back : la seule reconnaissance qui vaille pour un EC c’est celle des

77
Source : bilan social 2013 de l’Université B.

245
étudiants.
B5 / PR / HIST / DIRCOMP RNP : promotion de carrière sur la base de l’investissement dans les
MAND / UMR POL activités pédagogiques et les activités collectives.
B6 / MCF / SOCIO /
RNP : notre investissement, même s’il porte ses fruits, n’est pas reconnu.
ADMRECH/ UMR SOCIO
B7 / DOCTO / DROIT / UMR RNP : à l’Université B on prend soin de nous dans le sens où on nous laisse
DROIT de temps pour réaliser notre thèse
RNP : notre travail en tant que doctorant n’est pas reconnu, nos activités
B8 / DOCTO / DROIT /
d’enseignement ne sont pas reconnues au même titre que les PR et MCF
EXTERNE
alors qu’elles le devraient
B9 / PR / HIST ADMENS /
NSP-2
UMR TERRI
B10 / PR / HIST / ADMENS /
NSP-2
UMR RELI
B11 / PR / DROIT / ADMENS
DIRREC / AERES / UMR NSP-2
DROIT
B12 / MCF / HIST / UMR
NSP-2
RELI
RNP : je me sens reconnaissante envers l’Université de m’avoir permis à un
moment de ma vie de ralentir pour élever mes enfants. Aujourd’hui je me
B13 / MCF / DROIT / VP /
mobilise pour rendre à l’Université ce qu’elle m’a donné.
UMR DROIT
Recrutement : afficher le projet de l’établissement en invitant les candidats à
participer à ce projet
RNP : celui qui fait des activités qui permettent de « vendre » l’université
B14 / MCF / HIST / MAND /
(en termes de visibilité) sera plus récompensée que celui qui contribue à la
UMR RELI
réussite des étudiants.
B15 / DOCTO / SOCIO / UMR Espace de mobilisation : Proximité physique qui encourage à monter des
SOCIO projets de recherche collective
B16 / EC CNRS / DIR UMR
Espace de mobilisation : créer des moments de discussion collective.
DROIT
Espace de mobilisation : Manque de dynamisme, de partage d’objectif
B17 / DOCTO / UMR SOCIO commun. Manque d’espace intermédiaire qui permet de sortir le chercheur
de sa solitude.
B18 / PR / GEO / ANC PRS /
RNP : prendre davantage en compte les missions publiques
UMR TERRI
B19 / MCF / DROIT /
DIRCOMP ADMENS / UMR NSP-2
DROIT
RNP : la mobilisation collective du doctorant n’est pas reconnu au même
B20 / DOCTO /SOCIO / UMR
niveau que celle des MCF et PR. La mobilisation collective n’est possible
SOCIO
que si tout le monde est reconnu au même niveau.
Leadership du directeur de centre de recherche.
B21 / MCF / SCIPO /
Accompagnement : atelier pédagogique
ADMRECH, UMR POL
Projet d’établissement : projets de recherche
B22 / MCF / DROIT / UMR
NSP-2
DROIT
B23 / MCF / DROIT /
ADMENS ADMRECH
Promotion en termes de carrière
DIRCOMP MAND/ UMR
DROIT
B24 / MCF / HIST / ADMENS
Espace de mobilisation : encourager le travail collectif notamment grâce à
ADMRECH / UMR CNRS
l’assemblée du laboratoire tous les mercredis.
TERRI
RNP : je défends mon centre de recherche parce que j’ai été bien accueilli,
j’ai un bureau, un ordinateur et une équipe superbe, je suis heureux.
B25 / MCF / SOCIO /
RP : je suis prêt à ce qu’on m’évalue, à donner plus de cours, si en échange
ADMENS / UMR POL
on me donne un contrat de recherche ou une petite prime. Voilà, tout
simplement.

246
Reconnaissance des activités pédagogiques et administratives pour
B26 / PR / Vice-Président
l’avancement de carrière
B27 / MCF / Vice-Président NSP- 2
NSP : Ne Sais Pas
NSP-1 : Question non posée à l’informateur
NSP-2 : Question posée, laissé sans réponse (a dévié de la question)
NSP-3 : Réponse ambiguë
NC : Non Concerné par l’étude

2.1.5. Taille du groupe mobilisé

Cinq répondants reconnaissent que le degré de mobilisation collective n’est pas de même
niveau pour tous. Quatre pensent que la mobilisation collective ne concerne qu’un noyau dur
d’EC, sur qui repose le bon fonctionnement de l’université :
« Quand on gratte un peu et qu’on s’aperçoit – et si on s’en aperçoit - que tout le système ne
fonctionne que parce qu’il y a 40 personnes qui s’agitent, et qui traînent les autres derrière »
(B3).

Ces personnes mobilisées se sentent « sacrifiées » :


« Si ça tourne c’est parce qu’il y en a qui sacrifient un peu à leurs connaissances académiques
pour que ça tourne quoi, ou qui se sont trouvés sacrifier par les circonstances » (B6).

2.2. RS de la performance organisationnelle (QR2)

2.2.1. La performance, un mot tabou

Le mot « performance » est peu employé. Certains utilisent le mot de manière ironique :
« On en parle, et je dirais qu’on en parle souvent pour en plaisanter. Parce que le
terme performance - peut-être à tort, peut-être parce qu’il a été mal employé – mais il est devenu
une de ces figures mythiques et emblématiques de la bureaucratie. Donc, c’est en plus le contraire
du management » (B11).

Certains disent ne jamais l’avoir entendu dans le contexte universitaire, ni de la part des
collègues, ni de la part de la direction de l’Université B :
« C'est un vocabulaire que je n'ai jamais entendu, utilisé par mes collègues. […] Donc c'est un
vocabulaire de texte administratif, de texte législatif, c'est un vocabulaire vu de l'extérieur qui ne
rencontre pas d'écho me semble-t-il, ce n’est pas un vocabulaire que s'approprient… pour l'instant
en tout cas… me semble-t-il… mes collègues de lettres et de sciences humaines. […]
Et moi je peux dire que je n'ai pas vu sciemment tenir un discours d'exigence de performance, si
vous voulez de la part de mon autorité de tutelle ici à l’Université B, je pense ici que c'est un
discours qui vient de plus haut » (B12).

247
D’une manière globale, les réformes menées sont peu appropriées par les EC :
« Il y a un grand décalage entre les discours et les réalités, parce que sur le terrain, moi
enseignant-chercheur de base, je n’ai pas vu le moindre changement dans le fonctionnement
depuis la LRU. Si vous me posiez la question qu’est-ce que ça va changer à l’avenir d’un pauvre
enseignant de base ? » (B18) ;

« La performance ça n’existe pas pour nous. Vous voyez c’est très très loin de notre univers.
C’est-à-dire qu’on a en effet des trucs d’évaluation, on en a parlé mais c’est quand même très
éloigné. Donc du coup je pense que les gens ne se sentent pas concernés du tout. […] en même
temps, la loi LRU, honnêtement moi je suis incapable de dire ce qu’il y a dedans. La loi
d’autonomie pas loin je pense qu’une personne qui prend le métro sait mieux que moi quasiment »
(B25).

Selon B16, directeur de l’UMR DROIT, seuls les EC impliqués dans les processus
managériaux sont confrontés au terme « performance » :
« A mon avis, il y a une rupture absolue entre les stratégies d’université et puis le vécu des
enseignants-chercheurs qui ne sont pas du tout au courant… Ils ne sont même pas forcément au
courant de la stratégie de l’université. C’est-à-dire, tous les 4 ans et maintenant tous les 5 ans,
l’université doit remettre à plat ses projets. Donc, éventuellement, certains enseignants-chercheurs
vont s’impliquer dans la confection des maquettes. En même temps… en même temps que les
évaluations des universités, il va y avoir l’évaluation des labos. Donc, certains enseignants-
chercheurs vont s’impliquer dans la confection du rapport d’activités du labo et dans ce qui peut
être considéré comme stratégie et les projets scientifiques du labo. Il y en a qui sont absolument et
complètement à côté de ça, à mon avis » (B16, directeur de laboratoire).

B13, vice-président à l’Université B, souligne effectivement que c’est un mot qu’il faut
employer avec prudence pour ne pas heurter les EC, mais qu’il est nécessaire de l’utiliser afin
de propager la culture de la performance :
« Il faut l’utiliser assez habilement. Je pense qu’il faut être prudent. On est bien obligé de
l’utiliser si on veut distiller cette culture-là. Mais on ne peut pas l’utiliser tout le temps. Parce
qu’il peut provoquer des réactions négatives. Il faut faire très attention avec l’utilisation du mot
performance […]. Parce que ça peut renvoyer à une dure réalité selon laquelle on ne serait pas.
Et ça, c’est parfois difficile à entendre. C’est vrai que dans certains cas, peut-être qu’on ne l’est
pas… Et quand vous avez un discours, quand on recherche la performance, et quand on va aller
vers la performance, ça sous-entend qu’au départ, on ne l’est pas. Et pour certains collègues, c’est
difficile à entendre… Ils ne sont pas bons. Leur formation… n’aboutit à rien » (B13).

Un EC nous confie que le terme est implicite dans les discours de la direction :
« Je pense que la performance c’est de l’ordre du chiffon rouge quoi il y a quand même une
idéologie du service public qui est assez importante et quand on dit performance rien que le fait de
le dire c’est contre-productif donc peut être que l’université est assez intelligente pour ne pas
nous le dire on nous parle beaucoup d’évaluation on nous parle beaucoup de cases à remplir on
nous parle beaucoup d’indices qui permettent d’avoir des postes à la fin de l’année ou des
financements ah si on n’a pas tant d’étudiants qui réussissent on n’aura pas le pognon bon très
bien ça effectivement on l’entend on ne dit pas forcément le mot performance » (B4).

Dès lors, certains ont l’impression que le mot « excellent » a substitué le mot « performance »
dans les discours :
« Peut-être plus excellence que performance qu’on nous a donné comme vocabulaire » (B6).

248
2.2.2. Contenu de la RS

Les thèmes les plus fréquemment abordés pour décrire la performance d’une université sont
l’insertion professionnelle (10/23) : « un maximum d’étudiants puissent obtenir un emploi.
Pour moi c’est ça une université performante » (B7), et « privé/public » : « performance
rappelle l’entreprise » (B22). Ils sont suivis par publication (9/23) : « la performance se
traduit par les publications » (B1), et qualité (6/23). Cette catégorie regroupe des verbatim
liés à la qualité ou à l’excellence de la recherche et/ou de l’enseignement : « plutôt que des
critères strictement statistiques, il y a aussi à prendre en compte quelque chose du plus
qualitatif, de plus impalpable, qui est le jugement global de la communauté scientifique sur le
travail produit » (B12) (tableau 40).
Ces quatre catégories thématiques composent le noyau central de la représentation car ils sont
cités spontanément par au moins 20 % des répondants et sont associées en premier au terme
« performance de l’université » (rang) (tableau 41). En s’intéressant à la valeur affective que
les répondants accordent à ces catégories indice de polarité), il apparait qu’insertion
professionnelle, publication et qualité ont une valeur affective plutôt neutre. Par contre,
privé/public est connoté très négativement dans le discours des répondants : « la notion de
performance est assez violente » (B4), « pour moi, c’est vraiment un vocabulaire qui ne me
plaît pas du tout (B21), « les mots font peur parce que les mots ne sont pas des mots qui
appartiennent à l’univers de la recherche » (B22).

Tableau 40 : Cas B - Catégories thématiques associées à la RS de la performance de


l’université

Fréquence en
Catégorie thématique P Fréquence en %78 Rang79
effectifs (n= 23)
insertion professionnelle 0.6 10 43 2.1
privé/public -1 10 43 2
publication -0.1 9 39 2.2
qualité 0.2 6 26 2.3
réussite -0.2 5 22 1.8
fonctionnement 0.3 4 17 2.5
classement 0.8 4 13 3.25
Evaluation 0.8 4 17 2.5
enseignement 0.7 3 13 2
concurrence 0.7 3 13 2.3
recherche 0 2 9 1.5

78
Fréquence moyenne = 20 %
79
Rang moyen = 2,2

249
Bien-être 1 3 13 2
visibilité 0 2 9 2
pression 1 1 4 2

Tableau 41: Cas B - Analyse structurale de la RS de la performance de l'université

Importance

Grande (< 2,2) Faible (> 2,2)


Privé/public (43%) Qualité (26%)
Insertion professionnelle (43%)
Forte (> 20%)
Réussite (22%)
Publication (39%)
Fréquence Bien-être (13%) Fonctionnement (17%)
Visibilité (9%) Enseignement (13%)
Faible (< 20%) Recherche (9%) Concurrence (13%)
Pression (4%)

Une analyse des réponses par répondants nous permet d’identifier très clairement des profils
(tableau 42). Il apparait deux conceptions de la représentation de la performance d’une
université. Un premier groupe de répondants (B1, B5, B6, B7, B8, B9, B11, B12, B13, B14,
B18, B19, B21, B23) fait part d’une conception plutôt neutre d’un point de vue affectif qui
envisage la performance d’une université comme étant particulière, intégrant l’insertion
professionnelle, la qualité de la recherche et de l’enseignement et les publications scientifique.
Nous nommons cette conception, une conception « pragmatique » de la performance de
l’université.

Un deuxième groupe de répondants (B2, B4, B10, B15, B17, B20, B22, B24, B25) a une
approche très chargée affectivement de manière négative. Lorsque ce groupe évoque la
performance d’une université, il ne cherche pas à en donner une définition mais expose un
point de vue critique sur le bien-fondé de l’application du terme performance à l’université
car celle-ci est une organisation publique.
« Vous pourriez peut-être faire une réflexion là-dessus, sur la performance pour elle-même,
l’indication de performance pour elle-même avec le serpent qui se mord la queue comme ça »
(B2) ;

250
Tableau 42 : Cas B - Synthèse des catégories thématiques associées à la RS de la performance de l'université, par répondant

Catégories thématiques
Répondant P
Rang 1 Rang 2 Rang 3 Rang 4 Rang 5
B1 / PR / DROIT / DIRCOMP/ UMR DROIT Qualité Insertion pro Publication Classement
0,25
(0)80 (+) (0) (0)
B2 / MCF / HIST / DIRCOMP / UMR RELI Evaluation Classement Bien être Entreprise
-0,5
(-) (-) (+) (-)
B3 / PR / Vice-Président NC
B4 / PR / DROIT / DIRCOMP / UMR DROIT Entreprise Qualité Réussite
-0,67
(-) (0) (-)
B5 / PR / HIST / DIRCOMP MAND / UMR POL Publication
0
(0)
B6 / MCF / SOCIO / ADMRECH/ UMR SOCIO Visibilité Insertion pro
0,5
(0) (+)
B7 / DOCTO / DROIT / UMR DROIT Insertion pro Enseignement Publication Fonctionnement
0,75
(+) (+) (+) (0)
B8 / DOCTO / DROIT / EXTERNE Insertion pro Publication Qualité
0
(0) (0) (0)
B9 / PR / HIST ADMENS / UMR TERRI Insertion pro Réussite Visibilité Publication
0,5
(+) (+) (0) (0)
B10 / PR / HIST / ADMENS / UMR RELI Entreprise Publication Evaluation Insertion pro
-1
(-) (-) (-) (-)
B11 / PR / DROIT / ADMENS DIRREC / AERES / UMR Réussite des
Fonctionnement Evaluation Insertion pro Classement
-0,8 étudiants
DROIT (-) (-) (0) (-)
(-)
B12 / MCF / HIST / UMR RELI Insertion pro Classement Qualité Publication
-0,75
(-) (-) (0) (-)
B13 / MCF / DROIT / VP / UMR DROIT Concurrence Fonctionnement Insertion pro
0,33
(0) (0) (+)
B14 / MCF / HIST / MAND / UMR RELI Réussite
0
(0)
B15 / DOCTO / SOCIO / UMR SOCIO -1 Entreprise

80
Le signe ou le zéro entre parenthèses après le nom de la catégorie correspond à l’attitude qui lui est associée. (0) = attitude neutre ; (1) = attitude positive ; (-) = attitude
négative.

251
(-)
B16 / EC CNRS / DIR UMR DROIT NC
B17 / DOCTO / UMR SOCIO Entreprise Bien être
0
(-) (+)
B18 / PR / GEO / ANC PRS / UMR TERRI Enseignement Recherche Entreprise
0
(0) (0) (0)
B19 / MCF / DROIT / DIRCOMP ADMENS / UMR DROIT Fonctionnement Réussite
0
(0) (0)
B20 / DOCTO /SOCIO / UMR SOCIO Publication Pression Entreprise Concurrence
-0,75
(0) (-) (-) (-)
B21 / MCF / SCIPO / ADMRECH, UMR POL Humain Insertion pro Qualitatif
0,33
(+) (0) (0)
B22 / MCF / DROIT / UMR DROIT Entreprise Concurrence
-1
(-) (-)
B23 / MCF / DROIT / ADMENS ADMRECH DIRCOMP
Recherche Publication Evaluation
0
MAND/ UMR DROIT (0) (0) (0)

B24 / MCF / HIST / ADMENS ADMRECH / UMR TERRI Entreprise Qualité Enseignement
0,33
(-) (+) (+)
B25 / MCF / SOCIO / ADMENS / UMR POL Entreprise
-1
(-)
B26 / PR / Vice-Président NC
B27 / MCF / Vice-Président NC

252
« Il faut incontestablement rationnaliser le fonctionnement peut-être faire des économies dans
certains cas mais je ne crois pas que nous puissions avoir une démarche d’entreprise 100% dans
cette maison. Ne serait-ce d’ailleurs que parce que le fonctionnement n’est pas celui de
l’entreprise. Ne serait-ce que parce que vous voyez, vous avez des conseils, vous avez ce qu’on
appelle une démocratie universitaire qui n’est pas du tout forcément une entreprise. Ça, ça me
semble … et puis d’autre part, nous fabriquons du savoir et nous travaillons avec les étudiants
c'est-à-dire avec quelque chose qui n’est pas une matière première, qui n’est pas un produit fini,
qui n’est pas un produit brut. On ne peut pas avoir la même logique avec ce genre de personnes
qu’avec du charbon, du ciment ou de la pâte. Voilà. […] Plutôt que performance, je parlais plutôt
d’excellence. Le mot performance me déplait dans ce contexte » (B24).

Certains répondants évoquent ces deux facettes :


« Je pense que je connais bien le discours de ma collègue B9, je sais très bien que pour elle,
l’université doit-être conduite comme une entreprise. Et moi je pense que ce n’est pas possible. On
ne sabre pas certaines choses sous prétexte que ce n’est pas rentable » (B24) ;

« Je n’utilise pas le terme de performance quoiqu’il en soit dans… À quoi s’appliquerait-il ?


Qu’est-ce qui est performant dans ce que je fais ? Et quel est… ? Je ne produis rien, enfin ils ne
produisent rien de visible, de perceptible et de quantifiable. Voilà, donc à partir de là, le mot
performance ou tout ce qui concerne ce genre de domaine est totalement inopérant, c’est un
plaquage qui provient de discours totalement extérieur et ascientifique, ça nous vient de la gestion
entrepreneuriale etc. du monde de la production. Est-ce que nous appartenons au monde de la
production ? Posez la question. » (B10).

Un professeur, ancien président d’université et membre de l’AERES, nous livre son


explication du rejet du terme « performance » :
« Tout simplement parce que c’est un mot qui est connoté monde de l’entreprise et que
fondamentalement, l’universitaire considère qu’il n’a pas à être géré comme l’entreprise. Et que
sa mission n’est pas celle-là, qui est une mission, surtout en sciences humaines et sociales, où il y
a quand même une dimension culturelle importante, etc. et que ça, ça ne se mesure pas à l’aune de
critères qui sont les critères du monde de l’entreprise.
[…] Le Ministère a utilisé un jargon d’Enarque et que le jargon d’Enarque, il ne passe pas auprès
des collègues universitaires. Il aurait fallu faire un peu plus de pédagogie. Et peut-être éviter
d’utiliser certains termes qui sont de connotation… qui ne conviennent pas à ce milieu. Ce type de
maladresses, on les trouve aussi avec les médecins » (B18).

Une grille d’interprétation commune

Les seules catégories ayant une valence neutre ou positive communes aux deux groupes sont
« qualité », « enseignement », « bien-être ». Ces catégories sont des éléments de définition
communs à tous les EC. En d’autres termes, même s’il existe deux facettes de la RS de la
performance de l’université, tous les EC sont d’accord pour considérer que la qualité,
l’enseignement et la prise en compte du bien-être représentent ce que devrait être la
performance de l’université.

253
2.2.3. Réactions face aux réformes

Le thème des réformes est beaucoup moins abordé spontanément par les répondants du cas B
que ceux du cas A. Nous avons donc posé la question, qui n’a pas systématiquement suscité
de réponse. En général ceux qui ne répondaient pas n’étaient pas très au courant des réformes
en cours et de leurs conséquences. Cinq répondants sont favorables aux réformes en cours
dans l’enseignement supérieur. Huit répondants y sont défavorables et trois tiennent un
discours critique. Cette dernière catégorie renferme deux positions totalement opposées : B12
pense que les réformes ne sont pas adaptées, B18 pense que la LRU n’est pas allée assez loin
dans une logique privée. Il souhaiterait par exemple pouvoir sélectionner les étudiants. Les
critiques vont également à l’encontre du pouvoir accru accordé au Président. Ce pouvoir lui
permet de prendre des décisions seul sans faire un travail de conviction de la communauté
universitaire puisqu’il peut se passer de leur approbation sur certains points. Dès lors, B18
souligne qu’un Président ne peut avoir de légitimité que grâce à son leadership.

B19 est défavorable aux réformes car il voit émerger une culture d’établissement qui affaiblit
celles des composantes. Dans le même ordre d’idée, B20 perçoit la LRU comme une menace
de disparition de certaines composantes. LRU serait particulièrement une menace pour les
petits établissements comme l’Université B qui se verrait rattaché à l’Université Grande-
Nord.

Enfin, B25 souligne que le mouvement de grève en 2009 lors de la réforme des statuts des EC
et de la loi LRU a été très important et engendré une fracture relationnelle entre les EC
favorables aux réformes et ceux qui étaient défavorables. B25 ajoute avoir « perdu une
amie dans cette histoire ».

2.3. Lien entre RS de la performance organisationnelle et engagement envers


l’organisation et engagement envers la profession (QR3)

12/23 répondants mentionnent une forme d’engagement envers l’organisation. Cet


engagement est souvent affectif et se manifeste par un sentiment d’attachement et
d’appartenance.

254
« B est une des universités où à laquelle on s’attache » (B1).
« J’appartiens à cette université » (B15).

L’engagement professionnel est très fort. 18/23 répondants le mentionnent.


Globalement, les Professeurs et Maîtres de Conférences sont heureux d’appartenir à la
profession d’EC, et/ou ont un attachement fort à leur mission d’enseignement et/ou de
recherche. Ils ressentent également une utilité sociale. La profession d’universitaire est pour
eux une profession noble et valorisante.
« C’est ça, la recherche, c’est ça l’enseignant-chercheur. On vient là par passion » (B22).

De nombreux répondants ayant un engagement professionnel soulignent la difficulté


qu’ils ont à se sentir appartenir à leur établissement.

Ainsi, B25, Maître de Conférences en Sociologie, évoque un sentiment d’appartenance à son


centre de recherche mais pas à l’université (en tant qu’établissement) :
« J’appartiens au laboratoire UMR SOCIO […]. J’ai plus un attachement à mon laboratoire qu’à
mon université… parce que pour moi … enfin je fais ce métier pour faire de la recherche.
Ça [le niveau « université »] n’a pas d’existence pour les gens de l’extérieur, je suis de
l’université, je suis universitaire » (B25).

Dès lors, les efforts de mobilisation collective de B25 s’orienteront vers le centre de
recherche :
« quand les gens se mettent à critiquer moi je défends. J’ai le sens pas de la famille » [dimension :
loyauté]
« assister aux séminaires » [dimension : vie citoyenne]
« proposer des séminaires » [dimension : amélioration continue]

« Bon la faculté c'est pareil, c'est un peu, c'est un peu filandreux et je parle même pas de
l'université qui est encore plus lointaine, donc je dirais que de fait, je suis ici dans mon centre de
recherche, la réalité pour moi la plus évidente, c'est l'appartenance au centre de recherche, qui est
là réalité je dirais la plus dense, au contour les plus précis et les plus fermes » (B12) ;

« Alors l’université, franchement, on ne la connait pratiquement pas. Enfin moi en tout cas. Moi je
ne suis pas très douée pour les arcanes du pouvoir, je vous le dis franchement, je ne suis pas
douée. Donc, je vais à l’université quand j’ai besoin d’un papier ou d’un document, mais
autrement, je n’y mets pas les pieds. […] La faculté oui en revanche, oui parce que ce sont les
enseignants-chercheurs qui travaillent, qui font les programmes. Sincèrement, je suis au niveau de
la faculté » (B22) ;

« Appartenance à l’Université, c’est plus diffus, parce que… On a très peu de contact déjà avec
les autres composantes on n’est pas tous sur le même site. C’est très frappant quand on fait des…
J’ai des enfants, on fait… Il y a des arbres de Noël qui sont organisés par l’Université. C’est
toujours très surprenant de se retrouver au milieu en se disant qu’on ne connaît personne. On fait
partie… je ne sais pas combien on est chez nous… Je ne sais pas combien on est de personnel ! On
fait partie... Alors, il y a des gens qu’on croise là sur le site, mais on se connaît très très peu. Et
donc du coup, il y a moins… Oui. Je pense que l’Université essaie de développer ce sentiment
d’appartenance à l’université B » (B23).

255
Six enseignants chercheurs présentent un engagement à la fois à la profession et à
l’organisation (B1, B8, B15, B18, B21, B24). Cinq ont une perception plutôt pragmatique de
la performance de l’université. Par ailleurs, les EC faisant part d’un double engagement ont la
particularité d’avoir des responsabilités importantes (B1 : directeur de composante ; B18,
ancien président d’université ; B21, directeur d’une antenne d’un centre de recherche ; B24,
directeur-adjoint d’un centre de recherche) ou de faire part des trois orientations de la
mobilisation collective (B15). B8 fait part d’un double engagement et d’une mobilisation à la
fois individuelle et organisationnelle, mais pas collective. Doctorant en droit et peu habitué au
travail collectif, il nous confie ne pas être à l’aise avec le travail collectif et le contact avec les
autres. Néanmoins, il se présente comme quelqu’un de volontaire si on a besoin de lui.
Aucun n’a fait part d’un conflit entre ces deux types d’engagement. Organisation et
profession se confondent presque dans leur esprit. En effet, ils considèrent que l’EC « est »
l’université.
« Nous ne sommes pas de l’université B. Nous somme l’université » (B2).

Les EC ayant une conception plutôt philosophique de la performance de l’université ont


tous un engagement professionnel, mais peu organisationnel. Seuls trois d’entre eux ont
également un engagement organisationnel : B15, B17 et B24. B15, une doctorante en
troisième année de sociologie, a un sentiment d’appartenance à l’université B car elle y a fait
toutes ses études. B24 est un professeur d’histoire qui a une grande ancienneté dans cet
établissement, qu’il appelle « cette maison » : « je suis habilité depuis 2002 et maître de
conférences dans cette maison depuis 1997 ». Il a donc développé un sentiment
d’appartenance à l’université B, mais tout en admettant que l’université B « n’est pas toute sa
vie ». Enfin, le cas de B17, doctorant en première année de sociologie, est particulier car son
engagement envers l’université B est purement calculé, parce qu’on ne peut pas faire un
doctorat dans un autre cadre que l’université.

Les EC ayant une conception plutôt pragmatique de la performance de l’université ont


davantage un engagement organisationnel que professionnel ou les deux.

256
2.4. Lien entre engagement envers l’organisation et engagement envers la profession et
mobilisation collective des EC (QR4)

Chaque fois qu’un répondant mentionne une orientation organisationnelle de


mobilisation collective, il fait part également d’un engagement organisationnel (tableau 43).
L’engagement organisationnel est présenté par les répondants comme étant un moteur de la
mobilisation collective :

« Ce qui pousse ? C’est… Je crois qu’il faut… Il y a quand même l’attachement… Enfin, moi en
ce qui me concerne. L’attachement à un établissement. Je dis attachement, parce qu’il est très
attachant, celui-là. Je ne sais pas si je le ferais ailleurs » (B13).

Notons qu’ils préfèrent les termes « établissement » ou « Université B » au terme


organisation qui n’est presque jamais mentionné dans les discours. Cet engagement s’explique
souvent soit par l’ancienneté des EC (certains ayant fortement contribué au développement de
l’université ou, a minima, de leur composante), soit parce qu’ils perçoivent leur établissement
comme l’ « institution Université ».

Une fois encore, l’engagement envers la profession est présenté comme étant un moteur de la
mobilisation collective :

« Qu’est-ce qui me pousse ? J’aime vraiment bien la recherche, l’enseignement dans le fond, il y a
plein de moments que j’aime bien » (B21).

Ils ne perçoivent pas une pression au contrôle de la part de leur université qu’ils
considèrent finalement plus comme une communauté de pairs qu’une organisation classique,
même si la plupart d’entre eux note l’évolution du modèle universitaire vers un type
d’organisation classique.

La mobilisation collective repose donc très souvent sur un engagement organisationnel.

Par ailleurs, lorsque nous interrogeons les EC sur les raisons qui expliquent leurs efforts
de mobilisation, ils nous font part, de manière étonnante, que c’est au nom des valeurs de la

257
profession et des valeurs de service public qu’ils se mobilisent pour la performance de
l’université.
« Ben, la réussite des étudiants, ça passe par des tâches supplémentaires, par exemple, avec les
enseignants référents » (B13-pragmatique).

Les valeurs professionnelles sont constituées principalement de la transmission de la


connaissance à l’ensemble des citoyens (B8, B12, B22, B24), de la liberté intellectuelle
(B11), de la tolérance (B19), de l’ouverture d’esprit (B20), de l’honnêteté intellectuelle (B24),
etc.

La motivation pour le service public (MSP) se décline sous les mêmes dimensions que dans le
cas A : un intérêt porté aux étudiants en difficulté, un intérêt pour les politiques publiques, la
volonté de contribuer à l’intérêt général, un sens du sacrifice personnel et un attachement aux
valeurs publiques telles que l’égalité du citoyen, la démocratie, etc.
19 répondants mentionnent au moins une de ces cinq dimensions.

« B, c’est une ville populaire. On a beaucoup d’étudiants qui sont boursiers ou qui travaillent à
côté… Je pense qu’il doit y avoir… Alors là, il y a eu des études aussi, qui ont été faites par
l’Observatoire de l’Université. On doit avoir peut-être 60 ou 70%, peut-être même plus des
étudiants qui travaillent à côté ou qui… Donc, ça reste quand même une formation ouverte pour
tous, et qui donne la même chance à tous, même si on sait qu’en haut, en Master1, Master 2, ce
n’est pas les enfants d’ouvriers qui y arrivent le plus. On sait bien que plus on monte dans les
études, plus c’est profession libérale et les cadres et les enseignants qui sont représentés, mais ça
reste quand même… une chance d’avoir un diplôme pour tout le monde » (B23-pragmatique).

Tableau 43 : Cas B - Lien entre engagement et mobilisation collective (QR3), matrice par
répondant

Répondant Engagement Mobilisation MSP


B1 / PR / DROIT / DIRCOMP/ engagement organisationnel Collective ++
+
UMR CNRS DROIT + engagement professionnel Organisationnelle +
B2 / MCF / HIST / DIRCOMP / Individuelle ++
Engagement professionnel ++
UMR CNRS RELI Organisationnelle +
B3 / PR / VP NC
B4 / PR / DROIT / DIRCOMP / Individuelle ++
Engagement professionnel ++
UMR CNRS DROIT Organisationnelle +
B5 / PR / HIST / DIRCOMP MAND Individuelle ++
Engagement organisationnel +
/ UMR POL Organisationnelle +
B6 / MCF / SOCIO / ADMRECH/
engagement organisationnel Organisationnelle ++
UMR SOCIO
Collective +++
B7 / DOCTO / DROIT / UMR
Engagement professionnel Individuelle ++ +
CNRS DROIT
Organisationnelle +
Engagement professionnel Individuelle ++
B8 / DOCTO / DROIT / EXTERNE ++
+ engagement organisationnel Organisationnelle +
B9 / PR / HIST ADMENS / UMR engagement organisationnel Organisationnelle ++

258
CNRS TERRI
B10 / PR / HIST / ADMENS / UMR
Engagement professionnel Collective
CNRS RELI
B11 / PR / DROIT / ADMENS
Individuelle ++
DIRREC / AERES / UMR CNRS Engagement professionnel +
Organisationnelle +
DROIT
B12 / MCF / HIST / UMR CNRS Collective ++
Engagement professionnel +++
RELI Individuelle +
B13 / MCF / DROIT / VP / UMR
engagement organisationnel Organisationnelle ++
CNRS DROIT
Individuelle +++
B14 / MCF / HIST / MAND / UMR
Engagement professionnel Collective ++ +++
CNRE RELI
Organisationnelle +
Collective +++
B15 / DOCTO / SOCIO / UMR Engagement professionnel
Organisationnelle ++ +
SOCIO + engagement organisationnel
Individuelle +
B16 / EC CNRS / DIR UMR CNRS
NC
DROIT
Engagement professionnel
B17 / DOCTO / UMR SOCIO ++
+ engagement organisationnel
B18 / PR / GEO / ANC PRS / UMR Engagement professionnel Collective ++
CNRS TERRI + engagement organisationnel Organisationnelle +
B19 / MCF / DROIT /
DIRCOMP ADMENS / UMR engagement organisationnel Organisationnelle
CNRS DROIT
B20 / DOCTO /SOCIO / UMR
Engagement professionnel Collective
SOCIO
B21 / MCF / SCIPO / ADMRECH, Engagement professionnel Organisationnelle
++
UMR POL + engagement organisationnel
B22 / MCF / DROIT / UMR CNRS
Engagement professionnel Organisationnelle +
DROIT
B23 / MCF / DROIT / ADMENS
Collective ++
ADMRECH DIRCOMP MAND/ Engagement professionnel ++
Individuelle +
UMR CNRS DROIT
B24 / MCF / HIST / ADMENS Engagement professionnel Collective ++
+++
ADMRECH / UMR CNRS TERRI + engagement organisationnel Organisationnelle +
B25 / MCF / SOCIO / ADMENS / Organisationnelle ++
Engagement professionnel +
UMR POL Collective +
B26 / PR / VP NC
B27 / MCF / VP NC
NSP : Ne Sais Pas
NSP-1 : Question non posée à l’informateur
NSP-2 : Question posée, laissé sans réponse (a dévié de la question)
NSP-3 : Réponse ambiguë
NC : Non Concerné par l’étude

259
Section 3. Synthèse : Dans quelle mesure la RS de la performance que les
professionnels élaborent oriente-t-elle leur mobilisation collective envers
l’organisation ?

Pour résumer, la technique de codage par comparaison/contraste suggère que les répondants
qui ont une conception plutôt philosophique ont tendance à avoir un engagement
professionnel. Les EC qui ont font part d’une conception philosophique et d’un double
engagement ont des responsabilités importantes ou sont des doctorants qui sont très attachés à
l’Université B à cause de leur statut d’étudiant.

La vision pragmatique est liée à un engagement organisationnel. Néanmoins, B11, B12 et


B23 ont une vision pragmatique de la performance mais ne font pas part d’un engagement
organisationnel. Leur engagement est uniquement envers la profession. Un retour sur leur
discours permet de comprendre ces résultats qui ne correspondent pas aux autres. B11 et B12
ont un profil similaire : ils ne rejettent pas la performance mais ne sont pas d’accord avec la
façon dont elle est mesurée et appliquée à l’Université B. Dès lors, ils estiment que les
procédures mises en place par l’Université B pour améliorer sa performance débouchent au
contraire sur une « contre-performance » (B11). Ce désaccord avec l’Université B à ce
niveau-là peut expliquer qu’ils ne nous aient pas fait part d’un engagement envers
l’Université.
B23 est un EC qui concentre quasiment tous ses efforts de mobilisation sur le centre de
recherche. Dès lors, son engagement professionnel est fort mais l’Université B en tant
qu’organisation prend peu de place, ce qui peut expliquer une absence d’engagement
organisationnel.

Les EC ayant une vision pragmatique ont un engagement organisationnel et font part
d’une mobilisation collective dont les efforts sont essentiellement orientés vers
l’organisation (participation à la vie civique, orientation vers l’usager, etc.).
Les EC ayant une vision philosophique ont un engagement professionnel et font part
d’une mobilisation collective dont les efforts sont essentiellement orientés vers le collectif
(facilitation interpersonnelle, coordination, aide apportée aux autres etc.).

260
Tout comme dans le cas A, il est possible d’avoir également un engagement
professionnel fort. Le malaise dont font part les EC concerne surtout la difficulté à fournir
des efforts de mobilisation envers toutes les sous-unités de l’Université B (composante, centre
de recherche, université, etc.).

261
Tableau 44 : Cas B - Lien entre RS de la performance organisationnelle, engagement et mobilisation collective, matrice par répondant
Mobilisation collective
Répondant RS Engagement MSP
Orientations Dimensions Niveau groupal
B1 / PR / DROIT / DIRCOMP/ engagement organisationnel Collective ++ Facilitation interpersonnelle /
PRAG UFR +
UMR CNRS DROIT + engagement professionnel Organisationnelle + vie civique
B2 / MCF / HIST / DIRCOMP / Individuelle ++
PHILO Engagement professionnel Rôle prescrit / dévouement UFR ++
UMR CNRS RELI Organisationnelle +
B3 / PR / VP NC
B4 / PR / DROIT / DIRCOMP / Individuelle ++ Centre de
PHILO Engagement professionnel Rôle prescrit / vie civique ++
UMR CNRS DROIT Organisationnelle + recherche
B5 / PR / HIST / DIRCOMP Individuelle ++ Rôle prescrit / dévouement /
PRAG Engagement organisationnel Université +
MAND / UMR POL Organisationnelle + loyauté
B6 / MCF / SOCIO /
PRAG engagement organisationnel Organisationnelle Vie civique Equipe de travail ++
ADMRECH/ UMR SOCIO
Collective +++
B7 / DOCTO / DROIT / UMR Aide apportée aux autres / Centre de
PRAG Engagement professionnel Individuelle ++ +
CNRS DROIT coordination / vie civique recherche
Organisationnelle +
B8 / DOCTO / DROIT / Engagement professionnel Individuelle ++ Rôle prescrit/dévouement/vie
PRAG Université ++
EXTERNE + engagement organisationnel Organisationnelle + civique/éthique
B9 / PR / HIST ADMENS /
PRAG engagement organisationnel Organisationnelle Amélioration continue Université ++
UMR CNRS TERRI
Coordination / facilitation
B10 / PR / HIST / ADMENS /
PHILO Engagement professionnel Collective interpersonnelle Profession
UMR CNRS RELI
B11 / PR / DROIT / ADMENS
Individuelle ++
DIRREC / AERES / UMR PRAG Engagement professionnel Dévouement/vie civique UFR +
Organisationnelle +
CNRS DROIT
Amélioration continue /
B12 / MCF / HIST / UMR Collective ++ facilitation interpersonnelle Centre de
PRAG Engagement professionnel +++
CNRS RELI Individuelle + /orientation usagers/aide recherche
apportée aux autres
B13 / MCF / DROIT / VP /
PRAG engagement organisationnel Organisationnelle Dévouement / vie civique Université ++
UMR CNRS DROIT
Individuelle +++
B14 / MCF / HIST / MAND /
PRAG Engagement professionnel Collective ++ Esprit sportif Département +++
UMR CNRE RELI
Organisationnelle +
B15 / DOCTO / SOCIO / UMR PHILO Engagement professionnel Collective +++ Rôle prescrit/facilitation NSP-2 +

262
SOCIO + engagement organisationnel Organisationnelle ++ interpersonnelle/aide apportée
Individuelle + aux autres/vie civique
B16 / EC CNRS / DIR UMR
NC
CNRS DROIT
Engagement professionnel
B17 / DOCTO / UMR SOCIO PHILO NSP-2 Equipe de travail ++
+ engagement organisationnel
B18 / PR / GEO / ANC PRS / Engagement professionnel Collective ++
PRAG Coordination NSP-1
UMR CNRS TERRI + engagement organisationnel Organisationnelle +
B19 / MCF / DROIT /
DIRCOMP ADMENS / UMR PRAG engagement organisationnel Organisationnelle loyauté UFR
CNRS DROIT
B20 / DOCTO /SOCIO / UMR
PHILO Engagement professionnel Collective Facilitation interpersonnelle NSP-2
SOCIO
B21 / MCF / SCIPO / Engagement professionnel Organisationnelle
PRAG Vie civique TOUS ++
ADMRECH, UMR POL + engagement organisationnel
B22 / MCF / DROIT / UMR
PHILO Engagement professionnel Organisationnelle Vie civique UFR +
CNRS DROIT
B23 / MCF / DROIT / Dévouement/travail en
ADMENS ADMRECH Collective ++ équipe/orientation vers les Centre de
PRAG Engagement professionnel ++
DIRCOMP MAND/ UMR Individuelle + usagers recherche
CNRS DROIT
B24 / MCF / HIST / ADMENS
Engagement professionnel Collective ++ Centre de
ADMRECH / UMR CNRS PHILO Coordination/vie civique +++
+ engagement organisationnel Organisationnelle + recherche
TERRI
Rôle prescrit/facilitation
B25 / MCF / SOCIO / Organisationnelle ++ Centre de
PHILO Engagement professionnel interpersonnelle/ loyauté/vie +
ADMENS / UMR POL Collective + recherche
civique/amélioration continue
B26 / PR / VP NC
B27 / MCF / VP NC
NSP : Ne Sais Pas
NSP-1 : Question non posée à l’informateur
NSP-2 : Question posée, laissé sans réponse (a dévié de la question)
NSP-3 : Réponse ambiguë
NC : Non Concerné par l’étude

263
CHAPITRE 8 : SYNTHÈSE ET TRANSITION VERS LA
DISCUSSION

De la même manière que nous avons organisé les deux chapitres précédents, nous présentons
dans ce huitième chapitre la comparaison des résultats obtenus dans les deux cas. Après une
comparaison des contextes des deux universités (section 1), nous comparons les résultats en
suivant l’ordre des questions de recherche que nous avons formulées à l’issue de la revue de
littérature (section 2), puis nous terminons par une synthèse des résultats, qui vise à répondre
à la problématique générale de la thèse (section 3).

Section 1 : Comparaison du contexte des deux cas étudiés

Les deux universités étudiées ont en commun d’être au sein d’un environnement universitaire
dense. C’est ce contexte qui les a poussées à se proposer volontaires pour accéder aux RCE
dès la phase de son lancement. Toutefois, si de manière objective, ce contexte concurrentiel
semble plus important pour l’Université B, il est plus présent dans les discours des répondants
de l’Université A.
Elles se distinguent dans leur rapport à l’université concurrente. Si l’Université A
cherche à s’en dissocier sur tous les points, l’Université B préfère s’en rapprocher afin de
devenir un partenaire important de cette grande université (l’Université Nord-Grande), dont la
notoriété est très importante. Leur mode de gouvernance est également différent. Il est très
participatif dans le cas A, le Président associant les composantes à toutes les décisions, et très
centralisé dans le cas B, les décisions étant prises par une équipe resserrée autour du
Président.

264
Section 2 : Réponses aux QR

2.1. Description des comportements adoptés dans le cadre de la mobilisation collective


(QR1)

Pour le Président du cas A, la mobilisation collective des EC signifie en priorité d’orienter


leurs recherches sur les axes stratégiques décidés par la Présidence et s’impliquer dans les
activités administratives qui découlent des différents projets de changement menés par
l’établissement (essentiellement des activités de rendu de comptes dans le cadre des audits et
des évaluations…). Dès lors, les efforts des EC doivent être alignés sur les axes stratégiques
de l’établissement.
L’équipe présidentielle (les vice-présidents) du cas B envisage la mobilisation
collective de manière plus globale, à la fois dans sa dimension individuelle (respecter les
missions affichées dans les textes et être dévoué dans son travail) et organisationnelle
(participer à la vie civique).

Du point de vue de l’ensemble des EC, être mobilisé se définit en priorité par des
efforts de participation à la vie civique. La dimension participation à la vie civique est
autant abordée par les répondants du cas A (10/19) que ceux du cas B (12/23). La
participation à la vie civique est donc une caractéristique essentielle de la mobilisation
collective des EC pour améliorer la performance de l’établissement. Cette participation à la
vie civique prend plusieurs formes : il s’agit de prendre part aux conseils consultatifs, de
diriger des formations, des composantes (UFR ou département), de diriger des centres de
recherche ou des axes de recherche… ces instances « qui servent à faire vivre l’université »
(A17).
Lorsqu’il s’agit de décrire les dimensions de la mobilisation collective, l’orientation
collective est la plus fréquemment abordée dans les discours des répondants du cas A
(facilitation interpersonnelle 8/19 et coordination 6/19) mais peu dans les discours des
répondants du cas B (facilitation interpersonnelle 6/23 et coordination 4/23). Les répondants
du cas B insistent davantage sur l’orientation individuelle (rôle prescrit 8/23 et dévouement
dans le travail 7/23). Certains soulignent de pas être à l’aise avec le travail en équipe, ce qui

265
restreint les possibilités de facilitation interpersonnelle, de coordination avec les autres, et les
occasions d’aider les collègues.

2.1.1. Niveau groupal de référence de la mobilisation collective

Pour beaucoup d’EC du cas A et du cas B, les efforts de mobilisation collective s’orientent
vers une autre entité que l’université considérée globalement. En effet, ce qui incarne
l’ « université » est soit le laboratoire, soit la composante de rattachement (l’UFR ou le
département). Dès lors, lorsqu’ils décrivent la performance d’une université, ils la décrivent
spontanément en fonction de leur entité d’engagement.
Par conséquent, le vocabulaire employé par les EC est primordial à la compréhension
de la mobilisation collective. Lorsqu’ils veulent parler de l’université en tant qu’organisation,
ils utilisent le terme « établissement ». Nous adoptons ce terme.

De nombreux EC du cas A avouent que leurs efforts se dirigent en priorité vers leur
composante (UFR ou département) (8/19) alors que beaucoup d’EC du cas B soulignent que
leurs efforts s’orientent en priorité vers leur centre de recherche (7/23). Cette prédominance
pour le centre de recherche est particulièrement vraie pour les EC en Droit qui sont rattachés à
une Unité Mixte de Recherche (associée au CNRS) de renommée nationale et unique dans la
région.
Une explication complémentaire de cet intérêt pour le centre de recherche peut être
trouvée dans l’organisation géographique du campus du cas B. Un bâtiment sur trois étages
est dédié aux centres de recherche à quelques pas des bâtiments des UFR. Beaucoup des EC
que nous avons rencontrés ont leur bureau dans ce bâtiment et rejoignent l’UFR uniquement
au moment de donner des cours. À contrario, les EC plaçant la composante en priorité ont leur
bureau dans le bâtiment de l’UFR et leurs efforts quotidiens sont dirigés vers la composante
(conseils d’UFR, direction de formation, participation au JPO, etc.). Alors que dans le cas A,
le discours sur la menace de rattachement à l’Université Nord a conduit l’Université à
redonner pertinence aux formations pour contribuer à l’environnement local. Cela peut
expliquer la plus forte proportion à citer l’UFR comme cible prioritaire de mobilisation
collective.

Une autre distinction est à noter. Certains EC du cas B font part d’un grand malaise
concernant la direction de leurs efforts de mobilisation collective. Ils perçoivent un conflit

266
entre les sous-unités de l’université. Les explications fournies laissent penser à un conflit
d’ordre identitaire. Il est plus logique pour eux de concentrer leurs efforts vers des actions qui
concernent directement leur discipline, en particulier le cœur de leur profession :
l’enseignement et la recherche.

2.1.2. Comment encourager la mobilisation collective

Les thèmes les plus fréquemment cités par les EC du cas A et du Cas B appartiennent
au champ de la gestion des ressources humaines. Le thème le plus fréquemment cité concerne
la reconnaissance. Il est souvent lié de manière négative à la mobilisation collective dans les
discours. La catégorie « reconnaissance » est découpée en deux sous-catégories : la
reconnaissance pécuniaire (RP) et la reconnaissance non pécuniaire (RNP).

Le leadership du Président est une source de mobilisation collective abordée dans le cas
A et non dans le cas B.
Le mode de gouvernance de l’université A repose sur un management participatif.
Depuis l’élection du Président, une équipe hebdomadaire a été mise en place, regroupant
l’équipe présidentielle, composée du Président, du DGS, des vice-présidents, et des chargés
de mission, et les directeurs des composantes. Les décisions et les projets concernant
l’université sont donc discutés avec les directeurs de composantes qui apprécient ce mode de
gouvernance qui permet de les associer au pilotage de l’université :
« il y a une volonté de travailler en commun d’avoir cette vision commune sur nos atouts aussi sur
nos faiblesses […]. Donc ça c’était un gros progrès et c’est vrai qu’on partage des choses, qu’on
anticipe beaucoup, je crois que ça contribue d’une certaine façon à une certaine
performance » (A19)

Par ailleurs, le président est également régulièrement invité (accompagné du DGS) dans les
composantes afin de répondre directement aux questions que se posent les EC.

Le mode de gouvernance du cas B est différent. La gestion est centralisée autour du


président et les composantes ne sont pas associées aux prises de décisions stratégiques.
Cette différence de mode de gouvernance se ressent dans les discours respectifs : les EC
du cas A citent spontanément les axes stratégiques poursuivis par l’établissement, disent y
adhérer et se mobiliser dans ce sens (en alignant leurs recherches sur les axes de recherches de
l’établissement par exemple). Les EC du cas B ne font quasiment jamais référence à la

267
stratégie poursuivie par l’établissement (la connaissent-ils ?) et leurs efforts de mobilisation
collective ne sont pas alignés sur les axes stratégiques de l’établissement.

2.1.3. Taille du groupe mobilisé

Dans les deux cas, les répondants soulignent spontanément mais pas dans les mêmes
proportions (cas A : 10/19 ; cas B : 5/23) que la mobilisation collective repose sur un petit
nombre d’EC, qui assurent le bon fonctionnement de l’établissement. Beaucoup le regrettent
et avouent un certain épuisement.

2.2. RS de la performance organisationnelle (QR2)

Dans le deux cas, il apparait deux conceptions de la représentation de la performance d’une


université : une conception « pragmatique » de la performance de l’université et une
conception « philosophique ». Les éléments communs aux deux cas sont l’insertion
professionnelle et les publications scientifiques. Ces éléments sont donc incontournables et
non négociables pour les répondants. Ces catégories sont des éléments de définition communs
à la majorité des EC. En d’autres termes, même s’il existe deux facettes de la RS de la
performance de l’université, tous les EC seront d’accord pour considérer que les publications
scientifiques et l’insertion professionnelle des étudiants représentent ce que devrait être la
performance de l’université.
La conception philosophique de la performance de l’université est très chargée
affectivement de manière négative. Lorsque ce groupe évoque la performance d’une
université, il ne cherche pas à en donner une définition mais expose un point de vue critique
sur le bien-fondé de l’application du terme performance à l’université car celle-ci est une
organisation publique. Les répondants du cas B sont plus nombreux que les répondants du cas
A à évoquer la catégorie « Privé/Public », qu’ils y soient favorables ou pas. Cette catégorie
fait même partie du noyau central de la RS de la performance de l’université alors que dans le
cas A la catégorie « Privé/Public » fait partie de la première périphérie. En d’autres termes,
les répondants du cas A sont nombreux à citer la catégorie « Privé/Public » mais n’y
accordent pas une grande importance dans la définition de la RS de la performance de
l’université.

268
La catégorie qui définit le mieux la performance de l’université pour les répondants du
cas A est la qualité des services fournis aux usagers, alors que les répondants du cas B sont
nombreux à la citer mais sans y accorder une grande importance dans la définition de la RS de
la performance de l’université.

2.3. Lien entre RS de la performance organisationnelle et engagement (QR3)

Une distinction importante est à noter concernant les cibles d’engagement. Les EC du cas A
font part d’un engagement essentiellement organisationnel (12/19) alors que l’engagement des
EC du Cas B est essentiellement professionnel (18/23). La présence d’un double engagement
est quasiment identique sur les deux terrains : quatre EC du cas A et six du cas B font part
d’un engagement à la fois professionnel et organisationnel.

Dans le cas A, lorsque l’EC cumule engagement professionnel et engagement


organisationnel, cela ne génère pas de conflit mais un léger malaise qui s’explique par la
difficulté à déployer autant d’énergie envers la profession qu’envers l’établissement.
À contrario, de nombreux répondants du cas B ayant un engagement professionnel
soulignent la difficulté qu’ils éprouvent à se sentir appartenir à leur établissement. Les
répondants qui ont un engagement à la fois envers leur profession et envers l’établissement ne
mentionnent pas de conflit car organisation et profession se confondent presque dans leur
esprit. En effet, ils considèrent que l’EC « est » l’université. Ils ressentent un conflit
davantage au niveau de la mobilisation envers les niveaux infra-organisationnels qu’au niveau
de l’engagement, là où les EC du cas A distinguent les niveaux infra-organisationnels et les
perçoivent comme liés et faisaient partie d’une même organisation.

Une similitude intéressante à souligner également. Dans les deux cas, la vision
philosophique semble liée à un engagement professionnel et peu organisationnel (dans sa
forme affective), alors que la vision pragmatique semble liée à un engagement
organisationnel ou aux deux.

269
2.4. Lien entre engagement et mobilisation collective (QR4)

Dans les cas A et B, l’engagement organisationnel est présenté par les répondants comme
étant un moteur de la mobilisation collective. L’engagement envers la profession est
également présenté comme un moteur de la mobilisation collective.

Dans les deux cas, les répondants mentionnant une orientation organisationnelle de
mobilisation collective font part également d’un engagement organisationnel.
Les EC qui font part d’un engagement professionnel et organisationnel à la fois sont
ceux qui font part des trois orientations de la mobilisation collective : individuelle, collective
et organisationnelle.
Leur engagement envers la profession les pousse à des efforts de mobilisation
individuelle tels que le dévouement dans le travail de recherche et d’enseignement (travailler
à la maison pour finir un article par exemple) et leur engagement envers l’organisation les
pousse à entreprendre des actions directement orientées vers l’organisation telles que la
participation à la vie civique (assister aux réunions, participer à la Journée Portes Ouvertes,
etc.). Lorsqu’ils font part d’un engagement essentiellement organisationnel, ils vont prioriser
l’orientation organisationnelle de la mobilisation collective, au détriment de l’orientation
individuelle. Leur conception de la carrière professionnelle est peu basée sur une vision
traditionnelle qui met en avant la performance individuelle en matière de recherche, mais
davantage sur une implication et une évolution au sein de l’établissement.

Par ailleurs, lorsque nous interrogeons les EC sur les raisons qui expliquent leurs
efforts de mobilisation, ils nous font part, de manière étonnante, du fait que c’est au nom des
valeurs de la profession et des valeurs de service public qu’ils se mobilisent pour la
performance de l’université (cas A 17/19 ; cas B 19/23). Nous utilisons l’expression de
« motivation au service public » (MSP) pour rendre compte de cette manière dont les EC
expliquent leurs comportements de mobilisation collective envers l’organisation ; cette
motivation au service public influence ainsi leurs comportements, qu’ils aient une conception
philosophique ou pragmatique de la performance organisationnelle. Cette motivation pour le
service public se décline sous des dimensions identiques dans les cas A et B : un intérêt porté
aux étudiants en difficulté, un intérêt pour les politiques publiques, la volonté de contribuer à
l’intérêt général, un sens du sacrifice personnel et un attachement aux valeurs publiques telles
que l’égalité du citoyen, la démocratie, etc.

270
Section 3 : Réponse à la problématique

Rappel de la problématique : Dans quelle mesure la RS de la performance que les


professionnels élaborent oriente-t-elle leur mobilisation collective envers l’organisation ?

L’analyse comparative des résultats des deux cas suggèrent l’existence de quatre
grands profils-type d’EC.
Deux premiers profils concernent la majorité des répondants, cas A et B confondus.
Concernant le premier profil, il s’agit d’EC qui ont une vision pragmatique de la
performance de l’université, associée à un engagement organisationnel et à une mobilisation
essentiellement orientés vers l’organisation (l’établissement). Nous avons nommé ce profil 1
« conviction identitaire/organisationnel »81 Le deuxième profil regroupe des EC qui ont une
vision pragmatique de la performance de l’université, associée à un engagement à la fois
organisationnel et professionnel et à une mobilisation décrite sous ses trois formes
(individuelle, collective et organisationnelle). Nous l’avons nommé « conviction
identitaire/professionnel et organisationnel ». Les EC du troisième profil une vision
philosophique de la performance de l’université, associée à un engagement professionnel et à
une mobilisation essentiellement collective. Nous l’avons nommé « rejet identitaire ».
Le quatrième profil correspond à un EC qui a une vision philosophique de la performance de
l’université, un engagement envers l’université perçue comme une « institution », et une
mobilisation à la fois individuelle et organisationnelle. Nous l’avons nommé « bricolage
identitaire ».
Enfin, les EC mentionnent également de manière spontanée qu’ils se mobilisent pour
la performance de l’université au nom des valeurs de la profession et des valeurs de service
public.

3.1. Profil 1: vision pragmatique/engagement organisationnel/mobilisation


organisationnelle

Ce profil-type a été élaboré en grande partie à partir de la comparaison en termes de


ressemblance/distinction des discours des huit répondants suivants :

81
Nous nommons ici simplement les profils et nous les détaillerons dans le « Chapitre 9. Discussion ».

271
Cas A : A3, A7, A12, A19
Cas B : B6, B9, B13, B19

Les EC qui ont une vision pragmatique de la performance organisationnelle, dont le


noyau de représentation est constitué des grandes missions et valeurs de l’université et de
l’EC (à savoir l’insertion professionnelle et la qualité du service rendu en termes
d’enseignement et de recherche), font part d’un engagement organisationnel et d’une
mobilisation collective constituée d’efforts orientés vers l’université en tant qu’organisation
(l’établissement). La participation à la vie civique est l’élément fondateur de la mobilisation
collective d’un EC envers la performance de l’université. Cette participation se décline
essentiellement à la participation aux différents organes de représentation (les conseils), à la
prise de responsabilités pédagogiques (direction de composante ou de formation), à la prise de
responsabilités de recherche (direction de centre de recherche), mais également à la
participation aux événements tels que les Journées Portes Ouvertes ou les forums étudiants.

Pour soutenir leur mobilisation collective, ces EC disent avoir besoin de


reconnaissance, de la part de l’établissement et de la profession, en particulier de
reconnaissance non pécuniaire (4/8) de leur investissement dans des activités qu’ils jugent peu
reconnues comme l’enseignement et les tâches et responsabilités collectives, mais également
de reconnaissance pécuniaire (3/8). En effet, le sentiment d’iniquité salariale décourage leur
mobilisation collective. Ce n’est donc pas un besoin d’obtenir une rémunération plus élevée à
tout prix qui est relaté, mais surtout que cette rémunération tienne compte des efforts de
mobilisation collective. En d’autres termes, ils désirent que la rémunération soit individualisée
et qu’elle rende compte de leur mobilisation.

272
Figure 12 : Profil 1 : vision pragmatique/engagement organisationnel/mobilisation organisationnel

Reconnaissance au travail
- Reconnaissance Pécuniaire (RP)
(besoin d’équité salariale et de
rémunération individualisée)
- Reconnaissance Non Pécuniaire
Représentation Sociale Engagement Mobilisation collective (RNP)
Organisationnel
Conception pragmatique de la Orientation organisationnelle
*
performance de l’université : Lien psychologique
Insertion professionnelle et avec l’établissement Participation à la vie civique de
Motivation à l’égard du
publications scientifiques l’établissement, de la composante et
du centre de recherche service public (MSP)
Attrait pour les valeurs publiques
comme motivation intrinsèque

Légende

Concepts issus du modèle de recherche

Concepts émergents

* Pour prévenir le risque de circularité des résultats, nous n’avons pas interrogé les répondants sur
les liens de causalité entre variables. Les liens que les répondants ont établi eux-mêmes sont
représentés par une flèche unidirectionnelle , alors que liens que nous avons établis par
simple association sont représentés par une flèche bidirectionnelle .

273
3.2. Profil 2 : vision pragmatique/double engagement/mobilisation renforcée

Ce profil-type a été élaboré en grande partie à partir de la comparaison en termes de


ressemblance/distinction des discours des dix répondants suivants :

Cas A : A2, A14, A16, A18. Les quatre ont une vision pragmatique de la performance
organisationnelle.
Cas B : B1, B7, B15, B18, B21, B24. Parmi eux, deux répondant une vision plutôt
philosophique de la performance universitaire.

Les résultats suggèrent que la mobilisation collective est renforcée lorsque les EC font
part d’un engagement à la fois organisationnel et professionnel. En effet, les EC ayant ce
double engagement font part également des trois orientations de la mobilisation (individuelle,
collective et organisationnelle) et/ou de responsabilités administratives importantes. Les
efforts individuels qu’ils disent fournir prennent alors la forme d’un dévouement au travail (ne
pas compter ses heures, travailler au domicile, etc.), les efforts collectifs prennent la forme
d’actions de facilitation interpersonnelle (nouer des liens avec les collègues, échanger,
discuter, etc.) et de coordination du travail avec celui des autres, et les efforts organisationnels
prennent la forme d’une participation à la vie civique de l’établissement.
Ces EC ont fait le choix d’être autant engagés et mobilisés envers leur profession que
leur organisation même s’ils reconnaissent que cette situation est parfois difficile à vivre. A2
nous confie que lorsqu’il y a trop d’efforts à fournir, il se concentre (malgré tout) sur le cœur
de sa profession : l’enseignement et la recherche, non pas pour manifester une mauvaise
volonté à l’égard de l’établissement mais pour ne pas nuire à son travail. Il s’agit davantage
d’un sentiment de malaise lié à une reconnaissance de l’engagement organisationnel qui n’est
pas à la hauteur de la reconnaissance de l’engagement professionnel, que d’un « conflit »
entre engagement organisationnel et engagement professionnel.
Pour soutenir leur mobilisation collective, ces répondants disent également avoir besoin de
reconnaissance, pécuniaire (4/10) et non pécuniaire (5/10). Trois d’entre eux évoquent
également le besoin d’avoir des espaces de mobilisation collective afin de générer de la
cohésion, de faire des ponts entre l’enseignement et la recherche (A14), etc. Ces espaces
peuvent être physique (réunions, organisation de repas, machine à café, etc., A14) ou virtuels
(partager des ressources pédagogiques ou scientifiques en ligne).

274
Figure 13 : Profil 2 : vision pragmatique/double engagement/mobilisation renforcée

Espace de mobilisation physique ou Reconnaissance au travail


virtuel permettant la cohésion
- Reconnaissance Pécuniaire (RP)
(besoin d’équité salariale et de
rémunération individualisée)
- Reconnaissance Non Pécuniaire
Représentation Sociale Engagement Mobilisation collective (RNP)
Organisationnel
Conception pragmatique de la * + Engagement Individuelle (travail prescrit et
performance de l’université : professionnel dévouement)
Insertion professionnelle et Lien psychologique Collective (facilitation
Motivation à l’égard du service
publications scientifiques avec l’établissement et interpersonnelle et coordination)
public (MSP)
avec la profession Organisationnelle (participation à
la vie civique
Attrait pour les valeurs publiques
+ Responsabilités administratives
comme motivation intrinsèque
importantes

Légende

Concepts issus du modèle de recherche

Concepts émergents

* Pour prévenir le risque de circularité des résultats, nous n’avons pas interrogé les répondants sur
les liens de causalité entre variables. Les liens que les répondants ont établi eux-mêmes sont
représentés par une flèche unidirectionnelle , alors que liens que nous avons établis par
simple association sont représentés par une flèche bidirectionnelle .

275
3.3. Profil 3 : vision philosophique/engagement professionnel/mobilisation collective

Ce profil-type a été élaboré en grande partie à partir de la comparaison en termes de


ressemblance/distinction des discours des cinq répondants suivants :

Cas A : A1, A10, A13


Cas B : B10, B20

Les EC de ce profil ont vision philosophique de la performance de l’université,


exposent un point de vue critique sur le bien-fondé de l’application du terme performance à
l’université car celle-ci est une organisation publique. Ils ont tendance à avoir un engagement
professionnel et peu organisationnel, associé à une mobilisation orientée vers le collectif
(facilitation interpersonnelle et coordination).
Les EC qui s’approchent de ce profil décrivent des efforts de mobilisation essentiellement
tournés vers le collectif professionnel comme : « être solidaire avec les collègues » (A1) et
« avoir le sens de l’équipe, […] monter des projets collectifs et pas uniquement individuels »
(A13). Il s’agit du professionnel « typique », dont la priorité en termes de mobilisation
s’oriente vers les membres de sa profession et les tâches liées directement à la profession. Son
intérêt envers la stratégie affichée par l’établissement est secondaire, sans être nul.

Pour encourager une mobilisation collective davantage orientée vers l’établissement, ces EC
évoquent également un besoin de reconnaissance non pécuniaire (4/5). Le manque de
reconnaissance décourage en particulier les doctorants, qui sont les moins enclins à fournir
des efforts pour l’établissement.

276
Figure 14 : Profil 3 : vision philosophique/engagement professionnel/mobilisation collective

Reconnaissance au travail
Représentation Sociale Engagement Mobilisation collective - Reconnaissance Non Pécuniaire
professionnel (RNP)
Conception philosophique de la * Collective (facilitation
Lien psychologique
performance de l’université : interpersonnelle et coordination)
avec la profession
Attitude négative et critique envers
l’application de la performance à
l’université
Motivation à l’égard du
service public (MSP)
Attrait pour les valeurs publiques
comme motivation intrinsèque

Légende

Concepts issus du modèle de recherche

Concepts émergents

* Pour prévenir le risque de circularité des résultats, nous n’avons pas interrogé les répondants sur
les liens de causalité entre variables. Les liens que les répondants ont établi eux-mêmes sont
représentés par une flèche unidirectionnelle , alors que liens que nous avons établis par
simple association sont représentés par une flèche bidirectionnelle .

277
3.4. Profil 4 : vision philosophique/engagement institutionnel/mobilisation individuelle et
organisationnelle

Les discours des EC qui nous ont permis de construire ce profil sont intéressants car peu
attendus.

Ce profil-type a été élaboré en grande partie à partir de la comparaison en termes de


ressemblance/distinction des discours des six répondants suivants :

Cas A : A1, A4, A11, A13


Cas B : B2, B4

L’engagement de l’EC qui se rapproche de ce profil peut paraitre organisationnel, mais il


s’agit en fait d’un engagement envers l’université perçue comme une « institution » et non
comme un établissement. Il n’est donc pas engagé envers l’établissement A ou l’établissement
B en particulier, mais envers l’ « université publique » en général. Nous avons nommé ce type
d’engagement, un engagement « institutionnel ».

Ces EC qui ont une conception philosophique de la performance de l’université et pas


d’engagement organisationnel, mentionnent tout de même des efforts orientés vers
l’organisation (l’établissement). Ce résultat pourrait être surprenant au regard des résultats
que nous avons exposés précédemment. En les interrogeant sur les raisons qui les poussent à
fournir des efforts envers l’établissement, ils évoquent l’intérêt qu’ils portent aux valeurs
publiques :
« on en restera à notre propre regard, à notre propre volonté d'assurer un bon service public pédagogique.
C'est ça qui me pousse, juste ça, je n’ai pas de pression extérieure de ce point de vue-là » (A11) ;
« Pour moi, le service de l’Etat ça va aussi bien dans le fait que l’institution doit-être efficace » (B2).

Ainsi, l’attrait pour les valeurs publiques est une motivation intrinsèque à l’adoption de
comportements de mobilisation collective envers l’établissement. Cette mobilisation
collective prend la forme d’une participation à la vie civique (participer aux réunions,
s’engager dans les entités administratives, etc.). Les EC sont alors loyaux envers
l’établissement (« être solidaire avec l’université afin qu’elle fonctionne pour le mieux », A1)
qu’ils considèrent comme « l’institution université », même si celle-ci adhère à des valeurs
privées de performance qu’ils ne partagent pas.

278
Si l’intérêt pour les valeurs publiques représente une motivation intrinsèque pour l’ensemble
des EC, tous profils confondus, cet intérêt permet en particulier aux EC du profil 4 de justifier
les efforts qu’ils adoptent pour améliorer la performance de l’établissement. Par ailleurs,
l’étude de la représentation sociale qu’ils se font de la performance révèle qu’ils remplacent le
terme performance par un autre terme, appartenant au vocabulaire professionnel (qualité,
excellence), ce qui pourrait d’ailleurs être une tactique supplémentaire pour justifier les efforts
qu’ils fournissent.

A1 et A13 sont à cheval entre ce quatrième profil et le profil 3. Ce profil 4 pourrait être un
profil de transition vers le profil 3.

Pour encourager une mobilisation collective davantage orientée vers l’établissement, ces EC
évoquent un besoin de reconnaissance, pécuniaire (3/6) et non pécuniaire (4/5), ainsi qu’un
besoin de feed-back de la part des étudiants. Ainsi, B4 estime que « la seule reconnaissance
qui vaille pour un enseignant-chercheur c’est celle des étudiants ».

279
Figure 15 : Profil 4 : vision philosophique/engagement institutionnel/mobilisation individuelle et organisationnelle

Feed-back Reconnaissance au travail


Reconnaissance des étudiants - Reconnaissance Pécuniaire (RP)
(besoin d’équité salariale et de
rémunération individualisée)
- Reconnaissance Non Pécuniaire
Engagement Mobilisation collective (RNP)
Représentation Sociale
institutionnel
Conception philosophique de la * Lien psychologique Individuelle (travail prescrit et
performance de l’université : avec l’Université en dévouement)
Attitude négative et critique envers tant qu’institution Organisationnelle (participation à
Motivation à l’égard du
l’application de la performance à la vie civique
l’université service public (MSP)

Attrait pour les valeurs publiques


comme motivation intrinsèque

Légende

Concepts issus du modèle de recherche

Concepts émergents

* Pour prévenir le risque de circularité des résultats, nous n’avons pas interrogé les répondants sur
les liens de causalité entre variables. Les liens que les répondants ont établi eux-mêmes sont
représentés par une flèche unidirectionnelle , alors que liens que nous avons établis par
simple association sont représentés par une flèche bidirectionnelle .

280
CHAPITRE 9 : DISCUSSION

Plusieurs points importants émergent de la confrontation des deux cas et permettent d’éclairer
la problématique de la thèse : Dans quelle mesure la RS de la performance que les
professionnels élaborent oriente-t-elle leur mobilisation collective envers l’organisation ?

Les résultats soulignent une représentation sociale de la performance de l’université


assez homogène, dont le noyau central est composé de l’insertion professionnelle des
étudiants et la qualité des services. Face à cette représentation sociale partagée, les EC se
divisent en deux groupes : ceux favorables au concept de performance de l’université (que
nous appelons « conception pragmatique de la performance »), et ceux défavorables au
concept de performance de l’université (que nous appelons « conception philosophique de la
performance »), minoritaires.
À l’intérieur de ces deux groupes, les résultats révèlent quatre profils de mobilisation
collective. Certains EC ont un profil à dominante organisationnelle (profil 1), reposant sur une
conception pragmatique de la performance de l’université et un engagement organisationnel.
A l’opposé, d’autres EC, minoritaires, ont un profil à dominante professionnelle, fondé sur
une conception philosophique de la performance de l’université et un engagement
professionnel (profil 3). Puis, entre ces deux profils opposés, se trouvent les majoritaires, qui
s’engagent à la fois envers leur établissement (engagement organisationnel) et envers leur
profession, et ont ainsi une mobilisation collective renforcée (profil 2). Dans le cas A, ce
double engagement ne génère pas de tension, mais un certain épuisement. Dans le cas B, ce
double engagement génère un conflit, car les EC ont l’impression d’être « sacrifiés ». Enfin,
un dernier groupe d’EC possède un profil hybride : une mobilisation organisationnelle et un
engagement professionnel, tous deux fondés sur une conception philosophique de la
performance de l’université (profil 4).

281
Tableau 45 : Profils de mobilisation collective

Conception de la
Type de profil de mobilisation
performance de Engagement Mobilisation
collective
l’université
Profil 1 : conviction identitaire /
Organisationnel Organisationnelle
organisationnel
Pragmatique
Profil 2 : conviction identitaire /
Double Renforcée
organisationnel et professionnel
Professionnel Collective Profil 3 : rejet identitaire
Philosophique
Institutionnel Individuelle et organisationnelle Profil 4 : bricolage identitaire

Nous articulons la discussion des résultats en cinq sections. La première section


propose un retour sur le cadre théorique qui a guidé cette recherche. Dès lors, nous discutons
le concept de mobilisation collective et son lien avec la RS de la performance de l’université
(section 1). Les quatre sections suivantes sont consacrées à une série d’explications des
résultats qui fait appel à d’autres concepts et théories que ceux qui ont cadré initialement la
recherche. Nous détaillons tout d’abord les quatre profils présentés en amont (section 2), puis
nous proposerons ensuite trois explications possibles des résultats que nous avons obtenus.
Tout d’abord, l’hybridation des identités professionnelles peut expliquer la
conciliation entre les engagements organisationnel et professionnel, ainsi que l’existence de
quatre profils distincts d’EC (section 3). Ensuite, le travail de théorisation du changement
opéré par le Président de l’Université A lors du passage aux RCE peut expliquer à la fois la
mobilisation collective des EC au moment de la mise en œuvre de la loi LRU (Grenier et
Zeller, 2014), l’absence de malaise professionnel (Guérin et al., 1999) pour ceux qui ont un
double engagement, et enfin que la représentation de la performance de l’université soit
davantage partagée que dans le cas B (section 4). Pour finir, nous apporterons un éclairage sur
le concept de reconnaissance organisationnelle qui a émergé des entretiens, comme un soutien
d’une mobilisation durable et une lutte contre le sentiment d’épuisement (section 5).

282
Section 1 : Retour sur le cadre théorique de la recherche

Nous discutons dans cette section les résultats obtenus au regard des principaux éléments
abordés dans la littérature : les dimensions de la mobilisation collective (1.1), la taille du
groupe mobilisé (1.2), les orientations de la mobilisation collective (1.3), l’existence de
plusieurs facettes d’une RS (1.4), la relation entre RS et mobilisation collective (1.5), et enfin,
l’existence de grilles de lecture transverses qui s’élaborent durant les interactions entre acteurs
et qui expliquent les phénomènes cognitifs collectifs (1.6).

1.1. Une mobilisation collective qui prend forme d’une participation à la vie civique

De nombreuses études ont montré que les membres des organisations, qu’elles soient privées,
à but non lucratif ou publiques, ne se contentent pas toujours de prendre en charge les tâches
inscrites dans leur contrat (comportement prescrit), mais vont au-delà des comportements
prescrits en cherchant à satisfaire les buts organisationnels (hors rôle) (Simon, 1991). Borman
et Motowidlo (1997) estiment que les comportements au-delà de la tâche contribuent
davantage à la performance des organisations que les comportements dans le rôle, car pour
fonctionner, les structures de travail des organisations contemporaines ont besoin de conduites
orientées vers l'entraide, la coopération, et le soutien des objectifs de l'organisation. Tous ces
comportements sont dits « hors rôle » car ils ne font pas partie du rôle prescrit. Leur absence
ne peut donc pas être sanctionnée mais ils sont très recherchés par les organisations.
Nos résultats révèlent en effet que le type de comportement qui représente le mieux la
mobilisation collective est la participation à la vie civique interne. Cette dimension n’est
pourtant présente que dans deux concepts : celui d’OCB et la mobilisation collective définie
par Tremblay et Wils (2005). En d’autres termes, il s’agit de participer aux réunions, qu’elles
soient obligatoires ou non, de participer aux événements organisés par l’établissement pour le
représenter (Forum étudiants, Journées Portes Ouvertes, etc.), de prendre part aux organes de
représentation (les différents conseils), etc. Ces sont des efforts que les EC doivent se répartir
entre eux afin de faire fonctionner l’organisation, mais aucun dispositif ne peut les y
contraindre. Ce qui nous amène à discuter le point suivant, à savoir la taille du groupe.

283
1.2. Une mobilisation collective reposant sur un petit nombre d’EC très motivés

La littérature offre peu de réponses quant à la taille d’un groupe mobilisé. Tremblay et Wils
(2005) suggèrent l’existence d’une masse critique qui correspondrait à une majorité de
membre de l’organisation. Pour Barraud-Didier (1999), la mobilisation n’existe que si
l’ensemble des membres de l’organisation est concerné. Nous avions plutôt retenu l’approche
de Granovetter (1978) qui suggère que la mobilisation collective repose sur une minorité
active et très motivée. Nos résultats confirment que la mobilisation repose sur « un petit
noyau dur d’EC » (pour reprendre les termes des répondants) qui font « tourner l’université ».
Néanmoins, nous rejoignons Tremblay et Wils (2005) lorsqu’ils soulignent que la
mobilisation doit concerner tous les niveaux de l’organisation. Toutefois, dans une
organisation pluraliste, il s’agit moins de niveaux que de sous-unités.
La stratégie du Président de l’Université A a été d’associer des membres de chaque
composante de l’établissement aux différents projets stratégiques afin de disséminer la
mobilisation collective à travers tous les niveaux. La mobilisation collective prend donc sa
force dans une poignée de professionnels convaincus et fortement motivés. Néanmoins, nos
résultats ont révélé un certain épuisement de ces EC, sur qui reposent de nombreuses tâches
qui finalement ne sont pas prises en compte par leurs collègues. En effet, tout le monde n’a
pas le même niveau de motivation et rien ne peut obliger les EC les moins motivés à adopter
des comportements qu’ils considèrent « hors rôle ». Comme l’ont souligné Katz et Khan
(1996), ce qui fait partie ou non du rôle reste une affaire de perception et c’est le rôle perçu
qui va influencer les comportements. Dans les universités que nous avons étudiées, le contenu
des rôles reste flou (Organ, 1997).

1.3. Une mobilisation multi-cibles

Si le malaise n’est pas ressenti au niveau de l’engagement qui lie l’EC avec l’établissement et
l’engagement qui le lie avec sa profession, il est ressenti au niveau de la cible/de l’unité vers
laquelle se dirige les efforts (composante, centre de recherche, équipe de recherche, etc.). En
effet, l’université est une organisation pluraliste, à l’intérieur de laquelle coexistent plusieurs
sous-unités disposant de leurs propres pouvoirs et ligne hiérarchique (département,
composante, centre de recherche, équipe de recherche, etc.). Les EC peuvent alors ressentir un
réel malaise (Guérin et al., 1999) à fournir des efforts envers toutes ces sous-unités, qui avant
la réforme LRU restaient indépendantes (permettant aux EC de s’investir envers l’une de ces

284
sous-unité sans être en tension avec les autres) et qui désormais sont davantage mises en
interdépendance ; dès lors l’EC se trouve aux prises à des engagements parfois
contradictoires. C’est pourquoi, a contrario, la comparaison des situations des deux études de
cas révèle que lorsqu’ il y a un discours supérieur sur les buts et valeurs de l’établissement,
avec un management très participatif qui intègre pleinement les sous-unités, alors ce malaise
n’est pas ressenti : les sous-unités sont perçues comme faisant partie d’un tout. Être mobilisé
envers la composante sera forcément bénéfique à l’établissement. Il existerait au sein des
organisations pluralistes une mobilisation multi-cibles comme il existe un engagement
multi-cibles. Il est donc peu pertinent de traiter « la mobilisation collective » dans une
organisation pluraliste comme un concept relevant de dimensions identiques parmi tous les
professionnels qui la composent.
Ce dernier point nous amène à discuter la manière de soutenir la mobilisation
collective. Si les différents profils d’EC ont un besoin fort de reconnaissance
organisationnelle et sociale, les EC qui fournissent des efforts envers l’établissement (profil
1, 2 et 3) ont également un besoin de reconnaissance pécuniaire. Les EC des profils 1 et 2
recherchent particulièrement une individualisation de la rémunération fondée sur l’équité et la
méritocratie. Ils sont donc favorables à toute évaluation leur permettant de les distinguer de
leurs collègues. Les EC du profil 3 ont particulièrement besoin de concilier valeurs
publiques et valeurs de marché pour continuer à se mobiliser envers l’organisation (nous
avons initié ce point de discussion dans la partie « Théorisation du changement »).

1.4. Une RS de la performance de l’université à deux facettes

Le noyau central de la RS de la performance de l’université, qui donne la signification à la


représentation (Abric, 2011), est composé de la qualité des services et l’insertion
professionnelle. Le système périphérique de la RS de la performance de l’université, qui est
contextuel, dépendant de l’environnement et des caractéristiques individuelles (Abric, 2011),
est principalement composé des publications scientifiques. Dit plus clairement, la qualité des
services et l’insertion professionnelle sont des éléments incontournables, stables et
indépendants du contexte immédiat de la RS de la performance. Les publications scientifiques
rendent concrète la qualité des services et l’insertion professionnelle en les ancrant dans la
réalité des EC. Ces éléments périphériques sont mouvants et peuvent s’adapter au contexte.
En d’autres termes, la qualité des services et l’insertion professionnelle pourraient prendre une
autre forme que les publications scientifiques si le contexte venait à remettre ces deux

285
éléments en cause, mais toutefois sans atteindre le noyau central. Le système périphérique va
protéger le système central afin qu’il ne disparaisse pas en lui permettant d’intégrer des
informations et des pratiques différenciées (Abric, 2011).

Par ailleurs, nos résultats révèlent l’existence de deux facettes d'une même RS de la
performance de l’université, que nous avons nommées « philosophique » et
« pragmatique ». Les répondants ayant une conception pragmatique sont favorables au
concept de performance de l’université. Ceux ayant une conception philosophique font part
d’un point de vue critique et négatif sur le bien-fondé de l’application du terme performance à
l’université. Ces deux facettes sont « deux ensembles praxeo-discursifs » relatifs à un même
objet et qui se comportent tous deux comme deux RS bien constituées (Milland et Flament,
2010). D'un point de vue méthodologique, il a donc été essentiel de recueillir l'attitude des
répondants à l'égard de l'objet étudié (Milland et Flament, 2010).
Milland et Flament (2010) soulignent que chaque facette peut être mobilisée
indépendamment des autres facettes, et venir compléter l’information donnée par une facette.
L'autonomie des facettes permet de maintenir un certain niveau de cohérence cognitive. Le
fait que chaque facette d'une même RS soit indépendante permet de maintenir un niveau de
cohérence cognitive. Cette autonomie des facettes permet de ne pas affirmer
systématiquement et de façon simultanée deux images qui conduiraient à des rapports
difficiles à exprimer dans une même phrase. Dans notre cas, il serait difficile pour un EC de
dire dans la même phrase « la performance c'est la qualité des services fournis aux usagers
mais le concept de performance ne doit pas être appliqué à l’université ».

Les répondants du cas B ont révélé spontanément leur conception philosophique de la


performance de l’université, ayant conscience qu’il existe une autre conception,
concurrentielle (la conception pragmatique). Les répondants du cas A, ont eu tendance à
« masquer » la conception philosophique de la performance de l’université. Dès lors, en les
plaçant dans une autre condition, c’est-à-dire en leur demandant ce que diraient d’autres EC
sur la performance de l’université, cette deuxième facette s’est révélée. Nous confirmons donc
les résultats de Piermattéo et Guimelli (2012) qui suggèrent que le changement de consigne
d’expression (nommée parfois consigne de substitution) a un impact sur le discours des
répondants. Cette approche par les zones de masquage apporte une conception moins
monolithique de l'approche structurale et considère qu'une même population peut avoir des
images multiples, voire concurrentielles d'un même objet (Milland et Flament, 2010).

286
1.5. Lien entre mobilisation collective et RS de la performance de l’université…

Jodelet (1989b) tire une conséquence essentielle de l’existence de plusieurs conceptions d’un
même objet de représentation sur les comportements : selon les caractéristiques de la
situation, les acteurs vont mobiliser telle ou telle facette de la RS et adopter les
comportements qui lui sont associés. Par conséquent, il devient encore plus difficile de saisir
le lien entre RS et comportements (Mardellat, 2011). Nos résultats nous amènent à
considérer qu’il est illusoire pour un chercheur, dans un contexte mouvant tel que celui que
nous avons étudié, d’affirmer quelle variable influence l’autre. C’est pour cette raison que nos
résultats nous conduisent à un modèle empirique différent du modèle de recherche théorique
de départ : alors que la littérature nous conduisait à imaginer une flèche unidirectionnel qui
liait le concept de RS avec celui d’engagement (lié lui-même au concept de mobilisation), nos
résultats nous conduisent à relier ces deux concepts par une flèche bidirectionnelle (figure
16). Ces deux variables nous semblent interdépendantes, les RS justifiant les conduites et
vice-versa (Weick, 1995).

Figure 16 : Relations empiriques entre RS, engagement et mobilisation collective

Représentations Engagement Mobilisation


Sociales collective
organisationnel
de la individuelle
performance collective
organisationnelle organisationnelle
professionnel

Lien théorique initial

Lien empirique

1.6. Des espaces de mobilisation collective

Enfin, le dernier point du cadre théorique que nous souhaitons aborder est la manière
dont les EC élaborent collectivement la RS de la performance de l’université et se mobilisent
en son nom. Les résultats du cas A révèlent une grille de lecture similaire de l’enjeu de

287
l’amélioration de performance de l’Université A, et ce, malgré des attitudes plus ou moins
favorables à l’égard de la performance. Cette grille de lecture commune semble davantage
être le fruit d’une élaboration dans l’interaction, grâce aux discussions, réunions, ateliers, etc.
(Allard-Poesi, 1997, 1998) mis en place au moment du passage au RCE que de croyances
initiales des EC. Nous discuterons ce point en particulier sans la quatrième partie « Une
théorisation du changement (LRU) fondée sur des valeurs publiques encourageant la
mobilisation collective ».

Section 2 : La profession d’EC : entre logique organisationnelle et logique


professionnelle

À travers les réformes de ces dernières années, le courant NPM a introduit la question de la
performance au sein des établissements universitaires que nous avons étudiés. Ces réformes
ont contribué à transformer la relation des EC avec leur établissement (Musselin, 2008a), en
introduisant une culture d’établissement, et ont introduit des logiques et pratiques
managériales (évaluation externe de la recherche, évaluation de l’enseignement par les
étudiants, alignement des recherches individuelles sur les axes stratégiques affichés par le
Président, prise en compte des besoins du marché du travail pour l’insertion professionnelle
des étudiants, etc.). Ces logiques managériales se sont progressivement installées aux côtés
des logiques professionnelles traditionnelles (indépendance des activités de recherche et
d’enseignement, gestion autonome des activités professionnelles, etc.). Notre recherche, qui
s’est intéressée à la fois à la représentation sociale de la performance d’une université et aux
comportements de mobilisation qui y sont liés, révèle que la majorité des EC a une attitude
favorable envers la performance et les logiques managériales, et qu’ils fournissent des efforts
pour la performance de leur établissement (par exemple, certains alignent leurs recherches
individuelles avec les axes stratégiques de l’établissement).
Pourtant, la littérature dominante a présenté ces logiques comme étant incompatibles
car les professionnels sont soumis à une autorité fondée sur l’expertise alors qu’une
organisation est caractérisée par une autorité basée sur la position hiérarchique et un
« management » fondé sur des outils et pratiques qui ne relèvent pas de la sphère / des normes
de la profession. L’autonomie des professionnels serait alors menacée par des logiques
managériales introduisant un contrôle sur les activités professionnelles. Cette situation

288
génèrerait alors un malaise professionnel qui mettrait à mal la mobilisation collective (Guérin
et al., 1996). Les professionnels qui rejoignent une organisation doivent alors choisir entre un
engagement qui va à l’organisation et un engagement qui va à la profession. Ces pratiques,
managériales et professionnelles, sont toutes deux portées par des valeurs. Freidson (1994)
souligne que plus un professionnel est engagé dans des valeurs professionnelles, plus il
montrera une résistance forte face aux logiques managériales. Plus récemment, les études
menées auprès d’EC de Chatelain-Ponroy et al. (2012a) soulignent également que les EC
engagés envers les valeurs de performance (mesurées par les attitudes envers les
instruments, dispositifs, agences en charge de l'évaluation de la performance, et le degré
d'acceptation de l'introduction de la performance dans l'allocation du budget, au lieu d'un
processus budgétaire qui reproduit un budget formel) ne le sont pas envers les valeurs
publiques (mesurées par le niveau d'adhérence ou de résistance à des mesures qui visent à
transformer le caractère public des universités et/ou de leur mission de service public).
Néanmoins, nos résultats révèlent, de manière émergente, une adhésion aux valeurs
publiques, à travers un intérêt porté aux étudiants en difficulté, un intérêt pour les politiques
publiques, une volonté de contribuer à l’intérêt général, un sens du sacrifice personnel et un
attachement aux valeurs publiques telles que l’égalité du citoyen, la démocratie, etc. Ces
éléments cités spontanément (ce qui leur confèrent une plus grande fiabilité/validité) par les
répondants peuvent être incontestablement rapprochés du concept de Motivation au Service
Public (MSP), que Perry et Wise (1990) définissent comme « une prédisposition individuelle
à agir en réponse à des mobiles caractéristiques des institutions et organisations publiques ».
Les résultats ont fait émerger que la MSP est un facteur explicatif important de la mobilisation
collective. Admettre qu’il existe une motivation « à l’égard du service public » revient à
considérer qu'il existe des sources de motivation spécifiques aux employés du secteur public
car ils portent plus d’importance aux facteurs intrinsèques à l’emploi occupé, notamment le
contenu et le sens des activités (Giauque et al., 2011). La littérature fait état de l’influence
importante de la motivation sur la mobilisation collective. Néanmoins, aucune étude n’a relié
MSP et mobilisation collective pour l’amélioration de la performance organisationnelle,
hormis celle de Desmarais et Gamassou (2012) qui suggère que la MSP peut en outre être
envisagée comme un antécédent fort de la mobilisation. Si les auteures reprennent la
définition de Tremblay et Wils (2005) (à savoir « inciter les employés à travailler ensemble en
vue de réaliser un objectif commun ou un projet collectif » Desmarais et Gamassou, 2012 :
396)), elles ne considèrent pas comme nous que « l’objectif commun » peut être
l’amélioration de la performance de l’organisation publique. Toutefois, en prenant acte des

289
nombreuses études qui ont souligné les conflits entre valeurs publiques et valeurs de marché
(Chanut, Chomienne et Desmarais, 2015), en particulier chez les EC, la MSP ne devrait pas
encourager une mobilisation envers la performance, qui se rattache à des valeurs
concurrentes de marché.
Pourtant, nos résultats révèlent que les EC (profil 1 et 2) que nous avons rencontrés
sont favorables envers les principes de différenciation de traitement des individus (en
particulier l’allocation des moyens basée sur la performance à travers le modèle SYMPA, les
financements ANR et appels à projets internes, ou via des primes ou une modulation de
services), diffusés par les réformes actuelles qui promeuvent une culture du résultat. Le fait
d’avoir interrogé les EC sur leur mobilisation collective, les raisons qui motivent leurs
comportements de mobilisation collective et leur représentation sociale de la performance de
l’université a permis de mettre en lumière ces résultats surprenants au regard des récentes
études. En effet, les études de Chatelain-Ponroy et al. (2012a) et Drucker-Godard, Fouque,
Gollety et Le Flanchec (2013) constatent que les EC ont une attitude défavorable envers les
valeurs d'équité, d'individualisation (en termes de carrière et de rémunération) et d'évaluation
des performances dans la mesure où ils sont portés par des valeurs publiques d'égalité de
traitement.
Néanmoins, nos résultats révèlent des situations différenciées au sein des mêmes
établissements, que nous avons illustrées à travers quatre profils-type d’EC. Ces profils
expliquent la manière dont les acteurs intègrent une mobilisation collective désormais
également orientés vers la performance de l’établissement, et non plus uniquement vers la
profession. Ces différentes réponses apportées par les EC face à la nouvelle logique
organisationnelle confirment le constat fait par Chatalain-Ponroy et al. (2012, 2013) quant à
la faible cohésion de « la communauté universitaire ». Leurs résultats révèlent une certaine
distance entre le « centre » des universités et la « périphérie ». Les réformes menées,
notamment les RCE, ont renforcé les équipes présidentielles et les ont conduites à être plus
distantes en pratiques et en valeurs de la « périphérie ». Si nous avons constaté le même
isolement de l'équipe centrale sur le cas B, il en est tout autre sur le cas A82. D’une manière
globale, la différence s’observe au niveau du corps d’appartenance : les MCF orientent
davantage leur mobilisation collective vers l’établissement que les PR et les doctorants.

82
Nous y reviendrons dans la quatrième partie de cette discussion « 4. Une théorisation du changement (LRU)
fondée sur des valeurs publiques encourageant la mobilisation collective ».

290
Ainsi, nous observons deux grands types de profils, eux-mêmes subdivisés en deux
profils chacun. Les deux grands profils correspondent aux deux conceptions de la
performance : conception pragmatique et conception philosophique. A l’intérieur de ces
deux profils, les engagements et les comportements adoptés ne sont pas identiques. C’est là
où notre approche du lien social (présentée en introduction) nous permet de faire ressortir des
explications d’ordre individuel, relevant de processus psychologiques propres à chaque
acteur. Nous discutons ces quatre profils dans les parties suivantes.

2.1. Une mobilisation collective portée par un engagement affectif envers l’établissement
(profil 1)

Ainsi à l’intérieur du profil « pragmatique », certains EC envisagent leur carrière comme étant
davantage organisationnelle que professionnelle (profil 1). Ils s’identifient à leur
établissement et trouvent leur satisfaction dans les efforts organisationnels. Leurs efforts sont
moins orientés vers l’individuel, surtout en termes de recherche. Leur perception de la carrière
est organisationnelle. Les tâches administratives font parties intégrantes du métier d’EC. Ils
ont des besoins forts en termes de reconnaissance de la part de l’établissement et comparent
leurs résultats et leur investissement à ceux de leurs collègues. Si nous retrouvons des
dimensions de MSP, en particulier la compassion pour l’usager, celle-ci est toutefois moins
présente que dans les discours des autres répondants. L’étudiant reste la justification de la
mobilisation collective. L’établissement doit être performant au nom de la qualité des services
qu’il fournit et de l’insertion professionnelle des étudiants. Ils se mobilisent envers la
performance de l’établissement par conviction identitaire et leur profil est à dominante
organisationnelle. Ils intègrent donc une identité plus organisationnelle pour faire sens de ce
qu’ils font. Ils endossent totalement l’exigence de performance de l’université, employant
sans retenue un vocable du champ de l’entreprise privée (concurrence, excellence,
résultats…). Ils adhèrent le plus fortement au discours sur l’autonomie de leur université. Ils
opèrent même une critique de la figure de l’EC qui se voit toujours comme un professionnel
autonome. En un mot, puisque la profession change, l’identité du professionnel doit changer
aussi.

291
2.2. Une mobilisation collective portée par un double engagement (profil 2)

D’autres EC appartenant au profil pragmatique accordent leur priorité à la fois à la carrière et


à l’établissement par conviction identitaire également, mais leur profil est à la fois
organisationnel et professionnel. Même s’ils ont un fort engagement envers la profession, ils
endossent totalement l’exigence de performance de l’université. Leur mobilisation collective
est renforcée, dans le sens où ils la définissent à la fois dans son orientation individuelle,
collective et organisationnelle et dans la mesure où ils ont des responsabilités administratives
importantes. Ce résultat peut être rapproché de ceux de l’étude menée par Somers et
Birnbaum (2000) auprès de professionnels hospitaliers d’un hôpital américain. Les résultats
de leur étude suggèrent que les professionnels qui présentent un engagement à la fois
organisationnel et professionnel sont ceux qui ont les attitudes au travail les plus positives
(attitudes mesurées par les concepts de satisfaction au travail, d’implication au travail - job
involvement -, et de congruence entre les valeurs personnelles et organisationnelles).
Néanmoins, leur étude ne portait pas sur les comportements. Nos résultats ne peuvent donc
pas être exactement rapprochés de ceux d’autres études antérieures.

2.3. Une mobilisation uniquement professionnelle (profil 3)

La conception « philosophique » laisse aussi entrevoir deux profils différents.

Certains EC rejettent l’application de la performance à l’université (profil 3). Nous avons


nommé cette situation le rejet identitaire. Ainsi, la qualité des services et l’insertion
professionnelle ne doivent pas faire l’objet d’une injonction à la performance en termes de
résultats à atteindre et à mesurer car cette logique relève des organisations privées et non
publiques. Leurs efforts ne portent pas vers l’établissement qui n’existe pas en soi, ou qui
n’est perçu que comme « une machine bureaucratique ». Leur mobilisation collective est
orientée vers les membres de la profession (orientation collective). Ils rejettent dont la logique
organisationnelle et la performance au nom de l’identité professionnelle soutenue par les
valeurs publiques. Ils font preuve de résistance (en refusant de communiquer le contenu de
leurs enseignements par exemple) et élaborent un discours critique sur la performance. Ce
profil ne révèle aucune hybridité identitaire.

292
2.4. Une mobilisation institutionnelle portée par des valeurs publiques (profil 4)

D’autres EC ayant la même conception philosophique que le profil précédent se mobilisent


envers l’établissement, même s’ils n’ont pas d’engagement organisationnel (profil 4). Il y a
une distance entre les valeurs affichées et les pratiques associées. Une telle hybridation est
instrumentale dans la mesure où elle permet aux EC de maintenir la conformité avec leur
logique professionnelle, à la fois pour maintenir leur propre identité et pour apparaître
légitimes auprès de leurs collègues, tout en acceptant de modifier leurs pratiques. Le maintien
d’une certaine cohérence est possible grâce à un discours critique sur la performance
(conception philosophique). Certains EC du cas A soutiennent la stratégie du Président qui
défend le rôle de proximité de l’Université menacée de fermeture ou de fusion. Ils sont prêts à
changer leurs pratiques et se mobiliser pour la performance de leur établissement, mais tout en
développant un discours critique sur celle-ci. Ce bricolage identitaire permet également une
hybridation par stratégie pour obtenir des moyens supplémentaires pour la recherche, ou une
reconnaissance en termes de carrière (prouver sa performance). L’étude de la représentation
sociale de la performance de l’université révèle qu’ils opèrent un travail sémantique en se
référant non pas à l’exigence de performance, mais aux valeurs publiques et à un « bon
usage des deniers publics ». Ce profil 4, que nous avons nommé « le bricolage identitaire
(deux modes : par conformité ou par stratégie) » correspond à un EC qui n’opère pas de
distinction entre la profession et l’université dans laquelle il exerce, qui représente pour lui
une institution. Ainsi, il est professeur « des universités » et non pas « d’une université ». Les
engagements professionnel et organisationnel se confondent. Il conviendrait alors de parler
d’une mobilisation institutionnelle : fournir des efforts pour le bon fonctionnement de
l’université est une obligation morale, au nom des valeurs publiques.
Le profil 4 pourrait être un profil de transition entre le rejet identitaire (profil 3) et la
conviction identitaire (profils 1 et 2).

293
Section 3 : L’hybridation des identités professionnelles

Nous expliquons ces résultats à travers les modes d’articulation entre logiques
institutionnelles (professionnelle et organisationnelle) (Grenier et Bernardini-Perinciolo,
2016). Ainsi, nous discutons l’hybridation de ces deux logiques. Dans un sens commun,
l’hybridation est le résultat de deux (ou plus) entités différentes (Gittel et Douglas, 2012).
Les logiques institutionnelles fournissent des explications sur la manière dont les
institutions façonnent les valeurs et pratiques des acteurs, ainsi que de la manière dont ils font
sens de la situation (Dunn et Jones, 2010 ; Reay et Hinings, 2005). Nous entendons ici par
pratiques des schémas d'activités, manières de faire reflétant notamment une identité
professionnelle (Lounsbury et Crumley, 2007). Le cadre théorique des logiques
institutionnelles explique comment les acteurs font face et résolvent les contradictions qui
émergent dans des contextes de pluralisme institutionnel. Parce que chaque logique représente
une façon de penser et d’agir, la multiplication des logiques institutionnelles peut conduire à
une concurrence entre logiques. Cette situation génère des tensions qui mettent à mal la
cohésion et pose des difficultés en termes de management (Dunn et Jones, 2010 ; Lounsbury,
2007). Par ailleurs, cette concurrence peut aboutir à une hiérarchie entre la logique dominante
et les autres logiques (Reay et Hinings, 2009). En ce sens, une hybridation non contrôlée peut
déboucher sur des conflits de pouvoir entre les parties prenantes (Kitchener, 2002 ; Scott et
al., 2000) en termes de gouvernance (Thornton et al., 2005), de structure organisationnelle
(Cooper et al., 1996 ; Tracey et al., 2011), et de pratiques (Lounsbury, 2007). Finalement,
cette situation peut conduire les organisations à s’écarter de leur mission et à perdre de vue
leur objectif principal (Battilana et Dorado , 2010). Toutefois, le conflit n’est pas la seule
configuration possible. Les différentes logiques peuvent coexister pendant longtemps même si
c’est de manière précaire. Thornton et al . (2012) suggèrent que l'hybridité durable ne peut
être atteinte que si les conflits et tensions générés par la concurrence des logiques sont gérés.
Au cœur de cette articulation entre logiques professionnelle et managériale se pose la
question de l’identité professionnelle, par laquelle un acteur se définit (vis-à-vis de ses pairs
ou autres groupes de référence), et qui donne sens à son comportement. Puisant ses sources
dans la psychologie, l’identité professionnelle est formée de tout élément symbolique (mythe
fondateur, croyance, rite initiatique, référence historique…), comportemental (attitude,
expérience, tenue vestimentaire…) ou matériel (formation, diplôme…) qui permet aux

294
membres d’une profession de se définir eux-mêmes et par rapport à d’autres groupes de
référence (Dahan et Mangematin, 2010). Conjointement, quand l’identité des professionnels
évolue (Dahan et Mangematin, 2010), les valeurs des EC évoluent également, comme l’avait
déjà remarqué Fave-Bonnet (2002). Au cœur de l’identité professionnelle des EC se trouvent
deux activités (enseignement et recherche), et un principe (autonomie de contrôle (Paradeise,
2008). La légitimité des efforts entrepris envers l’établissement dépendra de la manière dont
l’acteur va, plus ou moins, hybrider son identité, en intégrant des éléments d’une identité plus
organisationnelle (Pratt et al., 2006). Pratt et al. (2006) soulignent que la façon dont l'identité
évolue a fait l'objet de peu d'attention dans la littérature. Nos résultats suggèrent que l’identité
professionnelle des EC évolue pour intégrer des conduites de mobilisation orientés vers la
performance de l’établissement. En plus des formes d’hybridation présentées dans la
littérature (l’acceptation (profils 1 et 2) ou le rejet (profil 3) de la nouvelle logique), nos
résultats soulignent une forme supplémentaire : le bricolage identitaire (profil 4). Ces
différentes formes d’hybridation sont autant de manière pour les EC de faire face à la nouvelle
logique organisationnelle, la performance de l’établissement étant le point central. Pourtant, la
littérature suggère que les EC résistent à l’imposition de nouvelles pratiques (Henkel, 2000 ;
Barrier, 2010) ou renoncent à leurs valeurs professionnelles pour endosser les valeurs de
marché (Slaughter et Rhoades, 2004). Nos résultats apportent donc une réponse
différente : celle de l’hybridation.
Ainsi, nos résultats supposent que cette évolution se fait de manière différenciée au
sein du même établissement. Les profils 1 et 2 soulignent une identification à
l’établissement. Selon Pratt et al. (2006), l'identification implique parfois un changement
identitaire, mais parmi les questions centrales d'identification à l'organisation, celle qui a
probablement reçu le moins d'attention parmi les études est de savoir comment l'identification
à l'organisation apparaît. La littérature a traité la construction de l'identité dans le cas de
membres d'organisations mais sans que l’on sache si cela concerne également les
professionnels. En effet, les professionnels sont définis par « que font-ils » alors que les autres
métiers sont définis par « où travaillent-ils » (Pratt et al., 2006). Nos résultats enrichissent
donc la littérature en fournissant une compréhension de l’identification à l’organisation par
des professionnels.

295
Section 4 : Une théorisation du changement (LRU) fondée sur des valeurs
publiques encourageant la mobilisation collective

La comparaison inter-cas offre une explication supplémentaire de cette capacité qu’ont les
acteurs d’adopter des comportements différenciés face aux réformes : le travail de théorisation
du changement (Munir, 2005) opéré par le Président de l’Université A lors du passage aux
RCE (Grenier et Zeller, 2014).

Le mode de gouvernance de l’université A repose sur un management participatif.


Depuis l’élection du Président, une équipe hebdomadaire a été mise en place, regroupant
l’équipe présidentielle composée : du Président, du DGS, des vice-présidents, et des chargés
de mission, et les directeurs des composantes. Les décisions et les projets concernant
l’université sont donc discutés avec les directeurs de composantes qui apprécient ce mode de
gouvernance qui permet de les associer au pilotage de l’université. Par ailleurs, le président
est également régulièrement invité (accompagné du DGS) dans les composantes afin de
répondre directement aux questions que se posent les EC.
Le mode de gouvernance du cas B est différent. Même si quelques répondants
soulignent la volonté du Président d’expliquer les réformes en cours, la gestion est centralisée
autour du Président et les composantes ne sont pas associées aux prises de décisions
stratégiques. Cette différence de mode de gouvernance se ressent dans les discours respectifs :
les EC du cas A citent spontanément les axes stratégiques poursuivis par l’établissement,
disent y adhérer et se mobiliser dans ce sens (en alignant leurs recherches sur les axes de
recherches de l’établissement par exemple). Les EC du cas B ne font quasiment jamais
référence à la stratégie poursuivie par l’établissement (la connaissent-ils ?) et leurs efforts de
mobilisation collective ne sont pas alignés sur les axes stratégiques de l’établissement.
Les résultats de l’étude du cas A montrent que l’adhésion au changement institutionnel
a été permise par un intense travail de théorisation (Munir, 2005) opéré par le Président. Ce
travail est défini comme « le développement et la spécification de catégories abstraites,
générales, et l’élaboration de chaînes de cause-effet » (Greenwood et al., 2002 : 61) ; il permet
aux acteurs de donner du sens et de justifier le changement mené. Le Président a présenté les
principes de reddition de compte, de contrôle des coûts, et de mesure de l’efficacité, comme
étant des moyens de sauvegarder une université de proximité, qui pourra se doter de moyens

296
renouvelés pour améliorer la qualité des services rendus aux étudiants, essentiellement en
termes d’enseignement. Il s’est donc appuyé conjointement sur des valeurs publiques et des
valeurs de marché.
Greenwood et al. (2002) ont présenté la théorisation comme étant une étape parmi le
processus d’institutionnalisation du changement. Munir (2005) adopte une position différente
en considérant que la théorisation est un processus continu qui s’étale tout au long de la mise
en œuvre du changement. Nos résultats vont dans le sens des travaux de Munir (2005) dans la
mesure où le Président a opéré un travail de théorisation avant même le passage aux RCE et a
continué ce travail de manière quasi-quotidienne. En effet, rappelons que le président actuel
de l’université A, élu en 2008 (qui a été réélu en 2012 au moment de la collecte des données)
avait présenté lors de sa campagne le passage aux RCE comme un réel levier de
développement pour cette jeune université. En lançant le projet d’accéder aux RCE, le
Président espérait trouver des moyens d’action renouvelés pour lutter contre un effectif
estudiantin en diminution les années précédentes et revaloriser l’attractivité de l’établissement
sur son territoire régional. Il a alors développé une stratégie de différenciation dans le but de
se distinguer des deux grandes universités se trouvant à moins de deux heures de route,
voyant trop souvent ses étudiants rejoindre ces grandes universités après y avoir obtenu leur
licence. L’ambition de la Direction était de modifier radicalement l’image que pouvaient avoir
les étudiants, les professeurs, les entreprises, de cette université.
La grande majorité du personnel a donc voté pour ce candidat qui présentait la LRU comme
un moyen (voire le seul) de sauver l’université. Ainsi, les EC étaient globalement très
favorables à l’autonomie offerte par la loi.
Pour Munir (2005), le processus d'institutionnalisation ne commence pas après que le
changement ait remis en cause les pratiques des acteurs mais bien en amont. Munir (2005)
suggère que non seulement la théorisation légitime les nouvelles pratiques et idées en
formulant de nouveaux principes (Greenwood et al., 2002), mais qu’elle permet également de
donner un sens aux menaces et aux problèmes en expliquant comment certains événements
perturbateurs engendrent des changements. Cette justification implique de démontrer la valeur
ajoutée des nouvelles pratiques comparées aux pratiques existantes. Ainsi, la justification a
été de prouver la légitimité de l’Université A et de trouver des arguments pour échapper à la
menace de fermeture ou de fusion.
La théorisation est constituée de deux activités. La première est discursive et consiste à
construire les problèmes et démontrer la plus-value des solutions proposées, et ainsi à justifier
le besoin de changement. La deuxième activité consiste à mobiliser des acteurs au sein de

297
l’organisation, qui seront des alliés pour faciliter l’adaptation. Ils vont participer à la mise en
œuvre du changement et propager le discours. Nos résultats suggèrent que des acteurs se sont
mobilisés en participant à des ateliers dans lesquels la stratégie et les moyens de mettre en
œuvre la réforme ont été discutés. Ils ont ensuite pu être les relais auprès de leurs collègues du
discours du Président.
Le moment fort du passage aux RCE a fait prendre conscience aux EC, grâce à la
théorisation opérée par le Président, que le bon fonctionnement de l’université reposera de
plus en plus sur un travail collectif et sur l’intériorisation des buts affichés par l’établissement.
L’adhésion à ce changement a été facilitée par la légitimité du Président, considéré comme un
pair car il continue de faire de la recherche, et parce qu’il a une bonne compréhension de la
façon dont ses pairs peuvent être perturbés par une telle réforme.
Cependant, cette théorisation ne s’est pas réellement faite au nom des enjeux prônés
par la loi (excellence, l’université considérée comme une entité globale). Les résultats laissent
apparaître un travail différencié de théorisation du changement de la part des EC (Grenier et
Zeller, 2014), conduit à trois niveaux. Un premier niveau, supérieur, justifie le changement au
nom des valeurs publiques. Un deuxième niveau, organisationnel, légitime le changement au
nom de l’établissement mais non pas en adoptant le vocabulaire prôné par ce changement
(excellence), mais une traduction portée par la direction (université de proximité). Enfin, un
troisième niveau, individuel, au nom de la carrière. L’argument de la survie prend ainsi un
sens dual. Pour certains, l’adhésion à la LRU se justifie par la volonté de maintenir une offre
de formation sur le territoire, d’offrir des formations de qualité aux étudiants, de montrer que
l’université est innovante et qu’elle a une recherche de qualité. Pour d’autres, l’adhésion à la
LRU peut être expliquée par la préoccupation de leur propre avenir professionnel (Grenier et
Zeller, 2014).
Finalement, la théorisation permet aux EC de développer leur propre capacité (i.e
agency) (DiMaggio et Powell, 1983; Holm, 1995; Seo et Creed, 2002) d’adopter la nouvelle
logique organisationnelle en hybridant leur identité (même si c’est de différentes manières),
ou de résister à l’hybridation.

La question des valeurs utilisées comme levier managérial lors des réformes inspirées
du NPM suscite un intérêt grandissant, comme le démontre le numéro spécial de la Revue
International des Sciences Administratives sur le thème « Pratiques valorielles et
management public » (2015/2, vol. 81). Les travaux de Dahan (2015) portent précisément sur
les EC face à la réforme de la formation doctorale en France. L’auteure constate que dans une

298
organisation pluraliste comme l’université, il existe un pluralisme de valeurs qui remet en
cause la pertinence d’un usage managérial, discursif des valeurs, qui seraient listées, affichées
et hiérarchisées pour l’ensemble de l’organisation. Ainsi, les résultats portant sur l’usage des
pratiques valorielles semblent contrastés.

Section 5 : Gestion des Ressources Humaines et enseignants-chercheurs ?

Pichault et Nizet (2013) soulignent que la littérature fait soit l’impasse sur la définition de la
GRH, soit offre des définitions trop larges telles que « l’humain et le social » (Sékiou,
Besseyre Des Horts, Blondin, Chevalier et Fabi, 1992 : 8, cité par Pichault et Nizet, 2013 :
15), « les structures et les hommes » (Peretti, 2007 : 9, cité par Pichault et Nizet (2013 : 15) ),
« la régulation du travail dans les organisations » (Cadin et al., 1997 : 31, cité par Pichault et
Nizet (2013 : 15) ), « la gestion du travail et de l’emploi » (Weiss, 1993 : 36, cité par Pichault
et Nizet (2013 : 15) ), « management des hommes dans les organisations » (Hunt, 1992 : IX,
cité par Pichault et Nizet (2000 [2013] : 15) ), « l’ensemble des pratiques de planification, de
direction, d’organisation et de contrôle des ressources humaines au sein de l’organisation »
(Saint-Onge, Haines et Audet, 2009 : 4, cité par Pichault et Nizet (2013 : 15). Dès lors,
Pichault et Nizet (2013 : 11) se réfèrent à la définition formulée par Bournois et Brabet
(1993) pour qui la GRH désigne à la fois un corps de connaissance et un ensemble d’activités
déployées dans les organisations, interdépendantes de ces connaissances. Ces activités
regroupent aussi bien des discours sur des sujets tels que le recrutement, la rémunération, la
formation, etc. et des pratiques issues de ces sujets.

L'expression même de GRH peut soulever des réticences dans certains secteurs,
comme l’ont souligné Chanut et Chavas (2008). C’est le cas en ce qui concerne les
professionnels en particulier les EC. Chanut et Chavas (2008), soulignent que la possibilité
d'une GRH peut être vécue comme un déni du savoir professionnel et du modèle de la
vocation (Tardif et Lessard, 2005). De plus, le corpus à disposition des organisations
publiques est faible (Chanut et Chavas, 2008).
En effet, peu d’études se sont intéressées à la GRH des professionnels dans des
organisations pluralistes, en particulier à l’université et en période de changement important

299
imposé par un extérieur (nouvelle réglementation dans nos cas). Il est en effet très compliqué
d’appliquer les mêmes « bonnes pratiques » d’une organisation à l’autre, même si cette
approche dite « universaliste de la GRH » a eu un grand succès dans la littérature. Néanmoins,
à l’opposé de cette approche, certains auteurs, certes moins nombreux, tels que Pichault et
Nizet (2013) plaident pour une approche contextuelle de la GRH. Ainsi, « les matières qui
constituent la GRH diffèrent fortement d’une situation à l’autre ; il n’est donc pas pertinent
d’avancer une liste de pratiques qui seraient, en soi, constitutives de la GRH » (Pichault et
Nizet, 2013 : 21). Se référant aux travaux de Crozier et Friedberg (1977), Pichault et Nizet
(2013) soulignent que les initiatives des acteurs et les jeux de pouvoir qu’ils déploient
influencent les pratiques de GRH mises en place dans l’organisation. Par ailleurs, se
rapportant aux travaux de Giddens (1979), les auteurs soulignent également que les jeux
d’acteurs sont autant contraints par le contexte qu’ils l’influencent à leur tour, en le
construisant et le transmettant. Dans cette idée, Pichault et Nizet (2013) vont développer toute
une réflexion sur la GRH dans différents types de configurations organisationnelles (ils
reprennent celles de Mintzberg, 2010). Pichault et Nizet (2013) fournissent une analyse des
pratiques de GRH appliquées dans les organisations professionnelles (leur étude porte en
particulier sur une faculté universitaire). Leurs résultats confirment que les pratiques de GRH
sont loin d’être universelles. Ils soulignent, d’une part, qu’une même pratique (la formation
par exemple) diffère en fonction du contexte organisationnel d’application, et d’autre part, les
différentes pratiques observées dans un même contexte (les organisations professionnelles par
exemple) présentent des similitudes. Ces conclusions ont amené Pichault et Nizet (2013) à
élaborer des « conventions » de GRH. La convention qui intéresse notre thèse est nommée «
délibérative » pour illustrer l’horizontalité qui caractérise les pratiques de GRH dans les
organisations professionnelles. Dans cette configuration, les professionnels « conviennent
collectivement [au cours de débats entre pairs] des pratiques qui restent sous leur contrôle
individuel » et « celles qui peuvent être régies par des procédures plus formelles mises au
point par eux-mêmes » (Pichault et Nizet, 2013 : 113).

5.1. Un besoin de reconnaissance organisationnelle

Alors que la reconnaissance organisationnelle est présentée comme une des plus importantes
sources de mobilisation et d’engagement par les auteurs (Tremblay et Wils, 1998 : Tremblay
et al., 2000), la littérature n’offre pas une conceptualisation systématique (Brun et Douglas,

300
2005). Brun et Douglas (2005) ont procédé à une recension de la littérature sur le sujet afin de
proposer une définition satisfaisante du concept de reconnaissance au travail. Quatre
approches de la reconnaissance au travail jalonnent la littérature, et se déclinent en quatre
groupes de pratiques, que nous présentons successivement.
1) Les pratiques de reconnaissance existentielle, rattachées à la notion de souci de l’autre, à
l’attention portée à la finalité et aux retombées des gestes exécutés. Faire participer les
individus aux prises de décisions et aux projets entrepris par l’organisation contribue à la
reconnaissance existentielle. C’est ce que nos résultats reflètent lorsque les EC nous disent
que l’université offre un système qui respecte l’humain en permettant aux EC de ralentir à un
moment de leur carrière pour se consacrer à la vie de famille (B13).
2) Les pratiques de reconnaissance de la pratique de travail concernent la reconnaissance de la
façon dont l’individu exécute son travail, plutôt à que la reconnaissance de sa personne et des
résultats qu’il a produits. La rétroaction par les pairs sur les qualités professionnelles traduit la
reconnaissance de la pratique de travail. Nous pouvons rapprocher ce besoin de
reconnaissance de la pratique de travail par les pairs aux discours des EC lorsqu’ils nous
disent que les recherches individuelles sont les seules qui soient valorisées par les pairs
(notamment le CNU) alors que les recherches collectives, qui apportent satisfaction et
permettent de créer du collectif, ne sont pas reconnues (A1, PR en Droit).
3) Les pratiques de l’investissement dans le travail concernent les efforts entrepris par
l’individu au quotidien. Valoriser l’intensité de ces efforts contribue à la reconnaissance de
l’investissement. C’est ce que nos résultats soulignent lorsque les EC nous confient que les
collègues qui s'investissent administrativement dans le travail de coordination pédagogique
sont presque laissés pour compte et qu’au bout du compte ce n'est pas la peine de s'investir
administrativement ou faire de l'enseignement pédagogique (A16).
4) Enfin, les pratiques de reconnaissance des résultats concerne le produit du travail.
L’évaluation des résultats ainsi que les récompenses pécuniaires et non pécuniaires lorsque les
objectifs sont atteints traduisent les pratiques de reconnaissance des résultats. Nous pouvons
rapprocher ce besoin de reconnaissance des résultats aux discours des EC lorsqu’ils nous
disent qu’ils sont favorables à la modulation des services qui permet de valoriser les pratiques
et innovations pédagogiques qui ont été jusqu’à lors complètement ignorées (A7).

301
5.2. Une rémunération équitable

La rémunération de base répond à des échelles barémiques, à laquelle peuvent


s’ajouter des primes et autres bonifications. Les professionnels peuvent également obtenir des
revenus supplémentaires grâce à des activités extérieures (services de consultance et de
formations de courte de durée, fournis dans le cadre de contrats de travail séparés). Pichault et
Nizet (2013) soulignent que ces revenus parallèles peuvent aller jusqu’à être institutionnalisés
par des dispositifs réglementaires qui cherchent à les cadrer dans le temps ou de limiter leur
importance au regard de la rémunération de base (soulignons que leurs conclusions portent sur
l’étude d’une faculté universitaire belge). L’enjeu pour le professionnel sera de négocier et de
faire valoir sa valeur au moment de son entrée dans l’organisation. Musselin (2006b)
remarque également que des négociations ont lieu (dans les universités nord-américaines)
entre le candidat et le responsable de la composante sur les conditions de travail et les
avantages personnels qui complémentent le salaire. Ces particularités propres aux
organisations professionnelles peuvent générer de fortes situations d’iniquité interne, d’autant
plus que les différences portent davantage sur les avantages non salariaux, limités dans le
temps et difficiles à comparer de manière standardisée. Nos résultats corroborent l’analyse
menée par Pichault et Nizet (2013).

Dans les lignes qui suivent, nous essayons de comprendre ces mécanismes à l’œuvre
dans la relation entre reconnaissance pécuniaire et comportement, en nous référant notamment
aux travaux de Tremblay et al. (2000).
Les récompenses monétaires et non monétaires comprennent traditionnellement la
rémunération et les pratiques de reconnaissance non monétaires telles que les félicitations par
exemple. Elles peuvent être individuelles ou collectives. La rémunération est composée du
salaire, des augmentations de salaire, de la structure de salaire, des avantages sociaux et de la
gestion des salaires (Heneman et Schawb, 1985, cité par Tremblay et al., 2000).
Si toutes les études s’accordent à dire que les récompenses non pécuniaires, aussi variées
soient-elles, telles que les félicitations, les remerciements, ou le feedback positif , ont une
influence positive sur les comportements, en étant des marques de reconnaissance de la part
de l'organisation, le lien entre récompenses monétaires et mobilisation collective est
controversé, car certaines études n’ont trouvé aucun lien statistique entre ces deux variables.
Intéressons-nous aux arguments qui soutiennent les deux approches. Un premier ensemble de
travaux soutient que les récompenses monétaires iraient jusqu'à décourager les conduites hors

302
rôle en restreignant les échanges à leur forme transactionnelle (Organ, 1988). Un deuxième
ensemble de travaux suggère que lorsque la rémunération est perçue comme équitable par les
individus, alors elle influence les conduites (Peretti, 2004).
Ce qui intéresse particulièrement les auteurs qui établissent une influence des
récompenses monétaires sur la mobilisation collective est la perception qu'ont les individus à
propos des récompenses proposées par l'organisation. Ce sont les perceptions des
récompenses qui vont influencer l'engagement et les conduites.

Selon la théorie de l'équité formulée par Homans (1974) puis Adams (1965), un
individu forge sa motivation au travail en comparant sa situation à celles d'autres personnes.
Homans (1974) et Adams (1965) fondent leurs conclusions à partir des théories de la
comparaison sociale (Festinger, 1954) et de la dissonance cognitive (Festinger, 1957), selon
lesquelles un individu compare sa situation à celles des autres et va tenter de réduire
l’éventuel écart.
La théorie de l'équité prend appui sur les principes d'échange et de comparaison qui se
déroulent en trois temps. Dans un premier temps, l'individu apprécie, d'une part, l'ensemble
des avantages qu'il obtient de son organisation (c'est la « rétribution »), en termes de
rémunération (dans ses diverses composantes extrinsèques et intrinsèques), de conditions de
travail, de possibilités de progression et d'accroissement des compétences, de signes de
reconnaissance qu'il reçoit et de statut social, et d'autre part, les contributions qu'il lui offre, en
termes d'expérience, de formation et compétences, de temps de présence, d'efforts,
d'ancienneté, de résultats, etc.
Dans un deuxième temps, il confronte ces deux évaluations (rétribution/contribution)
afin de déterminer un ratio d'équité. Le niveau d’équité est constamment estimé par l'individu,
qui détermine ainsi sa relation d'échange avec son employeur (Peretti, 2004).
Dans un troisième temps, l'individu compare son ratio d'équité avec ceux d'autres
personnes qu'il a sélectionnées. Ainsi, l'individu perçoit une situation d'équité dès lors que son
ratio contributions/rétributions est égal au ratio contributions/rétributions de la personne
référente. Cette situation est alors source de mobilisation pour les acteurs. La comparaison
peut être aussi bien interne (se comparer à un collègue de la même organisation), qu'externe
(se comparer à des employés d'autres organisations), qu'individuelle ou collective (entre les
fonctions, groupes ou catégories). Si les ratios ne sont pas égaux, il perçoit une situation de
non-équité, qui peut être soit une sous-équité (« Vu tout ce que je fais et ce que lui fait, ce
n'est pas juste qu'il gagne autant par rapport à moi », cité par Peretti, 2004 : 5), auquel cas

303
l'individu, pour rééquilibrer la situation, aura tendance à adopter des comportements contre-
productifs ou réduire tout simplement ses efforts au minimum exigé par l'organisation ; soit
une situation de sur-équité (« J'ai le sentiment d'être mieux traité que la personne avec
laquelle je me compare », cité par Peretti, 2004 : 5), auquel cas l'individu aura tendance à
adopter des comportements très productifs.
Par conséquent, si la rémunération n'encourage pas systématiquement la mobilisation
collective, elle peut générer une certaine démobilisation si elle est perçue comme inéquitable.
Adams (1965) souligne d'ailleurs que le principe d'équité peut difficilement être mesuré
directement, il convient alors de mesurer le sentiment d'iniquité perçue. C'est donc la non-
équité perçue qui pousse à agir (Peretti, 2004).

Les concepts de justice distributive et de justice procédurale affinent la théorie de


l'équité. Ainsi, la justice distributive explique la réaction des individus à l'égard du montant de
la récompense qui leur est attribuée (cela concerne traditionnellement le montant du salaire,
les augmentations de salaire, la structure du salaire et les avantages sociaux). La justice
procédurale, quant à elle, explique les réactions des individus à l'égard des procédures
utilisées pour déterminer les récompenses (cela concerne la gestion de la rémunération).
Ainsi, les procédures apportent satisfaction aux acteurs lorsqu'ils peuvent donner leur opinion
sur la décision qui les concerne et faire appel si besoin est, et aussi lorsque l'employeur agit de
manière cohérente avec les pratiques habituelles, c’est-à-dire avec rigueur, respect, sérieux, de
manière transparente et sans pratiquer aucune discrimination (Rojot, 2003).
La littérature suggère non seulement que la perception de l'équité salariale apporte plus
de satisfaction que le niveau de salaire (Sweeney, 1990), mais également qu'une procédure de
distribution des rémunérations perçues comme juste (justice procédurale) apporte plus de
satisfaction que le niveau de salaire (justice distributive), ce que nos résultats corroborent.
Tremblay et al. (2000) ne rapportent que cinq études traitant du lien entre justice
distributive et les conduites des employés, et ce, à travers le concept d'OCB : celle de
Schnake, Cochran et Dumler (1995) et Scholl, Cooper et McKenna (1987) qui ont souligné
une corrélation significative entre la perception d'équité et l'OCB, et celles de Tremblay, Sire
et Pelchat (1998), Igalens et Barraud (1997) et Deckop, Mangel et Cirka (1999) qui ne notent
pas de relation significative entre les pratiques de rémunération et les comportements.

Par ailleurs, la structure de la rémunération peut prendre différentes formes : un salaire


fixe de base qui peut représenter entre 50 % à 90 % du salaire total (OCDE, 2005), et des

304
parts variables fondées sur la compétence ou la performance. Ces parts variables permettent
d’individualiser la rémunération. La rémunération de la compétence consiste à rétribuer des
caractéristiques de l’employé et non du poste. Les compétences peuvent se définir comme des
répertoires de comportements observables dans le travail au quotidien et dans des situations
test, qui rendent certains employés plus efficaces que d’autres dans une situation donnée car
ils maîtrisent mieux ces comportements. Les compétences regroupent les aptitudes, les traits
de personnalité et les connaissances acquises (Levy-Leboyer, 1996). Quant à la rémunération
à la performance, elle désigne la « rétribution dépendant des performances, allouée à des
personnes et /ou à des groupes, soit sous la forme d’une augmentation permanente de leur
traitement de base, soit en tant que prime » (Perry, Engbers et Yun, 2009 : 42). La
rémunération à la performance est censée avoir une influence sur la motivation individuelle.
Or, les études ne vont pas systématiquement dans ce sens, en particulier dans le secteur public
(Emery, 2003). Ainsi, Perry et Wise (1990) suggèrent que les incitations financières ont peu
d’influence sur la motivation extrinsèque des agents publics, qui éprouvent une forte
motivation de service public (ou motivation intrinsèque). Par ailleurs, Bayser et al. (2008)
soulignent qu’une telle forme de rémunération contribue à installer une compétition et un
manque de coopération entre les individus et favorise la dégradation des rapports de travail
entre les employés et leurs responsables hiérarchiques. Ainsi, les récompenses pécuniaires
n'encourageraient pas les conduites volontaires. Selon Organ (1988), elles iraient jusqu'à
décourager les conduites hors rôle en restreignant les échanges à leur forme transactionnelle,
ne créant pas l'attachement affectif nécessaire à la mobilisation collective. Par conséquent, les
avis des chercheurs sont partagés concernant l’influence des récompenses sur la mobilisation
collective. Nos résultats suggèrent pourtant que les EC attendent une rémunération de leur
performance.

305
CONCLUSION DE LA TROISIÈME PARTIE

Nous présentons dans la figure 17 les principaux éléments développés dans cette troisième et
dernière partie.
Figure 17 : Synthèse de la troisième partie

SYNTHESE DE LA TROISIEME PARTIE : RESULTATS ET DISCUSSION

Chapitre 6 : Analyse intra-cas A Chapitre 7 : Analyse intra-cas B

- la participation à la vie civique est la - la participation à la vie civique est la


caractéristique essentielle de la mobilisation caractéristique essentielle de la mobilisation
collective des EC pour améliorer la performance de collective des EC pour améliorer la performance de
l’établissement ; l’établissement ;
- une représentation sociale de la performance à - une représentation sociale de la performance à
deux facettes : une conception « pragmatique » et deux facettes : une conception « pragmatique » et
une conception « philosophique » de la une conception « philosophique » de la performance
performance de l’université ; de l’université ;
- un engagement principalement organisationnel. - un engagement principalement professionnel.

Chapitre 8 : Synthèse et transition vers la discussion

L’analyse comparative des résultats des deux cas suggèrent l’existence de quatre grands profils de
mobilisation collective :
- Profil 1 (conviction identitaire/organisationnel) : vision pragmatique/engagement organisationnel /
mobilisation organisationnelle ;
- Profil 2 (conviction identitaire/organisationnel et professionnel) : vision pragmatique / double engagement /
mobilisation renforcée ;
- Profil 3 (rejet identitaire) : vision philosophique / engagement professionnel / mobilisation collective ;
- Profil 4 (bricolage identitaire) : vision philosophique / engagement institutionnel / mobilisation individuelle
et organisationnelle.

Chapitre 9 : Discussion
- retour sur la cadre théorique ;
- discussion des profils de mobilisation collective à travers la littérature sur les logiques institutionnelles ;
- discussion sur une Gestion des ressources humaines.

306
CONCLUSION GÉNÉRALE

307
Apports théoriques

Tout d’abord, nos travaux permettent d'enrichir le concept de mobilisation collective proposée
par Tremblay et Wils (2005). Si ce concept est porteur en raison de l'intégration théorique
rigoureuse de tous les concepts développés en matière de comportements organisationnels, il a
été peu étudié au plan empirique. Nous avons notamment classé les différentes dimensions
comportementales que nos résultats ont confirmées en fonction des orientations des efforts
dans lesquels elles s’inscrivent (tableau 27).

Tableau 27 : Dimensions et orientations de la mobilisation collective


Mobilisation collective
Orientation individuelle Orientation collective Orientation
organisationnelle
Dévouement dans le travail Facilitation interpersonnelle Participation à la vie civique
Amélioration continue Coordination avec les autres Loyauté organisationnelle
Dimensions
Rôle prescrit Travailler en équipe Orientation vers les usagers
Amélioration des compétences Aide apportée aux autres Amélioration continue

Ensuite, le concept de mobilisation collective nous a permis d’aborder les


comportements des EC à travers de multiples dimensions. Nous avons minutieusement décrit
ces comportements en les illustrant de verbatim. Ces comportements ont fait l'objet de peu
d'études, en particulier dans les organisations publiques et pluralistes.

Par ailleurs, notre recherche permet d'approfondir la compréhension des attitudes qui
constituent la base de la mobilisation collective.
D’une part, nos résultats contribuent au débat sur l’incompatibilité ou la compatibilité
entre l’engagement organisationnel et l’engagement professionnel. Nos résultats confirment
que les deux engagements sont compatibles lorsque les valeurs transmises par l’organisation
rejoignent les valeurs professionnelles. De plus, nos résultats suggèrent que le double
engagement conduit à une mobilisation renforcée. Peu d’études ont étudié ce lien. Nos
résultats révèlent quatre profils-type de mobilisation collective (tableau 45).

308
Tableau 46 : Profils de mobilisation collective

Conception de la
Type de profil de mobilisation
performance de Engagement Mobilisation
collective
l’université
Organisationnel Organisationnelle Profil 1 : conviction identitaire /
organisationnel
Pragmatique
Double Renforcée Profil 2 : conviction identitaire /
organisationnel et professionnel
Professionnel Collective Profil 3 : rejet identitaire
Philosophique
Institutionnel Individuelle et organisationnelle Profil 4 : bricolage identitaire

D’autre part, nous avions émis l'hypothèse que dans le cas de la mobilisation collective
des professionnels envers leur organisation, les RS de la performance organisationnelle
orientent leur comportement. Peu de recherches ont étudié le lien entre RS et comportement.
Notre revue de littérature nous a amené à formuler l'hypothèse que les RS de la performance
influencent la mobilisation collective, par l'intermédiaire de l'engagement. Nos résultats ne
confirment pas ce lien unidirectionnel mais laissent penser que RS et comportement sont en
interaction. Nous pouvons donc enrichir la littérature sur la théorie des RS à ce niveau-là et
confirmer l’hypothèse 3 émise par Abric (2011) concernant le lien entre RS et conduites :
« H3 : Dans les situations à forte contrainte – sociale ou matérielle –, les pratiques sociales et
les représentations sont en interaction » (2011 : 284).

Apports méthodologiques

D'un point de vue méthodologique, notre recherche a recueilli les RS par entretien individuel
et a étudié les RS dans une démarche qualitative, alors que les RS sont généralement
recueillies par des questionnaires. Notre méthode de recueil et d'analyse des données nous a
pourtant permis de recueillir des données riches sur les RS. D'une part, deux conceptions de la
RS coexistent : la conception pragmatique et la conception philosophique. D’autre part, Les
EC se partagent en deux groupes : ce qui ont une opinion défavorable de la performance de
l’université et ceux qui ont une opinion favorable. Ces conceptions ont émergé grâce à la
méthode de traitement de l’effet de masquage. Peu de recherches ont traité l’effet de
masquage à travers l’entretien individuel. La littérature s’interroge encore sur l’efficacité de

309
cette méthode de recueil des RS à cause de la tentation que les répondants ont de masquer une
partie de leur discours en présence d’un interviewer. Notre recherche permet d’affirmer
que l’entretien individuel permet de révéler des zones masquées du discours.
Notre méthode nous a également permis d'identifier des profils de mobilisation
collective en lien avec les RS, ce que ne nous auraient pas permis des questionnaires.

Implications managériales

Notre corpus de 48 entretiens nous permet de formuler quelques implications managériales.

- La mobilisation collective des EC envers la performance de leur établissement est


étroitement dépendante des représentations sociales de la performance de l’université qu’ils
élaborent collectivement. Dès lors, il est vain de chercher à « mobiliser » des EC dans un sens
ou dans l'autre de manière prescriptive dans une logique « top down ».
Si les récentes réformes permettent aux présidents de prendre davantage de décisions
seuls, et les tentent de resserrer la gouvernance autour d’une petite équipe très compétente
afin d’armer l’établissement au mieux pour absorber les réformes, les présidents ne peuvent
pas faire l’impasse sur le travail de conviction de la communauté d’EC, au risque de voir de
multiples sens se créer autour des missions de l’université, des réformes en cours, du concept
de performance et des stratégies adoptées.
Seul un management participatif, qui repose sur un fort leadership du Président, avec
une gouvernance qui associe étroitement les directeurs de composantes à toutes les décisions
prises pour l'établissement, peut encourager la mobilisation collective. Le Président peut
trouver dans les composantes des alliés qui se font les « relais » de la stratégie de
l’établissement auprès de leurs collègues. Ce mode de management participatif génère des
rencontres, des communications qui permettent la construction des représentations sociales de
la performance et des réformes. Un rythme de rencontres soutenu, accompagnées
d’informations riches, conduisent à des représentations partagées des buts à atteindre.
L’équipe présidentielle (le Président soutenu par des vice-présidents) doit trouver des mots
pour fournir une explication possible de la situation. C’est pour cette raison que le

310
vocabulaire, le langage, les symboles, l’expression d’émotions, etc. utilisés par l’équipe
présidentielle sont d’une grande importance.
Ainsi, une gouvernance centralisée, même autour d’une équipe très compétente,
investie et dynamique risque d’affaiblir la mobilisation collective à cause de la potentielle
diversité des intérêts et des perspectives des différents groupes d’EC dans les organisations
pluralistes. Par ailleurs, ces intérêts multiples ont souvent été mis en avant pour justifier
l’impossibilité de générer une dynamique de mobilisation collective dans les universités.
Pourtant nos résultats montrent que les EC se retrouvent, d’une part, autour d’objectifs
communs à toutes les disciplines de SHS, à savoir l’insertion professionnelle des étudiants, les
publications scientifiques, et la qualité de services rendus aux usagers, et, d’autre part, autour
de valeurs publiques communes telles que l’intérêt de l’étudiant, l’égalité de traitement de
l’étudiant, la compassion, etc. Dès lors un discours, une stratégie, une réforme, ou un projet,
mettant clairement en avant ce type d’objectifs, associés à ces valeurs, peut avoir de grandes
chances de générer une mobilisation collective.
C’est également lorsque les EC se rencontrent et communiquent qu’ils peuvent
confronter, s’échanger, synthétiser leurs différents cadres de référence. Pourtant, le modèle
universitaire actuel manque d’espaces de mobilisation collective, même si ceux-ci tendent à se
développer. Des ateliers de travail sur les projets en cours, des ateliers d’accompagnent à la
pédagogie, des espaces de partage numérique des supports pédagogiques, etc. sont autant
d’espaces propices au partage des représentations sociales et à la mobilisation collective. Les
directeurs de composantes se voient devenir de réels managers de proximité, capables de se
faire le relai de la stratégie de l’établissement et de générer une dynamique de mobilisation
collective.

- Il parait important de poser la question de GRH des EC. Les nombreuses théories
développées sur le contrat psychologique, la motivation au service public, la reconnaissance
organisationnel pécuniaire et non pécuniaire soulignent à quel point la mobilisation collective
doit être soutenue.
1/ La gestion des carrières ne correspond plus à la nouvelle perception du métier d’EC.
Les EC engagés envers leur établissement ont besoin d’une possibilité de carrière
organisationnelle, leur permettant d’exercer des responsabilités administratives fortes, au
détriment des activités d’enseignement et de recherche. Il conviendrait de développer
davantage la logique de référentiel pour permettre aux EC de trouver une voie de carrière qui
corresponde à leur profil de mobilisation collective. Se pose ainsi la question du modèle de

311
gouvernance l’université. Faut-il professionnaliser le métier d’EC-manager ? Ou faut-il laisser
la direction des universités aux administratifs ? La situation actuelle laisse penser que le
modèle oscille entre les deux sans qu’un choix ne soit clairement arrêté. Cette situation a pour
conséquence de faire porter de lourdes responsabilités à une minorité d’EC très dévouée et
motivée, qui est en train de s’épuiser.
2/ Étonnement, alors que la littérature souligne d’une part, que les pratiques
individuelles de GRH nuisent au collectif, et, d’autre part, que les agents publics sont portés
par des valeurs d’égalité de traitement et non d’équité, nos résultats suggèrent un besoin
d’individualisation de la GRH à travers une reconnaissance de la mobilisation collective.

Limites théoriques

La première limite théorique réside dans le fait que notre cadrage théorique n’a pas pris en
compte les travaux sur les logiques institutionnelles qui influencent fortement les
comportements. La deuxième limite, liée à la première, est l’absence dans le cadre théorique
des travaux sur le changement institutionnel et organisationnel, qui auraient permis d’apporter
une compréhension supplémentaire des comportements de mobilisation dans le contexte de
réforme des universités.

Limites méthodologiques

La taille limitée de l’échantillon ainsi que le nombre limité de cas étudiés ne permettent pas
une généralisation des résultats. Même si la généralisation statistique n’était pas l’objectif de
la recherche, un échantillon plus important aurait permis d’augmenter le nombre
d’observations, et ainsi accroitre la validé des résultats. Par exemple, nous aurions pu
interroger des EC issus de chaque département de chaque composante afin de faire varier
davantage l’appartenance disciplinaire.

312
De même nous pouvons souligner qu’avec une université mieux positionnée sur le
plan de la concurrence internationale nous aurions pu obtenir des résultats différents.
Enfin, un retour sur le terrain aurait permis de stabiliser nos observations dans cette
période de changement.

Pistes de recherche

Les pistes de recherche que nous proposons sont issues des limites que nous venons
d’exposer.
Premièrement, nous envisageons de retourner sur les deux terrains étudiés dans une
logique de recherche processuelle avec un cadre théorique de changement et un cadre
théorique du sensemaking (Weick, 1979). Ce retour nous permettra d’observer si les
comportements de mobilisation ont été redéfinis sous l’influence des réformes et si
l’engagement des EC envers leur établissement a évolué.
Deuxièmement, une future recherche pourrait faire varier les situations d’université en
étudiant une université en position de concurrence internationale.
Enfin, une prochaine recherche pourrait retenir d’autres disciplines, notamment les
sciences « dures », dans une visée comparative.

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350
Table des matières

Sommaire .............................................................................................................................................................. 11

INTRODUCTION GÉNÉRALE........................................................................................................................... 13
1. Contexte ........................................................................................................................................................ 14
2. Définition de la performance ........................................................................................................................ 17
3. Terrain de recherche : les EC au sein des universités françaises confrontées à l’introduction de la notion de
performance organisationnelle .......................................................................................................................... 19
4. Une recherche exploratoire hybride et abductive.......................................................................................... 20
5. Questions de recherche ................................................................................................................................. 21
6. Principaux résultats et pistes futures de recherche ........................................................................................ 22
7. Plan de la thèse ............................................................................................................................................. 23

PREMIÈRE PARTIE : REVUE DE LITTERATURE ......................................................................................... 25


CHAPITRE 1. L’UNIVERSITÉ, UNE ORGANISATION PLURALISTE EN PLEINE MUTATION .............. 27
Section 1 : L’autonomie des acteurs professionnels dans un contexte de performance organisationnelle ....... 28
1.1. Caractéristiques des professionnels ....................................................................................................... 28
1.2. Définition de l’autonomie ...................................................................................................................... 30
Section 2 : Les modèles de fonctionnement de l’université .............................................................................. 35
2.1. Les organisations pluralistes .................................................................................................................. 35
2.2. Le cas particulier des universités ........................................................................................................... 40
Section 3 : Vers une possible réconciliation entre acteurs professionnels et organisations ? ........................... 43
3.1. Des situations différenciées selon les professions ................................................................................. 43
3.2. Une possible réconciliation entre valeurs professionnelles et organisationnelles ................................. 45
CONCLUSION DU CHAPITRE 1 ....................................................................................................................... 46
CHAPITRE 2. LA MOBILISATION COLLECTIVE DES PROFESSIONNELS, ENTRE ENGAGEMENT
ORGANISATIONNEL ET ENGAGEMENT PROFESSIONNEL ...................................................................... 48
Section 1 : La mobilisation collective : une action collective dirigée vers un objectif partagé ........................ 48
1.1. Plusieurs approches de la mobilisation collective : instrumentale ou compréhensive, individuelle ou
collective ...................................................................................................................................................... 49
1.1.1. Une conception instrumentale (processus) ou compréhensive (état) de la mobilisation collective 49
1.1.2. Principales définitions de la mobilisation collective et inscription des auteurs dans les deux
approches ................................................................................................................................................. 51
1.1.3. Une conception individuelle et une conception collective de mesure de la mobilisation collective
................................................................................................................................................................. 56
1.2. Des caractéristiques du concept à clarifier ............................................................................................ 57
1.2.1. Des conduites volontaires qui dépassent les rôles prescrits par l’organisation .............................. 57
1.2.2.1. La liberté d’action des acteurs ................................................................................................ 58
1.2.2.2. Des comportements « dans le rôle » ou « hors rôle » ............................................................. 59
1.2.2. Quelle taille du groupe pour parler de mobilisation collective ? .................................................... 61

351
1.2.3. Une mobilisation ponctuelle ou durable ......................................................................................... 62
Section 2 : La mobilisation collective : un concept comportemental unique .................................................... 64
2.1. Les fondements du concept de mobilisation collective ......................................................................... 64
2.1.1. La mobilisation .............................................................................................................................. 65
2.1.2. Les comportements de citoyenneté organisationnelle (OCB) ........................................................ 66
2.1.3. Les comportements prosociaux ...................................................................................................... 66
2.1.4. La spontanéité organisationnelle .................................................................................................... 67
2.1.5. La performance contextuelle .......................................................................................................... 67
2.2. Les dimensions de la mobilisation collective : des comportements orientés vers une œuvre collective 68
Section 3 : Les fondements psychologiques de la mobilisation collective ....................................................... 73
3.1. Des concepts liés mais à distinguer ....................................................................................................... 74
3.2. Mobilisation collective, engagement organisationnel et engagement professionnel ............................. 75
3.2.1. La mobilisation collective repose sur un lien affectif fort .............................................................. 75
3.2.2. L’engagement organisationnel, une attitude qui détermine l’orientation organisationnelle de la
mobilisation collective ............................................................................................................................. 76
CONCLUSION DU CHAPITRE 2 ....................................................................................................................... 80
CHAPITRE 3. LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES COMME GUIDES DE LA MOBILISATION
COLLECTIVE ...................................................................................................................................................... 82
Section 1 : Les représentations sociales : donner une signification à la situation pour savoir comment agir ... 83
1.1. Du sens commun aux représentations sociales ...................................................................................... 83
1.2. La théorie des représentations sociales en psychologie sociale ............................................................. 86
1.2.1. Définition : une construction collective de la réalité à travers les interactions .............................. 86
1.2.2. Elaboration et fonctions des représentations sociales .................................................................... 89
1.2.3. La structure des représentations sociales : un double système qui permet leur stabilité ................ 92
1.3. Lien entre représentations sociales et conduites .................................................................................... 94
Section 2 : Différentes conceptions des phénomènes cognitifs collectifs en organisation ............................... 99
2.1. Perspective cognitive ........................................................................................................................... 100
2.3. Perspective weickienne ....................................................................................................................... 102
2.2. Perspective sociocognitive .................................................................................................................. 105
CONCLUSION DU CHAPITRE 3 ..................................................................................................................... 107
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE ................................................................................................... 109
PRÉSENTATION DES QUESTIONS DE RECHERCHE ................................................................................ 111

DEUXIÈME PARTIE : CHOIX ÉPISTÉMOLOGIQUES ET MÉTHODOLOGIQUES DE LA RECHERCHE


............................................................................................................................................................................ 112
CHAPITRE 4. PROBLÉMATISATION DE LA RECHERCHE ET FONDEMENT ÉPISTÉMOLOGIQUE .. 114
Section 1 : Problématisation de la recherche .................................................................................................. 115
1.1. Points de départ de nos questionnements ............................................................................................ 115
1.2. La formulation de notre problématique et des questions de recherche qui la déclinent ...................... 116
Section 2 : Inscription paradigmatique de la recherche .................................................................................. 122
Section 3 : Un positionnement épistémologique interprétativiste ................................................................... 125
3.1. Les trois paradigmes dominants en Sciences de l’organisation ........................................................... 125
3.2. Le choix de notre posture interprétativiste .......................................................................................... 128

352
3.2.1. Statut de la connaissance .............................................................................................................. 129
3.2.2. Elaboration de la connaissance .................................................................................................... 129
3.2.3. Critères de validité ....................................................................................................................... 130
3.2.4. Une recherche exploratoire hybride et abductive ......................................................................... 131
CHAPITRE 5 : UNE MÉTHODOLOGIE QUALITATIVE FONDÉE SUR L’ÉTUDE DE CAS MULTIPLES
............................................................................................................................................................................ 133
Section 1 : Une étude de cas multiples ........................................................................................................... 133
1.1. La méthode des cas .............................................................................................................................. 133
1.1.1. Description de la méthode des cas ............................................................................................... 133
1.1.2. Le choix d’une étude de cas multiples ......................................................................................... 135
1.2. La définition des cas retenus ............................................................................................................... 136
1.2.1. Présentation du contexte institutionnel ........................................................................................ 136
1.2.2. La sélection des cas ...................................................................................................................... 141
1.2.2.1. Types d’établissement retenus .............................................................................................. 142
1.2.2.2. Disciplines retenues .............................................................................................................. 143
1.2.2.3. Statuts retenus ....................................................................................................................... 148
1.3. La méthode de recueil des données primaires et secondaires .............................................................. 148
1.3.1. Le choix de l’entretien semi-directif ............................................................................................ 148
1.3.2. Le plan d’entretien ....................................................................................................................... 152
1.3.3. Description des données primaires et secondaires recueillies ...................................................... 156
1.3.3.1. La définition de la population ............................................................................................... 156
1.3.3.2. Les techniques d’échantillonnage retenues ........................................................................... 157
1.3.4. Caractéristiques de l’échantillon .................................................................................................. 160
1.3.4.1. Caractéristiques de l’échantillon du Cas A ........................................................................... 160
1.3.4.2. Caractéristiques de l’échantillon du Cas B ........................................................................... 163
Section 2 : Méthode d’analyse du matériau recueilli ...................................................................................... 166
2.1. Analyse de contenu thématique verticale ............................................................................................ 167
2.1.1. Les techniques de codage utilisées : codage multiple et multithématique ................................... 167
2.1.2. Méthode d’analyse causale qualitative ......................................................................................... 169
2.2. Analyse des représentations sociales .................................................................................................. 172
2.2.1. Analyse du contenu de la RS de la performance organisationnelle ............................................. 172
2.2.2. Analyse de la structure de la RS de la performance organisationnelle (noyau central et système
périphérique) .......................................................................................................................................... 176
2.2.3. Technique de traitement de l’effet de masquage .......................................................................... 179
CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE .................................................................................................. 182

TROISIÈME PARTIE : RÉSULTATS ET DISCUSSION ................................................................................. 183


CHAPITRE 6 : ANALYSE INTRA-CAS A ...................................................................................................... 185
Section 1 : Description de l’Université A ....................................................................................................... 185
Section 2 : Réponses aux QR .......................................................................................................................... 192
2.1. Types de comportements (envers l’organisation et envers la profession) que les EC adoptent dans le
cadre de leur mobilisation collective (QR1) ............................................................................................... 192
2.1.1. Point de vue des dirigeants ........................................................................................................... 192

353
2.1.2. Description des dimensions et orientations de la mobilisation collective .................................... 193
2.1.3. Niveau groupal de référence de la mobilisation collective .......................................................... 196
2.1.4. Comment encourager la mobilisation collective .......................................................................... 198
2.1.5. Taille du groupe mobilisé............................................................................................................. 209
2.2. RS de la performance organisationnelle (QR2) ................................................................................... 209
2.2.1. La performance, un mot tabou ..................................................................................................... 209
2.2.2. Contenu de la RS.......................................................................................................................... 211
2.2.3. Réactions face aux réformes ........................................................................................................ 220
2.3. Lien entre RS de la performance organisationnelle et engagement envers l’organisation et engagement
envers la profession (QR3) ......................................................................................................................... 220
2.4. Lien entre engagement envers l’organisation et engagement envers la profession et mobilisation
collective des EC (QR4) ............................................................................................................................. 223
Section 3 : Synthèse : Dans quelle mesure la RS de la performance que les professionnels élaborent oriente-t-
elle leur mobilisation collective envers l’organisation ? ................................................................................. 226
CHAPITRE 7 : ANALYSE INTRA-CAS B ....................................................................................................... 231
Section 1 : Description de l’Université B ....................................................................................................... 231
Section 2 : Réponses aux QR .......................................................................................................................... 236
2.1. Types de comportements (envers l’organisation et envers la profession) que les EC adoptent dans le
cadre de leur mobilisation collective (QR1) ............................................................................................... 236
2.1.1. Point de vue des dirigeants ........................................................................................................... 236
2.1.2. Description des dimensions et orientations de la mobilisation collective .................................... 238
2.1.3. Niveau groupal de référence de la mobilisation collective .......................................................... 239
2.1.4. Comment encourager la mobilisation collective .......................................................................... 243
2.1.5. Taille du groupe mobilisé............................................................................................................. 247
2.2. RS de la performance organisationnelle (QR2) ................................................................................... 247
2.2.1. La performance, un mot tabou ..................................................................................................... 247
2.2.2. Contenu de la RS.......................................................................................................................... 249
2.2.3. Réactions face aux réformes ........................................................................................................ 254
2.3. Lien entre RS de la performance organisationnelle et engagement envers l’organisation et engagement
envers la profession (QR3) ......................................................................................................................... 254
2.4. Lien entre engagement envers l’organisation et engagement envers la profession et mobilisation
collective des EC (QR4) ............................................................................................................................. 257
Section 3. Synthèse : Dans quelle mesure la RS de la performance que les professionnels élaborent oriente-t-
elle leur mobilisation collective envers l’organisation ? ................................................................................. 260
CHAPITRE 8 : SYNTHÈSE ET TRANSITION VERS LA DISCUSSION ...................................................... 264
Section 1 : Comparaison du contexte des deux cas étudiés ............................................................................ 264
Section 2 : Réponses aux QR .......................................................................................................................... 265
2.1. Description des comportements adoptés dans le cadre de la mobilisation collective (QR1) ............... 265
2.1.1. Niveau groupal de référence de la mobilisation collective .......................................................... 266
2.1.2. Comment encourager la mobilisation collective .......................................................................... 267
2.1.3. Taille du groupe mobilisé............................................................................................................. 268
2.2. RS de la performance organisationnelle (QR2) ................................................................................... 268
2.3. Lien entre RS de la performance organisationnelle et engagement (QR3) ......................................... 269
2.4. Lien entre engagement et mobilisation collective (QR4) .................................................................... 270

354
Section 3 : Réponse à la problématique .......................................................................................................... 271
3.1. Profil 1 : vision pragmatique/engagement organisationnel/mobilisation organisationnelle ................ 271
3.2. Profil 2 : vision pragmatique/double engagement/mobilisation renforcée .......................................... 274
3.3. Profil 3 : vision philosophique/engagement professionnel/mobilisation collective ............................ 276
3.4. Profil 4 : vision philosophique/engagement institutionnel/mobilisation individuelle et organisationnelle
.................................................................................................................................................................... 278
CHAPITRE 9 : DISCUSSION ............................................................................................................................ 281
Section 1 : Retour sur le cadre théorique de la recherche ............................................................................... 283
1.1. Une mobilisation collective qui prend forme d’une participation à la vie civique .............................. 283
1.2. Une mobilisation collective reposant sur un petit nombre d’EC très motivés ..................................... 284
1.3. Une mobilisation multi-cibles ............................................................................................................. 284
1.4. Une RS de la performance de l’université à deux facettes .................................................................. 285
1.5. Lien entre mobilisation collective et RS de la performance de l’université… .................................... 287
1.6. Des espaces de mobilisation collective................................................................................................ 287
Section 2 : La profession d’EC : entre logique organisationnelle et logique professionnelle ........................ 288
2.1. Une mobilisation collective portée par un engagement affectif envers l’établissement (profil 1) ....... 291
2.2. Une mobilisation collective portée par un double engagement (profil 2) ............................................ 292
2.3. Une mobilisation uniquement professionnelle (profil 3) ..................................................................... 292
2.4. Une mobilisation institutionnelle portée par des valeurs publiques (profil 4) ..................................... 293
Section 3 : L’hybridation des identités professionnelles................................................................................. 294
Section 4 : Une théorisation du changement (LRU) fondée sur des valeurs publiques encourageant la
mobilisation collective .................................................................................................................................... 296
Section 5 : Gestion des Ressources Humaines et enseignants-chercheurs ? ................................................... 299
5.1. Un besoin de reconnaissance organisationnelle................................................................................... 300
5.2. Une rémunération équitable ................................................................................................................ 302
CONCLUSION DE LA TROISIÈME PARTIE ................................................................................................. 306

CONCLUSION GÉNÉRALE ............................................................................................................................. 307


Apports théoriques .............................................................................................................................................. 308
Apports méthodologiques ................................................................................................................................... 309
Implications managériales ................................................................................................................................... 310
Limites théoriques ............................................................................................................................................... 312
Limites méthodologiques .................................................................................................................................... 312
Pistes de recherche .............................................................................................................................................. 313

Bibliographie....................................................................................................................................................... 314
Table des matières ............................................................................................................................................... 351
Table des tableaux ............................................................................................................................................... 356
Table des figures ................................................................................................................................................. 357
Table des encadrés .............................................................................................................................................. 358
Annexes............................................................................................................................................................... 359
Annexe 1 : Les missions de l’université ......................................................................................................... 360
Annexe 2 : Décret n°84-431 du 6 juin 1984 ................................................................................................... 361

355
Annexe 3 : Grille de codage ........................................................................................................................... 367
Annexe 4 : Fiche individuelle répondant A1 ................................................................................................. 370
Annexe 5 : Échange de messages électroniques avec un répondant ............................................................... 372

Table des tableaux

TABLEAU 1 : LES GRANDES APPROCHES SOCIOLOGIQUES DE LA RELATION ETAT-PROFESSIONS, SELON LE BIANIC


(2008) ........................................................................................................................................................... 33
TABLEAU 2 : LES MODÈLES DE FONCTIONNEMENT DE L'UNIVERSITÉ ..................................................................... 42
TABLEAU 3 : LES DEUX APPROCHES DE LA MOBILISATION COLLECTIVES, EXPRIMÉES PAR LES AUTEURS............... 51
TABLEAU 4 : DÉFINITIONS DE LA MOBILISATION COLLECTIVE CLASSÉES PAR APPROCHE « PROCESSUS » ET
APPROCHE « ÉTAT » ...................................................................................................................................... 55
TABLEAU 5 : LES BASES PSYCHOLOGIQUES DES TROIS ORIENTATIONS DE LA MOBILISATION COLLECTIVE, BICHON
(2005 : 51) .................................................................................................................................................... 74
TABLEAU 6 : LES PRINCIPAUX CONCEPTS À NE PAS CONFONDRE AVEC LA MOBILISATION COLLECTIVE ................. 74
TABLEAU 7 : LES PRINCIPALES DÉFINITIONS DES REPRÉSENTATIONS SOCIALES ..................................................... 87
TABLEAU 8 : PRINCIPALES DÉFINITIONS DE LA RELATION ENTRE REPRÉSENTATIONS SOCIALES ET CONDUITES ..... 95
TABLEAU 9 : QUESTIONS ET SOUS-QUESTIONS DE RECHERCHE ............................................................................ 120
TABLEAU 10 : LES CRITÈRES DE VALIDITÉ DE L'APPROCHE INTERPRÉTATIVE, DJABI (2014) ................................ 131
TABLEAU 11 : CARACTÉRISTIQUES DES CAS RETENUS ......................................................................................... 143
TABLEAU 12 : CAS A - RÉPARTITION DES EFFECTIFS ESTUDIANTINS PAR COMPOSANTE (2012) ........................... 147
TABLEAU 13 : CAS B - RÉPARTITION DES EFFECTIFS ESTUDIANTINS PAR COMPOSANTE (2012) ........................... 147
TABLEAU 14 : MÉTHODES DE RECUEIL DES REPRÉSENTATIONS SOCIALES : AVANTAGE ET LIMITES (THAMAIN, 2010
: 201)........................................................................................................................................................... 150
TABLEAU 15 : CAS A - SYNTHÈSE DES ENTRETIENS ............................................................................................. 158
TABLEAU 16 : CAS B - SYNTHÈSE DES ENTRETIENS ............................................................................................. 158
TABLEAU 17 : SYNTHÈSE DES DONNÉES RECUEILLIES .......................................................................................... 159
TABLEAU 18 : CAS A - LISTE DES SIGLES DE DÉNOMINATION DES RÉPONDANTS .................................................. 160
TABLEAU 19 : CAS A - DÉNOMINATION DES RÉPONDANTS .................................................................................. 161
TABLEAU 20 : CAS B - LISTE DES SIGLES DE DÉNOMINATION DES RÉPONDANTS .................................................. 163
TABLEAU 21 : CAS B - DÉNOMINATION DES RÉPONDANTS ................................................................................... 164
TABLEAU 22 : CATÉGORIES THÉMATIQUES ASSOCIÉES À L'OBJET « PERFORMANCE DE L'UNIVERSITÉ », CITÉES PAR
LE RÉPONDANT A1 ...................................................................................................................................... 173
TABLEAU 23 : EVALUATION DE L'ATTITUDE DES RÉPONDANTS ENVERS L'OBJET « PERFORMANCE DE
L'UNIVERSITÉ », PAR RÉPONDANT ............................................................................................................... 174
TABLEAU 24 : EVALUATION DE L'ATTITUDE DU RÉPONDANT A1 ENVERS L'OBJET « PERFORMANCE DE
L'UNIVERSITÉ » ........................................................................................................................................... 175
TABLEAU 25 : EVALUATION DE L'ATTITUDE DES RÉPONDANTS ENVERS L'OBJET « PERFORMANCE DE
L'UNIVERSITÉ », PAR CATÉGORIE THÉMATIQUE ........................................................................................... 175
TABLEAU 26 : CARTE COGNITIVE DU RÉPONDANT A1 .......................................................................................... 176
TABLEAU 27 : CAS A - DIMENSIONS ET ORIENTATIONS DE LA MOBILISATION COLLECTIVE (QR1) ...................... 195
TABLEAU 28 : CAS A – DESCRIPTION DE LA MOBILISATION COLLECTIVE, MATRICE PAR RÉPONDANT (QR1) ...... 197
TABLEAU 29 : CAS A - SYNTHÈSE DES VERBATIM SUR LES MOYENS D'ENCOURAGER LA MOBILISATION COLLECTIVE
(QR1).......................................................................................................................................................... 199
TABLEAU 30 : CAS A - SYNTHÈSE DES VERBATIM SUR LES MOYENS D'ENCOURAGER LA MOBILISATION
COLLECTIVE, PAR RÉPONDANT .................................................................................................................... 207
TABLEAU 31 : CAS A - CATÉGORIES THÉMATIQUES ASSOCIÉES À LA RS DE LA PERFORMANCE
ORGANISATIONNELLE, PAR CONCEPTION ..................................................................................................... 215

356
TABLEAU 32 : CAS A - ANALYSE STRUCTURALE DE LA CONCEPTION PRAGMATIQUE DE LA PERFORMANCE DE
L'UNIVERSITÉ .............................................................................................................................................. 216
TABLEAU 33 : CAS A : ANALYSE STRUCTURALE DE LA CONCEPTION PHILOSOPHIQUE DE LA PERFORMANCE DE
L'UNIVERSITÉ .............................................................................................................................................. 216
TABLEAU 34 : CAS A - SYNTHÈSE DES CATÉGORIES THÉMATIQUES ASSOCIÉES À LA RS DE LA PERFORMANCE DE
L’UNIVERSITÉ, PAR RÉPONDANT .................................................................................................................. 217
TABLEAU 35 : CAS A – LIEN ENTRE RS DE LA PERFORMANCE ORGANISATIONNELLE ET ENGAGEMENT, MATRICE
PAR RÉPONDANT (QR3) ............................................................................................................................... 222
TABLEAU 36 : CAS A - LIEN ENTRE ENGAGEMENT ET MOBILISATION COLLECTIVE (QR4), MATRICE PAR
RÉPONDANT ................................................................................................................................................ 225
TABLEAU 37 : CAS A – LIEN ENTRE RS DE LA PERFORMANCE ORGANISATIONNELLE, ENGAGEMENT ET
MOBILISATION COLLECTIVE, MATRICE PAR RÉPONDANT ............................................................................. 229
TABLEAU 38 : CAS B – DESCRIPTION DE LA MOBILISATION COLLECTIVE (QR1), MATRICE PAR RÉPONDANT....... 242
TABLEAU 39 : CAC B - SYNTHÈSE DES VERBATIM SUR LES MOYENS D'ENCOURAGER LA MOBILISATION COLLECTIVE
.................................................................................................................................................................... 245
TABLEAU 40 : CAS B - CATÉGORIES THÉMATIQUES ASSOCIÉES À LA RS DE LA PERFORMANCE DE L’UNIVERSITÉ 249
TABLEAU 41: CAS B - ANALYSE STRUCTURALE DE LA RS DE LA PERFORMANCE DE L'UNIVERSITÉ ..................... 250
TABLEAU 42 : CAS B - SYNTHÈSE DES CATÉGORIES THÉMATIQUES ASSOCIÉES À LA RS DE LA PERFORMANCE DE
L'UNIVERSITÉ, PAR RÉPONDANT .................................................................................................................. 251
TABLEAU 43 : CAS B - LIEN ENTRE ENGAGEMENT ET MOBILISATION COLLECTIVE (QR3), MATRICE PAR
RÉPONDANT ................................................................................................................................................ 258
TABLEAU 44 : CAS B - LIEN ENTRE RS DE LA PERFORMANCE ORGANISATIONNELLE, ENGAGEMENT ET
MOBILISATION COLLECTIVE, MATRICE PAR RÉPONDANT ............................................................................. 262
TABLEAU 45 : PROFILS DE MOBILISATION COLLECTIVE ....................................................................................... 282

Table des figures

FIGURE 1 : LE PROCESSUS INDIVIDUEL DE MOBILISATION COLLECTIVE .................................................................. 21


FIGURE 2 : STRUCTURATION DE LA THÈSE ............................................................................................................. 24
FIGURE 3 : LES DIMENSIONS DE LA MOBILISATION, D'APRÈS WILS ET AL. (1998) ................................................... 65
FIGURE 4 : « COMPORTEMENTS ET DYNAMIQUE MOBILISATRICE » (TREMBLAY ET WILS, 2005 : 43) .................... 71
FIGURE 5 : LE MODÈLE DE L'ARCHITECTURE DE LA PENSÉE SOCIALE, D'APRÈS ROUQUETTE (1996) ....................... 85
FIGURE 6 : SYNTHÈSE DE LA PREMIÈRE PARTIE .................................................................................................... 109
FIGURE 7 : RELATIONS ENTRE LES PRINCIPAUX CONCEPTS DU CADRE THÉORIQUE ............................................... 110
FIGURE 8 : MODÈLE DE LA RECHERCHE ............................................................................................................... 121
FIGURE 9 : SYNTHÈSE DE LA DEUXIÈME PARTIE ................................................................................................... 182
FIGURE 10 : CONTEXTE GÉOGRAPHIQUE DE L'UNIVERSITÉ A ............................................................................... 187
FIGURE 11 : CONTEXTE GÉOGRAPHIQUE DE L'UNIVERSITÉ B ............................................................................... 232
FIGURE 12 : PROFIL 1 : VISION PRAGMATIQUE/ENGAGEMENT ORGANISATIONNEL/MOBILISATION ORGANISATIONNEL
.................................................................................................................................................................... 273
FIGURE 13 : PROFIL 2 : VISION PRAGMATIQUE/DOUBLE ENGAGEMENT/MOBILISATION RENFORCÉE ..................... 275
FIGURE 14 : PROFIL 3 : VISION PHILOSOPHIQUE/ENGAGEMENT PROFESSIONNEL/MOBILISATION COLLECTIVE ...... 277
FIGURE 15 : PROFIL 4 : VISION PHILOSOPHIQUE/ENGAGEMENT INSTITUTIONNEL/MOBILISATION INDIVIDUELLE ET
ORGANISATIONNELLE .................................................................................................................................. 280
FIGURE 16 : RELATIONS EMPIRIQUES ENTRE RS, ENGAGEMENT ET MOBILISATION COLLECTIVE .......................... 287
FIGURE 17 : SYNTHÈSE DE LA TROISIÈME PARTIE ................................................................................................. 306

357
Table des encadrés

ENCADRÉ 1 : CAS A - UNE NOUVELLE DÉMARCHE MANAGÉRIALE ....................................................................... 192


ENCADRÉ 2 : CAS A - LE SYSTÈME DE RECONNAISSANCE DES RESPONSABILITÉS COLLECTIVES .......................... 203
ENCADRÉ 3 : CAS B - PROFIL « ENSEIGNANT » VS PROFIL « CHERCHEUR ».......................................................... 241
ENCADRÉ 4 : CAS B - LA POLITIQUE INDEMNITAIRE NATIONALE (2013) ............................................................. 244
ENCADRÉ 5: CAS B - LA POLITIQUE NATIONALE DE PROMOTION ......................................................................... 245

358
ANNEXES

Annexe 1 : Les missions de l’université

Annexe 2 : Décret n°84-431 du 6 juin 1984

Annexe 3 : Grille de codage

Annexe 4 : Fiche individuelle répondant A1

Annexe 5 : Échange de messages électroniques avec un répondant

359
ANNEXE 1 : LES MISSIONS DE L’UNIVERSITÉ

Art. L. 123-3 de la LRU :


Les missions du service public de l'enseignement supérieur sont :
1° La formation initiale et continue ;
2° La recherche scientifique et technologique, la diffusion et la valorisation de ses résultats ;
3° L'orientation et l'insertion professionnelle ;
4° La diffusion de la culture et l'information scientifique et technique ;
5° La participation à la construction de l'Espace européen de l'enseignement supérieur et de la
recherche ;
6° La coopération internationale.

La loi a ajouté aux précédentes missions :


- L’orientation et l’insertion professionnelle
- La participation à la construction de l’Espace européen de l’enseignement supérieur et de
la recherche.

360
ANNEXE 2 : DÉCRET N°84-431 DU 6 JUIN 1984

Décret n°84-431 du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables
aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des
universités et du corps des maîtres de conférences.

Version consolidée au 27 mai 2015

Article 2
Modifié par Décret n°2009-460 du 23 avril 2009 - art. 2

Les enseignants-chercheurs ont une double mission d'enseignement et de recherche. Ils


concourent à l'accomplissement des missions du service public de l'enseignement supérieur
prévues par l'article L. 123-3 du code de l'éducation ainsi qu'à l'accomplissement des missions
de la recherche publique mentionnées à l'article L. 112-1 du code de la recherche.

Dans l'accomplissement des missions relatives à l'enseignement et à la recherche, ils jouissent,


conformément aux dispositions de l'article L. 952-2 du code de l'éducation, d'une pleine
indépendance et d'une entière liberté d'expression, sous les réserves que leur imposent,
conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du code de l'éducation, les
principes de tolérance et d'objectivité.

Article 7
Modifié par DÉCRET n°2014-997 du 2 septembre 2014 - art. 4

Les fonctions des enseignants, chercheurs s'exercent dans les domaines énumérés aux articles
L. 123-3 et L. 952-3 du code de l'éducation et L. 112-1 du code de la recherche.
I.-Le temps de travail de référence, correspondant au temps de travail arrêté dans la fonction
publique, est constitué pour les enseignants-chercheurs :
1° Pour moitié, par les services d'enseignement déterminés par rapport à une durée annuelle
de référence égale à 128 heures de cours ou 192 heures de travaux dirigés ou pratiques ou
toute combinaison équivalente en formation initiale, continue ou à distance. Ces services

361
d'enseignement s'accompagnent de la préparation et du contrôle des connaissances y afférents.
Ils sont pris en compte pour le suivi de carrière réalisé dans les conditions prévues à l'article
18-1 du présent décret ;
2° Pour moitié, par une activité de recherche prise en compte pour le suivi de carrière réalisé
dans les conditions prévues à l'article 18-1 du présent décret.
Lorsqu'ils accomplissent des enseignements complémentaires au-delà de leur temps de travail
tel qu'il est défini au présent article, les enseignants-chercheurs perçoivent une rémunération
complémentaire dans les conditions prévues par décret.
II.-Dans l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur, dans le respect des
dispositions de l'article L. 952-4 du code de l'éducation et compte tenu des priorités
scientifiques et pédagogiques, le conseil d'administration en formation restreinte ou l'organe
en tenant lieu définit les principes généraux de répartition des services entre les différentes
fonctions des enseignants-chercheurs telles que mentionnées aux articles L. 123-3 et L. 952-3
du code de l'éducation et L. 112-1 du code de la recherche. Il fixe également les équivalences
horaires applicables à chacune des activités correspondant à ces fonctions, ainsi que leurs
modalités pratiques de décompte.
Ces équivalences horaires font l'objet d'un référentiel national approuvé par arrêté du ministre
chargé de l'enseignement supérieur.
III.-Dans le respect des principes généraux de répartition des services définis par le conseil
d'administration en formation restreinte ou par l'organe en tenant lieu, le président ou le
directeur de l'établissement arrête les décisions individuelles d'attribution de services des
enseignants-chercheurs dans l'intérêt du service, après avis motivé, du directeur de l'unité de
recherche de rattachement et du directeur de la composante formulé après consultation du
conseil de la composante, réuni en formation restreinte aux enseignants.
Ces décisions prennent en considération l'ensemble des activités des enseignants-chercheurs.
Les enseignants-chercheurs peuvent en outre accomplir une partie de leur service dans un
établissement public d'enseignement supérieur distinct de leur établissement d'affectation,
notamment dans le cadre d'un regroupement prévu au 2° de l'article L. 718-3 du code de
l'éducation, ou dans un établissement public dispensant un enseignement d'un niveau
supérieur à celui correspondant au baccalauréat, dans le cadre d'un service partagé. La mise en
œuvre de ce service partagé est subordonnée à la conclusion entre les établissements
concernés d'une convention qui en fixe l'objet et en détermine les modalités. Ce service ne
peut se faire sans l'accord écrit de l'intéressé.

362
Le tableau de service de chaque enseignant-chercheur lui est transmis en début d'année
universitaire et peut être adapté pour chaque semestre d'enseignement.
Le service d'un enseignant-chercheur peut être modulé pour comporter un nombre d'heures
d'enseignement inférieur ou supérieur au nombre d'heures de référence mentionné au I.
Cette modulation est facultative et ne peut se faire sans l'accord écrit de l'intéressé.
La modulation peut s'inscrire dans le cadre d'un projet individuel ou collectif, scientifique,
pédagogique ou lié à des tâches d'intérêt général. Elle tient compte du caractère annuel ou
pluriannuel de ce projet.
La modulation de service ne peut aboutir à ce qu'un enseignant-chercheur n'exerce qu'une
mission d'enseignement ou qu'une mission de recherche et à ce que le service d'enseignement
soit inférieur à 42 heures de cours magistral ou à 64 heures de travaux pratiques ou dirigés, ou
toute combinaison équivalente. Elle doit en outre laisser à chaque enseignant-chercheur un
temps significatif pour ses activités de recherche.
Tout enseignant-chercheur peut demander le réexamen d'un refus opposé à sa demande de
modulation après consultation d'une commission, composée d'enseignants-chercheurs d'un
rang au moins égal à celui de l'intéressé, désignés par le conseil académique ou l'organe
compétent pour exercer les attributions mentionnées au IV de l'article L. 712-6-1. Pour les
maîtres des conférences, cette commission est composée à parité de maîtres de conférences et
de professeurs.
Les principes généraux de répartition des obligations de service et les décisions individuelles
d'attribution de services ne peuvent avoir pour effet de compromettre la réalisation des
engagements de formation prévus dans le cadre du contrat pluriannuel entre l'établissement et
l'Etat.
Dans le cas où il apparaît impossible d'attribuer le service de référence à ces personnels, le
président ou le directeur de l'établissement leur demande de compléter leur service dans un
autre établissement public d'enseignement supérieur de la même académie sans paiement
d'heures complémentaires. La région d'Ile-de-France est, pour l'application des dispositions du
présent alinéa, considérée comme une seule et même académie.
IV.-Les enseignants-chercheurs qui exercent les fonctions de président d'université, ou de
vice-président du conseil d'administration ou de président du conseil académique d'une
université, de président, ou de directeur d'un établissement public d'enseignement supérieur,
ainsi que de président du conseil académique d'une communauté d'universités et
d'établissements sont, de plein droit, déchargés du service d'enseignement mentionné au
troisième alinéa du présent article sauf s'ils souhaitent conserver tout ou partie de ce service.

363
De plus, les vice-présidents désignés par les statuts des universités, dans la limite de deux,
bénéficient de plein droit de la même décharge de service d'enseignement, sauf s'ils souhaitent
conserver tout ou partie de ce service.
Les enseignants-chercheurs qui exercent les fonctions de directeur d'un institut ou école
relevant de l'article L. 713-9 du code de l'éducation ou de directeur d'une école supérieure du
professorat et de l'éducation relevant de l'article L. 721-1 du même code ainsi que ceux qui
sont placés en délégation auprès de l'Institut universitaire de France sont, sur leur demande,
déchargés de plein droit des deux tiers du service d'enseignement mentionné au troisième
alinéa du présent article sauf s'ils souhaitent ne bénéficier d'aucune décharge ou bénéficier
d'une décharge inférieure.
Les enseignants-chercheurs qui exercent les fonctions de directeur d'unité de formation et de
recherche peuvent, sur leur demande, être déchargés au plus des deux tiers du service
mentionné au troisième alinéa du présent article.
Les enseignants-chercheurs qui exercent auprès des ministres chargés de l'enseignement
supérieur et de la recherche des fonctions notamment d'expertise et de conseil, dont la liste est
fixée par arrêté conjoint de ces ministres, peuvent, sur leur demande, être déchargés des deux
tiers du service mentionné au troisième alinéa du présent article, sauf s'ils souhaitent ne
bénéficier d'aucune décharge ou bénéficier d'une décharge inférieure.
Les enseignants-chercheurs qui exercent les fonctions de président de section du Conseil
national des universités ou du Conseil national des universités pour les disciplines médicales,
odontologiques et pharmaceutiques ou de président de la commission permanente du Conseil
national des universités peuvent, sur leur demande, être déchargés au plus d'un tiers du service
mentionné au troisième alinéa du présent article. La décharge accordée au titre de président de
la commission permanente du Conseil national des universités ne peut être cumulée avec celle
de président de section.
Les enseignants-chercheurs qui bénéficient des dispositions du présent IV ne peuvent pas être
rémunérés pour des enseignements complémentaires.
Les enseignants-chercheurs qui exercent les fonctions de membre du Conseil national des
universités peuvent demander à convertir les indemnités de fonction dont ils bénéficient en
décharge de service d'enseignement selon des modalités déterminées par décret.
NOTA :
Conformément à l'article 52 du décret n° 2014-997 du 2 septembre 2014 les présentes
dispositions dans leur rédaction antérieure au présent décret, continuent de s'appliquer aux

364
procédures de recrutement, d'avancement et de promotion en cours et jusqu'à leur
achèvement.
Article L123-3 du Code de l’éducation
Modifié par LOI n°2013-660 du 22 juillet 2013 - art. 7

Les missions du service public de l'enseignement supérieur sont :


1° La formation initiale et continue tout au long de la vie ;
2° La recherche scientifique et technologique, la diffusion et la valorisation de ses résultats au
service de la société. Cette dernière repose sur le développement de l'innovation, du transfert
de technologie lorsque celui-ci est possible, de la capacité d'expertise et d'appui aux
associations et fondations, reconnues d'utilité publique, et aux politiques publiques menées
pour répondre aux défis sociétaux, aux besoins sociaux, économiques et de développement
durable ;
3° L'orientation, la promotion sociale et l'insertion professionnelle ;
4° La diffusion de la culture humaniste, en particulier à travers le développement des sciences
humaines et sociales, et de la culture scientifique, technique et industrielle ;
5° La participation à la construction de l'Espace européen de l'enseignement supérieur et de la
recherche ;
6° La coopération internationale.

Article L112-1 du Code de la recherche


Modifié par LOI n°2013-660 du 22 juillet 2013 - art. 16

La recherche publique a pour objectifs :


a) Le développement et le progrès de la recherche dans tous les domaines de la connaissance ;
b) La valorisation des résultats de la recherche au service de la société, qui s'appuie sur
l'innovation et le transfert de technologie ;
c) Le partage et la diffusion des connaissances scientifiques en donnant priorité aux formats
libres d'accès ;
c bis) Le développement d'une capacité d'expertise et d'appui aux associations et fondations,
reconnues d'utilité publique, et aux politiques publiques menées pour répondre aux défis
sociétaux, aux besoins sociaux, économiques et du développement durable ;
d) La formation à la recherche et par la recherche ;
e) L'organisation de l'accès libre aux données scientifiques.

365
Les établissements publics de recherche et les établissements d'enseignement supérieur
favorisent le développement des travaux de coopération avec les associations et fondations,
reconnues d'utilité publique. Ils participent à la promotion de la recherche participative et au
développement des capacités d'innovation technologique et sociale de la Nation. Ces
coopérations s'exercent dans le respect de l'indépendance des chercheurs et, en l'absence de
clauses contraires, dans un but non lucratif. Les travaux de recherche menés dans le cadre de
ces coopérations sont, en l'absence de clauses contraires, rendus publics et accessibles.

366
ANNEXE 3 : GRILLE DE CODAGE

Thème 1 : Sens de la performance


1.1. Sens de la performance/imposé
1.1.1. Sens de la performance/imposé/par l’Etat
1.2.1. Sens de la performance/imposé/par la direction de l’établissement
1.2. Sens de la performance/élaboré par les EC eux-mêmes
Thème 2 : Parler de performance
2.1. Parler de performance / les avec collègues EC
2.2. Parler de performance / les avec collègues EC/lieu
2.2.1. Parler de performance / les avec collègues EC/lieu/réunions
2.2.2. Parler de performance / les avec collègues EC/lieu/informel
2.3. Parler de performance/avec la direction
2.4. Parler de performance/avec la direction/lieu
2.4.1. Parler de performance/avec la direction/lieu/réunions
2.4.2. Parler de performance/avec la direction/lieu/discours
2.5. Parler de performance/tabou
Thème 3 : Réformes
3.1. Réformes/impacts positifs
3.1.1. Réformes/impacts positifs/sur l’enseignement
3.1.2. Réformes/impacts positifs/sur la recherche
3.1.3. Réformes/impacts positifs/sur les activités administratives
3.1.4. Réformes/impacts positifs/sur la gouvernance de l’établissement
3.1.5. Réformes/impacts positifs/ rendre des comptes/enseignement
3.1.6. Réformes/impacts positifs/ rendre des comptes/recherche
3.2. Réformes/impacts négatifs
3.2.1. Réformes/impacts négatifs/sur l’enseignement
3.2.2. Réformes/impacts négatifs/sur la recherche
3.2.3. Réformes/impacts négatifs/sur les activités administratives
3.2.4. Réformes/impacts négatifs/sur la gouvernance de l’établissement
3.2.5. Réformes/impacts négatifs/rendre des comptes/enseignement
3.2.6. Réformes/impacts négatifs/rendre des comptes/recherche
Thème 4 : Mobilisation collective
4.1. Mobilisation collective/définie par les EC
4.1.1. Mobilisation collective/définie par les EC/individuelle
4.1.1.1. Mobilisation collective/définie par les EC/individuelle/rôle prescrit
4.1.1.2. Mobilisation collective/définie par les EC/individuelle/dévouement dans le travail
4.1.1.3. Mobilisation collective/définie par les EC/individuelle/amélioration continue
4.1.1.4. Mobilisation collective/définie par les EC/individuelle/amélioration des compétences
4.1.2. Mobilisation collective/définie par les EC/collective
4.1.2.1. Mobilisation collective/définie par les EC/collective/facilitation interpersonnelle
4.1.2.2. Mobilisation collective/définie par les EC/collective/coordination avec les autres
4.1.2.3. Mobilisation collective/définie par les EC/collective/travailler en équipe
4.1.2.4. Mobilisation collective/définie par les EC/collective/aide apportée aux autres
4.1.3. Mobilisation collective/définie par les EC/ organisationnelle
4.1.3.1. Mobilisation collective/définie par les EC/ organisationnelle/ Participation à la vie civique
4.1.3.2. Mobilisation collective/définie par les EC/ organisationnelle/ Loyauté organisationnelle
4.1.3.3. Mobilisation collective/définie par les EC/ organisationnelle/ Orientation vers les étudiants
4.1.3.4. Mobilisation collective/définie par les EC/ organisationnelle/ Amélioration continue
4.2. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction
4.2.1. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction /individuelle
4.2.1.1. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction /individuelle/rôle prescrit
4.2.1.2. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction/individuelle/dévouement dans le
travail
4.2.1.3. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction/individuelle/amélioration continue
4.2.1.4. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction/individuelle/amélioration des
compétences
4.2.2. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction /collective

367
4.2.2.1. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction /collective/facilitation
interpersonnelle
4.2.2.2. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction /collective/coordination avec les
autres
4.2.2.3. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction /collective/travailler en équipe
4.2.2.4. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction /collective/aide apportée aux autres
4.2.3. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction / organisationnelle
4.2.3.1. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction / organisationnelle/Participation à
la vie civique
4.2.3.2. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction / organisationnelle/Loyauté
organisationnelle
4.2.3.3. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction / organisationnelle/Orientation vers
les étudiants
4.2.3.4. Mobilisation collective/définie par l’équipe de direction / organisationnelle/Amélioration
continue
4.3. Mobilisation/cible
4.3.1 Mobilisation/cible/UFR
4.3.2. Mobilisation/cible/département
4.3.3. Mobilisation/cible/laboratoire
4.3.4. Mobilisation/cible/équipe de travail
4.3.5. Mobilisation/cible/communauté scientifique
4.3.6. Mobilisation/cible/établissement
4.3.7. Mobilisation/cible/tous
4.3.8. Mobilisation/cible/conflit
4.4. Taille du groupe
4.5. Démobilisation
Thème 5 : Engagement
5.1. Engagement organisationnel
5.2. Engagement professionnel
5.3. Double engagement
5.4. Double engagement/conflit
5.5. Double engagement/malaise
5.6. Lien engagement-mobilisation
Thème 6 : Motivations
6.1. Motivation au service public
6.1.1 MSP/valeurs publiques
6.1.2. MSP/intérêt public
6.1.3. MSP/sacrifice personnel
6.1.4. MSP/compassion
6.1.5. MSP/ politiques publiques
6.1.6. Lien MSP-mobilisation
6.2. Reconnaissance
6.2.1. Reconnaissance/des résultats
6.2.1.1. Reconnaissance/des résultats/recherche
6.2.1.2. Reconnaissance/des résultats/enseignement
6.2.1.3. Reconnaissance/des résultats/administratif
6.2.2. Reconnaissance/investissement
6.2.2.1. Reconnaissance/investissement/mobilisation collective
6.2.2.2. Reconnaissance/investissement/pédagogique
6.2.3. Reconnaissance de la pratique de travail collective
6.3. Leadership
6.3.1. Leadership/Président
6.3.2. Leadership/autre
6.4. Management de proximité
6.5. Espace de mobilisation
6.6. Accompagnement dans le travail/recherche
6.7. Accompagnement dans le travail/enseignement
6.8. Projet d’établissement
6.9. Feed back formatif
6.10. Carrière

368
6.11. Recrutement
Thème 7 : Sens donné à la profession
7.1. Sens donné à la profession/valeurs
7.1.1. Sens donné à la profession/valeurs/autonomie
7.1.2. Sens donné à la profession/valeurs/liberté intellectuelle
7.1.3. Sens donné à la profession/valeurs/honnêteté intellectuelle
7.2. Sens donné à la profession/missions de l’université
7.2.1. Sens donné à la profession/missions de l’université/formation des étudiants/intellectuelle
7.2.2. Sens donné à la profession/missions de l’université/formation des étudiants/professionnelle

369
ANNEXE 4 : FICHE INDIVIDUELLE RÉPONDANT A1

Renseignements :
Professeur Droit
Age : 60 ans
Ancienneté : depuis la création de l’Université
Responsabilités administratives : Administration de la recherche (directeur-adjoint d’école
doctorale), Administration de l’enseignement (responsable de master), Mandat (Conseil
Scientifique)

Carte cognitive de la RS de la performance de l’université

Verbatim Catégories Liens entre catégories


thématique thématiques
quand on regarde les classements quand on regarde les Concurrence Classement /+/ concurrence
pôles d’excelle etc. il y a bien aujourd’hui cette notion
de concurrence qui est mise en avant par le
gouvernement par les autorités publiques bien
évidemment et on est obligé de réagir par rapport à ça
mais je trouve ça détestable
l’université pour moi ce n’est pas une entreprise Public/privé Université /≠/ entreprise
je préfère à performance la notion de qualité Qualité Performance /≠/ qualité
ce n’est pas la performance mais la qualité
la qualité de ce qu’on produit j’ai horreur de ce terme Qualité Production /=/ entreprise
parce que là encore on est dans des termes qui font Production /=/ consommation
référence à l’entreprise à la consommation
il y a une culture du chiffre Indicateur Performance /=/ indicateur
pour moi la performance je pense à la pression Pression Performance /=/ pression
je suis assez gênée par tous ces concepts qui viennent Public/Privé performance /∈/ entreprise
de l’entreprise et qu’on veut appliquer à l’université

Analyse des attitudes

Favorable Neutre Défavorable


Catégorie thématique (P)
+ 0 -

Qualité   
Consommation   
Public/Privé   
- 0,67
Concurrence   
Pression   
Indicateur   

370
Type d’engagement : institutionnel

=> « l’institution l’université est extrêmement importante, être au service d’une institution »

Définition de la mobilisation collective

Mobilisation collective
Dimensions Individuelle Dimension Collective Dimension organisationnelle
la notion d’être au service d’une travail de solidarité vis-vis des travail de solidarité vis-vis des
institution pour moi ça implique tous autres collègues, vis-à-vis des autres collègues, vis-à-vis des
ces comportements-là dont vous parliez étudiants bien évidemment étudiants bien évidemment
c’est-à-dire un travail d’enseignant- aujourd’hui en ce qui me aujourd’hui en ce qui me concerne
chercheur qui soit de qualité en ce qui concerne des doctorants des doctorants, de l’université
concerne l’enseignement qui soit de => être solidaire avec les d’une manière générale afin que
qualité en ce qui concerne la recherche collègues et les étudiants => cette université fonctionne pour le
=> enseignement de qualité, recherche FACILITATION mieux
de qualité => AMELIORATION INTERPERSONNELLE => être solidaire avec
CONTINUE l’organisation => LOYAUTE
ORGANISATIONNELLE

371
ANNEXE 5 : ECHANGE DE MESSAGES ELECTRONIQUES AVEC UN
REPONDANT

-----Message d'origine-----
From: Christelle ZELLER
Sent: Tuesday, March 19, 2013 1:26 PM
To: *************
Subject: Demande d'entretien dans le cadre d'une recherche doctorale

Madame,

Je me permets de vous contacter car je réalise une thèse en Management


Public à Aix-Marseille Université et je souhaite dans ce cadre mener des
entretiens individuels avec des enseignants-chercheurs en Droit.

Je m'intéresse à la démarche de performance menée dans les universités, en


particulier au sens qu'attribuent les acteurs universitaires à cette
démarche.
La problématique a pour objet de comprendre la
mobilisation collective des enseignants-chercheurs au sein des universités
dans la perspective d'une performance collective et organisationnelle.

L'anonymat de l'université étudiée ainsi que des répondants est évidemment


garanti.

Accepteriez-vous de m'accorder un entretien ?


En espérant que vous accorderez un intérêt à ma recherche doctorale,

Cordialement,

Christelle ZELLER
Doctorante au laboratoire CERGAM, Allocataire Région PACA
Chargée de Mission d'Enseignement
Institut de Management Public et Gouvernance Territoriale
21, rue Gaston de Saporta
13625 Aix en Provence Cedex 1
Aix-Marseille Université
Courriel : christelle.zeller@univ-amu.fr
Mobile : 06 ** ** ** **

---------------------------
From: **************
> Sent: Tue Mar 19 15:18:21 CET 2013
> To: Christelle ZELLER <christelle.zeller@univ-amu.fr>
> Subject: Re: Demande d'entretien dans le cadre d'une recherche doctorale

Mademoiselle,
Je ne suis pas opposée à un entretien. J'ai déjà eu l'occasion de
travailler avec des étudiants en ce sens.
En revanche, je dois à la vérité de vous dire que je ne suis pas du tout
dans le créneau que vous recherchez.

Personnellement, je n'ai jamais pensé à travailler pour "l’entité


organisationnelle", mais pour les étudiants et pour la culture.
C'est ainsi que la recherche avance, en pensant aux êtres humains d'abord,
puis à la culture, au développement de la connaissance et donc de la
civilisation.

372
Pour rien au monde, je ne souhaiterais travailler pour une organisation
quelle qu'elle soit.
Je vois trop ce que cela donne. Les chercheurs sont tentés de prendre les
sujets qui plaisent aux "entités organisationnelles", c'est-à-dire aux
puissances du moment. Et la vraie recherche en pâtit.
Car, la connaissance ne s'acquiert pas dans la soumission, mais dans
l'esprit d'initiative, dans la curiosité intellectuelle, et nécessairement
dans l'anti-conformisme.

Pour quelle raison la France qui était parmi les premières au monde dans le
domaine de la recherche voici plusieurs décennies, rétrograde-t-elle
irrévocablement depuis que les chercheurs ne sont plus libres du choix de
leur domaine de recherche, depuis surtout que recherche et carriérisme sont
tellement imbriqués qu'il faut choisir entre la liberté et la stagnation
dans la carrière, ou le conformisme et la primauté donnée aux réseaux qui
imposent les choix venus d'en haut ?
Il faudrait se poser la question.

L'excellence ne se commande pas. La performance ne conduit qu'à la


poursuite de l'argent et du pouvoir, "la puissance et la gloire" selon
l'expression consacrée.
Non, la recherche part d'une volonté de connaître, de comprendre,
d'expliquer et de transmettre.
Cela peut se faire seul ou en communauté, car les recherches en groupe
peuvent aussi être très riches.
La première condition est l'attachement à la vérité, chercher à avancer sur
ce chemin de la vérité, de la connaissance de ce qui est et qui n'est pas
encore perçu, quel que soit le domaine, scientifique, historique,
juridique, littéraire, médical...
Et cette connaissance de la vérité, deuxième condition, n'est pas destinée
à une gloire personnelle, collective ou organisationnelle. Elle est
recherchée pour être donnée à tous, transmise et portée à la connaissance
de tous.
Le reste n'est qu'idéologie, c'est-à-dire soumission aux puissances
d'argent et de pouvoir qui travaillent à courte vue et de toute façon
contre l'intelligence humaine parce que celle-ci leur échappe.

J'ai préféré vous dire la vérité. Je reste à votre disposition.


Cordialement
************

373

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