Vous êtes sur la page 1sur 24

La plupart des composés que nous rencontrerons ne sont pas des atomes isolés mais des

groupes d’atomes appelés molécules. Comme dans le cas de l’atome polyélectronique, la


résolution analytique de l’équation de Schrödinger du système n’est pas possible.
L’introduction de quelques approximations permettra de simplifier le problème tout en
conservant une précision suffisante pour les applications qui nous intéressent.

L'
opérateur hamiltonien d’une molécule diatomique A-B est fonction des coordonnées des 2
noyaux et des coordonnées des n électrons ainsi que de la distance dAB entre les 2 noyaux.
Dans le référentiel barycentrique du système, il s'
exprime par :

= − ∆ − + − ∆ +
πε
>
πε πε

Comme nous l’avons déjà dit, la résolution de l'équation de Schrödinger


correspondante est impossible. En plus des répulsions entre les électrons déjà rencontrées
dans l’étude de l’atome polyélectronique, chaque électron interagit avec chaque noyau, et
les noyaux se repoussent.

Born et Oppenheimer ont proposé une hypothèse simplificatrice qui consiste à considérer que
les noyaux, beaucoup plus lourds que les électrons, peuvent être supposés immobiles pendant
que les électrons se déplacent autour d’eux.
Pour l’ion H2+, comprenant deux noyaux et un électron, les calculs montrent que les noyaux
d’hydrogène se déplacent de 1 pm quand le déplacement de l’électron atteint 1000 pm.

32
Dans cette approximation, l’hamiltonien du système peut se décomposer en la somme de deux
termes : un hamiltonien électronique Hel et un hamiltonien nucléaire Hnu :
= +

avec = − ∆ − +
πε
>
πε

expression dans laquelle la position des noyaux est fixée. A ce premier opérateur sera associée
énergie électronique Eel du système.
l'

et =− ∆ +
πε
A ce deuxième opérateur sera associée l'
énergie de répulsion internucléaire ENu constante si la

position des noyaux est fixe ( ∆ =0).

La fonction d’onde Φ(R,r), fonction propre de l'


opérateur H peut alors s'
écrire sous la forme
d’un produit de deux termes : l’un ξ(R) décrivant les noyaux et l’autre χ(r), les électrons :

φ( ) =ξ ( )× χ ( )

Dans le cadre de cette approximation, la résolution de l’équation de Schrödinger relative au


système {électrons + noyaux} revient à déterminer χ(r), la position des noyaux étant fixée.
En nous plaçant dans le cadre de cette approximation, nous allons, dans la suite, nous
intéresser à la fonction d’onde électronique χ(r) de la molécule… puisque la chimie est la
science des mouvements d’électrons.1

De même qu’il n’était pas possible de résoudre exactement l’équation de Schrödinger pour un
atome polyélectronique, il est impossible de trouver une expression analytique de la fonction
d’onde électronique χ(r) dès que la molécule étudiée a plus d’un électron.
Comme dans le cas de l’atome polyélectronique, les répulsions interélectroniques seront
modélisées par un champ moyen. Chaque électron voit alors un potentiel qui ne dépend que
de sa position. L’hamiltonien électronique du système peut alors s’écrire sous la forme d’une

1
Le mouvement de vibration des noyaux permet d’accéder à des informations très importantes sur les fonctions
présentes dans la molécule grâce à la spectroscopie infra-rouge.

33
somme d’hamiltoniens monoélectroniques. Les variables électroniques ainsi séparées
écrire χ(r), fonction des coordonnées des n électrons (e1, …en), sous la forme
permettent d'
d’un produit de fonctions monoélectroniques ψi(ei), chacune fonction des coordonnées du seul
électron i :
χ(e1, ..en) = ψ1(e1)×…×ψn(en)

Les fonctions monoélectroniques ψi(ei) sont appelées Orbitales Moléculaires (OM) de la


molécule A-B. Chaque OM ψi est fonction propre d'
un hamiltonien monoélectronique hi ; hi
représentant la somme de l'
énergie cinétique de l'
électron i et du potentiel résultant de
l'
attraction exercée par les noyaux (la répulsion exercée par l'
ensemble des autres électrons
j i est décrite par un terme moyen). Chaque OM est fonction propre d’une équation de
Schrödinger de la forme :
hi ψi = Ei ψi ou < ψi | hi | ψi > = Ei < ψi | ψi > (1)

Pour la molécule, se pose alors le problème de déterminer la forme des orbitales


moléculaires : ψ1, .. ψn.

! "#

Comme nous l’avons précédemment vu, les orbitales atomiques forment une base de l’espace
des fonctions d’onde. Dans le cas des molécules, l’ensemble des orbitales atomiques de
chaque atome de la molécule forme par conséquent une base de l’espace des orbitales
moléculaires. Toute orbitale moléculaire peut ainsi s’écrire sous la forme d'
une Combinaison
Linéaire d'
Orbitales Atomiques (C.L.O.A.) :

ψi = c Ajϕ jA + c kBϕ kB
j k

Cette base est infinie, et ainsi difficilement utilisable. C’est pourquoi, nous ne retiendrons que
les orbitales atomiques qui sont, dans les atomes isolés situés à l’infini, peuplées par des
électrons, et celles qui leur sont proches en énergie.

Une justification simple de cette théorie est qu’à l’intérieur d’une molécule, un atome ne perd
pas totalement son identité et conserve certaines caractéristiques de l’état isolé. Dire qu’une

34
OM est combinaison linéaire des OA des atomes constitutifs de la molécule, c’est dire qu’au
voisinage de l’atome A, l’OM se confond pratiquement avec l’OA de A. C'
est aussi dire que
lors de l'
approche de 2 atomes, la formation d'
une liaison n' une perturbation des
est qu'
orbitales atomiques de ces atomes.
Muni de ces bases, nous allons à présent voir comment il est possible de construire les
orbitales moléculaires de divers systèmes.

"

# $ %

Nous considèrerons le système formé de deux atomes d’hydrogène HA et HB, chaque atome
étant décrit par une orbitale 1s (notée ϕ pour l'atome HA et ϕ pour l'atome HB).

Dans le cadre de la théorie CLOA, l’équation (1) s’écrit :


< ϕ + ϕ ϕ + ϕ >= < ϕ + ϕ ϕ + ϕ > (2)

Pour simplifier l’écriture, on pose :2


αA = < ϕA | h | ϕA > intégrales coulombiennes
αB = < ϕB | h | ϕB >
β = < ϕA | h | ϕB >= < ϕB | h | ϕA > intégrale de résonance
S = < ϕA|ϕB > intégrale de recouvrement
Nous admettrons pour l’instant que A est proche de l’énergie d’un électron occupant
l’orbitale atomique ϕ dans l’atome isolé et que et sont négatifs, S étant positif.

En développant, l’équation (2) devient :


c A2α A + cB2α B + 2c AcB β − E (c A2 + cB2 + 2c AcB S ) = 0 (3)

2
La signification physique de ces paramètres sera discutée à la fin de ce chapitre.

35
Afin de résoudre ce système, et seront considérés comme des variables ; α, β et S étant
des paramètres fixés. Nous chercherons les valeurs de et qui permettent d’obtenir une
énergie minimale. Une condition nécessaire pour cela s’écrit :

∂ ∂
= =
∂ ∂

On obtient ainsi un système de deux équations linéaires et homogènes appelées équations


séculaires (4) :
(α − ) + (β − ) =
(4)
(β − ) + (α − ) =

La solution triviale de ce système, cA = cB = 0, n’est pas physiquement acceptable puisque


l’orbitale ne peut être normalisée. Pour qu’il existe une solution non triviale à ce système, il
faut que le déterminant séculaire (5) soit nul :

α − β−
= (5)
β− α −

(5) conduit à une équation du second degré en E, dont les solutions E1 et E2 correspondent aux
2 énergies que peut prendre un électron de la molécule H2.

& $ '

L’écriture du déterminant séculaire (5) se simplifie en considérant que A = B (car les deux
atomes de la molécule sont identiques).
α − E β − ES
=0
β − ES α − E

soit (α − E ) 2 − ( β − ES ) 2 = 0

α − E = ±( β − ES )
On obtient ainsi deux solutions réelles pour E, notées E+ et E-.

36
+ α+β
=
+
α −β
=

Notons que E+ peut s'


exprimer par :
β − α S où β − αS
E+ =α + <0
1+ S 1+ S
et E- :
β − αS β − αS
E− =α − où <0
1− S 1− S

L'interaction de 2 orbitales atomiques appartenant à deux atomes distincts conduit à la

formation de 2 orbitales moléculaires associées aux valeurs propres E+ et E − .

& '

expression des OM ψ+ et ψ − en introduisant les valeurs de E+ et E −


On détermine ensuite l'
dans le système d’équations séculaires (4).
énergie E+ revient à chercher les coefficients
onde ψ + associée à l'
Déterminer la fonction d'

c A+ et cB+ des ϕ et ϕ . Pour cela, on remplace, dans l'


équation (4), E par la valeur de E+ :

α +β α +β
α− +
+ β− +
=
+ +
α +β α +β
β− +
+ α− +
=
+ +

Outre la solution triviale, ce système de deux équations à deux inconnues est vérifié par
c A+ = cB+ .

Afin de déterminer les coefficients de l’OM, la condition de normalisation de ψ + est


nécessaire. Cette équation conduit à :
c A+ϕ A + cB+ϕ B c A+ϕ A + cB+ϕ B = (c A+ ) 2 + (cB+ ) 2 + 2c A+ × cB+ S = 1

or c A+ = cB+

37
1
c A+ = cB+ =
ainsi 2(1 + S )
expression suivante pour ψ + :
On obtient ainsi l'

ψ+ = ϕ +ϕ
+

α −β
Un calcul analogue permet de déterminer ψ − d'
énergie = :

ψ− = ϕ −ϕ

Vous reverrez cette méthode de manière plus détaillée au cours des PC…

( $ ) '

Ces résultats sont traditionnellement représentés sur un diagramme d’énergie ayant l’allure
suivante :

HA HB 1
ψ− = (ϕ A − ϕ B )
2(1 − S )

E-

ϕΑ ∆E − ϕΒ

α α
∆E + 1
ψ+ = (ϕ1 + ϕ2 )
2(1 + S )

E+

* $ + ) $

Une fois l’énergie et l’expression des orbitales moléculaires connues, il reste à voir comment
se répartissent les électrons dans ces orbitales. Comme dans le cas des OA, ce remplissage se
fait par énergie croissante en plaçant au maximum deux électrons dans chaque OM
(correspondant aux 2 états de spin).

38
La configuration électronique de la molécule de dihydrogène H2 est donc (ψ + )2. Les deux

orbitale ψ + , leurs spins étant opposés.


électrons occupent l'
Le remplissage des OM permet de prévoir la stabilité des systèmes. Considérons ainsi l'
ion
moléculaire H2+ comportant 1 électron. Cet ion est globalement stabilisé par rapport au
système initial (H+, H). En effet, la différence d' ion moléculaire H2+ (1 électron
énergie entre l'
orbitale ψ + ) et le système de départ (1 électron dans une OA d'
dans l' énergie ) est
β − αS
Estab = 1 × E+ - = E+ = ion moléculaire H2+
< 0 . Cette différence étant négative, l'
1+ S
est plus stable que le système (H+, H). De la même façon, on montre que la molécule H2 est
stabilisée par rapport au système composé de deux atomes d'
hydrogène isolés puisqu'
elle
orbitale ψ + :
possède deux électrons dans l'
Estab = 2 x E+ - 2 = 2 E+ < 0

ion moléculaire H2-. On dispose


Ajoutons un électron à ce système, on obtient alors l'
maintenant de trois électrons pour deux atomes. L'
électron supplémentaire se place dans
orbitale ψ − et contribue à détabiliser le système. Toutefois, le bilan énergétique dépend des
l'
β − αS β − αS
valeurs de E+ ( ) et ∆E − ( − ). En effet, la stabilisation du système est
1+ S 1− S
Estab = 2 E+ + ∆E − . Si cette valeur est négative, l'
ion moléculaire est plus stable que le
système de départ et peut donc exister. Par contre, l' un 4ème électron déstabilise
ajout d'
inévitablement le système puisque Estab = 2 E+ + 2 ∆E − > 0. Ceci explique que la molécule
He2 n'
existe pas et que, de manière plus générale, les gaz rares ne dimérisent pas
spontanément.
σ∗ σ∗ σ∗ σ∗

σ σ σ σ

Quand un électron occupe l’orbitale ψ+, il stabilise la molécule par rapport aux atomes
constitutifs. En effet, pour dissocier H2, il faut fournir de l’énergie pour ramener les électrons
au niveau . ψ + est appelée orbitale moléculaire liante. En revanche, si un électron occupe

39
ψ − , il a tendance à couper la liaison puisque la dissociation sera exothermique. ψ − est
appelée orbitale moléculaire antiliante.
La stabilisation de l'
OM liante par rapport à l'
OA la plus basse en énergie est toujours plus
faible que la déstabilisation de l'
OM antiliante par rapport à l'
OA la plus haute en énergie
( | ∆E + |<| ∆E − | ).

, - , )

Dans le diagramme précédent, nous avons représenté :

l'
OM de plus basse énergie par

l'
OM de plus haute énergie par

Dans cette représentation conventionnelle, le rayon de chaque sphère est proportionnel au


coefficient affecté à l'
OA correspondante dans l'
OM considérée. Si la sphère est grisée, le
coefficient est positif, il est négatif dans le cas contraire. Cette représentation pratique sera
constamment utilisée dans la suite bien qu'
elle ne donne pas une idée claire de la distribution
des électrons décrits par ces OM. Il faut, pour cela, représenter les surfaces d'
isodensité
OM ψ + de plus basse énergie
électronique associées à chaque orbitale. Ainsi pour l'

( ), la distribution électronique est représentée par :

A B

Cette représentation fait clairement apparaître que l’obitale moléculaire ψ + accumule les
électrons entre les deux noyaux. Cette OM assure donc la cohésion de la molécule. Alors que

OM ψ − de plus haute énergie (


pour l' ), les surfaces d'
isodensité électronique ont

l'
allure suivante :

A B

40
L’orbitale moléculaire ψ − « repousse » les électrons à l'
extérieur du segment joignant les
noyaux : si elle est occupée, elle a tendance à éloigner les noyaux.

! ψ+ ! ψ−"

$ α . / ϕ 0 0 ϕ 1 $

intégrale coulombienne représente l’énergie d’un électron occupant l’orbitale atomique ϕA


L'
3
dans l’atome A isolé, donc A<0.

|αA| est voisine du potentiel d’ionisation de l’atome A, c’est-à-dire l’énergie qu’il faut fournir
pour arracher un électron à ϕA et l’envoyer à l’infini (E = 0).
E

E.I.A

αA

$ 2 . / ϕ 0 0 ϕ 1 $

une énergie ; β est négatif quand le recouvrement S > 0. D’après


, comme , a la dimension d'
l'approximation de Mulliken, est proportionnel à S :
#kS

3
On considère qu’au voisinage de A, ϕ A h i ϕ A = ϕ A h A ϕ A .

41
Au départ, chaque atome est porteur d'
un électron. Après formation de la molécule H2, les
deux électrons vont se trouver dans le niveau le plus stable afin de constituer l'
état
fondamental de la molécule. Le bilan thermodynamique est donc :
α+β
∆E = 2 E + − 2α = 2 − 2α
1+ S
Or S est petit devant 1 (cf paragraphe suivant), ∆E ≈ 2 β .
En première approximation, est égal à la moitié de l'
énergie de liaison H-H. est donc une
mesure de force de la liaison H-H.
Notons que, puisque kS, seules 2 OA ayant un recouvrement non nul entre elles
peuvent former une orbitale moléculaire.

$ - . / ϕ 0ϕ
ϕ 1 $ +

Les orbitales atomiques étant normées, la valeur absolue de l’intégrale de recouvrement S est
toujours inférieure à 1.4
Le recouvrement entre deux orbitales atomiques correspond à la zone d'
espace dans laquelle
les deux orbitales atomiques sont en interaction. Considérons deux atomes HA et HB
possédant chacun une orbitale atomique de valence respectivement notée ϕ et ϕ se
recouvrant partiellement, elles définissent ainsi 4 régions de l'
espace :

ϕA I ϕB

II IV III

Région I : faible probabilité de trouver l’électron car rappelons qu'


à "l'
extérieur" de l'
orbitale,
la probabilité de trouver l'
électron est inférieure à 2%. Cette région de l'
espace contribue donc
peu à la liaison et au recouvrement S.

4
Attention à ne pas confondre :
recouvrement entre 2 OA d'un même atome (rappelons que 2 OA d' un même atome ont toujours un
recouvrement nul entre elles).
recouvrement entre 2 OA appartenant à 2 atomes différents. Ici, ϕ et ϕ correspondent aux atomes
HA et HB.

42
Régions II et III : faible contribution à S puisque l’un des facteurs est infiniment petit (par
exemple, dans la région II, ϕ prend des valeurs très faibles puisque cette portion de l'
espace
est située en "dehors" de l'
orbitale B).
Région IV : principale contribution à S puisque c'est la partie "commune" à ϕ et
ϕ …d’où le nom de recouvrement.

# 3 #%

La formation d’une liaison entre H et Li (Z = 3) implique l'


interaction de l'
orbitale 1s de
l'
hydrogène, d' orbitale 2s du lithium, d'
énergie -13,6 eV, et de l' énergie -5,4 eV. L'
orbitale 1s
du Li est trop profonde en énergie, elle n'
interagit donc pas avec la 1s de H. L’orbitale 2p du
lithium étant plus haute en énergie (-3,5 eV), les interactions entre la 1s de H et la 2p du Li
peuvent être négligées.
L’écriture du déterminant séculaire (5) pour la molécule de LiH s'
écrit :
α Li − E β LiH − ES
=0
β LiH − ES α H − E

soit (α Li − E )(α H − E ) − ( β LiH − ES ) 2 = 0

& $ '

On obtient ainsi une équation du second degré en E, qui a deux racines E+ et E − .

β −α
+
≈α +
α −α
β −α
≈α +
α −α
Or H = -13,6 eV et Li = -5,4eV, le terme ( H - Li) est négatif. On trouve donc que E+< H.

On montrerait de même que E − > Li.

L’interaction entre l'


orbitale 1s de H et l'
orbitale 2s de Li donne naissance à deux orbitales
moléculaires : l'
une d'
énergie plus basse que H et l'
autre d'
énergie plus haute que le niveau Li

de départ.
énergie de déstabilisation |∆ E − | = | E − -
L' Li| est, en valeur absolue, supérieure à l'
énergie de
stabilisation |∆E+| = |E+ - H| comme dans le cas de l'
interaction de deux orbitales de même
énergie.

43
D' expression donnée ci-dessus, on remarque que E+ est proportionnelle au carré de
après l'
et donc au carré du recouvrement S (d’après l’approximation de Mulliken), et inversement
énergie ∆ε entre les deux niveaux de départ
proportionnelle à la différence d' H et Li.

+
∆ ∝
∆ε
Cela permet de justifier a posteriori l'
approximation qui consiste à négliger la participation
des OA de cœur (1s du lithium) dans la construction des OM. Ces orbitales, très profondes en
énergie interagissent peu avec les orbitales de valence car est grand. Elles sont, de plus,
fortement contractées dans la région nucléaire et ont, par conséquent, un faible recouvrement
avec les OA des atomes voisins (faible S). Ces deux facteurs contribuent au fait que l'
on peut
négliger les interactions entre les OA de cœur d'
un atome et les OA de valence d'
un atome
voisin. Cela justifie également que l'
on néglige les OA 2p du lithium trop hautes en énergie
pour interagir significativement avec l'
OA 1s de l'
atome H.

'

Comme nous l'


avons vu dans le cas des molécules diatomiques homonucléaires, l'
interaction
entre ces deux orbitales atomiques donne naissance à 2 orbitales moléculaires : l’une liante
notée et l’autre antiliante notée *. La résolution des équations séculaires permet de
déterminer les coefficients des orbitales atomiques et donc la forme des OM et *. Ce calcul
est long et fastidieux, nous en retiendrons ici les principaux résultats.
L'
orbitale liante énergie E+, proche en énergie de la 1s de H. Nous
ainsi formée est d'
admettrons que cette orbitale est également proche en structure de l'
OA 1s de l'
atome
d'
hydrogène. En fait, l'
orbitale moléculaire liante ressemble à l'
OA 1s de l'
hydrogène à
laquelle on ajoute une petite contribution de l'
OA 2s du lithium. Cette interaction étant liante,
les deux lobes sont en phase. On obtient ainsi de manière qualitative l'
allure de l'
OM liante de

la molécule de Li-H : .
*
De la même manière, l'
OM antiliante est proche en énergie et en structure de l'
OA 2s du Li.
*
L'
OM antiliante ressemble donc à l'
OA 2s du Li à laquelle on ajoute une petite contribution
de l'
OA 1s de l'
atome d'
hydrogène. Cette interaction étant antiliante, les deux lobes sont en
opposition de phase. On obtient ainsi de manière qualitative l'
allure de l'
OM antiliante de la

molécule de Li-H : .

44
# $ %&

H
Li

'

H
Li

'(

45
") * !

On obtient donc rapidement l’allure du diagramme d'


OM :
Li-H

σ∗
∆E-
αLi

αH
+
∆E
σ

Le remplissage de ce diagramme montre que les électrons se retrouvent dans une orbitale
proche en énergie de l'
hydrogène et essentiellement développée sur l'
orbitale 1s de H. Lors de
la constitution de la liaison, un électron situé initialement au voisinage du Li (électron 2s) va
occuper une orbitale moléculaire essentiellement développée sur H. La liaison est donc
fortement polarisée (Li(δ+)-H(δ-)).

# , 3 $ %4

L'
atome F (Z = 9) comporte 4 orbitales de valence : 1 OA 2s située à -40,4 eV, et les 3 OA 2p
dégénérées : 2px, 2py et 2pz situées à -18,6 eV.

F H
y

z z z z

y y y y

x + x + x + ,
x + -

46
Toutefois, toutes ces orbitales ne peuvent interagir avec la 1s de l'
atome H. En effet, comme
nous l’avons précédemment montré, pour que deux orbitales interagissent, il faut que le
recouvrement de ces deux orbitales soit non-nul.

"

Le recouvrement S dépend de la forme et de l'


orientation des orbitales dans la molécule.
Considérons, dans la molécule HF, le recouvrement entre l'
OA 2pz de F et l'
OA 1s de H.
y
0

x Sblanc

Snoir < >= + =

L'
OA 1s est symétrique par rapport au plan x0y alors que l'
OA 2pz est antisymétrique par
rapport à ce même plan. La partie négative du recouvrement, notée Sblanc, est contrebalancée
par une contribution positive, notée Snoir, de même valeur absolue en raison de la symétrie du
système par rapport au plan x0y. L’intégrale de recouvrement entre une orbitale atomique 2pz
d’un atome et une orbitale atomique 1s d’un deuxième atome est nul. Ce résultat est général :
Le recouvrement S est non nul si les deux OA sont de même symétrie par rapport à tout
élément de symétrie de la molécule (plan contenant les atomes H et F ou l’axe de liaison
H-F). S = 0 si les deux OA sont de symétries différentes (l'une symétrique, l'autre
antisymétrique par rapport à un élément de symétrie de la molécule).
En phase S ≥0


En opposition de phase S ≤0

47
Avec le choix d’axes effectué précédemment, le recouvrement entre l’orbitale 1s de H et
l’orbitale 2px ou 2pz de F est nul5 ; seules les OA 2s et 2py ont un recouvrement non nul avec
l'
OA 1s.
z z
2pzF
1sH 2pyF 1sH 2pxF 1sH

y y

S>0 S=0

De plus, l'
OA 2s de F (d'
énergie -40,4 eV) étant beaucoup plus basse en énergie que l'
orbitale
1s de H (-13,6 eV), on pourra négliger cette interaction ( grand).

Le diagramme orbitalaire est ainsi réduit à l’interaction de 2 orbitales d’énergies différentes.


Les OA 2s, 2px et 2pz de F ne sont pas perturbées, seule la 2py peut interagir avec la 1s de H
pour conduire à la formation d'
une OM liante et d'
une OM antiliante.

Les orbitales ainsi obtenues par interaction entre l'


OA 1s de H et l'
OA 2py de F sont
invariantes par rotation autour de l’axe de la molécule, elle seront respectivement notées σ et
σ*.
Plus généralement, une orbitale moléculaire provient du recouvrement en phase de deux OA
de type s, ou deux OA de type p toutes deux portées par l'
axe de la liaison mais aussi du
recouvrement d’une OA s avec une OA p orientée dans l’axe de la liaison. Le recouvrement
est dit axial et conduit à une orbitale moléculaire symétrique par rapport à tout plan
contenant l’axe de liaison.

s-s s-p p-p

5
L’intégrale de recouvrement sur le demi-espace z>0 est exactement opposée à celle sur le demi-espace z<0. Le
plan z=0 étant plan d’antisymétrie pour l’orbitale 2pz.

48
Un recouvrement axial en opposition de phase conduit à une orbitale moléculaire antiliante
notée *.

s-s s-p p-p

( $ ) '

H F
E

σ∗

1sH
2pF

2sF

Le remplissage des OM indique que 3 paires d’électrons sont situées dans des OM
uniquement développées sur le fluor. Les électrons engagés dans la liaison sont portés par une
OM σ dissymétrique fortement développée (gros coefficient) sur F. La liaison est donc
fortement polarisée.

49
# $ &.

H
F

'

H
F

'(

50
6 ' $
Pour construire le diagramme orbitalaire de O2, on se limitera aux seules interactions des OA
de valence 2s (E2s = -32,4 eV) et 2p (E2p = -15,9 eV).

O O
y
x

avons vu précédemment, les deux orbitales 2s peuvent interagir pour former


Comme nous l'
*
deux orbitales moléculaires notées s et s . De même, l'
interaction des deux orbitales 2py
*6
conduit à la formation deux nouvelles OM notées y et y .

Les recouvrements entre les OA 2px/2py, 2px/2pz, 2py/2pz, 2pz/2s et 2px/2s, sont nuls car ces
OA sont orthogonales entre elles (OA de symétries différentes par rapport à un plan contenant
l'
axe de la liaison O-O).
Toutefois, le recouvrement est non nul entre deux OA de même symétrie par rapport à tout
plan contenant l’axe de la liaison. Ainsi, deux orbitales 2pz ont un recouvrement latéral non
nul, elles peuvent interagir ensemble pour former une orbitale moléculaire de type z.

pz-pz px-px

Un recouvrement latéral en opposition de phase conduit à une orbitale moléculaire


antiliante notée z *.

pz-pz px-px

6
En toute rigueur, il faudrait considérer les interactions 2py/2s. Toutefois, par souci de simplification, nous
négligerons ici les interactions s-p et ne considérerons que les interactions s-s et p-p. Cette approximation peut se
justifier en remarquant qu' une interaction entre orbitales de même énergie ( = 0) est plus forte qu'une
interaction entre orbitales d'énergies différentes ( ε = 16,5 eV).

51
*
De même, la combinaison des 2 OA 2px va donner 2 OM notées x et x . Les deux OM x et
* *
z (resp. x et z ) provenant de l'
interaction d'
OA dégénérées ayant des recouvrements
identiques sont elles-mêmes dégénérées.
Nous avons vu que la stabilisation ( ∆E + ) d'
une orbitale moléculaire est d'
autant plus
importante, que le recouvrement entre les deux orbitales atomiques est grand. Or un
recouvrement axial (liaison de type ) est plus fort qu'
un recouvrement latéral (liaison de type
).
*
La stabilisation des OM (resp. la déstabilisation des OM ) est par conséquent plus faible
*
que la stabilisation des OM (resp. la déstabilisation des OM ).

Munis de l'
ensemble de ces considérations, on peut donc tracer le diagramme orbitalaire de
O2.

( $ ) '

z
σy*

y
x O O πx* πz*

2p 2p
πx πz

σy

σs*

2s 2s

σs

L'
oxygène (Z = 8) possède 6 électrons de valence. Le remplissage des OM avec douze
2 *2 2 2 2 *1 *1
électrons conduit à la configuration suivante : s , s , y , x , z , x et z . En effet, en
accord avec la règle de Hund, cette configuration sera plus stable que celle dans laquelle les

52
*
deux derniers électrons s'
apparient sur une des deux . On constate que la molécule de
dioxygène possède deux électrons célibataires. C'
est une molécule paramagnétique, ce que
l'
on vérifie expérimentalement. Cette propriété ne peut être déduite de la seule représentation
de Lewis de la molécule.

Même si l'
étude de la configuration électronique de quelques molécules diatomiques est
"relativement simple", on comprend facilement que le problème va rapidement se compliquer
dès que la molécule contient plus de deux atomes. On va donc chercher à simplifier le
problème en se contentant notamment de regarder les OM dont les électrons sont responsables
de la réactivité de la molécule puisque, rappelons-le, le but de ces calculs est de parvenir
rapidement à des conclusions quant à la réactivité de la molécule.

53
# $ +

' '(

/- /-(

54
Lorsque des électrons occupent une OM liante, ils contribuent à former une liaison entre les
deux atomes. Au contraire, quand ils occupent une OM antiliante, ils contribuent à la rupture
de la liaison.
On définit l'
indice de liaison comme la différence entre le nombre d'
électrons liants (électrons
occupant une orbitale liante, nl) et le nombre d'
électrons antiliants (na) divisée par 2 (il faut
deux électrons pour une liaison).

!=

Pour la molécule de dioxygène, on trouve un indice de liaison égal à 2. Ce résultat est


conforme à la représentation de Lewis de la molécule de dioxygène faisant apparaître deux
liaisons entre les deux atomes d'
oxygène.
ion moléculaire O2-, l'
On peut également noter que dans l' indice de liaison est égal à 1,5
(puisqu'
un électron est ajouté dans une OM antiliante), ce que reflète bien l'
allongement de la
ion moléculaire O2+, l'
liaison observé dans cet anion. Au contraire, dans l' indice de liaison
vaut 2,5, ce qui est en accord avec une liaison O-O plus courte.

55

Vous aimerez peut-être aussi