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Traumatismes thoraciques fermés夽


S. Mirek, M. Freysz

Les traumatismes thoraciques fermés sont fréquents et souvent graves, en particulier en cas d’association
lésionnelle (crâne, abdomen). Ils peuvent conduire à une détresse respiratoire aiguë. La recherche et le
traitement d’un pneumothorax (qui peut être suffocant) sont deux des objectifs prioritaires. L’analgésie
précoce est également essentielle. L’intubation trachéale et la ventilation assistée ont des indications
précises. L’éventualité de lésions médiastinales (isthme de l’aorte) doit être systématiquement évoquée
dans le bilan lésionnel initial lorsque le traumatisme a une cinétique élevée. La prise en charge en urgence
est orientée par le mécanisme du traumatisme et par un examen clinique minutieux. L’imagerie médi-
cale (en particulier échographie et scanner) doit être d’utilisation large chez le traumatisé pour ne pas
méconnaître une lésion curable. Un avis spécialisé est demandé pour tous patients présentant un terrain
à risque. Une surveillance hospitalière de 24 heures est nécessaire pour ces patients.
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Mots-clés : Traumatisme thoracique fermé ; Bilan initial d’un traumatisme thoracique fermé ; Pneumothorax ;
Hémothorax ; Syndrome de Perthes ; Emphysème sous-cutané ; Lésion médiastinale ; Fracture de côte

Plan ■ Critères d’orientation 13


■ Conclusion 13
■ Introduction 1
■ Mécanismes du traumatisme thoracique fermé 2
■ Critères de gravité 2
■ Bilan lésionnel 2  Introduction
Abord clinique du traumatisé thoracique 2
Stratégie diagnostique 2 Le traumatisme thoracique reste un problème important en

urgence aussi bien lorsqu’il est d’emblée jugé sévère que lorsqu’il
Lésions pariétales 4
semble a priori bénin. Les données physiopathologiques condi-
Emphysème sous-cutané 4
tionnent la prise en charge du traumatisé thoracique. Les
Syndrome de Perthes 4
recommandations très récentes pour la prise en charge en urgence
Lésions osseuses pariétales 4
et dans les 48 premières heures serviront largement pour nous
■ Lésions pleuropulmonaires 5 guider. Le traumatisme thoracique peut survenir dans le cadre
Pneumothorax 5 d’un traumatisme grave, associé à d’autres lésions ou être isolé
Hémothorax 6 (agression, rixe, etc.). Il est important de rechercher les signes de
■ Lésions pulmonaires 6 gravité et d’organiser dès la régulation médicale, l’orientation du
Hématome intrapulmonaire 6 patient. Les mécanismes, le bilan lésionnel et le traitement sont
Pneumatocèle post-traumatique et lacération/rupture pulmonaire 6 successivement envisagés.
Contusion pulmonaire 6 Le traumatisme thoracique fermé est fréquent et souvent grave,
Atélectasie 7 en particulier en cas d’association lésionnelle (crâne, abdomen) et
■ Lésions médiastinales 7 reste grevé d’une mortalité élevée. Il peut conduire à une détresse
Hémomédiastin 7 respiratoire aiguë. La recherche et le traitement d’un pneumotho-
Lésions cardiopéricardiques 7 rax (qui peut être suffocant) sont deux des objectifs prioritaires.
Pneumomédiastin 8 L’analgésie précoce est également essentielle. L’intubation tra-
Lésion du canal thoracique 8 chéale et la ventilation assistée ont des indications précises.
L’éventualité de lésions médiastinales (isthme de l’aorte) doit être
■ Prise en charge dans les 48 premières heures 8 systématiquement évoquée dans le bilan lésionnel initial lorsque
Évaluation préhospitalière 8 le traumatisme a une cinétique élevée.
Évaluation à la salle d’accueil des urgences vitales (SAUV) 9 La prise en charge en urgence est orientée par le mécanisme
Stratégie thérapeutique 9 du traumatisme, par un examen clinique minutieux et habituel-
Ventilation 11 lement par l’analyse complète de la radiographie pulmonaire.
Décompression pleurale 11 L’imagerie médicale (en particulier échocardiographie et scan-
Épanchements péricardiques 12 ner) doit être d’utilisation large chez le traumatisé pour ne pas
Traitements associés 13 méconnaître une lésion curable. Il est important de mettre en
Traitements chirurgicaux 13 place localement une stratégie de prise en charge. Cette prise en

EMC - Urgences 1
Volume 13 > n◦ 1 > janvier 2018
http://dx.doi.org/10.1016/S1241-8234(17)88042-1
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Tableau 1.
Score MGAP (mécanisme, Glasgow, âge, pression artérielle).
Variables Cotation
“ Conduite à tenir
Score de Glasgow Point du score de Glasgow
Principaux éléments sémiologiques à rechercher à
PAS > 120 mmHg +5
l’examen clinique (diagnostic à évoquer)
60 à 120 mmHg +3
Inspection :
< 60 mmHg 0 • fréquence et amplitude respiratoire ;
Traumatisme fermé +4 • cyanose ;
Âge < 60 ans +5 • asymétrie des deux hémithorax ;
• volet costal, respiration paradoxale ;
PAS : pression artérielle systolique.
• lésions cutanées : traumatisme direct ? Ceinture de sécu-
charge est multidisciplinaire avec l’intervention des urgentistes, rité ? (= décélération) ;
des anesthésistes-réanimateurs, des radiologues et des chirurgiens. • balancement thoracoabdominal d’une lésion médullaire
haute ;
• turgescence jugulaire (lésion médiastinale ou pleu-
 Mécanismes du traumatisme rale ?) ;
• position médiane de la trachée cervicale (lésion médias-
thoracique fermé tinale ou pleurale ?) ;
Les mécanismes les plus fréquemment en cause, du moins en • tirage (obstruction voies aériennes supérieures ? Encom-
Europe, relèvent d’un choc direct ou d’une décélération. brement ?) ;
• hémoptysie (contusion pulmonaire ?).
Palpation :
 Critères de gravité • emphysème sous-cutané diffus (pneumothorax) ;
• emphysème sous-cutané cervical (pneumomédiastin ?
La gravité du traumatisme thoracique peut être estimée par plu- Rupture trachéobronchique ?) ;
sieurs critères à rechercher systématiquement chez chaque patient • douleur exquise à la pression des côtes, mobilité anor-
traumatisé thoracique. male (fracture de côtes).
Les antécédents du patient, en particulier pulmonaires (bron-
Auscultation :
chopneumopathie chronique obstructive [BPCO], insuffisance
• diminution des vibrations vocales (pneumothorax) ;
respiratoire chronique obstructive) et cardiovasculaires (coronaro-
pathie, insuffisance cardiaque) mais aussi son âge (plus de 65 ans) • bruits du cœur : souffle (lésion valvulaire traumatique ?),
vont majorer le risque de décès par deux ou trois [1] . La prise d’un frottement (épanchement péricardique), assourdissement
médicament anticoagulant et/ou antiagrégant ainsi qu’un trouble (épanchement) ;
de la coagulation congénital peuvent majorer le saignement. • déplacement de l’apex cardiaque (déchirure péricar-
Les circonstances de survenue de l’accident sont importantes à dique ?).
recueillir notamment en cas de haute cinétique. En cas de trau-
matisme thoracique pénétrant, la mortalité va être augmentée par
2,6 [2] .
Les critères de gravité clinique doivent être systématiquement
recherchés : plus de deux fractures de côtes, un âge supérieur à L’analyse de ces différents éléments sémiologiques est com-
65 ans, une détresse respiratoire avec fréquence respiratoire (FR) plétée par celle des paramètres hémodynamiques habituels. La
supérieure à 25/min, hypoxémie avec saturation « pulsée » en prise comparative des pouls et de la tension artérielle aux quatre
oxygène (SpO2 ) inférieure à 90 % en air ambiant ou inférieure à membres doit être systématique. L’existence d’un gradient ten-
95 % sous oxygénothérapie, une détresse circulatoire [3] définie sionnel supérieur ou égal à 20 mmHg entre les membres supérieurs
par une chute de pression artérielle systolique (PAS) supérieure à et inférieurs ou tout autre signe évoquant un pseudosyndrome
30 % ou une PAS inférieure à 110 mmHg [4] . de coarctation de l’aorte doit faire envisager une lésion trau-
La présence de ces critères de gravité ou de ces signes de matique de l’aorte. La diminution et la disparition du pouls à
détresse vitale nécessite une prise en charge spécialisée avec trans- l’inspiration (pouls paradoxal) évoquent un épanchement intra-
port médicalisé dans un centre de référence [5, 6] . On privilégie thoracique compressif (pleural ou péricardique). L’existence d’une
l’admission directe de ces patients dans un centre de référence : bradycardie doit systématiquement faire rechercher une lésion
cette attitude réduit la mortalité de 25 % en cas de transfert direct médullaire, une hypertension intracrânienne, la prise antécédente
par rapport aux transferts secondaires [7] . de bêtabloquants ou d’amiodarone, une contusion myocardique
Un avis spécialisé (type télémédecine) doit être pris auprès du ou faire craindre la survenue d’un état de choc gravissime. Enfin, la
centre de référence en cas de terrain à risque. Une surveillance de vitesse de recoloration du lit capillaire sous-unguéal est appréciée.
24 heures est obligatoire pour tous ces patients. La surveillance de l’oxygénation par oxymètre de pouls permet
Le score de MGAP (mécanisme, Glasgow, âge, pression arté- le diagnostic précoce d’une hypoxémie avant que d’autres signes
rielle) peut être utilisé pour trier les patients ne présentant pas cliniques ne soient présents [9] et un traitement plus rapide d’un
de critères de gravité initialement [8] . Il permet de prédire la mor- pneumothorax [10] .
talité intrahospitalière et est intéressant car permet d’échelonner Le reste du bilan clinique comporte également l’évaluation du
le risque de mortalité en haut, intermédiaire et faible dès la phase degré de conscience, l’examen systématique des autres régions
préhospitalière (Tableau 1). anatomiques.

 Bilan lésionnel Stratégie diagnostique


Abord clinique du traumatisé thoracique Chez un patient en instabilité hémodynamique
Le traumatisé thoracique présente habituellement une altéra-
et/ou respiratoire
tion évidente de la fonction respiratoire traduite par une dyspnée En préhospitalier, une échographie pleuropulmonaire doit être
d’intensité variable. Les principaux signes cliniques sont à recher- réalisée si le matériel est disponible et si l’équipe est formée à cette
cher. technique, de manière à éviter tout retard de prise en charge.

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“ Conduite à tenir
Critères de qualité, technique de lecture, spécifi-
cité du cliché thoracique au lit selon Freysz
Critères techniques de qualité
Vérifier les conditions techniques de prise de cliché. Il doit :
• être strictement de face (les extrémités internes des
clavicules symétriques par rapport aux apophyses épi-
neuses) ;
Figure 1. Glissement pleural à l’échographie. • être pris en inspiration (l’extrémité antérieure du 6e arc
costal droit doit se projeter au niveau de la coupole dia-
phragmatique) ;
Il faut réaliser une échographie pleuropulmonaire associée à • être ni surexposé, ni sous-exposé ;
l’échographie focused assessment with sonography for traumas (FAST) • permettre la visibilité des deux culs-de-sac pleuraux cos-
dans un contexte d’instabilité (Fig. 1). todiaphragmatiques et des deux apex pulmonaires.
Celle-ci apporte une aide au diagnostic des épanchements intra- Lecture du cliché
thoraciques liquidiens ou gazeux, avec une supériorité par rapport • Le squelette (rachis, côtes, clavicules, omoplates et
à la radiographie pulmonaire [11] . Pour le diagnostic d’un pneumo-
thorax, il est retrouvé une sensibilité de 78 % et une spécificité de
humérus).
• Les parties molles extrathoraciques (creux sus-
98 % en faveur de l’échographie pleuropulmonaire [12] . Le bilan
est complété par une radiographie du thorax et une radiographie claviculaire, creux axillaire, paroi thoracique latérale,
de bassin [13] . ombres mammaires, étage sous-diaphragmatique).
• Les contours de la plèvre et sa réflexion sur le gril costal,
le diaphragme et le médiastin.
Chez un patient stable ou stabilisé • Les structures du médiastin sur les clichés en haute ten-
Le scanner thoracique avec injection de produit de contraste sion (trachée, vaisseaux, lignes médiastinales).
est l’examen de référence pour faire le bilan des lésions thora- • Les champs pulmonaires proprement dits.
ciques après un traumatisme [14] . Cet examen s’intègre dans le Spécificité du cliché thoracique couché au lit
scanner corps entier réalisé en cas de traumatisme grave [15, 16] . • Apex sus-claviculaires de petite taille et le plus souvent
Il doit être réalisé de manière systématique devant un ou opaques.
des critères de gravité. Un scanner thoracique est effectué • Élargissement du cœur et du médiastin supérieur.
en cas de lésion thoracique suspectée à l’examen clinique et • Débord gauche de l’aorte thoracique descendante.
confirmée par l’échographie pleuropulmonaire ou la radiogra-
• Visibilité des omoplates.
phie thoracique. La technique est une acquisition hélicoïdale
• Surélévation des deux coupoles (avec réduction des
avec injection de produit de contraste, à un temps artériel
précoce. champs pulmonaires).
L’échographie pleuropulmonaire peut être réalisée (seule) sans • Redistribution vasculaire vers les sommets.
radiographie de thorax en cas de lésion pariétale bénigne isolée
sans critère de gravité retrouvé à l’examen clinique initial [17, 18] .
L’échographie permet le diagnostic d’hémothorax et/ou de pneu-
mothorax non visualisé sur la radiographie thoracique [19, 20] . Elle • des lésions pleurales : hémothorax ou pneumothorax. Les pneu-
permet aussi de faire le diagnostic de fractures de côtes et du ster- mothorax partiels antérieurs ne sont souvent découverts que
num. La réalisation de celle-ci ne doit pas retarder la prise en par cet examen. Enfin, la position des drains préalablement mis
charge du patient traumatisé. en place est contrôlée ;
Le cliché radiologique standard permet d’obtenir une infor- • des lésions pulmonaires et trachéobronchiques, une contusion
mation diagnostique suffisante dans la plupart des problèmes pulmonaire qui est souvent sous-estimée par le cliché tho-
traumatiques thoraciques d’urgence extrême. Son utilisation dans racique conventionnel, des pneumatocèles traumatiques, une
cette circonstance permet de guider efficacement la thérapeutique atélectasie ;
(drainage ou thoracotomie) [13] . Il représente, avec la clinique, • une lésion diaphragmatique : le scanner avec reconstruction
l’élément de base pour nombre de traumatisés thoraciques. La sagittale et coronale peut montrer une hernie digestive ou grais-
réalisation du cliché dépend des caractéristiques techniques de seuse via l’hiatus diaphragmatique traumatique. Le diagnostic
l’appareillage utilisé (salle de radiologie ou matériel léger au lit reste néanmoins difficile.
du patient). Le cliché thoracique pris au lit doit répondre à des Le scanner impose le transfert médicalisé jusqu’au service de
critères techniques de qualité [21] . Son interprétation nécessite la radiologie. La qualité de la surveillance médicale pendant celui-ci
connaissance de ses spécificités. doit être équivalente à celle du milieu de réanimation pour les
Un cliché n’a de valeur que lors de sa réalisation. patients graves. On veille tout particulièrement aux drainages et
Une échographie transthoracique (ETT), voire au mieux tran- à la ventilation.
sœsophagienne (ETO) doit être réalisée en cas de suspicion de La fibroscopie bronchique est indiquée en cas de suspicion de
contusion myocardique afin d’évaluer respectivement la cinétique rupture trachéobronchique. Elle permet de localiser la lésion ini-
segmentaire, le péricarde et les fonctions systolique et diasto- tiale. Toutefois, la réalisation de cet examen nécessite une bonne
lique des ventricules. Cet examen peut s’avérer difficile dans ce maîtrise de la technique pour explorer la totalité de la trachée et
contexte, il doit être répété et intégré avec l’ensemble des examens ses zones vulnérables, et elle peut méconnaître le diagnostic dans
cliniques et paracliniques. un nombre de cas non négligeable.
Le scanner thoracique peut mettre en évidence [22] : L’électrocardiogramme (ECG) est à réaliser de façon systéma-
• un hémomédiastin (antérieur, moyen ou postérieur). La rupture tique et représente le meilleur examen de débrouillage pour le
de l’isthme aortique représente la lésion qu’il faut rechercher diagnostic de contusion myocardique. Toutefois, s’ils ne sont pas
devant tout hémomédiastin moyen. La sensibilité et la valeur absents, les signes électriques sont extrêmement variables, des
prédictive négative du scanner seraient très bonnes ainsi que sa troubles de conduction intracardiaques, des troubles du rythme
spécificité [22] . Le scanner spiralé après injection de produit de supraventriculaire ou non, ainsi que des troubles de repolarisation
contraste est actuellement l’examen de référence ; pouvant exister.

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2
3
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Figure 2. Origines de l’emphysème sous-cutané. 1. Effraction parié- Figure 3. Syndrome de Perthes.


tale ; 2. effraction pleuropulmonaire ; 3. rupture alvéolaire ; 4. effraction
bronchique ; 5. rupture œsophagienne.

Le bilan sanguin n’a pas de spécificité en dehors de la ciné-


tique de troponine sérique, complémentaire avec l’ECG pour le
diagnostic de lésions cardiaques [23] .

 Lésions pariétales
Emphysème sous-cutané
L’emphysème sous-cutané, défini comme de l’air dans les tis-
sus sous-cutanés, peut être localisé ou diffus. Les origines de
l’emphysème sous-cutané sont résumées sur la Figure 2. Lorsque
la cause de la fuite d’air disparaît, l’emphysème sous-cutané se
résorbe en une dizaine de jours.
Son diagnostic est avant tout clinique avec la classique sensa-
tion de crépitation neigeuse lors de la palpation. La radiographie
simple de thorax reconnaît facilement l’emphysème sous-cutané, 1 2 3
lorsqu’il est abondant, sous la forme de bandes claires le long des Figure 4. Mouvements du volet thoracique correspondant à la respira-
parois latérales du thorax. tion paradoxale (selon Dahan). 1. Inspiration ; 2. expiration ; 3. toux.

Syndrome de Perthes d’un pneumothorax ou d’un hémothorax. Une hémoptysie


Le syndrome de Perthes, ou masque ecchymotique, ou syn- témoigne d’un embrochage pulmonaire.
drome de Morestin, voire autre synonyme le traumatic asphyxia
des Anglo-Saxons, est rarement décrit dans la littérature et égale- Volet thoracique (Fig. 4)
ment peu rattaché à sa cause, une compression intense et de courte Actuellement, on ne doit parler de volet thoracique que
durée du thorax à glotte fermée. Celle-ci entraîne une augmen- lorsque la mécanique ventilatoire est perturbée par une respira-
tation importante de la pression intrathoracique avec syndrome tion paradoxale : mouvement inversé d’une partie désolidarisée
cave supérieur, œdème en « pèlerine », pétéchies oculo-cervico- de l’ensemble par les fractures. Deux grandes variétés anato-
faciales avec masque ecchymotique ; elle est parfois associée à miques sont classiquement décrites : le volet latéral et le volet
une hypertension intracrânienne qui peut être responsable d’un antérieur sternocostal, ce dernier étant limité de chaque côté
coma (Fig. 3). du sternum par une ligne de fractures associées ou non à une
fracture du sternum. La survenue d’une insuffisance respiratoire
Lésions osseuses pariétales peut être expliquée par une hypoventilation alvéolaire globale en
cas de délabrement pariétal très important et collapsus pulmo-
Les fractures de côtes et les volets thoraciques sont les lésions naire sous-jacent, ou surtout par un encombrement bronchique
les plus fréquemment retrouvées. Leur conséquence constante est secondaire à la douleur, ou par l’existence d’une contusion du
la douleur entraînant une polypnée qui ampute les capacités tus- parenchyme pulmonaire sous-jacente à la lésion pariétale. Les
sigènes et le soupir du traumatisé et conduit à l’encombrement troubles de l’hématose, engendrés par la contusion pulmonaire,
bronchopulmonaire. ne sont pas aggravés par la présence d’un volet.

Fractures de côtes et du sternum Ruptures diaphragmatiques


Le diagnostic de fracture de côtes et du sternum est avant tout Une hernie diaphragmatique est l’issue d’un organe de la cavité
clinique : recherche systématique d’un emphysème sous-cutané, abdominale vers la cavité thoracique par un orifice accidentel

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Figure 5. Pneumothorax bilatéral avec emphysème sous-cutané.

situé sur la coupole diaphragmatique. L’incidence des ruptures 4


diaphragmatiques chez le patient traumatisé grave est comprise
entre 3 et 4 % [24, 25] . Leur diagnostic est difficile lors du bilan
initial effectué en urgence. Elle est souvent associée à des frac-
tures costales basses. Plus rarement, elle est secondaire à une
compression abdominale, et dans ce cas, il convient de véri-
fier l’absence de rupture de vessie associée (et d’une fracture du Figure 6. Origines du pneumothorax. 1. Lacération pulmonaire ; 2.
bassin). rupture de bleb ou de bulle sous-pleurale ; 3. fracture costale ; 4. plaie
La mortalité est élevée (20 à 30 %), liée aux lésions associées. pénétrante thoracique ; 5. effraction bronchique.
Les complications propres sont l’ischémie gastrique et la parésie
phrénique habituellement régressive.

 Lésions pleuropulmonaires
Pneumothorax
Il se définit comme de l’air entre les deux feuillets de la plèvre
entraînant un collapsus pulmonaire et une baisse du débit sanguin
du poumon collabé. C’est une lésion fréquente, sa gravité tient 4
surtout à son retentissement respiratoire, plus rarement circula-
toire. Il peut être cliniquement muet, car de faible importance, 1 3
parfois soupçonné en présence d’un emphysème sous-cutané,
sinon c’est une dyspnée de gravité variable qui attire l’attention
(Fig. 5). Il accompagne habituellement des fractures de côtes. Plus 2
rarement, il s’agit d’une plaie thoracique, d’une rupture bron-
chique, d’un barotraumatisme ou d’un geste iatrogène (Fig. 6). Il
se constitue habituellement au cours des premières heures du trau- Figure 7. Signes radiologiques de pneumothorax compressif. 1. Pneu-
matisme mais il peut apparaître plus tardivement au cours d’une mothorax compressif ; 2. horizontalisation de l’hémidiaphragme ; 3.
séance de kinésithérapie ou de la ventilation assistée. Sa gravité déplacement médiastinal ; 4. poumon collabé.
dépend surtout du niveau de la pression intrapleurale par rapport
à la pression atmosphérique. Un pneumothorax unilatéral par-
tiel ou complet peut rester assez bien toléré tant que la pression
intrapleurale est inférieure ou égale à la pression atmosphérique.
En revanche, la bilatéralisation et surtout l’élévation de la pres-
sion intrapleurale sont très mal supportées. L’air sous pression
comprime le médiastin gênant le retour veineux avec effet de tam-
ponnade gazeuse (Fig. 7). Ces pneumothorax dits « suffocants »
correspondent généralement à l’existence d’une lésion formant
clapet et qui siège sur la paroi thoracique ou sur une voie aérienne
mettant en communication l’air atmosphérique et la cavité pleu- A B
rale. Cette élévation progressive de la pression intrapleurale peut
être extrêmement rapide lorsque le patient est en ventilation
assistée, aboutissant en quelques minutes à un arrêt circulatoire.
L’élévation brutale des pressions d’insufflation, la turgescence de
la circulation veineuse cave supérieure, la cyanose intense en sont
les signes d’appel habituels. Il a été décrit des embolies gazeuses
qui sont à l’origine de décès brutaux. L’administration de pro-
toxyde d’azote majore le volume et la pression de l’épanchement C
aérien pleural (Fig. 8).
Les signes de gravité du pneumothorax sont importants à noter Figure 8. Diagnostic échographique de pneumothorax.
tout en retenant bien le caractère évolutif de cette lésion. Ils sont A. Aspect normal (signe du « bord de mer »).
résumés sur la Figure 7. B. Pneumothorax complet (signe du « code-barre »).
Le scanner est donc particulièrement intéressant avant C. Pneumothorax partiel. Point poumon.
l’instauration d’une ventilation contrôlée. De plus, le scanner

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Scanner
Il est plus sensible dans la détection des épanchements pleuraux
que la radiographie standard. Il permet une meilleure quantifica-
tion de l’épanchement et précise la topographie des collections
1 enkystées. De même que pour le pneumothorax, il permet de
vérifier la position d’un éventuel drain.

2
3
 Lésions pulmonaires
Le scanner a une bien meilleure sensibilité et spécificité que la
radiographie pulmonaire. Il est de bonne clinique de refaire une
imagerie en cas d’aggravation (évolution des lésions).
Plusieurs lésions élémentaires sont décrites, souvent asso-
ciées ou intriquées [16] : lacérations ou ruptures pulmonaires,
4 hématome intrapulmonaire, pseudokyste pulmonaire ou pneu-
5 matocèle, contusion pulmonaire, lésions de blast.

Hématome intrapulmonaire
Figure 9. Origines de l’hémothorax. 1. Plèvre et paroi thoracique ; 2. C’est une lésion mineure de rupture pulmonaire centrale,
poumon ; 3. médiastin ; 4. diaphragme ; 5. foie (ou rate). se traduisant par un comblement alvéolaire localisé évo-
luant en quelques jours vers l’opacité ronde. Ces hématomes
régressent habituellement spontanément en quelques semaines
mais peuvent poser des problèmes diagnostiques si le traumatisme
est passé inaperçu.

Pneumatocèle post-traumatique
et lacération/rupture pulmonaire
La pneumatocèle s’observe même à la suite d’un traumatisme
mineur, plus souvent chez l’enfant ou l’adulte jeune. Radiologi-
quement, elle correspond à une clarté arrondie ou ovalaire avec
parfois niveau hydroaérique.

Figure 10. Épanchement pleural. Contusion pulmonaire (Fig. 11, 12)


Il s’agit de la lésion la plus fréquente, retrouvée chez environ
peut permettre d’expliquer la persistance d’un pneumotho- 50 % des traumatisés thoraciques [26, 27] . Elle est la conséquence
rax malgré un drainage pleural, en visualisant le drain mal de l’atteinte post-traumatique du parenchyme pulmonaire liée
positionné. à une onde de choc. La physiopathologie de la contusion pul-
Devant un pneumothorax, il convient de discuter un éventuel monaire [28] est composée par une phase inflammatoire [28–31] ,
drainage thoracique avant mise sous respirateur. une augmentation de la perméabilité de la membrane alvéo-
locapillaire avec un œdème lésionnel [32–34] , une lacération du
surfactant [35–37] , une altération du rapport ventilation/perfusion,
une augmentation du shunt intrapulmonaire [38] et une diminu-
Hémothorax tion de la compliance pulmonaire. Elle se caractérise du point
Il peut être isolé ou associé au pneumothorax. Il est habituel- de vue anatomique par des ruptures alvéolocapillaires avec infil-
lement mieux toléré que le pneumothorax et son retentissement tration hémorragique interstitielle et alvéolaire s’associant à des
est essentiellement circulatoire. lacérations, des plaies, des ruptures bronchiques ou vasculaires. Il
Environ 30 % de la masse sanguine peuvent rapidement passer en résulte des hématomes, des cavités nécrotiques et surtout des
dans l’espace pleural et entraîner une détresse circulatoire. alvéolites hémorragiques [39–41] . Il faut insister sur le très impor-
En l’absence de pathologie pleurale préexistante connue, tout tant remaniement du lit vasculaire pulmonaire surtout distal, avec
épanchement pleural chez un traumatisé doit être considéré thromboses partielles ou totales [42] . Les lésions touchant à la
comme un hémothorax. Généralement, il correspond à la lésion fois les alvéoles et le lit vasculaire pulmonaire, l’étude du shunt
d’un vaisseau pariétal ou pulmonaire et atteint un volume de 300
à 500 ml (Fig. 9).
Le diagnostic est habituellement facile cliniquement avec une
diminution du murmure respiratoire, une matité à la percussion,
voire des troubles tensionnels associés.

Radiographie standard
Chez le sujet alité, le signe le plus fréquent est la diminution de
transparence unilatérale, homogène, maximale à la base.

Échographie
C’est un examen très utile au dépistage des épanchements de
faible abondance qui sont visibles sous la forme d’une image en
théorie non échogène (Fig. 10). Figure 11. Contusion pulmonaire.

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Figure 13. Dissection trauma-


tique de l’aorte.

Figure 12. Contusions pulmonaires bilatérales.


céphalique. Un mécanisme de décélération ou de compression
antéropostérieure est habituellement retrouvé. S’agissant d’un
intrapulmonaire initial ne donne pas un reflet exact des lésions. traumatisme violent, d’autres lésions intrathoraciques peuvent
En fait, ce sont surtout les zones périlésionnelles qui sont le siège être associées : trachéobronchiques, veineuses pulmonaires et azy-
d’un œdème qui diminue la compliance pulmonaire. Cet œdème gos, œsophagiennes.
va entraîner un shunt qui augmente si les lésions s’aggravent.
L’œdème périlésionnel est particulièrement aggravé par un état Hémomédiastin d’autres origines
de choc concomitant et l’excès de remplissage vasculaire.
Ce n’est qu’après avoir éliminé les causes chirurgicalement
Les principales complications de la contusion pulmonaire sont
curables que la rupture de petites veines ou une lacération des
la surinfection pulmonaire et le syndrome de détresse respiratoire
veines médiastinales doivent être envisagées. Le cliché de profil
aiguë (SDRA). Il est noté un taux de pneumopathies acquises sous
ou le scanner retrouve parfois un hémomédiastin antérieur loca-
ventilation mécanique de 30 à 50 %. Il est important de noter
lisé, responsable d’une opacité rétrosternale qui traduit le plus
l’évolution potentielle de ces contusions pulmonaires dans les 48
souvent une fracture sternale et plus rarement une lésion mam-
premières heures.
maire interne. Il faut souligner la fréquence des hémomédiastins
Le diagnostic repose sur la triade hypoxémie-hémoptysie-
postérieurs associés aux fractures instables du rachis dorsal qui
opacités alvéolaires. Une contusion pulmonaire intéressant plus
peuvent se rompre ultérieurement dans les plèvres et créer ainsi
de 20 % du parenchyme est un facteur de survenue d’un SDRA [43] .
une hypovolémie.

Atélectasie Lésions cardiopéricardiques [44]


L’atélectasie ou collapsus pulmonaire se définit comme un état Les lésions cardiopéricardiques regroupent des lésions myo-
d’affaissement alvéolaire, ce qui l’oppose au comblement alvéo- cardiques à type de pétéchies, d’hémorragie interstitielle ou de
laire des contusions pulmonaires. Les collapsus pulmonaires sont véritables nécroses, des lésions valvulaires, des lésions des artères
très fréquents lors des traumatismes du thorax. La localisation aux coronaires à type de dilacération ou d’obstruction et des lésions
lobes inférieurs est la plus fréquente. péricardiques à type d’épanchements ou de déchirures.
À la radiographie standard, les signes directs sont : l’opacité Les mécanismes responsables de telles lésions sont multiples :
d’un collapsus aérique non aéré et triangulaire à sommet hilaire et impact direct sur le cœur ; décélération brutale ; compression
base périphérique. Elle peut s’accompagner d’un bronchogramme du cœur entre sternum et rachis ; compression abdominale avec
aérique. En cas de collapsus aéré, l’opacité est absente ; il existe hyperpression responsable d’une augmentation de la pression
une désorientation et un tassement des vaisseaux ; les bronches intrathoracique et du retour veineux ; ébranlement du cœur.
aux parois épaissies deviennent visibles. Le refoulement des scis- Bien que de diagnostic délicat, elles sont présentes chez près
sures est le meilleur signe de collapsus. La scissure est concave d’un tiers des traumatisés thoraciques.
vers le lobe sain, ce qui permet de distinguer un collapsus d’un
comblement alvéolaire où la scissure est convexe. Les signes indi- Contusion myocardique
rects sont : déplacement et déformation hilaires, hyperaération Son incidence chez le patient traumatisé grave est d’environ
compensatrice des territoires adjacents, déplacement médiastinal, 15 % [22, 44, 45] . La contusion myocardique est une lésion myo-
ascension de la coupole diaphragmatique, pincement intercostal cardique œdématohémorragique pouvant altérer grandement la
homolatéral. fonction cardiaque. Son diagnostic clinique est très difficile, repré-
senté essentiellement par une douleur thoracique d’interprétation
délicate dans ce contexte. Elle peut entraîner des troubles du
 Lésions médiastinales rythme graves [46] avec arrêt circulatoire, en particulier en cas de
choc violent dans la région précordiale [47, 48] . Au niveau paracli-
Hémomédiastin nique, la réalisation d’un ECG à 18 dérivations s’impose.
L’ECG normal ainsi qu’un taux sanguin normal de troponine à
Rupture de l’aorte et des troncs supra-aortiques l’admission permettent d’écarter un traumatisme cardiaque [49] .
(Fig. 13) Lors d’un traumatisme sévère, un monitorage du rythme car-
diaque, des dosages répétés de la troponine, ainsi qu’un ECG sont
Les ruptures aortiques sont retrouvées dans 15 % des autop-
indispensables. Une échographie cardiaque doit toujours être réa-
sies après accident de la voie publique et représentent la cause
lisée en cas de traumatisme thoracique grave.
majeure de décès par traumatisme thoracique. En effet, près de
80 % des ruptures aortiques entraînent un décès post-traumatique
immédiat. Chez les 20 % restants, la rupture sous-adventitielle
Lésions péricardiques
initiale peut se compléter dans les jours suivants. Seuls 5 % des L’association d’une hypotension, d’une turgescence des veines
cas évoluent, en l’absence de traitement, vers le faux anévrisme jugulaires et d’une pression veineuse centrale élevée est très évoca-
traumatique organisé qui se rompt dans tous les cas. Les ruptures trice d’une tamponnade cardiaque, diagnostic parfois conforté par
artérielles siègent pour près de 90 % sur l’isthme aortique, dans 2 % l’existence d’un pouls paradoxal. Il faut cependant éliminer tout
des cas ailleurs sur l’aorte et dans 5 % sur le tronc artériel brachio- autre syndrome compressif intrathoracique. C’est l’échographie

EMC - Urgences 7
24-103-B-10  Traumatismes thoraciques fermés

qui confirme le plus souvent ce diagnostic. Le drainage doit de


préférence être chirurgical car il peut permettre de réparer une
lésion traumatique cardiaque. La péricardiocentèse à l’aiguille
sous contrôle échographique doit être réservée aux situations
“ Conduite à tenir
urgentes en dehors d’un contexte chirurgical. Les rares rup-
Traumatisme fermé du thorax et détresse respira-
tures péricardiques peuvent s’accompagner d’une luxation du
cœur, évoquée par un déplacement de l’apex vers la droite à toire aiguë : éléments à rechercher
l’auscultation et des aspects radiologiques mettant en évidence Éliminer ou traiter :
la luxation avec silhouette cardiaque à droite. Cette situation • une obstruction des voies aériennes supérieures ;
exceptionnelle justifie, en partie, l’intérêt de la thoracotomie de • un épanchement pleural abondant (air, liquide) ;
sauvetage en cas d’arrêt circulatoire après traumatisme thoracique. • les lésions extrarespiratoires (ne pas oublier la dilatation
gastrique post-traumatique).
Lésions valvulaires Évaluer la gravité de l’atteinte parenchymateuse et/ou du
Elles sont surtout localisées à l’anneau aortique.
délabrement pariétal par :
• l’état clinique ;
• la fréquence ventilatoire ;
Pneumomédiastin • la SpO2 ;
• la fréquence cardiaque et la pression artérielle.
Lésions trachéobronchiques
Il s’agit de lésions exceptionnelles. Cependant leur gravité,
en l’absence de diagnostic initial, fait qu’elles doivent être sys-
tématiquement recherchées. Leur symptomatologie parfois peu
bruyante initialement retarde leur prise en charge. Les ruptures
touchent surtout la partie terminale de la trachée et la par-
tie initiale des bronches souches (80 % des lésions autour de
“ Point fort
la carène) [50] . L’emphysème cervical sous-cutané est le signe le
plus pertinent pouvant faire suspecter une lésion trachéobron- Traumatisme fermé du thorax et détresse circula-
chique [51] . toire aiguë : éléments à rechercher
• Épanchement liquidien pleural abondant uni- ou bila-
Lésions de l’œsophage téral (rupture traumatique des gros vaisseaux, fracture
Elles surviennent très rarement mais l’œsophage est un organe rachidienne, fracture de côtes).
discret qui, si on l’oublie au moment du traumatisme, se manifeste • Épanchement péricardique compressif.
secondairement et très sévèrement. • Pathologie valvulaire aiguë.
• Lésions hémorragiques extrarespiratoires.

Lésion du canal thoracique


Il s’agit d’une lésion rare, le plus souvent diagnostiquée lors
de l’évacuation d’un liquide pleural d’aspect évocateur d’un chy- En l’absence d’urgence vitale immédiate, l’échographie pleu-
lothorax. Les mécanismes en sont : l’hyperextension du rachis ropulmonaire peut être associée à la FAST-échographie en
dorsal haut, la contusion directe par fracture vertébrale, ou par préhospitalier pour rechercher un épanchement liquidien ou
la fracture des arcs costaux postérieurs. Cet épanchement peut gazeux. Il doit être réalisé par un praticien expérimenté ayant
se limiter d’abord au médiastin et s’ouvrir secondairement à la reçu une formation spécifique et ne doit pas retarder la prise en
plèvre. Son traitement est habituellement médical (régime, ponc- charge. S’il est réalisé en préhospitalier comme au déchocage, il
tions ou drainage), exceptionnellement chirurgical (ligature du faut rechercher également un épanchement péricardique.
canal thoracique). Une urgence vitale étant écartée, le conditionnement du patient
est peu spécifique.
• Monitorage. Il fait appel à la prise régulière de la tension arté-
 Prise en charge dans les 48 rielle, à la surveillance scopique ainsi qu’à une mesure continue
de la SpO2 .
premières heures • Oxygénation. Celle-ci est indispensable dans le cadre du trau-
matisme thoracique. Le débit d’oxygène à apporter au patient
Évaluation préhospitalière est fonction de sa saturation transcutanée en oxygène et son
administration se fait à l’aide de lunettes ou d’un masque. La
L’atteinte isolée du thorax se rencontre rarement. En effet, elle décision d’intubation et de ventilation mécanique d’un patient
s’inscrit souvent dans un contexte d’un traumatisme grave, où traumatisé thoracique en phase préhospitalière ne se conçoit
des lésions beaucoup plus bruyantes (atteinte viscérale, atteinte que lorsque le patient présente une détresse respiratoire c’est-
craniofaciale) apparaissent au premier plan. L’atteinte thoracique à-dire lorsque les capacités à maintenir une ventilation et une
peut, de ce fait, être initialement sous-estimée. oxygénation adéquates sont dépassées.
Lorsque le traumatisme thoracique s’associe à un tableau • Hémodynamique. La correction des troubles hémodynamiques
de polytraumatisme, la priorité est donnée aux différentes fait appel à la perfusion de solutés de remplissage, éventuelle-
défaillances d’organes constatées. Lorsque le traumatisme thora- ment suivie, après groupage sanguin, d’une transfusion de sang
cique est isolé, l’examen clinique doit alors s’attacher à rechercher si l’hémoglobine est inférieure à 8 g/100 ml ou en cas d’état
l’absence de lésion d’autres organes. de choc hémorragique. Celle-ci ne doit cependant pas retarder
L’évaluation du traumatisé thoracique débute d’une part par l’arrivée du patient dans un milieu hospitalier.
une analyse succincte des circonstances de survenue (accident • Douleur. La prise en charge spécifique de la douleur
de la voie publique, compression, notion de décélération, etc.) d’un traumatisé thoracique est essentielle afin de limiter
et d’autre part par la connaissance des antécédents cardiopul- l’encombrement, l’hypoxémie et le stress. Celle-ci fait appel
monaires du patient (BPCO, asthme, etc.). Enfin, il évalue le aux antalgiques mineurs (paracétamol) et aux agents morphi-
retentissement du traumatisme thoracique sur la fonction pulmo- niques [52] .
naire et hémodynamique. Les éléments de la prise en charge en • Cas particulier.
cas de détresse respiratoire aiguë ou circulatoire aiguë respectent ◦ Une détresse respiratoire avec collapsus et silence auscul-
un protocole bien établi. tatoire doit faire envisager l’existence d’un pneumothorax

8 EMC - Urgences
Traumatismes thoraciques fermés  24-103-B-10

suffocant uni- ou bilatéral, nécessitant la réalisation d’une Tableau 2.


exsufflation à l’aiguille pour diminuer la pression intra- Comparaison des performances diagnostiques de l’échocardiographie
thoracique [53] . La décompression est réalisée par voie transthoracique (ETT) et transœsophagienne (ETO) pour l’évaluation des
axillaire au 4e ou 5e espace intercostal sur la ligne axil- traumatismes thoraciques (n = 134). Adapté de Chirillo et al. [58] .
laire moyenne plutôt que par voie antérieure [54–56] avec un ETT (%) ETO (%)
cathéter court. L’issue d’air sous pression et l’amélioration
clinique attestent de la bonne position du cathéter qui devra Examen satisfaisant 38 98
être laissé en place jusqu’au positionnement d’un drain Hémopéricarde 21 30
thoracique. Contusion myocardique 11 34
◦ Une instabilité hémodynamique majeure compatible avec Rupture aortique 2 10
une hémorragie non extériorisée peut être en relation avec un
Hémomédiastin 4 25
volumineux hémothorax imposant alors la réalisation d’un
drainage thoracique avec système de récupération sanguine Lésions valvulaires 0 1
afin d’effectuer au besoin une autotransfusion.

pour thoracotomie d’hémostase en urgence. Dans un second


“ Conduite à tenir temps, l’analyse plus fine de l’image permet d’évaluer la gravité
des lésions pariétales, de rechercher des signes d’appel de rup-
ture traumatique de l’aorte. La radiographie pulmonaire reste
Ponction de sauvetage d’un pneumothorax suffo- un examen peu performant dans la recherche de pneumothorax
cant, selon Carli mineur et antérieur.
• Cas d’un patient relativement stable. Le bilan lésionnel précis
Ponction à effectuer :
est réalisé grâce au scanner thoracique avec et sans injection.
• du côté où l’hémithorax est distendu, ne respire pas, et
Il est devenu un outil indispensable pour la prise en charge
où il y a emphysème sous-cutané ; des traumatisés du thorax. Le diagnostic de pneumothorax, de
• du côté opposé à la déviation trachéale dans le creux contusion pulmonaire, d’épanchements liquidiens pleuraux en
sus-sternal. est très aisé. Grâce à l’adjonction indispensable de produit de
Matériel : contraste, le scanner permet de faire le diagnostic exhaustif des
• aiguille intramusculaire ou intraveineuse longue ou lésions thoraciques traumatiques.
cathéter court pour traverser la paroi thoracique ; • Apport de l’échographie cardiaque. Elle permet d’évaluer avec
• seringue 20 ml ou plus à déconnecter lorsque l’air sous précision la volémie et la fonction cardiaque, ainsi que des
pression est trouvé (ce qui permet le diagnostic). troubles de la cinétique segmentaire. L’ETO reste plus perfor-
mante dans le diagnostic des contusions myocardiques que
l’ETT (Tableau 2) [58] . L’ETO est la méthode de choix pour
diagnostiquer des lésions cardiaques plus rares, à type de dés-
insertion valvulaire traumatique, d’insuffisance tricuspidienne.
La prise en charge préhospitalière du traumatisé thoracique
Elle permet aussi en cas d’hypoxie non expliquée de vérifier
permet d’assurer l’acheminement du patient vers un centre
l’absence de shunt droite-gauche par réouverture du foramen
hospitalier dans les plus brefs délais, et dans les meilleures
ovale.
conditions possibles. Elle s’inscrit dans une filière de soins
où la qualité du bilan lésionnel initial permet une orienta-
tion optimale du blessé. Grâce à cette transmission précoce, Place des autres examens
l’équipe accueillant le traumatisé anticipe et prépare l’arrivée
Électrocardiogramme
de celui-ci (préparation de la salle et mise en alerte de l’équipe
de radiologie) [57] . La qualité du bilan lésionnel initial per- Il est systématique et répété. La constatation d’un trouble
met d’envisager la stratégie thérapeutique, de programmer les d’excitabilité ou de la conduction est en faveur d’une contusion
examens paracliniques (scanner, FAST-échographie, ETT, voire myocardique. Il permet aussi de dépister, avec la mesure répétée
ETO) et d’organiser l’accueil du patient dans une infrastruc- de la troponine, les lésions coronariennes post-traumatiques.
ture adaptée (salle de déchocage, bloc opératoire). Certains
Examens sanguins
patients sont à admettre rapidement en réanimation ou en soins
continus. La réalisation d’une gazométrie artérielle est essentielle afin de
juger des conséquences du traumatisme sur la fonction respira-
toire et d’adapter la réanimation respiratoire.
Évaluation à la salle d’accueil des urgences La troponine, dosée de manière répétée, permet de suivre
l’évolution des contusions myocardiques.
vitales (SAUV) Le groupage sanguin avec deux déterminations, la recherche
Place de l’imagerie d’agglutinines irrégulières, une numération-formule sanguine
avec dosage des plaquettes, un ionogramme sanguin, un bilan
À l’arrivée à l’hôpital, il est nécessaire de faire un bilan lésionnel de coagulation (taux de prothrombine [TP], temps de céphaline
précis après avoir traité l’urgence vitale. En effet, certains patients activé [TCA] et fibrinogène) font partie des examens à demander
restent très instables malgré les traitements effectués durant la devant tout traumatisé thoracique grave.
phase préhospitalière. L’algorithme de prise en charge d’un traumatisme thoracique
• Cas de patient instable sur le plan hémodynamique mal- isolé d’apparence cliniquement bénigne initialement est repré-
gré le remplissage et un soutien par vasopresseurs ou dans senté sur la Figure 14.
un état initial précaire stabilisé. Le but immédiat à atteindre
est la recherche d’une lésion hémorragique grave mettant
en cause le pronostic vital à court terme. Au niveau thora- Stratégie thérapeutique
cique, il faut réaliser une radiographie pulmonaire de face
associée si possible à une échographie pleuropulmonaire dans La prise en charge spécifique du traumatisme thoracique
ce contexte d’instabilité hémodynamique. Elle permet de faire s’appuie essentiellement sur une analgésie de qualité, une kiné-
un état des lieux succinct, notamment pour l’individualisation sithérapie efficace et au besoin une ventilation non invasive.
d’épanchements pleuraux liquidiens ou gazeux nécessitant En cas de traumatisme grave important ou d’existence d’autres
la pose en urgence d’un drain thoracique [10] . L’observation lésions associées (crâne et abdomen en particulier), le recours à
d’un débit sanguin au travers du drain thoracique supérieur à l’intubation avec sédation et ventilation mécanique peut s’avérer
200 ml/h et/ou 1500 ml d’emblée nécessite un avis chirurgical nécessaire.

EMC - Urgences 9
24-103-B-10  Traumatismes thoraciques fermés

Figure 14. Arbre décisionnel. Algorithme de prise en charge.


Traumatisme thoracique isolé ECG : électrocardiogramme ; TDM : tomodensitométrie ; ETO :
d’apparence cliniquement bénigne initialement échographie transœsophagienne ; ETT : échographie transtho-
racique ; FAST : focused assessment with sonography for traumas.

Accident à cinétique élevée

Oui Non

Radiographie pulmonaire
État hémodynamique et
Échographie pleuropulmonaire
respiratoire stable lors de
ECG
la surveillance clinique
Cinétique de la troponine

Oui Non TDM injectée corps entier

Radiographie pulmonaire
FAST-échographie
Échographie abdominale État stabilisé
Radiographie du bassin
Traitement d'une cause évidente

Persistance état très précaire

Échographie cardiaque
(ETO ou ETT)

Prise en charge de la douleur • Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont contre-indiqués


L’évaluation de la douleur, au moyen de l’échelle visuelle ana- chez le patient traumatisé devant leur toxicité rénale en cas
logique (EVA) ou de l’échelle numérique, est une étape essentielle. d’hypovolémie et leurs effets antiagrégants plaquettaires.
Le contrôle de la douleur est une urgence en soi. L’EVA doit être • Les autres molécules telles que le tramadol, le néfopam, bien
réalisée systématiquement au repos mais aussi lors de la toux et de que pouvant être utilisées dans le cadre de l’analgésie, ont des
l’inspiration profonde [59] . De plus, son monitorage est nécessaire effets secondaires digestifs ou des effets plateaux limitant leur
pour améliorer le soulagement des patients. administration. Cependant, ces médicaments peuvent, par des
Celle-ci est d’autant plus indispensable pour cette catégorie de habitudes de service, être manipulés avec efficacité.
patients que la douleur engendrée par le traumatisme thoracique
Analgésie locorégionale
a une conséquence directe sur la mécanique ventilatoire. Il en
résulte alors une hypoventilation alvéolaire et un encombrement L’anesthésie locorégionale doit pouvoir être proposée chez le
bronchique pouvant conduire à la survenue d’une détresse respi- patient à risque ainsi que chez le patient présentant une douleur
ratoire aiguë. non contrôlée dans les 12 heures. Il faut probablement préférer le
bloc paravertébral sous échographie à l’analgésie péridurale en cas
Analgésie intraveineuse de lésions costales unilatérales avec plus ou moins mise en place
• Le paracétamol, à raison de 1 g toutes les six heures est, en de cathéter par le médecin anesthésiste-réanimateur.
dehors de rares cas d’allergie, la première molécule à adminis- En cas de lésions complexes multiétagées ou bilatérales, il sera
trer. Bien qu’elle ait peu d’effets secondaires, son efficacité est discuté la mise en place d’une péridurale thoracique.
rarement suffisante et nécessite l’adjonction d’autres analgé- Ces gestes nécessitent une asepsie chirurgicale ainsi qu’une
siques. normalité de l’hémostase. Ils sont réalisés exclusivement par un
• Les agonistes morphiniques purs : la morphine est l’antalgique médecin anesthésiste-réanimateur entraîné [60] .
intraveineux le plus couramment utilisé. Administrée à dose L’analgésie doit être multimodale dans le respect des contre-
titrée, elle permet d’obtenir une analgésie de bonne qualité tout indications.
en minimisant les effets secondaires (bradypnée, somnolence,
histaminolibération, etc.). L’objectif est une échelle numérique
inférieure ou égale à 3 ou EVS inférieure ou égale à 2. En
Kinésithérapie respiratoire
l’absence de contre-indication, il est recommandé d’utiliser le En association avec une analgésie adéquate et efficace, elle
mode patient controlled analgesia (PCA) pour la morphine, en représente l’autre volet essentiel de la prise en charge du trau-
complément d’une analgésie locorégionale. matisé thoracique. Celle-ci a pour but d’améliorer le drainage
• Pour la mobilisation du patient, il est proposé après titration des sécrétions trachéobronchiques et la fonction inspiratoire. Elle
bien conduite l’utilisation de la kétamine à dose analgésique. permet ainsi d’optimiser l’hématose et de diminuer l’incidence
En cas de geste invasif nécessaire, il doit être réalisé par une des atélectasies en luttant contre l’encombrement trachéobron-
analgésie efficace. chique.

10 EMC - Urgences
Traumatismes thoraciques fermés  24-103-B-10

Ventilation
Ventilation non invasive
En l’absence de contre-indication (pneumothorax, lésions asso-
LMC LAM
ciées, troubles de conscience, traumatisme abdominal grave) et
après réalisation d’un scanner thoracique, il est recommandé de
débuter une ventilation non invasive. Elle permet de réduire le
recours à l’intubation, l’incidence des pneumopathies et dimi-
nue la mortalité. Elle doit être de type ventilation spontanée avec
aide inspiratoire-pression expiratoire positive (VSAI-PEP) et doit 2e EIC
être instituée dans un environnement de surveillance continue.
Les complications restent modérées devant le bénéfice attendu.
Il s’agit essentiellement de distension gastrique ou de lésions de
compression cutanéomuqueuse autour du nez. A 4e EIC

Ventilation mécanique invasive


B
La ventilation mécanique après intubation en séquence rapide
est recommandée en l’absence d’amélioration clinique ou gazo-
métrique après une heure de ventilation non invasive bien
conduite.
Les modalités de ventilation mécanique du traumatisé thora-
cique ne sont en rien spécifiques. Un volume courant doit être
réglé entre 6 et 8 ml/kg de poids idéal du fait du caractère non
homogène du poumon traumatisé. Il faut monitorer la pression
de plateau qui doit être inférieure strictement à 30 cmH2 O. En Figure 15. Points de ponction du drainage (selon D’Honneur [61] ). A :
cas d’hypoxémie, la PEP est à adapter pour maintenir une frac- drainage thoracique antérieur au 2e espace intercostal (EIC) ; B : drain
tion inspirée en oxygène (FiO2 ) inférieure à 60 % avec une SpO2 thoracique par voie axillaire du 4e espace intercostal ; LMC : ligne médio-
supérieure à 92 % si la tolérance hémodynamique et ventilatoire claviculaire ; LAM : ligne axillaire moyenne.
le permet. La PEP doit être au moins égale à 5 cmH2 0.
Une attention particulière est à porter au risque de survenue
d’un pneumothorax lors de la mise en route de la ventilation en supérieur de la côte inférieure, en plein dans la région tympa-
pression positive (surveillance impérative de l’évolution des pres- nique. Elle ne comporte aucune contre-indication et permet en
sions maximales d’insufflation), requérant alors immédiatement égalisant les pressions atmosphérique et pleurale d’atteindre une
une exsufflation à l’aiguille si le pneumothorax est suffocant, ou structure hospitalière où la pose d’un drain thoracique se fera dans
s’il est relativement bien toléré la mise en place initiale d’un drain des conditions optimales.
thoracique. Une antibiothérapie prophylactique est indiquée uniquement
avant drainage d’un traumatisme pénétrant [59] .
Évaluation Les épanchements pleuraux ne doivent pas être systématique-
ment drainés. Ils doivent être discutés au cas par cas. Concernant
Pour un patient non intubé, elle est clinique, gazométrique et
l’épanchement liquidien, il est suggéré de réaliser un drainage si
radiologique. L’évaluation régulière et rapprochée du patient doit
celui-ci est évalué à plus de 500 ml (critères échographiques et/ou
s’attacher à dépister un début d’épuisement avec encombrement
scanographiques). La technique de la pose du drain est rigoureuse.
bronchique, une incapacité de tousser ou une aggravation des
La nature et l’importance de l’épanchement sont confirmées par
lésions pulmonaires. Ces différentes données ainsi que leurs évo-
la radiographie de thorax et surtout le scanner qui permettent
lutions dans le temps doivent faire envisager la possibilité d’une
également d’éliminer une hernie diaphragmatique avec ascension
intubation trachéale avec ventilation artificielle.
d’organes intra-abdominaux dans le thorax. Le drainage pleural
se fait de préférence par voie axillaire au 4e ou 5e espace intercostal
Décompression pleurale sur la ligne axillaire moyenne (Fig. 15) [61] . La voie antérieure sur la
ligne médioclaviculaire au niveau du deuxième espace intercostal
Il est recommandé de réaliser une décompression en urgence en reste à utiliser en cas d’extrême urgence. Les règles d’asepsie chi-
cas de détresse respiratoire aiguë ou hémodynamique avec forte rurgicale doivent être respectées. Après repérage à l’échographie
suspicion de tamponnade gazeuse. En cas d’arrêt cardiaque et/ou si possible et réalisation d’une anesthésie locale de la peau et des
d’échec d’exsufflation, une thoracostomie par voie axillaire est à différents plans musculaires jusqu’à la plèvre, une incision de la
réaliser en urgence. peau est réalisée à l’aide d’un bistouri. Le trajet du drain à tra-
En ce qui concerne le drainage thoracique, il doit être réservé vers les muscles jusqu’à la plèvre est préparé à l’aide d’une pince
à l’intrahospitalier. Il est à effectuer sans délai pour tout pneu- de Kocher et la pleurotomie est réalisée (Fig. 16) [62] . L’issue de
mothorax complet, tout épanchement liquidien ou aérique gaz ou de liquide confirme la pleurotomie. Le drain est ensuite
responsable d’un retentissement respiratoire et/ou hémodyna- délicatement avancé et positionné soit vers le sommet en cas de
mique. En préhospitalier, les gestes de décompression thoracique pneumothorax, soit vers la base du poumon en cas d’hémothorax.
(exsufflation, thoracostomie) sont uniquement réservés en cas Le drain est ensuite raccordé à un dispositif d’aspiration équipé
de mise en jeu du pronostic vital immédiat. En intrahospitalier, d’une valve permettant de limiter la dépression et une colonne
l’indication du drainage est fonction du retentissement ventila- de liquide autorisant la visualisation d’un bullage (valise de drai-
toire et/ou circulatoire, du caractère gazeux, liquidien ou mixte de nage à usage unique). La position et l’efficacité du drain sont
l’épanchement, de son uni- ou bilatéralité. L’indication du drai- alors vérifiées par le cliché radiologique de thorax de face et si
nage d’un pneumothorax est à discuter au cas par cas chez un possible de profil et l’issue d’air (bullage) ou de liquide dans le
patient sous ventilation mécanique en prévision d’une interven- dispositif de drainage, avec visualisation du siphonnage à l’arrêt
tion chirurgicale [59] . de l’aspiration (mouvement de la colonne de liquide avec les mou-
En cas de pneumothorax minime, unilatéral ou sans reten- vements ventilatoires). Lors d’un hémothorax a priori massif en
tissement clinique, le drainage n’est pas systématique. Une situation pré- ou interhospitalière et comme solution de sauve-
surveillance simple avec radiographie pulmonaire de contrôle à tage, il est possible d’ajouter à la valise de drainage unique un
12 heures est recommandée. dispositif supplémentaire à celui-ci afin d’effectuer une transfu-
Devant un tableau de pneumothorax compressif, le geste sal- sion autologue (autotransfusion) (Fig. 17). Ce dispositif se branche
vateur est la ponction à l’aiguille. Elle s’effectue en rasant le bord immédiatement après la pose du drain thoracique, voire après le

EMC - Urgences 11
24-103-B-10  Traumatismes thoraciques fermés

Figure 16. Technique d’insertion d’un drain tho-


racique (selon Rabbat [62] ). 1. Dissection de l’espace
intercostal à la pince ; 2. vérification de l’ouverture
pleurale au doigt ; 3. mise en place douce du drain
thoracique guidé par la pince.

1 2 3

par la suite. Un hémothorax dû à une hémorragie secondaire aux


fractures de côtes ou une lacération veineuse est contrôlé par un
simple drainage. En revanche, un hémothorax par rupture de gros
vaisseaux intrathoracique ou pariétal (intercostal ou mammaire),
objectivé par un saignement persistant et à fort débit (supérieur
à 200 ml/h sur 3 heures consécutives) doit faire discuter avec le
chirurgien de l’indication d’une thoracotomie d’hémostase. Pour
le pneumothorax, le drainage simple permet de remettre le pou-
mon à la paroi dans la plupart des cas. La persistance d’un bullage
doit faire rechercher la présence d’une brèche parenchymateuse
ou d’une plaie (ou rupture) bronchique. Cette dernière est recher-
chée par une fibroscopie. En cas de pneumothorax persistant, une
sanction chirurgicale doit être discutée.

Type de drain
En cas de pneumothorax isolé, un drain de faible calibre (18
Figure 17. Autotransfusion.
à 24 F) doit être proposé. L’utilisation de drains de petit calibre
de type « queue de cochon » peut être éventuellement considérée
comme une alternative en cas de pneumothorax isolé. Inverse-
ment en cas de suspicion d’hémothorax, on utilise un drain de
gros calibre (28 à 36 F).

Complications
La pose d’un drain thoracique, même dans des conditions
optimales (patient stable, drainage aux urgences, expérience de
l’opérateur, etc.), peut se compliquer de plusieurs façons.
La complication la plus fréquemment rencontrée est la malpo-
sition du drain. Inséré dans la paroi musculograisseuse du thorax,
ou même dans des organes médiastinaux ou abdominaux, ce
mauvais positionnement est suspecté au niveau clinique (pas de
bullage ou d’amélioration de l’état général du patient), et est
Figure 18. Valve antiretour de Heimlich (selon D’Honneur [61] ). confirmé par la radiographie pulmonaire de face, indispensable
après la réalisation de ce geste.
Les douleurs secondaires à la pose du drain sont relative-
début de recueil de l’hémothorax. Une fois plein, il est désolida- ment fréquentes aussi, nécessitant un recours à une analgésie de
risé de la valise de drainage, puis transfusé au patient au moyen palier III.
d’une tubulure et d’un filtre adapté. Dans le sang ainsi transfusé, Un saignement par effraction des vaisseaux intercostaux ou
la concentration d’hémoglobine est variable, les facteurs de la coa- mammaires internes peut être observé. Afin de limiter ce risque,
gulation sont activés, les produits de dégradation de la fibrine et le geste doit être réalisé en rasant le bord supérieur de la côte infé-
des débris cellulaires sont présents. Enfin, le liquide est pauvre rieure et en cas de drainage par voie antérieure, à distance des
en plaquettes. Il s’agit d’une manœuvre d’exception, dont le but artères mammaires internes.
est d’amener un patient vivant au bloc opératoire. Les risques
principaux sont l’embolie gazeuse et l’hypocoagulabilité.
Une valve de Heimlich (Fig. 18) peut être utilisée pour per- Épanchements péricardiques
mettre une évacuation de l’épanchement et le maintien d’une
faible dépression dans le drain. Ce dispositif est particulièrement En cas de tamponnade, une évacuation de l’épanchement
intéressant en préhospitalier et lors des transferts. En cas de pneu- péricardique doit être envisagée. En urgence, lorsque la tam-
mothorax, il faut s’assurer que la poche de recueil ne soit pas sous ponnade est mal supportée, une évacuation à l’aiguille de
tension. l’épanchement péricardique est effectuée. La ponction se fait par
L’efficacité et la perméabilité des drains doivent être fréquem- voie sous-xiphoïdienne sous contrôle échographique, l’aiguille
ment vérifiées et le volume de sang drainé régulièrement surveillé. étant avancée en haut et en arrière, le vide à la main. Dans les
En effet, la gravité d’un hémothorax se juge non pas par la quan- conditions idéales, une péricardiocentèse par voie chirurgicale
tité de sang initialement drainée, mais par le débit de sang drainé doit être réalisée.

12 EMC - Urgences
Traumatismes thoraciques fermés  24-103-B-10

Traitements associés à 200 ml/h pendant trois heures [59] , une thoracoscopie chirurgi-
cale pour les hémothorax résiduels malgré un geste de drainage
La prise en charge des patients traumatisés du thorax est, thoracique bien conduit est à considérer.
comme elle a été décrite (cf. supra), basée sur la prise en charge de Après un bilan lésionnel complet et quelques jours de stabilisa-
la douleur et la kinésithérapie respiratoire. Néanmoins, certaines tion clinique, une indication opératoire pourra être retenue lors
mesures thérapeutiques doivent être envisagées pour diminuer de lésions de la trachée ou de l’œsophage.
l’incidence des complications.
• Strict respect de la balance hydrosodée. Cette attitude limite le Ostéosynthèse pariétale
risque de surcharge pulmonaire liée à une altération de la bar-
rière alvéolaire (œdème lésionnel dans le cadre d’une contusion Une fixation chirurgicale est recommandée chez les patients
pulmonaire). À l’inverse, toute hypovolémie doit être corrigée présentant un volet thoracique et ventilé mécaniquement, si l’état
rapidement pour éviter le surcroît de remplissage nécessaire en respiratoire ne permet pas un sevrage rapide de la ventilation
cas de retard thérapeutique. mécanique. Un avis spécialisé doit être demandé pour tout fracas
• Prévention thromboembolique. Le patient traumatisé présente costal déplacé ou complexe.
un risque thromboembolique majeur. Une prévention throm-
boembolique est indispensable et fait appel à des moyens
mécaniques (bas de contention, compression pneumatique  Critères d’orientation
intermittente) ou pharmacologiques (anticoagulant). Néan-
moins, l’emploi des anticoagulants peut être contre-indiqué Les patients présentant un traumatisme pénétrant de l’aire car-
en cas de risque hémorragique persistant ou d’un traumatisme diaque (stable ou instable) ou du thorax avec un état circulatoire
potentiellement hémorragique. ou respiratoire instable ou stabilisé doivent être orientés sur un
centre spécialisé avec plateau technique adapté. Tous patients pré-
sentant des critères potentiels de gravité ou des signes de détresse
vitale nécessitent un transport médicalisé. Les patients instables
“ Point fort sur le plan hémodynamique ne permettant pas un transport vers
un centre spécialisé doivent être orientés sur le centre chirurgi-
cal de proximité. Il est important d’adapter sa prise en charge à
Contre-indications aux anticoagulants à la phase chaque patient en prenant en compte le rapport bénéfice/risque.
aiguë Un réseau régional avec parcours patient doit être mis en place
• Traumatisme : lésions potentiellement hémorragiques. pour pouvoir améliorer la prise en charge de ces patients. Chez
• Thorax : contusion pulmonaire, hémothorax. un patient avec un terrain à risque, un avis spécialisé est demandé
• Crâne : hémorragie intracrânienne, contusion hémorra- auprès du centre de référence par téléphone ou télétransmission.
gique. Quoi qu’il en soit, ces patients doivent pouvoir être surveillés pen-
• Bassin : épanchement rétropéritonéal. dant 24 heures. En cas de lésions intrathoraciques objectivées sur
le bilan lésionnel chez un patient stable, un transfert secondaire
• Abdomen : contusion d’un organe plein.
vers un centre spécialisé doit être organisé.
Certains patients présentant un traumatisme thoracique isolé
et bénin peuvent regagner leur domicile, parfois avec une
prescription de kinésithérapie, toujours avec une prescription
• Antibiothérapie : la surinfection pulmonaire est fréquente chez
d’antalgiques en cas de fracture de côtes. Il est conseillé de revoir
le traumatisé thoracique et ce surtout en cas de contusion pul-
ces patients à 48 heures. Certains patients doivent être admis en
monaire. Aucune mesure prophylactique ne permet de prévenir
réanimation et soins intensifs.
ce risque, hormis une kinésithérapie respiratoire bien conduite
permettant un drainage efficace des sécrétions bronchiques.
En cas de surinfection, une antibiothérapie doit être débutée
précocement après avoir effectué les prélèvements bactériolo-  Conclusion
giques. Le choix de l’antibiothérapie doit se faire en fonction
de l’écologie locale, mais doit comporter des antibiotiques à Le diagnostic et le traitement du traumatisé thoracique sont
action antistaphylococcique et dont la diffusion pulmonaire actuellement bien codifiés. La filière de soins de ces patients,
est bonne. surtout s’ils sont graves, doit être clairement définie au niveau
régional. Pour les patients les plus sérieusement blessés, il
convient de privilégier l’admission directe dans un centre dis-
Traitements chirurgicaux posant d’un plateau technique et de compétence en chirurgie
thoracique et cardiovasculaire, ainsi que d’une équipe médicale
Thoracotomie de ressuscitation rompue à la radiologie interventionnelle. Cette stratégie est parti-
Cette thoracotomie de ressuscitation n’a pas d’intérêt et n’est culièrement importante dans la prise en charge des traumatisés les
donc pas recommandée en préhospitalier. Cette technique chi- plus graves. Il faut garder à l’esprit que les deux principales causes
rurgicale de damage control est à utiliser en intrahospitalier de décès évitable d’origine thoracique sont d’une part le pneumo-
dans toute réanimation cardiopulmonaire, sauf lorsqu’il n’y a thorax non diagnostiqué et non traité, et d’autre part l’absence de
pas de récupération d’activité circulatoire après dix minutes de diagnostic de lésions médiastinales graves.
réanimation spécialisée et/ou en cas d’asystole en l’absence de
tamponnade [59] .
Déclaration de liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens
d’intérêts en relation avec cet article.
Thoracotomie d’hémostase
La thoracotomie d’hémostase correspond à une prise en charge
rapide au bloc opératoire en dehors des situations de thoracoto- Remerciements : au docteur Catherine Doussot, qui a participé à la version
mie de ressuscitation. Elle doit être envisagée en cas de saignement précédente de cet article.
persistant associé à une instabilité hémodynamique et de saigne-
ment intrathoracique actif dans le drain thoracique en l’absence
d’autre cause de saignement.  Références
En cas de stabilité hémodynamique, si le débit du drain tho-
racique est supérieur à 1500 ml d’emblée avec une poursuite du [1] Battle CE, Hutchings H, Evans PA. Risk factors that predict mortality
débit de drainage supérieur à 200 ml/h dès la première heure, ou in patients with blunt chest wall trauma: a systematic review and meta-
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EMC - Urgences 13
24-103-B-10  Traumatismes thoraciques fermés

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200-B-10]. 2005. p. 564–71.

S. Mirek, Assistant hospitalo-universitaire (sebastien.mirek@chu-dijon.fr).


Service d’anesthésie-réanimation, Centre hospitalier universitaire François-Mitterrand, 14, rue Gaffarel, 21033 Dijon cedex, France.
M. Freysz, Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Département de médecine d’urgence, Service d’aide mobile d’urgence-Service mobile d’urgence et de réanimation-Service régional d’accès aux urgences
(Samu-Smur-Srau), Centre hospitalier universitaire François-Mitterrand, 14, rue Gaffarel, 21033 Dijon cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Mirek S, Freysz M. Traumatismes thoraciques fermés. EMC - Urgences 2018;13(1):1-15 [Article 24-103-
B-10].

Pour citation, ne pas utiliser la référence ci-dessus de cet article, mais la référence de la version originale publiée dans EMC – Médecine d’urgence
2016;11(4):1-15 [25-200-D-10].
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/S1959-5182(16)67482-2

Disponibles sur www.em-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos/ Documents Information Informations Auto- Cas
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations clinique

EMC - Urgences 15
 24-112-C-15

Troubles du rythme cardiaque夽


S. Ederhy

Les troubles du rythme cardiaque sont fréquemment observés en service d’urgence et doivent faire l’objet
de prises en charge spécifiques selon leur tolérance clinique, le risque potentiel de complications auxquelles
ils exposent, et l’éventualité d’une pathologie cardiaque ou extracardiaque sous-jacente. Les troubles
du rythme atriaux posent essentiellement le problème du traitement symptomatique (antiarythmique,
ralentisseur) et de la gestion du traitement anticoagulant qui doit être le plus souvent associé. La réduction
immédiate des tachycardies jonctionnelles est la règle aux urgences. Le traitement à plus long terme des
troubles du rythme supraventriculaires inclut l’abstention thérapeutique, le traitement antiarythmique,
et l’ablation par radiofréquence. Les troubles du rythme ventriculaire sont à considérer systématiquement
comme une urgence vitale. Leur prise en charge inclut le diagnostic rythmologique, l’identification d’une
étiologie et le choix thérapeutique immédiat (antiarythmique). L’indication d’un défibrillateur implantable
doit être discutée par les spécialistes. Le pronostic de troubles du rythme ventriculaires dépend de leur
correction rapide avec une évaluation du risque de mort subite et de la cardiopathie sous-jacente.
© 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Fibrillation atriale ; Flutter atrial ; Tachycardie ventriculaire ; Torsades de pointes ; Antiarythmiques ;
Anticoagulants ; Antiagrégants plaquettaires

Plan ■ Tachycardie jonctionnelle 12


Prise en charge 12
■ Introduction 1 Prise en charge immédiate 12
Prise en charge à distance 12
■ Accueil et prise en charge initiale d’un patient suspect
■ Prise en charge d’une tachycardie ventriculaire 12
de présenter un trouble du rythme cardiaque 2
Interrogatoire 2 Tachycardie ventriculaire avec instabilité hémodynamique 12
Examen clinique 2 Tachycardie ventriculaire bien tolérée sur le plan
Bilan paraclinique 2 hémodynamique 12
Prise en charge ultérieure 12
■ Analyse de l’électrocardiogramme de surface 2 Étiologies des tachycardies ventriculaires 13
Diagnostic ECG des tachycardies à complexes QRS fins 2 Étiologies 13
Caractéristiques ECG des tachycardies supraventriculaires 2
Diagnostic des troubles du rythme jonctionnel 3
Diagnostic ECG des tachycardies à complexes QRS larges 4


Torsade de pointes
Prise en charge des troubles du rythme supraventriculaire
6
7
 Introduction
Prise en charge de la fibrillation atriale/flutter atrial au service Les troubles des rythmes supraventriculaires et ventriculaires
d’accueil des urgences 7 constituent un groupe hétérogène de pathologie. Ils peuvent
Évaluation clinique 7 survenir sur un cœur sain ou apparemment sain, mais le plus
Évaluation ECG 7 souvent en association avec une cardiomyopathie. Ils repré-
Évaluation paraclinique 7 sentent une cause fréquente de consultation aux urgences. La
Prise en charge immédiate 7 classification du trouble du rythme est basée sur l’analyse de
Prise en charge de la fibrillation atriale non compliquée l’électrocardiogramme, de l’effet des manœuvres vagales ou d’une
sur le plan hémodynamique 8 intervention pharmacologique.
Évaluation du risque thromboembolique 8 Le retentissement du trouble du rythme cardiaque est éva-
Ralentissement de la fréquence cardiaque 8 lué sur des paramètres cliniques simples. La cardioversion par
■ Prise en charge d’une fibrillation atriale mal tolérée choc électrique externe est rapidement envisagée chez les patients
sur le plan hémodynamique 9 présentant un trouble du rythme mal toléré sur le plan hémody-
Risque thromboembolique de la cardioversion pharmacologique namique, et ce quel que soit son origine (supraventriculaire ou
ou électrique 9 ventriculaire).
Encadrement anticoagulant pour une fibrillation atriale de durée La prise en charge ultérieure des patients ayant présenté un
inférieure à 48 heures nécessitant une cardioversion immédiate 11 trouble du rythme supraventriculaire repose sur l’introduction
Encadrement anticoagulant pour une fibrillation atriale de durée d’un traitement ralentisseur de la fréquence cardiaque ou
supérieure à 48 heures nécessitant une cardioversion immédiate 11 antiarythmique, et l’introduction éventuelle d’un traitement

EMC - Urgences 1
Volume 13 > n◦ 1 > janvier 2018
http://dx.doi.org/10.1016/S1241-8234(17)88052-4
24-112-C-15  Troubles du rythme cardiaque

Figure 1. Arbre décisionnel.


Tachycardie FC > 120/min Diagnostic différentiel des tachy-
cardies à QRS fins et larges.
FC : fréquence cardiaque ; TJ :
tachycardie jonctionnelle ; TV :
Durée QRS < 120 ms Durée QRS > 120 ms tachycardie ventriculaire ; TSV :
tachycardie supraventriculaire ;
BB : bloc de branche ; VA : voie
accessoire.
Régulière ? Irrégulière ? Régulière ? Irrégulière ?

TJ par réentrée intranodale Fibrillation atriale TV TSV + BB


TJ par voie accessoire Flutter auriculaire à conduction TSV + BB TSV + VA
Tachycardie atriale variable TV polymorphe
Flutter atrial Tachycardie atriale multifocale

anticoagulant, et ce en fonction du niveau de risque thromboem-


bolique ou hémorragique. La place des techniques ablatives est
 Analyse
réservée aux patients présentant une fibrillation atriale non val- de l’électrocardiogramme
vulaire invalidante et symptomatique résistant à un traitement
antiarythmique maximal.
de surface
Les troubles du rythme ventriculaire constituent une urgence
Un électrocardiogramme (ECG) 12 dérivations et un tracé D II
vitale, nécessitant le plus souvent une cardioversion en urgence.
long doivent être réalisés dès l’admission du patient. L’analyse de
Une fois le rythme sinusal rétabli, la prise en charge a pour
l’ECG est alors centrale dans la prise en charge et permet à partir
but d’identifier l’étiologie de la tachycardie ventriculaire, de
d’une démarche systématique de s’orienter très rapidement entre
rechercher une cardiopathie structurale sous-jacente, de strati-
deux grands cadres nosologiques (Fig. 1) :
fier le risque de mort subite et d’évaluer les places respectives
• les tachycardies à complexes QRS fins ;
du traitement préventif médical et du défibrillateur automatique
• les tachycardies à complexes QRS larges.
implantable.

 Accueil et prise en charge Diagnostic ECG des tachycardies à complexes


QRS fins
initiale d’un patient suspect
Elles sont définies par l’association d’une fréquence cardiaque
de présenter un trouble supérieure à 120 battements par minute et d’une durée de QRS
du rythme cardiaque inférieure à 120 ms. Il s’agit alors de faire la distinction entre
les tachycardies régulières à complexes QRS fins (tachycardie
Interrogatoire jonctionnelle ou flutter atrial) des tachycardies irrégulières à com-
plexes à QRS fins (flutter atrial à conduction variable, fibrillation
L’interrogatoire s’attache à préciser la nature des symptômes atriale, tachycardie atriale focale ou multifocale).
(palpitations, lipothymie, syncope, douleur thoracique, dyspnée), L’arbre décisionnel (Fig. 2) décrit les différents critères ECG
leurs circonstances de survenue (au repos, à l’effort), les éventuels (régularité de la tachycardie, analyse de l’activité auriculaire, lien
facteurs déclenchants et les modalités de début et de fin. entre activité auriculaire et ventriculaire), et leur hiérarchisation
L’existence de facteurs de risques cardiovasculaires, d’une car- permettant d’aboutir au diagnostic positif et différentiel en pré-
diopathie structurale sous-jacente, et les traitements en cours sence d’une tachycardie à complexes QRS fins.
(notamment antiarythmiques) doivent être relevés.

Examen clinique Caractéristiques ECG des tachycardies


supraventriculaires
L’examen clinique permet de préciser la tolérance fonction-
nelle du trouble du rythme sur des critères simples (niveau de Tachycardie atriale focale (Fig. 3)
conscience, fréquence cardiaque, fréquence respiratoire, pression Activité atriale
artérielle) et d’identifier rapidement les facteurs de gravité (signes La tachycardie atriale focale est définie par une activité
de choc cardiogénique, syncope, ischémie myocardique, insuffi- auriculaire ectopique, rapide, régulière, comprise entre 100 et
sance cardiaque) permettant une orientation rapide du patient 250 battements par minute. Les pseudo-ondes « p » ont une mor-
vers la zone de déchocage. phologie individualisable, séparées l’une de l’autre par un retour
Bien qu’incontournables dans la prise en charge, à la ligne isoélectrique, et sont de morphologie différente de celle
l’interrogatoire et l’examen clinique ne sont en général que observée en rythme sinusal. Le nombre de complexes QRS est
peu informatifs quant à l’orientation diagnostique et étiologique. inférieur au nombre d’auriculogrammes.

Conduction auriculoventriculaire
Bilan paraclinique
La conduction auriculoventriculaire peut se faire en 1/1, chaque
Le bilan initial paraclinique, prélevé en urgence, doit comporter pseudo-onde « p » étant alors suivie d’un complexe QRS, mais
au minimum un ionogramme sanguin, une numération formule le plus souvent il existe un bloc de conduction entraînant une
sanguine, un bilan d’hémostase et un dosage de la troponine (Ic dégradation de la conduction en 2/1. Le nombre de complexes
ou us). QRS est alors inférieur au nombre d’auriculogrammes.

2 EMC - Urgences
Troubles du rythme cardiaque  24-112-C-15

Figure 2. Arbre décisionnel.


Tachycardie à QRS fins < 120 ms Diagnostic positif et différentiel
des tachycardies à QRS fins. FA :
fibrillation atriale ; TJ : tachycardie
jonctionnelle ; RIN : réentrée
Tachycardie régulière ? intranodale ; VA : voie accessoire ;
TA : tachycardie atriale ; TAF :
tachycardie atriale focale.
Oui Non

Onde P visible FA , flutter, tachycardie atriale multifocale

Cadence auriculaire > cadence ventriculaire

Oui Non

Flutter/tachycardie atriale focale Intervalle RP’

RP’ < P’R RP’ > P’R

RP’ < 70 ms RP’ > 70 ms

TJ RIN TJ RIN/TJ VA/TA TA, TAF, TJ RIN atypique

Cette morphologie est particulièrement bien visible dans les


dérivations explorant l’oreillette droite (dérivation inférieure et
précordiale). La dérivation de Lian peut être utile pour mieux
identifier l’activité auriculaire.
Conduction auriculoventriculaire
La conduction auriculoventriculaire se fait généralement avec
une réponse ventriculaire en 2/1, plus rarement en 1/1.
Le complexe QRS succédant à l’onde F est en général d’aspect
Figure 3. ECG 12 dérivations : tachycardie atrial focale. normal ou peut présenter un aspect de bloc de branche soit en
présence d’un bloc préexistant, soit en présence d’une aberration
de conduction.

Fibrillation atriale (Fig. 5)


Activité atriale
Elle est définie par la présence d’une activité auriculaire non
sinusale, onde f, irrégulière, rapide, avec une fréquence comprise
en dehors de toute imprégnation médicamenteuse entre 350 et
600 battements par minute, constituée par une trémulation de la
ligne de base, sans retour à la ligne isoélectrique.
Réponse ventriculaire
Les complexes QRS fins ou élargis surviennent très irrégulière-
ment à une fréquence en général supérieure à 100 battements par
minute mais qui reste inférieure à celle des oreillettes en raison
Figure 4. ECG 12 dérivations : flutter atrial. d’un bloc auriculoventriculaire fonctionnel.
Les complexes QRS peuvent être élargis en présence d’un
trouble conductif préexistant ou d’une aberration de conduction.
Flutter atrial (Fig. 4)
Activité atriale Diagnostic des troubles du rythme
Le flutter atrial est défini par une activité auriculaire ectopique, jonctionnel
non sinusale, régulière, rapide, comprise entre 250 et 350 batte-
ments par minute. Les ondes F dites de flutter sont identiques Il s’agit de troubles du rythme prenant naissance au sein du
entre elles, de morphologie particulière dite en dent de scie, nœud d’Aschoff-Tawara, à distance des oreillettes et des ventri-
constituées d’une ligne ascendante rapide, un sommet étroit et cules. Ils correspondent à des rythmes réciproques naissant dans
une pente descendante lente sans retour à la ligne isoélectrique le nœud auriculoventriculaire et empruntant la jonction nodo-
mimant un toit d’usine. hissienne.

EMC - Urgences 3
24-112-C-15  Troubles du rythme cardiaque

Il s’agit de tachycardie régulière dont la fréquence est com-


prise entre 180 et 200 battements par minute comportant autant
d’oreillettes que de ventricules.
Les éléments en faveur d’une tachycardie jonctionnelle sont les
suivants :
• les complexes QRS sont fins, en général non élargis, de mor-
phologie comparable à celle observée en rythme sinusal, d’une
durée inférieure à 120 ms en l’absence de bloc de conduction
droit ou gauche ou d’aberration ventriculaire. Un élargissement
du QRS est possible en présence d’un bloc de branche préexis-
tant, d’une aberration ventriculaire, ou d’une voie accessoire ;
• absence d’onde P avant le complexe QRS ;
• présence d’une onde P’ rétrograde de morphologie anormale
en générale négative en D2, D3, aVF, soit confondue avec le
complexe QRS, soit succédant au complexe QRS.
L’injection d’ADP ou d’ATP stoppe cette tachycardie. L’analyse
de l’effet de l’injection d’adénosine en fonction du type de
Figure 5. ECG 12 dérivations : fibrillation atriale. réponse observée et du type de tachycardie diagnostiquée est
décrite dans la Figure 7.
L’ECG de surface fournit certains arguments en faveur d’une
tachycardie jonctionnelle par réentrée intranodale (Fig. 2). La
mesure de l’intervalle R-P’ entre l’onde R et l’onde P’ rétrograde
lorsqu’il est inférieur à 70 ms est un argument certes non for-
mel en faveur d’une réentrée intranodale (RIN). En cas de RIN,
l’injection d’ATP, d’un agent vagomimétique ou les manœuvres
vagales peuvent interrompre la tachycardie, entraînant une pause
sinusale de 2 à 3 secondes, terminée par un battement sinu-
sal ou d’échappement, sans dissociation auriculoventriculaire
(AV).
Un intervalle R-P’ supérieur à 70 ms est en faveur d’une réentrée
utilisant une voie accessoire dans le cadre d’un syndrome de WPW
(présence d’onde delta). En outre, la voie accessoire est parfois
identifiable sur l’ECG 12 dérivations en rythme sinusal.

Diagnostic ECG des tachycardies à complexes


QRS larges
Une tachycardie à complexes QRS larges est définie par la coexis-
tence d’une fréquence cardiaque (FC) supérieure à 120 battements
par minute et d’une durée du complexe QRS élargi supérieure ou
Figure 6. ECG 12 dérivations : tachycardie jonctionnelle par réentrée
égale à 120 ms.
intranodale.
Le diagnostic différentiel doit être fait entre schématiquement
trois groupes étiologiques :
On distingue les tachycardies jonctionnelles par réentrée intra- • les tachycardies supraventriculaires avec bloc de branche pré-
nodale des tachycardies jonctionnelles empruntant une voie existant ou aberration de la conduction ;
accessoire (syndrome de Wolff-Parkinson-White [WPW]). • les tachycardies supraventriculaires et voie accessoire ou préex-
citation ;
• les tachycardies ventriculaires.
Tachycardie jonctionnelle par réentrée L’arbre décisionnel (Fig. 8) décrit les paramètres à prendre en
intranodale (Fig. 6) compte et leur hiérarchisation permettant la différenciation entre
Les mécanismes précis permettant d’expliquer le déclenche- ces différentes entités.
ment et l’entretien de ces tachycardies restent pour le moment Cet algorithme proposé par Brugada permet sur la base d’une
mal élucidés. L’hypothèse la plus fréquemment retenue est que approche diagnostique en quatre étapes, doté d’une bonne sen-
ces tachycardies pour se déclencher et se maintenir nécessitent la sibilité (99 %) et d’une bonne spécificité (> 96 %) de faire le
coexistence au sein du nœud auriculoventriculaire de deux voies diagnostic positif de tachycardie ventriculaire (TV).
de conductions aux propriétés distinctes (une voie de conduc- Selon cet algorithme sont pathognomoniques d’une TV :
tion lente en général postérieure et une voie de conduction rapide • l’absence de complexe RS dans les dérivations précordiales ;
antérieure). • la présence de complexe RS dont la durée entre le pic de l’onde
R et S est supérieure à 100 ms ;
• la présence d’une dissociation auriculoventriculaire.
Tachycardie réciproque du syndrome
de Wolff-Parkinson-White
Tachycardie ventriculaire (Fig. 9)
Le mécanisme à l’origine de cette tachycardie repose sur le fait
que l’excitation emprunte le nœud auriculoventriculaire puis un De nombreux mécanismes peuvent être à l’origine de troubles
faisceau accessoire (faisceau de Kent) comme voie de retour. du rythme ventriculaire. Ils peuvent être secondaires ou provo-
qués par différents mécanismes ou substrats tels que circuit de
réentrée, postdépolarisation ou un foyer d’automatisme anormal.
Diagnostic ECG des tachycardies jonctionnelles Ils ont pour caractéristique commune de prendre naissance au-
Les éléments recueillis sur l’ECG de surface 12 dérivations, dessous de la bifurcation du tronc du faisceau de His ou sur
le tracé D II long, l’effet des manœuvres vagales et d’un test l’une des branches du faisceau de His (tachycardie hissienne).
à l’adénosine diphosphate (ADP) ou à l’adénosine triphos- Elles peuvent survenir sur cœur sain mais plus fréquemment
phate (ATP) permettent en général de poser rapidement le sont associées ou révélatrices d’une cardiomyopathie dont la plus
diagnostic. représentée est la cardiomyopathie ischémique.

4 EMC - Urgences
Troubles du rythme cardiaque  24-112-C-15

Figure 7. Arbre décisionnel.


Tachycardie régulière à QRS fins Effet de l’adénosine par voie intra-
veineuse (i.v.) en fonction du type
de tachycardie diagnostiquée.
AV : auriculoventriculaire ; TJ :
Adénosine i.v. tachycardie jonctionnelle ; TAF :
tachycardie atriale focale.

Pas de changement Ralentissement progressif puis réaccélération Arrêt brutal Bloc AV haut grade

TV fasciculaire Tachycardie sinusale TJ Flutter atrial


Tachycardie atriale TAF Tachycardie atriale
TJ

Figure 8. Arbre décisionnel.


Absence de complexe RS dans toutes les dérivations précordiales Description de la démarche
diagnostique face à une tachy-
cardie à QRS large permettant le
Oui Non diagnostic positif de tachycardie
ventriculaire (TV) et différentiel
de tachycardie supraventriculaire
TV Intervalle R-S > 100 ms dans une dérivation précordiale (TSV). AV : auriculoventriculaire.

Oui Non

TV Dissociation AV

Oui Non

TV Critère morphologique pour TV présent en V1, V2 et V6

Oui Non

TV TSV et aberration de conduction

L’analyse de l’ECG 12 dérivations doit être là aussi méthodique,


et reposer sur l’analyse d’un tracé D II long. Les ECG en rythme
sinusal doivent être dans la mesure du possible analysés s’ils sont
disponibles.

Analyse de la séquence auriculoventriculaire


L’analyse de la séquence auriculoventriculaire autorise une pre-
mière orientation permettant d’identifier schématiquement trois
situations :
• une activité ventriculaire plus fréquente que l’activité auricu-
laire en faveur d’une tachycardie ventriculaire ;
• une activité auriculaire égale à l’activité ventriculaire ne per-
mettant pas formellement d’éliminer une TV ;
Figure 9. ECG 12 dérivations : tachycardie ventriculaire. • une activité auriculaire plus fréquente que l’activité ventricu-
laire en faveur en général d’une tachycardie supraventriculaire
(TSV) mais compatible avec une bitachycardie.

Elles sont définies par une FC supérieure à 120 battements par Analyse de l’effet des manœuvres vagales
minute, régulière associée à un élargissement du complexe QRS,
d’une durée supérieure ou égale à 120 ms et par la survenue d’au
ou d’une intervention pharmacologique
moins trois extrasystoles ventriculaires consécutives. La fréquence Lorsque la situation hémodynamique le permet (TV bien
peut cependant être discrètement irrégulière mais avec une varia- tolérée sur le plan hémodynamique), l’effet des manœuvres
tion en général inférieure à 0,04 seconde. vagales ou d’une intervention pharmacologique modulant la
On distingue les TV soutenues lorsque la durée de l’épisode conduction auriculoventriculaire (adénosine di- ou triphosphate,
est supérieure à 30 secondes des TV non soutenues d’une durée bêtabloquant, inhibiteurs calciques bradycardisants) en dehors
inférieure à 30 secondes. des contre-indications peut participer et aider au diagnostic

EMC - Urgences 5
24-112-C-15  Troubles du rythme cardiaque

Tableau 1.
Critères électrocardiographiques morphologiques analysés en V1, V2 ou
V6 en faveur d’une tachycardie ventriculaire.
Critères électrocardiographiques
Morphologie du QRS type BBD
R, QR ou RS en V1
R/S < 1 en V6
R, QS, ou QR en V6
Morphologie du QRS type BBG
Durée de R > 30 ms en V1 ou V2
R nadir S > 60 ms en V1 ou V2
Crochetage de S en V1 ou V2
QR ou QS en V6

BBD : bloc de branche droit ; BBG : bloc de branche gauche.

positif de TV et différentiel avec une TSV. L’ADP et l’ATP ne


doivent être utilisés que si l’hémodynamique est stable. Figure 10. ECG 12 dérivations : torsades de pointes de réduction spon-
Trois situations peuvent être observées après manœuvres tanée.
vagales ou interventions pharmacologiques :
• absence de modifications des auriculogrammes et ralentisse-
ment des ventriculogrammes en faveur d’une TSV ;
• réduction brutale du trouble du rythme plaidant en faveur
d’une tachycardie jonctionnelle (TJ) ;
• absence de modification du rythme des ventriculogrammes en
faveur d’une TV.

Dissociation auriculoventriculaire
Le diagnostic de TV peut être en général évoqué lorsque sur
l’ECG le nombre de complexes QRS est supérieur au nombre
d’auriculogrammes et qu’il n’est pas possible d’établir de lien entre
ces deux activités. Ce signe n’est cependant présent que dans 30 %
des TV prouvées par ailleurs.

Existence de complexe de capture


Figure 11. ECG 12 dérivations : bradyarythmie avec allongement du
Elle se traduit sur l’ECG par la présence d’un QRS fin ou d’aspect
QT.
comparable au QRS en rythme sinusal, affiné par rapport à celui
présent en TV. Il résulte d’une dépolarisation du myocarde ven-
triculaire secondaire à une activation sinusale ayant traversé le
Un aspect R exclusif ou qR en regard de la dérivation V1
nœud auriculoventriculaire et ayant pu exciter le myocarde en
est en faveur d’une TV, alors qu’un aspect rSR’ évoque un
dehors de sa période réfractaire.
BBD et plaide plutôt en faveur d’une TSV avec aberration de
conduction. Un aspect QR ou RS en V1 est en faveur d’une TV,
Existence de complexe de fusion alors qu’un aspect triphasique présent en V6 plaide en faveur
Le complexe de fusion est lié à l’activation du myocarde en d’une TSV. En V6, un ratio R/S inférieur à 1, un aspect QR
dehors d’une période réfractaire à la fois par l’activité ectopique ou QS ou R exclusif sont en faveur d’une TV. Un aspect tri-
et par une activation d’origine sinusale. La morphologie du QRS phasique ou un ratio R/S supérieur à 1 est en faveur d’une
est alors différente, intermédiaire entre celle observée en TV et TSV.
celle observée en rythme sinusal.
Tachycardie ventriculaire à type de retard gauche
Durée et morphologie du complexe QRS En présence d’une TV à type de retard gauche, l’association de
en tachycardie quatre critères plaide en faveur d’une TV :
Durée du QRS • durée de l’onde R en V1 ou V2 supérieure à 30 ms ;
Deux aspects caricaturaux mais rarement observés permettent • onde Q en V6 ;
de faire le diagnostic de TV notamment lorsque la durée du QRS • durée du QRS nadir de S en V1 ou V 2 supérieure à 60 ms ;
est supérieure à 140 ms en présence d’un bloc de branche droit • un aspect QR ou QS.
(BBD), ou supérieure à 160 ms en présence d’un bloc de branche
gauche (BBG). Cependant de tels allongements de la durée du
complexe QRS peuvent être observés en cas de TSV et BBG ou Torsade de pointes (Fig. 10)
BBD préexistants ou de prise d’antiarythmique de classe Ic.
La torsade de pointes (TdP) est une tachycardie ventriculaire
Morphologie du QRS
polymorphe non soutenue caractérisée par un élargissement des
La morphologie de la TV est influencée et est variable selon le complexes QRS, une variation d’amplitude des QRS, un change-
point d’origine qui peut être à type de retard droit (la TV prend ment d’axe des QRS autour de la ligne isoélectrique.
alors origine dans le ventricule gauche [VG]) ou gauche (la TV La cadence ventriculaire est en générale comprise entre 160 et
prend alors origine dans le ventricule droit [VD]). Le Tableau 1 240 battements par minute.
décrit les différents critères morphologiques en faveur d’une Elle se termine généralement spontanément.
TV. Le principal facteur de risque de déclenchement d’une TdP
Tachycardie ventriculaire à type de retard droit est l’allongement de l’intervalle QT que celui-ci soit congénital
L’analyse des dérivations V1 et V6 permettent le plus souvent ou induit par un traitement pharmacologique (QT long acquis)
de faire la distinction entre TSV et TV. (Fig. 11).

6 EMC - Urgences
Troubles du rythme cardiaque  24-112-C-15

Tableau 2. Tableau 4.
Classification des symptômes des patients présentant une fibrillation Stratification du risque hémorragique par le score HAS BLED.
atriale selon l’échelle de l’European Heart Rhythm Association (EHRA).
Lettre Caractéristique clinique Score
Classe Signification
H Hypertension (PAS > 160 mmHg) 1
EHRA I Aucun symptôme A Fonction rénale (1 pt) (créatinine > 200 ␮mol/l) 1 ou 2
EHRA II Symptômes modérés ou hépatique (1 pt) anormale (cirrhose ou
Activité quotidienne non affectée bilirubinémie > 2N et transaminases > 3N)
EHRA III Symptômes sévères S Antécédent d’AVC 1
Activité quotidienne affectée B Hémorragie ou prédisposition au saignement 1
EHRA IV Symptômes invalidants L INR labile 1
Activité quotidienne impossible
E Âge > 65 ans 1
D Traitement (1 pt) (AINS, aspirine) ou 1 ou 2
consommation d’alcool (1 pt)
Tableau 3.
Description des différentes composantes du score CHA2 DS2 VASC. PAS : pression artérielle systolique ; AVC : accident vasculaire cérébral ; INR :
international normalized ratio ; AINS : anti-inflammatoire non stéroïdien.
Marqueurs de risques Score
Insuffisance cardiaque 1
Hypertension artérielle 1
Âge ≥ 75 ans
Diabète
Antécédent d’AVC/AIT
2
1
2
“ Point important
Maladie vasculaire (IDM, AOMI, plaque carotidienne) 1 Place de l’imagerie dans la prise en charge des
Âge 65–74 ans 1 patients présentant un trouble du rythme ventri-
Sexe féminin 1 culaire
• L’échographie transthoracique (ETT) et l’échographie
AVC : accident vasculaire cérébral ; AIT : accident ischémique transitoire ; IDM :
infarctus du myocarde ; AOMI : artériopathie oblitérante des membres inférieurs. transœsophagienne (ETO) occupent une place importante
et centrale dans la prise en charge des patients en fibril-
lation atriale (FA) ou en flutter. L’ETT précise l’existence
 Prise en charge des troubles d’une cardiopathie structurale, en particulier d’une valvu-
du rythme supraventriculaire lopathie rhumatismale et décrit certains paramètres clés
de la tolérance fonctionnelle (fraction d’éjection ventri-
Prise en charge de la fibrillation atriale/flutter culaire gauche, taille de l’oreillette gauche) et du risque
de récidive de la FA. L’ETO complète l’ETT en analysant
atrial au service d’accueil des urgences la morphologie et la fonction auriculaire. L’ETO participe
La fibrillation atriale non valvulaire (FANV) représente le également à la stratification du risque thromboembolique.
trouble du rythme le plus fréquemment observé en pratique cou- Les stratégies guidées par ETO sont une alternative inté-
rante. Elle est associée à une majoration du risque d’accident ressante à la stratégie conventionnelle d’anticoagulation.
vasculaire cérébral, du risque d’insuffisance cardiaque et à une • L’ETO constitue un outil performant semi-invasif, bien
augmentation de la mortalité. Il est actuellement acquis que la toléré autorisant l’étude des structures postérieures inac-
prise en charge de la fibrillation atriale (FA) et celle du flutter atrial
cessibles en ETT. Selon les données de l’Euro Heart
sont superposables. Le niveau de risque thromboembolique de la
FA paroxystique est équivalent à celui de la FA permanente [1] .
Survey, elle n’est réalisée que dans 12 à 20 % des cas.
L’ETO permet d’évaluer quatre paramètres essentiels dans
l’évaluation des patients en FA ou flutter : la présence d’un
Évaluation clinique thrombus dans l’auricule et l’oreillette gauches ainsi que
L’évaluation initiale d’un patient en FA repose sur cinq grands
dans l’auricule et l’oreillette droites, les vitesses de vidange
axes : et de remplissage de l’auricule gauche et de l’auricule
• la quantification des symptômes basée sur la classification de droite, le contraste spontané et l’athérome aortique.
l’European Heart Rhythm Association (EHRA) (Tableau 2) ; • L’ETT a aussi une place importante dans l’évaluation
• l’évaluation du risque thromboembolique (score CHADS2 et des patients admis pour un trouble du rythme ventricu-
CHA2 DS2 VASC) (Tableau 3) ; laire permettant de faire le diagnostic d’une cardiopathie
• l’évaluation du risque hémorragique (score HAS BLED) structurale sous-jacente (cardiopathie dilatée, cardiopa-
(Tableau 4) ; thie hypertrophique, cardiopathie ischémique).
• la recherche de facteurs prédisposants ;
• l’identification d’une cardiopathie structurale sous-jacente par
la réalisation d’une échographie cardiaque.
Au terme de cette évaluation, il est possible d’identifier sché-
Évaluation ECG matiquement, trois situations cliniques :
• FA bien tolérée sur le plan hémodynamique et non compliquée ;
L’analyse de l’ECG 12 dérivations outre le diagnostic positif • FA mal tolérée sur le plan hémodynamique ;
permet d’identifier des éléments en faveur d’une cardiopathie • FA compliquée d’un accident vasculaire cérébral (AVC),
associée en présence d’une hypertrophie ventriculaire gauche d’insuffisance cardiaque ou d’un syndrome coronaire aigu.
(HVG), d’une onde Q de nécrose, d’anomalies de la repolarisation.
Prise en charge immédiate
Évaluation paraclinique
Une fois le trouble du rythme caractérisé, une évaluation
Le Tableau 5 décrit le bilan minimal à réaliser lors de la décou- rapide de la tolérance basée sur quelques paramètres simples (fré-
verte et la prise en charge d’une FA non valvulaire. quence respiratoire, niveau de conscience, présence de marbrure,

EMC - Urgences 7
24-112-C-15  Troubles du rythme cardiaque

Tableau 5. Tableau 6.
Bilan d’entrée d’un patient en fibrillation atriale. Stratification du risque thromboembolique selon le score CHA2 DS2 VASC.
Paramètres Objectifs Score Accident vasculaire cérébral (%, an)
Ionogramme sanguin Dyskaliémie 0 0%
Urée, créatininémie Adaptation posologique à la fonction rénale 1 1,3 %
Bilan d’hémostase Bilan avant anticoagulation 2 2,2 %
Numération + plaquette Infection 3 3,2 %
TSH Dysthyroïdie 4 4%
Dosages non systématiques 5 6,7 %
Digoxinémie Surdosage 6 9,8 %
CRP Processus inflammatoire
7 9,6 %
D-dimère Suspicion processus thromboembolique
BNP Insuffisance cardiaque 8 6,7 %
Imagerie 9 15,2 %
Radio de thorax
ETT Cardiopathie structurale, cardiopathie
Tableau 7.
valvulaire
Recommandation pour l’instauration du traitement anticoagulant en
ETO Recherche de marqueurs de risque fonction du niveau de risque thromboembolique.
thromboembolique
Recommandations Niveau de
TSH : thyroid stimulating hormone ; CRP : protéine C réactive ; BNP : brain preuve
natriuretic protein ; ETT : échographie transthoracique ; ETO : échographie tran-
sœsophagienne. Un traitement anticoagulant est recommandé pour IA
prévenir les accidents emboliques chez tous les
patients en FA sauf ceux à très bas risque
hypotension, lipothymie ou syncope, signes d’insuffisance car- thromboembolique (< 65 ans, cœur sain) ou
diaque) permet en présence de l’un ou plusieurs de ces paramètres présentant une contre-indication
d’orienter rapidement ces patients vers une unité de déchocage où Chez les patients à très bas risque thromboembolique IB
ils pourront être rapidement monitorés et bénéficier de la mise en défini par un score = 0, aucun traitement n’est
place d’une voie veineuse. recommandé
Différentes stratégies sont alors envisageables et consistent en
Chez les patients avec score CHA2 DS2 VASC ≥ 2, un IA
un ralentissement de la fréquence cardiaque, une anticoagulation traitement anticoagulant oral est recommandé soit par
en fonction du niveau de risque thromboembolique et hémorra- AVK à dose ajustée, soit par AOD
gique et une cardioversion immédiate dans de rares situations de
Chez les patients avec score CHA2 DS2 VASC = 1, un II A
FA mal tolérée.
traitement anticoagulant oral peut être recommandé
soit par AVK à dose ajustée, soit par AOD en tenant
compte du risque hémorragique et de la préférence du
Prise en charge de la fibrillation atriale patient
non compliquée sur le plan hémodynamique En cas de refus du traitement anticoagulant, un II A
traitement antiagrégant plaquettaire peut être
Les trois principaux objectifs initiaux de la prise en charge sont envisagé, de préférence une association par aspirine et
la prévention du risque thromboembolique, l’amélioration des clopidogrel
symptômes et de la qualité de vie en partie médiée par le contrôle
de la fréquence cardiaque et la prise en charge d’une éventuelle FA : fibrillation atriale ; AVK : antivitamines K ; AOD : anticoagulants oraux
cardiopathie associée. directs.

Les différentes composantes de ce score sont décrites dans le


Évaluation du risque thromboembolique Tableau 3 et le niveau de risque thromboembolique en regard de
chaque strate de risque est décrit dans le Tableau 7.
Le risque d’AVC constitue l’une des complications les plus
La mise à jour 2012 des recommandations européennes 2010
redoutées dans la FA. Les AVC secondaires ou associés à la FA
(Fig. 12) propose de débuter un traitement anticoagulant par
sont en général multiples, associés à des séquelles motrices plus
AVK ou AOD à partir d’un score CHA2 DS2 VASC égal à 2, et de
importantes et à une mortalité élevée.
l’envisager à partir d’un score CHA2 DS2 VASC égal à 1.
Le risque d’AVC n’est pas homogène chez les patients en FA, et
Les patients ou patientes de moins de 65 ans sans cardiopathie
est modulé par la présence de facteurs de risque thromboembo-
structurale et sans aucun autre marqueur de risque sous-jacent
lique aisément relevés au lit du patient.
peuvent être traités par aspirine, voire aucun traitement anti-
La prescription d’un traitement anticoagulant (antivitamines K
thrombotique (Tableau 7).
[AVK] ou anticoagulants oraux directs [AOD]) ou antiagrégant
L’évaluation du risque hémorragique peut être réalisée à l’aide
doit donc prendre en compte la balance entre le risque throm-
du score HAS BLED dont les différentes composantes sont
boembolique spontané en l’absence de traitement anticoagulant
décrites dans le Tableau 4. Ces paramètres clinique et biologique
et le risque hémorragique en cas de prescription d’un traitement
permettent de bâtir un score variant de 0 à 9. Ce score per-
anticoagulant.
met d’identifier les caractéristiques des patients modifiables et
Le score de risque CHADS2 puis le score de CHA2 DS2 VASC per-
d’identifier les patients à haut risque hémorragique défini par
mettent d’évaluer le risque thromboembolique chez un patient
un score HAS BLED supérieur à 3, pour lesquels des précautions
non anticoagulé (Tableau 6).
doivent être prises avant introduction d’un traitement AVK ou
Le score CHADS2 permet de décrire à mesure que ce score aug-
AOD sans pour autant que cela constitue une contre-indication.
mente un accroissement du risque d’AVC variant de 1,8 % par
an pour le score CHADS2 égal à 0, à 18,9 % par an pour le score
CHADS2 égal à 6. Plusieurs limites de ce score ont été mises en Ralentissement de la fréquence cardiaque
évidence, justifiant la proposition d’un score visant à affiner cette
stratification notamment par le score CHA2 DS2 VASC. Bien que Le ralentissement de la fréquence cardiaque est l’option théra-
non exempt de critique, ce score de risque tend à se substituer au peutique retenue le plus souvent en présence d’une FA/flutter bien
score CHADS2 dans les recommandations les plus récentes. tolérée sur le plan hémodynamique.

8 EMC - Urgences
Troubles du rythme cardiaque  24-112-C-15

Fibrillation atriale “ Point important


Place des anticoagulants oraux directs dans la
Fibrillation atriale valvulaire prise en charge des patients en FA
• Les AOD récemment mis à disposition et ayant une
autorisation de mise sur le marché (AMM) pour la
prise en charge de la FA non valvulaire appartiennent
Âge < 65 ans, fibrillation atriale isolée, homme ou femme schématiquement à deux grandes catégories que sont
les inhibiteurs directs de la thrombine (dabigatran)
et les inhibiteurs directs du facteur Xa (rivaroxaban,
CHA2DS2VASC apixaban). Ces médicaments sont essentiellement à élimi-
nation rénale préférentielle ou modérée, présentent peu
d’interactions médicamenteuses et aucune interaction ali-
mentaire. Aucun antidote n’est actuellement disponible
0 1 2 et aucun monitorage n’est nécessaire. Il est important
de surveiller la clairance de la créatinine une à trois fois
par an, plus fréquemment en cas de déshydratation ou
d’événements intercurrents. La posologie doit être adap-
Traitement anticoagulant oral
tée à la clairance de la créatinine.
• Ils sont actuellement considérés comme des alternatives
au traitement AVK.
HAS BLED/évaluation • Comparativement aux AVK, ces traitements ont mon-
tré leur non-infériorité (rivaroxaban) comparativement
aux AVK, voire une supériorité (apixaban, dabigatran)
pour la prévention des AVC ou embolies systémiques. De
Pas de traitement AOD AVK manière constante, les AOD ont montré une réduction
significative du risque hémorragique intracérébral compa-
Figure 12. Arbre décisionnel. Modalités de prescriptions des anticoa- rativement aux AVK au prix cependant d’une majoration
gulants oraux directs (AOD) et antivitamines K (AVK). du risque hémorragie digestif (rivaroxaban, dabigatran),
non observé avec l’apixaban.
• La prescription de ces molécules peut être envisagée
pour les patients présentant une FA non valvulaire avec un
score CHA2 DS2 VASC supérieur ou égal à 1 et est recom-
Tableau 8. mandé pour un score inférieur à 2.
Traitements ralentisseurs de la fréquence cardiaque utilisable pour la prise
en charge des patients en fibrillation atriale.

 Prise en charge
Bêtabloquants
Bisoprolol Première ligne Effets secondaires :
Métoprolol hypotension, bradycardie, d’une fibrillation atriale
trouble de la conduction,
Carvédilol
insuffisance cardiaque,
mal tolérée sur le plan
Aténolol bronchospasme hémodynamique
Inhibiteurs calciques (non dihydropyridines) Une cardioversion électrique peut être discutée très rapidement
Vérapamil Première ligne Effets secondaires : dans la prise en charge du patient en présence d’une FA mal tolérée
Diltiazem À éviter chez les patients hypotension, trouble de la sur le plan hémodynamique (Fig. 13).
insuffisants cardiaques ou conduction, insuffisance
avec une dysfonction VG cardiaque
Doivent être préférés aux
Risque thromboembolique
bêtabloquants en cas de de la cardioversion pharmacologique
bronchospasme chez un
patient BPCO
ou électrique
La cardioversion quelle que soit sa modalité, par voie élec-
VG : ventricule gauche ; BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive.
trique ou pharmacologique est associée lorsqu’elle est effectuée
sans couverture anticoagulante à une majoration du risque throm-
boembolique variant de 0 à 5,6 %.
Les deux principaux mécanismes évoqués pour expliquer ces
Les principaux médicaments et éventuels effets secondaires embolies au décours d’une cardioversion sont la sidération de
sont décrits dans le Tableau 8. l’auricule gauche survenant en postcardioversion ou la mobili-
Certaines situations cliniques doivent être identifiées car elles sation d’un thrombus intra-auriculaire méconnu au décours de la
vont directement influencer les modalités thérapeutiques. Ainsi, cardioversion.
en présence d’une hypotension artérielle ou d’insuffisance car- Deux stratégies ont été développées pour prévenir ce type de
diaque, la digoxine ou l’amiodarone sont les deux médicaments complications que sont respectivement un encadrement de la
à utiliser préférentiellement. La correction d’une déshydrata- cardioversion par une anticoagulation de trois semaines avant
tion, l’oxygénothérapie en cas d’hypoxie, les antipyrétiques et quatre semaines après la cardioversion ou la réalisation d’une
en cas de fièvre participent également à la correction de la échographie transœsophagienne (ETO) préalable à la cardiover-
tachycardie. sion à la recherche d’un thrombus intra-auriculaire (Fig. 14). Ces

EMC - Urgences 9
24-112-C-15  Troubles du rythme cardiaque

deux stratégies ne sont cependant pas applicables aux urgences, Le choix du traitement doit être basé sur l’existence d’une car-
certaines situations cliniques et notamment d’instabilité hémody- diopathie sous-jacente, il doit être effectué après contrôle de la
namique nécessitent la réalisation d’une cardioversion immédiate normalité des électrolytes, sous surveillance scopique pendant et
notamment chez les patients dont la FA se complique d’instabilité après la cardioversion, et encadré par une anticoagulation efficace
hémodynamique, d’un œdème aigu du poumon, ou d’un syn- assurée par héparine non fractionnée (HNF) ou héparine de bas
drome coronaire aigu (Fig. 13). poids moléculaire (HBPM), puis relayé par AVK selon les modalités
La cardioversion pharmacologique peut être envisagée aux décrites précédemment (Fig. 15).
urgences dans certaines situations bien codifiées à l’exclusion de
l’instabilité hémodynamique qui constitue une indication élec- Tableau 9.
tive à la cardioversion électrique (Fig. 9). Les indications et les Recommandations pour la réalisation d’une cardioversion électrique.
places respectives de la cardioversion électrique et de la cardio-
Recommandations Niveau
version pharmacologique sont respectivement décrites dans les
de preuve
Tableaux 9 et 10.
Cinq médicaments par voie intraveineuse peuvent être utilisés Pour les patients présentant une FA compliquée IC
pour réaliser une cardioversion pharmacologique (Tableau 11). d’ischémie myocardique, d’hypotension artérielle
symptomatique, d’angor, d’insuffisance cardiaque
aiguë, une cardioversion immédiate par CEE doit être
envisagée en l’absence de réponse rapide à des mesures
FA < 48 h pharmacologiques
Une cardioversion par CEE est recommandée en cas de IC
préexcitation compliquée d’une tachycardie rapide ou
d’instabilité hémodynamique
Instabilité sur le plan hémodynamique Une cardioversion par CEE est contre-indiquée chez les III C
patients présentant une intoxication digitalique

Oui Non FA : fibrillation atriale ; CEE : choc électrique externe.

Tableau 10.
Cardioversion Cardiopathie ? Indication de la cardioversion pharmacologique chez les patients en fibril-
électrique lation atriale.

Oui Non Recommandations Niveau


de preuve
La flécaïne ou la propafénone i.v. sont recommandées IA
Amiodarone i.v. Flécaïne i.v.
pour une cardioversion pharmacologique en l’absence
Propafénone i.v.
de cardiopathie structurale sous-jacente
Ibutilide i.v.
En cas de cardiopathie structurale sous-jacente chez un IA
patient présentant une FA récente, une cardioversion
Figure 13. Arbre décisionnel. Place de la cardioversion électrique et
par amiodarone est recommandée
pharmacologique dans la prise en charge des patients en fibrillation
atriale. i.v. : par voie intraveineuse. i.v. : par voie intraveineuse ; FA : fibrillation atriale.

Figure 14. Arbre décisionnel. Modalité de la


FA de début récent réduction des patients en fibrillation atriale (FA).
i.v. : par voie intraveineuse ; p.o. : per os.

Instabilité hémodynamique

Urgence Choix patient/médecin

Élective Cardiopathie structurale

Sévère Modérée Absente

Cardioversion Amiodarone Ibutilide Flécaïnide Flécaïnide


électrique i.v. Vernakalant Ibutilide Propafénone
i.v. Propafénone Forte dose
(non dispos) Vernakalant p.o.
i.v.

Amiodarone Amiodarone
i.v. i.v.

10 EMC - Urgences
Troubles du rythme cardiaque  24-112-C-15

Encadrement anticoagulant gulation brève administrée par voie veineuse d’HNF ou par des
HBPM par voie sous-cutanée. Un relais par AVK pendant au moins
pour une fibrillation atriale de durée quatre semaines, voire au long cours doit être envisagé chez les
inférieure à 48 heures nécessitant patients présentant des facteurs de risque thromboembolique. Le
une cardioversion immédiate relais par AVK n’est pas obligatoire chez les patients ne présen-
tant aucun marqueur de risque thromboembolique (Tableau 12,
Pour les patients dont le début de la FA a pu être identifié Fig. 14).
de manière certaine comme datant de moins de 48 heures, et
présentant ou non des facteurs de risque thromboembolique,
la cardioversion doit être réalisée sous couvert d’une anticoa-
Encadrement anticoagulant
Tableau 11. pour une fibrillation atriale de durée
Traitement et posologie des traitements utilisables pour une cardioversion
pharmacologique.
supérieure à 48 heures nécessitant
Médicament Dose Dose
une cardioversion immédiate
d’entretien Prise en charge immédiate
Amiodarone 5 mg/kg i.v. sur 1 h 50 mg/h Pour les patients dont la FA date de plus de 48 heures, ou dont
Flécaïne 2 mg/kg i.v. sur 10 min ou la durée n’a pu être déterminée et nécessitant une cardioversion
200–300 mg p.o. immédiate en raison d’une instabilité hémodynamique, d’un syn-
Ibutilide 1 mg i.v. sur 10 min 1 mg i.v. sur drome coronarien aigu (SCA) ou d’un œdème aigu du poumon
10 min (OAP), HNF ou HBPM doivent être administrées selon les mêmes
Propafénone 2 mg/kg i.v. sur 10 min ou modalités que précédemment avant la cardioversion et relayées
450–600 mg p.o. pour au moins quatre semaines par des AVK. La poursuite de ce
traitement au-delà de cette période initiale doit être basée sur la
Vernakalant 3 mg/kg sur 10 min 2 mg/kg i.v. sur
10 min
confrontation du risque thromboembolique et du risque hémor-
ragique évalué par les scores CHADS2 et CHA2 DS2 VASC et HAS
i.v. : par voie intraveineuse ; p.o. : per os. BLED (Tableau 12, Fig. 14).

Figure 15. Arbre décisionnel.


FA pour cardioversion Modalités du traitement anticoa-
gulant dans la fibrillation atriale.
FA : fibrillation atriale ; ETO : écho-
graphie transœsophagienne ; AG :
FA de durée < 48 h auricule gauche ; RS : rythme
sinusal ; FRTE : facteurs de risque
thromboembolique.
Oui Non a L’anticoagulation doit norma-

lement être continuée pendant


Héparine Anticoagulation quatre semaines après la cardio-
conventionnelle ou ETO version sauf lorsque la fibrillation
atriale est de début récent et pas
de FRTE.
b Anticoagulants oraux en cas de

Traitement anticoagulant Stratégie guidée présence de facteurs de risque


oral pendant 3 semaines par ETO d’accident vasculaire cérébral
et/ou risque de récurrence élevé
de fibrillation atriale, ou de
présence de thrombus.
Absence Thrombus
Héparine
thrombus AG AG

Cardioversion Cardioversion Opter pour Anticoagulation


contrôle orale à dose
fréquence thérapeutique
ventriculaire pendant 3
RS FA RS FA semaines

FRTE Anticoagulation pendant


Oui 4 semaines a

Non
Considérer une anticoagulation à long terme si indiquée b

Pas de traitement anticoagulant oral à


FRTE Traitement anticoagulantoral à long terme
long terme

EMC - Urgences 11
24-112-C-15  Troubles du rythme cardiaque

Tableau 12. Tableau 13.


Recommandations pour la prescription d’un traitement anticoagulant au Prise en charge des patients présentant une tachycardie ventriculaire.
décours d’une cardioversion pharmacologique ou électrique.
Type de TV Prise en charge Niveau
Pour les patients présentant une FA > 48 h, ou de durée IB de preuve
non connue, un traitement par AVK 3 semaines avant
TV soutenue CEE si mauvaise tolérance IC
et 4 semaines après la cardioversion est recommandé,
monomorphe Amiodarone 300 mg i.v. puis IIa C
quelle que soit la méthode de cardioversion
150 mg sur 1 h IIb C
(pharmacologique ou électrique)
Lidocaïne (contexte SCA) 1 à
Pour les patients présentant une FA et nécessitant une IC 1,5 mg/kg
cardioversion immédiate en urgence pour instabilité
TV soutenue répétée Amiodarone i.v. IIa C
hémodynamique, un traitement par HNF en bolus puis
Bêtabloquant i.v. IIa C
i.v. ou HBPM ajusté au poids est recommandé
TV polymorphe CEE si mauvaise tolérance IB
Après une cardioversion en urgence pour une FA de IB
Bêtabloquant i.v. IB
durée > 48 h ou de durée non connue, un traitement
Amiodarone i.v. IC
anticoagulant par AVK doit être poursuivi pendant
Coronarographie II B
4 semaines
Lidocaïne
Pour les patients présentant une FA de durée < 48 h, IIb C
sans facteur de risque thromboembolique, HNF, TV : tachycardie ventriculaire ; CEE : choc électrique externe ; SCA : syndrome
HBPM, peut être considéré en péricardioversion sans coronarien aigu ; i.v. : par voie intraveineuse.
anticoagulation en post CV

FA : fibrillation atriale ; AVK : antivitamines K ; HNF : héparine non fractionnée ;


i.v. : par voie intraveineuse ; HBPM : héparine de bas poids moléculaire ; CV :
 Prise en charge
cardiovasculaire. d’une tachycardie ventriculaire
Le diagnostic est posé sur l’examen d’un ECG 12 dérivations,
Prise en charge à moyen terme d’un D II long, et dans certaines situations après manœuvre vagale
Le rétablissement du rythme sinusal par cardioversion phar- et/ou injection d’adénosine bi- ou triphosphate, uniquement si
macologique ou électrique permet de discuter de l’introduction hémodynamique stable.
d’un traitement antiarythmique pour maintenir le rythme sinu- La tolérance est essentiellement appréciée sur les paramètres
sal. L’introduction d’un traitement anti-antiarythmique doit tenir cliniques (niveau de conscience, fréquence cardiaque, fréquence
compte de l’existence d’une cardiopathie structurale sous-jacente. respiratoire), et l’existence de signes d’insuffisance cardiaque, de
L’ablation de la FA par radiofréquence permet en théorie au prix choc cardiogénique ou d’ischémie myocardique.
d’une à plusieurs séances d’ablation de traiter radicalement la FA. On distingue deux grandes situations :
Ce geste est actuellement réservé aux patients restant symp- • tachycardie ventriculaire avec instabilité hémodynamique ;
tomatiques malgré un traitement antiarythmique maximal ou • tachycardie ventriculaire bien tolérée sur le plan hémodyna-
toléré. mique.

Tachycardie ventriculaire avec instabilité


 Tachycardie jonctionnelle hémodynamique
Une TV d’emblée syncopale, compliquée d’un arrêt cardio-
Prise en charge respiratoire, d’un état de choc ou d’une mauvaise tolérance
La prise en charge initiale est guidée par la tolérance clinique qui hémodynamique impose d’emblée en association avec les
doit être évaluée rapidement sur des paramètres cliniques simples manœuvres de réanimation la réalisation d’une cardioversion par
tels que l’état de conscience, le score de Glasgow, saturation, et choc électrique externe permettant en général et le plus souvent
pression artérielle. de rétablir un rythme régulier sinusal (Tableau 13).
En cas de mauvaise tolérance hémodynamique, un choc élec-
trique externe (CEE) sera nécessaire après une courte sédation. Tachycardie ventriculaire bien tolérée
sur le plan hémodynamique
Prise en charge immédiate Lorsque la tachycardie ventriculaire reste bien tolérée sur le plan
Si l’épisode est bien toléré, les manœuvres dites vagales doivent hémodynamique, il est alors licite de tenter une cardioversion par
être utilisées de première intention et reposent sur l’utilisation voie pharmacologique. Le tableau décrit les différentes options
isolée ou conjuguée du massage sinocarotidien, de la compression thérapeutiques envisageables (Tableau 13).
des globes oculaires, ou de la manœuvre de Valsalva [2] .
Ces manœuvres entraînent une augmentation transitoire du Prise en charge ultérieure
tonus parasympathique vagal pouvant entraîner un blocage de
la conduction et stopper par ce biais la tachycardie. Une fois la prise en charge initiale réalisée et le patient sta-
Les agents médicamenteux peuvent être utilisés de première bilisé, le patient doit être transféré en unité de soins intensifs
intention en cas d’épisode mal toléré, ou secondairement en cas cardiologiques pour surveillance et réalisation du bilan étiolo-
d’échec des manœuvres vagales. Elles reposent essentiellement sur gique (Tableau 14).
l’utilisation d’agent vagolytique tel que l’acide adénosique bi- ou Les objectifs essentiels de cette prise en charge sont de :
triphosphate ou d’un inhibiteur calcique bradycardisant tel que • réaliser un bilan étiologique à la recherche d’une cardiopa-
le vérapamil. thie structurale sous-jacente (cardiopathie ischémique, dilatée,
hypertrophique, dysplasie ventriculaire droite arythmogène) ;
• discuter la mise en place d’une thérapeutique préventive
Prise en charge à distance soit par traitement médical, implantation d’un défibrillateur
implantable (DAI), ou discussion d’une ablation par cathéter
Après retour en rythme sinusal par manœuvre vagale ou injec- de la zone de tachycardie ventriculaire.
tion d’un agent pharmacologique, un traitement antiarythmique L’orientation entre ces différentes stratégies thérapeutique et de
peut être introduit (bêtabloquants, inhibiteurs calciques bradycar- prévention dépend grandement de la gravite de l’épisode initial
disants). et de la cardiopathie documentée.

12 EMC - Urgences
Troubles du rythme cardiaque  24-112-C-15

Tableau 14. Tableau 15.


Prise en charge et évaluation d’un patient présentant une tachycardie Prise en charge d’une torsade de pointe.
ventriculaire.
Recommandation Niveau
Antécédents Cardiopathie connue ?, facteurs de risque de preuve
cardiovasculaire, syncope ou lipothymie,
Arrêt de tout traitement associé avec allongement du QT IA
palpitations, lien avec l’effort
Corrections des désordres hydroélectrolytiques IA
Antécédents familiaux Mort subite familiale, cardiomyopathie,
cardiopathie ischémique Sonde d’entraînement électrosystolique temporaire ou IA
permanente si TDP due à une bradycardie ou BAV
Traitements Antiarythmique, traitement interférant
avec le QT Sulfate de magnésium i.v. si QT long et rares épisodes de II B
TDP
Examen physique Éléments en faveur d’une
cardiomyopathie TDP : torsade de pointes ; BAV : bloc auriculoventriculaire, i.v. : intraveineuse.
ECG 12 dérivations Onde Q, intervalle QT, sus-décalage ST
V1-V3, repolarisation précoce, onde
epsilon ment ST de V 1 à V 2 (anomalie de type 1), mesurant au moins
Échographie cardiaque MVG, FEVG, pressions de remplissage,
2 mm dans au moins une de ces deux dérivations, élément diag-
transthoracique fonction valvulaire, PAPs nostique central que cette anomalie soit présente spontanément
ou survenant après un test de provocation après administration
Examen biologique Électrolytes, fonction rénale
d’un antiarythmique de classe 1.
Test d’effort Recherche d’arguments en faveur d’une Il est important de réaliser plusieurs ECG en position standard,
ischémie inductible mais aussi en déplaçant les électrodes aux deuxième, troisième et
Coronarographie Bilan d’une dysfonction VG, bilan au quatrième espaces intercostaux permettant parfois de démasquer
décours d’un SCA cette anomalie.
IRM cardiaque Recherche d’arguments en faveur d’une Il atteint de manière prédominante l’homme entre 30 et
myocardique, d’un IDM 40 ans. Cet aspect ECG est variable dans le temps et peut
sous-endocardique, d’une sarcoïdose, être majoré ou provoqué lors de l’administration à titre diag-
amylose nostique d’un traitement bloqueur des canaux sodium tel que
Test génétique l’ajmaline, la flecaïne ou le procaïnamide. La présentation cli-
Stimulation ventriculaire Stratification du risque nique est variable allant des formes asymptomatiques découvertes
programmée de manière fortuite, en passant par la syncope ou l’arrêt cardia-
que.
ECG : électrocardiogramme ; MGV : masse ventriculaire gauche ; FEVG : fraction Ce syndrome est lié à une perte de fonction du canal sodique
d’éjection ventriculaire gauche ; PAPs : pression artérielle pulmonaire systo- SCN5a pour laquelle sept mutations ont été pour le moment mises
lique ; VG : ventricule gauche ; SCA : syndrome coronarien aigu ; IRM : imagerie
par résonance magnétique ; IDM : infarctus du myocarde. en évidence.
Le défibrillateur automatique implantable (DAI) est actuelle-
ment la seule thérapeutique ayant prouvé son efficacité dans cette
Le bilan comporte outre un bilan métabolique, une échogra- pathologie. Elle est proposée chez les patients ressuscités ou ayant
phie cardiaque, une imagerie par résonance magnétique (IRM) présenté une TV avec ou sans syncope. Il n’est pas indiqué chez
cardiaque et une coronarographie. La stimulation ventriculaire les patients asymptomatiques.
programmée est discutée au cas par cas [3] .

Tachycardie ventriculaire catécholergique


Étiologies des tachycardies ventriculaires polymorphe
Les TV peuvent survenir ou être associées à une cardiopathie Il s’agit d’une affection rare touchant 0,1 naissance sur 1000. Le
structurale sous-jacente dont la plus fréquente est représentée diagnostic est posé chez des patients sans cardiopathie structurale
par la cardiopathie ischémique. Les TV peuvent aussi survenir en sous-jacente, présentant un ECG de repos normal et des épisodes
l’absence de cardiopathie sous-jacente [4] . de TV à l’exercice, des ESV polymorphes ou une TV chez un patient
de moins de 40 ans.
Syndrome du QT long La prise en charge et le traitement préventif reposent sur une
Le syndrome du QT long est défini sur l’ECG par un allon- limitation des efforts physiques, une diminution de l’exposition
gement significatif de l’intervalle QT corrigé (QTc) supérieur à au stress et sur la prescription en première ligne d’un traitement
440 ms chez l’homme et 460 ms chez la femme, associé ou non à bêtabloquant dénué d’activité sympathomimétique intrinsèque
des modifications de la repolarisation et de l’onde T. La prévalence (nadolol).
de cette anomalie est de 1 pour 2000 naissances. La morpholo- Un DAI peut être discuté chez les patients ayant présenté un
gie cardiaque analysée en échographie cardiaque est en général arrêt cardiocirculatoire, des syncopes récidivantes, persistance de
normale, ainsi que sur le plan histologique. TV malgré un traitement médical bien conduit.
Les principales manifestations cliniques sont la syncope, l’arrêt
cardiaque ou la mort subite liées à une torsade de pointes. Syndrome du QT court
Le diagnostic repose essentiellement sur la mesure de
l’intervalle QT et sa correction par le QTc en général par la for- Il est diagnostiqué devant la présence d’un QTc inférieur
mule de Bazett après exclusion des causes habituelles associées ou égal à 330 ms. Le DAI est proposé chez les patients
à un allongement du QT (Tableau 15). On distingue le QT long porteurs de l’anomalie et ayant été victimes d’un arrêt car-
acquis en général lié à un allongement du QT secondaire à la diaque et ou ayant présenté une TV documentée avec ou sans
prise d’un traitement des QT longs congénitaux. Les grandes syncope.
lignes de la prise en charge en urgence sont décrites dans le
tableau. Syndrome de repolarisation précoce
Le diagnostic est posé devant l’association d’une élévation du
Étiologies point J supérieure ou égale à 1 mm dans deux dérivations conti-
guës inférieure et/ou dérivation latérale chez un patient ayant
Syndrome de Brugada présenté une fibrillation ventriculaire ou une TV polymorphe.
Le syndrome de Brugada est caractérisé par une déformation Le diagnostic peut être évoqué en présence de ces modifications
du segment ST se traduisant par un sus-décalage en dôme du seg- de l’ECG chez un patient asymptomatique.

EMC - Urgences 13
24-112-C-15  Troubles du rythme cardiaque

Cette anomalie est présente chez 1 à 13 % des sujets en popula- [2] Blomström-Lundqvist C, Scheinman MM, Aliot EM, Alpert JS,
tion générale et dans 15 à 70 % des cas de fibrillation ventriculaire Calkins H, Camm AJ, et al. ACC/AHA/ESC guidelines for the
idiopathique. management of patients with supraventricular arrhythmias--executive
summary. a report of the American college of cardiology/American
heart association task force on practice guidelines and the Euro-
Déclaration de liens d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts pean society of cardiology committee for practice guidelines (writing
en relation avec cet article. committee to develop guidelines for the management of patients
with supraventricular arrhythmias) developed in collaboration with
NASPE-Heart Rhythm Society. J Am Coll Cardiol 2003;42:1493–531.
[3] Proclemer A, Dagres N, Marinskis G, Pison L, Lip GY,
 Références Blomstrom-Lundqvist C, et al. Current practice in Europe: how do we
manage patients with ventricular tachycardia. European Heart Rhythm
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S. Ederhy (stephane.ederhy@sat.aphp.fr).
Service de cardiologie, Hôpital Saint-Antoine, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75012 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Ederhy S. Troubles du rythme cardiaque. EMC - Urgences 2018;13(1):1-14 [Article 24-112-C-15].


Pour citation, ne pas utiliser la référence ci-dessus de cet article, mais la référence de la version originale publiée dans EMC – Médecine d’urgence
2017;12(2):1-14 [25-020-B-60].
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/S1959-5182(17)58699-7

Disponibles sur www.em-consulte.com


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