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UNE APPROCHE PSYCHODYNAMIQUE DES TROUBLES

SPÉCIFIQUES DES APPRENTISSAGES


Anne Brun, Frédérik Guinard

ERES | « Nouvelle revue de psychosociologie »

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2015/2 N° 20 | pages 77 à 96
ISSN 1951-9532
ISBN 9782749248141
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psychosociologie-2015-2-page-77.htm
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Pour citer cet article :


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Anne Brun, Frédérik Guinard« Une approche psychodynamique des troubles
spécifiques des apprentissages », Nouvelle revue de psychosociologie 2015/2 (N°
20), p. 77-96.
DOI 10.3917/nrp.020.0077
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Une approche psychodynamique
des troubles spécifiques des apprentissages

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Anne Brun, Frédérik Guinard
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« Ces enfants au carrefour de toutes nos théories nous lancent un défi


passionnant et nous invitent à mieux comprendre, en nous aussi,
les rapports de la vie affective et de la connaissance. »
Flagey (1996)

Les difficultés d’apprentissage observées chez l’enfant dans un cadre


scolaire constituent un objet traditionnel de la psychopathologie clinique
et de la psychopédagogie. Dans le cadre des rased 1 à l’école primaire, en
centre médico-psychologique ou en cabinet libéral, l’accueil et l’accom-
pagnement des jeunes en difficulté scolaire effectués par des générations
successives de psychologues cliniciens et de psychanalystes depuis le
début du xxe siècle ont permis d’élaborer progressivement une lecture
clinique assez fine des enjeux affectifs à l’œuvre dans la psychopatholo-
gie des apprentissages et dans le développement cognitif de l’enfant 2. En

Anne Brun, professeur de psychopathologie et psychologie clinique, directrice


du Centre de recherches en psychopathologie et psychologie clinique (crppc),
université Lyon 2. annebrunlyon@orange.fr
Frédérik Guinard, psychologue clinicien, doctorant en thèse de psychopathologie
et psychologie clinique, université Lyon 2. frederik.guinard@univ-lyon2.fr
1. Réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté.
2. Voir, entre autres contributions, celles de Freud, 1909 ; Klein, 1923 ;
Saussure, 1932 ; Ajuriaguerra, 1951 ; Diatkine, 1972 ; Flagey, 1977 ; Birraux,
2001 ; Berger, 2006 ; Catheline, 2012 ; Ciccone, 2013 et Chagnon, 2014.

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parallèle de ces travaux se situent les apports décisifs de la psychologie


du développement (un temps appelé « psychologie génétique ») avec
l’importance des modélisations de chercheurs comme Piaget, Vygotski et
Binet sur le fonctionnement intellectuel de l’enfant.
Dans ce paysage scientifique de la fin des années 1980, l’arrivée
de la désignation diagnostique « troubles spécifiques des apprentissages
scolaires », objet des neurosciences cognitives, est venue considérable-
ment mettre en tension les modèles existants de compréhension des diffi-
cultés d’apprentissage sur le plan des théories du développement affectif

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et cognitif de l’enfant, sur le plan des méthodologies d’accompagnement
et de prise en charge, ainsi que sur le plan politique, social et économique.
Après un bref rappel des enjeux scientifiques de ce débat contem-
porain entre les travaux des neurosciences et les recherches psychana-
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lytiques concernant le champ des apprentissages, cet article montrera,


à l’appui d’une situation clinique, qu’une approche psychodynamique se
basant sur l’utilisation de médiations thérapeutiques rend possibles non
seulement une autre lecture de ces troubles instrumentaux, mais aussi,
à la faveur d’une mobilisation de la symbolisation primaire, une améliora-
tion de leur prise en charge.

Enjeux scientifiques et débats autour des troubles spécifiques des


apprentissages

La catégorie des « troubles spécifiques des apprentissages » concerne


tout trouble instrumental affectant la mise en place et le bon fonction-
nement d’apprentissages comme le langage oral, la lecture, l’écriture,
le calcul, mais aussi les fonctions exécutives (Moret et Mazeau, 2013).
Le vocable « spécifique » renvoie directement à une étiologie définie par
la négative : ces troubles ne doivent avoir comme « cause primaire » ni
un retard global, ni un handicap sensoriel, ni un environnement familial
défavorable, ni des troubles mentaux avérés, ils ne seraient dus qu’à des
facteurs intrinsèques au sujet, c’est-à-dire à une origine neurobiologique
(Rutter, 1989 ; Fletcher et coll., 2004). Ces critères 3, qui excluent tout
effet de l’environnement sur l’émergence des troubles des apprentissages
affectant l’enfant dans ses acquisitions cognitives et sa progression
scolaire, se situent d’emblée dans une antinomie manifeste avec les
théories psychanalytiques sur la psychopathologie des apprentissages ;
tant et si bien que la prise en compte de cette définition de troubles
« spécifiques » des apprentissages et son acception dans les recherches
en psychopathologie clinique constituent une vraie question, sujette à
débat, voire à controverses.

3. Ces critères se retrouvent dans la classification internationale des maladies, la


cim-10 (oms, 1994), et dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles
mentaux, le dsm-IV (American Psychiatric Association, 2004).

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Depuis l’inclusion de la « dyslexie de développement » dans la clas-


sification des maladies génétiques, le 7 mai 1997, puis la proposition
de considérer les troubles du langage comme un « handicap cognitif »
dans la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances
des personnes handicapées, l’augmentation des prises en charge spécia-
lisées en orthophonie ou en remédiation cognitive a été spectaculaire.
Passant en France d’au moins 9,2 millions d’actes 4 en 1993 à près de
17,4 millions d’actes 5 en 2010, les rééducations orthophoniques du
langage écrit, des troubles des fonctions exécutives et des dyscalculies,

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des retards de parole et du langage oral ont pratiquement vu leur nombre
doubler en l’espace de vingt ans. Ces approches spécialisées ont offert
de nouvelles perspectives à la prise en charge de la symptomatologie
scolaire des enfants en proposant des tests de repérage et de dépistage
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de la dyslexie, avant et après l’entrée dans la lecture, des propositions


rééducatrices, des programmes d’entraînement spécifique pour l’amélio-
ration de la conscience phonologique, de la mémoire, de l’acuité auditive
et visuelle, des repères temporo-spatiaux, etc. (Petiniot, 2012).
Ces « nouvelles 6 » techniques de prise en charge ont été accueillies
de manière mitigée par nombre de professionnels et d’équipes médico-
psychologiques qui déploraient dans cette approche les effets de simpli-
fication des symptômes présentés par l’enfant dans le cadre scolaire.
En effet, en se proposant de rééduquer « spécifiquement » ces troubles,
ceux-ci avaient de plus en plus tendance sur le terrain à être perçus et
traités comme des « processus sans sujets 7 », comme des phénomènes
sans histoire, sans signification et sans dimensions intersubjectives
et intrapsychiques. Dans sa note de lecture accompagnant l’expertise
collective de l’inserm « La dyslexie, la dysorthographie, la dyscalculie »,
Nicolas Georgieff remarquait que cette tendance à « subordonner de
manière réductrice la psychopathologie au fonctionnement cognitif »
pourrait se comprendre aussi comme une tentative de « contester la
subordination inverse et tout aussi réductrice des troubles des apprentis-
sages aux facteurs psychologiques » (2007, p. 817).
Par ailleurs, il faut remarquer que ces nouvelles modalités d’éduca-
tion et de soin se propagent et prospèrent dans un contexte social où
le discours dominant est celui d’une langue marchande, économique,

4. En 1993, 82,5 % des 11,1 millions d’actes effectués par les orthophonistes
concernent des clients âgés de moins de 16 ans (http://fulltext.bdsp.ehesp.fr/
Cnamts/PointStat/20/1.pdf).
5. Sources : tableau pages 12 et 13 de l’« Étude sur les champs d’interventions
des orthophonistes » : http://www.sante.gouv.fr/img/pdf/Etude_sur_le_metier_d_
orthophoniste.pdf
6. Serge Boimare (1999, p. 165-168) regrette que ces méthodologies ne soient
en réalité pas vraiment innovantes, mais présentées comme telles car ignorant
les outils traditionnellement utilisés en psychopédagogie depuis près d’un siècle.
7. Pour reprendre l’expression de Hegel, développée par Heidegger et Althusser,
reprise et conceptualisée par Roussillon (2015).

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scientiste 8. Dans ce climat singulier, il s’agit d’être attentif aux risques de


dérives de l’utilisation systématique 9 d’un paradigme qui pourrait devenir
un référentiel unique et de critiquer « sa méconnaissance de la psycho-
pathologie clinique, ses tendances parfois réductionnistes, sa prétention
déterministe linéaire, son essentialisme et sa croyance en une incurabi-
lité stricte, en dépit des avancées des neurosciences elles-mêmes qui
valorisent les notions de plasticité cérébrale et d’épigenèse interactive »
(Chagnon, 2014, p. 10-11).
Car une lecture attentive des travaux neuroscientifiques nous amène

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en effet à considérer que les recherches fondamentales qui sous-tendent
ces techniques de remédiation et de rééducation sont en réalité beau-
coup plus prudentes et nuancées qu’il n’apparaît, notamment sur la
question de leur causalité : en effet, si l’imagerie fonctionnelle ne laisse
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aucun doute aujourd’hui sur la localisation neurologique de troubles


instrumentaux comme la dyslexie de développement (Habib, 2004 ;
Ramus, 2005), de nombreuses interrogations subsistent encore sur les
liens entre ces anomalies neurologiques et les manifestations sympto-
matiques présentées par les enfants et les caractéristiques culturelles
du modèle d’écriture concerné (Dehaene, 2007). Plus encore, les cher-
cheurs qui s’intéressent aux mécanismes complexes du développement
cognitif élaborent aujourd’hui des modèles où « contraintes génétiques
et facteurs environnementaux sont intimement imbriqués » (Dworczak,
2004, p. 17) et s’intéressent aux premières interactions bébé-environne-
ment et au contexte d’émergence de ces troubles de la cognition et de la
construction des savoirs (Findji, Ruel, Pêcheux, 1999).
Si repérer une causalité unilatérale dans la compréhension des
troubles d’apprentissage n’est donc plus envisagé sérieusement par les
chercheurs en neurosciences, du moins en ces termes, c’est en revanche
profondément au travail dans les familles d’enfants en difficulté scolaire
et au sein des équipes pluridisciplinaires qui les accompagnent, mais
aussi chez les associations d’usagers et dans les médias, qui posent
encore « tel quel » le problème de la distinction entre ce qui serait dû à
l’hérédité d’une part et ce qui serait dû à l’éducation et à l’environnement
d’autre part 10. En opposant de manière simplificatrice hérédité et envi-

8. « Dans ces conceptions, la souffrance psychique est toujours une maladie,


jamais une expression de mal-être, et la visée de tout acteur du soin est la
“santé”, à un moindre coût » (Ciccone, 2015, p. 8).
9. Nous pourrions citer le rapport polémique de l’Inserm (2005) sur les troubles
des conduites et son utilisation démagogique à des fins électoralistes. Ce rapport
a conduit un certain nombre de professionnels de l’enfance à créer un collectif
« Pas de zéro de conduite » qui a produit plusieurs travaux (2006, 2008)
dénonçant les modalités d’organisation, les résultats et les effets sur l’opinion de
ce type de rapport.
10. Sur son site internet, la Fédération française des « dys » présente délibérément
les « troubles dys » comme « innés » tout en reconnaissant que, éventuellement,
« certains enfants victimes d’un traumatisme crânien » pourraient également

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ronnement, avec l’implicite que plus un trait serait héritable, au sens de


génétiquement transmis, moins il serait modulable par l’environnement,
cette tendance réductionniste produit d’importantes contradictions épis-
témologiques 11 lorsqu’elle se met en œuvre de présenter et d’expliquer
ces troubles dits « spécifiques » au grand public, aux politiques ou aux
professionnels de l’éducation.

Évolutions paradigmatiques de la psychanalyse vers de nouveaux


dispositifs-cadres

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De manière moins spectaculaire que l’arrivée des neurosciences dans
le paysage scientifique et politique contemporain, la méta­ psychologie
psychanalytique s’est vue profondément revisitée, depuis une trentaine
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d’années, sous l’influence de nouvelles pratiques auprès de situations


cliniques dites « extrêmes », mais aussi au contact d’autres champs
disciplinaires (travaux de l’école Palo-Alto, des théoriciens de l’attache-
ment, des sciences sociales ou encore de l’éthologie…). Cette progres-
sive transformation de la théorie psychanalytique, de ses modélisations à
partir de la pratique et de ses explorations du côté des champs connexes
ou étrangement familiers (citons aussi la littérature, le cinéma, la pein-
ture…) est particulièrement méconnue chez les opposants d’une psycha-
nalyse décrite comme datée et dépassée.
Dans les contextes de l’accompagnement clinique en libéral, de l’ac-
cueil en psychiatrie ou des prises en charge médico-sociales, les dispo-
sitifs « classiques » d’orientation psychanalytique ont fait preuve de leur
efficacité thérapeutique 12. Cependant, ces dispositifs standards, consis-
tant principalement en des accompagnements individuels ou familiaux,
présentent des limites dès lors que le clinicien intervient, par exemple,
auprès d’enfants autistes, d’adultes psychotiques, de personnes en
errance ou incarcérées. Auprès de ces cliniques « extrêmes », ou « situa-
tions limites de la subjectivité », selon la terminologie de René Roussillon

présenter des troubles cognitifs spécifiques touchant leurs capacités d’appren­


tissage. http://www.ffdys.com/troubles-dys/nature-des-troubles/introduction.htm
(mise à jour du 10 juillet 2015).
11. Il y a aujourd’hui un hiatus important entre une approche scientifique « neuro-
développementale » qui met de côté une définition innéiste des troubles spécifiques
des apprentissages et une perspective idéologique et scientiste – se réclamant d’une
approche scientifique –, qui continue à nier ou à minimiser le rôle de l’influence
environnementale (psychologique, pédagogique, sociale) sur ces troubles, ignorant
manifestement l’existence de « travaux menés sur d’autres espèces qui ont montré
que des traits fortement héritables ou héréditaires sont particulièrement sensibles
aux effets de l’environnement » (Dworczak, 2004, p. 217).
12. Lire à ce sujet l’important article du journal de l’Association médicale
américaine consacré à l’étude de l’efficacité des psychothérapies analytiques
chez les patients traités pour des troubles mentaux complexes qui s’est appuyé
sur cinquante années de données médicales (Glass, 2008).

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(1999), les dispositifs de soin articulés autour d’un medium (comme la


peinture, le modelage, la musique, l’eau, la danse, etc.) se sont avérés
très pertinents, même si l’utilisation de ces media ne saurait être théra-
peutique en soi, car elle nécessite la construction d’un cadre-dispositif
spécifique 13.
L’originalité de ces médiations thérapeutiques consiste à permettre
aux patients en difficulté majeure avec la symbolisation d’engager un
travail de figuration à partir des qualités sensorielles d’un « medium
malléable 14 » dont la manipulation s’inscrit dans une dynamique transfé-

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rentielle où entre en jeu la sensori-motricité. Le clinicien doit alors opérer
une extension de sa capacité d’écoute à la prise en compte de ce langage
mimo-gesto-postural et se centrer sur l’associativité propre au langage
du corps et de l’acte. Dans leur Manuel des médiations thérapeutiques,
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Anne Brun, Bernard Chouvier et René Roussillon (2013) ont récemment


proposé la modélisation d’une métapsychologie des médiations thérapeu-
tiques, qui s’inscrit dans le cadre de ces changements épistémologiques
majeurs de la psychanalyse.
Dans le cadre de ces dispositifs thérapeutiques, des expériences
primitives non symbolisées vont pouvoir se figurer et se mettre en sens
pour le patient par l’intermédiaire d’une appropriation subjective de
celles-ci. Ce sont ces expériences primitives catastrophiques qui vont se
réactiver dans les groupes auprès d’enfants psychotiques (Brun, 2007)
où la sensorialité du medium va permettre d’enclencher un processus
de réactualisation d’éprouvés somato-psychiques impensables, souvent
d’ordre agonistique 15. Il s’agit par exemple d’angoisses de chute sans
fin, de liquéfaction, de tomber en morceaux, de se répandre dans

13. Ce recours aux médiations est ancien dans l’histoire du soin, notamment
en psychothérapie psychanalytique d’enfants. Cependant, la théorisation
comme la pratique de ces médiations avaient été jusque-là négligées par les
psychanalystes : les groupes à médiation sont souvent animés par des infirmiers,
des éducateurs, des « art-thérapeutes », encore trop peu par des psychologues
référés à l’épistémologie psychanalytique, même si cela évolue actuellement – en
témoignent par exemple les nombreux travaux de recherche initiés ces dernières
années par les doctorants et les enseignants-chercheurs du Centre de recherches
en psychopathologie et psychologie clinique de l’université Lumière Lyon 2 sur
les médiations thérapeutiques.
14. La psychanalyste Marion Milner souligne la manière dont l’enfant en psycho-
thérapie utilise des jouets, des objets ou des matériaux divers, comme l’artiste
utilise un « medium malléable ». Ce concept de « medium malléable » fut intro-
duit par Marion Milner en 1950, puis prolongé et renouvelé par René Roussillon
à partir de 1991.
15. Winnicott (1974) dénomme « agonies primitives » les angoisses inimaginables
du bébé, « terreurs sans nom » (Bion, 1967), terreurs extrêmes, sans fin et sans
limites où le sujet n’a d’autre solution que de se retirer de l’expérience afin de
pouvoir survivre. Ces expériences primitives catastrophiques n’ont donc pu être
représentées, jamais figurées, car elles n’ont en quelque sorte pas été éprouvées
par le sujet.

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l’espace, d’angoisses d’explosion, d’aspiration, de vidange… Winnicott


(1974) a insisté sur la nécessité de symboliser après coup ces agonies
primitives en favorisant leurs conditions d’émergence dans le transfert.
Par rapport au cadre de la cure classique, la spécificité de la symboli-
sation dans les médiations thérapeutiques consiste donc à s’effectuer
à partir du registre sensori-moteur et dans le lien transférentiel au
medium, à la fois matériau et thérapeute. C’est le transfert qui donnera
un sens à ces expériences impensables, d’ordre corporel et affectif.
Dans cette perspective et pour revenir à la question des difficul-

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tés instrumentales chez l’enfant, nous allons examiner tout l’intérêt
de cette démarche psychanalytique lorsqu’elle s’intéresse aux sujets
« troublés » dans leurs apprentissages, ainsi qu’à la question de leur
accompagnement.
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Entendre et accompagner l’enfant en deçà des difficultés


actuelles d’apprentissage

Une série d’expériences d’apprentissages préexiste nécessairement


aux troubles instrumentaux qui sont repérés sur le plan des apprentis-
sages dits « scolaires » : lorsqu’il commence à apprivoiser la lecture
ou l’écriture, l’enfant a déjà réalisé d’importants apprentissages (la
marche, la propreté, la parole, pour les plus remarquables) ainsi que de
nombreuses conquêtes cognitives qui, de jeux en découvertes (reconnais-
sance d’animaux, apprentissage par cœur de petites comptines, asso-
ciation de mots, reproduction de rythme, etc.), lui ont permis d’arriver à
une autonomie suffisante pour qu’une inscription à l’école devienne envi-
sageable. Cette mise en perspective d’apprentissages préscolaires, ryth-
miques, psychomoteurs et langagiers avec les apprentissages scolaires,
pédagogiques, comportementaux et déclaratifs, permet de reconsidérer le
processus de développement intellectuel dans le contexte d’un processus
de subjectivation et d’une relation d’apprentissage 16.
L’observation clinique des enfants en échec scolaire nous conduit en
effet à repérer un vaste champ de troubles touchant à des degrés divers
et de manière plurimodale plusieurs domaines de fonctions cognitives
(Habib, 2004, p. 220 ; Berger, 2006, p. 196). Mais ces symptômes,
qui polarisent à juste titre toute l’attention des parents et des équipes
pédagogiques qui prennent en charge ces enfants, sont souvent accom-
pagnés chez les enfants par des phénomènes moins remarqués, mais
tout aussi inquiétants : un appauvrissement de leur capacité de pensée

16. Cette expression que nous empruntons aux remarquables travaux des
équipes de la Tavistock Clinic sur cette question (Youell, 2006) se démarque de la
préoccupation obsessive de la psychiatrie médicalisée de déterminer une origine
causale aux difficultés d’apprentissage pour adopter le positionnement autrement
plus fécond et complexe de la psychopathologie clinique qui intègre les dimen-
sions d’intersubjectivité et de négativité des processus (Chagnon, 2014, p. 28).

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métaphorique, une pauvreté fantasmatique, une incapacité de repré-


senter les affects à travers le langage ou d’autres moyens symboliques
(Flagey, 1977 dans Chagnon, 2014, p. 38) et une restriction de leur
curiosité envers les objets d’apprentissage, l’ensemble de ces caracté-
ristiques se verrouillant dans des « peurs d’apprendre » (Boimare, 1999)
et des comportements anti-apprentissages, entravant à la source tout
mouvement spontané et actif en direction de nouvelles expériences.
La situation d’un enfant pris en charge pour des troubles spécifiques
des apprentissages va nous permettre d’illustrer la manière dont une

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approche psychodynamique vient éclairer ces comportements qui réguliè-
rement mettent en échec les tentatives de remédiation orthophonique en
touchant aux dimensions fondamentales du plaisir d’apprendre.
André a 10 ans lors de son arrivée au sessad 17. Ses parents sont
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séparés depuis cinq ans et la mère (45 ans) nous déclare qu’elle n’a pas
« refait sa vie », car elle se consacre énormément à son travail. Son
père (55 ans) travaille dans le secteur du tourisme à plusieurs centaines
de kilomètres de là. Après un bilan orthophonique sont diagnostiquées
chez André une dyslexie-dysorthographie importante et des difficultés à
automatiser la reconnaissance de sons à l’oral et à l’écrit. En parallèle de
ces troubles spécifiques d’apprentissage qui ont motivé la demande de
prise en charge en sessad via la mdph et la demande parentale, d’autres
difficultés scolaires sont repérées chez André : identifiées aussi bien en
individuel qu’en groupe-classe, elles se traduisent par des refus de travail-
ler, de l’exubérance, de l’insolence parfois qui obligent les intervenants à
le « recadrer ». André est un enfant qui est aussi décrit comme « à fleur
de peau » : sont évoqués des troubles de l’alimentation, de l’anxiété et
de nombreux tics (cligne des yeux, tord la bouche).
À la suite d’une période d’observation durant laquelle André fera
connaissance avec les professionnels intervenant au sessad, nous lui
proposons de participer à un groupe « peinture » coanimé par une éduca-
trice spécialisée et un psychologue clinicien 18. Le groupe peinture est
composé de quatre préadolescents. Nous leur proposons dès la première
séance de construire leur propre support de peinture en utilisant un grand
rouleau de toile de lin et des châssis en bois. Ils peuvent ainsi choisir
la taille de leur future toile et commencer le groupe par la construction
de leur support. Il s’agit de couper une surface de toile et de l’agrafer
sur un cadre vide. Nous les invitons ensuite à peindre avec les couleurs

17. Service éducatif spécialisé et de soin à domicile (accompagnement


pluridisciplinaire sur notification de la Maison départementale de la personne
handicapée).
18. Cette expérience groupale présentée par Frédérik Guinard sera plus longue-
ment développée dans son travail de thèse de psychologie et psychopathologie
clinique : « Troubles des apprentissages de l’enfant en période de latence. Intérêt
thérapeutique des groupes à médiation », sous la direction d’Anne Brun, univer-
sité Lumière Lyon 2.

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Une approche psychodynamique des troubles spécifiques des apprentissages 85

acryliques que nous avons disposées au centre de la pièce et en utilisant


les rouleaux, les pinceaux ou les éponges « comme ils le souhaitent »
pour créer un « tableau ». À la fin de chaque séance, nous encourageons
un temps de nettoyage des instruments, puis un temps de déambula-
tion parmi les toiles durant lequel ils ont la possibilité de s’exprimer au
sujet des toiles des autres (nous sommes attentifs à rappeler que nous
ne devons pas être dans le jugement des toiles exposées, ils sont invi-
tés à dire à voix haute ce que ces toiles leur évoquent). Tout au long
du groupe, ils sont libres de terminer à tout moment leur tableau et de

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changer de toile.
Lors de la première séance, André va discrètement chercher dans
une autre salle un crayon de papier, une gomme et une règle, alors que
nous n’avions mis à disposition que de la peinture et des pinceaux. Sur
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sa toile de lin, il commence à tracer les contours d’une guitare, mais ne


parvient pas à avancer, cela ne lui convient pas… Il ne cesse de gommer
ce qu’il fait, ce qui, sur la toile de lin, produit de grandes traces grises.
Les autres enfants ont tous commencé à peindre. Lors de la deuxième
séance, il remplit sa palette d’une couleur jaune orangé et en remplit les
trois quarts de sa toile, recouvrant ainsi le dessin au crayon de la guitare.
Il fait gicler de la peinture sur les murs qui ne sont pas protégés, sur les
fauteuils du bureau et même, à la fin de la séance, sur la tête de l’édu-
catrice. Il peint à la fois sur sa toile et sur la bâche autour de sa toile. Il
utilise tellement de peinture que tout son espace devient poisseux et que
la peinture passe au travers de la bâche protectrice sur le mur. Ainsi il
vide à lui seul tout un tube de jaune qui était prévu pour tout le groupe
et pour plusieurs séances. Il n’ajoute que très peu d’eau à sa peinture
et il ne parvient pas à remplir totalement son fond malgré la quantité
impressionnante de peinture employée. Il finit la séance avec les mains
« pleines de jaune ».
Tout l’enjeu du travail en médiation thérapeutique se retrouve
bien dans ces séances où la médiation peinture se révèle un « medium
malléable » tel que Marion Milner l’a défini, comme désignant à la fois le
matériau, la matière et le thérapeute. Le thérapeute est le représentant
du medium, comme le medium est le représentant du thérapeute. Le
medium malléable renvoie donc conjointement à la matérialité du cadre
et à la dimension transférentielle. Le travail avec ce medium malléable
va permettre l’émergence et la mise en forme de protoreprésentations,
qui renvoient à une inscription des premières expériences de la rela-
tion à l’objet-environnement, expériences d’ordre sensoriel et affectif.
Ces protoreprésentations se caractérisent par une indissociabilité entre
corps, psyché et monde, ou entre espace corporel, espace psychique et
espace extérieur. C’est la façon dont Piéra Aulagnier (1975) définit les
pictogrammes, proches aussi des formes autistiques décrites par Frances
Tustin (1984). Dans les médiations picturales, on pourrait les caractériser
par exemple comme une « sensation main agrippée à la feuille », chez

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des enfants qui ne peuvent que faire de la peinture au doigt en restant


longtemps collés à la feuille, une « feuille/peau caressée » ou encore un
« moi/pinceau englouti dans la peinture » (Brun, 2007). Avec la consti-
tution de son fond jaune, André vient nous traduire en gestes/sensations
la question de la rencontre avec l’environnement primaire autour d’une
expérience de débordement : dans un premier temps, il n’est pas là où les
adultes l’attendent, il utilise un crayon, alors qu’il ne lui était présenté que
de la peinture. Puis il y a du « trop », le fond de son tableau déborde de
matière, submerge le lien à l’autre, il y en a tant qu’il existe une grande

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porosité entre la forme et le fond… Tout devient indistinct et les protec-
tions que nous avions installées pour éviter de tacher le mur se gorgent
de cette matière pâteuse.
Au début de la quatrième séance, j’ai l’impression qu’à l’image des
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autres enfants du groupe André va changer de toile pour en prendre une


autre, vierge. Mais, après avoir littéralement arraché la première toile
de son support en bois, il se met à la froisser, la déchirer ou la marquer
avec tout ce qui lui tombe sous la main. Avec l’éducatrice, nous avons
beaucoup de mal à le cadrer et nous lui rappelons qu’il peut faire ce
qu’il souhaite de sa toile du moment qu’il reste dans l’espace de groupe
(il veut l’emmener sur la route pour la frotter sur le goudron). Il laisse
tomber alors sa toile à terre et continue à la maltraiter durant toute la
séance devant les autres enfants qui rient tout en étant quand même
assez mal à l’aise.
Lors de la cinquième séance, en entrant dans la salle, André est
assez surpris et presque joyeux que – à l’instar de toutes les autres toiles
du groupe – nous ayons installé sa toile déchirée contre le mur. Il lance
de manière assez spontanée : « Noooon ? Mais j’avais fait n’importe
quoi ! », puis il reprend son attitude impertinente et emploiera toutes les
séances suivantes à poursuivre sa lente et impitoyable destruction.
À chaque séance, André continue ainsi d’abîmer sa toile. Il se met
d’abord en œuvre d’enfoncer la toile à l’intérieur d’un tube de range-
ment en plastique transparent, ajoute de la peinture, des objets divers et
referme le tout. Puis, il se met à abîmer le tube qui contient la toile en
le perçant de coups de ciseaux et d’agrafes. Il prend ensuite un bout de
la bâche de protection contre le mur et le scotche tout autour du tube.
Il mélange de grandes quantités de peinture pour recouvrir cet ensemble
d’une pâte épaisse et verdâtre. Il brise ensuite son châssis en plusieurs
morceaux pour le fixer par-dessus ce colombin. Parfois il lance celui-ci à
terre comme pour en tester sa fragilité (ou sa possibilité à tacher le sol
à notre insu). Nous le laissons patiemment se livrer à cette destruction
continue. Notre seule exigence est que sa création ne soit pas emportée
en dehors du groupe pendant son déroulement. André décidera finale-
ment de jeter sa création dans une poubelle lors de la dernière séance.
Au cours de cette expérience groupale, André a intensément mis au
travail nos capacités de verbalisation, de réflexivité et d’empathie… Nous

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Une approche psychodynamique des troubles spécifiques des apprentissages 87

avions mal pour lui, nous avions de la peine à mettre des mots sur ce qu’il
faisait subir à sa création et ce qu’il nous faisait éprouver comme affects
négatifs de rejet et d’agacement. En écoutant attentivement le prototype
de situation relationnelle qu’André nous proposait dans le transfert de
rejouer avec lui, de séance en séance, nous pouvons constater que la
question centrale qui est explorée par lui à l’occasion de ce groupe est
celle de sa destructivité et de la réponse de l’environnement à celle-ci.
La reviviscence de cette problématique archaïque, de prime abord décon-
certante chez un préadolescent au comportement globalement adapté, à

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l’intelligence normale et à la sensibilité artistique plutôt développée, attire
notre attention sur une période de la vie psychique du nourrisson où celui-
ci doit faire l’expérience d’un détruit-trouvé 19. Pendant cette période les
réponses que l’objet primaire apporte à la destructivité du sujet sont déter-
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minantes : si l’objet exerce des représailles, des rétorsions ou un retrait


en réponse aux mouvements pulsionnels de l’enfant, la destruction du lien
aura lieu et le narcissisme de l’enfant restera enfermé dans un fonctionne-
ment solipsiste. À l’inverse, si l’objet survit aux mouvements de destructi-
vité, s’il se montre atteint par ceux-ci sans se retirer de la relation, le lien
sera maintenu avec l’objet : une topique psychique commencera à s’orga-
niser, avec une différenciation entre l’objet interne détruit par le fantasme
et l’objet externe survivant à la destructivité du sujet.
Il faut observer qu’André a été dans un premier temps dans la mise
à l’épreuve du dispositif et de ses délimitations (sorties intempestives de
la salle, manipulation d’objets qui venait distraire le groupe, impertinence
verbale, jets de peinture sur les murs et sur les intervenants) puis, dans
un second temps, sa destructivité s’est concentrée sur l’objet médiateur
qui lui était présenté : la toile, entendue à la fois comme consigne du
groupe, comme support de l’acte créateur, comme représentant-chose
des capacités (en)cadrantes des coanimateurs du groupe et comme
surface d’inscription. À partir de la quatrième séance, cette toile va en
effet être malmenée en lieu et place des intervenants qui supportent (et y
survivent !) depuis le début du groupe les différentes tentatives d’André
de se mettre hors-jeu. Mais elle va, à un autre niveau de transfert, lui
permettre de revisiter l’histoire d’une relation d’apprentissage : celle
d’un bébé qui va sans cesse jeter à terre les objets présentés par son
environnement, qui va se montrer décevant face aux attentes qui pèsent
sur lui, qui va rester fermement accroché à ce qu’il perd de l’objet, à ce
qu’il ne parvient à réaliser avec satiété et qui va exceller à produire de la
« merde », comme André pouvait régulièrement le verbaliser.
Après un tel traitement, impitoyable, du groupe et de l’objet média-
teur proposé, l’accompagnement d’André a considérablement évolué :

19. Expérience subjective décrite par Winnicott (1969) et dénommée ainsi par
Roussillon (1991, p. 121), elle permet au bébé de localiser dans le domaine de la
vie psychique la destructivité éprouvée à l’égard de l’objet primaire.

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88 Nouvelle Revue de psychosociologie - 20

à l’école, l’accent s’est moins porté sur son comportement et ses diffi-
cultés que sur la créativité et la motivation dont il pouvait faire preuve
lorsqu’il se trouvait en situation de confiance. D’abord fermement opposé
à sa prise en charge, André a progressivement pu accepter d’être aidé
(par son éducateur, par l’auxiliaire de vie scolaire) et a progressé dans
la reconnaissance de ses difficultés. Il a montré peu à peu de nouvelles
compétences qui l’ont notamment aidé à accéder à une sixième « clas-
sique ». Il a par ailleurs pu exprimer sa colère à ses parents concernant
leur séparation et le peu de temps que chacun lui consacrait dans leur

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relation.
Les effets « positifs » de tels dispositifs peuvent apparaître para-
doxaux aux équipes éducatives, ou aux parents, lorsqu’ils constatent à
quel point ces expériences groupales sont parfois difficiles à vivre pour
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ces enfants : plutôt que d’essayer d’éviter la répétition de ce qui est


difficile pour l’enfant dans les expériences d’apprentissage, ces disposi-
tifs voient, au contraire, l’émergence d’affects intenses de tristesse ou
de panique (Guinard, 2013) et sont le théâtre d’un déplacement et d’une
réactualisation de ce qui se passe à l’école, en famille – ce qui peut créer
des écarts avec les dispositifs pédagogiques ou éducatifs qui se veulent
souvent hypercontenants 20. Seulement, afin de pouvoir rencontrer et
analyser les particularités de la zone traumatique de la vie psychique,
il est d’une certaine manière inévitable que les dispositifs « répètent »
celles-ci (Roussillon, 2005, p. 62). Afin que cette répétition soit tolérable,
il convient d’essayer autant que possible de garantir les conditions d’ana-
lysibilité de la dynamique transféro-contretransférentielle en jeu dans le
groupe et avec le medium malléable.

Intérêt et évaluation des médiations thérapeutiques dans la


clinique des apprentissages

Si ces dispositifs groupaux de médiation comportent des effets


thérapeutiques notables, ce n’est pas uniquement parce qu’ils viennent
travailler les aspects extrinsèques (motivation, confiance en soi, tolé-
rance à l’erreur) des processus d’apprentissage, mais aussi parce qu’ils
interviennent sur les ressorts intrinsèques des mécanismes cognitifs,
notamment à la faveur de la mise en travail de la symbolisation primaire.
Le langage verbal n’est pas le moyen d’expression privilégié des
enfants en difficulté d’apprentissage, qui utilisent aussi le langage
du corps, la motricité, la gestualité et différents modes d’expression

20. Les équipes éducatives et pédagogiques essayent de contrôler tous les


paramètres des dispositifs groupaux qu’ils mettent en place (nombre de jeunes,
écart d’âge, homogénéité des problématiques…) de manière que tout se passe
le mieux possible dans le groupe. Dans ces styles très « contenants » de prise
en charge, les intervenants se retrouvent à anticiper tout risque d’émergence
d’angoisses, de violences ou de plaisirs excessifs dans le groupe.

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Une approche psychodynamique des troubles spécifiques des apprentissages 89

sensoriels. C’est en effet une forme d’« associativité » non verbale qui


se déploie dans ces dispositifs-cadres, une associativité liée au geste, à
la succession des séquences, à l’enchaînement des formes et aux défor-
mations que le sujet fait subir au medium. Le clinicien sera attentif à la
gestualité des patients, à leurs mimiques, à leurs postures corporelles.
Pour le clinicien, il ne s’agira donc pas de se contenter d’interpréter
« classiquement » les attaques du cadre ou l’intolérance à la frustration
manifestées par les sujets dans ces groupes, mais au contraire de veiller
à ce que le dispositif de médiation soit à même de se laisser « éprouver »

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par les sujets du groupe (Jacquet, 2011). En effet, en acceptant d’ajuster
et d’adapter son dispositif afin de laisser se déployer dans le transfert
des « formes de communication primitive acceptables » (Roussillon,
2005, p. 61), le clinicien va rendre possibles les conditions suffisam-
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ment bonnes de reprise de l’histoire des échecs de certaines capacités


de symbolisation, des traumatismes que la fonction symbolisante de ces
sujets a pu connaître.
Dans notre expérience du groupe peinture, il a été déterminant de
laisser André poursuivre son exploration jusqu’à son terme : détruire et
détruire encore cette toile que nous lui avions présentée… et faire l’ex-
périence que, malgré tout, il n’a pas détruit le groupe. En lui restituant
séance après séance sa « toile », nous lui signifions que son compor-
tement avait un impact sur nous et laissait une trace sur le dispositif
groupal, même si ce cadre-dispositif parvenait à restaurer ses paramètres
de fonctionnement de séance en séance. Il est important de préciser
que ces dispositifs de médiation favorisent aussi une activité réflexive et
autoréflexive sur les propres activités de représentation du sujet (Brun,
2013, p. 136 ; Roussillon, 2008). Ce mouvement autoréflexif des sensa-
tions, des émotions et de l’activité représentative du sujet a un impact
positif sur les phénomènes de métacognition, c’est-à-dire une activité
mentale sur ses propres processus mentaux (Flavell, 1976). Cette faculté
métacognitive d’apprendre à apprendre, si chère à la psychopédagogie
moderne (Loarer, 1998), est considérablement mise en faillite dans les
troubles dyslexiques et leur phénomène de non-discrimination figure/fond
(dyslexie de type visuel ou « de surface » ; Petiniot, 2012, p. 79) et de
non-congruence entre ce qui est écrit et ce qui est entendu (dyslexie
linguistique ou phonologique).
Le travail thérapeutique de médiation passe, nous l’avons vu, par
une réactualisation sous forme de sensations hallucinées d’expériences
primitives non symbolisées et corrélativement par une mise en forme
de ces expériences à l’aide de protoreprésentations qui en permettront
une première figuration dans un processus de symbolisation primaire
(Roussillon, 2001). Lorsque ce travail va concerner les enfants en diffi-
culté d’apprentissage, en favorisant la résurgence ou la reviviscence des
activités sensori-motrices de la prime enfance (discrimination de la partie
et du tout, de l’acte et de la pensée, du fond et de la forme, du vivant et

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du non-vivant, catégorisation, classification, etc.), les médiations théra-


peutiques vont permettre ainsi à ces sujets de revisiter cet univers multi-
sensoriel et polymorphe du langage. En réexpérimentant les premiers jeux
d’apprentissage avec le langage qui permettent de distinguer et d’identi-
fier les bruits, les sons, les rythmes, les formes, les couleurs et les traits,
les enfants vont avoir la possibilité de reparcourir les différentes étapes
de développement de leur conscience phonologique et de leur conscience
graphémique (Petiniot, 2012, p. 51).
L’apport original de la psychanalyse concernant ce processus de

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récapitulation ontogénétique (proposée par d’autres dispositifs d’inspi-
ration neurobiologique 21) est de rendre possible un libre redéploiement
de l’espace de chevauchement entre les aires de jeu d’un enfant touché
par des troubles des apprentissages et de son environnement. Là où il
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n’était plus possible de jouer et de découvrir ensemble, des expériences


de plaisir et de déplaisir peuvent de nouveau être partagées au sein de la
relation d’apprentissage.
En proposant des groupes à médiation thérapeutique, nous ne
contribuons pas seulement à lever les blocages affectifs et les obstacles
secondaires qui entravent un réinvestissement des expériences d’appren-
tissage ; au contraire, cette méthodologie permet de librement repar-
courir dans un environnement sécurisant et stimulant les différentes
étapes, parfois douloureuses, de l’histoire du processus de développe-
ment psychocognitif de l’enfant coconstruit avec son environnement. La
lecture psychodynamique étant à l’heure actuelle d’une grande précision
en la matière dans ce qu’elle a su tirer de toutes les méthodes contem-
poraines d’observation du bébé.
Ainsi, dans l’optique d’une évaluation 22 rigoureuse des effets de
leur accompagnement sur les difficultés rencontrées par ces enfants, les
cliniciens repèrent à la fois la manière dont leurs troubles d’apprentissage
font signe des enjeux intrapsychiques et intersubjectifs rencontrés par
le sujet dans sa relation d’apprentissage « actuelle » avec son environ-
nement scolaire et familial, mais aussi le processus par lequel ces diffi-
cultés se révèlent comme traces de la manière dont il a historiquement
commencé à explorer son environnement premier en présence d’un objet
« autre-sujet » (Roussillon, 1999, p. 170). Les difficultés d’apprentissage

21. Nous remarquons que les options méthodologiques de la psychanalyse


convergent avec de nombreuses tentatives récentes de créer des dispositifs de
réorganisation neurofonctionnelle des troubles « dys » par la stimulation de la
motricité (Padovan, 1995), de la sensorialité (Tomatis, 1995) ou de la sensori-
motricité (Davis, 1995) dans l’optique d’une récapitulation des différents stades
du développement.
22. Concernant la question de l’évaluation de ces dispositifs-cadres thérapeutiques,
un travail de recherche proposera de repérer, à l’aide d’un tableau de repérage
clinique, les expériences précoces de jeux d’apprentissage qui n’ont pas eu la
possibilité de se vivre dans le cadre rythmique d’un plaisir partagé avec l’objet et
d’une reprise intégrative seul en présence de l’objet (Brun et Guinard, à paraître).

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Une approche psychodynamique des troubles spécifiques des apprentissages 91

présentées par l’enfant en âge de latence seraient alors à envisager


dans la continuité (ou dans la rupture) avec une relation d’apprentissage
première qui constitue le contexte interactionnel et intersubjectif de ses
premières acquisitions.

Conclusion

De la même manière que l’apport des neurosciences est aujourd’hui


incontournable pour notre connaissance des modes de fonctionnement

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et de dysfonctionnement du développement cognitif, l’approche psycho-
dynamique des troubles spécifiques des apprentissages (réunissant
notamment les troubles « dys ») a l’avantage de rendre intelligibles les
impasses des remédiations cognitives et/ou orthophoniques lorsque
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celles-ci se confrontent à des refus comportementaux, des blocages


massifs, véritables techniques anti-apprentissages qui masquent effica-
cement chez ces sujets le mal-être sous-jacent aux expériences vécues
dans le cadre de la relation d’apprentissage. L’évolution contemporaine
des dispositifs analysants et les avancées théoriques importantes rela-
tives aux formes primaires de la symbolisation (Brun et Roussillon, 2014)
et aux processus psychiques de médiation (Chouvier, 2002) permettent
aux praticiens de proposer des alternatives efficientes à des méthodo­
logies strictement orientées vers les symptômes qui excluent les sujets
en souffrance dans ses apprentissages de leurs aires d’interrelation.
Enfin, face aux logiques simplificatrices contemporaines économiques
et idéologiques (le plus souvent parées de bonnes intentions), il est
nécessaire de toujours défendre et rappeler la richesse d’une théorie
psychanalytique proposant une approche multidimensionnelle prenant en
compte l’intersubjectivité 23 dans ses développements théoriques comme
dans ses applications.

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Anne Brun, Frédérik Guinard, Une approche psychodynamique des troubles


« spécifiques » des apprentissages

Résumé
La prise en charge des enfants présentant des troubles des apprentissages a
bénéficié des dernières évolutions paradigmatiques de la psychanalyse dans
l’accompagnement de patients en difficulté majeure avec la symbolisation. Ces
mutations épistémologiques ont rendu possible le développement de nouveaux
dispositifs de rencontre : les médiations thérapeutiques, permettant aux enfants
en difficulté d’apprentissage d’explorer leur sensorialité en appui sur leur appareil
de langage et rendant possible ainsi la transformation d’éprouvés infantiles non
subjectivés.
Au travers de la description d’une expérience de groupe peinture avec un
préadolescent en difficulté d’apprentissage, ce travail met en évidence la manière
dont les processus de réactualisation et de subjectivation qui s’engagent dans
l’utilisation de l’objet de médiation ont des effets positifs sur les capacités de
symbolisation mobilisées dans les apprentissages.

Mots-clés
Apprentissages, dyslexie, médiations thérapeutiques, neurosciences,
psychanalyse, symbolisation.

Anne Brun, Frédérik Guinard, A psycho-dynamic approach to «  specific  »


learning difficulties

Abstract
The treatment of children with learning disabilities has started to benefit from
the latest paradigm changes in psychoanalysis concerning patients with major
difficulties in symbolization. These epistemological changes have facilitated the
development of novel consultation arrangements : therapeutic mediation. Such
mediation opportunities are available to children with learning difficulties in order

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to explore their sensorial capacities using their full language system, and so they
enable transforming non-subjectivated infantile traumas.
Using a description of a painting group experience – related to a therapeutic
support for child with learning difficulties –, our work demonstrates how, using
a mediating object, the updating and subjectivization wich take place in this
context have some positive effects on the symbolization capabilities that are
brought into play during learning.

Keywords
Learning, dyslexia, therapeutic mediation, neurosciences, psychanalysis,

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symbolization.
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