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Conférence_Forsé_5_Avril_2011

LA SOCIOLOGIE DES RESEAUX PAR MICHEL FORSE

Le thème des réseaux sociaux est un thème dynamique qui a connu une forte expansion ces dernières années et
particulièrement dans la sociologie américaine et allemande.

La notion de réseaux n’est pas ici utilisée dans un sens métaphorique. Le but est d‘étudier les structures sociales.
L’analyse en termes de réseaux sociaux n’est pas seulement un outil de plus dans la mallette du sociologue. En effet,
pour comprendre une structure sociale, il est nécessaire de recourir à l’analyse des réseaux.

Les comportements des individus s’expliquent par les structures dans lesquelles ils s’insèrent. Or, on pense
facilement en termes de catégories (agrégations d’individus ayant des caractères communs) et non en réseaux. Les
catégories sont construites, a priori, avant l’étude même de la réalité qu’elles sont censées éclairer et rendre
intelligible, et avant même l’étude des sujets. Dès lors, le relationnel se trouve exclu par l’usage des catégories.

Le dispositif des catégories ne permet donc pas de réfléchir sur les relations et ne permet de mettre en évidence que
des co variations sans donner d’explication. Le dispositif des catégories ne permet pas, en particulier, de comprendre
les cas « marginaux ». Exemple de la relation entre âge et pratique religieuse : les jeunes qui vont à l’église sont-ils
une exception ou la catégorie est-elle bien construite ? Il faudrait ainsi se poser la question de savoir si la catégorie
est bien construite. Est-ce parce que la catégorie choisie n’est pas la bonne, ou bien est-ce parce que le dispositif des
catégories ignore les réseaux et les relations ?

On a donc deux schémas d’analyse.

On a donc une analyse basée sur les catégories. Les individus sont donc normativement orientés. La causalité est
inscrite dans le départ (l’inculcation de normes, leur intériorisation…) et indiscutable. Les acteurs sont mûs par de
forces intériorisées (la conscience collective par exemple). Les normes sont essentiellement des causes.

Pour l’analyse structurale, les normes sociales sont construites et sont le point d’aboutissement des rapports des
individus dans une structure sociale donnée. Ce type d’analyse permet de se passer de boîtes noires comme
« l’habitus » pour comprendre les comportements.

Les réseaux ont des tailles et des formes diverses et variées. Mais les réseaux sont inséparables de la vie en société, il
n’y a pas d’individu sans relation sociale et G. Simmel souligne que la sociologie commence à partir de 3 acteurs, car
il y a des stratégies possibles d’alliance, de conflits. Georg Simmel n’a pas utilisé le mot réseau, mais c’est le fondateur
de l’analyse des réseaux car les directions épistémologiques qu’il a utilisées sont à la base de cette analyse.

La structure d’un réseau de relations fait peser des contraintes sur les choix et les opinions des individus qui en sont
membres. L’analyse des réseaux est donc un moyen qui permet de montrer que la forme des réseaux débouche sur
un effet émergent.

Un exemple de réseau noté ici A

2 6

4 5 8

3 7
Un deuxième exemple de réseau noté ici B

2 6

1 4 5 8

3 7

Les réseaux A et B ont le même nombre d’individus ; ils ont la même densité : 9 traits de relation ; mais les formes
des deux réseaux sont très différentes. Dans le réseau A on a 2 groupes d’individus alors que dans le réseau B il n’y a
qu’un groupe. La distance moyenne des relations est plus grande dans le réseau B que dans le réseau A.

Dans le réseau A, les individus 4 et 5 sont des articulateurs. Ils détiennent des capacités stratégiques particulières, ce
qui n’est pas le cas dans le réseau B. Si l’on a un seul vaccin, on saura qui vacciner dans le réseau A (le 4), mais pas
dans le réseau B.

La question qui vient ici à l’esprit est : comment se font les groupes, comment déterminer les groupes qui existent ?
On trouvera à ces questions des réponses dans l’article fondateur de Granovetter : la force des liens faibles (1973).
Mais on trouve aussi des éléments importants chez Simmel. Simmel a été relu par un psychosociologue Hedder
(1945). Pour qu’une triade (l’ancêtre des réseaux), si on met un signe + (amitié) ou – (inimitié), il faut que la somme
algébrique des ces signes soit positive pour que cela marche. Pour qu’un réseau existe il faut que le produit
algébrique des relations des membres soit positif. Granovetter reprend cette idée mais distingue des liens forts et
des liens faibles et non pas des liens à contenu positif ou négatif.

Lien fort

Lien faible

Dans le cas du réseau A si le lien entre 4 et 5 est faible qu’est-ce que cela change ? Quelle est la nature du lien entre 4
et 5 ?

Ce qui fait le ciment du lien social, ce sont des liens faibles entre des groupes qui à l’intérieur d’eux-mêmes ont des
liens forts. C’est le principal enseignement que l’on peut tirer de l’enquête sur l’emploi conduite par Granovetter.

Michel Forsé a tenté de vérifier cette hypothèse en s’appuyant sur les enquêtes emplois de l’Insee, il a pu montrer
que les liens faibles sont efficaces surtout chez les cadres (alors que chez les ouvriers, la recherche d’emplois passent
plus par les relations au sein de la famille). Il propose le schéma suivant qui permet de lier le capital social et
l’acquisition du statut social.

Question : Comment avez-vous trouvé un emploi ?


Hypothèses possibles : Origine sociale / niveau d’éducation / Type de capital social / niveau socio-professionnel /
niveau de salaire… Mais aussi type de capital social : la famille (liens forts), les amis, connaissances (liens faibles)…
On constate que les liens faibles sont plus efficaces que les liens forts et ce, d’autant plus que la catégorie sociale est
élevée…

Type de capital social

Type de capital social Niveau


Origine sociale
socioprofessionnel

Niveau d’éducation

Niveau de salaire

La notion de capital social a des liens avec la notion de capital humain développée par des économistes. Elle inclut un
capital relationnel qui se manifeste tant au niveau individuel qu’au niveau collectif.

Compte-rendu réalisé par J. JULIEN qui en assume seul les erreurs ou imperfections.

Eléments bibliographiques.
Sociologie des réseaux sociaux – Pierre Mercklé – Collection Repères – n°398 - 2011
La sociologie économique – Philippe Steiner - Collection Repères – n°274 – 2007
Ecoflash – octobre 2001

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