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Parmi les grands domaines l’accent est porté sur la sûreté nucléaire et sur la réparation en
cas d’accident nucléaire, mais il ne faut pas négliger les textes relatifs aux transports de
matières nucléaires qui doivent s’intégrer dans les nombreuses réglementations existantes
sur les transports internationaux et la réglementation sur le contrôle des matières
nucléaires liée aux aspects non prolifération.
La radioprotection occupe une place à part dans ces familles. Si pour certains elle est
assimilée à la sûreté prise au sens large, elle constitue une discipline séparée, tout en
étant très étroitement liée bien sûr avec la sûreté (et avec la responsabilité) car
notamment elle fixe les seuils à partir desquels s’appliquent les règles de sûreté nucléaire
et les règles de réparation des accidents nucléaires.
L’ordre de présentation des familles ci-dessous a été choisi suivant l’ordre chronologique
d’apparition des grands textes internationaux correspondants
1. LA RADIOPROTECTION
Les Etats Unis, pionniers de l’utilisation de l’énergie nucléaire, ont jugé très rapidement
qu’un régime spécial, dérogatoire du droit commun de la responsabilité civile, était
nécessaire pour assurer, d’une part la réparation des dommages subis par les victimes
d’accidents nucléaires, d’autre part le développement de cette industrie naissante. En
1957 ils ont élaboré ce régime sous la forme de l’amendement Price Anderson Act à
l’Atomic Energy Act de 1954. A la même époque un groupe d’experts travaille au sein
de l’O.E.C.E (aujourd’hui l’O.C.D.E.) à la rédaction d’une convention internationale
(Convention de Paris) qui sera adoptée le 29 juillet 1960, mais qui n’entrera en vigueur
que le 1er avril 1968. Cette longue période a « obligé » la France (qui a ratifié cette
convention le 9 mars 1965) à mettre en place par la voie législative un régime «
transitoire » en 1965, compte tenu du développement déjà bien engagé de l’industrie
nucléaire française ; régime transitoire remplacé par la loi du 30 octobre 1968, après
l’entrée en vigueur de la Convention de Paris. Cette loi a été modifiée par la loi du 16
juin 1990.
Il convient de préciser qu’une autre convention internationale sur le même sujet a été
élaborée dans le cadre « universel » de l’A.I.E.A. (par opposition au cadre « régional » de
l’O.C.D.E.). Signée le 21 mai 1963, cette convention (Convention de Vienne) n’est
entrée en vigueur que le 12 novembre 1977 (la France n’est pas Partie à cette
convention).
Tous ces textes, même s’ils présentent des différences parfois importantes, appliquent les
mêmes principes :
• la responsabilité est canalisée de façon exclusive sur l’exploitant nucléaire ;
• la responsabilité est « objective », c’est-à-dire qu’il n’est pas nécessaire de prouver la
« faute » de l’exploitant, seul le lien de causalité entre l’accident nucléaire et le dommage
subi doit être prouvé ;
• l’indemnisation est limitée quant au montant ;
• la responsabilité est limitée quant à la durée ;
• l’exploitant doit avoir une garantie financière équivalente au montant de sa
responsabilité, obtenue en général par la souscription d’une police d’assurance ;
• il existe une unicité de juridiction compétente.
Le contrôle des matières nucléaires a été institué pour s’assurer que les matières
nucléaires ne sont pas détournées à des fins militaires. Plusieurs textes internationaux
sont à la base de ces contrôles :
• en 1956, le Statut de l’A.I.E.A. (article III. A. 5.) qui donne mission à l’Agence
d’établir des mesures visant à garantir que les matières nucléaires ne sont pas utilisées à
des fins militaires ;
• en 1957, le Traite instituant la Communauté européenne de l’énergie atomique
(Euratom) qui dans son article 2 précise que la Communauté doit garantir que les
matières nucléaires ne sont pas détournées à d’autres fins que celles auxquelles elles sont
destinées ;
• en 1958, le Statut de l’A.E.N. qui dans son article 6 institue un contrôle de sécurité
pour prévenir la prolifération de dispositifs nucléaires explosifs ;
• en 1968, « enfin », le Traité de non prolifération qui dans son article III impose que
les Etats non dotés de l’arme nucléaire acceptent les mesures pour empêcher l’utilisation
de l’énergie nucléaire pour l’usage d’armes nucléaires. Ce traité charge l’A.I.E.A.
d’exercer des contrôles sur la base d’accords bilatéraux entre l’Agence d’une part et les
Etats concernés d’autre part. A noter que les Etats dotés de l’arme nucléaire ne sont pas
soumis à cette obligation, mais que la France notamment a souscrit un accord équivalent
avec l’Agence, sur une base volontaire.
Suivant les dispositions de ces bases, des textes internationaux d’application intéressant
la France ont été établis :
Le régime français est celui de la loi n° 80-572 du 25 juillet 1980 sur la protection et le
contrôle des matières nucléaires, complétée et modifiée par la loi 89-434 du 30 juin 1989.
Ces textes prennent en compte un autre texte international dont l’objet, toujours lié aux
aspects de non prolifération, est plus restreint (la protection physique des matières
nucléaires en cours de transport international) et qui ne met pas en place un contrôle
international. Il s’agit de la Convention sur la protection physique des matières nucléaires
établie par l’A.I.E.A. le 3 mars 1980, ratifiée par la France le 6 septembre 1991.
Cette dernière convention devrait faire l’objet d’une révision avec élargissement de son
champ d’application et dont les travaux se sont accélérés depuis les attentats du 11
septembre 2001. Un projet de révision a été finalisé en mars 2003 en vue d’une
négociation finale (dont la date n’est pas fixée) avant son adoption
Contrairement aux autres thèmes ci-dessus le thème sûreté des installations nucléaires
n’est pas (encore ?) véritablement identifié dans la réglementation française. Mais il
constitue sans aucun doute le pan le plus important des préoccupations de la société par
rapport aux activités nucléaires. De plus, comme indiqué en chapeau de la présente partie
IV du document, il est bien identifié dans le domaine du droit international nucléaire.
Classés par l’A.I.E.A. dans le domaine « sûreté nucléaire », ont été élaborés auparavant,
dans l’émotion de l’accident de Tchernobyl, deux conventions ouvertes à la signature le
26 septembre 1986 et entrées en vigueur rapidement : l’une porte sur la notification
rapide d’un accident nucléaire, l’autre sur l’assistance en cas d’accident nucléaire ou de
situation d’urgence radiologique.
Bien que n’y faisant pas explicitement référence, la Convention sur la sûreté nucléaire
s’inspire des travaux menés par l’A.I.E.A. dans ce domaine ayant conduit à la rédaction
de nombreux standards et notamment au document « Fondements de sûreté – La sûreté
des installations nucléaires » de 1993 (Collection Sécurité n°110). La Convention sur la
sûreté nucléaire comprend deux volets d’obligations : d’une part des obligations
d’organisation administrative et de respect de normes techniques , d’autre part un
système de réunions des Parties contractantes basées sur le mécanisme des peer reviews.
Les critiques habituellement portées sur cette convention concernent les deux volets : les
obligations administratives et techniques sont trop générales, le non respect des
obligations, qui apparaîtrait dans les rapports remis pour les réunions des Parties
contractantes, n’entraîne aucune sanction. Il n’en reste pas moins que ce texte représente
une étape importante dans la prise en compte de la sûreté au plan international et que s’il
n’apporte pas de véritables contraintes supplémentaires pour des pays comme la France,
il nécessite des efforts importants pour d’autres Etats. C’était d’ailleurs la volonté des
négociateurs de construire un texte « incitant » (le terme est employé dans le Préambule)
les Parties Contractantes à atteindre un haut niveau de sûreté nucléaire. Suivant le
calendrier fixé par la Convention, l’Autorité de sûreté nucléaire française a envoyé deux
rapports (en 1998 et 2001) établis suivant un modèle fixé par la Convention pour examen
lors des réunions régulières des Parties contractantes.
Compte tenu des risques éventuels pour l’homme et pour l’environnement, la gestion des
déchets radioactifs est soumise à des normes de sûreté dont les principes sont communs à
toutes les installations nucléaires. Mais, paradoxalement, le droit international de la
sûreté des déchets radioactifs est apparu tardivement. Le texte de référence est la
Convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la
gestion des déchets radioactifs du 29 septembre 1997, établie sous les auspices de
l’A.I.E.A. et entrée en vigueur le 18 juin 2001, la France l’ayant ratifiée le 27 avril 2000.
Cette convention se présente de façon analogue à la Convention sur la sûreté nucléaire de
1994. L’Autorité de sûreté nucléaire française a envoyé en 2003 le rapport national, pour
examen lors de la première réunion des Parties contractantes qui s’est tenue en novembre
2003. Au plan national les installations de gestion des déchets radioactifs qui entrent dans
la catégorie des INB sont bien sûr soumises au décret 63-1228 du 11 décembre 1963.
Par contre des textes internationaux touchant à d’autres aspects de la gestion des déchets
radioactifs sont apparus plus tôt :
• L’immersion de déchets radioactifs dans la mer par les Etats Unis dès la fin de la
seconde guerre mondiale, et de quelques autres pays ensuite, a provoqué l’inquiétude des
populations. Des dispositions ont été prises au plan international dans le cadre de la
prévention de la pollution marine ; un des textes les plus importants est la Convention de
Londres de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion des
déchets et prenant en compte les déchets radioactifs : elle réglemente l’immersion des
déchets de faible activité et interdit ceux de haute activité. Elle est entrée en vigueur en
1975, mais n’a été ratifiée par la France que le 22 décembre 1976. Elle a été modifiée à
plusieurs reprises : après un moratoire en 1983, des amendements ont été présentés en
1993, sous la forme de résolutions ; la Résolution LC 51 a interdit l’immersion de tous
les déchets radioactifs, ces amendements sont entrés en vigueur en février 1994 et ont été
acceptés par la France. De nombreux autres textes généraux ou régionaux concernent la
prévention de la pollution marine par les déchets, explicitement ou implicitement (c'est-à-
dire en n’excluant pas les déchets radioactifs contrairement à d’autres textes). Parmi ces
textes on peut citer, en dehors de la Convention de Londres ci-dessus évoquée, la
Convention de Barcelone du 16 février 1976 relative à la protection de la Méditerranée
contre la pollution, la Convention des Nations Unies du 16 décembre 1982 sur le droit de
la mer, la Convention de l’Atlantique du nord-est du 22 septembre 1992 (OSPAR)
relative à la pollution du milieu marin, ratifiée par la France, entrée en vigueur le 25 mars
1998. L’article 3 de l’annexe II de cette dernière convention interdit l’immersion des
déchets radioactifs : la France et le Royaume Uni avaient obtenu une exemption de cette
clause pour une durée de 15 ans à compter du 1er janvier 1993, mais en 1997 ces deux
pays ont déclaré ne plus demander cette exemption et la réunion de la Commission
OSPAR en 1998 a entériné cette déclaration par la décision 98/2 sur l’immersion de
déchets radioactifs.
• D’autres dispositions ont été prises concernant les mouvements transfrontières de
déchets radioactifs. D’une part l’A.I.E.A. avait adopté en 1990 un Code de bonne
pratique sur le mouvement transfrontière international de déchets radioactifs. Le Code de
l’A.I.E.A. n’est pas un texte de droit positif mais ses dispositions principales ont été
incorporées dans la Convention commune de 1997. D’autre part, dès 1992, Euratom a
établi une directive sur ce sujet : il s’agit de la Directive 92/3 du 3 février 1992 relative à
la surveillance et au contrôle des transferts de déchets radioactifs entre Etats membres
ainsi qu’à l’entrée et à la sortie de la Communauté. Cette directive a été transposée en
droit français par le décret 94-853 du 22 septembre 1994.
CONCLUSION
Le document sur le droit nucléaire (1ère et 2ème partie) brosse le cadre juridique des
activités nucléaires en France en le situant dans le cadre international et en présente les
principales dispositions. Il ne prétend pas présenter un catalogue complet de la
réglementation. Le recueil CEA de législation et de réglementation des activités
nucléaires répond à cette demande.
Les critiques qui sont portées sur le régime juridique français portent plus sur « l’absence
» de débat parlementaire pour décider de la politique nucléaire française que sur une
faiblesse du régime juridique d’encadrement de cette activité. Ce régime est destiné à
assurer la sécurité et la sûreté et une réparation en cas de dommage nucléaire ; il respecte
les dispositions pertinentes du droit international.
Note : La bibliographie générale succincte peut être consultée sur ce même site (menu
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