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CHARTE ETHIQUE DE L’ARBITRAGE

Introduction

La présente Charte est destinée à faciliter le bon déroulement des


procédures d’arbitrage, tant interne qu’international. Elle constitue une
contribution offerte à tous les praticiens de l’arbitrage des Centres affiliés à
la Fédération des Centres d’Arbitrage.

Les principes qu’elle pose sont valables tout au long de la procédure


arbitrale : depuis la phase d’engagement de l’arbitrage jusqu’à la reddition de
la sentence définitive, et même après son prononcé.

Elle s’impose aux acteurs de l’arbitrage soit parce que le Centre d’arbitrage
encadrant la procédure l’a adoptée, soit parce que les parties ou les arbitres
y ont fait référence dans la convention d’arbitrage, dans l’acte de mission ou
tout autre document, par exemple de la manière suivante :

« La Charte éthique de l’arbitrage de la Fédération des Centres


d’Arbitrage, s’appliquera au présent arbitrage, dans sa version en
vigueur à la date de saisine du Centre ».

On entend par « les acteurs de l’arbitrage », toute personne ou institution


concourant à la procédure arbitrale tels que les arbitres, les parties, leurs
conseils, les secrétaires administratifs, les témoins, les experts, les centres
d’arbitrage, les autorités de désignation, ou encore les tiers financeurs, sans
que cette liste soit limitative.

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1. LES PRINCIPES COMMUNS

Les acteurs de l’arbitrage doivent, en toute circonstance, respecter la Charte. Ils


doivent agir avec loyauté, bonne foi, conscience, diligence, compétence, honnêteté,
probité, courtoisie, et dans le respect de leurs obligations professionnelles.

2. L’ARBITRE

L’arbitre se trouve dans une relation de confiance avec les parties, qui l’ont investi
de la mission de régler leur différend. Il accomplit personnellement sa mission.

La mission de l’arbitre est d’origine contractuelle et de nature juridictionnelle.

L’arbitre tranche le litige par référence aux règles de droit, ou à l’équité si les
parties lui ont confié le rôle d’amiable compositeur, et en respectant toujours les
garanties fondamentales de bonne justice.

L’arbitre peut à tout moment concilier les parties ou proposer une médiation selon
les règles propres à chaque Centre.

2-1. Aptitude, disponibilité et diligence

Un arbitre pressenti ne doit accepter la mission qui lui est proposée que s’il
possède la compétence juridique et/ou technique nécessaire en fonction du litige, et
s’il s’est assuré de sa disponibilité pour arbitrer le litige dans des délais
raisonnables au regard des circonstances et de la complexité du litige. Il doit
s’assurer de bien maîtriser la langue (ou les langues) de l’arbitrage.

L’arbitre assure le bon déroulement de la procédure arbitrale.

L’arbitre agit avec diligence tout au long de l’exercice de sa mission, y compris pour
favoriser la célérité de la procédure arbitrale, en veillant toutefois à éviter une
augmentation des coûts de l’arbitrage excessive au regard des intérêts en jeu.

2-2. Indépendance et impartialité

L’indépendance de l’arbitre se définit comme l’absence de toute relation d’affaires


ou personnelle passée ou présente, directe ou indirecte, entre d’une part l’arbitre ou
un tiers qui lui est étroitement lié personnellement ou professionnellement, et d’autre
part l’une des parties, ou toute personne étroitement liée à l’une des parties, avec
les conseils, voire les coarbitres du litige.

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L’impartialité de l’arbitre se définit comme l’absence de déséquilibre, et l’égalité de
traitement des parties. C’est aussi une indépendance d’esprit, notamment vis-à-vis
des pressions extérieures.
Un arbitre pressenti ne doit accepter la mission qui lui est proposée que s’il est à
la fois indépendant et impartial vis-à-vis de l’ensemble des parties, excepté dans les
cas où ces dernières, informées des éléments propres à mettre en doute
l’indépendance ou l’impartialité de l’arbitre, s’accordent néanmoins pour permettre sa
nomination.

Un arbitre pressenti doit immédiatement dévoiler aux parties l’ensemble des


éléments propres à mettre en doute son indépendance ou son impartialité. Si de
tels éléments apparaissent au cours de la procédure arbitrale, l’arbitre concerné doit
également les révéler sans délai.

2-3. Principe du contradictoire

Une fois que le tribunal arbitral est saisi de l’affaire, il ne peut communiquer avec
une seule des parties, à son initiative ou à celle de la partie concernée, sur un
sujet concernant le fond du litige, sauf à informer les autres parties et le cas
échéant les autres arbitres de l’existence et du contenu précis de cette
communication.

En cas de communication écrite, une copie doit être envoyée aux autres parties et,
le cas échéant, aux autres membres du tribunal arbitral.

Les communications non contradictoires sont néanmoins possibles dans le cadre


des procédures ex parte destinées à obtenir des mesures provisoires ou
conservatoires, ou pour régler des questions relatives à la procédure en cours.

2-4. Confidentialité

Toute information relative à un arbitrage est confidentielle, sous réserve des


stipulations contraires des parties, des obligations légales et réglementaires, ou dans
le strict cadre d’actions judiciaires liées à l’arbitrage.

L’arbitre ne doit en aucune manière user, dans un but étranger, d’informations


auxquelles il a eu accès à l’occasion de la procédure soit pour en tirer un avantage
personnel ou à l’avantage d’un tiers, soit pour préjudicier à quiconque.

En particulier en cas d’obligation légale ou réglementaire, l’arbitre ne peut participer,


directement ou indirectement, à une quelconque procédure relative à l’arbitrage.

L’arbitre est tenu par le secret du délibéré. Il ne peut révéler à quiconque un


quelconque élément concernant les discussions, orientations ou décisions de la
juridiction arbitrale.

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L’arbitre ne doit révéler à aucun tiers, excepté dans le cadre de l’exécution de sa
mission ou si le tiers est associé au déroulement de la procédure, l’existence ou le
contenu du litige et de la procédure arbitrale. Les tiers informés sont tenus à la
même confidentialité que l’arbitre.

La sentence demeure confidentielle, sauf nécessité dans le cadre d’une action


judiciaire liée à l’arbitrage.

3. LES PARTIES ET LES CONSEILS

Les parties et leurs conseils doivent agir de bonne foi en évitant toute manœuvre
abusive ou dilatoire dans le but de retarder ou de perturber la procédure. Les
parties et leurs conseils s’engagent à n’exercer aucune pression ni influence, directe
ou indirecte, sur l’arbitre ou sur le tribunal arbitral.

Les parties et leurs conseils sont tenus à la confidentialité de l’arbitrage et de toute


information relative à l’arbitrage sauf stipulations contraires. Les conseils des parties
sont en outre tenus au secret professionnel dans la limite des obligations légales et
réglementaires qui les régissent.

Les parties et leurs conseils ne doivent révéler à aucun tiers, excepté dans le cadre
de l’exécution de sa mission ou si le tiers est associé au déroulement de la
procédure, l’existence, le contenu ou n’importe quel élément du litige et de la
procédure arbitrale.

Le principe du contradictoire s’impose aux parties et à leurs conseils sauf lorsque


des circonstances particulières exigent que des mesures conservatoires soient prises
de façon non contradictoire.

4. LES CENTRES D’ARBITRAGE

Les Centres d’arbitrage devront faire respecter la présente Charte éthique par les
acteurs de l’arbitrage.

Ils doivent également, en toutes circonstances, respecter et faire respecter le


règlement et les lois régissant la procédure arbitrale.

En tant qu’autorité de désignation des arbitres, ils se feront préalablement confirmer


l’indépendance, l’impartialité et la disponibilité de ceux qu’ils désignent.

Ils s’assureront, selon la méthode propre à chaque centre, de la compétence, de la


diligence et de la courtoisie des acteurs de l’arbitrage.

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En bonne intelligence avec le tribunal arbitral, ils veilleront à une application
mesurée des délais de la procédure de façon à éviter les comportements dilatoires
et à permettre à la justice arbitrale d’être rendue dans de bonnes conditions.

5. LES EXPERTS ET LES TEMOINS

5-1. Les experts

L’expert ou les experts, qu’il(s) soi(en)t désigné(s) par les parties ou par un tribunal
arbitral notamment, se trouve(nt) dans une relation de confiance avec les parties et
les membres du tribunal arbitral, qui l’ (les) ont investi(s) de la mission de les
éclairer sur des questions, notamment techniques.

5-1-1. Aptitudes

Compte tenu de ce que sa mission est d’éclairer des personnes dans un domaine
ou sur des questions dans lesquelles l’expert est compétent, en vue de la reddition
d’une décision de justice, l’expert a conscience qu’il est choisi pour ses
compétences et ses connaissances, qu’il devra entretenir et maintenir à jour.

En cas de doute par l’expert sur sa capacité et ses aptitudes à remplir sa mission,
il doit refuser la mission.

En cas de survenance, à l’occasion de l’exécution de sa mission, d’une question qui


échappe à son domaine de compétence, l’expert devra en informer aussitôt le
tribunal arbitral.

Les travaux de l’expert devront refléter de manière objective les différentes positions
scientifiques ou doctrinales relatives à son domaine d’expertise et d’intervention
dans le cadre de la mission qui lui a été confiée.

Son opinion finale sera ainsi objectivement démontrée, et fera apparaître la solution
qu’il considère être la plus adaptée au différend, conformément à son expérience et
à ses qualifications dans son domaine d’expertise.

5-1-2. Indépendance et neutralité

L’expert devra agir avec objectivité et neutralité, en toute indépendance et


impartialité.

A l’acceptation de sa mission, l’expert informera les parties et le tribunal arbitral de


ses liens et de toutes relations, passées ou présentes, directes ou indirectes, avec

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les parties, les membres du tribunal arbitral, les avocats et conseils, les autres
experts et plus généralement tout autre acteur de l’arbitrage en question (par
exemple, assureurs ou tiers pouvant avoir un intérêt dans l’arbitrage).

L’expert dévoilera les liens, passés ou présents, directs ou indirects, qu’il pourrait
avoir ou avoir eu avec telle ou telle industrie ou entreprise ayant un intérêt dans
l’issue du différend.

L’expert remettra aux parties et au tribunal arbitral une déclaration écrite attestant
son indépendance et sa neutralité conformément à la présente Charte à laquelle il
devra adhérer.

Il devra répondre à toute question sur la façon dont il est rémunéré.

Il fournira une liste détaillée de ses articles, discours et autres publications relatifs à
son domaine d’expertise.

5-1-3. Clarté

L’expert doit effectuer de bonne foi son travail lui-même et fournir des explications
et des conclusions de façon qu’elles soient intelligibles. Il doit s’exprimer, par écrit
ou oralement, de façon précise et motivée, en s’adaptant à ses interlocuteurs afin
qu’ils le comprennent autant que faire se peut. Il se gardera de complexifier
sciemment des questions qui sont susceptibles d’expression claire.

En cas de controverse ou de débat, il en signalera l’existence et indiquera les


termes du débat et ses sources ainsi que la solution ou la thèse qu’il retient, en
motivant son opinion.

Ses explications feront apparaître distinctement ce qui ressortit à des faits et ce qui
ressortit à son opinion.

5-1-4. Confidentialité

L’expert s’engage à ne divulguer à aucune personne extérieure au différend


opposant les parties, ou à tout tiers quel qu’il soit à l’affaire présentée devant le
tribunal arbitral, des informations ou données auxquelles il pourrait avoir accès dans
le cadre de sa mission.

Il gardera également confidentiels les faits qu’il pourrait découvrir en lien avec le
différend dans le cadre de la procédure à laquelle il apporte son concours.

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5-1-5. Courtoisie

Dans l’exécution de sa mission, et notamment lors des audiences et des auditions,


l’expert restera courtois en toute circonstance et, s’il condamne les propos ou les
agissements d’un acteur de l’arbitrage, notamment d’un autre expert, il le fera avec
la fermeté qu’il souhaite mais avec courtoisie.

5-2. Les témoins

Les acteurs de l’arbitrage respecteront scrupuleusement les dispositions légales et


réglementaires relatives aux témoignages, dispositions spécifiques à chaque Etat et
au droit gouvernant la procédure arbitrale.

Dans le cadre de l’arbitrage international, tenant compte de la diversité des


pratiques et des réglementations en matière de témoignage, notamment en ce qui
concerne celles relative à la préparation des témoins à comparaître devant le
Tribunal arbitral, les conseils des parties s’obligent à respecter de la retenue dans
cette préparation de nature à préserver le caractère spontané du témoignage et sa
véracité.

Les témoins s’obligent à dire toute la vérité, rien que la vérité, engagement qui sera
reçu par le Tribunal arbitral qui en donnera acte.

6. LES TIERS FINANCEURS

Tout financement par un tiers doit être révélé par les parties.

Le tiers financeur doit avoir un comportement éthique. Il ne doit pas entraver


l’application de la présente Charte.

En aucun cas, le financement par un tiers ne peut fournir aux parties, aux arbitres
et aux autres acteurs de l’arbitrage un motif pour s’exonérer des règles prévues
dans la présente Charte.

Le tiers financeur doit veiller à éviter de placer les arbitres en situation de conflit
d’intérêts.

Le tiers financeur doit éviter toute intervention dans le choix des arbitres. Il ne doit
pas s’immiscer dans la procédure arbitrale.

Le tiers financeur doit respecter la confidentialité de l’arbitrage, de même que celle


qui régit la relation entre la partie financée et son conseil.

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La Charte éthique établie pour la Fédération des Centres d’Arbitrage, a été réalisée
sous la direction scientifique de :

• Patrice Mouchon, Avocat à la Cour, Président du Centre de médiation et


d’arbitrage de la Chambre de commerce franco-arabe,
• Thomas Clay, doyen honoraire de la faculté de droit et de science politique
université de Versailles, Premier Vice-Président du Conseil scientifique du
Centre de médiation et d’arbitrage de la Chambre de commerce franco-arabe
qui a animé un groupe de travail composé de :
• Ana Atallah, Avocat à la Cour, Vice-Présidente du Conseil scientifique
du Centre de médiation et d’arbitrage de la Chambre de commerce
franco-arabe,
• Paul Riquier, Avocat à la Cour, Vice-Président du Conseil de l’arbitrage
et de la médiation du Centre de médiation et d’arbitrage de la Chambre
de commerce franco-arabe
• Sylvestre Tandeau de Marsac, Avocat à la Cour, ancien membre du
conseil de l’ordre des Avocats, ancien Président de l’association des
Médiateurs Européens, et membre du Conseil de l’arbitrage et de la
médiation du Centre de médiation et d’arbitrage de la Chambre de
commerce franco-arabe,
• Walid Ben Hamida, Maître de conférences en droit à l’université d’Evry
Val d’Essonne et à Sciences Po Paris,
• Jalal El-Ahdab, Avocat aux Barreaux de Paris, New York et Beyrouth,
Vice-Président du Conseil scientifique du Centre de médiation et
d’arbitrage de la Chambre de commerce franco-arabe.

CENTRES SIGNATAIRES

Association Française d’Arbitrage – AFA


Association Bretonne de M édiation et d’Arbitrage – ABAM
Centre d’Arbitrage et de Médiation de Bretagne – CAMB
Centre de Médiation et d’Arbitrage près la Cham bre de Com m erce
Franco-Arabe
Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris – CMAP
Centre Européen d’Arbitrage et de Médiation – CEA
Centre Français d’Arbitrage de Réassurance et d’Assurance – CEFAREA
Cham bre Arbitrale Maritim e de Paris – CAMP
Cham bre de Conciliation et d’Arbitrage de Toulouse Midi-Pyrénées
Cham bre Régionale d’Arbitrage – CRA
Cour d’Arbitrage de l’Europe du Nord – CAREN
Institut d’Expertise, d’Arbitrage et de Médiation – IEAM
Institut Euro-Méditerranéen d’Arbitrage – IEMA

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