Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
A ma famille
Aux Professeurs T. BACCOUCHE & S. MEJRI qui m’ont donné accès aux
Linguistique de Tunisie
pour sa patience
A tous mes élèves, mes étudiants et mes collègues là où ils sont et là où je viens
de passer.
1
Table des matières
Introduction…………………………………………………………………….. …...9
Première partie : La théorie du stéréotype dans la sémantique lexicale…… …29
Premier chapitre – Le stéréotype : foyers et identité(s)………………… …31
1- Le trait stéréotypique comme composant d’un vecteur dans la
représentation sémantique des noms……………………………. …31
1-1-Le stéréotype………………………………………………… …33
1-2-Le marqueur sémantique…………………………………… …37
1-3- L’extension …………………………………………………. …40
2- Du mot au syntagme et du trait à la phrase stéréotypique……… …43
3- L’expression stéréotypique, une catégorie des séquences figées ? …58
Deuxième chapitre- Le stéréotype et les enjeux de la normativité ……. …61
1- Le stéréotype entre fixation et variation…………………………. …61
2- Stéréotype et généricité……………………………………………. …68
3- Du dictionnaire en général à la définition en particulier : saisie
du stéréotype et problèmes de sens………………………………. …74
Troisième chapitre- Théories des stéréotypes et sémantique
contemporaine : enjeux d’un ancrage
épistémique controversé………………………… …86
1- A propos de la notion de « représentation » et de la corrélation
intension/extension………………………………………………….. …87
2- L’aréférencialité…………………………………………………… …97
2-1- Démonstration logique de l’indexicalité ou l’histoire des
« mondes possibles » qui ne sont pas possibles…………… …99
2-2- Indexicalité et déictiques…………………………………… ..105
2-3- Rigidité et chaîne causale………………………………….. ..109
3- Le holisme de la signification……………………………………. ..113
Deuxième partie : Stéréotype et notions apparentées………………………. ..119
Premier chapitre-Stéréotypie et prototypie……………………………. ..120
1-(les) théorie(s) du prototype ……………………………………….. . ..121
1-1 La théorie originelle du prototype …………………………. ..121
1-2 Le prototype comme conjonction de propriétés typiques…. ..123
1-3 la version étendue du prototype…………………………….. ..128
2- Rapprochements et distinctions entre le prototype et le stéréotype... ..133
2-1 Les rapprochements ………………………………………… ..134
2-2 Les différences ………………………………………………... ..137
3- Stéréotype et prototype : pourquoi faut-il les distinguer ?………… ..143
3-1 Stéréotypie, centralité prototypique et appartenance
catégorielle …………………………………………………… ..143
3-2 Stéréotypie, prototypie et hiérarchie verticale du lexique …. ..150
3-3 Représentation catégorielle prototypique et représentation
stéréotypique ………………………………………………… ..154
Deuxième chapitre- Champ stéréotypique de la signification et
théories linguistiques ……………………………… ..158
1 -la théorie des topoï …………………………………………………. ..158
1-1- Les topoï dans la version standard …………………………. ..161
1-2- La théorie des blocs argumentatifs ………………………… ..169
2- Connotation et traits virtuels ………………………………………. ..178
3- Les sèmes afférents ………………………………………………… ..193
3
3-1 Sèmes inhérents vs sèmes afférents …………………………. ..194
3-2 Les sèmes afférents socialement codés et les sèmes afférents
contextuels …………………………………………………… ..199
3-3 Quelques implications théoriques de l'inhérence et de
l'afférence …………………………………………………… ..201
Troisième chapitre- Stéréotype : statut, typologie et économie dans la
structuration du sens …………………………… ..208
1. Les propriétés du stéréotype………………………………………… ..209
- La typicité ……………………………………………………… ..209
- La conventionnalité …………………………………………….. ..212
- La généricité …………………………………………………… ..216
- L'idéalisation, l’arbitraire, la variabilité ……………………… ..225
2- Typologie et économie des stéréotypes …………………………….. ..230
2.1. Stéréotype définitionnel au niveau d'une catégorie primaire ..230
2.2. Stéréotype définitionnel au niveau d'une catégorie
sémantique polysémique…………………………………… ..233
2-3- Stéréotype définitionnel au niveau d’une catégorie
sémantique dérivationnelle………………………………… ..235
2.4. La stéréotypie discursive ……………………………………. ..240
3- Rupture ou continuum ?……………………………………………. ..242
Troisième partie-Stéréotypie et mécanismes sémantiques …………………. ..245
Premier chapitre - Stéréotypie, métaphore, métonymie ………………. ..246
1- Métaphore et métonymie : bilan critique …………………………. ..247
2- Stéréotypie et tropes lexicalisés ……………………………………. ..264
3- Stéréotypie et types d’analogie …………………………………….. ..268
Deuxième chapitre- Polysémie et stéréotypie …………………………… ..280
1- Théories de la polysémie : bilan critique…………………………… ..281
2-Stéréotypie et génération polysémique ……………………………… ..297
2-1-Structuration stéréotypique en réseaux translexicaux (à
travers le lexique)…………………………………………… ..298
2-2-Extension stéréotypique du sens fondée sur le sens initial … ..303
2-2-1-Extension liée à la stéréotypisation d’un sème
définitoire …………………………………………… ..303
2-2-2-Extension par la fixation d’un sème latent ………….. ..305
2-2-3-Extension par la modulation stéréotypique de tout le
sens initial ………………………………………… ..307
2-3-Extension en rupture manifeste avec le sens initial ………... ..309
3-Stéréotypie et les limites de l’extension polysémique……………….. ..311
3-1-La stéréotypie peut-elle être un facteur de blocage de la
polysémie ?…………………………………………………… ..311
3-2-Variabilité indéfinie de sens ou superposition
stéréotypique ?……………………………………………… ..319
Troisième chapitre-Stéréotypie et figement ……………………………. ..328
1-Le stéréotype dans les séquences figées : entre transparence et
opacité ……………………………………………………………… ..329
1-1- Repositionnement de la problématique…………………….. ..329
1-2- Stéréotypie et expression de l’intensité avec « comme »….. ..334
1-3- Formations figées d’origine discursive……………………… ..338
2-Stéréotypie et structuration du sens dans les unités polylexicales :
univocité ou pluralité ?…………………………………………… ..343
4
2-1- Rôle déclencheur du sens ………………………………… ..343
2-2- Stéréotype de relais ………………………………………….. ..345
2-3- Rôle manifeste au niveau de la synthèse sémantique ……… ..347
. 2-3-1- Les séquences fondées sur un mécanisme
inférentiel………………………………………… ..348
2-3-2-Les séquences fondées sur un mécanisme tropique …. ..350
-Métaphore fondée sur une dimension axiologique ………. ..350
-Métaphore à valeur prototypique ………………………… ..351
- Métaphore fondée sur une dimension analogique ………. ..353
- Figuration symbolique ………………………………… ..353
3- Stéréotypie et dimension contrastive……………………………. ..359
Quatrième partie : Le traitement lexicographique de la stéréotypie……….. ..366
Premier chapitre-Stéréotypie et définition……………………………… ..369
1-Structures syntaxiques et morphologiques et expression des
relations sémantiques……………………………………………… ..369
1-1- La relation d’inclusion à travers la structure N de N entre
rigidité et variation…………………………………… ..370
1-2- Régularité morphologique et paraphrase synonymique : le
cas de dérivés exprimant l’idée d’opposition……………… ..373
1-3- La relation de détermination à déterminant indéterminé
ou indéfini et le rapport à la norme : le cas de la
relativisation par « (qui est) considéré
comme »………………………………………………………. ..375
2- Stéréotypie : idéalisation, pertinence et représentation effective….. ..378
2-1- Référents statiques ou évolutifs, données perceptives et
idéalisation : le cas des noms de métaux et de fruits……… ..380
2-2- Catégorie référentielle subordonnée, multitude des
spécificités et catégorisation culturelle : le cas des noms de
chiens………………………………………………………… ..387
2-3- Limites de la définition minimale et représentation
effective stéréotypique : le cas des noms de récipients de
cuisine……………………………………………………… ..391
3- Modalité de présentation des stéréotypes définitoires……………… ..397
3-1- Degré d’accord entre les différents dictionnaires :
tendances communes et spécificités………………………… ..397
3-2- Modalisation de l’information stéréotypique………………. ..406
3-3- Synthèse………………………………………………………. ..412
Deuxième chapitre : Stéréotypie et traitement lexicographique de la
polysémie………………………………………… ..417
1. Le rôle des catégories syntaxiques et des mécanismes sémantiques
dans la variation du traitement du sens à l’intérieur des articles
lexicographiques…………………………………………………… ..419
1.1. Le traitement homonymique et la donnée stéréotypique….. ..420
1.2. Polysémie systématique et donnée stéréotypique…………... ..432
1.3. La variation du traitement du sens à l’intérieur des
articles lexicographiques…………………………………… ..438
2. La variation du contenu sémantique d’un dictionnaire à un autre ..444
3- Variation de la distribution de l’information à l’intérieur de
l’article lexicographique………………………………………… ..454
3-1- La variation des marqueurs définitionnelles………………. ..454
5
3-2- Variation et fonction des exemples………………………….. ..457
3-3- Fonctions des synonymes et des antonymes………………... ..460
Troisième chapitre : Traitement des stéréotypes figés…………………. ..465
1. De la difficulté du traitement lexicographique du figement ………. ..465
2. Pratiques lexicographiques…………………………………………. ..468
3. Transposition des séquences figées stéréotypées dans un
dictionnaire bilingue……………………………………………… ..475
3.1. La correspondance…………………………………………… ..475
3.2. L’équivalence…………………………………………………. ..478
3.3. La paraphrase………………………………………………… ..479
Conclusions et perspectives……………………………………………………. ..482
1- Conclusions…………………………………………………………….. ..482
2- Perspectives …………………………………………………………….. ..487
Bibliographie………………………………………………………………….. ..490
Les annexes
Premier chapitre- Stéréotypie et définition
Annexe I.1 : configuration canonique des définitions ayant un hyperonyme du
type variété de + N……………………………………………………. 515
Annexe I.2 : Significations savantes et ordinaires de genre, espèce et variété
dans le TLF………………………………………………………………. 516
Annexe I.3-a : Idée de distinction rattachée à type et catégorie dans le TLF…… 516
Annexe I.3-b : Exemples de définition…………………………………………. 517
Annexe I.4 : Spécification d’un contenu vague dans la définition du N
déterminant……………………………………………………… 517
Annexe I.5 : Spécification sur la base d’une similitude avec un trait de la
définition primaire………………………………………………. 518
Annexe I.6 : Hyperonyme générique lié à une multitude référentielle…………. 518
Annexe I.7 : Configuration sémantique de sorte de + N dans le TLF………….. 518
Annexe I.8 : Idées d’inclusion et d’atypicité rattachées à la structure sorte de +
N…………………………………………………………………… 519
Annexe I.9 : Sorte de + N : Exemples d’idée d’approximation non corrélée 520
avec une idée d’inclusion………………………………………...
Annexe I.10 : Structure N deN et rapprochement avec une instance
prototypique…………………………………………………….. 521
Annexe I.11 : Liste de mots figurant sous l’entrée anti- dans le TLF………….. 521
Annexe I.12 : Paraphrases de anti dans des définitions d’objets……………….. 522
Annexe I.13 : Variation portant sur l’adjectif ou le nom désigné par la base….. 522
Annexe I.14 : Degré d’intensité relatif à certains mots exprimant l’idée
d’opposition selon le TLF………………………………………. 523
Annexe I.15 : Variation dans la paraphrase du préfixe anti-…………………… 523
Annexe I.16 : Variation touchant les significations de la base et du préfixe…… 524
Annexe I.17 : Définition totalement cadrée par la structure qui est considéré
comme…………………………………………………………. 525
Annexe I.18 : Définition partiellement cadrée par la structure qui est considéré
comme…………………………………………………………… 525
Annexe I.19 : Divergence de la vision normative d’un dictionnaire à un
autre……………………………………………………………... 526
Annexe I.20: Distribution des configurations paraphrastiques selon les trois
types de traits dans chaque dictionnaire………………………… 527
Annexe I.21 - État des métaux dans la nature…………………………………... 528
6
Annexe I.22 : Type de configuration des définitions des métaux dans les
différents dictionnaires………………………………………….. 532
Annexe I.23 - Les métaux : variation…………………………………………… 533
Annexe I.24 - Les métaux : traitement des traits propriétés physiques………… 534
Annexe I.25 - Les métaux : répartition des traits (nombre) selon les
dictionnaires…………………………………………………….. 542
Annexe I.26 a) Répartition des traits traités (nombre) selon les métaux………. 542
b) Répartition des traits traités (nombre et pourcentage) selon les
groupes de métaux……………………………………………….. 542
Annexe I.27 : Définition d’amande dans le Petit Robert………………………. 543
Annexe I.28 - Les fruits -a) La couleur………………………………………. 543
b) La forme………………………………………….. 544
c) Le goût……………………………………………. 544
Annexe I.29 : Quelques hyperonymes « culturels » dans les définitions des
variétés de chiens……………………………………………… 545
Annexe I.30 - Définition de la race par l’origine ou l’emploi………………….. 546
Annexe I.31 : L’origine : variation……………………………………………... 546
Annexe I.32 : La fonction : variation…………………………………………… 547
Annexe I.33 : Traits distinctifs dans le même dictionnaire……………………... 548
Annexe I.34 a) : Traits distinctifs entre deux dictionnaires ou plus……………. 549
Annexe I.34 b) : Définitions génériques………………………………………... 549
Annexe I.35 : Définitions minimales par l’origine et la fonction………………. 550
Annexe I.36 : Présentation de l’échantillon de corpus relatif aux récipients de
cuisine…………………………………………………………… 550
Annexe I.37 – La famille /bouteille/ : matière et forme………………………… 551
Annexe I.38 - Récipients /à boire/ : Configuration des traits…………………… 552
Annexe I.39 – Récipients pour conserver les liquides : configuration des traits.. 554
Annexe I.40 - Tableau de croisement…………………………………………... 558
Annexe I.41 a) Métaux : fréquence des traits non modalisés dans tous les
dictionnaires……………………………………………………... 559
b) Métaux : fréquence des traits modalisés ou objet de variation
dans tous les dictionnaires ………………………………………. 563
Annexe I.42 Chiens : fréquence des traits non modalisés dans tous les
dictionnaires……………………………………………………... 565
Annexe I.43 - « Chiens » : répartition des exemples…………………………… 569
Annexe I.44 a) Récipients : fréquence des traits non modalisés dans tous les
dictionnaires……………………………………………………... 571
b) Récipients : fréquence des traits modalisés ou objets de
variation dans tous les dictionnaires…………………………….. 575
Annexe I.45 Fruits : fréquence des traits non modalisés dans tous les
dictionnaires……………………………………………………... 578
Annexe I.46 Fruits : traitement modalisé……………………………………….. 582
Annexe I.47 Chiens: traitement modalisé………………………………………. 583
Annexe I.48 Récipients : traitement modalisé………………………………….. 584
Annexe I.49 Récipients : traitement modalisé………………………………….. 587
Deuxième chapitre- Stéréotypie et polysémie
Annexe II.1 - Traitement d’approfondissement dans les différents dictionnaires 590
Annexe II.2 – Regroupement/dégroupement : rôle des critères syntaxiques…... 590
Annexe II.3- Traitement de "droit, droite"…………………………………….. 592
Annexe II.4- Traitement de "gauche"………………………………………….. 595
7
Annexe II.5 - Classification selon le critère syntaxique dans Le Petit Larousse 598
Annexe II.6 - Traitement de Haut………………………………………………. 599
Annexe II.7 - Traitement homonymique et traitement polysémique dans Lexis 603
Annexe II.8 a) - “boeuf-viande”……………………………………………….. 612
.8 b) - « vache-viande »…………………………………………….. 612
c) – taureau…………………………………………………………. 612
d) - génisse ………………………………………………………… 612
e) - « poulet-viande »……………………………………………….. 613
f) - « poule, coq-plat »……………………………………………… 613
Annexe II.9 - "animal-viande" : traitement du TLF…………………………….. 615
Annexe II.10 - "animal-viande" : Traitement du Petit Robert…………………. 618
Annexe II.11 - "animal-viande" : traitement du Petit Larousse………………... 621
Annexe II.12 - "animal-viande" : Traitement de Lexis…………………………. 624
Annexe II.13 - "animal-viande" : Traitement de Hachette……………………... 627
Annexe II.14 a) – Animaux : extensions polysémiques……………………….. 629
Annexe II.14-b) Modalité d’explicitation des relations sémantiques…………... 632
Annexe II.15 - Structuration des significations des mots polysémiques ………. 635
Annexe II.16 - Sensations / sentiments…………………………………………. 643
Annexe II.17 -Les indicateurs…………………………………………………... 651
Annexe II.18 : Variation du contenu des extensions polysémiques……………. 655
Annexe II.19 : Charges axiologiques des exemples……………………………. 661
Annexe II.20 : La modalisation………………………………………………… 667
Annexe II.21 - La distribution des stéréotypes liés à l'appartenance à une aire
géographique………………………………………………………. 669
Annexe II.22 - La distribution des stéréotypes relatifs aux noms de professions 670
Annexe II.23- La distribution des stéréotypes relatifs aux noms d'ethnies…….. 672
Annexe II.24 a - La distribution des stéréotypes relatifs aux classes sociales…. 677
Annexe II.24 b - Les représentations péjoratives……………………………… 679
Annexe II.24 c - Les représentations mélioratives……………………………... 680
Annexe II.25 - La distribution des stéréotypes relatifs aux idées, aux opinions 681
Annexe II.26 : Charges stéréotypiques figurant sous une autre entrée…………. 686
Annexe II.27 : Fonctions des synonymes et des antonymes…………………… 687
Troisième chapitre- Stéréotypie et figement
Annexe III.1 - La variation de la figuration de quelques expressions figées….. 688
Annexe III.2 : Variation de la paraphrase définitoire de quelques expressions
figées…………………………………………………………….. 689
Annexe III.3 : Explicitation des contenus sémantiques de la tournure
locutionnelle à la manière de+ nom ethnique dans le TLF…… 690
Annexe III.4 : Modalités d’emploi des expressions figées dans le discours à
travers les citations du TLF…………………………………… 692
8
Introduction
« La langue n’est pas une simple nomenclature », c’est l’une des rares
assertions qui fait l’unanimité entre les linguistes de tout bord. Cependant, une
question aussi naïve que la suivante « pourquoi ne le serait-elle pas ? », justifie
tout le programme de la sémantique et sous-tend la divergence entre les
différentes théories référentielles, structurales, pragmatiques etc.. Autrement
dit, si la signification des mots ne rend pas exactement les propriétés des choses
auxquelles ils réfèrent, comment interpréter cette part du sens plus ou moins
importante qui ne relève pas de la nature des faits mais de la représentation ?
Une première réponse intuitive et plus ou moins neutre verrait à l’origine de
cette non coïncidence une représentation à propos d’un référent donné, se
présentant comme un écart par rapport à sa réalité ontologique ; une telle
représentation devrait être à la fois partagée par la communauté linguistique
d’une langue donnée et relativement stable pour que le signe puisse fonctionner
normalement dans l’interaction et la production verbales. Il en résulterait une
certaine obligation imposée par la norme sociale et assurant
l’intercompréhension au sein d’une communauté linguistique donnée. Or, ce
sont ces trois propriétés « association », « répétition », « obligation » qui
définissent la texture du stéréotype, du moins comme le souligne Denis Slakta
(1993) ou comme le formule Hilary Putnam (1975).
Cependant, aucun de ces trois paramètres n’échappe à la controverse.
L’association d’une représentation à un référent peut être arbitraire (bêtise/balai
dans bête comme un balai) ou motivée (saleté/cochon dans sale comme un
cochon). Cette différence implique des modes d’appréhension cognitifs
différents (l’arbitraire n’étant explicitement pas fondé sur une catégorisation du
type sélection-généralisation), ce qui ne serait pas sans conséquences sur
l’homogénéité du fait stéréotypique et sur l’univocité des critères auxquels il
9
répond. En outre, la motivation est également partagée avec certains
mécanismes tropiques (notamment la métaphore et la métonymie) ce qui
impose l’étude d’éventuels recoupements ou distanciations de sa configuration
dans les différents foyers. A cela s’ajoute le fait que les représentations peuvent
se greffer au sens primaire ou initial comme elles peuvent affecter des sens
dérivés ou polysémiques, ou encore des expressions figées.
Quant à la répétition, elle fait appel à son antonyme : la variation. La langue est
une source inépuisable de faits qui prouveraient les limites du phénomène
stéréotypique tant sur le plan synchronique (variation d’un locuteur à un autre
ou d’une communauté à une autre) que sur le plan diachronique (variation à
travers le temps). Évidemment, cette variation n’a pas la même ampleur selon
qu’il s’agit de séquences figées ou d’unités monolexicales.
Enfin, l’obligation, résultant des deux premiers paramètres, pourrait être
relativisée par la différence des univers de croyance et des échos idéologiques
ou sociolectaux dans la langue comme dans le discours.
Devant ce caractère relativement inconstant des éléments définitoires du
stéréotype, aurons-nous besoin d’introduire cette notion dans le champ de la
linguistique ?
La clef de la réponse à cette question réside dans la nature même de la
langue. Raccah constate qu’ « une langue, quelle qu’elle soit, ne permet en
aucun cas de décrire objectivement des faits, mais oblige, au contraire, à les
présenter en fonction d’un point de vue, d’un biais » (1992 : 8). Autrement dit,
parce que la langue n’est pas une nomenclature, les signes linguistiques
présentent généralement, si ce n’est toujours, une part d’arbitraire, d’écart,
quant à leur référenciation aux objets et aux êtres du monde.
Ainsi, le contenu stéréotypique, généralement admis au moins comme
une représentation dont les dénominations linguistiques diffèrent selon les
optiques, ne peut être étranger au domaine de la langue appréhendée comme
« vision du monde » ou comme moyen de communication. Au-delà de cette
intuition, la consécration du stéréotype en tant que notion linguistique nécessite
la réponse à des questions qui visent à délimiter son champ d’applicabilité, sa
10
nature et son rapport aussi bien au sens en général qu’aux mécanismes
sémantiques qui le génèrent :
- Le stéréotype est-il un fait de langue ou de discours ?
- S’il relève des deux, y a-t-il des critères permettant de détecter son
mode de fonctionnement à chaque niveau ?
- Quel est son impact sur les appréhensions relatives à l’acte de
référence ?
- A-t-il pour foyer les unités simples ou les unités figées ?
A supposer qu’il participe à la signification du premier type d’unités, plusieurs
interrogations seraient légitimes :
-Quel serait son économie dans la signification des mots ? Comment se
définit-il par rapport aux données analytiques de la signification ? Quels
critères permettraient de le distinguer de ce type de données ?
- En quoi diffère-t-il des notions qui lui sont apparentées : « le
prototype », « la connotation », « le virtuème », « le topos » et « le sème
afférent » ?
- Se limite-t-il au champ définitionnel primaire ou, au contraire
participe-t-il à la structuration du sens polysémique ou dérivationnel ?
- Le stéréotype aurait-il une place dans les procédés tropiques
(métaphore et métonymie) de la production du sens ?
- Si le stéréotype a pour foyer le deuxième type d’unités, est-il le
corollaire de toute forme de figement ? Concerne-t-il les unités
compositionnelles, non compositionnelles ou les deux ? Fonctionne-t-il dans ce
cas comme un trait sémantique, comme un scénario ou comme une
image métaphorique?
- Le cadre du système d’une langue suffit-il à saisir toutes ses
dimentions stéréotypiques (particulièrement celles ayant comme foyer les
expressions figées) ou faut-il, pour certaines, les traiter dans un cadre
contrastif pour dégager toute leur ampleur?
- S’il est présent dans les deux types d’unités, est-il régi par des critères
généraux ? Y a-t-il une correspondance entre ses modes de fonctionnement
11
dans les deux cas ? Manifeste-il au contraire un fonctionnement propre à
chaque type d’unités et dans ce cas, serait-on en présence de deux modalités de
représentations stéréotypiques ?
Certaines de ces interrogations concernent l’aspect normatif des unités
de la langue. Il serait donc intéressant d’étudier le traitement réservé aux
stéréotypes dans différents types de dictionnaires censés perpétuer cette norme
pour vérifier les présupposés théoriques avancées à partir d’un corpus précis et
d’un type particulier de discours portant sur la langue elle-même, d’où les
questions suivantes :
- Au niveau de la définition primaire, comment la stéréotypie se
présente-t-elle suivant le type des catégories référentielles ? Quelle est sa
configuration à l’intérieur de chaque type ?
- Comment les traits stéréotypiques sont-ils présentés dans les différents
dictionnaires ? Peut-on parler de régularité dans le traitement des stéréotypes
dans des discours lexicographiques qui se présentent comme normatifs tout en
étant différents les uns par rapport aux autres ?
- Au niveau des catégories polysémiques, la stéréotypie joue-t-elle un
rôle dans la catégorisation controversée du sens en termes de polysémie
systématique et d’homonymie ?
- Quelles formes, la variation du traitement des stéréotypes revêt -elle ?
Comment s’explique-t-elle ? Est-elle liée aux choix lexicographiques ou à la
nature des concepts définis ?
- Pour ce qui est des séquences figées, présentent-elles un problème
particulier au traitement lexicographique ? Comment sont-elles traitées dans les
différents dictionnaires ?
- Quels problèmes particuliers pourraient-elles poser à la lexicographie
bilingue ?
Chacune de ces questions soulève une ou plusieurs problématiques ayant
un écho d’une manière ou d’une autre dans le foisonnement des théories et des
points de vue sur la nature et la circulation du sens. Nous nous proposons d’en
12
étayer les aspects les plus saillants avant de tenter une analyse plus approfondie
du phénomène.
L’étude de la stéréotypie à la lumière de la dichotomie langue/parole
relance tout le débat sur la vision de la langue comme système. L’idée des
représentations se fixant virtuellement dans la signification des mots
perturberait une certaine appréhension des oppositions telles que
inhérence/afférence, fonctionnalité et codification sociale structurant le système
linguistique. Par contre, le rejet de la possibilité d’une telle fixation et
l’interprétation de telles représentations comme étant exclusivement
contingents dans le discours remettraient en cause l’existence d’un sens dès le
niveau lexical ou aboutiraient à une conception de la langue-nomenclature.
Par ailleurs, considérer que ce phénomène relève aussi bien de la langue
que de la parole nécessite une description de son fonctionnement à chacun de
ces deux niveaux pour en déterminer les différences et les similitudes.
Sur le plan de la référence, la stéréotypie, vue comme écart par rapport
aux propriétés ontologiques du référent, donne lieu, selon qu’on la reconnaît ou
qu’on la rejette, à une appréhension holistique de la signification concluant à la
rigidité de la référence ou à une conception trop étroite de la signification (en
termes de conditions nécessaires et suffisantes) où l’acte de référer se
rapproche d’un simple étiquetage.
Le foyer de la stéréotypie est également source de confusion. Ce
phénomène est souvent sommairement évoqué en rapport avec les séquences
figées apparemment pour des raisons diachroniques liées à l’évolution de la
notion. Son appréhension dans le cadre des unités monolexicales est à son tour
partielle (les termes d’espèces naturelles chez Putnam) ou restrictive (en
rapport avec l’argumentation). Une saisie globale du phénomène passe d’abord
par la délimitation de la spécificité de son fonctionnement dans chaque type
d’unité.
L’économie du stéréotype dans la signification du mot révèle un vrai
dilemme : la dimension référentielle du langage est difficile à évacuer puisque
sans cette fonction, celui–ci ne serait qu’une gymnastique verbale et la
13
communication serait impossible. En même temps le signe, de par son signifié,
est associé à un référent donné, actuel ou virtuel, avec lequel il ne coïncide pas
forcément. L’étude de la structure sémantique interne d’un mot donné entraîne
donc inévitablement une prise de position au sujet de la référence. Or, cette
structure implique l’existence de propriétés universelles ou analytiques et
d’autres non universelles ou stéréotypiques dont la nature et le rôle sont
largement controversés.
La parenté entre le stéréotype et des notions recouvrant le même espace
sémantique n’est pas moins problématique. « Prototype », « connotation »,
« virtuème », « topoï », « sème afférent », sont autant de notions relevant
d’horizons théoriques divers mais qui partagent entre elles le vaste champ des
significations non analytiques. Ce foisonnement terminologique témoigne de la
complexité du traitement de cette part du sens. Toute « nouvelle notion » doit
être justifiée par les limites des notions déjà conçues.
A côté du rôle que jouerait le stéréotype dans la signification des mots, il
serait également légitime de vérifier s’il intervient dans la structuration des
sens polysémiques, étant donné que n’importe quel type de trait peut servir de
base pour une extension du sens. Si tel est le cas, il faut alors définir la nature
du lien permettant de passer d’un sens à un autre. Théoriquement, tous les cas
sont envisageables : le sens stéréotypé pourrait être situé à un niveau
translexical, en relation avec le sens initial d’un mot, dans le cadre d’une
rupture avec ce sens ou encore dans le cadre d’un continuum allant de l’un à
l’autre. Aussi, faut-il vérifier si le phénomène stéréotypique permet de
condenser le sens et de nous épargner de « gonfler » le lexique ou, au contraire,
s’il est source de sa profusion.
Le rapport entre la stéréotypie et les tropes (le cas de la métaphore et de
la métonymie) est à son tour problématique. L’idée générale d’inconvenance
ou d’incompatibilité entre les foyers source et cible de ces figures rappelle
d’une certaine manière l’écart entre la réalité ontologique d’un référent donné
et sa représentation stéréotypique. De plus, les tropes en général impliquent des
procédés étagés ayant comme point de départ la catégorisation primaire des
14
unités de la langue au niveau desquelles se situerait le stéréotype. Dès lors, la
possibilité d’un croisement, d’une inclusion ou d’un recouvrement éventuels
n’est pas à exclure. Dans un tel cas, il faut définir les conditions et les
modalités de connexion entre les deux phénomènes.
Pour ce qui est de la stéréotypicité des séquences figées, l’obstacle
premier serait de déterminer sa source. Un parcours rapide des études de
critiques littéraires montre une tendance à définir le phénomène d’un point de
vue formel qui fait de toute expression « toute faite » un stéréotype, d’où la
confusion entre celui-ci et toute forme de figement. L’origine discursive des
expressions figées contribue également à la complexité de son étude puisque le
signifié global de ces unités évoque souvent la mémoire originelle des mots qui
les composent, et ouvre la voie à une description éventuelle du stéréotype en
termes de traits sémantiques. Enfin, le passage du sens littéral (émanant d’une
combinaison d’unités structurées selon les règles de la syntaxe libre) au sens
figé convoque généralement des mécanismes tropiques et/ou inférentiels
engageant des scénarios ou des images qui seraient déterminants dans le
signifié global d’une expression donnée.
Par ailleurs, dans le cadre d’un univers linguistique donné, les
représentations sont intersubjectivement partagées et il se pourrait que la
dimension stéréotypique ne soit pas saisie par les locuteurs dans toute son
ampleur. L’approche contrastive pourrait dans ce sens apporter des
éclaircissements nouveaux sur le phénomène. De même, ces représentations
relèvent des spécificités langagières relatives à chaque communauté
linguistique, d’où la difficulté de leur traduction d’une langue dans une autre.
Si l’on admet la notion de stéréotype dans les deux types de cas, on est
alors confronté à la problématique de l’unicité du phénomène surtout que ces
unités ont des fonctionnements sémantiques fort différents. Ainsi, il y a lieu de
voir si ces spécificités aboutissent à une pluralité divergente des formes
stéréotypiques ou à des caractéristiques générales voire communes coiffant ces
réalisations propres.
15
La définition lexicographique présente par ailleurs une tentative de
l’explicitation de la norme linguistique, d’où l’intérêt de son exploration en vue
de vérifier les présupposés théoriques à partir d’un corpus précis et dans le
cadre d’un type de discours particulier ayant pour objet la langue elle-même.
L’activité définitoire fait appel nécessairement à la faculté de
catégorisation. Celle-ci implique à son tour un système de cognition qui
conditionne notre perception et notre interprétation du réel ainsi qu’un système
d’organisation des faits et de leur représentation dans la langue. Or, les objets
du monde diffèrent selon leur nature de même que les représentations que nous
pourrions en avoir varient selon le degré de leur présence dans notre
environnement immédiat et selon l’usage que nous en faisons. Ceci légitimerait
l’hypothèse d’une diversité des degrés et des aspects de stéréotypicité selon les
types de référents et de propriétés relatives à chaque catégorie référentielle.
Un autre aspect problématique provient de la variation des discours
lexicographiques définissant un concept donné. Un tel fait ne peut être sans
incident sur la pertinence de la notion de « stéréotype ». En effet, la différence
de traitement d’une donnée stéréotypique pourrait infirmer sa stabilité,
condition nécessaire sans laquelle il serait difficile d’admettre un rôle essentiel
du stéréotype dans la sémantique lexicale. Par contre, si l’on parvient à
démontrer une certaine régularité dans le traitement de ce type de données, il
faudrait alors expliquer la nature et l’ampleur des différences enregistrées dans
les dictionnaires ainsi que leur éventuelle incidence sur la présentation des
stéréotypes.
Au niveau des catégories polysémiques, le regroupement et le
dégroupement des sens posent le problème des dissociations inter-catégorielles
(polysémie systématique, nuance de sens, acceptions, sens) et extra-
catégorielles (homonymie). Les deux aspects font souvent l’objet de
controverses. Or, se prononcer sur la catégorisation d’une acception d’un mot
donné évoque inévitablement sa nature et ses liens sémantiques avec d’autres
significations rattachées à la même forme graphique. Le stéréotype serait au
cœur de cette nature et de ces relations. Il serait donc intéressant de montrer, à
16
partir d’exemples précis, s’il constitue un facteur régulateur ou perturbateur de
l’extension polysémique.
Quant à la variation du traitement des données stéréotypiques, il serait
difficile d’en délimiter le foyer et les formes qu’elle pourrait revêtir.
L’extension polysémique est présentée dans le cadre d’une entrée
définitionnelle à composants multiples (indicateur, définition, exemples, etc.).
Chaque composant est susceptible de présenter le concept sous une certaine
facette. La présentation de l’information stéréotypique peut varier d’un
dictionnaire à un autre, allant de la simple mention par l’indicateur, au contenu
définitoire voire à l’illustration par l’exemple. A cela s’ajoute la variation du
contenu formulé au niveau d’un même composant. A travers tous ces cas, il
serait important de vérifier si les différences de traitement sont liées au contenu
sémantique des concepts définis ou si elles résultent d’un choix des
lexicographes. Dans ce cas de figure, s’agit-il d’une politique générale de
chaque ouvrage fondée sur des considérations techniques (volume, public-
cible, etc.) et ce indépendamment des concepts dont il est question dans la
définition ou au contraire, d’une vision idéologique propre aux élaborateurs ou
aux éditeurs de ces ouvrages qui réservent pour certains types de concepts un
traitement particulier ?
Pour les séquences figées, la difficulté essentielle provient du fait que
des unités polylexicales dont le sens est souvent non compositionnel figurent
dans des dictionnaires de langue conçus pour les unités simples. Ainsi, le
choix de l’entrée sous laquelle l’expression figée figure, la place dans l’article
et la paraphrase l’accompagnant, sont tous des aspects problématiques auxquels
sont confrontés les lexicographes.
La traduction de ce types d’unité dans les dictionnaires bilingues pose
d’autres types de problème liés à la différence des univers linguistiques et
culturels. Entre équivalences et paraphrases, le décodage dans l’esprit d’une
langue et l’encodage dans l’esprit d’une autre, les solutions ne sont pas toujours
heureuses. L’approche contrastive devrait permettre d’en déterminer les
17
causes : celles-ci sont-elles toujours dues aux spécificités de chaque langue ou
à la compétence des traducteurs ?
L’ampleur du phénomène, la diversité de ses formes et la multitude des
aspects qu’il touche, témoigne à la fois de son intérêt et de sa complexité.
Ainsi, s’interroger sur le stéréotype, c’est se prononcer sur des aspects
essentiels de la production, de la structuration et de la circulation du sens. Mais,
pour situer ce travail par rapport aux usages qu’on fait de la notion et pour
mieux cerner le cadre de ses objectifs, il importe de commencer par un tour
d’horizon de la question qui permettrait de donner une idée sur les principales
tendances de l’étude du phénomène et les difficultés qui en résultent.
18
- Bernard Fradin considère la représentation sémantique d’un nom
(composée de stéréotypes) comme « une suite ouverte (c'est-à-dire non finie)
d'énoncés » (1984 : 64) ;
- Enfin, J. C. Anscombre avance que « le stéréotype d'un terme est une
suite ouverte de phrases attachées à ce terme, et en définissant la signification »
(2001 : 60).
Cette imprécision et l’absence de tout accord au sujet du stéréotype sont
en grande partie dues à l’origine du terme et aux domaines d’études auxquels il
se trouve rattaché. Ruth Amossy affirme dans ce sens que « le stéréotype se
trouve classé […] dans les rubriques les plus diverses. Tantôt image et
représentation, il est aussi concept, idée, croyance, attitude, jugement » (1991 :
28).
L’imprécision a également conduit à des rapprochements terminologiques
qui entravent son identification comme notion indépendante et autonome, d’où
l’affirmation de Denis Slakta qu’on peut parler du concept du stéréotype mais
non du stéréotype comme concept (1993, 38).
Là aussi, il suffit de passer en revue quelques équivalences
terminologiques qui le rattachent à d’autres notions pour être convaincu du
vague caractérisant son emploi :
- « le cliché et le stéréotype sont devenus des lieux communs » affirme
Isabelle Rieusset (1994 : 22) ;
- Danielle Dubois constate que « le prototype devient un stéréotype dans
la mesure où il est une représentation stabilisée d’un donné physiquement
universel, le monde réel » (1993 : 378) ;
- Blanche Noëlle Grunig parle de « formules banales », de « signifiants
reçus » (1993, 103-106) ;
- Enfin comme le remarque Ruth Amossy « la banalité est stigmatisée à
l’aide de termes divers, qui recouvrent des notions pas toujours clairement
différenciées : on parle de lieu commun, de poncif, de cliché, d’idée reçue, de
stéréotype » (1991, 21).
19
2- les fondements sur lesquels reposent ces définitions témoignent de la
diversité des horizons théoriques et pragmatiques. La définition d’Isabelle
Rieusset met l’accent sur l’origine technique du terme. « D’abord, produits de
l’art des fondeurs, écrit-elle, dont tout le monde s’accorde à rapprocher la
technique de celle qui est employée par la frappe des monnaies, le cliché et le
stéréotype se frappent à même le métal pour recevoir une empreinte. Mais,
lorsque celle-ci est effacée, il ne reste plus qu’une image usée et banalisée
propre à l’échange standardisé » (ibid., 22). Ainsi, d’une technique
révolutionnaire qui a participé à la propagation de la culture livresque, cette
pratique finit par instaurer une nouvelle norme culturelle : « de la
standardisation industrielle pure , [on] passe à la mécanisation de la production
culturelle » (ibid., 15).
Cette vision rejoint celle de Joëlle Prugnaud en ce qu’elle associe
stéréotype et figement.
Le stéréotype devient désormais une composante de la norme sociale et
son étude acquiert de ce fait une dimension sociologique. Libéré de son origine
typographique, il est appréhendé sous un angle nouveau où il est conçu, selon
Pierre Barbéris, comme étant étroitement dépendant :
- « d’un appris et donc d’un apprendre, école sauvage et buissonnière de
la « sagesse des nations », école institutionnelle avec ses musts mémorisés et
propagande sous toutes ses formes hétéro- intoxication et autre intoxication,
culture, propagande ;
- de médias de diffusion étroitement liées aux modes d’inculcation,
oralité conforme, livres de classes, modèles littéraires, presse, radio, télévision,
tout ce qui véhicule sur le mode de la répétition et d’un certain par cœur »
(ibid. :10). Il implique un système de proverbes, de citations obligées et de
phrases toutes faites. Il est rattaché de ce fait, au discours, tout discours oral ou
écrit et donc au texte.
20
S’inscrivant dans le cadre de cette réflexion générale sur le stéréotype,
l’étude de ce phénomène en rapport avec la langue a été entreprise d’abord
dans les analyses de critiques littéraires.
Putnam est le premier qui a étudié son économie dans la représentation
sémantique d’un type particulier de noms (les termes d’espèces naturelles). Son
apport indéniable dans la l’identification du concept reste cependant contraint
par le cadre théorique de son approche s’inscrivant plutôt dans l’optique de la
philosophie du langage.
Enfin, les travaux les plus récents de B. Fradin et notamment de J. C.
Anscombre (surtout depuis 1998 et les années qui suivent) se sont intéressés au
fonctionnement du stéréotype dans une perspective plutôt argumentative ;
3- La stéréotypisation du stéréotype est l’obstacle qui résulte de tous les
autres. Par là, nous entendons la dépréciation qui se rattache au terme. Roland
Barthes parle de « fascisme linguistique ». Isabelle Rieusset voit que « le
concept n’est qu’un stéréotype facteur à la fois de banalisation et d’illusion sur
la nature même du langage et de la réalité » (22). Elle finit par le qualifier de
« crime contre l’humanité » dans la mesure où il « désymbolise la reproduction
du langage » (25). Pour Danielle Corbin, il s’agit d’« une théorie populaire » de
la connaissance et de l’usage des mots. « [C’est] une normalisation
« dégradée » qui n’a plus les exigences du vrai » (385).
Derrière la plupart de ces rapprochements et de ces caractérisations, la
dimension littéraire, véhiculant des charges axiologiques et des catégorisations
de portée générale, est fort présente.
Cependant, l’hétérogénéité de l’emploi du stéréotype et la diversité des
domaines qu’il implique, imposent de dépasser de telles assertions puisque
« tout changement du cadre référentiel exerce une influence sur l’appréhension
du sémantisme de l’unité lexicale concernée par cette transposition et devient
susceptible de favoriser la mise à jour des sèmes spécifiques occultés
précédemment » (Cusin-Berche Fabienne, 2003, 21). Dans ce sens, nos
objectifs n’ont pas pour objet la continuation d’un débat sur le statut du
stéréotype dans de tels cadres, mais de partir de ceux qui se rapportent plus au
21
domaine de la linguistique pour débattre, faits de langue à l’appui, de
l’économie de la notion dans le fonctionnement de la langue.
22
Pour y parvenir, le cheminement de la réflexion sur le phénomène est à
envisager en fonction de deux paramètres essentiels : la nature de l’objet
d’étude et l’état actuel des recherches qui s’y rapportent.
Le premier aspect concerne la nature du stéréotype, sa place dans la
structure interne de la signification d’un concept ou d’une expression, ses effets
sur l’acte de référence et les relations qu’il permet d’établir au-delà du mot et
les modalités de ses manifestations dans le discours. Toutes ces dimensions
inscrivent son étude dans le vaste domaine de la sémantique et précisément la
sémantique lexicale.
Toutefois, l’identification des critères définitoires de la notion du côté de
la langue doit être confrontée à la pluralité de ses formes et aux modalités de
son ancrage discursif. C’est pourquoi l’évocation des différentes facettes que
pourrait impliquer le stéréotype seront traitées selon le besoin de l’analyse :
- l’aspect discursif sera présent tout au long de l’étude puisque toute
signification associée à un mot du côté de la langue demande à être vérifiée
dans le discours. Toutefois, la stéréotypie proprement discursive, c’est-à-dire
celle qui ne semble pas être fixée dans la signification lexicale des mots, ne
sera traitée que dans un cadre polémique ou synthétique ;
- les séquences figées ont déjà un sens inscrit dès le niveau lexical, c’est
ce qui justifie leur traitement dans un chapitre à part et localement en relation
avec certains mécanismes sémantiques (métonymie et métaphore) ;
- la dimension lexicologique sera évoquée surtout pour montrer un rôle
éventuel des stéréotypes dans la génération du lexique (la dérivation par
exemple) ;
- enfin, les études appliquées sont essentielles dans la compréhension du
phénomène au moins à deux titres. Les études lexicographiques permettent
dans ce sens la vérification des hypothèses théoriques concernant la nature et
l’économie de la notion et peuvent rendre compte par là-même d’aspects
insoupçonnés par les postulats de départ. En outre, l’approche comparative
permettrait d’appréhender le phénomène sous un angle contrastif susceptible de
révéler certains aspects difficiles à saisir dans un univers linguistique donnée.
23
Pour ce qui est de l’état actuel de la recherche déjà menée en rapport
avec le phénomène, nous pouvons dégager a priori quatre orientations
principales :
- Se rendant compte que rien ne lui échappe, ni le mot ni la phrase ni le
texte, Putnam entame, dans son article « The meaning of the meaning » (1975),
une première tentative de réhabiliter le stéréotype dans le système de
fonctionnement de la langue en l’envisageant comme une composante de la
signification lexicale des mots. Cependant, s’inscrivant dans le cadre de la
philosophie du langage et appliquée exclusivement aux termes des espèces
naturelles, cette approche n’a pas pu implanter la problématique du stéréotype
sur le plan linguistique. Plusieurs aspects de cette théorie sont à discuter ; les
présupposés concernant la non distinction entre concept et représentation
mentale ou état psychologique dans la critique des thèses dites classiques du
sens et notamment celle de Frege, l’indexicalité des termes d’espèces naturelles
et leur parenté avec les déictiques, la cohérence entre la structure logique de ses
fictions et son contenu, la séparation radicale entre signification et référence
sont autant de questions théoriques auxquelles les réponses ne sont pas
évidentes.
- S’inspirant de la pensée putnamienne, B. Fradin et J. C. Anscombre ont
cherché à mettre les fondements d’une théorie du sens fondé sur le stéréotype
en tant que notion linguistique. Fradin a essayé de dégager des hypothèses
concernant la représentation sémantique des noms à partir d’un type particulier
d’énoncés (cas d’anaphores associatives). Les conclusions auxquelles il est
parvenu sont à vérifier dans un cadre lexical et discursif plus large. Les travaux
les plus récents ont été menés par J. C. Anscombre qui affirme avoir trouvé
dans la théorie du stéréotype une réponse aux lacunes de la théorie des topoï à
laquelle il adhérait. Reste à savoir si cette implantation basée sur une vision
argumentative et non référentielle de la langue parvient à ressortir toute
l’économie du phénomène surtout du côté de la signification lexicale.
24
- Étudiant certaines catégories de textes essentiellement politiques et
journalistiques, l’école française de l’analyse de discours a traité le phénomène
dans le cadre d’une approche discursive. Celle-ci a pour objet l’analyse de
toutes les dimensions discursives (syntaxe, signification lexicale, structures
figées, prosodie, etc.). La diversité des aspects étudiés ne semble pas favoriser
une saisie globale du phénomène en termes de critères généraux ;
- Se basant sur l’origine typographique du terme, le rapprochement entre
stéréotypes et séquences figées est d’abord apparu dans le cadre des critiques
littéraires avant d’être repris ici et là dans des analyses plutôt linguistiques.
L’étude linguistique explicitant le plus ce rapprochement est celle de C.
Schapira (1999) ; elle fait intervenir dans sa description des dimensions
stylistiques et rhétoriques difficiles à formaliser ;
Nous retenons de ces études que le stéréotype n’a pas été suffisamment
décrit du côté de la langue. Or, nous pensons que cet aspect pourrait être d’un
grand intérêt dans la compréhension d’autres aspects plus particuliers tels que
sa présence dans les expressions figées et son fonctionnement dans le discours.
C’est pourquoi nous plaçons notre travail plus précisément dans le cadre de la
sémantique lexicale.
Quant au corpus exploité dans ce travail, il est essentiellement de trois
types répondant chacun à un besoin méthodologique :
- nous retenons les exemples illustrant les analyses de chaque auteur
puisqu’ils font partie intégrante des raisonnements dans lesquels ils figurent et
s’adonnent par conséquent à une éventuelle critique ;
- nous optons pour un corpus relevé le plus souvent dans des œuvres
littéraires disponibles dans la base de données Frantext et occasionnellement
dans la presse écrite (Le Monde) pour traiter d’aspects précis (en rapport
surtout avec la polysémie). Ce corpus servira pour décrire le fonctionnement
des stéréotypes dans le discours. Nous ne préférons pas procéder à un choix
thématique de ce corpus pour montrer le caractère général de la stéréotypie qui
peut affecter n’importe quel type de concept ou de catégorie de discours.
Toutefois, dans le souci de rendre compte de la forte stéréotypicalité de
25
certains domaines de relations, nous privilégions localement un type particulier
d’exemples (notamment en rapport avec la relation homme/femme) ;
- enfin, nous choisissons pour les applications un corpus lexicographique
qui est impérativement thématique vu les exigences suivantes :
le besoin de représentativité : un caractère général éventuel de la
stéréotypie n’empêcherait pas l’existence de catégories référentielles ou
conceptuelles plus sujettes à ce type de catégorisation, des occurrences et des
concepts plus affectés que d’autres dans chaque catégorie et des aspects plus
stéréotypisables pour chaque occurrence ou concept. Deux idées sous-tendent
un tel postulat : la première est que la conventionnalité des représentations
présuppose vraisemblablement que celles-ci doivent porter sur des objets
physiques ou mentaux présents d’une manière ou d’une autre dans la vie des
hommes. La seconde est que notre faculté de catégoriser implique
nécessairement, à un certain moment de ce processus, la sélection, opération
étroitement liée à notre système cognitif qui aurait un accès plus facile à
certains types d’informations plutôt que d’autres. De ce fait, un corpus
d’applications doit être conçu de manière à favoriser la vérification d’une telle
hypothèse, d’où le recours à des catégories thématiques variant quant à leur
degré de proximité par rapport à l’homme et quant à leur nature ;
le besoin de systématicité : cette exigence découle de la première. Pour
percevoir les différences éventuelles de la stéréotypicalité aux trois niveaux
évoqués, le corpus doit être pour chaque thématique le plus exhaustif possible,
sans quoi les résultats obtenus seraient peu fiables.
En plus de ces corpus attestés, nous forgeons un certain nombre
d’énoncés brefs pour illustrer des comportements discursifs en rapport avec la
généricité ou en rapport avec des faits précis (cf. les exemples relatifs au verbe
couper).
Par ailleurs, conformément au cadre de notre travail, le choix des
dictionnaires n’est pas non plus arbitraire. Il répond aux objectifs spécifiques
suivants :
26
- l’intérêt primordial de l’étude lexicographique des stéréotypes n’est
pas de comparer des ouvrages bien que cette dimension soit parfois
incontournable. Il réside surtout dans la description de la manière dont ce type
d’information est présenté dans des perspectives différentes, d’où une première
exigence de la diversité quantitative des ouvrages lexicographiques supports ;
- le discours lexicographique présente une vraie problématique : il est
censé rendre compte de la norme linguistique et en même temps se caractérise
par l’extrême diversité de ses visées théoriques et pragmatiques. Or, la
consécration du stéréotype en tant que notion linguistique dépend crucialement
de la pertinence de son aspect normatif. De ce fait, la diversité, voire la
disparité même des types de discours normatifs est un outil idéal pour mettre à
l’épreuve la stabilité de la notion et son degré de régularité, d’où la deuxième
exigence de la diversité qualitative des dictionnaires ;
- le stéréotype est souvent associé à la compétence du locuteur moyen
d’où l’exigence d’une représentativité plus importante des dictionnaires
destinés au grand public.
En somme, notre travail évoluera en quatre parties :
- dans la première partie, nous présenterons la synthèse des travaux
essentiels(H. Putnam, B. Fradin & J. C. Anscombre, C. Schapira) en rapport
avec les problématiques que pose ce phénomène à savoir celles liées à
l’identification de la notion et de son foyer, à son rapport avec la norme et à
son impact sur les théories générales du sens. L’objectif est de cerner leurs
cadres théoriques respectifs et de discuter les conclusions auxquelles ils sont
parvenus. Pour ce faire, nous présenterons les différentes analyses dans leur
contextes avant d’en faire une lecture critique ;
- la deuxième partie sera consacrée aux notions apparentées au
stéréotype. Chacune de ces notions fera l’objet d’un exposé critique en vue
d’en dégager les implications et les limites. Au terme de cette partie, nous
procèderons à une délimitation des critères définitoires de la stéréotypie et nous
dresserons une typologie des configurations du phénomène selon son économie
dans l’organisation et la circulation du sens ;
27
- dans la troisième partie, nous nous intéresserons à l’analyse du
fonctionnement des stéréotypes dans les procédés et les mécanismes
sémantiques (métonymie, métaphore, polysémie et figement). Nous
commencerons d’abord par une synthèse de chacun de ces mécanismes afin
d’en établir le lien avec le phénomène stéréotypique avant de procéder à la
description sémantique de son rôle ;
- la dernière partie sera réservée au traitement lexicographique des
stéréotypes. Les analyses porteront respectivement sur les définitions, les
extensions de sens et le figement (y compris dans des dictionnaires bilingues
français-arabe). Dans le premier chapitre, seront abordées les questions liées à
l’inscription de la donnée stéréotypique dans les structures syntaxiques et
morphologiques, à la diversité des représentations en fonction des catégories
référentielles et le degré d’accord ou de variation entre les différents
dictionnaires.
Dans le second chapitre, nous étudierons l’impact de la stéréotypie sur les
différents aspects de la structuration polysémique à savoir le regroupement et le
dégroupement des significations (homonymie, polysémie systématique et
organisation interne de la microstructure de l’article lexicographique), la
variation du contenu définitoire (différences, modalisation et signalisation des
acceptions) et la distribution de l’information dans les différents composants de
l’article (marqueur, définition, exemple ou citation, synonymes et antonymes).
Le dernier chapitre sera consacré aux problèmes spécifiques que pose le
traitement des séquences figées, à la description de quelques pratiques
lexicographiques et aux difficultés de leur traduction entre deux langues.
Ces applications ont pour objectif essentiel d’apprécier le degré de
stabilité des informations stéréotypiques dans des discours « normatifs » variés.
28
Première partie : La théorie du
stéréotype dans la sémantique lexicale
29
Dans l’état actuel des recherches sémantiques, si nous cherchons à
trouver des éléments objets d’un consensus général concernant notre rapport
avec la langue, deux postulats semblent être difficiles à nier :
a) la langue véhicule certaines de nos pensées et de nos représentations
qui ne coïncident pas forcément avec les entités extralinguistiques sur
lesquelles elles portent ;
b) l’intercompréhension a besoin pour être assurée d’un minimum de
conventionnalité.
Or, ces deux présupposés semblent fonder l’idée même du stéréotype.
Cependant, au-delà de ce haut degré de généralité, le contenu de cette notion et
le rôle qu’on réserve ou qu’on pourrait lui réserver dans la production et la
circulation du sens restent tributaires de trois facteurs :
- la nature du segment linguistique minimal auquel le stéréotype est
associé ;
- le degré et les enjeux de sa normativité ;
- ses implications dans les théories du sens et de la référence.
C’est que nous nous proposons de voir en détail dans les chapitres suivants.
30
Premier chapitre – Le stéréotype : foyers et
identité(s)
Si l’on passe en revue les rares réflexions et recherches linguistiques où
est investie la notion de « stéréotype », on constate qu’elle est identifiée dans
chaque cadre théorique en fonction du foyer linguistique censé véhiculer ce
type de savoir. Dans l’ensemble, nous relevons trois appréhensions différentes
du stéréotype que nous présentons comme suit :
- une première réflexion le situe au niveau de la signification du mot et
spécifiquement celle du nom à laquelle il participe comme un composant parmi
d’autres donnant lieu à une représentation sémantique globale ;
- une deuxième approche qui, sans trancher avec la première, le rattache
à l’énoncé et plus précisément au syntagme nominal vu comme l’unité
minimale sous-tendant le fonctionnement discursif des unités de la langue ;
- enfin, une dernière perspective, plus proche de l’origine technique du
terme, l’associe à un type particulier d’expressions figées.
31
1985 : 198). Elles représentent « une hypothèse à propos de la compétence du
locuteur individuel »1 (Putnam, 1975. : 191).
Le stéréotype est défini comme « une idée conventionnelle […] d’à quoi
un X ressemble ou comment il agit ou de ce qu’il est »3 (Ibid. : 169). Son
champ d'identification n'est donc pas la phrase mais le mot. Il relève, selon
Putnam, d’«une certaine connaissance linguistiquement obligatoire considérée
conventionnellement comme faisant partie de la signification de nos mots »4
(2001 : 501)
1
« a hypothesis about the individual speaker's competence»
2
«items classified under these headings virtually never have been reclassified»
3
«a conventional […] idea […] of what an X looks like or acts like or is »
4
«some linguistically obligatory knowledge that is conventionally counted as part of the meaning of our words…»
5
«although we have to use a description of the extension, to give the extension, we think of the
component in question as being the extension (the set), not the description of the extension»
6
«x and y agree in important physical properties»
32
l'extension même7 : (Cf. ci-dessus) et non une description de l'extension. Il est
censé combler l'imprécision du composant stéréotypique dans l'acte de
référence et il n'est généralement connu que par les experts à qui les locuteurs
moyens reviennent chaque fois qu'ils trouvent une difficulté à fixer une
référence.
1-1-Le stéréotype
Dans la représentation quadripartite du sens chez Putnam, le stéréotype
est censé rendre compte du savoir préconstruit et commun. Autrement dit, si
les marqueurs syntaxique et sémantique assurent la classification catégorielle
des noms dans leurs domaines respectifs, le stéréotype et l'extension constituent
en quelque sorte le contenu sémantique propre d'un item lexical. Les deux
composants s'opposent dans la mesure où ils traduisent une division du travail
linguistique dans une communauté donnée entre experts et profanes ; l'un
relève du sens commun, spontané ; l'autre du savoir spécialisé et scientifique.
Ce caractère préconstruit est lié à la conventionnalité qui assure l’intégration du
stéréotype dans la signification de nos mots 8 (2001 : 501). De ce dernier critère
semblent résulter deux caractéristiques essentielles du stéréotype putnamien.
En premier lieu, c'est un savoir linguistique obligatoire et nécessaire aussi bien
à la communication qu'à la reconnaissance de l'appartenance d'un membre
donné à une espèce. En ce sens, «les traits centraux du stéréotype sont
généralement des critères-traits qui, dans les situations normales, constituent
des moyens de reconnaître si une chose appartient à l’espèce, ou au moins, des
conditions nécessaires […] pour son appartenance à l’espèce »9(Putnam, 1975 :
7
«we think of the component in question as being the extension (the set)»
8
«some linguistically obligatory knowledge that is conventionally counted as part of the meaning of our words…»
9
«The central features of the stereotype generally are criteria-features which in normal situations constitute ways
of recognizing if a thing belongs to the kind, or at least, necessary conditions […] for membership of the kind…»
33
147). Leur acquisition permet au locuteur de distinguer par exemple les
occurrences qui ne sont pas de l’or est « linguistiquement obligatoire »10. A
première vue, dans les conditions normales, le stéréotype ne diffère pas de la
conception qui voit dans la signification la conjonction d'un ensemble de
propriétés. Le fait de le doter d'un contenu discriminatoire obligatoire pour
décider de l'appartenance ou de la non-appartenance d'une occurrence à une
espèce est en quelque sorte une reconnaissance que l'intension détermine
l'extension même si cette reconnaissance est conditionnée et limitée aux
circonstances normales. La relativisation de ce point de vue est liée à d'autres
caractéristiques du stéréotype que nous verrons ci-dessous.
10
«Knowledge of the stereotype will enable a speaker to do such things as participate in conversations, to rule out
many things as not possible examples of gold etc… Presumably these are the reasons that it is (I claim)
linguistically obligatory to learn, stereotypes when one learns a language»
11
«The linguistic community […], écrit Putnam, has its minimum standard, with respect both to syntax and to
«semantics»
12
«Not all criteria used by the linguistic community as a collective body are included in the stereotype and in same
cases stereotype may be quite weak»
34
(1)- Argent : « Métal d'un blanc brillant, très ductile et malléable,
inoxydable » (TLF)
13
« …our culture speakers are required to Know what tigers look like […] they are not required to know the fine
details […] of what an elm tree looks like»
35
espèce, censé être dénoté par l'item ayant ce contenu sémantique, on ne pourrait
plus prétendre que l'intension détermine l'extension14.
A cela, s’ajoute le fait qu’un stéréotype puisse être dans certains cas
invalidé ; il n'est donc pas nécessairement vrai. Prenons l’exemple de
l’expression du goût que nous pouvons rattacher à un fruit comme « merise »
qui est « légèrement acide » pour le TLF, « au goût amer » pour le Petit Robert et
« âpre » pour Lexis. Dans un tel cas, il n'y aurait aucune garantie que cette
signification servirait à reconnaître ce qui relève ou ce qui ne relève pas d'une
espèce comme il n'y aurait aucune garantie quant à l'intercompréhension dans
la communication puisqu'il y aurait toujours des locuteurs plus rationnels et
moins conventionnels que d'autres. Face à de telles objections, Putnam postule
une hypothèse qui tout en attribuant une certaine valeur de vérité à ces
« critères », les relativise néanmoins. La notion d'approximation lui permet à la
fois de ne pas rompre totalement avec l'analyse vériconditionnelle15 et de
mettre en doute l'universalité du savoir linguistique. Il affirme, dans ce sens,
que «les stéréotypes sont généralement approximativement corrects ou
incorrects, au moins, à propos des membres paradigmatiques d’une espèce et
les locuteurs dépendent tacitement de ce fait ». Tel est le cas par exemple, pour
le trait « couleur » rattaché à abricot : ce fruit a une chair « jaune-orangé » (TLF,
le Petit Robert et le Petit Larousse), « jaune rosé » (Hachette). Le fait qu’un
stéréotype puisse être faux ou partiellement faux et l’exclusion du fait qu’il
exprime souvent une part de vérité à propos d’une espèce ou des membres
paradigmatiques d’une espèce créent un air de mystère là où il n’y a pas. « Le
14
- Notons que dans l'approche du sens en tant que conjonction de propriétés, les traits de la signification qui
permettent de renvoyer à l'extension sont souvent des traits universels et non des traits stéréotypiques.
Dans la théorie de Putnam, ces éléments sont essentiellement classés dans le marqueur sémantique et
dans l'extension (relevant de la compétence des experts). Selon Putnam, même ces derniers ne sont pas
en mesure de référer à l'objet dénommé pour des raisons évoquées ci-haut.
15
– Cf. sur ce point la critique de Rastier (1991 : 78).
36
savoir linguistique […] n’a pas besoin d’être universel pour être utile»16 (2001:
501).
37
De plus, cette conception, n’étant pas fondée sur une distinction entre le fait
lexical et le fait énonciatif, oblige à tenir compte de la « mouvance […]
largement tributaire de facteurs contingents, comme les besoins expressifs des
locuteurs en fonction de leur perception de la réalité à décrire ou l'envie de
transgresser certaines règles à des fins ludiques» (Colette Cortès, 1992 : 15).
18
«a whale is still a fish for a layerperson, but it is mammal according to its reproduction system»
19
.(is not necessarily lexicalized)
38
marqueur n'est qu'un stéréotype plus marqué dont la place est privilégiée à la
tête du vecteur.
Pour la seconde objection, le point de vue défendu par Melka n'est pas
non plus aussi précis. D'abord, qualifier le marqueur de «plus marqué» et d'être
«privilégié en tête de vecteur» demande à définir l'intérêt sémantique et
structurel de telles qualifications. Puis, cette suggestion nous paraît excessive
puisqu’en considérant le marqueur comme étant de la même classe et de la
39
même texture que le stéréotype, nous le privons de son pouvoir classifieur et
par conséquent, nous renions la catégorisation même, fait tout à fait évident
dans le fonctionnement linguistique. «Un truc» ne peut être tenu comme
classifieur au même titre que «figure ». La relation entre un mot et le terme
classifieur qu'il implique est une relation d'hyperonyme à hyponyme où on
dispose pour leur ordonnement de deux patrons «relationnels, irréductibles l'un
à l'autre, car ils se fondent sur des relations diamétralement opposées […].
D'une part, on recourt à une hiérarchie-être qui permet d'intégrer une classe
dans une autre, définie comme englobante […]. D'autre part, on précise une
caractéristique propre à certains individus d'une même classe pour distinguer
des sous-groupes à l'intérieur de la classe de départ […]. On est alors tenté
d'assimiler l'hyperonymie à la démarche de généralisation ascendante, en la
redéfinissant comme une procédure récursive d'emboîtement d'une classe
moins générale dans une classe plus générale d'une part, et, d'autre part,
d'identifier l'hyponymie à la démarche de spécification descendante qui permet
de proche en proche de subdiviser de plus en plus finement une même classe»
(Kleiber & I. Tamba, 1990 : 27).
1-3- L’extension
20
«x and y agree in important physical properties»
21
«we think of the component in question as being the extension (the set)»
40
Cette façon de voir suscite deux types d’interrogations : la première
concerne la pertinence de la distinction entre l’extension et le stéréotype ; la
seconde la fixité du savoir inclus dans l’extension.
Dans les deux cas, il s'agit bien de l'eau typique ; H2O n'est que l'expression
scientifique de l'objet idéalisé décrit par le stéréotype, tout comme le stéréotype
n'est autre que les caractéristiques perceptibles de l'extension pure idéalisée.
Le fait que l'eau puisse avoir dans la nature une infinité d'états n'empêche pas le
stéréotype de référer à l'eau dans tous ses états. L'idéalisation d'une occurrence-
type garantit la fixation du sens. Des énoncés tels que :
(2)- Il y a bien de l'eau mais elle est sale, de mauvais goût, odorante,
etc.…
41
De plus, comme le remarque F.J. Melka Teichroew, Putnam exclut l'extension
de la compétence du locuteur moyen et sépare ainsi radicalement le stéréotype
de l'extension. Or, la distinction entre le savoir commun et le savoir
scientifique est une question de degré. Parfois, il est difficile de dissocier ce
qui 22 revient à l'un ou à l'autre des deux types de savoir ( l’exemple de l’AIDS,
cité J.F. Melka, 1985 : 43). La frontière entre ces deux composants n’est pas
non plus circonscrite : l’information relative à l’extension peut être de même
nature ou avoir la même fonction que le stéréotype (J. Melka, 1989).
Par ailleurs, selon le goût des fictions de Putnam, imaginons que les
experts découvrent qu'en fait ce qu'on a pris pour H2O, correspond à une
substance extrêmement sensible aux moindres variations de l'environnement et
que chaque «eau» est presque singulière tant que sa structure varie selon la
température, la nature des impuretés, etc. Dans ce cas, on imagine mal
comment intégrer l'extension dans le sens d'eau. Quel serait ce sens ? Une
infinité d'extensions obéit-elle à la rigidité de l'indexicalité et au déterminisme
scientifique stricte ? De même, la science évolue et il se peut que ce que nous
prenons aujourd'hui pour H2O s'avèrerait d'une autre structure. Le « vrai » et le
« faux » n'impliquent pas seulement le stéréotype mais également le savoir
scientifique. Dans ce cas, comme le remarque Kleiber toute vérité scientifique
est relative et non acquise et par conséquent aucune détermination de
l’extension n’est définitive (Kleiber, 1985 : 85).
22
«what was pure science 10 years ago, today constitutes everybody's knowledge (note the example of aids)»
23
«we know that there are kinds with common hidden structure, but we don't yet have the knowledge to
describe all these hidden structures»
42
n'interviennent qu'a priori» (Kleiber, Ibid.) après que les locuteurs auraient
isolé et déterminé l'extension.
Or, dans l'optique de Putnam, les traits relatifs à l’extension ne sont pas
analytiques, sinon rien n'empêcherait de traiter le sens selon une conception
componentielle (Cf. note 6 page 9, Putnam 1975 : 191). Ainsi, la circularité de
cette conception du sens reste entière.
43
l’approche putnamienne, ont tenté de réarranger sa configuration de la
représentation sémantique dans deux directions :
- la première, en ne retenant que le stéréotype. Les deux autres
composants du noyau sémantique sont soit assimilés au stéréotype (Cf. ci-
haut), soit simplement omis du champ linguistique (l’extension). D’après
Anscombre (2001b : 55), celle-ci « relève très exactement de l’intension » qui,
en tant qu’elle implique la connaissance et la détermination de la référence, ne
fait pas partie des problèmes linguistiques (Ibid. :53). De ce fait, «…la notion
d'extension, si elle s'avère fondée […], il n'est pas sûr qu'elle doive figurer dans
la représentation sémantique». (Fradin, 1984 : 65.) ;
- la deuxième, en implantant la notion dans le cadre du fonctionnement
discursif des unités de la langue. Il faut toutefois mentionner que Putnam lui-
même fait allusion dans ses écrits à cette dimension en rapport avec les
problèmes de désignation et non ceux de la signification. Il affirme dans ce
sens que « le signe lui-même, considéré indépendamment de son emploi, n’est
pas le concept. Et les signes eux-mêmes ne désignent pas intrinsèquement
quelque chose » (1981-1984 : 29).
Nous nous proposons alors d’explorer plus en détail les aboutissements
de ces deux types de réarrangement en vue d’apprécier le degré de leur
similitude avec la conception du stéréotype putnamien et de retenir quelques
implications de l’investissement de la notion révisée dans le champ discursif.
44
considéré, une phrase stéréotypique» (2001a : 60). Cette signification « peut
être constituée de phrases stéréotypiques… antinomiques» (Ibidem. : 61)
utilisées chacune dans des circonstances énonciatives qui lui sont appropriées.
Ainsi, la conventionnalité qui est supposée assurer la définitude des éléments
constitutifs du stéréotype devient un facteur variable et non absolu de par la
texture ouverte du stéréotype et la non-conformité de son contenu d’un locuteur
à un autre. Le seul point commun avec le stéréotype putnamien semble être,
donc, l'accord sur le refus de l'analycité.
45
(H2) étant formulé comme suit :
(H2) a- Un Nj avoir un / des Ni
b- Un Nj être avec un des Ni
Fradin envisage émettre des hypothèses sur la forme de la représentation
sémantique des noms en général, cependant, le cadre qu’il choisit pour
l’établissement de ces hypothèses se réduit à un phénomène discursif
particulier : celui de l’anaphore associative24. Doit-on comprendre d’après la
règle H1. 2 que tout N doit être anaphorisé dans le discours pour pouvoir
décrire sa représentation sémantique ? Ainsi, des noms figurant dans des
énoncés minimaux tels que :
24
Cette approche soulève plusieurs objections dont nous
citons particulièrement:
-La forme : / x avoir un y / ou / x être avec un y / ne couvre pas la totalité du contenu sémantique stéréotypique
pouvant être rattaché à un nom. Mathide salles remarque dans ce sens que «l'anaphore associative peut se
fonder sur une relation membre-collection» à laquelle «le cadre avoir s'applique mal…» (1995 : 50) ;
- Les règles établies par Fradin concernent exclusivement les anaphores associatives méronymiques
canoniques. Elles excluent par exemple les anaphores associatives locatives ( « suites locatives » dans
le vocabulaire de Fradin) du type Une voiture s'arrêta. Le becquet arrière / l'arceau de sécurité était
tordu ou les anaphores fonctionnelles du type La voiture dérapa : le conducteur s'était assoupi .
46
anaphorique. Puis, indépendamment même de cette contrainte, la condition
postulée dans la règle H1. 3 empêche tout lien de la sorte entre les Ni et les Nj :
A première vue, sa théorie du stéréotype est fondée sur un dilemme. Étant une
liste ouverte de phrases, variant d'un locuteur à un autre, la signification d'un
terme n'a plus, en principe, une structure interne et donc un mot ne peut avoir
une configuration sémantique particulière, opposable aux autres unités de la
langue sauf si la signification est envisagée comme relative à chaque locuteur.
La distinction qu’il opère entre le stéréotype primaire s’intégrant à la
signification lexicale d’un mot et le stéréotype secondaire localement induit par
le contexte (2001 : 63) reste ouverte sur les deux appréhensions de la
signification. De même, si l’on se rappelle que, pour lui, le sens d’une
occurrence d’un terme est la partie de la signification mise en jeu dans le
discours, il est légitime de se demander si ce sens équivaut au stéréotype
secondaire ainsi défini.
47
(8)- Regardant autour de lui, il aperçut par terre une grosse branche qui
avait été oubliée là après les coupes d'automne. (* Ce gourdin + ?? ce
gourdin improvisé) fit hésiter les assaillants
(9)- Regardant autour de lui, il aperçut par terre une grosse branche qui
avait été oubliée là après les coupes d'automne, la ramassa, et
l'empoigna par bout. (* Ce gourdin ? ce gourdin improvisé) fit hésiter
les assaillants.
(10)- Regardant autour de lui, il aperçut par terre une grosse branche
qui avait été oubliée là après les coupes d'automne. Il la ramassa,
l'empoigna par un bout, et commença à battre l'air devant lui (? Ce
gourdin + ce gourdin improvisé) fit hésiter les assaillants». (Ibid.).
(12)- gourdin : «bâton gros et lourd servant à frapper» (Le Petit Robert)
Cette démonstration contredit l’idée d’un sens qui serait une partie de la
signification lexicale du mot sinon rien n’empêche les énoncés précédant le
dernier exemple d’en rendre compte. Faut-il alors comprendre que pour mettre
en évidence le stéréotype primaire d'un terme, le procédé serait de trouver un
contexte qui permettrait de paraphraser sa signification ? Si tel était le cas, il
48
s'ensuit que, dans il cherche un gourdin, gourdin n'a pas de signification
puisque le contexte n'explicite et ne paraphrase ni le stéréotype primaire, ni le
stéréotype secondaire.
(13)- Regardant autour de lui, il aperçut par terre un gros bâton qui
avait été oublié là par un berger ou un paysan. Il le ramassa,
l'empoigna d'un bout et commença à battre l'air devant lui. (Ce gourdin
improvisé) fit hésiter les assaillants.
(14)- Regardant autour de lui, il aperçut une grosse planche oubliée sur
le chantier. Il la ramassa. L'empoigna d'un bout et commença à battre
l'air devant lui. Ce gourdin improvisé fit hésiter les assaillants.
(15)- Regardant autour de lui, il aperçut une grosse barre de fer oubliée
là par les ouvriers. Il la ramassa, L'empoigna d'un bout et commença à
battre l'air devant lui. Ce gourdin improvisé fit hésiter les assaillants.
Si l'on abandonne cette propriété, faut-il décider alors que tout ce qu'on
empoigne d'un bout et dont on se sert pour frapper est un gourdin ?
49
(17)- Qui se ressemble, s'assemble
Pour le second argument, Anscombre asserte que «la plupart d’entre nous
admettraient sans doute d’intégrer dans le stéréotype de fait à la fois Une
hirondelle ne fait pas le printemps et sa contradictoire Il n'y a pas de fumée
sans feu » (2001a : 61). Soulignons, d'abord, que le caractère antinomique de
ces proverbes est à discuter. S'ils le sont vraiment, cela implique qu'un locuteur
X dans une situation énonciative Y a le choix d'opter pour l'un ou l'autre de ces
énoncés mais non les deux à la fois. On peut imaginer une infinité de contextes
où ce choix n'est pas possible. Supposons que deux locuteurs parlent de la
mauvaise réputation d'un haut fonctionnaire soupçonné dans des affaires de
corruption qui n'ont jamais été démontrées. L'un d'eux pourrait bien dire :
Toutefois, ce n'est pas là l'essentiel. Admettons néanmoins que les deux phrases
seraient antinomiques. Anscombre les considère comme faisant partie du
stéréotype de fait, mais il ne fournit aucun moyen de les rattacher à ce terme.
Théoriquement, deux possibilités se présentent : ou bien ils le sont dès le
niveau lexical ou ils ne sont manifestes qu'à travers le discours.
50
n, qui sont reliées entre elles par des phrases génériques G(m, n). Dans la
mesure où la signification d'un terme m est l'ensemble des phrases de type
G(m, n)» (Ibid. : 72).
Soit m le terme fait auquel sont rattachées les deux phrases stéréotypiques
mentionnées ci-haut. Aucune de ces deux phrases, ayant formellement la
structure G (m, n) ne contient le terme fait. Autrement dit, m est
respectivement dans les deux proverbes hirondelle et fumée.
Par ailleurs, même si l’on se libère des contraintes qu'impose cette formule, il
est absurde d'imaginer quelqu'un asserter que le sens de fait est : Une
hirondelle ne fait pas le printemps / ou Il n'y a pas de fumée sans feu.
énoncé qui convient bien à : Il n'y a pas de fumée sans feu. Toutefois, le
terme fait ne figure pas dans cet énoncé, et donc, on ne voit pas comment lui
rattacher cette signification25.
(21)- Tout le monde parle de ce fait. Je ne crois pas qu'il soit innocent,
Jusque là, nous n'avons traité la théorie du stéréotype que sur la base de
la définition mentionnée ci-haut et qui rattache le stéréotype à un terme. Or, la
démonstration du mode de fonctionnement du stéréotype va nous révéler que
l'unité minimale à laquelle s'attache le stéréotype n'est plus le terme mais le
syntagme. «Lorsque nous parlons, asserte Anscombre, nous utilisons des
syntagmes nominaux. Le sens d'une occurrence d'un tel syntagme correspond à
25
- Si tel est l'intention d'Anscombre, elle serait vraisemblablement une reprise de la notion
d'argumentation intrinsèque interne de la nouvelle version de l'ADL (Cf. dans le chapitre suivant notre
critique de cette thèse)
51
l'activation d'un ou plusieurs énoncés stéréotypiques» (Ibid. : 61). Soit par
exemple, les énoncés suivants :
(22)- Max et Lia sont mariés, mais ils n'ont pas d'enfants
(23)- Marie ne peut pas conduire la voiture, car elle n'a pas le permis
52
Si l’on se rappelle que, pour Anscombre, le sens d’un mot est la partie de sa
signification mise en jeu lors de son occurrence, il est légitime de se demander
de quelle signification rend compte l’enchaînement en question.
3- Le postulat qui dit que «la relation ‘être un argument pour’ est une
relation primitive dans la TAL» (Ibidem.), cache le fait que cette relation est en
réalité fondée sur l'existence de phrases génériques et non sur des schémas
53
abstraits. Autrement dit, «la nature argumentative de la langue est donc une
conséquence quasi-immédiate de la généricité non analytique» (Ibid. : 73).
Anscombre soutient que, « pour conserver les thèses d’un dynamisme non
référentialiste de la langue et de la gradabilité du mouvement discursif mais
sans prêter le flanc aux critiques […il abandonnera…] le concept de schéma
binaire gradable, au profit d’un autre concept, celui de stéréotype » (2001, Lynx
47).
54
dans le sens de l’une des acceptions de conduire tant que pour conduire une
voiture, il faut avoir un permis.
ne peut pas être un argument pour l’emploi de mais bien qu’elle soit bien
acceptable et donc peut figurer dans la signification de chercher que certains
locuteurs peuvent partager.
Pour (ii), la possibilité de l'énoncé :
(29)- On dit souvent «quand on cherche, on trouve» mais Max a cherché
et n'a rien trouvé
est la preuve que (27) n'a rien à voir dans la justification de l'indissociabilité de
chercher et trouver.
55
De ce point de vue là, trouver dans Q est le résultat de chercher contenu dans
P. Dans ce cas, chercher dans P et trouver dans Q ne peuvent être
qu'indépendants.
Ainsi, dans :
le résultat dans Q est concordant avec la finalité contenue dans chercher (P).
Dans :
le résultat est discordant avec l'attente contenue dans chercher. Ainsi, se justifie
l'emploi de mais ; il traduit l'opposition entre un résultat et une démarche.
Les termes chercher et trouver figurant dans l'énoncé sont indépendants parce
que le sème /trouver/ inséparable effectivement de chercher se trouve dans le
mot même.
Suivant cette logique, chercher n'a pas de signification dans cet énoncé parce
que justement n n'y apparaît pas. Sinon, quelle phrase générique selon la
formule G (m, n) pourrait ici rendre compte de la signification de chercher ?
Serait-ce «quand on cherche, on trouve» ?
56
Le troisième point, s'inscrit dans la même problématique évoquée ci-
haut. Le fait de considérer «être un argument pour…» comme une conséquence
de la généricité stéréotypique n'est qu'un prétexte pour fixer les méta-prédicats
métalinguistiques P et Q dans les syntagmes de la langue enchaînés dans un
cadre générique. Ainsi, «si m est un argument pour n, c'est parce que du fait de
sa non-analycité, la phrase générique G(m, n) qui est convoquée et instanciée
admet par nature des exceptions, m n'étant donc qu'une bonne raison de croire à
n» (Ibid., 73). Autrement dit, on peut inverser cette logique et dire que toutes
les phrases génériques sont fondées sur un primitif qui est «m être un argument
pour n» sans que rien ne soit changé. Le postulat sur lequel repose la théorie
des topoï est ainsi maintenu. La preuve est que Anscombre lui-même affirme
que «m est un argument pour n» n'est qu'un raccourcissement volontaire, pour
les besoins de l'exposition de «… si un énoncé de telle forme dans lequel figure
m est un argument pour un énoncé de telle autre forme dans lequel figure n…»
(p 73, note 37).
Par ailleurs, les deux théories rencontrent la même difficulté : celle des
enchaînements argumentatifs qui se laissent difficilement exprimer par un
topos ou une phrase générique stéréotypique. Selon Anscombre, «la phrase
stéréotypique n'est pas à proprement parler énoncée. Elle est plutôt évoquée,
mise en place, convoquée, un peu à la façon dont les proverbes sont convoqués
pour appuyer un enchaînement ou un raisonnement» (Ibid. : 63). Admettons.
Mais, soit les énoncés suivants :
(35)- Cette chemise est sale ; je vais m'en servir pour boucher ce
trou
Nous avons là, des énoncés fondés sur des enchaînements argumentatifs. Quels
topoï ou quelles phrases génériques stéréotypiques pourraient sous-tendre ces
57
enchaînements ? Et, selon la formule G(m, n), m étant chemise, quel serait la
signification de ce terme qu'on pourrait atteindre par cette formule ?
58
- le critère stylistique : la locution stéréotypée est définie comme un
énoncé impliquant une rhétorique et une stylistique ; supposant le plus souvent
le recours à une « figure », métaphore , métonymie… ;
Ces critères peuvent être mis en doute au moins à deux égards : leur cohérence
et leur pertinence dans la description de la stéréotypie dans les séquences
figées.
Enfin, le critère qui voit dans les locutions stéréotypées un luxe du lexique, une
alternative expressive à un terme non marqué correspondant est infirmé par
26
Nous ne discutons pas, ici, le fait de considérer de telles formations comme des locutions
grammaticales.
59
plusieurs exemples de locutions censés ne pas présenter une telle alternative
(citées par Shapira, p 20) :
60
Deuxième chapitre- Le stéréotype et les enjeux
de la normativité
Jusque-là, nous nous sommes contenté d’explorer la réflexion sur le
stéréotype considéré du point de vue de sa configuration et de son foyer. Or,
l’identité de cette notion dépend également et surtout de son degré de stabilité.
Autrement dit, le contenu qu’on pourrait lui attribuer et le rôle qu’on lui
assignerait dans la nature et dans la circulation du sens restent largement
tributaires de la façon dont on envisage son rapport avec la norme. Pour cela, il
nous faut revenir, à travers ces différentes approches, sur sa nature-même pour
interroger la portée du critère de la conventionnalité qui lui est rattaché,
réexaminer le concept de la « généricité » qui semble s’imposer comme un
outil de sa reconnaissance potentielle et revoir la capacité des ouvrages
lexicographiques, en tant qu’institutions destinées à perpétuer une certaine
vision de la norme, à en rendre compte.
- «(H1) Tout locuteur d'une langue L dispose d'un certain lexique, i.e. d'une
liste plus ou moins longue de termes […] auxquels il est susceptible d'attacher un
certain nombre de caractéristiques sémantiques […]. J'appellerai l'ensemble des
61
caractéristiques sémantiques attachées à un terme la signification de ce terme, étant
bien entendu que cette signification est relative au locuteur considéré» (Ibid., 60).
- (H2) «Tout locuteur, lorsqu'il parle, i.e. dans son rôle de locuteur parle en
tant que membre d'une certaine communauté linguistique» (Ibidem.).
27
- C'est nous qui soulignons
62
au sujet de la compétence du locuteur individuel à l’exception de l’extension»28
(1975 : 191).
Les différences entre les deux approches ont une répercussion sur la
représentation de la signification lexicale. Pour Putnam, le stéréotype tout
comme l'extension sont des descriptions de la signification d'un mot même si
28
«the components of the vector all represent a hypothesis about the individual speaker's competence, except the
extension»
29
- "Not all criteria used by the linguistic community as a collective body are included in the
stereotype.." (Putnam, 1975 : 147).
63
30
ces descriptions n'arrivent pas à identifier le réfèrent (1975 : 190). Chez
Anscombre, le fait de considérer le stéréotype comme une liste ouverte de
phrases, parfois contradictoires, a pour conséquence l’impossibilité de décrire
la signification lexicale d'un mot en dehors du discours. La raison en est que
nous n’avons plus aucun critère pour décider des contenus candidats à figurer
dans la signification du mot dès son niveau lexical. Autrement dit, si pour un
locuteur donné , à un mot comme argent peuvent être rattachées, selon les
circonstances, des phrases stéréotypiques telles que L’argent fait le bonheur ou
L’argent ne fait pas le bonheur, laquelle de ces deux phrases fera partie de la
signification qu’il a de ce mot ? Conclut-on qu’à l’image des sens d’une
occurrence dans le discours, un mot donné a plus d’une signification lexicale
pour un locuteur considéré et qu’on peut multiplier ces significations
infiniment selon la multiplication des locuteurs ?
De plus, nous savons que les données encyclopédiques que nous pouvons
inclure dans un concept sont effectivement quasi-illimitées tant que l’objet
qu’il désigne ou semble désigner peut être appréhendé sous plusieurs angles et
nous trouverons certainement quelqu’un capable d’en avoir une représentation
sous un angle ou un autre. La question qui se pose cependant est de savoir si
toutes ces données font réellement partie des significations possibles que peut
avoir un terme chez l’ensemble des locuteurs. Une telle idée est contre intuitive
du moment où nous prenons en considération que nos représentations sont
fonction de notre perception, de notre faculté à catégoriser selon un mécanisme
de sélection et donc ne retiennent que les données saillantes à un titre ou à un
autre. Ainsi, si le savoir que nous avons ou que nous pouvons avoir à propos
d’un être comme « chat » reste ouvert, le mot chat tel que nous employons ou
que nous nous représentons ne peut que suggérer un nombre limité de traits ou
30
«My proposal is that the normal form description of the meaning of a word should be a finite sequence, or
«vector» whose components should certainly include the following […] (1) the syntactic markers […] ; (2) the
semantic markers […] (3) a description of the additional features of the stereotype […] (4) a description of the
extension»
64
de phrases stéréotypiques partagés31 même si leur délimitation reste floue ou
approximative. De ce fait, si la texture ouverte de la signification n’est pas si
évidente pour l’ensemble des locuteurs d’une langue, elle l’est encore moins
pour un locuteur isolé dont le savoir, si étendu soit-il, ne peut être que limité.
31
La distinction entre "mot » et « terme » acquiert ici tous son sens.
65
décrit, c’est-à-dire possède au moins quelques termes dont les “critères”
associés sont connus par un sous-ensemble des locuteurs qui acquièrent les
termes, et dont l’usage par les autres locuteurs dépend d’une coopération
structurée entre eux et les locuteurs dans les sous-ensembles pertinents»32
(1975 : 146). Autrement dit, la communauté linguistique est un ensemble unifié
et coopératif qui tient sa légitimité des rôles respectifs de ses parties dans la
transmission de la signification. La nature même de celle-ci est fortement
marquée par cette division du travail linguistique. Ainsi, les traits considérés
comme des conditions nécessaires et suffisantes pour décider de l'appartenance
d'une occurrence particulière à une espèce sont tous présents à l'échelle de la
communauté linguistique dans sa globalité comme le postule Putnam (note 8,
page 11). Mais, l'élément décisif déterminant une telle appartenance n'est
reconnu que par quelques uns (les experts) et ce n'est qu'à travers eux que la
communauté linguistique toute entière possède ces critères : « la façon de
reconnaître acquise par ces locuteurs “experts” est aussi à travers eux, acquise
par le corps linguistique collectif, bien qu’elle ne soit pas acquise par chaque
membre individuel du corps »33 (Ibidem.).
32
«Every linguistic community exemplifies the sort of division of linguistic labor just described, that is, possesses
at least some terms whose associated «criteria» are known only to a subset of the speakers who acquire the terms,
and whose use by the other speakers depends upon a structured cooperation between them and the speakers in the
relevant subsets»
33
«…the way of recognizing possessed by these «expert» speakers is also, through them, possessed by the
collective linguistic body, even thought it is not possessed by each individual member of the body…»
66
Chez Anscombre, cette assertion prend un sens tout à fait différent. Le
locuteur est le premier responsable de la signification qu'il associe au mot, il
peut la modifier, en garder deux versions contradictoires. Celle-ci peut donc
varier d'un locuteur à un autre sans aucune contrainte. La communauté
linguistique qui est censée avoir un rôle fixateur et régulateur de la
transmission de la signification est dépourvue d'un tel pouvoir. Pourquoi ?
67
ci-haut parfois, semble / comme si). Cette conception peut être utile dans un
domaine autre que la signification d'un mot : par exemple, dans l'étude des
sociolectes et des registres de langue (ex. l’emploi de bagnole à la place
d'automobile, etc.).
2- Stéréotype et généricité
La généricité joue dans ce sens, un «rôle clé» (2001a : 57) dans l'identification
de la nature du stéréotype. Selon lui, la distinction entre «le stéréotype primaire
associé de façon stable au mot, du moins au sein d'une communauté
linguistique donnée et le stéréotype secondaire, attaché localement à
l'occurrence d'un terme, et pouvant être en particulier induit par le contexte»
(2001a : 63) «est à rapprocher de la différence entre phrases génériques
typifiantes a priori et des phrases génériques typifiantes locales» (Ibid. : 64).
68
un ensemble ouvert de phrases stéréotypiques. Le premier, c’est que le
stéréotype peut comporter autre chose que les phrases génériques permettant
l’identification des stéréotypes primaires ou secondaires (parmi les phrases
faisant partie du stéréotype…). Il est légitime dès lors de se demander quels
seraient la nature et le statut de cette partie du stéréotype qui reste en dehors
des deux types ainsi définis (primaire et secondaire). Le deuxième élément est
relatif aux phrases génériques nécessairement vraies. Si le savoir véhiculé par
ces phrases doit figurer dans la signification d’un terme, alors on ne peut plus
soutenir que « le stéréotype définit » (2001b : 58) cette signification. Dans le
cas contraire, il est inconcevable d’envisager qu’un tel type de savoir reste en
dehors de la signification.
Pour le deuxième paradigme, «une propriété est essentielle pour une classe, si
elle est commune aux éléments de C» (Ibidem.). On en déduit qu'une propriété
intrinsèque est une propriété essentielle. Les exemples présentés par
Anscombre et illustrant ces deux notions confirment cette similitude : avoir
34
- C'est nous qui soulignons.
69
deux bras et deux jambes pour un humain est une propriété intrinsèque ; avoir
un cœur est une propriété essentielle. On pourrait bien inverser les exemples, le
résultat serait toujours le même.
A partir des similitudes mentionnées ci-haut, nous mettons l'accent sur les faits
suivants pour :
70
- L'extrinsèque essentiel : une propriété partagée seulement par une
sous classe de C ne peut de toute évidence être commune aux
éléments de C35.
- «(Déf. 1) P est une propriété essentielle d'une classe C si Les x sont des P est
une phrase générique vraie. La propriété P est intrinsèque si Les X sont P est
générique a priori (analytique ou typifiante a priori). P est en revanche extrinsèque si
Les X sont P est une générique typifiante locale» (Ibidem.).
-« (Déf. 2) P est une propriété accidentelle d'une classe (si la phrase générique
Certains x sont P est vraie (elle est donc typifiante locale), la phrase Les X sont P
n'étant pas valide» (Ibid. : 60).
35
- Nous reprenons les exemples illustratifs en partie ci-dessus.
71
(38) Les voitures sont chères (Cf. Ibid. : 56 - 57).
Du côté des exemples illustratifs, Anscombre postule que «de ce point de vue,
Certains hommes sont blonds dénote une propriété intrinsèque accidentelle. La
signification même de homme inclut le fait que certains sont blonds et rend
sans objet la question Est-ce que certains hommes sont blonds ? . En revanche,
la signification de train ne comprend pas le fait que certains ont un wagon-
restaurant, et un locuteur francophone pourra effectivement poser la question
Est-ce vrai que certains trains ont un wagon-restaurant ?» (Ibidem.).
En fait, ces exemples reposent sur une vision d'Anscombre qui voit que «les
phrases du type Certains X sont P sont authentiquement génériques»36 (Ibid. :
57).
36
- Anscombre fonde son point de vue sur deux types d'arguments :
1- Ces types de phrase "ont… les propriétés des phrases génériques" (Ibid. : 57).
72
Anscombre trouve chez le locuteur francophone une justification de ladite
«propriété extrinsèque accidentelle». Rien n'empêche d'imaginer qu'un individu
de l'une de ces tribus inconnues dans les forêts d'Australie dont les membres
n'ont jamais vu un homme blanc, ait «la chance» de s'égarer et d'être «instruit»
par un père blanc qui lui enseigne la langue française et qu'à son retour il
l'apprend également à ses confrères. Il serait légitime, dans ce cas qu'un
francophone novice pose la question : Est-ce vrai que certains hommes sont
blonds ? ; une manière parmi d'autres pour nous, de relativiser cette distinction.
Le point de départ est un énoncé comme "Les voitures sont chères", d'où "certaines voitures sont
chères"
L'une des propriétés est qu'un tel énoncé accepte l'exception :
Les voitures sont chères, sauf celle qui ont un moteur diesel
La seconde est l'acception du test de mais :
C'est une voiture, mais elle n'est pas chère
Si l’on applique ces tests à nos exemples, nous aurons des propos pour le moindre dire absurdes :
* Les hommes sont blonds sauf les 3/4 des humains de la planète
* C'est un homme mais il est blond
2- Ce type a des propriétés spécifiques qui fondent sa généricité. L'une des propriétés est le fait d'être
"un argument pour la possession de P par tout x de la classe envisagée. C'est pourquoi, écrit-il, les
raisonnements suivants sont valides (en langue) :
- Méfie-toi des abeilles : la piqûre de certaines d'entre elles est mortelle
- Tu devrais lire des romans contemporains : certains sont vraiment très bons
Il n'est pas du cadre de notre travail de discuter comment cet argument passe pour la classe tout entière
mais signalons simplement que dans ces énoncés, les types en certains sont … ne sont pas en soi en
emploi générique. Ce qui est par contre générique et qui par conséquent nécessite une explication, ce
sont les SN "des abeilles" et "des romans".
73
En théorie, il est clair que la fixité du stéréotype et les outils de sa
reconnaissance restent fort controversés. Toutefois, à l’échelle d’une
communauté linguistique donnée, la norme est également une affaire
d’institution qui essaie de la perpétuer et se porte garant de sa validation. Le
dictionnaire de langue en est une même si, de par son objet, il est au cœur des
débats et réflexions théoriques.
74
sous l’angle du degré de sa scientificité et de son ancrage dans une perspective
théorique donnée.
La première question concerne la nature de l’information
lexicographique et la manière dont elle est présentée. S’agissant du contenu
informatif de l’article, les lexicographes, confrontés à la problématique de la
définition de choses ou de mots, parviennent à un même constat :
l’hétérogénéité de cette définition.
Oscar Ducrot avance que les lexicographes présentent l’accès aux
choses, comme étant l’entrée dans le domaine de la signification. Or, l’objet
d’une définition lexicographique est un mot défini à l’aide d’autres mots ce qui
fait qu’à travers ces renvois de mots à mots, « l’allusion aux propriétés des
choses [n’apparaît] que comme un horizon que l’utilisateur est censé
imaginer » (1995 : 11).
A. Rey, portant un regard épistémique sur l’état actuel de la linguistique
en général, conclut qu’« en l’absence d’une théorie satisfaisante de l’analyse
sémique, la frontière entre cette analyse et l’analyse conceptuelle, logique et
extra-linguistique, est quasiment impossible à tracer » (1977 : 127). Autrement
dit, l’hétérogénéité du contenu lexicographique n’est pas une question de choix
(quelle que soit sa motivation, pédagogique, idéologique, commerciale…) mais
elle reflète l’état des connaissances en général.
J. Dubois, lui, voit que la distinction entre les deux types d’analyse est
théoriquement possible (1971 : 13) bien que, dans les faits, les dictionnaires
soient souvent hétérogènes. La définition lexicographique a des facettes
multiples : en tant qu’analyse sémantique, elle résume le contenu d’un mot ce
qui la met dans la perspective de la définition logique, en tant que tentative
d’une description objective, elle décrit l’objet auquel ce mot renvoie. Mais, de
par sa spécificité, elle ne peut être confondue « ni avec la première […] ni avec
la seconde car elle reste une phrase du discours pédagogique […] » (1971 : 84).
Ce caractère composite et cette singularité du contenu lexicographique
résultent donc d’un choix et répondent à des besoins socioculturels auxquels le
dictionnaire de langue est destiné. Toutefois, même si la possibilité de la
75
distinction entre les deux types d’analyse pouvait être mise à l’œuvre et même
si la définition lexicographique pouvait s’identifier plus à l’une ou à l’autre de
ces analyses, le critère de scientificité n’en demeure pas plus garanti. Selon J.
Dubois, « les définitions de mots et les définitions de choses […] sont toutes en
réalité des définitions culturelles » (Ibid. : 87) et donc idéologiques ; ce qui
rejoint en fait la position d’Alain Rey.
Pour, Josette Rey-Debove (1998 : 277), le fondement même de la
distinction entre le dictionnaire de langue et l’encyclopédie est utopique.
L’impossibilité de les séparer est due au fait que « les prédications d’identité
entre choses [soient] le fondement des significations. Pas de vérité sur le sens
sans vérité sur les choses » (Ibid.). Ici, le caractère composite du contenu
lexicographique ne résulte ni d’une insuffisance théorique, ni d’un choix
pragmatique, il s’inscrit plutôt dans une certaine approche sémiologique du
sens qui voit que « le dictionnaire de langue est en rapport avec une théorie
sémantique de la désignation et non de la signification » (1998 : 20). La
définition lexicographique est, dans ce sens, « le lieu commun au système du
monde (être) et au système des signes (signifier) ; le système du monde étant
explicite et celui du signe seulement implicite » (1970 : 23). Ce fondement
théorique de la signification suffit-il à conclure à la scientificité de
l’information lexicographique ?
La réponse est aussi bien circulaire qu’elle ne l’est avec Rey ou Dubois
puisque, selon J. Rey-Debove, aussi bien le sémanticien que le lexicographe
n’ont pas les moyens d’affirmer que X signifie Y. Il peuvent « seulement dire
que X = (est égal à) Y, ce qui implique identité de choses signifiées (et non de
signes) par inclusion réciproque d’ensembles de choses » (Ibid. : 22).
Pour clore la boucle de la circularité, nous citons le point de vue
pragmatique de Christian Buzon (1979, 39, 40) pour qui les mots restent des
mots du discours tant que leur référence n’est actualisée que dans son cadre.
Dans la pratique lexicographique, la multitude des discours dans lesquels le
mot peut figurer est ignorée (Ibid. : 38). Faut-il encore répliquer que
l’application potentielle d’une telle conception du sens dans la définition
76
lexicographique ne donne vraisemblablement pas une description scientifique
de la signification de par l’infinité des énoncés dans lesquels un mot peut
apparaître et de par le fait qu’il n’y ait plus de définitions mais des énoncés
superposés. Jean Claude Milner (1976 : 64) distingue référence actuelle et
référence virtuelle. Il semble bien que « cette dernière notion saisisse ce qu’on
appelle [...] le sens lexical, et de ce fait, la référence virtuelle d’une unité est
bien ce que tente de représenter la définition du dictionnaire » (Ibid.).
Par ailleurs, la manière dont le contenu lexicographique est présenté
dans les dictionnaires de langue ne donne pas moins lieu à des interprétations
antagonistes. En premier lieu, le dictionnaire est appréhendé comme « une
institution sociale dont la fonction est de définir la norme linguistique » (J.
Dubois, 1976 : 51). Cette normativité se traduit par au moins cinq spécificités
du discours lexicographique :
1- elle définit « l’acceptabilité de tous les termes et de toutes les phrases
contenues dans le dictionnaire » et également « des propositions engendrées
par le modèle socioculturel » (J. Dubois, 1970 : 43) ;
2- elle donne aux exemples signés « une fonction d’attestation »
puisqu’ils bénéficient « d’une présomption de véridicité et de compétence
langagière » (J. Rey-Debove, 1998 : 246) ;
3- elle « masque la fusion du sujet d’énonciation dans la totalité des
sujets parlants [et] donne au dictionnaire la valeur d’une loi […] » (J. Dubois,
1970 : 42). Ainsi, ce sujet collectif « s’identifie avec la langue française [et est]
capable de juger des différenciations régionales, historiques et sociales » (J.
Dubois, 1976 : 52) ;
4- cette instance énonciatrice ne reconnaît que « le présent atemporel : la
langue est une loi et le lexique « un trésor » d’où la durée est exclue » (J.
Dubois, 1970 : 42) ;
5- Enfin, cette normativité implique des « réglementations [qui]
comportent nécessairement des sanctions. Le dictionnaire autorise des mots,
des constructions, des sens les intégrant à « l’usage » de la communauté ; il leur
77
donne force de loi. Inversement, il condamne ou écarte, en rejetant de l’usage
(abusif, incorrect, etc.). (J. Dubois, 1976 : 51).
Or, à chacune de ces spécificités correspond une autre qui la relativise
ou l’infirme en partie :
1’- « Le discours lexicographique n’est pas neutre » (C. Girardin, 1987,
76). Il est sous tendu par les structures idéologiques dominantes relative à une
époque qu’il maintient et assure les conditions de sa durée. (J. Dubois 1976 :
8). Il relève donc d’une « vision du monde », d’une « représentation […] non
scientifique » (A. Rey, 1977 : 6).
2’ – Les exemple et les citations d’autorité « peuvent être l’expression
d’une pensée ou d’un jugement moral, d’une opinion philosophique ou
politique, voire même à l’occasion d’une expérience ou d’un ressentiment
personnel du lexicographe » (B. Quemada, 1968 : 527).
3’- Le dictionnaire est d’abord un texte. Il s’agit donc d’un « discours
fini, tenu sur la langue et la culture » (J. Dubois, 1971 : 8). Et, de ce fait, il
implique une analyse dont le producteur est obligé de « se référer explicitement
ou implicitement à une théorie linguistique » (Ibid., 11) et à une idéologie qui
est celle d’une communauté à laquelle il s’identifie (Ibid. : 54) ;
4’- Le dictionnaire tout comme la langue n’est pas statique. Son contenu
reflétant un « consensus » au sein de la communauté linguistique à une époque
donnée est sujet à variation. J. Rey-Debove constate que « depuis les années
60, de vraies nouveautés sont apparues : on a essayé soit d’abandonner des
informations traditionnelles, soit d’en apporter de nouvelles […] soit de
transformer le discours lexicographique » (1998 : 237) ;
5’- Enfin, la notion de rejet peut ne pas seulement résulter d’un écart ou
d’une conformité par rapport à la norme linguistique mais également d’un
interventionnisme puriste ou d’une modélisation subjective réalisée au nom
d’un consensus pas toujours évident dans la communauté. « La définition, écrit
J. Dubois, fait place au jugement, justifié seulement parce que l’invalidation
repose sur l’histoire […] [or,] la conscience de l’histoire n’est évidement pas la
même selon les groupes sociaux » (1976 : 53).
78
Toutefois, ce n’est pas seulement l’idéologie qui éloigne le discours
lexicographique du discours scientifique. Il y a également la destination
première du dictionnaire de langue en tant qu’outil didactique et pédagogique
et sa matérialité en tant que produit de consommation. Concernant le premier
point, la plupart des lexicographes s’accordent sur la vocation pédagogique du
dictionnaire de langue (J. Dubois 1976, C. Girardin, 1987, J. Rey-Debove
1998). Quatre raisons concourent à ce point de vue :
1- il y a la nature du savoir qu’il dispense. Le dictionnaire s’appuie sur
un niveau de langue moyen «exprimant la pensée métalinguistique naïve
propre à une société » (J. Rey- Debove, 1970 : 8). Sa vocation première n’est
donc pas d’ordre théorique ;
2- son but essentiel est de fournir “des réponses didactiques à des
questions” et de là, il vise à “combler des écarts entre les locuteurs et une
norme linguistique et culturelle préalablement définie” (J. Dubois, 1976 : 11) ;
3- le dictionnaire « possède une fonction d’explication et de
désambiguïsation qui assure en dernier lieu la régularité de la communication »
(J. Rey – Debove, 1970 : 8) ;
4- il est consulté afin de faciliter la communication entre des groupes
socioculturels (J. Dubois, 1976 : 11) ; une communication qu’il ne peut assurer
par son seul potentiel.
Vu dans matérialité, le dictionnaire est également un produit
manufacturé destiné à être commercialisé. L’espace consacré aux articles, leur
contenu, leur présentation sont étroitement liés aux lois du marché (le coût, le
pouvoir d’achat, le profil de la clientèle, etc.).
Ainsi, pour définir le dictionnaire, on ne trouverait pas mieux que les
mots clés définis par J. Dubois (1976) ; il est à la fois un objet culturel, une
œuvre littéraire, un outil didactique, une institution sociale et un produit destiné
à la commercialisation. En tant que texte, il « se distingue, selon A. Rey, par sa
nature linguistique (analyse synonymique d’unités appartenant au code de la
langue), sémiologique (il est articulé en signes dont les signifiés sont eux-
mêmes des signes) et socioculturelle (il définit un univers d’unités signifiantes
79
en tant qu’instruments d’expression et d’information » (1977 : 55). N’étant pas
neutre, il est alors à la fois « un discours sur une certaine description de la
langue et un discours sur l’homme, c’est-à-dire, sur un certain type de culture »
(J. Dubois, 1970 : 47).
Le fait que le discours lexicographique ne puisse être à plusieurs égards
scientifique, n’empêcherait pas, en principe, l’explication de la variation
observée au niveau de ses contenus par la différence des points de vue
théoriques qui le sous-tendent, du moins en partie. Sur ce point, l’interrogation
des positions des linguistes et des lexicographes laisse dégager une quasi-
unanimité sur l’impossibilité de rattacher le traitement lexicographique à une
théorie donnée.
Outre les faits relevés ci-haut : à savoir qu’il est lié à des besoins
socioculturels d’ordre didactique et idéologique, qu’il implique une description
de la connaissance moyenne et naïve d’une communauté et qu’il est difficile de
tracer une limite entre l’analyse sémique et l’analyse conceptuelle, d’autres
faits viennent appuyer ce point de vue. D’abord, l’objet même du dictionnaire
résiste à toute conceptualisation théorique, de par sa grande disparité et ses
irrégularités. « Le lexique des linguistes, écrit A. Rey, composante du système
abstrait de la langue, est un modèle théorique cohérent et confus” (1977 : 5).
Pour J. Rey-Debove, étant l’expression de la pensée métalinguistique naïve
propre à une société, le dictionnaire, « dans ce qu’il a de plus spécifique
s’écarte des vues du linguiste et même des domaines de sa recherche » (1970 :
8) Cf. ci-dessous une modélisation de ce point de vue).
Il y a également l’absence d’accord sur la nature de ce rapprochement
vue la diversité des théories. De ce fait, l’assimilation des paraphrases
définitoires des dictionnaires traditionnels à des descriptions fondées sur plus
d’une théorie sémantique est « une preuve éloquente du fait qu’elles ne relèvent
en réalité d’aucune théorie » (M.Temple, 1996 : 25).
Enfin, selon A. Lehmann (1990 : 209) « les diverses théories sur le sens
(référentielles, logiques…) ne fournissent guère d’outils appropriés à la réalité
du message lexicographique et de sa réception ».
80
Néanmoins, confrontant les dictionnaires à des modèles théoriques, les
linguistes et les lexicographes adoptent des points de vue plus nuancés qui
récusent ou appuient des tendances souvent mises en rapport avec la pratique
des dictionnaires. Selon ces modèles, nous avons pu dégager quatre tendances
que nous présentons avec leurs critiques :
1- Comme le remarque A. Rey, la sémantique des dictionnaires repose
sur une double analycité : « la définition correspond à une tentative d’analyse
sémique et tend à dégager pour chaque signification des traits pertinents ou
sèmes ; puis, les unités lexicales les plus fréquentes sont décrites selon une
répartition du matériel linguistique et des énoncés (définitions, marques
stylistiques, etc.)…(1977 : 17).
Toutefois, cette analycité ne donne pas lieu à une définition d’ordre
logique, ayant pour but la détermination de l’extension d’un concept. La
définition lexicographique, de par son caractère explicatif et non constructif,
accidentel et non essentiel (A. Rey, 1990 : 99) et de par la nature lexicale du
signe sujet de la prédication synonymique s’écarte du concept « sujet d’une
proposition logique » (J. Rey-Debove 1998 : 51).
Cette analycité de la présentation du contenu définitionnel a permis à
certains linguistes d’établir un rapprochement avec l’analyse componentielle de
par la décomposition lexicale en composants prônée dans les deux pratiques
(Melka Teichroew,1989 : 163).
Pour Alain Rey, la définition en conditions nécessaires et suffisantes
relèverait d’un métalangage construit où il s’agirait de « nommer un objet de
pensée supposé clair, préalablement exprimé en langue naturelle, par recours à
des signes supposés correspondre à des objets de la pensée préalables, eux-
mêmes non-ambigus » (1990 : 14). Or, aucun concept ne peut être rendu ou
analysé dans sa totalité en séquence finie dans le langage considéré (1977 :
107). Il conclut donc à l’impossibilité de « grouper les éléments nécessaires et
suffisants à l’élaboration d’un concept isolable, relié d’une manière biunivoque
à une unité lexicale » (Ibid. : 112).
81
J. Rey-Debove s’attaque plus ouvertement aux fondements théoriques de
ce modèle. Elle présente cinq arguments qui font que la définition
lexicographique s’en écarte :
a- le lexicographe opte pour une définition générique où il ne s’agit pas
d’individus mais de classes (1998 : 128). Le modèle de CNS s’appuie, lui, sur
la formule « X est un oiseau si est seulement si C1, C2, C3, etc.» ; ce qui
implique une vérification par les instances idiosyncrasiques d’une classe ;
b- cette généricité donne lieu à une « description positive évocatrice de
la classe » (130) qui prend en compte des conditions non nécessaires. Ainsi, on
pourrait dire que, dans les dictionnaires, la définition est dédoublée en
définition « scientifique » et définition « vulgaire » ; la dernière échappe à la
détermination exigée par le modèle ;
c- la définition par CNS, de par sa nature abstraite, ne rend pas compte
des membres atypiques d’une catégorie (Ibid. : 131) ;
d- ce type de définitions ne présente pas de référentiel total (En cela, elle
rejoint la critique d’A. Rey) parce que les différences dépendent du nombre fini
de mots comparés et s’appuient « sur un lexique à trous qui nomme un univers
à trous » (Ibidem.)
e- Enfin, le modèle sur lequel se fonde la définition lexicographique
n’est « pas celui des CNS comme attributs, mais le modèle aristotélicien du
genre prochain et de la différence spécifique » (Ibid. : 128).
2- Pour Josette Rey Debove le dictionnaire est plutôt, « du côté des
prototypes » (1998 : 127). Le discours lexicographique se situe au niveau du
langage ordinaire. Il s’approche de la définition naturelle qui, selon R. Martin
(1990. : 86), est « celle des mots du langage ordinaire, c’est-à-dire la définition
d’objets naturels » visant la saisie « du contenu plus ou moins vague que
momentanément et souvent inconsciemment les locuteurs y associent » (87).
Cette appréhension de la définition lexicographique permet à Rey-Debove de la
rapprocher de la sémantique du prototype. Elle avance, dans ce sens, trois
arguments :
82
- l’article dans son entier rend compte des emplois les plus prototypiques
et donc ne couvre pas la totalité des effets de sens contingents qui peuvent
apparaître dans le discours ;
- la définition n’est pas rigide puisqu’elle est « une prédication générale
où le prédicat est libre » (1998 : 51) et qu’elle n’admet pas « de trancher par
oui ou non » (Ibid. : 21), du fait qu’elle renferme à côté du contenu
« scientifique » un contenu stéréotypique ;
- à l’instar de l’approche de la théorie du prototype, la définition
lexicographique « module la différence spécifique en mettant l’accent, soit sur
la sous-classe prototypique préférentielle, soit sur une éventuelle multiplicité de
sous-classes prototypiques » (Ibid. : 132).
Pour Alain Rey (1977 : 100), s’il est clair que les définitions
lexicographiques, par CNS ou prototypique sont toujours des variantes de
définition de mots par la langue naturelle, il n’en reste pas moins que la
définition du dictionnaire « s’inscrit tout entière dans la pratique » (1990 : 21)
de par sa dimension didactique et sociale qui vient s’ajouter à la dimension
sémantique. Pour cela, des « notions comme celle de quasi-synonymie, de
« stéréotype culturel » et de « prototype » ou de morpho-sémantique n’ont de
valeur utile qu’intégrées à une théorisation de la pratique » (Ibid.).
3- Geeraerts (1985 : 28) postule que « les alternatives du choix
lexicographique se situent à l’intersection des définitions théoriques de
différentes sortes de signification lexicale et des fonctions pragmatiques du
dictionnaire ». Les types de dictionnaire donnent lieu à une classification
tripartite :
- les dictionnaires encyclopédiques répandant des connaissances
scientifiques de nature extensionnelle ;
- les dictionnaire généraux répandant des connaissances
stéréotypiques relatives à une norme sociale ;
- et les dictionnaires linguistiques ayant pour but primaire de
« donner la description linguistique d’un concept lexical dans sa structure
synchronique ou dans son développement diachronique » (Ibid. : 34).
83
Cependant, vue sous l’angle de l’influence des facteurs pragmatiques,
cette classification paraît plus comme une catégorisation idéale que comme une
description d’un fait. Prenant en considération le public cible non-
professionnel, le dictionnaire encyclopédique est obligé d’intégrer des
connaissances stéréotypiques permettant la représentation effective de l’objet
défini. Le dictionnaire de langue ne peut contourner les données
encyclopédiques et les « prototypes de concepts lexicaux ». En outre, la
stéréotypie à la Putnam est trop étroite pour rendre compte de la variation
sociolinguistique du lexique dont les lexicographes sont obligés d’expliciter.
Enfin, le dictionnaire historique, censé être fondé sur une approche scientifique
« sert en même temps la fonction hermeunétique et communicative consistant à
dévoiler le discours du passé » (Ibid. : 39). Ainsi, « l’approche pragmatique et
le programme lexicographique scientifique […] sont inextricablement liés dans
la pratique lexicographique » (Ibidem.).
84
qu’un nombre réduit d’unités lexicales. Ainsi, pour l’étude de « l’ensemble »
du lexique, nous ne disposons que du dictionnaire de langue qui se veut le
garant d’une norme de l’usage des mots d’une langue donnée. Or, chose bien
connue, les dictionnaires ne sont pas identiques. Le discours qu’ils portent sur
la langue varie à bien d’égards :
- au niveau du contenu propre de chaque définition ;
- au niveau de la catégorisation des significations liées à un item
(polysémie, homonymie, etc.) ;
- au niveau de la représentation et de la distribution du sens entre les
composants d’un article (définition, exemple, indicateur).
A cet égard, la donnée stéréotypique est encore au cœur de cette variation. Si la
langue n’était que pure dénotation, les écarts du traitement lexicographique
seraient moins importants qu’ils ne le soient réellement dans les dictionnaires.
Ainsi, l’étude des différents traitements de cette donnée devrait, en principe,
donner du sens à cette variation : est-elle le résultat d’une appréhension
différente de la signification d’un mot selon la diversité des perspectives
théoriques qui y sont impliquées ? est-elle le produit des usages variés de ce
dernier dans des discours fort hétérogènes ? Ou est-elle l’indice d’une
stéréotypicalité du discours lexicographique lui-même ?
Il nous semble que toutes ces approches controversées du stéréotype
proviennent d’une problématique plus large liée à la nature du sens et plus
particulièrement à sa sortie sur le monde extralinguistique des objets.
85
Troisième chapitre- Théories des stéréotypes et
sémantique contemporaine : enjeux d’un
ancrage épistémique controversé
Dans Anscombre (1998), l'auteur propose d'esquisser les grandes lignes
de l'évolution de la sémantique. Il parvient au terme de cette analyse à dégager
les hypothèses concernant respectivement, la nature du sens, sa représentation
et ses unités. De là, il situe les différents courants linguistiques par rapport aux
hypothèses adoptées que nous résumons brièvement comme suit :
37
- La méthode réductionniste "se propose d'expliquer un ensemble de phénomènes naturels par un
autre ensemble de phénomènes également naturels, mais jugé plus réduit" (Ibid. : 42).
86
- (R2) Étude des phénomènes de sens par une méthode de
simulation38.
La théorie des topoï (p. 43) et la théorie des stéréotypes (p. 48) reposent
typiquement sur (R2).
-Concernant les unités du sens, les hypothèses les plus saillantes sont :
(U1) Les propositions ont un sens littéral
(U2) Les propositions n'ont pas de sens littéral
(U3) Les mots sont des constantes sémantiques
(U4) Les mots ne sont pas des constantes sémantiques
«Bien que théoriquement indépendantes, ces hypothèses vont généralement de
pair. A savoir que bien souvent, une théorie sémantique opte soit pour (U1) +
(U3), soit pour (U2) + (U4)» (Ibid. : 44).
Les théories du stéréotype (celle de Putnam et celle des topoï considérée
comme un type de théorie de stéréotype ; p49) sont fondées sur (U2) et (U4).
Nous nous proposons alors d’étudier les implications de ces fondements à
travers les notions de « représentation », d’« intension » et d’« extension », leur
incidence sur l’acte de référence et leurs retombées sur la saisie et la
description de la signification.
87
« 1- Tout mot qu'il emploie est associé dans l'esprit du locuteur à une
certaine représentation mentale.
2- Deux mots ne sont synonymes […] que s'ils sont associés à la même
représentation mentale par les locuteurs qui emploient ces mots.
3- La représentation mentale détermine, à tout le moins, ce que le mot
désigne » (Putnam, 1990 : 49).
88
En fait, il s'agit au juste, de l'acception d'égalité que Frege a rejetée. Pour
lui, a = b veut dire tout simplement que « les signes ou les noms «a» et «b»
dénotent la même chose » (Frege, 1879-1971 : 102) et il a pris la précaution de
préciser en note qu'il emploie le mot égalité au sens d'identité et qu'il interprète
«a=b» au sens de «a est la même chose que b» ou «a et b coïncident». Cette
relation possible entre les deux noms (ou signes) naîtrait de leur liaison
arbitraire avec le référent désigné . Ainsi, « la proposition a=b ne concernerait
plus la chose même, mais la manière dont nous la désignons ; nous n’y
exprimerions aucune connaissance proprement dite » (Ibid. : 103). Autrement
dit, la dénotation d’un terme n’équivaut pas à son sens40 (Philippe de Pouilhan,
1988 : 48) ; celui-ci étant le mode de donation ou de présentation de la
dénotation (c’est-à-dire de l’objet dénoté).
40
Dans sa lettre à Husserl datée du 24 mai 1891, Frege établit une analogie entre les termes et les noms
propres qu’il schématise comme suit :
énoncé nom propre terme conceptuel
89
1971 : 103). En fait, la dénotation est justement ce que Putnam appelle
l’« intension » définie [pour un ensemble d’objets abstraits appelés « mondes
possibles » , représentant les différents états de choses possibles, ou les
différentes histoires de mondes possibles] comme une « fonction f(M) dont la
valeur pour chaque monde possible M est l’ensemble des objets possibles qui
sont des chats dans le monde M » (1981-1984 : 37). Le sens, lui, est le mode de
donation ou la représentation de l’objet. A travers cette distinction, le rejet
frégéen de la notion d’égalité entre a et b rejoint le point de vue de Putnam qui
voit que « la raison pour laquelle l’« intension » d’un terme (définie de la sorte)
ne saurait être identifiée à son sens est que deux termes quelconques qui sont
logiquement équivalents ont la même extension dans tous les mondes possibles
et donc la même intension » (Ibidem. : 38).
Pour ce, il serait intéressant de définir ce que Putnam entend dire par
«représentation mentale» (qui dans son interprétation équivaut à «concept»)
pour confronter sa définition à celle de Frege et évaluer la pertinence de cette
assimilation.
90
Putnam distingue deux acceptions possibles de ce qui serait «un état
psychologique» ; la première correspondrait à l'état étudié et décrit par la
psychologie cognitive et qui serait trivialement vrai ; la seconde correspondrait
à un état qui ne présuppose aucune existence d'individu autre que le sujet
pensant dont l'état est décrit (Ibid. : 136). Cette seconde acception serait celle
impliquée par les théories « classiques » du sens.
91
Pour ceux-ci, les concepts sont des entités abstraites ; or, écrit Putnam, « si
les significations sont des entités « platoniques » plutôt que des entités
« mentales », dans l’optique de Frege et Carnap, « saisir » ces entités est
vraisemblablement un état psychologique (dans le sens étroit)· De plus seul
l’état psychologique détermine les entités « platoniques »41 (Ibid.: 138). A
partir de cette équivalence entre « saisir un sens abstrait » et « être dans un
certain état psychologique », il avance que les assomptions 1 et 342 ne peuvent
être vraies à la fois.
Dans sa fiction sur Terre et Terre-Jumelle, Putnam déduit que Oscar1 sur
Terre et son Doppelgänger Oscar2 sur Terre Jumelle pourraient être dans le
même état psychologique et avoir la même représentation de l'eau bien que
celle-ci ait deux extensions différentes (H2o sur Terre et XYZ sur Terre-
Jumelle).
Les états psychologiques de Oscar1 et de Oscar2 sont identiques : ils ont les
mêmes convictions, sensations, pensées et monologues internes43 (Ibid.: 141).
Considérer les pensées et les croyances comme faisant partie de l'état
psychologique au même titre que les émotions et le monologue intérieur revient
à nier l'existence de pensées communes que partagent Oscar1 et Oscar2 avec les
membres de leurs communautés respectives et qui peuvent différer des
impressions sensibles qu'ils pourraient avoir à un moment t de leur existence.
41
« Meanings are «platonic» entities rather than «mental» entities, on the Frege Carnap view, «grasping» these
entities is presumbly a psychological state (in the narrow sense). Moreover, the psychological state uniquely
determines the «platonic» entities. So whether, one takes the «platonic» entity on the psychological state as the
«meaning» would appear to be some a matter of convention»
42
1 et 2 dans "the meaning of the meaning" ; l'assomption (3) n'apparaît que plus tard dans Représentation et
réalité
43
«There is no belief that Oscar1 had about water that Oscar2 did not have about water […]. You may even
suppose that Oscar1 and Oscar2 were exact duplicates in appearance, feelings, thoughts, interns monologue»
92
Si ceci est vrai, chacun aurait son eau et il y aurait tant d'extensions que
d'Oscar sur Terre et sur Terre-Jumelle. Frege affirme dans ce sens, que « si
toute pensée a besoin d'un porteur dont elle est un contenu de conscience, elle
est la pensée de cet unique porteur [ou de son Doppelgänger sur Terre-Jumelle]
et il n'existe aucune science commune à plusieurs individus à laquelle ils
puissent travailler ensemble. Au contraire, il se pourrait que j'aie ma science, à
savoir un ensemble de pensées dont je suis le porteur, qu'un autre ait sa science.
Chacun de nous aurait affaire aux contenus de sa seule conscience» (1879-
1971 : 184).
Si tel n'est pas le cas, Oscar1 et Oscar2 pourraient bien partager avec les
membres de leurs communautés une certaine connaissance de l'eau à savoir que
c'est un liquide, incolore, inodore, nécessaire pour la vie, qu'il bouillit à une
certaine température, etc.. Mais, imaginons, également, qu'à un moment donné
l'un sur Terre et l'autre sur Terre-Jumelle, ils se trouvent assoiffés devant une
eau d'étang et qu'ils ne s'aperçoivent pas, de ce fait, que cette eau est
légèrement odorée et qu'elle a un goût quelque peu désagréable ; le jour
suivant, leur soif étanchée, ils s'aperçoivent qu'ils avaient tort puisque cette eau
est effectivement malpropre. Cet exemple montre qu'un état psychologique
diffère nettement de la pensée partagée. Le premier est subjectif et échappe à la
logique du vrai et du faux. Si Oscar1 et Oscar2 ont trouvé l'eau de l'étang
agréable, aucune valeur de vérité ne peut être accordée à leur représentation.
Par contre, le concept de l'eau, décrite dans des conditions idéalisées, peut
relever comme toute pensée de ce qui est faux tout comme de ce qui est vrai
(Ibid. : 173). Si un habitant de la Terre ou de sa sœur Jumelle prétend que l'eau
(ce qu'on appelle communément eau) n'est pas indispensable à la vie où qu'elle
ne bout pas à une certaine température, les autres sont en mesure de juger sa
pensée fausse comme ils peuvent juger que l'eau sur Terre n'est pas XYZ ou
que sur Terre-Jumelle, elle n'est pas H2O, une fois ce savoir leur est disponible
et est devenu partagé par leurs communautés.
93
Ainsi, «on voit [on goûte, on touche, on entre en contact avec] une
chose, on a une représentation, on saisit [un concept] ou on pense une pensée.
Quand on saisit […] on ne […] crée pas. On entre en rapport avec cette pensée
[ou ce concept] qui existait auparavant, et ce rapport diffère de la manière dont
on voit une chose ou dont on a une représentation» (Ibid. : 184). Un concept ou
une pensée sont « indépendants » de nous et, c'est pour cette raison qu'ils
peuvent être saisis par plusieurs. «Mais, si l'on réunit le subjectif et l'objectif
sous le terme de la représentation [ou état psychologique], on efface les
frontières entre l'un et l'autre ; et on ne tarde pas de traiter une représentation au
sens propre comme objective, et une réalité objective comme une
représentation» (Ibid. : 146).
Il est évident que les trois premières parties de la représentation sémantique des
noms sont des parties intentionnelles ou conceptuelles donc relevant de l'état
psychologique selon Putnam (Kleiber 1985 : 198). Reste le quatrième
composant, « l'extension ». Putnam refuse de le considérer comme une
description. Il affirme que « bien que nous devions utiliser une description de
l’extension, donner l’extension, nous pensons au composant en question
comme étant l’extension (l’ensemble), et non la description de l’extension »44
(1975, 191). La notion de sens est alors à envisager en partie «comme quelque
chose de concret : le sens d'eau devant contenir l'extension même d'eau (le set),
comportera obligatoirement l'ensemble de la substance naturelle concrète
44
«Although we have to use a description of the extension, to give the extension, we think of the
component in question as being the extension (the set), not the description of the extension»
94
appelée eau» (Kleiber, Ibid. : 99). Pour reprendre l'expression de Frege dans sa
critique à J. Stuart Mill qui fait pénétrer l'objet dans les états de conscience
l'eau ne risque-t-elle pas de noyer l'état de conscience ? (1879-1971 : 145).
Ce que nous retenons de 1) c'est que «tout mot est associé à un concept» dans
la mesure où la pensée est le sens d'une proposition tout comme le concept est
le sens d'un mot, la pensée et le concept en eux-mêmes inaccessibles au sens,
95
revêtent « l'habit sensible de la proposition » ou du mot et deviennent ainsi plus
saisissables (Ibid. : 193).
96
Nous admettons avec Putnam que « les traits que nous pensons
généralement être présents en connexion avec un nom général, les conditions
générales et nécessaires et suffisantes pour appartenir à l’extension, les moyens
de reconnaître si quelque chose fait partie de l’extension (“critères”) etc.- sont
tous présents dans la communauté linguistique considérée comme un corps
collectif ; mais ce corps collectif répartit le travail de connaître et d’employer
ces diverses parties du « sens » »45 (Putnam, 1975 : 145). Nous admettons
aussi que l'état psychologique individuel tel qu'il est décrit par Putnam ne fixe
pas l'extension ; « c’est seulement l’état sociolinguistique du corps linguistique
collectif auquel ce locuteur appartient qui fixe l’extension »46 (Ibid. : 146).
Signalons qu'une fois l'interprétation du concept comme état psychologique est
écartée 1) et 2) restent intacts ; d'une part, chaque signe est associée à un
concept, d'autre part, l'intension (saisie à l'échelle de la communauté
linguistique) détermine l'extension.
2- L’aréférencialité
Dans son article de 1975, Putnam affirme qu'il adhère entièrement à la
position suivante de Kripke : la description envisagée comme un faisceau de
propriétés ne sont pas utilisées dans la fixation de la référence47 (Putnam,
1975 : 152). De ce fait, l'indexicalité tout comme la rigidité montrent la non
opérationnalité des thèses classiques dans la description de la référence. Il faut
noter que Kripke part de la supposition que nous fixons la référence d'un nom
45
«The features that are generally thought to be present in connection with a general name necessary and
sufficient conditions for member ship in the extension, ways of recognizing if something is in the extension
(«criteria») etc. - are all present in the linguistic community considered as a collective body ; but that collective
body divides the «labor» of knowing and employing these various parts of the «meaning» […]»
46
«it is only the sociolinguistic state of the collective linguistic body to which this speaker belongs that fixes the
extension »
47
«I think […] that the reference of names is rarely or almost never fixed by means of description. And by this I
do not just mean what Searle says : «It's not a single description, but rather a cluster a family of properties that
fixes the reference». I mean that properties in this sense are not used at all»
97
par une description. « Si tel est le cas, écrit-il48, nous ne considérons pas le nom
comme synonyme de sa description, mais nous utilisons le nom rigidement
pour référer à l'objet ainsi nommé même en parlant à propos de situations
contre-factuelles où la chose nommé pourrait ne pas satisfaire la description en
question» (Ibid. : 152).
48
Le texte original est: "Let us suppose that we do fix the reference of a name by a description. Even if
we do so, we do not make the name synonymous with the description, but instead we use the name
rigidly to refer to the object so named, even in talking about counterfactual situations when the thing
named would not satisfy the description in question".
98
cohérence entre ces deux approches de la référence ou si la contradiction et
l’inconstance est une caractéristique de la pensée de Putnam .
2') (pour tout monde w) (pour tout x dans w) (x est de l’eau x porte la
même nature L que l’entité connue sous le nom de « ceci » dans le monde
actuel w1)50 ; donc, eau n'a pas le même sens dans les deux mondes ; ce qu'on
appelle eau en w2 n'est pas de l'eau. L'eau est H2O dans tous les mondes
possibles. Pour Putnam, cette deuxième théorie est évidemment celle qui est
correcte.
(for every world w) (for every x in w) (x is water x bears sameL to the entity referred to as «this» in w)
49
(For every world w) (For every x in w) (x is water x bears sameL to the entity referred to as «this» in the actual
50
world w1)
(For every world w) (For every x in w) (x is water x bears sameL to the entity referred to as «this» in the
51
99
Entre 2') et 2'') il n'y a pas de contradiction logique concernant la structure des
deux propositions ; les deux sont valides selon le principe de l'identité et de la
non-contradiction rationnelles. Cette validité logique affirme leur vérité de
système (le changement des contenus réel ou imaginaire n'implique pas
l'invalidité des deux propositions du point de vue logique).
52
"… the relation between English speakers in w1 and English speakers in w2 is exactly the same as the
relation between English speakers on Earth and English speakers on Twin Earth" (1975 : 148).
53
«there are, not surprisly, a few tiny differences […] between the dialects of English speakers on Earth and
standard English, these differences them selves depend on same of particularities of Twin Earth»
54
« natural kind words like «water» are indexical»
100
2) A partir de la proposition 2'), Putnam construit une deuxième
proposition ayant, pour lui, des conséquences lourdes sur la théorie de la
nécessité vériconditionnelle (startling consequences, 149). Il introduit ce qu'il
appelle la notion de «cross-world-relation» qu'il définit ainsi : « une relation R
entre deux termes sera appelée “cross-world” quand elle comprise de telle
manière que son extension est un ensemble de paires d’individus qui ne sont
pas toutes ordonnées dans le même monde possible. »55 (149).
La relation «même hauteur que» relève, selon lui, de ce type de relation. Ainsi,
si un individu x dans m1 a 5 pieds de haut et y un individu dans m2 a 5 pieds de
haut, alors la paire (x en m1, y en m2) appartient à l'extension de «même
hauteur que» (Éventuellement, écrit-il, un même individu pourrait avoir des
tailles différentes, dans les différents mondes possibles dans lesquels ce même
individu peut exister). Similairement, selon Putnam, on peut comprendre la
relation «mêmeL», (sameL, same liquid as) comme a cross-world relation : un
liquide en m1 a les mêmes propriétés physiques (en m1) qu’un liquide possède
en m2 ce qui implique qu’il est mêmeL (même nature) que ce dernier liquide en
m2. Ainsi, “une entité x, dans un monde arbitraire possible, est de l’eau si et
seulement si elle porte la relation mêmeL (construite comme une relation cross-
world) avec la chose que nous appelons eau dans le monde réel ».56En fait,
cette similitude est fausse. Dans la «cross-world-relation» ayant pour contenu
«même hauteur que», l'identité de la valeur de cette relation n'entraîne pas
l'identité entre l'individu x et l'individu y. Le point de référence dans la
détermination de R tient compte équitablement de la valeur de R dans les deux
mondes possibles.
55
«A two term relation R will be called cross-world when it is understood in such away that its extension is a set
of ordered pairs of individuals not all in the same possible world»
56
«An entity x, in an arbitrary possible world, is water if and only if it bears the relation sameL (constructed) as a
cross-world relation) to the stuff we call «water» in the actual world» (149).
101
Dans l'exemple de l'eau, l'identité porte à la fois sur la valeur de R et sur les
entités relatives aux « deux » liquides. Au lieu de la paire (x en m1, y en m2)
qui devrait résulter de l'exemple illustratif donné plus haut, nous avons la paire
(x en m1, x en m2 tel que x porte mêmeL que x en m1) ce qui reviendrait tout
simplement à 2') puisque le point de référence dans la détermination de R est
fixé par la nature de x dans m1 («bears the same relation to the stuff we call
water in the actual world»).
57
Suppose, now, that I have not yet discovered what the important physical properties of water are (in
the actual world") (1975 : 150).
102
devrait être de l'eau. Comment, donc, Putnam, justifie-t-il le fait de pouvoir
reconnaître l'eau tout en ignorant sa structure ?
La réponse est que, pour tout x , « pour être de l’eau, dans n’importe quel
monde, est pour x avoir la relation mêmeL avec les membres normaux de la
classe d’entités locales qui sont de nature à satisfaire la définition
opérationnelle »58. (1975 : 150) ; laquelle relation «mêmeL» ne serait reconnue
par aucun sur Terre ou sur Terre-Jumelle puisqu'elle n'est pas analytique (si ce
n'est d'ailleurs une libre création des esprits individuels). Ainsi, tout en ne
sachant pas la structure de l'eau, « je peux affirmer, écrit-il, que l'eau sur Terre-
Jumelle n'est pas vraiment de l'eau » (150). Pourquoi ?
Parce que, même si elle satisfait la définition opérationnelle, elle n'implique pas
la relation «mêmeL» que la chose locale qui satisfait cette définition. De même,
une chose locale qui satisfait la définition opérationnelle mais qui a une
structure différente du reste des choses locales qui satisfont cette définition,
n'est pas de l'eau parce qu'elle n'implique pas, elle aussi, le relation «mêmeL»
que les exemples normaux de l'eau locale. Remarquons la circularité de
l'argumentation ; finalement, dans le cadre de cette première supposition, nous
ne reconnaissons pas l'eau puisque nous n'avons aucun moyen pour savoir ce
que c'est la relation «mêmeL» en dehors des propriétés opérationnelles.
A ce stade, Putnam est obligé de trouver une solution pour l'embarras résultant
de 2'')59 à savoir : en tout monde m et pour tout x de m, x est de l'eau x réfère
58 21
«x to be water, in any world is for x to bear the relation sameL to the normal members of the class of local
entities that satisfy the operational definition»
59
Putnam n'a jamais explicité 2'') ; 2'') est une déduction logique qui résulte de 2').
103
à la chose indexée par «ceci» dans m2. La solution est qu’« une fois que nous
avons découvert la nature de l’eau, plus rien ne compte en tant que monde
possible dans lequel l’eau n’a pas cette nature. Une fois que nous avons
découvert que cette eau (dans le monde réel) est H2O plus rien ne compte en
tant que monde possible dans lequel l’eau n’est pas H2O ».60 (1975 : 151-152).
Comment Putnam justifie-t-il le fait de renoncer à sa Terre-Jumelle et au
monde possible auxquels il doit toute l'ampleur de sa théorie ?
A partir de 2'), nous avons démontré que 2'') est logiquement possible.
Putnam ne démontre pas comment il ne l'est pas et comment le concevable et le
rationnel peuvent ne pas être logiques. Il se réfère simplement à Kripke pour
60
«In fact, once we have discovered the nature of water, nothing counts as a possible world in which water doesn’t
have the nature. Once we have discovered that water (in the actual world) is H2O, nothing counts as possible world
in which water isn't H2O»
61
«If a « logically possible» statement is one that holds in some «logically possible world», it isn't logically
possible that water isn't H2O […] we can perfectly well imagine having experiences that would convince us (and
that would make it rational to believe that) water isn't H2O. In that sense, it is conceivable that water isn't H2O. It is
conceivable but it isn't logically possible»
104
distinguer la nécessité épistémique contingente et la nécessité métaphysique où
les énoncés sont vrais dans tous les mondes possibles 62 (Putnam, 1975 : 151).
Nous constatons justement que 2') est de cette seconde nature puisque dire que
« pour tout monde m et pour tout x de m, x est de l'eau si est seulement si x
porte la relation mêmeL que l'unité à laquelle réfère «ceci» dans le monde
actuel», c'est consentir à ce que le réfèrent soit conçu «comme ayant des
propriétés telles qu'elles garantissent son identité à travers les différents
mondes possibles» (Kleiber, 1985 : 93). Ainsi, «l'adhésion à la rigidité entraîne
l'adhésion à l'essentialisme» (Ibid. : 93) ; lequel essentialisme échappe à la
portée de l'intuition humaine, selon Putnam (151). La relation «mêmeL» n'étant
pas empiriquement démontrable pour être valide dans tout m, alors, il s'agit
bien d'une nécessité métaphysique. D’ailleurs, Putnam finit par rejeter plus tard
(1981) ce point de vue qui n’est qu’« une version de la théorie magique de la
référence » (59) puisque dire que « l’eau est H2O » est vrai dans tous les
mondes possibles sans avoir déterminé la référence dans le monde réel par des
contraintes opérationnelles et théoriques revient à présupposer la notion de
référence sans dire si elle fixe ou ce qu’elle est. Nous revenons ainsi dans une
circularité hallucinante à la case de départ où la détermination de la référence
est une affaire sociale.
62
«Statements […] are true in all possible worlds»
63
«This theory cannot be true of natural kind words like «water» for the same reason it cannot be true
of obviously indexical words like «I» (Ibid. : 152).
105
concept qui leur est associé. Trois raisons, ontologique, logique et pragmatique
concourent à ce constat.
En premier lieu, le propre des indexicaux (je, ceci, ici, maintenant) est
d'avoir une extension qui varie selon les contextes et les emplois ; alors que
pour l'eau, l'indexicalité signifie selon Putnam qu’à travers tous les temps, dans
tous les espaces et dans tous les mondes possibles, l'eau demeure de l'eau
(Ibid.: 151) ; une et une seule extension et non des extensions différentes
comme dans le cas du je prononcé d’un locuteur à un autre. Par conséquent, le
propre des symboles indexicaux «réside dans cette nécessité de prendre en
compte le contexte d'apparition de l'occurrence elle-même» (Kleiber, 1985 :
89) alors que le sens des termes d'espèces naturelles «n'oblige nullement le
locuteur à tenir compte à chaque fois du contexte d'énonciation» (Ibidem.).
Dans la fiction de l'eau, les deux Oscar auraient la même représentation de cette
substance bien que celle-ci diffère en extension (H2O et XYZ). De cette fiction,
64
Kleiber défend l’idée que si l'on se place au niveau des référents individuels, le "je" serait "un
concept individuel associé à un emploi d'un symbole indexical [qui] correspond [à] une extension et
par conséquent, le sens état psychologique détermine l'extension"(1985 : 87). De même, "dans
l'hypothèse où l'on définit l'extension de "je" comme étant l'ensemble des locuteurs qui disent "je" (la
classe des locuteurs), il n'y aura comme pour "eau" et "chat", qu'une seule extension et il sera légitime
de maintenir le lien (i) (ii) en invoquant un seul état psychologique (la personne qui dit je) et une seule
extension (la classe des locuteurs" (1985 : 88) et donc l'intension continue à déterminer l'extension.
106
Putnam déduit que les référents individuels de eau renvoient toujours à une et
une seule extension selon la relation mêmeL. Une telle déduction pourrait-elle
être retenue dans le cas du je de Oscar1 et Oscar2 ? D’après le raisonnement de
Putnam, on peut affirmer que oui puisque les deux Oscar ont la même
microstructure génétique et biologique. Oscar1 à travers son je serait indexical
tout comme eau. Mais, le principe de l'intégrité de la personne, fait que malgré
cette identité absolue entre Oscar1 et Oscar2, on ne saurait déduire que le je
dans le monde actuel renvoie à tout individu x de même nature que Oscar1 ou
Oscar2. Donc, il s'agit d'une fausse similitude et les termes d'espèces naturelles
ne peuvent être des indexicaux à la manière de je.
Or, les termes d'espèces naturelles ne relèvent pas de ces pensées subjectives,
sinon chacun aurait son «eau» propre. Si la description (eau pure incolore, sans
goût…) n'est pas synonyme de l'extension, cela n'empêche qu’«eau» est
exprimable par des descriptions objectives telles que «il pense que P». «Ceci
est de l'eau» ne peut être déterminé par la seule «signification du locuteur»
(Grice, 1957). Il faut également, comme le suggère Searle (Cf. Laurier, 1993 :
81-82), faire intervenir les règles ou les conventions du langage :
107
signe et le contexte. L'analyse de cette relation nous oblige à considérer ce que
le locuteur pense à propos de l'objet et à analyser la chaîne causale qui le
conduit d'une information perceptive à l'usage du signe. ( P. Engel, Ibidem.).
Imaginons un visiteur d'une autre planète qui débarque sur Terre et qui,
lui, ignore totalement ce que c'est «de l'eau» ; imaginons également que cette
planète est identique à notre Terre et que le seul élément variable est que les
habitants (parlant le français) ne connaissent l'eau que sous son état solide
qu'ils nomment glace, comme nous d'ailleurs. Si ce visiteur s’informe auprès
de notre « Oscar » sur la nature de cette substance, et, si celui-ci lui répond
ceci est de l'eau, évidement, notre hôte ne comprendra rien. Il est ridicule
que notre Oscar s'amuse à lui expliquer que ceci veut dire comme ceci, c'est-
à-dire comme toute substance sur notre Terre qui se comporte comme ceci.
Arrive-t-il ainsi, à fixer la référence de l'eau ?. Il est clair qu'on ne peut se
passer de la pensée pour fixer la référence. D’ailleurs, Putnam lui-même
rejette dans un autre contexte cette manière circulaire de raisonner.
« Supposons, écrit-il, que je ressente une sensation E. Supposons que je
décrive E, par exemple en disant : « E est une sensation de rouge. Si rouge
veut simplement dire « comme ça », alors l’assertion veut dire « E est
comme ça », dit au sujet de E, c’est-à-dire « E est comme E » -et aucun
jugement véritable n’a été fait » (1981-1984 : 74).
108
Dans l’article de 1975, Putnam affirme que les conclusions qu'il tire de
l'indexicalité sont les mêmes que celles atteintes par la théorie de la référence
causale de Kripke avec laquelle il est en accord. Voyons ce qu’il en découle et
s’il a conservé cet accord dans ses écrits ultérieurs.
Cette théorie trouve son origine dans l'étude de la référence des noms
propres. Un nom propre désigne non par les propriétés que nous attribuons à un
individu et qui peuvent être vraies ou fausses, mais en vertu d'un enchaînement
causal qui remonte au premier emploi (Kleiber, 1985 : 81). Ce mécanisme de
désignation comprend trois étapes :
Or, pour les termes d'espèces naturelles, cette théorie ne semble pas être
valide pour les raisons suivantes :
109
3- Si l’on découvre qu’une erreur s’est produite lors du premier emploi
de sorte que « chat n'a pas renvoyé à un chat mais à un robot», l'emploi actuel
de chat, selon la théorie causale, est également erroné puisque les chats actuels
ne sont pas de la même nature « que l'objet originellement appelé chat» (Ibid. :
83). Une telle conclusion paraît inadmissible.
La conclusion à laquelle il parvient est que, même s’il existe des termes
désignant des choses liées par une telle relation, ce type de connexion ne
constitue pas « le mécanisme unique ou fondamental de la référence » (Ibid. :
79).
110
objets particuliers dans le cadre conceptuel de ces utilisateurs » (Ibid. : 64). Il
s’agit là d’une formulation trop large pour être interprétée comme une reprise
de la détermination sociale de la référence puisque celle-ci présuppose une
division du travail linguistique qui n’est pas inféré par l’assertion : les
utilisateurs peuvent bien être des profanes. En effet, Putnam postule que les
objets à la fois « construits et découverts », « doivent se retrouver
automatiquement sous certaines étiquettes, parce que ces étiquettes sont les
outils que nous avons utilisé au départ pour construire une version du monde
contenant ces objets » (Ibid. : 66). La langue est ainsi une nomenclature qui
résulte non pas d’une catégorisation du sens en termes de conditions
nécessaires et suffisantes mais d’un étiquetage automatique et sans faille des
objets que nous intégrons dans notre cadre conceptuel. L’objet n’est donc pas
« indépendant de l’esprit » mais en même temps sa « substance elle-même
parachève la détermination de la référence » (Ibid. : 36). Encore une fois, selon
les termes de Frege : ne risque-t-elle pas de noyer la/les conscience(s) ?
65
Pour Anscombre, nous trouvons une explication en note dans laquelle il affirme que sa théorie est
«compatible avec par exemple une hypothèse à la Putnam ou à la Fradin d'une référence qui se fait sur
le mode de la désignation rigide». Ailleurs (2001a, 58).
66
Cf. l’introduction de ce chapitre.
111
manière qu'elle soit sur l'état du monde et que les mots ont dans leur
signification des constantes sémantiques analytiques. D'ailleurs, la conclusion
majeure que tire Anscombre du regroupement des théories sémantiques selon
l'opposition (U1) + (U3) et (U2) + (U4) est que «le premier cas est typiquement
celui des théories logicisantes dans lesquelles les propositions ont une valeur de
vérité, et les mots un «sens référentiel», i.e. l'ensemble des traits que doit
posséder une portion de la réalité pour que tel mot ou groupe de mots soit apte
à la désigner» (1998 : 44). Or, définir les stéréotypes par le biais du
rapprochement avec les phrases génériques conduit inévitablement vers
l'adoption de telles théories logicisantes.
112
3- Le holisme de la signification
Avec Putnam, la question est plus compliquée du fait que ce n’est pas
seulement le stéréotype qui se trouve en jeu mais également l’extension qui est
censée être le composant décisif dans l’identification de la signification d’un
mot. La difficulté essentielle provient du fait de considérer que « la référence
d'un mot comme or est fixée par les critères connus par les experts» (Ibid. :
75) et en même temps conclure que sa fixation est indexicale. La première
assertion envisage que l’extension peut être déterminée par l’intension puisque
tous les critères nécessaires et suffisants de la détermination de la référence
sont présents à l'échelle sociale (1975 : 145). Donc, de ce point de vue la
séparation ci-haut évoquée, n’a pas lieu d’être. La deuxième assertion maintient
l’extension en dehors de la compétence même collective et donc la séparation
devient pertinente. Elle trouve sa justification dans le fait qu’«aucun ensemble
de critères opérationnels ne peut totalement fixer la signification du mot or [par
exemple] car, au fur et à mesure que nous développons de meilleures théories
de la constitution de l'or et des tests plus élaborés du comportement des
substances (y compris le comportement sous des rapports que nous n'étions pas
113
auparavant capables de mesurer) nous pouvons toujours découvrir des défauts
dans les tests que nous avons précédemment» (Ibid. : 76).). Ceci revient à dire
qu'il peut y avoir plusieurs modes de donation du référent ou plusieurs
significations possibles pour un même terme.
Cependant, selon cette logique, si l'on considère pour des mots comme orme et
hêtre que la représentation mentale n'est d'aucun recours dans la fixation de la
référence, que le savoir des experts peut rater la détermination exacte de la
référence, seul le composant indexical persiste.
114
qu’ « une fois prise en compte les différences, de croyances et de désirs, le fait
de prononcer un énoncé dans l'autre langue dans un contexte donné évoque
naturellement des réponses semblables à celles auxquelles on s'attendrait si l'on
s'était trouvé dans sa propre communauté de discours et si l'on avait prononcé
l'énoncé équivalent dans sa propre langue» (Ibidem.).
115
indexicales […] ne sont pas ce que nous préservons dans la traduction» (Ibid. :
78).
On peut également penser qu’il refuse b) puisque «le chimiste qui sait que le
nombre atomique de l'or est 79 n'a pas une meilleure connaissance de la
signification du mot or, il en sait simplement davantage sur l'or» (Ibid. : 54)
d’autant plus que les contraintes opérationnelles peuvent s’avérer fausses.
Pourtant, c’est le composant que Putnam croit susceptible d’être traduit :
«quand un mot est un terme d'espèces naturelles, nous le traduisons
généralement par le terme de l'espèce naturelle correspondant dans notre propre
langage, là où le terme d'espèce naturelle correspondant est le terme d'espèces
naturelles qui a la même extension […] il semble que la «composante»
dominante de la signification soit bien l'extension» (Ibid. : 93). Soit.
Évidemment, on ne traduit pas H2O, mais à quoi correspondrait une
signification qui serait «connaître la signification de eau, c'est trouver le mot
dans une autre langue qui partage avec le mot eau l'extension H2O ? Puis,
supposons maintenant que sur Terre et sur Terre-fausse-Jumelle, deux
communautés linguistiques différentes (pour justifier la traduction)
reconnaissent le même métal que nous appelons or, sauf que, sur Terre-Fausse-
Jumelle l'or est abondant et il est d'usage courant comme l'est le fer sur Terre.
Par contre, le fer est chose rare chez eux et il est précieux tout comme l'or
chez nous. Un des leurs pourrait bien dire : «Jette ces tonnes d'or dans la
ferraille». Quelle serait notre traduction d'un tel énoncé ? Et si l'un des
nôtres dit «Le temps, c'est de l'or». Quelle serait la traduction d'un tel propos
sur Terre-Fausse-Jumelle ? En fait, si les profanes reviennent aux experts, ce
n'est pas pour l'usage correct du mot dans le sens de savoir son extension
comme le suggère Putnam, mais pour vérifier si le métal en question
correspond bien au concept qu'ils ont de lui à savoir le fait d'être précieux et
donc de vérifier si cette extension est bien celle qui est déterminée par leur
représentation.
116
Si par contre, on se fie aux rejets de la traductabilité du stéréotype du
savoir des experts, les choses n’iront pas mieux car si connaître la signification
d'un mot ne relève ni de la compétence de l'expert, ni de celle du profane, donc,
on en déduit tout simplement qu'aucun ne reconnaît la signification des mots
qu'il utilise.
A vrai dire, la position de Putnam n'est pas aussi précise qu'il le prétend.
Il affirme qu'une «connaissance tacite de la signification, au sens d'être capable
d'utiliser le mot dans le discours» (68) «n'est pas connaître un fait» (69), mais il
avoue en même temps que «savoir ce que signifient les mots d'un langage …
sans savoir ce qu'ils signifient, on ne peut pas dire ce qu'ils désignent (48)],
c'est savoir la manière dont on les utilise» (Ibid. : 195). Or, écrit-il, «l'usage est
117
holistique» et «la fixation de la croyance est holistique»67. Il nous reste la
bonne «pratique interprétative sophistiquée [qui] présuppose une
compréhension sophistiquée de la manière dont les mots sont utilisés par la
communauté dont on est en train d'interpréter les mots» (Ibid.). L'interprétation
elle-même «est une affaire essentiellement holistique. Une «formalisation»
complète de l'interprétation […] est un projet aussi utopique qu'une
formalisation complète de la fixation de la croyance» (Ibid. : 194-195).
67
Putnam affirme dans la préface de Représentation et réalité qu’il assume les résultats négatifs de ses
recherches comme le considèrent certains. Il annonce également que les chapitres V et VI prennent
appui « sur les développements précédents notamment sur les arguments en faveur du holisme de la
signification ».
118
Deuxième partie : Stéréotype et notions
apparentées
119
Premier chapitre-Stéréotypie et prototypie
Bien que relevant "d'horizons théoriques différents", selon l'expression de
Kleiber (1990 : 9), les notions de "prototype" et de "stéréotype" ne manquent pas d'être
"souvent employées comme des variations notationnelles d'un même phénomène"
(Ibidem.). Or, se délibérer sur les fondements d'une telle confusion terminologique
exige, d'abord, la distinction de leurs champs d’applicabilité respectifs. Sans une telle
mise au point, on ne saurait déterminer avec précision les motivations d'une affinité ou
les causes d'une dissemblance entre les deux notions. De plus, les études comparatives
menées jusqu'ici, opposent essentiellement deux modèles théoriques : la théorie du
stéréotype de Hilary Putnam et la sémantique du prototype dans ses versions standard
et étendue. Cependant, chacun des deux modèles est à envisager dans le cadre de ses
propres limites. La théorie putnamienne se veut une approche de la signification
réduite aux seuls termes d'espèces naturelles d'autant plus que son cadre théorique
d'ensemble est loin de s'imposer comme une solution satisfaisante aux problèmes du
sens. La théorie du prototype de E. Rosch (1970-1978) à G. Lakoff (1989-1987) a
connu des révisions successives dont la plus récente (celle de Lakoff) rompt avec les
thèses fondamentales de la version originale (cf., Kleiber, 1991 : 104). Dès lors, une
redéfinition de la notion du stéréotype, une délimitation de son économie dans la
structuration du lexique et une prise en considération de l'hétérogénéité des approches
prototypiques ouvriraient vraisemblablement la voie au traitement de cette opposition
sous un angle nouveau.
- faire l'état des rapprochements et des distinctions entre les deux notions à
travers des lectures linguistiques variées;
120
Notre objectif est de montrer que :
1- les rapprochements entre les deux notions sont justifiés par des similitudes de
surface concernant les motivations de formation de ces concepts telles que la typicité
et la conventionnalité ;
Faut-il encore noter que la version standard présente, dans son cadre, deux
représentations différentes du prototype. Ceci dit, notre tour d'horizon consistera en la
saisie de ces différences entre les trois approches.
68 *
Le livre de Kleiber La sémantique du prototype est une oeuvre incontournable pour faire le tour de la
question. Nous nous appuierons essentiellement sur ce travail pour cerner les tenants et les aboutissants des
travaux liés au prototype.
121
comme l'explicite Langacker (1987 : 371): « un prototype est un exemple typique
d’une catégorie, et les autres éléments sont assimilés à la catégorie à la base de leur
ressemblance au prototype ; il y a des degrés d’appartenance basés sur des degrés de
ressemblance ». 69
b) Une catégorie référentielle a une structure interne où les membres sont placés
dans un ordre allant des instances prototypiques, centrales aux instances périphériques.
(E. Rosch, 1975 : 544 ; citée par Kleiber, 1990 : 52). Toutefois, le regroupement de ces
instances se fait sur la base d'une ressemblance de famille et non sur des propriétés
communes. Ceci dit, la réciproque n’est nécessairement pas vraie : la structuration en
ressemblance de famille peut avoir une configuration autre que celle organisée autour
d’instances centrales et autres périphériques. (cf., Ibid. : 56)
69
"A prototype is a typical instance of a category, and other elements are assimilated to the category on the basis of their
perceived resemblance to the prototype ; there are degrees of membership based on degrees of similarity".
70
"Elements are not merely in interior, but may be located in the fuzzy boundary area…"
122
1-2- Le prototype comme conjonction de propriétés typiques
Dès lors, le critère retenu pour expliquer l'exemplarité du prototype est celui de
la typicalité; le prototype est le meilleur exemplaire de la catégorie, parce qu'il
présente les meilleures propriétés, les propriétés typiques de la catégorie.
- le prototype est perçu comme une construction mentale et non plus comme
une instance de la catégorie (Ibid. : 63). Un locuteur pourrait fort bien "connaître le
concept prototypique d'une catégorie sans connaître, sur le plan de l'extension, une
sous-catégorie qui lui correspond". (Ibid. : 60).
123
représentation mentale, mais, au contraire, c'est à partir du prototype-objet-abstrait que
ces propriétés finissent par référer à une sous-catégorie référentielle telle que
« moineau ». En outre, d'autres motivations ont participé à ce changement. D'abord,
l'existence de plusieurs instances prototypiques pour une même catégorie rend
inconcevable le maintien des prototypes-objets et de leurs représentations mentales ;
puis, "la conception du prototype-objet et celle du prototype-concept du meilleur
exemplaire entraînent inévitablement l'apparition de propriétés jugées non pertinentes
pour la catégorie tout entière" (Ibid. : 65). Un meilleur exemplaire peut bien avoir des
propriétés qui lui sont spécifiques, et par conséquent, ne sont pas valides pour
l'ensemble des instances d'une catégorie (par exemple, «pépier » pour « moineau »).
124
niveau subordonné (fruit - pomme - Granny Smith). La prototypie est liée au niveau
de base pour au moins cinq raisons :
(i) C'est le niveau le plus inclusif auquel sont rattachées les caractéristiques
typiques de l'interaction comportementale. Imaginons, postule A. Cruse (2000 : 136),
qu'on est amené à mimer comment quelqu'un doit se conduire avec un animal. La
réponse sera d'autant plus difficile si l’on n’a pas précisé de quel animal particulier il
s'agit.
(ii) C'est le niveau le plus inclusif à partir duquel une image visuelle peut être
formée. On ne peut pas déterminer une gestalt précise à partir d'une catégorie
superordonnée comme « fruit ». La visualisation nécessite de spécifier un type
particulier.
(iii) Il est utilisé pour renvoyer à des référents neutres, quotidiens. Supposons
avec A. Cruse (Ibid.), que deux individus X et Y entendent un bruit de l'intérieur d'une
maison où ils sont. X s'interroge : "Qu'est-ce que c'est que ça ?" Y regardant par la
fenêtre voit un caniche dans le jardin. Pour répondre, il doit choisir entre trois
propositions parmi lesquelles (b) serait la plus normale :
a) C'est un animal
b) C’est un chien
c) C'est un caniche
Les autres réponses pourraient être envisageables dans des contextes particuliers.
(iv) Le niveau de base est le niveau à partir duquel les meilleures catégories
peuvent être créées. Les meilleures catégories sont celles qui représentent le
maximum de ces caractéristiques :
125
(v) Les noms des catégories de base tendent à être morphologiquement simples
et originaux dans la mesure où ils ne constituent pas une extension métaphorique
dérivée d'autres catégories. Prenons l'exemple d'un terme relevant du niveau de base
comme "boîte" ; les catégories les plus spécifiques ont des noms plus complexes :
"boîte à outils" ; "boîte d'allumettes" etc.
Pour ce qui est de la qualité, l'exemple avancé est qu'une émeraude de couleur intense
passerait bien pour être prototype de cette sous-catégorie sémantico-référentielle ;
critère qui est, de toute évidence, distinct des jugements basés sur la fréquence et la
bonne formation.
F. Rastier avance un autre contre-argument qui touche la validité même de ces tests.
Pour lui, le nom de la catégorie et les noms de ses exemplaires, à l’instar de tout autre
contexte, participent à l’actualisation des traits sémantiques (1991 : 273). Cependant,
l’actualisation de tels traits est la preuve même de leur pertinence linguistique ; il reste
à déterminer leur statut exact dans la signification des items lexicaux.
126
celles qui ne le sont pas 71 (Cruse, 2000 : 138). Ainsi, en optant pour le flou des
catégories, la théorie du prototype trouve des difficultés à expliquer comment les
instances centrales et les instances périphériques relèvent toutes les deux de la même
catégorie référentielle.
71
"A primary function of a category is to discriminate between things which are in it and things which are not in
it"
127
Kleiber : Chien jaune,1990 : 130-131 et celui de D.N Osherson et E.E. Smith 1981 à
propos de pet fish en anglais). Dans ce cas, il n'est pas concevable de conclure que le
prototype d'une telle catégorie complexe soit expliqué en termes de prototypicalité
séparée de ces deux composants.
- Pour Rastier, le fait que les prototypes soient propres au niveau de base,
permet d’en déduire que "les catégories des niveaux inférieurs et supérieurs ne seraient
donc pas structurées" (Ibid. : 265). J. E.Tyvaert (1992 : 21) de son côté remarque
qu’une telle notion ne serait opérationnelle que pour certains types de lexème qui ne
dénotent ni des substances premières (des individus), ni des substances ou des classes
très générales.
Les travaux ultérieurs sur la prototypie, sensibles à ces difficultés, ont relancé la
théorie du prototype sur de nouveaux fondements.
Ceci a deux conséquences sur la nature du prototype : la première consiste dans le fait
qu’on assiste à une extension du phénomène qui permet, désormais, de rendre compte
d"effets prototypiques dans le cadre des catégories structurées par des CNS (ex: les
nombres impairs 1, 3, 5, 7 et 9 sont perçus comme les meilleurs représentants de cette
128
catégorie) ; la seconde, dans le fait que le prototype peut bien s'appliquer à des
catégories polysémiques. Du coup, la catégorisation ne s’effectue plus à partir d’un
lien entre une instance centrale, prototypique et les autres instances de la catégorie
mais plutôt à partir d’associations reliant les différentes instances référentielles
(Kleiber, 1991 : 113). La ressemblance de famille ouvre, ainsi, la voie "à une
conception référentielle éclatée de la catégorie" (Ibid. : 115).
Avec Lakoff (1978), la théorie du prototype connaît une tournure radicale non
seulement en ce qu'elle se distingue de la version standard mais surtout en ce qu'elle
s'inclut dans un modèle théorique plus large où le langage est perçu comme faisant
partie d'une structure cognitive englobante. L'hypothèse de départ est fondée sur deux
assomptions :
1- Les catégories linguistiques sont du même type que toutes les autres
catégories relevant de notre système conceptuel. Le langage n'est plus envisagé comme
une structure indépendante comme dans les modèles classiques. Dans ce sens, le
prototype et le niveau basique ne sont que des effets de l'application dans le langage de
ces structures cognitives englobantes 73 (1987 : 65).
72
"To speak of a prototype at all is simply a convenient grammatical fiction, what is really referred to are
judgements of degree of prototypicality […] Prototypes do not constitute a theory of representation for
categories"
73
"[…] category structures and prototype effects are by- products of that organization"
129
Dans cette optique, l'organisation de notre savoir s'effectue par ce que Lakoff
appelle les modèles cognitifs idéalisés (ICMs), caractérisés à un niveau conceptuel et
cognitif général, « indépendamment des mots et des morphèmes de langues
particulières » 74 (Lakoff 1986 : 289). Chaque ICM est une structure complexe globale,
une gestalt, régies par quatre principes structurants :
- une structure propositionnelle telle qu'elle est décrite dans la structure (frame)
de Filmore (1984).
En somme, les structures des catégories cognitives et les effets prototypiques qui s’y
attachent se présentent sous diverses manières (Lakoff, 1987, 288-289) :
- La catégorie radiale : soit une catégorie B avec une structure radiale et A une
instance centrale de B, alors A est le meilleur exemple de B ;
74
« independently of the words and morphems of particular languages »
130
qui a l'ensemble de ces propriétés, elle est le meilleur exemplaire de B. Un élément
C n'ayant que quelques-unes de ces propriétés serait jugé comme un moins bon
exemple de B. A proprement parler, C est en dehors de B, mais les locuteurs
peuvent, dans certains cas, considérer B comme une catégorie graduée puisque cet
élément représente un degré de similarité avec les membres de B.
A part ces cas purs, des catégories mixtes pourraient également exister. Les
catégories linguistiques ne sont dans ce sens qu’une manifestation de cette
catégorisation cognitive générale fondée sur les structures conceptuelles préconstruites
à partir de l’expérience ainsi que sur les relations qui se tissent sur leur base. « Les
expressions linguistiques tirent leurs significations des faits suivants : a) le fait d’être
associées directement à des ICMs b) le fait d’avoir les éléments des ICMs par une
compréhension directe en termes de structures pré-conceptuelles dans l’expérience, ou
une compréhension indirecte appréhendée en termes de relations structurelles
conceptuelles directes » 75 (Ibid. : 291)
75
“ Linguistics expressions get their meanings via (a) being associated directly with ICMs and (b) having the
elements of ICMs either by directly understood in terms of preconceptual structures in experience, or indirectly
understood in terms of directly concepts structural relations”
76
« Most words and morphems have [dans cette optique] multiple meanings, meanings that are related to one
another. These meanings can be seen as forming a radial category.”
131
les caractéristiques du prototype, de par l'applicabilité variable de chacune d'elles,
donneraient lieu à des prototypes plus prototypiques que d'autres. Ces caractéristiques
sont formulées par Geeraerts en quatre éléments :
Dans ses travaux sur les traits sémantiques de 1975 à 1985, Filmore défend que
le sens des items lexicaux devrait être caractérisé en termes de modèle cognitif. Le
sens de chaque item est représenté comme un élément dans un ICM. Autrement, l'ICM
dans sa globalité est perçu comme l'arrière plan à partir duquel chaque mot est défini
(cf. Lakoff, 1987 : 289). De là, il conclut que les types de prototype sont aussi
diversifiés que les ICMs. Il en distingue au moins six (cf. Kleiber, 1990 : 166-167).
132
(ii) La ressemblance de famille est la relation unissant les différents membres
de toute catégorie (1990 :152).
En outre, inversement à ce qui est dans la version standard, c'est (ii) qui justifie (i).
Autrement dit, (i) n'est qu'une conséquence de (ii) et donc (i) ne pourrait plus servir à
expliquer la structure des catégories.
S'interroger sur la relation entre ces deux notions nous conduit à reconsidérer
leurs statuts dans leurs modèles théoriques respectifs, en particulier, en rapport avec la
nature de la signification et de la référence. Les résultats de leur rapprochement ou de
leur opposition varient sensiblement selon qu'on les considère comme étant de la
même nature ou de nature différente.
Dans le cadre de la première optique, celle qui assimile les deux notions sur la
base d'une identité commune, il y a lieu de distinguer deux points de vue opposés :
133
caractérisé par des traits distinctifs qui l'opposent au reste du lexique. Dans cette
optique différentielle, les notions de prototype et de stéréotype relèvent de la même
version « populaire » de la signification fondée sur le sens commun et sur la seule
intuition des locuteurs. De là, les structuralistes récusent cette vision naïve qui cherche
à réhabiliter dans la sémantique des traits variables ou référentiels faisant de la langue
une simple nomenclature (cf. par exemple Rastier, 1991).
L'intérêt de cette position est double. Elle se démarque des tendances sceptiques
prônant le holisme de la signification sous le prétexte de la complexité des faits du
monde et de l'infinité et la variabilité de leur interprétation par les locuteurs ; puis, elle
récuse, du moins à ce niveau, les tendances réductrices qui, en optant exclusivement
pour déterminer la signification par l'un des composants (perceptif ou intellectuel) font
de la langue une simple nomenclature où les mots correspondent à de simples
étiquettes ou, au contraire, la systématise au point de la déraciner totalement de son
ancrage dans le réel.
Martin Humel précise que le perceptif est rendu par les images prototypiques
caractérisées par une forte charge culturelle alors que l'intellectuel constitue la
composante conceptuelle ayant une qualité assez universelle (1994 : 169). Il ajoute que
L'image prototypique se situe à niveau médian entre la connaissance d’exemplaires,
par rapport à laquelle elle est une abstraction, et la composante conceptuelle, par
rapport à laquelle elle est plus concrète tout en demeurant tout de même « une image
134
idéalisée et stéréotypée qui réduit la complexité extralinguistique à un schéma
mental » (Ibid. : 173).
L’exemple concret serait donc en dehors de la signification ; c'est l'image mentale lui
correspondant qui en fait partie.
Compte tenu d’une telle divergence, on ne peut que s'interroger sur les
fondements qui justifient le rapprochement entre les deux notions. La confrontation de
la théorie sémantique de Putnam et la théorie du prototype permet de dégager au moins
trois affinités :
135
- La deuxième affinité, celle de la conventionnalité, est une conséquence directe
de la typicité. Les éléments les plus saillants sont généralement ceux sur lesquels porte
le consentement des sujets parlants.
- Enfin, les deux théories récusent le modèle de CNS sur quatre points :
a) Le modèle des CNS stipule que les frontières entre les catégories sont nettes.
Pour Putnam, les membres de l’espèce naturelle ne sont pas à l’abri d’une variation de
leurs caractéristiques tant que les conditions environnantes peuvent changer à travers
le temps (1990 : 295). De même, plusieurs référents peuvent avoir en commun un
même stéréotype (cf. l’exemple de l’aluminium et du molybdène, Putnam, 1991 : 302).
Du coup, le stéréotype de Putnam rejoint la théorie du prototype quant au flou des
frontières des catégories.
136
Putnam, "[…] il n'y a pas de vérité analytique de la forme : tout citron a la propriété
P." (1990 : 294).
Putnam a de son côté, rejette le fait que l’intension détermine puisque les stéréotypes
ne sont qu'une partie des données incorporées à la description extensionnelle d'une
catégorie.
Au-delà de ces affinités, l'assimilation entre les deux notions ne saurait être
totale.
Contrairement aux rapprochements entre les deux notions qui se fondent sur des
traits de ressemblance généraux, les différences sont généralement envisagées sous
l'angle de perspectives théoriques diverses qui constituent de véritables lectures
croisées débouchant sur des tentatives d'harmonisation propres à chaque perspective.
Pour cela, nous nous proposons d'analyser ces visées représentées par Kleiber,
Geeraerts, Martin et Lakoff.
La position de Kleiber :
137
La représentation sémantique de Putnam reconnaît l’existence de traits nécessaires
formant le marqueur sémantique alors que la sémantique du prototype rejette de tels
traits (1990 : 68). Toute la théorie sémantique de Putnam repose sur le refus de ce qu'il
considère les "deux dogmes" de la philosophie solipsiste :
(i) connaître le sens d’un terme, c'est être dans un certain état psychologique,
(ii) le sens d'un terme détermine son extension (ou l'intension détermine la
référence).
Il en découle que, pour lui, le sens ne peut être un état mental (cf. ci-dessus la
structure du sens chez Putnam). Or comme le montre Kleiber, c'est là où se séparent
les deux théories. A l'instar du modèle des CNS, la référence, dans la sémantique du
prototype, dépend d’une certaine manière du sens puisque l’appartenance à une
catégorie n’est pas le fruit du hasard mais résulte de l’appariement de l’instance en
question avec le sens prototypique du mot même si les frontières des catégories sont
floues. Ainsi, l’on peut dire que l’intension, appréhendée comme combinaison de traits
typiques, détermine l’extension d’une catégorie (1990 : 98). Or, « le sens
prototypique, pareil au sens en CNS, est un objet mental et du coup implique aussi la
conjonction (i) du sens psychologique et (ii) du sens-mode de donation du référent »
(Ibid. : 99).
La position de Geeraerts
138
Le point faible de cette théorie est, qu'en reléguant au second plan l'aspect
psychologique de l'organisation de la connaissance, elle ne fournit aucune alternative
permettant de décrire l'organisation des concepts. La théorie du prototype, elle, répond
à ce manque. Elle a le mérite de montrer l’application flexible d’un prototype central
est déterminant dans cette organisation.
139
individuelles, il y a des sens figurés généralement connus et des modes d'emploi non-
littéraux tout à fait idiosyncrasiques » (1985 : 37). Il apparaît ainsi, que la théorie du
stéréotype de Putnam ne couvre pas la totalité de la dimension sociale du
fonctionnement de la langue.
- Dans son article « typicité et sens des mots » (1991 : 151), R. Martin admet
que la stéréotypie et la prototypie sont « les deux faces d'une même réalité : la
première est plutôt intensionnelle, liée au flou des propriétés : la seconde plutôt
extensionnelle, liée à la notion d'exemplarité" (1991 : 152). Toutefois, le linguiste se
doit de les séparer. En ceci, R. Martin rejoint l'idée de Schwarze. La représentation
prototypique d'un objet est à situer au-delà des traits pertinents. Les traits
supplémentaires qui constituent la richesse du prototype concernent tantôt la sous-
catégorie, tantôt l'exemplaire abstrait, tantôt les deux. Désormais, poser la
problématique du statut linguistique de ces traits place la question au niveau de la
définition stéréotypique ; cette définition étant justement l'expression linguistique de la
représentation prototypique extensionnelle : R. Martin commence par distinguer la
définition conventionnelle et la définition naturelle. La première d’ordre technique
délimite, en dehors de toute stéréotypie, l’objet le plus nettement possible (1991 :
154) ; la seconde est celle des mots du langage ordinaire, qui se prête, elle, à la
stéréotypie. La conventionnalité n'est pas ici liée au jugement des locuteurs mais est
corollaire de la minimalité qui s'associe à la pertinence dans le sens qu'elle concerne
les propriétés "nécessaires et suffisantes pour définir l'objet en cause" (Ibid. : 157).
Désormais, distinguer les deux types de définition nécessite de cerner les types
de propriété qui figureraient dans l’une ou l’autre. R. Marin distingue trois sortes de
propriétés :
140
- les propriétés universelles, satisfaites par tous les objets dénommés et c'est
parmi celles-ci que le lexicographe puise les propriétés pertinentes d'une
définition minimale ;
Ces propriétés présentent « donc un axe qui va des contenus linguistiques à des
contenus encyclopédiques, mais sans rupture nette » (Ibid. : 157).
141
considère que cette notion de stéréotype est trop restreinte pour pouvoir décrire la
totalité des effets découlant des modèles métonymiques et encore moins les structures
catégorielles radiales.
- Elle se limite aux seuls modèles propositionnels et n'inclut aucun des modèles
imaginatifs ("imaginative") c'est-à-dire métonymique, métaphorique et schématique
(image schematic).
Notons que cette critique croise celle de Geeraerts dans la mesure où la diversification
sociale du langage, qui reste en dehors de la portée de la théorie de Putnam, implique
essentiellement ces extensions métaphoriques et figurées.
Notre attention portera essentiellement sur les retombées de cette distinction sur :
142
- les notions de centralité et d'appartenance catégorielle ;
Le prototype, dans son acception standard, est le résultat (donc un effet) d'une
vision stéréotypique d'une catégorie. La présence d'un trait stéréotypique au niveau de
la signification d'un item lexical entraîne inévitablement une représentation
prototypique de la totalité de la catégorie. Pourquoi ?
143
Jean-Emmanuel Tyvaert voit qu’un tel enchaînement exprime une contre-vérité
d’où son inacceptabilité (1992 : 23), contrairement au stéréotype qui s'intègre aisément
dans la définition lexicale :
(40)- Les agrumes sont des fruits qui ont généralement un goût acidulé
et, l'inacceptabilité ou le tilt sémantique d'un énoncé ou d'un item catégorisant qui
devrait en principe fonctionner comme un élément anaphorique lexical :
(43) ? J'ai une poule dans ma basse cour. L'oiseau me paraît bien étrange.
Les "hedges" ou les modificateurs utilisés par Lakoff sont un moyen permettant
d'assurer la rigidité contextuelle portant la saillance sur les seules propriétés
universelles nécessaires et neutralisant en même temps les traits stéréotypiques
comme "voler" dans ces cas :
(44)- J'ai une poule dans ma basse cour. Cet oiseau, à strictement parler me
paraît étrange.
(45)- J'ai une poule dans ma basse cour. Comme tous les oiseaux, elle ne cesse de
remuer ses oeufs sous elle.
144
Les sous-catégories extensionnelles de "eau" n'ayant pas de dénominations
monolexicales propres, eau renvoie à la catégorie et à chaque instance particulière
même si celle-ci ne correspond pas à la quasi-totalité des propriétés définitoires :
(46)- J'ai plongé dans la mer. L'eau était trouble, salée et ayant la senteur des
algues.
- Celle qui implique les traits partagés par tous les membres d'une
catégorie.
- Celle qui implique les traits généralement partagés par ces membres
ou associés d'une manière saillante à la catégorie (cf. infra.).
145
pouvoir figurer à une valeur au-dessus de 0 puisqu'elle partage au moins un trait
avec cette catégorie : le fait d'être "ovipare". Que faire, alors, d'une occurrence qui
ne partage avec une catégorie donnée qu'un seul trait (tel que /mammifère/ pour
baleine)? Selon quel critère décider de son appartenance à une catégorie et non à
une autre si l’on envisage tous les traits sur le même plan ?
Dans la catégorie "oiseau", ce sont toujours les propriétés universelles (avoir un bec,
des ailes, etc.) qui décident de l'appartenance des instances périphériques n'ayant pas
les propriétés stéréotypiques les plus saillantes à la catégorie. Ce sont les traits qui
constituent ce que R. Martin appelle la définition minimale ; et c'est sur leur base,
qu'une instance comme "chauve-souris" 77 qui, bien que partageant avec les oiseaux le
trait stéréotypique le plus saillant (voler), ne fait pas partie de cette catégorie.
A.. Wierzbiecka, (1985 : 60, cité par Kleiber, 1990 : 110), distingue les
propriétés essentielles et les propriétés prototypiques. Les premières ne sont pas
obligatoirement nécessaires ; elles constituent "le plus petit ensemble de traits qui, pris
ensemble, garantissent que tout objet qui les possède sera généralement reconnu
comme appartenant à la catégorie en question". Pour oiseau, "voler" serait un trait qui
illustre ce type de propriétés. Les secondes sont des propriétés typiques n’ayant pas un
caractère essentiel pour la conception du référent (Ibidem.).
Aux premières correspond la formule "imaginant des choses de cette espèce, les
gens diraient les choses suivantes sur elle" et aux secondes, la formule "imaginant des
choses de cette espèce, les gens pourraient dire les choses suivantes sur elle" (Ibidem.).
77
- Notons, cependant, que cette conception ne peut être valide pour toutes les langues. On pourrait bien
imaginer un langage où la définition minimale se fait dans certains cas essentiellement sur la base de traits
stéréotypiques. Dans la catégorie oiseau, par exemple, ce serait le trait stéréotypique de la fonctionnalité qui
prime. Ainsi est-il le cas dans le dialectal tunisien où la dénomination même de la chauve-souris (twi:r illi:l
« l'oisillon de la nuit ») reflète ce type de dénomination particulier.
146
Cette approche nous paraît inadéquate à quatre égards :
- Les traits essentiels tels que définis par Wierzbicka (c'est-à-dire des traits
valides pour la plupart des locuteurs) permettent déjà la représentation de la structure
interne d’une catégorie avec des instances prototypiques et d'autres périphériques sans
l'intervention des propriétés prototypiques qui semblent n'avoir aucune pertinence
linguistique dans la structuration de la catégorie.
a) N'appartient à la catégorie que l'instance qui réunit toutes les propriétés. Une
telle interprétation ne nous paraît pas celle voulue par Wierzbicka puisque le fait
d'inclure un trait tel que "voler" dans ce type de propriétés exclut plusieurs instances
de la catégorie.
147
catégorie sémantique : la polysémie. Comme exemple du premier cas, nous citerons la
paresse pour l'âne ; pour le second, le symbole de liberté associé à oiseau.
148
composantes. Certains auraient un sens abstrait conceptuel, d'autres un sens concret
sensuel.
149
plutôt d'ordre stéréotypique. Encore une fois, sommes-nous face à une confusion
entre les deux notions et par-là entre deux faits linguistiques distincts ?
Les relations d'inclusion permettent de faire figurer un même objet dans des
catégories différentes et sous des dénominations variées. L'organisation verticale du
lexique, traitée généralement en termes de distinction des genres, des espèces ou en
termes d'hyponymie et d'hyperonymie, est définie par E. Rosch en trois niveaux :
Sur le plan cognitif, l'opposition de ces trois dimensions montre les faits
suivants :
- de ce fait, les catégories relatives à ces deux niveaux sont les seules
susceptibles de « donner lieu à une image, soit abstraite soit concrète […] qui
représente toute la catégorie […] le niveau de base se trouve donc caractérisé comme
étant le niveau le plus élevé où une simple image mentale (ou schéma) peut refléter
toute une catégorie » (Ibidem.).
Etant plus saillant sur le plan cognitif, le niveau de base est le niveau où les
dénominations sont les plus fréquentes et où l'identification de ces nominations est
plus rapide. C'est le niveau auquel s'applique le prototype et dans lequel la similarité
globale des instances d'une catégorie est perceptible.
150
La conception hiérarchique du lexique et la solidarité entre le prototype et le
niveau basique révèlent l'écart entre celui-là et le stéréotype, à deux égards :
(48)- Regarde ces plantes ! Ce sont les plus vieux arbres de la région
« suggère qu'un arbre (et donc également un chêne) n'est pas une plante, comme une
classification ternaire en superordonné (plante), basique (arbre) et subordonné (chêne)
peut le laisser croire de prime abord" (Ibid. : 114). En fait, si on se fie au critère
botanique, une définition telle que celle présentée par le Petit Larousse :
Plante 1- "Tout végétal vivant fixé en terre et dont la partie supérieure s'épanouit dans
l'air ou dans l'eau douce".
donne lieu à une conception hiérarchique tripartite puisque "arbre" se trouve inclus
dans le genre des plantes et évidemment un chêne se trouve à son tour inclus dans la
catégorie "arbre". Ces énoncés seraient acceptables en activant cette donnée
encyclopédique.
D'après cette signification, /plante/ et /arbre/ seraient tous les deux du même niveau
basique. Le tilt sémantique des énoncés cités est le produit de cette autre
catégorisation.
151
de traits perceptuels spécifiants. L'extrême abstraction du premier niveau et l'extrême
spécification du dernier font que les catégories qui leur sont relatives ne peuvent être
structurées selon une vision prototypique. En effet, par exemple au niveau
superordonné, on ne voit pas, selon les termes de A. Leemann et F. Martin Berthet, "en
quoi chat serait-il un meilleur exemple d'animal que chien ou oiseau…" (1998 : 33).
Or, ceci n'empêche pas la représentation stéréotypique de ce type de catégories de se
manifester que ce soit en ce qui concerne le sens primaire définitoire ou le sens dérivé
polysémique.
Pour les catégories superordonnées, nous avons dans la définition (1) de plante,
une illustration de cette dimension stéréotypique. A part le trait "végétal vivant", aucun
des deux autres sèmes n'est à proprement parler l'expression d'une propriété objective
universelle. Une plante comme "misère" (tradescantia) peut bien pousser dans l'eau
sans être fixée en terre pourtant elle ne demeure pas moins plante que toute autre
végétation plantée dans le sol ; les algues marines vivant dans les profondeurs des
océans poussent à l’abri de l'air et sans l'eau douce. Ces éléments stéréotypiques
perceptuels ne sont justifiés que par le souci d'une représentation effective de l'objet
dénommé qui vient combler la pauvreté en traits de la définition minimale. Ils se
fondent néanmoins sur une familiarité perceptive et expérentielle avec la plupart des
occurrences de cette catégorie qui leur attribue une certaine saillance.
152
Héritant les propriétés universelles de leurs hyperonymes, les catégories subordonnées
se distinguent essentiellement à partir de données encyclopédiques générales et des
traits stéréotypiques généralement vérifiés. Si l’on se limite aux seules dénominations
subordonnées des occurrences de la catégorie "chien", on voit que les traits distinctifs
sont presque exclusivement perceptuels donc sujets à variation. Dans le TLF, caniche,
par exemple, comporte dans sa définition le trait "fidèle" :
Caniche : Chien de l'espèce des barbets, à poils frisés et généralement très fidèle
Par ailleurs, certains traits sont sujets à des variations d'un dictionnaire à un autre.
Ainsi en est-il, par exemple, du cas de dogue défini par Le Petit Robert comme étant
un chien de garde ; dans le TLF, il s'agit d'un chien de chasse et de garde. D'autres sont
définis par une origine conventionnelle qui ne reflète pas nécessairement la réalité ;
dans ce sens, le teckel est allemand, le dogue peut être anglais, etc. Cependant, ces
traits perceptuels n'arrivent pas parfois à discriminer vraiment des occurrences très
proches. Examinons les trois définitions suivantes de basset, beagle et teckel figurant
dans Le Petit Robert :
Basset et teckel ont presque la même définition. A part le trait "allemand" associé à
teckel, trait fort discuté, les deux traits "bas sur pattes" et "pattes très courtes" censées
être distinctifs ne sont qu'une variation expressive de la même réalité ; / beagle / ne
s'en distingue que par "jambes droites", fait à vérifier pour les deux autres occurrences
puisque "avoir des pattes très courtes" amènent logiquement qu'elles sont aussi droites.
- merle "[…] un personnage peu recommandable […] merle blanc personne ou chose
introuvable ou extrêmement rare" (Le Petit Robert).
153
Les traits caractérisant une catégorie superordonnée atteignent des degrés d'abstraction
si élevés qu'il n'est plus possible, du moins au niveau perceptuel, de douter de
l'appartenance d'une instance à une telle catégorie ; le flou catégoriel atteint ainsi son
seuil minimal. L'existence d'instances périphériques n'est pas envisageable à ce niveau
du moment où les frontières entre les catégories superordonnées sont bien délimitées.
Le niveau subordonné n'est pas le foyer d'une telle image pour une autre raison.
Etant le niveau inférieur de la hiérarchie lexicale, il ne présente que des dénominations
idiosyncrasiques, c'est-à-dire, des dénominations particulières qui ne se laissent pas
généralement se diviser en occurrences sous-catégorielles. Même dans le cas où ce
niveau catégoriel présente une variété d'espèces, le nombre limité d'occurrences et le
peu de traits discriminatoires qui les distinguent ne permettent pas l'organisation
prototypique de l'ensemble de la sous-catégorie.
154
effet de la structuration interne du sens d'un item lexical en propriétés universelles ou
simplement jugées comme telles et propriétés stéréotypiques. Appliquée à l'approche
prototypique, cette vision fait que l'unité catégorielle est assurée par le premier type de
propriétés ; l'effet prototypique résulte de la dimension stéréotypique caractérisant ce
noyau sémantique (ex. le sens idéalisé de eau) ou de la conjonction de ce noyau et
d'éléments stéréotypiques qui s'y attachent (ex. Oiseau).
- Les stéréotypes sociaux peuvent référer à une catégorie dans son ensemble. Ils
relèvent souvent des faits de conscience et font l'objet de discussions entre les
78
"In general, any element of a cognitive model can correspond to a conceptuel category"
155
locuteurs. Ils sont variables à travers le temps, définissent les attentes culturelles à une
époque donnée et servent comme arguments dans le raisonnement. Occasionnellement,
ces stéréotypes sociaux peuvent s'associer à des noms fonctionnant comme des
catégories stéréotypiques pour d'autres catégories.
79
"Reasoning on this basis of typical cases is a major aspect of human reason. Our vast Knowledge of typical
cases leads to prototype effects"
156
- Les submodèles constituent une autre issue pour la compréhension des
catégories. L'un des submodèles, le plus commun, est les multiples de 10 (10.000.000).
- Enfin, les exemples saillants dérivent d'une image familière, mémorable qui
sert d'exemple dans la compréhension d'autres catégories. Par exemple, écrit Lakoff,
« si votre meilleur ami est végétarien et vous ne connaissez pas bien d’autres, vous
aurez tendance à généraliser le cas de votre ami aux autres végétariens » 80 (Ibid.: 89).
Les cas métonymiques des fonctions prototypiques ou, en général, ce que Rosch
appelle reference-point reasoning, concernent l'établissement des conclusions et non
l'identification. Lakoff affirme dans ce sens que “la plupart des cas réels du
phénomène prototypique ne sont simplement pas utilisés dans “l’identification”. Ils
sont utilisés plutôt dans les déductions d’idées formées en faisant des calculs, des
approximations, en organisant, en comparant, en faisant des jugements aussi bien dans
la définition des catégories, de leur extension, de la caractérisation des relations parmi
les sous-catégories. Les prototypes font la plus grande part du vrai travail de l’esprit et
ont un usage large dans les processus rationnels » 81 (Ibid.: 145). Ainsi, même si Lakoff
prévoit l'application des ICMS aux catégories linguistiques, sa tentative reste fortement
marquée par la représentation cognitive des catégories. Le niveau primitif d'analyse est
une relation entre sous-catégories conceptuelles formées par le prototype, entité
80
"If your best friend is vegetarian and you don’t know others well, you will tend to generalize from your friend
to the other vegetarians"
81
"Most actual cases prototype phenomena simply are not used in "identification". They are used instend in
thought-making inferences, doing calculations, making approximations, planning, comparing, making
judgements - as well as in defining categories, extending them, and characterizing relations among
subcategories. Prototypes do a great deal of the real work of the mind and have a wide use in rational processes"
157
physique centrale, et les entités abstraites non centrales constituées par les noms
abstraits et les idiomes (Ibid. : 289-290).
N'envisageant pas, dans cette perspective, des outils théoriques allant au-delà de
ce niveau relationnel entre concepts, cette version de la sémantique du prototype ne
rend pas compte de la structure interne d'une catégorie, d'une signification lexicale
isolée. Au-delà de son pouvoir descriptif général, elle ne spécifie pas et n'explique pas
les mécanismes linguistiques sous tendant les relations conceptuelles entre catégories
sémantiques. Le rapprochement entre des sous-catégories liées à un item lexical se fait
selon un processus déductif et non analytique. Cette approche est, de ce fait, incapable
d'isoler et de décrire, à titre d'exemple, les traits latents existants déjà au niveau du
prototype central du sens premier avant de se cristalliser en sens dérivé ou de spécifier
les mécanismes de sélection et de généralisation qui permettent le passage d'un sens à
un autre.
158
Deuxième chapitre- Champ stéréotypique de la signification et
théories linguistiques
Cette approche, au-delà de ses origines antiques (avec Aristote), a été élaborée
dans le cadre théorique de l'argumentation dans la langue (ADL) avec O. Ducrot, J.C.
Anscombre, P.Y. Raccah et d’autres. L'idée fondamentale est que "l'orientation
argumentative d'un énoncé est obtenue par l'application, à certains éléments de la
signification de la phrase, d'une règle d'inférence graduelle que le locuteur présente
comme générale … [et] partagée" (P-Y. Raccah, 1990 : 182).
Ces règles sont appelées topoï et peuvent être formalisées comme suit :
159
// plus x est P, moins y est Q //
Cependant, l'identification de ces topoï dès le niveau lexical diffère selon qu'on
se situe dans le cadre de l'ADL standard, fondée sur l'hypothèse de la gradabilité des
méta-prédicats topiques ou dans le cadre de la théorie dite "des blocs argumentatifs"
160
qui postule l'existence dans les énoncés d'un aspect normatif, rendu par la forme
topique « P Donc Q (PDC Q) » et d'un aspect trangressif, rendu par la forme topique
« P POURTANT NON -Q (PPT NON-Q) ».
Notre objectif est de voir si la théorie des topoï (dans les deux versions),
initialement conçue pour rendre compte des enchaînements discursifs, permet de
décrire la signification lexicale d'un item et, par conséquent peut servir à distinguer ses
éléments typiques et ses éléments stéréotypiques.
C'est ce que nous nous proposons de discuter avec un intérêt particulier à la distinction
entre les deux types de topoï puisque, c'est d'elle que dépend la signification d'un mot.
161
nécessairement explicitée par le discours". D'un côté, cette définition recoupe celle du
stéréotype chez Putnam en ce qu'elle fait appel au critère de la conventionnalité mais
elle s'en distingue puisque, pour ce dernier, le stéréotype est une composante de la
signification des mots. D'un autre côté, cette approche croise celle des sèmes afférents
chez Rastier en ce qu'elle établit au niveau lexical une opposition semblable entre
sèmes inhérents définitoires et relevant du système fonctionnel de la langue et les
afférents, contingents et contextuels et relevant d'autres types de codification
socialisés.
- Pour P-Y. Raccah (1990 : 196) "un énoncé d'une phrase contenant un mot M
peut utiliser soit un topos intrinsèque à M : il s'agit alors d'un énoncé doxal, soit un
autre topos, qui peut être contraire au topos intrinsèque à M (on parle d'un énoncé
paradoxal ou simplement un topos différent".
Il faut noter que si le topos est défini par rapport à l'énoncé doxal, celui-ci est défini,
dans une circularité apparente, par rapport au topos intrinsèque. En effet, "Les énoncés
[…] sont doxaux en ce qu'ils utilisent un topos intrinsèque à l'un de ses lexèmes : un
locuteur […] n'ajoute rien à la doxa codée dans la langue" (Ibid. : 197).
- Une troisième définition est cette fois-ci proposée par Ducrot, Bruxelles et
Raccah. C'est elle qui sous-tend la version révisée de l'ADL. Ils distinguent dans les
énoncés non-doxaux (foyer des topoï extrinsèques ou dynamiques) trois types :
- "certains se présentent comme visant une conclusion opposée à celle qui serait
atteinte par les topoï intrinsèques aux mots de la phrase énoncée. En ce cas, ces énoncés sont
difficilement acceptables, sauf interprétation ironique ou si le caractère paradoxal est
162
souligné, notamment par un adverbe comme paradoxalement. C'est le cas des exemples
suivants :
Etc.
Etc.
163
Cette dernière définition semble étayer la seconde.
Nous avons vu que les topoï extrinsèques relevant des croyances communes
pour Anscombre "restent néanmoins non codés dans la langue et donc relevant
d'énoncés non-doxaux" pour P-Y. Raccah (1990 : 97).
Et qui se fonde sur une relation codée comme le montre ces tests avec mais :
la première est que les topoï "conventionnels" relèvent de la doxa, s’ils sont codés
dans la langue ;
La seconde, c'est que les stéréotypes linguistiques, dans notre optique, relèvent des
topoï intrinsèques (tout comme fatigue par rapport au travail) et donc sont des énoncés
doxaux.
Or, et c'est paradoxal, la possibilité même d'un topos tel que T27 montre bien que T26
ne peut être tenu comme exprimant une propriété intrinsèquement associée à "travail"
du moins dans le sens typique : une propriété inhérente ou intrinsèque est une propriété
164
vraie dans tout contexte linguistique ou pragmatique et ne peut être contredite par un
énoncé quel qu'il soit.
(61) Le petit moineau peut voler ; ses ailes prennent déjà forme
(63)- Le petit moineau peut voler mais ses ailes ne prennent encore pas forme.
(64)- * Le petit moineau peut voler, paradoxalement ses ailes ne prennent encore pas
forme.
Le second est sous-tendu par une relation stéréotypique qui n’est pas vérifiée par
toutes les occurrences de la catégorie « oiseau » d’où la possibilité de :
(65)- Cet oiseau a des ailes mais il n’est pas apte au vol.
165
Si ces deux types de topoï sont intrinsèques, la version standard de l’ADL ne postule
aucun critère pour les distinguer.
La raison en est que la théorie des topoï constitue une métalangue qui ne peut rendre
compte de l'informativité orientée vers le monde extralinguistique là où se situent les
données stéréotypiques.
Les tenants de cette théorie insistent sur le fait que les topoï ne concernent que
les valeurs argumentatives. Pour l'argumentivisme radical, les valeurs informatives
n'existent pas au niveau de la phrase. Les relativistes avancent, eux, que les "usages
(pseudo-informatifs) sont dérivés à partir d'une composante plus "profonde" purement
argumentative" (Anscombre- Ducrot, 1986 : 92).
Derrière cet obstacle réside le fait que le référent ne soit convoqué que par le
biais d'une forme topique où "P seul n'a aucune valeur et ne se comprend que via
[cette forme]" (Ibid. : 67).
Par ailleurs, le fait de postuler que le sens d'un mot est un faisceau de topoï ou
que les topoï sont présents dès le niveau lexical est impossible de mettre en évidence
sans la présupposition a priori des traits sémantiques descriptifs. Pourquoi ?
La raison en est simple : si cette théorie prend comme primitif la relation "être
un argument pour", il est impossible de recenser toutes les configurations
166
argumentatives liées à un terme dans le discours sans cet a priori lexical perçu et
envisagé en dehors des contextes donc des enchaînements argumentatifs. En affirmant
que "l'étude systématique des topoï ne relève pas de la linguistique mais d'une
anthropologie culturelle" (S. Bruxelles, O. Ducrot et P-Y. Raccah, 93 : 89), non
seulement la délimitation du faisceau de topoï constituant le sens d'un mot n'est plus
possible mais aussi toute approche de la structuration du lexique connaît le même sort.
(67) Il fait plus beau temps qu'hier : allons nous promener comme hier.
(68)- Il fait plus beau temps qu'hier ; allons nous promener plus qu'hier
Anscombre constate que la solution apportée par Ducrot et qui consiste à utiliser une
autre forme topique à savoir (+ BEAU TEMPS, + AGREMENT DE PROMENADE)
bien qu'elle permette de tirer la conclusion ‘allons nous promener’, elle "équivaut à
renoncer à la gradabilité du méta-prédicat PROMENADE, en la reportant sur le méta-
prédicat AGREMENT" (Ibid. : 68). Or, écrit-il, "il me semble qu'un tel procédé
82
Sur ce point cf. Anscombre (2001 : p71 et les pages qui suivent).
167
revient à renoncer implicitement à la gradabilité d'un des deux méta-prédicats, et à la
transférer subrepticement sur le lien conclusif" (Ibidem.).
Il avance des exemples auxquels les formes topiques qu'on pourrait envisager à partir
de l’ADL ou du TAL sont invraisemblables :
(+ signe, + bananophile)
(+ promesse, + exécution)
(+ castor, + construction de barrages).
Nous ajoutons :
168
1-2 La théorie des blocs argumentatifs
Cette théorie présente une véritable rupture avec l'ADL standard. Deux
nouvelles hypothèses (dont l'une met en péril la notion de méta-prédicats gradables) la
sous-tendent :
1- "De manière plus générale, tout bloc a […] deux aspects argumentatifs : un aspect
normatif P DC Q (P DONC Q), regroupant les discours en DC, et un aspect transgressif, P PT
NON-Q, (P POURTANT NON-Q), regroupant les discours en PT" (Marion Carel, O.
Ducrot, 1999 : 12).
2- "[…] une argumentation peut être associée à une expression de deux façons
différentes. Si l'expression étudiée intervient dans l'un des enchaînements de l'aspect
argumentatif qui lui est associé, cet aspect sera dit relever de l'argumentation externe
de l’expression étudiée. Sinon, il sera dit relever de son argumentation interne. Ceci
nous permettra de décrire tout mot ou énoncé par les seuls enchaînements en DC ou
PT qu'il évoque" (Ibid. : 13).
En effet, Carel et Ducrot doublent cette première distinction d'une autre qui
oppose un aspect argumentatif extrinsèque effectué par le discours et un aspect
argumentatif intrinsèque effectué par la langue. Ce deuxième aspect peut à son tour
être scindé en deux :
- L'intrinsèque "interne" à l'expression qu'il définit, illustré par les deux exemples
suivants :
- Soit :
169
(77. 2) Ce bon étudiant a tout de même raté.
Donc, cet aspect relève de l'argumentation interne de (77. 1, cf. infra la discussion de
cet exemple).
- l'intrinsèque externe : "La langue elle-même associe prudent à des discours comme
(80) et (81) :
170
Apparemment, cette structure argumentative complexe est une alternative "à la
parallèle" à la structuration du sens dans la perspective structuraliste de Rastier.
171
Carel et Ducrot établissent un critère distinctif entre l'argumentation interne et
l'argumentation externe qui consiste en ceci :
- Si, par contre, cette expression n'intervient pas dans un tel enchaînement, alors
l'aspect relèvera de son argumentation interne.
Dans les exemples (80) et (81) servant d'illustration à l'intrinsèque externe, il est
clair que prudent intervient dans l'enchaînement argumentatif : donc, il s'ensuit que les
aspects prudent DC sécurité et prudent PT NON sécurité 83 relèvent de l'argumentation
externe.
Dans les deux enchaînements, le mot prudent intervient. L'intrinsèque externe relève
donc de l'argumentation externe.
D'où vient donc l'allusion à quand Olga Gatalanu situe l'intrinsèque externe
dans le cadre de l'argumentation interne ?
Elle vient d'un autre exemple employé par les deux auteurs par appuyer leur
argumentation étayée dans l'exemple précédent.
Soit
83
Pour Carel et Ducrot, "cet exemple […] permet d'introduire une propriété importante de l'intrinsèque externe :
dès qu'un aspect argumentatif appartient à l'intrinsèque externe d'une expression, l'autre aspect du même bloc y
appartient aussi… l'argumentation intrinsèque externe est ainsi constituée de blocs » (1999 : 15).
84
Nous ne discutons pas ici la validité même d'un tel exemple.
172
pour Carel et Ducrot, cet énoncé "évoque, s'il est compris comme définitoire, toute une
famille de discours argumentatifs comme :
et ils concluent que "l'aspect enfant de cadre DC blond relève alors de l'argumentation
interne de (84)" et que (84), définitoire, "associe l'expression enfant de cadre à l'aspect
enfant de cadre DC blond qui devient dans ce discours, constitutif de l'argumentation
externe de enfant de cadre".
173
Rappelons, d'abord, que l'ADL version standard ne peut rendre compte des propriétés
universelles ou typiques parce que P ne peut être indépendant de la forme topique à
laquelle il participe et parce que ces propriétés ne sont pas toutes gradables. La
sémantique des blocs argumentatifs est développée pour répondre à un autre type de
problèmes que rencontre la version standard notamment celui d'expliquer "les énoncés
sémantiquement paradoxaux" et d'éviter" la notion de topos contraire" (1999 : 9).
- ( P, Q)
- P DC Q, P PT NON-Q
nous nous rendons compte que le lien argumentatif entre P et Q n'est plus le même : le
lien qui était pris en charge par la gradabilité de chaque méta-prédicat est dans la
nouvelle version reporté sur le lien conclusif exprimé par les articulateurs donc et
pourtant.
- La version standard de l'ADL pose que "la signification […] des mots lexicaux est
constituée, et constituée seulement, par des paquets de topoï" (Ibid. : 7). N'ayant pas
dans sa perspective argumentative le souci de distinguer le noyau dénotatif et l'aspect
connotatif, cette version rencontre des difficultés à justifier, par exemple, comment on
peut expliquer un énoncé comme le travail repose qui constitue une contradiction au
topos intrinsèque à travail, le travail fatigue.
Dans une phase qu'on peut qualifier de transitoire (Ducrot, 1989), l'ADL
introduit la notion de polyphonie. "L'idée de base est qu'en utilisant un mot, un
174
locuteur convoque des énonciateurs, dits lexicaux, qui posent les topoï inclus dans la
signification de ce mot" (1999 : 7). Cette notion a aussitôt été rejetée parce qu'elle"
repose sur une conception référentialiste de la prédication ("prédiquer, c'est attribuer
une propriété à un objet)" : ainsi, le dernier énonciateur dans l'exemple du travail qui
repose, déclarerait reposantes les activités repérées à partir des croyances exprimées
par le premier" (Ibid. : 8).
- Nous savons que l'ADL est une théorie fondamentalement argumentative, son
objet unique est le discours. De ce fait, si une expression n'apparaît pas dans un
enchaînement discursif, on ne voit pas comment lui accrocher un sens, alors qu'elle est
absente dans l'énoncé censé donner sa signification. Dans :
- la deuxième raison est qu'un aspect comme danger DC précaution est défini
comme étant lié à la signification d'un item lexical particulier (prudent). On est, dès
lors, confronté au problème que pose, dans ce cas, la synonymie. Pourquoi ne pas
rattacher un tel aspect plutôt à circonspect, attentif ou encore avisé qui contiennent,
d'une manière ou d'une autre cet aspect ?
Nous voyons donc que cette tentative d'atteindre la signification lexicale par le biais de
l'argumentation finit par évacuer le mot étudié du champ discursif, initialement établi
pour permettre son étude.
175
Analysons maintenant, de plus près, les exemples servant d'illustration à cet
aspect « intrinsèque interne à… »
Carel et Ducrot concèdent que l'énoncé de départ (74) est "curieux" et expliquent ce
caractère "curieux" du fait "qu'en lui se réalise l'argumentation "curieuse, (75)".
Sous les mots d'un autre, si l’on remplace curieux par inacceptable ou inadéquat, le
raisonnement serait "l'énoncé (77) est inacceptable ou inadéquat parce qu'en lui se
réalise l'argumentation inacceptable ou inadéquate". C'est une manière de montrer le
caractère circulaire de ce type de démonstration et de mettre en doute la validité même
de l'exemple.
à (78) :
Si l’on attribue à (78) le fait qu'il explicite le lien argumentatif (dans (77. 1) entre le
sujet grammatical (bon étudiant) et le prédicat (réussi), c'est que l'expression tout de
même est interprétée dans le sens de pourtant ou encore néanmoins. Là, on ne voit pas
comment le fait de réussir qui est de toute évidence une conséquence logique de ce que
c'est "être un bon étudiant" peut être en même temps transgressif par rapport à ce
premier segment. Un énoncé tel que :
En fait, (77. 1) n'est acceptable (et encore) que si tout de même est comprise dans le
sens d’enfin, ce qui évoque dans le premier segment non pas le fait d'être un bon
étudiant mais la peine qu'il a vécue en préparant son examen comme le montre
l'énoncé suivant :
(89)- Ce bon étudiant, malgré ses conditions lamentables, a beaucoup travaillé durant
l'année, il a tout de même réussi.
176
Dans ce cas, un enchaînement transgressif moyennant pourtant paraît clairement
inadéquat :
travail fatigue
177
(97)- ? Cet oiseau a des ailes, donc il vole
De même, elle ne paraît pas pertinente pour rendre compte d'une bonne part des
stéréotypes présentant des extensions de sens à partir d'une catégorie de sens primaire :
(102)- ? Pauline est une femme, pourtant elle n'est pas faible
ou encore :
En somme, si l'ADL dans les deux versions trouve des difficultés à rendre
compte de la signification d'un mot, c'est parce que celui-ci n'est conçu que dans sa
dimension argumentative : donc, n'importe quelle propriété ne peut être saisie en elle-
même mais seulement à travers la forme topique qui l'associe à une autre propriété ou
une autre relation. Pour que cette théorie soit pertinente, il faudrait que la signification
d'un item soit structurée dans une nomenclature relationnelle binaire, ce qui n'est pas
de toute évidence le cas des langues naturelles.
Une description de l'économie de ces deux notions dans les diverses théories
linguistiques est problématique au moins à trois égards :
178
perspective onomasiologique les deux notions sont plus ou moins présentes et
entretiennent des relations variées.
- vues sous l'angle de leur pertinence linguistique, elles constituent, (sous une
forme ou une autre) le sens, s'y accrochent ou s'en excluent.
Cependant, ces trois niveaux ne sont pas indépendants l'un de l'autre et donc
s'impliquent réciproquement. Tout en ne privilégiant aucun niveau, nous tenterons
dans notre analyse, pour une raison de commodité, de suivre le premier axe en tenant
compte des deux autres.
Ainsi en est-il, chez Baylon et Mignot (1995, 47), pour qui la connotation est
"tout ce qui dans le sens n'est pas propriété objective du référent (le mot renard a la
ruse comme connotation)". Le terme s'oppose à "dénotation", définie par le biais de la
désignation considérée comme l'"utilisation d'un signe pour évoquer le référent". Le
pouvoir de désigner, présuppose, dans ce sens, la présence d'éléments dénotatifs
garantissant l'acte de référence. La nature et l'économie de ces propriétés intégrées
dans le sens mais dépourvues de pouvoir de désignation, ne sont pas spécifiées chez
les deux auteurs. A. Leemann et Françoise Martin-Berthet (2000 : 12), tout en
maintenant l'opposition entre dénotation et connotation explicitent le caractère externe
et second de celle-ci par rapport à la première. Elles affirment que la connotation
179
représente les valeurs sémantiques secondes qui viennent se greffer sur le sens
dénotatif.
Le deuxième point fait apparaître les éléments dénotatifs comme résultant d'un
consensus dans le cadre de la communauté linguistique alors que les connotations
peuvent résulter de l’expérience commune à l’ensemble des locuteurs, de celle d’un
groupe social ou de celle d’un locuteur particulier; c'est pourquoi, expliquent Dubois et
al., « on parle aussi de sens affectif ou émotif, de contenu émotionnel ». Soulignons
180
que cette manière de voir recoupe celle de L. Bloomfield, commentée par Dubois,
(Ibid. : 111) pour qui il y a trois types de connotation :
Cependant, ce critère distinctif ne paraît pas tout à fait satisfaisant. Si l'on admet
que certaines connotations sont partagées par la communauté linguistique dans son
ensemble, rien ne permet dans la première définition de Dubois et al. de les distinguer
des éléments dénotatifs et de justifier le fait qu'elles n'appartiennent pas au sens
conceptuel ou cognitif.
Dans la deuxième optique, celle de Kleiber (1981 : 17) "les noms dénotent c'est-
à-dire qu'ils peuvent référer à des individus particuliers parce qu'ils connotent, c'est-à-
dire qu'ils ont un sens".
En fait, cette citation ne convient pas tout à fait à la position de Kleiber présentée dans
« Dénomination et relations dénominatives » (1984). Dans cet article, la désignation
"définie comme la référence à des particuliers" (1984 : 82 en note) s'oppose à la
dénotation définie comme "la relation qui unit un item lexical à une classe d'objets"
(Ibid. : 80). Donc, il s'agit bien de la désignation comprise comme la référence dans un
sens propositionnel et qui présuppose un référent conceptuel dont la connotation
constitue le sens. Il semble, ici, que Kleiber attribue à « connotation » le sens que lui
donne S. Mill. Dans Kleiber (1999) et citant la classification des noms chez S. Mill
selon l'axe connotation-dénotation, il précise en note que la "connotation n'a pas le
sens restreint actuel de contenu sémantique subjectif, variable, etc. mais correspond
peu ou prou à la notion générale de sens" (1999 : 30).
Dans cette perspective, les propriétés objectives et les propriétés dites "secondes"
restent indistinguées vu le niveau d'analyse très général.
181
sens. L'opposition entre "sèmes inhérents" et "virtuèmes" ou "sèmes afférents" et
même "connotation" correspond peu ou prou à l'opposition entre "dénotation" et
"connotation" dans l'approche sémasiologique.
Selon Rastier (1996 : 42), l'assimilation entre le caractère non distinctif d'un
élément et son caractère connotatif remonte à Bloomfield 85 (1933 : 186). Pottier
explicite la correspondance voire la confusion entre virtualité et connotation." Est
virtuel, pour lui, tout élément qui est latent dans la mémoire associative du sujet
parlant, et dont l'actualisation est liée aux facteurs variables des circonstances de
communication. Le virtuème représente la partie connotative du sémème". Il faut noter
que Pottier exclut de son virtuème et de la connotation les effets liés aux emplois
individuels ou textuels. La virtualité ne concerne qu'un savoir latent et connu de
l'utilisateur. Ainsi, de la définition de Dubois et al. ne sont retenus que les traits
reconnus par la communauté tout entière ou à la limite par un groupe particulier.
C'est à ces éléments omis par Pottier que Jacqueline Picoche (1977 : 104)
réserve le nom de « connotation ». Dans une terminologie proche de celle de Pottier,
elle propose une autre classification où le sème relève du domaine de la valeur et le
virtuème du domaine de la signification alors que la connotation constitue la valeur
85
Cité dans Dubois et al. (2001).
182
stylistique du signe. Derrière la parenté apparente des notions de "sème" et de
"virtuème" chez les deux linguistes, réside pourtant une différence de taille. Pour
Picoche, "la conception du lexique comme totalité amène à considérer le signifié du
sens lexical sous deux aspects: celui de la valeur et celui de la signification. La valeur
d'un mot se définit par rapport aux autres mots de sens voisins qui délimitent ses
emplois. La signification par rapport à la catégorie d'objets qu'il peut dénoter. La
signification a donc un contenu positif par rapport à l'univers alors que la valeur est
une forme dans laquelle se coule ce contenu". Quant à la connotation, bien qu'elle
soit relative à la valeur stylistique, donc exclusivement textuelle et énonciative, elle
n’en demeure pas moins en dehors du signifié. Elle renferme, dit-elle, « l'ensemble…
des éléments signifiants (dénotatifs) logiquement classifiables" (1977 : 99).
F.Rastier réhabilite tout le contenu défini par Dubois et repris en partie par
Pottier dans sa démarche onomasiologique en le versant soit dans le contenu des sèmes
génériques ou dans le contenu des sèmes afférents. Nous ne nous intéresserons pas
pour le moment à ces notions auxquelles nous consacrerons le paragraphe suivant mais
nous interrogerons par contre sur le traitement que réserve Rastier aux traits virtuels.
Ne reconnaissant à la connotation aucun intérêt linguistique parce
qu’insuffisamment précise, Rastier (1996 : 43) observe que, selon Martin,
"l’opposition entre les sèmes distinctifs par définition et les autres composants non
distinctifs, se réduit entre prédications universelles et prédications non universelles".
Partant de là, il avance une argumentation qui met en doute une telle distinction pour
proposer enfin une autre classification et une autre terminologie.
Il constate, d'abord, que les traits virtuels regroupent des phénomènes divers qui n'ont
pas toujours la même relation au sens et le même fonctionnement discursif.
Si l'on concède que "seuls les composants distinctifs et toujours actualisés, écrit-il,
méritent le nom de sème, il faut bien convenir que certains dits ordinairement
connotatifs sont bel et bien des sèmes"(Ibid. : 42). Le trait / vulgarité/ dans bagnole ou
flic lui sert d'illustration. Ce trait est, d'une part, toujours actualisé et prend une valeur
distinctive par rapport à des lexies comme voiture ou policier. Donc, il ne considère
pas de tels traits, comme virtuels et leur réserve le statut de « sème générique d'une
grande généralité ».
183
En plus, si une partie de ces traits est bien des composants virtuels, susceptibles d'être
parfois actualisés, rien ne permet par contre d'affirmer qu'ils n'ont pas de valeur
distinctive puisque" même des traits virtuels dont la réalisation est purement
facultative peuvent jouer un rôle distinctif dans certains contextes" (Ibidem.).
Enfin, si l'on considère qu'"une prédication universelle sera vraie en tout contexte
linguistique ou pragmatique" (Ibid. : 43), il faudrait alors conclure que les traits
distinctifs ne font pas partie du sémème dans la mesure où ils ne sont pas
véritablement universels, ce qui ne nuirait pas seulement à l'appréhension du sens d'un
item lexical (qu'en reste-t-il dans ce cas de la signification ?) mais surtout qui est
invalidé par les tests expérimentaux menés par J.-C Kratz dans un groupe culturel
homogène et qui montrent qu'aucun trait distinctif ne jouit de l'unanime accord des
locuteurs 86.
Rastier conclut que "les traits universels et non universels ne sont donc en fait,
respectivement, que des traits généralement attestés et des traits parfois attestés"
(Ibidem.). Il propose pour les premiers la dénomination de "sèmes inhérents" et pour
les seconds, "sèmes afférents" socialement codés ou textuels.
86
Cette critique est affaiblie par le point de vue de Rastier, présenté ailleurs (1991 :193), qui ne retient pas la
méthode expérimentale comme un outil d'analyse linguistique.
184
généralement vérifiés, valeurs relatives aux registres de langue et effets textuels
résultant d'une compétence discursive idiolectale.
1- le terme "connotation" s'étend pour couvrir non seulement des éléments signifiants
du sens lexical relevant de l'a priori mais également des effets textuels et
pragmatiques. En outre, le recours à des expressions descriptives de la sorte
"s'ajouter", "se greffer"…, s'inscrit dans le cadre de cette ouverture sur le discours, sur
la référence actuelle des mots dans le contexte.
Une théorie qui se fonde sur la présupposition de la valeur distinctive des mots dans un
système fonctionnel ne prévoit pas un tel statut pour une telle part de la sémantique,
rien n'empêche d'intégrer la notion de sème dans l'analyse de la signification.
3- Les contenus exprimés par la connotation n'ont pas le même statut. Certains
sont des contenus sémantiques pleins et autonomes susceptibles de jouer un rôle
référentiel dans le discours comme le montrent ces deux exemples où le rusé peut
fonctionner comme anaphorique lexical de renard mais non d'un autre animal :
185
(106)- Un renard a l'habitude de venir se nourrir de mes poules. Je lui ai tendu un
piège mais, à chaque fois, il sait s'en tirer, le malin / le rusé !
(107)- Un chien errant a l'habitude de venir se nourrir de mes poules. Je lui ai tendu
un piège mais chaque fois, il sait s'en tirer ? Le rusé ! le diable !
D'autres, par contre, ne dépassent pas la simple valeur ou charge qu'elle soit
d'ordre affectif, péjoratif, mélioratif ou autre comme le trait "familier" pour bagnole.
1- L'idée que le trait virtuel existe d'une manière latente et qu’il n'est actualisé
qu'occasionnellement, ne permet pas d'expliquer certaines extensions polysémiques
s'établissant à partir de traits latents dans la signification primaire. Aux deux
acceptions de coq définies ainsi par Le Petit Robert :
2 "Homme qui séduit ou prétend séduire les femmes par son apparence
avantageuse".
(108)- Étalant ses plumes et dressant sa crête, le coq semble dominer les
poules de la basse cour.
(109)- Paul est le coq du village. Les plus belles filles rêvent de sa compagnie.
186
Pour coq, ce qui est latent au niveau lexical et actualisé par le contexte (108), devient
dans (109) l'essentiel de la signification après la neutralisation de tous les traits
renvoyant à "coq-animal" (cf. infra., le rapport de la stéréotypie au sens figuré). La
notion de virtuème susceptible d'être parfois actualisée ne permet pas de décrire cette
dimension de toute évidence linguistique.
Par ailleurs, cette approche ne permet pas non plus de rendre compte de certains
items morphologiquement dérivant d'autres entités lexicales mais dont le contenu
sémantique définitoire a comme source le trait initialement virtuel ou latent dans l'item
d'origine. Ainsi en est-il par exemple de l'adjectif mâlement défini par le TLF comme :
(110)- Le visage de Raoul était mâle et dur. (LE PORTULAN Heureux les
pacifiques, 1947 : 24)
187
Dans les théories linguistiques, l'on assiste essentiellement à deux tendances
apparemment opposées :
- L'opposition entre traits universels et traits non universels est banalisée sans
pour autant que la valeur distinctive des dits « virtuèmes » soit reconnue.
La première approche est celle de R. Martin qui regroupe (a) et (b) sous une
même notion: « le composant 87 » qui « se définit par la notion de prédication
universelle. On dira d'une prédication qu'elle est universelle :
- Si elle est vraie pour x X, où X est la classe des denotata dans une définition
extensionnelle de l'unité considérée.
- Si elle est vraie pour tout locuteur compétent du langage auquel cette unité
appartient. Soit:
Toutefois, il considère (a), les sèmes, comme un type particulier de composants. Pour
(c), Martin parle plutôt de « virtuème socialisé » et de « virtuème plus ou moins
socialisé ». Le premier correspond à une prédication seulement possible mais valide
aux yeux de tout locuteur :
87
L’existence de composants non distinctifs (obligatoires mais ne jouent pas un rôle distinctif dans le système
fonctionnel de la langue) est discutée dans Rastier (1996 : 41). Rastier voit que les traits jugés comme tels par
Martin (ex. mansarde) ne sont pas vraiment obligatoires et donc ne peuvent être tenus pour des composants.
188
En somme la pertinence de (c) n’est pas reconnue par Martin, contrairement à Pottier
qui parle de « sème connotatif » (Ibid. : 139-140). Si les lexicographes puisent leurs
textes de définitions dans les composants (a et b), le recours aux propriétés non
universelles ne vise qu’une « représentation effective de l’objet défini ».
Quant aux propriétés exprimées en d), leur intérêt ne peut être que contextuel.
On en conclut que, selon Martin, seuls les traits universels peuvent être distinctifs. Or
une telle vision ne distingue pas les deux plans cités ci-dessus : celui de la définition
extensionnelle centrée sur les qualités objectives de l’objet et la définition
« intensionnelle », « fonctionnelle », envisagée dans le cadre des oppositions entre les
signes dans le système de la langue.
A notre sens, il n’y a pas de correspondance stricte entre les deux niveaux.
Autrement dit, un trait universel typique au niveau extensionnel est nécessairement un
trait distinctif au niveau du système fonctionnel de la langue. Le contraire n’est pas
toujours vrai et la relation entre les deux niveaux n’est pas réciproque. Nous avons
dans les noms d’artefacts, définis souvent selon leur fonctionnalité, et où il est difficile
de trouver des traits universels typiques pour chaque objet, des exemples où le trait
stéréotypique non universel joue un double rôle : du côté de l’extension, l’ensemble de
ces traits permet la reconnaissance, la distinction de l’objet (ce que Martin appelle la
représentation effective) ; du côté du concept, il permet de discriminer deux unités de
sens proches. A titre d’exemple, Le Petit Robert définit ainsi mallette et attaché-
case :
Sous les deux entrées, on trouve parmi les exemples mallette de représentant et un
représentant avec son attaché-case. Les traits / utilisée pour transporter / et / qui sert
de porte-documents / sont les seuls traits qui permettent de distinguer les deux unités.
Or, ces traits ne sont nullement universels et rien n’empêche, au niveau de l’extension,
chacun de ces deux objets de servir pour l’un ou l’autre des deux usages mentionnés.
189
La seconde approche est celle de F. Rastier qui distingue :
Dans cette optique, l'opposition entre traits universels et non universels se réduit à
l'opposition entre "traits généralement attestés et traits parfois attestés". Cette
relativisation est lourde de conséquences parce qu'en définitive, elle vise à évacuer de
la langue tout lien avec le monde extralinguistique. Elle mérite donc d'être analysée de
plus près.
Nous avons vu ci-haut que Rastier met en doute l'universalité des traits
distinctifs dans la langue en recourant aux résultats de l'expérience de Kratz alors qu'il
nie la validité de cette méthode dans sa critique de la théorie du prototype ; "les mots
isolés, écrit-il, n'appartiennent pas à l'objet empirique de la linguistique" (1991 : 276).
Voyons maintenant comment il invalide cette thèse dans le discours. Rastier présente
deux arguments :
-"Des traits jugés non distinctifs parce que non universels en compétence peuvent se
révéler universels dans un corpus donné : si /en bois/ et / métallique / sont des traits virtuels
pour "armoire", on ne s'étonnera pas que dans Eugénie Grandet toutes les occurrences de
"armoire" réalise le trait /en bois /" (1996 : 43).
Cet argument repose sur deux ambiguïtés : "la notion d' « universel » laisse entendre
une confusion avec celle de « pertinent » et la notion de "contexte" se confond avec
celle de "corpus". Nous avons vu que R. Martin définit les propriétés universelles à un
niveau lexical comme étant "les propriétés satisfaites par tous les objets dénommés"
(1983 : 70). Autrement dit, l'universalité d'un trait est descriptible avant tout à un
niveau catégoriel.
190
ce point de vue, l’œuvre de Balzac n’équivaut pas à tous les contextes ; il s'agit d'un
corpus limité aussi long qu'il soit (Rastier a bien fait de mentionner le mot corpus).
Greimas et Cortès (2001 : 66-67) définissent le contexte comme "l'ensemble du texte
qui précède et / ou qui accompagne l'unité syntagmatique considérée et dont dépend la
signification". Ils mentionnent toutefois sous l'entrée texte que ce terme "est parfois
employé au sens restrictif lorsque la nature de l'objet choisi (oeuvre d'un écrivain,
ensemble de documents connus ou témoignages recueillis) lui imposent des limites :
dans ce sens, texte devient synonyme de corpus" (Ibid. : 390). Il en résulte que
l'actualisation d'un sème afférent ou virtuel dans un texte donné (corpus) ne lui confère
pas ce statut de trait universel.
-"A l'inverse, même des traits jugés universels et donc définitoires peuvent être
neutralisés en contexte : si / reliant la tête au tronc / est un composant distinctif de "cou", il est
regrettablement neutralisé dans le syntagme "cou coupé" (1996 : 43).
A notre sens, dans le syntagme "cou coupé", le classifieur adjectival exprimée par
"coupé" ne modifie nullement le contenu sémantique de "cou". Il nous paraît non
fondé de considérer que l'opposition entre "coupé" et "reliant" fonctionne comme une
neutralisation de la première par la seconde. La preuve, c'est que, si l'on concède avec
Rastier qu'il y a neutralisation, le syntagme "cou coupé" serait synonyme de "partie
coupée" (partie est l'élément qui devrait en principe précéder "reliant la tête au tronc").
« Cou coupé » présuppose déjà qu'il y a un cou, c'est-à-dire, "partie reliant…" comme
le montre la paraphrase métalinguistique suivante du syntagme en cause :
191
(1983 : 07) donne une illustration à travers les définitions de l'item tournevis
respectivement par le DFC et Le Petit Robert :
-"outil pour tourner les vis, fait d'une tige d'acier emmanchée à une extrémité,
et aplatie à l'autre afin de pénétrer dans la fente d'une tête de vis".
Martin remarque que "la définition du DFC ne permet pas, sans aucune expérience de
l'outil en cause, de reconnaître parmi l'ensemble des outils, les objets dénommés
tournevis". En outre, ces traits stéréotypiques ne sont pas discriminatoires puisqu'il
n'existe pas d’objets qui seraient "des outils pour tourner les vis" mais qui ne seraient
pas faits" d'une tige d'acier emmanchée à une extrémité et aplatis à l'autre" (Ibidem.).
Il considère que ces traits sont "des propriétés universelles jugées suffisantes pour
susciter de l'objet une représentation". Nous n’adhérons pas tout à fait à ce point de
vue parce qu’un tournevis qui a perdu sa manche ou dont la tige n'est pas en acier n'en
demeure pas moins tournevis et parce que l'autre extrémité n'est pas dans la réalité,
toujours aplatie. En fait, la forme de l'extrémité dépend de la tête de la vis à laquelle
elle est destinée (par exemple un certain tournevis dit "américain" a son extrémité en
forme d'étoile). Il s'agit, en fait, de traits non universels mais qui deviennent par
idéalisation définitoires. Ils correspondent à une certaine image prototypique du
tournevis dont ils sont les composants stéréotypiques.
Pour montrer le caractère non universel de tels éléments, nous avançons deux
exemples :
- bidon : "Récipient portatif pour les liquides, généralement de métal, et que l'on peut
fermer avec un bouchon ou un couvercle" PR.
A part le sème générique "récipient", aucun trait n'est à proprement parler universel
qui est satisfait par tous les objets dénommés « bidon ». Un bidon sert bien dans la
réalité à porter des liquides mais également de la poudre ou tout autre matière ; il peut
être en métal, plastique etc., il peut ne pas être fermé du tout.
192
Tous les traits de la définition sont vus dans une condition idéalisée qui ne correspond
pas, dans la nature, à toutes les substances qu'on appelle eau.
Il en découle que la notion de virtuème ne rend pas compte de ces traits qui,
tout en étant de la même nature que le virtuème (non universel, conventionnel,
typique), joue des rôles différents dans la signification. Les envisager sous le seul
angle de la contingence discursive conduit à laisser dans l'ombre des mécanismes
essentiels de la genèse du sens.
Notons, à la suite Samir Badr (1999 : 12) que cette définition de l'inhérence par
rapport au système fonctionnel et de l'afférence par ce qui ne l'est pas, est tout à fait
circulaire.
"le sème inhérent est une relation entre sèmes au sein du même taxème"
"Le sème afférent est une relation d'un sémème avec un autre sémème qui
n'appartient pas à son ensemble strict de définition : c'est donc une fonction d'un
ensemble de sémèmes vers un autre" (ibid. : 46).
Les deux définitions font donc appel à la notion de taxème défini, lui, comme
"l'ensemble de rang inférieur [par rapport à une classe de sémèmes]. Les sèmes
spécifiques sont définis à l'intérieur du taxème, ainsi que certains sèmes génériques de
faible généralité" (Ibid. : 49).
193
Encore une fois, le taxème est défini par rapport au sème spécifique et au sème
générique. Samir Badr observe que, dans ce cas, "la distinction inhérent vs afférent est,
par conséquent tributaire, notamment à travers une sous-catégorie, de la définition des
sèmes appartenant à une autre catégorisation, celle qui distingue les sèmes spécifiques
des sèmes génériques" (1999 : 16).
Or, ces deux dernières notions sont définies, respectivement, par rapport au
sémantème et au classème :
194
significatives de la langue elle-même" (Coseriu 1969 : 241, cité par Rastier, 1996 :
39).
- "le problème de traits non pertinents obligatoires n'est sans doute qu'un
artefact de la réflexion lexicographique" (Ibid. : 41). Au niveau du système de la
langue, le trait non pertinent obligatoire chez Martin rejeté par Rastier ne peut
relever que des traits socialement codés ou des traits encyclopédiques.
- "Même des traits virtuels dont la réalisation est purement facultative peuvent
jouer un rôle distinctif dans certains contextes" (Ibid. : 42). Il est clair qu'il s'agit ici
du deuxième type d’opposition liée au contexte.
195
Une première brèche vient de la distinction qu'établit Rastier entre deux
sortes de traits et surtout dans la terminologie qu'il retient. En effet, nous trouvons à
la page 44 de SI le tableau suivant ainsi commenté :
« A B
"dénotatifs" "connotatifs"
Parmi les qualifications non retenues par Rastier figure "non distinctifs" pour les
traits en B (qui seront par la suite nommés "sèmes afférents") ; seule la
qualification "non définitoires" leur convient dans sa terminologie.
On peut penser qu'il s'agit d'une simple confusion des deux niveaux de pertinence cités
puisque, effectivement, ces traits peuvent être distinctifs en contexte. Mais, il n'en est
rien car les traits fonctionnels peuvent également être non distinctifs en contexte (Nous
verrons qu'il ne s'agit pas d'une simple confusion).
- Considérer que les traits en A sont définitoires parce que justement distinctifs
et les traits en B non définitoires et parfois distinctifs comme le laisse entendre la
terminologie retenue par Rastier conduit à un dilemme qui ne peut être résolu qu'en
196
identifiant un autre critère que celui de la pertinence pour distinguer ce qui est
définitoire de ce qui ne l'est pas.
"
Le type de systématicité lié à la norme et donnant lieu aux sèmes afférents est le
sociolecte défini dans le glossaire de la SI (277) comme l'"usage d'une langue
fonctionnelle, propre à un groupe social déterminé". Ceci laisse à penser, logiquement,
que les traits faisant l'unanimité des locuteurs d'une langue doivent faire partie du
système fonctionnel de la langue dans la mesure où ils ne sont pas exclusifs à un
groupe social particulier.
Ici, les traits / luxueux / tout comme / salé / sont partagés par l'ensemble des
locuteurs 88. Ils ne relèvent donc pas d'une norme sociolectale telle qu'elle est définie.
88
Rastier fonde son argumentation sur une expérience menée dans un groupe de collégiens et où le trait
/luxueux/ obtient à une fréquence élevée (22/27/).
197
Pourtant, Rastier assigne à ce trait le statut d' « afférent ». Plus encore, si l’on exclut
ces deux sèmes "afférents" (/salé/ et / luxueux/), il ne reste dans la définition de caviar
que "oeufs d'esturgeon" qui, seul, n'est pas distinctif parce qu'il existe un syntagme tel
que "oeuf d'esturgeon" référant à l’œuf biologique servant de matière première dans la
préparation du caviar alimentaire. Certes, il n'y a pas d'unité simple dénommant un
oeuf d'esturgeon mais quand on sait que pour Rastier "rien ne peut être représenté en
langue qui n'ait auparavant été décrit en contexte" et que "la compétence linguistique
est une évidence empirique" (Ibid. : 62) on comprend pourquoi ce sème devrait être
considéré comme distinctif en langue puisqu'il l'est en contexte où peut figurer le
syntagme "oeuf d'esturgeon" renvoyant à oeuf biologique.
Donc, / luxueux / et / salé / sont bien des sèmes distinctifs (définitoires) si l'on tient
compte de cette vision de Rastier et, par conséquent, ils ne doivent pas être considérés
comme des sèmes afférents.
En fait, si SI assigne aux traits tels que /luxueux / et / salé / le statut "de sèmes
inhérents", le fondement de l'opposition entre inhérence et afférence s'écroule. La
raison en est que l'opposition entre la langue comme système fonctionnel et la langue
comme institution sociale ne serait plus pertinente et qu’il faudrait également
envisager à l'intérieur des traits relevant d'une codification sociale ceux qui seraient
pertinents en langue (inhérents) et ceux qui ne le seraient pas. Dans un tel cas, la
définition des sèmes afférents par le fait qu'ils relèvent d'autres codifications, à savoir
les normes socialisées, ne serait plus valide. De même, le résultat sur lequel
débouchent ses critiques de l'universalité (et à travers elle, la visée référentielle)
manquerait de pertinence.
198
tout à fait contradictoire avec l'hypothèse selon laquelle des traits comme / luxueux /
pourraient être considérés comme des sèmes inhérents parce que nous aurions dans ce
cas des traits non universels mais généralement attestés.
3-2 Les sèmes afférents socialement codés et les sèmes afférents contextuels
Selon Rastier (1996 : 81), "on dira qu'un trait est actualisé quand la compétence
interprétative reconnaît sa pertinence ; or sa pertinence peut dépendre de sa
récurrence"
(111)- Guillaume était la femme dans le ménage, l'être faible qui obéit, qui subit les
influences de chair et d'esprit (Madeleine Férat, 287 citée par Rastier : 80-81).
"Le trait / faiblesse /, afférent à femme, est actualisé parce qu'il est aussi actualisé,
mais en qualité de trait inhérent, dans le sémantème de faible".
On pourrait objecter que cette distinction serait sans intérêt du moment où les
deux types jouent le même rôle dans le fonctionnement discursif. Or, tel n'est pas le
cas. Les sèmes relevant d'une norme sociale jouissent d'une certaine conventionnalité
et leur fonctionnement en contexte présuppose cet a priori conventionnel. Par contre,
199
les traits strictement contextuels ne peuvent compter que sur la relation syntagmatique
des mots en contexte et nécessitent de ce fait une justification.
Dans la phrase de Zola, la faiblesse liée à femme est interprétée comme le seul
produit de l'énoncé à travers la récurrence du sème / faiblesse / dans faible et de son
para-synonyme / soumission / dans obéit et subit. Or, dans ce cas, il ne s'agit pas, à
proprement parler, de justification mais de sélection (qui exige une existence préalable
du fait sélectionné) dans la mesure où le seul énoncé :
(113)- Guillaume est la femme au ménage. Il fait à lui seul tous les travaux de la
maison/ Il s'occupe tout le temps des enfants/ C'est lui qui cuisine, etc.
(114)- Guillaume est marié / a une femme mais, c'est lui qui fait les travaux de ménage
etc.
Les traits / voler / et / faiblesse / explicités ne faussent pas le sens et ne comptent que
sur leurs relations avec leurs concepts respectifs sans nul besoin d'être justifiés.
Les sèmes contextuels, du fait qu'ils ne sont pas de la même nature que les traits
stéréotypiques, ne peuvent pas se dispenser de justifications en contexte, n'acceptent
pas le test de mais et ne peuvent pas donner lieu à des phrases génériques :
200
(120)- * La femme est stupide
Nous présentons ici trois types d'incompatibilité entre, respectivement, les deux
définitions du sème afférent, entre celui-ci et le sème spécifique et enfin entre la
conception des sens polysémiques fondée sur la nature des sèmes.
Nous nous appuyons pour les deux premières questions, sur la lecture critique
de Samir Badr (1999) avec qui nous ne partageons pas les conclusions tirées, et pour la
troisième, sur l'analyse des exemples commentés par Rastier pour illustrer sa
classification des extensions polysémiques.
"Le sémème "femme" et le sémème "faiblesse" sont liés par une relation
d'afférence entre deux taxèmes présentés comme suit :
S1 : "homme"
S2 : "femme"
S3 : "force"
S4 : "faiblesse"
201
S. Badr constate que « les taxèmes dont dépendent les relations d'afférence
appartiennent au système fonctionnel de la langue. Sinon rien ne nous empêcherait de
construire[…] le schéma suivant :
taxème 1 taxème 2
S1 : "homme"
S2 : "loup"
S3 : "femme"
S4 : "agneau"
(99 : 20) »
-La relation d'afférence s'institue entre deux taxèmes dont chacun est constitué
par un ensemble de sémèmes. Elle attribue le sème afférent au premier ensemble
comportant un sémème actualisé. « Le second ensemble de sémèmes sert à actualiser
202
dans l'analyse le taxème où ce sème spécifique à une relation d'opposition, c'est
l'unique fonction de cet ensemble. […] La langue étant considérée
métalinguistiquement de manière à ne contenir pour seul sème spécifique que le sème
afférent en question […]. L'établissement d'un taxème distinct de celui du sémème
examiné présuppose donc, dans une relation d'afférence, l'actualisation d'un sème en
tant que sème spécifique. Mais, en tant que sème afférent, ce même sème présuppose à
son tour ledit taxème » (Ibid. : 21-22).
Règle 1 : Dans une relation d'afférence, les sèmes spécifiques ont le statut de sémèmes
virtuels
Badr mène sa démonstration de la deuxième règle à partir des cas où l'analyse actualise
un sème afférent générique. L'exemple suivant de Rastier lui sert d'illustration :
"Le Canard Enchaîné du 30.11.1983 titrait : Le caviar et les arêtes. […] Des
inférences contextuelles et la connaissance de normes sociales permettent […] de construire
des sèmes afférents […] le sème générique afférent commun à "caviar" et "arêtes" peut être
dénommé / condition économique / ; le sème spécifique afférent à "caviar" / luxe/, et à
"arêtes/ misère/". (1996 : 53).
Badr constate que la relation d'afférence ne s'est pas établie de façon directe
entre les deux taxèmes que permettent de constituer les sèmes génériques inhérent et
afférent. Les sèmes spécifiques des sémèmes appartenant au taxème /condition
économique / sont également actualisés dans l'interprétation. C'est ainsi que caviar
actualise le sème spécifique / luxe / et arêtes le sème spécifique / misère / (1999 : 22).
Règle 2 : Dans une relation d'afférence, les sèmes spécifiques sont toujours actualisés
La conjonction des deux règles implique que les taxèmes analysés en fonction d'une
relation d'afférence présupposent l'actualisation des sèmes spécifiques afférents (Badr,
1999 : 23).
203
Si l'on se rappelle que le sème spécifique se fonde sur une relation opposant
deux termes voisins dans le même taxème et que ce type de sème présuppose le dit
taxème, la conclusion logique découlant de cette analyse contredit cette définition dans
la mesure où cette analyse envisage que le taxème présuppose le sème spécifique. "On
ne saurait donc prétendre sans contradiction définir le sème afférent par une relation
entre deux taxèmes si l'un de ces taxèmes présuppose que serait déjà analysé le sème
pour lequel la relation d'afférence est établie" (Ibidem.).
- les sens diffèrent par au moins un sème inhérent […]" (Rastier, 1996 : 69).
Rastier affirme que cette conception diffère de celle proposée par R. Martin qui
distingue, lui, les acceptions résultant de l'effacement ou de l'addition de sèmes entre
deux sémèmes et le sens résultant de l'effacement et de l'addition de sèmes.
Ainsi, le sens tel qu'il est défini par Rastier correspond à une partie des extensions
polysémiques traitées par Martin comme acceptions. Par contre, les cas les plus
complexes constituant le sens chez Martin sont absents dans SI.
Nous nous contenterons ici de discuter la notion de « sens » chez Rastier pour
voir en quoi elle diffère de l'approche de Martin en termes d'acception.
Dans son illustration de ce type d'extension, Rastier présente une lecture critique de
deux mots polysémiques (blaireau et femme) analysés par Martin.
204
S2 : "Pinceau fait de poils de blaireau dont se servent les peintres, les doreurs
[…]"
Martin y voit deux acceptions en relation dite métonymique. Elle "consiste dans la
réapparition, sous forme de sème spécifique, de ∑1 (ie S1) dans ∑ 2 (ie. S2)" (Ibid. :
68).
Pour Rastier, ce n'est pas l'ensemble des sèmes de S1 (notamment les sèmes
génériques / Mammifère / et / carnivore/) qui réapparaît dans S2. Selon lui, seuls les
sèmes spécifiques / pelage/, /clair/ ou /foncé/ sont inhérents à S2. Des traits tels que
/plantigrade/ ou /bas sur pattes/ deviennent virtuels ; la virtualisation étant définie
dans le glossaire de SI comme étant "la neutralisation d'un sème en contexte" (278).
205
S1 : "personne" Sgén1
" de sexe féminin" S sp1
S2 : "personne" Sgén1
"de sexe féminin" Sgén2
"qui est ou a été mariée" S sp2.
(121)- Elle est devenue femme maintenant mais elle n'est pas encore mariée 89
2- L'articulation avec mais montre que le sème / mariée / est latent dans
femme. Il en découle que le fait de considérer "S1" et "S2" comme deux sens de femme
ne rend pas compte du lien qui existe déjà dans "S1" si ce n'est que virtuellement.
Ainsi, il nous paraît plus commode de voir deux acceptions dans femme et de
considérer que ce qui est latent dans ∑1 devient définitoire (spécifique) dans ∑2.
89
Un autre exemple : Il y a deux femmes au foyer, son épouse et sa sœur qui n'est encore pas mariée.
206
De ce qui précède de l’étude des notions « partageant » avec le stéréotype le
même espace sémantique, nous retenons les éléments suivants :
2- Cette part est de nature plus ou moins contingente et seconde ; elle est soit
externe, soit un ajout (connotation), soit non universelle (composant virtuel chez
Martin), soit latente et simplement disponible (virtuème de Pottier), soit afférente et
non distinctive (Rastier) ;
Dès lors, il serait légitime de définir cette part du sens par rapport à cette
dimension pour en saisir l’économie dans la structuration de la signification lexicale.
207
Troisième chapitre- Stéréotype : statut, typologie et
économie dans la structuration du sens
Dans l'état actuel de la réflexion sur la stéréotypie, on assiste à une situation
paradoxale à double titre. Le terme est employé dans les usages les plus divers ; il
touche la description du sens des mots, des extensions du sens, du discours et des
séquences figées. Les études disponibles (notamment celle de Putnam, Fradin et
Anscombre) sont toutes relatives à des aspects linguistiques particuliers (termes
d’espèces naturelles, relation anaphorique, enchaînements argumentatifs). Les
définitions correspondantes ne font que généraliser des déductions locales qui ne
touchent pas la vraie étendue du phénomène. Ainsi, de "l'idée conventionnelle associée
à un terme" (Putnam) à "la suite de phrases ouvertes rattachées à un terme"
(Anscombre), la définition du stéréotype ne rend pas compte de cette profusion de
l'emploi. Par conséquent, ces approches, bien qu’elles rendent compte dans des
optiques différentes d’aspects fondamentaux de la stéréotypie, ignorent quand elles ne
renient pas le rôle structurant que joue ce phénomène au niveau du lexique.
208
ignorer ces sérieuses objections et continuer d’y voir un mécanisme sémantique
participant à la structuration du lexique ?
Toutefois, le problème ne nous semble pas exclusif aux données stéréotypiques. Les
données encyclopédiques ne sont pas non plus à l'abri d'une telle variabilité tant que
notre connaissance du monde n'est ni statique, ni définitive. De même, ces mêmes
données, pouvant donner lieu à une liste plus ou moins longue pour chaque item
lexical, n'ont pas toutes la même pertinence et donc, ne participent pas de manière
égale à la configuration du sens. Qu'est-ce que le stéréotype alors ?
La typicité
La notion de typicité n'est pas moins confuse que celle du stéréotype. Tout
comme lui, elle donne lieu aux emplois les plus diverses. Cependant, la notion de
typicité fait l’unanimité en ce qu’elle est à la base de toute catégorisation. Car, dans un
sens, catégoriser, c'est sélectionner sur la base d'une pertinence quelconque et pour être
pertinent un trait ou une catégorie doit être représentatif à un égard ou à un autre et
donc typique. L'enjeu de la typicité est à situer alors par rapport à ces aspects variables
qui constituent les critères choisis dans une théorie ou dans une autre.
209
Au niveau sémantique, notre lecture a fait dégager deux conceptions différentes
de la typicité :
Ainsi, si les propriétés universelles sont "satisfaites par tous les objets dénommés,
seule une partie de ces propriétés est distinctive et permet de discriminer une catégorie
d'une telle autre qui peut partager avec elle des propriétés qui, tout en étant
universelles pour chacune des deux catégories, ne peuvent pas être distinctives et donc
ne sont pas typiques. Ainsi, pour la catégorie « oiseau », par exemple, la propriété
"avoir un bec" est typique dans la mesure où elle n'est pas seulement partagée par tous
les membres de la catégorie mais surtout est distinctive donc caractéristique de cette
catégorie. Par contre, la propriété, "être ovipare", bien que partagée par tous les
oiseaux n'est pas une propriété typique de la catégorie puisqu'elle est partagée avec
d'autres catégories telles que les serpents, …
- Chez les cognitivistes, la notion de typicité n’a pas cette nature essentielle. Elle est
liée à la notion de saillance, chose qui complique davantage sa définition précise.
Jacques Poitou (2000 : 22) définit la typicité "comme un cas particulier de la saillance
dans le cadre d'une catégorie donnée : l'élément A est plus typique que l'élément B
dans la catégorie C, si A est plus saillant que B par rapport à C. La saillance est ainsi
envisagée comme un facteur a priori indépendant de la catégorie qui correspond à une
association d'un objet avec un élément de son environnement, ou d'une propriété avec
des propriétés co-occurrentes. Tout comme la typicité, il s'agit d'une valeur relative :
un objet ou une propriété ne sont pas saillants en soi, mais plus ou moins que tel (le)
autre".
210
Cette propriété peut être révélée par un seul élément linguistique vis-à-vis
d'autres éléments dans une expression plus large ou par une propriété sémantique d'un
mot vis-à-vis d'autres propriétés dans le cadre du même mot.
Une question dès lors s'impose : selon quel critère confère-t-on ce caractère
typique à une telle catégorie ou telle propriété particulière et non à une autre ?.
A. Cruse voit que l'un des critères est la facilité de l'accessibilité à l'information.
Les caractéristiques faciles à retenir joueraient un rôle plus évident dans le processus
sémantique que celles auxquelles l'accessibilité est plus difficile. Ainsi, «quand les
gens sont amenés à énumérer, en un temps limité, l’ensemble des caractéristiques
d’une entité donnée, il y a une forte probabilité pour certaines propriétés d’être
mentionnées en premier » 90 (2000 : 57). En ce qui concerne les catégories, les
exemples prototypiques semble être d’une accessibilité plus rapide que les exemples
périphériques 91 (1990 : 384).
- l’idéalisation d’un modèle sur les plans cognitif ou culturel donne lieu à un
autre type de saillance plus ou moins partagé (le cas du chêne) ;
90
"When people are asked to list the characteristics of some entity, under time pressure, then is a strong
211
- les circonstances du moment peuvent concourir à des effets de saillance
ponctuels et occasionnels (Ibid. : 23).
Faut-il alors conclure à l'abandon d'un tel critère ? La réponse est, à notre avis,
non. Pourquoi ? Parce que, de tels reproches, s’ils remettent en cause l'appréhension du
sens par les procédures expérimentales, n'excluent pas la possibilité de vérification par
des tests linguistiques tels que la généricité, l'adversion par mais et la reprise
anaphorique lexicale (cf. ci-dessous).
Mais, il nous faut préciser quel type de typicité relève le trait sémantique
stéréotypique. Il est bien évident qu'il est lié à la saillance non essentielle. Dès lors,
une première rectification s'impose : nous parlerons dorénavant de « saillance
stéréotypique » plutôt que de « typicité ». Nous garderons cette dernière au sens que
lui attribue R. Martin. Cependant, cette solution n'est pas sans problème car comme
nous venons de le voir, les origines de la saillance sont multiples et ne sont pas toutes
de nature stéréotypique. Nous allons voir comment les autres caractéristiques du
stéréotype fonctionnent comme un véritable filtre qui ne maintient que la saillance de
cette nature.
- La conventionnalité
212
et non une donnée sémantique préconstruite dans le sens lexical. De ce fait s’impose la
discussion des fondements de cette approche du sens.
213
S’agissant du rôle du locuteur, Poitou avance que, du fait de l’activité de
catégorisation antérieure, le sujet dispose déjà d’un ensemble d’objets catégorisés
(47). Autrement dit, « pour chaque sujet, une catégorie existante est le résultat d’une
multitude d’opérations de catégorisations déjà effectuées par lui » (Ibidem.).
Ceci le mène tout naturellement à considérer que les catégorisations effectuées font
« l’objet de variations individuelles au sein d’une même communauté linguistique »
(46). Cette variation met en difficulté cette conception de la catégorisation de deux
manières :
214
réactualisés dans tous autres contextes » (Siblot, 1996 : 51) ne peut être saisie que
rétrospectivement.
215
nous appliquerons les seconds à des exemples bien connus pour voir comment se
manifeste le conventionnalisme au niveau du fonctionnement discursif de la langue et
surtout pour montrer comment ces critères excluent des types de saillance contingents
ou subjectifs.
- La généricité
du second type :
Dans ce cas, la représentation de ces phrases par les quantificateurs universels (les-le-
un) ne doit pas cacher le fait que la propriété "voler" ne soit pas valide pour toutes les
216
instances sous-catégorielles d'"oiseau". Par ailleurs, l'acceptabilité d'une telle phrase
montre bien qu'elle concerne d'une manière ou d'une autre l'ensemble de la catégorie.
Comment alors isoler les propriétés universelles communes à tous les membres
des propriétés associées à la totalité de la catégorie sans être satisfaites par chaque
membre particulier de la classe des référents à laquelle renvoie l’item lexical ?
Deux moyens, l'un linguistique, l'autre logique permettent d'opérer une telle
distinction:
Ici, l'inférence est stricte ; elle n'accepte aucune exception. Le second type autorise,
par contre, une inférence par défaut :
- "si Tweety est un oiseau et s'il n'y a pas d'information contraire, alors on peut en
inférer que Tweety peut voler" (Kleiber, 90 : 111).
Cependant, il est évident que chaque type de propriétés n'autorise pas l'inférence
contraire :
* si x est un oiseau est s'il n'y a pas d'information contraire, alors on peut en inférer
que x a un bec
217
Kleiber (1990 :111-112) mentionne que deux principes d'interprétation textuelle
complémentaires découlent du statut d'inférence par défaut des propriétés et attributs
typiques.
- Le premier […] marque qu'en l'absence de toute indication contraire dans le texte,
l'interprétation d'un terme se conforme normalement au prototype. L'anaphore associative
repose pour l'essentiel sur ce principe (cf. ci-dessous).
- Le test de mais :
"Mais, écrit Riegel et al. (1994 : 527), indique que le deuxième terme est un
argument plus fort qui oriente de façon décisive vers une conclusion opposée aux
attentes suscitées par le premier [élément]". Ce connecteur peut fonctionner comme
un marqueur d'interprétation non prototypique. Sa valeur adversative permet de
neutraliser la saillance stéréotypique dans la signification d'un item en actualisant des
connaissances encyclopédiques non typiques ou en portant la saillance sur les seules
propriétés typiques communément partagées par tous les membres. Ceci permet de
mettre au premier plan les caractéristiques communes sur lesquelles se fonde
l'appartenance d'une instance particulière, précise, à l'ensemble de la classe, de
l'espèce ou de la catégorie.
218
La négation permet, par contre, d'isoler le trait stéréotypique et de l'identifier : en le
niant pour le membre individuel, elle affirme par également son inclusion dans les
propriétés sémantiques de la catégorie :
Les propriétés typiques ou nécessaires, même dans une construction négative, donnent
lieu à des séquences mal formées en l'absence d'une justification en contexte de
l'anomalie en cause ou quand la négation porte sur une propriété ontologique :
Kleiber (2001 : 152) affirme en note qu'il ne postule "nullement pour mais qu'il "roule"
sur des stéréotypes lexicaux".
Il nous semble quand même possible de déterminer dans quel cas précis mais joue ce
rôle identificateur. Kleiber postule que ce connecteur "roule" sur des stéréotypes
lexicaux seulement en contexte étroit. L'activation d'autres connaissances et d'autres
relations dans un contexte plus large fait de ce dernier l'élément décisif dans
l'interprétation de l'anaphore associative véhiculée par mais. Or, une précision nous
semble s'imposer : l'exemple présenté par Charolles met en relation deux propriétés à
un antécédent particulier, précis (Louis) qui ne peut pas correspondre à un antécédent
générique. Cependant, du moment où l'on considère que dans le cas d'une saillance
stéréotypique on a affaire à une catégorie dont la représentation est plus ou moins
partagée par l'ensemble des locuteurs, un tel exemple paraît effectivement d'ordre
contextuel et subjectif ; un autre locuteur pourrait bien rétorquer "non, je ne le trouve
pas cultivé". Il en résulte que l'identification stréréotypique avec mais est liée à la
219
généricité. La preuve, c'est que, en modifiant l'exemple de Charolles, l'énoncé devient
mal formé :
Pourquoi ?
A notre sens, deux qualités sémantiquement disparates telles que "être gros" et "être
cultivé", ne peuvent être opposées par le connecteur mais que dans le cas où
l'antécédent référentiel serait un particulier, délimité spatio-temporellement. Dans ce
cas, la subjectivité du locuteur peut établir une opposition axiologique d'une manière
oblique puisque la saillance présentée par mais porte sur une valeur positive
adversative à une autre valeur négative ne relevant pas du même champ sémantique.
Par contre, quand il s'agit d'un antécédent générique, la relation entre les deux
prédicats opposés constituant ses propriétés ne peut plus compter sur une subjectivité
quelconque et s'appuie nécessairement sur la non-réalisation d'une implication
lexicale:
Ceci s'explique par le fait que la généricité de l'antécédent, son appréhension en tant
que totalité, définissent en quelque sorte la relation entre les deux propriétés opposées
à un niveau d'abstraction suffisant pour rendre compte de l'aspect global de la
catégorie en cause.
220
- L'anaphore associative
Elle met en oeuvre une interprétation textuelle fondée sur une relation lexicale
entre l'expression anaphorique en question et son antécédent. Elle est le produit de
deux facteurs :
(139)- Il entra dans une maison. Les murs étaient peints en blanc
(140)- Nous entrâmes dans un village. L'église était située sur une hauteur.
Comme dans le cas des séquences génériques, l'anaphore associative implique une
règle d'inférence sur laquelle s'appuie l'interlocuteur pour trouver le bon réfèrent. Là
également, l'inférence plus ou moins stricte met en évidence les traits nécessaires qui
sous-tendent la relation partie-tout :
S'il y a une maison, alors il y a des murs ou si x est une maison, alors x a des murs
221
(141)- ? Il s'arrêta devant une fleur. La beauté était éclatante.
Or, la beauté est une propriété stéréotypique de la fleur. Les énoncés génériques
suivants le prouvent :
La raison en est que ces attributs non spécifiés ne satisfont pas les deux conditions
requises pour l'établissement d'une anaphore associative à savoir que :
(i) "Le référent d'une anaphore associative doit être présenté ou donné comme aliéné
par rapport au référent de l'antécédent" (Kleiber, 2001 : 242).
(ii) "l'aliénation exigée par l'anaphore associative n'a lieu que si l'élément subordonné
est du même type ontologique que le réfèrent de l'antécédent" (Ibid. : 247).
Le type ontologique d'une propriété comme "beauté" pour "fleur" est différent de celui
de l'antécédent. Par conséquent, l'aliénation ne se trouve pas réalisée.
Pour Charolles (1990 : 132-135, cité par Kleiber : 109-110), à part les
anaphores associatives issues d’associations stéréotypées, « le discours génère aussi
[…] son propre cadre associatif en promouvant des relations inédites, conjoncturelles,
qui peuvent n'avoir qu'une validité occasionnelle, mais dont la reconnaissance s'impose
au récepteur du fait de la présomption de cohérence qui préside à son interprétation ».
Charolles et Clark illustrent leur point de vue par plusieurs exemples discutés dans
Kleiber (2001).
222
Nous nous contenterons ici de deux de ces exemples qui témoignent de la complexité
des phénomènes stéréotypiques :
(147)- Jean a été assassiné. Le couteau a été retrouvé à proximité (Clark 1977 : 417).
(148)- Je suis entré dans la pièce. Les chandeliers brillaient vivement (Ibid. : 416).
Clark voit dans ces deux exemples la preuve que le pont inférentiel entre l'antécédent
et l'expression anaphorique peut être généré par le discours puisque couteau et
chandeliers ne sont ni des traits nécessaires, ni stéréotypiques respectivement
à assassinat et pièce .
Kleiber remarque qu'en effet on ne peut pas correspondre à ces deux énoncés des
phrases génériques du type :
Kleiber montre que ces exemples sont sujets à trois contraintes : deux d'ordre
syntaxique et une sémantique. En premier lieu, il est impossible d'adjoindre un
modifieur à l'expression anaphorique :
(151)- ? Je suis entré dans une pièce. Les chandeliers d'argent brillaient vivement
(Kleiber, 2001 : 122).
(152)- ? Jean a été assassiné. Les (deux) couteaux ont été trouvés à proximité
(153)- ? Je suis entré dans la pièce. Le chandelier brillait vivement (Ibid. : 123).
223
Enfin, "il faut que le référent du SN anaphorique soit dans le cas du meurtre reconnu
comme une arme "à tuer" stéréotypique et dans le cas de la pièce comme une partie du
mobilier" (Ibidem.).
(154)- ? Jean a été assassiné. Le chou /la bûche/ la clef à mollette a été retrouvé(e) à
proximité
Ces restrictions témoignent que la relation anaphorique dans ces cas ne sort pas du
cadre stéréotypique. Seulement, elle n'obéit pas au modèle canonique régi par
l'inférence par défaut. Il s'agit d'un autre modèle où l'ingrédient anaphorique doit être
reconnu « comme un ingrédient (ou une partie de ou un élément) possible a priori du
référent de l'antécédent :
Si x est une pièce, alors il peut y avoir des chandeliers comme partie du mobilier
La thèse qui postule que, dans ces cas, le discours « génère son propre cadre
associatif » (Charolles, 1990) n’est pas convaincante. Comme l’affirme Mathilde Salle
(1995 : 57) « si le discours était effectivement capable de promouvoir des relations
inédites, alors, il devrait, à plus forte raison, pouvoir assurer le lien anaphorique dans
le cas où il y aurait une relation sémantique entre les termes [ex. noms de propriété et
noms de parenté] » (Voir le commentaire dans le corps de l’article de M. Salle (1995)).
En définitive, nous voyons que les critères de la conventionnalité, mis en évidence par
ces tests linguistiques, réduisent considérablement les sources de la saillance telle
qu'elle est appréhendée dans les méthodes expérimentales. La saillance du terme
inducteur, la familiarité de l'objet pour le sujet et la saillance ponctuelle, contingente
ne constituent plus des obstacles pour la reconnaissance des traits stéréotypiques
puisqu'elles ne peuvent compter que sur un contexte plus large justifiant le type de
saillance impliqué. Un locuteur qui pourrait affirmer que :
224
(156)- Le poussin est un oiseau typique
225
membres atypiques ou partiellement typiques d'une catégorie à une représentation plus
ou moins unique et en tout cas stable.
226
les occurrences particulières, apparaissent comme étant stéréotypiques du fait qu'ils
sont saillants et liés typiquement au concept en cause.
Ciel : espace visible au-dessus de nos têtes, et qui est limité par l'horizon
Bidon : récipient portatif pour les liquides, généralement de métal et que l'on
peut fermer avec un bouchon ou un couvercle
227
La motivation du trait culturel est plus ou moins lâche. Elle peut résulter d'un cumul
d'expériences tels que dur pour fer, précieux pour or, d'une simple représentation
culturelle telle que "courage" pour lion ou "ruse" pour renard ou d’une représentation
axiologique telle que la valeur positive attribuée à haut ou négative rattachée à bas .
Cette valeur est stéréotypique dans la mesure où elle présente une certaine saillance,
une certaine relation idéalisée, une certaine conventionnalité où la signification a une
stabilité intersubjectivement partagée.
La zone du flou entre motivation et arbitraire n’est pas toujours facile à tracer. A ne
citer que les représentations liées aux cris des animaux, attribués à des sujets humains :
les traits « plaintif », « exprimant le mécontentement » etc. respectifs à bêler, grogner
relèvent d’une taxonomie d’un genre impossible à vérifier.
Par ailleurs, on avance souvent l’idée que le stéréotype, par la variabilité de ses
motivations et de son contenu d’une époque à une autre et d’un locuteur à un autre, n’a
pas à figurer dans la signification des mots et qu’il doit être appréhendé, dans le
meilleur des cas, comme un simple effet discursif.
Dans cette optique, "le stéréotype consiste en traits dont le nombre n'est pas fixe" et il
"dépend de la culture, au sens large, du locuteur, de l'époque, de l'item en question"
comme l'affirme Melka Teichroew (1989 : 64). Cette vision paraît découler d’une
stéréotypisation de la notion même : ramener tous les faits relatifs à ce phénomène à
un moule unique conduit à une homogénéisation qui n'avance guère les choses et qui
justifie en fin de compte son renvoi en dehors du champ de la linguistique.
En outre, une telle vision ne semble pas vraiment établir une distinction entre le
stéréotype discursif qui semble, en effet, et d'une manière générale, être sujet à de
telles variations et le stéréotype lexical en tant que trait sémantique qui ne peut être
228
décrit que dans les limites qui le rattachent à un concept et qui permettent par la suite
de juger la nature de son lien et du degré de sa variabilité.
L'idée selon laquelle "le stéréotype consiste en une partie stable que la communauté
partage et une partie variable qui peut se modifier selon l'idiolecte et aussi selon les
objets auxquels on l'applique" (Ibid. : 63) résulte d'une confusion entre le prototype et
le stéréotype puisque celui-ci est vu comme une entité globale susceptible d'être
analysée en composants stables et d'autres variables et non comme un trait sémantique.
Cependant, chez le même auteur figure une autre vision qui va dans le sens de
la séparation des deux niveaux. Il affirme, en effet, que l’existence de traits
obligatoires et d'autres facultatifs établit une forme de hiérarchie ou de dégradation
entre deux types d’élément (Ibid. : 64).
Pourtant, une première distinction semble s'imposer d'elle-même entre les traits
stéréotypiques linguistiques qui se sont fixés dans la langue et font partie intégrante de
la signification des items lexicaux, et les traits stéréotypiques de pensées qui ne se
manifestent qu'au niveau du discours.
L'existence d'unités où ces traits sans pour autant être définitoires présupposent dans
leur manifestation discursive une relation lexicale établie a priori avec ces entités,
favorise l'idée qu'il s'agit plutôt d'un continuum que d'une hiérarchie.
229
2- Typologie et économie des stéréotypes
Ce qui assure à tous ces niveaux l'identité du stéréotype, c'est sa nature en tant
que trait sémantique saillant, idéalisé, conventionnel et intersubjectivement stable.
Cette correspondance est d'autant plus apparente dans des exemples où ces traits
stéréotypiques non universels ont un rôle fondamental dans la définition d'un mot.
230
Nous avons évoqué ci-dessus le refus de Rastier de considérer le sème / luxueux /
comme inhérent à caviar. Siblot, pour sa part, affirme que "le dictionnaire de langue
est loin de s'en tenir à la caractérisation minimale du genre prochain et de la différence
spécifique. Il livre une multitude d'informations liées au terme et qui s'avèrent
nécessaires pour que nous puissions nous faire une représentation adéquate du référent
dans le cas où nous ne connaîtrions pas le terme" (Ibid. : 151).
Nous avons soutenu précédemment (dans les exemples de caviar et eau) que les
traits stéréotypiques peuvent être discriminatoires, donc définitoires. Nous revenons ici
sur les fondements d'une telle position.
Nous croyons que les données perceptives et fonctionnelles jouent un rôle important
dans l'établissement de la signification. Ces données sont, selon l'expression de R.
Martin, la trace d' « autant d'expériences inéluctables, dont il est peu vraisemblable
qu'elles soient sans répercussions sur la langue » (1992 : 101). Les traits définitoires ne
sont généralement pas sélectionnés en rupture avec notre appréhension perceptive des
objets dénommés. Or, cette appréhension peut coïncider avec les propriétés objectives
du référent comme elle peut ne les couvrir qu'en partie ou encore s'en distancier
totalement. Cette manière de voir est d'autant plus intéressante si l'on garde en vue que
certains référents ont une structure complexe, une gestalt variée ou un usage varié (les
artefacts en général). Ainsi, leur signification n'est accessible qu'à travers des
231
manifestations perceptuelles faisant plus ou moins l'objet d'une convention sans pour
autant prétendre à l'universalité dans la mesure où la représentation sélectionnée ne
couvre pas la totalité de ces dimensions et ne coïncide pas avec une réalité objective
absolue. Dans ces cas, la définition minimale contient forcément des éléments
stéréotypiques saillants, idéalisés et conventionnels. C'est dans ce sens que R. Martin,
commentant la définition de tasse, affirme que "la tasse est, dans la réalité, un petit
récipient ; elle est faite, dans la réalité, pour boire ; c'est dans la réalité encore que ce
récipient est muni d'une anse. Aucune différence définitoire référentielle ne sépare
donc les traits de la définition minimale et les traits stéréotypiques" (1991 : 151).
Si l'on voit avec M. Sourdot que la pertinence "se dit d'un élément linguistique doué
d'une fonction dans un système déterminé" (2000 : 96 ) et si l'on consent avec Marc
Sourdot que "ne s'intègre proprement à la langue que ce qui est commun aux réactions
des différents membres de la communauté" (2000 : 101), rien n'empêche, dès lors, les
traits stéréotypiques d'être pertinents et définitoires.
232
hyperonyme matière fonction traits descriptifs
Bidon récipient généralement portatif pour les que l'on peut fermer
en métal liquides avec un bouchon ou un
couvercle
Les deux définitions ont en commun les traits relatifs à l'hyperonyme et la fonction :
elles s'en distinguent par la matière et les traits descriptifs. Or, la matière ne constitue
pas objectivement une propriété discriminatoire ; les deux objets peuvent être faits en
plastique et rien n'empêche l'un ou l'autre d'être respectivement en verre ou en métal.
De même, les traits descriptifs ne sont pas objectivement spécifiques aux deux
référents ; une bouteille peut aussi être fermée par un bouchon ou un couvercle ; un
bidon, dans la réalité, peut avoir un goulot étroit. Sans la saillance perceptive qui
sélectionne dans chaque objet des propriétés déterminées et sans l'idéalisation qui
rattache ces propriétés à l'objet en cause, on ne saurait discriminer les deux concepts.
La représentation stéréotypique est ainsi la condition nécessaire de la pertinence
linguistique des deux significations.
233
Vu l’importance de ce type de fait dans les mécanismes linguistiques, nous nous
contenterons ici de quelques illustrations et nous traiterons cette relation dans un
chapitre à part :
(157)- Méfie-toi de cet homme, il est fou ; il a des troubles mentaux depuis deux ans
Ici, si le verbe se méfier évoque le danger, fou en donne une justification par
l'actualisation d'un sème latent associé au concept (extravagant). Ce sème ne fait pas
partie de la signification dans la mesure où la folie n'est pas nécessairement liée à la
violence. Ce trait est contingent dans le discours comme le montre l'énoncé qui suit :
(158)- …un visionnaire de bonne foi, un maniaque inoffensif, un pauvre fou qui est
plaint autant qu' il méritait d' être aimé.( RENARD Jules, Journal : 1887-1910 / 1910,
page 906 )
- fou : "personne qui, sans être atteinte de troubles mentaux, se comporte d'une
manière déraisonnable, extravagant" (PR).
- Le contenu dénotatif de gifler est défini dans Le Petit Robert comme suit :
Cependant, dans certains contextes, il est rattaché à une valeur symbolique exprimant
l'humiliation :
Dans cet énoncé, l'interprétation de il rougit qui est l'expression de la honte, convoque
l'actualisation de cette valeur symbolique latente contenue dans gifler.
234
ces deux énoncés, par exemple, le substantif mugissement est employé dans deux sens
différents :
(162)- « ces paroles furent dans toutes les bouches, et cette voix collective fut
comme le dernier mugissement d’une tempête… » (Honoré de BALZAC, La Comédie
humaine, Béatrix : t. 2. Paris : Gallimard, 1976, p 188).
- Enfin, un trait latent peut donner lieu à une extension polysémique par une
projection métaphorique fondée sur l'analogie. Entre le domaine source tel qu'il est
perçu à travers la définition lexicale de l'item et le domaine cible, il n'existe aucune
relation sémantique directe. La signification de l'extension se fonde sur une
représentation stéréotypique latente au sens primaire. Guêpier renvoie dans l'une de
ses acceptions à un nid de guêpes. A partir de ce sens et du stéréotype d'hostilité lié à
cet insecte dérive l’acception de "position critique dans une affaire ou parmi des
personnes hostiles, nuisibles" caractérisant le domaine des hommes et des relations
humaines.
235
des classes qui accompagne la création de tout signe linguistique et qui varie avec lui à
chaque étape de son évaluation". Cette approche de la catégorisation s'écarte, ainsi, de
celle de E. Coseriu pour qui "les relations internes d'un champ lexical en tant que
structure de contenu sont déterminées par les identités et les différences qui constituent
le champ même, c'est-à-dire par les oppositions sémantiques qui y fonctionnent. Une
typologie des champs doit, par conséquent, se fonder sur un classement des
oppositions lexématiques" (1975 : 34). Nous défendons l’idée que le lien entre la
langue et la réalité extralinguistique, telle qu'elle est représentée par l'ensemble des
locuteurs, est fondamental dans la compréhension de la genèse et de la génération des
mécanismes sémantiques. Dans la perspective de Coseriu et selon les termes de Cortès
"la question de l'origine de ces traits n'est pas posée : le linguiste fait comme s'ils
s'imposaient lors de l'étude, le seul critère de choix d'un trait étant son pouvoir
explicatif au sens du modèle théorique choisi" (1992 : 26). Cependant si nous
privilégions la recherche des ressemblances entre les items, nous ne nous inscrivons
pas dans l’optique qui repère les identités entre des objets et non des significations.
L'étude de la structuration stéréotypique du lexique ouvre la voie à une vision plus
large de la catégorisation qui, sans évacuer le réel en dehors de la langue, envisage
celle-ci dans ses rapports avec lui.
La fréquence des dérivés stéréotypiques est très élevée dans la langue. Un même trait
peut donner lieu à plusieurs formations 92 dont le sens dépend non seulement du
contenu sémantique de ce trait mais également de la valeur affixale et du domaine
cible où est investi ce trait.
92
Comme il peut donner lieu à plusieurs acceptions polysémiques d'un même item.
236
Vues sous l'angle de la variation de ces domaines, ces significations
stéréotypiques renvoient à une multitude référentielle. La projection stéréotypique
étend la signification de ces termes au-delà de la réalité concrète qu'ils dénomment
initialement. Cette altérité dénominative doit sa diversité à la productivité du foyer
stéréotypique élémentaire correspondant aux termes noyaux. Lequel foyer couvre les
champs lexicaux les plus divers. Ainsi en est-il dans la famille dérivationnelle ayant
comme tête noir et auquel est rattachée une valeur stéréotypique négative :
Vue sous l'angle du rapport avec le sens premier, la dérivation stéréotypique emprunte
généralement deux voies :
a) Chiffonner : 1. "froisser…"
2. ennuyer
Chiffonné(e) 1. Froissé.
237
2. tracassé
rebutants
Glacial 1. qui a la température de la glace, qui pénètre d'un froid très vif
Cette corrélation entre la glace et la froideur des sentiments fait partie d'un autre
type de structuration sémantique plus large descriptible au niveau du lexique (cf.
infra.).
D'autres dérivés de glace existent (glaçage, glacerie, glaceuse…) mais ils sont
rattachés sémantiquement à d'autres traits tels que l'analogie de l'aspect (lisse…) ou
l'aspect technique et productif (glacier, glacière…)
3- "Homme qui séduit ou prétend séduire les femmes par son apparence
avantageuse"
238
2- qui veut plaire par sa mise, qui a le goût de la toilette, de la parure
2- flirter
Si dans cet exemple, tous les dérivés résultent d'un sème latent à coq « animal » et
actualisé pour être définitoire dans « coq 2 », chacun d'eux donne lieu à son tour à un
ensemble de signifiés. Ainsi, chaque forme dérivée constitue en soi un polysème.
Le trait qui sous-tend toutes ces formations est celui du "mécontentement"; il permet
par ailleurs dans certains dérivés de tendre un trait de caractère (humeur maussade).
Les stéréotypes associés aux cris d'animaux constituent un champ plus large (cf.
infra.).
239
de lexèmes qui ont un sème en commun constitue un paradigme ou un champ
sémantique.
Cette définition a pour conséquence que le fait qu'un lexème, qui est la plupart du
temps constitué de plusieurs sèmes, se retrouvera nécessairement dans plusieurs
paradigmes sémantiques et que l'on peut structurer de proche en proche de grands pans
du vocabulaire selon ce principe" (1992 : 21).
Cette conception du champ sémantique nous offre une liberté plus grande dans la
description de l'économie des traits stéréotypiques dans la structuration du lexique. En
effet, le sème commun qui fonde le champ peut être lui-même un trait stéréotypique,
comme il peut être un autre sème auquel est rattaché pour chaque mot un stéréotype
différent. Enfin, entre les deux, un même stéréotype peut structurer tout un ensemble
de définitions ayant un sème commun auquel se rattache ce stéréotype.
Cette mouvance résulte du fait que la stéréotypie discursive fait intervenir des
éléments au-delà de l'unité lexicale (figée ou simple) et implique une imbrication des
plans d'énonciation individuels et collectifs comme elle met en oeuvre un processus
d'interprétation complexe.
240
luxueuse Jaguar) qui présentent un élément […] comme l'effet d'une prédication
antérieure" (1997 : 106-107).
Une illustration de ce type de stéréotypie est rendue par "la langue de bois" qui
concerne essentiellement l'étude des discours soviétiques dans la perspective de l'école
française de l'analyse du discours. Sur le plan du contenu on assimile "la langue au
bois" "à un jargon qu'il faut décoder, à un langage technique, normalisé, froid, sans
prise sur l'auditoire. Elle est perçue d'autre part comme un langage stéréotypé, répétitif,
réfractaire à toute évolution, une litanie sans racine et hors temps" (Ibid. : 115).
Sur le plan des caractéristiques formelles, "la langue de bois" se caractérise par
"la lourdeur syntaxique produite par l'abondance des tournures nominales, des groupes
verbo-nominaux où le verbe n'assume plus qu'une fonction d'auxiliaire, l'absence
d'embrayeurs, la présence massive du "nous", l'importance des tournures passives et
impersonnelles, l'emploi excessif des comparatifs […] ces procédés syntaxiques
passives et impersonnelles, l'emploi excessif des comparatifs […] créent l'imprécision
et maintiennent le flou et l'abstraction dans le discours. L'utilisation fréquente de
figures rhétoriques… transfigure la réalité" (Pinera, 1988 : 163) 93
Toutefois, Pineira souligne l'ambiguïté de cette notion telle qu'elle est définie en
rapport avec un discours idéologique particulier. Il montre que ce type de discours,
bien présent dans d'autres discours, doit être dégagé des fins politiques. Pour lui
conférer une légitimité scientifique, il faut donc décrire de tels procédés rhétoriques
s'apparentant à une langue codée, un jargon dont il faut mettre en évidence les
spécificités, en dégageant « la notion de langue de bois" de son étiquette politique,
polémique et ambiguë » (Ibid. : 165).
93
L'auteur résume les caractéristiques de ce type de discours telles qu'elles sont présentées par Françoise Tone
dans son livre La langue de bois, Paris, Julliard, 1978.
241
impriment des croyances et des convictions dans lesquelles le sujet parlant fait
difficilement la part du stéréotype et l'opinion individuelle" (1999 : 48). R. Amossy et
A. H. Pierrot mentionnent de leur côté que "le jugement" préconstruit" dans la
relation syntaxique est un élément préalable au discours, non asserté par le sujet
énonciateur, non soumis à la discussion et dont on a oublié l'origine discursive"
(1997 : 107).
3- Rupture ou continuum ?
242
- le stéréotype – construction de lecture exploite entre autres les contenus
sémantiques des items lexicaux. Ce qui est définitoire ou latent est investi pour les
besoins de l'argumentation discursive ;
243
Ainsi, l'idée de continuum entre la stéréotypie linguistique et la stéréotypie discursive
s'avère pertinente.
Par ailleurs, jusqu'ici, nous n'avons envisagé la stéréotypie linguistique que sous
l'angle de l'opposition universel/ non universel caractéristique des unités
monolexicales.
Mais, avant d’entamer ces deux volets d’études, il serait nécessaire d’élucider la
relation entre la stéréotypie et la métaphore qui joue un rôle similaire dans cette
structuration et ce, aux deux niveaux.
244
Troisième partie- Stéréotypie et mécanismes
sémantiques
245
Chapitre premier- Stéréotypie, métaphore, métonymie
La métaphore et la métonymie sont deux mécanismes essentiels de
l'enrichissement lexical et ce à double à titre : au niveau des unités monolexicales, les
lexicographes enregistrent un nombre important d'extensions polysémiques introduites
sous des gloses définitionnelles telles que "figuré", "métaphorique", "analogie", etc. et
qui impliquent d'une manière ou d'une autre des aspects relatifs à ces deux mécanismes
sémantiques. En ce qui concerne les unités polylexicales, un grand nombre de
séquences figées résultent, de la fixation dans la langue de représentations fondées sur
ces figures. Une bonne part d'entre elles figure sous des entrées lexicographiques à
travers des locutions considérées à partir de l'un de leurs termes, jugé comme pivot ou
foyer et comme illustrant des extensions polysémiques de ce même terme vu dans son
sens "propre".
Ce lien a été constaté par plusieurs théoriciens surtout dans leur traitement des
aspects divers de la métaphore. Concernant les métaphores nominales par exemple, I.
Tamba constate que "ces dernières se fondent sur un stéréotype relevant d'une
convention socioculturelle tout autant que sur un prototype d'ordre perceptif" (1999 :
220). Schulz voit dans le double sens de l'emploi métaphorique un "effet
stéréoscopique" qui fait de la métaphore ce qu'elle est" (2002 : 29). Quant à Prandi, il
distingue un type particulier de métaphores reposant sur "l'analogie régressive [qui] se
reconnaît du fait qu'elle porte immédiatement à l'individuation d'un tertium
comparationis préalablement disponible parmi nos stéréotypes cognitifs et culturels"
(2002 : 24). Enfin, Lakoff constate que les schèmes métaphoriques moraux sont aussi
producteurs de stéréotypes que la pensée ou le langage (1997 : 251).
246
Toutefois, l'étude de la relation entre les deux types de phénomène, si elle
existe, nécessite d'abord la description des mécanismes sémantiques qui sous-tendent
la métaphore et la métonymie en général afin d'en savoir le mode de fonctionnement.
Une telle tâche ne peut être accomplie qu'en confrontant les différentes
approches les concernant, du moins dans les études linguistiques actuelles. Le domaine
d'étude étant encore vaste, nous nous proposons de les traiter conjointement sous
l'angle de leurs similitudes, lorsqu'elles se présentent toutes les deux dans le même
cadre théorique, et de leurs différences.
247
La métaphore dépasse la simple relation sémantique établie entre deux
catégories relevant de deux domaines différents pour impliquer un système de
connections et de relations structurelles permettant à un concept d'être
« métaphoriquement structuré en termes d'un autre » (ex. Métaphore de conduit) ou
encore à organiser « un système entier de concepts les uns par rapport aux autres » (ex.
Métaphore d'orientation, Ibid. : 24). Ce transfert d'un domaine source vers un domaine
cible concerne la structure même, les relations internes sur lesquelles repose la logique
du modèle cognitif véhiculée par la source. Ainsi, en définitive, la métaphore est
définie comme une correspondance systématique ("mapping") des structures, d'un
modèle source vers un modèle cible. Ainsi en est-il, par exemple, des métaphores
conceptuelles suivantes :
source cible
plantes idées
guerre amour
bâtiments théories
248
d'objets de catégories de base (tank, bombe, tranchée, etc.) et des catégories d'action
(frappe, attaque, conduire) ;
- « les schémas d'images de base sont utilisés pour la conceptualisation spatiale des
catégories abstraites » 97 . Dans la métaphore du / contenant /, nous nous servons
d'images (image schemas) dérivant de notre interaction quotidienne avec le monde
(expériences de base pour organiser des domaines abstraits tels que / l'argument est
une journée / ; un argument est un contenant / ou encore / l'esprit est un contenant pour
les idées/.
97
C'est nous qui traduisons.
249
paraissent absurdes bien que la notion d' « ouverture » puisse être rattachée à cette
catégorie abstraite :
On a par ailleurs des expressions telles que "La clef de cette théorie" où le mot "clef"
isolé de tout domaine particulier (qu’il soit source ou cible) 98 symbolise la facilité
d'accès.
- En second lieu, la métaphore conceptuelle s'appuie sur des expériences concrètes. Or,
plusieurs d'entre elles impliquent des paires de domaines dont la corrélation est loin
d'être évidente. Considérons la métaphore / « le plus » est en haut / ; Lakoff avance
qu’il existe, dans l’expérience quotidienne une corrélation entre la quantité et la
verticalité qui fait que le « plus » est toujours en haut (par exemple, quand on
« empile des livres sur le bureau, le niveau monte », 1990, 166).
Pour ce qui est de la métonymie, tout comme la métaphore, elle est de nature
conceptuelle, conventionnelle, inconsciente et généralement établie comme un modèle
cognitif. Elle est source de génération d'expressions linguistiques et donne lieu à des
correspondances systématiques (mapping). Cependant, elle se distingue de la
métaphore en ce qu'elle établit des correspondances au sein d'un même modèle. Une
98
La clef peut être d'une porte ou d'un meuble ; elle peut être aussi rattachée à une théorie, à une situation "clef
de cette affaire" ou autre "clef de la réussite".
250
catégorie relevant d'un domaine donné est employée pour désigner une autre catégorie
au sein du même domaine sur la base d'une relation préconstruite entre les deux.
251
conceptuelle des émotions n’est pas le produit pur du seul mécanisme métonymique 94 .
A titre d'exemple, la colère peut être rattachée à deux métaphores : / la colère est du
feu / et / la colère est la chaleur d'un liquide dans un contenant / comme le montrent
respectivement les expressions suivantes : se consumer de colère / bouillonner de
colère;
Pour Patricia Schulz, par exemple, "la métaphore n'a pas de réalité objective".
Elle résulte d'un choix subjectif qu'un observateur donné peut faire ou ne pas faire. Du
point de vue théorique, elle est "le produit d'une conception référentialiste du sens,
conception qui décrit les significations à travers les données du monde que les
expressions de la langue aurait pour objet […] de signifier […]" (2002 : 32).
Selon Schulz, cette conception repose cruellement sur la théorie du double sens:
les mots auraient des significations premières ou propres, définies à partir des traits
dénotatifs du référent et des significations secondes ou dérivées construites qui
viennent s'ajouter à ces traits.
Or, pour elle, cette distinction n'a pas d'intérêt puisque l'on peut toujours
postuler qu’"il n'y a qu'un sens "réalisé" par les entités de la langue. Autrement dit, le
sens d’un mot peut avoir différentes réalisations selon les contextes impliquant
chacune l’une de ses facettes (Ibid. : 35). Pour justifier le rattachement de ces
différentes facettes à une seule forme, elle postule à la suite de Davidson (1978 : 33) et
Searle (1979 : 100) que "M a le même sens dans les deux emplois. Décrire M
consistera à lui donner un même sens indépendamment de la situation qu'il décrit"
(ibidem). L'exemple qu'elle avance est :
94
"Metonymies cannot provide the conceptual structure of emotions all by them selves" (Ibid.: 133).
252
- l'acte de suivre des yeux des mouches réelles,
Si l'on croit à ce raisonnement, une expression telle que les mouches qui volent,
n'aurait qu'une seule signification qui fait que le procès exprimé rend naturellement le
manque d'intérêt caractérisant un tel acte dans toutes les situations possibles ;
l'interprétation "métaphorique" résulterait, donc d'une incompatibilité entre l'idée
d'intérêt contenue dans regarder et sa négation dans l'expression en cause. Or,
examinons l'énoncé suivant :
(167)- Paul regarde les mouches qui volent au-dessus de ces pâtisseries
exposées sans le moindre souci d'hygiène. Malgré sa faim, il décide de ne pas
en acheter.
Ici, "regarder les mouches qui volent", au-delà de l'acte réel, acquiert un intérêt
évident dans ce contexte énonciatif. Il faudrait dès lors expliquer comment l'usage
discursif active deux facettes totalement opposées et surtout comment les rattacher à
un sens unique construit. D'ailleurs, le même problème se pose avec d'autres
expressions où mouche est lié soit à un contenu positif soit à un contenu négatif
comme dans une fine mouche (personne habile et rusée) vs ne pas faire du mal à une
mouche (où mouche = faiblesse). En outre, une telle conception ne peut pas expliquer
les cas des séquences totalement opaques où l'absence de compositionnalité rend
impossible l'explication par un tilt quelconque entre les composants. Par exemple, dans
"avoir un cheveu sur la langue", il est difficile de dériver la signification "zézayer
légèrement" à partir d'une forme schématique d'où dérive également le sens littéral ou
la "seconde facette".
253
Le manque d'intérêt signifié par l'expression "les mouches qui volent" ne résulte pas
directement de la signification d'aucun des éléments constitutifs de l'unité comme dans
le cas de regarder où le sème "intérêt" est distinctif (par rapport à voir).
On ne peut non plus prétendre que l'usage linguistique subjectif d'un locuteur
individuel ou encore le contexte énonciatif par ses seuls moyens dotent l'expression
d'une telle signification, sinon on pourrait rattacher n'importe quelle signification à
n'importe quel segment linguistique. La langue serait dans ce cas une pure création
subjective et la communication deviendrait impossible. En fait, la signification d'une
telle expression n'est pas construite mais exploitée. Irène Tamba refuse la distinction
"sens propre" / "sens figuré" parce que le sémiotique des langues naturelles, auquel est
rattaché souvent le sens figuré, est issue de la sémantique, considérée généralement
comme le foyer du sens propre ; il y renvoie et n'arrive « à s'en détacher que
partiellement » (1981 : 139-142). Elle attribue à la construction figurative la valeur
d'un "construit énonciatif" original. "L'objet visé une fois repéré par référence
situationnelle, sera soumis à d'autres déterminations par référence contextuelle".
Formulée selon les règles énonciatives ordinaires, la construction figurative sera alors
"mise au compte personnel de l'énonciateur".
Collette Cortès consent avec Tamba que cette construction obéit aux mêmes
opérations énonciatives ordinaires générant le sens, mais elle voit le conflit ou
l'incongruence un indice qui « déclenche un supplément de travail interprétatif et
permet de construire l'interprétation "décalée" de l'expression figurative » (1994-
1995 : 119). D'où les mécanismes sous-jacents qui lui sont particuliers :
"- sur le plan structural, la projection sur l'axe syntagmatique d'un rapport de
similarité entre deux paradigmes non-isotopes (métaphore) ou la projection sur l'axe
paradigmatique d'un rapport de contiguïté (métonymie) ;
Cependant, l’identification d’une telle similitude n’aide pas les théories qui
reconnaissent le fait métaphorique à s'en sortir moins divisées sur cette dualité du sens.
La complexité du phénomène suscite en outre, des divergences concernant son origine
254
(conceptuelle / linguistique), ses mécanismes (similitude / comparaison) et sa
reconnaissance (incompatibilité, possibilité d'une description unifiée).
Ces deux visions continuent à sous-tendre d'une manière ou d'une autre les travaux
actuels sur la métaphore.
95
Comparatio concerne les relations quantitatives telles que "être plus long" / "être plus grand" et similitude
implique les jugements qualitatifs ayant pour objet deux propriétés similaires. La métaphore relève de ce dernier
niveau.
255
l’identification métaphorique se fait du même au différent exigeant ainsi
l’incompatibilité (Ibid. : 219).
Dans « Sophie est une lionne », la sélection sémique maintient une partie des
prédications dénotatives dans le vague permettant ainsi le passage du "vrai" au
"potentiellement vrai". Cette suspension sémique permet en retour « de surmonter
l'incompatibilité que nécessairement la métaphore porte en elle » (Ibid. : 220), et
d'établir une équivalence approchée ( V) entre deux prédicats donnés reposant sur
une double implication qu'on peut schématiser ainsi :
V : [2x Px]
spécifique ou générique
pp : x, P(x) Fx
où F(x) ƒ'(x) ensemble flou des implications possibles à partir de Q (x'') (Ibid. : 225).
256
Soit ƒ(x) l'ensemble des implications qui peuvent caractériser ce qu'est une femme
dans le ménage (Px) à savoir que :
F(x) serait, dans un contexte plus large, une ou plusieurs de ces prédications.
Ces caractéristiques sont présupposées être valides dans tout univers, pour toute
femme. Sans cette validité, la seconde implication, celle du posé, ne peut être déduite.
Dans la seconde implication, l'équivalence entre "Paul dans le ménage" Q(x) et
"femme dans le ménage" P(x) n'est assumée que par le locuteur ( loc). La prédication
qui permet ce rapprochement F(x) appartient cette fois-ci à un autre ensemble
d'implication ƒ('x) possible à partir de Q(x) et qui n'est pas forcément le même que
celui possible à partir de P(x). A titre d'exemple, "une femme infante", "allaite"
appartient à Px et non Q(x).
257
(tautologie et descriptions définies) ; linéaire sous celui de l'inclusion (hypo /
hyperonymie comme dans chaise et siège) et synthétique provenant d'une « relation de
contradiction () entre le référent et la polarité dénotative qui le vise » (1987 : 38).
Marc Bonhomme constate que les polarités dénotatives d'un référent comme
"pape", prennent appui sur deux types de relation : les unes fonctionnant à l'intérieur
du même domaine référentiel et donnant lieu à la métonymie (ex. Rome / Chaussettes
rouges pour "pape") ; les autres agissant entre différents domaines et donnant lieu à la
métaphore (ex. "moufti" / "phare").
Pour définir la nature de ces domaines et les relations tropiques, il fait appel à la
notion de « cotopie » qui « regarde la cohérence sémantico-référentielle d'une langue
donnée » et qui « délimite des ensembles sémantico-référentiels constitués d'un
TOPOS (ou d'un thème) de base autour duquel s'agglutinent des polarités lexicales qui
sont compatibles à la fois avec ce topos et entre elles » (Ibid. : 43-44). Un mot comme
pape s'intègre dans un ensemble sémantico-reférentiel où peuvent être évoqués en
discours des aspects divers qui lui sont rattachés : le lieu où il habite (Rome), telle
particularité vestimentaire (chaussettes rouges) symbole de sa fonction (mitre), etc.
Cet ensemble est le foyer des tropes. La cotopie sémiotique s'organise autour de
catégories notionnelles primitives (pape, Rome…) liées entre elles par des relations
contiguëlles inhérentes (positionnement circonstanciel, actanciel…).
258
due à des transferts entre deux ou plusieurs polarités co- référentielles dans une même
cotopie sémiotique" (49) ; la seconde en ce qu'elle se fonde sur "la transgression des
cotopies sémiotiques elles-mêmes". Elle "se définit ainsi comme une dénotation
synthétique fondée sur la rupture cotopique - ou sur la fonction ALLOTOPIQUE-,
source de fortes incompatibilités dans le pôle tropique" (Ibid., 50).
Ce qui justifie une telle interrogation, c'est que, selon Marc Bonhomme, la cotopie
sémiotique se greffe d’abord sur pivot référentiel premier , c’est-à-dire un terme
central (par ex. le pape) avant de s’étendre à d'autres termes (Ibid. : 47) ce qui met
l'accent sur la nature lexicale des différents nœuds. En outre, commentant des énoncés
métaphoriques tels que : le pape est un lion / un phare, il parle dans ces cas,
respectivement, des "cotopies inattendues" "animalité" " et "paysage côtier" (52). Les
implications d'un tel changement sont considérables. D'un côté, si l'on admet que la
cotopie repose sur une identité conceptuelle et non lexicale, on serait en mesure de
réviser la quiétude constatée dans l'analyse des métonymies liées à la cotopie papale.
Dans ce cas, on serait tenté, par exemple, d'élargir les limites de la cotopie pour
l'étendre au champ notionnel de la "christianité". Si l'on objecte qu'il s'agit de
259
"catégories notionnelles primitives" comme le postule par ailleurs Bonhomme, on ne
voit pas comment ajuster la cotopie de l'"animalité" pour être primitive.
De même, seul le pivot métaphorisé de la première cotopie se trouve touché par cette
relation. Autrement dit, dans le cas de la métaphore la relation ne s'établit pas entre
deux structures fondées sur des relations de contiguïté entre des connexions ayant
comme pôle dénotatif un pivot privilégié mais disons, pour le moment, entre deux
termes.
Pour Kleiber, dans le cas de la métaphore "même s'il peut y avoir deux
catégories lexicales en jeu, il n'y a qu'une entité, ou qu'un ensemble d'entités ou, si l'on
veut qu'une occurrence qui se trouve catégorisée par le nom tropique" (1999 : 127).
260
Il s'agit d'une catégorisation indue reposant sur des traits de ressemblance, d'analogie,
différents de ceux mis en jeu dans la comparaison (différence vériconditionnelle, Cf.
Martin).
La première est défendue entre autres par les tenants de la théorie interactionnelle qui
pensent que le mécanisme métaphorique résulte d'une interaction (tension) entre une
expression employée métaphoriquement (foyer ou véhicule) et les termes co-
occurrents (cadre ou teneur) présentant l'acception littérale. Selon Kleiber, cette
approche ne permet pas de rendre compte des phrases non déviantes employées
métaphoriquement telles que :
et où le tilt entre l’emploi figuré de bébé et son sens propre n’est pas senti (87). Elle
ne rend également pas compte des énoncés métaphoriques où aucun terme n'est
employé avec son sens littéral 96 .
96
Sous un autre angle, Prandi affirme qu'"en présence de métaphores projectives, l'analogie qu'on prête à la
relation entre teneur et véhicule est une analogie vide, une présomption analogie que seul le travail sur les
concepts rapprochés peut se proposer de remplir dans les limites d'un champ d'interprétation" (1992 : 240).
261
indéterminée des individus de tout genre, à l'intérieur duquel se détermine la vérité ou
la fausseté de la proposition » (Ibid. : 114).
Michele Prandi avance dans le même sens que "la métonymie et la synecdoque
se servent de relations concevables indépendamment entre des choses appartenant à un
domaine conceptuel homogène pour désigner ou qualifier une chose [donc occurrence]
par le nom d'une autre" (1999 : 195). Toutefois, il précise que si la construction de
telle ou telle relation métonymique dépend totalement d'une expression linguistique
donnée, la relation en elle-même est préétablie et préexistante par rapport à sa
réalisation linguistique ; selon lui, la métonymie "n'agit jamais sur la substance des
concepts. Si un être humain est appelé trombone par métaphore, c'est-à-dire, dans
l'idée que le trombone est un bon modèle pour le décrire, son essence est mise en
discussion. Si un être humain est appelé trombone par métonymie, c'est-à-dire, du fait
qu'il joue du trombone, son essence conceptuelle n'est pas mise en question" (1998 :
91).
262
valable pour tous les cas de figures ne font, en fait que favoriser l’une des démarches
interprétatives (la plus typique) pouvant caractériser une forme donnée (Ibid. : 6). L'un
des schémas souvent proposé est celui de l'identification directe "A est B". Prandi
remarque que, pour une métaphore verbale non substitutive comme La lune rêve,
l’application de la formule "A est B" entraîne l’évidemment de la position sujet (Le
de la lune est un rêve). « Comme la métaphore contient un double cohérent du sujet,
on peut certainement focaliser ce partiel de l'interaction à l'aide d'une formule
d'identification : La lune est un être humain. Mais, cette équation, qui par ailleurs n'est
pas assénée par la métaphore, n'épuise certainement pas sa valeur, car elle ignore
précisément le foyer de la métaphore » (1999 : 200).
263
Les métaphores verbales ont la particularité d’attribuer « un procès à des actants
incohérents » (Prandi, 2002 : 17). Dans ce cas, l'analogie qui s'établit indirectement
entre l'actant incohérent et l'actant cohérent "initial" n'est qu'une partie de la structure
conceptuelle véhiculant le sémantisme de l'expression métaphorique. Dans « Dorment
les sommets des montagnes », l'auteur ne vise pas à dire que les montagnes sont des
êtres vivants. Ainsi, ce type de métaphores ne peut être ajusté à la formule
d'identification.
Pour mieux cerner cette problématique, nous exposerons les deux figures à un
"filtrage" sémantique permettant de délimiter leurs aspects éventuels qui pourraient
avoir trait à la stéréotypie.
Concernant la métaphore, une telle relation, si elle existe, ne peut avoir comme
foyer que les métaphores régressives puisque ce sont celles-là qui font appel dans leur
construction et leur interprétation à un savoir préconstruit. Dans ce cas, nous nous
intéresserons à un sous-ensemble de ce type de métaphores, à savoir les métaphores
conventionnelles, lexicalisées ou mortes et ce, pour trois raisons :
264
1- Ce type s'appuie sur un préconstruit sémantique d'une manière constante ;
98
Winfrid Nöth définit quatre degrés de démétaphorisation qui sont le résultat d'un processus de
conventionnalisation : (1) an originally creative metaphor becomes by conventionlization (2) a lexicalized
mataphor (e.g bottle-neck), (3) which can then become an opaque metaphor (e.g. radical : literally "from the
root') and finally (4) a dead metaphor (e. g. news magazine meant-store house')" (1985, 6). Ces étapes diffèrent
par leur degré d'innovation ainsi que par la décroissance de leur transparence sémantique.
Selon Searle (1979, 122) une métaphore morte fonctionne comme un sens littéral, c'est-à-dire que le
sens phrastique équivaut au sens discursif. Pour cette raison, il ne considère pas ce type comme relevant de la
métaphore qui correspond à une disjonction entre ces deux types de sens.
Elisabeth Closs Traugott (1985, 2) considère que dans une expression comme Elle est très froide, le
sens littéral originel relève de la compétence des locuteurs ; la remotivation du sens métaphorique éteint reste
toujours possible pour tout locuteur ayant un savoir minimal sur les étapes antérieures de la langue.
265
apport. Cependant, sa relation avec le phénomène stéréotypique est plus complexe du
fait qu'elle ne se manifeste que d'une manière indirecte à travers la réalisation
discursive de l'expression métonymique et ce, pour au moins trois raisons :
266
mieux les entités et les ensembles référentiels. Sur le plan de la référence ou de
l'énonciation, la métonymie permet au locuteur de diversifier son attitude
dénotative par l’atténuation (euphémisme), le débrayement (ludisme), etc. ;
- Contrairement à la métaphore lexicalisée qui garde un lien avec son sens original du
fait de la résistance de la relation analogique à l'usure du temps, la métonymie
lexicalisée ou morte (catachrèse) "cesse d'être pertinente par son déroulement" puisque
le sens se fige totalement dans une nouvelle acception en rupture totale avec le
mécanisme générant. Ceci s'explique par le fait que le lien entre les acceptions
présupposées par le terme métonymique est d’ordre conjoncturel (contiguïté). « Ce
lien est très fort en saisie synchronique, à tel point que le sens initial reste dans
l'utilisation déviante du terme. Par contre, dès que l'oubli diachronique se manifeste,
entraînant la déperdition de cette relation de contiguïté, toute rémanence du sens initial
se volatilise. Du moment où le rapport entre le Bureau-Tapis de table et le trope
Bureau /Table n'a plus été perçu, le "bureau" a totalement échappé à son extraction
textile… » (Ibid. : 263). Bonhomme parle dans ce cas de neutralisation sémantique qui
affecte le trope le transformant en une nouvelle acception du premier degré.
Toutefois, il est toujours possible d'étudier son impact indirect sur la langue à travers
les cas où elle s'appuie sur la métaphore comme dans les expressions de l'émotion
fondées sur une relation cause-effet (rougir, avoir la tête haute / basse, etc.) ou encore
dans une perspective contrastive ou la dimension culturelle donne à la diversité du
découpage du réel tout son ampleur.
267
alors étroitement liée à la question du figement en général (Cf. stéréotypie et
figement). Considérées sous un angle cognitif élargi, elles impliquent aussi bien les
expressions figées que les entités monolexicales dites "figurées". Dans les deux cas, ce
type de métaphores fournit une matière considérable pour les lexicographes dans
l'élaboration des entrées des dictionnaires. Ayant traité certains aspects de ces deux
approches dans d'autres chapitres, nous nous limiterons ici à la description de la
relation analogique qui sous-tend ces métaphores afin de dégager les formes
particulières de la fixation des représentations stéréotypiques dans la langue.
L'analogie dans son sens courant "désigne une ressemblance plus ou moins
lointaine entre deux ou plusieurs grandeurs entre lesquelles on admet implicitement
une différence essentielle" (A. J. Greimas, & J. Cortès, 2001 : 14). La catégorisation
métaphorique repose fondamentalement sur ce type sémantique et référentiel de
relations. Selon la nature du catégorisé et du catégorisant et selon l'objet sur lequel
porte la relation de similitude, nous dégageons trois types essentiels de projections
analogiques métaphoriques :
Cette relation implique d'une part, une occurrence ou une classe d'occurrence
qui "renvoie obligatoirement à un objet d'univers" (Martin, 1983-1992 : 210) et un
comparant, meilleur exemplaire d'une qualité ou d'une relation et dont le contenu
268
sémantique subit des contraintes sélectionnelles qui maintiennent les traits dénotatifs
en veilleuse et portent la saillance sur la propriété ou la relation objet de similitude.
L'exemplification du contenu analogique trouve dans le fonds culturel commun d'une
communauté linguistique (expériences quotidiennes, croyances, Histoire, etc.) les
sources de sa diversification. Selon le foyer métaphorique impliqué par cette relation
nous distinguons :
Chaque prototype donne lieu à des expressions figées variées. Pour fleur par
exemple, l'idée de beauté est présente dans des expressions telles que : "couvrir
quelqu’un de fleurs", "faire une fleur à quelqu’un", "dans la fleur de…", "la fine fleur
de quelqu’un". Elle est également à l'origine de dérivés tels que fleurir dans le sens de
"éclore et s'épanouir comme une fleur", "être dans tous ses éclats".
269
modèle relève de la doxa qui l'érige en tant que cas exceptionnel. Le figement en fait
un cliché, « une image donnée sémantiquement pour un prototype, au moyen d'une
expression désormais stéréotypée » (Shapira, 1999 : 34). Cette instance peut être
mythologique (le talon d'Achille, les travaux d'Hercule, le cheval de Troie, le tonneau
des Danaïdes, etc.), historique (franchir le Rubicon, aller à Canossa, etc.), d’origine
textuelle (montrer patte blanche (La Fontaine), se battre contre les moulins à vent
(Don Quichotte), etc.) ou tout simplement puisée dans la vie quotidienne (mettre les
bâtons dans les roues, scier la branche sur laquelle on est assis, donner le feu vert,
etc.).
99
Ceci montre que la distinction entre les différents types d'analogie n'est que méthodique.
270
une stéréotypisation qui la déforme. Ainsi, par exemple, l'adjectif épicurien, quand il
renvoie à ce qu’est relatif à la théorie d'Épicure peut qualifier la morale vue par ce
dernier comme une recherche raisonnée du plaisir. Dans son emploi absolu, cet
adjectif qualifie une personne qui ne songe qu'au plaisir.
100
Toutefois, ce type de figuration ne concerne pas seulement les catachrèses. S. Mejri (1997a : 324) fournit une
multitude d'exemples où les images-types "forment des séquences usuelles parallèles aux dénominations
savantes" (ex. Oreille-d'âne pezize / dent-de-lion pissenlit, etc.)
101
Une autre typologie de ce type de relation est envisagée sous l'angle de son économie sémantique dans l'acte
de dénomination (Cf. stéréotypie et figement).
271
(ouvre-boîte, ouvre-bouteille, etc.) à la quasi-opacité (guide-âne, lèche-bottes, etc.)
jusqu’ à l'opacité totale (saut-de-lit).
Dans le premier cas, nous sommes en présence de ce que Mejri appelle « les ruptures
bloquant la lecture compositionnelle ». Dans une unité telle que pieds-de-cheval, on
assiste à un double blocage :
Deuxième blocage : sélection sémique qui ne retient des éléments lexicaux que
les sèmes justifiant la dénomination" (1997a : 308) :
272
cadre à la propriété sélectionnée qui est la source d'une similitude le reliant à plusieurs
instances référentielles :
Inversement, une même image peut faire l'objet de plusieurs focalisations qui
mettent chaque fois en saillance un trait différent donnant lieu à une dénomination
différente. Ces traits peuvent se combiner avec des projections culturelles co-
occurrentes (Cf. ci dessous tête d'oiseau par exemple) ;
273
Foyer Trait sélectionné Projection co- Dénomination Sens
occurrente
L'absence des traits perceptuels dans le dernier type de dénomination le fait basculer
du côté des images mentales. En effet, des unités telles que tête de mule, tête de
cochon ou encore des locutions telles que perdre la tête, ne pas savoir ou se donner la
274
tête font appel plutôt à une représentation conceptuelle fondée sur une relation d'ordre
métonymique entre la tête-partie du corps et l'intelligence dont elle est le siège.
Il s'agit là, au propre, de ce que Lakoff appelle métaphore conceptuelle (Cf. ci-
dessus). Chaque unité ou expression ne développe pas son acception figurée à partir
seulement de son propre potentiel sémantique mais à travers toute une structuration en
réseau qui implique d'autres unités. Ainsi, "obscur" signifie dans l'une de ses
acceptions "difficile à comprendre, à expliquer". Cette signification ne provient pas
d'une exemplification isolée où l'obscurité est liée directement à la propriété en
question (l'incompréhensibilité) comme l'est, par exemple, le courage pour "lion" ou la
dureté pour "l'acier". Cette signification passe nécessairement par la correspondance
plus vaste entre le domaine de la vision et celui de l'entendement.
En somme, tous les termes relatifs à la vision en tant que phénomène physique
(étroitement lié à la luminosité et à l'obscurité) servent à structurer le domaine de la
pensée.
275
domaine des sentiments et des caractères, le "noir", le "sombre" symbolisent la
mélancolie, la tristesse, le mal, le blanc, l'innocence.
Il s'agit d'une métaphore projective vive qui ne s'appuie pas sur vision stéréotypique.
(177)- Cet homme est un chêne que les vents ne peuvent déplacer
276
Il s'agit d'une métaphore régressive vive ; le présupposé est stéréotypé.
posé (présupposé 2) : les hommes constituent des menaces les uns pour les
autres.
277
stéréotypique dans la mesure où le référent (brosse servant à …) peut avoir la forme
carrée ou rectangulaire sans pour autant que la dénomination cesse d'y renvoyer.
Émotions
Concret
froid
froideur, etc.
278
domaine source : objet
domaine source oeil, vision
concret
domaine cible esprit, entendement stéréotypes
domaine cible : objet abstrait
clarté
lueur
pénétrer
+ lumière + etc.
- lumière aveugler vision
- vision s'aveugler voir comprendre obscurcir - lumière
opacifier -compréhension
ténébreux
etc.
279
Deuxième chapitre- Polysémie et stéréotypie
Dans l'acte de dénommer, les langues fixent dans la signification des mots une
part des représentations intersubjectivement partagées par les locuteurs, relative à leur
appréhension des objets du monde. Ces représentations jouent un rôle fondamental, à
double titre, dans la catégorisation sémantique. Elles condensent le lexique par des
rapprochements entre les faits permettant le renvoi à une multitude de référents par le
biais d'une seule dénomination. Et, elles structurent l'ensemble du lexique sur la base
d'affinités sémantiques dépassant le cadre des dénominations isolées. Autrement dit, si
l'on considère que le propre de la polysémie est de rattacher une pluralité de sens à une
seule forme sur la base d'une parenté sémantique, celle-ci implique, entre autres
mécanismes linguistiques, la part de la stéréotypie dans l'établissement de telles
affinités.
Cependant, pour étudier le lien entre les deux phénomènes, on ne peut pas se
contenter de ce rapprochement intuitif. D'ailleurs, comme nous l'avons vu pour le
stéréotype, le phénomène polysémique, au-delà du consensus sur l'existence d'un
rapport fondant l'association de sens multiples à une seule forme, est l'objet de
divergences entre les linguistes. Comme le remarque Kleiber, "dès que l'on entend
dépasser le cadre de cette définition intuitive de la polysémie et que l'on veut préciser
ce qu'on entend par sens et par sens différents et surtout quels sont les rapports de
parenté qui justifient leur rassemblement et qui autorisent à séparer la polysémie de
l'homonymie […], alors, les choses se gâtent" (1999 : 55).
Ceci nous invite à passer en revue les différentes approches dans le traitement
de la polysémie et d'y prendre position pour pouvoir par la suite délimiter l'impact de
la stéréotypie sur ce mécanisme fondamental de la structuration du sens.
280
1- Théories de la polysémie : bilan critique
281
- relation dite "restriction de sens" où il y a une addition de sèmes
spécifiques (Ibid. : 77) : ex. femme : personne du sexe féminin / personne du sexe
féminin qui est ou a été mariée
- relation dite "relation métaphorique : "Elle consiste dans l'identité d'au moins
un des sèmes spécifiques, identité qui entraîne la similitude du [sémème 1] et [du
sémème 2]" (Ibid. : 81-82) ; ex. cuirasse : partie de l'armure qui protègerait le buste /
Attitude morale qui protège des blessures d'amour propre, des souffrances.
- La polysémie lâche qui présente un seul sème spécifique commun avec des
archisémèmes différents ; il y a substitution de sèmes spécifiques (Ibid., 83) ; ex.
plateau : support plat servant à poser et à transporter des objets / Etendue de pays
assez plate et dominant les environs.
282
- "les emplois [qui] diffèrent par au moins un sème affèrent en contexte. Sème
spécifique : ex. convoi : suite de véhicules / suite de voitures de chemin de fer. Sème
générique : ex. curasse partie de l'armure / attitude morale.
- les sens [qui] diffèrent par au moins un sème inhérent ; ex; blaireau
mammifère carnivore / pinceau.
- les homonymes [qui] diffèrent au moins par tous leurs sèmes spécifiques
inhérents" (1996 : 69, Cf. critique supra).
Ayant étayé les implications d'une telle vision (Cf. le chapitre: stéréotypie et
prototypie), nous nous contenterons ici de présenter les arguments contre une telle
thèse.
283
occurrences non seulement factuelles, mais aussi virtuelles et contrefactuelles"
(ibidem : 97), d'où leur pouvoir de classifier des référents nouveaux. A l'opposé, les
catégories polysémiques constituent des ensembles fermés où l’on regroupe des sens
attestés et stables (ibidem). Elles n'ont donc, de ce fait, aucun pouvoir catégorisateur.
Les différentes acceptions d'un mot seraient reliées continuellement par un cinétisme
ou un mouvement de pensée inconscient. Les saisies effectuées en divers points de son
déroulement correspondent aux effets de sens relatifs à un locuteur donné à un
moment de son énonciation. Ces coupes vont d'une saisie plénière, sémantiquement
plus riche, à une saisie subduite, plus pauvre en sèmes (Cf. pour l'illustration Picoche
1986 : 63).
Cette vision s'inscrit dans une tendance plus générale qu envisage le sens d'un
item comme une dynamique qu'on ne peut construire qu'à partir de l'interaction avec
les autres unités du contexte et la situation d'énonciation. Plusieurs théories se
partagent, dans ce cadre, le refus de l'énumération a priori des sens polysémiques et de
l'interprétation en double étape : la première, sémantique, consiste en la saisie du sens
d'une unité dans la totalité de ses potentialités et la seconde, pragmatique, consiste à la
désambiguïsation en contexte par la sélection du sens approprié à la situation
d'énonciation.
284
Bernard Victori et Catherine Fuchs (1996) développent dans cette optique, une
théorie fondée sur la distinction entre énoncé-occurrence et énoncé-type. Le premier
type correspond à "un énoncé proféré à tel moment, à tel endroit, par telle personne"
(p.26). Le sens de cet énoncé-occurrence est défini comme sa participation à la
construction référentielle du monde , d’où la possibilité de le décrire il est donc en
termes "pragmatico-référentiels" et d’où son caractère observable à travers ses effets
« dans la situation où il est proféré » (ibidem). Le second type est postulé comme
correspondant à "l’ensemble ordonné des marques linguistiques d'un énoncé
occurrence, c'est-à-dire la suite de phonèmes et de traits prosodiques…" (ibidem). Le
sens d'un énoncé-type est défini comme "la contribution constante du matériau
linguistique dont il est constitué au sens de toute occurrence de cet énoncé" (Ibid. :
27).
Ensuite, ils postulent deux types de jugement : le premier est relatif aux jugements de
paraphrase qui établissent une relation entre deux énoncés de très grande proximité.
Leur substitution l’un par l’autre n’affecte le plus souvent pas le sens dans la majorité
des conditions d’énonciation (Ibid. : 30). Le second concerne les jugements
d'ambiguïté qui caractérisent certains énoncés capables « d'évoquer, dans des
conditions d'énonciations appropriées, deux scènes différentes, chacune s'appliquant,
pour des raisons différentes, à la situation en question » (Ibid. : 31). L'un des exemples
qui illustrent ce dernier type est :
285
expressions monosémiques où il n'y a pas de règles d'interaction : le sens est le même
dans tous les énoncés (ex. Tournevis). A l'autre, il y a, d'abord, les mots dits
"lexicalement vides" dont l'apport propre est réduit au minimum (les prépositions) et
dont le sens, de ce fait dépend crucialement des règles d'interaction, puis, il y a les
"vrais" homonymes « dont l'apport propre est effectivement nul, puisque le sens peut
changer radicalement suivant les énoncés, mais dont le fonctionnement se scinde en
deux cas (ou plus) complètement disjoints » (Ibid. : 37). La polysémie se situe entre
ces deux extrêmes. Elle est définie comme "une expression dont le sens ne se réduit ni
à son apport propre, ni à l'apport du reste de l'énoncé dans l'interaction avec les
énoncés dans lesquels elle est insérée" (Ibid. : 38).
Notons enfin, que le calcul du sens dans les deux types d'énoncés ne se fait pas par une
démarche à double étape mais directement "dans l'interaction dynamique des éléments
linguistiques et extralinguistiques présents…" (Ibid. : 29).
Les auteurs atténuent une telle difficulté en considérant que cette méthode est une
"aide pratique, imparfaite, destiné à aider à mettre en oeuvre la définition théorique de
la polysémie qui, elle, […] ne fait pas référence à la paraphrase (est polysémique toute
286
expression dont l'apport n'est pas nul mais ne constitue pas à lui seul le sens d'une
expression dans un énoncé donné)" (Ibid. : 38).
n'y a-t-il pas là, dans le mot tournevis une activation par le contexte, d'un certain
savoir à propos de cet outil qui n'était pas essentiel dans les exemples cités ci-haut ?
(181)- Il l'a poignardé avec "un outil formé d'une tige en acier emmanchée d'un
extrême et aplatie de l'autre".
- dans le cas des énoncés ambigus, le postulat d'un énoncé-type unique a pour
conséquence directe de rattacher tous les sens à une forme unique qui constitue la
matérialité de l'unité lexicale. Le sens d'une expression hors énoncé rejoint le même
postulat puisqu'il couvre l'ensemble des emplois contextuels. Ceci conduit à un
dilemme. Les auteurs affirment qu'ils associent « dans tous les cas à une forme
donnée un seul sens, mais ce sens contient toutes les règles d'interaction, qui peuvent
conférer à l'expression un sens différent dans différents énoncés » (Ibid. : 39). Mais, ils
avancent que ceci ne les a pas empêchés de distinguer polysémie et homonymie en
termes d'apport propre et de règles d'interaction.
287
Cette vision relève au moins deux autres objections. La première concerne la nature
même de ce sens unique. Dire que ce sens est la somme des sens potentiels n'explique
rien. Abstraction faite de la forme phonique (qui ne porte en soi aucun sens), on se
demande quelle unicité peut relier avocat = homme de loi et avocat = fruit. En fait, ce
sens unique n'est que le résultat direct du postulat de l'énoncé type unique. La seconde
concerne la définition de l'homonymie en tant que produit d'un apport propre nul. La
question serait de savoir comment un tel apport à valeur zéro dans l'énoncé type peut
donner lieu à un apport spécifique dans l'énoncé-occurrence. Il est clair qu'on ne peut
mettre ce fait sur le compte des seules règles d'interaction. Ces règles n'activent pas un
sens qui n'existe pas auparavant. Ainsi, si on part du postulat qu'un énoncé-occurrence
ne prend son sens propre et ne joue sa fonction dans son contexte spécifique que
lorsque l'énoncé-type correspondant a un sens, on a du mal à comprendre comment ce
dernier type d'énoncé a un tel sens alors que l'apport d'un de ses éléments essentiels
(ex. Avocat) est nul.
L'idée d'un sens unique lié à une forme lexicale trouvera un écho dans les
travaux ultérieurs de B. Vectori et d'autres par l'introduction de la notion de "forme
schématique" qui, selon Jean-Jacques Franckel (2002 :12) « représente l’identité d’une
unité […]. Une FS doit décrire l’ensemble des valeurs et des emplois de l’unité qu’elle
caractérise. En même temps, elle ne correspond en elle-même à aucune de ses valeurs
singulières. Elle n’est pas assimilable à quelque sens paticulier, et en particulier à un
sens qui serait premier. La FS n’est pas le sens du mot, l’identité qu’elle pose n’est pas
une substance autonome, elle n’est pas le plus petit dénominateur sémantique commun
des emplois du mot. » (2002 : 3-15).
Dans Kleiber (1999) nous trouvons une présentation critique de ces approches.
288
Le sens véhiculé par ces formes schématiques subsume les différentes valeurs
sémantiques que peut avoir un item dans les différents contextes. Il s'agit d'une
reconstruction qui, tout comme dans l'approche précédente, est envisagée d'abord à
partir des produits observables dans les énoncés-occurrences. Se détachant de toute
valeur référentielle, ce sens n'est pas directement accessible et son contenu devient de
plus en plus insaisissable en perdant de vue l'interprétation à construire.
L'idée de base est qu'une unité linguistique peut "présenter plusieurs faces, dans ses
interactions". En même temps, elle est le foyer d'un double continuum : l’un s’établit
entre les facettes et apparaît sous forme de tendances et de cas intermédiaires entre les
différentes facettes ; l’autre « entre ce niveau de stabilisation partielle et les autres
processus qui agissent en parallèles jusqu'à la stabilisation globale de la scène
verbale… » (B. Victori, 1997 : 58, cité par Kleiber 1999 : 69).
289
(Ibid. : 72). Or, Victori affirme que le sens d'une unité se stabilise dans la parole
chaque fois que celle-là figure dans un énoncé produit dans un contexte donné. Les
traces d’un tel processus existent dès le niveau lexical (1997 : 59, cité par Kleiber,
1999 : 72).
Cela signifie que ces stabilisations relèvent aussi bien de la langue et de la parole.
Pour ce qui est de la seconde question, Kleiber soutient qu' « il y a une forte
tendance à ériger en modèle d'organisation sémantique ou modèle de compétence le
modèle de l'interprétation discursive ou modèle de performance » (Ibid. : 75). Si la
détermination du sens en contexte implique un processus de stabilisation dynamique
donnant lieu au sens construit, approprié à la situation d'énonciation, cela ne nie pas
l'existence d'un sens conventionnel, préconstruit intersubjectivement partagée par les
locuteurs. La compétence définitionnelle d'un locuteur donné n'est pas une mesure
valable pour sa compétence sémantique. Autrement dit, la plupart des locuteurs sont
incapables d'énumérer des définitions à la manière des dictionnaires mais cela ne les
empêche pas de porter des jugements sémantiques sur la pertinence des sens qu'on
peut leur proposer.
Par ailleurs, si, comme le soutiennent les défenseurs de cette thèse, l'ambiguïté
discursive pour un homonyme et l'ambiguïté polysémique ne sont presque jamais
effectives, cela ne donne pas la preuve que l'homonymie et la polysémie n'existent pas.
De ce fait, l'organisation sémantique du lexique est indépendante du processus
interprétatif.
290
détermination du sens approprié d'une unité lexicale donnée dans une situation
d'énonciation précise, cette participation ne peut être prise comme une attribution
originelle d'un sens à une forme. Autrement dit, elle ne se fait pas sur le mode d'un
"meaning ceremony" 102 consistant à doter une forme de signification d'un sens
contingent. Si tel était le cas, il n'y aurait plus de sens pour tout l'énoncé concerné
parce que chaque unité apparaitrait comme en premier emploi et donc tous les mots
seraient vides de sens ; celui-ci ne pourrait être créé à partir du néant.
En second lieu, cette détermination ne peut également pas être envisagée comme un
ajout d'éléments significatifs au sens de l'item en contexte parce que, dans ce cas, vu
l'infinité de contextes possibles dans lesquels cette unité peut figurer, ses potentialités
sémantiques seraient ouvertes, illimitées et on aboutirait à la thèse de
l'indétermination.
102
- Par écho à "naming ceremony".
291
parcours qui leur sont propres. Ainsi, leurs sens, pris dans l'ensemble des contextes
infinis dans lesquels ils peuvent apparaître, n'auraient aucune parenté sémantique entre
eux.
groupées.
époque déterminée.
Excepté la forme, aucun lien d'ordre sémantique ne s'établit directement, par exemple,
entre (I.1) et (II. 3) ou encore entre (I.1) et (I.3). Si l'on essaie d'appliquer à un énoncé
correspondant à (II.3) le processus de convocation-évocation sur lequel reposent les
292
formes schématiques, on remarquera que toutes les autres acceptions ne seront pas
impliquées par ce processus. Autrement dit, aucune forme schématique ne peut réunir
de quelque manière quelle soit tous les sens potentiels de campagne. Soit l'énoncé
suivant :
Le mot campagne convoque une classe d'entités de même type servant de référence
(dans ce cas une classe d'activités) et qui, en retour, va permettre de stabiliser le sens
approprié de l'expression par rapport à cette référence. Or, cette convocation ne
renvoie qu'à la classe d'entités relative à la signification exprimée dans (I.3) parce que
l'ensemble des sens potentiels de campagne présente une grande diversité de classes
référentielles avec lesquelles il devient impossible à un emploi précis de se connecter
avec l'ensemble de ces classes. On en conclut que les formes schématiques ne sont pas
aussi englobantes que ne le laisse entendre la thèse constructive.
Toutefois, il est clair que tous ces sens sont des extensions polysémiques d'un
même item lexicale. Comment rendre compte alors d'une telle parenté ?
Par contre, si l'on admet que le sens premier correspond à une acception
effective, particulière et envisagée comme la source à partir de laquelle se déclenche
une série d'enchaînement permettant de générer d'autres sens dérivés, la saisie des liens
entre les diverses acceptions devient possible. Le sens premier acquiert, dans ce cas,
une souplesse qui permettrait de remonter d'un sens premier immédiat à un autre
jusqu'à atteindre la source.
293
polysémiques et la relation anaphorique associative, pour préciser la nature de ces
liens sémantiques.
* I. 1 I. 2 :
'1: Paysage (S1'1 ) rural (S1'2) où les champs …(S1'3) et où les habitations (S1'4).
'1 ne diffère de 1 que par l'addition des sèmes (S1'3) et (S1'4) ; la relation est
donc du type dit « restriction de sens ».
(183)- Nous passâmes par une campagne. Les terres cultivées dominaient le
paysage
294
295
* I.2 I.3 :
montre l'existence d'un stéréotype qui dit qu'on ne cultive généralement que les terres
fertiles. Le test de "mais" rend compte de ce stéréotype :
(187)- Ce sont des terres fertiles mais elles ne sont pas cultivées
(188)- Ce sont des terres cultivées mais elles ne sont pas fertiles
Ainsi, " S²2" donnent lieu à " S²’2" "cultivable" et S²’’2 "fertile". Appliquée à la relation
entre 2 et 3, cette décomposition permet de conclure à une relation de spécification
dite "restriction de sens" où il y a ajout de S²’’2 (fertile).
La relation entre 1 et 2 et entre 2 et 3 est la même ; dans les deux cas, il s'agit
d'une spécification.
296
* I. 1 II. 1 :
2 : vaste étendue (S1) du pays (S2) découvert (S3)
4 : Etendue de terrain (S41) où les armées se déplacent (S42), lorsqu'elles sont en
guerre (S43).
S1 = S41 ; toutefois, il y a addition des sèmes S42 et S43 et effacement du sème S3.
la relation en donc dite "polysémie étroite".
297
L'identité entre ces deux ensembles de sèmes, l’opposition entre S62/ S72 et le maintien
d’un archisémème presque « commun » (ensemble de…) entraînent une similitude
entre le sémème 6 et le sémème 7 ; la relation est de type analogique.
- Si oui, quelles en sont les limites ? Autrement dit, peut-elle, dans certains cas,
freiner ces mécanismes polysémiques ? Où, au contraire, les déploie-t-elle à profusion
illimitée ?
298
2-1-Structuration stéréotypique en réseaux translexicaux (à travers le lexique)
Nous avons évoqué dans un chapitre précédent (typologie des stéréotypes) que
la motivation de l’extension polysémique peut s'étendre à tout un réseau lexical. A la
l’origine, se trouve ce que Lakoff appelle la métaphore conceptuelle qui, à partir des
expériences perceptives et sensitives, permet à un concept d'organiser "un système
entier de concepts les uns par rapport aux autres" (1985 : 24).
Sur le plan linguistique, cette motivation translexicale peut être ramenée à une
vision stéréotypique associée à une forme linguistique élémentaire. Cependant, ce type
de structurations ne se limite pas à une forme canonique unique. La relation entre les
domaines structurés va de la quasi-systématicité, à des réseaux plus ou moins partiels.
C’est pourquoi nous multiplierons les exemples (dont quelques-uns sont repris et
approfondis) pour mieux cerner cette diversité.
L’un des cas les plus systématique est celui de la métaphore vision/esprit qui se
fonde initialement sur un stéréotype qui relie les facultés de l’esprit à la vue :
(193) - Il me semble avoir vu ce visage auparavant mais 103 je
ne le reconnais pas
(194) - Je vois cet engin mais je n’y comprends rien,
Ainsi, à partir de :
(195)- Voir, c’est reconnaître, comprendre,
on passe à l’analogie quasi-totale entre la vue et les facultés de l’esprit.
103
L’opposition sémantique exprimée par mais prouve que les procès formulés dans le deuxième terme
(reconnaître, comprendre) font partie de la représentation stéréotypique du premier procès (voir) .
299
(197)- Cet objet est tellement lumineux que je n’arrive pas à
l’identifier.
Sensualité + Sensualité -
(198)- Malgré ce froid glacial, cette présence féminine frémissante fait monter en lui
une chaleur / une flamme qui embrase le cœur et le corps.
En fait, la dimension axiologique donne lieu, ici, à une relation binaire d’opposition où
deux champs sémantiques s’opposent d’une manière quasi-symétrique.
Le second type de structuration implique une relation binaire entre des éléments
relatifs à deux domaines différents. Il s’agit d’un recouvrement partiel qui ne s’appuie
pas sur un stéréotype générique comme dans le cas des métaphores précédentes mais
sur la fixation d’une inférence motivée stéréotypiquement par notre représentation de
l’être ou de l’objet ou par notre expérience perceptive.
300
Domaine source : animal domaine cible : homme
La relation sémantique entre les deux champs est fondée, ici, sur un sème
hyperonymique commun aux items du champ catégorisant (cri de…) auquel
correspond dans le second champ un sème générique qui pourrait être quelque
chose comme /attitude, conduite/. La structure binaire entre des couplets
d’items et de sens donne lieu dans l’ensemble à une configuration horizontale
parallèle.
301
Le second exemple est relatif au rapprochement entre certaines attitudes
comportementales et la disposition des objets dans l’espace ou leurs formes :
- Des extensions de sens dénotant des objets et des êtres jugés futiles et
dérivant de catégories primaires n’ayant aucun lien entre elles, se partagent le même
contenu stéréotypique définitoire :
Courge
Gland
Cruche
Huître
Gourde
Etc.
302
La configuration de la structure d’ensemble est convergente. Le sème stéréotypique
étant le noyau autour duquel s’organise ce paradigme.
long
(discours) ennuyeux
pompeux
longue
( discussion) ennuyeuse
banale
303
prêcher faire des discours solennels et + +
ennuyeux
Il s’agit d’extensions définitoires qui se déploient à partir du sens initial, soit par la
stéréotypisation de l’un de ses sèmes, soit par la fixation d’un stéréotype initialement
latent par rapport à ce sens.
Ici, la stéréotypie consiste à générer le sens à partir d’un sème définitoire qui, dans
le sens initial, n’a pas cette dimension. Dans la définition de mâle, le sème
« fécondation » dans « sexe doué du pouvoir de fécondation », exprime une propriété
essentielle du référent. Dans certains univers de croyances, ce signifié est lié à la
puissance sexuelle :
(201) -On dit qu’il est impuissant !
- Non, c’est un vrai mâle, mais il n’a pas la chance d’avoir des enfants (forgé).
304
La stéréotypisation peut être le produit d’une restriction du sens qui restreint la
signification à un champ typique ; tel est le cas dans «impuissant », impuissance » :
(202)- Il était... non, il n' était pas impuissant , comme le disait Philips à la princesse,
mais la gymnastique de l' amour, chez lui, s' exécutait avec une telle difficulté, un tel
embarras, une telle gêne…(GONCOURTEdmond de, GONCOURT:Jules de, Journal :
mémoires de vie littéraire : t. 2 :1864-1878, p 929, ED. R. RICATTE. Paris, Fasquelle &
Flammarion, 1959)
104
-Notons que la dimension abstraite de central, centre…découle d’une représentation stéréotypique de
l’espace et où ces signifiés sont opposés à marginal, côté…
305
il signifie « qui constitue le noyau », c’est-à-dire capital, essentiel. Figurant dans la
signification de noyau en tant que sème, « central » garde cette double extension et sert
à générer le deuxième sens de noyau :
Là encore, ce qui est central d’un objet n’est pas toujours perçu comme fondamental
ou essentiel :
105
D’autres exemples sont toujours possibles comme dans : félin/ féliner/ félinement- chat/ chatterie- singe/
singer/ singerie- lézard/ lézarder- coq/ coquet/ coquette/ coquetterie, etc.
306
Les dérivés cochonceté, cochonnerie et cochonner expriment plus ou moins ces deux
dimensions. Notons que le passage du concret à l’abstrait s’appuie, dans ce cas, sur un
stéréotype où le domaine des attitudes morales est structuré en termes d’un autre
domaine axiologique relatif aux antonymes propreté / saleté.
- Elle accouche.
-? Elle accouche.
(211)- Bien que son accouchement ne fût pas facile, elle l’a
vécu dans la joie de voir venir au monde son premier enfant.
307
Avec le sens 2) d’accoucher (élaborer péniblement), le passage au figuré s’établit à
partir d’une similitude entre toute production pénible et la naissance d’un enfant.
Désormais, ce passage n’est possible que par la fixation du trait «péniblement» qui
n’est plus contingent mais devient trait inhérent au contenu définitoire du nouveau
sens.
Le sens suivant :
- «se décider de parler»
projette le contenu sémantique de l’extension précédente dans le domaine de la parole.
Il constitue un autre sens qui se déploie à partir du stéréotype déjà fixé: la parole étant
ici perçue comme un aveu difficile.
308
(215)- «N’avez-vous jamais eu envie de coucher avec votre mère ? »
« N'avez-vous jamais eu envie de coucher avec votre grand-mère ? » (Un prix
d'excellence BORY Jean-Louis, 1979, page 35).
Dans ce dernier exemple, les noms de parenté constituent à eux seuls un contexte
favorisant la lecture neutre du verbe. Un usage différent nécessite un complément
justificatif.
Notons aussi que le verbe exprime ce même sens en emploi intransitif absolu :
Coucher 1- – «avoir des relations sexuelles, une vie sexuelle».
Ce même type de projection régit la génération du sens dérivé de lit :
- lit : 1- « meuble destiné au coucher »
5- « (Le lit symbolisant les rapports sexuels et les relations conjugales)
partager le même lit, lit nuptial, conjugal etc.
Le verbe accoupler connaît une extension semblable. Initialement, il signifie «joindre,
réunir par deux». Il a, cependant, deux extensions :
Ext. 2 – «réunir (deux choses qui jurent entre elles)
Ext. 3 – «procéder à l’accouplement de (un mâle et une femelle) »
Le passage du sens initial à la première extension se réalise par restriction de sens du
fait de l’addition du sème «qui jurent entre elles». La jonction dans les deux cas
présuppose un lien physique (ex. Accoupler des bœufs à la charrue) ou abstrait
(accoupler deux idées). L’extension 3- apparaît comme une spécification de
l’extension 2- qui, à partir du sème «jurent entre elles», projette les deux mots de
l’union dans le domaine structuré par l’opposition mâle / femelle. Cette projection
s’accompagne d’une spécification du lien physique (contact sexuel), lequel lien n’est
pas exclusivement envisagé par le sens initial. La seule union de deux sexes opposés
n’est pas une condition suffisante pour générer le sens 3- ni de 1- ni de 2- :
(216)- Les gars, conclut Colin, est-ce que vous voulez être mes garçons d'honneur ?
- C'est entendu, acquiesça Nicolas. Mais il ne faudra pas nous accoupler avec des
filles horribles, hein ? Le coup est classique et bien connu...
-Je compte demander à Alise et Isis d'être les demoiselles d'honneur, dit Colin (VIAN
Boris, L'Écume des jours, PARIS : 10|18, 1995, p 49)
(217)- Ce fut une vraie noce normande. On se mit à table à cinq heures du soir ; à
onze heures on mangeait encore. On m'avait accouplé, pour la circonstance, avec une
demoiselle Dumoulin, fille d’un colonel en retraite, jeune personne blonde et militaire,
309
bien en forme, hardie et verbeuse. (MAUPASSANT Guy de, Contes et nouvelles :
1882, IN : C. ET N. T.1. A. M. SCHMIDT ET G. DELAISEMENT. PARIS : ALBIN
MICHEL, 1959, p 668).
C’est le stéréotype qui nous mène à penser à un contact sexuel chaque fois que deux
sexes opposés se trouvent joints.
Cette rupture peut se fonder respectivement sur une figuration symbolique, sur
les vestiges d’un savoir erroné ou encore sur un arbitraire pur et simple. Les
projections symboliques liées aux couleurs illustrent le premier cas. Ainsi, par
exemple, l’adjectif blanc renvoie dans l’une de ses extensions à l’innocence ; le verbe
blanchir porte, lui aussi, cette même évocation : « disculper et innocenter » qui n’ont
rien à voir avec le sens initial « rendre blanc » tout comme son antonyme noircir qui
signifie dans l’une de ses acceptions «diffamer ». De même, rien dans la couleur bleue
ne justifie l’évocation des sèmes de « l’incompréhension » ou de « l’inexpérience »
contenus par exemple dans l’extension substantivale de bleu qui signifie « jeune
recrue ».
Un savoir révolu peut être également source de rupture entre le sens initial et ses
extensions. Nous avons dans les exemples de bile et de sang deux illustrations de cette
rupture en synchronie.
310
En diachronie, ce savoir faisait partie des traits définitoires de ces mots. Nous
retrouvons cette signification de bile sous l’article colère dans Le dictionnaire
étymologique du français, Les Usuels du Robert :
En français, au XIVème siècle, bile et colère remplace dans l’ancien français courrouz
et ire.
Quant au mot sang, il a cette acception déjà en latin : sanguis et sanguinis renvoient
au sang « en tant que constituant la parenté et la descendance ». En français, cette
acception populaire est enregistrée à partir du Xème siècle.
Enfin, le lien entre le sens initial et son extension peut relever du simple
arbitraire. Il faut, cependant, distinguer ici l’arbitraire sémantique, qui caractérise, à
des degrés différents, tous les sens stéréotypiques, de l’arbitraire structural qui
concerne l’existence ou non d’un lien, de quelque nature qu’il soit, entre la
configuration sémantique d’un sens initial et ses dérivés polysémiques.
Les exemples suivants relient tous des objets à une caractérisation d’un état d’esprit.
Le monde objectal, dépourvu de tout principe animé, donne un exemple typique de la
projection arbitraire 106 (Cf. les items liés à la bêtise ci-haut) :
Couille / erreur, ennui
couillon / imbécile
couillonner / tromper, duper
En somme, la stéréotypie se présente comme un mécanisme sémantique qui,
d’un côté, établit des liens transcendant tout le lexique, d’un autre côté, projette le
sens initial d’un mot dans un domaine qui lui est totalement étranger ou encore dans
un domaine spécifique qui lui est annexé, attaché par un lien latent ou inférentiel.
Donc, vraisemblablement, elle contraigne l’intégration de tous les sens sous une même
106
On aurait pu choisir nos exemples dans le domaine de l’animal ( âne, mouton. . ) mais le rapprochement
entre deux domaines relevant de l’animé peut révéler parfois des traits stéréotypiques latents au sens initial.
311
forme schématique puisqu’il n’est plus possible de trouver un trait général commun à
ces sens.
Notre point de départ sera l’analyse des exemples avancés respectivement par
G. Nunberg et A. Zaenen cités par Kleiber (1999 : 104) relatifs à la polysémie
systématique, et par J. Searle (1979 : 176) et repris par C. Bianchi (2001 : 99) relatifs à
la variabilité indéfinie du sens.
1- “ L’idée selon laquelle l’on peut dresser la liste des sens d’une expression et
y choisir le sens approprié à un contexte donné… ne permet pas de rendre compte de
la détermination graduelle et perméable des valeurs attestées et du continuum constitué
par ses sens.
2-Un mot [peut] exprimer un nombre de sens potentiellement infini étant donné
le nombre indéfini de situations de discours dans lesquelles il peut y être employé ;
312
Relèverait de ce type d’extensions tout mécanisme qui permettrait de passer, par
exemple :
- d’un nom d’animal à sa viande (le porc, l’agneau, le poulet, etc.)
- d’un nom d’animal à sa fourrure (l’hermine, le vison, la marmotte, etc.)
- d’un nom d’animal à sa peau (le serpent, l’agneau, la vachette, etc.)
- du nom d’une plante à ses feuilles utilisées pour des infusions (le thé, la
menthe, la verveine, etc.)
- du nom d’un arbre à son bois (le chêne, le bouleau, l’acajou, etc.)
- etc.
Nous nous contenterons, ici, du premier paradigme.
Selon G. Nunberg et A. Zaenen, le passage de veau “ animal ” / lapin “ animal ”
à veau “ viande de … ”/ lapin “ viande de… ”, dans les exemples suivants :
(218)- Jean mangeait du veau
(219)- Jean mangeait du lapin
est le résultat d’un processus polysémique unificateur, s’inscrivant au niveau
lexicologique et qui est “ une fonction de transfert unique qui projette n’importe quel
nom comptable C sur un nom non comptable qui dénote une substance qui correspond
de façon évidente aux dénotations de C ” (1997 : 14).
Ainsi, par exemple les sens de veau “ viande de… ” / “ peau de … ” tout
comme ceux de lapin “ viande de …. ” / “ fourrure de … ” sont dus à un mécanisme de
transfert où la réification massif comptable permet de passer de la source (animal) à
la cible (substance de…)
Le sens vague, sous déterminé de “ substance de …. ” donne en contexte l’un
des sens particuliers “ viande ” / “ peau ” ou “ viande ” / “ fourrure ”,
respectivement pour veau et lapin, grâce à un processus de spécification où entre en
jeu la connaissance des normes sociales quant aux différents cadres associés à tel
emploi ou tel autre.
313
Kleiber montre que l’opération de broyage qui repose sur le transfert d’un N
comptable à un N massif ne saurait rendre compte de la signification qui découle d’un
emploi positif tel que dans :
(220)- Il y a du sanglier dans la forêt
et où le sens ne peut évidemment pas dériver du concept “ substance de… ”.
Kleiber constate enfin que “ la règle polysémique qui veut que le nom d’un
animal puisse servir pour le nom de la viande de cet animal n’est pas aussi
systématique que cela ” (Kleiber, 1999 : 117).
La première série comporte les N veau, porc, bœuf, mouton, agneau …qui s’intègrent
“ de façon naturelle ou du moins plus facilement dans une hiérarchie être comportant
le nom viande comme hyponyme ” :
(221)- Le veau, le porc, l’agneau, le mouton, c’est de la viande
c’est une viande chère
De même ces noms sont les seuls qui acceptent sans peine des substantifs
quantificateurs de mesure de poids :
(222)- J’ai acheté un kilo / une livre / 300 g… de veau, de mouton
Alors que les noms de la deuxième série lapin, viande, poulet, dindon, saumon,
truite… donnent lieu à un écho interprétatif significatif et donnent à penser qu’il y a en
quelque sorte démembrement ou broyage dans des emplois tels que :
(223)- le lapin, la dinde, le poulet…, c’est de la viande
(224)- j’ai acheté un kilo / un livre, / 300 g… de lapin, de
poulet…
Kleiber avance l’hypothèse suivante sans toutefois trancher sur la question : lapin
dans (224) aurait le sens “ d’objet de consommation ”.
Or, si tel était le cas, rien ne devrait justifier ce tilt ou cette difficulté quant à son
emploi avec des substantifs quantificateurs de mesure de poids puisque n’importe quel
objet de consommation peut s’intégrer facilement dans une telle structure à condition
d’avoir un poids et d’être échangé sous cette forme.
314
A notre avis, la différence entre (222) et (224), pour être expliquée, exige que
nous prenions en compte le cadre relationnel différent de la sélection sémantique
pour « veau » et « lapin », respectivement avec l’opérateur quantificateur (un kilo, 300
g…) et l’opérateur verbal (manger), afin de délimiter par la suite le statut sémantique
de chaque unité.
est inacceptable en l’absence de justification en contexte, du fait que les livres, bien
que quantifiables en mesure de poids, ne sont pas échangés (commercialisés) sous
cette forme. Cette idée de forme est étroitement liée au mode de donation global de
l’unité en question (livres). Donc, on peut facilement comprendre l’origine de cet effet
apparent de démembrement ou broyage ressenti dans l’énoncé.
315
Si l’on prend maintenant la catégorie “ viande ”, on voit qu’elle répond dans
son ensemble à la condition en question puisqu’elle est quantifiable en mesure de
poids et échangée sous cette forme, d’où l’acceptabilité d’un énoncé tel que (222).
Or, pour qu’une occurrence puisse être substituée à “ viande ”, il faut qu’elle
soit vraiment une occurrence prototypique de cette catégorie, autrement dit qu’elle ait
les mêmes traits typiques dans sa structure sémantique, d’où la nécessité d’analyser
cette structure et de voir pourquoi des noms tels que veau, mouton, porc … peuvent
fonctionner comme hyponymes de viande et par conséquent occuper une telle position,
alors que des noms tels que lapin, poulet, dinde, truite... donnent lieu à un effet de
démembrement.
Dans des situations contextuelles où la sélection est plus appropriée (le cas de
l’opérateur manger) celle-ci se fait non sur la base d’une globalité de traits mais sur la
base d’une description partielle où la saillance porte sur un trait unique (comestible), la
contrainte stéréotypique est neutralisée par ce transfert de la saillance et les
mots lapin , poulet, etc. expriment naturellement le sens de “ chair comestible de cet
animal ” comme c’est le cas dans :
(226)- Qui croit manger un lapin en civet trouve dans son assiette une sauce au
chocolat et une gélatine chaude de pomme, RIBAUT Jean Claude, Aujourd’hui
goûts, le Journal le Monde du 20 juin 2001, page 27.
Dans cet exemple la relation prototypique entre manger et le nom d’aliment qui le
complète se fait sur la base de la sélection directe d’un trait définitoire minimal
(comestible) à l’intérieur de la structure sémantique et c’est sur ce trait que porte la
316
saillance. Les traits latents ou secondaires ne sont pas impliqués. Cette sélection
sémique permet la coïncidence entre le sens de lapin “ chair comestible de cet animal ”
et le sens de viande à un niveau définitionnel minimal.
le second présente une certaine ambiguïté : poulet même s’il renvoie à « chair
comestible » ne pourrait vraisemblablement pas désigner quelque chose comme
« morceau de lapin » ou encore « tranche de lapin ».
(229)- Ce gallinacé de poche a failli sombrer dans les années 80. C'est l'époque
où le poulet en morceaux voit ses ventes décoller. Deux pilons dans une
barquette, deux blancs dans une autre : tout d'un coup le célibataire peut se
contenter de l'aile ou de la cuisse. Auparavant, quand on n'était pas une famille
nombreuse, point de salut ! Pour ne pas avoir à acheter un poulet entier pour soi
tout seul (poids minimal 1 kilo pour un poulet label), la seule solution c'était le
coquelet, CROUZET Guillaume, le Journal Le Monde du 4 octobre 2000, page
32.
(230)- …ce traité est une synthèse où sont consignées des préparations
allemandes, hongroises, espagnoles, italiennes et françaises, illustrées de 127
gravures sur bois. La première partie détaille de nombreux banquets, la seconde
317
donne les recettes classées par genre : viande, volaille, gibier, poisson, légumes,
etc., BEDEL Catherine, Une bibliothèque gastronomique dispersée à Paris, le
Journal Le Monde du 21 janvier 2000, page 28 ;
(231)- C'est aujourd'hui l'une des bouteilles phares de la jeune appellation des
coteaux-varois, créée en 1993. Un vin de bonne compagnie avec une viande en
sauce ou, mieux, avec un gibier, en attendant la truffe, RIBAUT Jean Claude,
Aujourd’hui, goûts bouteille, le Journal Le Monde du 24 octobre 2001, page 27.
De là vient le flou, au niveau lexical, un flou qui tient, d’après Robert Martin, à la
« pertinence variable des traits sémantiques et à la stéréotypie » (1992 : 28)
Alors que (231) reflétant une saillance stéréotypique de la qualité “ être rouge ” dans la
catégorie “ viande ” refuse ce test, l’énoncé (232) semble être plus acceptable ; ce qui
implique que la neutralisation du trait stéréotypique permet de ranger lapin dans la
catégorie “ viande ”. Dans la réalité, il est évident que la viande peut être rouge,
blanche ou même noire :
(234)- Elle fournit, d’une part, des viandes blanches poulet, perdreau, dindon
aussi riches en azote que la viande de bœuf, assez pauvres en graisse, très
tendres et très digestibles, et d’autre part des viandes noires canards, oies très
chargées de graisse et, par suite, indigestes, malgré leur pouvoir nutritif
(MACAIGNE Dr ; Précis d'hygiène, 1911, p 217)
318
En second lieu, nous savons aussi que l’une des caractéristiques essentielles de
la structure classificatoire générique est d’exiger un prédicat asserté comme vrai par
définition. Corollairement, toute limitation modale (négative, restrictive ou
évaluative) du prédicat est anormale.
Or, il nous semble que l’expression « viande blanche » réfère à un certain type
particulier de viande de veau qui est le produit d’un élevage particulier de cet animal
destiné à l’abattage consistant à le priver de se nourrir normalement et de se contenter
du lait de sa mère et ce, en lui fixant au cou un appareillage l’empêchant de se pencher
pour se nourrir. L’expression est récente :
319
(238)- Cet effort a été très poussé, puisque 50 % de la production nationale du label "
veau de lait sous la mère " viennent d'Aquitaine, CHERRUAU Pierre, le Journal Le
Monde du 30 août 2001, page 11.
Cela n’empêche pas les mots dénommant ces instances de garder cette nuance
de sens d’une manière latente ; laquelle nuance trouve sa réalisation dans des contextes
particuliers qui permettent d’isoler, au niveau de la catégorie subordonnante, un trait
particulier de sa structure et de l’ériger en tant que foyer d’une relation le reliant à un
opérateur approprié entraînant de la sorte, au sein de sa structure interne, un transfert
de la saillance à un niveau plus élémentaire, dotant ainsi toute la catégorie d’un
pouvoir recatégorisant extensif et permettant à des entités comme lapin, portant déjà ce
niveau primitif de sens, à s’intégrer dans la catégorie.
(239)- Et même des viandes plus marginales comme le lapin connaissent " une très
nette progression, de l'ordre de 30 % " chez Carrefour, BELOT Laure ; GALINIER
Pascal; VALO Martine, le Journal Le monde du 17 novembre 2000, page 20.
320
(244)- Le tailleur a coupé le costume.
Le sens du verbe couper ne varie pas alors que “ son interprétation est radicalement
différente d’un énoncé à un autre … ” et semble par conséquent avoir « un ensemble
de conditions d’applications qui varie sensiblement » (ibidem) de (240) à (244). Ainsi,
si en exécutant l’ordre :
(245)- Coupe le gâteau !
l’exécuteur fait passer une tondeuse à gazon sur le gâteau, on est en mesure de se
demander si l’ordre a été obéi.
Trois implications sont à retenir de ce constat :
(i) Si le sens du verbe est stable alors que l’interprétation varie, c’est que, de ce
point de vue, le sens se présente comme un programme général qui se résout
différemment en contexte. On trouve, ici, une parenté avec les formes schématiques, le
processus de convocation-évocation et des facettes de Victori ainsi qu’avec le
paradigme du lexique génératif et des qualia de J. Pustejovski. (Cf. Kleiber, 1999).
A première vue, ce sens peut être quelque chose comme “ disjoindre ce qui est uni ”.
Tous les énoncés semblent avoir en commun ce sens, mais on se rend très vite compte
que cette signification ne peut être suffisante puisqu’elle ne permet pas de distinguer le
321
verbe « couper » d’autres verbes comme « détacher », « déchirer » ... Ce qui est
vraiment distinctif pour « couper », c’est le moyen utilisé à savoir “ un instrument
tranchant ”.
Or, si l’on tient compte de (iii), la nature de cet instrument et pour quelque
chose dans la variation de l’interprétation de couper. Mais, si l’on se rend compte que
“ couper un gâteau ” n’équivaut pas à “ couper une corde ” bien que l’instrument
puisse être le même, on est obligé de relativiser un tel constat. Donc, il ne peut y avoir
de relation directe entre la variation du sens et la variation de l’instrument.
Il faut donc se tourner du côté des arguments. C. Bianchi se base sur le test de la
réduction de la conjonction pour rejeter la théorie de la généralité du sens et pour
démontrer également la variabilité indéfinie des sens du verbe « couper » selon
l’infinité de contextes possibles :
Ainsi, couper aurait tant de sens que d’arguments ; ce qui est contre intuitif
parce qu’il est toujours possible de trouver des associations compatibles avec un même
sens :
322
g- Il lui coupe la tête et les bras
Ceci montre que les sens du verbe couper sont définis, limités et stables. Dans
chaque type d’énoncé le verbe est en relation d’appropriation avec l’argument qui se
présente comme une occurrence d’une catégorie. Chaque catégorie est structurée sur la
base de conventions culturelles relatives surtout à la forme d’usage (« bout » pour
corde, joindre les bouts, nouer les bouts…)
Potentiellement, un gâteau peut être coupé avec une scie, des ciseaux… mais
les conventions d’usage sélectionnent le couteau aux dépens de tout autre instrument.
323
Les propriétés physiques de l’objet (taille, nombre, position dans l’espace…) jouent un
rôle dans cette sélection.
Ainsi, bien que le sens du verbe soit le même (séparer) dans des énoncés tels
que :
(247)- Il coupe l’arbre
(248)- Il coupe l’herbe
Le test de la réduction conjonctive ne fonctionne pas ou du moins passe difficilement :
(250)- Paul coupa un arbre en peu de temps. La hache / la scie était bien affûtée
(251)- Paul coupa difficilement les herbes. La faux était en mauvais état
Mais cela ne veut pas dire que le verbe couper, dans ces cas, a deux significations
différentes puisqu’il suffit de séparer les deux procédures en marquant la succession
dans le temps pour que l'énoncé soit acceptable :
La stéréotypie entre en jeu dès que nous sommes en présence du même effet, de
la même procédure et probablement les mêmes instruments pouvant réaliser cet effet.
Nous savons que l’herbe, le blé, le foin…sont des objets fragiles qui peuvent
être coupés avec presque n’importe quel instrument tranchant. Cependant, on imagine
mal l’emploi des cisailles, d’un couteau pour couper le blé. L’existence d’un outil
conçu pour un usage particulier (faux, scie…) le relie prototypiquement et donc
stéréotypiquement au niveau conceptuel (voir R.Martin, 1992 : 75) aux objets
324
correspondants bien que l’acte de couper reste possible avec d’autres instruments. En
contexte, l’expression par un instrument atypique nécessite une justification :
(253)- … de jeunes arbustes trop tentants à couper au couteau, pour faire des bâtons
(ARAGON Louis, ARAGON Louis Les Voyageurs de l'impériale, 1947, Première
partie, Fin de siècle, VIII, pages 85-86)
(254)- On volait aussi beaucoup de blé aux fermiers. On se glissait à plat ventre dans
les champs et l’on coupait les épis avec des ciseaux (VAN DER MEERSCH Maxence,
Invasion, 1935, page 386)
(255)- L’homme, dans son ignorance, se trompe souvent sur les fins et sur les
moyens, sur ses forces et sur la résistance, sur les instruments et sur les obstacles.
Tantôt il veut couper un chêne avec un canif, et tantôt il lance une bombe pour briser
un roseau (MAISTRE Joseph de, Les Soirées de Saint-Pétersbourg ou Entretiens sur
le gouvernement temporel de la Providence, 1883, Deuxième Entretien T 1, page 171).
Car le verbe faucher convoque à l’esprit “ faux ” qui sert à couper aussi bien l’un que
l’autre.
alors qu’avec cisailles que l’on peut utiliser pour raccourcir l’herbe dans les travaux de
jardinage, l’énoncé devient étrange sauf contexte particulier :
(259)-? Avec les cisailles, Paul coupe les blés et les herbes
325
(260)- Paul coupe les herbes avec les blés
Ces cas sont à distinguer des exemples cités par Bianchi où l’échec de ce test est dû à
la variation du sens :
reste absurde pour un locuteur ordinaire qui ne sait rien au sujet des fameuses fermes
californiennes en l’absence d’un élément justificateur en contexte ; tout comme :
La conclusion tirée par Bianchi à partir de cet exemple à savoir que le sens d’un
mot peut se multiplier de façon indéfinie ne nous semble pas pertinente dans la mesure
où ce “ nouveau ” sens dans le cas de “ couper le gazon avec le couteau ” ne se réalise
pas en dehors des sens polysémiques bien définis du verbe couper.
Nous savons qu’une catégorie est ouverte et que la même occurrence peut
relever de plusieurs catégories à la fois ; ainsi, « gazon » et non « herbe » se trouve, à
la fois, meilleur exemplaire de ce que c’est couper avec une tondeuse de gazon
(raccourcir) et une occurrence périphérique non typique avec couper dans le sens
de débiter en tranches avec un couteau ; et ces deux sens ne dépassent pas le cadre de
la catégorie fermée du sens polysémique de couper.
326
serve à couper plusieurs objets (papier, verre…), on l’associe surtout à deux usages :
l’usage dans la cuisine et l’usage en tant qu’arme blanche. Cette représentation est
inhérente à sa définition naturelle (dans le sens que donne R. Martin, 1983) et exige
que tout autre emploi qui s’éloigne nettement de ces deux usages doit être justifié soit
par la dénomination, elle-même distinctive (couteau de papier, couteau de verre…),
soit par un élément justificateur en contexte. Dans un énoncé comme :
(265)- ?Elle prend un couteau de cuisine et elle coupe les légumes
le sème “ cuisine ” paraît redondant puisque suggéré par “ légumes ” et donc son
explicitation est injustifiée ; tandis que dans :
(266)- Avec un couteau de cuisine, il coupe difficilement la planche
le terme “ cuisine ” participe à la bonne interprétation en contexte.
En somme, la stéréotypisation des traits relatifs aux différents effets de couper
est la source de la génération de son sens polysémique puisqu’elle fixe le contenu
sémantique général dans des acceptions définies et stables.
Cependant, cette stéréotypisation est doublée d’une autre qui a comme foyer les
instruments et qui s’étend pour conditionner les relations sémantiques entre les unités
du discours. La superposition des deux niveaux engendre, à première vue, cet effet de
variabilité indéfinie de sens. Mais, comme nous l’avons vu, c’est le contenu
sémantique spécifique du verbe qui, en définitif, incline la portée stéréotypique, ayant
comme source l’instrument, à son essence, maintenant de la sorte sa stabilité (Cf., par
exemple, la possibilité de conjonction avec puis).
(267)- à Rome, à Florence, dans le train pour Paris et Londres, Simon, Augustin
et moi faisions ce que nous pouvions pour détendre une atmosphère à couper au
couteau.( Jean d'ORMESSON Tous les hommes sont fous, 1986, page 133)
(268)- à couper au couteau - On entend maintenant les avions, un
bourdonnement fantastique, à couper au couteau (CAVANNA François, Les
Russkoffs, 1979, pages 240-241)
327
(269)- Je ne suis pas très psychologue mais la gêne, Monsieur, à couper au
couteau...
( NOURISSIER François, Le Maître de maison, 1968, page 117)
(270)- Il avait un accent à couper à la hache (Christine de RIVOYRE, Les
Sultans, 1964, pages 200-201).
Il est clair que, pour tels cas de stéréotype l’analyse en traits ne suffit pas pour rendre
compte de la stéréotypicité de ces unités. Cette difficulté provient de deux
caractéristiques essentielles des séquences figées :
L’étude de ces différences permettrait de voir si la stéréotypie dans les deux cas est de
nature radicalement différente, si elle obéit à un schème général ou s’il s’agit d’une
simple correspondance.
328
Troisième chapitre-Stéréotypie et figement
La relation entre la stéréotypie et le figement est problématique à plus d’un
titre :
- les séquences figées ne sont homogènes ni du point de vue de leur structure
syntaxique, ni de leur charge sémantique. À ce dernier niveau, elles présentent une
gamme de degré qui va de la transparence totale à l’opacité totale. Dans les deux cas,
le fonctionnement sémantique n’est pas le même ;
- ces séquences n’admettent pas l’analyse en terme de traits comme pour les
unités monolexicales mais présentent une signification généralement globale et
synthétique. Ceci invaliderait l’utilisation des critères de l’identification des
stéréotypes ci-haut évoqués et impose par-la même une appréhension différente du
phénomène ;
- elles impliquent des mécanismes et des procédés de structuration sémantique
variés (tropes, représentations prototypiques, inférences, etc.) ;
- toutefois, le caractère figé de ces séquences les dote d’une conventionnalité
évidente qui les rapproche du stéréotype monolexical et justifie la recherche de traits
généraux et communs qui confirmeraient l’unité du phénomène à un égard ou à un
autre.
Les études associant le stéréotype et ce type d’expressions n’arrivent pas à
sortir du cadre clichétique et péjoratif dans lequel cette notion est envisagée par les
critiques littéraires.
Afin de montrer les limites d’une telle approche et afin d’explorer de nouvelles pistes
d’analyse et de description du phénomène, nous nous proposons de décrire la pluralité
de voies qu’emprunte la fixation stéréotypique dans la structuration des unités figées et
de mettre en saillance un autre type de stéréotypie ayant comme foyer les structures et
qui n’est percevable que par le biais d’une approche contrastive pour enfin tenter de
dégager les mécanismes communs aux différentes configurations de la stéréotypie.
329
1-Le stéréotype dans les séquences figées : entre transparence et
opacité
Parmi les recherches actuelles sur le figement, deux thèses nous paraissent
relativiser la pertinence d’une relation tranchée entre la stéréotypie et la transparence
ou l’opacité.
Les séquences figées présentent le « mouvement d’un continuum allant des
séquences les plus transparentes ( les moins expressives) à celles qui sont de plus en
plus opaques ( les plus expressives) » Mejri ( 1997a : 309). Donc à première vue, le
critère de l’expressivité paraît flou et il est difficile de tracer une limite entre les deux
types d’expressions citées ci-haut.
Si l’on admet, avec Prandi, que la motivation en tant que « forme de
transparence » n’a pas comme opposé l’arbitraire « mais l’opacité » puisque tant l’une
que l’autre « sont compatibles avec un régime de signification arbitraire » (1998 : 88),
et si l’on considère que le domaine de la stéréotypie est justement cette part
d’arbitraire qui caractérise la relation sens / référence, on est alors tenté de la relier à la
fois à la transparence et à l’opacité.
Prenant en compte le fait que l’opacité puisse être sémantique ou structurelle, nous
interrogerons un corpus relatif à deux types de structure illustrant l’imbrication de
cette double origine (expression de l’intensité avec comme / formations d’origine
discursive) afin de cerner les implications de cette relation et de vérifier ces
hypothèses.
330
permettant de tracer la limite entre « les locutions grammaticales » d’une part et « les
locutions stéréotypées » de l’autre. 107
Ainsi, se trouvent exclues du domaine de la stéréotypie, les catachrèses telles
que le pied de la table, la tête du marteau, etc. Cette exclusion met l’accent sur un
autre critère étroitement lié au premier, celui de la dimension stylistique. En effet, la
charge expressive de ces expressions est atténuée par l’usage et leur transparence
quasi-totale fait qu’elles ne sont plus senties comme des figures. Le stéréotype relève
dans cette optique de l’ornemental et son contenu est relégué au second plan.
Cependant, si l’on considère la stéréotypie comme un mécanisme de catégorisation
impliquant une représentation conceptuelle particulière de la matière sur laquelle
s‘exerce la pensée, on est amené alors à la rattacher, à l’instar de Prandi, à la fois à la
motivation et à l’opacité.
Cette double implication trouve sa légitimité dans le fait que la motivation,
phénomène de toute évidence scalaire lui aussi, « peut…être expliquée, voire justifiée
par l’ordre normal des choses ou de la pensée » (Ducrot, 1972-1995 : 321) ; la
stéréotypie relève justement de l’interaction de ces deux ordres.
Néanmoins, confronté aux faits, on se rend compte, quand il s’agit d’unités
polylexicales, qu’il n’en est rien dans un cas comme dans l’autre : une expression dont
le figement et la transparence sont attestés comme avoir froid ne véhicule aucun
stéréotype. De même, dans une expression comme découvrir le pot aux roses, on ne
saurait mettre en évidence l’existence d’un stéréotype quelconque en synchronie.
Il faudrait alors en expliquer les causes pour préciser davantage le cadre de
notre problématique.
Du côté de la transparence totale, nous comparons dans ce qui suit les
mécanismes sémantiques qui sous-tendent la formation du sens dans deux unités qui
ne présentent apparemment pas de différences, ni au niveau de la structure (N de N), ni
au niveau de leur mode de signification (porte de garage – porte d’entrée). Le but est
de montrer que derrière cette quasi-similitude réside quand même une différence :
l’une est neutre, l’autre est stéréotypée.
107
- Cf. , Shapira,C.(1999), Les stéréotypes en français, Ophrys.
331
Les deux unités relèvent d’une structure très productive où « le premier nom est
l’hyperonyme de la séquence (ce qui détermine le genre de la séquence) et le deuxième
renvoie à un référent que l’on peut mettre en relation pertinente avec le premier de
telle sorte que le tout renvoie à une sous-catégorie du référent du premier nom » (D.
Corbin, 1985 : 63).
S’agissant de la première unité, G. Gross montre qu’elle est sujette à de fortes
restrictions quant à la détermination et à l’adjonction d’adjectifs. Il conclut que dans
cette suite « on n’observe pas les relations syntaxiques spécifiques des groupes
nominaux mettant en jeu une relation de partie à tout [caractéristique des unités
libres] » (1996 : 37). Nous constatons également que la dénomination rend un sens
global sans toucher à la substance conceptuelle des concepts relatifs à la base et à
l’expansion (comme il est le cas dans cœur d’acier par exemple). L’unité de base ne
subit aucun rattachement sémique provenant de la décomposition de l’expansion et de
l’activation d’une sélection sémique en son sein. De ce fait, le signifié global n’a rien
d’arbitraire puisque la restriction extensionnelle ne découle pas d’un réarrangement
sémique quelconque mais d’un recouvrement conceptuel entre les deux unités : dans
porte de garage, porte signifie toujours « ouverture…permettant d’accéder à un lieu
fermé ou enclos et d’en sortir » et « garage » signifie toujours « lieu couvert qui sert
d’abri aux voitures » (Le Petit Larousse).
La transparence totale provient donc du fait que les contenus initiaux gardent
leurs configurations sémantiques et puisque ces contenus ne véhiculent initialement
aucune charge stéréotypique, le sens global n’est pas atteint d’une telle visée. Tel type
de séquences fait partie de ce que Mejri (1997a) appelle le figement au premier degré.
L’expression en question présente vraisemblablement dans le cadre de ce degré un cas
typique des unités les plus à gauche sur l’axe du continuum allant de la transparence
totale à l’opacité totale.
La position la plus immédiate par rapport à ces séquences est occupée par des
unités, à première vue, non moins transparentes mais dont le contenu sémantique laisse
à réfléchir.
Dans porte d’entrée, le sème « accéder / accès » figure dans les contenus sémantiques
des deux composants :
332
porte (Cf. ci-dessus)
entrée : « endroit par où l’on entre, voie d’accès ».
Outre la spécification par la préposition de, cette redondance est le second lien
d’attache entre les deux concepts. Cependant, au lieu de fonctionner comme une forme
d’insistance, elle entraîne un changement qualitatif se traduisant par la cristallisation
de sèmes nouveaux : « fondamental » et « spécialement qu’empruntent les
étrangers » :
Porte d’ entrée
« ouverture « voie d’accès »
permettant l’accès »
« fondamental »
« qu’empruntent les étrangers »
333
L’analyse des mécanismes sémantiques dans les deux séquences porte de garage et
porte d’entrée nous a permis de voir que la stéréotypie dans les unités polylexicales
devient manifeste à partir de cette limite primaire entre la transparence totale et
l’opacité partielle.
Pour ce qui est de l’absence de la stéréotypie dans les unités totalement
opaques, on ne peut qu’admettre après Robert Martin que « historiquement, la non
compositionnalité n’existe pas ». « Si des locutions restent obscures, dit-il, cela est dû
à une connaissance insuffisante et non à l’absence effective de motivation […]
l’opacité vient seulement en synchronie d’une motivation qui se perd » (1996 : 300).
On pourrait, dès lors à première vue, situer le champ d’action de la stéréotypie
dans cette zone de flou qui s’étend entre la transparence totale et l’opacité totale :
domaine de la stéréotypie
transparence totale opacité totale
334
l’éloignement catégoriel s’accompagne de l’ellipse des conditions d’énonciation, et,
par conséquent, fait tomber l’expression dans l’idiomaticité.
335
« très », « intense », à « un degré élevé » ( Mel’čuk, Clas, Polguère, 1995 : 136).
L’expression de « très » dépend, dans les deux approches, du mot de base modifié.
« Les compléments de comparaison constituent des modificateurs intensificateurs qui
signifient dans le contexte donné « très ». Autrement dit, le mot de base fonctionne
normalement mais l’élément qu’il amène perd une partie de ses traits sémantiques et,
l’ensemble finit par équivaloir à « très » » (T. Szende,1999 :74).
Dans les deux approches, la clef de l’interprétation de ce type de structures
réside dans l’élément de base puisque, pour Mejri, la redondance sémique n’est pas
affectée même si le comparant est sémantiquement opaque du fait que, dans tous les
cas de figures, l’élément objet de redondance et exprimant la qualité est rendue par la
base ; pour Mel’čuk, l’expression de « très » dépend de ce même élément servant de
support pour le modificateur intensificateur.
Or, si on prend en considération que ce premier élément précédant comme peut
être un verbe ou un adjectif, l’analyse semble suivre deux orientations différentes
comme l’illustrent ces deux exemples :
336
Ceci montre que bien qu’il s’agisse dans les deux types de structure (Adj. + comme +
SN / V. +comme + SN) d’expressions de l’intensité, leur fonctionnement relève de
deux mécanismes différents.
Dans le premier cas, le comparant, censé être exemplaire typique d’une qualité
qui lui est rattachée stéréotypiquement (âne bêtise), se trouve dans une structure où
cette qualité est explicitée par l’adjectif de base précédant comme ; donc, la saillance
ne porte, dans le cadre de ce second élément, que sur le caractère typique de cette
instance. L’interprétation obéit, dans ce cas, à un mouvement régressif :
Bête comme un âne
(cette) qualité instance typique
(de)
Ce type de renvoi régressif permet au second élément d’exprimer le degré, l’intensité,
et, donc on peut parfaitement comprendre la présence de certains noms ethniques
(avare comme un Ecossais) qui « ne reflète pas forcément l’univers de croyance du
locuteur » (Mejri, Ibidem. : 447), et la possibilité d’interpréter des séquences dont le
deuxième élément est totalement opaque (bête comme un balai). La valeur
appréciative d’origine qui a permis de passer de loc. à loc. est ainsi affaiblie au
point qu’on peut utiliser l’expression en question sans partager cette motivation
originelle.
Il n’en est pas de même dans le deuxième cas ; l’élément verbal crée au cours
de l’interprétation une situation d’attente qui ne se résout que dans le cadre du
comparant. Dans ce cas, la saillance porte aussi bien sur la qualité, qu’il intègre en tant
que stéréotype, que sur son caractère typique en tant que meilleur exemplaire de cette
qualité :
Manger comme un ogre
mange beaucoup exemple typique
Si dans le premier cas, on peut parler de redondance sémique, à droite du comparant,
comme source de renforcement de l’intensité :
Bête comme un âne [est bête]
ici, la redondance centrée sur le verbe n’arrive pas à rendre le sens :
337
Manger comme un ogre [mange].
Par conséquent, le contenu sémantique stéréotypique du comparant garde toute son
ampleur dans la synthèse sémantique.
Par ailleurs, même dans le cas de la structure Adj. + comme + SN, il nous
semble qu’il existe une exception où le second élément garde toute sa charge
sémantique : il s’agit des tournures fondées sur un paradoxe telles que dans aimable
comme une porte de prison.
Dans cette expression, «les relations logiques […] vont à l’encontre de la
logique commune, celle de la doxa » (C. Fromilhague, 1995 :102). Contrairement à la
structure ordinaire (non paradoxale) où le comparant se contente d’exprimer
l’intensité, le paradoxe, lui, permet de garder toute sa force expressive. L’opposition
entre le monde des attentes sous-entendu par la base et sa négation apportée par le
second élément porte toute la saillance sur celui-ci et lui permet de suspendre le
contenu sémantique de la base pour la doter de sa propre charge (Cf. Mejri, :444).
Notons qu’on assiste, parfois, à un mouvement inverse dans le cadre des
structures non paradoxales. Quand la redondance sémique est inopérante à cause de
l’opacité du comparant (con comme une cruche), l’assignation d’un signe (+) suit un
mouvement prospectif allant de la base vers le second élément.
Ce que nous pouvons retenir de cette analyse, c’est que l’expression de
l’intensité avec comme est rendue par trois cas de figures :
- Quand la base est un verbe, la saillance porte sur le comparant et le stéréotype
garde tout son poids dans la détermination du sens ; le nom rend simultanément
l’expression de la qualité et l’expression de l’intensité ;
- quand la base est un adjectif dans un emploi paradoxal, l’opposition entre
l’attente créée et sa négation dans le deuxième terme suspend le sens de la base et lui
substitue la charge sémantique du comparant. Le stéréotype reste là aussi saillant ;
- quand la base est un adjectif dans un emploi ordinaire, celui-ci se charge
d’expliciter la qualité considérée et, le stéréotype se trouve de ce fait affaibli. Le nom
ne garde qu’un schème général rendant le caractère typique de l’instance. Cette
dissociation entre la qualification et le degré de qualification est due à un transfert de
la saillance vers la base. La typicalité se détache ainsi, de tout contenu sémantique
338
particulier grâce à l’idée du « haut degré » qu’elle implique et le sens global de « très »
est stabilisé par la distribution sémique complémentaire dans ce type de structures.
En termes d’opacité et de transparence, ces trois cas se ramèneraient à deux :
- quand l’expression de la qualité est prise en charge par la base, celle-ci
compense avec l’apport de la structure même l’éventuelle opacité sémantique du
comparant. L’ensemble est assez transparent pour dégager le sens global ; la
stéréotypie est latente, affaiblie.
- quand l’expression de la qualité dépend du comparant, l’ensemble de l’unité
est plus opaque et la stéréotypie reste saillante. Comparons ces deux exemples pour
saisir la pertinence de ce constat :
(275)-Fier comme Artaban
(276)-Se porter comme le Pont-Neuf
Les deux comparants étant des noms propres, leur opacité découle de leur
dimension allusive. Si dans (275), on peut toujours ignorer qui est Artaban sans que
cela empêche d’interpréter correctement le sens. Par contre dans (276), on ne serait pas
en mesure de dégager le sens de l ’expression à moins de connaître la locution, et par
conséquent le référent du Pont-Neuf.
En somme, l’opacité sémantique dans ce genre d’expressions se calcule à
l’échelle de toute la séquence. Elle est largement tributaire de la distribution du sens
entre les composants. Plus le tout est opaque, plus le potentiel de la stéréotypie est
grand.
A la transparence relative de la structure avec comme, nous opposerons, dans ce
qui suit, l’opacité relative de la structure de certaines séquences d’origine phrastique et
verbale.
339
les fait passer d’une structure énonciative, généralement phrastique, à une catégorie
nominale (suivez-moi-jeune-homme) ou adverbiale (va-comme-je-te–pousse). Cette
recatégorisation est due à une « décontingification » qui entraîne la perte de tous les
indices d’ancrage et d’historicité premiers et l’installation d’un acte de référenciation
permanent. De ce fait, elles sont totalement figées ; elles subissent lors de la
reconstitution catégorielle une « compactification » qui est à la base de leur
substantivation. Ainsi, elles n’acceptent aucune modification. Cet éloignement
catégoriel est une autre source d’opacification qui vient s’ajouter à celle résultant de la
sélection sémantique et de la dénomination oblique.
Les dénominations d’origine phrastique ou verbale pourraient être ramenées à
trois grands modes de signification selon l’orientation de la relation inférentielle qui
sous-tend leur formation :
(277)- Suivez-moi-jeune-homme
L’énoncé originel est une inférence dont la motivation se situe en dehors de son
cadre et dont dépend la signification. « La réinterprétation de l’énoncé », dans le sens
que lui donne Robert Martin, est étroitement liée aux données situationnelles et
stéréotypiques.
Les caractéristiques de l’objet dénommé (pan de chapeau de femme flottant sur
la nuque) ne peuvent d’eux-mêmes donner lieu à une telle inférence. Les potentialités
d’évocation de la simple forme flottante ne mènent pas de soi à l’évocation explicitée
par la séquence (invitation connotée). C’est la subjectivité des locuteurs qui module
stéréotypiquement cette forme en la rapprochant analogiquement d’un geste codé
socialement (geste du doigt par exemple) et ce n’est que par l’intermédiaire de cette
modulation que l’inférence se trouve justifiée. L’univers féminin sert de cadre à cette
modulation. A l’origine, le pan du chapeau (O) évoque par sa forme flottante (F)
l’image gestuelle d’un doigt (O’), par exemple, effectuant un geste socialement
connoté (F’) : celui d’une invitation discrète adressée à un homme. Perdant son statut
d’énoncé, la séquence substantivée se détache de ses conditions d’énonciation
originelles et devient dénomination de l’objet (O) :
340
O (pan)
(1)
Suivez-moi-jeune-homme F
(3) substantivation (flottant)
O’ (geste)
F’
(connotation
sexuelle)
[Suivez moi jeune homme]
inférence (2)
341
Personne [qui] va nu-pieds
Thème prédicat
Cependant, ce prédicat descriptif et concret ne réfère pas directement au
dénommé mais seulement à travers ce qu’il infère :
a) Va-nu-pieds misérable, pauvre..
b) Va-et-vient dans les deux sens
En a), la stéréotypie trouve son foyer dans l’arbitraire du découpage normatif où
le lien, normalement contingent, entre un trait physique perceptible (être / aller nu-
pieds) et un état (devenir misérable) devient permanent. A l’origine, le rapport entre
les deux n’étant pas exclusif : une personne qui va nu-pieds n’est pas forcément pauvre
et une personne misérable ne marche pas nécessairement pieds nus.
En b) seule l’idée des sens opposés est sélectionnée ; l’idée de point de départ et
l’idée de l’unité de l’agent physique qu’implique le procès s’estompent. C’est ce qui
permet à la nouvelle unité de renvoyer à divers types de référent (petit bac, porte, gond
de porte, système de cordage, dispositif électrique, mouvement alternatif, déplacement
de personnes et de choses).
L’énoncé d’origine étant transparent, le calcul du sens se réalise surtout à partir
du prédicat. La situation d’énonciation pèse peu sur la nature du sens global et la
motivation stéréotypique reste saillante.
(280)- M’as-tu-vu
(281)- Y-a-qu’-à
Le lien entre la dénomination et le référent est un lien typique du fait que l’un infère
l’autre. Il s’agit d’une inférence réciproque : un type de discours tel que m’as-tu-vu
infère que la personne qui profère ce genre de propos est vaniteuse ; de même, on peut
également inférer qu’une personne vaniteuse tient ordinairement ce genre de discours.
Ici, la réinterprétation implique une « lecture métalinguistique [où] la
projectivité du signe se trouve […] retournée sur le signe lui-même au bénéfice
exclusif de la réflexivité » (Robert Martin, 1983 : 251).
En termes d’énonciation, la substantivisation de la séquence est le résultat de la
saillance portée sur un acte perlocutoire bien défini s’opposant à l’effet illocutoire
recherché (arracher une reconnaissance de la part d’un auditoire donné) et suspendant
le sens locutoire initial (donc la signification stricte) pour devenir lui-même la
342
signification. En principe, « les effets perlocutoires peuvent […] être infiniment
divers » (ibidem : 256). Cependant, l’effacement de la situation d’interlocutivité
initiale permet d’associer l’un de ces effets à la forme discursive en question d’une
manière permanente.
Relevant d’un registre oral où les conditions d’énonciation sont généralement
difficiles à rétablir, ces séquences hypostasiées ne comptent que sur la transparence de
leur matière lexicale. Plus cette matière est opaque quant à la reconstitution de ces
conditions, plus la part de l’arbitraire et de l’imprévisible est grande. C’est le cas en 1)
où la séquence est elle-même une inférence originelle ayant sa source ailleurs. Bien
que la motivation stéréotypique sous-tende toutes ces formations, elle est d’autant plus
facile à mettre en évidence que la séquence est transparente.
On conclut que le champ de la stéréotypie étant le fonctionnement même de
l’arbitraire, celle-ci a tendance, théoriquement, dans les séquences figées, à être le
corollaire de l’opacité partielle ou totale. Dans les faits, elle ne peut être mise en
évidence dans ce dernier cas, faute de connaissances suffisantes.
Cependant, l’opposition des deux types de séquence figée (expressions de
l’intensité avec comme et les formations d’origine phrastique et verbale) montrerait
combien importe de distinguer les facteurs d’opacité.
Dans le premier type de séquences, la structure étant transparente, la stéréotypie
est saillante chaque fois que le trait qu’elle implique n’est pas explicité par la base ;
dans le second, la structure étant opacifiante, la stéréotypie est plus décelable chaque
fois que l’énoncé d’origine est relativement transparent.
En somme, la compositionnalité ou la non compositionnalité du contenu lexical
ne rend pas compte, à elle seule, de la saillance stéréotypique. Celle-ci, pour être mise
en évidence, nécessite la prise en considération de la distribution du sens dans le cadre
de la structure, sinon la structure même.
Pour une vision plus globale du phénomène, nous nous intéresserons au rôle
que joue la stéréotypie dans les séquences figées en général.
343
2-Stéréotypie et structuration du sens dans les unités
polylexicales : univocité ou pluralité ?
On peut inférer que X est en face d’un danger ayant comme source Y. Cette
inférence n’est possible que par l’activation du stéréotype suivant :
344
à griffes qui en est le symbole même et qui peut lui être rattaché d’une manière
afférente :
(283)- C’est un animal qui a des pattes mais qui n’a pas de griffes.
Un cas plus simple peut être illustré par l’expression retomber sur ses pattes
qui signifie « se tirer habilement d’une affaire dangereuse ou compromettante ».
L’inférence d’origine trouverait sa justification dans le stéréotype que nous avons du
chat ou des félins (habileté). Bien que, dans cette expression, le sens global se trouve
généralisé par analogie, rien en lui ne renvoie à chat. Ce sens pourrait être rendu à
partir d’une phrase générique telle que :
La généricité n’est pas liée, ici, à une propriété universelle relative aux chats,
mais, à une représentation stéréotypique suffisamment pertinente « pour cerner le
détachement par rapport aux existences concrètes [du chat] » (Kleiber, 1996). Le
contenu inférentiel (se tirer d’une affaire dangereuse) seul persiste après l’effacement
du SN générique et le sens projeté dans le domaine de l’humain ne garde qu’une
allusion vague à ses origines (pattes).
345
2-2- Stéréotype de relais
Partant d’une comparaison entre le sens de l’expression dans son contexte initial 108 et
son sens en emploi figuré, S. Mejri montre qu’il s’agit de la même structure
énonciative dans les deux cas » (1997a : 387) et que « le passage du cas particulier au
cas général se fait grâce à l’effacement des actants de la première situation ( le loup et
le chevreau). Seule la preuve montrer patte blanche demeure » (ibidem : 388) . La
condensation sémantique est le résultat d’un « transfert sémantique qui transforme des
éléments énonciatifs [en principe contingents] en sèmes intégrés dans la structure du
signifié » (ibidem : 389).
108
- Les Fables de la Fontaine « Le loup, la chèvre et le chevreau », Hachette , 1929, p 147.
346
abstraite impliquant un effort de construction. Ce deuxième niveau d’abstraction se
fonde sur un stéréotype qui lui sert de relais, et qui consiste à voir dans toute personne
étrangère une menace potentielle :
1ère abstraction
fournir agresseur
victime
un signe, potentiel
potentielle
imposer une
condition
2ème abstraction
personne étrangère
groupe social
ou lieu précis
347
des contraintes logiques auxquelles ils sont soumis (rapport potentiellement
conflictuel) .
Dans ces deux expressions, on est à première vue en présence d’un mécanisme
métonymique où l’effet est désigné par la « cause » puisqu’un fait manifeste renvoie à
sa conséquence :
Le troisième cas concerne les stéréotypes figés qui ne reposent pas sur
l’activation, à un moment quelconque de la genèse du sens, d’un trait lexical
particulier. Il s’agit plutôt d’expressions où sont impliqués des schèmes conceptuels
d’ordre général ou des mécanismes inférentiels ou tropiques donnant lieu à des
348
scénarios ou des images mentales dont la saisie s’effectue au niveau de la synthèse
sémantique.
Dans une expression telle que franchir le Rubicon, la genèse du sens permet de
passer d’un cadre de référence spécifique à un cadre de référence générique. La
construction du sens se réalise ainsi en deux étapes : la typicalisation du procès
originel puis sa généralisation par un mécanisme analogique. Au départ, le sens littéral
coïncide avec un sens inférentiel contingent (prendre une décision irrévocable, passer
hardiment à l’action). La saillance ne porte pas sur le procès lui-même mais sur
l’inférence qu’il évoque : l’historicité de l’acte lui donne une ampleur dépassant la
simple contingence pour en faire un procès-type. L’agent lui-même (César) reste en
dehors de cette typicalisation.
349
Genèse historique :
démotivation
position désancrage
actancielle libre référentiel
remotivation, typicalisation
fixation
transfert
sémantique
350
Synthèse sémantique
X1 Référent contextuel 1
X2 Référent… 2
franchir le Rubicon
X3 Référent… 3
sens conventionnel
Ici, la stéréotypie est typicalisante ; elle se fonde sur un mode de référenciation éclaté
où il y a glissement d’une référence particulière à une référence généralisée s’appuyant
sur le simple partage d’une contingence devenue stable.
351
Les expressions des hauts et des bas et les actions montent / baissent
relèvent de la métaphore conceptuelle dite d’orientation (Lakoff, 1985 : 24). Leur
transparence ne résulte pas de leur sens littéral concret mais de l’ancrage dans le
lexique d’une signification qui n’est plus perçue comme seconde, dérivée. Chaque
élément de l’expression contribue au sens par sa charge axiologique initiale.
Dans l’acception concrète, l’expression elle-même est une inférence qui résulte
d’un fait qui en constitue le sens. Le deuxième sens oppose boire à manger et les dote
d’une dimension axiologique qui ne leur est pas propre en emploi monolexical. Cette
dimension n’est possible qu’à partir du premier sens .
352
adjectivales :
- soûl comme un polonais
- avare comme un écossais
- etc.
verbales :
- filer à l’anglaise
- bâtir sur le roc
- bâtir sur le sable
- etc.
ou phrastiques :
- C’est de l’allemand
- C’est du chinois
- C’est de l’hébreu
- C’est de l’algèbre
- etc.
353
- Métaphore fondée sur une dimension analogique
- Figuration symbolique
354
sémantique des mots et impose parfois même une « anomalie » structurale comme
l’illustre l’exemple suivant : les avoir accrochées.
Notons que cette séparation des niveaux et des procédés linguistiques dans
l’étude des unités polylexicales est avant tout d’ordre méthodologique. Dans les faits,
l’imbrication de ces facteurs présente un chevauchement et un recouvrement de ces
niveaux et de ces procédés dans le cadre de la même expression. La stéréotypie peut y
être décrite à plus d’un niveau et peut témoigner de la présence de plus d’un
mécanisme structurant. Analogie et inférence, figuration et symbolisme, rôle
déclencheur ou de relais et rôle apparent au niveau de la synthèse sémantique… se
superposent dans la même expression comme en témoignent les exemples traités.
355
l’iconicité qui caractérise les séquences figées condense le sens et assure
l’unité conceptuelle de l’expression malgré la pluralité de ses composants. Elle est
aussi la source de la typicalité stéréotypique.
356
- l’arbitraire pur et simple ( ex. Bête comme une valise) .
La différence est que dans les unités polylexicales, ce sens ne peut être dérivé à partir
d’un contenu sémantique afférent au sens stabilisé ; le sens polylexical étant figé, toute
manipulation discursive entraînant son défigement.
si X est Y , et s'il n'y a pas d'information contraire, alors on peut en inférer que X est Z
alors que dans le cas des anaphores associatives, la relation stéréotypique peut être
construite à partir d’un « ingrédient […] possible a priori du référent de
l’antécédent (Kleiber, 2001 : 123) :
357
si X est un assassinat, alors un couteau peut-être l’arme du crime
1’- d’être pris en charge par une instance énonciatrice indéfinie (à l’instar des proverbes :
comme on dit : qui part à la chasse perd sa place. Ces expressions stéréotypées s’insèrent
d’une manière ou d’une autre dans une prédication du type « ça s’appelle » :
« FRANTEXT
(289)- ça s' appelle être enfermé, MARTIN DU GARD Roger / Vieille France /
1933 page 1083 / Chapitre XXI
(290)- ça s'appelle brûler le dur, MALET Léo / La Vie est dégueulasse / 1948 page
90 / Chapitre XV
(291)- L'un d'eux avait récemment joué dans un film, mais « il n'en faisait pas une
maladie » comme on dit ici , IZZO Jean-Claude / Chourmo / 1996 page 140 / 9
(292)- Comme on dit chez nous, tu ressembles à une noix de coco !, SCHREIBER
Boris / Un silence d'environ une demi-heure / 1996 page 426 / 48
(293)- J'étais au comble du bonheur... J'allais retrouver mes racines comme on dit à
la télévise dans les grands débats culturels, BOUDARD Alphonse / Mourir
d'enfance / 1995 page 110 / 6
(294)- Il mène son deuil, comme on dit ici, en silence, le cul vissé, dès le matin, sur
un haut tabouret de bois, au zinc du Café de la Cale, DORMANN Geneviève / La
Petite main / 1993 page 125 /
(295)- J'ai, comme on dit, «l'oreille de la brousse» : j'entends le langage des
oiseaux, je lis les traces des petits animaux sur le sol et les taches lumineuses que le
soleil projette à travers les feuillages, BÂ Amadou Hampâté / Amkoullel, l'enfant
peul / 1991 page 26
(296)- Il faut dire aussi que Bâbilen avait, comme on dit, "utilisé sa bonne bouche"
en faveur de Kadidja, BÂ Amadou Hampâté / Amkoullel, l'enfant peul / 1991 page
134.
358
2’- de constituer des noyaux prédicatifs, ce qui les distingue des séquences figées
grammaticales :
Nous retrouvons là un certain parallélisme entre les critères distinctifs des stéréotypes
relatifs aux unités monolexicales et ceux relatifs aux unités polylexicales :
-en 1 comme en 1’ l’accent est mis sur l’instance générique, indice de typicité du trait
dans 1 et de l’image ou du procès dans 1’ ;
-3 et 3’ mettent en œuvre la notion d’écart entre une représentation et le fait support qu’il
soit référentiel ou linguistique.
En outre, il existe un autre critère plus ou moins partagé entre ces deux formes de la
stéréotypie : celui de l’intraductibilité. En effet, excepté les calques dus au contact des
langues ou les universaux du langage, les représentations stéréotypiques, souvent indices
d’un découpage différent du réel d’une langue à une autre, demeurent récalcitrantes à
toute traduction fidèle ; d’où l’intérêt de leur étude dans une perspective contrastive.
359
Quelques exemples d’expressions relevant du français et de l’arabe nous serviront
d’illustration pour l’exploration de cette dimension.
360
chaque langue, à travers des images lexicalisées ou vives variant selon la spécificité
des cultures, des environnements et des scénarios de la vie quotidienne.
(fi :f-rru :hi), avec esprit ((fi :f-laqli), mais non avec cœur.
Les exemples suivants illustrent bien cette sélectivité différée.
(299)- lw kunt faddan ali:da-lqalbi
Si tu étais cruel épais de cœur Surat El Omrane 159
(300)-k :n raqi :qa-lqalbi
→ Il était tendre de cœur. Assarab,11
Il avait le cœur tendre. Les chimères,17
(301)- inn qalbk adfu min n…
Ton cœur est si faible pour qu’il…… ibidem, 123
Tu as le cœur trop tendre pour….. trad. ibidem, 180
(302)- qawwi: qalbk qalbun qawijjun
renforça ton cœur cœur fort
courage brave cœur
(303)- gonfler les cœurs
fm qalb X Al-kamel
a rempli le cœur de X (lit.), (fig.) a enjôlé le cœur
(304)- crever le cœur
hzz fi-lqalbi
a entaillé dans le cœur
Dans les deux couplets (279-300 et 301-302), l’arabe qualifie le cœur selon les
oppositions épais / mince, fort /faible. Ce qui est remarquable dans les traductions,
c’est le fait de traduire [raqi :q] et [dai:f] avec le même terme non marqué « tendre ».
Pour sauvegarder la nuance entre les deux termes d’origine (le premier étant en effet
relatif à la tendresse, le second au manque d’énergie), le traducteur a recours à
361
l’adverbe « trop », qui, joint à l’expression de la finalité (pour), arrive à maintenir
l’idée de degré contenu dans [dai :f] (faible).
Le dernier exemple présente une spécificité du français par rapport à l’arabe.. Le cœur
étant représenté comme un espace creux enveloppé d’une membrane fine est alors
susceptible d’être gonflé, crevé. Cependant, si crever est axiologiquement négatif,
gonfler (303) dépend du contexte ; un cœur peut être gonflé de tendresse comme de
colère ou de terreur. La traduction lexicographique ne pose pas de problèmes dans
l’exemple (304) ; l’équivalent appartient en effet au même réseau sémantique (crever,
déchirer,…). Par contre, l’équivalent arabe de « gonfler » restreint le sens de
l’expression d’origine à la seule valeur positive. Pourquoi ? Le verbe (fm ) en
emploi concret a le sens de [m l, remplir] ; en emploi figuré (fm qalb X),
il figure dans une séquence figée qui signifie exclusivement enjôler, enchanter (El-
Munjid).
Par ailleurs, la sélectivité des attributs du cœur est marquée, dans les deux
langues par l’interaction entre l’homme et son environnement. L’exemple typique est
perçu dans l’influence des climats sur notre perception de nos sentiments et sur la
représentation de notre corps. Si en français, « chauffer, réchauffer le cœur » signifie
« donner de la force d’âme » et « faire chaud au cœur », « être, rendu ému,
réconforté », ces mêmes significations en arabe sont exprimées par « juliu ssadra
362
a humidifié cette pensée mon cœur enflammé ibidem,144
Cette pensée a apaisé le feu de mon cœur etc. trad .ibidem, 212
Dans les expressions en arabe, les concepts de « rosée » et d’ « humidité » s’opposent
à feu. Cette dimension n’est préservée dans aucune des expressions traduites en
français.
Enfin, les même signes peuvent bien porter des charges culturelles différentes.
Écœuré signifie en français « être dégoûté, en malaise » ; en arabe, il existe deux
dérivés de [ fu :d]
363
Mon cœur bouillonnait … de terreur et de haine à son endroit .trad. Ibidem, 14
En (309)-, le traducteur opte pour déchirer comme équivalent à [jtwzzu],
apparemment à partir de leur sème commun « être fragmenté ». Le caractère pluriel du
sujet (l’amour, la foi, la peur) semble à première vue être compatible avec le
sémantisme du verbe déchirer. Or, une analyse plus fine de la relation sujet-verbe
montre l’existence d’un élément qui ne peut pas faire partie de la classe des noms
appropriés pour être sujets de « déchirer le cœur » . En effet, si « l’amour déchire mon
cœur » et « la peur déchire mon cœur » sont parfaitement acceptables, « la foi déchire
mon cœur » ne l’est pas.
La même remarque vaut pour le cas en (310) ; le traducteur a conservé la structure
d’origine moyennant l’emploi de « bouillonnait de ». Or, là aussi, la dissociation du
complément pluriel ( de terreur et de haine) montre bien que si « mon cœur
bouillonnait de haine » est sémantiquement acceptable, « mon cœur bouillonnait de
terreur » ne l’est pas, parce que, c’est plutôt la froideur extrême qui serait appropriée à
une telle sensation. On dirait bien, une terreur qui glaçait le cœur
(311)- La terreur fit glacer mon cœur
et non :
(312)- *La terreur fit bouillonner mon cœur.
Au-delà des similitudes et des discordances, le parallélisme des champs et des réseaux
sémantiques entre les deux langues offre des possibilités multiples pour la
transposition d’une image, d’une expression, d’une perception particulière d’une
langue à l’autre. Le cœur peut bien être brisé, crevé, percé, arraché, déchiré ou encore
sous une autre langue entaillé, écrasé, émietté, la douleur humaine reste la même.
Par ailleurs, la manière dont une langue agence des mots refléterait une vision
particulière de la réalité. Michèle FOURMENT-BERNI CANINI, (2003, 90) constate,
dans ce sens, que l’acte de traduire révèle l’existence de certaines structures
linguistiques de l’une des deux langues qui témoignent d’une approche particulière de
la réalité de la part du locuteur dépassant la subjectivité et le niveau individuel pour
constituer « une préférence collective qui est confirmée par la fréquence d’emploi de
ces structures. Le choix préférentiel propre à toute une collectivité qui, parmi les
nombreuses possibilités d’expression, en privilégie certaines selon un mode particulier
364
d’appréhension du réel et selon un rapport presque codifié du moi aux autres […]
semble représenter un trait culturel digne d’intérêt ». De ce fait, une approche qui se
limite au cadre du système n’arrive pas à cerner cette vision dans toute son ampleur.
Une étude contrastive permettrait de révéler cette dimension. Ailleurs (Saïd, 2001 :
155), nous sommes parti d’une hypothèse qui suppose que la variation des moules
syntaxiques entre deux langues pourrait être un indice d’un découpage différent du réel
et, par conséquent, ces moules eux-mêmes pourraient être foyers d’une fixation
stéréotypique différente. L’arabe comme le français disposent de moules exprimant la
comparaison (comme / k) et le superlatif (plus + adj. / schème compact). Dans chaque
langue, la stéréotypie peut se fixer dans un moule comme dans l’autre.
365
Les résultats statistiques ont montré une différence très tranchée entre les deux
langues : en français, la lexicalisation des expressions avec comme domine ; en arabe,
c’est le schème rendant le superlatif qui est nettement favorisé par rapport à la
structure comparative 109 . Cette grammaticalisation différente dont l’explication
demeure inexpliquée traduit une différence des représentations.
109
-Nous avons procédé à un relevé statistique de la distribution des stéréotypes selon les deux moules dans
chaque langue à partir de deux dictionnaires unilingues (Dictionnaire des locutions et expressions, Les Usuels
du Robert, et la partie consacrée aux expressions et aux proverbes dans El-Munjid ) .
Les résultats : - en français, 610 exp. avec comme ; 5 avec le superlatif ;
- en arabe, 14 avec k ; 229 avec le schème superlatif.
366
Quatrième partie : le traitement
lexicographique de la stéréotypie
366
La description du traitement lexicographique de l’information stéréotypique se
situe dans le cadre général de la représentation du sens dans ce type particulier de
discours. Elle implique de ce fait trois axes :
- celui de la définition primaire (correspondant à l’acception plus ou moins
concrète, source des autres extensions de sens) ou relative à une acception quelconque
considérée du seul point de vue de sa matérialité en tant produit de l’acte définitoire ;
- celui de son rôle structurant au niveau du lexique (correspondant au
dégroupement polysémique et homonymique) ;
- et celui des séquences figées.
En même temps, cette description doit tenir compte de la spécificité du discours
lexicographique où la distribution de l’information selon les composants de l’article
dictionnairique (marqueurs, définitions, exemples, synonymes et antonymes) répond à
des besoins variés dépendant de l’unité considérée et de la stratégie suivie par le
lexicographe.
L’intérêt en est d’abord d’étudier l’articulation entre norme et stéréotypie, de
voir comment la première est définie par la seconde et de vérifier si toute stéréotypie,
inscrite dans le dictionnaire est toujours normative. Puis, en rapport avec cette dernière
problématique, il serait intéressant de décrire l’articulation entre la stéréotypie
structurant le lexique indépendamment de tout traitement et celle lexicographique
relevant de la dimension interne de ce discours.
Pour ce faire, nous avons choisi, pour la confection de notre corpus, les ouvrages
suivants :
- le Trésor de la Langue Française : s’adressant à un large public cultivé et
« principalement aux spécialistes qu’ils soient linguistes, historiens…ou philologues »
et conçu selon une démarche composite entre linguistique et philologie, ce dictionnaire
se présente comme trésor des mots usuels de la langue française (Cf. préface du TLF).
Centrés surtout sur des exemples essentiellement littéraires, ses traitements privilégient
la description du fonctionnement des unités de la langue dans le discours, d’où sa
particularité de représenter une certaine vision savante de la norme.
- Le Nouveau Petit Robert : visant un public plus large que constitue « tous les
usagers de la langue française » (Cf. présentation du PR), cet ouvrage se veut un
367
dictionnaire qui joue le rôle de « l’observateur objectif » dans le sens qu’il est plus
ouvert sur la variation des usages de la langue dans « l’univers culturel présent ». Son
intérêt réside de ce fait dans son appréhension plus souple de la norme.
- Le Petit Larousse : cet ouvrage s’adresse à « tous ceux qui veulent avoir sous
la main un dictionnaire pratique » (Cf. préface du PL). Il se caractérise par une vision
plus rigoureuse de la norme et par la condensation de ses définitions.
- Lexis : selon ses élaborateurs, ce dictionnaire est conçu dans une intention
didactique et vise « le large public d’enseignement » (Cf. préface de Lexis). Sa
particularité est de présenter les unités de la langue selon « les données les plus
récentes de la linguistiques » et particulièrement selon une approche théorique où le
regroupement et le dégroupement des significations ne suivent pas le critère
étymologique d’où son intérêt pour l’étude de certains aspects particuliers de la
structuration du lexique tels que la distinction entre faits polysémiques et faits
homonymiques.
- Le dictionnaire Hachette : s’inscrivant dans une perspective « volontairement
didactique », Hachette encyclopédique vise un public cible plus restreint, celui « des
apprenants de la langue française » d’où l’intérêt de son discours vulgarisant et
simplifié.
Il est à noter que nous avons puisé notre corpus à partir des versions
informatisées des trois premiers dictionnaires et papiers pour les deux autres.
368
Premier chapitre-Stéréotypie et définition
La définition lexicographique met en relation une certaine représentation des
objets du monde par le biais des concepts qui les définissent et une compétence
langagière propre aux élaborateurs d’un type particulier du discours qui se veut
normatif. Or, ces deux paramètres s’inscrivent naturellement dans la variation. De ce
fait, l’identification d’une présence stéréotypique qui présume la fixité et la
conventionnalité nécessite l’interrogation de plus d’une piste de recherche :
- les structures syntaxiques dans lesquelles sont versés les contenus définitoires
et les paraphrases des structures morphologiques régulières de certains mots
permettraient de saisir en partie la manière dont le lexicographe appréhende son
objet et révèleraient certains aspects cachés du phénomène stéréotypique ;
369
que l’idée d’une fixation des représentations dans la langue fait immédiatement appel,
quand il s’agit de décrire ces significations, à une métalangue spécifique. Et, comme la
stéréotypie ne se limite seulement pas au contenus sémantiques pour impliquer des
relations diverses entre catégories référentielles, déterminants et déterminés,
composants morphologiques, etc., il est normal qu’un discours sur la signification des
mots concernés par ces relations évoque ces implications relationnelles de la
stéréotypie de par des structures propres. Il serait donc intéressant d’étudier quelques
manifestations de cette dimension avant d’entamer la description des modalités et
enjeux de la fixation des contenus sémantiques(Cf. chapitres 2 et 3). Pour rendre
compte de ce fait, nous optons pour l’analyse d’exemples précis que nous considérons
comme importants de par leur récurrence et leur fonction. L’objectif est de montrer
dans quelle mesure la stéréotypie se déploie ou est révélée, négativement,
potentiellement ou explicitement, à partir d’une structure syntaxique ou
morphologique.
110
Dans certains dictionnaires, entre variété de N et N d’une variété, il y a une différence de focalisation : dans
le premier cas, l’accent est mis sur la partie appartenant au tout et dans le second sur le tout divisible en parties.
370
d’inclusion à un ensemble (Cf. annexe I.2). Type et catégorie suivis de de+ N
permettent d’atteindre différemment la même interprétation en distinguant à l’intérieur
du N déterminant un sous-ensemble envisagé sous l’angle de propriétés communes
(Cf. annexe I.3 a et b). La structure sorte de + N ne sort pas de ce cadre interprétatif.
Dans tous les exemples relevés à cette position aucun rapprochement approximatif
explicite n’est constaté. Toutefois, les procédés de restriction sémantique qu’elle
permet d’opérer à l’intérieur de la classe d’objets dénotée par le N déterminant, situent
explicitement ou implicitement le contenu définitoire par rapport à d’autres contenus
figurant au-delà de la définition de l’acception considérée. Certains de ces emplois ne
véhiculent aucune présence de stéréotypie. Il s’agit généralement :
- d’une spécification d’un contenu définitoire vague figurant sous l’entrée
relative au N déterminant (annexe I.4) ;
- d’une justification d’une acception se déployant à partir d’un sème commun
avec la définition primaire de la même entrée (annexe I.5) ;
- d’une introduction d’un hyperonyme général commun à des acceptions
renvoyant à plusieurs référents (annexe I.6).
Il existe cependant un autre emploi de cette structure (annexe I.7) qui obéit à la forme
canonique ci-indiquée (hyperonyme complexe + traits spécifiques) et n’introduit pas
un contenu stéréotypique propre (dans le sens d’un savoir typique, idéalisé et partagé)
mais qui inscrit négativement une partie du contenu définitoire par rapport à la
stéréotypicalité de traits correspondants figurant dans la définition du N déterminant.
Autrement dit, certains traits se présentent comme étant atypiques par rapport à ceux
relatifs au même type de propriété dans la définition du nom suivant sorte de. Ce
contraste peut concerner (annexe I.8) :
- le lieu : /eau douce/ pour anodonte et /les mers du globe/ pour moule
(anodonte étant défini comme sorte de moule) ;
- la fonction : /chauffer l’eau d’alun et le suif/ pour baignoire et /cuire les
aliments/ pour poêle (baignoire = sorte de poêle) ;
- la matière : /paille d’avoine/ pour avoine et /tube de bois ou de métal/ pour
flûte (avoine= sorte de flûte) ;
371
- la matière et la fonction : /en osier ou roseau, pêche/ pour bire et /souvent en
verre (PR), destiné à un liquide/ pour bouteille (bire= sorte de bouteille) ;
- la forme : /portée à bras d’hommes ou à dos de chameaux ou éléphants/ pour
palanquin et /comprenant quatre pieds/ pour chaise (palanquin= sorte de chaise) ;
- la constitution : /deux manches/ pour théorbe et /une manche/ pour luth
(théorbe= sorte de luth), etc..
Au niveau référentiel, tous les objets dénotés par ces dénominations sont des
instances périphériques de la catégorie 111 à laquelle réfère le N déterminant.
Autrement dit, les propriétés atypiques de ces objets ainsi définis confirment la
stéréotypicité (ou le caractère générique typifiant a priori selon Anscombre) des
propriétés considérées comme typiques pour la catégorie toute entière dénommée par
le N déterminant dans la structure considérée. Elles confirment en même temps l’idée
selon laquelle l’effet de prototypie est étroitement lié à la présence des traits
stéréotypiques dans la représentation de telles catégories.
Par ailleurs, il existe au moins un trait analytique ou pertinent (dans le cas des
artefacts) qui justifie l’appartenance de chacun de ces objets à la catégorie
correspondante :
- anodonte s’inclut dans la classe des moules par le trait /mollusque/ ;
- avoine, théorbe et palanquin appartiennent respectivement aux sous-
catégories de flûte, luth et chaise de par les traits relatifs à la fonction et à la forme
(instrument de musique ayant une certaine forme et produisant un certain type de son,
siège pour les personnes, etc.) ;
- bire s’apparente à la catégorie des bouteilles de par sa forme.
Au niveau sémantique, la discordance entre les critères d’appartenance à la
catégorie et l’atypicité des traits relatifs à ces occurrences inscrit la signification des
mots correspondants dans un certain flou. En effet, bien que sorte de + N admette une
interprétation exprimant l’inclusion de l’entité dénommée dans la classe des N (Cf.
annexe I.7 déf.1), l’idée d’approximation n’est pas totalement exclue de par l’atypicité
constatée.
111
C’est ce qui peut expliquer que la plupart des mots ne figurent que dans un seul dictionnaire (le TLF).
372
Dans certains cas, cette représentation sémantique du sens diffère quand la structure se
trouve employée en position non hyperonymique. Pour corymbe (sorte de parasol), le
flou provient d’un rapprochement par analogie qui ne se trouve pas renforcé par une
idée d’appartenance nette à la catégorie des parasols (annexe I.9).Toutefois, ce type
d’approximation n’a pas la même fonction que celle exprimée par des structures du
type voisin/proche de+ N qui visent la représentation effective de l’objet (achilienne,
par exemple) par son rapprochement à une occurrence prototypique (lyre dans ce cas)
d’une catégorie ou sous-catégorie distincte sur la base d’une similitude quelconque
(annexe I.10).
373
Cependant, cette régularité devient toute relative quand il s’agit de bases renvoyant à
des attitudes ou à des comportements humains. La variation peut dans ce cas toucher la
signification de la base, celle du préfixe ou les deux à la fois.
Dans le premier cas (annexe I.13), ce sont les contours du concept relatif à l’adjectif
ou au nom qui se trouvent concernés. Pour des mots comme anti-américaniste et anti-
américanisme, l’idée d’hostilité présente dans toutes les définitions porte sur les États-
Unis (PR et Hachette), sur le gouvernement et/ou la politique de ce pays (TLF) et sur
leur politique et leur civilisation (PL). cette différence traduit des stéréotypes (vrais ou
faux)ou des charges idéologiques dont les lexicographes rendent compte.
Dans le deuxième cas, c’est le sémantisme du préfixe qui est perçu différemment :
pour anti- par exemple, l’idée d’opposition présente une variation de degré allant du
simple fait de faire face à…, à la nuisance plus ou moins néfaste, à l’agressivité et la
violence. Les définitions des différents mots paraphrasant ce préfixe mettent l’accent
sur ces différences (annexes I.14 et I.15) :
- dans anti-évangélique, le préfixe est paraphrasé par contraire à ; ce qui revient
à un simple constat d’opposition ;
- dans anti-humaniste, la paraphrase va de la simple attitude d’esprit
(défavorable) à l’hostilité impliquant une éventuelle agressivité.
Cette différence de traitement se trouve parfois dans les définitions du même mot :
anti- dans antireligieux est paraphrasé par hostile (TLF et Hachette) et par opposé à
(PR et PL). D’autres expressions du type attitude de et animé/marqué par atténuent la
charge exprimée par le déterminant qui les suit en l’inscrivant dans la perspective
d’une attitude d’esprit plutôt que dans celle d’une action potentiellement nuisible ou
violente (Cf. anti-communiste, anti-communisme dans le Petit Robert et le Petit
Larousse).
Dans le dernier cas (annexe I.16), la variation circonscrit différemment les contours
des significations des deux composants. Dans le TLF et le Petit Larousse, les
définitions de contre-société paraphrasent la signification du préfixe respectivement
par une attitude de simple refus et une opposition active puisque fondée sur une
idéologie. Pour l’agent et l’objet de cette opposition, le TLF se sert du stéréotype de la
marginalité (collectivité en marge de la société) qui contraste avec les règles de la
374
société en général, alors que pour le Petit Larousse dont la formulation est plus neutre,
il s’agit d’un groupe s’opposant aux valeurs dominantes de leur société sur la base
d’une idéologie qui leur est propre.
Ce type de variation n’est pas lié à un flou sémantique émanant des
caractéristiques des entités définies mais plutôt d’une diversité de représentations
traduisant la polyphonie des points de vue observée dans une communauté linguistique
donnée et concernant des thèmes ou des centres d’intérêt fortement idéologicisés. En
l’absence de tout marquage circonscrivant le point de vue dans un univers de croyance
donné, le contenu définitoire relève, par l’effacement des énonciateurs particuliers
potentiels, le stéréotype au rang de la norme s’appuyant sur le consentement du
lexicographe et sur l’autorité du discours lexicographique en tant que discours
normatif.
Toutefois, il arrive qu’un lexicographe se place en observateur vis-à-vis d’une
certaine norme là où un autre l’incarne.
375
structure relative explicite ou elliptique du genre qui est…) couvrirait normalement les
emplois où l’association considérée serait vraie ou fausse, idéolectale ou
potentiellement stéréotypique. La structure qui est considéré comme convient, dans
l’un de ses emplois, à cette fin en ce qu’elle relativise l’information qualifiante.
Toutefois, il se peut qu’elle ne puisse servir à cadrer la totalité de la charge sémantique
de l’entité adjectivale, d’où l’intérêt de l’étudier en rapport avec la structure générale
de la définition. Son économie est également à définir par contraste aux autres
alternatives de formulation présentes dans d’autres dictionnaires.
L’économie de cette structure varie selon le fait qu’elle cadre la totalité de la
signification (annexe I.17) ou seulement une partie (annexe I.18). Dans la paraphrase
de sain du TLF, tout le contenu définitoire se trouve parenthétisé selon l’expression de
Husserl (Cf. le commentaire de Putnam, 1981-1984 : 39) dans le sens qu’il est attribué
à un univers de croyance collectif sans faire l’hypothèse de son existence réelle :
Sain : « Qui est considéré comme bon et normal, conforme à la raison, à un critère de
valeur ».
La structure fonctionne comme un patronyme unique pour l’ensemble des syntagmes
adjectivaux constituant la paraphrase synonymique du mot défini. De ce fait, la
relativisation touche tous les traits relatifs aux espaces conceptuels que pourrait
couvrir la signification.
Par contre, le contenu définitoire de féminin est rendu dans le même dictionnaire par
trois subordonnées relatives juxtaposées :
Féminin : « Qui appartient en propre à la femme, qui est considéré comme spécifique
de la femme, que l'on rencontre habituellement chez la femme ».
Chacune de ces relatives couvre une part de la signification de l’adjectif :
- la première renvoie avec certitude (au propre) à ce qui est inhérent au sexe
féminin. L’adhésion du lexicographe à ce contenu est ici complète ;
- la deuxième situe ce qui est attribué aux femmes dans un univers de croyance
collectif et indéfini. Être considéré comme permet d’inférer que le déterminé
indéterminé peut ne pas être réellement spécifique aux femmes mais simplement
considéré comme tel. Le lexicographe se place en simple rapporteur en dehors de cet
univers de croyance ;
376
- la dernière met l’accent par l’emploi de l’adverbe habituellement sur la
fréquence et la non-exclusivité de l’association entre le référent et la qualité qui le
qualifie. Autrement dit, elle infère qu’on peut ne pas rencontrer le fait considéré chez
certaines femmes. Le lien entre le déterminant et le déterminé est alors envisagé
comme étant extrinsèque.
Pour ce qui est de la divergence entre les dictionnaires, notre objectif ponctuel
est moins de les comparer (Cf. les chapitres suivants) mais de nous servir de cette
structure comme un repère permettant de saisir les formes que peut revêtir la
représentation de la norme. La distribution des différentes configurations de la
paraphrase synonymique dans chaque dictionnaire (annexes I.19 et I.20) révèle pour
l’échantillon de corpus étudié trois cas de figure :
- le premier cas est illustré par le traitement de féminin. Des trois parties de la
signification présentes dans le TLF, le Petit Robert opte pour la formulation absolue, là
où le Petit Larousse choisit exclusivement celle relativisée par le syntagme adjectival
considérés comme ;
- le second cas est représenté par incongru et majeur dont les paraphrases
scindent la signification en deux parties, l’une absolue et l’autre inscrite relativement à
un univers de croyance donné (Cf. incongru dans le PR et majeur dans le TLF) ou la
présentent uniquement dans la première perspective (Cf. le reste des définitions) ;
- le dernier cas correspond aux traitements réservés à intempestif, masculin et
sain dont les définitions dans chaque dictionnaire sont du premier ou du second type.
Il est à noter cependant que la deuxième définition de masculin dans le PR (« Qui a les
caractères de l'homme, tient de l'homme » ) relativise la première (« Propre à l'homme »)
sur le plan référentiel puisque des X n’appartenant pas à la catégorie des hommes
peuvent avoir leurs caractères. Mais, les deux définitions considérées ensemble ne
remettent nullement en cause l’adéquation entre le référent et la qualité exprimée par
l’adjectif, c’est-à-dire, le fait que ces caractères soient valables pour tous les hommes.
Par contre, dans la définition du TLF par exemple, la relativisation porte à la fois sur
l’appartenance catégorielle et sur l’adéquation de l’attribution de la qualité à la
catégorie dont il est question :
- « Qui est considéré comme caractéristique des hommes ».
377
Cette divergence traduit deux attitudes du lexicographe à l’égard de la norme. La
première, révélée par les paraphrases à formulation exclusivement absolue, est
univocisante dans le sens que l’assignation du sens dans son cadre conduit à une seule
interprétation possible. Le lexicographe s’identifie dans ce cas à la norme ou plutôt à
une certaine norme, la représente et l’exprime. La deuxième, exprimée par les
paraphrases nuancées ou simplement relativisantes, est plurivocisante puisqu’elle
oriente l’interprétation vers d’autres discours où l’inadéquation du référent au mot
devient possible même si l’interprétation glosée par la structure être considéré comme
est envisagée en tant qu’acception dominante.
Toutefois, faut-il signaler que le lexicographe se sert d’autres moyens que fournit la
langue pour relativiser l’information potentiellement stéréotypique. Dans la définition
de fou, le TLF emploie l’une des valeurs du conditionnel pour exprimer le simplement
probable :
- « Qui est dénué de bon sens, de prudence, qui va à l'encontre de ce qui serait
raisonnable ».
Pour le même mot, le Petit Larousse opte pour l’expression lexicalisée de cette nuance
par l’emploi du verbe apparaître :
- « Qui apparaît extravagant dans ses actes, ses paroles ».
Mais dans la définition lexicographique, la stéréotypie n’est pas simplement
convoquée à travers l’évocation d’entités ou de discours possibles ; elle constitue
plutôt une bonne part de son contenu sémantique.
378
Les objets du monde se caractérisent par leur extrême complexité (structure,
composition, etc.). La plupart des connaissances qui leur sont relatives sont de nature
encyclopédique et relèvent de plusieurs domaines de spécialité. Par conséquent, ce
savoir dont seule une partie est mise en circulation dans la communication, demeure
inaccessible à un locuteur unique. Du point de vue de la diversité des formes
d’existence des objets, on peut citer les cas suivants :
- le référent peut avoir des propriétés plus ou moins stables dont la saisie dépend
des formes de leur présence dans l’environnement et du degré de complexité de leur
structure ;
- le référent peut avoir un caractère évolutif. Ce fait se traduit par l’absence de
propriétés générales, communes à toutes les étapes du processus de son évolution et
directement perceptibles par le locuteur ordinaire ;
- le référent peut appartenir à une catégorie de niveau subordonnée et où les
propriétés spécifiques sont variées et parfois variables d’une instance idiosyncrasique à
une autre ;
- le référent peut être un artefact initialement destiné à un usage déterminé. Ses
caractéristiques physiques (forme, matière, etc.) varient selon les exigences de
commercialisation ; son usage varie également selon les habitudes de consommation
ou d’utilisation facteurs eux-mêmes variables.
Théoriquement, le lexicographe dispose pour un concept donné d’un ensemble
de traits de saillance perceptive, cognitive ou culturelle qui constitue le sens
conventionnel, communément associé au mot. Dans la pratique, l’ouvrage
lexicographique est fortement soumis à des contraintes matérielles (le dictionnaire
étant avant tout un produit de commerce) et idéologique (le dictionnaire étant un
discours où la subjectivité et la vision propre à l’élaborateur n’est pas exclue). En
même temps, il est souvent conçu et admis comme un discours normatif et prescriptif,
d’où l’intérêt d’étudier la concordance ou la discordance des traits sélectionnés pour
une définition donnée d’un dictionnaire à un autre et voir leur économie dans le cadre
de chaque définition et dans l’ensemble des définitions relatives à un item dans les
ouvrages étudiés.
379
Selon les problèmes spécifiques que présente chacun des types de référent
mentionnés ci-haut, le lexicographe sélectionne les traits qui lui semblent pertinents ou
rendant le mieux le « sens commun ». Dans l’ensemble la définition présente une
description de l’objet dans des conditions idéales, une description à forte charge
culturelle ou une description visant la représentation effective. Évidemment, les trois
optiques peuvent s’impliquer mutuellement et être réunies dans une même définition.
Toutefois, nous optons, ici, pour l’étude d’éléments de corpus (métaux, fruits, chiens
et récipients de cuisine) qui rendraient le mieux cette distinction d’intérêt strictement
méthodologique.
380
Mot TLF Petit Robert
381
d’un métal donné. Ils sont également étroitement liés aux conditions de l’expertise ;
d’où, outre l’écart qu’ils présentent par rapport à l’état natif des métaux, la possibilité
de leur variation. Le strontium, par exemple, isolé dans certaines conditions a la
couleur blanc-argent ; mis en contact avec l’air, il devient jaune. A part Le TLF qui
présente cette information complète (Cf. annexe I.23.), les autres dictionnaires
choisissent l’une ou l’autre des deux couleurs. De même la malléabilité va de pair
normalement avec la ductilité, corrélation qu’on peut vérifier dans la plupart des
définitions (cassant/dur, ductile : malléable ; Cf. annexe I.24 colonnes 4 et 5.). Ceci
n’empêche pas les dictionnaires pour un métal tel que palladium (annexe I.23.) d’opter
pour le trait /malléable/ (TLF), /dur/ (Petit Larousse) et /très dur/ (Lexis et Hachette).
Toutefois, ni la saisie idéalisée de ces traits, ni leur variation ne suffisent à en faire
des stéréotypes. Ceux-ci dépendent simultanément de la saillance perceptive ou
cognitive de ces propriétés, du degré de présence du métal dans le vécu quotidien, de
son importance et de son usage courant. Seuls ces facteurs, une fois réunis, peuvent
participer à la conventionnalité, pierre angulaire de toute représentation stéréotypique.
Or, pour les 50 métaux étudiés, ces paramètres sont présents à des degrés variés. Le
trait le plus perceptible (la couleur) est enregistré, au moins par un dictionnaire, pour
45 métaux ; l’altérabilité, trait moins perceptible, seulement pour 14 (Annexe I.24.).
Par ailleurs, le plus grand regroupement de propriétés dans l’ensemble des
dictionnaires est perçu avec or et argent (qui cumulent chacun 3 propriétés ou plus
dans toutes les définitions) et avec platine, fer, chrome, étain et aluminium cumulant
chacun deux propriétés ou plus dans chaque définition. Pour le reste des métaux, les
traits varient du cuivre cumulant entre une (Petit Larousse et Hachette) et trois
propriétés (TLF, Petit Robert et Lexis) aux francium, gadolinium, lutécium et terbium
pour lesquels aucune propriété du genre n’est mentionnée.
Cette disproportionnalité reflète d’une certaine manière la typicité de ces traits
selon le degré de présence du métal en question dans l’usage quotidien et dans
l’environnement immédiat des hommes. C’est ce que confirmerait le pourcentage que
représente le nombre des traits cumulés par chacun de ces sept métaux par rapport à la
382
totalité des propriétés du genre dans chaque dictionnaire 112 (annexe I.25). Sur
cinquante métaux, les traits relatifs à ce groupe représentent 30,52 % dans le TLF,
25,75% dans Le Petit Robert, 34,48% dans Le Petit Larousse, 34,92% dans Lexis et
57,14% dans Hachette 113 (annexe I.26).
Les référents évolutifs conviendraient mieux à une définition stéréotypique puisque
la saisie des propriétés s’effectue au stade le plus perceptiblement et cognitivement
saillant et qui correspond à celui de la maturation, du mûrissement ou de la
complétude.
La langue a souvent des dénominations de concepts relatifs à chaque stade
d’évolution mais tel n’est toujours pas le cas. L’exemple des fruits en est un. La
définition lexicographique suit dans ce cas étroitement la représentation ordinaire
qu’en font les locuteurs. Les propriétés sélectionnées concernent presque
exclusivement les aspects perceptibles (couleur, forme, goût, usage, etc.). La
stéréotypie trouve ici sa source dans deux faits principaux : la description du fruit à un
moment donné de son évolution et la sélection des traits communs parmi une
multitude de variétés. Le premier fait apparaît avec les propriétés correspondant
presque toujours à l’état de maturité du fruit. Tous les aspects décrits (couleur, goût,
forme, etc.), non seulement s’écartent des cas atypiques, mais ne s’appliquent pas au
jeune fruit vert. La mention du processus de croissance est également absente de toutes
les définitions à deux exceptions près :
- celle de banane dont la description de la couleur 114 en rend compte dans le TLF et
Le Petit Larousse :
112
Le nombre élevé des propriétés enregistrées par le TLF s’expliquerait par son volume et sa vocation littéraire,
le nombre relativement réduit dans Hachette s’expliquerait par le fait qu’il est à la fois un dictionnaire illustré
des noms communs et des noms propres. C’est ce qui donne de l’importance au 57,14% cumulé par sept métaux
dans un dictionnaire caractérisé par les définitions les plus brèves. Pour les autres, l’écart n’est pas très
significatif si ce n’est le fait qu’ils correspondent mieux à la compétence du locuteur moyen.
113
Si l’on ajoute les propriétés attribuées au cuivre et au plomb, les neuf métaux les plus connus cumulent
36,84% des propriétés dans le TLF, 33, 33% dans Le Petit Robert, 37,93 dans Le Petit Larousse, 42,85% dans
Lexis et 62,85 dans Hachette.
114
La raison serait que ce fruit, s’abimant très vite une fois mûr, est cueilli et commercialisé avant d’atteindre la
maturité complète.
383
- « à peau jaune lorsqu’il est mûr » (TLF)
- « à peau jaune à maturité » (Le Petit Larousse) ;
- celle de l’amande dans le TLF :
- « enfermé dans une coque à écale de couleur verte ».
Le choix est justifié par le fait que les amandes se consomment fraîches ou séchées
(laquelle distinction est présente dans Le Petit Robert sous deux exemples : amandes
fraîches, amandes sèches, Cf. annexe I.27).
Le second fait est manifeste à travers le choix des traits parmi les variétés
prototypiques. Cette prototypicalité se présente comme un effet du caractère stéréotypé
de certains traits qui correspondent, un à un, à une variété et non à une autre. La
diversité des variétés emprunteuses de ces propriétés entraîne de légères différences
dans le traitement lexicographique. Pour rendre compte de cette variation, nous nous
limitons à la description de trois aspects définitoires : la couleur, la forme et le goût.
Grosso modo, les différences vont de la simple expression du degré, de la nuance et
de la subjectivité, à la sélection différée de traits typiques, jusqu’à la discordance plus
ou moins nette (annexe I.28).
L’expression de la couleur rend le mieux compte de la variation du premier type.
La teinte du kiwi est catégorisée selon des nuances très proches : « brun » (TLF),
« gris-marron » (PR) et « marron » (PL. et Lexis) ; « le rose soutenu » du framboise
dans le TLF devient « rouge » dans Le Petit Robert et le « jaune très pâle »
s’apparente au « blanc ». Au « rose » de merise dans ce dernier dictionnaire
correspond le « rouge » dans le TLF ; le « jaune-rosé » de l’abricot dans Hachette se
nuance distinctement du « jaune-orangé » « dans tous les autres dictionnaires. En
outre, la nuance devient approximation, quand il s’agit de la forme : l’ananas est de
« forme conique » (TLF) ou simplement « oblongue » (PR) ; la grenade ressemble par
sa forme et sa taille à la pomme (TLF, Petit Larousse) ou à l’orange (PR).
L’approximation devient gradable avec le goût acidulé de l’alise (TLF, PL, Lexis et
Hachette) ou légèrement acidulé (PR) 115 .
115
La pêche a un noyau « dur » (PL, Lexis, Hachette) ou « très dur » (TLF et PR).
384
Cette fluctuation minime trace les limites de la perception plus qu’elle ne reflète
une différence de variétés. Elle rejoint en quelque sorte l’expression de la subjectivité
plus ou moins partagée. Pour alise, par exemple, là où Lexis et Hachette optent pour
un terme neutre (/acidulé/), Le Petit Robert le modalise par l’ajout de « légèrement »
alors que Le Petit Larousse et le TLF emploient des adjectifs plus axiologiques
(respectivement « aigrelet mais agréable » / « agréable ») ; la pêche est sucrée dans
Hachette et à chair savoureuse dans le TLF et Lexis.
Toutes ces variations n’empêchent pas toutefois les différentes descriptions d’être
toutes présentes dans une même variété.
La sélection différée des traits revêt d’un dictionnaire à un autre une forme absolue
ou modalisée. Dans le premier cas, le trait privilégié est relatif à une variété
prototypique (merise : « fruit noir » dans Le Petit Larousse ; ananas : « jaune –
orangé » (TLF) et « brun rouge » (PR)) ou deux (melon : « Chair orangée ou vert
clair » (PR et PL), « jaunâtre ou orangée » (Hachette) et « jaunâtre ou rougeâtre »
(Lexis)). Il existe cependant d’autres variétés ne présentant pas ces propriétés. L’écart
est souvent apparent dans l’ensemble des définitions (Cf. annexe I.28 spécialement,
merise (TLF et PR) ou encore l’exemple du melon d’hiver ou melon d’Espagne à la
chair blanche dans Le Petit Robert).
Dans le second cas, le trait sélectionné est relatif à une variété prototypique mais
présentée d’une manière modalisée avec l’emploi de parfois (framboise (TLF et Petit
Robert) ; cerise (PR)), (le plus) généralement (framboise, Hachette ; cerise, TLF ;
pomme, TLF), le plus souvent (melon, TLF) ; cerise, PR) et ordinairement (cerise,
Lexis ; Cf. le paragraphe suivant pour l’étude de la présence de la modalisation selon
les dictionnaires).
La discordance apparaît surtout avec l’expression du goût. Deux exemples de notre
corpus l’illustrent :
- Pour le TLF, l’ananas est « estimé pour sa chair et son suc acidulé
rafraîchissant », alors que sa pulpe est « sucrée et très parfumée » (PR) ou « sucrée et
savoureuse » (PL). Si le fait d’être acidulé est positivement modalisé par l’expression
« être estimé », cette modalisation ne réduit pas l’écart avec « sucré » dans les deux
autres dictionnaires. La différence relèverait vraisemblablement (comme dans le cas de
385
la couleur pour banane) du fait que la cueillette et la commercialisation du fruit se font
juste avant la maturité totale. Elle correspondrait donc à deux saisies de deux états se
succédant dans le temps.
- La merise est « légèrement acide » dans le TLF ou « suret » dans Le Petit
Larousse alors qu’elle est d’un goût amer » dans Le Petit Robert ou vaguement
« âpre » dans la définition de Lexis. L’étymologie du mot mentionnée dans Hachette
nous informe qu’il provient du latin amarus « amer » et de « cerise ».
Toutefois, ce qui limite la portée de toutes ces variations, c’est le cadre idéal de la
description qui préserve, par la fixation du référent à un stade d’évolution, la vision
stéréotypique et maintient l’effet prototypique de l’ensemble.
Une autre source de stéréotypie réside non dans les propriétés physiques apparentes
mais dans le trait classifieur lui-même.
Dans la plupart des dictionnaires, figue est enregistré comme étant le fruit du
figuier. Le Petit Robert précise entre parenthèses que ce « n’est pas un fruit au sens
botanique mais un réceptacle charnu portant les fruits ». Le Petit Larousse atténue
l’écart en précisant que ce fruit est « formé par toute l’inflorescence qui devient charnu
après la fécondation ».
Ici la catégorisation scientifique se distingue nettement de la catégorisation
linguistique. Du point de vue de l’extension, le genre inclut logiquement l’espèce.
Mais, dans ce cas de catégorisation, ce rapport est en quelque sorte inversé.
Analytiquement, l’hyperonyme ne couvre qu’une partie de l’hyponyme puisque la
figue est l’ensemble des fruits et du réceptacle. Linguistiquement, le tout est
suffisamment solidaire et perceptiblement saillant pour être indissociable 116 .
Un cas quasi-analogue est perçu avec les définitions de bâton. Tous les
dictionnaires font figurer « morceau de bois » comme hyperonyme. Or, en extension
les occurrences de cet objet dépassent le cadre prescrit par « morceau de bois » : un
bâton peut bien être en fer ou en plastique durcifié, etc 117 . Cette sélection pourrait être
expliquée par le cumul de deux facteurs :
116
Nous avons là une preuve de plus que le marqueur sémantique de Putnam n’est pas aussi différent du
stéréotype.
117
Exemples de Hugo et le Clézio.
386
- Le premier est d’ordre cognitif. Le bois est la matière prototypique la plus
répandue et la plus fréquemment utilisée comme bâton quand il a une certaine forme et
servant à certains usages. De plus, l’existence d’autres dénominations (tige, verge,
barre) partageant avec bâton la plupart des sèmes spécifiques sinon la totalité à savoir
être « rond », « allongé », etc., entraîne une certaine difficulté à fixer la référence et
justifie le recours au trait / bois/ comme distinctif par rapport à /fer/ par exemple qui
figure dans l’hyperonyme de barre ;
- Le second est étymologique : bâton provient d’un dérivé du mot latin bastum (ce
qui supporte) : basto, appliqué à « une tige de bois utilisée comme soutien »
(Dictionnaire Étymologique du français, Les Usuels du Robert).
Enfin, le trait générique classifieur peut traduire une taxinomie culturelle (Cf. ci-
dessous les hyperonymes terrier, lévrier, berger figurant dans les définitions de races
de chien ; annexe I.29) que nous proposons d’étudier en relation avec le second type
de référents mentionnés ci-haut.
387
- Samoyède : « de couleur blanche ou crème » (TLF)
« blanche » (PR et Hachette)
- Danois : « de couleurs variées » (TLF)
« …robe rose clair parfois tachetée ou sombre » (Hachette).
Cette représentation, variable et non forcément partagée en dehors du cercle des
connaisseurs, donne, de prime abord, raison aux tenants de la théorie du prototype
pour qui, à ce niveau, il n’y a pas de catégorisation prototypique. Cependant, pour
certaines catégories ayant une grande proximité avec l’homme, cette « défaillance »
définitoire des traits physiques est compensée par le recours à des traits culturels qui
prennent en charge ce rôle et deviennent la source d’une stéréotypie typifiante.
Pour les chiens, l’origine et la fonction semblent être de ce type de traits. Les
dictionnaires se servent entre autres de ces deux aspects pour catégoriser les
différentes races (annexe I.30 ) :
- Bull-dogue : « variété de dogue de race anglaise » (TLF)
- Bouledogue : « variété de dogue de race française » (TLF)
- Épagneul : « dont il existe différentes races de chasse et d’agrément » (PL).
Or ces deux types de propriété n’ont rien d’analytique.
Pour l’origine, la variation du traitement lexicographique peut aller de la
spécification (Briard : de la Brie (PR) / français (PL)), à la différence explicite
(épagneul breton, picard (TLF), breton (PR), « originaire d’Espagne » (Lexis))
(annexe I.31). Cette sélection différée résulte en partie de l’imprécision et de
l’incertitude qui caractérise ce critère de classification.
L’encyclopédie Encarta 2005 en rend compte dans ces exemples :
- le bouledogue américain « originaire des États Unis n’est pas reconnu par la
fédération cynologique internationale » ;
-« les origines du dogue allemand sont incertaines »
- le bouledogue français descend probablement du bouledogue anglais »,
- le griffon bruxellois : « descend vraisemblablement d’un chien utilisé au XVII
siècle par les paysans belges ».
et :
danois : « origine sujette à caution » (TLF).
388
Dans le cas de la fonction (annexe I.32), la différence de sélection implique dans
l’ensemble :
- des spécifications :
- braque : « …de chasse » (TLF, PR et Hachette)
« d’arrêt » (PL), etc.
- des polyvalences :
- Terre-neuve : « de garde, réputé pour sa disposition à se jeter à l’eau pour
sauver les personnes en difficulté » (TLF)
« de sauvetage » (PL et Lexis) etc.
- des changements :
- Skye–terrier : « terrier devenu de nos jours chien d’agrément » (TLF)
« servant surtout de chien d’agrément » (PR)
« devenu maintenant race d’agrément » (Lexis)
« terrier » (Hachette).
- enfin, des différences nettes :
- chow – chow : « souvent utilisé comme chien d’aveugle par suite de son sens
de l’orientation très prononcé » (TLF)
« de compagnie » (PR et PL)
« chiens originaires de chine où on les utilise pour leur travail et
où ils sont consommés après engraissement » (Lexis).
Ces dernières différences s’expliquent par le fait que la destination d’un type de chien
à une fonction donnée est d’abord le produit d’un apprentissage qui tient compte d’une
certaine disposition de caractère. Un chien est dressé pour répondre à tel usage ou tel
autre, d’où le changement et la polyvalence de ses emplois :
- « Ou bien il torturait affectueusement un jeune berger allemand, le futur chien de
garde » Lainé Pascal, La Dentellière, 1974, p. 1974 p57, II (Frantext)
- « Un sanglier surgit et prend la fuite : un lévrier, le gagnant de vitesse, le saisit par
l’oreille » Faral Edmond, La vie quotidienne au temps de Saint-Louis, 1942, p. 36. (Frantext).
- « C’était un griffon briard Pyrénées mâtiné chien de traîneau, tout noir » Rochefort
Christiane, Encore heureux qu’on va vers l’été, 1975, p. 121 (Frantext).
389
Le caractère stéréotypique variable et relatif de ces traits ne les empêche pas,
cependant, d’être distinctifs quand les propriétés physiques s’accordent ou quand elles
sont si diversifiées qu’elles ne peuvent plus être définitoires.
Dans le premier cas, cette pertinence est vérifiée dans le cadre du même
dictionnaire (annexe I.33) :
Hachette : Skye–terrier : « chien terrier à longs poils »
Griffon : « chien de chasse ou d’agrément à longs poils »
Grœnendael : « chien de berger belge à longs poils ».
En outre, la lecture croisée des différents dictionnaires montre que grâce à ce
type de traits, on évite d’attribuer la même définition à deux entités différentes (annexe
I.34 a) :
Lexis : airedale : « race de terriers anglais à poil dur »
TLF : scotch–terrier : « chien terrier de race écossaise à poil dur ».
Les seules fois où deux définitions concordent dans un (PL) ou plusieurs
ouvrages (PL, TLF, Hachette et Lexis), il s’agit vraisemblablement non pas de
dénominations de races mais des variations dénominatives de registre de langue
(annexe I.34-b). En effet, mâtin est marqué dans Le Petit Robert par l’indicateur
« vieux » et molosse par « littéraire ».
Dans le second cas, la fonction et / ou l’origine constituent la seule matière
définitoire (annexe I.35) :
Petit Larousse - bull-terrier : « chien d’origine anglais, bon chasseur de rats »
- pointer : « chien d’arrêt anglais ».
La représentation culturelle est ici non seulement discriminatoire mais a également un
rôle classifieur de par le recours à ces deux aspects dans la distinction des races et des
variétés. Vu sous l’angle de la variation de ces traits, de telles représentations reposent
sur une catégorisation prototypique due au caractère stéréotypé de ces propriétés. Cette
catégorisation est manifeste, entre autres, à travers des effets dont certains sont fixés
dans la langue sous forme de locutions ou simplement récurrents dans le discours
comme en témoignent les exemples avancés par les lexicographes. Le prototype peut :
- se déployer au sein d’une même catégorie référentielle : dans la classe
des bergers, c’est le berger allemand qui est cité en exemple dans la plupart des
390
dictionnaires (PR, TLF, PL et Hachette). Les instances prototypiques peuvent toutefois
être plusieurs (dogue anglais (PR) / dogue allemand (TLF), etc. ) ;
- choisir un type de chiens comme meilleur exemplaire d’une fonction :
-Le fox – terrier est un excellent ratier (PR)
- Les terriers sont de bons chiens de garde (PR)
- Loc – C’est un vrai saint–bernard (TLF) ; se dit « d’une personne
toujours prête à se dévouer à prêter secours aux autres »
- Flair de limier
- concerner un trait de caractère ou une qualité :
-Suivre quelqu’un comme un caniche (PR), ce trait est considéré par le TLF
comme définitoire,
-Fidèle, féroce, vigoureux comme un dogue (TLF),
-Aimable comme un bouledogue hargneux (PR)
- Humeur de dogue (TLF)
Certains de ces effets sont inclus dans le corps des définitions :
- Saint–bernard : - « dont les qualités de sauveteur sont légendaires » (TLF)
- Terre-neuve : « réputé par sa disposition à se jeter à l’eau pour sauver les
personnes en difficulté » (TLF)
- Bull–terrier : « également connu comme ratier » (TLF).
Les noms d’artefacts admettent encore moins une définition analytique. Les
occurrences auxquelles ils référent dans la réalité présentent une grande diversité et
une variation qui touchent la quasi–totalité de leurs propriétés envisageables.
391
l’analyse de ces définitions, en trois étapes : nous démontrerons, d’abord, à partir de
l’ensemble du corpus choisi (annexe I.36) la variabilité de ces aspects ; puis, à partir
de deux « familles » de récipients (récipients servant à boire et récipients servant à
transporter les liquides), nous montrerons comment chaque dictionnaire singularise
chaque objet par rapport à ses semblables. Enfin, nous ferons une lecture croisée de
toutes les synthèses obtenues pour délimiter et évaluer les propriétés communes
enregistrées. L’objectif final est de juger leur portée réelle et leur économie dans la
définition lexicographique.
Pour ce qui est de la variation, à commencer par la matière, celle-ci varie selon
le type du produit ou de l’usage auquel l’objet est destiné. L’usage d’une matière
donnée dans la fabrication d’un objet donné n’est plus exclusif. La profusion des
matériaux, la diversité des profils des usages et les contraintes de commercialisation en
général entraînent incessamment des nouveautés sur la marché. Les dictionnaires
enregistrent à des degrés variés (Cf. la comparaison détaillée au paragraphe 3) cette
non-exclusivité de la matière employée dans un produit donné :
Ex : Bouteille : « souvent en verre » (TLF)
Cruche : « souvent en grès » (PR), etc. (Cf. annexe I.37).
Même dans le cas où un trait ferait l’unanimité des dictionnaires, il n’y a aucune
garantie qu’il soit exclusif : pour « timbale » par exemple, le trait / métallique / est
présent dans toutes les définitions. Or, dans les faits comme dans les textes, on peut
toujours trouver une occurrence qui infirme cet accord :
- « Sans bouger le corps, je cherche de la main, sur le sol, la bouteille de Coca-Cola
mise au frais dans une timbale en carton remplie de glace pilée… » Vers l’Ouest Mohrt
Michel, 1988, p 216 (FRANTEXT).
La forme n’est pas moins sujette à la variation. La fantaisie des fabricants
répond entre autres à la diversité des goûts et des consommateurs cibles. Un gobelet
« est généralement sans pied, ni anse » (PL) ; ceci dit, il peut en avoir un :
- « … s’écria le jeune roi en levant le gobelet par le pied ». Honoré de Balzac – sur
Catherine de Médicés, 1846, 371 (1ère partie, FRANTEXT).
Une bouteille a généralement un long goulot étroit (TLF), mais une bouteille amputé
du goulot n’en demeure pas moins une :
392
- « Plus haut, il aperçut une bouteille de cognac sans goulot, bouchée avec un tampon
de linga ». Émile Zola, La conquête des Plassans, 1847, P. 1193 (Frantext).
Enfin, l’usage, l’élément définitoire censé être le plus stable, n’est pas exempt
de variation. Dans les faits, les usagers peuvent bien utiliser un l’objet à des fins autres
que celles auxquelles il est destiné. Une bouilloire sert « à bouillir de l’eau » (PR, PL,
Lexis et Hachette) ou un autre liquide (TLF). L’usage peut s’en écarter :
-« Je procède à mes ablutions à l’aide d’une bouilloire d’eau fraîche que l’on nous a
apportée » Bâ Amadou Hampâté, Oui, mon commandant ! 1991, P. 46, Le voyage, la vie
s’appelle « lâcher » ! (Frantext).
-« Nil alla dans la cuisine, mit la bouilloire sur le réchaud, prépara le thé ». Matzneff
Gabriel, Ivre du vin perdu, 1981, P. 229/ 13 (Frantext).
Cette variation met les lexicographes en difficulté quand il s’agit d’individuer des
objets très proches de par leur fonction, leur forme et la matière dont ils sont faits.
Cette difficulté apparaît dans les différences de description et de focalisation
constatées dans les différents dictionnaires. Deux exemples illustrent ce constat : les
récipients partageant le trait / à boire / et ceux présentés dans le TLF et Lexis sous
l’hyperonyme bouteille.
Le premier ensemble comporte verre, tasse, gobelet, timbale, quart et godet (Cf.
annexe I.38). Pour verre, compte tenu de la discordance sur la matière, les traits
communs à tous les dictionnaires sont / récipient /, /à boire/. Tasse a en plus / /Petit / et
/ avec anse ou oreilles/. Hormis les traits objets de variation ou de modalisation
(ordinairement, généralement), de gobelet sont retenus les mêmes traits que verre.
Timbale se distingue par /métallique/ et /cylindrique/. Dans quart sont pertinents les
traits /récipient/, /à boire/ et à un degré moindre / avec anse/. Ses traits proprement
spécifiques font l’objet d’une modalisation (/25 cl/, généralement :TLF, environ : PR
et Hachette ; / utilisé par l’armée/, surtout :TLF, ou en camping :Hachette, absent :PL
et Lexis). Enfin, godet se limite à /petit/ /récipient/ et /à boire/. En somme, les
définitions minimales communes sont :
- verre : récipient à boire
- tasse : petit récipient à boire avec anse ou oreilles
- gobelet : récipient à boire
- timbale : récipient à boire en métal
393
- quart : récipient à boire en métal, avec anse
- godet : petit récipient à boire
Si l’on retient que le trait /avec anse/ est partagé par tasse et quart et que le trait /en
métal/, typique pour timbale peut être invalidé (Cf. l’exemple ci-haut : timbale en
carton), on se rend compte que les définitions minimales s’équivalent ou presque (Il ne
reste que la différence de taille).
Le second ensemble comporte, en plus de bouteille, bonbonne, jacqueline, tourie et
dame-jeanne.
Le TLF catégorise les quatre récipients 118 comme des variétés de bouteille (annexe
I.39-a). Le Petit Robert catégorise bonbonne comme /récipient/, tourie comme
/bouteille /ou /bonbonne / et jacqueline comme / cruche/ (annexe I.39-b). La
comparaison des sémèmes révèle un rapport de restriction de sens entre bouteille et
bonbonne et cruche. Pour Le Petit Larousse (annexe I.39 c), bonbonne, jacqueline et
dame-jeanne sont des bouteilles ; tourie est un récipient. Lexis catégorise tous les
récipients comme / bouteille/ (Cf. annexe I.39-d). Enfin, Hachette catégorise bonbonne
et dame-jeanne comme /bouteille/, tourie comme /bonbonne/ et jacqueline est
simplement non enregistrée (annexe I.39 c).
Si l’on élimine les traits explicitement ou implicitement redondants, la comparaison
de toutes les définitions relatives à chaque récipient révèle les faits suivants (annexe
I.40) :
- l’existence de traits présentant une différence de modalisation, ce qui fait d’eux,
pour le plus, des propriétés typiques mais analytiquement non pertinentes. Sont de ce
genre :
- pour bonbonne :
- entourée d’osier (TLF) / souvent protégée par l’osier ou un récipient en
métal (Lexis) / absence (PR, PL et Hachette) ;
- utilisée notamment pour la conservation de l’alcool (TLF) / servant à
garder et à transporter de l’huile, des acides, etc. (Hachette).
- Pansue (PR) / souvent de forme renflée (PL)
118
On pourrait ajouter également canette, carafe, chopine et fiole, tous figurant sous l’hyperonyme « bouteille »
dans le même dictionnaire.
394
- En verre, en grès (Lexis) / en verre, en grès ou parfois en métal (TLF)
- pour dame-jeanne :
- de verre, de terre, de grès, etc. (TLF) / de grès ou de verre (PL, Lexis et
Hachette) ;
- souvent enveloppée d’osier (TLF) / souvent clissée (PL) / souvent cachée
d’osier (Hachette) ;
- pour tourie :
- de verre ou de grès (TLF, Lexis, Hachette) / exclusivement fabriqué de
grès (PL)
- servant au transport de certains liquides (alcools, acides etc.), (TLF) /
transport des acides (PR) / liquides caustiques (Lexis) / transporter de
l’huile, des acides etc. (Hachette).
- l’existence d’indications qui sont par nature approximatives et non précises :
- pour jacqueline :
- en usage dans le Nord de la France et dans les Flandres ;
- pour dame-jeanne :
- d’une contenance entre 20 et 50 litres
- Enfin, des traits qui ne sont mentionnés que par un seul dictionnaire ; donc leur
saillance est sujette à caution :
- pour bonbonne : /avoir un col court/ (PR) :
- pour jacqueline : / avoir une anse / (PR ; propriété héritée de cruche) ;
- pour dame-jeanne : / pansue, à col court / (PR).
En somme, pour chaque récipient, les traits communs à tous les dictionnaires sont :
- Bonbonne : grosse bouteille ;
- Jacqueline : bouteille en grès à large panse
- Dame-jeanne : grosse bouteille
- Tourie : grosse bouteille entourée d’osier.
Si l’on retient que les traits / en grès /, à large panse / et /entourée d’osier / ne sont pas
exclusifs respectivement à jacqueline (les deux premiers) et à tourie (le troisième), les
définitions minimales se limitent à « (grosse) bouteille » pour tous les récipients.
395
Dans les deux cas, nous constatons que si les traits en quelque sorte analytiques
(/récipient à boire/ et /bouteille/) sont distinctifs par rapport à d’autres récipients (pot
et broc par exemple), ils ne le sont pas à l’intérieur des deux groupes de leurs
dénominations respectives. De ce fait, la représentation de chacun de ces objets
véhicule des traits non universels mais typiques auxquels on attribue une présomption
de pertinence et de pouvoir discriminatoire. Sans cette présomption, l’usage de ces
dénominations dans le discours devient impossible puisque leur différence n’est plus
justifiée.
Le balayage successif, dans le dernier exemple, révèle également que ces traits
présentent des degrés de typicité (si l’on se fie à la fréquence de l’enregistrement dans
les dictionnaires comme un indice possible de cette gradabilité). /Être entouré d’osier /
est plus typique dans tourie que dans dame- jeanne ; / en grès / est plus typique dans
jacqueline que dans bonbonne ou dame-jeanne. Ainsi, la représentation effective se
traduit, au niveau de l’organisation interne du sens, par le recours à des traits
potentiellement distinctifs et, au niveau de la catégorie référentielle, par la
consécration d’images prototypiques aux objets. Ces deux niveaux sont corrélés. Les
traits sont sélectionnés parmi les caractéristiques des instances prototypiques, de par
leur fréquence ou leur présomption de fréquence (ceci concerne la plupart des
échantillons étudiés : fruits, chiens, récipients) et donnent en même temps l’effet de
prototypie appréhendé au niveau du concept ou de la représentation.
Les propriétés non universelles les plus typiques ou les traits socialement codés
sont une composante incontournable du sens. Leur économie dans la signification - du
moins celle rendue par les dictionnaires-, compte plus que celle de la plupart des
propriétés analytiques ou universelles qui ne sont identifiées que dans le cercle
restreint des domaines de spécialité. Le nombre ou le poids atomiques d’un métal, la
structure génétique d’un fruit ou d’un animal n’est de toute évidence pas la part du
sens qui est mise en circulation dans le discours. Si les lexicographes y puisent donc
une grande part de la matière définitoire des concepts, c’est parce qu’ils n’ont souvent
pas d’autres choix. Certes, la définition lexicographique est un discours de type
particulier contraint dans sa visée (aspect didactique) et dans sa forme (contrainte de
volume) mais, ce sont justement ces deux facteurs qui concourent au choix des traits
396
les plus saillants, les plus typiques et les plus communément impliqués dans la
circulation du sens. Une telle idée demande à être vérifiée en confrontant les stratégies
définitoires des différents dictionnaires.
397
définitoire ne s’effectuerait pas directement à partir de l’infinité supposée des traits
relatifs à un item donné ; ceux-ci se regrouperaient pour constituer des faisceaux de
propriétés rendant chacun un aspect (fonction, forme) qui, lui-même est plus ou moins
saillant et donc plus ou moins susceptible d’être présent dans le contenu sémantique
communément attribué à un mot. L’existence possible de constantes relatives à la
deuxième hypothèse vérifierait en quelque sorte la première puisque la typicité d’un
trait ne serait appréhendée qu’à travers la saillance de l’aspect auquel s’apparente ce
trait.
Ainsi, il y aurait, pour un concept donné, des traits plus typiques que d’autres,
donc faisant l’objet d’un quasi-accord entre les différents dictionnaires. D’autres
seraient plus ou moins typiques et faisant l’objet d’un accord partiel ou relatif. Enfin,
certains traits seraient peu typiques et ne sont mentionnés que par un seul dictionnaire.
De même, il y aurait, sur l’ensemble des traits des aspects plus saillants auxquels
s’apparenteraient les traits du premier type. D’autres seraient plus ou moins saillants
intégrant les traits du second type et des aspects peu saillants dont font partie les traits
du dernier type.
Pour vérifier ces hypothèses, nous avons considéré les mêmes types de trait
étudiés ci-haut qui correspondraient plus ou moins à la diversité des stéréotypes : dans
les définitions des métaux et des fruits, dominent les traits résultant d’une expertise
dans des conditions idéales. Les chiens, pour lesquels nous n’avons retenu que l’usage
et l’origine 119 , sont surtout définis par des traits culturels ; les récipients de cuisine
donnent un exemple parfait du besoin de la représentation effective. Puis, nous avons
procédé au recensement des traits ne faisant pas l’objet d’une variation selon le degré
d’accord dans les différents dictionnaires. Les résultats répartis en cinq colonnes (de 5
à 1) sont ensuite regroupés en trois sous-ensembles (5 et 4 : quasi-accord, 3 et 2 accord
partiel et 1 ceux mentionnés par un seul dictionnaire).
Le dépouillement des données a révélé des différences de traitement qui
seraient l’expression du caractère particulier de chaque type d’objets.
119
- Les traits physiques sont exclus du fait qu’ils sont plus ou moins analytiques et qu’ils ne sont pas de l’ordre
du culturel.
398
Pour les métaux (Cf. annexe I.41), nous avons montré auparavant, à partir de la
répartition du nombre de propriétés enregistrées, qu’il y a concentration des traits en
un nombre limité de métaux prototypiques. Ce constat se confirme encore une fois
puisque plus de la moitié des traits faisant l’objet d’un quasi-accord (mentionnés par 5
ou 4 dictionnaires) sont relatifs à cinq métaux vraisemblablement des plus connus par
les locuteurs :
Nombre total : 24
argent : 3, or : 3, platine : 2, fer : 3 , aluminium: 3 (total 14/24).
La répartition selon les définitions laisse paraître une gradation croissante allant
de l’accord à la disparité :
Taux d’accord 5 4 3 2 1
% des propriétés 6 19 19 24,5 31,5
Le taux réduit de l’accord total entre les dictionnaires s’expliquerait par le fait
que la plupart des métaux ne sont connus que dans un domaine de spécialité déterminé
(chimie minérale). Les propriétés descriptives potentiellement définitoires, bien
qu’elles partagent avec les traits stéréotypiques, linguistiquement pertinents, les
critères de l’idéalisation, de l’écart avec le référent (à l’état pur) et de la généricité,
s’en distinguent toutefois par le degré de conventionnalité, et par conséquent de
typicité : les traits les plus saillants, dignes d’être enregistrés dans un dictionnaire
appartiennent aux instances les plus prototypiques.
De même, sans tenir compte des caractéristiques particulières (préciosité,
toxicité, etc.), si l’on prend en considération le reste des données enregistrées (y
compris celles à caractère variable), on s’aperçoit qu’elles se regroupent en des aspects
plus saillants que d’autres :
399
Taux d’accord 5-4 3-2 1 Traits Total
variables
Couleur, 10 10 7 20 47
brillance,
Ductilité 8 23 11 4 46
malléabilité-
dureté
Altérabilité 2 4 7 0 13
Oxydabilité
Cassabilité 0 3 5 0 8
Solidité
légèreté 1 2 1 0 4
Les aspects les plus saillants auxquels se rattachent la plupart des propriétés sont la
couleur ou la brillance et la malléabilité ou la dureté. La cassabilité ou la solidité,
l’altérabilité et la légèreté semblent être moins saillants.
A l’opposé, le traitement des propriétés relatives aux chiens et aux récipients
présente des configurations presque inverses.
Pour les premiers (Cf. annexe I.42), les deux traits culturels retenus (l’usage et
l’origine) sont d’un nombre élevé dépassant celui des concepts définis (50) :
Taux d’accord Nombre %
5-4 37 39
3-2 31 33
1 26 28
Total 94 100 %
400
Taux d’accord 5-4 3-2 1 Total
Usage 34 15 17 66
Origine 4 14 11 29
Ainsi un chien serait-il plus connu par son emploi que par son origine.
Toutefois, il faut mentionner qu’un tel constat devrait être relativisé puisqu’une
bonne part des informations relatives à ce type de traits est présentée dans les
exemples. De telles informations n’ont pas le même statut que celles impliquées dans
la définition. Sous l’entrée terrier dans Le Petit Robert, on peut lire :
Terrier : « … utilisé autrefois pour la chasse des animaux à terrier. Les terriers sont de
bons chiens de garde ».
Aucun des quatre autres dictionnaires n’enregistre l’information contenu dans
l’exemple. Aussi Le Petit Robert est-il le seul qui modalise le trait / pour la chasse des
animaux à terrier / par une relativisation temporelle (utilisé autrefois). Cette modalité
de présentation assure la compatibilité du contenu de l’exemple avec celui de la
définition. Cet accord peut également rendre compte d’une simple spécification :
-Griffon : « … de chasse, griffon courant, d’arrêt » ( Le Petit Robert ).
Ainsi, étant donné qu’« un seul contexte ne [peut] pas définir une unité de
langue » (Josette Rey-Debove, 1970, 25), il ne vérifie pas la définition. Son « contexte
apporte une forte présomption sur le signifié du mot sans jamais être lui-même une
définition » (Josette Rey-Debove, 19, 246). Le terrier est d’abord un chien de chasse
mais secondairement, il a par ailleurs les qualités d’un chien de garde.
Servant entre autres d’illustration pour certains discours socialement acceptés et
valorisés ou tout simplement fréquents, l’exemple « qui est sélectionné de manière
« très culturelle » est alors lui-même exemplifiant et ce qu’il exemplifie va du contenu
de pensée original au stéréotype culturel répétitif » (A. Rey, 1995, 111). C’est ce qui
explique sa diversité d’un dictionnaire à un autre et d’autre part et sa grande proximité
du trait définitoire d’où la discordance parfois apparente dans la figuration de son
contenu entre définition et exemple. Pour la diversité, elle se manifeste dans des
saisies différentes :
401
Dogue : dogue allemand (TLF)
: dogue anglais (PR)
ou se recouvrant partiellement :
Berger : berger allemand (TLF)
: berger allemand, écossais, belge, des Pyrénées (PR)
: berger allemand, des Pyrénées (PL)
La discordance peut aller de la simple différence de distribution :
bouvier : Bouvier des Flandres (définitoire, PL, Lexis)
: bouvier des Flandres (exemple, PR)
: Bouvier des Flandres, des Ardennes (exemple, Hachette)
à l’opposition nette :
Épagneul : originaire d’Espagne (définition, Lexis)
: épagneul breton (exemple, PR)
: épagneul breton, picard (exemple, TLF)
Griffon : dont la race est originaire de Grande–Bretagne (définition, TLF)
: griffon vendéen (l’Ouest de la France) (Exemple, PR) .
Cette diversité et cette discordance reflètent, si l’on se limite au niveau du discours, la
multitude des usages et la variation de la norme. Ces deux facteurs renforcent
l’autonomie de l’exemple et la distinction de son contenu de celui de la définition.
Par ailleurs, faut-il signaler que, dans cet échantillon précis, le recours au procédé de
présentation de l’information varie d’un dictionnaire à un autre (annexe I.43). Du point
de vue de la fréquence des exemples « forgés », Le Petit Robert enregistre le taux le
plus élevé et Le Petit Larousse le taux le plus bas.
Pour ce qui est de la nature des traits, inversement à ce qui a été constaté dans les
définitions, c’est la donnée « origine » qui prédomine. Ceci s’expliquerait par la
caractère variable de la taxonomie non savante relative à ce type de traits qui se
situerait à la limite du continuum allant de l’individuel au conventionnel.
Pour les seconds (Cf. annexe I.44), la gradation de l’accord est quasi-identique
au cas des chiens :
Taux d’accord 5-4 3-2 1
% 40.5 31.5 28
402
Étant des objets très familiers, les récipients de cuisine s’adonnent à une représentation
plus ou moins partagée malgré la diversité des aspects impliqués dans les définitions.
Excepté /la mobilité/ et / le lieu d’usage / qui sont particuliers à certains récipients, on
a relevé six catégories de propriétés : la matière, la forme, la dimension, l’existence ou
l’absence de parties et la description de ces parties :
Si l’on se limite à ces choix, on relève une discordance entre la gradation décroissante
du recouvrement entre les différentes définitions et la configuration particulière à
chaque aspect.
Le degré d’accord entre les définitions est plus ou moins fluctuant. La matière
et l’usage font l’objet d’une grande similarité de traitement : le nombre relativement
réduit des traits qui leur sont relatifs ne diminue en rien l’accord apparent sur leur
saillance. Par ailleurs, ils présentent des taux de variabilité très proches (15 et 16 cas).
La forme fait moins l’objet d’un consensus. Sa représentation se répartit quasi–
équitablement entre le plus ou moins typique (7), le peu typique (6) et le variable (8).
Quant à la dimension, elle est représentée presque dans les mêmes proportions de
l’accord à la variabilité. L’indication de la présence ou de l’absence d’une partie
totalise le plus grand nombre de mentions. Elle s’adonne plus à l’accord total ou
partiel et à la variation. Enfin, la description des parties reflète par excellence
l’inconstance de la répartition avec une nette prédominance des traits mentionnés par
un seul.
403
Cette fluctuation s’expliquerait entre autres par la tendance à la description exhaustive
caractéristique de certains dictionnaires (Cf. ci-dessous).
Pour les fruits (annexe I.45), la variation de l’accord selon le nombre de
définitions suit une gradation ascendante puis descendante avec un niveau
intermédiaire du recouvrement total par rapport aux traits relatifs aux chiens et aux
récipients d’une part, et aux métaux d’autre part, avec une concentration des propriétés
partagées par 3 ou 2 dictionnaires et une baisse relative de celles mentionnées par un
seul dictionnaire :
Taux d’accord 5 4 3 2 1
Fruits 11.84 % 17.10 % 25 % 23.68 % 22.36 %
Le taux réduit des traits faisant l’objet d’un accord total contraste avec le
caractère familier des fruits et avec leur présence dans l’environnement humain.
Plusieurs facteurs concourent à cette baisse de conventionnalité. D’abord, il y a la
diversité des variétés qui limite le consensus à propos d’aspects essentiels tels que la
couleur et la forme, puis, une différence dans la focalisation : un dictionnaire peut
focaliser sur l’odeur d’un fruit là où un autre choisit la saveur ou l’aspect juteux de la
chair. Enfin, les traits sélectionnés peuvent concerner des caractéristiques propres au
fruit en question telles que la description du noyau, des pépins, des grains, etc.
La répartition des propriétés enregistrées confirme cet éparpillement :
Taux d’accord 5-4 3-2 1
Forme 3 6 2
Odeur 1 7 2
Peau, enveloppe Couleur 4 2 1
dure fine écailleuse - 1 4
Chair Couleur 1 - -
Juteux 4 4 2
Saveur 5 9 3
Tendre /ferme 1 2 1
Noyau, pépins, Aspect 3 3 3
graines Couleur - 1 -
404
Dans l’ensemble, les aspects incluant les traits sont d’ordre global (forme,
odeur) ou partiel (peau, chair). Les premiers cumulent un taux d’enregistrement très
proche (respectivement 11 et 10) avec un niveau d’accord moyen, indice probable de
leur saillance plus ou moins pertinente. Les seconds se caractérisent par la
prédominance des traits relatifs à la chair où l’aspect juteux et la saveur font l’objet
d’un degré d’accord assez important et par la discrétion des traits relatifs à l’aspect
extérieur (couleur de la peau, etc.). Cette tendance à l’accord partiel traduirait le
caractère relatif de la conventionnalité quand il s’agit d’objet présentant une grande
diversité. Le trait / savoureux / par exemple qui cumule le plus grand nombre de
mentions est lui-même très relatif puisque le goût de n’importe quel fruit dépend de la
variété en question, du système d’irrigation et de la nature du sol.
Ces résultats devraient être relativisés puisque les traits enregistrés par un seul
dictionnaire pourraient bien résulter d’un effort de description encyclopédique ou
visant une représentation plus ou moins exhaustive. L’étude de ce type de traits
confirme en effet qu’ils sont plus liés à la nature et à la vocation des dictionnaires :
Nbre total TLF PR PL Hachette
Lexis
Métaux 32 18 8 4 1 1
Fruits 17 6 3 3 2 3
Chiens 28 13 4 4 5 2
Récipient 28 20 2 3 2 1
105 57 17 14 10 07
L’écart entre le TLF et les autres dictionnaires rend parfaitement compte des choix et
du volume de chaque dictionnaire. A supposer que l’accord mette en l’avant les
propriétés stéréotypiques et que la disparité reflète l’étendue des traits qui peuvent être
rattachés au sens d’un mot, ceci confirme l’idée de Martin selon laquelle « les
propriétés universelles déterminent […] un axe qui va des contenus linguistiques à des
contenus encyclopédiques, mais sans rupture nette » (1983, p71), sauf que les contenus
linguistiques pourraient impliquer, également, des propriétés typiques mais non
universelles.
405
Jusqu’ici, nous nous sommes servi de la différence des modalités de
présentation des traits définitoires pour repérer les foyers stéréotypiques, pour étudier
leur nature et leur économie dans la définition et pour vérifier, à travers le degré de
l’accord entre les différents traitements, l’existence d’un lien entre le degré de
saillance des traits enregistrés et les fondements sous-jacents à cette variation de
typicité. Ces résultats demeurent toutefois incomplets sans la comparaison des
différents ouvrages et sans la saisie des spécificités relatives à chacun d’eux. L’étude
de la variation des modalités de présentation de l’information pourrait être un outil
même relatif, permettant d’atteindre cet objectif.
406
Généralement, la cerise est de couleur rouge
Le lexicographe opte pour la généralisation et ne tient pas compte des
exceptions jugées comme étant accidentelles et non représentatives, pour figurer dans
la définition.
Dans le second cas, le savoir est présenté comme une vérité analytique
n’admettant pas d’exceptions :
Une tourie est fabriquée (exclusivement) en grès.
La comparaison avec d’autres définitions rend compte de l’aspect formel et fautif
d’une telle assertion.
Dans la seconde optique, la modalisation se réalise de deux manières. Le cas le
plus fréquent est le choix d’un même trait qui se trouve toutefois relativisé parce qu’il
met l’accent sur le fait qu’il s’agit :
- d’un cas dominant : le plus souvent, surtout, essentiellement, généralement, en
général, volontiers, presque toujours, ordinairement, principalement, habituellement,
etc.
- d’un cas spécifique fréquent : notamment, particulièrement, en particulier, etc.
- d’une approximation : environ, presque, etc.
Pour le second procédé de modalisation, un dictionnaire donné recourt à plus d’une
instance prototypique là où un autre se limite à une seule. Les instances périphériques
sont toujours ignorées. L’expression de la modalisation se réalise alors au moyen d’un
paradigme fini qui s’oppose à un choix unique :
Merise : noire ou rouge (TLF, modalisé)
noire (PL, catégorique).
Une propriété rendue par deux paradigmes finis mais dont l’un est plus exhaustif que
l’autre, sera considérée comme étant modalisée dans le premier cas et catégorique dans
le second :
Melon : vert, jaune ou brun clair (PL, modalisé)
Orangé ou vert clair (PR, catégorique).
Enfin, le choix ouvert est exprimé lexicalement par l’emploi d’expression du type « de
forme variable », « existe plusieurs variétés », etc. ou explicité par « etc. » succédant à
un paradigme donné :
407
Dame – jeanne : de verre, de terre, de grès, etc. (TLF, ouvert)
de grès ou de verre (PL, Lexis, Hachette, catégorique).
Les expressions de l’intensité (dur, très dur) et de nuance (kiwi : brun, gris marron,
marron) ne sont pas retenues dans le recensement des variations. Elles relèvent plus de
l’approximation que de la modalisation. Selon le type de mots étudiés, la variabilité
des traitements est plus ou moins importante. Pour les métaux, nous avons relevé des
cas différents (Cf. ci haut) mais aucun cas de traitement modalisé. Ceci est dû au fait
que la plupart des métaux ne font pas partie des objets usuels, par conséquent leurs
dénominations ne sont pas d’un usage courant. La rareté de leur présence dans la
communication quotidienne ne favorise pas l’émergence de représentations
particulières à leur compte. Par ailleurs, les propriétés qui leur sont attribuées sont
validées surtout suite à une expertise scientifique et non profane.
Pour les fruits (annexe I.46), seulement six traits font l’objet d’un traitement
variable dont trois concernent la forme, deux la couleur et un le goût. Étant limité, ce
nombre ne permet pas de tirer des conclusions pertinentes si ce n’est la tendance pour
les choix modalisés du TLF (5/6). Les aspects qui sont ordinairement le foyer d’une
variation (la couleur et la forme) sont relativement peu décrits vu la diversité des
variétés, signalée ou non :
Les traits relatifs aux chiens (Annexe I.47) présentent un peu plus de variation.
L’usage puis la couleur y sont les plus concernés. Selon le nombre de propriétés
enregistrées par chaque dictionnaire, on relève deux tendances opposées avec un
408
niveau plus ou moins médian : le TLF cumule plus de choix modalisés (8 / 12) et peu
de choix fermes (3/12) ; à l’opposé, Lexis et Hachette favorisent les seconds
(respectivement 6/7 et 9/11).
Enfin, Le Petit Larousse répartit les traits d’une manière presque équilibrée (5/9
et 4/9) ; le traitement du Petit Robert, quant à lui, tend plutôt vers les choix fermes
(7/11, contre 4/11 pour les choix modalisés).
Ce sont les définitions des récipients (Annexe I.48) qui permettent le mieux une
comparaison plus significative puisque la variation touche dans l’ensemble 72 traits
répartis comme suit, selon les dictionnaires :
TLF 67
PR 55
PL 47
Lexis 47
Hachette 46.
Cette profusion traduit l’insuffisance des définitions minimales et une caractéristique
essentielle du trait stéréotypique, à savoir l’écart qu’il présente par rapport à la réalité
du référent. Ainsi, le choix ferme n’est que l’expression de la généricité de ce type de
traits ; le choix modalisé n’est souvent que l’expression inférentielle par défaut de ce
même type et le choix ouvert, un rappel de la diversité des occurrences de la catégorie
référentielle définie. Les dictionnaires tendent de manière différée vers l’un ou l’autre
de ces choix :
Type de choix Choix ferme Choix modalisé Choix ouvert
TLF 26.86 % 59.7% 13.43 %
PR 45.45 % 45.45 % 7.27 %
PL 55.31 % 31.91 % 10.63 %
Lexis 70.21 % 25.53 % 4.25 %
Hachette 67.39 % 28.26 % 4.34 %
Ces résultats concordent fortement avec ceux mentionnés avec les traits relatifs aux
chiens. Le TLF tend beaucoup plus vers la modalisation et a le plus grand taux de
choix ouverts. Lexis, et Hachette ont tendance par contre aux choix fermes. Enfin, les
409
traitements du Petit Robert et du Petit Larousse occupent toujours un niveau
intermédiaire avec une légère tendance vers les choix fermes pour le second. Si l’on
interroge le nombre de traits par type de propriétés, type de choix et par dictionnaire,
on saisit mieux les différences de traitement qui vont parfois jusqu’à l’opposition
nette. Les 67 propriétés enregistrées par le TLF se répartissent comme suit :
410
Pour tous les aspects, la tendance vers les choix fermes est nette avec en tête
« la forme », la description des parties et l’indication de leur présence ou leur absence.
La modalisation est toutefois présente dans le traitement des traits relatifs à la matière
et à l’usage.
Hachette ne s’en distingue que de peu :
Type de choix Choix ferme Choix modalisé Choix ouvert
Descriptions des parties 4 -
Parties 7 -
Matière 3 4 1
Forme 3 2
Usage 10 5 1
Mobilité 1 -
Dimension 3 2
Le traitement des traits relatifs à la matière tend plus vers la modalisation. Pour
le reste, les choix fermes dominent plus ou moins.
Le Petit Larousse a la même tendance, même s’il l’est d’une manière moins
accentuée :
Type de choix Choix ferme Choix modalisé Choix ouvert
Descriptions des parties 3 2
Parties 4 5
Matière 5 4 4
Forme 2 -
Usage 8 2 2
Mobilité - 1
Dimension 4 1
411
nombre plus grand de traits fixes au même titre que la description des parties et de
l’usage.
Enfin, Le Petit Robert paraît représenter le mieux la position médiane entre les
deux tendances :
Type de choix Choix ferme Choix modalisé Choix ouvert
Descriptions des parties 3 3 -
Parties 3 5 -
Matière 4 7 1
Forme 4 5 -
Usage 9 4 3
Mobilité 1 - -
Dimension 2 3 -
3-3- Synthèse
Dans l’ensemble, le caractère limité des choix ouverts dans tous les
dictionnaires maintient les représentations du sens dans un cadre stéréotypique
explicité ou non. Sur ce point précis, la différence de volume ne semble pas avoir une
incidence sur la nature des choix. Malgré le grand écart, sur ce plan, entre le TLF et Le
Petit Larousse, les taux de choix ouverts se rapprochent (13, 43% et 12.76 %).
De même, si l’on interroge le degré de recouvrement entre les dictionnaires
pour les différents choix, on ne relève pas une différence majeure, d’une part, entre le
TLF et Le Petit Robert ou Lexis et, d’autre part, entre Hachette et Le Petit Robert, Le
Petit Larousse ou Lexis :
412
Dictionnaire PR PL LEXIS HACHETTE
TLF 17 9 17 12
PR 12 12 18
PL 13 16
LEXIS 16
La modalisation ou l’option pour les choix fermes sont donc, avant tout, une question
de politique lexicographique. Proportionnellement au nombre de traits impliqués dans
la définition, l’une ou l’autre des solutions fait la particularité de chaque dictionnaire.
Les oppositions entre les choix fermes de chaque ouvrage et les choix modalisés dans
tous les autres confirment d’une autre manière ces spécificités :
Choix modalisés
dictionnaire PR PL LEXIS HACHETTE
TLF
TLF 9 7 2 4
PR 20 8 4 3
Choix fermés
PL 21 12 7 8
LEXIS 21 17 9 6
HACHETTE 23 10 9 6
413
diversité par ses visées et ses contenus (didactique, idéologique, commerciale, etc.),
rend compte de ce phénomène.
Vu sous l’angle de la première question, l’analyse de ces traitements aboutirait
aux constats suivants :
1. Les critères définitoires du stéréotype fonctionnent comme un seul paquet.
Nous avons, dans l’exemple des métaux, une illustration parfaite de cette solidarité. La
présence d’écart avec le référent à l’état pur et l’expertise dans des conditions
idéalisées ne suffisent pas à ériger et fixer un stéréotype linguistique. C’est ce qui
explique la concentration des traits de ce genre en un nombre limité de concepts
relatifs aux référents les plus connus par les locuteurs.
2. La typicité concerne plus les aspects perceptibles. Les traits qui font l’objet de
plus d’accord sont la couleur pour les métaux, l’emploi pour les chiens et la forme et
l’usage pour les récipients de cuisine. La saillance est corollaire de la conventionnalité
et les deux critères trouvent leur expression référentielle dans les instances les plus
prototypiques d’une catégorie donnée. Le degré d’accord, relativement important,
autour de deux aspects culturels relatifs aux chiens (l’usage et l’origine) et autour des
récipients de cuisine qui, dans la réalité, présentent une grande diversité, en est la
preuve. Même dans le cas de la modalisation, des modalisateurs comme souvent,
généralement, etc. consacrent cette vision stéréotypique sur laquelle se fonde toute
catégorisation prototypique. Celle-ci est vérifiée même dans des catégories
subordonnées se caractérisant par la grande disparité des propriétés spécifiques.
3. La variation se manifeste plus, dans les échantillons étudiés, comme un indice
de stéréotypie que comme son infirmation. Ses contours se meuvent entre les limites
de la perception (nuance de couleurs, diversité des expressions du goût, etc.) et la
multiplicité des instances prototypiques (recours à la modalisation, paradigmes à
recouvrement partiel, etc.). Elle est donc limitée aussi bien quantitativement (nombre
réduit par rapport aux traits concordants) et qualitativement (nombre réduit des
différences non conciliables).
4. Enfin, la pertinence des traits stéréotypiques est évidente dans la plupart des
cas. Pour les métaux, ces traits constituent la seule matière relevant de la compétence
des profanes. Les traits culturels relatifs aux chiens comblent le déficit des propriétés
414
Vu sous l’angle de la deuxième question, la comparaison des différents
traitements lexicographiques permettrait de conclure que :
a) - pour chaque dictionnaire, nous avons enregistré globalement les mêmes
tendances vers les choix fermes, modalisés ou ouverts à travers les différents types de
corpus (le TLF opte plus pour les choix modalisés ou ouverts, Lexis et Hachette pour
les choix fermes, le Petit Robert et le Petit Larousse se situent plutôt à un niveau
intermédiaire). Ces différences ne sont pas l’indice d’une variation qui a trait à la
nature bivalente ou paradoxale du stéréotype, mais plutôt le résultat d’une
modalisation qui définit la portée de l’information dans un cadre référentiel plus large.
La différence entre « de verre », « généralement de verre », « de verre ou de grès » et
« de verre, de grès, de cristal, etc. » s’inscrit dans le cadre d’un continuum de visées
allant de la représentation stéréotypique nette à celles modalisée ou ouverte.
-b) Si l’on considère l’ensemble des traits étudiés et la fréquence de chaque type
de traitement selon les dictionnaires, on se rend compte que les formulations des
informations sémantiques s’ancrent majoritairement dans les deux premières visées
avec des tendances plus ou moins importantes vers les choix fermes. Parallèlement,
dans tous les échantillons étudiés, le nombre des propriétés enregistrées par un seul
dictionnaire est remarquable chez le TLF, limité chez Le Petit Robert et Le Petit
Larousse et quasi-insignifiant chez Lexis et Hachette. Au-delà des considérations
relatives à la politique de chaque dictionnaire (volume, public-cible, etc.), ces
différences pourraient être l’indice du degré de saillance des traits stéréotypiques : les
plus saillants font l’objet d’un taux d’accord plus élevé. Ce constat rejoint la
distinction établie par Jean-Claude Anscombre (2001, 58) entre les stéréotypes
primaires et les stéréotypes secondaires (Cf. la deuxième partie). La contrainte du
volume et la visée didactique concourent vraisemblablement aux choix des traits les
plus saillants.
415
L’étude des stéréotypes en relation avec le traitement lexicographique de la
polysémie pourrait révéler d’autres aspects dépassant le cadre propre à chaque
dictionnaire.
416
Deuxième chapitre : Stéréotypie et traitement
lexicographique de la polysémie
L’étude de la variation du traitement lexicographique de la stéréotypie dans le
cadre des extensions polysémiques rencontre, sur le plan méthodologique, deux types
de difficulté majeure : le premier se rapporte aux supports de cette étude, le second à
son objet.
En premier lieu, les dictionnaires présentent une grande variété quant à leurs
volumes, leurs choix méthodologiques et leurs perspectives théoriques. Du Trésor de
la langue française, ouvrage à vocation littéraire et textuelle, au Petit Larousse et
Hachette illustrés, à visée didactique, en passant par le Petit Robert qui se veut
dictionnaire de l’usage et Lexis, conçu selon un modèle théorique précis, l’écart est
énorme. D’où le caractère démesuré et inconvenant de toute tentative d’étude
comparative sur la base de ces ouvrages.
En second lieu, l’étendue du phénomène stéréotypique lié à la polysémie, allant
des motivations translexicales dépassant le cadre du mot aux motivations arbitraires et
souvent idiosyncrasiques et son ouverture sur tout le lexique constituent un obstacle de
taille quant à la délimitation du corpus. A cela s’ajoute, au niveau d’une entrée lexicale
donnée, la pluralité des sens, acceptions ou nuances de sens, enregistrés inégalement et
parfois différemment dans les dictionnaires. En outre, l’information polysémique,
n’étant toujours pas dénotative des objets du monde, est largement tributaire des
descriptions des emplois du mot en discours, d’où la nécessité de dépasser le cadre
strict de la paraphrase définitoire.
Face à la première difficulté, nous avons choisi d’adopter une démarche
descriptive qui met plus l’accent sur les enjeux méthodologiques et théoriques du
traitement lexicographique de ces extensions. La diversité des dictionnaires est, dans
cette optique, un facteur fort utile pour la saisie des différentes facettes selon lesquelles
le phénomène peut être décrit et présenté.
Face à la seconde, nous avons arrêté des choix méthodologiques qui ont pour
objectif de cerner notre objet d’étude et de le doter d’une représentativité et d’une
régularité relatives. Ces choix concernent :
417
A- l’articulation entre le corpus thématique et les axes d’étude : notre corpus
relève essentiellement de trois grands ensembles thématiques. Le premier est relatif à
des catégories cognitives générales où il est question de la représentation de l’espace
(le haut ≠ le bas), des formes et de projections métaphoriques conceptuelles du
domaine du concret au domaine de l’abstrait (+ lumière, + vision ≠ -lumière, - vision //
+ chaleur, + sensibilité ≠ - chaleur, - sensibilité). Le second ensemble est lié à des
projections culturelles du domaine animal au domaine humain (structuration du
domaine des caractères humains en termes des dénominations des animaux) et à des
mécanismes métonymiques ayant comme foyer le premier domaine. Enfin, le dernier
est relatif aux représentations de l’autre impliquant l’ethnie, le métier, la classe sociale
et l’appartenance idéologique ou institutionnelle.
Ces thèmes s’articulent avec les axes d’études suivants :
- la variation de la structuration lexicographique du contenu sémantique,
foyer de la stéréotypie : Il s’agit de la distribution du sens entre homonymie,
polysémie systématique, absence de polysémie ou distribution différée entre sens,
acception et nuances de sens. Selon le fait étudié, nous puiserons nos exemples dans
les deux premiers ensembles qui permettent la description de la structuration du sens à
un niveau translexical comme à un niveau idiosyncrasique. Étant profondément
ancrées dans le lexique, les significations cognitivement ou culturellement saillantes
s’adonnent théoriquement à deux types de traitement totalement opposés : d’une part,
étant suffisamment généralisées et systématiques, elles peuvent être senties comme
une simple nuance de sens ou même formant un sens unique ; d’autre part, relevant de
deux domaines totalement disjoints, elles peuvent être interprétées comme des
réalisations homonymiques ;
- la variation du contenu sémantique d’un dictionnaire à un autre : Les
représentations de l’autre constituent un foyer idéal pour la description d’une telle
variation. La diversité des facettes selon lesquelles l’autre est représenté permet de la
situer par rapport à la normativité présupposée du dictionnaire et son caractère
idéologique (interventionnisme des élaborateurs) et par rapport à l’opposition entre
synchronie et diachronie (les représentations appartiennent à des états différents de la
langue française).
418
B- La délimitation de l’unité minimale de description : Pour contourner la
profusion des sens polysémiques se déployant à partir d’un mot, nous considérons
principalement une même signification donnée dans tous les dictionnaires. Au niveau
de la structure interne de l’article, nous l’appréhendons dans sa globalité, d’où le
recours, selon les besoins, aux marqueurs définitionnels et aux exemples. Toutefois,
l’enchevêtrement de certaines données nécessiteraient de dépasser le cadre de l’article
particulier pour une vision plus globale.
419
La divergence comme la convergence dépendent alors de l’optique à travers laquelle
on appréhende les phénomènes d’homonymie, de polysémie systématique et de la
structuration des extensions à l’intérieur d’une entrée donnée.
420
L’homonymie qui se fonde sur une conception du mot comme « une unité du
discours définie par son contexte : situation et distribution » (J. & C. Dubois, 1971,
67), se déploie inégalement d’un dictionnaire à un autre. Lexis, le seul qui prône une
description du lexique sur la base d’une théorie linguistique affichée, est de loin le plus
qui a recours à ce procédé de structuration lexicale.
Pour un mot comme « approfondissement », Lexis réserve un traitement
homonymique selon l’opposition entre les traits /concret/ vs /abstrait/ :
« 1. Profond 1. Se dit d’une chose dont le fond est loin de la surface, de l’ouverture
♦ approfondissement : L’approfondissement du canal demandera plusieurs années.
2. Profond 1. Se dit d’une chose cachée qui commande le comportement de
quelqu’un, le cours des événements.
♦ Approfondissement. L’approfondissement d’un problème, de ses propres
connaissances…de leurs désaccords ».
Le TLF et Le Petit Robert le traitent en termes de polysémie en explicitant la
projection cognitive du concert vers l’abstrait (annexe II.1). Hachette l’annexe sans
paraphrase à approfondir (traité d’une manière polysémique). Quant au Petit Larousse,
il le traite en une seule acception générique :
-« Action d'approfondir ; fait de s'approfondir ».
Le recouvrement homonymique, quand il existe, n’est que partiel. Le découpage selon
les catégories syntaxiques et les contenus sémantiques des unités homonymes n’est
souvent pas homogène.
Au niveau syntaxique, les rares cas où l’homonymie est plus ou moins partagée
révèlent une disparité du découpage catégoriel. Pour droit et droite par exemple
(annexe II.2), il y a cinq configurations différentes des homonymes comme le montre
le tableau suivant :
421
Entrée Droite n.f. Droit, e adj. Droit, e adj. Droit, e adj. Droit,e adj./adv.
et n. et adv. Et n.
dictionnaire
+ +
TLF
+ + +
PR
PL + + +
LEXIS + +++
HACHETTE + + +
120
Les traits /moral/ et /intellect/ figurent sous une même acception générique.
422
Pour Le Petit Robert et Le Petit Larousse, les acceptions relatives à l’orientation,
présentes dans 2.droit, sont reprises dans droite, nom féminin, et servent à dégrouper
le domaine politique du reste des significations. Le lien sémantique entre l’orientation
et la tendance politique est d’ordre métonymique. Il est de nature différente de celui
qui projette l’idée de direction dans le domaine abstrait de la morale et de l’intellect,
d’où la légitimité du traitement homonymique des deux sens. Cependant, le
dégroupement du sens relatif au domaine politique avec la redondance des acceptions
relatives à l’orientation dans les deux entrées 2.droit et droite pourrait s’expliquer plus
par une volonté de l’extraction du substantif féminin singulier que par le désir
d’expliciter la saillance du politique tant que celle-ci est, dans les deux types de
traitement (celui du TLF et celui du PR et PL), toujours rattachée à l’idée
d’orientation. Lexis distingue dans la seule catégorie de l’adjectif trois homonymes
séparant ainsi « géométrie » (1.droit) et « orientation » (3.droit), « intellect » (1.droit)
et « morale » (2.droit).
- Pour gauche (annexe II.4), le traitement des affinités sémantiques va de la
polysémie (PR et Hachette), à deux (TLF), trois (PL) et quatre homonymes (Lexis).
Mis à part Lexis qui réserve à chaque sens une entrée homonymique 121 , les autres
dictionnaires répartissent les acceptions par domaines :
domaine homonyme dictionnaire Polysème Polysème Hach.
(PR) 122
orientation 1.gauche TLF, PL II. A.5.,C.1.
2.gauche PL
politique 1.gauche TLF, PL II. et III. C.2.
Position/corps 1.gauche TLF, PL II. A.4., B.1.
2.gauche PL
3.gauche PL
géométrie 2.gauche PL A.2.
intellect 2.gauche TLF
physique 2.gauche TLF
121
1.Droit : « position du corps » , 2.droit : « choses » , 3.droit : « caractère » et 4.droit : « politique ».
122
Les sens polysémiques du PR correspondent plus ou moins au découpage homonymique du TLF.
423
caractère 2.gauche TLF, PL I. A.3.
choses 2.gauche TLF, PL I. A.1.
3.gauche PL
Grosso modo, les sens C. de Hachette et II., III. du Petit Robert correspondent à
1.gauche du TLF et Petit Larousse et, respectivement A. et I. à 2.gauche.
Cependant, si l’on compare les traitements du TLF et du Petit Larousse, on
constate que les homonymes 1 et 2 correspondent respectivement l’un à l’autre. Les
seules différences résident dans l’absence du lien spatial concret dans le TLF 123 et
toujours pour le même dictionnaire, dans la mention d’acceptions supplémentaires
(domaines de l’intellect et du physique). Le troisième homonyme du Petit Larousse est
conçu autour de significations composites qu’on pourrait rattacher à 1 et à 2. La
référence aux parties du corps dont il est question dans 3. gauche :
« 1. a. Poing gauche, en boxe. Crochet du gauche.
b. Pied gauche, au football, au rugby. »
pourrait s’insérer aisément sous l’entrée 1.gauche :
« 1. Côté gauche d'une personne. Tourner sur sa gauche.
2. Main gauche.
– En boxe, coup porté avec le poing gauche ».
De même, la référence plus ou moins terminologique à un état de chose :
« 2. [Mécanique industrielle] Défaut de planéité d'une pièce. Le gauche d'une bielle »
admettrait un lien avec l’acception suivante de 2. gauche :
« 4. Se dit de ce qui n'est pas droit, ou plan, du fait d'une torsion volontaire ou accidentelle ».
Dès lors, la seule justification d’un tel regroupement est la catégorie syntaxique
du mot homonyme : « gauche nom masculin ». Dans les rares cas d’homonymie (en
relation avec la stéréotypie et dans le cadre des thèmes choisis) relevés dans Le Petit
Larousse, le poids du critère syntaxique est de règle (annexe II.5). Néanmoins, si dans
les deux cas précédents, le dégroupement selon le critère sémantique ne cause pas de
perte sémantique du fait que l’expression de la projection cognitive, source de la
stéréotypie est maintenue dans l’unité lexicale extraite, tel n’est pas toujours le cas.
123
Dans le TLF, les acceptions de « 2.gauche » sont mises sous l’exergue « Qui s'écarte d'une norme ».
424
Pour cochon, Le Petit Larousse réserve trois homonymes dégroupés respectivement
selon les catégories syntaxiques suivantes :
-« Cochon adjectif et nom
féminin cochonne »
-« Cochon adjectif »
-« Cochon nom masculin »
Dans le premier, il fait figurer l’acception relative au caractère humain avec ellipse du
domaine source (animal) :
« Fam.
1. Sale, dégoûtant.
2. Malfaisant, déloyal.
3. Égrillard, obscène. ».
Le second homonyme rend la projection de l’idée de « saleté » ou d’ « obscénité »
dans le domaine des objets :
« Fam. Film, spectacle cochon, film, spectacle pornographique ».
Ce traitement cause une double distorsion du sens. D’une part, la motivation de la
signification est sacrifiée vu l’absence du domaine source ; d’autre part, l’unicité du
type de projection, source des deux contenus et de leur affinité (les mêmes traits
sémantiques), sont également sacrifiées. Dans le premier cas, ce qui est mis en
exergue, c’est l’unité fonctionnant comme un nom et un adjectif ayant un féminin et
dans le second cas, l’adjectif masculin.
Enfin, le troisième homonyme s’organise autour du substantif masculin
désignant l’animal. Des connotations qui lui sont associées, une seule figure dans un
syntagme figé :
« 1. Mammifère domestique élevé pour sa chair.
– Fam. Tour de cochon : action méchante commise au préjudice de quelqu'un».
L’homonymie fondée essentiellement sur des critères sémantiques n’est pas moins
problématique. Pour un mot comme haut (annexe II.6), le TLF et Le Petit Larousse 124
envisagent deux solutions d’homonymie selon des critères différents 125 .
124
Lexis, envisage, dans ce cas, un dégroupement semblable (annexe 34).
Quant au Petit Robert et Hachette, ils lui consacrent un traitement polysémique dont les grands axes
correspondent globalement aux différents homonymes dans le TLF (annexe 34).
425
Le Petit Larousse combine le critère syntaxique et le critère sémantique pour
aboutir à deux homonymes. Le premier représente les deux dimensions concrète et
abstraite avec une formulation générique de cette seconde :
« Haut, haute
1. Qui a une certaine dimension dans le sens vertical
7. Qui occupe une position supérieure, éminente dans sa catégorie
8. Qui est très grand, à quelque titre que ce soit
Haut adverbe 126
1. À haute altitude, en un lieu élevé, à un degré élevé. Voler haut dans le ciel.
Haut, locution adverbiale
D'en haut : d'un endroit élevé ; d'un niveau élevé du pouvoir ».
Le second homonyme regroupe des acceptions concrètes avec des expressions figées, à
connotations morales, présentées comme des nuances dérivant de ce premier sens :
« Haut nom masculin
1. Dimension verticale d'un corps ; hauteur, élévation
- Traiter, regarder quelqu'un de haut, traiter, regarder avec dédain, mépris.
– Le prendre de haut : réagir avec mépris.
– Des hauts et des bas : des périodes heureuses et malheureuses.
– Tomber de haut, de son haut : être extrêmement surpris ».
Le TLF procède avec le même découpage syntaxique en précisant pour le premier
homonyme qu’il s’agit de sens ayant comme « antonyme bas pour la plupart ».
Toutefois, les sens inclus dans le second homonyme ne se distinguent pas de ceux
figurant dans le premier au niveau du domaine :
125
Le traitement polysémique de haut dans Lexis et Hachette se fait selon un découpage catégoriel strict. Le Petit
Robert se rapproche respectivement des deux homonymes du TLF dans les sens I. et III..
126
Dans Le Petit Larousse Électronique, figure parfois deux entrées qui renvoient au même article ; tel est le cas
pour haut adj et haut adv.. Nous considérons dans ce cas qu’il s’agit d’une seule entrée.
426
« HAUT1, HAUTE, adj. et adv.
I. Emploi adj.
A. [Dans l'espace]
E. Domaine abstrait »
« HAUT2, subst. masc.
B. Position déterminée sur la verticale.
1. Le haut (entité abstr.). Elle ordonne aux roseaux de saluer, joyeux et satisfaits,
l'arbre superbe; Car l'équilibre c'est le bas aimant le haut (HUGO, Légende, t. 4,
1877, p. 129)..
3. Ce qui est élevé (moralement, socialement, intellectuellement, etc.), ce qui est
excellent. Le christianisme (...) qui a fait voir le haut et le bas de notre coeur
(CHATEAUBR., Génie, t. 2, 1803, p. 376) ».
Ils ne s’en distinguent pas non plus au niveau de l’opposition à l’antonyme bas :
« HAUT2, subst. masc.
B. 1. Le haut (entité abstr.). Elle ordonne aux roseaux de saluer, joyeux et
satisfaits, l'arbre superbe; car l'équilibre c'est le bas aimant le haut (HUGO,
Légende, t. 4, 1877, p. 129).
2. De haut
b) Au fig. D'une autorité supérieure. Synon. d'en haut (Cf. haut1). Ordre qui vient de
haut.
C. Partie supérieure d'une chose ou d'un être (corps ou partie du corps).
1. En emploi abs. Le haut, dans le haut, du haut, vers le haut ».
La variabilité des critères de dégroupement en homonymes devient plus
problématique quand il existe plus d’une possibilité de catégorisation sémantique et en
l’absence d’une éventuelle hiérarchie entre les traits qui pourraient fonder la
dissociation. Nous avons dans l’exemple élever un cas typique pour lequel les
différents dictionnaires réservent deux solutions de polysémie et plusieurs solutions
d’homonymie sur la base de critères fort éloignés.
Le Petit Robert traite les sens associés au mot dans un cadre polysémique selon
l’axe /concret/, /figuré/ permettant, ainsi, l’expression de la métaphore conceptuelle
qui structure des domaines variés par la valeur axiologique associée à tous les mots
contenant le trait /HAUTEUR, ELEVATION/ :
427
« Élever v. tr.
I. concret
II. Fig. ».
Sous ce second sens, il fait figurer des acceptions relatives aux valeurs morales,
sociales et également à l’éducation et aux soins portés aux enfants ; A cette dernière
acception, il rattache la signification de l’ « élevage » comme une nuance de sens :
« 1. Porter à un rang supérieur.
3.Rendre moralement ou intellectuellement supérieur
4. Amener (un enfant) à son plein développement physique et moral.
- Faire l'élevage de (un animal). Élever des chevaux, des lapins.
Le Petit Larousse et Hachette lui réservent, chacun, une seule entrée polysémique
tout comme Le Petit Robert avec la différence qu’ils séparent la signification
de « soins, éducation de l’humain » et celle de « élevage » en deux acceptions ou sens
différents :
- « Élever verbe transitif
5. Assurer la formation morale et intellectuelle de ; éduquer. Bien élever ses enfants.
6. Assurer le développement, l'entretien des animaux ; nourrir, soigner. Élever des
chiens ». PETIT LAROUSSE
- « 5. Assurer le développement physique et moral d’un enfant
6. faire l’élevage des animaux » HACHETTE
Le TLF dégroupe les sens en deux homonymes selon l’opposition /hauteur : sens
concret et abstrait/ et /développement d’un être vivant/ :
« Elever1, verbe trans.
I. [La notion dominante est celle d'une hauteur bien en vue ou d'un accroissement
de valeur]
A. [La montée est physique]
B. Au fig. [La montée concerne des valeurs]
1. [Valeurs physiques ou financières]
1. [Valeurs mor.]
I. [La notion dominante est celle d'une intensité]
A. [L’intensité est physique]
B. Au fig. [Intensité morale] » ;
« Elever2, verbe trans.
428
Assurer à un être vivant un développement continu, depuis sa naissance ou à partir
d'un moment relativement proche de sa naissance, jusqu'à un certain degré
d'accomplissement.
A. [L'obj. désigne un être humain]
B. [L'obj. désigne un animal; le subst. corresp. est élevage] ».
Les élaborateurs de l’ouvrage justifient ce dégroupement par le fait que «bien que sous
élever2 se cache l'image de faire grandir, donc d'un mouvement dans le sens de la
hauteur, cette image est trop peu directement perceptible pour que ses emplois se
laissent grouper sous élever1 ».
Lexis retient le regroupement des sens /concret/ et /abstrait/ mais dégroupe ceux
relatifs au « développement des êtres vivants » selon l’opposition /humain/ vs
/animal/ ; ce qui donne lieu à trois homonymes :
« 1. Élever v. tr
1- Élever une chose, la porter vers le haut la dresser
2- Élever une chose, une personne, les porter plus haut, les mettre à un niveau, à un
rang supérieur
2. Élever
1. Élever des enfants, assurer leur développement physique, intellectuel, moral
3. Élever
Élever des animaux assurer leur développement physique, les faire prospérer ».
Cependant, ni la corrélation entre le traitement homonymique et la présence
d’une opposition donnée, ni le maintien de la même opposition comme fondement du
dégroupement homonymique de mots du même réseau lexical ne sont systématiques.
Concernant le premier fait, nous avons relevé, pour tous les dictionnaires étudiés, des
cas où des mots antinomiques ou présentant les mêmes aspects cognitifs et
sémantiques sont traités différemment ; les uns en homonymes, les autres en
polysèmes :
429
Dictionnaire Traitement homonymique Traitement polysémique
TLF Haut Bas
Le Petit Robert droit, e gauche
Le petit Larousse cochon porc
Lexis élever baisser (annexe II.7)
Hachette droit, e gauche
430
Par ailleurs, à l’opposé de la politique générale du dictionnaire, nous trouvons
des cas rares où l’abstrait niche dans le concret ou se confond avec lui dans une seule
acception :
-« 1. Centre
1. Point situé à égale distance de tous les points de la ligne ou de la surface
extérieure, ou situé à l’intersection des axes de symétrie
2.point essentiel, La question financière a été au centre du débat (syn. Cœur)
2. Centre 1. Ville, localité caractérisée par l’importance de sa population ou de
l’activité qui s’y déploie
♦ Central, e, aux Adj. Le commentaire a insisté sur l’idée centrale du livre » ;
- « ● Apercevoir : Apercevoir quelqu’un, quelque chose, voir, après quelque
recherche, une personne ou une chose que l’éloignement, la petitesse ou d’autres
raisons empêchent de découvrir d’emblée. Son intelligence lui fait apercevoir ce qui
échappe aux autres ».
Concernant le second fait, si les dégroupements homonymiques à travers
l’ensemble des oppositions peuvent se réduire à l’opposition générale entre « concret »
et « abstrait », ce modèle de catégorisation n’est pas aussi systématique dans Lexis (Cf.
Zwanenberg W., 1983, 27-28). On y trouve au moins un cas où une autre opposition,
vraisemblablement plus pertinente, structure le dégroupement des sens :
« 1.Allumer 1. Rendre lumineux, faire fonctionner pour donner de la lumière
♦ s’allumer 1. Devenir lumineux
2. devenir brillant (d’envie, de convoitise, etc.)
431
jacents à la faculté du langage. Ignorer la structuration conceptuelle du lexique au-delà
de la réalité immédiate du mot ne peut qu’évacuer tout le champ stéréotypique qui fait
de la langue plus qu’une simple nomenclature.
432
dénominative. Bœuf renvoie à la viande du bœuf animal, du taureau, de la vache et de
la génisse, excepté Hachette (annexe II.8 a). Les différents dictionnaires considèrent la
signification de viande comme une acception du mot bœuf. Mais le résultat immédiat
d’une telle dénomination, c’est qu’elle empêche d’étendre le principe de la polysémie
systématique aux instances impliquées par cette dénomination. En effet, si la
signification de viande pour taureau, génisse est tout simplement absente (annexe II.8
b, c, d), elle est exprimée, pour vache par une distorsion due au dédoublement entre la
référence à la chose et sa dénomination :
TLF : « 6. Empl. techn.a) BOUCH. souvent péj. Viande de cet animal, vendue en
boucherie sous l'appellation bœuf. »
PETIT ROBERT : « — Vendue en boucherie sous le nom de bœuf*, la vache a la
chair plus savoureuse que … » (absente dans les autres dictionnaires).
Vraisemblablement, cet usage du mot relève d’un emploi idiolectal et pour le mieux
sociolectal (6. Empl. techn.a) BOUCH.).
Poulet présente un autre cas légèrement différent du précédent (annexe II.8 e). Il
désigne :
- L’animal vivant qui peut être soit « jeune coq » ou « jeune poule » (TLF, PETIT
ROBERT, PETIT LAROUSSE), soit « poule » ou « coq » tout court (LEXIS) ;
- La viande du poulet, de la poulette et vraisemblablement de la poule et du coq
puisque ces deux substantifs figurent plutôt dans des dénominations de plats et non de
la viande.
Cette relation métonymique afférente qui porte la dénomination non sur la viande de
l’animal mais sur les plats préparés avec cette viande constitue le deuxième facteur
perturbateur de la systématicité polysémique (annexe II.8 f) :
-« 2. Coq au vin : plat préparé à partir de ce volatile cuit » (Le Petit Larousse)
Enfin, en dernier lieu, certaines dénominations peuvent signifier un rapport de
synonymie 127 et non un rapport de désignation référentielle :
127
Pour le passage de nom d’animal à « fourrure de cet animal », nous avons relevé un cas quasi-similaire où
deux dénominations renvoient à « fourrure-objet » :
PETIT ROBERT : Marmotte: « - Fourrure de cet animal »
TLF : Murmel « Fourrure de marmotte qui rappelle la martre et qui a l'aspect du vison »
Putois : « a) Fourrure de cet animal »
433
TLF : Cochon :« 1.b) P. méton. Viande de cet animal. Synon. fam. de porc » ; d’où le
fait de considérer la signification comme une simple nuance de sens (TLF et Le Petit
Robert).
Du reste, les dictionnaires ne semblent pas s’accorder sur les mêmes critères
pour catégoriser les significations. Dans Le Trésor de la Langue Française, le trait
/être, principalement, élevé ou recherché pour sa viande/ semble être déterminant dans
la présence (sous n’importe quelle catégorisation) ou l’absence de la signification de
viande associée au nom de l’animal (annexe II.9). Presque tous les noms d’animaux
relevés présentant cette valeur sémantique donnent lieu à une acception, une nuance de
sens ou une définition rendant la signification de viande. Tous les noms qui n’ont pas
cette valeur ne donnent lieu à aucune indication de la sorte. Un tel trait, n’étant pas
universel, est stéréotypique puisque n’importe lequel des animaux répondant à ce
critère peut être élevé pour toute autre raison et tout animal, habituellement élevé pour
d’autres utilités, peut être élevé juste pour sa viande. Quant à la distribution entre
acceptions, nuances ou allusions définitoires, elle serait régie différemment selon que
l’animal est un mammifère ou un oiseau. Dans le premier cas, tous les noms des
mammifères cumulant les deux traits /+élevage/ et /principalement destiné pour donner
de la viande/ (lapin, agneau, mouton, etc.) donnent lieu à « viande/acception ». A
cheval, veau, sanglier et lièvre sont rattachées des nuances de sens : le premier n’est
pas essentiellement élevé pour sa viande, le second est souvent associé aux noms de
plats (3. P. méton.a) BOUCH., ART CULIN) et les deux derniers ne sont pas
domestiqués.
Pour les oiseaux, la seule instance qui cumule les deux traits évoqués est « oie-
animal » ; la signification de « oie-viande » figure sous une acception. Cependant,
pour le reste (les instances ne répondant qu’à un seul critère), la catégorisation baisse
d’un cran pour se limiter à une nuance de sens (sarcelle), un trait dans la définition de
l’animal (faisan, perdrix), un exemple (caille) ou à l’absence (autruche). Dinde et
canard représentent des cas limites. Le premier peut être élevé pour ses œufs. Sa
consommation comme viande paraît contingente et saisonnière :
434
-« engraissé notamment pour les fêtes de fin d'année. ».
Le second peut être sauvage ou domestiqué. Quant à poule et coq, ils ne comportent
pas vraiment de nuance de sens renvoyant à « viande » mais ont une nuance plus
générale correspondant plus à des noms de plats :
Coq : « ART CULIN.Coq vierge. Chapon. Préparation faite à partir d'un coq, d'un
poulet ou d'une autre volaille »
Poule : « ART CULIN. Bouillon de poule. Eau de cuisson d'une poule ».
Quant au Petit Robert (annexe II.10), il semble réserver deux traitements
différents selon l’opposition /mammifère/ vs /oiseau/. Les mammifères présentant les
traits /+élevage/, /principalement, destiné à donner de la viande/ 128 et /de boucherie/
(agneau, mouton, porc, veau) donnent lieu à la signification « viande-acception ».
Ceux qui ne répondent qu’à un seul critère ou ne comportent pas le trait /boucherie/
ont des significations « viande » traitées comme nuances de sens (lapin, lièvre,
sanglier). Encore une fois, cheval fait l’exception ; il n’a cette valeur que d’une
manière contingente qui a fait l’objet d’une mention spéciale dans un exemple forgé
du même dictionnaire :
-« cheval de boucherie ».
Les significations « oiseau-viande » sont classées entre nuances de sens (canard,
dinde, oie), simple allusion dans la définition (faisan), mention dans un exemple
(sarcelle, poule) ou absence (autruche, perdrix). La ligne de partage entre les deux
traitements serait liée à l’opposition /+élevage/, /- élevage/, excepté pour poule pour
les raisons mentionnées ci-haut.
Lexis, Hachette et Le Petit Larousse combinent deux critères (annexes II.11, II.12 et
III.13): l’opposition /mammifère/ vs /oiseau/ et /être, principalement, élevé ou
recherché pour sa viande/. La plupart 129 des noms de mammifères relevés remplissant
ces deux conditions donnent lieu à des acceptions (lièvre 130 , sanglier 131 , porc etc.) de
128
La peau de chevreau est perçue comme étant plus saillante, d’où l’acception qui lui est réservée :
« 2¨ Peau de chèvre ou de chevreau qui a été tannée ».
129
Excepté chevreuil et cerf, absents du Petit Larousse et Hachette et traités dans Lexis respectivement dans une
définition et un exemple.
130
Traité comme nuance de sens dans Lexis.
131
Traité comme nuance de sens dans Hachette.
435
« viande-animal ». Parmi les noms d’oiseaux relevés, seuls ceux de faisan et oie
comportent dans leurs définitions du Petit Larousse des traits qui mentionnent le
caractère /être apprécié/ associés à leurs chairs :
Le Petit Larousse : Faisan : « à chair estimée »
Oie : « que l'on élève pour sa chair et son foie surchargé de
graisse »
Lexis exprime ce trait dans la définition (caille, faisan, oie et perdrix) et dans un
exemple (bécasse et dinde) 132 . Pour Hachette, les traits « poule-chair » et « perdrix-
chair » sont définitoires alors que pour oie, c’est le foie qui est mentionné en exemple.
En somme, malgré le caractère localement arbitraire qui pourrait concerner
l’attribution d’un trait et non d’un tel autre à une instance donnée, l’analyse du corpus
relevé concernant les catégories de viande les plus consommées ou les plus connues
montre quelques faits que l’on ne puisse récuser :
- Il est apparent que tous les dictionnaires ne catégorisent pas de la même façon
les mammifères et les oiseaux ; parmi ces derniers, l’accès au statut d’acception n’est
accordé qu’à la signification viande associée à un seul oiseau et par un seul
dictionnaire (TLF) ;
- Tous les dictionnaires accordent, à un niveau ou un autre, une importance à
l’usage que font les humains des animaux (particulièrement les mammifères). La
représentation de cet usage varie, parfois, d’un dictionnaire à un autre. Pour chevreau,
par exemple, les significations fondées sur un mécanisme métonymique se limitent à
« peau » dans Le Petit Robert, Lexis et Hachette ; dans le TLF, elles incluent celle de
« viande » ;
- Ces représentations varient également selon la fréquence de l’usage et selon
son aspect permanent (mouton, veau) ou contingent (cheval, oie) ;
- La différence de traitement entre mammifère et oiseau et d’une manière moins
régulière entre les occurrences de la classe des mammifères (très claire dans le Petit
132
Sous l’entrée poule, il y a une acception qui comporte un mélange composite de nuances où ne figure pas la
signification « chair comestible »:
« 2.Chair de poule v. CHAIR 1. ║Fam. Être comme une poule qui n’a qu’un poussin…
1.Chair 2….chair de poule, peau devenue granuleuse sous l’effet du froid..
436
Robert où le trait /+boucherie/ trace la limite entre acception et nuance de sens) semble
être influencée par la distinction entre « viande » au sens courant impliquant l’élevage
et l’abattage et « chair » tout simplement comestible :
-Viande : « B. 1. [P. oppos. aux végétaux comestibles et aux animaux aquatiques,
en partic. les poissons]
b) Mod., lang. cour., BOUCH. Chair des animaux de boucherie, à l'exclusion de la
volaille, des abats ainsi que des préparations de conserve (charcuterie, confits, etc.) »
(TLF)
-Chair : « Rem. 1. Selon BESCH. 1845, Lar. 19e, LITTRÉ et BAILLY (R.) 1946, la chair se
différencie de la viande en ce qu'elle n'a subi aucune préparation. Mais dans l'usage
cour., les mots chair et viande semblent employés indifféremment l'un pour l'autre.
Chair paraît pourtant s'employer de préférence à viande quand il s'agit de mets plus
fins (volailles notamment) » (ibidem.)
- Les critères de catégorisation ne s’appuient pas sur des propriétés ou des
relations de portée universelle mais sur des représentations plus ou moins saillantes à
un niveau stéréotypique mais non universellement typique.
En définitif, l’idée de la polysémie systématique attribue la structuration de la
langue à un principe fonctionnel abstrait et non à des principes cognitifs et culturels,
plus ou moins fondés dans le vécu et capitalisés en langue par le biais de la
conventionnalité. Si un affamé dans le désert se trouve obligé de se nourrir de la chair
de serpent (qui n’est ni mammifère, ni oiseau) ou d’hyène, cela suffit-il pour étendre le
principe de la relation métonymique à tous ces animaux et conclure que chaque
dénomination animale sert à désigner sa chair comme nourriture ? Nous savons bien
que, dans chaque culture, il y a des animaux qui ne font pas partie de la nourriture des
hommes pour une raison ou une autre. Dans ce cas, à quoi pourrait servir une
dénomination fictive hors d’usage ?
La représentation stéréotypique, dans sa variation sociolectale relative, constitue un
facteur qui empêche l’étiquetage systématique dans l’attribution des dénominations.
437
1.3. Le rôle des catégories syntaxiques et des mécanismes sémantiques dans la
variation du traitement du sens à l’intérieur des articles lexicographiques 133
La description du traitement de la donnée stéréotypique à l’intérieur de l’article
lexicographique a pour objectif d’identifier le lien que cette donnée entretient avec
l’acception initiale souvent de nature concrète. Dans cette optique, nous acceptons
pleinement le point de vue de Josette Rey-Debove qui affirme qu’« il faut partir…du
principe d’un état de langue originel, pur, à l’intérieur duquel le mot existe en tant que
noyau sémique ». Théoriquement, l’extension porteuse de la représentation
stéréotypique, quand elle est enregistrée, peut être appréhendée comme un sens, une
acception ou une nuance d’emploi. Dans les faits, la tâche s’avère plus complexe
puisque, à un certain niveau de généralité, le regroupement peut se faire selon un
critère non sémantique (la catégorie grammaticale ; « Haut1, haute, I. Emploi adj. »
(TLF)) ou, comme c’est le cas souvent dans le TLF et parfois dans Le Petit Robert,
selon un mécanisme ou un critère sémantique général sous lequel sont rangées des
significations disparates :
« Haut1, haute
E. Domaine abstrait
G. Loc. adv. et prép. » (TLF)
« Haut, haute
C (Abstrait; av. le nom) » (Le Petit Robert).
En contrepartie, on assiste dans les autres dictionnaires à une présentation plus
simplifiée se réduisant, le plus souvent, à une hiérarchie binaire qui opte soit pour la
polarisation d’une acception figurant suite à un numéro, soit pour le rattachement de
l’emploi au sens « concret » au moyen d’un tiret :
« Vue 6. Fig. Manière de voir, d'interpréter, de concevoir quelque chose. Avoir une
vue optimiste de la situation. Procéder à un échange de vues.
– Vue de l'esprit : Conception théorique qui ne tient pas compte de la réalité, des
faits ». (Le Petit Larousse).
133
Étant pour l’essentiel homonymique, le traitement de Lexis ne sera pas pris en considération dans ce
paragraphe.
438
De ce fait, pour homogénéiser la description, nous nous sommes limité à la partition la
plus commune et la plus facile à délimiter entre acception et nuance de sens. Toutefois,
l’extension, foyer de stéréotypie, n’est pas seulement descriptible à travers son lien
avec l’acception concrète et la place qu’elle occupe à l’intérieur de l’article mais
également à travers la représentation qu’on pourrait avoir de son usage. Les marqueurs
définitionnels contribuent à la structuration de l’information en l’ancrant dans un
registre donné ou dans un type de discours particulier.
Par ailleurs, pour des raisons que nous développerons ci-dessous, cette
description n’est pas réductible au cas par cas et nécessite une approche thématique
qui met en valeur les tendances générales dans le traitement de cas identiques. C’est ce
que nous tenterons de montrer respectivement à travers des échantillons de corpus
relatifs à différents types de projection entre des domaines différents : de l’animal vers
l’humain, des sensations aux sentiments, de l’espace aux caractères humains et de la
vision à l’intellect.
La différence entre la polarisation des significations en acception et leur
rattachement au sens concret serait en principe régi en fonction de la nature des traits
distinctifs et essentiellement en fonction de l’hyperonyme projetant chacun des
contenus sémantiques dans un domaine donné. Pour bouc, par exemple, le trait
« puanteur » n’a pas le même statut suivant qu’il est rattaché à l’animal ou à l’humain.
Dans le premier cas, il serait latent et pourrait être considéré, dans un certain discours,
comme une nuance d’emploi (Puanteur de bouc : Le Petit Robert) et, dans le second
cas, il serait le noyau sémantique d’une acception :
« 2. P. anal. ou métaph., Usuel, péj
a) Homme qui sent mauvais. Bouc puant.
b) Homme d'une lubricité anormale » (TLF).
Cependant, tel n’est toujours pas le cas dans les dictionnaires (Annexe II.14).
Le trait « humain » ne donne pas toujours lieu à des acceptions distinctes.. Par
exemple, la signification « vermisseau = chétif, misérable » est enregistrée dans Le
Trésor de la Langue Française 134 comme une acception ou plutôt comme un sens :
134
Le même traitement lui est réservé respectivement dans Lexis et Hachette :
2. Être chétif, misérable
439
« B. P. anal., péj. [À propos d'une pers.] Être faible, misérable, insignifiant ».
Le Petit Robert la traite comme une nuance de sens exprimée au moyen d’un
commentaire explicatif (Par métaph. (Par allus. à la faiblesse de l'homme)) et d’un
exemple (« Un si chétif vermisseau » , Pascal).
Par contre, une signification comme « furet/personne fouineuse » est considérée par le
TLF et Le Petit Robert comme une nuance de sens, là où Le Petit Larousse y voit une
acception :
« _Personne rusée qui s'introduit quelque part et y fouille partout » (TLF)
« 2. Personne curieuse, fouineuse » (Petit Larousse).
Puisque le mécanisme générateur de ce type de projection est le même ( chaque fois
une certaine représentation de l’animal est projetée dans le domaine humain pour
qualifier positivement ou négativement un trait de caractère), rien ne justifie, surtout
au niveau du contenu sémantique de chaque signification particulière, l’irrégularité du
traitement réservé à ce type d’extension. Par conséquent, l’intérêt de décrire la
génération du sens du point de vue du cas isolé, diminue considérablement
d’importance.
Cependant, cette absence de régularité n’empêche pas de dégager des tendances
plus ou moins divergentes quant à l’explicitation de la nature du mécanisme
sémantique régissant cette projection et à la nature du lien entre le sens initial et
l’extension.
Le TLF a la particularité de mentionner et de paraphraser le plus souvent le lien
sémantique (dérivation sémantique résultant de relations associatives : Par extension,
analogie, comparaison, etc. ; dérivation sémantique par changement de niveau
d’abstraction : abstrait, concret, figuré, etc., J.& C. Dubois, 1971, 101) permettant le
passage de l’acception source à l’acception cible (Cf. annexe II.14 et II.14 a) :
- Hyène
_P. compar. (ou p. métaph.). [Symbole de la laideur, de la lâcheté, de la cruauté
440
-Bovin, ne
2. P. ext…. [En parlant d'une pers. ou d'un attribut d'une pers.] Qui rappelle le
bœuf, par son aspect extérieur, ses particularités, son comportement
-Oie
D. P. compar. et au fig.
1. [P. réf. à la réputation de bêtise de l'oie]
L’explicitation d’un tel lien n’a vraisemblablement pas d’incidence directe sur la
hiérarchisation de la signification. Dans les exemples précédents, il s’agit
respectivement d’une nuance de sens rattachée au sens concret, d’une acception
suivant immédiatement ce même sens et d’une acception figurant parmi d’autres avec
lesquelles elle partage le même mécanisme sémantique. Cependant, l’échantillon du
corpus étudié montre une tendance du TLF à privilégier l’enregistrement de ces
significations sous des acceptions (vipère, vermisseau, etc.) ou des nuances de sens
rattachées à la définition de l’animal (hyène, hérisson, etc., Cf. annexe II.15).
Les autres dictionnaires, moins explicites quant à la nature précise du
mécanisme sémantique sous-jacent à ces extensions, se contentent souvent de les
présenter après la mention « Fig. » (Cf. annexe II.14). Le Petit Robert, à quelques
exceptions près (par exemple, absence de significations figurées relatives à hyène et
bardot, Cf. annexe II.15), a la même tendance que Le TLF. Quant au Petit Larousse et
Hachette, ils optent généralement pour les acceptions avec un taux d’absence
relativement important qui s’explique vraisemblablement par une contrainte de
volume.
Pour les cas de métaphores conceptuelles, Le Trésor de la Langue Française
réserve dans l’ensemble deux types de traitement. Le premier consiste à traiter les
extensions sous des acceptions figurant après des sous-divisions du même rang que
celles où sont traitées les significations relatives à la dimension concrète de la
dénomination (Cf. annexe II.15) :
441
« Obscurcir
B. Au fig.
1. [Le compl. désigne gén. un événement, une situation, une manifestation de
l'esprit] Rendre difficile à comprendre. Synon. embrouiller
hauteur, subst. fém.
II. Au fig. Caractère des personnes et des choses.
A. Caractère élevé.
1. [Dans qq. expr.] Grandeur, supériorité dans l'ordre intellectuel ou moral.
- Enflammé
C.2. Rempli d'ardeur, d'enthousiasme; très vif, intense. »
Dans le second type de traitement, nous trouvons la même configuration hiérarchique
sauf que les acceptions sont affinées en des nuances de sens introduites généralement
après des lettres alphabétiques minuscules ou des tirets :
« Voir
2e Section. Domaine de la pensée. Percevoir par l'esprit, se représenter en esprit.
I. Voir + compl.
B. Porter son attention sur quelque chose.
1. a) Examiner, étudier »
« Descendre
B. [Implique une idée de mouvement le long d'une pente] Aller d'un point à un
autre.
1. [Le suj. désigne une pers.]
c) [P. réf. à une hiérarchie]
[La hiérarchie concerne la race humaine ou un groupe humain, les animaux ou les
plantes] Être issu de.
[La hiérarchie concerne les fonctions sociales, des qualités ou des valeurs
morales ou littér.] Passer à un rang inférieur. »
« Chaleur
B.2.a) Ardeur, passion intérieure d'une pers..pour une pers. ou une chose ».
Dans le Petit Larousse, une bonne part des extensions est traitée en acceptions mais,
pour le reste, il se distingue d’une part, par le taux d’absence plus ou moins important
des significations figurées relatives aux projections de source spatiale et, d’autre part,
442
par le recours à un sens unique susceptible d’être interpréter d’une manière concrète
ou figurée (Cf. annexe II.15) :
-« Approfondissement : Action d'approfondir ; fait de s'approfondir »
-« Obscurcir : Rendre obscur. ».
Ce choix, rappelant les formes schématiques, laisse dans l’ombre les liens sémantiques
qui structurent la pluralité de significations associées à un item et favorise plutôt une
interprétation au premier degré qui ne donne pas à la projection stéréotypique toute
son ampleur.
Le Petit Robert, avec peu de paraphrase et avec moins de sous-divisions, opte pour une
classification plus ou moins du même type surtout dans le traitement des unités
comme (Cf. annexe II.16):
« Allumer : I. (Feu)
2. Exciter, éveiller de façon soudaine (une passion). »
« Froid, e : II.B.1. Fig. Qui ne s'anime ou ne s'émeut pas facilement.
_Par tempérament, Spécialt Dépourvu de sensualité
_Par maîtrise de soi. 2. calme, impassible, imperturbable »
Pour le reste des exemples relevés, la tendance dominante favorise le traitement des
extensions en acceptions (Cf. annexe II.15):
« Rond, ronde
4- Fig. (Personnes) Qui agit avec franchise, simplicité, sans détour. Un homme très
rond »
« Monter
3- Fig. Progresser dans l'échelle sociale, s'élever dans l'ordre moral, intellectuel »
« Regarder
4 Envisager de telle ou telle façon. Regarder le danger, le péril en face, l'affronter
fermement. ».
Enfin, Hachette a plus ou moins la même tendance à opter pour les acceptions avec un
taux d’absence remarquable dans l’échantillon relatif à la représentation figurée de
l’espace (Cf. annexes II.14 et II.15).
Ces variations de l’organisation de la microstructure sont doublées d’un autre type
de variation relatif aux représentations stéréotypiques en général. C’est ce que nous
nous proposons décrire à travers des éléments de corpus plus ou moins hétérogènes du
443
point de vue de leur apparition sur l’axe diachronique et des domaines dont ils relèvent
mais qui ont en commun le fait de porter un regard sur l’autre ethnique, politique,
professionnel, religieux ou social.
444
montrent que les limites de cette norme sont souvent difficiles à tracer. Dans
l’échantillon étudié, nous avons relevé plusieurs types de variation :
-A certains mots sont associées deux représentations antagonistes qui
conviennent à des emplois contextuels différents. Certains dictionnaires n’enregistrent
q’une seule. Tel est le cas dans cartésien pour lequel seul le TLF et Lexis mentionnent
deux emplois, l’un péjoratif 135 , l’autre mélioratif (Cf. annexe II.18):
« _ Péj. Un esprit cartésien. Un esprit sec, trop systématique, par opposition à un
esprit intuitif ». (TLF) ;
« 2. Esprit, raisonnement cartésien caractérisé par sa rigueur, son habitude des
démarches méthodiques, des déductions logiques [ce mot s’emploie parfois
péjorativement pour opposer la sécheresse de l’intelligence à la sensibilité artistique,
135
Cette valeur est exprimée pour cartésianisme dans le TLF et Lexis.
445
3- Personne qui, par ses œuvres, son exemple, donne des leçons, des préceptes de
morale. - moralisateur. Un moraliste austère. — Adj. Elle a toujours été moraliste.
-Empreint de moralisme. Attitude moraliste. (Petit Robert)
- Auteur qui écrit sur les mœurs, la nature humaine.( Le Petit Larousse).
Le TLF et Lexis mentionnent en plus des emplois péjoratifs du mot avec une différence
nette au niveau du marquage (Souvent péj/ quelquefois péjor.) :
3. Souvent péj.
a) Personne qui se plaît ou se complaît à moraliser. Il flotte autour d'elle le louche
parfum qu'on respire dans certaines maisons. Je ne veux pas faire le moraliste.
b) Celui (celle) qui est attaché(e) au formalisme de la morale ou qui se veut le
défenseur de la morale (TLF) ;
♦ Moraliste : 3. [quelquefois péjor.] Personne qui fait, qui aime la morale, Me préserve
le ciel de m’ériger en moraliste (Lexis).
Cette gradation de l’emploi plus ou moins neutre à la fréquence controversée de la
nuance péjorative semble s’inscrire, pour chaque dictionnaire, dans le cadre d’une
politique propre. Dans l’ensemble, nous avons constaté que Le TLF a une tendance
plus affichée à enregistrer les extensions du premier type. En revanche, c’est Le Petit
Larousse qui use le plus des formulations du second type (Cf., par exemple, les noms
d’ethnies) ;
- la signification stéréotypique peut se déployer soit par extension soit par
restriction de l’emploi comme dans le cas d’académique dont le TLF mentionne les
deux emplois en envisageant trois acceptions chacune relative à un domaine et dont
l’une n’est rendue que par l’exemple :
B. Péj. Qui manque d'originalité, de force; conventionnel.
1. Dans le domaine de la litt. et du lang.
2. Dans le domaine des B.-A
3. Plus gén. :
- 17. Il semblait que les choses elles-mêmes lui fussent devenues étrangères, jusqu'à
cet ameublement prétentieux et désuet, d'une richesse sans fantaisie, d'une sévérité
sans noblesse, académique et bourgeois, de professeur millionnaire.
G. BERNANOS, La Joie, 1929, p. 563.
446
Le Petit Robert (par le biais des exemples) et Lexis restreignent la signification aux
domaines de la production littéraire ou artistique :
3- (1839) Qui suit étroitement les règles conventionnelles, avec froideur ou
prétention. - compassé, conventionnel. Un poète académique. « On s'était fait une
langue de convention, un style académique » (Taine). — (En art) Peinture
académique. – académisme (PR) ;
■. Académique : 2. péj. Dont le conformisme à la tradition littéraire et artistique
suppliée au manque d’imagination et d’originalité (Lexis).
Le Petit Larousse et Hachette se contentent chacun d’un seul emploi, général pour l’un
et dans le domaine artistique pour l’autre :
2. Péjor. Conventionnel, sans originalité (PL) ;
Académique : 2. conventionnel et compassé (en parlant d’une oeuvre d’art). »
(Hachette).
Dans les trois cas, il s’agit de mot relevant du discours d’intellectuels et où le rejet
idéologique d’une acception n’est pas exclu.
Pour des mots du sens commun où la péjoration peut être plus évidente, on
assiste parfois à des effets d’atténuation ou d’adhésion qui rendent compte
implicitement ou explicitement d’un certain regard du lexicographe sur le contenu
qu’il traite.
Ces effets sont surtout présents dans certaines gloses définitionnelles du TLF
qui tout en n’étant pas, en elles-mêmes, stéréotypiques servent de cadre validant sans
choquer le contenu rendu par le marqueur et l’exemple. Des formulations comme
« Caractère particulier rappelant un des traits dominants des Asiatiques » figurant
avant des contenus qualifiés de « péjoratifs » rattachés à asiatisme ou encore du genre
« qui est relatif », « qui est propre » encadrant de tels contenus sous les entrées
asiatique et sémitique attribuent une nuance de vérité sur les représentations en
question.
La modalisation explicite, à proprement parler, apparaît dans la paraphrase
définitionnelle. Plusieurs types de formulation servent à cette fin (Annexe II.20).
Le lexicographe opte pour une objectivité « mathématique » qui ne favorise ni le faux,
ni le vrai mais qui enregistre pour le moins la possibilité de l’écart par rapport aux
447
propriétés réelles du référent. Le TLF emploie ce type de paraphrases pour chinois et
provincial :
448
Chinois, se
B. P. anal., avec une nuance péj. (Personne) qui présente des ressemblances avec les
Chinois, leur physique et surtout leur caractère réel ou présumé; qui est étranger, peu
intéressant, original, compliqué, rusé. Provincial, -ale, -aux, adj. et subst ;
- Provincial
- b) Souvent péj. Qui a les caractéristiques ou certaines caractéristiques
(simplicité, rusticité, manque de finesse, etc.) appartenant ou supposées
appartenir aux habitants de la province.
Un autre procédé consiste à attribuer le contenu à une instance indéfinie (on)
moyennant une modalisation par une forme nominale (reproche) ou verbale ( qu’on
prête, prêté, qu’on attribue, que l’on croyait…) marquant une certaine distance que
prend le lexicographe vis-à-vis de la paraphrase définitoire de l’emploi
(provincialisme, Lexis et Hachette ; Cf. annexe II.20), du sens initial duquel il dérive
(bohémien, Lexis et Hachette) ou de la signification afférente à l’antonyme par rapport
à laquelle le contenu stéréotypique est institué (provincial, Petit Larousse ; banlieue,
TLF) :
♦ Provincialisme 2. péj. Gaucherie que l’on prête à la province, par opposition à
Paris (Lexis) ;
Provincialisme : 1. Caractère maladroit, emprunté que l’on attribue parfois aux
provinciaux » (Hachette) ;
Bohémien : 1.Nomade que l’on croyait originaire de la Bohême, disant de bonnes
aventures ou mendiant (Lexis) ;
Bohémien, ne : 1. Membre de tribus vagabondes qu’on croyait originaires de la
3. Péjor. Qui n'a pas l'aisance que l'on prête aux habitants de la capitale (Petit
Larousse) ;
Banlieue C. Emploi adj., fam., péj. Dépourvu de la distinction, du bon goût prêté
à ce qui vient de la ville. » (TLF).
Enfin, certains commentaires expriment un rejet plus ou moins explicite du
contenu stéréotypique soit par sa banalisation, soit par le rappel des conditions de son
émergence. La paraphrase que réserve Lexis à bourgeoisisme illustre le premier cas :
«Péjor. Accentuation presque caricaturale de tous les caractères de la
bourgeoisie».
449
Le commentaire du lexicographe met l’accent sur le caractère excessif et exagéré de
l’emploi ce qui équivaut presque à sa condamnation.
Le second cas est visible dans les paraphrases accompagnant hébraïsant et juif
respectivement dans Lexis et Le TLF :
« _♦ Hébraïsant,e : 2.Hist. Juif converti qui, au début du christianisme, restait
attaché à la lettre des prescriptions mosaïques
_ Juif, juive B. (Celui, celle) qui appartient aux descendants du peuple ci-dessus,
qui se réclame de la tradition d'Abraham et de Moïse.
2. Péj. [À cause des métiers d'argent interdits aux chrétiens et réservés aux juifs
au Moy. Âge] Synon. de avare, usurier.
Dans les deux cas, la référence aux faits historiques joue comme un argument
d’autorité qui restaure en quelque sorte le contenu dénotatif sur lequel se sont greffées
les représentations stéréotypiques.
Qu’elle soit implicite ou explicite, la modalisation du discours lexicographique
est le produit d’un ensemble de facteurs où se mêlent le point de vue propre de l’auteur
de l’article, sa manière de se présenter les faits de la langue, la politique générale du
dictionnaire et les tendances de la culture dominante. Cependant, elle ne constitue pas
le seul moyen dont dispose le lexicographe pour exprimer sa vision propre concernant
des significations linguistiques pour le moins contraignantes. L’absence pure et simple
de toute mention de l’emploi stéréotypique pourrait être un indice de la censure
volontaire ou imposée par des considérations d’ordre éditoriale ou autre. Les
implications idéologiques des significations mentionnées ou exclues donneraient une
idée relative des fondements de tels choix.
Pour tous les échantillons étudiés, Le TLF, conçu à partir d’un vaste corpus
littéraire, est le seul dictionnaire qui enregistre d’une manière ou d’une autre des
significations stéréotypiques pour la totalité des mots dont la plupart sont étiquetés
comme péjoratifs au moins dans un emploi. L’abondance d’un tel marquage associé à
certaines représentations des tendances politiques, des ethnies, etc., là où les autres
dictionnaires optent pour des paraphrases plus ou moins neutres, est d’abord le produit
d’un choix qui définit les mots d’après leurs emplois dans le discours. Cependant,
450
deux faits montreraient vraisemblablement que la vision idéologique n’est pas loin
d’un tel choix :
- Si l’on se limite à des mots tels que communiste, marxiste ou tout autre terme
relatif à ce courant philosophique et politique, il est difficile d’imaginer qu’ils ne
figurent dans le discours que sous une coloration neutre ou péjorative. Autrement dit,
il ne suffit pas pour un emploi donné qu’il soit attesté dans un corpus littéraire pour
être mentionné dans le dictionnaire ;
- Par conséquent, le lexicographe se devrait de distinguer deux types d’emplois
qui, sur le plan sémantique, n’ont pas la même pertinence. Le premier type est relatif
aux emplois dotés d’une certaine conventionnalité et qui ne comptent donc que sur
leurs potentiels sémantiques pour exprimer les significations qui leur sont inhérentes.
Dans les exemples suivants du TLF, les significations des mots jésuite, moraliste et
académisme, étiquetées par le marqueur « péjoratif », ne comptent que sur le potentiel
évocateur du mot concerné :
-Être un vrai jésuite; être plus jésuite que les jésuites; avoir un air jésuite
-Il flotte autour d'elle le louche parfum qu'on respire dans certaines maisons. Je ne
veux pas faire le moraliste
- Géricault est l'héritier de l'académisme de David et, par delà le romantisme, il
annonce le réalisme de Courbet.
L. RÉAU, L'Art romantique, 1930, p. 29.
Le second type concerne les emplois idéolectaux où les charges afférentes au mot sont
construites dans le discours et plus précisément à partir des significations des éléments
lexicaux présents dans le co-texte. Tel est le cas dans les emplois suivants,
respectivement de bolchévick, communiste et marxiste marqués comme péjoratifs dans
le même dictionnaire :
-3. CÉSAR, il rugit. -Il a bien fait! C'est ça, vous approuvez le révolté, vous félicitez
l'ingrat! Encore un bolchevick, qui veut détruire la famille! Et il faut entendre dire ça dans
mon bar! C'est inouï! PAGNOL, Fanny, 1932, I, 9, p. 39.
-L'avènement d'un régime totalitaire, dictatorial ou communiste, aurait pour
résultat l'annihilation légale de toute formation politique indépendante (MARITAIN,
Humanisme intégral, 1936, p. 293).
451
-Cette mode lancée (...) par les prétendus «nouveaux philosophes» s'est déployée
sur tous les médias en variations sur le thème: marxisme = goulag (Révolution, 23-29 oct.
1981, no 86, p.58, col. 1).
Selon les thèmes, les autres dictionnaires retiennent un nombre plus ou moins
réduit d’extensions à partir de l’acception initiale.
Pour les noms de métiers et l’appartenance à une aire géographique, les
significations mentionnées par ces ouvrages sont respectivement (à part marchand
dans Hachette et docteur dans Le Petit Larousse), mercanti/mercantile, paysan et
provincial, provincialisme (Cf. annexes II.21 et II.22). Certains de ces mots renvoient
initialement à une réalité socio-économique révolue (mercanti/mercantile) ou ont une
saillance culturelle nettement apparente (paysan, provincial, provincialisme) pour être
ignorées.
Les significations rattachées aux noms ethniques sont inégalement mentionnées
dans les quatre autres dictionnaires (Cf. annexe II.23). Le Petit Larousse exclut de son
traitement toutes les représentations relatives aux communautés actuelles. Les seules
extensions de ce type, enregistrées, concernent les Bohémiens (bohême, bohémien),
peuple ou groupe social existant à des époques révolues et chleuh, mot d’une charge
péjorative liée à la deuxième guerre mondiale. Hachette mentionne, en plus, chinois et
chinoiserie auxquels les marques associées (« figuré » et « familier ») confèrent une
atténuation diminuant l’effet de péjoration. Cette absence est le résultat d’un choix
pour un dictionnaire qui s’est imposé d’enregistrer les « créations du français vivant
[…] sans concession toutefois pour les vulgarismes ou pour les mots pouvant choquer
par leur caractère discriminatoire à l’égard du sexe, de l’origine ethnique ou des
convictions philosophiques ou religieuses » (Préface du Petit Larousse, 1993). Quant à
Lexis, il ajoute surtout juif, juiverie et sémite qui se trouvent modalisés par le trait
« vieux » ou relativisé par l’adverbe « parfois » (sémite). Le Petit Robert, lui, traite un
nombre d’extensions plus important mais dont la plupart ne sont pas explicitement
péjoratives (balkanisation, américaniser, américanisme, etc.
Les stéréotypes associés à une classe ou à un rang social ne sont pas aussi
fréquents dans ces dictionnaires par comparaison à ceux enregistrés dans Le TLF
(Annexe II.24a). Dans l’ensemble, les représentations péjoratives se limitent à
452
quelques emplois qui n’impliquent pas la classe dans son ensemble mais qui donnent
néanmoins une certaine représentation des traits de caractères considérés comme
typiques chez ses membres (Cf. le traitement de bourgeois, bureaucrate, capitaliste,
clergé et technocrate, annexe II.24 b).
D’autres stéréotypes ont exclusivement une valeur méliorative 136
(aristocratique, élite) ou font l’objet d’un traitement controversé selon les
dictionnaires (aristocrate, Cf. annexe II.24 c).
Pour les significations à charge idéologique, politique ou religieuse, en plus du
TLF, seuls Hachette et Lexis associent une marque de péjoration à un ensemble
d’emplois relatifs à un courant idéologique et politique, toujours actuel (Cf. annexe
II.25):
Hachette
Bolchévick péj. Communiste
Bolchévisme : 2. péj. Communisme
Communard 2. Mod. Et péjor. communiste
Lexis
Bolchévique, bolchéviste : …devenu ensuite synonyme de COMMUNISTE
(souvent péjoratif) jusqu’à la fin de la deuxième guerre mondiale
♦ bolchévisme, syn/ vieilli ou péj. de COMMUNSISME
♦ bolchéviser : syn. Péj. de COMMUNISER (remplacé avec cette valeur par
SOVIETISER)
bolchéviser
Syn.péjor. de communiser
♦ Communard, e 2. Péjor. et pop. communiste
♦ Communiste
♦ Coco Adj. et n. abréviation pop. et péjor. de COMMUNISTE ».
Les autres emplois enregistrés par les quatre dictionnaires n’impliquent pas des
tendances ou des institutions actuelles. Dans l’ensemble, ils concernent :
- un fait historique ou une tendance révolue (jésuite, jésuitisme…) ;
- un emploi à charge méliorative ou neutre (cartésien, pacifiste) ;
136
À l’exception du TLF qui mentionnent pour tous ces mots deux emplois, l’un mélioratif et l’autre péjoratif.
453
- un mot qui n’a pas d’autres significations que celle stéréotypée
(humanitarisme) ;
- une restriction à un domaine qui n’implique pas directement le référent source
(académique : domaine littéraire ou artistique) ;
- des attitudes personnelles et sans dimension communautaire (idéaliste,
moraliser, moralisateur, moralisme) ;
- des significations d’ordre général (politicien, commun, conventionnel) ;
- enfin, des significations déstéréotypées (Cf. bourgeoisisme dans Lexis).
A comparer avec l’exhaustivité des extensions figurant dans le TLF, les emplois
absents dans les autres ouvrages révèleraient une censure plus ou moins apparente qui
exclut les représentations controversées ou discriminatoires (croyances religieuses :
clérical, église… ; ethnies et peuples : américaniser, arabe, etc.). Ainsi, le travail du
lexicographe, qui est censé rendre compte d’une norme linguistique et des écarts par
rapport à cette norme, devient en quelque sorte l’écho de la polyphonie qui caractérise
l’usage des mots et leur représentation dans des sociolectes différents. De ce fait, la
variation qui en résulte va de l’enregistrement, parfois excessif, de toute résonance
particulière dans le discours à la censure.
Généralement, les significations sont rendues à travers des paraphrases
synonymiques accompagnées des marqueurs définitionnels exprimant les conditions
de leurs mises en discours et des exemples illustrant leurs emplois. Ces derniers
peuvent être le foyer d’une représentation stéréotypique rattachée à un mot mais
figurant sous une autre entrée. Ainsi par exemple, l’arabe est-il respectivement un
trafiquant et un corsaire sous les entrées trafiquant et corsaire du Petit Robert et du
TLF (Cf. annexe II.26).
Ceci nous mène à interroger, les modes de distribution de l’information à travers
d’autres composants aussi variés de l’article lexicographique comme les marqueurs,
les exemples, les synonymes et les antonymes qui seraient les indices d’un point de
vue ou d’une évaluation émanant de l’élaborateur.
454
3- Variation de la distribution de l’information à l’intérieur de l’article
lexicographique
La centralité de la définition en tant qu’acte locutoire naturel dans toutes les
langues ne doit pas cacher le fait qu’elle figure à l’intérieur de l’article
lexicographique à côté d’autres composants qui ne sont pas moins porteurs de sens.
455
Type de mot PR PL Lexis Hachette
TLF
variation
Degré Chleuh Fam. Péjor. Fam. Péjor. Injure,
péjor.
Juif Péjor.
Diffamatoire
456
en quelque sorte puisqu’elle se trouve consacrée par la fréquence de l’emploi
(chinoiserie, Petit Robert). Ces deux marques, associées avec le trait « péjoratif » à
arbi respectivement dans Le Petit Robert et Le TLF exprimeraient plus nettement une
différence d’appréhension de la dimension temporelle de l’emploi. Par ailleurs, le trait
« péjoratif », même quand il se trouve mentionné, peut s’accompagner d’un marquage
lui-même stéréotypé : la signification rattachée à capitaliste, par exemple, est
considérée d’une manière ou d’une autre comme faisant partie du langage standard
(marqué « Fam. » dans trois dictionnaires) ; Le TLF et Lexis situent la péjoration, l’un
dans un cadre élargi (usuel), l’autre dans un sociolecte marqué : « discours de
l’extrême gauche ».
Pour le niveau d’ancrage de ces marques, les différences entre les dictionnaires
proviennent généralement de la variation de la focalisation sur l’un de ces aspects
(annexe II.17). Toutefois, nous avons relevé des cas de discordance concernant le
même niveau :
-Pour la variation dans le temps, la controverse entre les lexicographes est
souvent implicite. Elle apparaît par la mention d’un état de langue donné relatif à un
mot dans un ou plusieurs dictionnaires, là où les autres se contentent d’une notation
relative au milieu ou au niveau d’abstraction :
« Furet : Personne rusée qui s'introduit quelque part et y fouille partout
TLF : Fig.
Petit Robert : Fig. vieux
Petit Larousse : vieux ».
Elle peut parfois être explicite comme dans la signification d’inconstance associée
à caméléon :
-B.2. Usuel gén. Péj. Celui qui change d'opinion, de manière d'être selon les
circonstances (TLF)
-2. Fig., vieilli Personne qui change de conduite, d'opinion, de langage, suivant les
circonstances (Petit Robert).
-Pour la variation des niveaux de langue relatifs au groupes sociaux ou aux
situations de communication, l’hétérogénéité du traitement concerne parfois des
marques qui ne relèvent pas forcément du même axe de classement mais qui peuvent
457
être l’indice « d’une attitude plus ou moins normative 137 » quand elles ne sont pas le
signe « d’options différentes » (Chantal Girardin, 1971, 78). Dans l’échantillon décrit
(domaine animal), cette variation s’établit surtout entre les notations « familier »,
« populaire » et « argotique » 138 :
« Faisan :
-C. Fig., pop. Individu malhonnête, se livrant à des affaires louches » (TLF)
-« 2.Arg. Individu qui vit d'affaires louches » (Petit Robert)
-« 2.Fam. Individu qui vit d'affaires louches » (Petit Larousse)
-« B.Fam. Homme d'une probité douteuse, aigrefin » (Hachette).
Ainsi, les marques qui sont censées délimiter le champ d’un emploi ou d’une
représentation stéréotypés par le renvoi à certaines catégories sociales, deviennent, par
l’hétérogénéité de leur association à un même mot, elles-mêmes foyers d’une vision
stéréotypique à propos de ces catégories.
137
Par exemple, pour Chantal Girardin (ibid.), populaire ou argotique signale un écart plus important par
rapport à la norme que familier ».
138
« La notation « familier » diagnostique le style de conversation qui s’oppose donc au style de l’écrit (la
langue standard est composée de mots qui appartiennent aux deux styles) ; l’indication « populaire »
diagnostique le style du peuple, assimilé au XIXème siècle aux « basses classes ». « Argotique » indique un
terme spécifique dont l’usage est limité à la communication dans un milieu restreint » (J. & C. Dubois, 1971,
101).
458
Généralement, on s’attend à ce que la citation ou l’exemple fonctionne comme
une preuve d’autorité validant le contenu définitoire ou les charges connotatives ou
autres annoncées par les marqueurs. Le cas idéal se présente quand ces trois
composants expriment d’une manière harmonieuse la ou les valeur(s) sémantique(s)
donnée(s). C’est le cas par exemple dans le traitement du TLF de l’une des acceptions
de moraliste où la nuance péjorative est rendue à la fois par le marqueur, la définition
et la citation :
- 3. Souvent péj.
a) Personne qui se plaît ou se complaît à moraliser. Il flotte autour d'elle le louche
parfum qu'on respire dans certaines maisons. Je ne veux pas faire le moraliste.
Cependant, des cas de traitements moins « authentiques » sont observés quand
la citation illustre la connotation annoncée par le marqueur mais avec une définition
neutre (Cf. par exemple américanisme dans le TLF). Ce choix est parfois justifié par
l’aspect modalisé et relatif de la connotation (souvent péj. Dans cet exemple) qui
impose le recours à une paraphrase synonymique plus générale ou neutre :
- « I . Transformer en marquant des traits propres à la civilisation américaine (du
Nord). ».
Mais, il arrive souvent que les contenus de l’exemple ou de la citation se situent à un
égard ou à un autre en deça ou au-delà de ceux formulés dans le marqueur ou la
définition. La valeur illustrative est ainsi reléguée à un rang second. Nous trouvons
dans le traitement d’américanisme dans le PR une illustration du premier cas de
figure. La définition du mot marque contient une charge méliorative nette :
- « Admiration, imitation du mode de vie, de la civilisation des États-Unis ».
la citation n’exprime pas cette charge :
- « Le monde marche vers une sorte d'américanisme » (Renan).
La raison en semble résider dans la rupture diachronique entre deux significations,
l’une vieillie (celle dont il est question dans cette définition) et l’autre actuelle et
péjorative même si elle n’est pas enregistrée dans ce dictionnaire contrairement au
TLF qui l’explicite (B. Le plus souvent péj.). La neutralité de l’exemple paraît de ce
point de vue relativiser la charge méliorative qui n’est plus perçue en synchronie.
Les exemples du second cas de figure sont plus variés.
459
Certains d’entre eux expriment un point de vue idéologique favorable ou défavorable
qui n’est pas annoncé auparavant. Relèvent du premier emploi mélioratif les
définitions de chrétien (PR et Lexis) et de libéralisme (TLF) :
- Chrétien : « Qui est empreint d'influence chrétienne, Traditions chrétiennes.
Humanisme chrétien » (PR) ;
- « Relatif ou conforme à la doctrine de Jésus-Christ , La religion chrétienne est
principalement consolatrice (Gide) » (Lexis) ;
- Libéralisme : « Ensemble des doctrines politiques fondées sur la garantie des droits
individuels contre l'autorité arbitraire d'un gouvernement (en particulier par la
séparation des pouvoirs) ou contre la pression des groupes particuliers (monopoles
économiques, partis, syndicats), ... le libéralisme pose des limites à l'intervention de
l'état par la reconnaissance des droits du citoyen, tempère le pouvoir exécutif par le
contrôle législatif et le pouvoir judiciaire, protège l'individu contre les abus de la
puissance publique, admet la représentation des minorités et les droits de
l'opposition, tient grande ouverte la lice où s'affrontent, sous la tutelle de la loi, les
compétitions individuelles et se nouent les solidarités sociales...
L. ROUGIER, Les Mystiques écon. Paris, Librairie de Médicis, 1938, p. 15 ».
Les citations figurant sous les entrées asiatique et communisme (sens II) dans le TLF illustrent
l’emploi péjoratif :
- Communiste : « 3. (Celui qui est) partisan de l'égalité absolue, . ... dans l'âme de
l'homme pour qui les trésors des nations allaient s'épuiser, on surprenait des
mouvements de haine que les communistes et les prolétaires manifestent à cette
heure contre les riches. CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 2, 1848, p.
320 ».
D’autres exemples rendent compte des aspects problématiques ou controversés des
connotations associées aux items considérés. Dans le premier cas, la citation se charge
d’exprimer deux facettes opposées du même phénomène s’inscrivant ainsi dans une
perspective neutre comme dans le traitement de capitalisme par le TLF :
- « B. Système économique et social qui se caractérise par la propriété privée des
moyens de production et d'échange et par la recherche du profit. L'esprit objectif du
capitalisme est un esprit d'exaltation des puissances actives et inventives, du
dynamisme de l'homme et des initiatives de l'individu, mais c'est un esprit de haine
de la pauvreté et de mépris du pauvre; le pauvre n'existe que comme outil d'une
460
production qui rapporte, non comme personne. MARITAIN, Humanisme intégral,
1936, p. 126.
Dans le second cas, les citations relatives au même mot dans les différents
dictionnaires montrent l’aspect controversé de la charge considérée. Les traitements
réservés à pacifiste illustrent parfaitement cette discordance. Dans le TLF, la citation a
une charge péjorative nette conforme au contenu exprimé par le marqueur et la
définition :
- « B. Péj. Personne qui préconise la paix à tout prix ou prétend à une paix
universelle. Un nationaliste rhénan a l'idée qu'un nationaliste français le comprendra
et le respectera mieux que ne fait un pacifiste décadent qu'il méprise (BARRÈS,
Cahiers, t.14, 1922, p.45) ».
Dans Lexis, le marqueur et la définition ne figurent pas et la citation exprime la totalité
du sens. Celui-ci exprime le point de vue favorable de son auteur même s’il laisse
entendre un autre point de vue possible :
-« Même si vous n’êtes pas pacifiste, vous devez me respecter (Sartre) ».
Le Petit Robert, avec une définition plus ou moins neutre et en l’absence de tout
marqueur, exprime un point de vue favorable tout en évoquant plus explicitement une
appréhension sociolectale différente du sens :
- « Partisan de la paix, « vos compatriotes, s'ils me connaissaient, me flétriraient
sûrement du nom de " pacifiste " qui est chez vous, je crois, une injure »
(A. Hermant) ».
Dans l’ensemble, étant relative à un auteur donné, la citation choisie en principe pour
illustrer une signification se voit doter dans la pratique lexicographique de valeurs
différentes qui fluctuent entre l’expression de la diversité et l’adhésion à un point de
vue aux dépens des autres.
Cette valeur ajoutée à la paraphrase définitionnelle est également présente dans
les synonymes et les antonymes mais avec des fonctions parfois différentes.
461
peut avoir des relations sémantiques d’équivalence ou d’opposition avec d’autres
mots, selon ses acceptions et ses emplois.
Quant aux synonymes gratte-papier et rond-de-cuir figurant sous l’une des acceptions
de bureaucrate, ils se chargent d’expliquer, dans un registre de langue familier, la
valeur péjorative annoncée par le marqueur et absente dans la définition (employé de
bureau). Cette fonction est à rapprocher de l’emploi illustratif typique de l’exemple.
Par ailleurs, les synonymes peuvent également servir à spécifier un contenu plus
ou moins vague ou à nuances multiples, lié à une instance référentielle définie et que le
lexicographe choisit de mentionner. C’est le cas de cartésien dans le Petit Robert :
- « 3- Par ext. Esprit cartésien, qui présente les qualités intellectuelles considérées
comme caractéristiques de Descartes. 6 clair, 2. logique, méthodique, rationnel,
solide ».
462
Il peut également s’agir d’une charge connotative n’ayant pas de correspondant
sémantique susceptible d’être lexicalisé comme pour capitaliste dans le TLF :
Enfin, les synonymes peuvent jouer un rôle atténuateur d’une charge péjorative
associée au mot. Dans le traitement de juif du TLF, cet effet est atteint par un double
procédé. D’abord, le dictionnaire en question explicite la source du stéréotype :
- « 2. Péj. [À cause des métiers d'argent interdits aux chrétiens et réservés aux juifs au
Moy. Âge].
Pour ce qui est de l’antonymie, son rôle essentiel semble résider dans la
désambiguïsation d’une superposition d’emplois possibles d’un mot. Cette visée
concerne la distinction de différentes acceptions d’un même item ou d’un contenu
conceptuel par rapport à d’autres contenus figurant sous d’autres dénominations.
Comme illustration du premier cas de figure, nous citons les antonymes rattachés à
villageois sous deux acceptions différentes enregistrées dans le TLF :
463
- « En partic. Lourd, d'une grande force, robustesse ou vigueur. Anton. délicat,
fragile. Force villageoise » ;
- « Synon. fruste, grossier, mal élevé (v. élevé2), rustre, sans façon* ; anton. fin (v.
fin2), raffiné ».
L’idée de force associée à ce mot donne lieu à deux significations différentes : l’une
méliorative, l’autre péjorative. En plus des synonymes, les antonymes délicat, fragile
et fin, raffiné rendent compte de cette différence. Nous avons là un autre cas qui révèle
comment la stéréotypie peut être la source d’une structuration translexicale des unités
de la langue.
Ces antonymes assurent dans le cadre de cette acception un double rôle. D’abord, ils
tracent les contours du concept défini par rapport à d’autres objets conceptuels avec
lesquels il entretient une relation de disjonction exclusive. La coexistence entre ces
différents courants dans un même esprit est évidemment impossible. Puis, ils
invalident par-là même une certaine représentation, réelle ou possible, qui, dans un
univers de croyance donné, établirait un rapport de similitude ou d’équivalence entre
ces objets. Une telle tendance est déjà enregistrée, par le même dictionnaire, dans le
cadre d’un exemple illustrant un emploi de bolchévique :
Cependant, sous les mots vedettes, nous ne retrouvons pas que des extensions
de sens structurées de la sorte. Les séquences figées stéréotypiques, figurant sous des
464
subdivisions, se déploient également à partir du sens de l’un des composants et ont
formellement la configuration des extensions polysémiques. Dotées d’une certaine
stabilité relative, elles sont, en principe, hors du champ des modalisations
idéologiques. Toutefois, leur caractère figé et leur sémantisme plus ou moins opaque
soulèvent des interrogations quant à leur rapport aux mots simples auxquels elles se
trouvent rattachées.
465
Troisième chapitre : Traitement des stéréotypes figés
466
l’impact du choix de l’emplacement sur la structuration sémantique à l’intérieur de
l’article lexicographique.
Le traitement d’une séquence figée dans la macrostructure ou la microstructure
d’un dictionnaire de langue dépend conjointement du type de l’unité en question et de
l’appréhension du phénomène du figement en général par les lexicographes.
Au niveau de la macrostructure, l’obstacle premier est celui de choisir le ou les
mot(s) clé(s) qui détermine(nt) l’entrée sous laquelle sera traitée la SF.
Grosso modo, deux pratiques lexicographiques sont en présence :
-l’expression figure sous le mot considéré intuitivement comme étant principal.
Pour une même expression, la place diffère d’un dictionnaire à un autre comme elle
peut figurer sous plusieurs entrées à la fois. Ainsi en est-il de l’expression prendre ses
désirs pour des réalités qui apparaît une seule fois dans le Petit Larousse sous désir et
trois fois dans le Petit Robert sous prendre, désir et réalité.
Dans ce dernier cas, même si l’on respecte en apparence l’aspect polylexical de
l’unité, le problème n’est que déplacé au niveau de la microstructure car on s’attend
normalement sous chaque entrée à une signification particulière du mot en question,
rendant sa contribution spécifique dans le sens global de l’expression, ce qui n’est
souvent pas possible comme en témoigne la paraphrase redondante sous chaque entrée.
Avec le choix d’une seule entrée, il y a lieu de s’interroger sur les critères
permettant de décider de l’importance du mot choisi. Dire que l’intuition est pour
quelque chose cache, outre l’absence de critères clairement définis, une appréhension
envers tout ce qui n’est pas monolexical. Ainsi, considérer un terme comme noyau
d’une expression fait appel inévitablement aux règles de la syntaxe libre qui, quand il
s’agit d’analyse syntaxique ou sémantique dépendent crucialement de la perspective
théorique adoptée. Pour livrer un combat par exemple, le fait de la faire figurer sous
l’entrée livrer privilégie le verbe, supposé être prédicat verbal, alors qu’en fait, il n’est
qu’un support du prédicat nominal combat.
Ce type d’inconvénient devient plus problématique quand on prend en compte
la dimension sémantique puisque dans les séquences figées, et comme le formule
Gaston Gross (1996, 12), « l’opacité sémantique [phénomène scalaire] et les
467
restrictions syntaxiques vont de pair ». Il en résulte une grande hétérogénéité dont tout
traitement unitaire est voué à l’échec.
Émanant de la décomposition de l’expression selon les règles de la syntaxe
libre, le choix intuitif d’un élément aux dépens des autres pourrait signifier que chaque
SF serait susceptible de deux interprétations : l’une figurée et l’autre littérale. Le
dilemme reste entier puisque les deux sens ne coïncident pas, l’un est global et où
chaque mot n’a plus son sens propre ; l’autre est compositionnel et où chaque mot
participe au sens par sa signification propre ; le tout est le résultat d’une combinatoire
discursive qui n’a pas à être enregistrée dans le dictionnaire, à moins qu’elle ne soit
attestée ou qu’elle ne serve comme exemple.
- Le second choix –moins fréquent- a recours à une systématicité de la
présentation à partir de critères morphologiques. Tel est le cas dans le dictionnaire
bilingue Hachette, cité par X. Blanco et Doleres (ibid., 175), qui, dans sa partie
espagnol-français, définit un ensemble de critères annoncés dans l’Avis au lecteur. Les
expressions, locutions et proverbes figurent « au nom, s’ils en comportent un (…) ; au
premier des noms, s’ils en comportent plusieurs (…) au mot employé comme nom, si
ce mot précède un nom dans l’expression, la locution ou le proverbe (…) ; au verbe,
ou au premier verbe s’ils ne comportent pas de nom (…) ; au premier pronom, s’ils ne
comportent ni nom ni verbe (…) ; ensuite au premier adjectif et enfin au premier
adverbe ». Même si les deux auteurs étudiant les proportions de répétition concernant
des articles choisis, jugent ces critères opératoires, nous considérons que ce choix, bien
qu’il facilite la consultation pour tout lecteur attentif, demeure non justifié du point de
vue linguistique. Les questions soulevées ci-haut ne sont donc pas réglées.
Au niveau de la microstructure se posent deux types de problème : le premier
est relatif à l’emplacement d’une SF dans le corps de l’article ; le second à la nature de
l’information sémantique qui lui est rattachée. Les choix des lexicographes pour régler
ces deux difficultés ont des implications théoriques relatives à l’appréhension de ce
type d’unités dépassant le simple fait de les agencer.
468
2. Pratiques lexicographiques
Pour ce qui est de l’emplacement, deux pratiques sont constatées : soit l’unité
figure sous une division sémantique soit elle fait partie d’un regroupement
d’expressions partageant avec elle le même mot clé. Pour une même expression, la
solution adoptée diffère d’un dictionnaire à un autre. Théoriquement, ces choix
pourraient être justifiés par la nature des séquences à traiter. Denis Lepesant (2004,
115-116) distingue trois types de « phrase » figée :
- celles qui sont «polysémiques […]à la façon des tropes ; leur sens propre est concret,
et il se manifeste au sein d’une structure libre ; leur sens figuré au contraire est
abstrait, et il se manifeste au sein d’une structure figée […] il existe entre le sens
propre et le sens figuré une relation sémantique constante : le sens figuré est une
métaphore figée (catachrèse) du sens propre ; il s’ensuit que le sens propre et le sens
figuré de ces expressions sont simultanément actualisés lors du processus
d’interprétation ; et que le sens figuré est quelquefois inféré à partir du sens propre ;
- celles qui sont «polysémiques telles que J’ai le cœur gros ou Je bois du petit
lait : elles peuvent certes donner lieu à des équivoques, mais elles diffèrent
radicalement des tropes en ceci que leur sens figuré ne doit rien au sens propre ;
- enfin, celles qui «sont monosémiques pour des raisons soit sémantiques
(comme Il a pris la poudre d’escampette et Il a fait chou blanc), soit syntaxiques
(comme Il y a anguille sous roche, qui ne peut avoir un emploi libre du fait de
l’absence des déterminants). »
Dans le cas du choix d’une division sémantique propre à l’unité en question, on
s’attend tout naturellement et conformément à la logique sémasiologique des
dictionnaires, à une signification polysémique du mot clé choisi, c’est-à-dire à un
apport sémantique qui dérive à la fois du sens premier et s’en distingue (les séquences
du premier type). Cela présuppose que le mot a son propre espace sémantique dans le
cadre d’une unité compositionnelle ou semi-compositionnelle. C’est le cas, par
exemple, des expressions secouer les puces à quelqu'un et avoir/ mettre la puce à
l'oreille qui figurent dans Le TLF sous une acception étiquetée par le trait « figuré » et
rattachée dans Le Petit Robert et Le Petit Larousse au sens initial. En revanche, si l’on
prend par exemple une séquence comme avoir d’autres chats à fouetter, figurant dans
469
Le Petit Robert sous 1(Cf. annexe III.1), il y a lieu de se demander si ce choix peut être
justifié alors que l’expression est totalement opaque ; chat n’est pas ici l’être physique
qu’on peut caresser ou fouetter.
Quant au regroupement, à part les séquences figées, il conviendrait
normalement au traitement des unités monosémiques ou polysémiques en rupture avec
le sens concret. Dans la pratique lexicographique, le fait de rassembler pêle-mêle les
expressions sous une division à part donne lieu à des contenus très hétérogènes (C’est
le cas pour la plupart des séquences figées relevées dans Lexis et Hachette, (Cf. par
exemple les locutions relatives à aigle, puce, cheval, chat, etc.). Si l’on prend les
formations figées sous l’entrée cheval, présentées dans le PR sous 4 et à la suite de 1
dans le Petit Larousse, on se rend compte de cette grande disparité des contenus :
« Petit Robert
I 1. Grand mammifère ongulé à crinière, plus grand que l'âne, domestiqué par
l'homme comme animal de trait et de transport.
4 Loc. fig. Fièvre de cheval, très forte. Un remède* de cheval— Monter sur ses
grands chevaux : s'emporter, le prendre de haut. — Cela ne se trouve pas sous, dans
le pas d'un cheval : c'est une chose qu'il est difficile de se procurer.
5 Fig. (Personnes) Vieilli Homme grossier, brutal. Mod. Un vrai cheval (de
labour) : une personne obstinée, infatigable.— Fam. C'est pas le mauvais cheval : il
n'est pas méchant. — Cheval de retour*.
Petit Larousse
1. Grand mammifère ongulé domestique …
– À cheval sur quelque chose, à califourchon sur quelque chose.
– Être à cheval sur quelque chose, être très strict sur quelque chose.
– Fièvre de cheval : forte fièvre.
– Remède de cheval : remède très énergique.
– Monter sur ses grands chevaux : s'emporter.
– Cheval de bataille : argument, thème favori.
– Fam. Cheval de retour : récidiviste.
– Fam. Ne pas être un mauvais cheval : être plutôt gentil. ».
Pour le PR, on passe de fièvre de cheval à monter sur ses grands chevaux à
cela ne se trouve pas sous, dans le pas d’un cheval. Le Petit Larousse juxtapose fièvre
470
de cheval, à cheval sur qqchose, cheval de bataille, monter sur ses grands chevaux,
etc. Le TLF, quant à lui, répartit les expressions à l’intérieur de la grande division qui
leur est consacrée en procédant à des regroupements dont les critères ne sont pas
unifiés. Ainsi, pour chat, il regroupe sous II.A. des expressions selon un critère
sémantique (la présence d’une comparaison explicite ou implicite du type courir
comme un chat maigre, écrire comme un chat, etc.) ; en B, le critère devient
typologique (locutions proverbiales) et en C des expressions diverses dites ‘usuelles.
Par contre, le traitement réservé aux locutions relatives à lièvre par ce même
dictionnaire distingue (sous « locutions ») les expressions qui projettent, dans le
domaine humain, « certaines caractéristiques, certaines des qualités que l'on prête au
lièvre » et (sous « locutions figurées ») celles qui, dans l’ensemble, sont susceptibles
d’une double interprétation :
Lièvre
2. Locutions
c) [En parlant du comportement d'une pers. ou de l'un de ses attributs] De lièvre. Qui
possède certaines caractéristiques, certaines des qualités que l'on prête au lièvre.
Bec*-de-lièvre.
Patte de lièvre. Favori.
Mémoire, cervelle de lièvre. Mémoire, intelligence déficiente. (Dict. XIX et XXe s.).
Sommeil de lièvre. Sommeil très léger interrompu au moindre bruit. (Dict.
XIXe et XXe s.).
Vie de lièvre. Vie tourmentée, malmenée
4. Loc. fig.
b) C'est là que gît le lièvre. C'est là que se trouve le nœud de l'affaire, le fond du
problème.
c) Chasser, courir, poursuivre deux, plusieurs lièvres (à la fois). Poursuivre deux,
plusieurs buts en même temps. On ne court pas deux lièvres.
d) Chasser, courir le même lièvre. Poursuivre le même but, être engagé dans la même
affaire que quelqu'un.
e) Lever un lièvre. Mettre au jour une question gênante et dissimulée.
f) Trouver le lièvre au gîte.
L’emplacement d’une expression à une section donnée de l’article ne respecte
pas parfois son sémantisme. Nous nous contentons ici de l’analyse d’un seul exemple
471
de traitement, celui de la présentation et la définition sémantique d’une expression
comme avoir mangé du cheval :
Le TLF la présente comme suit :
« A . 2 PAR METONY.a) ALIM. Synonyme de viande cde cheval. Aimer le cheval,
manger du cheval
-Fig. et fam. Manger du cheval. Manger de la viande très dure. Il a mangé du
cheval. Il a une force décuplée.
Dans le Petit Larousse, on peut lire :
3- viande de cheval
-avoir mangé du cheval : faire preuve d’une énergie inaccoutumée. ».
Si l’on analyse le traitement qu’en fait le TLF, on s’aperçoit qu’il y a un glissement de
la transparence totale à l’opacité totale. Les expressions aimer le cheval, manger du
cheval relèvent de la syntaxe libre ; le mot cheval signifie la viande de cet animal sans
plus. Dans l’expression figurée et familière, manger du cheval, le terme signifie
toujours « la viande » avec une restriction du sens qui se fait par l’adjonction du sème
/dur/. Enfin, dans Il a mangé du cheval, cheval ne signifie plus « viande » ; le sens
étant démotivé et global. La réminiscence de l’acception métonymique et concrète de
cheval (viande de cet animal) ne peut être appréhendée que si l’on reconstruise le sens
global de l’expression et ce, en remotivant le sens littéral et en l’interprétant dans un
univers de croyance où figure le stéréotype « La viande de cheval procure de la
force ». Laquelle phrase ne semble pas être dotée en synchronie de la conventionnalité
requise pour être générique.
Cet écart entre sens concret et sens figuré est plus clair dans Le Petit Larousse
où l’acception « viande de cheval » est suivie de la seule expression avoir mangé du
cheval avec sa paraphrase.
Enfin, la référence à la motivation, procédé fréquent dans le TLF, permet dans
certains cas de justifier l’emplacement de l’unité sous une division sémantique donnée
comme par exemple dans l’article cheval où sont regroupées, sous B.1., les
expressions référant à la robustesse et à la résistance du cheval. Toutefois, cette
mention n’est pertinente que pour les expressions plus ou moins transparentes telles
que travailler comme un cheval, santé de cheval, vie de cheval et un peu moins fièvre
de cheval, remède de cheval.
472
Ces différences de traitement confirment le statut second réservé aux SF
comparé à celui conféré aux unités lexicales simples. Pour rompre avec cette tradition
lexicographique, les lexicographes devraient tenir compte du degré de figement de ces
séquences et de la diversité de leur configuration sémantique.
Cependant, l’emplacement des expressions figées à l’intérieur de l’article
lexicographique n’est pas la seule difficulté à leur traitement lexicographique. Tout
comme les unités monolexicales, ces séquences ne sont pas à l’abri de la variation
paraphrastique, de l’aspect problématique de l’illustration par l’exemple et des
différences de la distribution de l’information sémantique entre les composants de la
définition.
En ce qui concerne la variation de la paraphrase définitoire, nous avons relevé
quatre cas de figure (Cf. annexe III.2) :
- Le contenu paraphrasant l’expression considérée peut être nettement
contradictoire. C’est le cas de la locution verbale Avoir un chat dans la gorge qui
signifie respectivement « être enroué » dans le TLF et le Petit Larousse et « parler
franchement » dans Hachette. L’absence de toute indication sur la motivation
stéréotypique de l’expression et son opacité relative ne permettent pas au lecteur du
dictionnaire de décoder la bonne interprétation. Si « avoir quelque chose dans la
gorge » est susceptible de favoriser la première paraphrase, rien ne dit pourquoi, c’est
précisément un chat. D’où, l’utilité de la mention de ce genre de commentaire si
disponible. Le TLF a parfois recours à ce type de présentation :
Chat : « 3. [P. réf. aux larcins habituels du chat], Avoir d'autres chats à
fouetter ».
- La signification est plus ou moins spécifiée selon les dictionnaires. La locution
donner sa langue au chat est paraphrasée en ces termes dans le Petit Robert :
- « renoncer à résoudre une énigme, une devinette ».
La paraphrase figurant dans Hachette est plus générale et n’évoque pas l’emploi précis
de la locution où il s’agit d’une réponse à un énigme, une charade (TLF) ou une
question (PL) :
- « s'avouer incapable de trouver une solution ».
473
- La différence peut concerner une variation de degré. Dans les traitements de
Ce n'est pas un aigle (ou N'être pas un aigle, TLF), la négation porte sur l’intelligence
mais chaque dictionnaire la quantifie différemment. Pour Lexis et le TLF, cette
expression qualifie une personne d’intelligence moyenne :
- « N'avoir qu'une intelligence moyenne » (TLF) ;
- « se dit d’un homme d’une intelligence moyenne » (Lexis).
Le Petit Robert et Hachette emploie l’intensif « très » précédé des particules de
négation :
- « il n'a rien d'un esprit supérieur, il n'est pas très intelligent » (PR) ;
- « ce n’est pas une personne très intelligente, d’une grande valeur »
(Hachette).
Quant au Petit Larousse, il interprète la négation dans le sens de l’absence de
l’intelligence :
- « il n'est guère brillant, guère intelligent ».
- L’expression peut avoir deux significations, l’une vieillie et l’autre moderne.
Les dictionnaires n’enregistrent pas tous la première et se contente de la seconde
comme pour Chaud comme une caille :
- « (vx) ardent en amour; (mod.) dont le corps est chaud » (PR) ;
« Cuite de tous les côtés, chaude comme une caille, elle alla se fourrer dans son
lit (ZOLA, Nana, 1880, p. 1277)
1. Pour l'amour et la liberté, Il était plus chaud qu'une caille » (TLF) ;
- « Se dit de quelqu’un bien au chaud dans ses vêtements ou ses couvertures »
(Lexis).
S’agissant de l’illustration par l’exemple, il est à noter que seul le TLF opte plus ou
moins fréquemment à cette pratique. Nous soulevons ici les problèmes que pose un
type particulier de locution de signification générale comme dans à + nom ethnique. Si
le figement de la structure est évident, ses emplois ne le sont pas toujours ou
conviennent le plus souvent à des sens bien différents. Le TLF paraphrase chaque
locution par la manière de suivi du nom de l’ethnie auquel renvoie le nom. Le sens
propre est rendu dans l’exemple qui l’inscrit dans un cadre contextuel ou
474
conventionnel. Dans le premier cas, l’expression est antéposée à l’énoncé
l’expliquant :
- « je n'ai aucun doute que cette femme élégante qu'est Mme Gondier, ne l'élève [Jean-
Michel] à l'anglaise ou à l'américaine, avec douche, tub et culture physique. »
- « C'est plutôt maigre aujourd'hui. Des fricandeaux... Peuh, fis-je. Je n'aime pas ça.
Si encore vous me le faisiez à la grecque, nageant dans l'huile d'olive et la farce
pimentée, grains de poivre alternant avec des raisins de Corinthe et des câpres.
CENDRARS , Bourlinguer, 1948, p. 274 ».
Dans le second cas, la locution condense un contenu stéréotypique qu’elle appuie :
- « Chaque siècle a sa façon de plaisanter. Le XVIIe siècle avait une manière un peu
grosse, à la gauloise (...) celle de Molière (FEUILLET, Morte, 1886, p. 97) » ;
- « Il avait (...) un besoin de grosse gaieté, à la flamande (ROLLAND, J.-Chr., Aube,
1904, p. 28) ».
Quand l’élément précédent la locution est lui-même figé, le caractère conventionnel de
l’expression est parfois glosé par des tournures métalinguistiques du type « j’appelle »,
« qu’on appelle » ou « que nous appelons » (Cf. annexe III.3) :
- « Ces sortes de gens les journalistes vont, viennent, arrivent quand on ne les
attend pas et quittent la société même la meilleure sans prévenir personne. En
France, c'est ce qu'on appelle « filer à l'anglaise ».
En présence d’une paraphrase synonymique (Cf. annexe III.4), l’exemple permet de
voir comment la signification générale exprimée se trouve spécifiée dans un contexte
particulier. Les cas relevés montrent que le sens de la locution peut être inféré par les
éléments contextuels ou se suffit de lui-même en maintenant tout son opacité. Le
traitement d’Acheter (vendre) chat en poche illustre le premier cas de figure :
- Je ne suis pas de ces gens qui, comme on dit, conseillent d'acheter chat en poche...
Venez par ici... Vous les examinerez tout à votre aise (SUE, Atar Gull, 1831, p.
6) ».
Pour le second cas, le sens ne compte que sur la conventionnalité de
l’expression comme pour Avoir un chat dans la gorge :
- « Pauvre petite! Elle aura eu un chat dans le gosier au moment de faire son trille
(G. SAND, La Comtesse de Rudolstadt, t. 1, 1844, p. 7) ».
475
Dans certains dictionnaires, l’absence, à des degrés variés (Parfois, nous ne retrouvons
que l’expression en italique sans plus), de l’exemple ou de la paraphrase ne favorise
pas la saisie de la signification et fonctionnement discursif de ces séquences.
Dans le cas du traitement lexicographique bilingue, ces difficultés sont doublées
des problèmes que pose la différence des univers culturels. L’étude des modalités de
transposition de quelques expressions figées dans un dictionnaire français-arabe (El-
Menhil) nous servira d’illustration.
3.1. La correspondance
476
Les représentations partagées proviennent des universaux de la pensée
métaphoriques, du rapprochement entre certaines expériences de la vie quotidienne, et
du fonds culturel commun qui pourrait exister entre deux aires civilisationnelles
différentes. Le dictionnaire bilingue El-Menhil parvient, sous plusieurs entrées, à
puiser sa traduction des expressions en L1 dans ce fonds partagé :
- s’écarter du droit chemin [:d ni-ssira:ti-lmustaqi:mi]
s’est écarté du chemin droit
La valeur axiologique de droit exprimant la justesse associée à la valeur symbolique
de chemin connotant la conduite humaine produisent la même signification globale à
charges morale et religieuse.
- le rapprochement de deux domaines d’expérience ou la récurrence dans le temps de
deux faits à portée universelle engendrent des stéréotypes similaires :
Le malheur des uns fait le bonheur des autres
Masa:ibu qawmin inda qawmin fawa:idu
Malheurs de gens chez des gens profits
Les malheurs des uns constituent des profits pour d’autres
- la correspondance pourrait également se fonder sur un héritage partagé. Les religions
monothéistes fournissent à cet égard plusieurs exemples, mentionnés dans cet ouvrage,
dont nous retenons l’exemple suivant :
L’homme propose, Dieu dispose
[lbdu fi-ttafki:ri wa-lla:hu fi-ttadbi:ri]
L’homme par la pensée et Dieu par la prescription
Les deux proverbes renvoient au même référent, comportent la même structure
hiérarchique (l’homme<Dieu / lbdu< lla:hu // propose < dispose/ ttafki:r< tadbi:r)
ainsi que le signifié global concordant.
Quant aux calques, ils constituent un moyen privilégié pour le transfert des stéréotypes
figées d’une langue à une autre. Certains sont d’un usage plutôt littéraire ou vieilli :
Œil pour œil, dent pour dent
ljnu bi-ljni w-ssinnu bi-ssinni
L’œil pour l’œil et la dent pour la dent ;
D’autres sont des maximes d’usage dans les discours spécialisés :
477
La fin justifie les moyens
l:jtu tubarriru-lwasi:lt
La fin justifie le moyen
D’autres encore sont plus récents et relèvent du discours journalistique :
-Pêcher en eau trouble
jasta:du fi-lm:i-lkiri
pêche dans l’eau trouble
- Le rideau de fer
ssita:ru-ldi:dijju
Le rideau de fer
Pour ces deux expressions, le lexicographe a réservé des gloses explicatives entre
parenthèses précisant, pour la première, qu’elle se dit de quelqu’un qui tire profit du
désaccord des autres et pour la seconde qu’il s’agit d’une dénomination des frontières
qui séparait l’Europe de l’Est et l’Europe de l’Ouest.
Enfin, le lexicographe a parfois recours à des traductions littérales bien que des
équivalents soient disponibles en L2 :
Faire du tamtam autour d’un événement
aa:ra tantanatan awla ada
a soulevé tantanatan (onomatopée) autour un événement
Or, il existe en arabe une expression équivalente :
aqa:ma-ddunja: wa aqadaha: min ali X
a levé la terre et l’a reposée pour X
Le second type de correspondance comporte un ou plusieurs segment(s) invariant(s) à
côté des transformations qui n’altèrent généralement pas le sens global :
- marcher la tête haute [m: :li-lbi:ni]
a marché haut le front
Dans cet exemple, la valeur axiologique de « haut » exprimant l’élévation et associée à
une partie du corps humain renvoyant métonymiquement à la personne participe à la
signification globale « avec dignité ». Le lexicographe aurait pu choisir une autre
expression en L2 qui est en parfaite correspondance avec celle de L1 :
[m: marfu:a-rrasi]
478
a marché levée la tête
- Qui se fait brebis, le loup le mange
in lam takun iban akaltka-ia:b
Si tu n’es pas loup, les loups te mangent
Ici, la signification n’est pas exactement la même. L’élément invariant est le fait d’être
mangé par le loup dans le cas où… ». Pour le reste, l’expression en L1 se sert du trait
/inoffensif/ associé à brebis pour exprimer un signifié global tel que « Trop de douceur
attire des ennuis ». En L2, l’expression signifie en plus qu’il faut être égal à ses
adversaires. La métaphore à la base de l’expression véhicule un stéréotype qui dit que
les loups n’attaquent pas leurs semblables.
3.2. L’équivalence
Les expressions de L2 présentées comme équivalentes à celles de L1 rendent
totalement, partiellement ou aucunement le signifié global exprimé par la source.
Comme exemple d’équivalence totale, nous présentons un cas où la variation
stéréotypique découle de la variation de la catégorisation prototypique qui participe à
l’expression d’un même signifié à partir d’expériences quotidiennes différentes :
Porter l’eau à la rivière
amalati-ttamra ila: haara
(elle) a porté les dattes à Hajara
L’expression en L1 infère l’inutilité de se livrer à une action sans intérêt comme celle
de porter l’eau à la rivière. Le même signifié est rendu par l’expression d’arrivée par
une métaphore semblable (même structure cognitive) qui met l’accent sur l’inutilité de
porter les dattes à un lieu où les dattes abondent (Hajara étant une région du Bahrein
connue pour ses dattes).
Dans l’équivalence partielle, le sémantisme de l’expression choisie en L2 est extensif
ou restrictif par rapport à celui exprimé par l’expression source :
- Des goûts et des couleurs, on ne dispute point
li-nn:si fi:m: jiqu:n m:hibu
pour les gens en ce qu’ils adorent des doctrines
Les gens ont, en ce qui concerne leurs préférences, des doctrines
479
L’expression en L1 détermine deux domaines de préférence que les gens n’ont point le
droit de juger ; l’équivalent étend ce droit au choix esthétique ou personnel à tous les
domaines de préférence ;
- Qui a bu boira
l: juf-lmaru min uju:bihi-lqadi:mati
ne guérit l’homme de défauts (ses) anciens
L’homme ne guérit point de ses anciens défauts
L’expression en L1 établit une relation d’attraction régressive entre le futur et le passé
d’où le sens de « retourner à ses anciennes habitudes » ; lesquelles habitudes
pourraient être connotées aussi bien positivement que négativement. L’équivalent en
L2 restreint le domaine de ces habitudes au seul versant négatif.
Pour ce qui est de l’équivalence nulle, le sens du stéréotype de départ est totalement
discordant avec celui qui est censé lui équivaloir :
- Rendre pois pour fèves (= ne pas rendre l’équivalent de ce qu’on a reçu)
sruddu lhu-ssafat safatjni
rendrai à lui la gifle gifles (deux)
Pour une gifle, je lui en rendrai deux
3.3. La paraphrase
La paraphrase synonymique constitue le procédé le moins coûteux pour le
lexicographe bilingue et le plus appauvrissant pour l’expression source puisqu’il
sacrifie sa dimension rhétorique sans la compenser. Cet appauvrissement est, dans le
cas de notre dictionnaire, parfois doublé d’erreurs qui vont de la restriction du sens, à
sa déformation, à son imprécision, à la discordance totale jusqu’au contresens :
- restriction du sens initial :
Les petits ruisseaux font les grandes rivières (= Des éléments modestes additionnés,
accumulés, finissent par produire une chose importante (appliqué surtout aux
sommes d’argent)) ;
mb:li qali:la tukkilu arwa
sommes petites constituent fortune
Les petites sommes constituent une fortune
480
L’emploi le plus fréquent en L1 devient le seul sens dans la paraphrase en L2. Or,
l’équivalent arabe existe :
wwlu-lji qatar
Début de la pluie (est) des gouttes
La pluie commence par des gouttes ;
- La déformation du sens :
On n’est pas encore sorti de l’auberge (= On n’a pas fini avec les ennuis, les
difficultés)
izd:diti- lawa:iq
se multiplient les obstacles
Les obstacles se multiplient
Qu’il y ait encore des difficultés ne signifie pas que celles-ci se multiplient.
L’expression en L1 est employée quand on a déjà résolu quelques ennuis et qu’il reste
encore d’autres à surmonter. En arabe, il y a un équivalent total :
nnu lm nru bdu min unuqi-zzu:ti
Nous ne sommes sortis encore du col de la bouteille
On n’est pas encore sorti du col de la bouteille ;
- l’imprécision du sens due à deux paraphrases différentes sous deux entrées :
Mettre les pieds dans les plats
Sous « plat » : irtkb altatan, tkllm bisara:atin qa:siatin
A commis une erreur, a parlé avec une franchise brutale
Il a commis une erreur, il a parlé avec une franchise choquante
Sous « pied » : tsarrafa bim: jruqu- l:d:t
S’est comporté d’une manière qui transgresse les coutumes
- la discordance totale :
se saigner des quatre veines (= se priver pour quelqu’un)
df nafaqa:tin ba:hiatin
a payé des dépenses énormes
Il a dépensé des sommes énormes
Dans la paraphrase en L2, l’idée de se priver pour quelqu’un est totalement absente ;
481
- Le contresens :
Être sur ses nerfs, vivre sur ses nerfs (= être dans un état de grande tension
nerveuse)
Wa:sala mlhu (bid:fiin min ira:dtihi wadh:)
A continué travail à lui (poussé par volonté à lui seule)
Il a continué son travail (motivé par sa seule volonté).
Ce bref exposé sur le traitement lexicographique des expressions stéréotypées
figées, dans un dictionnaire bilingue montre que les difficultés de décodage et
d’encodage, respectivement de L1 dans L2, pèsent lourdement sur la qualité de la
traduction que ne le font les facteurs liés à la différence culturelle et linguistique.
Toutefois, les représentations figées, étudiées dans un cadre contrastif, peuvent
être abordées sous un angle différent de celui du degré d’équivalence : les schèmes
conceptuels. En effet, des expressions linguistiques énoncés dans deux langues
différentes et dans des contextes quasi-similaires peuvent être différentes sur plus d’un
aspect, mais une concordance au niveau de l’appréhension de catégories conceptuelles
générales telles que la représentation de l’espace (valeur axiologique relative à
l’orientation, Cf. haut/droite, etc.) ou du temps (lever du jour, tombée de la nuit, etc.).
Le dictionnaire bilingue n’est pas le cadre idéal pour une telle investigation
même s’il peut servir de matière à réflexion dans ce sens.
482
Conclusion et perspectives
Conclusion
Tout au long de ce travail, nous avons mis l’accent sur la diversité des
foyers linguistiques dans lesquels le stéréotype se trouve impliqué. Rappelons
dans ce sens qu’il figure ou intervient dans :
- la structure interne de la signification des mots d’où son rôle
définitoire ;
- la structure interne des catégories référentielles dans lesquelles il a
un rôle classificatoire ;
- l’organisation du lexique (réseaux sémantiques), d’où son aspect
structurant ;
- les extensions polysémiques ou dérivationnelles des mots, d’où son
rôle générateur de sens ;
- les procédés sémantiques (tropes, figement) dans lesquels il participe
à la synthèse sémantique globale ;
- les enchaînements discursifs, d’où son rôle argumentatif.
A travers ces implications fort diversifiées, une synthèse globale du phénomène
devrait permettre de dégager les éléments qui assurent son unicité et de
favoriser la lecture des spécificités à chaque niveau dans le cadre du
mécanisme général régissant la stéréotypie. Autrement dit, cette vision globale
nécessite la délimitation de l’ensemble des configurations sémantiques
particulières de l’information stéréotypique dans toutes ses implications et se
doit de préciser comment ces configurations se rattachent au mécanisme
général de la stéréotypie.
Les manifestations de ce phénomène peuvent être ramenées à trois
configurations dont l’ampleur diffère selon les rôles dans lesquels elles se
trouvent engagées : il s’agit du stéréotype appréhendé comme trait sémantique,
comme une relation ou comme une image ou un scénario.
Il a été démontré que la configuration du premier type fait partie
intégrante de la signification de toutes sortes de mots relevant de domaines
482
variés (humain, animal, végétal et objets). Le type de savoir idéalisé et saillant
qu’elle véhicule est intersubjectivement partagé par les locuteurs d’une
communauté linguistique donnée et donne lieu à des énoncés génériques
typifiants a priori qu’on peut vérifier par le test de mais. Sa variation n’est pas
ontologiquement différente de celle qui peut toucher les propriétés universelles
des membres atypiques ou de celle qui résulte du caractère relatif de notre
savoir encyclopédique. De ce fait, le stéréotype est justement le facteur qui
empêche les mots de la langue de fonctionner comme de simples étiquettes
associées d’une manière univoque aux référents qu’ils dénotent.
A côté de son rôle proprement définitoire dans les unités simples, le trait
sémantique stéréotypique intervient dans la plupart des mécanismes cités
ci-dessus. En ce qui concerne les catégories référentielles, ce type de trait est
responsable de l’effet prototypique identifié dans les catégories classiques
fondées sur la distinction entre instances prototypiques et instances
périphériques. Sa saillance au niveau de la signification du mot dénommant la
catégorie dans son ensemble favorise son fonctionnement comme critère
classificatoire distinguant les occurrences référentielles prototypiques et celles
périphériques. Toutefois, il n’explique pas tous les autres cas de prototypes.
Les catégories abstraites (liberté, bravoure, beauté, etc.), n’admettant pas une
structuration en termes de niveaux hiérarchisés (superordonné, basique et
subordonné), donnent lieu à des effets prototypiques exemplifiés par des
occurrences concrètes (Che, Napoléon, telle star, etc.). De tels effets sont le
produit de modèles cognitifs générant la catégorie à partir de membres
individuels sans toutefois donner lieu à une représentation hiérarchique de la
structure catégorielle (absence de membres périphériques). Dans ce cas, la
conventionnalité associée à des instances idiosyncrasiques typiques et
idéalisées n’aboutit logiquement pas à la consécration d’énoncés génériques
qui la vérifient.
Les traits stéréotypiques ne sont pas tous définitoires. Certains d’entre
eux, exprimant généralement des qualités abstraites associées à des référents
concrets, demeurent latents par rapport au contenu sémantique proprement
483
lexical. Leur apparition dans le discours associée à ce contenu est tributaire
d’actualisations contingentes dans certains contextes où ils ont un rôle
nettement argumentatif :
- … je ne veux pas qu'il me retrouve si laide, puante, immobile, sans
aucune fleur sur mes joues ni dans mes cheveux (JOUHANDEAU
Marcel, Les Pincengrain,1924, page 189, Frantext).
Leur neutralisation n’est non plus possible que moyennant une justification en
contexte :
- … il était semblable à une fleur sans pétales, sans rien, toute nue,
toute seule, toute laide (HERMARY-VIEILLE Catherine, L'Épiphanie
des dieux, chap. IV, 1983, Page 53, Frantext.
Ce même type de trait latent dans la signification initiale, projeté à d’autres
catégories référentielles, donne lieu à des extensions polysémiques du mot :
Petit Robert
- 7- Ce qu'il y a de meilleur, de plus beau, de plus distingué. crème,
élite La fleur d'une civilisation, des arts. Paris « appelle
continuellement à soi la fleur et la lie de la race » (Valéry )
Les extensions dérivationnelles peuvent également se déployer à partir
des traits stéréotypiques qui constituent le noyau sémantique de ces unités (tel
est le cas par exemple dans ânerie dérivé d’une acception de âne).
Par ailleurs, nous avons vu comment ces traits interviennent parfois dans
la genèse du sens des expressions figées soit en la déclenchant (cf. l’analyse de
l’expression tomber sous les pattes, entre les pattes de quelqu’un), soit en
favorisant son extension à des domaines référentiels autres que ceux auxquels
il correspondait au départ (cf. Montrer patte blanche).
La configuration du second type concerne essentiellement les relations et
les associations préconstruites s’établissant entre des concepts autonomes et
ontologiquement distincts. C’est ce que nous trouvons par exemple à l’origine
des catégorisations issues des métaphores conceptuelles axiologiques (le plus
en haut/le moins en bas) et analogiques (plus lumière/+visibilité // oeil/esprit,
lumière/compréhension) qui sous-tendent la formation de réseaux sémantiques
484
et de familles dérivationnelles dont les unités connaissent des extensions
polysémiques plus ou moins systématiques. Cependant, vue au niveau des mots
pris isolément, la configuration sémantique du stéréotype apparaît plutôt sous
forme de traits.
Ce même type d’association nous a servi à expliquer la polysémie d’un
verbe comme couper dont les différentes acceptions sont en partie déterminées
par la relation prototypique entre l’objet à couper et l’instrument utilisé.
C’est également le cas des relations préconstruites donnant lieu dans le
discours aux anaphores associatives. D’ailleurs, celles-ci vérifient bien la
nature relationnelle des deux cas précédents :
- Nous entrâmes dans un endroit éclairé. La visibilité était parfaite
- Nous voulûmes couper un gâteau. Le couteau était introuvable
?? La scie/la faux
485
envisagée comme typique dans ce sens qu’elle véhicule une représentation
idéale et exemplaire caractérisant la situation donnée parmi n autres
représentations possibles.
Quant à la notion d’ « écart », fondamentale dans la saisie du phénomène
stéréotypique, elle est présente dans les expressions figées de deux manières.
La première est observée dans le choix évoqué d’une caractérisation non
exclusive dans son contexte bien qu’elle soit présentée comme tel. Dans ce
sens précis, elle implique les mêmes mécanismes de sélection et de
généralisation sur lesquels se fonde la stéréotypie dans les unités simples. La
deuxième est relative à la superposition souvent observée d’un sens littéral
remotivable dans certains contextes et un sens global figé. Cet écart est surtout
intéressant dans la compréhension de la genèse du sens dans ces expressions
permettant ainsi de comprendre comment celui-ci est construit pour dépasser
le cadre contextuel particulier pour un cadre plus général.
De ce tableau d’ensemble, nous dégageons les éléments suivants :
- la diversité des configurations des représentations stéréotypiques
témoigne à la fois de la complexité du phénomène et de son rôle comme l’un
des mécanismes fondamentaux de la langue régissant notamment le lexique.
Indépendamment des choix théoriques, il est clair que la stéréotypie
conditionne l’organisation et le fonctionnement des unités linguistiques ;
- la distinction générale de ces configurations constitue une entrée
possible pour une meilleure saisie de leur réalisation du côté de la langue et du
côté du discours ;
- les notions de « généricité » et d’ « écart » sont fondamentales dans la
compréhension de l’unicité du phénomène. Elles occupent une position
centrale par rapport aux autres critères définitoires du stéréotype linguistique.
Leur conjonction renvoie à la typicité en ce qu’elle implique un mécanisme de
sélection et de généralisation, à l’idéalisation en ce qu’elle exemplifie des
propriétés permettant le passage du cas singulier au cas général et à la
conventionnalité dont elle est le produit. Par ailleurs, la conjonction de ces
486
deux notions est la seule qui a des manifestations linguistiques à travers les
tournures génériques et l’emploi de certains connecteurs à valeur adversative ;
- la stéréotypie révèle la dimension référentielle de la langue non pas dans
le sens qu’elle établit une correspondance entre les mots et les choses mais en
ce qu’elle présente les significations par contraste à l’essence ontologique des
objets dénommés. La première raison en est que la généricité typifiante a
priori ne peut être identifiée que par contraste avec la généricité analytique. Le
« généralement vrai » ou supposé comme tel n’est vérifié ou récusé qu’à partir
de notre connaissance du réel. La deuxième raison concerne la variation de
l’ampleur et de la nature de la vision stéréotypique selon les catégories
référentielles, selon le degré de proximité ou de présence des occurrences de
ces catégories dans notre vécu quotidien et selon le degré d’accessibilité des
aspects relatifs à nos sens pour chaque instance particulière. Les tendances
convergentes des discours lexicographiques fort variées confirment cette
hypothèse.
Perspectives
La complexité du phénomène et l’absence relative des descriptions de
portée générale le concernant justifient notre choix d’une approche sémantique
globale visant à instituer les fondements permettant la reconnaissance du
stéréotype comme notion linguistique. Ainsi, plusieurs autres aspects
spécifiques restent à explorer ou à approfondir. Nous nous contentons de
présenter deux aspects qui nous semblent essentiels : la variation et l’inférence.
Concernant la variation, faut-il souligner que notre conception de la
stéréotypie s’appuie sur une vision de la norme linguistique qui refuse de voir
dans les représentations partagées des associations contingentes et variables
selon les circonstances de l’énonciation. Les notions de « généricité » et de
« communauté linguistique » sont à saisir non pas comme relevant d’une
détermination qui est le produit d’un consensus absolu, mais plutôt comme
l’intersection de visions sociolectales variant selon les conditions historiques,
culturelles et sociales de leurs groupes respectifs. Ceci pose la problématique
des représentations stéréotypiques qui ne sont partagées que par un sous-
487
ensemble de la communauté linguistique tout entière. Dans ce sens, il serait
intéressant de décrire le fonctionnement des mêmes représentations
lorsqu’elles s’appuient sur un consensus limité l’intérieur d’un groupe restreint
et lorsqu’elles sont exprimées dans un cadre plus hétérogène où il s’agit d’une
pluralité de visions énonciatives.
La dimension diachronique présente un autre aspect de la variation dont
l’étendue et la nature sont à étudier. Les stéréotypes n’ont pas tous la même
origine et varient selon les référents auxquels ils sont associés : la perception,
la culture, le vécu quotidien, les faits historiques, etc. sont tous des sources
possibles de la stéréotypie. Or, certains de ces facteurs sont plus contingents
que d’autres et on s’attend normalement à ce que les représentations qui en
résultent soient variables quant à leur persistance à travers le temps. Il serait
donc utile d’interroger l’évolution de la langue pour déterminer les foyers et
l’impact de cette variation.
Le rôle de l’inférence est également un autre aspect à étudier plus en
profondeur. Si l’on dit que les stéréotypes linguistiques n’ont pas besoin d’être
justifiés en contexte, cela signifie qu’ils sont inférés par la seule évocation du
mot dans un énoncé donné. Dans le cas des stéréotypes discursifs, la relation
préconstruite est également inférée mais à partir de plus d’un élément dans
l’énoncé puisqu’elle implique au moins deux concepts autonomes. La
description de la diversité des configurations stéréotypiques en termes de
diversité des mécanismes inférentiels paraît légitime pour deux raisons :
- la notion de « conventionnalité » doit être affinée davantage pour
permettre de distinguer nettement les stéréotypes primaires et les stéréotypes
secondaires ou encore ceux qui sont définitoires ou relationnels. Nous avons
déjà évoqué comment le « généralement vrai » et le « simple possible »
donnent lieu à des règles inférentielles différentes. L’étude des marqueurs
d’écart stéréotypiques tels que « habituellement », « souvent »,
« généralement », « fréquemment », « normalement », etc. serait utile pour
distinguer des classes à l’intérieur du conventionnel qui peut bien relever de
488
l’habitude, de la fréquence ou de la normalité. L’acceptabilité ou le rejet de ces
marqueurs dans des énoncés tels que :
- Habituellement/fréquemment/souvent/généralement
( ??normalement), dans un village français, on trouve une seule
église ;
- Normalement / généralement / ?habituellement / ?fréquemment /, un
oiseau est apte au vol
peut constituer, avec d’autres critères (cf. Anscombre 2002 a et b), une entrée
possible pour cette classification.
- il est impensable de décrire le fonctionnement de la stéréotypie dans le
discours sans tenir compte de la dimension syntaxique. Gaston Gross et
Micheli Prandi précisent par exemple que, dans le cadre des relations
transphrastiques, « l’expression […] résulte d’une interaction complexe entre
la capacité de codage d’un mot de liaison, le contenu des termes prédicatifs
spécifiques et l’inférence. Elle résulte donc d’une interaction entre le pouvoir
de mise en forme linguistique et la manipulation de structures conceptuelles
partagées indépendamment de l’expression » (2004 : 32-33). Il serait
intéressant dans ce sens d’étudier la variation inférentielle selon le fait que les
prédicats impliqués par ces relations font l’objet d’une association
conventionnelle ou non.
Bref, la voie de la description des représentations stéréotypiques en
termes d’inférences peut s’avérer fort utile pour une meilleure distinction des
manifestations particulières de la stéréotypie. Plusieurs interrogations restent
en suspens : une telle approche pourrait-elle aboutir à une formalisation de la
signification stéréotypique en termes de règles d’inférence ? Favoriserait-elle
un traitement de ces significations en vue du traitement automatique de la
langue? Serait-elle en mesure de constituer une perspective dans laquelle ce
qui est jusque-là considéré comme intraduisible devient désormais
transposable, même partiellement dans d’autres langues ?
489
490
BIBLIOGRAPHIE
1. Bibliographie générale
AGIZZI E., (1998), « Normativité logique et raisonnement de sens commun », dans La réalité
et le signe, Matter Negro (éd), Éditions Universitaires Fribourg, Suisse, pp13-34.
ANSCOMBRE J. C., (2001), « La nuit, certains chats sont gris, ou la généricité sans
syntagme générique », dans Linx, n°47, Du sens au sens. Hommage à Michel Galmiche, éds.
J.Anis & G.Kleiber, pp.13-30.
BAYLON Ch. & MIGNON X., (1995), Sémantique du langage. Initiation, Nathan, 255p.
COSERIU E., (1969), « Pour une sémantique diachronique structurale », dans Travaux de
linguistique et de littérature, 2, 1, pp139-186.
CUSIN-BERCHE F., (2003), Les mots et leurs contextes, Presse Sorbonne Nouvelle, 201p.
490
ENGEL P., (1977), « La logique peut-elle mouvoir l’esprit ? », dans CREA, Rapports et
documents, Rapport N°9716, École Polytechnique, Centre de recherche en épistémologie
appliquée.
GALMICHE M., (1985), « Phrases, syntagmes et articles génériques », dans Langages N° 79,
Larousse, pp2-59.
GAMUT L. T. F., Logic, language and Meaning, VII, Intensional logic and logic grammar,
The University of Chicago Press.
JAN SCHROTEN F. M., (1992), «On semantic representation», dans Cahiers de lexicologie
N°60, pp37-50.
JULIA C., (2001), Fixer le sens. La sémantique spontanée des gloses de spécifications du
sens, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 298p.
KLEIBER G. & LAZZARO H., (1987), «Qu’est-ce qu’un syntagme nominal générique? »,
dans Rencontre(s) avec la généricité, recherches linguistiques N012, G. KLEIBER éd.,
Klincksieck, pp73-111.
KLEIBER G. & RIEGEL M., (1978), «Les grammaires floues», dans Bulletin des jeunes
romanistes XXI, pp 68-123.
491
LAGORGETTE D. & LARRIVEE P., (2002), Représentations du sens linguistique, Lincom
Europa, 496p..
LYONS J., (1970), Linguistique générale, traduction de Dubois-Charlier & Robinson D.,
Larousse.
MARTIN R. (1992, 2ème édition), Pour une logique du sens, PUF ; 1982.
MARTIN R., (1976), Inférence, antonymie et paraphrase. Éléments pour une théorie
sémantique, Klincksieck, 176p.
MARTIN T., (1996), Pour une sémantique des mots construits, Presses Universitaires du
Septentrion, 373p.
492
REY A., (1973), Théories du signe et du sens, Tome 1, Klincksieck, 296p.
ANSCOMBRE J. C., (2001b), «Dénomination, sens et référence dans une théorie des
stéréotypes nominaux», Cahiers de praxématique, n°36, 'Linguistique de la dénomination',
pp.43-72.
493
ANSCOMBRE J.C., (1993), « Temps linguistique et théorie des topoï » in Lieux communs,
topoï, stéréotypes et clichés, Plantin (éd), Kimé, pp271-289.
ANTONA M-F., (1993), « Reality show : critique télévisuelle et « lieux du genre » », dans
Lieux communs, topoï, stéréotypes et clichés, Plantin (éd), Kimé, pp 133-143.
BADR S., (1999), « Sème inhérent et sème afférent », dans Travaux de linguistique N°38,
Duculot, pp7-27.
BALIVA. E. & GENNARD. D., (1997), «Lexique et discrimination raciale : les termes de
l'altérité », dans Revue d'Études de Linguistique Appliquée. Didier Érudition, pp84-90.
BOSREDON B., (2000), « Pour une approche discursive unitaire du fait dénominatif :
quelques propositions », dans Bulag, Mélanges offerts à Gaston Gross, pp425-437.
CADIOT P., (1993), « Sur l’indexicalité des noms »,Catégorisation et cognition, Éditions
Kimé, p243-269.
CAREL M. & DUCROT O., (1999), « Le problème de paradoxe dans une théorie sémantique
argumentative », dans Langue française N° 123, pp6-26.
494
CAUSINILLE-MARMECHE E., DUBOIS D. & MATHIEU J., (1988), « Catégories et
processus de catégorisation », dans Modèles généraux et locaux du développement cognitif,
G. NETCHINE (édition), PUF (cité dans Kleiber 1990).
CONSTANTIN DE CHANAY. H., (1998), «Les célibataires sont-ils seuls ? Prototypes, traits
structurels et polylectalité «, dans Cahiers de Lexicologie 72, pp97-126.
CORBIN D ; & TEMPLE A., (1994), «Le monde des mots et des sens construits : catégories
sémantiques, catégories référentielles», dans Cahiers de Lexicologie 65, pp. 213.236
CORDIER F., (1980), « Gradients de prototypie pour cinq catégories sémantiques », dans
Psychologie française N°25, 3-4, pp211-219.
CRUSE D.A.., (1990), « Prototype theory ans lexical semantics », dans Meanings and
prototypes: studies in linguistic categorization, Tsohatzidis (S.) (ed.) London/New York,
Routledge, p. 382-402.
DUBOIS D., (1997), « Catégories, prototypes et figement», dans La locution entre langue et
usages, Editions ENS Fontenay / St Cloud.
495
DUBOIS D., RIGON R. et TENIN A. (1997), « Des couleurs et des formes », dans Dubois
(éd) Catégories, représentations et systèmes symboliques. Kimé.
DUCROT O., (1993), « Les topoï dans la « théorie de l’argumentation dans la langue » »,
dans Lieux communs, topoï, stéréotypes et clichés, Plantin (éd), Kimé, pp233- 248.
DUCROT O., (1989), « Topoï et sens », Actes du 9ème colloque d’Albi, Université de
Toulouse-le Mirail, pp1-22.
FILMORE J., (1982), “Towards a descriptive Framwork for Spatial deixis», dans Speech,
Place and Action, R. J. Jarvella & W. Klein (édition), Londres, John Wiley &SonsLt, pp31-
59.
FRADIN B., (1984), « Hypothèses sur la représentation sémantique des noms », dans Cahiers
de lexicologie N°44, pp63-83.
FRADIN B., (1984), «Anaphorisation et stéréotypes nominaux», dans Lingua 64, pp. 325-
369.
GOULET A., (sous dir.) (1993), le stéréotype : crise et transformation ?, Actes du colloque
de Cerisy-la-Salle, Alain Goulet direction, Centre de Recherche sur la modernité, Université
de Caen, p 229.
496
GRIVEL Ch., (1998), « L’insu (cliché, standard et langue universelle ordinaire) » in Le
cliché, Presses universitaires du Mirail, pp 57-76.
GRUAZ C., (1997), « Catégories lexémiques et catégories morphémiques dans les familles
synchroniques dérivationnelles du français », dans Recherches Linguistiques de Vincennes
N°26, pp.39-60
HUMEL. M., (1994), «Regard critique sur la sémantique du prototype «, dans Cahiers de
lexicologie 65 – 2, pp 159-182.
KLEIBER G., (1994) « Lexique et cognition: y a-t-il des termes de base? », dans SCOLIA 1
pp.7-40.
KLEIBER G., (1991), « Prototype et prototypes. Encore une affaire de famille », dans
Sémantique et cognition. Catégories, prototypes et typicalité, DUBOIS D. dir., Éditions du
CNRS, pp103-129.
KLEIBER G., (1990), La sémantique du prototype, Catégories et sens lexical, Paris PUF
1990.
KLEIBER G., (1985), «Sur le sens du sens : contre la représentation sémantique des noms
chez Putnam», dans Modèles linguistiques VII Fasc. 2 1995, pp.73-104
KLEIBER G., (1984), « Dénomination et relations dénominatives », dans Langages 76, p 77-
94.
KLEIBER G. & RIEGEL M., (1991), «Sens lexical et interprétations référentielles, un écho à
la réponse de D. KAYSER », dans Linguisticae investigationes XV : 1, John Benjamins, B.
V., Amsterdam, pp181-201.
497
KLEIBER G. & RIEGEL M., (1989), «Une sémantique qui n’a pas de sens, n’a vraiment pas
de sens », dans Linguisticae investigationes XIII : 2, John Benjamins, B. V., Amsterdam, pp
405-417.
KRIPKE S., (1972-1982), La logique des noms propres, Les Éditions de Minuit, 176p.
LAKOFF G., (1990), Women, Fire, and dangerous Things, The university of Chicago Press,
607p.
LAKOFF G., (1986), Classifiers as a reflexion of mind. Noun classes and catégorization, éd
par Craig. C. Amesterdam John Benjamins, pp.13-51.
LAPAIRE J-R., (1994), « Le cas Lakoff », dans Modèles linguistiques Tome XV, fasc.1,
École Supérieure d’Arts et Métiers de Lille, pp99-118.
LEBAS F., (1997), « L’indexicalité du sens et l’opposition ‘en extension’/ ‘en intention’ »,
dans Sémiotiques 13, pp.163-177.
MARTIN R., (1991), « Typicité et sens des mots », dans Sémantique et cognition. Catégories,
prototypes et typicalité, DUBOIS D. dir., Éditions du CNRS, pp151-159.
MONDADA L. & DUBOIS D., (1995), Construction des objets de discours et catégorisation
: une approche des processus de référenciation. Université de Neuchâtel TRANEL, pp. 273-
302.
498
MORTON J., (1984), « La dénomination », dans Langages N°76, pp19-29.
PETIT G., (2001), «Dénomination et lexique », dans Journal of french language study Vol.
II, N°1, Cambridge University Press, pp87-121.
POITOU J., (1993), «La catégorisation comme résultat et comme processus», dans Lexique et
construction du discours, Cahiers du C.I.E.L, pp.15-51.
PORHIBEL S., (1995), «Les marqueurs de catégorisation «, dans Cahiers de Lexicologie 66.
1995-1, pp. 77-93.
PUTNAM H., (2001), «Putnam with his repliers», dans Revue internationale de philosophie
V 55, N° 218, 2001/4, .
PUTNAM H., (1990), «La sémantique est-elle possible? «, dans La définition, pp292-304.
PUTNAM H., (1981-1984), Raison vérité et histoire, Les Éditions de Minuit, 242p.
PUTNAM H;, (1975), «The meaning of "meaning», dans Mind, Langage and Reality,
Cambridge University Pren 1975, pp. 215-271.
499
RACCAH P.-Y., (1990), « Signification, sens et connaissance : une approche topique », dans
Cahiers de linguistique française N°11, Marquage linguistique, inférence et interprétation
dans le discours, Actes du 4ème colloque de Pragmatique de Genève, 16-18 octobre 1989,
Université de Genève, pp179-198.
RASTIER F., (2004), «Du lexique à la doxa. Pour une sémantique des idéologies », dans
Lexikaliche Semantik und Korpus Linguistik, internatonale Fack konferenz, munster, V6 Bis
8, pp1-25.
RASTIER F., (1990), « Signification et référence du mot », dans Modèles linguistiques Tome
XII, Fasc.2, pp61-82.
ROSCH E., (1976), «Classification d'objets du monde réel : origines et représentations dans la
cognition», dans Bulletin de la psychologie, 1976, pp. 242-250.
ROSCH E. & MERVIS C., (1975), “Family ressemblances: Studies in the internal structure of
categories”, dans Cognitive psychology N°7, pp573-605.
SALLES M., (1995), « Anaphore, partie de et stéréotypes », dans Scolia N°3, Publication de
l’Université des Sciences Humaines de Strasbourg, pp47-58.
SCHAFF A.., (1960), Introduction à la sémantique, traduit par Georges Lisowski, Éditions
Anthropos, Paris.
500
SCHWARZE C., (1985), « Lexique et compréhension textuelle », dans Sonderforschungs-
beirech 99, Universitat Konstanz, N°112 (cité dans Kleiber 90).
SIBLOT P., (1993), «De la prototypicalité lexicale à la stéréotypie discursive», dans Lieux
communs, topoï, stéréotypes et clichés, Plantin (éd), Kimé, pp342-354.
SLAKTAS D., (1993), « Stéréotype : sémiologie d’un concept », dans Le stéréotype : crise et
transformation, Actes du colloque de Cerisy-la-Salle, Alain Goulet direction, Centre de
Recherche sur la modernité, Université de Caen, pp35-45.
SZENDE T., (1999), « A propos des séquences intensives stéréotypées », dans Cahiers de
lexicologie, vol.LXXIV, 1999-1, pp61-77.
TEMPLE M, (1996), Pour une sémantique des mots construits, Presses Universtaires du
Septentrion, 373p.
TRAVERSO V., (1993), «Les routines lieux communs de la conversation», dans Lieux
communs, topoï, stéréotypes et clichés, Plantin (éd), Kimé, pp 11-122.
TYVAERT.J.E., (sous direct.) (1994), «Prototypes», dans SCOLIA N1, Publication du CNRS
et de l'Université de Strasbourg.
501
UNGERER F. & SCHMID H-J., (1996), An introduction to cognitive linguistics, Longman,
London and New York, 299p.
BLACK M., (1962), Models and metaphors : Studies in language and philosophy, Ithaca, N.
Y., Cornell University Press.
BIANCHI C., (2001), « La flexibilité sémantique : une approche critique », dans Langue
française N° 129, pp91-110.
CLOSS TRAUGOTT E., (1985), “Towards an explanation theory of metaphors”, dans The
ubiquity of metaphor, PARPOTTE W. & DIRVEN R. (eds), John Benjamins Publishing
Company, Amsterdam/Philadelphia, pp17-56.
DIRVEN R. & PAPOTTE W., (1985), « Introduction », dans The ubiquity of metaphor,
PARPOTTE W. & DIRVEN R. (eds), John Benjamins Publishing Company,
Amsterdam/Philadelphia, ppVII.
502
KLEIBER G., (2000), « A l’école de la polysémie », dans Bulag, Mélanges G. G. Gross,
Centre Tesnière, Besançon.
KLEIBER G., (1999), « Une métaphore qui ronronne n’est as toujours un chat heureux »,
dans La métaphore entre philosophie et rhétorique, Kleiber G. & Charbonnel N. (sous dir.),
PUF, pp 83-134.
LAKOFF G., (1980), Les métaphores dans la vie quotidienne, traduit par Michel De Fournel,
Les éditions de minuit, 254p.
MORINET. Ch. (1995), «Métaphore et locution : l'activité référentielle est-elle discursive ?»,
dans Cahiers du français contemporain 2, Didier Erudition, pp. 133-150.
NEECKEY V. (1997), « Pour une archéologie du sens figuré », dans Langue française
N°113, pp49-65.
NOTH W., (1985), « Semiotic aspects of Metaphor », dans The ubiquity of metaphor,
PARPOTTE W. & DIRVEN R. (eds), John Benjamins Publishing Company,
Amsterdam/Philadelphia, pp1-16.
503
PRANDI M., (2002), « La métaphore de la définition à la typologie », dans Langue française
N° 134, pp6-20.
PIOTROWSKI D., (1997), «La relation métaphorique de la logique au topologique», dans Les
formes du sens, Champs linguistiques (recueils G.Kleiber et N. Riegel) éd., pp.321-330.
PRANDI M., (1992), La grammaire philosophique des tropes, Les Éditions de Minuit, 267p.
PUSTEJOVSKI J., (1995), The generative lexicon, cambridge, The MITT Press.
RASTIER. F., (1994), «Tropes et sémantique linguistique», dans Langages 101, pp. 56-78.
SCHULZ P., (2002), « Le caractère relatif de la métaphore », dans Langue française N° 134,
pp21-37.
SEARLE J. R., (1982), «La métaphore», dans Sens et expression, trad. Paris Minuit, pp121-
166.
TAMBA I. (1999), « La femme est-elle une fleur comme le bleuet est une fleur ? métaphore
et classification. Les structures en Le N1 est un N2 », dans La métaphore entre philosophie et
rhétorique, Kleiber G. & CHARBONNEL N. (sous dir.), PUF, pp 207-236.
TAMBA I. (1994), « Une clé pour différencier deux types d’interprétation figurée,
métaphorique et métonymique », dans Langue française N°101, pp26-34.
504
VICTORI B. & FUCHS C., (1996), La polysémie. Construction dynamique du sens, Hermes,
215p.
ASHARD P. & FIALA P. (1997), «La locutionalité à géométrie variable», dans La locution
entre lexique, syntaxe et pragmatique, Fiala et al. Édition, Klincksieck, (coll. St. Cloud), pp.
273,284.
BAUER. L., (1980), «Deux problèmes au sujet des noms composés comprenant un premier
élément verbal en français moderne», dans Le français moderne 48, pp. 219.224.
BALSSON C., (1997), «Sur le trope lexicalisé "la bouche du couteau», dans Travaux du
C.R.T.T., Presses Universitaires de Lyon, pp. 158-185.
BOISSON D., (1989), «La distribution du sens dans les locutions à verbe support», dans
Travaux du cercle linguistique d'Aix-en-Provence n°7, pp. 57-72.
DANLOS L., (édit), (1988), «Les expressions figées», dans Langages n° spécial vol 90.
DANLOS L., (1981), «La morpho-syntaxe des expressions figées», dans Langages. Vol 63,
pp. 53-60.
DAVID. J., (1988), «Tous les prédicats ne meurent pas idiomes mais nul n'est à l'abri», dans
EUROPHRAS 88, Gréciano G. (éd), pp. 75-82.
505
DELABRE. M., (1984), «Les deux types de comparaison avec "comme"«, dans Le français
moderne 52, ½, pp 22-47.
DIAZ. O., (1983-1984), «Observations sur les expressions lexicalisées», dans Cahiers du
centre interdisciplinaire des Sciences du langage vol 5, pp. 139-153.
DIAZ. O., (1984), «Schémas linguistiques : le cas des expressions idiomatiques», dans
Schéma et schématisation vol 20, pp. 87-94.
DUNETON. C ; & CLAVAL. S. (1990), «Le bouquet des expressions imagées », dans
Encyclopédie thématique des locutions figurées de la langue française, Paris Seuil, 1380 p.
FIALA. P., (1987), «Pour une approche discursive de la phraséologie», dans Langage et
société 42, pp. 27-44.
FIASSE I., (2000), «Approches des expressions idiomatiques en FLE», dans Le langage et
l'homme vol 35-1, pp. 67-84.
GAATONE. D., (1997), «La locution analyse interne et analyse globale», dans La locution
entre lexique, syntaxe et pragmatique, Publication de l’INALF, pp 165-178.
GALISSON. R., (1995), «Les palempsestes verbaux : des révélateurs culturels remarquables
mais peu remarqués », dans Cahiers du français contemporain 2, Paris, Didier Érudition, pp.
41.64.
506
GRECIANO G. (1993b), « L’idiome comme icône », dans Verbum N° 1, 2 et 3, Presses
Universitaires de Nancy.
GROSS Gaston (1996), «Du bon usage de la notion de locution», dans La locution entre
langue et usages ENS Éditions, pp. 201-224.
GROSS. M (1988), «Sur les phrases figées complexes du français», dans Langue française
vol 77, pp. 47-70
GROSS. M (1988), «Les limites de la phrase figée», dans Langages vol 90, pp. 7-22
GROSS. M (1986), «Les Nominalisations d'expressions figées», dans Langue française vol
69, pp. 64-84.
HAUSMANN. F. J (1996), «Tout est idiomatique dans les langues», dans La locution entre
langues et usages, ENS Editions, pp. 277-290.
507
KLEIN. J.R et LAMIRAY. B (1994), «Lexique-grammaire du français de Belgique : les
expressions figées», dans Linguisticae Investigationes. John BENJAMIN. Publishing
Company Tome 18 Fasc 2, pp. 285-320.
MARTIN. R (1995) : «Sur les facteurs du figement lexical», dans La locution en discours,
Cahiers du français contemporain 2, ENS Fontenay/Saint Cloud, Didier Erudition, pp.291-
306.
Mejri S., (1998a), « La conceptualisation dans les séquences figées », dans L’information
grammaticale, numéro spécial Tunisie (sous dir. T. Baccouche et S. Mejri), mai 1998, pp41-
48.
MEJRI S., (1998b), «Structuration sémantique et variations des séquences figées», dans Le
figement lexical, Actes de la1ère Rencontre Linguistique Méditerranéenne, Ed. du CERES
TUNIS, Sept 1998, pp.103-112.
MEJRI S., (1997a), Le figement lexical, Publication de La Faculté des Lettres de la Manouba,
632p.
MEJRI S., (1997b), «Défigement et jeux de mots», Mélanges. Abdelkader Mhiri. Etudes
linguistiques vol 3. Publication de l'Association Tunisienne de Linguistique, pp. 75-92.
MEJRI S., (1997c), «La mémoire des séquences figées : une troisième articulation ou la
réhabilitation du culturel dans le linguistique», dans La mémoire des mots, Actes du colloque
de Tunis sept 97, Éditions SERVICED. Tunisie et AUPELF-UREF Canada, pp. 3.12.
508
ONYEOZIRI. G (1992), «Les structures métaphoriques du proverbe», dans ALFAV.5
REY. A., (1976), «Structure sémantique des locutions françaises". Actes du 13ème congrès de
linguistique et de philologie romanes. Québec PUL vol 1, pp. 831-842.
RODA. P. R., (1993), «Phrasedogy : the state of the art», dans L'actualité terminologique vol
26-2, pp. 4-19.
ROUGET. Ch., (1994), «Comment rendre compte des locutions verbales ? «, dans
International Journal of Lexicography 7-2, pp. 177-196.
RUWET. N., (1983), «Du bon usage des expressions idiomatique dans l'argumentation en
syntaxe générative», dans Revue Québécoise de Linguistique 13-1, pp. 9-145.
SAID M., (Sous presse) « Le traitement lexicographique des séquences figées : approche
méthodologique », actes du colloque international d’EUROPHRAS, Août 2004, Bale, Suisse
SAID M. ( sous presse) « La stéréotypie dans les séquences figées est-elle corollaire de
l’opacité sémantique ? », La composition syntaxique et le figement lexical en français et en
arabe : spécificités et interférences, publication mixte de l’université de Caen et du CERES,
prochain numéro de la Revue Syntaxe et Sémantique (projet CMCU).
SCHAETZEN. C., (1993), «Un accès rapide aux collocations», dans Terminologies nouvelles
10 Bruxelles, pp. 103-115.
509
SIMATOS. I., (1997), «Expression idiomatique, expression figée, prédicat complexe», dans
Mots et grammaire, FRADIN. B et MARANDIN. J.M (direct), Paris Didier Érudition, pp. 89-
127.
SIMATOS I., (1986), Éléments pour une théorie des expressions idiomatiques, Thèse de
doctorat, Université de paris VII.
THLIN. H (1975), «Quelques relations systématiques entre groupements de mots figés», dans
Cahiers de Lexicologie 27-2, pp. 52-71.
, pp. 273-281.
BOSREDON B. & et TAMBA I., (2000), « La traduction comme outil linguistique », dans
La traduction humaine, traduction automatique, interprétation ,Actes du colloque
international V I, Publications de l’ENS, Tunis, pp57-76.
COLLINOT A. & MAZIERE F., (199), Un prêt à parler : le dictionnaire, PUF, 226p.
510
DELASALLE S. & REY A. direction, (1979), Langue française N°13, Dictionnaire,
sémantique et culture, Larousse, 118p..
GLAS A., (1994), «Collocation et langues de spécialité», dans Méta 39, pp. 77-80.
GIRARDIN Ch., (1987), « Système des marques et connotations sociales dans quelques
dictionnaires culturels français », dans Lexicographica N° 3, édition Max Niemeyer
Tubingen, pp76-102.
HAUSMANN. F (1979), «Un dictionnaire des collections est-il possible ?», dans Travaux de
linguistique et de littérature 17-1, pp 187-195.
511
JORGE. G., (1992), «Les expressions idiomatiques correspondantes : analyse comparative»,
dans Terminologie et traduction,1992-N°2/3, pp.127-147
LEHMAN A., (sous direction), (1995), L’exemple dans le dictionnaire de langue, Histoire,
typologie, problématique, Larousse, 126p.
MASSALAAR P. A., (1988), «Les marques “familier” et « populaire » envisagées des points
de vue lexicologique et lexicographique », dans Cahiers de lexicologie N°53, pp91-106.
MAZIERE F., (1981), « Le dictionnaire et les termes », dans Cahiers de lexicologie N°39,
pp79-90.
REY.A (1992), «Traduire, interpréter ; les mots pour les dire», dans Terminologie et
traduction 1992-2/3, pp.13-23.
512
REY A. dir., (1983), Le dictionnaire, Actes du colloque franco-néerlandais, 28-29 avril 1981,
Maison Descartes, Amsterdam.
REY A., (1979), « Problèmes et conflits lexicographique », dans Langages N°13, pp4-25.
REY A., (1965), « A propos de la définition lexicographique », dans Langue française N°6,
1965-1, pp65-80.
SAID M., (2004), « La catégorisation du temps et par le temps en arabe et en français » Actes du
colloque L’espace euro-méditerranéen : une idiomaticité partagée, sept 2003, vol 2, Les Cahiers
du CERES, série linguistique N12,éditions du CERES, 2004.
SAID M., (2003), « Comment traduire le Cœur au figuré ? », Actes du colloque Traduire au
XIème siècle : tendances et perspectives, Université d’Aristote, Thessalonique (sept 2002), La
Grèce, 2003.
SAID M., (2001), « La stéréotypie: un fait culturel ou linguistique? » La traduction entre
équivalence et correspondance, Actes du colloque (V 3) Traduction humaine, Traduction
automatique, Interprétation, Tunis, sept., 2000, éditions de l’Institut Supérieur des Langues
de Tunis, 2001.
SARFATI G-E., (1995), Dire, agir, définir. Dictionnaires et langage ordinaire, l’Harmattan,
223p.
SZENDE Th. (dir.), (2003), Les écarts culturels dans les dictionnaires bilingues, Honoré
Champion, 199p..
513
ULLAND H., (1997), «Pour un dictionnaire des fréquences des locutions verbales», dans
Lingvisticae Investigationes, TomeXXI, Fasc.2, pp367-378.
DUCROT O. & SCHAEFFER J-M., (1972, 1995), Nouveau dictionnaire encyclopédique des
sciences du langage, Seuil.
Frantext
Nejib Mahfoudh ( 1948 ), Essarab, Edition Dar El kalem Beyrout, Traduction « les
chimères » par France Douvier Meyer, Edition Denoël/ Alif, 1992.
514
MINISTERE DE LA JEUNESSE , DE L’EDUCATION NATIONALE ET DE LA
RECHERCHE
Thèse de doctorat
en
Sciences du langage
Mosbah SAÏD
Les annexes
Membres du jury :
M. Bernard BOSREDON
M. Daniel LUZZATI
M. Salah MEJRI
Mme Mary-Annick MOREL
Mme Irène TAMBA
Annexe I.1 : configuration canonique des définitions ayant un hyperonyme du type variété de + N
Abraxas Genre de papillon nocturne, dont la chenille vit sur les groseilliers
Danaïde Genre de papillon diurne des tropiques, aux couleurs éclatantes
515
Annexe I.2 : Significations savantes et ordinaires de genre, espèce et variété dans le TLF
Mot Acception savante (définition 1) Acception ordinaire (définition 2) Trait commun Trait différent
Domaine Définition
Genre TAXINOMIE, Niveau de la classification des êtres [L'accent est mis sur l'ensemble et sur Idée d’inclusion Approximation
BIOLOGIE vivants, placé sous la famille au-dessus l'appartenance d'un être ou d'un objet explicite dans la (déf. 2)
ANIMALE et des espèces; p. ext. classe, espèce à l'ensemble] Catégorie, espèce, signification
VEGETALE sorte, type
Espèce TAXINOMIE Niveau de la classification des êtres Sorte, catégorie, variété de Idée d’inclusion
vivants, placé immédiatement sous le explicite dans la
genre et comprenant lui-même des sous- signification
espèces et des variétés
Variété Subdivision de l'espèce, groupe Type, sorte, espèce d'éléments d'un Idée d’inclusion
d'individus qui diffèrent des autres ensemble explicite dans la
individus de la population par un ou signification
plusieurs caractères héréditaires
Mot Définition
Type Ensemble des caractères distinctifs (choisis d'après des critères divers) de certains groupes Idée de distinction d’une entité par
d'objets, d'individus, permettant leur classification rapport à un ensemble plus large
Catégorie Ensemble ou groupe de personnes ou de choses qui ont un certain nombre de caractères Idée de distinction d’une entité par
communs. rapport à un ensemble plus large
516
Annexe I.3-b : Exemples de définition
Dictionnaire Structure Mot Domaine Hyperonyme Trait spécifique Traits englobants figurant dans l’entrée de N
TLF Sorte de Baille Sorte de baquet de servait à des usages divers Récipient…généralement de bois, servant à
+N bois dans la marine à voile divers usages domestiques, artisanaux et
industriels :
Barquette TECHNOL. Sorte de vase rappelant la forme d'un Petit récipient…de forme variables servant à
bateau et dont font usage un différents usages
grand nombre de corps de
métiers
Béquille Sorte de canne sur laquelle les handicapés Bâton…servant à divers usages
moteurs appuient l'aisselle et
la main pour s'aider à
marcher
Boit-tout Sorte de puisard creusé dans un terrain Puits…dans lequel se déversent les eaux usées et
humide pour l'assécher les eaux de pluie qui s'y décantent
517
Annexe I.5 : Spécification sur la base d’une similitude avec un trait de la définition primaire
Mot Acception savante (définition 1) Acception ordinaire (définition 2) Trait commun Trait différent
Sorte Catégorie qui permet de distinguer un objet parmi d'autres; [Se dit de ce qui ne peut être qualifié Idée Approximation
ensemble d'objets ainsi caractérisés exactement, et qui est rapproché d'autre d’inclusion avec idée de
chose] Une forme de explicite dans flou (déf. 2)
la signification
518
Annexe I.8 : Idées d’inclusion et d’atypicité rattachées à la structure sorte de + N
Dictionnaire Structure Mot Domaine Hyperonyme Trait atypique Trait spécifique Trait figurant dans
l’entrée réservée au
N hyperonymique
TLF Sorte de + N Anodonte ZOOL. Sorte de moule d'eau douce dont la charnière vivent dans toutes les
est dépourvue de mers du globe.
dents
Aqueduc BOT., vieilli. Sorte de canal que forment qui croissent dans Conduit
naturellement les tiges des lieux fort
ou les feuilles entières chauds et fort
de certaines plantes arides
Avoine POÉSIE. rare, Sorte de flûte fabriquée avec une constitué d'un tube en
vx rudimentaire paille d'avoine bois ou en métal
percé de trous
Auget BÂT. Sorte de réservoir que les maçons font au Bassin naturel ou
bord du joint de deux artificiel; récipient
pierres d'une machine ou
d'une installation
baignoire TECHNOL. Sorte de poêle dans laquelle on fait servant à cuire
chauffer l'eau d'alun et certains aliments à
le suif qui servent à feu vif.
l'apprêt des cuirs
Bire Sorte de bouteille en osier ou en roseau Récipient…pour un
qui sert à la pêche liquide destiné à la
consommation, à un
usage familier
519
PR palanquin Sorte de chaise ou portée à bras d'hommes Siège [Meuble
de litière (parfois à dos de comprenant
chameau ou d'éléphant) généralement quatre
pieds]
Théorbe Sorte de luth à deux manches à son plus grave à manche long et
que celui du luth large,
ordinaire
Tortue (XVIe; par anal. Sorte de toit que les soldats romains afin de s'abriter des Partie supérieure d'un
avec la carapace formaient avec leurs projectiles des bâtiment ou d'une
protectrice) boucliers levés assiégés construction
PL Sorte de toit que formaient les pour se garantir
soldats romains en des projectiles
joignant leurs boucliers
au-dessus de leurs têtes
Annexe I.9 : Sorte de + N : Exemples d’idée d’approximation non corrélée avec une idée d’inclusion
520
Annexe I.10 : Structure N deN et rapprochement avec une instance prototypique
Dictionnaire Structure Classe Mot Syntagme comportant une instance prototypique de la classe
TLF Voisin de + N Instrument de Achilienne Voisin de la lyre, de la cithare ou de la harpe
Proche de + N musique Arc-en-terre Proche de l’arc musical
Bousine Proche de la cornemuse
guimbri Proche de la guitare
Voisin de + N Oiseau Bécassine Voisin de la bécasse
gelinotte Très voisin de la perdrix
Proche de + N Barge Souvent proche de la péniche
Risse Proche de la mouette
Voisin de + N Poisson Amproie Voisin de l’anguille
Pagre Voisin de la daurade
Proche de + N Black-basse Voisin de la perche
Voisin de + N Carnassier Jaguar Voisin de la panthère et du léopard
Proche de + N Fruit Clémentine Proche de la mandarine
PR Voisin de + N Voisin de la mandarine
TLF Proche de + n Matière Ébonite Proche de l’ébène
Plante Reine- Proche de la marguerite
marguerite
Couleur Callaïs Proche de la turquoise
Goût Pâtisson Goût proche de celui de l’artichaut
Trait d’esprit Boutade Proche de la contre-vérité
Annexe I.11 : liste de mots figurant sous l’entrée anti- dans le TLF
- anti(-)autrichien, (anti autrichien, anti-autrichien) anti(-)bolchévique, (anti bolchévique, anti-bolchévique) antibonapartiste, anti-bourbonien,
antiboulangiste, anti(-)bourgeois, (anti bourgeois, anti-bourgeois) anti(-)capitaliste, (anti capitaliste, anti-capitaliste) anti(-)catholique, (anti
catholique, anti-catholique) anti-classique, anti(-)communiste, (anti communiste, anti-communiste) anti(-)dreyfusard, (anti dreyfusard, anti-
dreyfusard) antidreyfusiste, antimarxiste, anti(-)mystique, (anti mystique, anti-mystique) antinapoléonien, anti-nazi, anti(-)romantique, (anti
romantique, anti-romantique) anti-russe, anti(-)soviétique(anti soviétique, anti-soviétique)
521
- anti- + dér. en -isme :
anti(-)capitalisme, (anti capitalisme, anti-capitalisme) anti(-)catholicisme, (anti catholicisme, anti-catholicisme) anti-communisme,
antidreyfusisme, anti(-)germanisme, (anti germanisme, anti-germanisme) anti(-)jésuitisme,(anti jésuitisme, anti-jésuitisme)
Annexe I.13 : Variation portant sur l’adjectif ou le nom désigné par la base
522
TLF Non-conformiste qui refuse les normes sociales, morales, intellectuelles, esthétiques de son époque
PR Personne qui ne se aux usages établis, aux opinions reçues, qui fait preuve d'originalité
conforme pas
PL Qui manifeste du , de l'originalité
non-conformisme
Annexe I.14 : Degré d’intensité relatif à certains mots exprimant l’idée d’opposition selon le TLF
523
PR Qui s'oppose au capitalisme
PL Hostile au système capitaliste
TLF Anti-civique Qui est contraire à ce qui est civique
Anti-évangélique Contraire à l'esprit de l'Évangile
Anti-humaniste (Celui) qui est défavorable ou aux conceptions de la doctrine humaniste
hostile
524
TLF Contre-société Collectivité en les règles de la société dans laquelle elle vit
marge de la
société…qui refuse
PL Groupe se prévalant aux valeurs dominantes de la société dont il émane
d'une idéologie
opposée
Annexe I.17 : Définition totalement cadrée par la structure qui est considéré comme
Annexe I.18 : Définition partiellement cadrée par la structure qui est considéré comme
Dictionnaire Mot Validation absolue du contenu Validation à l’intérieur d’un univers Validation relative sur la base d’un
de croyance critère précis
TLF Féminin Qui appartient en propre à la qui est considéré comme spécifique de que l'on rencontre habituellement chez la
femme la femme femme
TLF Majeur Qui a atteint l'âge de la majorité ou qui est considéré comme majeur du
légale fait de son mariage
PR Artificiel Créé par la vie sociale, la et considéré comme non nécessaire
civilisation
Incongru Contraire à ce qui convient à ce qui est considéré comme
convenable
PR Étranger Qui n'appartient pas ou qui est considéré comme
n'appartenant pas à un groupe (familial,
social).
525
Annexe I.19 : Divergence de la vision normative d’un dictionnaire à un autre
Dictionnaire Mot Validation absolue du contenu Validation à l’intérieur d’un univers de Validation relative sur la base d’un
croyance critère précis
TLF Féminin Qui appartient en propre à la femme qui est considéré comme spécifique de la que l'on rencontre habituellement
femme chez la femme
PR Qui est propre à la femme
PL Qui manifeste des caractères considérés
comme propres à la femme
TLF Majeur Qui a atteint l'âge de la majorité légale ou qui est considéré comme majeur du fait
de son mariage
PR Qui a atteint l'âge de la majorité légale
PL Qui a atteint l'âge de la majorité
PR Incongru Contraire à ce qui convient à ce qui est considéré comme convenable
TLF Qui ne convient pas ; inattendu et
surprenant
PL Qui va contre les règles du savoir-
vivre, de la bienséance ; déplacé,
inconvenant
TLF Sain Qui est considéré comme bon et normal,
conforme à la raison, à un critère de valeur
PR Considéré comme bon et normal
PL Conforme à la raison, à la pondération ; qui ne s'écarte pas de ce qui est jugé
normal
TLF Intempestif Qui est considéré comme mal venu, non
adapté à une situation donnée.
PR Qu'il n'est pas convenable de faire
PL Qui est fait à contretemps, se produit
mal à propos ; malvenu, inopportun
526
TLF Masculin Qui est considéré comme caractéristique des
hommes
PR 1- Propre à l'homme
2- Qui a les caractères de l'homme,
tient de l'homme
PL Qui manifeste des caractères considérés
comme propres à l'homme
Annexe I.20: Distribution des configurations paraphrastiques selon les trois types de traits dans chaque dictionnaire
Typ Dictionnair Validation absolue du Validation à l’intérieur d’un univers de Validation relative sur la base d’un critère
e e Mot contenu croyance précis
I TLF Féminin .+ .+ .+
PR .+
PL .+
II PR Incongru .+ .+
TLF .+
PL .+
TLF Majeur .+ .+
PR .+
PL .+
III PR Intempesti .+
PL f .+
TLF .+
TLF Masculin .+
PL .+
PR .+
PL Sain .+
TLF .+
PR .+
527
Annexe I.21 - État des métaux dans la nature
calcium très répandu dans la nature obtenu par électrolyse de son obtenu en
où il existe combiné, sous chlorure décomposant
forme notamment de certains sels par un
carbonate courant électrique
étain L'étain se rencontre L'étain se trouve dans la nature
généralement à l'état surtout à l'état d'oxyde
d'oxyde stannique
iridium est contenu dans certains L'iridium s'extrait de Analogue au platine, qu'il contenu dans
minerais de platine certains minerais de accompagne dans ses minerais certains minerais
platine. de platine
niobium toujours associé au tantale toujours associé avec le associé au tantale dans ses associé au tantale
dans ses minerais tantale dans ses minerais minerais dans ses minerais
osmium que l'on trouve dans les extrait des minerais de Métal de la mine du platine qui se trouve dans
minerais de platine, associé platine les minerais de
à l'iridium et à d'autres platine souvent
métaux associé à l’iridium.
528
potassium largement répandu dans la Métal alcalin extrait de la Le potassium
nature sous forme de divers potasse très répandu
sels dans la nature
sous forme de
sels
praséodyme présent dans les minéraux extrait de la monazite
renfermant du cérium et du
lanthane
rhénium n'apparaissant pas à l'état
natif ou sous forme d'une
espèce minéralogique
donnée
rhodium principalement utilisé , extrait des minerais de
comme élément d'alliage du platine et d'or avec
platine avec lequel on le lesquels il forme des
trouve également associé à alliages naturels
l'état naturel
cuivre Cuivre gris : sulfure Le cuivre existe dans la nature à
complexe à l'état natif. l'état natif ou combiné à
différents corps
sodium que l'on trouve en Le sodium ne se rencontre très répandu dans très abondant
abondance dans la nature qu'en combinaisons la nature à l’état de dans la nature
chlorure (sel marin sous forme de
et sel…) et de chlorure
nitrate
fer Le fer se trouve à l'état naturel
sous forme d'oxydes (dont on
l'extrait), de sulfures et de
carbonates.
529
extrêmement répandu dans d'oxyde
la nature minérale et
organisée (...). On le trouve
parmi les constituants
minéraux des plantes (...) et,
en petite quantité chez les
animaux
mercure Le mercure existe dans la
nature à l'état de sulfure
(cinabre).
plomb On trouve le plomb dans la le plomb se
nature surtout à l'état de sulfure présente dans la
(galène) et, aussi, souvent allié nature surtout à
à l'argent (plomb argentifère). l’état de sulfure
(galène). Il est
souvent allié à
l’argent
ruthénium extrait des minerais de Métal de la mine du platine
platine.
yttrium accompagnant le
Cérium dans la
plupart de ses
minerais
strontium très disséminé dans la
nature
thallium très répandu dans la nature Présent dans certaines pyrites
en association minérale
530
associé au radium pechblende) où il est sous forme
toujours accompagné de d’oxyde et
radium d’uranium.
531
Annexe I.22 : Type de configuration des définitions des métaux dans les différents dictionnaires
2- Métal (Al) de densité 2,7 qui fond à 660°C et bout à 2467°C entrant dans la composition
d’alliages légers
Lexis Argent Métal blanc, brillant et inoxydable, ductile et malléable…
532
Annexe I.23 - Les métaux : variation
533
Annexe I.24 - Les métaux : traitement des traits propriétés physiques
534
Métal dictionnaire couleur ductilité malléabilité altérabilité légèreté autres
Chrome TLF blanc grisâtre - dur inoxydable - -
brillant
PR brillant - dur - - -
PL blanc légèr. - dur inoxydable - -
bleuté
LEXIS blanc - dur inoxydable - -
HACHETTE blanc - très dur - - -
Cuivre TLF rouge brun ductile malléable - - -
PR rouge ductile très malléable - - -
PL rouge brun - - - - -
LEXIS rouge brun ductile malléable - - -
HACHETTE brun orangé - - - - -
Étain TLF blanc gris ductile malléable - - -
PR blanc gris - très malléable - - -
PL blanc brillant - très malléable - - -
LEXIS blanc - très malléable - - -
HACHETTE blanc - très malléable - - -
Argent TLF blanc brillant très ductile malléable inoxydable - précieux
PR blanc très ductile malléable - - -
PL blanc très ductile - - - précieux
LEXIS blanc brillant ductile malléable inoxydable - précieux
HACHETTE blanc brillant - - peu altérable - précieux
Cobalt TLF gris clair tirant - - - - -
faiblement sur le
rouge
PR blanc - - - - -
PL blanc d’argent - malléable - - -
LEXIS blanc rougeâtre cassant dur - - -
HACHETTE blanc - - - - -
535
Métal dictionnaire couleur ductilité malléabilité altérabilité légèreté autres
Or TLF jaune brillant très ductile très malléable, mou inaltérable - précieux
PR jaune brillant - - inoxydable - -
inaltérable
PL jaune brillant - - - - précieux
LEXIS jaune brillant - - - - précieux
HACHETTE - ductile malléable quasiment inaltérable - précieux
Palladium TLF blanc comme - malléable - léger précieux
l’argent
PR - - - - - précieux
PL blanc ductile dur - - précieux
LEXIS blanc très ductile très dur - - -
HACHETTE blanc très ductile très dur - - -
Platine TLF blanc d’argent ductile malléable - - -
PR blanc gris - - inaltérable à l’air - précieux
PL blanc gris - - - - précieux
LEXIS blanc gris - - inoxydable à toute - précieux
température
HACHETTE - très ductile - - - précieux
Vanadium TLF gris argent ductile mou - - -
PR blanc charge de élasticité - - -
rupture élevée
PL gris argent - - - - -
LEXIS blanc - le plus dur - - -
HACHETTE - - - - - -
Fer TLF blanc grisâtre ductile malléable - - résistant
PR blanc grisâtre ductile malléable - - -
PL blanc gris ductile malléable - - tenace
LEXIS - - malléable - - tenace
HACHETTE gris blanc ductile - - - -
536
Hafnium TLF blanc très ductile au froid - - - -
brillant
PR blanc brillant ductile - - - -
PL - - - - - -
LEXIS - - - - - -
HACHETTE - - - - - -
Iridium TLF aspect argenté très dur - - -
PR blanc cassant très dur - - -
PL blanc grisâtre - - - - -
LEXIS - - dur - - résistant
HACHETTE - - - - - -
Magnésium TLF blanc brillant - - - - -
PR blanc argenté peu ductile malléable - - -
PL blanc argenté - - - - -
LEXIS blanc argenté - - - - solide
HACHETTE gris blanc - - - - solide
Manganèse TLF gris cassant dur très oxydable - -
PR gris clair cassant dur - - -
PL grisâtre - - - - -
LEXIS grisâtre très cassant très dur - - -
HACHETTE gris - - - - -
Mercure TLF aspect brillant - - - - -
argenté
PR blanc argenté - - - - -
très brillant
PL blanc très - - - - -
brillant
LEXIS blanc d’argent - - - - -
HACHETTE - - - - - -
-
Métal dictionnaire couleur ductilité malléabilité altérabilité légèreté autres
537
Molybdène TLF d’un blanc mat cassant dur - - -
PR blanc argenté - - - - -
PL blanc cassant dur - - -
LEXIS blanc cassant dur - - -
HACHETTE blanc - - - - -
Niobium TLF gris - - - - -
PR blanc brillant - - - - -
PL gris - - - - -
LEXIS gris d’acier - - - - -
HACHETTE gris et brillant - - - - -
Osmium TLF - - - - - -
PR bleu blanc - - - - -
PL - - - - - -
LEXIS - - - - - -
HACHETTE gris bleu - - - - -
Plomb TLF gris bleuâtre ductile très malléable, - - -
mou
PR gris bleuâtre - mou - - -
PL gris bleuâtre - - - - -
LEXIS gris bleuâtre - très malléable - - -
HACHETTE gris bleuâtre - - - -
Potassium TLF blanc argenté - mou très oxydable - -
PR blanc d’argent - mou oxydable - -
PL - - mou oxydable léger -
LEXIS - - mou oxydable léger -
HACHETTE - - - - - -
-
538
Métal dictionnaire couleur ductilité malléabilité altérabilité légèreté autres
Praséodyme TLF - - - - - -
PR jaune clair - - - - -
PL - - - - - -
LEXIS jaune pâle - - - - -
HACHETTE - - - - - -
Rhénium TLF - - - - - -
PR blanc brillant - - - - -
PL blanc - - - - -
LEXIS blanc - - - - -
HACHETTE - - - - - -
Rhodium TLF blanc argenté - très dur - - -
PR - - très dur - - -
PL blanc cassant dur - - -
LEXIS - - - - - -
HACHETTE - - - - - -
Ruthénium TLF blanc argent cassant dur - - -
brillant
PR - - - - - -
PL - - - - - -
LEXIS - - - - - -
HACHETTE blanc - - - - -
Samarium TLF - - - - - -
PR - - - - - -
PL blanc gris - - - - -
LEXIS - - - - - -
HACHETTE - - - - - -
539
Métal dictionnaire couleur ductilité malléabilité altérabilité légèreté autres
Sodium TLF blanc - de consistance très oxydable - -
molle
PR blanc d’argent - mou - - -
PL - - - - - -
LEXIS blanc - mou - - -
HACHETTE à l’éclat blanc - mou - - -
Strontium TLF blanc d’argent / ductile malléable - - --
jaune à l’air
PR blanc d’argent - mou - - -
PL jaune - - - - -
LEXIS jaune - - - - -
HACHETTE blanc - - - -
Thallium TLF blanc - malléable résistant à - -
l’oxydation
PR blanc bleuâtre - très malléable - - -
PL blanc - - - - -
LEXIS blanc - - - - -
HACHETTE - - - - - -
Thulium TLF blanc argenté - - - - -
PR blanc argenté - - - - -
PL - - - - - -
LEXIS blanc argenté - - - - -
HACHETTE - - - - - -
Titane TLF blanc - malléable résistant à - -
l’oxydation
PR blanc brillant - - - - -
PL blanc - - - - -
LEXIS blanc - dur - - -
HACHETTE - - - - - -
540
Métal dictionnaire couleur ductilité malléabilité altérabilité légèreté autres
Tungstène TLF blanc - dur - - -
PR - - - - - -
PL blanc d’étain très réfractaire - - - -
LEXIS gris presque noir - - - - -
HACHETTE - - - résistant - -
Uranium TLF gris - - - - -
PR gris - dur - - -
PL - - ayant l’aspect du - - -
fer
LEXIS - - - - - -
HACHETTE - - - - - -
Yttrium TLF - - - - - -
PR gris - - - - -
PL - - - - - -
LEXIS - - - - - -
HACHETTE - - - - - -
Zinc TLF brillant d’un ductile malléable - - -
blanc bleuâtre
PR blanc bleuâtre - dur - - -
PL blanc bleuâtre - - peu altérable - -
LEXIS blanc bleuâtre - - - - -
HACHETTE - - - - - -
Francium --
Gadolinium
Lutécium
Terbium
541
Annexe I.25 - Les métaux : répartition des traits (nombre) selon les dictionnaires
Dictionnaire Nombre total des propriétés Propriétés relatives à la couleur Nombre du reste des propriétés
TLF 95 33 62
PETIT ROBERT 66 28 38
PETIT LAROUSSE 58 28 30
LEXIS 63 26 37
HACHETTE 35 15 20
Annexe I.26 -
b) Répartition des traits traités (nombre et pourcentage) selon les groupes de métaux
542
Annexe I.27 : Définition d’amande dans le Petit Robert
543
b) La forme
c) Le goût
544
PL Suret
LEXIS Âpre
Poire TLF, PR, PL, HACHETTE Oblongue approximation
LEXIS Plus ou moins allongé, s’amincissant vers la queue
Melon TLF, PR, PL, HACHETTE Ovoïde ou sphérique variété
LEXIS arrondi
Annexe I.29 : Quelques hyperonymes « culturels » dans les définitions des variétés de chiens
545
Annexe I.30 - Définition de la race par l’origine ou l’emploi
546
PR Dogue anglais
PL, LEXIS, PR Bouvier Des Flandres, (PR : ex.)
HACHETTE Bouvier des Flandres, des Ardennes
TLF, HACHETTE Berger Berger allemand
PR Berger allemand, écossais, belge, des Pyrénées
PL Berger allemand, des Pyrénées
547
PL Dont il existe différentes races de chasse et d’agrément
TLF Dogue De chasse et de garde
PR, PL, HACHETTE De garde
PR Mâtin De garde ou de chasse
PL, LEX., HACHETTE De garde
TLF Employé à la garde des maisons et des troupeaux
PL, LEXIS Chihuahua D’agrément
HACHETTE Terrier
TLF Terre-neuve De garde, réputé par sa disposition à se jeter à l’eau pour sauver
les personnes en difficulté
PL, LEXIS De sauvetage
LEXIS Fox-terrier Terrier essentiellement chasseur
HACHETTE Utilisé pour la chasse au renard en terrier
548
Annexe I.34 a) : Traits distinctifs entre deux dictionnaires ou plus
549
Annexe I.35 : Définitions minimales par l’origine et la fonction
Famille A: /à boire/ Famille B : /contenir, conserver/ Famille C : /servir/ Famille D : /cuire, bouillir/ Famille E : /contenir,
transporter
Bock, chope, coupe, Bidon, bocal, bobonne, bouteille, buire, Assiette, écuelle, Bouilloire, caquelon, casserole, Baquet, bassin,
gobelet, godet, hanap, burette, canette, carafe, chopine, jatte, plat, pot, chaudière, chaudron, coquemar, bassine, cuve, cuveau,
pichet, quart, tasse, cruche, cruchon, dame-jeanne, fiole, saucière, soupière fait-tout, poêle, marmite, poêlon, cuvette, puisette, seau,
timbale, verre flacon, jacqueline, tourie poissonnière, terrine seille, seillon
550
Annexe I.37 – La famille /bouteille/ : matière et forme
551
Annexe I.38 - Récipients /à boire/ : Configuration des traits
Mot Dict. Hyperonyme Usage Parties Forme Matière Contenance Usage
hyper. ptt récipient à boire pied anse, oreille cylind. évasé .+larg.//ht métal verre plastique cristal 1/4l Utilisé par l’armée
Verre TLF .+ .+
PR .+ .+ .+ .+
PL .+ .+ .+ .+ .+
LEX .+ .+ .+
HACH .+ .+
tasse TLF .+ .+ .+ .+
PR .+ .+ .+ .+
PL .+ .+ .+ .+
LEX .+ .+ .+ .+ .+ .+ .+
HACH .+ .+ .+
gobelet TLF .+ .+ ord- ord- .+ lég+ .+
PR .+ .+ ord- gén.+
PL .+ .+ gén- gén-
LEX .+ .+ .- .- .+
HACH .+ .+ .- .- .+
Timbale TLF gobelet [.+ .+ .- ord- .+ lég+ .+] .+
PR gobelet [.+ .+ .- .+ gén.+] .+
PL gobelet [.+ .+ gén- gén-] .+
LEX gobelet [.+ .+ .+ .+] .+
HACH gobelet [.+ .+ .+] .+
Quart TLF gobelet [.+ .+ ord- .+ lég+ .+] .+ gén+ surt+
PR gobelet [.+ .+ ord- gén.+] env+ .+
PL gobelet .+ [.+ .+ gén- .+] .+ .+
LEX gobelet .+ [.+ .+ .+ .+] .+ .+
HACH gobelet [.+ .+ .+ .+] env+ .+ou camp.
godet TLF .+ .+ .+ .- .-
PR .+ .+ .+ .- .-
PL gobelet .+ [.+ .+ gén- gén-]
LEX vase .+ .+ .+ .- .-
HACH verre .+ [.+ .+] .- .-
552
Abréviations et autres signes
gras = trait explicite
non gras = correspond au trait hérité de l'hyperonyme
[ = début de la définition impliquée par l'hyperonyme
] = fin de la définition impliquée par l'hyperonyme
.+ = avec
.- = sans
gén. = généralement
lég. = légèrement
ord. = ordinairement
env. = environ
surt. = surtout
camp. = camping
cylind. = cylindrique
plast. = plastique
.+larg.//ht = plus large que haut
orei. = oreille
553
Annexe I.39 -
a) TLF
Bouteille : « Récipient de contenu variable, le plus souvent en verre (plus récemment en matière plastique), à large ventre, généralement à goulot
long et étroit, destiné à contenir des liquides. ».
554
b) Le Petit Robert
- Bouteille : « Récipient à goulot étroit, souvent en verre, destiné à contenir du vin ou d'autres liquides. »
- Bonbonne : « Récipient pansu à col étroit et court servant à conserver certains liquides ».
-Cruche : « Récipient, souvent de grès ou de terre, à col étroit, à large panse, à anse. ».
Récipients Traits hérités de cruche Les modifications Les ajouts Traits redondants
Jacqueline -à col étroit -en grès -en usage dans les Flandres -à large panse
-à anse
555
c) Le Petit Larousse
Bouteille : « . Récipient de forme variable, à goulot étroit, en verre, en plastique, etc., destiné aux liquides, en particulier aux boissons ».
d) Lexis
Bouteille : « Récipient en verre, allongé et à goulot étroit, destiné à contenir les liquides ».
556
e) Hachette
- Jacqueline Ø
557
Annexe I.40 - Tableau de croisement
Jacqueline TLF bouteille en grès en usage dans le Nord de la France et dans les Flandres
PR bouteille pansue, à anse, en grès, en usage dans les Flandres
PL bouteille en grès, à large panse, répandue dans le Nord de la France et dans les Flandres
LEXIS bouteille à large panse, en grès
Dame-jeanne TLF grosse et grande bouteille (de verre, de terre, de grès etc./ souvent enveloppée d’osier ou de jonc et d’une
contenance pouvant aller de 20 à 50 litres et (servant au transport de certains liquides).
PR sorte de bouteille, pansue, à col court
PL grosse bouteille de grès ou de verre, souvent clissée, contenant de 20 à 50 litres, destinée pour le transport
d’un liquide
LEXIS grosse bouteille de grès ou de verre, d’une contenance de 20 à 50 litres
HACHETTE grosse bouteille renflée, de verre ou de grès souvent cachée d’osier
Tourie TLF grosse bouteille, de verre ou degrés, protégée par un recouvrement d’osier et (servant transport de certains
liquides (alcool, acides, etc.)).
PR grande bouteille, entourée de paille, d’osier et servant au transport des acides.
PL récipient de moyenne contenance, fabriqué en grès
LEXIS grosse bouteille de grès ou de verre, entourée d’osier pour le transport des liquides caustiques
HACHETTE grosse bouteille, de verre ou de grès, entourée d’osier, servant à garder et à transporter de l’huile, des acides,
etc.
558
Annexe I.41
a) Métaux : fréquence des traits non modalisés dans tous les
dictionnaires
559
Fer blanc gris .+
ductile .+
malléable .+
tenace .+
Hafnium blanc .+ TLF
brillant .+
ductile .+
Iridium cassant .+ PR
dur .+
inaltérable .+
Magnésium peu ductile .+ PR
malléable .+ PR
s'oxydant
facilement .+ TLF
solide .+
Manganèse gris .+
cassant .+
dur .+
très oxydable .+ TLF
Mercure brillant .+
Molybdène cassant .+
dur .+
Niobium brillant .+
Or jaune brillant .+
ductile .+
malléable .+
inaltérable .+
précieux .+
560
Palladium blanc .+
précieux .+
léger .+ TLF
Platine blanc gris .+
ductile .+
malléable .+ TLF
inaltérable .+
précieux .+
Plomb gris bleuâtre .+
ductile .+ TLF
malléable .+
Potassium blanc argenté .+
mou .+
oxydable .+
léger .+
Praséodyme jaune .+
Rhénium blanc .+
Rhénium brillant .+ PR
Rhodium cassant .+ PL
très dur .+
blanc argent
Ruthénium brillant .+ TLF
cassant .+ TLF
dur .+ TLF
Samarium blanc gris .+ PL
Sodium mou .+
très oxydable .+ TLF
Strontium ductile .+ TLF
malléable .+
Métal Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel ?
Thallium malléable .+
561
résistant à
l'oxydation .+ TLF
Titane blanc .+
brillant .+ PR
Tungstène réfractaire .+ PL
dur .+
Uranium gris .+
dur .+
Vanadium ductile .+
Yttrium gris .+ PR
Zinc blanc bleuâtre .+
brillant .+ TLF
ductile .+ TLF
peu altérable .+ PL
Zirconium ductile .+ TLF
malléable .+ TLF
Total 6 18 18 23 30 95
562
b) Métaux : fréquence des traits modalisés ou objet de variation dans tous les dictionnaires
Métal Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Béryllium blanc .+
gris .+
Cadmium blanc .+
blanc argent .+ TLF
blanc bleuâtre .+ LEX.
Calcium blanc .+
blanc argent .+ TLF
Chrome blanc .+
blanc grisâtre .+ TLF
blanc légèrement bleuté .+ PL
gris clair tirant faibl.sur
Cobalt le rouge .+ TLF
blanc .+
blanc rougeâtre .+ LEX.
blanc d'argent .+ PL
malléable .+ PL
dur .+ LEX.
Étain blanc gris .+
blanc .+
Iridium blanc grisâtre .+
blanc .+ PR
Magnésium blanc argenté .+
blanc brillant .+ TLF
Mercure blanc .+ PL
blanc argenté .+
Molybdène blanc .+
blanc argenté .+ PR
Métal Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel ?
563
Niobium gris .+
blanc .+ PR
Osmium bleu-blanc .+ PR
gris-bleu .+ HACH.
Palladium malléable .+ TLF
dur .+
Rhodium blanc argent .+ TLF
blanc .+ PL
Sodium blanc .+
blanc argent .+ PR
Strontium blanc argent .+
jaune .+
blanc .+ HACH.
Thallium blanc .+
blanc bleuâtre .+ PR
Thulium blanc argent .+
blanc .+ PR
Titane malléable .+ TLF
dur .+ LEX.
Tungstène gris presque noir .+ LEX.
vanadium gris argent .+
blanc .+
Zinc malléable .+ TLF
dur .+ PR
Zirconium blanc .+ PR
gris .+ LEX.
Total 0 3 7 11 31 52
Annexe I.42
Chiens : fréquence des traits non modalisés dans tous les
564
dictionnaires
Caniche d'agrément
Chien Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Carlin d'agrément .+
565
originaire du
Chihuahua Mexique .+
d'agrément .+
terrier .+ HACH.
Chow-chow d'origine chinoise .+
de compagnie .+
d'aveugle .+ TLF
pour leur travail .+ LEX
consommation .+ LEX
Cocker de chasse .+
Colley de berger .+
écossais .+
Dalmatien d'agrément .+ LEX.
originaire du
Danois Danemark .+
de garde .+ PR
Doberman de garde .+
d'origine
allemande .+
Dogue de chasse .+ TLF
de garde .+
Épagneul de chasse .+
d'agrément .+ PL
Fox-hound courant .+
anglais, de
Grande-Bretagne .+
Fox-terrier terrier .+
.+
d'origine anglaise
Chien Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Griffon de chasse .+
566
d'agrément .+
originaire de la
Grande-Bretagne .+ TLF
Groenendael de berger .+
belge .+
Husky de traîneau .+
King-charles anglais .+ PL
d'agrément .+ LEX.
originaire de
Labrador Terre-neuve .+ TLF
de chasse, d'arrêt .+
de chasse,
Limier courant .+
d'appartement, de
Loulou luxe .+
Malinois de berger .+
belge .+
Mastiff de garde .+
de race anglaise .+
Mâtin de garde .+
de chasse .+ PR
Pékinois de Chine .+ TLF
de compagnie .+
Pointer anglais .+
d'arrêt .+
Ratier Chasse les rats .+
567
Chien Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Retriever de chasse .+
rapporter le
gibier .+
sauvetage ne
Saint-bernard montagne .+
Samoyède de Sibérie .+ TLF
de garde .+ TLF
de traîneau .+
Scottish-terrier terrier .+
d'Écosse .+
Setter d'arrêt .+
anglais .+ PR
Skye-terrier terrier .+
d'agrément .+
de l'île de Skye .+
Sloughi lévrier .+
arabe .+
de l'Afrique du
Nord .+
Teckel de chasse .+ TLF
terrier .+ LEX.
d'agrément .+ TLF
allemand .+
originaire de
Terre-neuve Terre-neuve .+
de garde .+ TLF
sauvetage .+
Total 23 14 17 14 26 94
568
Annexe I.43 - « Chiens » : répartition des exemples
569
Lexis Loulou Loulou de Poméranie
Terre- Le terre-neuve est un précieux compagnon de l’homme,
neuve surtout des marins, à cause du courage qu’il manifeste
pour effectuer des sauvetages en mer.
570
Annexe I.44
a) Récipients : fréquence des traits non
modalisés dans tous les dictionnaires
571
Récipient Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Canette mince et longue .+ TLF
Carafe base large .+
col étroit .+
pansue .+ PR
Casserole fond plat .+
à manche .+
Cocotte .+anse .+
.+couvercle .+
Coquemar .+anse .+
Cruche large panse .+
.+anse .+
.+bec .+
col étroit .+
installé
durablement en
Cuve un lieu .+ TLF
Cuvette large .+
peu profond .+
bords évasés .+ TLF
Dame-jeanne grande .+
de 20 à 50 litres .+
Écuelle petite .+
ronde .+
creux .+
très évasé/sans
rebord .+
contenir la
nourriture .+
épaisse .+ HACH.
572
Récipient Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Fait-tout .+anse .+
.+couvercle .+
Fiole petite .+
de verre .+
col étroit .+
utilisée spéc. en
pharmacie .+ PR
Flacon ouvragé .+ PR
Gobelet à boire .+
Godet petit .+
sans pied .+
sans anse .+
à boire .+
Jacqueline en grès .+
large panse .+
utilisée en Flandre .+
Jatte ronde .+
tr-ès évasé .+
sans rebord .+
sans pied .+ TLF
sans anse .+
sans manche .+
Marmite fond plat ou arrondi .+ TLF
.+couvercle .+
Pichet petit
de forme galbée
collet étroit
.+anse
573
Récipient Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Poêle en métal .+
bords bas .+
longue queue .+
Puisette .+anse .+ TLF
Quart en métal .+
.+anse .+
Saladier creux .+ TLF
sans anse .+ TLF
hauts rebords .+ TLF
Larg. ouvert vers le
Seau haut .+ TLF
Seille .+oreilles .+ TLF
Soupière profond .+
large .+
soupe/potage .+
Tasse .+anse .+
Terrine ronde .+ TLF
tronconique .+
fond plat .+ TLF
bords évasés .+
bords épais .+ PL
Timbale en métal .+
sans pied .+
cylindrique .+
574
Récipient Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Tourie entourée d'osier .+
grande .+
Verre à boire .+
Total 23 17 16 13 29 98
b) Récipients : fréquence des traits modalisés ou objets de variation dans tous les dictionnaires
575
Bouteille en verre .+ LEX.
goulot étroit .+
Burette huile, vinaigre .+ HACH.
Canette bière .+
.+bouchon .+ LEX.
Caquelon terre .+
profond .+ HACH.
Carafe en verre .+ HACH.
Casserole cylindrique .+
Cocotte fonte .+ PR
Coquemar en métal .+ PL
.+couvercle .+
.+pieds .+ HACH.
Cruche grès ou poterie .+ LEX.
Cuve grand .+
Cuvette portatif .+
usages
domestiques .+
Dame-jeanne de verre, de grès .+
Fait-tout cuire .+
en métal .+ LEX.
Flacon en verre .+ LEX.
avec bouchon .+
plus haut que
Gobelet large .+ TLF
cylindrique .+ HACH.
évasé .+ LEX.
sans pied .+
sans anse .+
Récipient Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Marmite cuire .+
576
en métal .+ PR
.+anse .+ PL
Pichet à vin, à cidre .+ LEX.
Plat creux .+ LEX.
on y sert les
mets .+
Poêle ronde .+
pour les fritures .+
Quart 25 cl .+
utilisé dans
l'armée .+ PR
servir des
Saladier salades .+
Seau cylindrique .+
.+anse .+
transporter des
liquides .+ PL
Soupière .+anse .+ TLF
.+couvercle .+
boissons
Tasse chaudes .+ TLF
Tourie grès .+ PL
tr.acides .+
Verre en verre .+ LEX.
Total 0 5 14 13 32 64
577
Annexe I.45
578
Fruit Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Cerise à noyau .+
rond .+
chair juteuse et
sucrée .+ PL
petit .+
Citron jaune .+
saveur acide .+
ovïde .+
Coing jaune .+
piriforme .+
goût âpre .+
cotonneux .+ PR
peau veloutée .+ LEX.
Figue à pulpe .+
Fraise très parfumé .+ TLF
forme conique .+ TLF
charnu .+
Framboise très parfumé .+
composé de
petites drupes .+
Goyave sucré .+
parfumé .+
579
Fruit Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
à enveloppe
Grenade coriace .+ TLF
de la grosseur
d'une pomme,
orange .+
à grains rouges .+
aigrelet .+
sucré, agréable,
rafraîchissant .+
Mangue chair jaune .+
savoureuse .+
parfumée .+
à gros noyau .+ TLF
Melon chair juteuse .+
sucrée .+
parfumée .+
noir, rouge
Merise (rose) .+
amer, âpre .+
Orange pulpe juteuse
jaune tirant sur
le rouge
pulpe sucrée
Pamplemousse jaune .+
légèrement amer
580
Fruit Trait 5 dict. 4 dict. 3 dict. 2 dict. 1 dict. Lequel?
Pêche forme ronde .+ TLF
noyau dur .+
chair juteuse .+
chair
savoureuse,
sucrée .+
chair fine/tendre .+
Poire charnu .+
à pépins .+
sucré .+
parfumé .+
forme oblongue .+
Pomme à pépins .+
rond .+
pulpe ferme .+
juteuse .+
parfumée .+ HACH.
peau fine et
coriace .+ HACH.
Prune à noyau .+ TLF
chair juteuse .+
sucrée .+
Total 8 12 18 16 16 70
581
Annexe I.46
Fruits : traitement modalisé
582
Annexe I.47
Chiens: traitement modalisé
Chien Trait TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH
Sain-bernard roux et blanc ou pie rouge .+ .+ .+
Epagneul chasse, agrément .+ .+ .+ .+ .+
Airedale chasse, agrément .+ .+ .+
Skye-terrier terrier, agrément .+ .+ .+ .+ .+
Griffon chasse, agrément .+ .+ .+ .+ .+
Bull-terrier chasse, ratier, compagnie .+ .+ .+ .+
Chow-chow couleur fauve .+ .+
Dogue chasse, garde .+ .+ .+ .+
Bouledogue chasse, agrément .+ .+
Malinois gris-fauve .+ .+ .+ .+
Danois du Danemark .+ .+ .+
rose et clair .+ .+
Samoyède blanc ou crème .+ .+ .+
traîneau, compagnie .+ .+ .+
Teckel chasse, agrément .+ .+
Total 15 3 7 5 6 9 8 4 4 1 2 1 0 0 0 0
Propriétés traitées 12 11 9 7 11
583
Annexe I.48
Récipients : traitement modalisé
584
TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH
Caquelon terre, fonte .+ .+ .+ .+
profond .+ .+
Carafe verre, cristal .+ .+ .+ .+
Casserole forme cylindrique .+ .+ .+ .+
Chope cylindrique .+ .+
Cocotte fonte, verrerie culinaire etc. .+ .+ .+ .+ .+
Coquemar terre, métal .+ .+
avec couvercle .+ .+ .+ .+
avec pieds .+ .+
Coupe arrondi, évasé .+ .+ .+
plus haut que large .+ .+ .+
Cruche grès, terre .+ .+
Cuve grande taille .+ .+ .+ .+
Cuvette portatif .+ .+ .+ .+
usages domestiques, industriels .+ .+ .+ .+
Dame-jeanne verre, grès, terre .+ .+ .+ .+
Fait-tout bouillir, cuire .+ .+ .+
métal, terre, fonte etc. .+ .+ .+
Flacon verre .+ .+ .+ .+
fermé par un bouchon .+ .+ .+ .+ .+
Futaille bois .+ .+
Gobelet plus haut que large .+ .+
cylindrique, évasé .+ .+ .+
sans pied .+ .+ .+ .+ .+
sans anse .+ .+ .+ .+
Marmite bouillir, cuire .+ .+ .+ .+ .+
terre, métal .+ .+
avec anse .+ .+ .+
Récipient Trait Choix ferme Choix modalisé Choix ouvert
TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH
585
Pichet boisson, vin, cidre .+ .+ .+ .+ .+
Plat servir, cuire .+ .+ .+ .+
creux .+ .+
Poêle ronde .+ .+ .+
pour les fritures .+ .+ .+
Poêlon mijoter .+ .+ .+
Puisette métal, bois .+ .+
Quart contenance 25 cl .+ .+ .+ .+ .+
utilisé dans l'armée .+ .+ .+
Saladier salades, autres mets .+ .+ .+ .+ .+
Saucière sauce, jus, crème .+ .+ .+ .+ .+
Seau cylindrique, tronconique .+ .+ .+ .+ .+
muni d'une anse .+ .+ .+ .+
liquides, matières solides .+ .+ .+ .+ .+
Soupière avec anse .+ .+
avec couvercle .+ .+ .+
Tasse boire, boissons chaudes .+ .+ .+ .+ .+
Terrine terre, porcelaine, métal etc. .+ .+ .+ .+ .+
Tourie verre, grès .+ .+ .+ .+ .+
entourée d'osier, de paille .+ .+ .+ .+
liquides, acides .+ .+ .+
Verre verre, cristal, plastique .+ .+ .+
Total 72 18 25 26 33 31 40 25 15 12 13 9 4 5 2 2
Propriétés traitées 67 55 47 47 46
586
Annexe I.48
Récipients : traitement modalisé
587
Récipient Trait Choix ferme Choix modalisé Choix ouvert
TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH
Caquelon terre, fonte .+ .+ .+ .+
profond .+ .+
Carafe verre, cristal .+ .+ .+ .+
Casserole forme cylindrique .+ .+ .+ .+
Chope cylindrique .+ .+
Cocotte fonte, verrerie culinaire etc. .+ .+ .+ .+ .+
Coquemar terre, métal .+ .+
avec couvercle .+ .+ .+ .+
avec pieds .+ .+
Coupe arrondi, évasé .+ .+ .+
plus haut que large .+ .+ .+
Cruche grès, terre .+ .+
Cuve grande taille .+ .+ .+ .+
Cuvette portatif .+ .+ .+ .+
usages domestiques, industriels .+ .+ .+ .+
Dame-jeanne verre, grès, terre .+ .+ .+ .+
Fait-tout bouillir, cuire .+ .+ .+
métal, terre, fonte etc. .+ .+ .+
Flacon verre .+ .+ .+ .+
fermé par un bouchon .+ .+ .+ .+ .+
Futaille bois .+ .+
Gobelet plus haut que large .+ .+
cylindrique, évasé .+ .+ .+
sans pied .+ .+ .+ .+ .+
sans anse .+ .+ .+ .+
588
Récipient Trait Choix ferme Choix modalisé Choix ouvert
TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH TLF PR PL LEX HACH
Marmite bouillir, cuire .+ .+ .+ .+ .+
terre, métal .+ .+
avec anse .+ .+ .+
Pichet boisson, vin, cidre .+ .+ .+ .+ .+
Plat servir, cuire .+ .+ .+ .+
creux .+ .+
Poêle ronde .+ .+ .+
pour les fritures .+ .+ .+
Poêlon mijoter .+ .+ .+
Puisette métal, bois .+ .+
Quart contenance 25 cl .+ .+ .+ .+ .+
utilisé dans l'armée .+ .+ .+
Saladier salades, autres mets .+ .+ .+ .+ .+
Saucière sauce, jus, crème .+ .+ .+ .+ .+
Seau cylindrique, tronconique .+ .+ .+ .+ .+
muni d'une anse .+ .+ .+ .+
liquides, matières solides .+ .+ .+ .+ .+
Soupière avec anse .+ .+
avec couvercle .+ .+ .+
Tasse boire, boissons chaudes .+ .+ .+ .+ .+
Terrine terre, porcelaine, métal etc. .+ .+ .+ .+ .+
Tourie verre, grès .+ .+ .+ .+ .+
entourée d'osier, de paille .+ .+ .+ .+
liquides, acides .+ .+ .+
Verre verre, cristal, plastique .+ .+ .+
Total 72 18 25 26 33 31 40 25 15 12 13 9 4 5 2 2
Propriétés traitées 67 55 47 47 46
589
Deuxième chapitre- Stéréotypie et polysémie
Annexe II.1 - Traitement d’approfondissement dans les différents dictionnaires
Dictionnaire Droite n.f. Droit adj. Droit adj. et n. Droit adj. et adv. Droit adj./adv. Et n.
TLF + +
PR + + +
PL + + +
LEXIS
HACHETTE
590
Gauche n.f. Gauche adj. Gauche adj. et n. Gauche n. m.
TLF + +
PR +
PL + + +
LEXIS
HACHETTE
Haut n.m. Haut adj. Haut adj. et n. Haut adj. et adv. Haut adj./adv. Et n.
TLF + +
PR +
PL + +
LEXIS + +
HACHETTE +
591
Annexe II.3- Traitement de "droit, droite"
592
Dictionnaire homonyme catégorie entrée catégorie domaine signification
PETIT ROBERT Droite n. f. n. f. géométrie II. Ligne dont l'image est celle d'un fil parfaitement tendu
Droite n. f. n. f. orientation I.1¨ Le côté droit, l'aile, la partie droite
Droite n. f. n. f. politique I.3¨ La droite d'une assemblée politique
Droite n. f. n. f. politique .I.3. — Les différents partis qui composent la droite.
1. Droit adj. et adv. adj. direction A.2¨ qui va d'un point à un autre par le chemin le plus court.
1. Droit adj. et adv. adv. direction B.2¨ Fig. Par la voie la plus courte, la plus rapide
1. Droit adj. et adv. adj. géométrie A.1¨ Qui est sans déviation, d'un bout à l'autre
1. Droit adj. et adv. adj. géométrie A.2._à Géom. Ligne droite. droite
1. Droit adj. et adv. adv. géométrie B.1¨ En ligne droite
1. Droit adj. et adv. adj. intellect B.2¨ Vieilli Qui suit un raisonnement correct
1. Droit adj. et adv. adj. morale A.2.— Fig. Le droit chemin : le chemin de l'honnêteté
1. Droit adj. et adv. adj. morale B.1¨ Qui ne s'écarte pas d'une règle (morale).
1. Droit adj. et adv. adv. morale 2._à Marcher droit : bien se conduire, être obéissant
2. Droit adj. et n. m. adj. orientation I. Qui est du côté opposé à celui du cœur de l'observateur
2. Droit adj. et n. m. n. m. position/corps II. Le poing droit, à la boxe
TLF 1. Droit adj., adv. et n. adj. direction B.2¨ Dont la direction est constante
1. Droit adj., adv. et n. adj. géométrie A.1. Ligne droite, et, p. ell., droite
1. Droit adj., adv. et n. adj. géométrie A.1.a.Qui ne présente ni angle, ni courbure
1. Droit adj., adv. et n. adj. intellect C.2.Conforme à la raison, juste, sain, sensé
1. Droit adj., adv. et n. adj. morale C.1.a.Conforme aux principes de la morale, de la religion.
1. Droit adj., adv. et n. adj. morale C.1.b.Franc, honnête, ouvert, sans compromission
2. Droit adj. et n. adj. orientation B.Qui correspond au côté droit de l'observateur.
2. Droit adj. et n. adj. orientation A.Situé du côté opposé à celui du cœur.
2. Droit adj. et n. n. f. politique C.Côté droit de l'hémicycle d'une assemblée parlementaire
2. Droit adj. et n. n. f. politique C._L'ensemble des parlementaires qui y siègent; idées, partis
593
Dictionnaire homonyme catégorie entrée catégorie domaine signification
HACHETTE 1. Droit adj., adv. et n. adj. géométrie A.1.Qui n'est pas courbe, qui trace une ligne qui ne dévie pas
1. Droit adj., adv. et n. adj. orientation A.2.Qui va par le chemin le plus court
1. Droit adj., adv. et n. adj. intellect A.4.Juste, équitable, un esprit droit
1. Droit adj., adv. et n. adj. morale A.5.Honnête et loyal
1. Droit adj., adv. et n. n. m. géométrie B1.Angle droit
1. Droit adj., adv. et n. adv. orientation C.2.Directement
2. Droit adj. et n. adj. position/corps A.Qui est du côté opposé ç celui du cœur
2. Droit adj. et n. n. m. position/corps B1.en boxe, le poing droit
géométrie, Ligne droite, La droite (d'une assemblée)…l'ensemble des
Droite n. f. n. f. politique conservateurs
594
Annexe 32- Traitement de
"gauche"
catégorie
Dictionnaire homony./polys. entrée catégorie domaine signification
LEXIS 1.gauche adj. et n. adj. et n. position/corps 1. Se dit de la partie du corps située du côté du cœur
2.gauche adj. adj. choses 1. Se dit d’une chose qui est de travers, tordue
1. Se dit de quelqu’un (ou de son comportement) qui est
emprunté, embarrassé,
3.gauche adj. adj. caractère maladroit et mal à l’aise
4.gauche n. f. n. f. politique 1. Gauche de gauche 2
PETIT
LAROUSSE 1.gauche n. f. n. f. orientation 1. Côté gauche d'une personne. Tourner sur sa gauche
2. partie des parlementaires siégeant à la gauche du président;
1.gauche n. f. n. f. politique les représentants,
1.gauche n. f. n. f. politique 3._les partis qui professent des opinions progressistes
1.gauche n. f. n. f. position/corps 2. Main gauche.
2.gauche adj. adj. caractère 3. Empreint de maladresse, de gêne. Personne gauche
3. Se dit de ce qui n'est pas droit, du fait d'une torsion volontaire
2.gauche adj. adj. choses ou accidentelle.
5. [Géométrie] Se dit d'une courbe ou d'une figure qui n'est pas
2.gauche adj. adj. géométrie plane.
2. choses orientées, se dit de la partie située du côté gauche
2.gauche adj. adj. orientation de celui qui regarde.
2.gauche adj. adj. position/corps 1. Se dit du côté du corps où est placé le cœur
2. [Mécanique industrielle] Défaut de planéité d'une pièce.
3.gauche n. m. n. m. choses Le gauche d'une bielle
3.gauche n. m. n. m. position/corps 1. a. Poing gauche, en boxe
3.gauche n. m. n. m. position/corps 1.b. Pied gauche, au football, au rugby.
595
catégorie
Dictionnaire homony./polys. entrée catégorie domaine signification
PETIT
ROBERT I.1.polysémie adj. et n. adj. et n. choses I.1¨ Qui est de travers, qui présente une déviation
I.2¨polysémie adj. et n. adj. et n. caractère I.2¨ (Personnes) Dépourvu de grâce, d'adresse, d'assurance
II.1._ Par anal. ( choses...) Qui est du côté correspondant au côté
gauche
II.1._polysémie adj. et n. adj. et n. orientation d'une personne
II.1._Se dit dans une assemblée délibérante du côté situé à main
gauche
II.1._polysémie adj. et n. adj. et n. politique du président
II.1.Par ext.polys
émie adj. et n. adj. et n. position/corps II.1Par ext. Se dit du côté où est la main gauche
II.1.polysémie adj. et n. adj. et n. position/corps II.1¨ (En parlant de la main) Qui est situé du côté du cœur
II.2¨. orientation de l'espace correspondant au côté gauche
II.2¨. polysémie adj. et n. n. f. orientation d'une personne
III. membres d'une assemblée siégeant à la gauche du président
III.polysémie n. f. n. f. politique et professant des idées progressistes
596
catégorie
Dictionnaire homony./polys. entrée catégorie domaine signification
TLF 1.gauche adj. et n. adj. orientation B. P. ext. Qui correspond au côté gauche de l'observateur.
1.gauche adj. et n. n. f. politique C. Côté gauche de l'hémicycle d'une assemblée parlementaire
1.gauche adj. et n. n. f. politique C._L'ensemble des parlementaires qui y siègent; les idées, les partis
1.gauche adj. et n. adj. position/corps A. 1. [une partie du corps] Situé du côté du cœur
1.gauche adj. et n. adj. position/corps A.2. En partic.a) Emploi péj.Main gauche. V. droit1
1.gauche adj. et n. n. f. position/corps A. [P. ell. de main]1. Main gauche
1.gauche adj. et n. n. f. position/corps B. Côté de la main gauche
B. 1.b) [De son comportement] Qui est maladroit, mal assuré,
2.gauche adj. adj. caractère emprunté
A. [objet]1. Qui est dévié, de travers par rapport à une ligne
2.gauche adj. adj. choses ou à un plan de référence
B.2. [manifestations de l'activité intellect. ou artist.] Qui est
maladroit,
2.gauche adj. adj. intellect lourd, mal venu
B. 1.a) [De son aspect extérieur, de sa silhouette] Qui est lourd,
2.gauche adj. adj. physique dépourvu de grâce
HACHETTE A.1.polysémie adj. et n. adj. choses A.1.Qui n'est pas plan, déformé
A.2.polysémie adj. et n. adj. géométrie A.2.Dont tous les points ne sont pas contenus dans le même plan
A.3.polysémie adj. et n. adj. caractère A.3.Qui manque d'aisance, d'adresse
A.4.polysémie adj. et n. adj. position/corps A.4.Qui est situé du côté du cœur
A.5.polysémie adj. et n. adj. orientation A.5. Qui est situé du côté de la main gauche
B.1.polysémie adj. et n. n.m. position/corps B.1.poing gauche
C.1.polysémie adj. et n. n. f. orientation C.1.Le côté gauche
C.2.polysémie adj. et n. n. f. politique C.2. Ensemble des députés…
597
Annexe II.5 - Classification selon le critère syntaxique dans Le Petit Larousse
598
Annexe II.6 - Traitement de
Haut
catégorie
Dictionnaire homony./polys. entrée catégorie domaine signification
HACHETTE A.1.polysémie adj., adv. et n. adj. Dans l'espace A.1.D'une certaine dimension dans le sens vertical
A.5.polysémie adj., adv. et n. adj. intensité A.5. Élevé, important en intensité, en valeur
échelle de valeur
A.7.polysémie adj., adv. et n. adj. morale+ 7. Excellent
A.6. Qui possède la prééminence, la supériorité
A.6.polysémie adj., adv. et n. adj. hiérarchie soc. et pol. hiérarchiquement
B.1.polysémie adj., adv. et n. n. m. Dans l'espace B.1. Dimension verticale
C.1.polysémie adj., adv. et n. adv. Dans l'espace C.1.A une très grande hauteur
échelle de v. mor., C.4. A un degré très élevé sur l'échelle des valeurs sociales,
C.4.polysémie adj., adv. et n. adv. intelect. et esth. morales etc.
échelle de v. mor., 12. ce qui est jugé supérieur, possède de la noblesse, de la
LEXIS A.12.polysémie adj. adj. intelect. et esth. distinction de la force.
1. ce qui a une grande dimension dans le sens vertical,
A.1.polysémie adj. adj. Dans l'espace de ce qui est élevé
B.2.polysémie n. m. n. m. Dans l'espace 2. Dimension verticale d'un corps, de la base au sommet
échelle de valeur
B.4.polysémie n. m. n. m. morale+ 4.ce qu’il y a d’élevé, d’important, d’excellent
C.polysémie adv. adv. tous sens
599
Dictionnaire homony./polys. catégorie entrée catégorie domaine signification
PETIT
LAROUSSE 1.haut adj. et adv. adj. Dans l'espace 1. Qui a une certaine dimension dans le sens vertical
1.haut adj. et adv. adv. Dans l'espace 1. À haute altitude, en un lieu élevé, à un degré élevé
1.haut adj. et adv. Loc. adv. figement/ générique D'en haut : d'un endroit élevé ; d'un niveau élevé du pouvoir
7. Qui occupe une position supérieure, éminente dans sa
1.haut adj. et adv. adj. hiérarchie (générique) catégorie.
2.haut adj. et adv. adj. intensité (générique) 8. Qui est très grand, à quelque titre que ce soit.
2.haut n. m. n. m. Dans l'espace 1. Dimension verticale d'un corps
2.haut n. m. n. m. Dans l'espace 2. Partie haute, sommet ; partie supérieure
figement/ valeur – Traiter, regarder quelqu'un de haut, avec dédain,
2.haut n. m. n. m. morale mépris
figement/ valeur
2.haut n. m. n. m. morale – Le prendre de haut : réagir avec mépris.
600
catégorie
Dictionnaire homony./polys. entrée catégorie domaine signification
PETIT I.B.1¨ Qui est placé ou porté au-dessus
ROBERT I.B.1.polysémie adj., adv. et n. adj. Dans l'espace de la position normale ou habituelle
I.B.1.polysémie adj., adv. et n. adj. Dans l'espace I.B.1_« Un homme qui tient haute une épée
figement/ valeur
I.B.2.polysémie adj., adv. et n. adj. morale I.B.1. — Loc. Marcher la tête* haute, le front haut
I.C.1.polysémie adj., adv. et n. adj. Dans l'espace I.B.2¨ Qui se trouve situé au-dessus des choses, de la chose.
I.C.2.polysémie adj., adv. et n. adj. hiérarchie soc. et pol. I.C.1. éminent, grand
échelle de v. mor.,
I.C.2.polysémie adj., adv. et n. adj. intelect. et esth. I.C.2¨ au-dessus de la moyenne, supérieur
échelle de valeur
I.C.2.polysémie adj., adv. et n. adj. morale+ I.C.2._ Vx 1. beau, élevé, noble
I.C.3.polysémie adj., adv. et n. adj. valeur morale- I.C.2._ Vieilli altier, 1. hautain
II.1.polysémie adj., adv. et n. adj. intensité I.C.3¨ (Abstrait) Très grand. extrême
II.1.Dimension dans le sens vertical, de la base au
II.2.polysémie adj., adv. et n. n. m. Dans l'espace sommet
II.4.polysémie adj., adv. et n. n. m. Dans l'espace II.2¨ Position déterminée sur la verticale
II.5.polysémie adj., adv. et n. n. m. Dans l'espace II.4¨ La partie la plus haute, le point culminant.
III.B.4.polysémie adj., adv. et n. n. m. figement/ II.5¨ Spécialt Des hauts et des bas
III.B¨ 4¨ un haut degré de puissance, à un haut degré de
III.B.6.polysémie adj., adv. et n. adv. hiérarchie soc. et pol. l'échelle sociale
échelle de v. mor.,
III.C.1.polysémie adj., adv. et n. adv. intelect. et esth. III.B.6¨ un haut degré
figement/ valeur III.C.1._ Fig. Tomber de haut :
III.C.1.polysémie adj., adv. et n. adv. morale éprouver de graves désillusions
figement/ valeur III.C.1.— Le prendre de haut, de très haut : réagir avec
III.C.1.polysémie adj., adv. et n. adv. morale arrogance.
III.C.2.polysémie adj., adv. et n. adv. figement/espace III.C.1.de haut : d'un lieu, d'un point haut sur la verticale
601
III.C.2¨ EN HAUT : dans la région, la partie haute, la plus
III.C.4.polysémie adj., adv. et n. adv. Dans l'espace haute
III.C.4. D'EN HAUT : de la partie haute, de la région
III.C.4.polysémie adj., adv. et n. adv. Dans l'espace supérieure
III.C.4.polysémie adj., adv. et n. adv. hiérarchie soc. et pol. III.C.4.— Des ordres qui viennent d'en haut.
échelle de v. mor.,
TLF 1.haut adj. et adv. adv. intelect. et esth. F. À un haut degré
échelle de valeur
1.haut adj. et adv. adj. morale+ G. 1. Élevé, noble, beau
1.haut adj. et adv. adj. valeur morale- G. 2. Vieilli, péj. Fier, orgueilleux
1.haut adj. et adv. adj. Dans l'espace A. 1. Qui a une dimension déterminée dans le sens vertical
1.haut adj. et adv. adj. Dans l'espace A. 6. Qui est relevé, dressé.
1.haut adj. et adv. adv. Dans l'espace A.1. À un point élevé sur la verticale; à une grande hauteur
figement/ valeur A. 6. _fig. Pouvoir aller la tête haute, le front haut.
1.haut adj. et adv. adj. morale Avoir la conscience tranquille
1.haut adj. et adv. adj. hiérarchie soc. et pol. E. Qui occupe une position supérieure, un rang éminent
1.haut adj. et adv. adv. hiérarchie soc. et pol. E. À un haut degré de puissance, à un rang élevé
1.haut adj. et adv. adj. intensité H.1. Très grand; extrême. Haute sécurité
H.2. Loc. verb. Avoir une haute idée, une haute opinion de
1.haut adj. et adv. adj. intensité qqn
2.haut adj. et adv. adv. intensité D. Le plus grand, le plus abondant
échelle de v. mor.,
2.haut n. m. n. m. intelect. et esth. B.3. Ce qui est élevé, ce qui est excellent
2.haut n. m. n. m. Dans l'espace A. Dimension verticale déterminée, de la base au sommet
2.haut n. m. n. m. Dans l'espace B. Position déterminée sur la verticale
2.haut n. m. n. m. figement/ B.2. De haut b) Au fig. D'une autorité supérieure.
2.haut n. m. n. m. figement/ E.1. Loc. verb. Évacuer par le haut et par le bas
n. m. n. m. figement/ E.2. Avoir des hauts et des bas
602
Annexe II.7 - Traitement homonymique et traitement polysémique dans Lexis
603
Domaine Type de Mot vedette Définition
traitement
Veau 1. Petit de la vache
4. Personne lourde de corps ou d’esprit
Oie 1. Oiseau…
2. Fam. Personne sotte, niaise
1. Cheval 1. Mammifère ongulé …
2. Fam. Femme grande et forte, sans grâce
3. Fam. Personne dure à l’ouvrage
604
Domaine Type de Mot vedette Définition
traitement
Épais, se 1. Se dit d’un corps considéré dans la dimension qui n’est ni la
largeur, ni la longueur, ou d’un corps dans lequel cette dimension
est relativement importante
3. Se dit de ce qui est consistant, compact
4. Se dit de ce qui manque de pénétration, Esprit épais
Vision/ esprit Homonymie 1. Voir 1. voir : voir une personne, une chose, les percevoir par les yeux
2.Voir 2.voir
1. voir une chose : l’examiner, l’étudier de près, y réfléchir
2. juger, décider, aviser
3. avoir dans l’esprit l’image de quelque chose
4. imaginer, concevoir
♦ vue nf
1. image mentale ou faculté de former des images mentales
2. idée, conception
intention de faire quelque chose
1.Vision 1.Vision : Fonction assurée par les yeux et le cerveau de
l’homme…
2. Vision 2. Vision : perception imaginaire d’objets irréels, fantastiques
605
Domaine Type de Mot vedette Définition
traitement
Polysémie Regarder 1. Regarder quelqu’un, quelque chose, porter les yeux diriger les
yeux sur eux.
2. avoir en vue, considérer…(syn. envisager, rechercher)
Obscur, e 1.Se dit d’une pensée, d’une personne que l’on comprend
difficilement
2. Se dit de quelqu’un (ou de son rôle) qui reste inconnu ou peu
célèbre
♦ obscurité
1. État, qualité de ce qui est obscur. On dit que les chats voient
dans l’obscurité (syn LA NUIT, LES TENEBRES[ [litt] ;
contraire LE JOUR)...Les nobles et anciens nobles
continuaient à prendre des noms de terre fort contestables.
Leur obscurité les garantissait (Sand) (syn
ANONYMAT)...L’obscurité de la poésie mallarméenne
(=la difficulté de la comprendre)
2. Phrase, pensée obscure
♦ obscurcir
1. Rendre obscur : Les feuillages obscurcissent le jardin en
été (syn ASSOMBRIR). Le vin lui obscurcit les idées (syn
brouiller contraire ECLAIRER)
2. Oter du lustre, de l’éclat
Class 1. aveugler intellectuellement
606
Domaine Type de Mot vedette Définition
traitement
Un seul sens Aveugle ♦ Aveugler 1. Aveugler quelqu’un, le priver de la vue ; ou
priver de lucidité
♦ aveuglant : Les phares projetaient dans la cour leur lumière
aveuglante (Martin du Gard) [=éblouissante]/ Vérité aveuglante
[=claire, évidente]
607
Domaine Type de Mot vedette Définition
traitement
1. Profond 1. Profond 1. Se dit d’une chose dont le fond est loin de la surface,
de l’ouverture
2. Se dit d’une chose qui est ou qui descend loin de la surface
♦ Approfondir : Approfondir un trou, une cavité etc. les creuser
afin de les rendre plus profonds
♦ approfondissement : L’approfondissement du canal demandera
plusieurs années.
608
Domaine Type de Mot vedette Définition
traitement
Creux, creuse ♦ Creuser 1. Creuser quelque chose, le rendre creux en ôtant de
la matière…
3. Creuser un problème, une idée, une question etc. y réfléchir
attentivement, l’approfondir
Baisser 1.Baisser une chose, la faire descendre, la ramener à un niveau plus
bas
2. Baisser la main, la tête, les yeux etc., les porter, les incliner vers
le bas
♦ V. intr. Diminuer de hauteur, de valeur, de force etc.
Un seul sens Ascension 1. Action de s’élever : L’ascension d’un ballon. L’histoire de votre
ascension professionnelle a été faite plusieurs fois
.+ chaleur, + sensibilité / Homonymie 1.Glace 1.Glace
- chaleur, - sensibilité 1. Eau congelé par le froid…
609
Domaine Type de Mot vedette Définition
traitement
4. Froid 4.Froid
1. Se dit d’une personne (de son comportement) qui
donne une impression d’indifférence, d’impossibilité ou
d’insensibilité
♦ Froideur 1. Absence de sensibilité, indifférence, ostensible
etc.
2. manque de sensualité
3. Caractère d’une œuvre littéraire ou artistique qui
manque de vie, d’émotion
610
Domaine Type de Mot vedette Définition
traitement
1.Chauffer 1.Chauffer 1. Chauffer quelque chose, le rendre chaud
2.Chauffer 2.Chauffer 1. Donner une sensation de chaleur
2.Activer, mener rondement
3. Exciter, enthousiasmer
4. Chauffer des élèves, un sportif, les préparer avec un
zèle hâtif à un examen, une compétition
1. Chaud 1. Chaud
♦ Chaleur 1. Température élevée d’un corps
1. être en chaleur, en parlant des femelles des
animaux domestiques, désirer l’approche d’un mâle.
2. Chaud 2. Chaud
♦ Chaleur : Ardeur des sentiments
1.Bouillir 1.Bouillir 1.Etre animé de mouvements sous l’effet de la chaleur,
en dégageant des bulles de vapeur qui viennent crever à la surface
2.Bouillir 2.Bouillir : Bouillir de colère, d’impatience etc. Être animé d’une
violente colère, ne pouvoir se contenir qu’à grande peine
|| faire bouillir quelqu’un provoquer son irritation, son
impatience
|| Avoir le sang qui bout dans les veines, avoir la vivacité, la fougue de la
jeunesse
1. Flamme 1. flamme : 1.Gaz incandescent généralement lumineux…
2. Flamme 2. flamme 1. Ardeur, vivacité d’un sentiment
♦ enflammer 2.Enflammer quelqu’un, le cœur de quelqu’un : l’emplir
d’ardeur, de passion
♦ s’enflammer Être gagné par l’irritation, la passion
Polysémie Brûler 1. Brûler quelque chose, quelqu’un, les détruire, les anéantir, les
endommager par le feu
6. Brûler quelqu’un, provoquer chez lui une excitation, une douleur vive,
des sentiments violents.
611
Annexe II.8 a) - “boeuf-viande”
Bœuf
TLF : « 2. P. ext., ALIM. Chair du bœuf, de la vache ou du taureau »
PETIT ROBERT : « 4. Viande de bœuf ou de vache, de génisse »
PETIT LAROUSSE : « 2. a. Mâle châtré adulte de l'espèce bovine.
b. Viande de cet animal »
LEXIS : « 2. Viande de bœuf, de taureau ou de vache, noms de divers plats cuisinés »
HACHETTE : « Chair de cet animal »
612
Annexe II.8 e) - « poulet-viande »
Poulet
TLF : «2. ART CULIN.
a)Jeune coq ou jeune poule, élevé pour la consommation précoce.
b) P. méton. Viande de poulet. »
PETIT ROBERT : «2 Poule ou coq jeune, destiné à l'alimentation.
. — Du poulet : de la viande de poulet. Manger du poulet. »
PETIT LAROUSSE : «2. Poule ou coq non encore adulte, élevé(e) pour sa chair. Poulet de grain.
3. Viande de poulet »
LEXIS : «1.Poule
♦ Poulet, ette petit de la poule, jeune poule
♦ poule ou coq dans sa destination alimentaire, manger du poulet (de la chair de poulet) »
HACHETTE : « Volaille de jeune coq ou de jeune poule cuite, accommodée pour la table »
Poule
TLF : « 1. Volatile de basse-cour, femelle du coq, élevé pour ses oeufs et sa chair.
-ART CULIN. Bouillon de poule. Eau de cuisson d'une poule »
PETIT ROBERT : « 1 Femelle du coq, — Bouillon de poule. Poule au riz. »
PETIT LAROUSSE : «1. Femelle du coq, élevée pour sa chair et pour ses œufs. »
LEXIS : Ø
HACHETTE : Ø
613
Coq
TLF : « 1. Oiseau de basse-cour, mâle de la poule
-ART CULIN.
Coq vierge. Chapon. Préparation faite à partir d'un coq, d'un poulet ou d'une autre volaille. Coq en pâte.
Poularde, coq ou chapon farci. »
PETIT ROBERT : « 1 Oiseau de basse-cour, — Cuis. Coq adulte. Coq au vin. »
PETIT LAROUSSE : «1. Oiseau domestique, mâle de la poule
2. Coq au vin : plat préparé à partir de ce volatile cuit avec du vin rouge. »
LEXIS : Ø
HACHETTE : Ø
614
Annexe II.9 - "animal-viande" : traitement du TLF
Statut
Dic. Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
Mammifère, chassé principalement
TLF CHAMOIS mammifère élevage- élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 pour sa peau
Mâle non châtré de la brebis, réservé
BELIER mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 pour la reproduction
BOUC mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Mâle de la chèvre
Femelle adulte SYNT. fromage, lait de
BREBIS mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 brebis; laine, toison de brebis
Mammifère ruminant, utilisé comme
monture ou comme
CHAMEAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 bête de somme dans …
Mammifère ruminant domestique
SYNT. ; fromage, lait, peau, poil de
CHEVRE mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 chèvre »
GENISSE mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Jeune vache qui n'a pas encore mis bas
JUMENT mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Femelle du cheval
POULAIN mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Petit du cheval
. Mâle non castré de l'espèce bovine dont
TAUREAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 la femelle est la vache
AGNEAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception P. ext.1. Chair de l'agneau débitée à la boucherie
LAPIN mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- acception 1. Chair comestible du lapin
Viande de mouton dans le commerce de
MOUTON mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception B. P. méton.1. la boucherie et plus gén. viande d'agneau
PORC mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception B. P. méton.1. Viande de porc
CHEVREAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- acception B. P. méton.2. Viande de chevreau
615
Statut
Dic. Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
Mammifère...dont la chair est très
TLF CHEVREUIL mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- nuance de sens appréciée, Filet, gigot de chevreuil
Mammifère...qui est un gibier très
recherché, notamment pour la chasse à
CERF mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+- boucherie- définition courre
LIÈVRE mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- nuance de sens 3. P. méton.a) Chair de l'animal. Terrine de lièvre
SANGLIER mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- nuance de sens A.P. méton. Chair de cet animal.
BOUCH., ART CULIN. Viande de cet
VEAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ nuance de sens 3. P. méton.a) animal,
pouvant être accommodée de
nombreuses manières.
CHEVAL mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+- boucherie+- nuance de sens 2. P. méton.a) ALIM. Synon. de viande de cheval
AUTRUCHE oiseau élevage- élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0
GEAI oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- 0 0
Chair de cet oiseau, que l'on utilise dans
OIE oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- acception B. P. méton.1. l'alimentation:
vivant à l'état sauvage dans la forêt et la
FAISAN oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- définition plaine,
BECASSE oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- définition oiseau...constituant un gibier estimé
très estimé comme gibier et recherché
PERDRIX oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- définition pour les prépar.
culin. perdrix aux choux, rôtie
engraissé notamment pour les fêtes de
DINDE oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- définition fin d'année.
dont la chair comestible est recherchée.
CANARD oiseau élevage+- élevé, rech. pr viande+ boucherie- Définition A. Canard musqué, au sang, à l'orange
La caille est, parmi le gibier proprement
CAILLE oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- Exemple dit
616
Statut
Dic. Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
P. méton. Cet oiseau apprêté dans des
TLF SARCELLE oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- nuance de sens plats recherchés; chair de cet oiseau
Coq vierge. Chapon. Préparation faite à
COQ oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+- boucherie- nuance de sens ART CULIN. partir d'un coq,
d'un poulet ou d'une autre volaille.
Bouillon de poule. Eau de cuisson d'une
POULE oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+- boucherie- nuance de sens ART CULIN. poule
617
Annexe II.10 - "animal-viande" : Traitement du Petit
Robert
Statut
Dic Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
PR CHAMOIS mammifère élevage- élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Mammifère
nuance de
LIÈVRE mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- sens — Chair comestible de cet animal
nuance de
SANGLIER mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- sens 1.— Chair de cet animal
nuance de
CHEVREUIL mammifère élevage- élevé, rech.pr viande+ boucherie- sens — Cuissot, ragoût de chevreuil.
CERF mammifère élevage- élevé, rech.pr viande+- boucherie- 0 0 Grand mammifère ruminant. Les bois du cerf,
BELIER mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Mâle non châtré de la brebis
BOUC mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Mâle de la chèvre
Femelle adulte du mouton. Lait, fromage de
BREBIS mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 brebis
Grand mammifère …Transport à dos de
CHAMEAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 chameau
CHEVRE mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Lait de chèvre. Fromage de chèvre
Jeune vache qui n'a pas encore vêlé. Foie de
GENISSE mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 génisse
JUMENT mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Femelle du cheval
Petit du cheval, mâle ou femelle.
POULAIN mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Poulain entraîné pour la course
618
Statut
Dic Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
Mammifère, bovidé domestique, mâle de la
PR TAUREAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 vache
AGNEAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception 2. Viande d'agneau
nuance de
LAPIN mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- sens 1.— Chair comestible de cet animal
MOUTON mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception 4. Chair, viande de mouton.
PORC mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception 3. Viande de cet animal
Viande de cet animal (viande blanche),
VEAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception 3. vendue en boucherie
nuance de
CHEVAL mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+- boucherie+- sens — Viande de cheval
2¨ Peau de chèvre ou de chevreau qui a été
CHEVREAU mammifère élevage+ élevé, rech.pr viande- boucherie- 0 0 tannée.
AUTRUCHE oiseau élevage- élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 2¨ Peau tannée de cet oiseau
FAISAN oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- définition dont la chair est très estimée.
GEAI oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- 0 0
PERDRIX oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- définition oiseau...qui est très apprécié comme gibier
BECASSE oiseau élevage- élevé, rech.pr viande+ boucherie- définition Oiseau échassier, à chair très estimée.
nuance de
CAILLE oiseau élevage- élevé, rech.pr viande+ boucherie- sens Cuis Cailles aux raisins.
SARCELLE oiseau élevage- élevé, rech.pr viande+ boucherie- Exemple Chasser la sarcelle.
Cette volaille, apprêtée pour être mangée.
nuance de Dinde rôtie.
DINDE oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- sens 1.spécialt Dinde de Noël.
nuance de Confit d'oie. Foie* gras d'oie. Graisse
OIE oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- sens — d'oie.
Fam. Boniments à la graisse* d'oie.
619
Statut
Dic Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
nuance de Oiseau de basse-cour, — Cuis. Coq adulte.
PR COQ oiseau élevage+ élevé, rech.pr viande+- boucherie- sens 0 Coq au vin. »
1¨ Femelle du coq, — Bouillon de poule.
POULE oiseau élevage+ élevé, rech.pr viande+- boucherie- Exemple Poule au riz
Canard rôti. Canard aux navets, aux olives, à
nuance de l'orange,
CANARD oiseau élevage+- élevé, rech. pr viande+ boucherie- sens — au poivre vert, au sang.
620
Annexe II.11 - "animal-viande" : traitement du Petit
Larousse
Statut
Dic Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
élevé, rech. pr
PL BELIER mammifère élevage+ viande- boucherie- 0 0 Mouton mâle
élevé, rech. pr
BOUC mammifère élevage+ viande- boucherie- 0 0 Mâle de la chèvre
élevé, rech. pr Mammifère...sert de monture et d'animal de
CHAMEAU mammifère élevage+ viande- boucherie- 0 0 trait
élevé, rech. pr
CHAMOIS mammifère élevage- viande- boucherie- 0 0 2. Peau de chamois
que l'on élève principalement pour la
élevé, rech. pr production
CHEVRE mammifère élevage+ viande- boucherie- 0 0 de lait.
CHEVREA élevé, rech. pr
U mammifère élevage+ viande- boucherie- 0 0
élevé, rech. pr Jeune femelle de l'espèce bovine n'ayant
GENISSE mammifère élevage+ viande- boucherie- 0 0 pas encore vêlé.
élevé, rech. pr
JUMENT mammifère élevage+ viande- boucherie- 0 0 Femelle adulte de l'espèce équine
élevé, rech. pr
POULAIN mammifère élevage+ viande- boucherie- 0 0 Jeune cheval âgé de moins de trois ans
élevé, rech. pr
TAUREAU mammifère élevage+ viande- boucherie- 0 0 Mâle reproducteur de l'espèce bovine
élevé, rech. pr
BREBIS mammifère élevage+ viande- boucherie- Mouton femelle
élevé, rech. pr
AGNEAU mammifère élevage+ viande+ boucherie+ acception 1.b. Chair d'agneau
621
Statut
Dic Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
élevé, rech. pr
PL LAPIN mammifère élevage+ viande+ boucherie- acception 2. Chair comestible du lapin
élevé, rech. pr
LIÈVRE mammifère élevage- viande+ boucherie- acception 1.b. Chair comestible de cet animal.
élevé, rech. pr
MOUTON mammifère élevage+ viande+ boucherie+ acception 2. Viande, cuir ou fourrure de cet animal.
élevé, rech. pr
PORC mammifère élevage+ viande+ boucherie+ acception 2. Viande de cet animal.
élevé, rech. pr
SANGLIER mammifère élevage- viande+ boucherie- acception 2. Chair de cet animal
élevé, rech. pr
VEAU mammifère élevage+ viande+ boucherie+ acception 2. Chair de cet animal.
élevé, rech. pr boucherie+
CHEVAL mammifère élevage+ viande+- - acception 3. Viande de cheval
CHEVREUI élevé, rech.pr
L mammifère élevage- viande+ boucherie- 0 0 Ruminant sauvage des forêts d'Europe et d'Asie
élevé, rech.pr
CERF mammifère élevage- viande+- boucherie- 0 0 Ruminant des forêts
AUTRUCH élevé, rech. pr 2. Peau tannée de cet oiseau, utilisée
E oiseau élevage- viande- boucherie- 0 0 en maroquinerie
élevé, rech. pr
CANARD oiseau élevage+- viande+ boucherie- 0 0
élevé, rech. pr
DINDE oiseau élevage+ viande+ boucherie- 0 0
élevé, rech. pr
GEAI oiseau élevage- viande+ boucherie- 0 0
élevé, rech. pr
PERDRIX oiseau élevage- viande+ boucherie- 0 0 0
622
Statut
Dic Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
élevé, rech. pr
PL FAISAN oiseau élevage- viande+ boucherie- définition à chair estimée
élevé, rech. pr que l'on élève pour sa chair et son foie
OIE oiseau élevage+ viande+ boucherie- définition surchargé de graisse
élevé, rech. pr 2. Coq au vin : plat préparé à partir de
COQ oiseau élevage+ viande+- boucherie- 0 ce volatile cuit
élevé, rech. pr Femelle du coq, élevée pour sa chair
POULE oiseau élevage+ viande+- boucherie- définition et pour ses œufs.
élevé, rech.pr
BECASSE oiseau élevage- viande+ boucherie- 0 0 Oiseau échassier migrateur
élevé, rech.pr
CAILLE oiseau élevage- viande+ boucherie- 0 0 Oiseau voisin de la perdrix, migrateur
élevé, rech.pr
SARCELLE oiseau élevage- viande+ boucherie- 0 0 Canard sauvage
623
Annexe II.12 - "animal-viande" : Traitement de Lexis
Statut
Dict. Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
élevage élevé, rech. pr
LEXIS BELIER mammifère + viande- boucherie- 0 0 Mouton mâle
élevage élevé, rech. pr
BOUC mammifère + viande- boucherie- 0 0 Mâle de la chèvre
élevage élevé, rech. pr
BREBIS mammifère + viande- boucherie- 0 0 Femelle du bêlier
élevage élevé, rech. pr
CHAMEAU mammifère + viande- boucherie- 0 0 Mammifère ruminant…
élevé, rech. pr
CHAMOIS mammifère élevage- viande- boucherie- 0 0 2. Sa peau préparée
élevage élevé, rech. pr …une nouvelle race de chèvre qui donnerait
CHEVRE mammifère + viande- boucherie- 0 0 deuxou trois fois plus de lait
CHEVREA élevage élevé, rech. pr
U mammifère + viande- boucherie- 0 0 Petit de la chèvre
élevage élevé, rech. pr
GENISSE mammifère + viande- boucherie- 0 0 Femelle de l'espèce bovine
élevage élevé, rech. pr
JUMENT mammifère + viande- boucherie- 0 0 Etym.bête de somme
élevage élevé, rech. pr
POULAIN mammifère + viande- boucherie- 0 0 2. Fourrure de cet animal
élevage élevé, rech. pr
TAUREAU mammifère + viande- boucherie- 0 0 …apte à la reproduction
élevage élevé, rech. pr
AGNEAU mammifère + viande+ boucherie+ acception 2. Chair de cet animal
624
Statut
Dict. Animal Trait1 Trait2Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
élevage
élevé, rech. pr
LEXIS LAPIN mammifère + viande+ boucherie- acception 2. Chair comestible du lapin
élevage
élevé, rech. pr
MOUTON mammifère + viande+ boucherie+ acception 2. Viande de cet animal
élevage
élevé, rech. pr
PORC mammifère + viande+ boucherie+ acception 2. Chair de cochon
élevé, rech. pr
SANGLIER mammifère élevage- viande+ boucherie- acception 2. Chair de cet animal
élevage élevé, rech. pr Chair de veau, vendue en boucherie
VEAU mammifère + viande+ boucherie+ acception 2. et utilisée pour l’alimentation
élevé, rech. pr nuance de
LIÈVRE mammifère élevage- viande+ boucherie- sens — Chair de cet animal
élevage élevé, rech. pr boucherie+
CHEVAL mammifère + viande+- - acception 4. Viande de cheval
élevé, rech.pr
CHEVREUIL mammifère élevage- viande+ boucherie- définition …gibier de qualité
élevé, rech.pr
CERF mammifère élevage- viande+- boucherie- Exemple gibier par excellence de la chasse à courre
élevé, rech. pr
AUTRUCHE oiseau élevage- viande- boucherie- 0 0 grand oiseau des steppes…
élevage élevé, rech. pr Volatile palmipède élevé en basse-cour
CANARD oiseau +- viande+ boucherie- 0 0 ou vivant à l'état sauvage
élevé, rech. pr
GEAI oiseau élevage- viande+ boucherie- 0 0 oiseau passereau
élevé, rech. pr
SARCELLE oiseau élevage- viande+ boucherie- 0 0 canard squvage de petite taille
élevé, rech. pr
CAILLE oiseau élevage- viande+ boucherie- définition gibier de choix
625
Statut
Dict. Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 sémantique Indicateur Définition
élevé, rech. pr
LEXIS FAISAN oiseau élevage- viande+ boucherie- définition constitue un gibier recherché
élevage élevé, rech. pr élevé pour sa chair et son foie
OIE oiseau + viande+ boucherie- définition surchargé de graisse
élevé, rech. pr
PERDRIX oiseau élevage- viande+ boucherie- définition qui est recherché comme gibier
élevé, rech. pr
BECASSE oiseau élevage- viande+ boucherie- Exemple …constitue un gibier très estimé
élevage élevé, rech. pr
DINDE oiseau + viande+ boucherie- Exemple 0 …les dindes rôties
élevage élevé, rech. pr
COQ oiseau + viande+- boucherie- 0 0 Mâle de la poule
élevage élevé, rech. pr
POULE oiseau + viande+- boucherie- 0 0 Femelle du coq domestique
626
Annexe II.13 - "animal-viande" : Traitement de Hachette
Dic. Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 Statut sémantique Indicateur Définition
HACH. BELIER mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Mouton non castré
BOUC mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Mâle de la chèvre
BREBIS mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Mouton femelle
CHAMEAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Mammifère ruminant
2. Peau préparé d'un chamois
CHAMOIS mammifère élevage- élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 ou d'un animal voisin
Mammifère…élevé pour son lait
CHEVRE mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 et son poil
CHEVREAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 2. Cuir de cet animal
GENISSE mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Jeune vache qui n'a pas encore vêlé.
JUMENT mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Femelle du cheval
POULAIN mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Petit cheval mâle ou femelle
TAUREAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande- boucherie- 0 0 Bovin non castré, mâle de la vache
CHEVREUIL mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- 0 0 Cervidé…
AGNEAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception 2. Viande d'agneau
LAPIN mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- acception 2 Chair du lapin
LIÈVRE mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- acception 2 Chair comestible de cet animal
MOUTON mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception 3. Viande de mouton
PORC mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception 2. Viande de cet animal
VEAU mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie+ acception 2. Chair de veau
SANGLIER mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- nuance de sens chair de cet animal
CERF mammifère élevage- élevé, rech. pr viande+- boucherie- 0 0 mamifère ruminant
CHEVAL mammifère élevage+ élevé, rech. pr viande+- boucherie+- acception 3. Viande de cet animal.
627
Dic. Animal Trait1 Trait2 Trait3 Trait4 Statut sémantique Indicateur Définition
AUTRUCHE oiseau élevage- élevé, rech. pr viande-boucherie- 0 0 Le plus grand des oiseaux actuels
BECASSE oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+boucherie- 0 0 oiseau migrateur
CAILLE oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+boucherie- 0 0 oiseau migrateur
certaines espèces sont domestiques
CANARD oiseau élevage+- élevé, rech. pr viande+ boucherie- 0 0 et d'autres sauvages
DINDE oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- 0 0 Femelle du dindon
FAISAN oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- 0 0 oiseau…
GEAI oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- 0 0 oiseau…
SARCELLE oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- 0 0 Petit canard sauvage
PERDRIX oiseau élevage- élevé, rech. pr viande+ boucherie- définition oiseau…recherché comme gibier
on engraisse les domestiques
OIE oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+ boucherie- Exemple pour obtenir le foie gras
COQ oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+- boucherie- 0 0 Mâle de la poule
femelle du coq…que l'on élève
POULE oiseau élevage+ élevé, rech. pr viande+- boucherie- définition pour sa chair ou pour ses œufs
628
Annexe II.14 – Animaux : extensions polysémiques
629
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire ind.de class définition
[Avec une idée... de puissance déchaînée] Se battre... comme un
lion courage TLF D.1.a)P. métaph. lion
PR 2.Fig. Se battre, se défendre comme un lion, courageusement
PL _ C'est un lion : c'est un homme courageux
HACHETTE 2. Homme d'une grande bravoure
renard ruse TLF C.1.a) P. anal. (d'attitude) Homme rusé, parfois perfide, fourbe
PR 3.Fig. Personne fine et rusée, subtile
PL 2.Fig. Homme rusé
HACHETTE 3. Homme rusé
singerie attitude affectée TLF 2. Attitude affectée, hypocrite et souvent ridicule
HACHETTE B. Simagrées
veau paresseux, nigaud TLF C.1.P. anal., fam. , péj. Personne paresseuse, sans énergie et souvent stupide
PR 5.Fig. Fam Nigaud, paresseux
PL 4.Fam., péjor. Personne lourde de corps ou d'esprit
HACHETTE 4. Personne lourde et sans ressort, au physique et au moral
vermisseau misérable, chétif TLF B.P. anal., péj Être faible, misérable, insignifiant
PR _ (par allus. à la faiblesse de l'homme) « Un si chétif vermisseau
HACHETTE 2.Fig Individu misérable et chétif
vipère méchant, médisant TLF B.2.P. anal. ou au fig., péj Personne méchante, cruelle; personne médisante
PR 2.Fig. Personne malfaisante, dangereuse
PL 2.Fig. . Personne médisante ou malfaisante
HACHETTE 2. personne malfaisante, d'une méchanceté sournoise
630
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire ind.de class définition
[P. réf. à la réputation de bêtise de l'oie] Être bête comme une
Oie bêtise TLF D.1.P. compar. et au fig. oie
PR 2.Fig. et fam. Personne très sotte, niaise
PL 2.Fam. Personne sotte, niaise
HACHETTE 2. Personne fort niaise
Celui qui change d'opinion, de manière d'être selon les
Caméléon inconstance TLF B.2.P. anal. circonstances
Personne qui change de conduite, d'opinion... suivant les
PR 2.Fig. et vieilli circonstances
PL 2.Fig. Personne versatile, qui change facilement d'opinion
personne qui change fréquemment d'humeur, d'opinion... selon
HACHETTE 2. les circonstances
Personne docile, impressionnable, se laissant facilement
Mouton docilité TLF D.2.P. anal. et p. compar. conduire…
PR II.Fig. 1. une personne crédule et passive, qui se laisse facilement mener
PL II.1. Homme crédule, moutonnier ou d'humeur douce
HACHETTE 7. Personne soumise et dépourvue de sens critique
Dinde sottise TLF 2.P. anal., fam., péj Femme, fille, prétentieuse et sotte
PR 2.Fig. Femme stupide
PL 2.Fam. Femme ou fille sotte, stupide
HACHETTE 2. Femme stupide
Chameau hargneux TLF 2.a)Au fig. Personne hargneuse.
PR 3.Fig. et fam. Personne méchante, désagréable
PL 2.Fam. Personne méchante ou acariâtre
HACHETTE 2. Personne méchante, d'humeur désagréable
631
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire ind.de class définition
Pers. dont la saleté..., l'attitude mor. ou intellect. suscite un...
Porc saleté, débauche TLF C. P. anal., fam. dégoût.
PR 2.Par compar. Il est gras, sale comme un porc.
PL 4.. Fig., fam. Homme sale, débauché ou glouton
HACHETTE 4. Homme malpropre ou grossier, libidineux
Cochon malpropre TLF B.2.a) [P. réf. à sa réputation de saleté, de manque de soin]
Personne sale physiquement
PR _Loc. fig. sale comme un cochon.
PL homonymie
HACHETTE B.1.Fam. Personne malpropre...
632
Mot Indicateur de relation Définition, objet ou spécification
FURET Au fig. Personne rusée qui s'introduit quelque part et y fouille partout
TLF LION, LIONNE D. P. métaph. 1. [À propos d'hommes]
633
Dictionnaire Mot Indicateur de relation Définition, objet ou spécification
PR LION Fig. Personne courageuse
OIE Fig. et fam. Personne très sotte, niaise
CAMELEON Fig. et vieilli Personne qui change de conduite, d'opinion, de langage, suivant les
circonstances
CHEVAL Fig. (Personnes) Vieilli Homme grossier, brutal
RENARD Fig. Personne fine et rusée, subtile
PORC Par compar. Cochon (fig. et fam.). Il est gras, sale comme un porc. Manger
comme un porc, très salement
PL VIPERE Fig. Personne médisante ou malfaisante
HERISSON Fig., fam. Personne d'un abord difficile
CAMEMEON Fig. Personne versatile, qui change facilement d'opinion
CHEVAL Fig., fam. Personne endurante à l'ouvrage
PORC Fig., fam. Homme sale, débauché ou glouton
HACHETTE CHAMEAU Fig., fam. Personne méchante, d'humeur désagréable
OIE Fig., péj. Personne fort niaise
CAMELEON Fig. Personne qui change fréquemment d'humeur, d'opinion, de conduite
selon les circonstances
DINDE Fig. Femme stupide
RENARD Fig. Homme rusé
VIPERE Fig. Personne malfaisante, d'une méchanceté sournoise
634
Annexe II.15 - Structuration des significations des mots polysémiques
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire Sens unique Acception Emploi//S1. Emploi//S2. Absence
Animal Vipère méchant, médisant TLF .+
Vermisseau misérable, chétif .+
Veau paresseux, nigaud .+
Singerie attitude affectée .+
Renard ruse .+
Lion courage .+
Faisan malhonnête .+
Cheval endurance .+
Oie sottise .+
Caméléon inconstance .+
Mouton docilité .+
Dinde bêtise .+
Porc saleté, débauche .+
Hyène lâcheté, cruauté .+
Hérisson Pers.abord difficile .+
Furet Pers.fouineuse .+
Bouc puanteur .+
Bardot souffre-douleur .+
Chameau hargneux .+
Cochon saleté, débauche .+
635
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire Sens unique Acception Emploi//S1. Emploi//S2. Absence
Animal Vipère méchant, médisant PR .+
Veau paresseux, nigaud .+
Renard ruse .+
Hérisson Pers.abord difficile .+
Faisan malhonnête .+
Oie sottise .+
Caméléon inconstance .+
Mouton docilité .+
Dinde bêtise .+
Chameau hargneux .+
Porc saleté, débauche .+
636
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire Sens unique Acception Emploi//S1. Emploi//S2. Absence
Animal Vipère méchant, médisant PL .+
Veau paresseux, nigaud .+
Renard ruse .+
Hérisson Pers.abord difficile .+
Furet Pers.fouineuse .+
Faisan malhonnête .+
Cheval endurance .+
Oie sottise .+
Caméléon inconstance .+
Mouton docilité .+
Dinde bêtise .+
Chameau hargneux .+
Porc saleté, débauche .+
Lion courage .+
Vermisseau misérable, chétif .+
Singerie attitude affectée .+
Hyène lâcheté, cruauté .+
Bouc puanteur .+
Bardot souffre-douleur .+
Cochon saleté, débauche homonymie
637
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire Sens unique Acception Emploi//S1. Emploi//S2. Absence
Vipère méchant, médisant HACHETTE .+
Vermisseau misérable, chétif .+
Animal Veau paresseux, nigaud .+
Singerie attitude affectée .+
Renard ruse .+
Lion courage .+
faisan malhonnête .+
Oie bêtise .+
Caméléon inconstance .+
Mouton docilité .+
Dinde sottise .+
Chameau hargneux .+
Porc saleté, débauche .+
Cochon saleté, débauche .+
Hyène lâcheté, cruauté .+
Hérisson Pers.abord difficile .+
Furet Pers.fouineuse .+
Cheval endurance .+
Bouc puanteur .+
Bardot souffre-douleur .+
638
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire Sens unique Acception Emploi//S1. Emploi//S2. Absence
Chal./sentiments Brûler v.tr. exciter le désir TLF .+
Froid indifférent, insensible .+
Froid maîtrise de soi .+
Froid hostilité + .+
Froideur calme, contrôle .+
Froideur réserve, distance .+
Brûlant excitant .+
Allumer exciter le désir .+
Allumer provoquer une passion .+
Chaleur ardeur .+
Chauffer animer, exciter le zèle .+
Allumer exciter le désir PR .+
Brûlant excitant .+
Chaleur ardeur .+
Chauffer animer, exciter lez zèle .+
Froid hostilité + .+
Froideur réserve, distance .+
Allumer provoquer une passion .+
639
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire Sens unique Acception Emploi//S1. Emploi//S2. Absence
Chal./sentiments Allumer provoquer une passion PL .+
Brûlant excitant .+
Brûler v.tr. exciter le désir .+
Chaleur ardeur .+
Chauffer animer, exciter lez zêle .+
Froid indifférent, insensible .+
Froid maîtrise de soi .+
Allumer exciter le désir .+
Froid hostilité + .+
Froideur calme, contrôle .+
Froideur réserve, distance
Allumer exciter le désir HACHETTE .+
Allumer provoquer une passion .+
Brûlant excitant .+
Chaleur ardeur .+
Chauffer animer, exciter lez zêle .+
Froid indifférent, insensible .+
Froid maîtrise de soi .+
Froid hostilité + .+
Brûler v.tr. exciter le désir .+
Froideur calme, contrôle .+
Froideur réserve, distance
640
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire Sens unique Acception Emploi//S1. Chal./sentiments Chal./sen
Anguleux difficile, rude (esprit) TLF .+
Cogn./espace réflexion .+
Approfondissement
Aspérité caractère rude .+
Astre Personne illustre .+
Baisse affaiblissement, déclin .+
Épaisseur consistance, richesse .+
Hautain élevé, noble .+
Hauteur Élévation morale, intell. .+
Souplesse docile .+
Central essentiel .+
Épais finesse - .+
épaisseur manque de finesse .+
Hautain dédaigneux .+
Anguleux difficile, rude (esprit) PR .+
Approfondissement réflexion .+
Aspérité caractère rude .+
Astre personne illustre .+
Épais finesse - .+
Épaisseur manque de finesse .+
Hautain élevé, noble .+
Hautain dédaigneux .+
Hauteur élévation morale, intell. .+
Souplesse docile .+
Baisse affaiblissement, déclin .+
Central essentiel .+
Épaisseur consistance, richesse .+
641
Domaine Mot Trait(s) Dictionnaire Sens unique Acception Emploi//S1. Emploi//S2. A
Cogn./espace Central essentiel PL .+
Épais finesse - .+
Épaisseur manque de finesse .+
Hauteur élévation morale, intell. .+
Anguleux difficile, rude (esprit) .
Approfondissement réflexion .+
Aspérité caractère rude .
Astre personne illustre .
Baisse affaiblissement, déclin .+
Épaisseur consistance, richesse .+
Hautain élevé, noble .
Hautain dédaigneux .+
Souplesse docile .+
Anguleux difficile, rude (esprit) HACHETTE .+
Central essentiel .+
Épais finesse - .+
Hauteur Élévation morale, intell. .+
Approfondissement réflexion .
Aspérité caractère rude .
Astre personne illustre .
Baisse affaiblissement, déclin .+
Épaisseur manque de finesse .
Épaisseur consistance, richesse .
Hautain élevé, noble
Hautain dédaigneux .+
Souplesse docile .
642
Annexe II.16 - Sensations / sentiments-
Cat. Ind.de
Dictionnaire Mot synt. class. Marqueur Définition
TLF adj. II.A. Vieilli Qui glace, qui donne froid
TLF II.B. Au fig. 1. Qui rebute par sa froideur. Paroles glaçantes
GLAÇANT
PETIT ROBERT 1¨ Vieilli. Qui glace
PETIT ROBERT 2¨ Fig. Qui décourage à force de froideur, de sévérité
PETIT
LAROUSSE Qui décourage, rebute par sa froideur. Un accueil glaçant
HACHETTE Fig. Qui rebute par sa froideur.Un ton glaçant
TLF n.f. I. A. Eau congelée, solidifiée par le froid
TLF B. Basse ou très basse température
TLF 2. Fig. [P. réf. à la froideur de la glace] Être froid comme glace
TLF GLACE _ De glace. Sans chaleur, sans effusion, raide, insensible.
PETIT ROBERT I.A.1. ¨ Eau congelée
PETIT ROBERT 4. Loc. Être, rester de glace, absolument insensible.
PETIT
LAROUSSE 1. Eau congelée, liquide solidifié par l'action du froid
PETIT
LAROUSSE _ Être, rester de glace, être, rester insensible
HACHETTE 1. Eau solidifiée par l'action du froid
HACHETTE Loc. rester de glace, très réservé
643
Cat. Ind.de
Dictionnaire Mot synt. class. Marqueur Définition
TLF adj. II.A.1. Congelé, transformé en glace ou durci par le froid
TLF 2. Fig. Qui est dépourvu de chaleur, de sensibilité. Âme glacée
PETIT ROBERT 1. Converti en glace.
PETIT ROBERT GLACÉ, -ÉE 4. Fig. Empreint d'une grande froideur. Regard glacé
PETIT ROBERT _ dur. Accueil glacé
PETIT
LAROUSSE 1. Durci par le froid. Terre glacée
PETIT
LAROUSSE 3. Fig. Qui marque des dispositions hostiles, de la froideur. Accueil glacé
HACHETTE 1. Gelé
HACHETTE 3. Fig. Hostile ou indifférent
TLF v. I.A. Convertir un liquide en glace, le solidifier
Frapper d'une émotion si violente que le sang paraît brusquement ... se
TLF B.1. Fig. figer
Faire impression sur quelqu'un, le paralyser, le pétrifier en le rebutant, en
TLF 2. Fig. l'effrayant
PETIT ROBERT GLACER 1. Rare Convertir (un liquide) en glace
PETIT ROBERT 4. Fig. Paralyser, décourager par sa froideur ou quelque aspect rebutant
PETIT ROBERT 5. Fig. Frapper d'une émotion violente et profonde qui cloue sur place
PETIT
LAROUSSE 1. Solidifier un liquide par le froid.
PETIT
LAROUSSE 4. Fig. Remplir d'effroi ; intimider
HACHETTE 1. Converti en glace, congeler.
HACHETTE 3. Fig. Paralyser, décourager par sa froideur
HACHETTE 4. Frapper de stupeur, glacer d'effroi
644
Cat. Ind.de
Dictionnaire Mot synt. class. Marqueur Définition
TLF adj. A. Qui est glacé, froid comme la glace; qui pénètre d'un froid très vif.
TLF B.1. Fig. Qui manque de chaleur, qui est très froid.
TLF GLACIAL a) Fig. [Qualifie une pers. ou son comportement] Accueil, air, baiser glacial
[Qualifie une œuvre, une réunion, une atmosphère] Ambiance, soirée
TLF b) Fig. glaciale
TLF 2. Fig. Qui affecte une indifférence extrême, qui déconcerte, paralyse
PETIT ROBERT 1. Qui a la température de la glace, qui pénètre d'un froid très vif.
PETIT ROBERT 2. Fig. D'une froideur qui glace, rebute, paralyse
TLF adj. B. Fig. [Emplois en rapport avec la psychol.]
Qui n'accorde pas d'attention, d'intérêt à quelque chose; qui manque de
TLF 1. sensibilité
Qui garde ou retrouve son calme, qui contrôle ses sentiments ou ses
TLF 2. émotions
TLF 3. Qui marque de la réserve, de la distance, voire de l'hostilité;
PETIT ROBERT II.B.1. Fig. Qui ne s'anime ou ne s'émeut pas facilement.
PETIT ROBERT FROID, E _ Par tempérament, Spécialt Dépourvu de sensualité
PETIT ROBERT _ Par maîtrise de soi. 2. calme, impassible, imperturbable
Dont la réserve marque de l'indifférence, de la distance ou une certaine
PETIT ROBERT 2. hostilité
PETIT ROBERT 3. Qui manque de sensibilité, de générosité, de ferveur…
PETIT ROBERT _ dur, insensible, sec.
PETIT
LAROUSSE 6. Qui manifeste du sang-froid, du calme, de la maîtrise de soi
PETIT
LAROUSSE 7. Qui manifeste de la réserve, qui manque de chaleur humaine
Qui semble indifférent, insensible ;qui garde toujours la maîtrise de soi et
HACHETTE 3. Fig. s'extériorise peu
645
HACHETTE 4. Qui n'éveille aucune émotion, qui manque de sensibilité
Qui ne se manifeste pas par les signes extérieurs habituels d'agitation, de
HACHETTE 5. Fig. violence
HACHETTE 6. Fig. Qui est le signe d'une certaine réserve, d'une certaine hostilité
TLF n.f. B. Fig. [Emplois en rapport avec la psychol.]
Calme, contrôle des sentiments, des passions; manque d'ardeur, de
TLF 1. passion.
TLF FROIDEUR En partic. [Le compl. du n. désigne œuvre d'art, artiste..] Manque... de sensibilité
TLF 2. Réserve, distance, pouvant aller jusqu'à l'hostilité
PETIT ROBERT 2.Mod. Absence relative d'émotivité, de sensibilité
PETIT ROBERT _ calme, flegme, impassibilité, réserve.
PETIT ROBERT _ indifférence, insensibilité; frigidité
PETIT ROBERT 3. Indifférence marquée, manque d'empressement et d'intérêt
PETIT ROBERT 4. Défaut de chaleur, d'éclat, en art
PETIT
LAROUSSE Absence de sensibilité ; indifférence
HACHETTE Insensibilité, sécheresse des sentiments, ; indifférence marquée
646
Cat. Ind.de
Dictionnaire Mot synt. class. Marqueur Définition
ALLUMER [Allumer renvoie au principe du feu, à ses effets de chaleur ou de
TLF v. B. destruction]
TLF 3.a) Fig. Mettre le feu, exciter
TLF _ Allumer qqn. Exciter ses désirs
TLF b) Faire prendre feu à, c'est-à-dire susciter, déclencher
PETIT ROBERT I. (Feu)
PETIT ROBERT 2. Exciter, éveiller de façon soudaine (une passion).
PETIT ROBERT 3. Fam. Séduire (un homme).
PETIT
LAROUSSE 4. Fam. 4. Fam.
PETIT
LAROUSSE a) Fam. Provoquer le désir de quelqu'un.
PETIT
LAROUSSE b) Fam. Critiquer quelqu'un violemment.
PETIT
LAROUSSE 5. Litt. Allumer la guerre, les passions, provoquer la guerre, les passions.
PETIT
LAROUSSE _ Litt. Allumer le désir, l'imagination, susciter le désir, l'imagination.
HACHETTE 5. Litt. Faire naître, allumer la colère de qqn
HACHETTE 6. Fam. Provoquer le désir de quelqu'un.
HACHETTE 7. Fam. Critiquer violemment
TLF A.1. Fig. [d'un sentiment, d'un besoin] Violent, vif, passionné. Amour, désir ardent
TLF 2. Fig. [En parlant d'une pers.] Passionné, enthousiaste
TLF _ En partic. [En parlant du désir amoureux] Un amant ardent
PETIT ROBERT 7. Qui a de l'ardeur, prompt à s'enflammer
PETIT ROBERT _ . Spécialt . Spécialt Tempérament ardent, porté à l'amour
647
PETIT ROBERT 8. Qui est très vif. Une imagination ardente. Une ardente conviction
PETIT
LAROUSSE 2.a) Fig. Plein de vivacité, d'ardeur ; vif, fervent, passionné. Désir ardent
PETIT
LAROUSSE 2.b) Fig. . Se dit d'une couleur vive, éclatante
PETIT
LAROUSSE 2.c) Litt. Ardent à : empressé, acharné à.
HACHETTE 4. Fig. Plein d'ardeur, enthousiaste, fougeux
HACHETTE 5. Fig. Vif, violent
TLF v.tr. B.1.et 2. Fig. Enflammer d'un désir violent
TLF _ Lang. class Rendre très passionné ou fortement épris
PETIT ROBERT 3. Produire les mêmes effets, les mêmes sensations qu'une brûlure
BRULER
PETIT ROBERT _ Fig. Enflammer, enfiévrer
PETIT
LAROUSSE 6. Litt. Provoquer chez quelqu'un une excitation intense, un sentiment violent
Brûler qqn, provoquer chez lui une excitation, douleur vive, des
LEXIS 6. sentiments violents
HACHETTE 6. Fig.Fam. Démasquer, compromettre
TLF BRÛLANT adj. A. Qui dégage de la chaleur
TLF _ Fig. [P. réf. à l'intensité du feu ou à son action destructrice] Passionné
Qui provoque des réactions passionnelles, que l'on doit envisager avec
TLF _ Fig. prudence
PETIT ROBERT 3. Ardent, passionné. Un regard brûlant
PETIT
LAROUSSE 3. Qui témoigne de l'ardeur, de la passion. Amour brûlant
PETIT
LAROUSSE 4. Qui est d'actualité et soulève les passions. Sujet, problème brûlant
LEXIS _ [syn.Ardent, passionné]
HACHETTE 3. Fig. Ardent, fervent
648
HACHETTE 4. Qui passionne, provoque la polémique
.] Entourer de près, exciter, encourager dans un sens favorable ou
TLF B.1. Fig. défavorable
PETIT ROBERT CHAUFFER 2. Fig.Fam. Chauffer qqn (à blanc), l'exciter, attiser son zèle
PETIT
LAROUSSE 3. Fig. Provoquer les réactions d'enthousiasme d'une salle, d'un public ; animer
HACHETTE 3. Fig. Mener vivement, activer qqchose; exciter, enthousiasmer qqn
TLF B.2.a) Fig. Ardeur, passion intérieure d'une pers..pour une pers. ou une chose
PETIT ROBERT CHALEUR II.3. Fig. Caractère animé des dispositions psychiques, des tendances
PETIT
LAROUSSE 3. Ardeur, fougue manifestée dans les sentiments ; enthousiasme
HACHETTE 5. Fig. Ardeur, impétuosité, véhémence
TLF C.2. Fig., anal. Qui se manifeste avec éclat
PETIT ROBERT FLAMBANT 2. Vieilli Beau, superbe
PETIT
LAROUSSE 1. Qui flambe, qui a l'éclat du feu
HACHETTE 3. Ce qui éclaire, ce qui sert de guide pour l'esprit
TLF E.1. Fig. Ardeur, enthousiasme, passion
PETIT ROBERT FLAMME 3. Fig. Ardeur, feu.
PETIT
LAROUSSE 3. Fig. Vive ardeur ; enthousiasme
HACHETTE 2. Fig. passion ardente, enthousiasme
TLF C.2. Fig. .] Rempli d'ardeur, d'enthousiasme; très vif, intense.
PETIT ROBERT ENFLAMMÉ 2. Rempli d'ardeur, de passion
PETIT
LAROUSSE 1. Plein d'ardeur, de passion
HACHETTE 0
649
Cat. Ind.de
Dictionnaire Mot synt. class. Marqueur Définition
TLF C.2. Fig. Remplir d'ardeur, d'enthousiasme; accroître la vivacité, l'intensité de
PETIT ROBERT ENFLAMMER 3. Remplir d'ardeur, de passion
PETIT
LAROUSSE 3. Fig. Insuffler l'ardeur, la passion ; exalter
HACHETTE 3. Litt. Emplir d'ardeur, de passion
650
Annexe II.17 -Les indicateurs
Ind.de
Dictionnaire Mot class. Marqueur Définition
TLF 2.a) Fig., fam. Personne hargneuse
PETIT ROBERT CHAMEAU Fig., fam. Personne méchante, désagréable
2.b) Pop. La chameau!
PETIT
LAROUSSE Fam. Personne méchante ou acariâtre
HACHETTE 2. Fig., fam. Personne méchante, d'humeur désagréable
TLF D. P. compar., fig
D_ Péj. . Personne très bête
OIE
PETIT ROBERT 2. Fig., fam. . Personne très sotte, niaise
PETIT
LAROUSSE 2. Fam. . Personne sotte, niaise
HACHETTE 2. Fig., péj. Personne fort niaise
LEXIS 2. Fam. . Personne sotte, niaise
TLF B.2. Usuel gén. péj Celui qui change d'opinion, de manière d'être selon les circonstances
Personne qui change de conduite, d'opinion, de langage, suivant les
PETIT ROBERT 2. Fig., vieilli circonstances
PETIT
LAROUSSE CAMÉLÉON 2. Fig. Personne versatile, qui change facilement d'opinion
personne qui change fréquemment d'humeur, d'opinion, de conduite selon
HACHETTE 2. Fig. les circonstances
personne qui change facilement d'opinions ou de conduite selon les
LEXIS 2. circonstances…
651
Ind.de
Dictionnaire Mot class. Marqueur Définition
TLF 2. P. anal., fam., péj Femme, fille, prétentieuse et sotte
PETIT ROBERT DINDE 2. Fig. Femme stupide
PETIT
LAROUSSE 2. Fam. Femme ou fille sotte, stupide
HACHETTE 2. Fig. Femme stupide
LEXIS 2. Fam. Femme sotte
TLF 3. Péj. Individu (peu intéressant)
PETIT ROBERT MOINEAU 3. Fig. Vilain, sale moineau : individu désagréable ou méprisable
PETIT
LAROUSSE 2. Fam. Individu, en particulier individu désagréable ou malhonnête
HACHETTE 2. Fam., péj. individu quelconque
LEXIS 3. individu désagréable ou malhonnête
TLF B. Pop. Femme (considérée du point de vue de ses rapports avec les hommes).
B.1. En partic., péj Femme, fille de conquête facile, le plus souvent entretenue
PETIT ROBERT POULE 2. Fam., péj. Fille de mœurs légères
_ Vieilli Maîtresse d'un homme
PETIT
LAROUSSE 4. Fam. . Épouse, maîtresse
5. Fam., vieilli. Femme légère
HACHETTE 3. Fam., vieilli. Bonne amie, maîtresse
4. Vieilli, péj. Femme etretenue
LEXIS 2. Pop. Femme de mœurs légères
3. Pop. Maîtresse d'un homme
652
Ind.de
Dictionnaire Mot class. Marqueur Définition
TLF 1. Péj. C'est un homme grossier et brutal
PETIT ROBERT CHEVAL 5. Fig., vieilli Homme grossier, brutal
PETIT
LAROUSSE 5. Fig., fam. Personne endurante à l'ouvrage
HACHETTE 0
LEXIS 3. Fam. Personne dure à l'ouvrage
TLF C. P. anal. (d'attitude)
C.1.a) Parfois péj Homme rusé, parfois perfide, fourbe
RENARD
PETIT ROBERT 3. Fig. Personne fine et rusée, subtile
PETIT
LAROUSSE 2. Fig. Homme rusé
HACHETTE 3. Fig. Homme rusé
LEXIS 3. Un homme fin et rusé
TLF B. P. anal. ou au fig., péj
VIPÈRE B.2. Personne méchante, cruelle; personne médisante
PETIT ROBERT 2. Fig. Personne malfaisante, dangereuse
PETIT
LAROUSSE 2. Fig. . Personne médisante ou malfaisante
HACHETTE 2. Fig. personne malfaisante, d'une méchanceté sournoise
TLF VOLAILLE B.1. Pop., péj Ensemble de jeunes filles, de femmes
B.2. Arg. . Femme facile, prostituée
PETIT ROBERT 3. Fam. et vulg. (péj.) Groupe de femmes, de jeunes filles.
_ Arg. Femme, fille
HACHETTE 0
LEXIS, PL 0
653
Ind.de
Dictionnaire Mot class. Marqueur Définition
TLF 2. Pop., arg. Personne très méchante ou d'une sévérité excessive
PETIT ROBERT VACHE 4. Fam. Méchant, sévère
PETIT
LAROUSSE 1. Très sévère ; méchant
HACHETTE
LEXIS
TLF _ Fig. Personne rusée qui s'introduit quelque part et y fouille partout
PETIT ROBERT FURET _ Fig., vieux Personne qui cherche partout pour découvrir qqch
PETIT
LAROUSSE 2. Vieux Personne curieuse, fouineuse
HACHETTE 0
LEXIS
TLF C. Fig., pop Individu malhonnête, se livrant à des affaires louches
PETIT ROBERT FAISAN 2. Arg. Individu qui vit d'affaires louches
PETIT
LAROUSSE 2. Fam. Individu qui vit d'affaires louches
HACHETTE B. Fam. Homme d'une probité douteuse, aigrefin
654
Annexe II.18 : Variation du contenu des extensions polysémiques
655
Domaine Mot Dictionnaire Type de Variation
variation
Idées, morale Moraliste TLF 3. Souvent péj.
a) Personne qui se plaît ou se complaît à moraliser. Il flotte autour d'elle
le louche parfum qu'on respire dans certaines maisons. Je ne veux pas
faire le moraliste.
b) Celui (celle) qui est attaché(e) au formalisme de la morale ou qui se
veut le défenseur de la morale
PR Absence de la 1- Rare Auteur qui écrit, qui traite de la morale. Les grands moralistes
nuance péjorative grecs.
2- (répandu XIXe) Auteur de réflexions sur les mœurs, sur la nature et la
condition humaines. Montaigne, Pascal, La Rochefoucauld, La Bruyère,
Vauvenargues, célèbres moralistes français.
3- Personne qui, par ses œuvres, son exemple, donne des leçons, des
préceptes de morale. - moralisateur. Un moraliste austère. — Adj.
Elle a toujours été moraliste.
- Empreint de moralisme. Attitude moraliste.
PL Absence de la Auteur qui écrit sur les mœurs, la nature humaine.
nuance péjorative Empreint de moralisme.
LEXIS 3. Péjor. Attachement formaliste et étroit à une morale, Un moralisme
extravagant
Pacifiste TLF Nuance péjorative A. Partisan de la paix, adepte du pacifisme
B. Péj. Personne qui préconise la paix à tout prix ou prétend à une paix
universelle.
PR - Partisan de la paix. colombe. Pacifistes et non-violents. « vos
compatriotes, s'ils me connaissaient, me flétriraient sûrement du nom de
" pacifiste " qui est chez vous, je crois, une injure » (A. Hermant)
PL Qui appartient au pacifisme ; qui en est partisan.
LEXIS Pacifiste Adj. et n. Même si vous n’êtes pas pacifiste, vous devez me
respecter (Sartre)
Pacifisme HACHETTE Doctrine qui prône la recherche systématique de la paix
656
Domaine Mot Dictionnaire Type de Variation
variation
Idées, morale Académique TLF Nuance péjorative Académique
touchant trois B. Péj. Qui manque d'originalité, de force; conventionnel.
domaines : 1. Dans le domaine de la litt. et du lang.
artistique, 2. Dans le domaine des B.-A
littéraire et 3. Plus gén. :
général 17. Il semblait que les choses elles-mêmes lui fussent devenues
étrangères, jusqu'à cet ameublement prétentieux et désuet, d'une richesse
sans fantaisie, d'une sévérité sans noblesse, académique et bourgeois, de
professeur millionnaire.
G. BERNANOS, La Joie, 1929, p. 563
PR Exemples 3- (1839) Qui suit étroitement les règles conventionnelles, avec froideur
spécifiant la ou prétention. - compassé, conventionnel. Un poète académique. « On
nuance péjorative s'était fait une langue de convention, un style académique » (Taine). —
dans les domaines (En art) Peinture académique. - académisme.
artistique et
littéraire
PL Nuance péjorative 2. Péjor. Conventionnel, sans originalité
sans précision du
domaine
LEXIS Nuance péjorative 2. péj. Dont le conformisme à la tradition littéraire et artistique suppliée
touchant deux au manque d’imagination et d’originalité
domaines :
artistique et
littéraire
HACHETTE Nuance péjorative 2. conventionnel et compassé (en parlant d’une oeuvre d’art)
touchant le seul
domaine
artistique
657
Domaine Mot Dictionnaire Type de variation Variation
Classe sociale Capitaliste TLF A. Personne qui possède des capitaux et qui en tire un revenu en les
faisant valoir notamment par prêt ou investissement dans une entreprise
P. ext. (souvent péj.), usuel. Personne qui possède une (sur-)abondance
de biens monétaires ou autres. Synon. fam. richard
PR Absence de la 2- Fam. Personne riche. Un gros capitaliste.
nuance péjorative
PL 1. Personne qui possède des capitaux et les investit dans des entreprises.
2. Fam., péjor. Personne très riche.
LEXIS Mention de la 2. celui qui est favorable au régime capitaliste (péj. Dans la langue
nuance péjorative politique de l’extrême gauche)
dans un discours 3.péjor. personne riche
sociolectal
HACHETTE Absence de la 2. fam. Personne riche
nuance péjorative
Aristocrate TLF Nuance péjorative I. A. 1. Partisan de l'aristocratie, en tant que forme de gouvernement
dépassant le cadre 2. [Plus partic. et souvent péj.] Partisan, noble ou non, de l'Ancien
historique Régime, à l'époque de la Révolution française
C. Au fig. [En parlant d'un animé ou d'un inanimé] Fin, distingué,
supérieur comme ce qui est le propre d'un noble -Péjoratif :
13. Je me le représente [Gourmont] ce soir, en pensée, couché là-bas dans
cet amphithéâtre d'hôpital, lui si aristocrate, si distant, si dédaigneux.
PR 1- Partisan de l'aristocratie— Spécialt (péj.) À la Révolution, Partisan
des privilèges, noble, contre-révolutionnaire.
2- Membre de l'aristocratie (2o). - noble.
3- Membre d'une aristocratie (4o), d'une élite.
PL Absence de la Membre de l'aristocratie
nuance péjorative
LEXIS 1. Membre de la classe des nobles, des privilégiés (souvent péjoratif)
2. personne qui a de la distinction, qui a des manières, des qualités
mondaines
658
Domaine Mot Dictionnaire Type de variation Variation
Ethnies Asiatique TLF Emplois péjoratifs 1. Péjoratif
et laudatifs non a) [En parlant de la vie affective de l'aristocratie] Corruption asiatique.
mentionnés dans Mœurs asiatiques. Mœurs à la fois passionnées et efféminées
Lexis b) [En parlant du train de vie de l'aristocratie] Opulence asiatique.
Surabondance de richesses
c) [En parlant du régime pol.]
2. Plus rarement, laud.
a) [En parlant de l'esprit et de son expression]
PR 0
PL 0
LEXIS 2. litt ; Excessif, somptueux, comme dans les anciennes monarchies de
l’Orient
HACHETTE 0
Chinois TLF Le contenu (cf. B. P. anal., avec une nuance péj. (Personne) qui présente des
traits en italique) ressemblances avec les Chinois, leur physique et surtout leur caractère
réel ou présumé; qui est étranger, peu intéressant, original, compliqué,
rusé.
Adj. 2. P. ext. Qui présente certaines particularités propres ou qu'on
attribue au caractère des Chinois ; compliqué, étrange, barbare.
PR Le contenu (cf. 2 (1799) Fam., vieilli Individu à l'allure bizarre dont on se méfie.
traits en italique) Personne qui subtilise, ergote à l'excès.
PL
LEXIS Fam. Pointilleux à l’excès, ergoteur qui a le goût de la complication
HACHETTE 1. Adj. Fam. Qui est formaliste, minutieux à l’excès
Chinoiseries TLF Le contenu (cf. B. Souvent au plur., avec une nuance péj. Ce qui rappelle certaines
traits en italique) particularités réelles ou attribuées au peuple chinois comme la bizarrerie,
le goût de la complication, la tracasserie, la ruse.
PR 2- (1845) Cour. Complication inutile et extravagante
PL Fam. Exigences inutiles et compliquées.
LEXIS Fam. Complication tracassière
HACHETTE 3.fig. complication, chicane mesquine
659
Domaine Mot Dictionnaire Type de variation Variation
Ethnies Arabe TLF Au fig., péj., fam. et vieilli. Homme avare, dur dans les affaires,
usurier
3. ... Le monde dira que je suis un juif, un arabe, un usurier, un corsaire,
que je vous aurai ruiné! Je m'en moque! BALZAC, Gobseck, 1830, p.
419.
PR Absence de la
nuance péjorative
PL Absence de la
nuance péjorative
LEXIS Class. Arabe : fam. Dur, âpre au gain, usurier :Endurcis-toi le cœur, sois
arabe, corsaire (Boileau)
HACHETTE Absence de la
nuance péjorative
Arbi TLF Argot Argot
A. Cour., A. Cour., péj. Arabe
PR - Vx, pop. - Vx, pop. et péj. Indigène d'Afrique du Nord
PL, LEXIS 0
HACHETTE 0
Chleuh TLF sans spécification B. Fam., péj. Allemand, allemande. Un avion chleuh. Pou chleu
de l’époque
PR Fam. et péj. Allemand, Allemande (en tant qu'ennemi, pendant la
Deuxième Guerre mondiale). Les Chleuhs. Adj. Un avion chleuh
PL Injur.,/ sans Injur., péjor. Allemand.
spécification de
l’époque
LEXIS 0
HACHETTE 0
Juif TLF Explication de la B. 2. Péj. [À cause des métiers d'argent interdits aux chrétiens et réservés
source de la nuance aux juifs au Moy. Âge] Synon. de avare, usurier
péjorative
PR (emploi diffamatoire) Personne âpre au gain, avare.
660
Annexe II.19 : Charges axiologiques des exemples
661
Mot Dictionnaire Marqueur Définition Exemple Charge axiologique
de l’exemple
Américaniser TLF Emploi I . Transformer en marquant des Américaniser qqn, qqc. Neutre
trans., traits propres à la civilisation
souvent péj américaine (du Nord).
II. Prendre le caractère3. Alca s'américanise; partout on détruit ce Péjorative
américain; adopter le genre, lesqui restait de libre, d'imprévu, de mesuré,
mœurs, les usages américains de modéré, d'humain, de traditionnel;
partout on détruit cette chose charmante,
un vieux mur au-dessus duquel passent des
branches; partout on supprime un peu d'air
et de jour, un peu de nature, un peu de
souvenirs qui restaient encore, un peu de
nos pères, un peu de nous-mêmes, et l'on
élève des maisons, épouvantables, énormes,
infâmes...A. FRANCE, L'Île des pingouins,
1908, p. 342.
PR Revêtir, marquer d'un caractère « La mécanique nous aura tellement Plus ou moins neutre
américain américanisés » (Baudelaire). — Pronom.
« un monde qui s'américanise » (Siegfried).
LEXIS Marquer du caractère américain, L’influence économique des États Unis a Neutre
des mœurs des USA. américanisé le comportement des hommes
d’affaires de l’Europe occidentale
662
Mot Dictionnaire Marqueur Définition Exemple Charge axiologique
de l’exemple
Américanisme TLF B. Le plus Engouement pour l'Amérique et 3. Il jouait à l'homme moderne, à l'homme Péjorative
souvent tout ce qui est américain, moderne avec la nuance « genre américain
péj. adoption des idées et manières ». L'espèce d'excentricité profonde qui
américaines était dans le caractère des Coëtquidan
s'était fait jour en lui vers vingt-cinq ans
sous cette forme : je serai l'homme
moderne de la famille. Très vite, cela
s'était compliqué d'américanisme. Ce
parti pris avait déterminé ensuite tous les
sentiments et toutes les attitudes du baron.
Par exemple, il l'avait poussé à aimer ou
feindre d'aimer le régime, la démocratie;
à dédaigner ou feindre de dédaigner la
condition; à s'intéresser ou feindre de
s'intéresser au mécanisme des affaires, à
la vie économique; à négliger légèrement
ou feindre de négliger légèrement l'être
suprême, et jusqu'à affecter une pointe de
voltairianisme.
H. DE MONTHERLANT, Les
Célibataires, 1934, p. 770.
PR Vieilli Admiration, imitation du mode « Le monde marche vers une sorte Neutre
de vie, de la civilisation des d'américanisme » (Renan).
États-Unis.
Américanisation LEXIS Le citoyen américain est soumis à une Neutre
force d’organisation et d’américanisation
intense (Sartre)
663
Mot Dictionnaire Marqueur Définition Exemple Charge axiologique
de l’exemple
Bolchéviste TLF péj. Qui se rapporte ou qui est Si la révolution bolchéviste, Péjorative
soumis au bolchevisme essentiellement dirigée contre Dieu, est un
signe annonciateur de l'homme de péché,
le vaste mouvement de foi suscité dans
l'église russe, et de si grandes souffrances,
et tant de sang et de martyrs, et de
témoignages héroïques, peuvent-ils ne pas
annoncer et préparer quelque grande
œuvre du Christ et du Saint-Esprit?
MARITAIN, Primauté du spirituel, 1927, p. 265
Bolchévique TLF Qui se rapporte, qui est propre Il est dominé de nouveau par Péjorative
au bolchevisme* et aux l'insupportable mentalité bolchevique, par
bolcheviks une exaltation stupide de la discipline.
MALRAUX, Les Conquérants, 1928, p. 147.
PR Par ext. Péj. Communiste. Abrév. fam. Les bolchos et les fachos. Péjorative
(1940) BOLCHO
Bolchévisme TLF P. ext., Synon. de communisme Le grand sujet de conversation entre mes Péjorative
souvent parents, c'étaient les catastrophes qui
péj. menaçaient le monde : le péril rouge, le
péril jaune, la barbarie, la décadence, la
révolution, le bolchevisme
664
Mot Dictionnaire Marqueur Définition Exemple Charge axiologique
de l’exemple
Capitalisme TLF B. Système économique et L'esprit objectif du capitalisme est un Méliorative et
social qui se caractérise par la esprit d'exaltation des puissances actives péjorative
propriété privée des moyens de et inventives, du dynamisme de l'homme
production et d'échange et par et des initiatives de l'individu, mais c'est
la recherche du profit. un esprit de haine de la pauvreté et de
mépris du pauvre; le pauvre n'existe que
comme outil d'une production qui
rapporte, non comme personne.
MARITAIN, Humanisme intégral, 1936, p.
126.
PR 2 Ensemble des capitalistes, Les intérêts du capitalisme. Capitalisme Neutre
des pays capitalistes international.
Communiste TLF 3. (Celui qui est) partisan de . ... dans l'âme de l'homme pour qui les Péjorative
l'égalité absolue trésors des nations allaient s'épuiser, on
surprenait des mouvements de haine que
les communistes et les prolétaires
manifestent à cette heure contre les riches.
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t.
2, 1848, p. 320.
665
Libéralisme TLF En partic. Ensemble des doctrines
... le libéralisme pose des limites à Méliorative
politiques fondées sur la l'intervention de l'état par la
garantie des droits individuels
reconnaissance des droits du citoyen,
contre l'autorité arbitraire d'un
tempère le pouvoir exécutif par le contrôle
gouvernement (en particulier législatif et le pouvoir judiciaire, protège
par la séparation des pouvoirs)
l'individu contre les abus de la puissance
ou contre la pression des publique, admet la représentation des
groupes particuliers (monopoles
minorités et les droits de l'opposition, tient
économiques, partis, syndicats).
grande ouverte la lice où s'affrontent,
sous la tutelle de la loi, les compétitions
individuelles et se nouent les solidarités
sociales...
L. ROUGIER, Les Mystiques écon. Paris,
Librairie de Médicis, 1938, p. 15.
Chrétien PR Qui est empreint d'influence Traditions chrétiennes. Humanisme Méliorative
chrétienne chrétien.
LEXIS Relatif ou conforme à la la religion chrétienne est Méliorative
doctrine de Jésus-Christ principalement consolatrice (Gide)
666
Annexe II.20 : La modalisation
667
Mot Dictionnaire Modalisation par Contenu modalisé Modalisation lexicale
le marqueur
Hébreu LEXIS :2.Hist.Juif converti qui, au début du christianisme,
- Hébraïsant,e restait attaché à la lettre des prescriptions mosaïques
668
Annexe II.21 - La distribution des stéréotypes liés à l'appartenance à une aire géographique
Mot Dictionnaire Marqueur + déf +exemple Marq + définition Marq + exemple Marqueur Absence
banlieue Hachette .+
banlieusard .+
provincial .+
villageois .+
provincialisme .+
banlieue Lexis .+
banlieusard .+
villageois .+
provincial .+
provincialisme .+
banlieue Petit Larousse .+
banlieusard .+
villageois .+
provincial .+
provincialisme .+
banlieue Petit Robert .+
banlieusard .+
villageois .+
provincial .+
provincialisme .+
banlieue TLF .+
banlieusard .+
provincial .+
villageois .+
provincialisme .+
669
Annexe II.22 - La distribution des stéréotypes relatifs aux noms de
professions
Mot Dictionnaire Marq+déf+ex Marq+définition Marq+exemple Marqueur Définition Absence
Docteur .+
Hachette
mercantilisme .+
ouvrier .+
professeur .+
salarié .+
marchand .+
mercanti .+
mercantile .+
paysan .+
docteur .+
Lexis
marchand .+
mercantilisme .+
ouvrier .+
professeur .+
salarié .+
mercanti .+
mercantile .+
paysan .+
docteur .+
Petit Larousse
marchand .+
mercantilisme .+
ouvrier .+
professeur .+
salarié .+
mercanti .+
mercantile .+
paysan .+
670
Mot Dictionnaire Marq+déf+ex Marq+définition Marq+exemple Marqueur Définition Absence
marchand .+
Petit Robert
ouvrier .+
professeur .+
salarié .+
mercanti .+
mercantile .+
paysan .+
docteur .+
mercantilisme .+
docteur .+
TLF
marchand .+
mercanti .+
mercantile .+
ouvrier .+
paysan .+
professeur .+
salarié .+
671
Annexe II.23- La distribution des stéréotypes relatifs aux noms d'ethnies
672
Mot Dictionnaire Marqueur +déf+ex Marqueur+définition Marqueur+exemple Exemple Absence
arabe .+
chinoiserie .+
Lexis
américanisme .+
asiatisme .+
allemand .+
éthiopien .+
judaïque .+
sémitique .+
balkanique .+
américaniser .+
américanisation .+
arbi .+
asiatique .+
bohême .+
bohémien .+
chinois .+
chleuh .+
chrétien .+
hébraïsant .+
juif .+
juiverie .+
sémite .+
turc .+
673
Mot Dictionnaire Marqueur +déf+ex Marqueur+définition Marqueur+exemple Exemple Absence
chinoiserie .+
Petit
balkanique Larousse .+
américanisation .+
arabe .+
asiatique .+
asiatisme .+
chinois .+
allemand .+
chrétien .+
éthiopien .+
hébraïsant .+
judaïque .+
juif .+
juiverie .+
sémite .+
sémitique .+
turc .+
américaniser .+
américanisme .+
arbi .+
bohême .+
bohémien .+
chleuh .+
674
Mot Dictionnaire Marqueur +déf+ex Marqueur+définition Marqueur+exemple Exemple Absence
bohême .+
chinois Petit Robert .+
chinoiserie .+
chleuh .+
juif .+
sémite .+
turc .+
américanisation .+
arabe .+
asiatique .+
asiatisme .+
allemand .+
éthiopien .+
judaïque .+
sémitique .+
balkanique .+
américaniser .+
américanisme .+
arbi .+
bohémien .+
chrétien .+
hébraïsant .+
juiverie .+
675
Mot Dictionnaire Marqueur +déf+ex Marqueur+définition Marqueur+exemple Exemple Absence
arabe .+
arbi TLF .+
asiatique .+
bohême .+
bohémien .+
chinois .+
chinoiserie .+
allemand .+
chleuh .+
chrétien .+
éthiopien .+
hébraïsant .+
judaïque .+
juif .+
juiverie .+
sémite .+
sémitique .+
turc .+
balkanique .+
américaniser .+
américanisation
américanisme .+
asiatisme .+
676
Annexe II.24 a - la distribution des stéréotypes relatifs aux classes sociales
677
Mot Dictionnaire Marq+déf+ex Marq+déf Déf.ex. Marq+exemple Marqueur Définition Absence
bourgeoisie .+
Petit Larousse
bourgeoisisme .+
clérical .+
église .+
élite .+
bureaucrate .+
capitaliste .+
technocrate .+
aristocrate .+
bourgeois .+
peuple
bourgeoisie .+
bourgeoisisme Petit Robert .+
capitaliste .+
clérical .+
église .+
élite .+
bureaucrate .+
aristocrate .+
bourgeois .+
peuple .+
technocrate .+
678
Mot Dictionnaire Marq+déf+ex Marq+déf Déf.ex. Marq+exemple Marqueur Définition Absence
aristocrate .+
TLF
bourgeois .+
bourgeoisie .+
bourgeoisisme .+
bureaucrate .+
capitaliste .+
clérical .+
église .+
élite .+
peuple .+
technocrate .+
Bureaucrate
_ Fonctionnaire, employé rempli du sentiment de son importance et abusant de son pouvoir sur le public. Bureaucrates et
technocrates. Péj. Employé de bureau (PR)
Péjor.
1. Fonctionnaire imbu de l'importance de son rôle, dont il abuse auprès du public.
2. Employé de bureau. (PL)
2 bureau
♦ bureaucrate : fonctionnaire d’une administration animé d’un esprit de routine ou qui se prévaut d’une autorité excessive (Lexis)
679
Capitaliste
1. Fam., péjor. Personne très riche. (PL)
Clergé
♦ Adj. et n. Péjor. Dévoué aux intérêts du clergé, Je crains un retour offensif des cléricaux…(Lexis)
Technocrate
_ (Souvent péj.) Ministre, haut fonctionnaire technicien (1o) (- énarque), tendant à faire prévaloir les conceptions techniques d'un
problème au détriment des conséquences sociales et humaines (PR)
Souvent péjor. Homme d'état ou haut fonctionnaire qui fait prévaloir les considérations techniques ou économiques sur les facteurs
humains. (PL)
♦ technocrate : [souvent péjor.] Homme politique ou haut fonctionnaire qui exerce son autorité dans le domaine de l’économie, de
l’industrie et du commerce, en fonction de sa formation technique (Lexis).
680
Annexe II.25 - La distribution des stéréotypes relatifs aux idées, aux opinions
Mot Dictionnaire Marq+déf+ex Marq+déf déf.ex. Marq+ex Marqueur définition Ex Absence
Académiste .+
anthéchrist .+
bolchéviser Hachette .+
cartésianisme .+
communisme .+
communiste .+
conventionnel .+
idéaliste .+
jésuitique .+
marxisme .+
métaphysicien .+
moralisateur .+
moralisme .+
moraliste .+
nietzschéisme .+
pacifiste .+
soixante-huitard .+
bolchévick .+
bolchévisme .+
communard .+
jésuite .+
jésuitisme .+
académique .+
académisme .+
cartésien .+
commun .+
humanitarisme .+
politicien .+
681
Mot Dictionnaire Marq+déf+ex Marq+déf déf.ex. Marq+ex Marqueur définition Ex Absence
anthéchrist .+
bolchévick .+
Lexis
communisme .+
communiste .+
marxisme .+
nietzschéisme .+
pacifiste .+
soixante-huitard .+
bolchéviser .+
humanitarisme .+
jésuitisme .+
métaphysicien .+
cartésianisme .+
commun .+
conventionnel .+
idéaliste .+
jésuite .+
jésuitique .+
moralisateur .+
moralisme .+
moraliste .+
politicien .+
bolchévisme .+
communard .+
cartésien .+
académique Lexis (homony.)
académisme Lexis (homony.)
académiste Lexis (homony.)
682
Mot Dictionnaire Marq+déf+ex Marq+déf déf.ex. Marq+ex Marqueur définition Ex Absence
académiste .+
anthéchrist .+
bolchévick Petit Larousse .+
bolchéviser .+
bolchévisme .+
cartésianisme .+
communisme .+
communiste .+
marxisme .+
métaphysicien .+
moralisateur .+
moraliste .+
nietzschéisme .+
pacifiste .+
soixante-huitard .+
académique .+
académisme .+
communard .+
humanitarisme .+
jésuite .+
jésuitisme .+
cartésien .+
commun .+
conventionnel .+
idéaliste .+
jésuitique .+
moralisme .+
politicien .+
683
Mot Dictionnaire Marq+déf+ex Marq+déf déf.ex. Marq+ex Marqueur définition Ex Absence
académiste .+
anthéchrist .+
bolchéviser Petit Robert .+
bolchévisme .+
cartésianisme .+
cartésien .+
commun .+
communisme .+
communiste .+
marxisme .+
métaphysicien .+
moraliste .+
nietzschéisme .+
soixante-huitard .+
communard .+
académique .+
académisme .+
bolchévick .+
conventionnel .+
humanitarisme .+
idéaliste .+
jésuite .+
jésuitique .+
jésuitisme .+
moralisateur .+
moralisme .+
pacifiste .+
politicien .+
684
Mot Dictionnaire Marq+déf+ex Marq+déf déf.ex. Marq+ex Marqueur définition Ex Absence
académique .+
académisme .+
académiste TLF .+
anthéchrist .+
bolchévick .+
bolchéviser .+
bolchévisme .+
cartésianisme .+
cartésien .+
commun .+
communard .+
communisme .+
communiste .+
conventionnel .+
humanitarisme .+
idéaliste .+
jésuite .+
jésuitique .+
jésuitisme .+
marxisme .+
métaphysicien .+
moralisateur .+
moralisme .+
moraliste .+
nietzschéisme .+
pacifiste .+
politicien .+
soixante-huitard .+
685
Annexe II.26 : Charges stéréotypiques figurant sous une autre entrée
686
Annexe II.27 : Fonctions des synonymes et des antonymes
687
688
Troisième chapitre- Stéréotypie et figement