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n°386 - 3e trimestre 2020

Association mondiale de la Route n°386 - 3e trimestre 2020


www.piarc.org

Association mondiale de la Route


DOSSIERS

Routes/Roads n°386
Ponts routiers

Version française
DATE À RETENIR SAVE THE DATE APUNTE ESTA FECHA

CONGRÈS MONDIAL DE LA VIABILITÉ HIVERNALE ET DE LA RÉSILIENCE ROUTIÈRE


8-11 FÉVRIER 2022
WORLD WINTER SERVICE AND ROAD RESILIENCE CONGRESS
FEBRUARY 8-11, 2022
CONGRESO MUNDIAL DE VIALIDAD INVERNAL Y RESILIENCIA DE LA CARRETERA
8-11 FEBRERO 2022

www.piarc-calgary2022.org

#PIARCCalgary2022
SOMMAIRE
ÉDiTORIAL P. 3
Patrick Malléjacq

ACTUALITÉ P. 4
Brèves : Nouvelles des actions menées par l’Association mondiale de la Route .......... 4
Communications
France : Vers une approche plus responsable des passages à niveau .................................................. 6
PIARC Italie : Conduite autonome et concept de route intelligente de l’ANAS ............... 9
Maroc/France : Évaluation de la valeur du patrimoine routier du réseau
structurant marocain en utilisant l’approche HDM-4 ............................................................................................................................ 13
Belgique/Suisse/France : Focus sur le transport routier de marchandises ..................... 17

Photo de couverture : Hokusai -


Le pont suspendu à la frontière DOSSIERS P. 23
des provinces de Hida et Etchū
© The Sumida Hokusai Museum,
Tokyo Sécurité et prolongation de la durée de vie des ponts routiers ................................................................................ 23
Kiyohiro Imai

Association mondiale Amélioration de l’équipement d’accès sur les poutres des ponts
de la Route
www.piarc.org . info@piarc.org Honshu-Shikoku ........................................................................................................................................................................................................................................................................................................... 24
La Grande Arche Masato Matsuba, Yuki Kishi, Yoshihiro Asakura et Toshihiro Matsuo
Paroi Sud - Niveau 5
92055 La Défense Cedex - France
Téléphone : +33 1 47 96 81 21
Détection du feuilletage et des fissures du béton à l’aide d’aéronefs
Président
sans pilote .............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 29
Claude Van Rooten (Belgique) Aleš Žnidarič, Maja Kreslin, Andrej Anžlin et Andarž Krivic
Directeur de la publication
Patrick Malléjacq Prise de décision en matière de sécurité des ponts routiers ............................................................................................... 33
Joseph Hartmann
Rédacteur en chef
Robin Sébille
Responsable des publications
Comment effectuer le choix le plus judicieux entre plusieurs solutions
Cécile Jeanne de réparation et/ou reconstruction de pont routier ? ............................................................................................................................. 37
Traductions :
Pierre Gilles et Michele Mele
Id2m (Rennes, France),
Robert Sachs Italferr et Anas : notre engagement pour le nouveau pont de Gênes
Impression : IMB (France) ; Les deux sociétés du groupe ferroviaire public d’Italie
Distribution : GIS (France)
ont pris en charge le projet d’exécution et les essais .................................................................................................................................. 42
Aldo Isi et Massimo Simonini
ISSN : 0004-556 X
Appréciation de la sécurité d’un pont à haubans endommagé
par un incendie ................................................................................................................................................................................................................................................................................................................. 44
Heungbae Gil

Conception des ponts facilitant les opérations d’inspection et d’entretien ....................... 49


Mohamed Parak

Processus d’évaluation d’alternatives de ponts .......................................................................................................................................................... 54


José Luis Canales

HISTOIRE DE ROUTES P. 57
Quand Hokusai peignait des ponts ........................................................................................................................................................................................................ 57

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 1


Pont inspiré des montagnes russes
ÉDiTORIAL
Patrick Malléjacq
Secrétaire général de PIARC

Des souris ou des hommes

L es mois écoulés ont été autant consacrés à la gestion des activités habituelles de l’Association qu’à notre
réponse collective à la crise Covid-19. Le président Van Rooten a largement évoqué ce sujet dans son
précédent éditorial. Je n’y reviendrai donc pas… directement. Une conséquence inattendue de l’épidémie aura
été de nous interdire de nous rencontrer physiquement, qu’il s’agisse des réunions des Comités techniques et des
Groupes d’étude, ou encore des instances de gouvernance de l’Association (Conseil, comité exécutif, Commissions).
Fort heureusement, PIARC avait pu tenir les réunions de lancement des Comités techniques en janvier et février,
peu avant que les liaisons aériennes ne cessent et que les pays, pour la plupart, confinent leurs habitants. Cela
aura au moins permis à l’Association de faire connaissance avec les nouveaux experts des comités, de se présenter
à eux et de créer la dynamique et l’affectio societatis minimales pour que les travaux démarrent.

Je voudrais donc ici rendre hommage aux présidents de mois – sans parler de la tentation d’économiser temps
nos Comités, qui ont su maintenir et raviver la flamme et déplacement – je demeure convaincu de la nécessité
pendant ces longs mois ; et à la de nous retrouver, et j’aspire à ce


Commission du plan stratégique, que cela soit de nouveau possible
qui s’est réunie (virtuellement) rapidement. Notre Conseil de
en septembre et a pu tirer un Dakar, le premier prévu en Afrique
bilan positif de cette phase de
…sans parler de la tentation subsaharienne, aurait dû se tenir
démarrage, malgré les difficultés. d’économiser temps et à la mi-octobre – nos décisions
Nous avons tous pu apprécier déplacement – je demeure de cette année se feront par voie
les possibilités offertes par les convaincu de la nécessité de électronique uniquement, mais
systèmes de visio-conférence nous retrouver, et j’aspire à nous vous donnons déjà rendez-
mis à notre disposition sur un ce que cela soit de nouveau vous dans la capitale sénégalaise
possible rapidement…


simple ordinateur. Sans eux, l’an prochain, en 2021.
l’interruption des déplacements
et le confinement auraient Enfin, j’attire votre attention
posé à notre association sur l’enquête que nous menons
d’insurmontables problèmes de sur le mode de diffusion de
gestion quotidienne et de poursuite de nos activités Routes/Roads, qui est présentée en page 5
internationales. Nous avons même découvert la de ce numéro. Nombre d’entre vous nous ont fait
possibilité, difficile auparavant, de tenir des réunions connaître, en effet, leur préférence pour une lecture en
virtuelles en plusieurs langues. format électronique. D’autres, nous le savons, sont très
attachés à la lecture traditionnelle sur un exemplaire
Toutefois, la souris d’ordinateur ne remplace pas le papier. Au travers de cette enquête, nous souhaitons
contact humain. Notre métier, la route, vise à transporter servir au mieux les uns et les autres, et adapter le mode
les marchandises – et cette dimension s’est globalement de diffusion. Je vous remercie donc d’y apporter toute
poursuivie – mais aussi à rapprocher les hommes. Nous votre attention et d’y répondre avant le 31 octobre.#
vivons tous PIARC comme une grande famille, et telle
est bien l’atmosphère qui préside à nos réunions :
cette chaleur humaine et les échanges qu’elle permet,
qui sont parfois les plus fructueux. Sans méconnaître
l’intérêt pratique de ce que nous avons vécu ces derniers

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 3


ACTUALITÉ Brèves
Nouvelles des actions de l’Association mondiale de la Route
NOUVEAU PREMIERS DÉLÉGUÉS
Bangladesh Guinée Slovénie
M. Quazi Shahriar Hossain, Ingénieur M. Ibrahima Barry, Conseiller principal, Mme Ljiljana Herga, directrice générale
en chef, Département des Routes et Ministère des Travaux publics de l’Agence slovène des Infrastructures
Autoroutes
Indonésie Ukraine
Canada M. Hedy Rahadian, Directeur général des Mme Natalia Forsyuk, Vice-ministre
Mme Natalie Bossé, Directrice générale, Autoroutes des Infrastructures pour l’Intégration
Programmes d’infra-structure et de européenne
transport, Transports Canada
Japon
M. Mikio Yoshioka, Directeur général,
Bureau des Routes
Uruguay
Estonie M. Hernán Ciganda, Directeur des Routes
M. Raido Randmaa, Directeur général par Mozambique
intérim de l’Administration des Routes M. Americo Dimande, Directeur général
de l’ANE

Enrique Balaguer Camphuis (1925-2020)


© Texte : Asociación técnica de Carreteras
Enrique Balaguer Camphuis, président de PIARC de 1984 à 1992, vient de nous quitter
à l’âge de 95 ans.

Sa longue carrière a couvert de nombreux publiques et privées sur la gestion des été nommé
domaines de connaissance liés à réseaux routiers. Sa brillante projection président
l’enseignement, à l’ingénierie et aux routes. Il internationale a atteint son point culminant de PIARC. Ses
se distingue comme professeur de routes et lors de la présidence de l’Association contributions aux
directeur de l’École des ingénieurs civils de mondiale de la route (1984-1992), où il a Congrès mondiaux de la
Madrid (1975-1981). En tant qu’ingénieur, il a joué un rôle important dans la rénovation et route et sa direction à la tête de l’Association
participé à la modernisation des techniques la modernisation de l’Association. ont contribué à l’échange de connaissances
et des réglementations routières et, depuis entre les pays ainsi qu’à la modernisation
sa nomination au poste de directeur général De par les responsabilités qui lui ont été et à l’harmonisation des grands réseaux
des routes au ministère des Travaux publics confiées en tant que haut fonctionnaire, il a routiers du monde.
et de l’Urbanisme (1981-1989), il a favorisé estimé qu’il était essentiel d’établir des liens
l’élaboration, la gestion et la direction du avec d’autres professionnels de différents Admiré et aimé par ses collègues,
Plan général des routes 1984/1993, sans pays pour l’échange de connaissances dans travailleur infatigable à la mémoire
doute l’une de ses plus grandes réalisations. le domaine des routes et pour renforcer prodigieuse, il a été actif jusqu’à ce que ses
Ses compétences en matière de gestion, la projection internationale de l’ingénierie yeux, à l’âge de plus de 90 ans, l’empêchent
reconnues par ses collègues, l’ont conduit à routière espagnole. À cette fin, il a rejoint de lire. Son héritage, sa grande humanité,
la présidence de l’Association des ingénieurs l’Association mondiale de la route très tôt son intégrité, sa grande personnalité, sa
civils (1980-1988). Dans sa dernière étape dans sa carrière. Il a participé à divers comités simplicité, ainsi que son énorme capacité
professionnelle, il a conseillé le ministère des techniques, a été membre du Comité de leadership et de travail, le placent parmi
travaux publics et d’autres administrations exécutif mondial de PIARC et a ensuite les grands ingénieurs routiers.#

Ada Lía González (1933-2020)


Ada Lía González, née à Buenos Aires en à promouvoir très et d’aider à la formation de bons
1933, est décédée en avril 2020. Ingénieur activement l’intégration ingénieurs.
des routes et enseignante, elle a fondé la des femmes dans
fondation CENATTEV en 1995, dont elle a le domaine de Elle fut également Membre du :
été présidente toute sa vie. Présidente du l’ingénierie. Ada Lía a
Comité national de PIARC en Argentine passé une grande partie • Conseil de PIARC de 2004 à 2015
(CENATTEV) de 2004 à 2011, elle s’est de sa vie active à organiser • Comité technique des tunnels
aussi consacrée avec ténacité à former et fréquemment des conférences, des de PIARC 2008-2016
à aider économiquement de nombreux réunions et différents événements, même • Comité de terminologie de PIARC 2008-
étudiants en génie civil, à encourager à son domicile, dans le but permanent 2019.
leur vocation de bons ingénieurs et d’améliorer l’ingénierie routière argentine

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Brèves ACTUALITÉ

PIARC : Enquête sur le mode de diffusion


de la revue Routes/Roads
Vous recevez notre revue trimestrielle Routes/Roads car vous êtes membre de PIARC (Association mondiale de la Route),
membre de l’un de ses Comités techniques ou Groupes d’étude, ou encore abonné à la revue.

Certains lecteurs nous ont indiqué leur souhait de ne plus recevoir la revue en format papier, à la fois pour des questions de
stockage et des questions d’environnement. Le risque de propagation du Covid-19 n’est peut-être pas étranger non plus à leur
demande.

Nous souscrivons pleinement à ces préoccupations, qui rejoignent également notre souci de réaliser des économies
d’impression et d’affranchissement. Ce dernier poste représente en effet une dépense importante pour notre Association.

Par ailleurs, comme vous le savez sans doute, le magazine est disponible, en plus de la version imprimée, en deux versions
numériques :

1. Un format PDF téléchargeable, que vous pouvez sauvegarder, visualiser et imprimer, à l’adresse :
https://www.piarc.org/fr/activites/Revue-Routes-Roads
2. Un site internet dédié, en format HTML enrichi, à l’adresse :
https://routesroadsmag.piarc.org/fr/

Ces versions électroniques vous sont déjà accessibles librement et le resteront.

Nous vous proposons donc de choisir entre consulter notre revue uniquement via les versions électroniques, ou de continuer
à la recevoir en format imprimé, à l’aide du questionnaire ci-après. Votre réponse est attendue impérativement pour le
31 octobre 2020 au plus tard. Passé ce délai, nous considérerons que vous renoncez à la revue papier.

Pour répondre à l’enquête :


https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSd4q44I354oNKiwMvobuYbV8NAfaq9PROKLfPeC7wxZOmbZFw/
viewform?vc=0&c=0&w=1&flr=0

Raymond Sauterey (1930-2020)


M. Raymond Sauterey, président du comité français de PIARC de 1985 à 2000, nous a quittés
le 9 septembre 2020, à l’âge de 90 ans. Il avait effectué la totalité de sa carrière au sein
de l’administration routière, au Laboratoire Central des Ponts et Chaussées (LCPC), où
il fut notamment un expert dans le domaine des chaussées souples, puis au Service
d’Études Techniques des Routes et Autoroutes (SETRA) où il eut en charge la division
des liaisons interurbaines puis les relations extérieures, avant de diriger la Mission
des Affaires Internationales de la Direction des Routes.

Raymond Sauterey rejoint PIARC en 1968, comme membre (de 1968 à 1971) puis
secrétaire francophone (de 1972 à 1979) du Comité technique des chaussées
souples. Il participe à la gestion de l’association en étant membre de la Commission
Internationale Permanente de 1984 à 1999 (devenue le Conseil), membre de la
Commission communication et président du comité éditorial de Routes/Roads de
1994 à 1999 ; il contribue pendant toute cette période aux Congrès mondiaux de
la route, de 1971 à Prague, jusqu’en 1999 à Kuala Lumpur. Raymond Sauterey était
membre d’honneur de PIARC depuis 2015.

Tous ceux qui ont connu Raymond Sauterey garderont le souvenir d’un homme
foncièrement bon, doté d’un grand sens de l’humour.#

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ACTUALITÉ Communication
Vers une approche plus responsable
des passages à niveau
Virginie Taillandier (SNCF) et Gérard Hernja (ECF), France
Illustrations © Auteurs

L es accidents aux passages à niveau


présentent des implications
humaines, sociétales et financières
colossales. Dans la plupart des
cas, leur cause est exclusivement
attribuée au comportement des
conducteurs, qu’il s’agisse d’erreurs
de conduite ou d’infractions au code
de la route. Ces accidents, mortels
dans près d’un tiers des cas (SNCF,
2018), se caractérisent par un niveau
élevé de gravité et par une relative
stabilité du nombre de décès ces 25
dernières années.
Illustration 1 - Panneau A7 Illustration 2 - Balises J10 destinées
destiné à anticiper un risque à durcir le message du panneau de
Pour mieux comprendre ce phénomène danger et à favoriser la décélération
et apporter des solutions d’amélioration,
la SNCF, Société nationale des Chemins
de fers français, direction Innovation et amener le conducteur à ralentir en lui remplacement du feu rouge par des
recherche, s’est attachée les compétences fournissant des indications de distance. feux tricolores ou l’ajout d’éclairages
complémentaires d’experts en simulation   directionnels indiquant le sens de
de conduite et comportements des Deux demi-barrières et des feux rouges passage des trains. Enfin, le profil
usagers de la route (École de conduite clignotants sont placés au passage routier a été changé dans un scénario
française) afin de mener une recherche à niveau et peuvent être complétés pour abaisser mécaniquement la
achevée en février 2020. d’un signal sonore. vitesse des véhicules en approche
(bourrelets).
Aux fins de cette expérience, la SNCF a
OBJECTIF DE LA RECHERCHE modélisé deux itinéraires de conduite L’expérience a été réalisée sur un
sur un simulateur dynamique en simulateur de conduite dynamique.
La recherche avait pour objectif de utilisant des éléments issus d’une Le choix du simulateur a reposé sur
vérifier si des innovations en matière de étude de conception et du projet de des études démontrant sa fiabilité et
panneaux de signalisation et messages passage à niveau connecté [1]. sa légitimité en tant qu’outil, alliant
routiers (texte et/ou bip) à l’intention perception, traitement cognitif et
des conducteurs pouvaient modifier • un itinéraire « classique » avec neuf étude comportementale (Godley et al.,
positivement leur comportement scénarios de franchissement de 2002 ; Hoffman & McDowd, 2010 ; Lee
à l’approche des passages à niveau. passages à niveau mettant en œuvre et al., 2008 ; Rosen, 2004).
des dispositifs innovants ;
• un itinéraire « connecté » avec six Une analyse cognitive du
MÉTHODOLOGIE scénarios de franchissement de comportement des conducteurs
passages à niveau signalés au à l’approche des passages à niveau
En France, la plupart des passages conducteur par des messages a été effectuée à l’aide de modèles
à niveau (11 000 sur les 15 000 du réseau) affichés sur une tablette. développés par Pierre Higelé et Gérard
sont signalés par un panneau de danger Hernja [2]. Elle a permis de modéliser
placé à 150 mètres hors agglomération Sur l’itinéraire « classique », l’ensemble une approche experte des passages
et 50 mètres en agglomération. du système existant a été conservé à niveau et de comprendre le rôle
pour l’expérience dans les neuf de l’anticipation de leur éventuel
Des balises J10 sont également scénarios, mais enrichi d’éléments déclenchement. L’anticipation s’appuie
implantées à 150 mètres, 100 mètres, (arches, balises, etc.) visant à accroître sur la mise en œuvre d’un
puis 50 mètres en amont du passage la visibilité du passage à niveau. raisonnement complexe basé sur des
à niveau. Elles sont vouées à rappeler La lisibilité du passage à niveau a été opérations mentales de niveau formel
la présence du passage à niveau et à modifiée dans trois scénarios, avec le (Hernja, 2006).

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Communication ACTUALITÉ

Le conducteur expert anticipe le


déclenchement du passage à niveau
dès qu’il voit le panneau et adapte sa
vitesse afin de ne pas être surpris par
l’abaissement des barrières. Pour cela,
il met en œuvre un raisonnement
complexe reposant sur l’éventualité
de ce déclenchement.

Cinquante-huit conducteurs de
véhicules de transport de voyageurs
représentatifs ont été sélectionnés
pour l’étude.

Pour chaque itinéraire, trois scénarios


de référence ont été appliqués afin de
modéliser le comportement de ces
sujets vis-à-vis des passages à niveau.

Différents outils ont été utilisés pour
collecter les données :
Illustration 3 - Modélisation de l’approche experte d’un passage à niveau ouvert
• observation externe du
comportement des sujets pendant la
simulation ; Les sujets n’agissant qu’en réaction peuvent être surpris par l’abaissement des
• entretiens pour recueillir les barrières et se mettre involontairement en danger parce qu’ils n’anticipent pas le
expériences des sujets lors du déclenchement du passage à niveau.
franchissement des passages
à niveau ; Parmi les nouveaux panneaux de signalisation testés, aucun n’est parvenu à modifier
• vidéo embarquée de l’expérience, la capacité des sujets à prévoir l’abaissement de la barrière.
centrée sur le conducteur ;
• données du simulateur, axées sur Certains dispositifs se révèlent toutefois intéressants car ils obligent le conducteur
les vitesses de franchissement des à ralentir (bourrelet).
passages à niveau.
D’autres solutions peuvent améliorer la visibilité (arches au-dessus de la route,
L’analyse des entretiens a porté dispositif imaginé par l’École de design Nantes Atlantique) ou la lisibilité
sur quatre principaux aspects : (éclairages directionnels indiquant le sens de passage des trains, équipement déjà
l’identification des mesures de sécurité déployé sur des passages à niveau au Japon) des infrastructures.
le long de l’itinéraire, leur perception,
leur compréhension et l’aide à la prise S’agissant des messages sur le tableau de bord, 8 % des sujets ont déclaré être
de décision en matière de conduite. réfractaires aux écrans et systèmes d’aide à la conduite (GPS, applications pour
smartphone, etc.). Ils n’ont absolument pas réagi aux messages reçus.

RÉSULTATS Les messages qui n’indiquent pas clairement l’approche d’un train et qui
se contentent de signaler un passage à niveau à 150 mètres réclament un
Les scénarios de référence nous ont raisonnement complexe de la part du conducteur.
permis de déterminer deux catégories
de sujets et de comportements Les sujets réagissent, mais 64 % d’entre eux attendent un élément concret pour
à l’approche de passages à niveau : décider de leur comportement. Ces messages, même s’ils évitent le phénomène
de distraction et sont complémentaires du panneau A7 (signalant un PN), sont
1. 42 % des sujets anticipent le possible donc moins efficaces.
déclenchement du passage à niveau
et adaptent leur vitesse pour pouvoir Les messages sans équivoque de type « passage à niveau fermé » se sont
s’arrêter et limiter les risques (à traduits par un ralentissement précoce de tous les sujets qui les ont
l’instar de l’expert). consultés. Dans ce cas, les conducteurs n’ont pas besoin d’anticiper
2. 58 % des sujets ont attendu une le déclenchement du passage à niveau. Avertis tôt de la fermeture
indication visuelle, un feu, un signal du passage à niveau, ils adaptent leur vitesse et adoptent un
sonore ou une barrière pour réagir. comportement en accord avec celui observé chez l’expert, sans avoir
à prévoir un risque défini comme un danger potentiel.

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ACTUALITÉ Communication

Illustration 4 - Modélisation du comportement des sujets Illustration 5 - Modélisation du comportement des sujets
recevant un message « Passage à niveau dans 150 mètres » recevant un message « Passage à niveau fermé »

DISCUSSION CONCLUSION

Le bourrelet est le seul dispositif exigeant une décélération Le comportement de conduite aux abords des passages
systématique lors du franchissement de passages à niveau. à niveau peut être influencé par des dispositifs
Il peut donc être considéré par certains conducteurs comme complémentaires à l’infrastructure existante et par des
une source d’inconfort et un motif de décélération inutiles, messages délivrés aux conducteurs, les changements de
surtout lorsque le passage à niveau ne se déclenche pas. comportement alors observés ne concernant toutefois pas la
capacité des individus à mettre en œuvre un raisonnement
Le message clair « Passage à niveau fermé » provoque un leur permettant d’anticiper les risques.
ralentissement basé sur la certitude que les barrières sont
ou vont être abaissées. Ce type de message peut néanmoins L’utilisation des dispositifs sélectionnés doit d’abord être
poser plusieurs types de problèmes. Son absence pourrait validée par des recherches en situations réelles, notamment
ainsi amener certains conducteurs, alors persuadés que le dans le cadre des projets de la SNCF sur les véhicules
passage à niveau est ouvert, à le franchir à grande vitesse. connectés / automatisés. Il sera également nécessaire
Ce risque pourrait être encore accru en cas de défaillance du d’évaluer scrupuleusement les effets de ces nouveaux
système de messagerie ou, plus simplement, s’agissant du dispositifs sur l’attitude et le comportement concrets des
contrôle du véhicule au franchissement de la voie ferrée. conducteurs.#

BIBLIOGRAPHIE

[1.] La direction Innovation et recherche de la SNCF a lancé fin 2016 le projet « Passage à niveau intelligent » visant la
communication des passages à niveau avec les trains et les véhicules routiers connectés / automatisés.
[2.] Godley, S. T., Triggs, T. J. et Fildes, B. N. (2002). Driving simulator validation for speed research. Accident Analysis &
Prevention, Volume 34, n° 5, pages 589-600.
[3.] Hernja, G. 2006. Approche cognitive du conducteur en formation, ROUTES/ROADS, PIARC, 8 p.
[4.] Hoffman, L. & McDowd, J. M. (2010). Simulator driving performance predicts accident reports five years later.
Psychology and Aging, 25(3), 741–745.
[5.] Lee, H., Falkmer, T., Rosenwax, L., Cordell, R., Granger, A., Vieira, B., et al (2008). Validity of driving simulator in assessing
drivers with Parkinson’s disease. Advances in Transportation Studies: An International Journal (édition spéciale), 81–90.
[6.] ONISR. 2020. Bilan 2019 de la sécurité routière. https://www.onisr.securite-routiere.gouv.fr/etat-de-l-insecurite-routiere/
bilans-annuels-de-la-securite-routiere/bilan-2019-de-la-securite-routiere
[7.] SNCF. 2018. Rapport annuel sécurité SNCF Réseau disponible sur le site https://www.sncf-reseau.com/fr.

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ACTUALITÉ Communication
Italie : conduite autonome et concept de route
intelligente de l’ANAS
Entretien avec Alberto Broggi, Directeur général de VisLab
Domenico Crocco, PDG d’Anas SpA, Premier Délégué de PIARC Italie et Président du Comité technique Conduite connectée et
automatisée, PIARC Italie
Illustrations © Auteur

D es experts de la conduite automatisée et des routes intelligentes ont mis à profit leurs facultés techniques et
scientifiques pour évaluer l’option zéro lors des discussions internationales de l’Association mondiale de la
Route (PIARC) auxquelles nous participons. Ils se sont demandé si les avantages du véhicule automatisé et des routes
intelligentes étaient supérieurs ou inférieurs aux coûts, s’ils pouvaient devenir incontournables et s’ils en valaient
vraiment la peine. Leur réponse fut un oui franc, qui ne s’expliquait pas par le confort de conduite ou la possibilité de
travailler tranquillement dans le véhicule, mais par les chiffres dramatiques de la sécurité routière : 1 200 000 morts,
dont 260 000 enfants, et 59 millions de blessés dans le monde pour la seule année 2019, 25 000 victimes en Europe,
dont près de 3 300 en Italie. Les véhicules automatisés pourraient réellement mettre un terme à ces accidents.
En effet, 94 % d’entre eux relèvent d’un facteur humain : distraction, utilisation du téléphone portable, vitesse
excessive... C’est pourquoi les directives européennes ont rendu obligatoires certains systèmes avancés d’aide à la
conduite (ADAS), tels que le freinage automatique d’urgence, le contrôle du taux d’alcool, le contrôle automatique
du maintien de la trajectoire et l’allumage automatique des 4 feux de détresse en cas de freinage brusque. L’idée est
que l’élimination du facteur humain responsable des accidents par la conduite assistée puis autonome peut mener
à un avenir sans décès, bien sûr, lorsque des véhicules automatisés uniquement rouleront. C’est pourquoi des tests
de conduite autonome sont menés dans tous les pays technologiquement avancés. C’est pourquoi tous les pays les
plus avancés mettent en œuvre des projets de numérisation des routes pour les transformer en routes intelligentes,
fournissant ainsi au véhicule autonome et à l’usager le plus d’informations possible et le meilleur environnement
de déplacement. C’est pourquoi des experts techniques du monde entier impliqués dans l’Association mondiale
de la Route (PIARC) échangent intensivement leurs connaissances techniques sur les tests de conduite autonome
et l’implémentation de routes intelligentes. L’Italie travaille également dans ce sens et prévoit la numérisation
progressive de ses routes principales (celles appartenant au réseau européen) à l’horizon 2025, grâce à des
dispositions du ministère des Infrastructures et des Transports. Et dans ce contexte, l’ANAS, l’autorité italienne des
routes, a le projet ambitieux de transformer 3 000 km de son réseau en routes intelligentes.

Depuis plusieurs mois, des véhicules à conduite autonome En 2019, VisLab a obtenu du ministère des Infrastructures
circulent dans les rues de Turin et de Parme parmi le trafic et des transports ses premières autorisations de test de
ordinaire. Ils se déplacent seuls, même si un conducteur conduite automatisée par un décret sur la route intelligente.
expert reste dans la voiture, prêt à prendre les commandes. Que pensez-vous de la procédure d’autorisation italienne ?
Jusqu’à présent, aucun accident n’a été recensé, et les tests
se déroulent bien. Ces premiers essais de conduite autonome La procédure d’autorisation a été complexe et structurée,
sur route, autorisés par le ministère des Infrastructures et des notamment pour permettre aux experts ministériels
transports, sont menés par VisLab, une entreprise spin-off de d’évaluer convenablement la sécurité des usagers. Une
l’Université de Parme rachetée par l’Américain Ambarella. La fois cette autorisation obtenue, le groupe Ambarella a
société VisLab a été créée au milieu des années 1990 dans pu poursuivre son programme d’investissements massifs
le milieu universitaire parmesan sous l’intuition d’Alberto en Italie, et VisLab, ses activités de recherche et de
Broggi, professeur titulaire au département d’ingénierie de développement, entamées il y a plus de vingt ans.
l’information.
Quelles technologies mettez-vous en place sur vos véhicules
Alberto Broggi est également membre du Comité automatisés ?
technique Conduite connectée et automatisée de PIARC
Italie, composé de responsables et d’experts du ministère Les dispositifs de perception de VisLab se composent
des Infrastructures et des transports, de l’ANAS SpA, des principalement de caméras et de radars. Ce sont des
secteurs clés de l’automobile et des télécommunications, de systèmes complémentaires car ils fonctionnent sur des
concessionnaires d’autoroutes et d’universités. Dans notre longueurs d’onde différentes et se distinguent donc
entretien, Alberto Broggi fait le point sur les perspectives de par leurs capacités et leurs limites perceptives, qui
la conduite autonome, sa réglementation, l’environnement se complètent et compensent les défauts de
routier idéal à sa mise en œuvre et les tests déjà réalisés. l’autre. Par exemple, les caméras (de vision

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ACTUALITÉ Communication
stéréoscopique à double capteur) grâce à une route intelligente, cela n’en est que mieux. Il faut également tenir
délivrent une plus grande densité compte du fait que la connexion d’un véhicule autonome à un réseau routier
d’informations que les radars, qui eux, intelligent accroît le risque collatéral d’intrusion ou de manipulation potentielle au
d’une résolution inférieure à celle des sein du système de conduite.
caméras, sont capables d’alimenter le
système en données utiles même par Le véhicule autonome peut peine à adapter sa conduite en présence de
très mauvais temps. Les dispositifs à travaux ou d’autres obstacles, d’autant qu’avec leur vision limitée, les capteurs
caméra unique (c’est-à-dire à un seul embarqués peuvent ne pas les repérer à temps. Ne serait-il pas possible de
capteur) reconnaissent les objets. « connecter » les images des centres opérationnels stratégiques de l’Anas et de
Les caméras stéréoscopiques, quant concessionnaires au véhicule autonome pour que celui-ci les exploite ?
à elles, fournissent la position en
3D, la distance et la relation spatiale Le problème de détection de travaux et d’autres imprévus est effectivement
entre les objets. Le système conçu assez courant. Je pense que le véhicule autonome devra un jour être capable
par VisLab n’utilise pas de télémètres d’interpréter ces situations de manière indépendante, tout comme le fait un
laser (LiDAR), et les tests italiens ont véritable conducteur. Dans tous les cas, toute information complémentaire
étayé cette décision. Contrairement provenant du système de communication permettra d’optimiser encore la
à ses concurrents, VisLab utilise des conduite (par exemple pour moduler la vitesse avant que l’événement ne soit
outils de perception (principalement visible voire pour changer d’itinéraire).
des caméras conçues et fabriquées
par le groupe Ambarella) équipés Le Groupe d’Étude PIARC dédié à la conduite autonome souligne la nécessité
de moteurs de traitement interne d’harmoniser la signalisation routière continentale et de prendre des mesures
destinés à l’apprentissage profond, techniques en faveur de la visibilité des panneaux dans différentes conditions
celui-ci s’effectuant « on the edge météorologiques. Pour un véhicule autonome, mieux vaut une signalisation
» (à l’intérieur même de la caméra) physique ou numérique ?
moyennant une faible consommation
d’énergie. La technologie VisLab peut Tant que nous n’aurons pas exclusivement des véhicules autonomes à circuler
également se passer des données sur nos routes, nous devrons conserver une signalisation pouvant être
GPS, car les seules informations interprétée par des conducteurs humains. Je pense donc que c’est au véhicule
visuelles tirées des caméras peuvent de s’adapter aux panneaux dans un secteur géographique donné. Comme
servir à la géolocalisation. dans le cas des communications abordées précédemment, il est évident que
  l’activation de la signalisation, avec l’émission de signaux radio prévenant
Comment étayez-vous les résultats d’un danger ou de la présence d’un feu de circulation, améliorerait encore les
obtenus aux tests ? choses.

Les résultats obtenus lors des Que demandez-vous aux exploitants de routes pour favoriser la conduite
essais menés en Italie ont ensuite autonome ? Que la surface de chaussée soit bien entretenue ? Que la signalisation
été consolidés et développés à Las horizontale et verticale soit visible ? Autre chose ?
Vegas, dans le Nevada (États-Unis),
dans des conditions de trafic, sur des Nous demandons principalement aux exploitants de routes de continuer
infrastructures et sur des types de à entretenir les marquages routiers horizontaux et verticaux et à vérifier leur
routes différents (CES 2020). précision. Il convient également de souligner que toute modification de la

Pour circuler en toute sécurité, le


véhicule automatisé doit-il être
impérativement connecté à une route
intelligente ?

Notre philosophie consiste à penser


que les technologies doivent
permettre la conduite du véhicule
avec une sécurité raisonnable sur
n’importe quelle route. Concevoir
un système de conduite automatisé
dont le fonctionnement exige des
informations de tiers (tel qu’un réseau
d’infrastructures) peut, selon moi, être
restrictif. Après, si des informations
complémentaires sont disponibles
(en faveur de la sécurité et du confort) ANAS SMART ROAD

10 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Communication ACTUALITÉ

signalisation est susceptible de causer des désagréments


aux utilisateurs de cartes numériques haute résolution, car ils
devront les mettre à jour.

Quelle « garantie minimale » les exploitants d’autoroutes


doivent-ils apporter si leur responsabilité juridique est
engagée en cas d’accident ?

Si l’on part du principe que le véhicule autonome est


conçu pour circuler sur le réseau routier actuel sans
autre moyen, je dirais que les exploitants d’autoroutes
n’ont rien à garantir de plus que ce qu’ils ont
à garantir actuellement aux usagers. Toute information
complémentaire que l’opérateur voudra fournir au véhicule
via le réseau routier intelligent peut uniquement entraîner
des responsabilités supplémentaires (par exemple, si 2010, van à guidage automatique VisLab
l’information est erronée). reliant Parme à Shanghai

Considérant la connexion avec l’infrastructure routière


comme certainement très utile mais « accessoire »
(elle peut connaître des interruptions), plusieurs constructeurs
automobiles intègrent des solutions de secours qui reposent
uniquement sur des capteurs optiques ou des cartes
numériques. Les exploitants d’autoroutes doivent-ils être
responsables uniquement de l’entretien courant (signalisation
horizontale et verticale et surface de chaussée) et non pas
des informations non obligatoires fournies par la route
intelligente ?

Cette problématique n’est vraisembla-blement pas qu’une 2020, véhicules autonomes VisLab
question d’ingénierie technique ; c’est aussi et surtout une
question juridique. Je crois qu’en principe l’exploitant est
responsable de chaque information et service qu’il fournit ou Quel calendrier est-il possible d’envisager pour la
gère, ses responsabilités augmentant donc avec le volume commercialisation de véhicules de niveaux de conduite
de services et d’informations qu’il met à la disposition des autonome 4 et 5 ?
usagers.
Il est toujours difficile de prévoir, mais je ne pense pas
Il n’en demeure pas moins que l’entretien par l’exploitant que nous en soyons très loin, une dizaine d’années ne
est primordial aujourd’hui pour le conducteur humain représentant pas grand-chose à l’échelle de la durée
et qu’il le sera également demain pour les conducteurs de vie – plus de 100 ans – du système de transport par
électroniques. En fait, le véhicule est conçu pour se véhicule. Cette nouvelle technologie va révolutionner
déplacer dans un environnement aux caractéristiques non seulement le système de transport, mais également
précises, tant en termes de géométrie que de signalisation. l’urbanisme et à l’accessibilité de nos villes.
Toute information complémentaire peut être utilisée mais
son exactitude engage la responsabilité de l’exploitant. Une plateforme s’attelle actuellement à la législation
européenne en matière de conduite autonome. Peut-elle
Est-il vrai que le véhicule autonome possède une visibilité prendre exemple sur un pays en particulier ?
d’environ 100 mètres vers l’avant alors qu’avec la route
intelligente, cette visibilité peut être supérieure de plusieurs En 2018, l’Italie a adopté un règlement qui fixe des
centaines de mètres ? exigences assez strictes pour ceux qui souhaitent procéder
à des essais. Notre groupe est autorisé à effectuer des
Il est vrai que la route intelligente peut communiquer tests au Nevada, en Californie et en Italie. Je pense que la
au véhicule des données qui ne sont pas directement Californie n’a pas d’équivalent dans le monde en termes
visibles, telles que la présence d’obstacles dans un virage, de tests. Elle applique un principe de responsabilité de
ou des informations de trafic sur son parcours. Lorsqu’elles l’expérimentateur qui résume tout, et peu importe que
sont fournies par l’exploitant de route, ces données sont le demandeur soit un constructeur automobile ou un
certainement utiles pour la conduite, mais le véhicule doit développeur de systèmes.
pouvoir se déplacer en toute sécurité y compris sur des
routes qui ne les proposent pas.

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 11


ACTUALITÉ Communication
Ainsi se conclut notre entretien avec SYSTÈMES DE CONNECTIVITÉ Les systèmes de connectivité jouent
Alberto Broggi. un rôle crucial dans le déploiement
Il existe deux types de systèmes de de systèmes STI-C pour la conduite
En tant que principal exploitant italien connectivité : connectée et autonome. Les
de quelque 30 000 km de routes et technologies de communication V2X
autoroutes nationales, l’ANAS SpA 1. les « systèmes à large bande », (véhicule à tout) constituent un facteur
est idéalement positionné pour qui représentent l’infrastructure clé d’évolution des systèmes STI-C,
promouvoir et tester des technologies physique de l’architecture du favorisant l’échange de données entre
de communication V2X en faveur de la réseau de télécommunications et véhicules (communication V2V), entre
conduite autonome et des véhicules de données de la route intelligente. les véhicules et l’infrastructure routière
associés. L’ANAS met progressivement S’appuyant sur des connexions (communication V2I) et entre les
en œuvre un plan visant à transformer câblées, ils relient les nœuds via véhicules et les piétons (V2P).
les routes principales de son réseau en une dorsale constituée de plusieurs
routes intelligentes. Les premiers essais anneaux de fibres optiques destinés Les systèmes de connectivité de
concernent le tronçon route nationale à connecter les équipements installés la route intelligente reposent
51 (SS51) - Alemagna (Vénétie), où tout au long de la route intelligente ; principalement sur la technologie LTE-V
se dérouleront les championnats du 2. les systèmes sans fil en marche, et son évolution LTE-V2X (ou C-V2X), et
monde de ski alpin, et le tronçon A91 qui permettent la connexion en sur la norme IEEE 802.11p (plus souvent
- Rome-Fiumicino, l’autoroute sans marche usager - véhicule, véhicule - appelée DSRC ou ITS-G5).
péage la plus fréquentée d’Italie. véhicule et véhicule - infrastructure.
En fait, ces systèmes s’appuient sur La coexistence de plusieurs
La route intelligente de l’Anas adopte l’utilisation généralisée des appareils technologies de communication V2X a
une conception modulaire, reposant mobiles personnels en exploitant conduit l’Anas à adopter des solutions
sur des unités indépendantes, leur potentiel colossal (notamment garantissant à tous les usagers la
autonomes et interconnectées, reliées leurs capteurs : accéléromètre, possibilité de bénéficier des mêmes
par des nœuds fonctionnels et multi- gyromètre, magnétomètre, capteur informations et services, quelle que
technologiques (appelés îles vertes). de proximité, baromètre, messagerie soit la technologie choisie par les
Chaque module de la route intelligente mains libres, etc.) et leurs applications constructeurs de leurs véhicules.#
est organisé de manière à accueillir dédiées (« Smart Road ») pour fournir
tous les éléments technologiques des services d’infomobilité et de
nécessaires à la fourniture des services sécurité routière.
qu’elle exige, c’est-à-dire :
L’Anas a opté pour la création du
• les systèmes de connectivité à large réseau Wi-Fi in Motion adapté à la
bande vitesse prévue pour le tronçon de route
• les systèmes de connectivité en et potentiellement pour au moins
marche 130 km/h, permettant la connexion
• les technologies intelligentes d’appareils mobiles à un réseau
• les plateformes TIC intranet réservé aux services de la route
  intelligente.

12 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


ACTUALITÉ Communication
Évaluation de la valeur du patrimoine routier
du réseau structurant marocain en utilisant
l’approche HDM-4
Abdelilah Bannour, Laboratoire des Systèmes de Communication et Détection, Faculté des Sciences de Tétouan,
Mohamed El Omari, Laboratoire d’Automatique de l’Environnement et Procédés de Transferts,
El Khadir Lakhal, Laboratoire de Mécanique des Fluides et Énergétique, Faculté des Sciences Semlalia de Marrakech,
Mohamed Afechkar, Directeur du cabinet de conseil et d’expertise et d’audit « AF Ingénierie », Maroc
Pierre Joubert, Consultant et Formateur HDM-4 à Ponts Formation Conseil, France
Illustrations © Auteurs

L ’un des objectifs du présent travail, est l’évaluation des actifs routiers qui s’avère un indicateur clé permettant aux
gestionnaires d’un réseau routier de prévoir un état acceptable, selon un coût économiquement viable à moyen
et long terme (20 ans), en ciblant la sauvegarde du patrimoine routier global et l’amélioration du service offert aux
usagers. Les routes, plus que de nombreux autres actifs, nécessitent une attention constante, sous une forme ou
une autre, pour limiter leur détérioration. Les résultats du présent travail portent sur l’évaluation de la valeur du
patrimoine routier, dans une démarche conçue et adaptée aux spécifications du contexte marocain. Les résultats
de la simulation ont montrés que les stratégies de maintenance des routes très fortement circulées, consomment
des investissements en capitaux importants. Le coût nécessaire pour la mise à niveau du réseau routier structurant
en 2017, est de l’ordre de 22 milliards de dirhams (MAD) , soit 1,46% du PIB national. Ces résultats confirment la
robustesse du choix des stratégies optimales. Il a ainsi été observé que la valeur du patrimoine aura augmenté de
22 à 28 milliards de dirhams en 2018, une évolution enregistré durant toute la période quinquennale.

Un système de gestion des chaussées première de son genre en Afrique du doivent également être spécifiés, ainsi
(PMS) est un outil essentiel d’aide Nord. que le volume du trafic, exprimé en
à la décision et la programmation moyenne journalière annuelle (TMJA).
de l’entretien du patrimoine routier. L’illustration 1 montre le circuit PMS
L’optimisation des interventions local et son noyau central constitués Pour représenter le réseau routier
à l’intérieur d’un processus budgétaire par le modèle HDM-4. En introduisant structurant, on constitue ce qu’on
revêt une grande importance lorsque l’approche HDM-4 dans ledit PMS, appelle une « Matrice de réseau »,
les gestionnaires des infrastructures le présent travail vise à rendre le qui est la décomposition du réseau
sont confrontés à la fois à une processus d’évaluation du patrimoine en fonction de critères jugés
augmentation de la demande routier du réseau routier plus flexible primordiauxsachant que la banque
de réfection et à une réduction et faisable. de données routières (BDR) d’une
ressources financières [1, 2, 3, 4, 5, 6]. campagne menée par le Centre
national d’Études routières (CNER)
Le présent travail s’inscrit dans la MÉTHODOLOGIE DE TRAVAIL constitue la base de ladite matrice.
troisième composante du modèle
HDM-4, celle qui porte sur l’analyse L’unité de base sur laquelle porte une Définition de la matrice de base
des stratégies de maintenance. Mais, analyse dans l’approche HDM-4 est la
avant d’utiliser le modèle HDM-4, section de route homogène. Plusieurs La matrice de base repose sur un
une étude approfondie de calibration stratégies de travaux peuvent être diagnostic approfondi de la BDR,
et d’adaptation a été entreprise. affectées à une section pour analyse. en croisant les deux principaux
Cette étude, qui a fait l’objet d’une Les différents types de véhicules du paramètres, le trafic en volume et
publication scientifique [7], est la parc national circulant sur la route la qualité structurelle en portance,
pour répartir le réseau structurant
en sections homogènes. Les cellules
TABLEAU 1 - MATRICE (M1) : PORTANCE - TRAFIC de la matrice indiquent la longueur
Classe de Classes de trafic totale en km pour les classes de
portance Total (Km)
1-Très fort 2-Fort 3-Moyen 4-faible portance et de trafic considérées.
1-Bonne 2 413 3 294 3 086 4 231 13 024 Le tableau 1 récapitule les
2-Moyenne 89 59 86 14 248
composantes de la matrice (M1).
3-Mauvaise 57 0 0 26 83
Total (Km) 2 559 3 353 3 172 4 271 13 355

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 13


ACTUALITÉ Communication

Illustration 1 - Fonctionnement d’un système de gestion de l’entretien routier (SYGER)

Hypothèses sur les stratégies réellement envisageable, car cela du patrimoine n’a de retombée que si la
optimales de maintenance conduirait à une destruction du réseau maintenance coûte moins cher que sa
à moyen terme. reconstruction à neuf. La simulation a
En accord avec la Direction des Routes été réalisé, pour les différentes sections
et du Transport terrestre, les huit homogènes du réseau structurant
stratégies décrites dans le tableau 2 RÉSULTATS DE SIMULATION de la matrice (M1). En se référant aux
ont été sélectionnées comme ET DISCUSSION hypothèses retenues pour le contexte
envisageables. Elles correspondent marocain, les résultats de simulation
à des niveaux de service très L’évaluation de la valeur du patrimoine sont présentés en hiérarchisation, selon
différenciés. L’entretien courant seul met en évidence les stratégies la classe de trafic. On présente ici les
sert de stratégie de référence pour permettant de conserver une valeur à résultats seulement du cas de très fort
évaluer les autres stratégies; il s’agit peu près constante du patrimoine. En trafic en adéquation avec une structure
d’un cas théorique, qui n’est pas effet, la politique routière de maintien de bonne portance (1-1), en appliquant
le même raisonnement aux autres
fractions de la matrice (M1) de trafic
TABLEAU 2 - STRATÉGIES RETENUES DE MAINTENANCE DU RÉSEAU STRUCTURANT
fort, moyen et faible.
Stratégies étudiées Description
1 Entretien courant + Réhabilitation Pour les structures de bonne
2 Entretien courant + ES monocouche tous les 8 ans qualité, l’illustration 2 révèle que
3 Entretien courant + ES bicouche tous les 12 ans l’augmentation de la valeur du
4 Entretien courant + Rechargement 6BB si IRI > 7
patrimoine nécessite uniquement deux
injections d’investissement, la première
5 Entretien courant + Rechargement 5BB si IRI > 5
en 2017 de 1 500 millions de dirhams,
6 Entretien courant + Rechargement 4BB si IRI > 4 la deuxième étant repoussée de
7 Entretien courant + Renforcement immédiat 19 ans (2036). La valeur du patrimoine
(à partir de 2017 par approche SNP)
s’élève suite au premier investissement
8 Entretien courant + Renforcement progressif en 5BB
de 4 400 à 6 200 millions de dirhams

14 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Communication ACTUALITÉ

Illustration 2 - Évaluation de la valeur du patrimoine, pour les sections 1-1

(valeur de reconstruction à neuf ). coûteuse et toute interruption de confondues, est maintenue presque
En absence des investissements, la service. constante durant toute la période
valeur du patrimoine se dégrade quinquennale. La valeur du patrimoine
linéairement. Dans le but de déterminer la valeur en 2017 évaluée à 22 milliard de
globale du patrimoine du réseau dirhams, ce qui représente presque
En conclusion, l’augmentation des structurant qui totalise un linéaire de 1,46% du PIB marocain.
taux de réinvestissement permettra 13 355 km, il semble important
d’économiser à long terme. De ce de l’évaluer à moyen terme, ce qui La valeur du patrimoine s’est contractée
fait, sans une augmentation des taux correspond à la période quinquennale de quelque milliards de dirhams, faisant
actuels de réinvestissement, l’état 2017-2021. L’illustration 3, page tomber la valeur globale à 26,85 milliards
des chaussées du réseau structurant suivante, illustre la valeur du patrimoine dirhams en 2021. Bien entendu, éviter la
diminuera progressivement. Il en découlant de la stratégie optimale perte progressive du patrimoine routier
coûtera davantage et cela risquera de retenue, pour chaque fraction du national implique de lui consacrer
provoquer des perturbations dans les réseau de la matrice (M1), comme le des budgets colossaux. Par manque
services auprès des usagers. En fait, montre le tableau 3. de continuité dans l’engagement de
l’investissement dans la maintenance moyens adaptés à son maintien et à son
préventive et la réparation régulière Il est constaté que la valeur du amélioration, ce patrimoine pourrait
prolongera la durée de vie des actifs. patrimoine du réseau structurant, rapidement perdre une partie de sa
Il évite toute reconstruction prématurée toutes classes de trafic et de structure valeur et donc de son utilité.

TABLEAU 3 - LA VALEUR DU PATRIMOINE POUR LES DIFFÉRENTES SECTIONS DU RÉSEAU STRUCTURANT

Stratégie optimale 2017 2018 2019 2020 2021


Section homogène (tableau 2) (a) (b) (a) (b) (a) (b) (a) (b) (a) (b)
1-1 6 4 400 1 500 6 200 0 6 100 0 6 090 0 6 080 0
1-2 8 160 56 230 0 229 0 228 0 227 0
1-3 8 100 35 147 0 146 0 145 0 144 0
2-1 6 5 800 1 800 8 380 0 8 379 0 8 378 0 8 377 0
2-2 6 105 33 148 0 147 0 146 0 145 0
3-1 5 5 400 0 5 350 0 5 300 0 5 250 0 5 200 0
3-2 6 150 48 214 0 213 0 212 0 211 0
4-1 3 5 400 700 6 700 0 6 600 0 6 500 0 6 400 0
4-2 3 18 2,38 22,11 0 22,10 0 22 0 21,9 0
4-3 3 32,5 4,3 41,10 0 41 0 40,70 0 46,60 0
Total (MMDH) 21,56 4,18 27,43 0 27,18 0 27,02 0 26,85 0
(a) : Valeur du patrimoine (MDH) ; (b) : Coût d’investissement (MDH)

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ACTUALITÉ Communication
CONCLUSION

Ce présent travail a étudié le


développement d’une méthodologie
plus flexible et bien adaptée au
contexte local transposable aux autres
pays ayant des conditions techniques
et économiques similaires. Les
conclusions suivantes peuvent être
tirées du présent travail.

Les résultats de la simulation de la


valeur du patrimoine routier national,
qui s’appuient sur l’application des
stratégies optimales retenues à la
base de la matrice M1, ont montré
bien que les fractions du réseau très
fortement circulées, consomment Illustration 3 - Valeur globale du patrimoine du réseau structurant, toutes sections confondues de (M1)
des capitaux importants, dans le but
de relever la valeur du patrimoine et
maintenir sa pérennité. La valeur globale du patrimoine routier structurant est de l’ordre de 22 milliards de dirhams, en 2017,
ce qui représente 1,46% du PIB. Les résultats de l’évaluation de la valeur du patrimoine confirment la robustesse du choix des
stratégies optimales, qui garantissent une augmentation de cette valeur durant toute la période quinquennale.#

RÉFÉRENCES

[1] W. R HUDSON, R HAAS et R. D. PEDIGO. “Pavement Management System Development”. In: sous la dir. de NCHRP
NATIONAL COOPERATIVE HIGHWAY RESEARCH PROGRAM. National Cooperative Highway Research Program, Report
Number 215. 500 Fifth Street, NW, Washington, DC, 20001, U.S.A: Transportation Research Board, 1979, p. 3–7.
[2] F. N. FINN. “Management System for Pavement Maintenance”. In: t. 105. Transportation Engineering Journal of ASCE,
1979, p. 457–472.
[3] R. DEKKER. “Applications of Maintenance Optimization Models: a review and analysis”. In : Reliability engineering and
system safety, 51.3 (1996), p. 229–240.
[4] D. CAMMISANO. “Développement d’un outil de diagnostic et de confirmation des causes de détérioration des chaussées
flexibles”. Thèse de doctorat. École de Technologie Supérieure, Montréal, canada, 2007.
[5] R. C HAAS et B. G. HUTCHINSON. “A Management System for Highway Pavements”. In: t. 5. 1. The 5th Australian Road
Research Board (ARRB) Conference, Canberra, 1970.
[6] R. E SMITH et J. P. HALL. “Overview of Institutional Issues in Pavement Management Implementation and Use”. In: Third
International Conference on Managing Pavements, TRB, National Research Council, Washington, D.C., 1994, p. 53–63.
[7] Bannour, A., El Omari, M., and Lakhal, El., Afechkar, M., Benamar, A., Joubert, P., 2017. Optimization of the maintenance
strategies of roads in Morocco: calibration study of the degradations models of the highway development and
management (HDM-4) for flexible pavements. International Journal of Pavement Engineering, 8(3), 214–22. https://
doi.org/10.1080/10298436.2017.1293261

16 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


ACTUALITÉ Communication
Focus sur le transport routier de marchandises
Hinko Van Geelen, chercheur principal, Centre de recherches routières, Belgique
Martin Ruesch, membre de la direction/partenaire, Rapp Trans Ltd., Suisse
Bernard Jacob, vice-présidence recherche, Université Gustave Eiffel, France
Membres du Comité technique 2.3 Transport de marchandises de PIARC
Illustrations © Auteurs

D epuis les années 2000, le comité technique Transport de marchandises de PIARC travaille sur des questions
concrètes et essentielles du transport de marchandises. Cet article présente les sujets traités dans le cycle
actuel et les réalisations marquantes du cycle précédent.

TRANSPORT DE MARCHANDISES : TRAVAUX RÉALISÉS EN VUE DU CONGRÈS MONDIAL DE LA


ROUTE À PRAGUE : CYCLE 2020 - 2023

La réunion de lancement du CT 2.3 (Transport de marchandises) s’est tenue à Paris en janvier 2020. Elle a été très fructueuse
et a permis de préciser les objectifs des trois groupes de travail. Une implication soutenue des membres du CT 2.3 se dessine,
s’inscrivant dans la continuité des méthodes de travail collaboratives du cycle précédent. Trois sujets seront traités :

1. Réduction des surcharges et de leurs


impacts,
2. Ecologisation du transport de
marchandises
3. Technologies émergentes pour le
transport de marchandises et la
logistique ».

Les travaux porteront sur le transport


de marchandises à courte, moyenne et
longue distances sur tous les types de
territoires (urbains et ruraux).

Lors de la préparation de ce cycle, les


experts du comité, en liaison avec le
coordinateur de thème, ont identifié
ces trois sujets comme les plus
pertinents pour l’avenir. Les résultats
Illustration 1 - Réunion du CT 2.3 Transport de marchandises à Paris en janvier 2020 des travaux contribueront à conforter
la place du transport de marchandises
dans un système de mobilité durable
moderne, pour tous les pays, quel que
soit leur niveau de revenu. Néanmoins
des approches différenciées et des
plans de déploiement adaptés seront
étudiés.

Le premier groupe de travail fera


un point sur les réglementations de
poids et dimensions des véhicules
commerciaux, sur les politiques
et outils techniques de suivi et de
contrôle visant à réduire les surcharges,
et les dommages induits aux ponts et
aux routes des réseaux de transport.
Les poids lourds en surcharge ou
en mauvais état, la fatigue des
Illustration 2 - Un camion surchargé endommage un pont au Vietnam en 2018 conducteurs et les excès
© www.khmertimeskh.com de vitesse posent de

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 17


ACTUALITÉ Communication
sérieux problèmes pour le transport
routier de marchandises dans tous
les pays. Ils affectent la sécurité et les
infrastructures routières. La surcharge
entraîne également une concurrence
déloyale entre modes et entreprises
de transport. Le groupe de travail
s’attachera à étudier et recueillir
les bonnes pratiques des différents
pays et identifier des solutions
intégrant des contrôles automatisés
ou pas, des processus d’inspection
et de certification et des outils et
propositions pour leur mise en œuvre
efficace. Un rapport complet incluant
des études de cas et une bibliographie
sera rédigé.

Le deuxième groupe de travail


sur l’Ecologisation du transport de
marchandises produira un recueil
de bonnes pratiques et une note Illustration 3 - Parts des différents modes de transport de marchandises
d’information. L’importance du sujet dans la consommation d’énergie en 2015 © IEA
est liée à la part du transport routier
de marchandises dans les émissions de
gaz à effet de serre et la consommation les cadres technologiques, organisationnels et juridiques nécessaires à leur mise
d’énergie fossile. Les problèmes de en œuvre. Le groupe de travail produira des fiches d’information sur les évolutions
pollution et de bruit, particulièrement technologiques et un rapport complet sur les technologies émergentes pour le
dans les zones urbaines, seront transport de marchandises et la logistique.
analysés afin d’améliorer la qualité de
vie dans ces environnements.
TRANSPORT DE MARCHANDISES ET CONGRÈS MONDIAL DE
Les stratégies et mesures visant à LA ROUTE À ABU DHABI : CYCLE 2016 -2019
réduire les émissions de gaz à effet
de serre du transport routier de Le comité technique B.4 a produit des résultats utiles au cours du cycle précédent,
marchandises reposeront sur des notamment sur les politiques nationales de transport multimodal de marchandises
mesures techniques, logistiques, et de logistique (enjeu B.4.1), la circulation des poids lourds sur autoroutes (enjeu
infrastructurelles, réglementaires, etc. B.4.2) et les bonnes pratiques en matière de transport routier de marchandises
Parmi les solutions citons les routes éco-énergétique (enjeu B.4.3).
électriques, les véhicules à émission
faible ou nulle, la réduction du trafic
et de la demande, la multimodalité
(déjà étudiée lors du cycle précédent)
et la construction de corridors de fret
écologiques.

Le troisième groupe travaillera sur les


Technologies émergentes et produira
des livrables sur leur application
au transport de marchandises et à
la logistique. Des technologies très
prometteuses comme la numérisation
et l’automatisation devraient permettre
d’améliorer la productivité, la fiabilité
et la flexibilité des services de
logistique et de transport. Les travaux
porteront sur des questions clés
comme l’impact et les avantages de la Illustration 4 - Impact des tendances technologiques sur le transport de marchandises et la logistique
numérisation et de l’automatisation et © DHL - Radar des tendances 2018/19

18 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Communication ACTUALITÉ

Les recommandations et résultats majeurs ont été publiés dans deux rapports et circulation%20des%20poids%20
un recueil de bonnes pratiques, présentés lors de deux séminaires et deux ateliers. lourds%20sur%20autoroutes%20
p our%20untransp or t%20de%20
marchandises%20durable,%20
Politiques nationales de transport multimodal de marchandises plus%20s%C3%BBr%20et%20
et de logistique (enjeu B.4.1) plus%20%C3%A9conome%20en%20
%C3%A9nergie
Un rapport technique de 70 pages Politiques nationales de transport multimodal • Une annexe de 166 pages est
de marchandises et de logistique a été publié, disponible sur le site web de PIARC également disponible sur le site.
en français, en espagnol et en anglais.
Certains membres du groupe de
Le comité technique a organisé huit réunions physiques et plus de 20 réunions travail B.4.3 ont participé à l’équipe
virtuelles auxquelles les membres ont activement participé, ayant à cœur de de supervision du projet spécial sur
partager leurs connaissances et leur expertise. Le rapport final a été rédigé par une les systèmes de routes électriques
dizaine d’experts motivés de différents pays. (2019). Une étude internationale a
été menée. Le rapport Systèmes de
Le rapport explique les politiques de transport multimodal de marchandises routes électriques : une solution
en mettant notamment l’accent sur les tendances et les défis à relever et sur les pour l’avenir ? est disponible en
fondements des politiques nationales. Il offre également une synthèse et une anglais à l’adresse : https://www.piarc.
analyse des principales conclusions et recommandations issues d’une enquête. Les org/fr/fiche-publication/29690-fr-
politiques nationales sont cruciales pour une utilisation optimale et efficace des Syst%C3%A8mes%20de%20routes%20
capacités modales disponibles pour le transport de marchandises. %C3%A9lectriques%20:%20une%20
solution%20pour%20l-avenir
• Un court article a été publié dans le magazine Routes/Roads n° 383 (page 55).
• Le rapport est disponible en version anglaise et espagnole à l’adresse suivante :
https://www.piarc.org/fr/fiche-publication/31319-fr-Politiquesnationales%20 RECUEIL DE BONNES
en%20mati%C3%A8re%20de%20transpor t%20multimodal%20de%20 PRATIQUES
marchandises%20et%20de%20logistique
Treize fiches d’information sur les
Circulation des poids lourds sur autoroutes (enjeu B.4.2) bonnes pratiques ont été produites
et bonnes pratiques en matière de transport routier à partir des connaissances et des
de marchandises éco-énergétique (enjeu B.4.3) relations des membres. Ces fiches
mettent en lumière les projets, les
Un second rapport de 65 pages présente les travaux sur La circulation des poids initiatives et les politiques des pays
lourds sur autoroutes pour un transport de marchandises durable, plus sûr et membres pour accroître l’efficacité
plus économe en énergie. Il est disponible dans les langues de travail de PIARC de leurs systèmes de transport de
(anglais, français et espagnol). L’exploitation des autoroutes et le rendement marchandises.
énergétique des poids lourds ont été étudiés.
L’Autriche, la Belgique, le Canada,
Les membres du comité ont mis en commun de nombreuses compétences. Seize la République tchèque, la Finlande,
pays ont répondu à un questionnaire sur les programmes de transport de fret, l’Italie, le Japon, la Norvège, la Suisse et
de logistique et d’occupation des sols, les stratégies de gestion et d’utilisation de les États-Unis ont fourni des exemples
l’énergie, et les mesures pour atteindre les objectifs d’amélioration du transport de bonnes pratiques sur divers sujets.
de marchandises. Huit pays ont fait part de leur retour d’expérience et bonnes
pratiques. Le comité a aussi produit des fiches
d’information sur les taxes poids lourds,
Le rapport traite de la circulation des poids lourds sur autoroutes et voies rapides, les véhicules de grande capacité, les
pour un transport de marchandises performant et respectueux de l’environnement, programmes nationaux de fret routier,
plus sûr et énergétiquement efficace. Il propose des mesures politiques innovantes le contrôle des vitesses dans les zones
pour améliorer l’efficacité de la logistique et répondre à des problèmes aussi divers de chantiers, la collecte de données à
que les embouteillages, le manque de capacité, l’insécurité routière, les émissions l’aide des STI, le partage des données
de gaz à effet de serre et de polluants, le bruit et les vibrations. Il présente des sur le mouvement des camions, le
technologies de pointe, comme les TIC, les STI, l’IoT, la circulation en peloton développement des terminaux et aires
des poids lourds, les véhicules de grande capacité, les carburants alternatifs, de stockage privés intermodaux, et les
l’électrification, le choix optimal des itinéraires, etc. mesures d’encouragement au report
modal de fret vers le rail.
• Un court article a été publié dans le magazine Routes/Roads n° 383 (page 54).
• Le rapport est disponible en versions anglaise et espagnole à l’adresse • Le recueil Les bonnes
suivante : https://www.piarc.org/fr/fiche-publication/31308-fr-La%20 pratiques en matière

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 19


ACTUALITÉ Communication
de politiques de transport multimodal de marchandises
et de gestion des poids lourds sur les autoroutes est
disponible à l’adresse https://www.piarc.org/en/activities/
PIARC-Directory-Technical-Reports. (version anglaise).

SÉMINAIRES ET ATELIERS

Deux séminaires ont été organisés dans des pays à pays


à revenu faible ou intermédiaire, favorisant les échanges
d’expériences avec les régions d’accueil. Ils ont permis
de renforcer la participation des membres issus des pays
en développement et en transition, qui rencontrent des
difficultés à participer régulièrement aux réunions du CT.
Illustration 5 - Terminal maritime automatisé
Le premier séminaire, organisé à Mexico en coopération Hambourg Altenwerder en Allemagne © HHLA
avec l’AMIVTAC et le SCT, s’est déroulé du 29 au 31 mars
2017, dans le cadre du séminaire international Logistique et
routes. Près de 100 experts y ont assisté. Des thématiques
s’inscrivant pleinement dans les missions du Comité y ont
été abordées :
,
• Politiques logistiques et transport multimodal,
• Gestion des camions sur les autoroutes
• Utilisation efficace de l’énergie dans le transport de
marchandises.

Ce séminaire a permis d’échanger connaissances et


expériences avec les experts internationaux et nationaux
d’Amérique latine.
Illustration 6 - Système d’information pour le stationnement
des poids lourds en Autriche © ASFINAG)
• Synthèse du séminaire : https://www.piarc.org/fr/activites/
Actes-Seminaires-Internationaux-PIARC/Seminaires-
Internationaux-AIPCR-2017/Seminaire-International-
Logistique-et-Routes-Mexico-Mexique-Mars-2017
• Vidéo du séminaire : https://www.youtube.com/
watch?v=fRgwwoDfJXs

Le deuxième séminaire Transport routier intégré et


mobilité s’est tenu au Cap, en Afrique du Sud, du 5 au 7
novembre 2018. Il a été organisé conjointement avec les CT
B.1 Exploitation des réseaux routiers/Systèmes de transport
intelligent et B.3 Multimodalité durable dans les aires urbaines,
en coopération avec SANRAL. 120 experts y ont participé. Illustration 7 - Véhicule routier de grande capacité au Canada
© https://www.mississauga.com/news-
Des séances se sont tenues sur : story/3154276-long-trucks-hit-the-road

• Écologisation du transport de marchandises (débat),


• Infrastructure intelligente multimodale,
• Coexistence efficace entre mobilité urbaine et logistique
urbaine
• Enjeux réglementaires et outils de conformité pour les
personnes et le transport de marchandises.

Présentations du séminaire : https://www.piarc.org/fr/


activites/Actes-Seminaires-Internationaux-PIARC/Seminaires-
Internationaux-AIPCR-2018/Seminaire-International-
Transport-Routier-Integre-Mobilite-Le-Cap-Afrique-du-Sud- Illustration 8 - Visite technique d’un terminal intermodal
Novembre-2018 ferroviaire/routier lors du séminaire de Mexico

20 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Communication ACTUALITÉ

Récapitulatif du jour 1 : https://www.


youtube.com/watch?v=yoZR6R-cUuI
Récapitulatif du jour 2 : https://www.
youtube.com/watch?v=vJXctrbBtMM

Outre les deux séminaires, le comité a


coorganisé deux ateliers.

Le premier atelier a été organisé


dans le cadre de la Conférence
internationale sur le pesage en marche
(ICWIM7), avec la Société Internationale
pour le pesage en marche (ISWIM),
à Foz do Iguaçu au Brésil, les 7 et
8 novembre 2016, sur le thème
Politiques multimodales et transport
Illustration 9 - Débat sur l’écologisation du transport de
marchandises lors du séminaire en Afrique du Sud routier de marchandises durable, sûr
et économe en énergie. Cinq séances
ont été organisées ou coorganisées par
le CT B4, avec plus de 20 présentations
sur les sujets suivants :

1. Amélioration de l’éco-efficacité du
transport de marchandises,
2. STI et solutions de pesage en marche
pour les poids lourds et suivi de la
circulation sur les autoroutes,
3. Politiques de fret multimodal pour
un transport de marchandises plus
efficace et plus durable,
4. Livraisons hors heures d’ouverture
pour un transport de marchandises
plus efficace et plus durable en
zones urbaines
Illustration 10 - Conférence et atelier ISWIM/PIARC au Brésil en novembre 2016 5. Impact des poids lourds sur les
infrastructures.

Les séances sur le transport de


marchandises (1, 3 et 4) ont offert
des opportunités d’échanges de
connaissances et chaque pays a pu
mieux appréhender les enjeux par
sujet, en différenciant les cas des pays
à revenu élevé, intermédiaire ou faible.
Les séances conjointes (2 et 5) ont
porté sur la qualité des données et
leur utilisation dans le cadre des STI, le
suivi de la circulation sur autoroute et
l’impact des charges sur l’infrastructure.
La conférence ICWIM7/PIARC a accueilli
plus de 250 participants, dont une
moitié de brésiliens.

Les actes de l’atelier peuvent être


téléchargés à l’adresse http://
is-wim.org/icwim7/doc/icwim7_
bookproceedings.pdf

Illustration 11 – Membres du CT B4 Transport de marchandises à Abu Dhabi

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 21


ACTUALITÉ Communication
Le deuxième atelier, organisé La séance prospective 13 Transport du comité garantit une poursuite
conjointement par l’ANAS routier de marchandises à longue cohérente de ses activités. Le travail
et PIARC à Rome, s’est tenu distance a également été organisée démarre ainsi dans la continuité
le 13 octobre 2017. Plus de par le CT B.4 et s’est déroulée en deux et la participation de membres à
250 experts, y compris le président parties : plusieurs cycles est un atout pour eux
de PIARC, ont échangé sur le thème et le comité. Les nouveaux membres
Conduite connectée et automatisée 1. Exploitation efficace et réglementaire apportent des perspectives neuves qui
- Le transport des passagers et des des poids lourds sur autoroutes enrichiront les futurs rapports.
marchandises dans le futur. 2. Transport routier de marchandises
à longue distance durable et Lors du nouveau cycle, le comité
L’attention portée à la fois sur écologique. Les membres du poursuivra son travail collaboratif
le transport de personnes et de CT B4 ont assuré la moitié des impliquant activement tous ses
marchandises a reflété la tendance présentations et l’animation des deux membres. Il répondra à l’objectif
émergente à considérer le système de parties. Les questions des véhicules majeur de PIARC de prendre en compte
transport dans sa globalité et non de à grande capacité, de la circulation les attentes des pays quel que soit leur
façon segmentée. Les présentations en peloton, du stationnement des niveau de revenu.
ont été ciblées sur le transport de poids lourds et de l’écologisation du
marchandises intelligent, innovant et transport de marchandises ont été Le comité renforcera sa collaboration
l’évolution de la logistique urbaine. abordées. avec d’autres organisations et d’autres
comités techniques de PIARC. Certains
Des informations supplémentaires sont membres se sont déjà portés candidats
SÉANCES ET ATELIERS disponibles à l’adresse https://www. pour la réalisation de cet objectif.
ORGANISÉS À L’OCCASION piarc.org/fr/activites/Congres-Mondiaux- Le comité continuera à soutenir
DU CONGRÈS MONDIAL DE Route-PIARC/XXVIe-Congres-Mondial- le partage de connaissances et la
LA ROUTE (PIARC) À ABU Route-Abou-Dhabi-2019. communication.#
DHABI

Le comité B4 a organisé ou coorganisé LEÇONS TIRÉES POUR LE


quatre séances au 26e congrès mondial CYCLE ACTUEL
de la route, à Abu Dhabi, du 6 au 10
octobre 2019. Les travaux du CT ont été Les travaux effectués au cours du
présentés lors de la séance dédiée le cycle précédent sont utiles pour les
mercredi après-midi. experts du transport de marchandises
et pour ceux qui travaillent sur une
Le comité a coorganisé un atelier sur approche holistique du système de
le pesage en marche (WS1) avec le CT transport. En effet, le transport routier
C3 (Ponts) et ISWIM le lundi matin, en de marchandises ne doit pas être
deux parties : traité de façon isolée, dans la mesure
où il utilise le plus souvent les mêmes
1. Données du pesage en marche infrastructures que celles du transport
pour l’évaluation et la gestion des de personnes.
infrastructures
2. Pesage en marche pour l’optimisation Le renouvellement des mandats de
d’un système de transport de plusieurs membres et responsables
marchandises. Cet atelier a permis
d’identifier les besoins en termes
de données de poids et leurs
applications à l’infrastructure et au RÉFÉRENCES
transport de marchandises. L’atelier (disponibles en version anglaise)
comprenait pour chaque partie une
série de brèves présentations et un [1] PIARC: National Policies for Multi-modal Freight Transport and Logistics,
débat. rapport 2019R24EN, 2019
[2] PIARC: Truck-Traffic on Highways for Sustainable, Safer, and Higher Energy
Le CT B4 a contribué à l’organisation de Efficient Freight Transport, rapport 2019R23EN, 2019 (rapport principal)
la séance sur le projet spécial Système [3] PIARC: Truck-Traffic on Highways for Sustainable, Safer, and Higher Energy
de routes électriques, le mardi après- Efficient Freight Transport, rapport 2019A23EN, 2019 (annexe)
midi. Des membres du CT B4 y ont [4] PIARC: Good Practices on Multi-Modal Freight Transport Policies and Truck
présenté les travaux menés en Norvège Management on Highways, rapport 2018CS02EN, 2019
et en France.

22 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


DOSSIERS

Sécurité et prolongation de la durée de vie des


ponts routiers
Kiyohiro Imai, Directeur du service de planification, Honshu Shikoku Bridge Expressway Company Ltd. (Japon)

L es ponts routiers constituent une infrastructure fondamentale de tous les réseaux routiers
nationaux, régionaux et locaux. De nombreux pays développés ont massivement investi
dans l’infrastructure routière, notamment dans les ponts, lors de la période de croissance
économique. Ils sont aujourd’hui confrontés au problème du vieillissement de ces ponts. Les
pays en développement ont effectué ces investissements plus récemment et seront également
confrontés à ces problèmes de vieillissement.

Kiyohiro Imai

Par le passé, les inspections et l’entretien futurs étaient Pour les gestionnaires de ponts, les déficiences des ouvrages
rarement pris en compte dans la conception des ponts représentent une réelle préoccupation. Ces déficiences sont
routiers. Ainsi, la conception était essentiellement basée sur dues à la dégradation des ponts sous l’effet du vieillissement,
la satisfaction des « exigences initiales » du pont, notamment des accidents, etc. Elles sont évaluées à l’aide de l’indice
la viabilité et la sécurité de l’ouvrage et, dans un second d’état des ponts. Les gestionnaires de ponts doivent prendre
temps, sur la « minimisation du coût de construction initial ». en compte l’adaptation de leur patrimoine aux exigences
Cette approche a souvent entraîné des coûts d’entretien de conception actuelles imposées par notre société et
élevés par la suite. Par conséquent, les pratiques en faveur de notre environnement : nombre de voies, capacité portante,
ponts durables s’inscrivent désormais de façon plus résolue fréquence des inondations, niveau de service, etc. Compte
dans la conception, de même que la prise en compte de la tenu de tous ces besoins, ils doivent décider ce qu’ils doivent
performance future des ponts (vis-à-vis des inspections, de faire à un moment donné : maintenir le pont dans son état
l’entretien et du remplacement des différents éléments). Si ce actuel, réaliser des travaux de remise en état limités, réaliser
principe est aujourd’hui universellement accepté, il n’est pas une remise en état importante ou construire un nouveau
encore bien défini et documenté. Il est donc nécessaire de pont.
documenter les expériences et les pratiques en vue d’inclure
les inspections et l’entretien futurs dans une perspective de Sur la base de ce constat, le Comité technique D.3 Ponts
conception standard. routiers de PIARC a étudié trois grands thèmes entre 2016 et
2019 :
Dans la plupart des pays, les gestionnaires de ponts évaluent
régulièrement les dommages et détériorations des ouvrages 1. Conception des ponts facilitant les opérations d’inspection
pour assurer la sécurité des usagers. Ils identifient sur ces et d’entretien
ponts en service des dommages ou détériorations liés 2. Considérations techniques et économiques des méthodes
à deux circonstances principales : tout d’abord ceux de réhabilitation des ponts
résultant de longues périodes de service et, dans un 3. Techniques d’inspection et d’évaluation des dommages.
deuxième temps, ceux qui apparaissent instantanément.
Les « déclencheurs » ou causes de ces dommages et Ces thèmes sont synthétisés et présentés dans les articles
détériorations sont divers : impacts environnementaux, de ce numéro. Les principales informations relatives à ces
augmentation des surcharges, dégivrages, phase de trois thèmes ont été obtenues auprès de différents pays,
conception insuffisamment détaillée, caractéristiques et et les résultats présentés ont été tirés de ces informations.
matériaux de construction médiocres, épisodes de charge De plus, pour favoriser l’échange de connaissances et d’idées
intense, impact des catastrophes naturelles, défauts de à l’échelle mondiale, nous invitons toutes les organisations
construction et erreur humaine. Parfois, la découverte de intéressées par ces sujets à enrichir ces articles en en
dommages et détériorations peut entraîner la fermeture du proposant de semblables.#
pont, une restriction de la circulation ou une restriction de
charge. Ceci nécessitera des techniques d’évaluation des
dommages et des calculs de capacité portante. S’ensuivront
les travaux curatifs nécessaires à la remise en service du pont.

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 23


DOSSIERS

Amélioration de l’équipement d’accès sur les


poutres des ponts Honshu-Shikoku
Masato Matsuba, Responsable adjoint de la section Installations mécaniques, Naruto Operation Center
Yuki Kishi, Directeur général adjoint, Naruto Operation Center
Yoshihiro Asakura, Directeur de la division Installations mécaniques
Toshihiro Matsuo, Responsable de la section Installations mécaniques, Naruto Operation Center
Collaborateurs de Honshu-Shikoku Bridge Expressway Company Limited, Japon
Illustrations © Auteurs

Masato Matsuba Yuki Kishi Yoshihiro Asakura Toshihiro Matsuo

L es ponts Honshu-Shikoku (ou HSB pour Honshu-Shikoku Bridges) forment un complexe de 17 ponts de longue
portée surplombant les détroits, dont les poutres se situent à une altitude élevée au-dessus du niveau de la
mer. Honshu-Shikoku Bridge Expressway Co., Ltd. gère l’entretien des ponts de longue portée selon une approche
préventive : les mesures appropriées sont mises en œuvre avant toute évolution des détériorations. L’inspection
de routine de la poutre de pont à haute altitude et les travaux de peinture de réparation requièrent une sécurité
sans faille et une efficacité optimale des opérations. Il est donc essentiel de pouvoir s’approcher au plus près de
chaque élément de la poutre. Ces conditions ont entraîné la modification des nacelles d’entretien et l’extension de
leur portée d’accès. Cet article décrit le développement technique des nacelles d’entretien du pont Ohnaruto et
notamment l’extension de leur portée d’accès à la poutre de pont.

PRÉSENTATION DES NACELLES D’ENTRETIEN DU PONT OHNARUTO

Le pont Ohnaruto, l’un des ponts reliant Honshu à Shikoku (HSB), est un pont suspendu d’une longueur de 1 629 m
surplombant le détroit de Naruto (illustration 1). Le pont Ohnaruto est le seul des ponts HSB faisant face à la fois à la mer
intérieure de Seto et à l’océan Pacifique. Il se situe dans un environnement extrêmement corrosif. La poutre de rigidité du
pont est située à une altitude de 40 m au-dessus du niveau de la mer et se compose de montants en treillis. Dans la poutre
de rigidité du pont, 9 nacelles d’entretien au total, dont 4 pour la poutre intérieure (MVI) et 5 en U pour la poutre extérieure
(MVO), ont été installées à la fin de la construction du pont en 1985. Elles constituent une plateforme d’entretien mobile et
intégrée pour chaque pont. Elles ont été développées spécifiquement pour garantir un entretien sûr et efficace des poutres
dans un environnement naturel particulièrement hostile (vents violents, particules de sel marin en suspension, etc.).

Illustration 1 - Pont Ohnaruto

24 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Amélioration de l’équipement d’accès sur les poutres des ponts Honshu-Shikoku DOSSIERS

Illustration 2 - MVI (pont Ohnaruto) Illustration 3 - MVO (pont Ohnaruto) Avant l’amélioration

Le bogie du MVI court sur la poutre de roulement installée perpendiculaires à l’axe du pont (illustration 2). Cependant, le
dans la poutre triangulée le long de l’axe du pont. La MVI ne peut pas accéder à la face inférieure de la membrure
plateforme de travail aérienne permet d’accéder à la centrale. Par ailleurs, en l’absence de poutre de roulement au
surface interne de la poutre de pont en se déplaçant niveau du pylône principal, le MVI ne peut pas se déplacer
horizontalement et verticalement dans les directions sur toute la portée. Le MVO est suspendu sur la poutre de

Illustration 4 - Exemples d’éléments corrodés de la poutre de rigidité (pont Ohnaruto)

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 25


DOSSIERS Amélioration de l’équipement d’accès sur les poutres des ponts Honshu-Shikoku

roulement installée sur la membrure élevé (environ 82 %). Une nouvelle méthode d’accès pour les ponts à faible « taux
inférieure de la poutre triangulée, d’accessibilité » est actuellement à l’étude [1].
le long de l’axe du pont. La surface
inférieure et les surfaces latérales de la
poutre de pont sont accessibles à l’aide PROBLÈMES POSÉS PAR L’ENTRETIEN DE LA POUTRE
du MVO (illustration 3). DU PONT OHNARUTO
Cependant, le « taux d’accessibilité » Des travaux de peinture de réparation ont été menés sur l’ensemble de la
du pont Ohnaruto (construction poutre du pont Ohnaruto de 1998 à 2004, soit 13 ans après l’ouverture du pont.
achevée en 1985 au début du projet Cependant, environ 3 ans après ces travaux, la présence de zones de corrosion
de construction des ponts HSB) était locales a été confirmée à différents emplacements : appareils d’appui du
faible (environ 40 %) au moment de tablier métallique, éclisses et boulons de raccordement, ferrure, capot de trou
l’achèvement des travaux. d’homme sur la membrure centrale, élément d’ancrage du câble porteur, etc.
(illustration 4).
Le « taux d’accessibilité » est défini par
l’équation suivante. Les travaux de peinture de réparation de ces éléments corrodés requièrent un
accès rapproché. Or, environ 60 % des appareils d’appui corrodés du tablier
Taux d’accessibilité (%) = (Zone de la métallique étaient inaccessibles via les coursives techniques et nacelles d’entretien
surface extérieure de la poutre de pont existantes.
à portée de main de l’inspecteur via
les coursives techniques et les nacelles L’accès aux éléments corrodés a donc nécessité l’installation d’échafaudages
d’entretien)/(Surface extérieure totale suspendus supplémentaires. Cependant, l’installation et la suppression de ces
de la poutre de pont) échafaudages suspendus entraînent différents inconvénients : chute potentielle
d’éléments des échafaudages, coût de construction élevé des échafaudages, etc.).
En revanche, le taux d’accessibilité Il était donc souhaitable d’envisager des méthodes d’accès sûres et économiques
du pont Akashi Kaikyo (construction pour les opérations d’entretien.
achevée en 1998, à la fin des travaux de
construction des ponts HSB) est assez

Illustration 5 - Vue tridimensionnelle (Nacelles d’entretien après amélioration)

26 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Amélioration de l’équipement d’accès sur les poutres des ponts Honshu-Shikoku DOSSIERS

Illustration 6 - Amélioration de la nacelle d’entretien (MVI)

EXTENSION DE LA PORTÉE D’ACCÈS appareils d’appui du tablier métallique (illustrations 6A


DES NACELLES D’ENTRETIEN et 6B) ;
AUTOUR DE LA POUTRE DE PONT • la structure et la robustesse du MVI ont été revues. Ses
montants ont été renforcés et son poids a été réduit. Ainsi,
Nous avons évalué plusieurs projets sur la base des critères le MVI modifié peut désormais accéder à la face inférieure
suivants : amélioration du « taux d’accessibilité », sécurité de la membrure centrale (illustration 6C) ;
des opérations d’entretien, amélioration de l’efficacité du • de nouvelles poutres de roulement pour le MVI ont été
travail et réduction du coût d’entretien de la poutre à long installées entre les travées adjacentes au pylône principal,
terme. Nous avons retenu le projet répondant le mieux permettant au MVI de parcourir toute la longueur de la travée.
aux objectifs d’amélioration des nacelles d’entretien. Cette installation a permis de réduire le nombre de MVI.
L’illustration 5 présente une vue tridimensionnelle des
nacelles d’entretien améliorées. Ce projet permettra Les points d’amélioration du MVO sont les suivants :
d’atteindre un taux d’accessibilité de plus de 90 %.
• un appareil de levage aérien articulé portant le plancher
Les points d’amélioration du MVI sont les suivants : de travail à une hauteur d’environ 10 m est installé au
centre de la plateforme inférieure. Le MVO modifié peut
• la largeur de plancher de la plateforme suspendue ainsi accéder au côté arrière de la coursive technique,
(initialement 0,9 m) a été portée à la largeur de la à la poutre de roulement du MVI et à la poutre de
plateforme de travail aérienne transversale. Par renforcement (illustration 7A) ;
conséquent, la distance d’approche entre la membrure • les cadres latéraux des deux côtés de la plateforme
centrale et la plateforme de travail aérienne est passée inférieure ont été retirés, et des appareils de
de 0,8 m à 0,1 m. Le MVI modifié donne ainsi accès aux levage aériens articulés portant le plancher

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 27


DOSSIERS Amélioration de l’équipement d’accès sur les poutres des ponts Honshu-Shikoku

Illustration 7 - Amélioration de la nacelle d’entretien (MVO)

de travail à une hauteur d’environ 17 m ont été installés. Ainsi, il est désormais L’illustration 8 représente le coût
possible d’accéder aux éléments d’ancrage des câbles porteurs et au côté arrière d’entretien de la poutre à long terme
du tablier métallique (illustration 7B). avec la méthode améliorée divisé
par celui encouru avec la méthode
existante par année écoulée. Elle révèle
ÉVALUATION DE L’EFFICACITÉ ÉCONOMIQUE que la méthode améliorée devient plus
économique que la méthode existante
Le coût d’entretien de la poutre à long terme (travaux de peinture de réparation environ 8 ans après l’amélioration
et inspections de routine) a été calculé pour les deux méthodes suivantes, pour et qu’elle doit entraîner une baisse
chaque année écoulée. significative du coût d’entretien.

1. Méthode existante [coût d’exploitation des nacelles d’entretien + coût de


l’échafaudage suspendu (coût de location + coût de construction, etc.) + coût CONCLUSION
des inspections de routine, etc.]
2. Méthode améliorée [coût de l’amélioration des nacelles d’entretien + coût L’entreprise cherche à gérer ses
d’exploitation des nacelles d’entretien + coût des inspections de routine, etc.] ponts efficacement via une approche
d’entretien préventif avec, pour objectif,
d’offrir des services routiers fiables pour
plus de 200 ans. De nombreuses zones
du pont Ohnaruto étaient inaccessibles
avec les coursives techniques et les
nacelles d’entretien existantes. Le « taux
d’accessibilité » était d’environ 40 %.
Cependant, l’amélioration des nacelles
d’entretien a permis d’atteindre un «
taux d’accessibilité » de plus de 90 %.
L’utilisation des nacelles d’entretien
modifiées pour les inspections et les
travaux de peinture de réparation
peut également entraîner une baisse
significative du coût d’entretien de la
Illustration 8- Estimation du coût d’entretien de la poutre à long terme poutre à long terme par rapport aux
méthodes d’entretien classiques avec
échafaudages suspendus. La procédure
RÉFÉRENCES d’amélioration peut être utilisée pour
d’autres ponts de longue portée
[1] S. Hirota, and T. Matsuo: The improvement of Maintenance Vehicle, composés de poutres triangulées.#
HONSHI TECHNICAL REPORT, Vol.40, No.126, pp.10-17, 2016

28 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


DOSSIERS

Détection du feuilletage et des fissures du béton


à l’aide d’aéronefs sans pilote
Aleš Žnidarič, Maja Kreslin, Andrej Anžlin, Institut national slovène du bâtiment et du génie civil, Ljubljana,
Andarž Krivic, IGEA d.o.o, Ljubljana (Slovénie)
Illustrations © Auteurs

L es aéronefs sans pilote (UAV) ou


drones permettent d’observer
des sites et des parties de structures
difficiles d’accès. Ils se révèlent très
précieux au moment d’inspecter
des ponts hauts de grande portée,
opération qui exigerait sinon des
véhicules spéciaux, des appareils Aleš Žnidarič Maja Kreslin Andrej Anžlin Andarž Krivic
de levage ou des cordistes
professionnels. En équipant le drone
de capteurs infrarouges et de lentilles haute définition l’inspecteur. Elle ne permet pas non plus de déceler les défauts
à grande distance focale, il est possible d’étendre sa cachés à l’intérieur de la structure, à moins qu’ils ne soient
portée à la recherche non destructive de dommages. Cet suffisamment avancés pour être visibles en surface. L’inspection
article présente les résultats d’une étude sur l’utilisation peut gagner en précision grâce à des méthodes d’essais non
de drones à cette fin. L’étude a d’abord été réalisée dans destructifs (END). Les UAV équipés de capteurs ultrasoniques
des conditions de laboratoire contrôlées, puis sur un et de caméras optiques et thermiques comptent parmi les
pont de référence. Elle s’est intéressée à deux indicateurs solutions de pointe disponibles dans ce domaine. Ils sont
de performance destinés à la définition optimale des potentiellement capables de fournir des informations plus
dommages de ponts en béton, à savoir l’ampleur et précises et opportunes au service d’une gestion efficace des
la localisation de zones feuilletées, et la position et ponts, viaducs et autres structures [1]. Une étude a été menée
l’ouverture des fissures. Les résultats montrent une dans un souci d’amélioration de la détection de deux types de
importante valeur ajoutée par rapport aux inspections dommages structuraux critiques affectant la durabilité et la
visuelles actuelles, principalement en termes de sécurité des ponts en béton : le feuilletage et les fissures [2].
cohérence des informations, qui ne reposent plus sur
les connaissances et les compétences de l’inspecteur.
DÉTECTION DU FEUILLETAGE DU BÉTON
L’inspection visuelle est la méthode d’étude des ponts la plus
répandue et la première étape de leur évaluation structurale. Plusieurs chercheurs se sont penchés sur la détection du
Elle se limite, toutefois, à une analyse qualitative subjective feuilletage du béton à l’aide d’une caméra thermique [3, 4].
qui dépend du niveau de connaissance et d’expérience de Le concept de thermographie infrarouge repose sur le fait que
les vides, défauts et anomalies internes au béton altèrent les
propriétés de transfert de chaleur de la structure (illustration 1).
Les caméras thermiques sont capables de détecter ces défauts
en mesurant le rayonnement émis par la surface du béton.
Les dommages ou irrégularités se reflètent dans la mesure du
gradient thermique, c’est-à-dire la différence de température
entre la partie endommagée et les parties adjacentes de la
structure (illustration 2).

L’étude destinée à repérer le feuilletage du béton à l’aide


d’une caméra infrarouge (IR) a débuté par la construction
de trois blocs de béton (illustration 3). Chaque bloc intégrait
deux morceaux de mousse en polyéthylène expansé de 4 mm
d’épaisseur afin de simuler le feuilletage d’une couche de
béton. Le béton recouvrait la mousse sur 1 cm d’épaisseur
pour le bloc A et 3 cm pour les blocs B et C. Le bloc C
Illustration 1 – Schéma de l’émission d’énergie infrarouge comportait, en outre, un treillis soudé pour béton
par le béton au quotidien [1] armé directement sous la mousse.

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 29


DOSSIERS Détection du feuilletage et des fissures du béton à l’aide d’aéronefs sans pilote

Illustration 2 – Détection d’un feuilletage du béton dans une colonne Illustration 3 – Coulage de blocs de test avec inserts de mousse

Chauffage progressif à l’aide de lampes été surveillées en continu pendant 24 heures (illustration 7).
aux halogénures L’illustration 7 montre également des images thermiques en
quatre points caractéristiques pendant le refroidissement.
Dans un premier temps, les blocs de béton ont été chauffés Comme escompté, une moindre épaisseur d’enrobage de béton
en laboratoire à l’aide de lampes aux halogènes métalliques et l’ajout d’une armature ont amélioré la visibilité des zones
d’une densité de flux de 800 W/m2 (illustration 4). Des images feuilletées, surtout entre 6 heures et juste avant midi. De 22 heures
ont ensuite été capturées par la caméra IR toutes les 30 et 6 heures, l’emplacement et la taille de ces zones dans les trois
secondes, et la température de surface et le flux lumineux blocs de test ont également été mesurés avec précision. Entre-
ont été mesurés. Tous les blocs ont été chauffés puis refroidis temps, elles étaient nettement plus difficiles à détecter. Au cours
pendant trois heures. L’illustration 5 montre l’évolution de du test, la température de l’air oscillait entre 17 et 22 °C.
la température de surface du bloc C, ainsi que des images
thermiques en quatre points caractéristiques.
DÉTECTION DE FISSURES DANS LE BÉTON EN
Pendant le chauffage, l’emplacement et la taille des inserts de LABORATOIRE
mousse de feuilletage inférieurs et supérieurs ont été détectés
dans les trois blocs de béton. Après environ 5 minutes de La détection de fissures importantes dans du béton
refroidissement, cette identification s’est compliquée. Au bout fait appel soit au jugement personnel d’un inspecteur
de 30 minutes, les zones feuilletées des blocs A et B étaient dans le cadre d’un processus chronophage, soit à un
difficiles à repérer, et passé 50 minutes, elles n’étaient plus système de surveillance dédié. Par conséquent, l’existence
visibles. À ce moment-là, celles du bloc C étaient, elles, encore d’une méthode plus rapide et plus fiable améliorerait
perceptibles. À l’issue de 90 minutes de refroidissement, ces considérablement l’efficacité et la cohérence de la procédure
zones n’apparaissaient plus dans aucun des blocs. d’inspection. Les UAV pourraient se révéler pratiques à cette
fin. Ils ont donc été au cœur de la deuxième partie de l’étude.
Chauffage / refroidissement en conditions Leur efficacité dans la détection des fissures a d’abord été
environnementales examinée en laboratoire sur un bloc de béton. Des fissures
de 0,1 à 0,5 mm de largeur ont été créées hydrauliquement
Dans un deuxième temps, les blocs ont été déplacés à (illustration 8). Cette largeur a été définie comme l’ouverture
l’extérieur et exposés au chauffage et au refroidissement moyenne mesurée par des systèmes de mesure de
naturels (illustration 6). La température et la densité de flux ont déplacement inductif en quatre points sur leur longueur.

Illustration 4 – Chambre thermique éclairant artificiellement un échantillon de béton et UAV équipé de caméras infrarouges

30 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Détection du feuilletage et des fissures du béton à l’aide d’aéronefs sans pilote DOSSIERS

Illustration 5 – Consignation de la température de surface Illustration 6 – Blocs de béton exposés au chauffage


et images thermiques caractéristiques du bloc d’une épaisseur et au refroidissement naturels
d’enrobage de béton de 3 cm

Les analyses préliminaires ont permis d’établir les paramètres


suivants : résolution d’image de 5 300 × 4 000 pixels au
format RAW, distance de relevé de 7,50 m et distance focale
de 175 mm. La lumière naturelle a été remplacée par des
réflecteurs de lampes aux halogénures de 1 250 à 1 350 lux.

L’UAV ne pouvait pas voler dans le laboratoire. Les mesures


des fissures ont donc été réalisées de manière statique
depuis différentes positions. Le modèle 3D de chaque bloc
a ensuite été créé à partir des images. Les résultats ont
révélé qu’il était possible de repérer les fissures de 0,1 mm de
largeur, mais que cette ouverture était difficile à mesurer. Les
Illustration 7 – Mesure de la température et de la densité du flux lumineux fissures d’au moins 0,2 mm ont, quant à elles, été mesurées
sur 24 heures, accompagnée de quatre images thermiques caractéristiques avec une précision raisonnable. L’illustration 9 montre une
des blocs de béton
fissure de 0,3 mm de largeur à la position définie, mesurée
à 0,2 mm dans le modèle 3D.

DÉTECTION DE DOMMAGES SUR UN PONT


TEST

Les essais en laboratoire ont été suivis de la vérification de


la possibilité de détecter des dommages à l’aide d’un UAV
sur un passage souterrain à dalle intégrale de 8,90 m de
long. Le système de capture des images se composait d’une
caméra munie d’un objectif de 45 à 175 mm surmontée
d’une caméra thermique d’une résolution de température de
20 mK, de capteurs ultrasoniques pour l’acquisition précise
d’un nuage de points et d’un capteur infrarouge balayant
Illustration 8 – Bloc de béton utilisé pour la simulation de fissures
au-dessus de l’UAV. Tous les capteurs ont été géolocalisés en
temps réel à partir de la station au sol et de l’UAV.

Les images obtenues ont servi de source de données à un


modèle 3D représentant un espace vectoriel mathématique
au sein d’un système de coordonnées défini avec précision.
Ce modèle a été converti au format vectoriel .dwg, dans
lequel les bords de la structure et l’emplacement des fissures,
zones de feuilletage du béton et barres d’armature visibles
ont été repérés (illustration 10).

La plupart des fissures ont été reconnues sur le plâtre


et ne présentaient aucune pertinence structurale.
Illustration 9 – Modèle 3D du bloc de béton avec Lors de la vérification à l’aide d’une procédure
une fissure induite de 0,3 mm de largeur conventionnelle de détection des fissures via

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 31


DOSSIERS Détection du feuilletage et des fissures du béton à l’aide d’aéronefs sans pilote

Illustration 10 – Modèle 3D du pont test au format .dwg A

une jauge, seules deux fissures de plus de 0,2 mm de largeur


ont été décelées. L’UAV les a également détectées.

Les images superposées des caméras optiques et thermiques


ont révélé les zones feuilletées. L’illustration 11A, est une image
thermique d’une culée. L’illustration 11B, montre, en rouge, les
résultats de la procédure classique de détection du feuilletage,
provoqué par des coups de marteau répétés sur la surface
du béton. L’aboutissement de ce travail chronophage repose
essentiellement sur la constance de l’inspecteur des ponts. Les
B
deux photos comparées offrent des résultats similaires, malgré
les graffitis qui ont compliqué l’utilisation de la caméra IR car les
couleurs rayonnent la chaleur différemment. Illustration 11 – Zones de feuilletage de la culée repérées par la caméra IR
(en haut) et par la technique des coups de marteau (en bas)

CONCLUSION
d’inserts en mousse. Des tests de thermographie infrarouge
Le présent article décrit les résultats d’une étude de la détection ont été effectués pendant le chauffage et le refroidissement de
non destructive de dommages – fissures et feuilletage du béton la surface du béton, en laboratoire et en extérieur. Les résultats
– sur des ponts à l’aide d’un UAV. La recherche de feuilletage ont montré qu’une faible épaisseur d’enrobage et une armature
a démarré par la construction de trois blocs de béton dotés amélioraient la visibilité des zones feuilletées.

La visibilité des fissures a d’abord été étudiée en laboratoire,


RÉFÉRENCES où des actionneurs hydrauliques ont induit des fissures de
0,1 à 0,5 mm de largeur dans un bloc de béton. Les fissures
[1] G. Washer, “Advances in the use of thermographic de 0,1 mm étaient reconnaissables visuellement, et celles de
imaging for the condition assessment of bridges,” plus de 0,2 mm ont été mesurées à partir du modèle 3D avec
Bridge Structures, vol. 8, no. 2, pp. 81-90, 2012. une précision raisonnable. Enfin, la possibilité de détecter
[2] G. Morgenthal, N. Hallermann, J. Kersten, J. des fissures et le feuilletage du béton à l’aide d’un UAV a été
Taraben, P. Debus, M. Helmrich and V. Rodehorst, vérifiée sur un pont à dalle intégrale existant.
“Framework for automated UAS-based structural
condition assessment of bridges,” Automation in Les résultats montrent une importante valeur ajoutée par
Construction, vol. 97, no. 1, p. 77–95, 2019. rapport aux inspections visuelles actuelles, principalement
[3] J. H. Rocha and Y. V. Povoas, “Infrared thermography en termes de cohérence des informations, qui ne reposent
as a non-destructive test for the inspection of plus sur les connaissances et la diligence de l’inspecteur. La
reinforced concrete bridges: A review of the state recherche de suivi implique des tests sur d’autres ouvrages
of the art,” Revista ALCONPAT, vol. 7, no. 3, pp. 200- en béton [5], ainsi que l’intégration de l’intelligence artificielle
214, 2017. à l’évaluation des dommages, reposant sur des réseaux
[4] M. Kreslin, A. Anžlin, A. Žnidarič and J. Kalin, “Report neuronaux convolutifs profonds.#
ZAG No. 576/18-620-1. Determination of the
condition of bridges based on modern methods of
remote sensing (in Slovene),” ZAG, Ljubljana, 2018. REMERCIEMENTS
[5] A. Anžlin and A. Žnidarič, “Report 158/16/620-6.
Inspection of the support structure of the VA0175-L Les auteurs expriment leur gratitude à l’organisme slovène
Ravbarkomanda viaduct (in Slovene),” ZAG, en charge des infrastructures pour son soutien financier dans
Ljubljana, 2018. cette étude.

32 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


DOSSIERS

Prise de décision en matière de sécurité des ponts


routiers
Joseph Hartmann, Directeur, Office of Bridges and Structures, Federal Highway Administration, États-Unis
Illustrations © FHWA

D ans la plupart des pays, les gestionnaires de ponts évaluent régulièrement les dommages
et la détérioration des ponts afin d’assurer la performance des structures et donc la sécurité
des usagers et la fiabilité du déplacement des biens et marchandises. Les gestionnaires de
ponts en service découvrent des dommages ou des détériorations dans deux circonstances
principales : d’une part, les dommages ou détériorations apparus sur une plus longue période,
généralement découverts et suivis dans le cadre d’une inspection régulière ou de routine ;
d’autre part, les dommages ou détériorations associés à un événement ou incident ponctuel
et signalés par les usagers, les autorités ou, dans certains cas, les responsables.
Joseph Hartmann

Les dommages ou détériorations apparaissant graduellement Le Comité technique D.3 Ponts de PIARC a déterminé qu’un
sur de plus longues périodes sont généralement causés par questionnaire général et un ensemble diversifié d’études de
les impacts environnementaux, les surcharges fréquentes cas à l’échelle mondiale seraient nécessaires pour atteindre les
ou accrues, les applications de produits de déglaçage, une objectifs de l’étude. En premier lieu, les membres du groupe
conception inadaptée, des matériaux de construction et des de travail ont conjointement établi un projet de processus
spécifications médiocres ou un entretien insuffisant. En voici décisionnel basé sur leurs expériences dans la gestion de la
quelques exemples : sécurité après la découverte de dommages ou détériorations
majeurs de ponts routiers. Les études de cas et réponses au
• corrosion de l’acier, des armatures et des câbles questionnaire ont ensuite été utilisées pour évaluer ce projet.
• fissures dans le béton
• dégradation de la pierre et de la brique Le groupe de travail a reçu des réponses de 14 pays au
• fuites dues à des joints inadéquats ou à des systèmes de questionnaire et, au total, 28 études de cas de 15 pays. Les
drainage mal entretenus résultats de l’évaluation, basés sur les informations collectées,
• fissures de fatigue dues aux charges cycliques ont ensuite été utilisés pour vérifier, réviser et améliorer
• roulements gelés le processus décisionnel envisagé. Par ailleurs, les facteurs
• dégradation des matériaux influant sur la prise de décision et les méthodes d’évaluation
sous-jacentes ont été identifiés. Ils sont brièvement abordés
Les dommages ou détériorations dus à des événements ou dans les sections suivantes de ce document.
incidents sont généralement causés par des charges importantes,
des catastrophes naturelles, des chocs, des défauts de
construction ou une erreur humaine. En voici quelques exemples : FACTEURS D’INFLUENCE
• phénomènes météorologiques extrêmes La formation et l’expérience des ingénieurs impliqués
• inondations ont été identifiées comme facteurs d’influence dans
• tremblements de terre la prise de décisions susceptibles d’affecter la sécurité
• incendies publique. Il n’existe pas de norme ou de diplôme spécifique
• défaillances ou ruptures d’éléments structuraux clés
• chocs de véhicules ou de navires

Ce document présente les résultats d’une étude sur les


processus décisionnels suivis par les autorités publiques
de différents pays du monde pour réagir de façon sûre et
responsable aux situations de dommages ou de détérioration
des ponts routiers. Cette étude a été entreprise par le groupe de
travail 3 du Comité technique D.3 Ponts, de PIARC (Association
mondiale de la Route) au cours du cycle 2016-2019. Elle a abouti
à la production du document de référence qui apporte aux
propriétaires et gestionnaires de ponts une ressource de base
pour identifier les données, processus et facteurs à considérer Illustration 1 - Impact du chargement excessif des véhicules
dans la prise de décision en matière de sécurité [1]. sur un pont aux États-Unis

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 33


DOSSIERS Prise de décision en matière de sécurité des ponts routiers

préparant les ingénieurs à exercer un jugement éclairé politique. Les deux approches sont défendables et l’approche
dans cette prise de décision. Cependant, une formation choisie a probablement autant à voir avec l’expérience des
initiale spécifique constitue souvent la meilleure base sur ingénieurs impliqués qu’avec l’auditoire qui évaluera les
laquelle les fondements de la pratique professionnelle sont réponses. Les décisions sont influencées par le fait de savoir
généralement posés. Les ingénieurs qui ont régulièrement quelle question est posée - probabilité ou possibilité.
appliqué leur formation et leur expérience pour déterminer
le fonctionnement mécanique et les chemins de charges, Enfin, les moyens disponibles pour réagir à une situation
interpréter le comportement ou quantifier les contraintes sont critique ou à une rupture ont également été définis comme
plus enclins à exercer un jugement éclairé. Même si elle n’est facteur d’influence. À tout le moins, ces situations exigent
pas toujours nécessaire, la composante expérimentale des du temps et des déplacements de la part du personnel. En
programmes d’études postdoctorales classiques en ingénierie outre, il est également courant de restreindre ou de fermer
permet de se familiariser avec le domaine de la défaillance un pont et/ou d’établir une déviation temporaire. Selon la
des matériaux, des composants et des systèmes. La délivrance complexité de la question à régler, il peut être nécessaire de
d’un permis d’exercice professionnel peut aussi refléter le faire appel à des experts sous contrat à des fins de conseil ou
niveau de formation et d’expérience d’un ingénieur. pour compléter ou mener des enquêtes. Tous ces efforts et
activités entraînent des coûts directs et/ou indirects. De plus,
L’étendue et la profondeur de l’expérience peuvent également ces coûts sont engagés avant ceux associés à l’ingénierie et à
jouer un rôle important dans la prise de décision de l’ingénieur. la mise en œuvre d’une réparation.
Les ingénieurs ayant des antécédents en conception, en
construction, en inspection et en gestion ont généralement Avant d’entreprendre une enquête approfondie, il convient
acquis un niveau de compréhension et de familiarité avec de réfléchir de manière critique aux informations susceptibles
les typologies de ponts qui leur permet de prendre des d’être produites et à la manière dont ces informations
décisions en temps opportun. Cette familiarisation impacte peuvent influencer une action ou une réparation. Si le
généralement le niveau d’effort, le temps et les coûts associés résultat n’est pas à questionner, l’objectif devrait être de
aux modélisations et analyses rigoureuses ainsi qu’aux activités réduire au minimum le délai jusqu’à ce qu’une réparation
de réparation, de réhabilitation et/ou de reconstruction d’un soit effectuée. Par exemple, si la source de fissuration d’une
pont. Même si l’on peut faire appel à des experts de bien des poutre d’acier n’est pas comprise, mais que la seule solution
façons, les ingénieurs qui possèdent un diplôme d’études consiste à enlever les pointes de fissuration et à créer un
supérieures, un permis professionnel et de l’expérience dans le chemin de charge alternatif (plaque au-dessus des zones
cycle de vie de plusieurs types de ponts routiers sont souvent touchées), une enquête sur l’origine de la fissuration devrait
ceux à qui l’on fait confiance pour approuver ou prendre des au plus être menée parallèlement à l’effort de réparation et
décisions en situation critique. ne pas précéder ou retarder celui-ci.

La disponibilité des données a également été identifiée Dans certaines situations, les réparations peuvent être
comme facteur d’influence dans la prise de décision. retardées ou atténuées par la surveillance d’un défaut.
Lors de la prise de décision en général, plus l’ingénieur Cependant, la surveillance est généralement une solution
dispose de données, mieux c’est. Savoir quel niveau de à court terme qui entraîne des coûts. Si la surveillance est
données est suffisant pour influencer ou soutenir un niveau choisie comme réponse, il convient de veiller à définir ce
correspondant de prise de décision fait partie du jugement qui est surveillé, quels sont les seuils d’action, les mesures à
technique. Savoir quand le niveau de données collectées prendre quand ces seuils sont atteints, qui est responsable
est suffisant pour soutenir une action pertinente tend des mesures et qui communique les résultats.
également à venir avec la pratique et l’expérience.

Les données recueillies dans la durée d’exploitation sont les MÉTHODES D’ÉVALUATION
plus importantes, car elles permettent d’établir l’historique des
faits ou de la capacité d’un pont. Si un pont a été régulièrement L’évaluation des études de cas a révélé que le jugement
inspecté et entretenu et si ces mesures sont bien documentées technique intervenait généralement à tous les niveaux de la
tout au long de la vie de la structure, elles fournissent une base prise de décision. Le poids de ce jugement était directement
éprouvée à partir de laquelle des hypothèses étayées peuvent lié aux qualifications et à l’expérience des ingénieurs
être formulées pour éclairer la prise de décision. concernés ainsi qu’à la disponibilité et à la fiabilité de
l’information sur la conception, la construction et l’historique
Le risque a également été identifié comme facteur d’influence. des performances du pont affecté.
Dans le cadre de ce rapport, le risque est défini comme le
produit de l’impact des conséquences et de la probabilité qu’il Dans le cas des ponts conçus et construits selon un ensemble
se produise. Alors que l’impact d’une conséquence peut être de normes connues et pour lesquels l’historique était
le même d’un point de vue technique et politique, lorsqu’on documenté au moyen d’actions de surveillance périodiques,
examine la probabilité, les probabilités sont généralement les ingénieurs disposaient généralement de l’information et
considérées du point de vue technique, tandis que les des données nécessaires pour prendre une décision fondée
possibilités sont généralement considérées du point de vue sur leur jugement et réagir immédiatement. Les ingénieurs

34 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Prise de décision en matière de sécurité des ponts routiers DOSSIERS

Illustration 2 - Fissure d’une âme de poutre en acier Illustration 3 - Armature de semelle sur pile corrodée
sur un pont aux États-Unis sur un pont aux États-Unis

plus expérimentés ont tendance à organiser les informations encore plus fin qui utilise des informations sur les propriétés,
sur un pont au moyen d’une série standardisée de questions. les dimensions ou le comportement du matériau tel que
construit, sur la base des résultats des essais non destructifs ou
• Quel est le type de structure ? destructifs (échantillonnage), permet de produire les prévisions
• Quel est le matériau de construction et quand a-t-il été les plus précises de la capacité. Toutefois, sa production et
produit ? son interprétation exigent beaucoup plus d’investissement
• Quel élément ou composant du pont est touché ? en temps et en ressources. Enfin, la compréhension des
• Quel est le défaut, le dommage ou la détérioration ? fondements statistiques des normes ou règles de conception ou
• Le défaut, le dommage ou la détérioration est-il lié à un d’évaluation permet d’optimiser l’utilisation des données pour
mécanisme de défaillance ? justifier la modification de facteurs de sûreté partiels dans le but
• Quelles sont les caractéristiques (emplacement, orientation, de quantifier les réserves de capacité non comptabilisées qui
etc.) du défaut, du dommage ou de la détérioration ? peuvent être utilisées pour atteindre un état limite technique.
• Quand a eu lieu la dernière inspection, et le défaut, le
dommage ou la détérioration a-t-il été documenté à ce Lorsque le type de pont est peu complexe et qu’un composant
moment-là ? peut facilement être découplé de l’ensemble du système, un
• Y a-t-il des antécédents de défectuosités, de dommages calcul de capacité partiel peut être effectué pour le composant
ou de détérioration similaires sur ce pont ou sur des ponts à l’origine du défaut, des dommages ou de la détérioration
semblables ? d’une section critique. Ces calculs sont plus faciles à faire pour
• Combien de véhicules empruntent le pont chaque jour et les composants qui peuvent être isolés de la structure restante
quel est l’itinéraire de déviation le plus raisonnable ? et permettent généralement de tirer parti des normes qui ont
été utilisées pour concevoir ou pour évaluer le pont concerné.
En répondant à ces questions, la plupart des ingénieurs
expérimentés peuvent déterminer si un grand nombre de ponts Lorsqu’un pont est constitué d’un système structurel
peuvent demeurer ouverts, s’ils doivent être limités à certains complexe, il est souvent nécessaire de procéder à une analyse
types de véhicules ou de charges, si le nombre de voies doit être approfondie pour déterminer la contribution du système à
réduit, ou s’ils doivent être fermés en attendant qu’une analyse la capacité globale d’un composant ou à une redistribution
plus détaillée puisse être effectuée, voire que des réparations des charges. Ces analyses utilisent généralement des modèles
temporaires ou permanentes soient effectuées. mathématiques qui tentent d’imiter le comportement
physique tridimensionnel d’un pont sous charge. Qu’il s’agisse
En tenant compte des marges et de la complexité du pont, on d’une analyse de premier ou de second ordre, ces modèles
peut estimer la capacité portante dans la situation dégradée peuvent avoir un niveau de rigueur très variable en fonction de
pour juger si des restrictions sont nécessaires ou s’il peut rester la méthodologie employée. Généralement, plus c’est rigoureux,
ouvert. Au niveau le plus élémentaire, ces calculs impliquent plus c’est long et coûteux. Il faut faire preuve de qualités de
généralement l’utilisation d’une norme de conception ou jugement pour déterminer si l’augmentation du niveau de
d’évaluation pour analyser un modèle bidimensionnel de rigueur est susceptible de produire des résultats suffisamment
charge statique à partir d’une analyse linéaire-élastique. significatifs et en temps opportun avant d’investir. Il faut
Au niveau de finesse suivant, on utilise généralement un également faire preuve de capacités de jugement pour
modèle tridimensionnel qui peut tenir compte des non- interpréter les résultats et en particulier l’incertitude
linéarités géométriques ou matérielles (ou les deux) et des associée à la variabilité inhérente, à la modélisation
effets dynamiques des charges. Le passage à un modèle imparfaite et aux erreurs d’estimation.

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 35


DOSSIERS Prise de décision en matière de sécurité des ponts routiers

Les investigations servent généralement à améliorer non destructives. Les résultats des investigations sont pris
l’information utilisée par un ingénieur pour justifier une en compte dans les calculs de la capacité portante et la
décision immédiate ou un plan d’action. Elles impliquent modélisation structurale.
généralement l’utilisation de moyens technologiques pour en
apprendre davantage sur le pont concerné. Entre autres choses, Une autre technique digne d’être mentionnée est l’extension
des investigations peuvent confirmer le comportement d’un de l’utilisation des moyens de surveillance ou d’auscultation
pont, le fonctionnement des appuis ou appareils d’appuis, les en place comme outil de mesure des déplacements, des
dimensions et propriétés des composants tels que construits déformations, etc. Si l’information recueillie n’est pas
et la charge de trafic spécifique. Après génération, ces données suffisante pour évaluer l’état du pont, un essai de charge est
peuvent être utilisées pour affiner l’analyse afin de prédire avec habituellement effectué.
plus de précision la sécurité structurale d’un pont.
Les niveaux d’évaluation traités dans la section précédente
Les niveaux d’évaluation discutés précédemment sont ont été présentés de façon indépendante pour faciliter la
basés sur les niveaux de fiabilité des règles de conception communication de leurs caractéristiques communément
ou d’évaluation, implicitement intégrés dans les valeurs comprises. Leur examen a donné lieu à plusieurs
nominales des charges et des paramètres de résistance et recommandations :
les facteurs de sécurité partiels correspondants. La fiabilité
visée est généralement liée aux critères de performance • Le jugement de l’ingénieur joue un rôle inestimable
satisfaits par un patrimoine de ponts. Des étalonnages tant dans la réaction initiale à un incident sur un pont
sont effectués le cas échéant. Si nécessaire, des évaluations que dans les actions de suivi. Il est recommandé que les
avancées impliquant une analyse de fiabilité ou une analyse maîtres d’ouvrage incluent toutefois des ingénieurs jeunes
de probabilité peuvent être utilisées par ceux qui disposent ou moins expérimentés dans le processus décisionnel
des connaissances et de l’expertise avancées requises. ou, à tout le moins, dans un rôle d’observation en
réservant la détermination des actions aux professionnels
Les niveaux d’évaluation discutés dans cette section ont expérimentés. Ces opportunités offrent les meilleures
été présentés de façon indépendante pour faciliter la leçons pour l’acquisition ou le maintien des compétences.
communication de leurs caractéristiques communément • Afin de pouvoir se fier adéquatement aux données
comprises. Dans la pratique, sous l’influence de l’expérience d’inspection, il est recommandé que les inspecteurs de
et du jugement des ingénieurs impliqués, plusieurs ponts disposent d’un ensemble de connaissances et d’une
niveaux et méthodes d’évaluation peuvent être utilisés formation définis faisant l’objet de vérifications.
simultanément. En fin de compte, ces types de calculs • Dans tous les cas, le temps est la ressource la plus
techniques ne sont que des outils utilisables par les importante, mais la sécurité est l’objectif premier. Il est
ingénieurs capables d’interpréter avec compétence les recommandé que tout compromis au niveau de sécurité
résultats pour appuyer la prise de décision. Cette décision habituel fourni par les mesures prises en réponse à un
peut être d’agir ou de ne pas agir en réponse à une situation problème de pont soit maîtrisé et justifié.
critique accidentelle ou révélée par une inspection. • Il est recommandé que les maîtres d’ouvrage gardent
à l’esprit les résultats probables d’une réponse à un
problème de pont à mesure que d’autres niveaux d’analyse
CONCLUSION sont utilisés. Les investigations et inspections peuvent être
coûteuses et prendre beaucoup de temps. La réussite est
Les maîtres d’ouvrage peuvent utiliser le processus généralement associée à la rapidité d’identification de la
décisionnel décrit dans les rapports produits par PIARC solution et de mise en œuvre de la réparation.#
comme référence clé en ce qui concerne les techniques
actuelles d’évaluation des dommages ou pour les guider
afin d’assurer la sécurité des usagers lors de l’occurrence REMERCIEMENTS
d’incidents sur leurs ouvrages.
L’auteur tient à remercier tous les membres du groupe
La plupart des pays ont répondu qu’ils procédaient à de travail 3 du Comité technique D.3 Ponts de PIARC du
des investigations pour déterminer les propriétés des cycle 2016-2019 qui ont contribué à cette étude pour leur
matériaux en combinant des techniques destructives et professionnalisme et leur diligence.

REFERENCES

[1] Prise de décisions en matière d’évaluation des dommages et de la détérioration pour la sécurité des ponts routiers,
PIARC (World Road Association), 2019R28FR.
[2] Techniques d’inspection et d’évaluation des dommages – Études de cas, PIARC (World Road Association),
2018CS01EN.

36 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


DOSSIERS

Comment effectuer le choix le plus judicieux


entre plusieurs solutions de réparation et/ou
reconstruction de pont routier ?
Pierre Gilles, Inspecteur général, Service public de Wallonie (Belgique),
et Michele Mele, Directeur général, mele consulting associates advanced engineering srl (Italie)
Respectivement Secrétaire francophone et Membre du Comité technique 4.2 Ponts routiers de PIARC
Illustrations © Auteurs

P our les gestionnaires de ponts, le choix de la stratégie de remise en état la


plus appropriée pour leur patrimoine est un enjeu majeur. La manière de
comparer les différentes solutions est primordiale. Elle est au cœur du présent
rapport. Pour leur permettre de déterminer la stratégie de remise en état la
plus appropriée compte tenu des exigences techniques et économiques, un
processus décisionnel a été développé à partir des réponses fournies par
17 pays à un questionnaire.

Pour les gestionnaires de ponts publics, les déficiences des ouvrages représentent Pierre Gilles Michele Mele
une réelle préoccupation. Ces déficiences sont dues à la dégradation des
éléments des ponts sous l’effet du vieillissement, de la corrosion, des attaques de
chlorures, des réactions alcali-silicate, etc. Les accidents peuvent également être • dans certains cas, la durée de la
la cause de dégradations. D’une manière générale, ces déficiences sont évaluées concession est plus courte que la
à l’aide de l’indice d’état des ponts. durée de vie des ponts. Le concédant
fixe l’état de service du parc
Cependant, les gestionnaires de ponts doivent également prendre les mesures d’ouvrages à la fin de la concession,
appropriées pour adapter leur patrimoine aux exigences actuelles (auxquelles ce qui conditionne la stratégie du
la conception d’origine ne répond peut-être pas) : nombre de voies, capacité concessionnaire.
portante, fréquence des inondations, normes de conception, etc. ; des exigences
impliquant d’augmenter le niveau de service des ponts. Dans ce cas, la priorité de remise
en état des ponts est toujours
Tous ces facteurs justifient la remise en état des ponts. établie selon les besoins liés à l’état
des ponts. Si le concédant décide
Compte tenu de tous ces besoins, les gestionnaires de ponts devront décider ce d’augmenter le niveau de service, le
qu’ils doivent faire à un moment donné pour chaque pont : concessionnaire le fera dans le cadre
d’un contrat, sans établir de priorités.
• maintenir le pont dans son état actuel (si la sécurité est garantie) avec un faible
impact sur la circulation ou d’autres fonctionnalités (uniquement pour les Dans tous les cas, la manière de
besoins de correction des déficiences) ; comparer les différentes solutions
• réaliser des travaux de remise en état limités, qui auront peu d’incidence sur la est primordiale. Elle est au cœur du
durée de vie du pont ; présent rapport.
• réaliser une remise en état importante à même de prolonger la durée de vie du
pont de manière significative ;
• construire un nouveau pont. ÉTAT ACTUEL
DES CONNAISSANCES
La question se pose certainement différemment pour les gestionnaires publics
et les concessionnaires privés. Il existe trois grandes différences pour un Gestion des ponts en Europe
concessionnaire privé : (BRIME) – 2001
• certaines normes « instantanées ou à court/moyen terme » sont fixées par les En Europe, le projet BRIME a permis
contrats de concession : la stratégie d’entretien est donc conçue pour répondre à d’établir une trame pour un système
des engagements contractuels ; de gestion des ponts (BMS)
• en général, les sociétés de concessionnaires mettent en place, de leur propre pour le réseau routier européen.
initiative, des chartes d’engagements vis-à-vis des utilisateurs afin de s’engager Le rapport final a été
sur un niveau de service. Ces engagements peuvent avoir des incidences sur les publié en mars 2001 [1]
politiques d’entretien (impact sur le trafic, par exemple) ; (chapitre 7 « Critères de

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 37


DOSSIERS Choisir entre plusieurs solutions de réparation et/ou reconstruction de pont routier

prise de décision »). Il inclut notamment les informations Cette analyse globale des coûts peut être effectuée pour
suivantes. différentes stratégies alternatives afin de les comparer. La
seule limitation est que les fonctionnalités du pont doivent
• Hormis le Danemark, les États-Unis et la Finlande, la rester au même niveau pour les différentes stratégies.
plupart des pays n’utilisent pas d’outil particulier d’aide à
la décision en matière de réparation ou de remplacement Tous les coûts sont actuellement évalués à l’aide de la valeur
des structures. actualisée nette.
• En France, en Allemagne et en Espagne, les décisions quant
à la réparation ou au remplacement sont prises sur la base Pour comparer les différentes stratégies, on utilise l’indice de
d’un jugement technique. réparation (RI) suivant :
• En Norvège, si le coût des réparations dépasse 20 % du coût
de remplacement du pont, deux stratégies alternatives au RI = CSolution de remplacement / CSolution de référence Équation 2
minimum peuvent être examinées en fonction des coûts
d’entretien et des coûts pour les usagers. D’autres critères Ponts : indicateurs clés de performance – COST
sont également pris en compte : âge du pont, durée de
vie utile résiduelle, capacité portante, largeur du pont, Lorsque l’on compare différentes stratégies de remise
courbure de la route, revanche verticale, sécurité routière, en état, il est important de définir les indicateurs clés de
esthétique, valeur historique, etc. performance. À cet égard, l’action COST TU1406 [2] a décrit
les principaux indicateurs clés de performance pour les ponts
À partir d’une analyse documentaire, deux modèles comme suit :
théoriques ont été retenus pour le choix du programme
d’inspection et de réparation optimal. • Les plus couramment utilisés :
* Fiabilité
Sur la base de ces informations, il a été proposé de * Disponibilité
déterminer un coût global C : * Maintenabilité
* Sécurité
C = CC + CI + CE + CR + CD + CU + CO - VS Équation 1 * Évaluation/inspection
• Souvent utilisés :
où CC = coûts de construction, CI = coûts d’inspection,
CE = coûts d’entretien, CR = frais de réparation, * Durabilité
CD = coûts de défaillance, CU = coûts pour l’usager de la route, • Rarement ou jamais utilisés :
CO = autres coûts et VS = valeur résiduelle du pont à la fin de la période
d’analyse. * Sécurité
* Santé
* Politique
La stratégie d’entretien consiste à minimiser la valeur C tout * Environnement
en maintenant la probabilité de défaillance pendant toute la
durée de vie en dessous d’une valeur acceptable.

Illustration 1 - Principaux sujets développés, mis en lumière par l’enquête PIARC

38 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


ENQUÊTE PIARC

Un questionnaire a été préparé


et envoyé à tous les membres du
Comité Ponts routiers de PIARC en
mai 2016. Les réponses de 17 pays
ont été collectées. Certaines d’entre
elles ont été soumises par différentes
organisations d’un même pays. Les
principaux résultats tirés de ces
réponses sont représentés dans
l’illustration 1.

PROPOSITION
DE PROCESSUS DÉCISIONNEL

Sur la base de l’ensemble des réponses,


un processus décisionnel est proposé,
visant à analyser tous les besoins
de remise en état et à produire un
programme de remise en état annuel
afin d’appliquer la solution la plus
appropriée pour chaque pont.

L’illustration 2 offre une vue d’ensemble


du processus global (détaillé dans le
rapport technique PIARC).

CHOIX DE LA SOLUTION
DE REMISE EN ÉTAT LA PLUS
APPROPRIÉE

Une fois identifiés les ponts à remettre en


état, il convient de déterminer la solution
appropriée pour chaque pont en :

• choisissant, parmi ces solutions,


celle qui sera la plus avantageuse
économiquement. Illustration 2 - Processus global

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 39


DOSSIERS Choisir entre plusieurs solutions de réparation et/ou reconstruction de pont routier

Pour comparer les solutions, il faut également prendre en considéré comme bénéfice du scénario « j » par rapport au
compte l’impact de la remise en état sur l’entretien futur du pont. scénario « o ». Ce bénéfice est calculé à l’aide de l’équation 5 :
La comparaison des programmes de remise en état devient
une comparaison de scénarios. La période d’analyse de ces
scénarios doit également être prise en compte. Elle doit être la Bjo=(TIo- TIj )+ (RVj- RVo ) Équation 5
même pour chaque scénario. Si elle est trop courte (10 à 20 ans),
elle ne couvre pas l’intégralité de l’impact de la remise en Où Bjo = bénéfice du scénario « j » par rapport au scénario « o »,
état initiale. Si elle est trop longue, les incertitudes quant au TIj = impact sur le trafic du scénario « j » et RVj = valeur résiduelle
du pont à la fin de la période d’analyse du scénario « j ».
programme d’entretien futur, au taux d’actualisation, au trafic et
à d’autres paramètres augmentent, ce qui peut affecter la
comparaison. Enfin, le coût et le bénéfice peuvent être comparés à l’aide de
l’équation 6 :
Ainsi, il semble plus approprié d’adopter une période
d’analyse de 40 ans, par exemple. Il peut également être
intéressant d’effectuer une petite analyse paramétrique Bjo / (Cj- Co) Équation 6
avec une période d’analyse différente pour évaluer l’impact
correspondant. Si le rapport est :

L’ensemble des coûts de remise en état et d’entretien • inférieur à 1 : le scénario « j » n’est pas avantageux par
sur cette période d’analyse doit être évalués, même rapport au scénario « o » ;
s’ils sont encourus à un autre moment dans le futur. • supérieur à 2 : le scénario « j » est très avantageux par
Ces coûts futurs peuvent être évalués sur la base des rapport au scénario « o » ;
prix actuels majorés du taux d’inflation (équation 3) : • compris entre 1 et 2 : le scénario « j » présente un léger
avantage. Cependant, de par les incertitudes associées, ce
scénario doit-il être privilégié ?
Cn=C0 (1+i)n Équation 3
Ce processus peut être simplifié pour les projets de petite
où Cn = coût dans n années, C0 = coût actuel, i = taux d’inflation envergure ou les situations d’urgence. Il peut également être
et n = année considérée. complété des aspects environnementaux.

Une fois tous les prix estimés en valeur courante (c’est-à-


dire au moment où les travaux auront lieu), il est nécessaire EFFICACITÉ DE L’ENTRETIEN FUTUR
de les exprimer en valeur présente en utilisant le taux
d’actualisation. Ces valeurs actualisées sont calculées à l’aide En comparant les stratégies de remise en état sur l’ensemble
de l’équation 4 suivante. de la période d’analyse, il est nécessaire de faire certaines
hypothèses associées aux travaux d’entretien. L’impact
de ces travaux d’entretien pendant la période d’analyse
P=Cn / (1+r)n Équation 4 peut être important dans la comparaison des différentes
stratégies de remise en état. La question qui se pose est
Où P = coût actuel, Cn = coût dans n années, de savoir comment s’assurer que l’entretien sera effectué
r = taux d’actualisation et n = année considérée. conformément au programme initial.

La valeur du taux d’actualisation dépend du pays et de Ici aussi, il peut être intéressant d’effectuer une analyse
la période. En France, il était de 8 % jusqu’en 2005. Il est paramétrique en tenant compte des différents programmes
actuellement fixé à 4 %. Au Royaume-Uni, il est de 3,5 %. d’entretien.
Dans certains cas, il est proposé d’utiliser un taux faible de
3 % au-delà de 30 ans et de 1 % sur 300 ans. Aux États-Unis,
il est recommandé d’appliquer deux taux d’actualisation LIEN AVEC LE SYSTÈME DE GESTION
différents : 3 % et 7 %. DES PONTS
Pour chaque scénario, le coût total actuel est calculé. Enfin, il est important de souligner que ce processus
décisionnel peut parfois se superposer partiellement au
On considère généralement le scénario « o » comme le système de gestion des ponts (BMS), selon la portée, qui
scénario le plus économique. D’autres scénarios, même s’ils dépend fortement de l’organisation. Certains BMS essaient
sont plus coûteux, offrent une meilleure valeur résiduelle du de proposer une solution standard pour la remise en état, ce
pont et ont un impact inférieur sur le trafic. qui peut être utile pour déterminer le budget total de remise
en état du patrimoine des ponts. Dans ce cas, c’est peut-être
L’impact de la remise en état sur le trafic et sur la valeur la solution standard que nous devrons comparer à d’autres
résiduelle du pont à la fin de la période d’analyse est solutions dans le cadre d’une deuxième étape.

40 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Choisir entre plusieurs solutions de réparation et/ou reconstruction de pont routier DOSSIERS

CONCLUSIONS

Le gestionnaire d’un parc d’ouvrages (administration de routes publiques ou concessionnaire privé) ne dispose généralement
pas d’un budget suffisant pour répondre à tous les besoins en matière de remise en état des ponts (à la suite de leur
dégradation ou en vue d’une augmentation du niveau de service). La première étape consiste à prioriser tous ces besoins. Il est
ensuite essentiel de déterminer la meilleure solution de remise en état pour chaque pont, en fonction des aspects techniques
et économiques. Ce processus décisionnel n’est pas encore fréquemment appliqué. Sur la base d’une enquête menée auprès
de 17 pays, le Comité technique Ponts routiers de PIARC propose un processus décisionnel, dont une vue d’ensemble est
présentée dans ce rapport.

Ce processus implique l’analyse de scénarios de remise en état sur une période d’analyse de plusieurs décennies.
Naturellement, certaines limitations sont inhérentes à ce type de processus (taux d’actualisation, taux d’inflation, efficacité du
programme d’entretien futur, etc.). Elles doivent être prises en compte lors de l’exploitation des résultats du processus.

Ce document synthétise le rapport technique final publié en 2019 par PIARC [3].#

BIBLIOGRAPHIE

[1] Woodward, R.J., BRIME: Bridge Management in


Europe. Rapport final D 10. 4e programme-cadre.
Union européenne. Bruxelles, mars 2001, 217 p
[2] Matos J.C., Performance Indicators for Roadway
Bridges of Cost Action TU1406 WG1 Rapport
technique, Vienne, juillet 2016, 38 p
[3] PIARC, CT D.3 Ponts routiers, Considérations
techniques et économiques des méthodes de
réhabilitation des ponts, rapport technique
2019R29, Paris, 2019, 94 p, ISBN 978-2-84060-579-9

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 41


DOSSIERS
Italferr et Anas : notre engagement
pour le nouveau pont de Gênes
Les deux sociétés du groupe ferroviaire public d’Italie
ont pris en charge le projet d’exécution et les essais
Aldo Isi (PDG, Italferr) et Massimo Simonini (PDG, Anas), Italie
Illustrations © Auteurs

C ’est en menant des projets d’une extraordinaire complexité


infrastructurelle et en se confrontant aux plus grands défis techniques
et de gestion qu’Italferr, société d’ingénierie du groupe ferroviaire
public d’Italie, a consolidé son savoir-faire au fil du temps, contribué au
développement des lignes à grande vitesse en Italie et fait concurrence
aux plus grandes sociétés de conception internationales, faisant rayonner
l’excellence italienne dans le monde entier. Aldo Isi Massimo Simonini

Forte de cette expertise, Italferr a été mandatée


par le consortium PerGenova (comprenant WeBuild
et Fincantieri Infrastructure) pour prendre en
charge la conception finale du nouveau viaduc du
Polcevera, clé de la restauration d’un réseau routier
stratégique pour l’équilibre social et économique
de la ville de Gênes.

Avec, pour point de départ, le principe de


conception de l’architecte Renzo Piano, l’équipe
pluridisciplinaire d’Italferr a développé un projet
d’étude d’une importance extraordinaire (tant en
termes de caractéristiques que de symbolisme)
dans un contexte national d’une dimension
émotionnelle inédite. Pour la conception
du nouveau pont, le recours aux meilleures
compétences dans les domaines structurels et de
l’ingénierie a permis d’allier qualité, durabilité et
innovation, le tout s’appuyant sur des éléments
structurels d’une extrême complexité, s’inscrivant à
la fois dans des géométries essentielles et dans une
idée architecturale singulière.
Le choix de développer le projet à l’aide de
la méthodologie BIM confirme également
cette approche. Cette méthodologie limite les
interférences potentielles qui, durant la phase
de construction, pourraient avoir de graves
répercussions sur le calendrier. Elle assure
également une excellente coordination des
activités, même dans un contexte technologique
particulièrement complexe. Enfin, c’est aussi le
modèle BIM qui simplifiera et optimisera, par la
suite, les travaux d’entretien.

En ces temps difficiles, l’ensemble de l’équipe


a développé un engagement sans faille en Le nouveau pont de Gênes

42 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Italferr et Anas : notre engagement pour le nouveau pont de Gênes DOSSIERS

faveur d’un projet unique en privilégiant des méthodes innovantes ;


un engagement reflétant l’expertise technique, le sens de la responsabilité et
la passion qui ont toujours fait du groupe ferroviaire public d’Italie une entité
à part.

L’entreprise Anas, membre du groupe FS Italiane depuis 2018, peut compter sur
la meilleure expérience du marché dans le domaine de l’ingénierie technique.
Et c’est précisément en s’appuyant sur l’expérience de nos experts techniques
que nous avons accepté avec le plus grand intérêt, en août 2019, de relever un
défi majeur pour le pays : prendre en charge les essais statiques et technico-
administratifs du nouveau pont de Gênes.

La phase d’essai statique est décisive lors de la réalisation d’une structure. En


effet, elle inclut le contrôle qualité des matériaux utilisés, la validation de leur
durabilité et, surtout, la vérification de leur conformité aux exigences de la
conception finale.

Pour accomplir ce travail colossal, plusieurs équipes d’ingénieurs se


sont engagées simultanément dans des activités transversales comme
les contrôles techniques des différents éléments de charpenterie
métallique composant le tablier ou la vérification des calculs statiques :
nos experts techniques ont développé des modèles de calcul
plus ou moins simplifiés reproduisant ceux fournis dans la
conception finale et vérifiant leur correspondance. Ces équipes ont
également assuré les essais de charge finaux, donnant le feu vert
à l’ouverture du pont.#

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 43


DOSSIERS
Appréciation de la sécurité d’un pont à haubans
endommagé par un incendie
Heungbae Gil, Directeur de recherche, Korea Expressway Corporation (Corée)
Membre du Comité technique 4.2 Ponts
Illustrations © Auteur

U n soir de décembre 2015, au cours d’un orage hivernal, l’un des câbles supérieurs les plus
longs d’un pont haubané a pris feu. Ce pont de 990 m de long se compose de trois travées à
haubans de 200 m + 470 m + 200 m et de deux travées de rive de 60 m de long de poutres mixtes
sur appuis simples. L’incendie s’est déclenché près de 80 m au-dessus du tablier de pont et a
duré plus de deux heures. Le feu se propageant, le câble a fini par se sectionner et deux autres Heungbae Gil
câbles ont été partiellement endommagés. L’incendie et l’ampleur des dégâts ont provoqué
la fermeture à la circulation immédiate du pont pendant 15 jours à des fins d’appréciation
de sa sécurité et de remplacement des câbles. Pour s’assurer de la sécurité structurelle et de l’opérabilité du pont
endommagé par le feu, il a été réalisé une analyse structurale détaillée exploitant un modèle par éléments finis
tridimensionnel qui tenait compte des poids morts et utiles. Une attention particulière a été portée aux forces de
tension du câble et aux contraintes de compression de la poutre de rigidité. Les données mesurées par les systèmes
de surveillance de l’intégrité des structures (SHMS) ont également permis d’étudier la force de tension des câbles
et la géométrie globale du pont. Ces systèmes ont d’ailleurs rendu possible le suivi continu de l’évolution de la
tension des câbles et de la géométrie globale du pont depuis sa construction.

Le pont de Seohae, ouvert à la circulation en novembre 2000, se situe à environ sont galvanisés, recouverts de cire,
65 km au sud de Séoul et est l’un des plus longs ponts à câbles de Corée. D’une gainés individuellement et placés dans
longueur totale de 7,31 km, il est constitué d’un pont à haubans et de deux types de un tuyau en polyéthylène haute densité
ponts à poutres-caissons en béton précontraint. Long de 990 m, le pont à haubans se (PEHD) sans coulis.
compose de trois travées à haubans de 200 m + 470 m + 200 m et de deux travées de
rive de 60 m de long de poutres mixtes sur appuis simples (illustration 1).
DOMMAGES CAUSÉS PAR UN
La section transversale du tablier est formée de deux longrines en acier espacées de INCENDIE
34 m, de pièces de pont en acier insérées entre ces poutres de rive à 4,10 m au centre
et de panneaux en béton préfabriqué. Structures de béton en H, les deux pylônes Le 3 décembre 2015, vers 18 h 00, l’un
culminent à 186 m au-dessus du niveau de la mer. Les trois travées haubanées sont des câbles (72D) les plus longs du pylône
soutenues par deux plans de haubans contenant chacun 72 câbles. Les haubans principal PY2 en aval du pont de Seohae
mesurent de 54 à 228 m de long et sont numérotés de 1 à 72, de gauche à droite. a pris feu. L’incendie s’est déclenché
Ces câbles sont constitués de brins de sept fils d’un diamètre de 15,2 mm. Ces brins près de 80 m au-dessus du tablier de
pont et a duré plus de deux heures.
Les pompiers arrivés sur place ne sont
pas parvenus à maîtriser rapidement
l’incendie en raison du vent fort et de la
hauteur du foyer. Le feu se propageant,
le câble 72D a fini par se sectionner.
Les deux tiers environ du câble sont
tombés sur la partie supérieure du
tablier de pont, tandis que le tiers
restant pendait de l’ancrage du pylône,
comme le montre l’illustration 2.
La partie du câble 72D en feu a
enflammé deux autres câbles du plan
situé en aval : le 56e câble (56D) et
le 57e câble (57D). Il a été constaté
ultérieurement, comme le montre
l’illustration 3 la rupture de 21 brins du
câble 56D sur 37 et 5 brins du câble 57D
Illustration 1 – Vue générale du pont haubané de Seohae sur 44. Devant l’ampleur des dégâts, le

44 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Appréciation de la sécurité d’un pont à haubans endommagé par un incendie DOSSIERS
pont a été immédiatement fermé à la circulation (Korea Expressway Corporation, 2016). Les trois câbles endommagés ont été
remplacés dans les 14 jours suivant l’incendie.

Dans un premier temps, des questions se sont posées quant


à l’origine de l’incendie. Le feu s’étant déclaré en hauteur,
comme le montre l’illustration 2, la possibilité que l’incendie
soit lié au trafic au niveau du pont a été écartée. Par ailleurs,
le personnel d’entretien a été témoin d’éclairs à proximité
du pont avant l’incendie, la foudre ayant été la cause initiale
présumée de l’incendie. Les investigations menées par le
bureau d’enquête incendie et la police scientifique coréenne
ont par la suite confirmé que la foudre s’était abattue sur le
câble et avait provoqué l’incendie.

ÉVALUATION DE LA SÉCURITÉ
STRUCTURELLE APRÈS INCENDIE

Pour s’assurer de la sécurité structurelle du pont endommagé


par le feu, il a été réalisé une analyse structurale détaillée
exploitant un modèle tridimensionnel par éléments finis Illustration 2 – Points d’inflammation de l’incendie
qui tenait compte du poids mort uniquement. Il a été émis

Illustration 3 – Haubans endommagés

Illustration 4 – Niveau de tension des câbles

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 45


DOSSIERS Appréciation de la sécurité d’un pont à haubans endommagé par un incendie

Illustration 5 – Répartition des contraintes sur les poutres de rigidité

l’hypothèse prudente que trois câbles avaient été complètement sectionnés. Les résultats d’analyse présentés dans l’illustration 4
montrent que les forces de tension des câbles du plan amont n’étaient pratiquement pas impactées par l’incendie. Les forces
des câbles situés en aval, à proximité des câbles endommagés 56D, 57D et 72D, ont, quant à elles, sensiblement augmenté
tout en restant inférieures aux forces de tension admissibles. Ces résultats ont également indiqué que la contrainte de
compression de la poutre de rigidité côté aval s’était sensiblement accrue entre les ancrages des câbles 56D et 57D en raison
de leur rupture, mais qu’elle restait inférieure à la limite autorisée (illustration 5).

Illustration 6 – Schéma d’agencement des capteurs du SSHMS

46 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Appréciation de la sécurité d’un pont à haubans endommagé par un incendie DOSSIERS
TABLEAU 1 – ÉVOLUTION DES FORCES DE TENSION DES CÂBLES

AVANT L’INCENDIE PENDANT L’INCENDIE APRÈS L’INCENDIE APRÈS LA RÉOUVERTURE


N° DU CÂBLE (3 DÉC., 14 h) (3 DÉC., 21 h) 7 DÉC. 19 DÉC. 20 DÉC.
37AM* 5 974 5 971 6 065 6 007 5 992
(-3)** (91) (33) (18)
37AV 5 846 5 643 5 888 5 906 5 890
(-203) (42) (60) (44)
69AM 7 498 7 026 7 333 7 102 7 097
(-472) (-165) (-396) (-401)
69AV 6 967 6 519 7 233 6 755 6 758
(-448) (266) (-211) (-209)
* AM : câble en amont, AV : câble en aval
** Différence de force de tension par rapport au niveau avant l’incendie

Installé en 2000, le système de


surveillance de l’intégrité des
structures du pont de Seohae
(SSHMS) continue d’être utilisé pour
surveiller la réponse structurale du
pont et évaluer ses performances.
Comme le montre l’illustration 6, de
nombreux capteurs – anémomètres,
accéléromètres, clinomètres, jauges de
contrainte, capteurs de température...
– ont été placés là où il était facile
de déterminer les performances et
le comportement structural globaux
des éléments critiques du pont.
En 2009, un système de surveillance
GNSS (positionnement par satellites)
cinématique en temps réel (RTK) a Illustration 7 – Grues sur chenilles de dépose et de pose des câbles
également été installé pour surveiller
le comportement statique et
dynamique du pont. SÉCURITÉ STRUCTURELLE AU COURS DE LA RÉPARATION
Au total, 24 accéléromètres ont Le pont a été immédiatement fermé à la circulation en raison de la crainte quant
été posés sur les haubans afin à son instabilité structurelle et à la sécurité routière. Bien que l’analyse structurale
de mesurer de manière indirecte détaillée ait démontré que le pont endommagé pouvait résister au passage d’une
le niveau de tension des câbles. partie du trafic en amont, il a, en effet, été décidé de veiller à son inaccessibilité
Cependant, aucun accéléromètre à des fins de travaux de réparation rapides.
n’a été placé sur des câbles
endommagés ou des câbles voisins, La préparation des travaux de réparation a commencé dès l’extinction de
à l’exception du 69e câble. Des l’incendie. Il a été déterminé que les vérins de contrainte monobrin et les brins de
accéléromètres sont également hauban comptaient parmi les éléments indispensables au remplacement rapide
installés sur le 37e câble, qui est des haubans. La présence de plusieurs grues sur chenilles de grande capacité a
situé côté opposé du pylône et également été jugée nécessaire pour accéder aux ancrages des câbles du pylône
symétrique au 72e câble. Le tableau 1 principal et remplacer les câbles endommagés. Le pont de Seohae faisant partie
compare les forces de tension de réseaux routiers stratégiques en Corée, avec un trafic moyen journalier de
mesurées des câbles impactés dans 88 000 véhicules, toutes les ressources dédiées disponibles du pays ont
les plans en amont et en aval. Au été mobilisées pour réparer le pont, avec l’aide du ministère national de
cours de l’incendie, ces forces ont l’Aménagement du territoire, des infrastructures et des transports. Pour leur
légèrement baissé en raison de prêter main-forte, du matériel de montage et des experts en ponts à haubans
la limitation du trafic sur le pont. ont été dépêchés d’autres chantiers relevant de la juridiction du ministère.
Après l’incendie, elles ont un peu Des torons destinés à un autre pont haubané ont également été utilisés. Les
varié tout en restant inférieures travaux de réparation n’ont duré que 15 jours grâce à la mobilisation rapide sur
à la force de tension maximale place de matériel de pose des câbles, de pièces et d’experts en la matière.
admissible des câbles (10 872 kN).
L’opération a réclamé le déploiement de deux ou trois grues sur
chenilles équipées d’une longue flèche afin de déposer et de poser

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 47


DOSSIERS Appréciation de la sécurité d’un pont à haubans endommagé par un incendie

Illustration 8 – Procédure de remplacement des câbles et position des grues sur chenilles

les haubans (illustration 7). Le poids de ces grues – 50 tonnes (490 kN), 100 tonnes (980 kN), 160 tonnes (1 570 kN) et 400
tonnes (3 920 kN), a fortement impacté la force de tension des câbles et le niveau de contrainte de la poutre de rigidité.
La procédure de dépose des haubans endommagés et de pose des câbles de remplacement présentée dans l’illustration 8
a été définie sur la base de l’analyse structurale détaillée, compte tenu de l’emplacement et du poids des grues sur chenilles.
Les brins restants du câble 56D ont en premier lieu été retirés par relâchement de la tension, et de nouveaux brins haute
résistance ont été installés. La pose du câble 72D a été suivie du remplacement du câble 57D endommagé.

CONCLUSION

En Corée, la foudre a provoqué la rupture par le feu de trois haubans d’un pont de 990 m de long. Ce pont a été fermé
à la circulation pendant 15 jours, et les câbles ont été parfaitement remplacés. Le présent document a abordé l’appréciation
détaillée de la sécurité structurelle du pont endommagé. Avant le début des travaux de réparation, la sécurité structurelle
a également fait l’objet d’une étude approfondie afin d’éviter toute contrainte excessive. Pendant l’incendie et les travaux,
l’évolution des forces de tension et de la géométrie des câbles a été étroitement contrôlée par le système de surveillance de
l’intégrité des structures (SHMS). Dans un souci de prévention des incendies de câbles à l’avenir, le pont a été équipé d’un
système de protection contre la foudre (SPF) comprenant des câbles parafoudres installés au-dessus des haubans.#

RÉFÉRENCES

[1] Korea Expressway Corporation. (2016). The Report of Repair Works for the
Seohae Bridge under ruptured stay cables., Korea

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DOSSIERS

Conception des ponts facilitant les opérations


d’inspection et d’entretien
Mohamed Parak, ingénieur de projets et spécialiste en structures, Agence Nationale des Routes d’Afrique du Sud (SANRAL),
(Afrique du Sud)

L es ponts doivent être conçus de manière à pouvoir être inspectés et entretenus efficacement
pendant toute leur durée de vie, ce qui exige de tenir compte des aspects liés aux inspections
et à l’entretien dès la phase de conception et non pas ultérieurement. Il s’avère nécessaire de
faciliter l’inspection et l’entretien de tous les éléments les constituant, ainsi que l’identification
des éléments à remplacer.

Cet article présente les résultats d’une étude de conception et détaille les pratiques de plusieurs pays
spécialement destinées à simplifier l’inspection, l’entretien et le remplacement d’éléments de ponts Mohamed Parak
à l’avenir. À cette fin, une enquête a été réalisée sous la forme d’un questionnaire et d’un modèle
d’étude de cas spécifiques, invitant les pays à décrire leurs expériences et leurs pratiques et à partager des exemples sur le
sujet. Cette étude a été entreprise par le groupe de travail 1 du Comité technique (CT) D.3, Ponts, de l’Association mondiale de
la Route (PIARC) au cours du cycle 2016-2019.

Cette étude a abouti à l’examen des différentes pratiques en la matière et à la présentation d’un ensemble consolidé de
directives et de recommandations connexes. Reste à espérer que ses conclusions attireront l’attention des concepteurs et
propriétaires de ponts sur l’importance de ce thème.

MÉTHODOLOGIE RÉPONSES ET RECOMMANDATIONS

Un questionnaire et un modèle d’étude de cas ont été L’examen des réponses a révélé que la plupart des pays
élaborés pour rassembler les pratiques des pays membres disposaient de codes de conception, de normes, de
du CT D.3 de PIARC, ainsi que des exemples en la matière. règlements, de spécifications et/ou de directives éclairant
Le questionnaire et l’étude de cas ont été divisés en quatre l’étude de définition et la conception détaillée du point
parties : de vue des inspections et de l’entretien. S’agissant des
dispositions relatives à l’accès sécurisé, l’exigence croissante
1. les dispositions relatives à l’étude de définition, de santé et de sécurité de la construction et de l’entretien a
2. celles portant sur la conception détaillée, réclamé d’y apporter plus d’attention.
3. celles relevant de l’accès sécurisé et
4. l’étude de cas, pour obtenir des exemples de bonnes Cette étude avait pour objectif d’établir un ensemble
pratiques. consolidé de directives sur la conception des ponts
afin d’améliorer leur inspection et leur entretien. Ces
Les dispositions propres à l’étude de définition concernent directives sont détaillées dans les tableaux 1, 2 et 3. Les
le choix du type de structure, des matériaux et des recommandations présentées ici sont d’ordre général
dimensions des éléments ou d’autres aspects améliorant et peuvent ne pas s’appliquer dans tous les cas. Les
les performances du cycle de vie du pont et réduisant ainsi concepteurs doivent faire appel à leur jugement d’ingénieur
les besoins d’inspection et d’entretien. Les dispositions avant d’adopter l’une d’entre elles.
portant sur la conception détaillée ont, quant à elles, trait aux
éléments d’un pont, tels que les appareils d’appui, les joints La sécurisation matérielle de l’accès au pont relève de
de dilatation, le drainage, etc. qui, lorsqu’ils sont appréciés et considérations pratiques et de méthodes de travail sûres.
installés correctement, facilitent les inspections, l’entretien Celles-ci, courantes et simples, ne seront pas mentionnées
et/ou leur remplacement. Enfin, les dispositions en matière ici. Les recommandations répertoriées dans le tableau 3 ne
d’accès visent à fournir aux inspecteurs et équipes d’entretien recensent donc pas les dispositions qui vont de soi.
un environnement de travail sûr et confortable.

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 49


DOSSIERS Conception des ponts facilitant les opérations d’inspection et d’entretien

Illustration 1 – Exemple d’utilisation d’un acier à résistance améliorée à la corrosion atmosphérique,


peint au niveau des joints de dilatation, au Canada-Québec © Bernard Pilon

TABLEAU 1 – RECOMMANDATIONS EN MATIÈRE D’ÉTUDE DE DÉFINITION FACILITANT LES OPÉRATIONS D’INSPECTION ET D’ENTRETIEN
Configurations structurales • L’emploi de dalles de pont intégrales, semi-intégrales ou continues est recommandé pour limiter
le recours à des appareils d’appui et des joints de dilatation. Certains pays stipulent d’utiliser des
structures intégrales pour les ponts de moins de 20 m et d’autres, pour les ponts jusqu’à 60 voire
100 m. Les limites dépendent de conditions spécifiques.
• Les coffrages à vide permanents inaccessibles dans les dalles de pont sont déconseillés. Ceux-ci
ont été source de problèmes lors de la construction et de l’entretien à long terme.
• On préconise l’utilisation de dalles de transition structurales pour éviter l’affaissement des remblais
de transition.
Choix des matériaux • Les spécifications de durabilité du béton doivent être appliquées selon les conditions d’exposition
environnementales.
• Il convient d’utiliser un acier à résistance améliorée à la corrosion atmosphérique, selon les
conditions d’exposition environnementales, qui est peint au niveau des joints de dilatation
(illustration 1). Il est également possible de recourir à ce type d’acier alors que les conditions
d’exposition ne l’exigent pas, si l’accès futur est réglementé (par exemple, sur les autoroutes très
fréquentées).
• Les éléments en acier exposés doivent, au besoin, être recouverts d’enduits de protection
• Le béton ultra haute performance à armature d’acier réduite peut être très utile dans certaines
conditions (illustration 2).
• Dans les tabliers de pont utilisant du sel de dégivrage, les armatures en acier galvanisé ou
inoxydable sont recommandées.
• L’utilisation d’armatures en acier galvanisé ou inoxydable dans les parapets en béton doit être
adaptée aux conditions d’exposition environnementales.
Dimensions ou hauteurs libres minimales • En général, il convient de ménager 150 mm au moins entre le sommier d’appui et le dessous
du tablier du pont pour les inspections, l’entretien et le remplacement des appareils d’appui,
notamment ceux en caoutchouc. Pour les autres types d’appareils d’appui, certains pays
préconisent un espace de 300 à 400 mm.
• Les dimensions minimum recommandées des creux / vides internes sont de 800 mm de diamètre
ou 800 mm de hauteur.
• Une galerie / chambre d’accès située au niveau d’une culée ou d’un joint de dilatation doit mesurer
au moins 500 mm de largeur lorsque l’accès à des ancrages de post-tension s’avère nécessaire à
des fins d’essais de frottement ou de remplacement d’éléments de précontrainte. Cette largeur
peut être réduite à 200 mm lorsqu’aucun remplacement d’éléments de précontrainte n’est prévu.
• En général, l’épaisseur des dalles de pont en béton ne doit pas être inférieure à 180 mm.
• L’épaisseur minimum des tôles d’acier dépend notamment des conditions d’exposition
environnementales.
• Les dimensions minimum des trous d’homme, ouvertures et vides doivent respecter les
réglementations en matière de santé et de sécurité.
• La hauteur maximale des balustrades et parapets de ponts doit tenir compte des limites des
véhicules d’inspection sous le pont. Leur hauteur minimale doit être déterminée par le niveau
de retenue requis.
Instrumentation des ponts • Il a été constaté une utilisation limitée de l’instrumentation en complément des informations
d’inspection, mais celle-ci présente un potentiel d’expansion croissant.
• L’instrumentation est davantage exploitée pour les grandes structures à des fins de surveillance
de l’incidence des tremblements de terre et du vent et de recherche.
Autres • Les éléments de service fixés aux ponts ne doivent pas nuire à la réalisation des inspections et
de l’entretien.

50 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Conception des ponts facilitant les opérations d’inspection et d’entretien DOSSIERS

Illustration 2 – Exemple d’utilisation d’un béton fibré ultra haute performance, d’une résistance
à la compression de 180 MPa, sur un pont au Japon © Yoichi Sato

TABLEAU 2 – RECOMMANDATIONS EN MATIÈRE DE CONCEPTION DÉTAILLÉE FACILITANT LES OPÉRATIONS D’INSPECTION ET D’ENTRETIEN
Appareils d’appui • En présence d’appareils d’appui en acier, des plaques d’adaptation supérieures et inférieures doivent être installées pour faciliter
leur remplacement.
• Le sommier d’appui doit prévoir des espaces pour l’installation de vérins.
• L’entretoise / la traverse / le diaphragme doivent se situer à mi-hauteur du longeron pour permettre l’accès aux appareils d’appui.
Ces poutres doivent être conçues pour permettre le vérinage du pont. Des montants de vérinage et une armature doivent être
prévues sur les poutres principales en acier et les entretoises pour permettre le vérinage du pont.
• avec chaque étude de pont. Le plan doit spécifier la conception, l’installation, l’entretien et le remplacement des appareils
d’appui toute au long de la durée de vie du pont.
• Un plan des appareils d’appui doit être soumis
Joints de • La présence de galeries / chambres d’accès est recommandée pour l’inspection et l’entretien des joints, en particulier sur les
dilatation grands ponts dotés de joints multi-éléments.
• Les galeries / chambres d’accès doivent permettre le drainage des fuites de joints, et la chambre doit être conçue pour protéger
les ancrages de précontrainte des fuites de joints, et le mur arrière (mur d’appui de la culée), des éclaboussures.
• La pose de joints de dilatation doit, dans la mesure du possible, être limitée.
• Les joints de dilatation doivent être installés en longueurs modulaires afin que leur remplacement n’impose pas la fermeture
de toute la plate-forme (illustration 3).
• Les extrémités des joints doivent être recourbées vers le haut dans les bordures ou les parapets.
• Un canal de drainage doit être placé sous le joint.
Bordures, • La conception des boulons d’ancrage des parapets et balustrades en acier doit garantir leur résistance aux dommages en cas
parapets, de choc et faciliter ainsi le remplacement des balustres et tablettes d’appui.
balustrades • Un béton à haute résistance (>50 MPa) à l’abrasion et au feuilletage dus aux chocs doit être utilisé pour les bordures et parapets.
• Les parapets en béton doivent être privilégiés en cas de risque de vandalisme et de vol.
• Dans les zones présentant un risque élevé de vandalisme, les pavés sont à proscrire sur les trottoirs et les passerelles des ponts.
Ces derniers doivent être revêtus de béton / bitume pour prévenir le vandalisme et le vol.
• Des revêtements hydrophobes peuvent être employés sur les bordures de béton à des fins de protection contre la corrosion
due au sel de déverglaçage.
Revêtement et • Il convient de recourir à des membranes d’étanchéité adaptées pour empêcher toute infiltration d’eau dans le pont. Le type
étanchéité de membrane d’étanchéité choisi ne doit pas nuire à l’adhérence avec la couche de revêtement ni à la qualité de roulement.
• Il est recommandé un revêtement en asphalte coulé modifié ou un revêtement en béton modifié au latex, qui ont démontré,
respectivement, une durée de vie allongée et un temps de prise raccourci.
• Il convient de lisser la surface en béton du pont pour améliorer la surface de roulement et limiter les dépressions favorisant la
stagnation de l’eau.
Drainage • Les dalots et descentes d’eau du pont doivent présenter un diamètre minimum de 75 mm.
• Les dalots doivent dépasser de plus de 150 mm de la dalle de pont ou de la poutre, selon l’élément le plus bas.
• Les dalots doivent comporter des barbacanes au niveau du béton du tablier pour évacuer l’eau s’écoulant à l’interface entre le
revêtement et la membrane d’étanchéité / le béton du pont.
• Dans la mesure du possible, les dalots doivent être à décharge directe, dans le respect des restrictions environnementales en
vigueur. Les systèmes de canalisation sont à éviter, et toutes les conduites d’évacuation doivent être extérieures (et non coulées).
• Pour limiter les effets néfastes de la projection d’eau par les dalots sur les piles de pont, les tuyaux d’écoulement situés près des
piles doivent courir jusqu’au sol.
• Des larmiers s’imposent.
Poutres-caissons • Les vides des tabliers de pont, ainsi que les piles et poutres-caissons creuses doivent être accessibles à des fins d’inspection. Les
creuses, vides dimensions minimum recommandées de l’accès sont de 800 mm de diamètre ou 800 mm de hauteur.
de dalle de • Tous les vides doivent être drainés.
pont, piles / • L’intérieur des poutres-caissons creuses en acier doit être ventilé et éclairé. Il peut être peint en blanc afin de mieux refléter la
culées creuses lumière et d’améliorer ainsi l’identification de fissures (illustration 4).
Systèmes de • Aucun ancrage ne doit se trouver dans la dalle du pont.
précontrainte • Des gaines supplémentaires doivent être prévues pour la post-tension externe.
• Pour la post-tension interne non injectée, le remplacement progressif des câbles doit être envisagé.
Autres • Un empierrement doit être réalisé sur les remblais situés devant les culées, et aucune plate-forme ne doit être aménagée devant la
culée pour éviter que les sans-abri ne dorment sous le pont et qu’on y allume des feux et pour prévenir le vandalisme.
• Il est recommandé d’installer un éclairage public sur le terre-plein central pour faciliter l’utilisation de véhicules
d’inspection sous le pont, au niveau des extrémités extérieures.

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 51


DOSSIERS Conception des ponts facilitant les opérations d’inspection et d’entretien

Illustration 3 – Exemple d’un joint modulaire Illustration 4 – Intérieur de poutres creuses en acier peint en blanc pour améliorer
à dents posé sur un pont en Chine. l’éclairage et la visibilité, au Canada-Québec © Bernard Pilon
Chaque module mesure 1 m de long dans le sens
transversal, ce qui permet de remplacer le joint
par unités sans fermer toute la chaussée © Liu Bo

TABLEAU 3 – RECOMMANDATIONS EN MATIÈRE DE CONCEPTION DÉTAILLÉE FACILITANT LES OPÉRATIONS D’INSPECTION ET D’ENTRETIEN
Plates-formes, appontements, • Sur certains ponts, une passerelle se trouve côté extérieur du parapet principal pour deux raisons :
passerelles, couloirs l’accès de l’équipe d’inspection et le secours des usagers de la route. Sa présence ne se justifie
que sur les ponts longs, caractérisés par un trafic à grande vitesse et un volume de circulation
important.
• Pour les longs ponts en treillis et autres grands ponts dont le treillis se trouve sous le tablier, une
passerelle pour piétons sur le treillis serait bénéfique pour l’équipe d’inspection. On estime que
le rapport coût-bénéfices d’une passerelle placée dans le treillis est relativement faible.
• Sur les grands ponts, des plates-formes fixes d’inspection et de remplacement des appareils
d’appui inaccessibles sont à envisager (illustration 5).
Connexions des plates-formes d’inspection • À installer là où elles sont nécessaires.
Plates-formes mobiles installées • Les plates-formes mobiles installées de manière permanente sous le tablier pour l’équipe
de manière permanente d’inspection pourraient ne plus être rentables. Un pays a indiqué qu’il ne les utilisait plus pour
cette raison. Cet aspect est à évaluer avant d’engager des dépenses coûteuses. Le recours à des
véhicules d’inspection ou des élévateurs sous pont à la place des plates-formes mobiles installées
de manière permanente est à envisager.
Installations sur des éléments • Des escaliers, marches ou marchepieds doivent être installés sur les remblais pour aider
inclinés, tels que des remblais l’inspecteur à les franchir.
Échelles, escaliers, palans, • Sur les pylônes / piles, l’utilisation d’escaliers / élévateurs doit toujours être évaluée.
élévateurs, échelons en fer
Dispositifs antichute, mains courantes • À installer là où ils sont nécessaires.
Fixations pour accès sur corde et harnais • À installer là où elles sont nécessaires.
Trappes, ouvertures, passages, trous d’homme • Les plaques de polymère renforcé de fibres (PRF) permettent de réduire le poids des trappes et
ouvertures (illustration 6).
• Les trappes doivent être munies de serrures pour empêcher le vandalisme et ne doivent pas
permettre l’entrée d’oiseaux et de chauves-souris.
Éclairage dans les espaces clos • À installer là où il est nécessaire.
• Il a été signalé que l’éclairage interne pouvait devenir coûteux à entretenir et, dans un cas, il a été
abandonné au profit de torches à main ou de lampes frontales.
Ventilation dans les espaces clos • À installer pour les poutres-caissons creuses en acier.
Stationnement de l’inspecteur des ponts • Une solution de stationnement sur la route ou le franchissement routier sous le pont doit être
étudiée.
Autres • Pour l’inspection des ponts, l’inspecteur doit être accompagné de personnel de sécurité dans les
zones de criminalité élevée.

52 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Conception des ponts facilitant les opérations d’inspection et d’entretien DOSSIERS

Illustration 5 – Exemple de plates-formes installées de manière permanente Illustration 6 – Exemple de trappe fabriquée
à des fins d’inspection des appareils d’appui, comme celles utilisées en Corée à partir de plaques de PRF au Japon. Légère,
du Sud sur de grandes structures © Heungbae Gil & Hyunho Choi cette trappe est plus facile à ouvrir
et moins sujette à la corrosion qu’une porte
en acier © Yoichi Sato

CONCLUSION

La mise en œuvre des pratiques présentées dans ce document peut parfois engendrer un surcoût par rapport
à l’investissement initial du pont. Selon la taille du pont ou l’ampleur du projet, le coût global du pont ou du projet peut être
plus ou moins élevé. Cependant, négliger la prise en compte des inspections et de l’entretien futurs de l’ouvrage a souvent
entraîné d’importants coûts ultérieurs, dépassant de loin les économies initiales que représente l’omission de ces aspects.
Outre le coût réel de l’inspection et de l’entretien, des coûts sociaux sont également engendrés par les retards dus à la mise
en place d’un accès sécurisé pour les réparations, par exemple. Reste donc à espérer que l’étude exposée dans le présent
document sensibilise et fournisse quelques directives quant à la conception et la construction des ponts en vue de faciliter,
à l’avenir, les opérations d’inspection, d’entretien et de remplacement d’éléments associées.#

REMERCIEMENTS

L’auteur tient à remercier tous les membres du groupe de travail 1 du Comité technique D.3 de PIARC du cycle 2016-2019 qui
ont contribué à cette étude.

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 53


DOSSIERS
Processus d’évaluation d’alternatives de ponts
José Luis Canales, spécialiste du trafic et du bilan économique, GMI S.A. Ingenieros Consultores (Pérou)
Illustrations © Auteur

L es infrastructures routières représentant un actif majeur pour le développement socio-


économique du Pérou, il est extrêmement important de garantir la traficabilité des
réseaux qui composent le système de route, les ponts constituant des éléments essentiels à
la connectivité de ce système.

Pour combler le manque d’infrastructures de ponts, un Programme national des ponts est mis
en œuvre depuis 2013, prévoyant notamment leur remplacement. Le ministère des Transports
et des communications, par l’intermédiaire de l’entité chargée de l’application du Programme
(Provias Nacional), a travaillé conjointement avec le ministère de l’Économie et des finances afin de
définir les lignes directrices de l’élaboration d’études de profil et ainsi d’instaurer des processus José Luis Canales
permettant, grâce à une combinaison d’informations primaires et secondaires, une évaluation
technique et économique rapide qui favoriserait la prise de décision en matière d’investissement dans
ce type d’infrastructures.

PROCESSUS DE PRÉ-INVESTISSEMENT DES PROJETS DE REMPLACEMENT DE PONTS

Schéma du processus

La démarche s’est en premier lieu appuyée sur l’analyse des inspections antérieures des ponts du réseau routier national
au regard du Guide d’inspection des ponts, qui fournit des directives d’inspection fondées sur des procédures techniques
normalisées. L’objectif était d’asseoir la prise de décisions axées sur le maintien de la continuité de la traficabilité efficace et
sûre des ponts.

Cette méthodologie consiste à estimer l’état de dégradation de chaque élément d’un pont, puis à définir un indicateur unique,
appelé état général, permettant de déterminer l’action à entreprendre sur l’infrastructure selon l’échelle de valeurs établie.
Les ponts d’un état général supérieur
ou égal à 3 sont ainsi candidats au
remplacement.

Échelle de valeurs
de l’état général

Dans un deuxième temps, des


inspections de terrain ont permis
d’actualiser ou de vérifier les
évaluations précédentes, ainsi que
d’apprécier l’état du pont au regard de
Illustration 1 – Processus de pré-investissement des projets de remplacement de ponts
trois critères de remplacement :

1. Exploitation à la capacité projetée


produisant des actions internes
inférieures à la charge maximale
légale, établie à 48 tonnes;
2. Non-conformité à l’état structural
approprié ; et/ou
3. Non-conformité fonctionnelle et
hydraulique à la réglementation
nationale en vigueur .

Enfin, des études de profil ont


été préparées pour les projets de
remplacement de ponts, un projet Illustration 2 – Description de l’état général d’un pont

54 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


Processus d’évaluation d’alternatives de ponts DOSSIERS
étant composé de tous les ponts d’un ou de plusieurs l’investissement relatif aux projets approuvés à ce stade
corridors routiers donnés remplissant les critères de s’élevait à 522 millions de dollars.
remplacement.
À ce jour, ces projets se trouvent en phase d’exécution,
laquelle repose sur une stratégie prévoyant la réalisation
ÉVALUATION D’ALTERNATIVES DANS L’ÉTUDE simultanée des études définitives et des travaux dans
DE PROFIL le cadre d’un contrat unique, ce qui réduit les délais
d’exécution.
Une fois définis les corridors et les ponts à remplacer les
composant, trois solutions alternatives maximum ont été
proposées pour chacun d’eux. Ces alternatives variaient CAS DU PONT DU VENADOS
selon le type de pont ou d’éléments de pont (superstructure,
infrastructure, conception géométrique de la route, etc.), Le cours d’eau Venados se situe au km 52+900 de la route
leurs avantages et inconvénients allant impacter les coûts nationale Sullana-El Alamor (PE-01NN), dans le district de
des travaux et d’entretien associés. Lancones de la province de Sullana, département de Piura.
Cette route se trouve sur l’un des axes transfrontaliers entre
Les coûts de l’investissement initial et de l’entretien sur le Pérou et l’Équateur.
20 ans de chaque alternative ont été évalués à partir de la
conception technique d’avant-projet. La structure à remplacer était constituée d’un ensemble
de ponceaux en béton armé construits en 2010, d’une
Enfin, il a été déterminé, sur la base de l’actualisation des flux longueur totale de 69,15 m, qui ne couvrait que 20 % du lit
de coûts aux prix économiques des différentes alternatives, de la rivière, d’une largeur totale de 350 m. Elle avait connu,
l’indice de rentabilité (IR), par division de la valeur actualisée dès sa mise en service, des problèmes de débitance, en
des coûts (exprimée en dollars) par la longueur du pont (en particulier pendant la saison des pluies, qui engendraient
mètres), l’alternative retenue étant celle présentant l’IR le des interruptions du trafic routier (illustration 3).
plus faible. Le taux d’actualisation social utilisé était de 9 %.
Au regard de l’évaluation réalisée, l’indicateur d’état général du
L’IR retenu devait, toutefois, être inférieur à un seuil prédéfini, pont était de 4,61, le plaçant dans la catégorie « très mauvais ».
fixé sur la base de données historiques relatives à des ponts
construits. Les alternatives proposées s’appuyaient sur un pont de
350 m de long composé de 10 sections de 35 m et variaient
TABLEAU 1 – SEUILS AUX PRIX SOCIAUX selon leur superstructure :
Catégorie Longueur du pont Nombre de voies $/m
• dalle+poutres AASHTO en béton postcontraint,
1 Moins de 50 m 2 100 542
• dalle+poutres-caissons en béton postcontraint et
2 Entre 50 et 100 m 2 96 364 • tablier+dalle de béton+poutres en acier.
3 Plus de 100 m 2 85 962
Estimation des coûts d’investissement et
Dans le cadre de ce processus, 13 études de profil ont été d’entretien de chaque alternative (illustration 4)
menées pour la première phase du Programme. Ces études
ont permis l’identification d’un total de 183 ponts d’une Ensuite, les prix du marché ou privés ont été convertis en
longueur totale de 7 300 mètres linéaires, dans 18 corridors prix sociaux, les flux de coûts ont été actualisés au taux social
nationaux, une analyse de l’évaluation des alternatives (9 %) et l’indice de rentabilité de chaque alternative a été
ayant été effectuée pour chaque pont. Le montant de calculé à partir d’indicateurs (illustration 5).

Le calcul de l’indice de rentabilité de chaque alternative a


permis d’obtenir les valeurs suivantes :

TABLEAU 2 – INDICATEURS D’ÉVALUATION DES ALTERNATIVES


Indicateur Alt. 1 Alt. 2 Alt. 3
IR ($) par mètre 55 212 56 979 82 549
Seuil ($) par mètre 85 963

Les résultats obtenus montrent que l’alternative 1 présente


l’IR le plus faible, ce qui en fait une solution de choix. Ils
permettent, par ailleurs, de constater que cette valeur
est inférieure au seuil défini pour les ponts de plus
Illustration 3 – Effondrement du pont en mars 2017 de 100 m.

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 55


DOSSIERS Processus d’évaluation d’alternatives de ponts

Illustration 4 – Coûts d’investissement et d’entretien de chaque alternative

PHASE D’EXÉCUTION (ÉTUDE DÉFINITIVE ET CONCLUSIONS


TRAVAUX)
Le processus d’évaluation d’alternatives de ponts mis
L’étude définitive a abouti à une structure de 350 m de long, en œuvre a associé des critères technico-économiques
composée de 8 sections et d’une dalle de béton avec des permettant de définir des normes ou des niveaux
poutres-caissons multicellulaires, pour un budget de travaux d’intervention sur les infrastructures des ponts du réseau
de 14,7 millions de dollars. Le pont a été mis en service en routier péruvien. Son application a favorisé la prise de
novembre 2018. décisions conformes aux directives techniques et à
l’approche d’évaluation sociale imposée par les normes
d’investissement public en vigueur.

La systématisation de ce processus a permis d’intervenir sur


un ensemble de ponts, rompant avec l’approche unitaire
antérieure.

La phase de pré-investissement en a été réduite, ce qui,


conjugué à la stratégie de contrat unique pour l’exécution
conjointe de l’étude finale et des travaux, a amélioré le
processus d’investissement dans les infrastructures de ponts
au niveau national.

Cette première étape est le fruit d’un effort commun entre


le secteur des transports, représenté par le ministère des
Transports et des communications, et le ministère de
l’Économie et des finances, visant à renforcer l’efficacité du
Illustration 5 – Flux de coûts au regard de l’évaluation processus d’investissement dans les infrastructures de ponts
du pays.#

REMERCIEMENTS

L’auteur remercie l’équipe technique du service de gestion


des études de l’unité Ponts de Provias Nacional, qui a
enclenché le cycle de projets du Programme devenu
politique nationale, articulant le système de route national
au bénéfice de la société.

Illustration 6 – Vue du pont contrastant avec l’ancienne structure

56 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


HISTOIRES DE ROUTES
Quand Hokusai peignait des ponts
Les documents suivants sont extraits du catalogue de l’exposition « Hokusai’s bridges, Sumida Bridges – The Full Span» qui
s’est tenue à Tokyo à l’automne 2018
Illustrations © The Sumida Hokusai Museum, Tokyo, Japon

L es ponts font partie de notre histoire : les êtres humains ont construit des ponts depuis l’Antiquité pour surmonter
les obstacles naturels posés par les rivières et les gorges, pour faciliter les voyages et la communication. Au fil
des siècles, les contraintes politiques et technologiques ont entraîné le développement de types et de structures
de ponts spécifiques à certaines époques. Dans le passé, par exemple, les ponts étaient construits en bois ou en
pierre. Aujourd’hui, l’acier est le matériau principal.

Une exposition organisée à Tokyo en


2018 a présenté les ponts peints par
Hokusai (1760 - 1849) et ses élèves.
Hokusai a remarqué la grande variété
des structures de pont et les a saisies
comme lui seul pouvait le faire dans la
série Vues remarquables de ponts dans
diverses provinces, considérée comme
l’un de ses chefs-d’œuvre. Il y dépeint
non seulement des ponts célèbres,
mais aussi des ponts aux structures
particulièrement intéressantes. Les
onze œuvres de cette série ont été
présentées dans cette exposition,
ainsi que de nombreuses autres
œuvres illustrant la variété des ponts
représentés par les élèves de Hokusai
ainsi que par Hokusai lui-même.
Illustration 1 - Le pont suspendu dans les nuages du mont Gyōdōsan près d’Ashikaga,
de la série « Vues remarquables de ponts dans diverses provinces »

Katsushika Hokusai (葛飾 北斎,


31 octobre 1760 - 10 mai 1849),
connu simplement sous le nom de
Hokusai, était un artiste, peintre et
graveur japonais de la période Edo.
Né à Edo (aujourd’hui Tokyo), Hokusai
est surtout connu comme l’auteur de
la série de gravures sur bois Trente-
six vues du mont Fuji (富嶽三十六景,
Fugaku Sanjūroku-kei, vers 1831) qui
comprend la gravure emblématique
internationale La Grande Vague au
large de Kanagawa.#

Illustration 2 - Vieille vue du pont ponton de Sano dans la province de Kōzuke,


de la série « Vues remarquables de ponts dans diverses provinces »

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 57


HISTOIRES DE ROUTES

Illustration 3 - Le pont de Yahagi à Okazaki


sur la route de Tōkaidō,
de la série « Vues remarquables de ponts
dans diverses provinces »

Illustration 4 – Vue ancienne


du pont Yatsuhashi dans la province de
Mikawa, de la série « Vues remarquables
de ponts dans diverses provinces »

Illustration 5 – Pont de Kintaikyō


dans la province de Suō,
de la série « Vues remarquables de ponts
dans diverses provinces »

58 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


HISTOIRES DE ROUTES

Illustration 6 - Le pont de Tenma


dans la province de Settsu,
de la série « Vues remarquables de ponts
dans diverses provinces »

Illustration 7 - Sous le pont


Mannenbashi à Fukagawa,
de la série « Trente-six vues du mont Fuji »

Illustration 8 - Le pont Nihonbashi à Edo


(vieux Tokyo),
de la série « Trente-six vues du mont Fuji »

Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org 59


HISTOIRES DE ROUTES

Illustration 9 - Belle journée d’automne à Choko Levee,


de la série « Huit vues des îles Ryūkyū »

Illustration 10 – La voix du lac à Rinkai,


de la série « Huit vues des îles Ryūkyū »

60 Routes/Roads 2020 - N° 386 - www.piarc.org


XVIe Congrès mondial de la viabilité hivernale
et de la résilience routière
Calgary 2022
« S’adapter à un monde en changement »
PIARC lance un appel à contributions individuelles sur les thèmes choisis pour le XVIe Congrès mondial de PIARC sur la
viabilité hivernale et la résilience routière, qui se tiendra à Calgary (Canada) du 8 au 11 février 2022.

Le Congrès mondial de la viabilité hivernale et de la résilience routière est un événement de niveau mondial qui s’appuie
sur des décennies d’expérience de PIARC. Il réunit des experts et des praticiens de la route du monde entier. Il s’agira
de la 16e édition du Congrès international de la viabilité hivernale, que PIARC organise tous les quatre ans depuis 1969.

Le Congrès de 2022 s’articulera autour de deux thèmes : Viabilité hivernale et résilience.


Les langues officielles du Congrès sont l’anglais, le français et l’espagnol.

SOUMISSION DES RÉSUMÉS ET DES ARTICLES COMPLETS


Les contributions ne sont sollicitées que sur les sujets décrits ci-dessous. Les auteurs sont invités à soumettre un
résumé, avant le 30 novembre 2020, en utilisant la fonction en ligne du site web du Congrès à l’adresse suivante :

https://abstracts-calgary2022.piarc.org/
Le résumé doit être rédigé et soumis en anglais, français et/ou espagnol, avec un maximum de 400 mots (l’anglais est
fortement recommandé pour l’évaluation et la diffusion).

Tous les documents doivent être des travaux originaux disponibles à la publication. Les documents déjà publiés ne
seront pas acceptés. Toute référence de nature politique, commerciale ou publicitaire doit être exclue des articles.
L’indication d’un nom de marque doit être exclue dans le titre et dans le résumé.

Les documents doivent présenter des études de cas, des résultats de recherche et/ou des expériences pratiques en
rapport avec les thèmes de cet appel.

Les résumés seront examinés de manière anonyme par les comités techniques de PIARC et les décisions seront
notifiées aux auteurs avant le 15 mars 2021. Les auteurs des résumés acceptés seront invités à soumettre un article
complet avant le 15 juillet 2021. Les articles complets peuvent être soumis en anglais, français et/ou espagnol (il est
recommandé de soumettre dans autant de langues que possible afin de maximiser la diffusion).

Ils seront examinés par les comités techniques de PIARC et les décisions concernant la publication et les demandes de
modifications seront notifiées aux auteurs avant le 15 octobre 2021.

Les articles seront évalués sur l’originalité du contenu, l’intérêt technique et l’applicabilité et la transférabilité des
résultats.

Toutes les propositions acceptées seront présentées lors de séances d’affiches et seront incluses dans les actes du
Congrès. Les contributions exceptionnelles seront sélectionnées pour être présentées oralement lors des séances
techniques du Congrès.

La publication des communications acceptées est soumise à l’inscription d’au moins un des co-auteurs au Congrès.

Appel à contributions À partir de juillet 2020


Date limite de soumission des résumés par les auteurs 30 novembre 2020
Avis d’acceptation des résumés 15 mars 2021
Date limite de soumission du texte intégral des articles par les auteurs 15 juillet 2021
Avis d’examen des documents 1er octobre 2021
XVIe Congrès mondial sur la viabilité hivernale et la résilience routière - Calgary 2022 8-11 février 2022

TEXTE COMPLET DE L’APPEL À COMMUNICATIONS SUR :


https://abstracts-calgary2022.piarc.org/fr/consignes.htm
Congrès mondial de la Viabilité hivernale et de la Résilience routière

THÈME DE LA VIABILITÉ HIVERNALE


Thème 1 : Situations hivernales extrêmes dans les régions à climat froid
Lors d’événements hivernaux extrêmes, les plans d’intervention standard peuvent ne plus être valables. Ces
événements peuvent avoir des conséquences importantes pour la société. Dans de nombreux pays, il existe des routes
dans des zones où les conditions sont extrêmes, telles que les cols de montagne nécessitant des convois, les routes
dans des zones ouvertes exposées à la dérive de la neige et les routes vulnérables aux avalanches. Mais les conditions
météorologiques extrêmes peuvent également se produire n’importe où ; par exemple, de fortes chutes de neige,
des pluies verglaçantes, un froid extrême, des conditions météorologiques changeant rapidement, une augmentation
rapide de la température et la fonte des neiges qui peut provoquer des glissements de terrain ou des inondations.

Thème 2 : Effet du changement climatique sur le service hivernal


Le service hivernal est dominé par le climat et les événements météorologiques locaux. Comment le changement
climatique affectera-t-il les conditions hivernales et comment affectera-t-il le service hivernal ? Comment les
organisations de service hivernal peuvent-elles réagir en tenant compte d’une analyse coûts-avantages ? Quelles sont
les périodes de planification appropriées et les possibilités de développement technologique, les stratégies nouvelles
ou actualisées et le contrôle de la qualité des performances nécessaires pour répondre au changement climatique ?

Thème 3 : Informations sur la météo routière


Le MDSS (système d’aide à la décision en matière de maintenance), les STI et l’utilisation de données mobiles sont
les nouveaux outils qui aident à assurer les opérations de service hivernal et à fournir des informations au public.
Des présentations seront faites sur les innovations, la technologie et les informations liées à la prise de décision.

Thème 4 : Nouvelles technologies et méthodes de service hivernal


Le service hivernal évolue au fil des ans grâce à un développement et à une recherche continus. Ce thème couvre
tous les sujets concernant l’innovation dans les techniques et les technologies du service hivernal.
Techniques Technologies
• Application des déverglaçants et des • Nouveaux équipements de déneigement et de déverglaçage ;
antiverglaçants ; • Automatisation du contrôle de la neige et du verglas ;
• Amélioration de l’utilisation des abrasifs ; • Produits chimiques, matériaux nouveaux ou de substitution ;
• Procédures et méthodes de déneigement • Sélection et optimisation des itinéraires;
et de déverglaçage ; • Spécifications et normalisation des équipements et des
• Des procédures de maintenance durables matériaux ;
et adaptées ; • Mesure des produits chimiques résiduels en hiver ;
• Protection contre les chutes de neige et • Produits ou équipements durables.
les avalanches.

Thème 5 : Gestion du service hivernal


L’administration des activités de service hivernal comprend la planification et l’organisation de nombreuses
fonctions des agences routières et nécessite des ressources importantes. Le service hivernal fait partie de
la stratégie opérationnelle des administrations routières. Les politiques et les outils que ces administrations
utilisent dans sa gestion font l’objet de ce sujet.

Thème 6 : Communications avec les usagers de la route


et véhicules connectés et autonomes en hiver
Ce thème portera sur les informations hivernales que le grand public veut et doit connaître, et sur les meilleures
plateformes à utiliser pour garantir que les informations puissent être fournies de manière claire et efficace en
utilisant à la fois la saisie manuelle et les informations reçues et envoyées par les véhicules connectés. En outre,
quels sont les effets des conditions hivernales sur les véhicules connectés et autonomes ; et l’effet des véhicules
connectés et autonomes sur le service hivernal ?
Congrès mondial de la Viabilité hivernale et de la Résilience routière

Thème 7 : Service hivernal en milieu urbain


L’entretien du réseau urbain peut varier, allant des grandes autoroutes aux impasses où l’espace est très limité.
La plupart des gens vivent dans les villes et beaucoup n’y utilisent pas de transports personnels. Le transport
multimodal est courant dans la plupart des villes, la neige et le verglas en hiver ont un impact sur les différents
types de transport et leurs liaisons. En raison de l’utilisation intense des zones urbaines, l’environnement de ces
zones est exposé aux opérations de service hivernal.

THÈME DE LA RÉSILIENCE
Thème 8 : Meilleures pratiques pour accroître la résilience des réseaux routiers
Cet appel vise à identifier les meilleures pratiques qui augmentent la résilience du système de transport routier
à toutes les menaces/dangers.

Nous encourageons les communications traitant de l’évaluation de la résilience, de la mise en œuvre d’actions
visant à accroître la résilience, ainsi que de l’identification des aspects économiques, sociaux et environnementaux
de la gestion de la résilience, et du rapport coût-efficacité de stratégies d’adaptation éprouvées.

Cela comprend également l’élaboration de cadres d’adaptation au changement climatique pour les infrastructures
routières et l’identification des méthodologies de gestion des risques et des besoins en données (par exemple, les
pratiques innovantes en termes d’acquisition, de traitement et de partage des données de prévision et d’analyse
des risques, ainsi que le développement de plateformes intégrant les systèmes d’information géographique - SIG
- et les systèmes de gestion du patrimoine routier). L’évaluation de la vulnérabilité, la hiérarchisation des risques,
l’élaboration et la sélection de réponses et de stratégies d’adaptation, ainsi que la prise de décision peuvent
prendre en compte des approches méthodologiques nouvelles et innovantes, en particulier l’évaluation de la
criticité et les voies d’adaptation.

Thème 9 : Gestion des catastrophes et des risques


Les pays qui connaissent des situations désastreuses acquièrent des connaissances uniques en matière de gestion
et développent des technologies de contre-mesure sur mesure en fonction de leur expérience. À mesure que
les sociétés se diversifient, les dommages causés par les catastrophes évoluent en même temps que la société.
Par conséquent, le type de technologie nécessaire pour gérer les situations désastreuses doit continuellement
s’adapter aux besoins des usagers de la route et de la société. La tendance actuelle en matière de gestion des
événements catastrophiques accorde une plus grande attention à la qualité de la gestion. Diverses données/
informations disponibles peuvent être facilement collectées et fournies entre les administrateurs et les usagers
de la route. L’interaction avec le public et d’autres organisations est également un mot clé pour produire de
meilleurs résultats. Par comparaison, l’approche traditionnelle de la gestion des catastrophes consiste à donner
la priorité à la sécurité des infrastructures. Une approche et des techniques de gestion nouvelles ou actualisées
sont donc les bienvenues pour la discussion.

Thème 10 : Améliorer la résilience de l’exploitation des réseaux routiers


grâce aux STI et aux nouvelles technologies
Lorsque des perturbations surviennent, la capacité des opérateurs routiers à fournir correctement des informations
aux usagers de la route peut être compromise et l’efficacité des opérations routières peut être mise en péril. Les
dangers qui se produisent le long du réseau (comme les situations hivernales extrêmes ou les événements à fort
impact par exemple) peuvent représenter un défi pour de nombreux opérateurs routiers en termes de garantie de
la viabilité de la route, et donc de la mobilité des personnes et des biens le long du réseau lui-même.

Ce thème couvre toutes les communications présentant des expériences sur la façon dont la collecte de données,
l’utilisation de nouvelles technologies et l’analyse représentent pour les exploitants routiers des atouts
précieux, afin de fournir non seulement des informations de base mais aussi une valeur réelle aux usagers
de la route, en améliorant l’efficacité de l’exploitation des réseaux routiers.
Congrès mondial de la Viabilité hivernale et de la Résilience routière

Thème 11 : Chaussées résilientes


Nous encourageons les communications qui abordent :

• Résilience des chaussées et des infrastructures • Le recours à des approches avancées de gestion des
routières, dans les zones urbaines et rurales chaussées pour atténuer/intégrer les catastrophes
• Expériences en matière d’adaptation de la conception naturelles ou d’origine humaine peut également
et des matériaux des chaussées résilientes, par être envisagée ;
exemple à des pneus non standard tels que les pneus • Matériaux ayant des capacités d’auto-réparation ;
simples à base large de nouvelle génération, • Des revêtements de chaussée qui conservent leurs
• Utilisation de technologies pour l’investigation et le caractéristiques indépendamment des variations
suivi de la résilience après une catastrophe climatiques, etc.

Les articles peuvent être basés sur la modélisation théorique, la recherche en laboratoire, l’évaluation des
performances in situ ou des études de cas.

Thème 12 : Résilience des ponts face aux risques naturels


En ce qui concerne les ponts routiers, les préoccupations liées au changement climatique sont la variation
extrême des températures de l’air, les vents extrêmes dus aux ouragans et aux typhons, l’élévation du niveau
de la mer, la fréquence et l’intensité des précipitations et les inondations qui en découlent, etc. En outre, les
événements sismiques ont causé de graves dommages aux ponts routiers dans les zones sismiques, ce qui a
entraîné la fermeture des réseaux routiers.

Thème 13 : Résilience des terrassements aux catastrophes naturelles


Il est essentiel d’étudier l’effet des catastrophes naturelles sur les terrassements existants et les mesures utilisées
pour leur remise en état. Des mesures spécifiques sont recherchées dans la conception et la construction des
terrassements afin de prévenir l’effet des risques naturels sur leur performance pendant leur durée de vie.

Les communications peuvent concerner n’importe quelle zone géographique et impliqueront toutes les techniques
utilisées dans le passé pour améliorer les performances des structures terrestres, quelle que soit la complexité
de la méthode employée. Elles pourraient éventuellement être intégrées un rapport de PIARC sur la résilience des
terrassements.

Thème 14 : Résilience - mesures visant à maintenir un tunnel routier disponible


pour la circulation en toute sécurité dans diverses circonstances
Par rapport à une route en rase campagne, les tunnels sont relativement vulnérables en ce qui concerne la
disponibilité à la circulation, en raison des nombreuses mesures de sécurité requises pour permettre une traversée
sûre. En outre, un accident de circulation ou un incendie dans un tunnel nécessite souvent plus de temps et d’efforts
pour normaliser la situation que sur la route en rase campagne. Ainsi, dans le contexte des tunnels routiers, la
résilience pourrait être décrite comme la capacité à maintenir le tunnel disponible à la circulation en toute sécurité,
lors de diverses situations anormales, comme les accidents de circulation, les dysfonctionnements techniques, les
conditions météorologiques extrêmes, d’autres risques naturels et artificiels, ou l’entretien et les rénovations.

Thème 15 : Résilience des routes et du transport routier


Le Plan stratégique de PIARC reconnaît la résilience comme l’un des problèmes mondiaux à aborder. Les
documents qui seront soumis sur ce sujet doivent être en rapport avec le Plan stratégique de PIARC.

Toutes les communications sont les bienvenues dès lors qu’elles traitent des routes et du transport routier. Les
articles portant sur le changement climatique et la résilience des réseaux routiers, la gestion des catastrophes,
l’exploitation des réseaux routiers, les chaussées, les ponts, les terrassements, les tunnels doivent être soumis
au travers du thème correspondant (thèmes 8 à 14).

INFORMATIONS DE CONTACT
Courrier électronique : paperscalgary2022@piarc.org
Site web : https://abstracts-calgary2022.piarc.org/

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