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(onespondonce CREFIGE
Université de Paris Dauphine
Place du maréchal de Lattre de Tassigny
75775 - Paris Cedex 16
Introduction
Le thème de l'harmonisation comptable internationale provoque un vif intérêt chez les praticiens
comprables, les universitaires, les investisseurs et autres utilisateurs des rapports financiers. Un
certain nombre d'organismes comme l'Intemational Accounting Standards Comminee (IASC),
I'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) et l'Union européenne
essaient de promouvoir des règles et des normes comptables à l'échelle internationale.
En Âllemagne, l'harmonisation et la normdisation comptables apparaissent pour de nombreux
auteurs comme une nécessité: la recherche de financement sur les marchés de capitaux mondiatx
est la preuve de cene exigence. Ainsi, Daimler-Benz a, en 1993, publié ses comptes selon les prin-
cipes comptables américains généralement admis (United States/Generally Accepted Accounting Prin-
ciples, USIGAAP) ; en 1994, Bayer AG, Hoechst AG, Schering AG et Heidelberge r Zement AG ont
établi leurs comptes consolides selon les normes de l'lASC.
Ces situations soulèvent plusieurs difficultés et traduisent un besoin d'evolution ou de révolution
dans la comptabilité allemande: comment faire face aux changements et à la mondialisation des
échanges financiers ? La mise en æuvre et la finalité des processus d'harmonisation restent sources
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- évaluation conseryatrice.
Les remarques de Liener (1992), président de Daimler-Benz, sont d'autant plus intéressantes
qu elles interviennent un an avant la présentation des comptes de Daimler-Benz selon les normes
américaines (US/GAAP). Dans la présentation de Schruff (1993), cette opposition se traduit dans
les buts assignés à la comptabilité : besoins d'information pour les investisseurs conrre prorection des
créanciers. Elle devient explicite et concrète à uavers plusieurs normes proposées par I'IASC qui
vont à I'encontre des principes comptables allemands. Schruff (1993) prend l'exemple de la norme
837 de |IASC concernant la comptabilisation des frais de recherche et développement. ks entre-
prises allemandes ne disposent d'aucune option : ces frais sont inscrits en charge et ne peuvent figu-
rer à l'actif, Or la norme 837 pr&oit dans certains cas leur activation au bilan. n On constate déjà
par cet exemple que les principes comptables de I'IASC ne considèrent pas la fonction de maintien
du capital à ûavers la limite de distribution du résultat, 5 (Schruff,1993, p. 40S). Le problème esr
également posé concernant la comptabilisation des produits à long terme (normeÛ42 de |IASC).
Plus généralement, les Allemands semblent réticents quant à l'adoption du cadre conceptuel de
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Ordelheide (L993) dénonce enfin Ie fait que le principe de mre andfair uieut soit appliqué dans
les pays anglo-saxons en vue de mesurer au mieux la performance des dirigeants. Or, ce n'est pas le
cas en Allemagne. On retrouve cette idée chez Schruff (1993), pour lequel les pays anglo-saxons
privilégient la performance et en particulier le management (donc le comportement des dirigeants)
alors que les Allemands privilégient la protection des créanciers.
De façon générale, ce principe est largement critiqué, cofilme étant un frein d'une part, à la
normalisation comPtable (Haller, 1992) et, d'autre part, à l'évolution des principes comptables.
Ainsi, pour Probst (1992), ce principe limite les applications techniques proposées par les directives
européennes qui n ont ainsi qu'un pouvoir politique limité.
læs conséquences de ce principe se traduisent, selon Haller (1992), directement sur les conceprs,
les normes, les pratiques comptables et, indirectement, sur les décisions des investisseurs étrangers,
sur l'harmonisation internationale.
En effet, les comptes consolidés allemands ont seulement pour vocarion de donner une informa-
tion pertinente aux différentes pafties intéressées. Ni la distribution de dividendes, ni le paiement de
l'impôt ne se font sur la base des comptes consolidés. Il y a donc une prééminence beaucoup moins
forte sur les comptes consolidés car le HGB donne la possibilité de présenter les états financiers sans
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Enfin, le point de vue de Pohle et Schwitters (1995) sur le principe de prééminence esr inréres-
tT! * il évoque la prééminence inversée : le poids de la fiscalité serait tel qu il conduirait les comp-
tables à établir le bilan commercial par référence au bilan fiscal.
Bien que les liens comptabilité/fiscalité soient perçus comme une lacune du qystème allemand,
aucune mesure concrète n'est, semble-t-il, envisagée par le gouvernement allemand pour remeftre
en cause ce principe.
Une étude réalisée auprès de 63 enueprises et de 43 universitaires a été réalisée par Fôrschle, Glaum
et Mandler (1995) sur le thème de I'harmonisation et de l'utilisation des lAS, des US/GAAP et des
principes du HGB. Face à I'importance croissante des marchés de capitau et à I'internationalisation
des choix des investisseurs, il paraît intéressant de voir comment ces nouvelles données sont analy-
sées par les Allemands et surtout s'ils se prononcent en faveur d'un changement de la comptabilité.
Compte tenu de la richesse de l'étude, nous ne donnerons que les résultats qui nous paraissent
les plus pertinents.
Le premier concerne la valeur de I'information contenue dans les comptes sociaux. Alors que les
Anglo'Saxons voient dans les pratiques allemandes un manque d'information, la position allemande
est différente. En effet, seulement 40 o/o des praticiens allemands pensent que l'information finan-
les comptes consolidés peuvent remplir la fonction d'information auprès des investisseurs
puisqu ils sont indépendana de toute considération fiscde et ne sont pas source de distribution de
dividendes. On peut donc appliquer les normes de I'IASC sans préjudice potu les entreprises ou sans
risque de non-maintien du capital ;
le bilan et le résultat consolidés, d'après les articles 300 abs. 2, 308 abs. I du HGB sont
complètement détachés des comptes annuels. Par conséquent, les groupes profitent de cette possibi-
lité de se détacher de la comptabilité fiscale et mènent de véritables stratégies comptables.
Sur la base de ces diftrents arguments, il
apparalt donc possible d'appliquer les normes de
|IASC aux comptes consolidés : u Par la suite, on pourra commencer par examiner quelles sont les
conséquences de l'utilisation dçs principes de I'IASC sur les comptes consolides par comparaison
aux principes du HGB. , " (Schruff, 1993, p. 412). tauteur y voit en fait une solution possible
mais non souhaitable. Comme nous allons le voir par la suite, il suggère plutôt une modification de
la comptabilité allemande par les comptes consolidés atxquels on appliquerait les principes de
fhSC. Dans la mesure oir l'adoption des principes de |IASC conduit à une réduction des options
applicables comptablement et facilite des comparaisons internationales, alors on va vers une amélio-
,"tiorr, à condition que u les principes de I'IASC soient conformes au critère d'objectivité o
to
(Schrufi 1993, p.421). Or cela ne semble pas être le cas pour cet auteur.
Haller (1995) explique que I'application des directives européennes en 1985 a eu peu de retom-
ont été interprétées à la lumière du HGB, sans qu il soit tenu compre
bées immédiates. En effet, elles
des développemenm internationaux et des discussions passées. Ces propos sonr confirmés par le fait
que l'Allemagne n'a pas adopté I'article 29.I de la Z directive européenne aurorisant les groupes à ne
pas appliquer les mêmes normes comptables alrx comptes individuels qriaux groupes. Dans la mesure
où Haller (1995) s'oppose à la création d'une dichotomie comptes sociaux/comptes consolidés, qui
riexiste pas enAllemagne comme elle existe en France, il rejoint la position de Schruff(1993). Mais il
ne va Pas aussi loin en ne proposant pas explicitement de modifier la comptabilité allemande.
Les critères évoqués, chez les deux auteurs, restent dans des domaines différents : Haller (1995)
ne remet Pas en cause I'objectivité et la clarté des normes IASC mais la pertinence de la dualité :
n Même " un modèle comptable dual " comme celui udlisé en France, qui traite les méthodes comp-
tables dans les comptes consolidés de manière différente de celles des comptes individuels, est à
discuter. > " (Haller, 1995, p.243).
Seeberg (1995) a, sur ces points, une position plutôt partagée. En effet, il évoque à la fois les
avantages et les inconvénients de l'application des normes IASC sans vraiment trancher : ( ayant
tout la question devrait se poser si l'établissement du bilan consolidé comparé au bilan individuel est
économiquement " correct ". À long terme, les répercussions indirectes àe l'établissement du bilan
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Plusieurs auteurs voient dans I'application des normes de I'IASC ou des US/GAAP une évolution
inévitable de la comptabilité. Remarquons que les deux réftrentiels sonr mis sur le même plan. Pour
Ktintig (1995), en effet, il semble inéluctable d'dler vers une reconnaissance de différenrs réftrentiels
comptables, sachant que nombre d'entreprises cherchent sur les places financières internationales,
notamment celle de New York, des autorisations de cotations. Ces autorisations, surtout celle déliwée
par la SEC (Securities and Exchange Commission), soulèvent le problème du référentiel à choisir : celui
de I'IASC ou les US/GAAP ? Il semblerait que la SEC essaie de rapprocher aurant que possible, avec
le concours de I'IOSCO, les normes de I'IASC de celles des US/GAAP Même si la reconnaissance
mutuelle et entière semble peu probable entre flASC er la SEC, des informations supplémentaires
aux bilans allemands vont émerger de l'application de l'un ou l'autre référendel. Et compte tenu des
difficultés actuelles, u []es prochains effors d'harmonisation devraient se concentrer sur les compres
consolidés comme instrument primordial d'information ,'i
(Kùntig, lgg5, p.434).
\Tiedmann (1995) voit dans I'application des normes de I'IASC aux comptes consolidés une
solution à I'intégration de données internationales dans la comptabilité. læ principe de rattachement
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Par ailleurs, I'auteur s'interroge sur I'orientation à prendre dans les principes comptables à long
terme. Sans proposer véritablement de changement de la comptabilité allemande, il insiste sur la
position à adopter par les entreprises allemandes si elles ne veulent pas être exclues des marchés de
capitaux mondiaux les plus importants. Enfin, le détachement des comptes sociaux des compres
consolidés semble souhaitable, compre tenu du principe de prééminence.
Schruff (1993) voit dans le détachement des compres consolid& des comptes sociaux une solu-
tion qui n est pas originale mais qui permet de tenir compre exclusivement du caractère informa-
tionnel. de la comptabilité. En revanche, il se prononce pour une modification des principes
comptables des comptes consolidés (et donc rejoint la position de Duisburg,1993), mais qui est
différente des principes proposés par I'IASC: u IJapplication des normes de |IASC aux compres
consolidés de lege daa dest pas souhaitable dans tous les cas. Pour une évoludon de la comptabilité
allemande des groupes, dz lege ferenda les principes IASC pourraient être transformés pour la plupart
en principes de baser'7 (Schruff, 1993, p.42I).ks normes de I'IASC pourraient ainsi servir de
Fondement à une réforme sans pour autant être adoptées intégralement. Schruff (1993) se distingue
ainsi de Kiintig (1995) et de Busse von Colbe (t995a t9g5b).
Busse von Colbe (1995 a" I995b) andyse la situation de la comptabilité allemande sous Ïangle de
l'orientation des marches de capitaux. En effet, selon cet auteur, à l'heure où les pratiques comptables
allemandes sonr ûès conrroversées et discutées (surtout du côté anglo-saxon), la comptabilité a un
rôle à jouer dans la conduite des entreprises sur les marchés financiers. Les comptes consolidés sont
plus appropriés que les comptes sociaux pour véhiculer I'information nécessaire aux marchés de capi-
i"u". E" ..1", l" question se pose de savoir s'il est peninent de leur appliquer les règles du HGB. La
reconnaissance de cette dichotomie lui paralt un moyen d'avancer significativement vers l'harmonisa-
tion et les comparaisons de bilans. Par ailleurs, la 7 directive a également accepté I'utilisation de deux
réftrentiels comptables différens pour les comptes consolidés et les comPtes sociaux (anicle 29.2(a),
Nobes, Roder et Slomp, 1994, p.46) mais I'Allemagne n'a pas adopté I'anicle dans le HGB.
Face à ces difficultés, Busse von Colbe (I995a) estime que n'autoriser que les sociétés cotées à
utiliser les US/GAAP ou les IAS est une ( petite solution , " : (Busse von Colbe, 1995a p. 388).
Il propose une alternative: les Bourses financières pourraient noter les entreprises, selon un droit
d'optiàn, d apres leurs comptes consolidés et selon les IAS. Sa position est donc sur ce point diffé-
r.ni. d. celle de Schruff (1993). En outre, un droit d'option pourrait revenir de droit aux grandes
entreprises faisant appel à l'épargne publique. lJn autre point soulevé par l'auteur concerne la comp-
tabilisation des résultats des filiales étrangères, qui n'est pas réglementée en Allemagne. Une solution
flASC par l'ensemble des sociétés concernées.
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Kûntig (1995) va encore plus loin que l'application des normes de I'IASC aux comptes consolidés.
Il propose en effet une adoption des IAS par I'ensemble des entreprises : u ... les normes IAS offient
aussi à I'entrepreneur, qui n aspire pas à un engagement sur les marchés de capitaux de cefte softe,
une plate-forme en vue d'une amélioration de leur position internationale , 32 (Kûntig, 1995,
p. 435).Les IAS offrent ainsi la possibilité d'aller vers une inrernationalisation des compres er, en
cela, permettent une amélioration de l'information. En fait, pour I'aureur, la question principale est
de savoir si I'article 297 de HGB et les principes comptables allemands généralement ràmis, noram-
ment la faible importance du concept d'image fidèle, ne portenr p"r piel,rdi.e ar.rx entreprises alle-
mandes ; l'aspect concurrentiel est mis en valeur.
Par ailleurs, I'auteur pose le problème du critère à retenir en matière de consolidation; il
évoque ( une autre sous-organisation des demandes de règles de consolidation où un critère, autre
que la taille des entreprises serait préféré., 33 (Kûntig, 1995, p.444).1,a relation enre les gros
grouPes industriels et la majorité des entreprises esr telle qu'un autre critère de classement, qui àoit
être emprunté aux marchés de capitaux, s'impose. Pour éviter des procédés arbitraires ou le mélange
des normes de I'IASC et du HGB, des règles précises mais cependant ouvertes sont nécessaires. En
effet, sous le critère de I'objectivité, ces règles doivent permerffe aux entreprises non cotées d'adopter
les principes de I'IASC ou les US/GAAP
Seeberg (1995) souhaite également une réforme de la comprabilité allemande mais sa pensée est
rès différente. Il est assez critique vis-à-vis de la position anglo-saxonne er en prend le contre-pied.
la création d'un organisme émettant des normes permettrait d'éviter une comptabilité à deux
yitesses oir un type de normes serait réservé à un type d'entreprises. Si, ponctuellement, I'adoption
des normes de I'IASC par les sociétés cotées constitue en soi une solution avantageuse, elle conduit,
d'une part, à un affaiblissement de la portée des principes compables dlemands généralement
admis et, d'aurre part, à une distorsion dans le tissu industriel allemand qui n est peut-être pas
souhaitable: u En outre, cela aboutirait à limiter rigoureusement l'utilisation de règles d'établisse-
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Conclusion
l,a prise de position du ministère de la Justice allemand, face à I'harmonisation comptable, révèle sa
difficulté, d'une part à trancher entre les diftrentes solutions possibles (il ne semble traiter qu une
partie du problème de I'harmonisation sans proposer de changement ou de réforme du système
comptable) et, d'autre paft, à intégrer des données internationales. En acceptant que les grouPes
cotés utilisent les US/GAA? ou les IAS pour leurs comptes consolidés, le gouvernement alnorce une
évolution mais à rravers o eine kleine Li)sung )), pour reprendre l'expression de Busse von Colbe.
Face à cetre décision, il est intéressant de constater que le sentiment allemand sur l'harmonisa-
tion est ambigu. Le cas de Liener est exemplaire: en 1992, 1l se prononce assez clairement pour ne
pas adopter les normes américaines (et propose un autre système de principes mondiaux, le
\7APAD) et, en 1993, il est contraint d'appliquer les normes US/GAAP aux comPtes consolidés de
Daimler-Benz. On rerrouve cette dualité dans la recommandadon proposée par l'Id'\ù?' en mars
1995, fondée sur la norme IAS7, proposant un état de présentation des flux de trésorerie. En effet,
o/o des entreprises
une étude réalisée par Haller et Jacoby (1995) montre qu en fait seulement 7,6
observées considèrent cet état comme ayant une importance comparable à celle du bilan ou