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NOTE SUR UNE INSCRIPTION TROUVÉE A TOBNA

Des fouill es entrep rises sur le site d e Tobna ( anlique Thubuna e) par Monsieur
le Sous-Préfet de Barika ont mis au jour à 250 mètres au Sud-Oues t du fort byzantin,
donc hors de l'enceinte telle qu 'elle nous est révélée par la photographie aérienne et
les fouill es anciennes, un ensem ble de bâtiments dont la destination aussi bien que
l'époqu e est ince rtain e. L 'occupation du site, en efTet, est attestée depuis la période
romaine jusqu 'à l'épo qu e d es Hammadites (1 ).
A proximité de ces bâtiments, fut découvert un bloc parallélépip édique, mal
équarri, de 147 cm de longueur sur 40 cm de hauteur et 30 cm d 'épaisseur , qui porte
sur une de ses grandes fa ces l'inscription :

X*S*l*D
M*IVL*NEON
V*S*L*A

L e champ épigraphique a une longueur de 65 cm eLun e hauteur de 30 cm environ.


Il porte aux deux premières lignes des traces de réglure. Les lettres , assez bien gravé es
ont les dimensions suivantes : ligne 1 = 43 à 50 mm ; ligne 2 = 73 mm ; ligne 3 =
60 mm .
La première ligne es t nett ement décalée vers la gauche. L es espacements y sont
importants. Ils le sont moins à la lign e 3. L es let tres son t resse rrées à la second e ligne.
Deux trous de sce ll ement en co re emplis d e plomb encadrent l'inscription à droite
et à gauche. L es tild es surmontant les lettres de la première li gn e sont en forme
d'accents circonflexes, les signes de ponctuation de simples points.
L 'a bréviation S. I.D . ou D.S.I. est fréqu ente sur les inscription s relati ves au culte
so laire (2 ). On peut donc res titu er :
X(?)S(oli)D(eo)I(nviclo) J M(arcus) Iul(ius ) Neo n / v (olum) s ( olvtl)l(ibens)
a (nimo).

( 1) Sur Tobna, on L•·ouvera un e bibliographie complè le dans Gsell , Atlas archéologique de l'Algérie,
reuill e 37, no 10.
(2) Pour S.I. D., c f. M. .J. Vermaseren, Corpus inscripli on wn el monumenlorum Religionis lwil hriacae,
La Ha ye, T . I 1956; T . II 1960: 185 1 = C. I.L . III , 15085 ( Da1malie) ; 1709 = C. 1.L. 11145 (Pannonie) ;
1720 ( Pannonie ); 1782 = C. I.L. III 1432 (Pannonie ).
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172 MICHEL JANON

Fig. 1.

Le surnom grec Neon a déjà été relevé en Afrique. On trouve sur une inscription
funéraire de la nécropole du Nord à Lambèse: C(aius ) Iul (ius ) Ne j on v (ixit) a (nnis )
viii ( 1 ).
Il serait vain d'essayer d'établir un lien de parenté entre cet enfant mort à huit
ans et le dédicant de l'inscription à Sol I nu ictus de Thubunae : l'adoption du gentilice
Julius par les nouveaux romanisés a été fréquente sous l'Empire et le surnom Neon
est très répandu en Grèce.
Le signe X au début de la première ligne est embarrassant. On peut noter qu'il
est placé en dehors du champ épigraphique et que sa présence apporte un déséquilibre
dans la composition de l'inscription. L'hypothèse de l'adjonction de cette lettre sur
une inscription plus ancienne est cependant à rejeter. Cela ne nous éclairerait pas
davantage d'ailleurs. De toute façon, les traces de réglures visibles à la première ligne,
intéressent autant le X que les deux lettres suivantes et atLestent la contemporanéïté
de leur gravure.
Le X est parfois l'a bréviation du titre decemvir (2). Ce n 'est sûrement pas le cas
ici. Si l'on tente d'éclairer le problème grâce à l'origine hellène du dédicant, on aboutit

( l ) C. I.L. VIU , 3728 et W. Thieling, Der hellenismus in Kleinafrika , Rome, 1911 , p. 109.
(2 ) Cf. Cagnat, IVTanuel d'épigraphie laline, 2e édition, Paris, 1889, p. 426.
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N OT E SU R U N E I NSCR IPT IO N T R O UVF:E A TOB NA 173

à une impasse . Outre le fait qu e le mélange dan s le m êm e Lexte épigraphiqu e d ' abré-
viations grecqu es et romaine s n'existe pas aill eurs , au cun de s mots grecs commen çant
par x n 'est utilisé pour qualifier le Soleil divini sé .
Si le signe X ou +
est à peu près inconnu dans les dédi caces à Mithra ( 1), il a
par contre été gra vé sur un certain nombre de stèl es afri cain es , à Saturne pour la
plupart (2). Symbole st ellaire sinon solaire, il indique la qualité céles te du dieu. Sur
un e inscription de Lambèse, d'autre part, Saturne est dit << invictu s d eus >> (3 ). E nfin ,
le S peut être l'abréviation de Saturn e 14). Faut-il voir d ans l'inscription d e Tobna
une dédi cace à Saturne, où le X serait soit un signe solaire, soit l'abréviation d e xp6voc; ?
Dans le cas où la première h y pothèse es t la bonne, un point reste à éclaircir :
qu el est le Sol 1nviclus auquel s'adresse notre insc ription? La qualité militaire possible
du dédicant e t ce qu e nou s savons de la diffu sion du culte de Mithra dans les armées
romaines, rend tentante un e identification au dieu phrygien . Doit-on pour autant
oublier qu e l' acclimatation du culte du Soleil , sous de s form es non mithriaques a
été t entée par plusieurs empereurs, Aurélien et Élagable en particulier? F . Cumont
avait pris soin de sé parer les inscriptions mithriaqu es et les inscription s relatives au
culte solaire (5). Il est certain que beau coup de ces dernières ont ét é gravées en l'hon-
neur de Mithra , bien qu e son nom n 'y fi gure pas. Mais n e ri squ e-t-on pas en attribu ant
les deux typ es d 'inscriptions au seul culte de M iihra (6) de fau sse r quelque peu le
problème en ignoran t systématiquement d 'autre s forme s du culte solaire?

Michel J AN O N .

(1) Au C.I. L. III , 7935, es t publi ée une " inscripti on " comprenant « des c hrismes e t de s X "· Il s'agit en
fait d e la r eprésenta ti on traditi onnelle des se pt planèt es sur un b as-reli ef mithria qu e mal gra v é (cf. F . Cumont,
Tex tes el JVlonum enls figurés relali(s au culle de Mithra , T ext e 587 p. 180 ; m onument 180 p. 303.
('2 ) Cf. C.I.L . VIII , 24333,24344; C. I .L. A lg. I 3 179 (Cr oix gamm ée surmontant un croissant ) ; Bulletin
de la Soc iété historique el géo graphiqu e de la régi on de Séti(, 1935, p. 68.
(3) C.I.L. VIII , 2667.
(4) Cf. nota mm ent C.I.L . VII I 1009, 24342, 1249 1.
(5) F . Cumon t , op . l.
(6) M.J . Vermaseren , op . l.

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