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Cours 3
Cours 3
1. Congruences
Définition 1.1. Soit m, a, b entiers. On dit que a est congru à b modulo m si m divise a − b.
(On dit aussi que “a et b sont congrus modulo m”.) En symboles
a ≡ b (mod m) ⇐⇒ m|a−b ⇐⇒ ∃k ∈ Z avec a − b = kn.
Par exemple on a 2 ≡ 8 (mod 3) car 3 divise 2 − 8 = −6. On a a ≡ 0 (mod 2) si et
seulement si 2 divise a − 0 = a, c’est à dire ssi a est pair. On a a ≡ 1 (mod 2) ssi il existe k
avec a − 1 = 2k et donc a = 2k + 1 est impair. Similairement on a
a≡2 (mod 5) ⇐⇒ a = 5k + 2 avec k entier,
a≡1 (mod 4) ⇐⇒ a = 4k + 1 avec k entier,
a≡3 (mod 4) ⇐⇒ a = 4k + 3 avec k entier.
Surtout on a
a≡0 (mod n) ⇐⇒ a = nk avec k entier. ⇐⇒ a est un multiple de n
Quelques propriétés de la congruence
Théorème 1.2. Soit a, b, c, a0 , b0 , n entiers. Les énoncés suivants sont vrais :
(a) (Reflexivité) a ≡ a (mod n).
(b) (Symétrie) a ≡ b (mod n) implique b ≡ a (mod n).
(c) (Transitivité) a ≡ b, b ≡ c (mod n) implique a ≡ c (mod n).
(d) a ≡ a0 , b ≡ b0 (mod n) implique a ± a0 ≡ b ± b0 (mod n).
(e) a ≡ a0 , b ≡ b0 (mod n) implique aa0 ≡ bb0 (mod n).
(f) Si d est un diviseur commun de a, b et n, alors a ≡ b (mod n) implique ad ≡ b
d (mod n
d ).
(g) Si d divise n, alors a ≡ b (mod n) implique a ≡ b (mod d).
Donc les règles de manipulation des congruences contiennent la plupart des règles de ma-
nipulations d’égalités entre entiers pour l’addition, la soustraction, et la multiplication. Mais
pour la division (et la simplification des congruences), c’est plus compliqué.
Exemple : 2 ≡ 16 et 3 ≡ 10 (mod 7) impliquent 2 · 3 ≡ 16 · 10 et donc 6 ≡ 160 (mod 7).
Preuve. (a) a − a = 0 = 0n.
(b) a − b = kn =⇒ b − a = −kn.
(c) a − b = kn, b − c = `n =⇒ a − c = (a − b) + (b − c) = (k + `)n.
(d) Laissée comme exercice.
(e) a − a0 = kn, b − b0 = `n =⇒ ab − a0 b0 = ab − a0 b + a0 b − a0 b0 = (a − a0 )b + a0 (b − b0 ) =
(kb + a0 `)n.
(f) Laissée comme exercice.
(g) Si d | n et n | a − b, alors d | a − b.
Théorème 1.3. Soient n et a entiers avec n ≥ 1. Alors a est congru modulo n à exactement
un des nombres 0, 1, 2, . . . , n − 1.
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CHAPITRE 3 : CONGRUENCES ET ARITHMÉTIQUE MODULAIRE 27
Donc chaque entier est congru à 0 ou 1 modulo 2, mais pas aux deux. Chaque entier est
congru à 0, 1 ou 2 modulo 3, mais pas à plus qu’un parmi les trois. Etc.
Preuve. Par la division euclidienne, on peut écrire a = qn + r avec q, r entiers et 0 ≤ r ≤
n − 1. Et a ≡ r (mod n) car leur différence est qn. Donc a est congru à un des nombres
0, 1, 2, . . . , n − 1.
Supposons maintenant que a est congrus à deux nombres r et s parmi 0, 1, . . . , n − 1. Par
symétrie et transitivité r et s sont aussi congrus, et il existe k entier avec r − s = kn. Or on
a 0 ≤ r < n et −n < −s ≤ 0, donc −n < r − s = kn < n et en divisant par n, −1 < k < 1.
Comme k est entier, on a k = 0 et r = s.
3. Le théorème chinois
Le théorème chinois. Soit m et n des entiers premiers entre eux. Alors quelque soit a et
b entiers il existe des solutions simultanées de x ≡ a (mod m) et x ≡ b (mod n), et cette
solution x est unique modulo mn.
Unicité. Soit x une solution simultanée des deux congruences, et soit y un deuxième entier.
Alors y est aussi une solution des deux congruences ssi on a x ≡ y (mod m) et x ≡ y
(mod n). Alors m | x − y et n | x − y, ce qui équivaut à ce que ppcm(m, n) | x − y ou x ≡ y
(mod ppcm(m, n)). Mais comme m et n sont premiers entre eux, on a ppcm(m, n) = mn.
Donc y est aussi une solution des deux congruences ssi x ≡ y (mod mn).
Maintenant tout entier est congru modulo n à exactement un entier k parmi {0, 1, 2, . . . , n−
1} et à exactement un entier aik parmi {a1 , a2 , . . . , an }.
≡ 1 · 1 · 1 · · · 1 · (−1) (mod p)
≡ −1.
On a montré le théorème suivant pour les premiers p ≥ 3. Le cas du premier p = 2 est facile.
Théorème de Wilson. Pour tout premier p on a (p − 1)! ≡ −1 (mod p).
Maintenant p ≥ 3 un premier, nécessairement impair (pourquoi ?), et soit a 6≡ 0 (mod p).
p−1 2
Selon le théorème 6.6 on a a 2 ≡ ap−1 ≡ 1 ≡ 12 (mod p), et donc selon le corollaire 6.3
p−1 p−1
on a a 2 ≡ 1 ou a 2 ≡ −1 (mod p). A quoi ces deux cas correspondent-ils ?
Or si a 6≡ 0 est un carré modulo p, c’est-à-dire s’il existe b 6≡ 0 avec b2 ≡ a (mod p), alors
on a
p−1 p−1
a 2 ≡ b2 2 ≡ bp−1 ≡ 1 (mod p)
par le théorème 6.6.
Mais que se passe-t-il si a n’est pas un carré modulo p ?
Donc fixons un a 6≡ 0 (mod p) qui n’est pas un carré modulo p. On va raisonner comme dans
la démonstration du théorème de Wilson. Par le théoréme 6.4, pour chaque x 6≡ 0 (mod p) il
existe un y 6≡ 0 avec xy ≡ a (mod p) et cet y est unique modulo p. Donc associé à chaque
x ∈ {1, 2, . . . , p − 1} est un unique y ∈ {1, 2, . . . , p − 1} avec xy ≡ a (mod p), et si y est associé
à x, alors x est associé à y. Donc on peut encore diviser {1, 2, . . . , p − 1} en une réunion
disjointe de sous-ensembles {xi , yi } de nombres avec xi yi ≡ a (mod p). Ces sous-ensembles
sont de cardinal 2 sauf quand on a un xi qui est associé à lui-même, ce qui correspond à
xi xi ≡ x2i ≡ a (mod p). Aucun tel xi auto-associé n’existe sous nos hypothèses, car on a
CHAPITRE 3 : CONGRUENCES ET ARITHMÉTIQUE MODULAIRE 33
supposé a non carré modulo p. Donc tous les sous-ensembles {xi , yi } de {1, 2, . . . , p − 1} sont
de cardinal 2, et il y a p−1
2 tels sous-ensembles. On trouve donc
−1 ≡ (p − 1)! = (x1 · y1 ) · (x2 · y2 ) · (x3 · y3 ) · · · (x p−1 · y p−1 )
2 2
p−1
≡ a · a · a···a 2 fois (mod p)
p−1
≡a 2 .
Conclusion :
Théorème 6.7. Soit p ≥ 3 premier, et a 6≡ 0 (mod p). Alors on a
(
p−1 1 (mod p) si a est un carré modulo p,
a 2 ≡
−1 (mod p) si a n’est pas un carré modulo p,
La conséquence de ce théorème que nous utiliserons dans ce cours est le théorème suivant.
Théorème 6.8. Soit p un premier.
(a) −1 est un carré modulo p si et seulement si p est de la forme p = 2 ou p = 4k + 1.
(b) −1 n’est pas un carré modulo p si et seulement si p et de la forme p = 4k + 3.
Donc −1 est un carré modulo p pour p = 2, 5, 13, 17, 29, 37, 41, 53, 57, . . . et n’est pas un
carré modulo p pour p = 3, 7, 11, 19, 23, 31, 43, 47, 59, . . . .
Preuve. Montrons d’abord les implications
p = 2 ou p = 4k + 1 =⇒ −1 est un carré modulo p,
p = 4k + 3 =⇒ −1 n’est pas un carré modulo p,
Pour p = 2 on a −1 ≡ 1 ≡ 12 (mod 2). Pour p ≥ 3 on applique le théorème 6.7. Pour p = 4k+1
p−1
on a (−1) 2 ≡ (−1)2k ≡ 1 (mod p), donc −1 est un carré modulo p pour p = 4k + 1. Pour
p−1
p = 4k + 3, on a (−1) 2 ≡ (−1)2k+1 ≡ −1 (mod p), donc −1 n’est pas un carré modulo p
pour p = 4k + 3.
Maintenant les contraposées des deux implications ci-dessus donnent les implications in-
verses.
p = 4k + 3 ⇐= p 6= 2 et p 6= 4k + 1 ⇐= −1 n’est pas un carré modulo p,
p = 2 ou p = 4k + 1 ⇐= p 6= 4k + 3 ⇐= −1 est un carré modulo p.
Références
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édition de la traduction américaine de 1964 [University of Chicago Press, Chicago].
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[6] W. J. LeVeque. Topics in number theory. Vol. I, II. Dover Publications Inc., Mineola, NY, 2002. Reprint
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34 CHAPITRE 3 : CONGRUENCES ET ARITHMÉTIQUE MODULAIRE
[7] I. Niven. Irrational numbers. The Carus Mathematical Monographs, No. 11. The Mathematical Association
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[8] I. Niven and H. S. Zuckerman. An introduction to the theory of numbers. John Wiley & Sons, New York-
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[9] A. Weil. Number theory for beginners. Springer-Verlag, New York, 1979. Avec la collaboration de Maxwell
Rosenlicht.