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Entreprise et covid 19

Fallait-il laisser continûment des suppliques vers le Ciel comme au temps de Habbaquq  ou choisir
d’exprimer une profonde reconnaissance au personnel de santé ? L'un n'exclut pas l'autre. Pour ne
pas faire ici un décompte macabre du nombre de décès ou de contaminés par régions du monde, on
peut néanmoins faire cas d’un lourd bilan de décès et de malades à l’échelle des continents (environ
300 000 000 décès).
En France, c’est le 12 mars 2020 que les autorités publiques françaises ont annoncé un report des
formalités de déclarations sociales pour les entreprises, et partant une fermeture progressive des
lieux publics.On se demande alors quel serait l’impact du covid-19 sur le fonctionnement des
entreprises? Bien avant la fin du confinement prévue pour le 11 mai, il a été mis à la disposition du
public l’information selon laquelle aucun licenciement n’est envisageable tandis qu’il a été mis à la
disposition des entreprises la nouvelle de la mise en place d’un fonds de solidarité pour celles qui
seraient en difficulté.

1. Le covid-19 et l’application traditionnellement restrictive de la force majeure par la cour de


cassation
S’agit-il d’une force majeure ? Autrement dit, il se pose la question de savoir s’il s’agit d’une
contrainte entraînant une suspension ou une interruption du contrat. Notion jurisprudentielle et
factuelle visant à protéger l’irresponsabilité, la force majeure est définie sous l’empire de l’ancien
article 1148 du code civil par la chambre sociale comme un événement extérieur, imprévisible et
irrésistible. A la faveur de la réforme faite par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la
définition a été codifiée à l’article 1218 du code civil «Il y a force majeure en matière contractuelle
lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu
lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées,
empêche l’exécution de son obligation par le débiteur…  ».
En ce qui concerne les pandémies et les maladies, il existe peu de cas dans lesquels les décisions de
justice ont été favorables à la reconnaissance d’un cas de force majeure. En ce sens, la bacille de la
peste, l’épidémie de grippe aviaire, le virus la dengue et du virus du chikungunya n’ont pas été jugés
comme constitutives d’événements de force majeure. Cependant, dans le cas du covid-19, c’en était
un, parce que le coronavirus était de type nouveau, inévitable dans sa survenance (imprévisible) et
insurmontable dans ses effets, avec une montée en flèche du nombre de décès et de malades
(irrésistible), d’où la décision du confinement par le gouvernement. Mais à compter du 11 mai, la
réouverture des entreprises (et à compter du 2 juin pour les cafés, hôtels et restaurants) étant
possible, le Covid-19 n’est plus un cas de force majeure, sauf par exemple, pour le travailleur salarié
ayant contracté le coronavirus. Dans ce cas, il y a matière à suspendre le contrat de travail pour le
temps de la maladie, l’exécution du contrat de travail étant intuitu personae.Seulement, la maladie
de longue durée pourrait conduire à interrompre le contrat de travail conformément à la
jurisprudence de la cour de cassation.
Le coronavirus n’est donc pas en soi un motif de rupture du contrat, notamment en ce qui concerne
les contrats d’entreprise à exécution successive. Encore faudrait-il le décès du fournisseur ou du
fabricant, dans le cas d’un contrat intuitu personae, si non le contrat passe aux ayants droits. On
pourrait citer l’exemple de ce fabricant qui n’a pu livrer une machine à concevoir pour les besoins
d’une activité professionnelle en raison de son état de santé et de son décès. La qualification de force
majeure a été retenue, et les défenderesses héritières du défunt ont été exonérées de l’obligation de
faire exécuter le contrat.

2. Le covid-19 et l’invocation de la responsabilité de plein droit dans le temps


L’invocation de la responsabilité de plein droit ou responsabilité objective du débiteur d’une
obligation contractuelle renvoie à une responsabilité sans faute comme c’est le cas pour la
responsabilité des parents du fait de leurs enfants, celle des artisans du fait de leurs apprentis, celle
des commettants du fait de leurs préposés et celle des instituteurs du fait de leurs élèves. Mais à
quel moment exactement on peut considérer que le Covid-19 est une force majeure ? C’est le 30
janvier que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a déclaré le virus comme une pandémie à
répercussion mondiale. Cependant, il s’agit d’une déclaration purement et simplement, et donc sans
effet juridique.
En territoire métropolitain, c’est le 14 mars que le ministre Edouard Philippe a déclaré la fermeture
des lieux publics. Mais l’acte juridique qui fonde en réalité l’invocation de la force majeure est
d’abord l’arrêté du 9 mars 2020 interdisant les rassemblements de mille personnes sauf cas de
nécessité de continuité de la vie de la nation puis l’arrêté du 14 mars 2020 interdisant les
rassemblements de 100 personnes. Ainsi, l’organisateur d’une manifestation dont le nombre de
participants dépasse ces effectifs peut invoquer si besoin devant le juge un cas de force majeure.Le
temps de l’urgence sanitaire se révèle pour le débiteur des obligations comme un temps de pause du
droit pendant lequel les affaires et surtout la justice tournent au ralenti.

3. La nuit du droit et la similitude avec la théorie du doyen Carbonnier


La nuit du droit se retrouve chez le doyen Jean-Carbonnier. Il cite d’ailleurs Héraclite  : « Les hommes
à l’état de veille ont un seul monde, qui leur est commun ; dans le sommeil, chacun s’en retourne à
son propre monde. » Il s’agit du temps des non-perquisitions et de la fin de la journée judiciaire. Mais
ce temps, à la différence de celui-ci qui a duré deux mois, est très court. «  Dans ce vide juridique,
dans ce désert social, l’homme retourne à un état de nature, à un état de pré-droit, de non-droit.»
Cette nuit du droit est synonyme de relâchement. Tout relâchement est en deux temps. » : l’apogée
de la marche et la marche clopin-clopant. En effet, il se peut que l’on parvienne au paroxysme de
l’effervescence. C’est là que dans un décor d’arrêt général, la justice tourne au ralenti. Pendant le
confinement suite à la propagation du covid-19, bien de tribunaux du travail sont restés fermés.
Parmi les quelques-uns ouverts, il y a notamment les juridictions du référé.

4. La nuit des affaires


Pendant le temps du confinement, des entreprises étaient fermées. Seules étaient ouvertes des
boutiques ou des boulangeries aux fins de rendre disponibles les produits de première nécessité.
D’une part, les dettes accumulées impliquent le recours aux prêts par les particuliers et les
entreprises auprès des banques. D’autre part, les mesures de distanciation sociale entraînent de
nouvelles formes d’organisation des assemblées générales au sein des sociétés.En général, l’après-
confinement amène à s’intéresser à une relative reprise de l’exécution des contrats, assortie d’un
important recours à la technologie en ce qui concerne l’administration des entreprises.

Partie I L’exécution des contrats commerciaux


Chapitre 1

Section 1

Section 2

Chapitre 2

Titre 2 La restructuration du crédit

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