Vous êtes sur la page 1sur 2

FICHE EL 01

L’EVOCATION D’UN REVE (L.1-9)

- Le monologue est écrit en versets, sans presque aucun point. Notre extrait comporte deux
phrases (v. 1-40 et 41-43). Le découpage de la phrase, des propositions et des groupes de mots
en versets, par le retour à la ligne impose au lecteur et à l’acteur un rythme, une manière de dire
qui sont au cœur des recherches formelles de Lagarce

- C’est un monologue qui prend en compte le temps de la représentation, la structure


de la pièce : «  je l’ai dit au début » (v. 4). Il donne l’impression que Louis, ce «  je  »
(répété 16 fois dans le texte) auquel il faut ajouter les formes du pronom objet « me »
et « moi », ce "je" est en fonction de régie. Il est celui qui organise la pièce, comme
figure de l’écrivain ou du metteur en scène que Lagarce affectionne de mettre dans ses
pièces. Il est aussi celui qui parle, celui qui analyse, et l’objet même de cette analyse.

- Louis raconte un rêve ou bien une impression au réveil. On remarque le vocabulaire


de la chambre et du réveil : « lit  », (v. 2), «  éveillé  » répété deux fois (v. 2, 8) de venu
«  réveillait » (v. 25) « matin  » (v. 5), « on sort du sommeil  » (v. 26). Louis confie qu’il
s’est réveillé avec une « pensée étrange et claire  » (v. 9). Les deux adjectifs créent une
sorte de dissonance.

- Plus loin, elle est dite «  limpide  » (v. 26) mais cependant tout de suite après il ajoute
«  on croit le saisir, pour disparaître aussitôt  » (v. 26). Ce monologue développe
comme une description phénoménologique de la venue d’une idée, d’une intuition,
d’une « impression  » (v. 24)

- On remarque la répétition du mot «  tête  » (v. 7). Il y a bien opération intellectuelle.


Or, ce que montre Louis c’est que la maladie l’a condamné à un présent répété. « je
me retrouve toujours, chaque matin, avec juste en tête pour commencer, commencer à
nouveau,/ juste en tête, l’idée de ma propre mort à venir. ». La maladie fait de lui un
Sisyphe moderne qui recommence chaque journée à rouler sa pierre.

- La difficulté de la pièce vient de ce que l’on ne sait pas si ce que la pièce nous montre
est un rêve ou la réalité d’un dimanche. Or dans notre extrait, c’est bien de cette
même ambiguïté dont il s’agit : un rêve qu’il a au réveil a fait émerger une idée
« étrange et claire ». Or, alors que la phrase n’est syntaxiquement pas terminée,
puisque le premier point apparaît au verset 40, la deuxième strophe vient défaire ce
qui a été dit. Alors que la première strophe se terminait sur l’adjectif « claire », le v. 10
continue avec cette incise, cette fois-ci sans signe de ponctuation parenthétique, «  je
ne sais si je pourrai bien la dire  »
LA QUESTION DE L’AMOUR ET DE L’ABANDON (L.10-43)

- En se reprenant, Louis a élargi son propos. En partant des parents, qu’il détaille,
(« père  », « mère  », frère  », sœur  » (v. 16-18) il en arrive à «  tout le monde » (v. 19),
ce monde incluant non seulement la famille proche mais aussi les amis et amants
«  les gens encore, tous les autres, dans ma vie,/ les gens les plus proches de moi  » (v.
13, 14). En se reprenant, Louis fait converger deux problèmes, l’amour familial,
l’amour conjugal

- Louis exprime une antithèse, un paradoxe : le proche et le lointain, la solitude dans la


foule qui sont l’obsession de toute l’œuvre de Lagarce et son problème existentiel.
D’un côté, on remarque les polyptotes «  proches », s’approche  », «  s’approchèrent »
(v. 14, 15) et d’un autre la négation du verbe « aimer » à tous les temps, « ne m’aime
plus, ne m’aima plus » (v. 19).

- En se développant, son propos exploite les mêmes fils sémantiques : «  atteindre  »,


«  toucher » d’un côté et d’autres négations grammaticales ou lexicale comme dans
«  abandon » (v. 23, 27), « renoncer » (v. 32, 33), « décourage  » (v. 38)

- On remarque la prééminence de trois mots dans l’œuvre de Lagarce : « l’impuissance » ; « le


renoncement » ; « l’abandon ». C’est le motif de l’espoir déçu.
Cette deuxième strophe permet de dire le paradoxe ontologique de Louis : il est seul parce qu’il
l’a cherché mais il en souffre. « on m’abandonna, car je demande l’abandon » (v. 23) qu’il
réitère un peu plus loin avec une autre formule fragmentée sur plusieurs vers « on
m’abandonna toujours…. Parce qu’on ne saurait m’atteindre, me toucher » (v. 27-31)

Vous aimerez peut-être aussi