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Leçon 4: Stationnarité, Cointégration

et Modèles à Correction d'Erreurs

M. KEHO

04/05/2017
1.0
Table des
matières

Introduction 3

I - La cointégration : définition statistique et signification économique 4

II - Estimation et tests de cointégration 11

III - Interprétation d'un modèle à correction d'erreurs 17

IV - Travaux pratiques 18
Introduction

Lorsqu'on travaille avec des séries temporelles, il faut vérifier au préalable que celles-ci sont
stationnaires. Lorsque cela n'est pas le cas, il faut trouver la bonne façon de les rendre stationnaires. La
plupart des données temporelles macroéconomiques sont des réalisations de processus non
stationnaires (Nelson et Plosser, 1982). Ce qui implique que les méthodes habituelles d'estimation et
d'inférence (moindres carrés ordinaires, test de Student, test de Fisher etc.) ne peuvent être appliquées
directement. Néanmoins, la théorie de la cointégration indique des conditions dans lesquelles les
régressions sont autorisées entre des séries non stationnaires. En effet, lorsque les variables ne sont
pas stationnaires, l'estimation d'un VAR en différences premières n'est pas toujours appropriée. La
différenciation conduit à un appauvrissement de l'information dans la mesure où on enlève les
mouvements de long terme contenus dans le niveau des variables. Or cette information devrait être
exploitée pour enrichir la dynamique des variables plutôt que d'être retirée. En différenciant, seuls les
effets de court terme peuvent être analysés. Le calcul des différences premières n'est donc pas une
stratégie appropriée. Les techniques de cointégration montrent que sous certaines conditions le
modèle initial peut être reparamétré sous la forme d'un modèle vectoriel à correction d'erreurs faisant
intervenir les variables en différences premières et leurs niveaux (Engle et Granger, 1987; Johansen,
1988). La représentation du modèle sous la forme à correction d'erreurs a plusieurs avantages.
Premièrement, elle n'est pas sujette aux problèmes de régressions fallacieuses puisque toutes les
variables du modèle sont stationnaires (Banerjee et al. 1993). Deuxièmement, elle permet de distinguer
clairement entre les élasticités de court terme et de long terme puisque les différences premières et les
niveaux des variables interviennent explicitement dans le modèle. La cointégration et les modèles à
correction d'erreurs s'inscrivent dans le prolongement de la modélisation VAR appliquée aux séries
temporelles non stationnaires. Leur mise œuvre et leur interprétation nécessitent de bien comprendre
la théorie sous-jacente. C'est pourquoi, dans ce chapitre, nous allons rappeler quelques éléments
essentiels de cette théorie. Nous recommandons aux lecteurs de se référer aux ouvrages
d'économétrie qui abordent en détail ces modèles afin d'approfondir certains aspects (par exemple,
Lardic et Mignon, 2002 ; Bourbonnais, 1998).

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La cointégration : définition statistique et signification économique

La cointégration :
définition statistique I
et signification
économique

Notion et tests de stationarité

La stationnarité renvoie à l'invariance temporelle des propriétés des séries temporelles.


L'économétrie appliquée utilise une notion moins restrictive de la stationnarité que l'on
qualifie de faible ou de stationnarité de second ordre. Une série y t est faiblement stationnaire
lorsque ses deux premiers moments (espérance et variance) sont finis et indépendants du
temps. En conséquence, une série pour laquelle l'espérance et la variance sont modifiées dans
le temps est non stationnaire.
En pratique, les cas de non-stationnarité sont analysés à partir de deux types de processus.
Les processus TS (Trend Stationary) caractérisés par une non stationnarité de nature
déterministe, et les processus DS (Difference Stationary) présentant une non stationnarité de
nature stochastique. Dans le cas de processus TS, les données suivent une tendance qui a une
fonction définie (linéaire, quadratique, etc.). Afin de résoudre ce problème, il suffit d'inclure
une variable de tendance dans le modèle de régression. Toutefois, en pratique, il convient de
ne pas traiter une tendance stochastique comme une tendance déterministe. Dans le cas de
processus DS, les données suivent une marche aléatoire avec ou sans dérive avec un
coefficient de 1 pour le terme retardé : yt = yt-1 + ut  où est stationnaire. Il y a non-stationnarité
de car on montre que la variance n'est pas constante.
La distinction entre ces deux types de stationnarité est fondamentale sur le plan économique
dans la mesure où ces deux types de processus sont caractérisés par des comportements très
différents. L'effet d'un choc sur un processus TS est transitoire (la série a une mémoire finie
des chocs), alors que sur un processus DS cet effet est permanent (mémoire infinie des chocs),
aucune force ne le ramènera à son niveau antérieur, sauf occurrence d'un choc de signe
opposé et de même magnitude. Sur le plan statistique, il est important d'identifier
correctement la nature de la non-stationnarité d'une série avant de la rendre stationnaire. En
effet, une méthode de stationnarisation inappropriée peut engendrer des artefacts
statistiques. Un processus TS est rendu stationnaire par une régression sur une tendance
déterministe, alors qu'un processus DS devient stationnaire par différenciation. Quand un
processus TS linéaire est statistiquement traité comme un processus DS, cela crée
artificiellement dans la série un mouvement cyclique court. A l'inverse, lorsqu'un processus est
traité comme un processus TS, cela génère un mouvement cyclique long (Nelson et Kang,
1981).
L'identification et la caractérisation de la non-stationnarité peuvent être effectuées par le biais
de tests statistiques. A cet égard, il existe un grand nombre de tests dont les plus utilisés en
raison de leur simplicité sont les tests de Dickey et Fuller (1979, 1981), le test de
Phillips-Perron (1988) et le test de KPSS.
Tests de Dickey et Fuller
Les tests de Dickey-Fuller (DF) testent l'existence d'une racine unitaire dans le processus
générateur des données. Ce sont des tests paramétriques qui sont basés sur l'estimation d'un

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La cointégration : définition statistique et signification économique

modèle autorégressif. La loi du test DF sur laquelle est basé le test diffère selon l'hypothèse
alternative. Le choix de l'hypothèse alternative est donc primordial pour la validité du test.
Dans le test de Dickey-Fuller augmenté, le modèle prend la forme suivante:

Suivant les termes déterministes inclus dans , on aboutit aux trois modèles sur lesquels est
basé le test de Dickey-Fuller Augmenté:

Dans ces modèles autorégressifs, le choix de p est très important pour l'issue du test. Comme
dans les modèles à décalages temporels, on peut utiliser les critères d'information (Akaike,
Schwarz, Hannan-Quinn, ...).
La question se pose toujours de savoir laquelle des trois spécifications précédentes retenir
pour conduire le test de racine unitaire. Il est fondamental de retenir le modèle le plus
adéquat car l'introduction de termes déterministes non pertinents réduit la puissance du test.
En pratique, on adopte une approche séquentielle descendante pour traiter cette question.
Celle-ci consiste à partir du modèle le plus large (avec constante et tendance déterministe –
modèle [3]) jusqu'au plus spécifique (sans tendance, ni constante – modèle [1]). Pour chaque
modèle, on teste la significativité des termes déterministes en utilisant les tables de
Dickey-Fuller. C'est une fois l'équation de test déterminée qu'on peut lire le test de racine
unitaire.

Le test est basé sur la statistique de student associée au coefficient de yt-1 .

Toutefois, Dickey et Fuller (1981) ont montré que sous l'hypothèse nulle de racine unitaire, ne
suit pas sa loi conventionnelle, même asymptotiquement. La distribution a été simulée par
Dickey et Fuller (1981) et par Mackinnon (1991). On rejette l'hypothèse nulle si la statistique
calculée est inférieure à la valeur critique tabulée. Si la statistique calculée est supérieure à la
valeur critique, on accepte l'hypothèse d'une racine unitaire, ce qui implique que la série n'est
pas stationnaire.
En dépit des tentatives de sophistication, le test de racine unitaire de Dickey-Fuller reste
marqué par une limite essentielle. L'hypothèse nulle suppose en effet que la tendance de la
série ne change pas sur toute la période. Or on sait que quelques chocs ponctuels peuvent
influencer, même sensiblement, la tendance des séries. Il apparaît donc que le test de
Dickey-Fuller est biaisé en faveur de l'hypothèse nulle de racine unitaire (Perron, 1989, 1992 ;
Rappoport et Reichlin, 1989) . Ces critiques ont conduit à l'élaboration d'autres tests de racine
unitaire et de stationnarité dont ceux de Phillips et Perron (1988) et Kwiatkowski, Phillips,
Schmidt et Shin (1992) (noté KPSS par la suite).
Test de Phillips-Perron
Le test de Phillips-Perron (1988) est construit sur une correction non paramétrique de la
statistique de Dickey-Fuller pour prendre en compte des erreurs hétéroscédastiques. Il se
déroule en deux étapes : on estime par MCO les trois modèles de base du test de
Dickey-Fuller et on calcule les statistiques associées, puis on estime un facteur correctif établi à
partir de la structure de covariance des résidus de telle sorte que les transformations réalisées
conduisent à des distributions identiques à celles du Dickey-Fuller standard. Ce test se ramène
donc au test de Dickey-Fuller simple dans le cas où les erreurs seraient homoscédastiques. Ce
test est non paramétrique car aucune modélisation du processus générateur des aléas n'est
formulée, il est plus robuste à une autocorrélation (mais également à une hétéroscédasticité)
de forme inconnue. La mise en œuvre du test est identique à celle du test de Dickey-Fuller : on

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La cointégration : définition statistique et signification économique

suit la même procédure séquentielle descendante.


Test de KPSS
Le test de Kwiatkowski, Phillips, Schmidt, Shin (1992) (noté KPSS) a la particularité de poser
l'hypothèse de stationnarité comme hypothèse nulle. Il teste l'hypothèse de stationnarité en

niveau ou autour d'une tendance contre l'alternative de non


stationnarité. Le test KPSS repose sur la décomposition de la série étudiée en une partie
déterministe, une marche aléatoire et un bruit blanc. On régresse la série sur une constante

ou sur une constante et une tendance et on détermine la


série des résidus estimés . La statistique de test est définit par:

où est la somme partielle des résidus et

l'estimateur de la variance de long terme de êt . La règle de décision est que si

alors la série est stationnaire, où est la valeur critique. Dans le


cas contraire, on considère que la série est non stationnaire. Pour choisir entre le modèle avec
constante et le modèle avec trend linéaire, on peut s'aider de la représentation graphique de
la série ou utiliser les résultats des tests de Dickey-Fuller.
Les tests de stationarité en pratique...
Pour réaliser les tests de stationnarité d'une série en pratique, on visualise la série (par un
double clic sur la série) et on sélectionne à partir du menu de la fenêtre, Unit Root Test...
Les résultats du test de Dickey-Fuller pour la série LPIB sont présentés dans les tableaux
suivants:
Tableau 14.1a : Résultats du test de Dickey-Fuller

Tableau 14.1b : L'équation du test de Dickey-Fuller

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La cointégration : définition statistique et signification économique

Le deuxième tableau indique le modèle à partir duquel le test est réalisé. On peut ainsi juger
de la pertinence des termes déterministes à inclure dans la régression auxiliaire.
Le premier tableau donne les statistiques de test ADF, les valeurs critiques et les probabilités
associées. La statistique de test reporte ici une valeur de -2,72106 supérieure aux valeurs
critiques aux seuils de 1% et 5%, ce qui nous conduit à accepter l'hypothèse nulle. La série
admet une racine unitaire et ne peut donc être stationnaire. Le test est effectué suivant la
même démarche pour les tests PP et KPSS. Il est important de toujours se rappeler que
l'hypothèse nulle du test KPSS est la stationnarité.
Le tableau suivant synthétise les résultats des tests ADF, PP et KPSS pour les huit variables en
niveau et en différence première.
Tableau 14.2 : Résultats des tests de stationnarité

Les différentes statistiques de tests conduisent à des résultats différents. Les tests ADF et
KPSS concluent à la non-stationnarité de LPIBR tandis que le test PP conclue à la stationnarité
de cette série. Selon les statistiques ADF et PP, la série LI est non stationnaire en niveau. En
revanche, le test KPSS indique que cette variable est stationnaire en niveau. Quant à la série
LC, le test PP rejette l'hypothèse de non stationnarité tandis que les tests ADF et KPSS rejettent
l'hypothèse de stationnarité. En d'autres termes, la série LC est stationnaire selon la statistique
PP, et non stationnaire selon les statistiques ADF et KPSS. Selon les trois statistiques de test,
les séries LG et LIPC sont non stationnaires en niveau et stationnaires lorsqu'on considère les
différences premières. Les trois statistiques de test indiquent que la série R est stationnaire.
En définitive, nous retenons que toutes les séries, à l'exception de R, sont non stationnaires en
niveau et stationnaires en différences premières. En d'autres termes, les séries LPIBR, LI, LC,
LG et LIPC sont intégrées d'ordre un.

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La cointégration : définition statistique et signification économique

Corrections à apporter au modèle  : La façon de corriger un modèle comportant des


variables intégrées d'ordre un est de différencier les variables, c'est-à-dire soustraire à chaque
observation la valeur de la période précédente ( Δyt = yt - yt-1 ) Cependant, si les séries sont
cointégrées la spécification du modèle en différence première est biaisée du fait de l'oubli
d'une variable explicative importante. La théorie de la cointégration que nous verrons dans le
chapitre suivant indique les conditions sous lesquelles l'on est autorisé à différencier les
variables.
Interprétation du modèle après différenciation : Un modèle différencié s'interprète
comme l'impact d'une variation de la variable indépendante sur la variation de la variable
dépendante. Si les variables sont en log, la variation s'interprète comme un taux de croissance.
Ainsi, si le modèle cherche à trouver les déterminants de la consommation et qu'on a dû le
différencier, on pourrait interpréter le résultat comme «une hausse de croissance du revenu a
un impact positif sur le taux de croissance de la consommation». En pratique l'analyse se fait
en termes de variation en points de pourcentage.
Deux mises en garde: Premièrement, il ne faut pas différencier un modèle avec tendance
déterministe. Deuxièmement, sur-différencier enlève tout potentiel d'interprétation au
modèle. Vous aurez beau dire que votre modèle est stationnaire, mais si vous ne pouvez pas
l'interpréter, vous n'êtes pas avancé. Le plus souvent les modèles différenciés ont un pouvoir
explicatif (R2) très faible comparé à celui du modèle en niveau.

Séries cointégrées, c'est quoi ?

La régression d'une série non stationnaire sur des séries non stationnaires peut donner une
régression n'ayant aucun sens économique. C'est ce qu'on appelle les régressions fallacieuses
(Granger et Newbold, 1974). L'estimation de modèles impliquant des variables non
stationnaires soulève plusieurs problèmes assez sérieux. Premièrement, les estimateurs des
coefficients ne sont pas convergents. Deuxièmement, les statistiques des tests conventionnels,
tels que le t de Student et le F de Fisher, ne suivent plus leur distribution habituelle sous
l'hypothèse nulle, même asymptotiquement. En conséquence, les valeurs critiques habituelles
ne sont plus appropriées. Troisièmement, les modèles présenteront une apparente bonne
adéquation reflétée par un coefficient de détermination très élevé, mais la statistique de
Durbin-Watson convergera vers zéro au fur à mesure que le nombre d'observations augmente
(Granger et Newbold, 1974).
Néanmoins, il arrive que des séries non stationnaires et intégrées d'ordre un forment une
combinaison linéaire stationnaire. Cette situation particulièrement intéressante signifierait
que, bien que chacune des séries ait tendance à "errer", elles "marchent ensemble" suivant
une relation commune. On dit qu'elles sont cointégrées. Economiquement, cela signifie qu'il
existe une relation de long terme stable qui unit ces variables.
Nous allons maintenant donner la définition formelle d'Engle et Granger (1987). Considérons
un vecteur de variables non stationnaires. Les composantes de sont dites cointégrées si
premièrement elles sont intégrées de même ordre d (I(d)), et s'il existe une combinaison
linéaire de ces variables d'ordre d'intégration inférieur, c

'est-à-dire s'il existe un vecteur β non nul tel que Zt = βXt est I(d-b) avec 0   b a.

Le vecteur β est le vecteur cointégrant. Dans le cas où d = 1, la cointégration implique que Zt =


βXt est stationnaire.
Si nous considérons deux variables X et Y intégrées d'ordre un (I(1), l'existence d'une relation

de cointégration implique qu'il existe un coefficient tel que Yt - Xt = Zt est stationnaire


(I(0)).
L'ordre d'intégration d'une variable est le nombre de fois qu'il faut la différencier pour la
rendre stationnaire. La cointégration se présente ainsi comme une propriété de réduction de
l'ordre d'intégration d'une combinaison linéaire de variables intégrées du même ordre.

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La cointégration : définition statistique et signification économique

Remarque
1. En cas de cointégration, le vecteur cointégrant n'est pas unique. En effet, si β est un vecteur
cointégrant, βØ ( Ø R ) est aussi un vecteur cointégrant.
2. Entre variables toutes non stationnaires, il existe au plus p - 1 relations distinctes de
cointégration. Par conséquent dans une relation bivariée, le rang de la cointégration ne peut
excéder 1. Un raisonnement par l'absurde permet de montrer ce résultat. Le nombre de
relations de cointégration est appelé rang de cointégration.

Spécification d'un modèle à correction d'erreurs

Lorsque deux variables sont cointégrées, elles sont liées par une relation de long terme.
Cependant, elles peuvent s'écarter de temps en temps (à court terme) de cette relation
d'équilibre. On peut interpréter l'écart entre et sa valeur de long terme Y t = a + βX , comme
une "erreur d'équilibre" et utiliser cet écart pour lier le comportement de court terme des
deux variables à leur comportement de long terme. On définit ainsi le modèle suivant:

Cette représentation est communément appelée modèle à correction d'erreurs. Le


coefficient mesure la force de rappel vers l'équilibre de long terme ; il doit être négatif pour
que le mécanisme de correction ait lieu. En effet, supposons que Xt est constant et que l'écart
à l'équilibre et-1 = Yt-1 - α-βXt-1 est positif. Cela signifie que Yt-1 est supérieure à sa valeur

d'équilibre Yt-1 = α + βXt-1 . En supposant que le coefficient est négatif, le terme

est aussi négatif et, par conséquent, ΔYt = Yt - Yt-1 sera négatif. La valeur de Yt à la
période t sera inférieure à la valeur Yt-1 de sorte à corriger l'erreur d'équilibre. Si l'erreur et-1 =

Yt-1 - α - βXt-1 est négative, alors Yt-1 sera en deçà de sa valeur d'équilibre. Le terme

étant positif ( étant supposé toujours négatif), la différence ΔYt = Yt - Yt-1 sera également
positive. Cela implique que Yt prendra une valeur supérieure à la valeur de Yt-1 permettant de
réaliser l'équilibre. En d'autres termes, lorsqu'à un moment donné Y t s'écarte de sa valeur
d'équilibre, la période suivante, elle y revient : il y a un mécanisme à correction qui gouverne la
dynamique des variables et qui fait que ces dernières ne peuvent pas s'écarter durablement
de la relation d'équilibre. Si les séries sont cointégrées, les déviations par rapport à la relation
de long terme ont pour effet, à court terme, d'induire des variations dans l'évolution de l'une
ou de toutes les variables de façon à forcer le système à retourner vers son équilibre de long
terme.
Pour illustrer le concept de cointégration et de modèle à correction d'erreurs, considérons
l'exemple d'un couple. L'union entre les deux partenaires impose à chacun un mode de vie
caractérisé par une harmonie et une complicité entre les conjoints. Cette vie de bonne entente
et d'harmonie représente la situation de long terme, c'est-à-dire la relation qui devrait
normalement lier les deux partenaires. Cependant, de temps en temps, la vie de couple peut
connaitre des moments de disharmonie caractérisés par une divergence des comportements
individuels. Mais avec le temps, les deux conjoints finissent par s'entendre et à revenir à la
situation normale. Il y a comme une force invisible qui restaure, de jour en jour, l'harmonie
dans le couple.
Engle et Granger (1987) ont montré que tout ensemble de variables cointégrées peut être mis
sous la forme d'un modèle à correction d'erreurs où toutes les variables sont stationnaires:

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La cointégration : définition statistique et signification économique

La différence avec le modèle VAR usuel réside dans la présence du terme d'erreur e t-1 = Yt-1 -
α - βXt-1. Remarquons que les équations d'erreurs (14.7) et (14.8) ne font intervenir que des
termes stationnaires. Par conséquent, les procédures habituelles d'estimation et d'inférence
statistique sont applicables sans risque de corrélation fallacieuse.
La vitesse d'ajustement ou force de rappel vers l'équilibre est mesurée par les coefficients

et . Suivant le même raisonnement, l'un au moins de ces deux paramètres doit

être significatif et négatif pour valider la représentation sous forme à correction d'erreurs. Si

l'hypothèse nulle H0  : = = 0 est acceptée, cela signifie qu'aucun terme à

correction d'erreurs n'est significatif. Dans ce cas, il convient de rejeter la spécification à


correction d'erreurs. En revanche, si l'hypothèse est rejetée, alors au moins un terme à
correction d'erreurs est significativement différent de zéro. Cela traduit un retour vers la
trajectoire de long terme : les séries sont alors cointégrées. Il est possible d'ajouter aux
équations de court terme d'autres variables explicatives supplémentaires à condition que
celles-ci soient déterministes ou bien stationnaires.

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Estimation et tests de cointégration

Estimation et tests de
cointégration II

Plusieurs méthodes d'estimation d'un MCE ont été proposées à la suite des travaux d'Engle et
Granger (1987). Dans cette section, nous allons présenter la méthode d'estimation en deux
étapes d'Engle et Granger, la procédure de Banerjee et alii. (1993) et la méthode de Johansen.

La méthode en deux étapes d'Engle et Granger

La méthodologie d'estimation d'un modèle à correction d'erreurs proposée par Engle et


Granger (1987) suit une procédure en deux étapes. Dans une première étape, on estime par la
méthode des moindres carrés ordinaires l'équation de cointégration yt = α + βxt + et puis on
teste dans une seconde étape la stationnarité du résidu estimé . Ce test fait office de test de
cointégration. La régression qui sert de base à ce test est la suivante :

où on teste

Si les résidus sont stationnaires, on conclut que les séries sont cointégrées, et la relation de

cointégration estimée est : . Bien entendu, il convient

de s'assurer au préalable que les variables en jeu sont intégrées d'ordre un. Néanmoins, étant

donné que le test porte sur les résidus calculés à partir de l'estimation de la relation de

cointégration et non pas sur les vraies erreurs et qui, elles, ne sont pas observées, les valeurs
critiques des tests DF ou DFA ne sont plus appropriées. Il convient d'utiliser les valeurs
critiques tabulées par Engle et Granger (1987), Engle et Yoo (1987) et Davidson et MacKinnon
(1993).
La deuxième étape de la procédure d'estimation consiste à estimer par la méthode des
moindres carrés le modèle à correction d'erreurs, en remplaçant l'erreur d'équilibre par son
estimation :

Il est clair que cette seconde étape ne pose aucun problème particulier car tous les
régresseurs sont maintenant stationnaires. Les coefficients ont une distribution standard,
ceux-ci peuvent alors être soumis aux techniques classiques d'inférence statistique (Engle et

Granger, 1987). La cointégration implique non seulement que est stationnaire, mais que

11
Estimation et tests de cointégration

le coefficient d'ajustement est négatif et significatif. Ces restrictions sont nécessaires

pour valider le modèle à correction d'erreurs.


La procédure en deux étapes d'Engle et Granger présente cependant un certain nombre de
défauts qu'il convient de souligner. Tout d'abord, elle n'est applicable que dans le cas d'une
seule relation de cointégration. Elle ne permet donc pas de différencier plusieurs vecteurs de
cointégration. Or, dans un cadre multivarié, il pourrait exister plusieurs relations de
cointégration. Ensuite, le choix de la variable endogène est arbitraire et influence l'issue du
test. Lorsqu'il y a plusieurs variables, il se pose la question de savoir laquelle va occuper la
place de l'endogène. Enfin, l'estimation de l'équation de long terme ne tient pas compte de
l'information potentielle contenue dans la dynamique de court terme. Si la super convergence
des estimateurs de première étape implique que ce biais s'estompe asymptotiquement, ce
biais peut être non négligeable pour de petits échantillons (Stock, 1987 ; Davidson et
MacKinnon, 1993 ; Banerjee, Dolado, Galbraith et Hendry, 1993). En outre, la distribution
asymptotique des estimateurs de long terme n'est pas standard (Phillips et Durlauf, 1986). Par
conséquent, il n'est pas possible de leur appliquer les règles d'inférence usuelles, notamment
pour en étudier la significativité.
Néanmoins, il est possible d'améliorer les estimations en appliquant des procédures de
correction robustes. La procédure suggérée par Stock et Watson (1993) consiste à ajouter des
régresseurs supplémentaires constitués de retards et d'avances de pour conduire la
régression cointégrante :
Cette façon de prendre en compte la dynamique de court terme corrige l'estimation des biais
d'endogénéïté et permet ainsi d'interpréter le t-student associé au coefficient β . Si les résidus
et sont autocorrélés, il suffit de corriger le t-student de β par la correction de Newey-West. Le
ratio de Student ainsi corrigé suit asymptotiquement une loi normale standard.

La méthode en une étape de Banerjee et al.

Certains auteurs ont montré que l'on peut faire l'économie de calculs en estimant
simultanément, en une seule étape, les paramètres de court et de long terme. Dans la
méthode préconisée par Banerjee, Dolado, Galbraith et Hendry (1993), l'estimation se fait
directement sur le modèle à correction d'erreurs, non pas en introduisant la relation de
cointégration estimée préalablement au cours d'une première étape, mais en introduisant
directement dans le modèle les niveaux retardés des variables. Le modèle estimé s'écrit sous
la forme suivante:

On en déduit la relation de cointégration par division :

Cette procédure peut paraître douteuse dans la mesure où la variable expliquée est
stationnaire tandis que les variables explicatives Yt-1 et Xt-1 sont non stationnaires. Cependant,
dans la mesure où il existe une relation de cointégration entre les variables, l'estimation par
MCO n'est pas biaisée. La cointégration est testée à partir de la statistique de Student du

coefficient . Pour accepter la cointégration, il faudrait que ce coefficient soit

significativement différent de zéro et négatif.

L'approche multivariée de Johansen

Johansen (1988) a proposé une procédure de test de cointégration, qui sera répandue par la
suite par Johansen et Juselius (1990), qui permet de s'affranchir du cadre restrictif d'Engle et
Granger. La procédure de test est fondée sur la méthode du maximum de vraisemblance et
offre la possibilité de prendre en compte plusieurs spécifications pour la relation de long

12
Estimation et tests de cointégration

terme (présence d'une constante/tendance ou non dans l'espace de cointégration). Cette


méthode est décrite abondamment dans les ouvrages d'économétrie des séries temporelles.
Nous nous contenterons ici d'exposer les éléments essentiels de cette approche.
La méthodologie du test de cointégration de Johansen repose sur l'estimation d'un modèle
vectoriel autorégressif (VAR) par la méthode du maximum de vraisemblance. Considérons le
modèle VAR(k) non structurel définit de la façon suivante:

où Xt est un vecteur de p variables, Dt un vecteur de variables exogènes incluant

éventuellement une tendance et des variables indicatrices, et un vecteur d'impulsions

iid N(0, ). La plupart des variables économiques étant I(1), une différenciation est
généralement appliquée. Toutefois, l'estimation du VAR en différence peut conduire à une
perte importante d'information si les séries sont effectivement cointégrées. Pour tenir compte
de cette dimension potentiellement cointégrée des variables économiques, Johansen (1988) et
Johansen et Juselius (1990) réécrivent à partir de transformations algébriques l'équation (8.9)
sous la forme Vectorielle à Correction d'Erreurs (VEC par la suite) suivante :

Cette équation peut aussi s'écrire :

L'équation (14.16) n'est en fait qu'une transformation de (14.14) de sorte à y permettre la mise
en relation des variables en niveau et en différence. Cette représentation permet aux variables
cointégrées d'être à l'écart de l'équilibre uniquement à court terme. Les matrices et
renferment respectivement toutes les informations pertinentes sur la dynamique de long
terme et de court terme.
La procédure du test de cointégration de Johansen repose précisément sur la détermination
du rang de la matrice , noté r , c'est-à-dire du nombre maximum de colonnes
indépendantes de ou, de façon équivalente, le nombre de ses racines caractéristiques
propres différentes de zéro. Ce nombre est au plus égal à p, le nombre de variables du VAR.

Si est de rang r, alors il existe deux matrices α et β de dimension (p x r) telles que =


αβ'. La stratégie de test repose ainsi sur le test de l'hypothèse nulle définie par :

Dans cette décomposition, β représente la matrice des vecteurs de cointégration qui rendent
la combinaison linéaire β' Xt-1 stationnaire.

La procédure de test permet de spécifier trois modèles. (a) Si est de plein rang colonne,
c'est-à-dire , alors Xt est stationnaire. Dans ce cas, l'estimation sous la forme du VAR en niveau
(8.9) est appropriée. (b) Si le rang de est égal à zéro, alors = 0 , et il n'existe aucune
relation de cointégration entre les variables. Dans ce cas, la modélisation appropriée est celle
d'un VAR en différence première d'ordre (k-1). Ce qui implique que la dynamique de court
terme ne dépend pas des niveaux des variables. ( c) Si est de rang r inférieur à , le modèle
vectoriel à correction d'erreurs s'exprime sous la forme :

La matrice de poids α joue un rôle important dans cette spécification. Elle est constituée des
coefficients d'ajustement de court terme, c'est-à-dire des « forces de rappel » vers l'équilibre
dans la représentation vectorielle à correction d'erreurs. La ième ligne de cette matrice mesure

13
Estimation et tests de cointégration

la vitesse avec laquelle la ième variable s'ajuste aux r relations de cointégration, c'est-à-dire
comment une des composantes donnée de Xt réagit à court terme à une déviation transitoire
de ses déterminants de leur valeur d'équilibre de long terme. La matrice β' est la matrice qui
contient les r vecteurs cointégrants linéairement indépendants. Chaque ligne de cette matrice
est constituée d'une relation de long terme.
Johansen utilise la méthode du maximum de vraisemblance concentrée pour estimer les
matrices α et β . Le test du rang de cointégration est déterminé par un test de nullité des p-r
plus petites valeurs propres de . Cette méthode conduit à deux statistiques de ratios de
vraisemblance :

La première statistique teste l'hypothèse nulle de cointégration de rang r (H0(r) : rang( )=r)
contre l'alternative de la stationnarité (H1(r)  : rang( )=p). Cette statistique est appelée
statistique de la trace. La seconde statistique teste (H0(r) : rang( )=r) contre (H1(r) : rang(
)= r+1. Elle porte le nom de statistique de la valeur propre maximale.
De façon pratique, ces tests procèdent séquentiellement de r = 0, à r = p - 1 jusqu'à ce que
l'hypothèse nulle ne puisse pas être rejetée. Les deux statistiques de test ne suivent pas une
distribution du Chi-deux. Les valeurs critiques asymptotiques ont été simulées par Johansen et
Juselius (1990) puis par Osterwald-Lenum (1992), et sont données directement par les logiciels
d'économétrie. Elles dépendent de l'hypothèse sur les termes déterministes et du nombre de
variables. On rejettera l'hypothèse nulle lorsque la statistique calculée est supérieure à la
valeur critique pour une erreur de première espèce donnée. Le test de la trace est plus
robuste au Skewness et au Kurtosis (donc à la normalité) dans les résidus que le test de la
valeur propre maximale (Cheung et Lai, 1993 ; Gonzalo, 1994). Il arrive que les deux
statistiques donnent des résultats différents. Dans ce cas, il est préférable de retenir le résultat
qui peut recevoir une interprétation économique.
Il est possible d'inclure dans le modèle VEC des variables stationnaires. En effet, il est
raisonnable de penser qu'une relation de long terme contient également des variables
stationnaires. On augmente ainsi le nombre de valeurs propres significatives puisque le
vecteur où le coefficient est égal à 1 devant la variable stationnaire et 0 devant les autres
variables est aussi un vecteur cointégrant.
Le test de cointégration de Johansen comporte des avantages par rapport à la méthode en
deux étapes d'Engle et Granger. Toutefois, l'issue de test dépend du choix d'un certain
nombre de paramètres dont le nombre de retards et la présence de constante et de tendance
dans la spécification. Ces questions sont traitées dans les paragraphes qui suivent.

Interprétation des termes déterministes

Les lois asymptotiques des statistiques de test de rang de cointégration de Johansen ne sont
pas invariantes à la prise en compte des variables qui ne sont pas explicitement modélisées
dans le système. En particulier, ces lois sont conditionnées par la présence éventuelle d'une
constante ou d'un trend linéaire dans les relations de long terme. Plusieurs spécifications du
modèle deviennent envisageables selon l'hypothèse faite sur la présence ou non de termes
déterministes (constante et trend) dans les relations de cointégration et dans le modèle à
correction d'erreurs. Les différentes interprétations inhérentes à ces spécifications prennent
leur source dans le fait qu'un modèle VEC mélange des variables en différence et des variables
en niveau modélisant un équilibre de long terme. Pour choisir entre les différentes
spécifications il importe de bien cerner d'abord leur signification.
Le modèle à correction d'erreurs et l'espace de cointégration ne comportent aucun

terme déterministe :

14
Estimation et tests de cointégration

Cette structure impose l'absence de toute composante déterministe, tant dans les séries en
niveau que dans les séries en différences premières.
Le modèle à correction d'erreurs ne comporte aucun terme déterministe et la
constante appartient uniquement à l'espace de cointégration:

Ce cas caractérise des séries sans tendance linéaire.


Le modèle à correction d'erreurs et l'équation de cointégration comportent une
constante :

Le fait que comporte une dérive implique que les séries en niveau sont caractérisées
par une tendance linéaire. Mais la relation d'équilibre de long terme est stationnaire de
moyenne β0 .
Constante dans le modèle à correction d'erreurs et constante et trend dans l'équation
de cointégration:

L'introduction d'une tendance linéaire dans la relation de cointégration se justifie si


certaines variables de Xt présentent une tendance linéaire. La relation d'équilibre de
long terme est stationnaire autour d'une tendance linéaire. Ce cas autorise la présence
de variables TS.
Constante et trend dans le VAR et dans l'espace de cointégration :

Le fait que admette une représentation avec dérive et tendance linéaire


signifie que les séries en niveau Xt comportent une tendance quadratique.
Il est important de distinguer clairement entre ces différents cas. Car, d'une part, ils
impliquent des interprétations différentes sur le comportement des variables et, d'autre
part, les tests de cointégration dépendent de la façon dont on spécifie les termes
déterministes.

Test de cointégration de Pesaran et al. (2001)

Pesaran et al. (2001) ont proposé une approche du test de cointégration basée sur les
modèles autorégressifs à retards échelonnés (ARDL). Cette méthodologie présente plusieurs
avantages par rapport aux méthodes d'Engle et Granger (1987) et de Johansen (1988).
Premièrement, ce test est applicable que les variables soient I(0) ou I(1). Cette caractéristique
fondamentale atténue le problème lié à l'incertitude des résultats des tests de racine unitaire.
Deuxièmement, la méthode tient compte des dynamiques de court et long termes lors du test
de cointégration. Au contraire, la méthode d'Engle et Granger (1987) estime la relation de long
terme sans prendre en compte explicitement les ajustements de court terme entre les
variables. Troisièmement, le test de Pesaran et al. (2001) s'avère relativement performante
dans le cas de petits échantillons contrairement au test de cointégration de Johansen dont la
validité requiert de grands échantillons.
L'équation de base du test de cointégration s'écrit sous la forme suivante:

où Δ est l'opérateur de différence première. L'équation (14.26) pourrait inclure également une
tendance et des variables indicatrices captant l'effet de certains chocs macroéconomiques
dans les données. L'équation est estimée en utilisant tour à tour chacune des variables
comme variable dépendante. C'est là aussi l'un des avantages de la méthode de Pesaran et al.
(2001) d'indiquer explicitement laquelle des variables est dépendante et laquelle est
indépendante dans la relation de cointégration. Les retards p et q sont déterminés en
minimisant le critère d'Akaike (AIC).
Sous la condition à long terme Δy = Δx = 0, la forme réduite de la solution de l'équation (8.29)
donne l'équation de long terme pour yt :

15
Estimation et tests de cointégration

La procédure du test de cointégration repose sur le test de l'hypothèse

contre l'alternative que

. La statistique de test bien que classique (Fisher ou Wald)

ne suit pas une loi standard. La distribution asymptotique dépend : (a) des propriétés de
stationnarité des variables explicatives, (b) du nombre de variables explicatives, (c) de la taille
de l'échantillon, et (d) de la présence de termes déterministes (constante et tendance) dans le
modèle. Ainsi Pesaran et al (2001) ont simulé deux ensembles de valeurs critiques pour la
statistique de test, avec plusieurs cas et différents seuils. Le premier ensemble correspond au
cas où toutes les variables explicatives sont I(0) et représente la borne inférieure. Le second
ensemble correspond au cas où toutes les explicatives sont I(1) et représente la borne
supérieure . Si la F-stat. excède la borne supérieure alors il y a cointégration. Si elle est
inférieure à la borne inférieure alors on rejette l'existence d'une relation de cointégration. Si la
F-stat. est comprise entre les deux bornes, on ne peut pas conclure à moins de connaître
l'ordre d'intégration exact des variables.

16
Interprétation d'un modèle à correction d'erreurs

Interprétation d'un
modèle à correction III
d'erreurs

La spécification sous la forme à correction d'erreurs permet d'estimer les effets de court

terme et de long terme. En considérant l'équation (14.7), les coefficients et β


représentent respectivement les effets de court terme et de long terme de la variable xt sur yt .
Lorsque les variables sont considérées sous la forme logarithmique, ces effets s'interprètent
en termes d'élasticités. Si les séries sont cointégrées, il est possible de distinguer la causalité
de court terme de celle de long terme.

17
Travaux pratiques

Travaux pratiques
IV
Nous allons examiner la possibilité d'une relation de cointégration entre les variables
intervenant dans la fonction de consommation. S'il existe une telle relation alors il est possible
d'estimer la fonction de consommation à court terme sous la forme d'un modèle à correction
d'erreurs.

Tests de cointégration

Pour qu'une relation de cointégration existe entre des variables, deux conditions doivent être
réunies. Premièrement, les variables doivent être non stationnaires et intégrées du même
ordre. Deuxièmement, leurs tendances stochastiques doivent être liées, c'est-à-dire qu'il doit
exister au moins une combinaison linéaire de ces variables qui soit stationnaire. Par
conséquent, en premier lieu, on doit déterminer l'ordre d'intégration des variables par le biais
des tests de racines unitaires standards. Ces tests effectués précédemment ont montré que
les variables LC, LPIBR et LIPC étaient intégrées d'ordre un. Nous allons étudier la possibilité de
cointégration entre ces variables en utilisant l'approche d'Engle et Granger et celle de
Johansen.
Test d'Engle et Granger
Ce test se fait en deux étapes. La première étape estime la relation statique de long terme par
la méthode des moindres carrés ordinaires. La seconde étape procède au test de stationnarité
des résidus de l'équation statique. La cointégration nécessite que la série résiduelle soit
stationnaire.
Etape 1 : Estimation de la relation de long terme
La relation statique de long terme s'écrit sous la forme suivante :

Il s'agit d'une équation linéaire dont la procédure d'estimation a été déjà vue. Le tableau
suivant reporte les coefficients de régression de cette équation.
Tableau 14.3 : Estimation de la relation de long terme

Pour que la relation estimée soit une relation de cointégration, le résidu issu de cette

18
Travaux pratiques

régression doit être stationnaire. Si les résidus sont non stationnaires, la relation estimée
pourrait être une régression fallacieuse. On va donc générer la série des résidus de cette
équation. Pour cela, cliquez sur Procs/Make Residuals series... et tapez le nom de la série
des résidus, soit RES.
Etape 2 : Test de stationnarité sur la série des résidus
On applique les tests de racine unitaire sur la série des résidus RES. Les résultats issus de
l'application des tests ADF et PP sont reportés dans le tableau suivant :

Les statistiques de tests reportent toutes des valeurs inférieures aux valeurs critiques à 5%.
On en déduit donc que la série des résidus de l'équation statique est stationnaire. Par
conséquent, les séries sont cointégrées. Il est alors possible d'estimer le modèle à correction
d'erreurs.
Test de cointégration de Johansen
La méthode de Johansen requiert tout d'abord de déterminer le nombre de retards du VAR en
niveau. Nous avons vu comment déterminer l'ordre optimal d'un VAR. En suivant la même
démarche, avec un retard maximal de 4, les critères d'information indiquent deux retards pour
le VAR en niveau. Après cette étape, sélectionnez puis ouvrez le groupe des trois variables. A
partir du menu du groupe, sélectionnez View/Cointegration Test.... Entrez ensuite le
nombre de retards du VAR en différence première.
Pour réaliser le test du rang de cointégration de Johansen, il faut choisir parmi les cinq
spécifications possibles celle qui apparaît la plus plausible pour les données. L'option par
défaut est la troisième, à savoir qu'il existe une constante à la fois dans l'équation de
cointégration et dans la forme à correction d'erreurs. La présence des deux constantes
implique la présence d'une tendance linéaire dans les niveaux des séries. L'option 6 fait un
résumé des cinq spécifications. En choisissant cette option, on obtient le tableau suivant:
Tableau 14.5: Récapitulatif du test de cointégration de Johansen

On peut ainsi lire le nombre de relations de cointégration suivant l'hypothèse faite pour la
spécification du modèle. Par exemple, si on suppose qu'il n'y a aucune tendance dans les
séries, la présence d'un terme constant dans l'espace de cointégration (cas 2) conduit à
retenir, selon la statistique de la trace, l'hypothèse de deux relations de cointégration entre les
trois variables au seuil de 5%. La statistique de la valeur propre maximale indique au contraire
une seule relation de cointégration. En supposant une tendance linéaire dans les données et
une constante dans les équations de cointégration (cas 3), la statistique de la trace indique
trois relations de cointégration. L'existence de trois relations de cointégration entre trois
variables non stationnaires s'avère impossible car elle remet en cause la non stationnarité des
variables.
En pratique, on ne choisit pas les cinq spécifications mais une seule. Or nous constatons que
le choix de la spécification n'est pas sans conséquence sur la structure du modèle. Comment
choisir la spécification la plus adaptée aux données ? L'analyse graphique des séries ainsi que
les tests de stationnarité peuvent être utiles à ce stade pour suggérer le choix de la ''bonne''

19
Travaux pratiques

spécification. En examinant l'évolution des trois variables, on constate que celles-ci présentent
une tendance à la hausse. Si nous voulons autoriser la présence d'une constante dans la
relation de cointégration, nous devons choisir la deuxième ou la troisième spécification.
Cependant, les estimations montrent que ni la constante ni la tendance ne sont significatives.
La mise en relation des variables supprime donc la tendance linéaire commune dans la
relation. Nous choisissons la première option qui exclue la constante et la tendance de toutes
les équations. Les résultats du test correspondant à cette spécification sont consignés dans le
tableau suivant.
Tableau 14.6 : Statistique de la trace du test de cointégration de Johansen

L'interprétation du test se fait de façon séquentielle partant de r = 0 à r = p - 1 = 2 . L'on


s'arrête dès que l'hypothèse nulle est acceptée.
La première ligne du tableau teste l'hypothèse selon laquelle r = 0, c'est-à-dire qu'il n'existe pas
de relation de cointégration. Pour cette hypothèse, la statistique de la trace reporte une valeur
de 36,8405, supérieure aux valeurs critiques à 5% (24.31) et 1% (29,75), ce qui conduit à
rejeter l'hypothèse qu'il n'existe aucune relation de cointégration entre les variables. La ligne
suivante du tableau teste l'hypothèse d'au plus une relation de intégration. Cette hypothèse ne
peut être rejetée car la valeur de la statistique de la trace est inférieure à la valeur critique à
5%. La procédure de test s'arrête à ce niveau. Finalement, la statistique de la trace indique qu'il
y a une seule relation de cointégration aux seuils de 5% et 1%.
Etant donné les distorsions du test de cointégration à distance finie, nous allons réexaminer
les résultats du test de cointégration en introduisant les facteurs de correction proposés par
Reinsel et Ahn (1992) et Cheung et Lai (1993). Les résultats sont reportés dans le tableau
suivant :
Tableau 14.7 : Correction de la statistique de la trace du test de cointégration de Johansen

En considérant ces corrections, la conclusion du test de la trace ne s'en trouve pas modifiée.
En effet, l'hypothèse d'absence de cointégration est toujours rejetée au seuil de 5%. En
revanche, on ne peut rejeter l'hypothèse d'au plus une relation de cointégration. Le test de la
valeur propre maximale dont les résultats sont reportés dans le tableau ci-dessous confirme
qu'il existe une seule relation de cointégration.
Tableau 14.8: Statistique de la valeur propre maximale du test de cointégration de Johansen

20
Travaux pratiques

En définitive, nous retenons qu'il existe une seule relation de cointégration entre les trois
variables. Nous allons estimer le modèle à correction d'erreurs qui lie la dynamique de court
terme à celle de long terme.

Estimation du modèle à correction d'erreurs

Nous allons appliquer trois méthodes pour estimer la fonction de consommation sous la
forme à correction d'erreurs.
La méthode en une seule étape
Le modèle à correction d'erreurs est estimé sous la forme suivante

Sélectionnez Quick/Estimate Equation et entrez les variables de la façon suivante :


DLCons C DLPibr DLipc DLPibr(-1) DLipc(-1) DCons(-1) LCons(-1) LPibr(-1) Lipc(-1)
Les résultats de l'estimation montrent que le coefficient associé à la force de rappel est négatif
(-0,86197) et significatif au seuil de 5%. Il existe bien un mécanisme à correction d'erreurs : les
déviations par rapport à la relation de long terme induisent à court terme des changements
dans l'évolution de la consommation, du PIB ou du prix de façon à forcer le système à
converger vers son équilibre de long terme. La valeur numérique du coefficient de rappel
représente la vitesse à laquelle tout déséquilibre entre les niveaux désiré et effectif de la
consommation est résorbé dans l'année qui suit tout choc. Ainsi, environ 86,197% des
déséquilibres de la consommation par rapport à son niveau de long terme sont corrigés
l'année suivante. Un choc constaté au cours d'une année est entièrement résorbé au bout
d'une année et 2 mois.
Tableau 14.9: Coefficients de régression du modèle à correction d'erreurs (méthode en une
étape)

21
Travaux pratiques

Le taux de croissance de la consommation dépend de façon positive du taux de croissance


courant du PIB réel et du taux de croissance passé de la consommation. Ce dernier résultat
est en accord avec les théories microéconomiques mettant en avant le rôle des habitudes
dans les choix de consommation des individus.
On peut calculer les élasticités de court et de long terme de la consommation par rapport au
revenu. L'élasticité de court terme est β1 = 0.3568. Si le PIB réel augmente de 10%, la
consommation à court terme augmente de 35.68%. L'élasticité de long terme est égale à

. La consommation augmente à long terme de

9.145% suite à une augmentation du PIB réel de 10%.


On peut effectuer sur ce modèle tous les tests classiques sur les résidus (autocorrélation,
hétéroscédasticité, normalité, stabilité, test d'erreur de spécification). Les résultats des tests de
diagnostic montrent que les résidus du modèle vérifient toutes les hypothèses du modèle
linéaire.
La méthode en deux étapes d'Engle et Granger
La méthode en deux étapes estime dans un premier temps la rélation de cointégration et
introduit, dans un second temps, la série résiduelle retardée d'une période issue de cette
rélation dans l'équation de court terme. Nous avons déjà estimé la relation de long terme et
généré la série des résidus RES. Il s'agit maintenant d'introduire la variable RES(-1) dans le
modèle en différence première. L'équation à estimer se présente alors sous la forme suivante :

Les résultats de l'estimation sont reportés dans le tableau suivant :


Tableau 14.10 : Coefficients de régression du modèle à correction d'erreurs (méthode en deux
étapes)

22
Travaux pratiques

Les variables étant toutes stationnaires, les tests usuels s'appliquent. Le coefficient associé à la
force de rappel est égal à -0,821. Il est négatif et significatif au seuil de 5%. La représentation à
correction d'erreurs est donc validée. La valeur du coefficient indique qu'environ 82% du
déséquilibre de la période t-1 est corrigé en t. L'élasticité de long terme issue de l'estimation
de la relation de cointégration est de 0,909. L'élasticité de court terme est estimée à 0,4019.
Nous remarquons que les resultats sont proches de ceux obtenus par la méthode en une
étape.
Il est important de rappeler que le modèle à correction d'erreurs ne se réduit pas à une seule
équation. Nous supposons ici qu'il se réduit à une seule équation parce que nous faisons
l'hypothèse d'exogénéïté faible des variables explicatives (LPIBR et LIPC). Il convient de tester
cette hypothèse dans l'étape suivante. Il est également possible d'appliquer tous les tests
classiques (autocorrélation, hétéroscédasticité, normalité, stabilité...) sur ce modèle.
La méthode de Johansen
L'approche de Johansen permet d'estimer simultanément la relation de cointégration et le
modèle à correction d'erreurs. Pour estimer le modèle à correction d'erreurs, sélectionnez les
variables dans le workfile, faites un clic droit, sélectionnez Open/ as VAR et cochez Vector
Error Correction...
On remarquera que le nombre de retards est celui du modèle VAR en différence première et
non celui du VAR en niveau. La méthode Johansen reste très sensible au nombre de retards.
Un nombre de retards élevé accroît la probabilité d'existence de relation de cointégration.
Pour indiquer le nombre de relation de cointégration et le type de spécification, cliquez sur
l'onglet Cointégration. Cliquez ensuite sur OK pour valider. Dans la mesure où nous avons trois
variables, le modèle à correction d'erreurs comportera trois équations. Les résultats de
l'estimation du modèle vectoriel à correction d'erreurs sont reportés dans le tableau suivant.
Tableau 14.11: Coefficients de régression du modèle à correction d'erreurs (méthode de
Johansen)

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Travaux pratiques

La première partie du tableau donne la relation de cointégration. CointEq1 désigne les résidus
retardés d'une période issus de la relation de cointégration. En mettant la variable LCONS en
début, la procédure choisit cette variable comme étant la variable endogène, LPIB et LIPC
étant les variables exogènes.
La relation de long terme s'écrit :

L'élasticité de long terme est donc estimée à 0,919, valeur qui est proche de celle obtenue par
les deux méthodes précédentes.
La deuxième partie du tableau montre que le terme à correction d'erreurs est négatif et
significativement différent de zéro dans l'équation relative au taux de croissance de la
consommation. Dans les équations relatives aux deux autres variables, ce terme est négatif
mais non significatif. Ce résultat indique que l'hypothèse d'exogénéïté faible des deux variables
LPIBR et LIPC ne peut être rejetée. Nous avons maintenant la certitude statistique que la
relation de cointégration mise en évidence plus haut est bien une équation de consommation.
A court terme, le taux de croissance de la consommation ne dépend que de sa valeur passée,
ceci reflète l'effet des habitudes de consommation.

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