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ANABELLE ROBERTS

Avec la collaboration d’Olivia Karam


Une plume de l’ombre qui mérite un peu de
lumière

La
THÉORIE
de la
VESTE
Une méthode choc
pour faire de
l’échec une force

édito
Infographie: Michel Fleury

ISBN: 978-2-924959-68-8
ISBN Epub: 978-2-924959-77-0

Dépôt légal – Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2020


Dépôt légal – Bibliothèque et Archives Canada, 2020

© 2020 Flammarion, Paris, France


© Gallimard ltée – Édito, 2020 pour la présente édition

Tous droits réservés


J’ai pris vingt-sept vestes en demandant à mon héroïne Christine
Lagarde d’écrire l’avant-propos de ce livre. À ce jour, pas de réponse.
C’est une veste pour le moment!
Alors, à la place, je vous laisse avec cette citation qui résume bien
pour quoi je l’idolâtre:

«Je crois que chaque fois que vous décidez de prendre un risque, il
vous faut être un peu effronté. Vous devez oser pour vous- même et
oser changer autour de vous. Et si ça ne fonctionne pas, ça ne
fonctionne pas.
Rebondissez et reprenez vos esprits.»

Christine Lagarde
Pour Cédric, l’homme qui m’a tout donné.
Et Mike, l’homme qui m’a tout appris.
Avertissement

Vous rêvez secrètement de booster votre carrière sans jamais oser en


parler, vous avez peur de demander une augmentation à votre patron
alors que vous savez que vous la méritez, vous cherchez à repousser
vos limites sans savoir par où commencer? Cet ouvrage est fait pour
vous! Grâce à une méthode pragmatique et efficace, en seulement
trois étapes illustrées par des exemples et des idées qui vous aideront
au quotidien à la mettre en pratique, vous n’aurez plus jamais peur
d’oser.
Connaissez-vous l’expression française «prendre une veste»? Elle
signifie subir un échec, le plus souvent cuisant et difficile à oublier. Si
cette expression reste surtout employée pour parler d’une déception
amoureuse, vous allez rapidement le constater, la Théorie de la veste
– LTDLV pour faire court – est essentiellement destinée à
développer vos compétences professionnelles (même si elle peut
aussi se pratiquer dans la vie privée, et notamment dans le cadre des
rencontres amoureuses). En parfaite workaholic qui pense beaucoup
au travail, j’ai tout naturellement choisi la majorité des exemples et
des situations de ce livre dans le cadre du boulot… Toutefois, je ne
manquerai pas de vous donner quelques pistes pour vous aider dans
la vie quotidienne.
J’ai appris l’expression «prendre une veste» peu de temps après
être arrivée en France. J’ai quitté le Canada à vingt-trois ans en 2007
pour emménager à Paris avec mon petit ami français. J’avais cru, à
tort, qu’on vivait en France comme au Canada et que les seules
différences flagrantes étaient qu’on pouvait manger chaque jour du
bon pain et avoir accès à de magnifiques sous- vêtements. Je ne
pouvais pas me tromper davantage. Ce fut le grand choc culturel de
ma vie.
Le troisième jour de mon arrivée, mes beaux- parents m’ont
conviée à participer à un «défilé». J’avais toujours aimé les parades
et je me souvenais avec tendresse des défilés de la fête du Canada à
Whitecourt, en Alberta. Le chef de la police jetait des bonbons aux
enfants dans la foule. J’ai donc suivi mes beaux-parents avec le
sourire jusqu’à la station de métro République.
Alors que nous remontions vers la surface en empruntant l’escalier
roulant, l’ambiance était tout sauf festive. Des gens criaient et
chantaient avec colère le poing levé en l’air. D’autres soufflaient dans
des sifflets et des cornes en marchant sur la place de la République.
Je ne parlais pas encore assez bien le français pour pouvoir poser des
questions. Quel genre de défilé était-ce? Personne n’avait l’air
heureux. Ce n’est qu’un an plus tard que j’ai su qu’il s’agissait d’une
manifestation syndicale communiste. J’avais atterri chez les rouges!
Maurice et Marine, mes beaux-parents, ont été extrêmement
gentils avec moi, plus que toutes les autres personnes dont j’avais
croisé la route depuis ma naissance. Malgré nos différences
politiques, notre relation s’est tissée dans l’amour. Marine m’a appris
à cuisiner certaines des choses les plus délicieuses que j’aie goûtées
jusqu’à présent: la sauce hollandaise, le cassoulet, le confit de canard
ou encore le foie gras mi-cuit au cognac et sa confiture d’oignons. Et
Maurice, un vieux de la vieille, m’a appris combien il est important
pour un citoyen de saisir son droit en tant que Français et de se
mettre en grève lorsque le gouvernement tente de changer quelque
chose…
Maurice était plus français qu’un croissant au beurre. Il travaillait
dans la plus grande entreprise automobile de France et y était le
représentant syndical. Il avait une cave pleine de 600 bouteilles de
vin qu’il commandait directement au vignoble. Il mangeait du
poisson le vendredi (même s’il était athée) et sa femme et sa
maîtresse étaient amies sur Facebook. Il regardait les nouvelles tous
les soirs et lisait un journal de gauche tous les matins. Il ne parlait
pas un mot d’anglais et en était fier. Il considérait que les Français
qui utilisent des expressions anglaises et des anglicismes «polluent
notre langue».
J’ai vécu avec Maurice, Marine et leur fils pendant six mois,
jusqu’à ce que nous ayons trouvé notre premier appartement dans le
11e arrondissement de Paris. Pendant ce temps, je cherchais
assidûment un emploi. Ce n’est pas facile quand on ne parle pas
français! J’étais au téléphone dans le salon à faire mes relances après
l’envoi de nombreux CV pendant que Maurice lisait son journal à
côté. Un employé des RH de l’hôtel où j’avais postulé m’a dit qu’ils
n’étaient pas intéressés et que je devais arrêter d’appeler. J’ai
raccroché, visiblement ébranlée par ce refus catégorique et, sans
lever les yeux de son journal, Maurice a dit sur un ton à la fois poli et
critique: «Eh bien, je ne parle pas anglais, mais j’ai bien saisi que tu
viens de te prendre une belle veste.» Je n’ai absolument pas compris
ce qu’il m’a dit! J’ai juste souri et j’ai continué à faire mes appels.
Quelques jours plus tard, j’ai accompagné Maurice à la
boulangerie. Oui, il allait chercher du pain frais à la boulangerie tous
les jours! Il en a profité pour m’interroger sur ma recherche
d’emploi. Je lui ai expliqué que je cherchais toujours, mais que j’avais
plusieurs pistes. Je me suis souvenue de l’expression «prendre une
veste» qu’il avait employée et je lui en ai demandé la signification. Il
me l’a expliquée: «Prendre une veste, c’est prendre un vent, une
porte, un râteau!» Plus il parlait, moins je comprenais de quoi il
retournait.
Ce même soir, dès que mon petit ami est rentré du travail, je lui ai
demandé ce que voulait dire cette curieuse expression. «Prendre une
veste, c’est se faire rejeter, c’est subir un échec.» Voilà comment j’ai
appris l’une de mes premières expressions idiomatiques en français.
J’aurais dû comprendre que cette formulation était un peu désuète et
que c’était une expression de grand-père. Mais je me suis mise à
l’utiliser abondamment et je l’ai peu à peu transmise à mon
entourage!
Mon éditeur québécois ne voulait pas que le livre s’appelle La
Théorie de la veste, mais après avoir lu le manuscrit, il s’est rangé à
mon avis. Oui, je sais, ce n’est pas une expression québécoise, et
même en France on ne l’utilise pas souvent. Mais «l’art de se faire
rejeter», ça ne sonne pas aussi bien que «l’art de prendre des
vestes». J’espère donc que, comme nous, vous adopterez cette
expression et que vous apprendrez à transformer l’échec en force.
Par ailleurs, certaines digressions vont nous amener à nous
éloigner de la question du rejet ou de l’échec. C’est le cas lorsque je
vais évoquer la relation que certaines personnes entretiennent avec
l’ambition et l’argent, leur obsession pour l’établissement où vous
avez fait vos études et votre nombre de diplômes. Ces passages sont
parfois un peu directs, mais je suis comme ça, j’aime m’exprimer
librement et dire ce que je pense. Aussi, vous n’êtes pas à l’abri d’un
ou deux gros mots.
Le passage le plus révélateur de mon franc-parler, vous ne pouvez
pas le rater, c’est le chapitre huit. Attention, construit sur une
métaphore sexuelle, il pourrait heurter un public non averti, c’est
pourquoi je prends le soin de vous mettre en garde. J’ai bien essayé
de trouver une image plus soft mais chaque fois c’est tombé à l’eau,
alors j’ai gardé la version trash… Je vous avoue que je n’imaginais
pas LTDLV sortir des murs de ma petite agence pour se dévoiler dans
un livre, et que je n’ai jamais pensé que des gens comme ma belle-
mère pourraient en entendre parler un jour (Catherine, si vous lisez
ce livre, je vous adore et j’espère que vous n’inciterez pas votre fils à
demander le divorce après l’avoir lu…). Mon éditeur a bien essayé de
me dissuader d’écrire un chapitre entier là-dessus, mais nous
n’avons jamais réussi à tomber d’accord sur ce point. Il n’est donc
pas responsable de ces propos obscènes et décline toute
responsabilité concernant le mécontentement des lecteurs: si vous
souhaitez vous plaindre, c’est auprès de moi qu’il faut le faire.
J’ai attisé votre curiosité, non? Si ce n’est pas le cas, au moins êtes-
vous prévenus!
Quoi qu’il en soit, je passe mes journées à aider les gens à se sentir
plus confiants au travail et je suis étonnée de voir qu’un nombre
incalculable de personnes ont en tête des choses insensées à propos
de ce qu’elles peuvent ou ne peuvent pas accomplir. Ce sont le plus
souvent des personnes exceptionnelles, qui pourraient faire bien plus
que ce qu’elles ont l’habitude de faire, mais qui ne le savent pas. Ces
hommes – parfois – et ces femmes – souvent – ignorent leur
potentiel. Faute d’avoir confiance en eux, ils se fixent des limites tout
seuls. Je le sais parce que j’ai longtemps été comme eux. Avec mon
équipe, nous développons depuis des années une méthode inédite
qui met fin à ce cycle d’ignorance, et qui fonctionne. Nous l’avons
constaté maintes fois. Alors j’espère qu’elle vous sera utile, à vous
aussi. C’est pour ça que j’ai écrit LTDLV. Pour vous. Je sais que c’est
bizarre, parce qu’on ne se connaît pas, mais c’est vrai.
Alors il ne me reste plus qu’à vous souhaiter bonne lecture. Et de
bonnes vestes à venir.
CHAPITRE UN

Avant la Théorie de la veste,


il y avait…

Les mormons
Lorsque j’étais petite, je devais assister aux messes mormones qui
duraient trois heures chaque dimanche. Trois longues heures
divisées en trois parties. Pendant la première heure, les femmes, les
hommes et les enfants étaient tous réunis dans la chapelle principale
sur des chaises en plastique – pas de bancs chez les mormons à
Whitecourt –, tête baissée pour écouter la prière, avant d’être
séparés pour les deux heures suivantes.
Ce jour-là, j’avais dans mon sac le petit matériel du bon mormon
de 14 ans: mon cahier d’études religieuses – à présenter chaque
dimanche pour prouver que j’étais bien allée à la prière quotidienne
de 5 h 30 à 6 h 30 pendant la semaine –, le «Séminaire», comme ils
l’appellent, et mon Livre de Mormon, une sorte de bible mormone
écrite par le fondateur de l’Église dans les années 1800, lequel avait
eu une révélation divine en plaçant des pierres magiques dans un
chapeau… Mais j’avais aussi fourré dans mon sac une bombe de
laque pour cheveux et des allumettes. Pour brûler mes livres. Et
j’étais bien décidée à le faire, je vous assure.
Vous vous demandez sûrement pourquoi je vous raconte cette
histoire digne d’un film d’horreur. Quel rapport avec la Théorie de la
veste? Vous allez comprendre.
Je suis l’aînée de dix enfants élevés dans le micro- village de Fox
Creek, en Alberta, au Canada. Ma famille représentait donc une
grande partie des habitants. On vivait loin de tout; le Walmart le plus
proche était à 220 kilomètres. Et l’hiver durait huit mois.
En tant qu’aînée, j’étais censé montrer l’exemple. Alors à 11 ans,
quand je me suis déclarée athée, ma famille a cru que j’étais possédée
par le diable. Mes parents m’ont forcée à aller à l’église. Quand à
13 ans j’ai eu un petit copain et que j’ai commencé à vouloir me
maquiller, mes parents, déboussolés, sont allés interroger l’évêque de
la paroisse pour savoir «quoi faire de cette enfant incorrigible qui ne
prie plus, se proclame athée et qui veut maintenant se maquiller». La
réponse fut sans appel: «Votre fille est comme une pomme
empoisonnée. Si on la laisse avec les autres, elle va toutes les
contaminer. Il faut l’éloigner. Et le plus tôt sera le mieux.» Ni une ni
deux, mes parents m’ont confiée à une famille d’accueil. Une famille
mormone installée au milieu de nulle part, à la campagne, à une
heure d’autobus de la première école. Et pendant que les parents
travaillaient aux champs, il fallait que je m’occupe de leur fille
handicapée.
Quelques mois plus tard, j’ai eu 14 ans. Règlement mormon oblige,
il me fallait commencer mes cours de doctrine religieuse: étude du
«Séminaire» chaque matin aux aurores. La première semaine, je n’y
ai pas assisté. Quand le premier dimanche est arrivé, je n’avais donc
rien à montrer à l’inspecteur. Je ne me suis pas démontée, je lui ai
expliqué que j’étais athée. Il m’a dit de me taire, que Dieu pourrait
m’entendre, Satan aussi – et qu’il allait en profiter pour me posséder.
Et, bien sûr, cet inspecteur a immédiatement conseillé à ma famille
d’accueil de me serrer davantage la vis. Le soir même je fus très
sévèrement punie.
Mais qu’importaient les punitions, rien n’aurait pu me faire
prendre au sérieux ces textes tout droit sortis d’un chapeau. Je me
concentrais sur mes études car je savais que les bonnes notes en
classe me mèneraient sur le chemin de la liberté. Malheureusement,
une autre semaine à sécher mes cours de Séminaire me priva de tous
mes livres; le seul auquel j’avais droit était le Livre de Mormon. On
m’avait supprimé tous les autres. La seule condition pour y avoir
accès à nouveau était de suivre les cours de Séminaire… Ça ne
s’arrangeait pas.
Mais la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, c’est une «soirée
des mutuelles». Trois heures de messe dominicale et une heure
d’étude religieuse chaque matin ne suffisent pas à faire de vous un
bon mormon. De 12 à 18 ans, les jeunes filles doivent aussi assister
chaque jeudi soir à une réunion ayant pour but de les former à leur
vie d’épouse parfaite, de mère parfaite. On leur enseigne comment
cuisiner, coudre, tricoter, bricoler, jardiner fruits et légumes,
entretenir son jardin, décorer sa maison, pratiquer les premiers
secours, couper, coiffer et tresser ses cheveux, faire du point de croix,
abattre une poule… La liste est proche de l’infini. Mon mari,
aujourd’hui encore, n’en revient pas que je sache faire tout ça!
Ce fameux jeudi soir, sur l’horaire des activités, on pouvait lire
«career training», formation de carrière, en français. C’était la
première fois que je me rendais à l’église avec le sourire: j’avais hâte
d’y entendre enfin quelque chose qui allait m’intéresser. On allait
parler carrière!
Notre animatrice, sœur Swanson, commença par nous donner des
nouvelles de Salt Lake. Salt Lake City, c’est le Vatican mormon; tout
ce qui venait de là-bas nous était lu à haute voix aux différentes
messes. Sœur Swanson nous indiqua donc qu’un nouveau
communiqué venait de tomber concernant toutes les jeunes
adolescentes du monde mormon. Dans les grandes lignes, ce texte
nous informait qu’il y avait de plus en plus de femmes mariées qui se
trouvaient en grande difficulté parce que leur époux avait succombé
à un accident ou à une maladie et qu’elles se retrouvaient dans
l’obligation de demander de l’aide à l’Église – de la nourriture et de
l’argent – afin de pouvoir subvenir aux besoins de leurs (nombreux)
enfants. Ces femmes pesaient lourd sur les finances de l’Église
(chaque mormon reverse 10% de ses revenus à la communauté pour
accéder à l’amour de Dieu; un peu comme Netflix, mais en moins
drôle) et il était donc grand temps qu’elles soient formées à un métier
avant de se marier et d’avoir des enfants. Le communiqué s’achevait
par une liste des métiers «acceptables» pour une femme mormone:
coiffeuse, secrétaire, préposée aux bénéficiaires, assistante médicale,
éducatrice à la petite enfance, esthéticienne. Les diplômes ne
devaient pas s’obtenir en plus de deux ans – douze mois c’était mieux
–, car ce temps à ne pas faire d’enfants était «volé à Dieu»…
J’étais folle de rage. J’avais envie de pleurer, de cracher au visage
de sœur Swanson. «C’est tout? Coiffeuse? Secrétaire?» ai-je
demandé. La pauvre sœur Swanson n’a pas su quoi me répondre et
m’a conseillé d’aller demander d’autres informations à l’évêque.
Furieuse, j’ai quitté la pièce pour que personne ne voie mes larmes.
Dans ma tête d’adolescente, je ne savais pas vraiment ce que
signifiait une «carrière», mais j’avais compris que derrière ce mot se
cachaient de beaux appartements dans de grandes villes et que ces
femmes qui avaient une «carrière» étaient écoutées lorsqu’elles
prenaient la parole, qu’elles gagnaient de l’argent et pouvaient se
payer des taxis…
Devenir coiffeuse ou éducatrice à la petite enfance, c’est très bien
quand vous le choisissez, mais je n’avais aucune envie de faire ce type
de job. Je ne savais pas ce que je voulais devenir plus tard, mais je
voulais pouvoir choisir parmi une infinité de carrières! J’ai détesté ce
communiqué et ma déception a été à la hauteur de mon attente.
Après avoir beaucoup pleuré, j’ai ressenti une colère immense.
J’étais athée, personne ne pourrait me prouver le contraire. J’aurais
une belle carrière, personne ne pourrait m’en empêcher. J’avais
besoin de m’affirmer. De le crier à la terre entière. Et c’est ce cri du
cœur, ce besoin viscéral qui m’a donné l’idée de glisser de la laque et
des allumettes à côté des textes sacrés dans mon sac le dimanche
suivant.
Une grande fenêtre de la chapelle donnait sur une vaste pelouse
enneigée. J’ai pris place dans l’église en attendant le moment idéal.
Après quelques minutes de prière, j’ai attrapé mon sac et je suis
sortie discrètement. Dehors, juste devant la grande fenêtre, j’ai
creusé un trou dans la neige. J’y ai jeté ma bible, mes cours de
Séminaire et mon Livre de Mormon. J’ai tout aspergé de laque avant
d’y mettre le feu. Je me souviens qu’il m’a fallu m’y prendre à
plusieurs reprises pour que ça flambe. Puis j’ai lancé la bombe de
laque dans les flammes de ma rébellion et je suis revenue à ma place,
au chaud, dans l’église. Moins d’une minute plus tard, une explosion
a retenti. Je devenais officiellement une terroriste domestique.
Le temps que la foule se précipite dehors, le feu d’artifice était déjà
éteint – une seule bombe de laque ne pouvait pas grand-chose face à
tant de neige – et ne restait sur place que la preuve flagrante de ma
révolte.
«Qui a fait ça?» ai-je entendu. Je suis sortie de la foule, je me suis
avancée à côté de mon œuvre. La neige m’arrivait à hauteur de
hanches mais on voyait distinctement les textes sacrés brûlés sur la
couche de neige fraîche. C’était exactement ce que j’avais planifié. Je
voulais que sœur Swanson, l’évêque et tous les autres comprennent
en me voyant que rien ne pourrait m’arrêter. Bien droite devant les
cendres, j’ai relevé le menton, croisé les bras lentement, et prononcé
calmement ces mots: «C’est moi.» Autour, tout le monde s’est
regardé et des murmures sont montés de la foule.
J’ai été punie comme jamais, ce jour-là. Mais peu m’importait: ce
feu était mon espoir parce qu’il m’avait prouvé que je pouvais
changer mon destin. Je ne pouvais pas échanger la main que m’avait
distribuée l’Univers, mais je pouvais choisir comment jouer mes
cartes. J’avais goûté au bonheur de ne pas subir une situation.
Vingt-deux ans plus tard, je suis la «working girl» que j’ai toujours
rêvé d’être. Bien sûr qu’elle n’est pas celle que je croyais à 14 ans. Je
prends le moins de taxis possible, je vis dans une maison en banlieue
et pas en plein centre de Paris. Mais il y a une chose qui est
exactement à l’image de ce que j’avais imaginé: c’est moi qui décide
comment gérer chaque situation, qui crée mes propres opportunités.
J’ai le pouvoir de choisir mon propre destin.
C’est peut-être pour cela que j’ai inventé la Théorie de la veste.
Pour aider un maximum de personnes à ne plus subir ce qu’elles
n’ont pas choisi. Je ne suis pas mère de six enfants – j’en ai trois,
c’est déjà pas mal! – mais je suis propriétaire d’une petite entreprise
parisienne qui ne connaît pas la crise et je me suis entourée au fil des
années d’une super équipe.
Ce livre n’est pas là pour raconter mes Mémoires, mais mon
éditeur a su me convaincre de partager cette histoire «flambante»
pour que vous compreniez qui je suis et d’où me vient cette rage de
réussir et de dépasser mes limites, de prendre mon destin à pleines
mains. Je suis heureuse de l’avoir fait, car c’est assez représentatif de
la femme que je suis devenue.
Si en lisant ceci vous pensez: «Dans sa situation, j’aurais pu faire la
même chose», alors vous allez probablement aimer ce livre. Si vous
pensez: «Dans cette situation, j’aurais aimé faire la même chose,
mais je n’aurais pas osé», alors vous avez vraiment besoin de ce livre,
parce que le monde appartient à ceux qui osent. Audacieux is the
new black. Et l’audace est un muscle. Il peut être entraîné, allongé,
étiré: avec LTDLV vous allez comprendre comment développer ce
muscle de l’audace pour sortir des situations que vous ne voulez plus
accepter.
N’ayez pas peur, pour pratiquer LTDLV, je ne vais à aucun
moment vous conseiller de brûler quoi que ce soit. Commençons par
une petite histoire…

Une histoire de buanderie


Si l’on m’avait dit un jour que la Théorie de la veste se déploierait
sous la forme d’un livre, je ne l’aurais pas cru. C’est une petite
méthode que j’ai mise au point pour moi, pour tenter de développer
ma confiance personnelle et de me donner le courage de monter ma
boîte. Puis je l’ai expérimentée avec mon équipe, pour agrandir mon
entreprise et recruter les personnes les plus brillantes et les plus
charmantes possible. Ah! et aussi pour m’offrir un sac Dior. J’en
rêvais depuis mes 14 ans. Il est vert émeraude et c’est mon accessoire
de pouvoir.
Quand Present Perfect, mon agence, a commencé à prendre de
l’ampleur et que des talents de tous horizons sont venus renforcer
mes rangs, on m’a demandé comment j’avais fait pour y parvenir –
ce qui me surprend toujours, parce que je ne suis pas la seule à
réussir: des dizaines d’autres y parviennent chaque jour. Alors,
plutôt que d’éluder la question, j’ai commencé à partager mon
«secret». Et ceux à qui j’en parlais m’ont rapidement fait un retour
positif: pour eux aussi ça fonctionnait! Tant mieux. C’était surtout
des entrepreneurs, ravis de trouver enfin une «méthode» qui les
aidait à faire décoller leur boîte; il m’a toujours semblé, il est vrai,
qu’on ne donnait pas assez de conseils aux entrepreneurs débutants,
et qu’ils étaient un peu livrés à eux-mêmes.
On entend souvent dire que «le premier million est le plus dur à
atteindre»; moi je crois plutôt que c’est le premier euro qui est le plus
dur à gagner. Quand on démarre un projet professionnel, c’est passer
de zéro client à un client qui est le plus compliqué. Monter une base
de données à partir de rien, envoyer sa première facture, mettre la
première pierre à l’édifice demande un courage colossal parce que ça
signifie qu’il faut accepter de commencer de rien. Et regarder ce rien
droit dans les yeux, l’affronter afin qu’il devienne quelque chose.
C’est ce que j’ai fait lorsque je me suis lancée dans
l’entrepreneuriat en février 2013. Je me suis installée dans ma
buanderie – le seul espace de l’appartement où j’ai pu trouver un peu
d’intimité. Et c’est dans cette buanderie qu’est née de toutes pièces la
Théorie de la veste. À partir de rien.
*

Pour la deuxième fois en deux ans, j’étais alors au chômage. J’ai


toujours été une bosseuse, une fille sérieuse et plutôt efficace, mais je
ne suis pas faite pour travailler au service d’un patron. Je suis une
entrepreneuse dans l’âme; travailler pour quelqu’un d’autre était
voué à l’échec dès le départ. N’oubliez pas que je suis celle qui a
préféré mettre le feu à sa bible plutôt que se plier à Dieu… Pour
reprendre un slogan percutant que j’adore: ni pute ni soumise.
Lorsque j’étais en contrat à durée indéterminée dans un grand
cabinet de communication pour hommes politiques et hauts
dirigeants, je m’ennuyais. Subir les ordres de patrons incompétents,
peu inspirants et sans créativité me pesait. Je perdais vite patience
devant l’inaptitude qu’ils montraient à gérer leur entreprise comme
je l’aurais fait. D’ailleurs, des patrons, j’en ai eu pas mal. La liste de
ceux à qui j’ai dit d’aller se faire voir ailleurs – pour ne pas être
grossière – ne cessait de s’allonger.
J’ai pris conscience que je n’avais pas d’autre choix que celui de me
mettre à mon compte et de développer ma propre entreprise, si je ne
voulais pas vivre d’amour et d’eau fraîche. Le souci, c’est que tout
entrepreneur digne de ce nom doit… entreprendre. Le plus doué que
j’aie connu disait toujours: «Tant que vous n’avez pas de client, vous
n’avez pas d’entreprise, vous avez juste un passe-temps.» Dans ma
buanderie, c’est ce que j’avais. Un passe-temps entrepreneurial. La
seule chose qui tournait là-dedans, c’était la machine à laver.
En attendant que je sorte de cette «torpeur de la buanderie», c’est
Cédric, mon mari, qui m’entretenait. C’est lui aussi qui prenait en
charge tout ce qui concernait notre petit garçon de trois mois. Il
payait tout, absolument tout: le loyer, les couches et les biberons, les
courses, les vacances, mes vêtements. En tant que jeune femme de
ma génération de milléniaux et, qui plus est, ayant échappé à une
famille de mormons pour me lancer dans une vie professionnelle
trépidante, la pilule était plutôt difficile à avaler… J’avais un besoin
vital d’indépendance. En manquer était une vraie source de honte: à
29 ans, je n’avais toujours pas réussi à devenir cette working girl qui
me faisait tant rêver et dont j’étais sûre d’avoir les compétences.
J’avais 13 ans seulement lorsque je me suis découvert une passion et
une belle aptitude pour la vente et l’entrepreneuriat.
Cette année-là, pour Noël, les scouts avaient décidé de vendre des
boîtes de pop-corn pour récolter des fonds. En tant que fille, je
n’avais pas le droit de faire partie des scouts. Habituellement, ça ne
me dérangeait pas vraiment, camper par moins dix degrés, ce n’est
pas franchement agréable. Mais cette fois, quand mon frère est
rentré avec ses boîtes de pop-corn et la mission d’en vendre autant
que possible, j’ai été saisie d’une jalousie immense. Le voir essayer
mollement de vendre quelques boîtes à la sortie de la messe du
dimanche matin m’a stupéfiée: un tel manque d’enthousiasme pour
une tâche aussi cool! Et je l’ai supplié de me confier sa mission.
Dès le lendemain, j’avais vendu du pop-corn à la grande majorité
de mes professeurs. Facile: j’avais adapté mon discours à ce que je
savais sur chacun d’entre eux. M. Untel était gourmand, je lui ai fait
l’article de la grande boîte au caramel. Mme Unetelle faisait attention
à sa ligne, je lui ai sorti un couplet sur les fonds destinés aux enfants.
Pour élargir mon périmètre d’action, j’ai créé des flyers que j’ai
distribués dans les boîtes aux lettres de toutes les sociétés pétrolières
des alentours et sur lesquels j’avais écrit: «Cette année pour Noël,
faites plaisir à vos employés et faites du bien à votre communauté!»
Puis j’ai appelé chaque entreprise pour m’assurer qu’elles avaient
bien pris connaissance de mon courrier et leur proposer de goûter
mes produits pour en constater la qualité.
Mon stock (enfin, celui de mon frère) s’étant épuisé rapidement,
j’ai commencé à vendre sur commande et à étendre mon offre à
d’autres acheteurs potentiels. En dix jours, j’avais prospecté chaque
résidence, chaque association, chaque entreprise de la région. Les
scouts étaient sidérés par le succès fulgurant de mon frère! Pfff.
Une fois toutes les commandes livrées, j’ai écrit un petit mot de
remerciement personnalisé à chaque client. Leur disant qu’ils
seraient avertis l’année suivante du produit choisi par les scouts pour
récolter à nouveau des fonds – j’assurais déjà la pérennité de mon
business. Je venais de goûter pour la toute première fois à ce que
j’allais adorer faire plus tard dans la vie, sans le savoir encore: c’était
mon coming out.
C’est ça que je voulais: le succès, l’indépendance, et développer des
relations. Mais comme le dit très bien Sheryl Sandberg, directrice des
opérations de Facebook et figure de proue de l’engagement pour
l’égalité homme-femme: «You cannot be what you cannot see»
[Vous ne pouvez pas être ce que vous ne pouvez pas voir]. À 13 ans, je
n’avais jamais vu une femme travailler ailleurs que dans les
restaurants et les écoles. Néanmoins, j’ai écrit dans mon journal ce
jour-là que je voulais «être une femme qui travaille à New York dans
une grande tour», jurant de ne jamais être une femme au foyer. Je
deviendrais une femme d’affaires, une femme indépendante, prête à
toujours aller plus loin, à faire fonctionner son cerveau et à se
dépasser d’année en année.
Dans ma buanderie, en 2013, j’étais devenue ce que je m’étais juré
de ne jamais être. C’est pour ça que mon échec était si cuisant. Je
n’étais pas une femme d’affaires, je n’étais même pas indépendante.
Bingo. J’étais au chômage et sans clients. Entièrement dépendante
de mon mari. Je vivais cela comme une trahison à la promesse que je
m’étais faite en 1996. Aucun homme ne devait «payer ma vie», je ne
pouvais pas être une femme au foyer. J’avais un vrai talent pour le
point de croix, certes, mais il me fallait à tout prix une carrière. Et
pour ça, j’allais devoir me lancer vraiment.
J’avais réussi à me créer un solide réseau dans la communication.
J’étais très douée pour transformer les mots en slogans accrocheurs
et créatifs et les idées en présentations originales et percutantes. Je
n’étais pas ingénieure en astrophysique mais mes clients avaient
toujours été enchantés de mes services. Alors pourquoi ne pas
essayer de me faire payer pour ce que je savais faire?
J’avais pris l’habitude de travailler avec des entrepreneurs et les
dirigeants des entreprises françaises les plus prestigieuses, j’étais
donc presque sûre qu’ils me répondraient au téléphone. Mais j’étais
absolument pétrifiée à la seule idée de les appeler. Quant à ceux qui
se trouvaient sur LinkedIn, je n’avais pas la conviction de réussir à
les contacter un jour. Chaque fois que je faisais défiler les contacts de
mon téléphone, je cherchais tous les prétextes pour perdre du temps,
ouvrir leur fiche, lire les informations les concernant, mais je
n’arrivais jamais à cliquer sur l’icône qui ferait sonner leur
téléphone. C’était impossible. J’étais tétanisée. Paralysée. Entre mes
déceptions sur le monde de l’entreprise, la honte d’être devenue ce
que je m’étais promis de ne jamais être et cette période de chômage
qui me mettait à plat, la vendeuse de pop-corn pleine d’avenir s’était
éteinte en moi…
Qu’est-ce que j’allais bien pouvoir leur dire? «Bonjour», bien sûr,
mais après? «Vous vous souvenez de moi?» Et s’ils répondaient:
«Non, qui êtes-vous?» À cette seule perspective je frémissais
d’angoisse.
Je me sentais coincée: je ne savais pas comment dépasser la peur
et contourner la gêne que pourrait entraîner l’absence de réponses de
mon réseau tout en déplorant, à chaque seconde, de continuer à
dépendre de mon mari comme une sangsue rivée à son compte
bancaire. J’étais bien consciente de me trouver prise au piège d’un
cercle vicieux, d’une spirale infernale qu’il me fallait à tout prix
stopper si je voulais avancer.
Mais de quoi avais-je si peur, au fond?
Des scénarios ne cessaient de tourner dans ma tête, des phrases y
résonnaient du matin au soir. «Pourquoi m’appelez-vous?» «Vous
croyez que nous devrions travailler ensemble?» «Mais qui sont vos
clients?» «Où se trouvent vos bureaux?» «Oh, vous n’en avez pas…
Hum.» Rien qu’à l’idée de ce type de questions, j’étais rouge de
honte. J’avais encore quatre heures de gardienne devant moi, et puis
il faudrait la payer (enfin… mon mari, plutôt) pour s’être occupée de
mon fils à ma place pendant que j’étais assise devant mon ordinateur
à regarder un écran vide: je me sentais trop bête. Alors j’ai pris une
décision qui a changé ma vie: je me suis fixé un objectif, un quota.
Lançant sans le savoir ce qui est devenu depuis LTDLV. Un quota de
trois échecs.
Trois, c’était le nombre de fois où j’allais devoir me confronter à
une réponse au bout du fil. Je devais joindre trois personnes qui
allaient immanquablement m’envoyer paître. Il fallait que je sois
rejetée à trois reprises, c’est-à-dire que je me prenne trois vestes,
avant de pouvoir faire quoi que ce soit d’autre – manger, faire pipi,
boire un café ou consulter mon compte Facebook. Nada.
Allez, on y va. J’envoie mon premier texto à la big boss d’un grand
cabinet français de recrutement, Isabelle. Je la connais depuis
toujours. Voici ce que j’écris: «Hello, Isa. J’ai quitté mon ancienne
boîte et je me suis mise à mon compte. Je suis plutôt douée pour
coacher les gens en prise de parole et je peux réaliser des diapos
magnifiques pour vos présentations PowerPoint. Si ça vous intéresse,
parlons-en autour d’un café. J’espère que tout va bien pour vous.
Amitiés, Annabelle.» Envoyé. Énorme poussée d’adrénaline. Mon
message apparaît instantanément comme Lu. Puis c’est la danse des
petits points gris sur mon écran de portable: elle répond! Mon sang
se fige. Mon téléphone me prévient d’un youuuuup. Ma première
réponse est là: «Ravie pour vous. Bien sûr. Quand vous voulez.» J’ai
dû le lire trente fois. «Ravie pour vous. Bien sûr. Quand vous
voulez.»
J’avais un rendez-vous dans les tuyaux! Alors que j’avais eu si peur
d’envoyer ce texto…
Galvanisée par cette première réussite, j’ai renouvelé l’expérience:
un nouveau texto à un autre contact. Pas de réponse. Mais je ne me
suis pas démontée – mon quota, mon quota – et j’ai carrément passé
un coup de fil. Bingo, mon contact répond. Ravi de m’entendre, il me
propose une rencontre, je n’ai qu’à envoyer un courriel à son
assistante. Lancée comme une fusée et encouragée par l’horloge que
je voyais tourner (plus qu’une heure devant moi), j’étais bien décidée
à atteindre mon quota. Sans autre raison peut-être que mon
obstination. Je suis têtue. Mais qui ne l’est pas?
Ça ne vous est jamais arrivé de vous fixer un objectif idiot, juste
comme ça? Ce moment, sur votre tapis de course, où votre titre
préféré de Beyoncé passe et que vous vous dites: «Allez, je cours à
fond jusqu’à la fin de la chanson.» En trente secondes, vous êtes à
deux doigts de défaillir mais vous ne lâchez rien et vous continuez à
courir comme un fou jusqu’au bout. Personne d’autre que vous ne
connaît ce défi personnel mais, pour une raison que j’ignore, il est
impossible de ne pas le relever.
Ce jour-là, dans ma buanderie, j’avais exactement ce sentiment.
Personne ne saurait jamais que je n’avais pas pris une seule veste sur
les trois essais que j’avais tentés – personne n’en avait même rien à
faire –, mais il fallait que je continue. Pour moi. Et il ne me restait
plus que soixante minutes pour compléter ces deux succès que j’avais
rencontrés. C’était court. Très court. J’avais l’impression de réaliser
enfin quelque chose. Alors j’ai poussé le bouchon un peu plus loin.
Tant qu’à faire. Plutôt que de prospecter un contact, j’ai carrément
appelé une «perspective» de client. Quelqu’un que je ne connaissais
pas mais que je rêvais d’avoir comme client. La trouille revenait au
galop, mais l’horloge tournait.
Avec qui avais-je vraiment envie de travailler? Chanel. C’est le
premier nom qui m’est venu à l’esprit. Des centaines de millions
d’euros et la plus grosse machine marketing que je pouvais imaginer
avaient probablement quelque chose à voir avec ce choix. Quitte à me
faire jeter, autant mettre la barre très haut et que ce soit par le top du
top. J’ai cherché sur Internet «directrice de communication
Chanel*», des liens LinkedIn se sont affichés sur l’écran, indiquant le
nom associé à cette fonction. J’ai appelé chez Chanel, quasiment sûre
qu’on ne me la passerait pas. Bague Chanel… bague Chanel…
résonnait dans ma tête.
«Maison Chanel, bonjour. Que puis-je faire pour vous aider?
— J’aimerais parler à Madame-de-la-communication, s’il vous
plaît.
— Un instant, s’il vous plaît, je vous mets en relation.»
Oups. Fu**. À cet instant, c’est de l’adrénaline pure qui coule dans
mes veines. Je ne sais absolument pas ce que je vais lui dire et je suis
à deux doigts de raccrocher. Mais non. Je suis sur mon tapis de
course, je m’approche de la fin de cette fichue chanson de Beyoncé.
Je ne sens plus mes jambes, la sueur me pique les yeux mais je
continue à courir comme une malade. Je reste en ligne. Avec un peu
de chance, elle ne répondra pas. «Allô, oui?» répond-elle sur un ton
déjà ennuyé. Je la dérange, c’est sûr. Alors, je me lance dans un
discours pitoyable… (Même six ans plus tard, je suis incapable de le
mettre noir sur blanc.) Silence gênant à l’autre bout du fil. «Nous ne
sommes pas intéressés», me dit-elle d’un ton si froid que j’en ai
encore des frissons en écrivant ces lignes. Clic. Elle raccroche.
Cette fois, on y était. Et c’était pire que tout ce que j’avais imaginé.
La honte que j’avais pensé pouvoir ressentir à ce moment-là était
plus douloureuse que dans mes pires cauchemars. Je la sentais se
répandre dans chaque parcelle de mon corps, à l’image d’une petite
goutte d’encre qui se diffuse lentement quand vous la faites tomber
dans un verre d’eau, jusqu’à s’y mélanger entièrement.
Pourtant, derrière la honte, une autre émotion perçait: de la fierté.
J’étais tellement fière! Ce petit jeu contre moi-même, je l’avais gagné.
J’étais à deux doigts de vomir sur mon tapis de course, j’ai même cru
mourir, mais je l’avais fait. Et je me sentais hyper bien. Un peu
comme avec mon feu de joie devant l’église: c’était mon désastre.
J’étais fière d’avoir accompli ma mission. C’était un peu idiot, car je
m’étais lancé ce défi toute seule et tout le monde s’en foutait
éperdument, mais ce n’était pas grave: j’avais réussi.
Et surtout, j’étais toujours en vie! C’est ça aussi qui me rendait si
euphorique. Ça ne m’avait pas tuée de me prendre cette grosse veste.
J’étais gênée de savoir que j’avais interrompu cette femme dans sa
journée de travail, de l’avoir ennuyée et fait perdre son temps avec
mon «entreprise» inexistante et dont elle ne se souciait visiblement
pas. Mais j’étais toujours debout. Je mentirais en disant que ce que
j’ai ressenti en me voyant rejetée n’était pas ce que j’avais craint en
me lançant ce défi. Bien sûr, c’était pénible, ça piquait. Beaucoup,
même. Mais cinq minutes plus tard, les effets de la piqûre
commençaient déjà à s’estomper.
Et surtout, j’avais deux rendez-vous dans mon agenda. Des
entretiens où j’allais pouvoir parler de ma boîte – la meilleure, bien
entendu!
Ce jour-là, j’ai appris que la honte ne tue pas, même si votre
cerveau veut absolument vous faire croire le contraire.
Dix-huit heures, il était temps de libérer la gardienne. J’avais brisé
la spirale. Grâce au défi que je m’étais lancé à moi-même, j’avais
réussi à surmonter ma peur et trouvé l’occasion de me prendre une
veste. En y réfléchissant bien, j’ai compris que la peur de l’échec était
la seule chose qui me retenait. En m’imposant ce quota d’échecs,
j’avais trouvé un moyen de me sentir vraiment fière de moi,
performante. J’allais pouvoir sortir de ma zone de confiance et de
confort, remplir un objectif, cocher tous mes KPIs** comme une
grande.
Dès le lendemain, je suis entrée dans ma buanderie avec
détermination. Envolée, la peur. J’étais bien déterminée à remplir
mon quota de vestes parce qu’elles étaient la preuve des opportunités
qui restaient à venir et que je n’aurais jamais eues autrement.
Ce quota, c’est le point de départ de toute cette histoire de Théorie
de la veste. Au fil des années, j’ai développé ma pratique et ma
méthode, j’ai fait des recherches et compilé des témoignages qui, je
l’espère, vous seront utiles si vous choisissez de la pratiquer. Vous
donner l’occasion de vous dépasser, de franchir vos limites, d’aller au
bout de vos envies et d’assumer vos ambitions, c’est ce que je veux
partager avec vous dans cet ouvrage – et que je n’aurais jamais
imaginé écrire un jour. Plus je vois de personnes pratiquer cette
méthode, plus je constate à quel point elle est bénéfique. Et elle ne se
pratique pas uniquement dans les buanderies. Elle fonctionne dans
la force de vente, dans le recrutement, pour faire évoluer sa carrière,
motiver ses équipes ou demander une augmentation. Et même, dans
sa vie privée, pour demander à quelqu’un de sortir avec vous.
Si vous voulez en savoir plus, tournez la page et continuez à lire. Si
c’est votre belle-mère qui vous a offert ce livre et que ça ne vous dit
rien de connaître la Théorie de la veste, vous pouvez toujours le
revendre. Mais si vous le lisez jusqu’au bout et qu’ensuite vous n’avez
pas envie de le prêter, alors je ne sais plus quoi vous dire.
J’allais oublier: Chanel fait partie de nos clients depuis février
2019, six ans et cinquante nuances de rejet plus tard.

* Le titre a été modifié afin de protéger l’identité de la personne que j’ai réellement
contactée.
*** Un KPI ou ICP est un indicateur clé de performance pour une entreprise; il permet de
suivre l’efficacité d’une action par rapport à des objectifs définis.
CHAPITRE DEUX

A priori, personne n’aime


prendre des vestes

Quitter son pays d’origine pour s’installer à l’étranger signifie


s’adapter à un nouvel environnement, découvrir de nouvelles
cultures et des modes de vie souvent aux antipodes de ceux dont on
avait l’habitude. Lorsque je suis arrivée en France, à tout juste vingt-
trois ans, je n’ai pas échappé à cette confrontation des cultures. J’ai
eu le sentiment d’être catapultée en territoire hostile: je ne
comprenais rien aux codes ni aux manières. Il m’a fallu un temps fou
pour m’adapter aux règles du jeu parisiennes. Sans compter que je ne
parlais absolument pas le français et que je me sentais totalement
frustrée de ne pas pouvoir m’exprimer – moi qui ai plutôt la langue
bien pendue!
Et j’avoue que, même une fois familiarisée avec le français, je n’en
ai pas maîtrisé tous les codes pour autant. Pourtant, c’est justement
ma position d’ «étrangère» qui m’a offert la chance inouïe de pouvoir
étudier le monde qui grouillait autour de moi. C’était si intéressant
que j’ai même fait ma petite étude anthropologique et sociale du
Français. Ou plutôt du Parisien, parce que c’est à Paris que je vis.
Parmi les observations qui m’ont marquée – je vous passe mes
premiers trajets en métro de Canadienne habituée aux grands
espaces perdus au milieu des montagnes Rocheuses: de la science-
fiction –, j’ai surtout retenu cette capacité qu’ont les salariés de se
retrouver autour de la machine à café pour parler… de sexe.
Vous trouvez peut-être que c’est étrange d’avoir noté ça, mais je
vous jure que cette constatation a eu une réelle influence sur la mise
en place de LTDLV et qu’elle a même conditionné ma carrière.
À la pause-café, ici, on ne parle pas d’argent, surtout pas de salaire,
ni de réussite. C’est tabou. Vulgaire, même. Alors que les blagues de
cul, ah ça! elles font l’unanimité… Intéressant. Cacher sa réussite, je
pense que c’est un instinct de survie qui remonte à la Révolution
française.
Le système scolaire et éducatif français, d’ailleurs, a tendance à
vous mettre dans cette posture dès votre plus jeune âge. Au collège,
déjà, il faut décider très précisément ce qu’on veut faire dans la vie.
Et pour ceux qui ne savent pas – qui peut le savoir, à cet âge-là?
Même Rimbaud le dit, «on n’est pas sérieux quand on a dix-
sept ans» –, pas de problème, des adultes vont choisir pour eux.
Ce pauvre gamin de 14 ans qu’on oriente dans une filière technique
parce que c’est évident, il n’ira jamais à l’université… peut-être a-t-il
l’âme d’un poète et pourrait-il devenir académicien, écrivain ou
scénariste? Je ne comprends toujours pas qu’on puisse mettre une
étiquette sur un ado qui n’a aucune idée de ce qu’il peut attendre de
sa vie professionnelle.
Et je ne vous parle pas de mes premiers repas dans ma belle-
famille – traditionnelle-bien-comme-il-faut – où coulait à flots un
«petit vin de table» qui était le meilleur qu’il m’avait jamais été
donné de goûter… Mais c’est un autre sujet.
Bref, mon étude devenait vraiment passionnante et enrichissante
au fil des années. Quelle chance de m’imprégner d’une nouvelle
culture et de pouvoir la comparer à la mienne!

La perfection n’existe pas


Ce qui m’a étonnée par-dessus tout, et c’est ce qui fait l’objet de ce
chapitre, c’est qu’avoir une ligne de son CV indiquant que vous avez
monté une start-up qui n’a pas fonctionné est visiblement mal vu de
la part d’un quelconque recruteur. Comment cela peut-il être mal
perçu en France alors qu’au Canada, à l’inverse, c’est flatteur et
valorisant pour votre profil? D’accord, votre projet n’a pas été à la
hauteur de vos espoirs, mais vous êtes un fonceur, un entrepreneur,
quelqu’un qui ose: exactement ce dont a besoin une équipe
dynamique et créatrice, non?
À quoi peut bien servir un brainstorming si on ne peut pas dire des
trucs idiots? Est-ce qu’un pitch présenté au PDG doit être parfait du
premier coup? C’est justement fort de ses erreurs et grâce à un travail
d’équipe qu’on peut créer du contenu nouveau et percutant.
Pourquoi a-t-on toujours l’impression qu’un travail doit être parfait
avant d’être présenté? Et ce n’est pas mon beau-père qui vous dira le
contraire: quand je l’ai interrogé à ce sujet autour d’un repas familial,
il m’a répondu: «La perfection n’existe pas.» Hummm. Que voulez-
vous ajouter?
J’ai eu la même impression quelques années plus tard en discutant
avec un client qui me parlait des résultats scolaires de son fils.
Comme il semblait très content de sa progéniture, je lui ai demandé
sa moyenne. «14/20», m’a-t-il répondu fièrement. «Mais ce n’est pas
du tout une bonne note!» ai-je lancé du tac au tac. Cette phrase est
sortie du fond de mon cœur, et un peu trop vite à mon goût, mais on
ne se refait pas. Pourtant, il n’a pas été surpris de ma «réponse de
Canadienne» et a ajouté: «Ici, c’est une bonne note. Par principe,
personne n’obtient jamais 20/20. La perfection n’existe pas.» À
nouveau, le même refrain!
Pour moi, ce principe relève d’un vrai paradoxe. On pourrait même
appeler ça le «paradoxe français». Comment peut-on motiver une
société tout entière à poursuivre des études et à travailler dur en
disant à ses jeunes qu’ils doivent être parfaits, parce que l’échec n’est
pas admis, mais que la perfection n’existe pas?
Par ailleurs, il me semble que ce qui est demandé aux élèves
français avant tout, c’est une capacité exemplaire d’apprendre par
cœur à la virgule près des textes ou des informations et à les
régurgiter parfaitement. J’en ai eu la preuve récemment, à l’occasion
d’un souper, en échangeant avec un ami dont le fils est en première
année de médecine. J’ai pu voir jusqu’où pouvait aller cette méthode.
J’ai halluciné. Ce gamin avait littéralement appris par cœur un
bouquin de plus de quatre cents pages afin de pouvoir tout ressortir
mot pour mot au moment du concours. Je ne sais pas s’il avait
compris ce que contenaient toutes ces pages – ce n’est d’ailleurs pas
ce qui semblait lui avoir été demandé. C’était juste une question de
mémorisation, rien de plus. Quant à ce système de devoir être dans
les trois cents meilleurs étudiants pour espérer passer en deuxième
année… ça me dépasse totalement. Surtout qu’en tant que patiente,
entre un médecin qui a compris ses cours et un autre qui les a juste
mémorisés, je sais lequel je préfère…
Bref, tout cela est bien la preuve que l’échec n’est pas une option à
l’école française. Les enseignants donnent des bonnes notes quand
tout est récité par cœur dans les seuls domaines qui semblent
compter pour eux, les maths, les sciences, les langues. Toutes les
autres intelligences n’ont pas l’air d’avoir beaucoup d’importance…
Pourtant, comme le présente le psychologue américain Howard
Gardner dans sa théorie passionnante sur les intelligences
multiples1, il n’existe pas moins de neuf types d’intelligence chez
l’être humain, et les maths, les sciences et les langues ne sont que
trois parmi d’autres. Si vous êtes très fort pour la musique, ou que
vous avez développé votre intelligence interpersonnelle (celle qui
permet de comprendre les autres) ou votre aptitude à vous connecter
à la nature, mais que par malheur vous n’êtes pas bon en maths, eh
bien, ça doit être difficile pour vous.
Quand on arrive dans le monde corporate, c’est bien l’intelligence
interpersonnelle qui compte, la capacité que vous avez de décrypter
votre patron et vos collègues pour naviguer dans la politique de votre
entreprise et grimper dans l’organigramme. Fini la mémorisation!
C’est la capacité de trouver des solutions créatives à des problèmes
complexes qui compte. Les couloirs affichent partout sur les murs
«Osez! Oser, c’est l’une de nos valeurs!» Mais comment voulez-vous
qu’une personne qui vient de passer vingt ans dans le cursus scolaire
français à répondre à l’injonction inverse puisse ajuster son
comportement? Ça risque de lui prendre pas mal de temps. Et
d’après ce que j’ai pu vivre en entreprise, certains ne s’ajustent
jamais. Heureusement, quelques-uns le font, sinon la France n’aurait
jamais pu produire son TGV, les plus belles maisons de couture, et
les chefs cuisiniers les plus créatifs et les plus talentueux ne seraient
pas français!

La culture de l’échec
Bien sûr que les Français sont des magiciens de l’ingénierie et de
l’innovation, qu’ils ont une très grande énergie créatrice. Mais il me
semble, pour bien connaître aujourd’hui les deux cultures, qu’on se
fait moins mal au Canada qu’en France. Pour un résultat équivalent,
on rigole plus au Canada, on se fait moins violence. C’est moins
douloureux. On est plus ouvert, quoi. Au Canada, si vous proposez
quelque chose, on vous répond: «Ah oui! pourquoi pas! Et quoi
d’autre?» En France, la première réponse, c’est toujours: «Non,
impossible.» Révélateur, non?
Quand je donne des conférences en France pour encourager les
gens à pratiquer LTDLV, je constate toujours avec étonnement qu’ils
y adhèrent immédiatement. Bien sûr! Ça leur permet tout
simplement de réconcilier deux extrêmes absolument opposés: ce
qu’ils ont appris à l’école (soyez sages, entrez dans le moule, mais
n’oubliez pas que la perfection n’existe pas) et ce qu’on leur demande
au boulot (osez plus, allez plus vite, soyez agiles, testez et
apprenez…). En remplissant leur quota de vestes, ils sont à la fois
obéissants (ils remplissent leurs fameux KPIs) et capables d’oser plus
et de quitter leur zone de confort.
Ce quota de vestes, c’est la première étape d’un programme en
trois parties que j’ai développé au fil des années pour motiver mes
équipes, pour progresser, et changer la relation au rejet et à l’échec
de mes clients. Il faut bien ça pour effacer les stigmates de leurs
années d’école et les aider à aller de l’avant!
Plus je pratique la Théorie de la veste, plus je constate que de
nombreuses personnes appliquent déjà cette méthode de façon
naturelle et spontanée, sans le savoir. Un de mes exemples préférés,
c’est l’histoire d’un professeur d’école primaire, partagée des milliers
de fois sur LinkedIn, qui encourage ses élèves à parler ouvertement
de leurs échecs et à les assumer pleinement. Il a placé des affichettes
dans sa classe où sont inscrits des messages comme: «Tu as échoué,
ce n’est pas grave! Essaie encore, ça va marcher!» «Tu t’es trompé…
c’est fantastique! Que retiens-tu de cette erreur?»
En faisant des recherches pour ce livre, j’ai même rencontré un
enseignant américain qui organise des «marathons de la veste» dans
des hôtels à New York. Des parents inscrivent leurs enfants et leurs
ados à ces stages où Jason Diaz les entraîne, pendant un week-end
entier, à se prendre des vestes. Au programme, une immense chasse
au trésor de vestes avec des listes de défis à remporter. Ça commence
avec des choses faciles comme «demander en mariage la jeune
femme de l’accueil», puis ça monte en puissance jusqu’à «chanter de
plus en plus fort dans le hall d’un hôtel jusqu’à ce qu’on vous
demande de vous taire». Chaque fois qu’ils se font rejeter, les
participants gagnent des points. Ils sont gênés, bien sûr, mal à l’aise,
mais ils continuent pour gagner des points et aller jusqu’au bout de
leur liste. Bref, tout le week-end est conçu comme un parcours du
combattant destiné à ne plus se laisser paralyser par la peur de ce
que les autres vont penser de vous.
C’est vraiment un terrain à étudier de près, mais comme je ne
souhaite pas me mettre à dos le système éducatif français (surtout
que mes trois enfants commencent tout juste leur scolarité), je
préfère m’attaquer à cette peur du rejet et de l’échec en entreprise. Et
comme nous passons quand même 33% de notre vie à travailler, il
me semble que c’est plus urgent.

En finir avec le syndrome du «petit chef»


Au bureau, l’équivalent de l’enseignant qui aime qu’on lui récite tout
par cœur sans se soucier de savoir si le contenu a été compris ou non,
c’est ce qu’on appelle souvent «un petit chef».
Les études montrent les unes après les autres que les entreprises
qui donnent à leurs salariés la possibilité d’échouer, et qui créent une
culture de «l’échec positif», sont parmi les plus innovantes et les plus
successful du monde des affaires actuel. Mais derrière une équipe qui
a échoué, il y a un dirigeant qui prend la responsabilité de cet échec.
Et ça demande une sacrée confiance en soi. Je pense que nous avons
tous connu un dirigeant qui prend les succès de ses équipes pour les
siens, mais n’hésite pas à renvoyer ses troupes face à leurs échecs.
C’est exactement ce qui caractérise, à mes yeux, un petit chef.
Sous l’impulsion de Julia Rodovsky, chercheuse à Harvard et
analyste au sein de son département ressources humaines, Google a
mené une vaste étude connue sous le nom de Projet Aristote afin de
percer le secret des équipes de travail efficaces et comprendre
pourquoi, à diplômes ou expériences égaux, les performances
n’étaient pas les mêmes d’une équipe à l’autre. Après avoir analysé
pendant des mois des lignes et des lignes de données, les chercheurs
n’ont pas obtenu de réponse adéquate, mais cette enquête a toutefois
permis de découvrir que ce qui faisait le secret des équipes
performantes au travail ne tenait pas aux personnes qui y prenaient
part – aussi brillantes fussent-elles –, mais plutôt à la sécurité
psychologique (je peux prendre des risques sans avoir peur de me
faire rabrouer par mon chef d’équipe), à la confiance partagée entre
les membres de l’équipe et au sens du travail effectué ensemble.
C’est Amy Edmondson, professeure à la Harvard Business School,
qui a inventé cette notion de «sécurité psychologique», définie
comme la capacité de prendre des risques dans une équipe sans
craindre de se sentir mal à l’aise ou embarrassé. Une conviction
partagée par les membres d’une équipe, qui savent qu’ils peuvent
travailler, prendre des risques et s’exprimer librement sans peur de
sanctions ou de se sentir ridicules. «Le projet Aristote nous rappelle
qu’à l’heure de l’ultraoptimisation, le succès repose d’abord sur nos
expériences personnelles comme les interactions émotionnelles et les
conversations profondes, sur la question de savoir qui nous voulons
être vraiment ou comment nos collègues tiennent compte de nos
sentiments2».
Mais prendre des risques, c’est accepter de tomber parfois à plat
ventre. Je pense que c’est une des raisons pour lesquelles ma théorie
amusante a piqué l’intérêt des gens. Parce que tout le monde veut
travailler dans un environnement où il peut se montrer tel qu’il est
vraiment, exposer ses idées sans avoir peur d’être sanctionné. Qui ne
rêve pas de trouver ce type de rapports dans son entreprise? C’est
une nouvelle façon de vivre et une culture à ajuster et à créer, nous le
verrons. Pour vous dire la vérité, ça me rappelle les mormons et leurs
principes…

La sécurité psychologique, une valeur clé


Je vous l’ai dit en introduction, j’ai grandi parmi les mormons, des
gens connus pour être incroyablement conservateurs et pour qui la
modestie est une valeur clé. Pourtant, mes amies et moi, ainsi que
toutes les autres jeunes mormones que j’ai connues en grandissant,
voulions nous faire remarquer, avoir l’air sexy, nous maquiller et
porter des jupes courtes. Ce n’était pas du tout en phase avec notre
éducation, mais nous l’avions vu à la télévision américaine et nous
mourions d’envie de le faire.
Eh bien, c’est à peu près la même chose avec les clients que j’ai
rencontrés dans les nombreuses sociétés que j’ai côtoyées: ils sont
censés être corporate et obéissants, écouter leur boss et accepter de
se faire rabrouer s’ils proposent une idée «idiote», pourtant, ils
savent que la vie professionnelle dans une jeune start-up cool peut
être différente. On peut venir au travail avec son chien, discuter
confortablement installés dans des fauteuils en sirotant un café ou en
mangeant bio – gratuitement. Ces hommes et ces femmes sont tentés
par cette nouvelle façon de faire des affaires… Qui ne le serait pas?
Comme toutes mes copines mormones, ce que je voulais, ce n’était
pas tant porter du rouge à lèvres et des jupes courtes que me sentir
désirée. C’est pareil pour les cadres d’une tour à bureaux. Ils n’ont
pas forcément envie d’amener leur chien dans l’open space du 38e
étage mais ils aspirent à ce que Amy Edmonson et Google nous ont
appris et qui constitue les fondations d’équipes heureuses et
performantes: la sécurité psychologique.
Soyons clairs, je ne suis pas DRH. Mon entreprise fait des
présentations PowerPoint et donne des conseils en prise de parole.
Nous ne sommes pas un grand cabinet de conseil qui vous explique
ce qui ne va pas dans votre organisation et comment l’améliorer.
Mais j’ai vu tant de fois LTDLV permettre aux équipes de se sentir
plus en sécurité, plus heureuses et plus performantes, que je suis
sûre qu’elle peut vous permettre à vous aussi d’avancer. Je peux vous
assurer qu’il y a beaucoup de petits chefs qui vont avoir chaud aux
fesses…
CHAPITRE TROIS

Pourquoi définir un quota de vestes

Les êtres humains sont programmés pour éviter le risque. Lorsque


nous vivions au milieu de la savane africaine, s’exposer, c’était se
faire dévorer, ne pas être d’accord avec le chef, c’était se faire éjecter
de la tribu. Sans remonter aussi loin, il n’y a pas si longtemps encore,
les enfants qui osaient défier leurs parents pouvaient se prendre une
bonne gifle.
S’exposer au danger cause des ennuis n’importe où dans le monde,
faire exprès de se faire rejeter peut avoir des répercussions négatives
et notre évolution à tous veut que nous évitions systématiquement
les problèmes. Et c’est plutôt une bonne chose parce que notre
espèce ne serait pas allée bien loin si nous n’avions pas eu ce réflexe.
La peur est tout simplement un mécanisme de survie, et c’est l’un des
plus vieux réflexes du cerveau humain.
Mais que se passe-t-il réellement dans votre cerveau quand vous
avez peur de relancer un client ou d’en démarcher un nouveau? Quel
système se met en place dans votre tête quand le trac s’empare de
vous au moment d’embrasser cette fille dont vous êtes tombé
follement amoureux? Cette peur qui m’a empêchée d’appeler mes
premiers clients potentiels depuis ma buanderie est la même que
celle qui vous empêche de demander à Anne-Sophie, votre nouvelle
voisine, d’aller boire un verre un soir, ou de réclamer une promotion
à votre patron après cinq ans de bons et loyaux services au même
poste. C’est la peur encore qui vous empêche de proposer une idée
folle à votre boss ou de présenter votre start-up à de puissants
investisseurs.
Mais vous allez voir, comme c’est le cas dans de nombreux
domaines, dès qu’on comprend le fonctionnement d’un phénomène,
on est en mesure de mieux le surmonter.

La peur, un système de défense


La peur est une émotion qui prend sa source par l’intermédiaire d’un
stimulus lié à nos différents sens: il peut être visuel, auditif, olfactif,
etc. Un bruit de pétard, une sensation corporelle ou une image
inattendue, et hop, les manifestations de la peur se déclarent: votre
rythme cardiaque s’accélère, vous avez la chair de poule ou des
sueurs froides. Les informations sensorielles atteignent alors une
région cérébrale centrale, le thalamus, qui à son tour transmet le
message à l’hypothalamus, une autre région du cerveau qui régule
notre équilibre intérieur, afin de déclencher la réaction immédiate de
l’amygdale, une structure essentielle de décodage de nos émotions
qui est chargée de sécréter les hormones de réponse – adrénaline et
cortisol – à cette peur: le combat ou la fuite.
Cette réaction en chaîne se fait de façon absolument immédiate et
sans réfléchir. C’est instinctif. Elle ne nous laisse pas le temps de
nous interroger sur la réalité objective de cette peur: est-ce que j’ai
vraiment besoin de m’enfuir? Est-ce qu’il y a bien un assassin
derrière la porte ou n’est-ce que le chat des voisins? Peu importe, le
cerveau se met en mode «panique» parce que ça pourrait être un
assassin et qu’il ne veut prendre aucun risque. D’ailleurs, c’est très
bien que le cerveau veuille nous protéger, mais dans l’âge moderne,
ce n’est pas son usage le plus efficace. Il y a quand même très peu de
risques pour que le signal détecté par votre cerveau soit un danger
réel… Pourtant, le système continue à fonctionner de cette façon
parce qu’il vaut mieux une fausse alerte plutôt qu’un cadavre.
C’est la même chose avec ce technicien à qui on demande de faire
le tour de l’avion avant chaque vol. Nous sommes sûrs à 99% que
tout va bien et que l’appareil qui vient d’atterrir après deux heures de
vol n’aura aucun problème pour reprendre le chemin des airs. Mais
les compagnies aériennes investissent dans le salaire de celui qui
effectue le contrôle et dans le temps nécessaire à cette vérification
parce qu’on ne sait jamais. Si l’avion n’était pas absolument
impeccable, les conséquences d’une erreur seraient tellement
désastreuses qu’on préfère s’en assurer en réalisant ce contrôle, bien
sûr. Mais est-ce qu’on agirait de la même façon si ce n’était pas la vie
des passagers et de l’équipage qui était en jeu? On ne prend pas
autant de précautions à vérifier la qualité des écrans vidéo des
passagers ou la température de l’air dans la cabine. Si le risque
n’était pas le chaos, la mort et dix ans de mauvaise presse, on ne
dépenserait pas autant d’énergie et d’argent dans ces vérifications.
Dans votre cerveau, c’est le même principe. Vous rêvez de
demander à Anne-Sophie de prendre un verre ce week-end, ou
d’aller voir une expo, mais vous tremblez à l’idée de prendre une
veste. Rien qu’en l’imaginant, votre thalamus perçoit déjà un grand
danger! Le plus court chemin neurologique face à ce danger, la
réaction immédiate du cerveau reptilien – celui qui agit sans
réfléchir –, c’est la peur: vous préférez fuir. C’est comme si vous aviez
peur d’avoir mal: votre corps ne veut pas souffrir, il veut éviter à tout
prix la douleur physique. Se faire rejeter par Anne-Sophie
s’apparente pour lui à une douleur réelle. Alors il préfère abandonner
plutôt qu’essayer.
Je ne suis pas neuroscientifique mais je fais des recherches sur le
rejet et la peur depuis des années, et j’ai retenu des explications
passionnantes. En réalité, «il existe deux importants circuits de la
peur: un circuit court qui passe directement du thalamus à
l’amygdale et permet d’assurer des réactions de survie, de fuite et de
défense dans un délai très court; et un circuit long qui interpose le
cortex entre le thalamus et l’amygdale, assure une perception précise
du stimulus, mais nécessite un prolongement du temps de réaction
qui peut être fatal en cas de danger3».
La route la plus courte relie l’information en provenance du
stimulus externe directement du thalamus vers l’amygdale: vous
entendez un bruit, vous voyez bouger quelque chose – ou vous
imaginez demander à Anne-Sophie de sortir avec vous… La voie
rapide du signal de la peur est une réponse instantanée à ce qui
pourrait être un danger. C’est ici que se trouve le réflexe de fuite ou
de combat qui entraîne la sécrétion d’adrénaline dans le corps. Le
chemin le plus court excite les réactions physiologiques de peur qui
sont très utiles pour réagir face au danger.
En parallèle, ce même stimulus suit une autre route, plus lente
mais plus précise. Le signal traverse le cerveau en s’arrêtant dans les
parties les plus sophistiquées et les plus récentes de notre organe
cérébral, le cortex frontal. Des pensées beaucoup plus complexes se
mettent en place: ce bruit que vous avez entendu, c’est sûrement le
chat des voisins; les turbulences en avion, c’est normal, on ne va pas
s’écraser, l’avion est l’un des moyens de transport les plus sûrs. Et
puis, il n’y a pas qu’une seule Anne-Sophie au monde…
En tant que primates complexes capables de marcher sur deux
jambes et de s’habiller seuls, nous devrions être en mesure de
comprendre que si Anne-Sophie refuse ce rendez-vous, la vie
continue et la honte ne tue pas. Avoir peur de prendre une veste
serait donc irrationnel. Alors? Demandez-lui de sortir avec vous.
Allez! Qu’est-ce que vous risquez? Eh bien non, ce n’est pas si simple:
merci à nos mécanismes de survie mis en place face au danger et à
notre cerveau reptilien qui a gâché toutes nos chances avec Anne-
Sophie. Ce sentiment de peur est suffisant pour éclipser toutes les
pensées rationnelles qui auraient pu nous donner toutes nos chances
avec ce rendez-vous…
C’est ce système qui freine notre détermination, c’est lui qui nous
empêche d’oser et donc d’avancer. C’est pour ça que c’est important,
au boulot comme sur le plan personnel, de se fixer un quota de
vestes: pour encadrer les risques.

Trois bonnes raisons de se fixer un quota de vestes

→ Raison numéro un: sortir de sa grotte


Il y a 60 000 ans, alors que nous vivions encore dans des grottes,
presque tout que ce que nous faisions pouvait s’accompagner d’une
mort immédiate. Pas question de sortir en pleine nuit parce que vous
aviez entendu un bruit, aussi petit soit-il: c’était peut-être
simplement la chute d’une noix de coco ou le bruit du vent, mais ce
pouvait être un tigre venu vous dévorer et votre bébé avec, ou un
adversaire d’une autre tribu sur le point de dérober toutes vos
affaires. Pas un geste, pas un mouvement.
Si la technologie se développe très rapidement, l’évolution
humaine a du mal à suivre: notre cerveau a conservé sa mentalité de
«je reste dans ma grotte» qui remonte à des dizaines de millénaires.
Nous préférons rester dans le canapé devant Netflix – version
moderne de la grotte – plutôt que de tenter notre chance avec la
voisine ou de chercher des opportunités dans n’importe quelle
situation professionnelle…
Notre cerveau veut continuer à nous faire croire que s’exposer c’est
se mettre en danger. Pourtant, le monde appartient à ceux qui
sortent de leur grotte! La job de vos rêves, ce n’est pas en restant
dans votre canapé que vous allez la décrocher. Ce super candidat que
vous voulez recruter à tout prix pour impressionner la boss, il ne va
pas tomber comme par miracle dans votre boîte courriel. Il faut aller
le chercher. Sortir de la grotte. Quitter le canapé. C’est pour ça que
vous devez vous fixer un quota de vestes!
Vous voulez rencontrer le grand amour? Fixez-vous un quota de
trois vestes par semaine, par exemple, et envoyez des messages à des
femmes ou des hommes qui vous inspirent, que vous trouvez trop
belles ou trop beaux «pour vous» ou que vous n’auriez jamais osé
aborder… avant de pratiquer LTDLV. En cherchant à prendre des
vestes, vous allez peut-être oser engager la conversation avec un
inconnu dans un restaurant ou à l’occasion d’un vernissage, alors que
ce n’est absolument pas naturel pour vous et que vous allez ainsi
sortir de votre zone de confort. Vous oserez peut-être faire livrer des
fleurs à votre voisine, alors que votre «ancien vous» aurait jugé cela
bien trop audacieux.
En décidant de votre propre gré de vous faire rejeter, en vous
mettant exprès dans des situations dont vous êtes quasiment sûrs
qu’elles vont se terminer par des vestes, vous prenez un risque
mesuré. Demandez-vous quel est le pire qui puisse vous arriver: si
vous êtes prêt à accepter ce risque – généralement peu élevé –, allez-
y, foncez!

→ Raison numéro deux:


prouver que Mick Jagger a tort
En vous fixant un quota de vestes, vous allez tellement vous faire
plaisir! Imaginons que vous ayez très envie de recruter, au sein de
votre équipe, cet excellent candidat que vous avez vu à l’œuvre chez
un prestigieux concurrent. Il est déjà en poste, certes, et pour le
compte d’une entreprise sûrement plus réputée que la vôtre… Ce
n’est pas grave, vous pratiquez LTDLV: les trois vestes par jour ne se
prennent pas toutes seules, il faut bien aller les chercher. Tous les
moyens sont bons.
Et sur le plan personnel, ça fonctionne aussi. Mon amie Béatrice
vient d’en faire l’expérience en essayant de faire entrer son fils dans
un établissement scolaire international ultra-sélect qui recrute ses
élèves – de maternelle – avec autant d’exigence et de soin que
Harvard ou McGill.
Après avoir suivi la voie classique de l’admission pendant plusieurs
mois (dossier scolaire, lettre de motivation, entretien avec les parents
puis avec l’enfant, test de QI, etc.), Béatrice a finalement reçu un
courriel l’informant que son fils n’était pas «retenu» pour faire son
entrée en maternelle dans cette école.
Qu’à cela ne tienne, elle a suivi mon conseil: afin que l’école
reconsidère sa décision, elle s’est fendue d’une réponse qui suivait
tous les critères d’une parfaite tentative de veste: 1. Elle était sûre de
se prendre à nouveau un «non» définitif. 2. Elle a choisi le ton idéal
pour ne pas nuire à sa réputation ni à celle de son enfant. 3. Si cette
veste échouait, elle aurait atteint son objectif.
Après une réponse négative polie mais ferme, faire cette nouvelle
demande à l’établissement était vraiment courageux de sa part! Mais
Béatrice l’a faite. Et elle a trouvé une astuce imparable pour le
paramètre mignon: elle a répondu avec des petites images
accompagnées d’une légende. Sur la première on voyait le docteur
Who sous une pluie battante: «Moi, lorsque j’ai pris connaissance de
votre courriel de refus.» En dessous, l’image d’un enfant qui croise
les doigts: «Moi, quand je vous demande d’ajouter mon fils sur la
liste d’attente.» #quinetenteriennarien. Et pour finir, elle a ajouté:
«Plus sérieusement, je vous serais très reconnaissante de
reconsidérer votre choix et d’accepter de laisser une chance à mon
fils en le mettant sur la liste d’attente dans l’espoir qu’un élève libère
une place.» Le tout suivi, bien sûr, d’une formule de politesse
d’usage.
La réponse de l’école? «Non», à nouveau… Mais la responsable des
inscriptions de l’établissement lui a avoué que son courriel l’avait fait
sourire! Une très belle veste, je dois dire. En bonne copine du flop, je
l’ai d’ailleurs félicitée lorsqu’elle m’a raconté son histoire. Désormais,
elle est connue, dans cette école, et elle aurait vraiment pu obtenir
une place sur la liste d’attente, elle n’était pas loin du but. Par
ailleurs, elle m’a dit qu’elle avait été heureuse d’aller au bout de sa
tentative de veste. Ainsi, elle a compris que si son fils n’était pas
accepté dans cet établissement haut de gamme, ce n’était pas parce
qu’il n’était pas assez brillant ni assez bien élevé, mais simplement
parce que son profil n’était pas adapté à celui des élèves choisis. Elle
avait tout fait pour que son enfant entre dans cette école, cela rendait
la décision plus facile à accepter. C’était ça le plus important.
Je veux insister ici sur une règle capitale à respecter dans votre
détermination à pratiquer LTDLV: cette méthode ne doit en aucun
cas nuire à votre réputation ni à votre image, que ce soit dans le
cadre professionnel ou sur le plan personnel ou familial. Pour
pratiquer LTDLV sans être lourd, vous devrez toujours être
«mignon». Comme Béatrice, veillez à pratiquer LTDLV sans jamais
omettre ce paramètre incontournable.
Cela vous semble sans doute contre-intuitif dans le monde
professionnel, car mignon s’apparente généralement davantage à un
bébé phoque ou à des chatons dans un panier. Pourtant, si vous
multipliez les rendez-vous galants dans le seul but d’atteindre votre
quota de vestes ou que vous négligez violemment et sans aucun
scrupule les étapes nécessaires pour débaucher un candidat éventuel,
vous risquez de passer pour un gros pervers, d’être convoqué par les
RH pour votre comportement borderline, ou même de perdre votre
job…
Si vous faites attention à la formulation de votre demande, en étant
«mignon» dans votre tactique d’approche, vous essuierez peut-être
une réponse négative – pas de problème, vous pourrez mettre ça
dans votre quota de vestes –, mais vous ne vous mettez pas
réellement en danger.
Mais pourquoi Mick Jagger a-t-il tort? Quel est le rapport? Eh
bien, il est question de get satisfaction avec LTDLV, voyons! Sans ce
quota de vestes vous n’auriez peut-être jamais demandé à Anne-
Sophie de sortir avec vous! Quelle frustration! Avec votre quota, vous
n’avez aucune certitude qu’elle accepte de sortir avec vous, mais au
moins, si elle dit non, vous serez fixé!
Établir un quota de vestes permet non seulement d’oser vous
déclarer, mais aussi de savoir que vous n’êtes pas passé à côté d’une
occasion. Dans tous les cas, vous êtes gagnant. Et ça n’a pas de prix.

→ Raison numéro trois: stimuler sa créativité


Laissez-moi vous expliquer ce dernier point en m’aidant du trajet
que j’effectuais chaque matin quand j’habitais dans l’Est parisien
pour me rendre à l’agence sur mon deux-roues électrique – je sais, je
suis la reine de la métaphore un peu surprenante!
Chaque matin, donc, je partais de la porte d’Italie, traversais le
13e puis le 5e arrondissement, avant de rejoindre le quai Saint-
Bernard, la place du Châtelet, d’emprunter les boulevards Sébastopol
puis Poissonnière, pour arriver enfin rue d’Enghien. Vingt-cinq
minutes chaque matin. Le même itinéraire tous les jours.
Exactement le même. Je ne changeais jamais: on ne change pas une
équipe qui gagne. Vingt-cinq minutes, c’est un temps de parcours
très raisonnable. Je savais exactement combien de temps durait
chaque feu rouge, je connaissais les artères embouteillées et les
endroits où se cachent les policiers qui arrêtent les motocyclistes qui
prennent parfois comme moi les pistes cyclables… Je reconnaissais
même les automobilistes qui faisaient le même trajet que moi!
Mais ça, c’était avant le printemps 2019 et la déchirante tragédie
de l’incendie de Notre-Dame… Comme je passais chaque jour devant
la cathédrale, lorsque les routes ont été fermées tout autour, il a bien
fallu que je trouve un nouvel itinéraire. Je me suis donc (ré)adaptée
pour finalement découvrir un chemin plus agréable et plus rapide –
j’ai gagné une minute! J’ai emprunté des rues que je n’avais encore
jamais eu l’occasion de parcourir et découvert de nouveaux quartiers
de Paris, cette ville que j’adore explorer.
Découvrir des opportunités là où vous ne pensiez trouver que des
contraintes est un phénomène qu’évoque Tim Harford dans son livre
passionnant sur les bienfaits du désordre dans nos vies, Bordélique:
le pouvoir du désordre pour transformer votre vie4! À la suite d’une
grève des transports à Londres, qui n’a duré que quarante-huit
heures, des milliers de voyageurs ont changé radicalement leur trajet
quotidien. Une fois le trafic revenu à la normale, 5% des personnes
touchées ont choisi de conserver l’itinéraire de remplacement
qu’elles avaient ainsi découvert.
En ouvrant les yeux, en quittant le mode «autopilote» de notre vie,
nous nous offrons de nouvelles opportunités, nous stimulons notre
créativité. Si vous savez que vous ne pouvez pas aller voir Anne-
Sophie en lui disant «eh, tu viens boire une bière?», vous allez
chercher une autre façon de le faire, un moyen plus agréable et plus
délicat. Le but n’est pas de vous ridiculiser auprès de cette jeune
femme ni de nuire à votre réputation. Vous devez mettre en action le
paramètre «mignon» afin que personne ne vous en veuille d’avoir
osé demander. Faire tout ce qui est en votre pouvoir pour ne pas
vous faire détester.
Pour être honnête, le terme le plus approprié ici serait celui de…
vulnérabilité.

Le pouvoir de la vulnérabilité
J’ai pris soin de ne pas commencer ce chapitre par ce mot, il aurait
pu vous effrayer. Lorsque les gens l’entendent, ils se disent
généralement: «Vulnérable? Non merci! Pourquoi me montrer
vulnérable alors que je suis le PDG d’une entreprise cotée en Bourse?
J’ai fait de grandes études, je n’ai pas besoin de vulnérabilité. C’est
bon pour les starlettes ou pour Brené Browne.» (Si vous ne
connaissez pas cette femme, chercheuse à l’université de Houston,
faites une recherche sur Google: son discours TED sur la
vulnérabilité a changé ma vie.) Et puis, si j’avais commencé par ça,
j’aurais eu peur que vous ne lisiez pas ce livre…
Le pouvoir de la vulnérabilité est immense et je suis convaincue
que tout le monde peut en tirer profit. Le Français le plus «sérieux»
qu’il m’ait été donné de rencontrer était l’un de mes étudiants de
Sciences Po, où j’étais intervenante. La plupart des élèves qui
fréquentent cette école sont brillants, ils ont soif d’apprendre, mais
lui avait un humour quasiment aussi froid et inexistant que le
printemps au Québec… Il aurait tellement eu besoin de vulnérabilité,
ce petit quelque chose qui rend impossible de ne pas vous aimer,
parce que vous vous dévoilez un peu.
En écrivant sa lettre au directeur de cette maternelle prestigieuse,
Béatrice a accepté de montrer sa vulnérabilité, en indiquant noir sur
blanc qu’elle aurait regretté de ne pas oser le relancer, bien qu’elle
soit au courant de toutes les règles de protocole qu’elle brisait en
agissant ainsi… Si elle révèle une petite part de sa tourmente, ça
devient difficile de refuser sa demande, non? Sa lettre était bien
formulée, sa tentative de veste efficace: même si la réponse s’est
montrée finalement – et fermement – négative, Béatrice a choisi le
paramètre mignon. Elle s’est montrée un peu… vulnérable.
Regardons de plus près comment ajouter de la créativité et une
pointe de vulnérabilité à vos tentatives de vestes peut vous faire
redoubler d’efficacité.
Vous avez bien compris à quel point je désirais signer avec Chanel
depuis des années. (Maintenant que c’est fait, je me suis attaquée à
Kering; si vous avez des contacts là-bas ou que vous travaillez dans
cette prestigieuse société et que vous ne me trouvez pas
complètement folle, envoyez-moi un courriel pour qu’on organise un
rendez-vous. Je suis très sérieuse, voici mon adresse:
annabelle@present-perfect.fr.) J’avais tellement envie de leur
présenter mes formations, de les aider à rendre leurs présentations
PowerPoint plus pertinentes – et plus glamour –, mais je n’arrivais
pas à décrocher ce rendez-vous tant espéré. Pourtant, est-ce que j’ai
baissé les bras? Jamais de la vie! Comme il était hors de question de
laisser tomber et de passer à autre chose, j’ai décidé d’être plus
créative.
Cette femme ne voulait pas de moi au téléphone, qu’à cela ne
tienne: je lui ai envoyé un courrier par la poste. Elle n’a pas répondu
à ma lettre, je lui ai fait livrer un ballon rose le jour de la Saint-
Valentin! Elle ne m’a pas donné de nouvelles… OK, là, j’ai décidé de
la laisser tranquille, de me faire oublier: je devais éviter d’être lourde
si je voulais garder toutes mes chances auprès de cette cliente.
N’oubliez pas qu’essayer de remplir son quota de vestes ne doit pas
ternir votre réputation. Il y a plein de vestes à prendre dans le
monde, ne vous focalisez pas sur une seule. Ça peut mal finir; pensez
au capitaine Achab avec Moby Dick…
J’ai donc laissé passer un peu de temps. Quelques mois plus tard,
elle a posté un lien sur LinkedIn. Il était 17 heures – j’arrête de
travailler entre 17 h 15 et 20 heures pour passer un moment en
famille chaque jour –, et je n’avais pas encore atteint mon quota de
vestes quotidien. Alors j’ai eu une idée: j’ai demandé à mon
assistante de l’époque d’envoyer à cette Madame-Communication-
de-Chanel un… cactus, accompagné d’un petit mot: «Je sais que je
suis insistante mais je vous promets que je ne pique pas;-) À votre
disposition pour boire un café.»
Pas de réponse.
Je n’ai personnellement jamais obtenu ce rendez- vous avec
Chanel. C’est le premier représentant commercial embauché dans
mon agence qui a obtenu cette rencontre. J’avais pourtant appliqué
le paramètre mignon… qu’est-ce qui ne fonctionnait pas?
En réalité, j’avais oublié quelque chose de très, TRÈS important.
Pour plaisanter, j’ai l’habitude de dire que ma job, c’est de
développer des présentations PowerPoint. Mais c’est un peu
dévalorisant parce que les discours que nous préparons à l’agence
sont percutants et nos présentations exceptionnelles; elles n’ont rien
à voir avec ces PowerPoint de base qui ressemblent à des punitions.
Maîtriser PowerPoint ne fera jamais de vous un excellent orateur,
pas plus que de savoir taper vite à la machine ne vous transformera
en écrivain à succès.
Nous aidons avant tout nos clients à créer des présentations et des
discours originaux capables de toucher les gens, de les mobiliser. Des
présentations qui donnent envie d’agir ou d’adhérer à l’idée qu’on
propose. Et la seule façon d’y parvenir, c’est de commencer par ce
que nous appelons un «audit du public» – un audience audit, dans
mon anglais natal –, la base de toute communication. J’avais
totalement oublié cette étape quand j’ai voulu remplir mon quota de
vestes. Vous devez impérativement en tenir compte.

Explorer la personal win de son interlocuteur


L’audit du public est une analyse, la plus fine et la plus fouillée
possible, des personnes à qui vous souhaitez adresser votre message.
Vous devez disposer du maximum d’informations qui toucheront ce
public parce que, lorsque vous communiquez, ce n’est pas de vous
que vous parlez, mais de lui. Ce n’est pas vous qui comptez, c’est lui.
Vous devez donc vous demander comment votre interlocuteur va
vivre votre présentation, quelle résistance il pourrait montrer en
entendant vos propos, dans quelle mesure il sera réceptif, ce qui le
motive et le fait vibrer. Qu’est-ce qui pourrait le mettre en colère, le
décevoir ou le surprendre. Prenez le temps, par tous les moyens, d’en
savoir plus sur la personne auprès de laquelle vous allez essayer de
prendre une veste; c’est primordial. Espionnez-la sur les réseaux
sociaux, googlez-la… Plus vous aurez d’informations, plus vous
limiterez les risques d’ennuyer cette personne et plus vous la
toucherez. Ce travail en amont va vous permettre de nourrir la
personnal win de votre interlocuteur.
Cette personnal win, qui n’a pas d’équivalent en français, c’est
l’ensemble des motivations les plus solides et les plus puissantes
d’une personne. Ces choses qui nous motivent au plus profond de
nous-même mais dont nous ne parlons jamais. Pas si simple de dire
tout haut «ce qui me motive, c’est le fric parce que je viens d’une
famille pauvre», ou bien «c’est la reconnaissance qui me motive
parce que mes parents ne m’en ont jamais montré enfant». Personne
ne vous avouera une chose pareille, mais n’importe quel vendeur
vous le dira: c’est ce qu’il y a de plus important à comprendre dans
les affaires. Comment ce que vous avez à offrir peut changer la vie de
votre interlocuteur et comment vous pourriez faire allusion à cette
motivation dans votre tentative de veste. Mais soyez prudent, une
personnal win est vraiment très personnelle, comme son nom
l’indique. N’oubliez pas d’ajuster votre discours en conséquence.
Pour vous aider à comprendre cette étape, prenons l’exemple d’un
client avec qui j’avais rendez-vous il y a quelques mois. Nous
l’appellerons Jean-François.
Jean-François, c’est le mâle dans toute sa splendeur. Le mec le plus
mec que j’aie rencontré de toute ma vie. Je n’ai jamais vu autant de
testostérone sous un seul épiderme. Ce n’est pas une critique,
seulement je n’ai plus vraiment l’habitude de travailler avec ce type
d’homme: à l’agence, nous sommes plus de 80% de femmes. (Je sais
que ce n’est pas très équitable et nous travaillons à développer notre
quota de diversité: si vous connaissez un homme qui recherche une
job en création ou en rédaction et qui est motivé par les paillettes et
les séances de manucure, n’hésitez pas à me le présenter!)
Mais revenons à Jean-François. Les indices de sa personnal win
m’ont sauté aux yeux dès qu’on est sortis de l’ascenseur. Nous avons
été guidés à travers l’open space, mon collègue et moi, par une
blonde longiligne avec des seins sortis tout droit d’un dessin animé,
perchée sur des talons tellement hauts qu’elle risquait l’accident du
travail à chaque pas. Elle nous a conduits dans le bureau de Jean-
François, le big boss, donc. Un espace plutôt modeste mais meublé
avec autant d’ostentation qu’une voiture de Formule 1. Ce monsieur,
un peu plus petit que moi, s’est approché pour nous saluer. Sa
poignée de main n’a pas seulement secoué la mienne ou mon bras,
mais mon corps tout entier, comme si j’étais subitement prise d’une
crise d’épilepsie. Puis tout aussi brutalement, il nous a demandé si
nous souhaitions un café. «Café? Café? Amanda! S’il vous plaît!»
Amanda a déboulé dans le bureau malgré ses talons Burj Khalifa
pour nous demander comment on aimait notre café.
Jean-François portait une chemise blanche – à boutons noirs, col
rigide et serré – qui criait à qui voulait l’entendre «j’ai coûté très
cher» et qui était suffisamment moulante pour laisser deviner que
son propriétaire était un fervent adepte de la salle de sport. En
l’écoutant parler d’une voix gonflée d’assurance, ma fibre féministe
s’est réveillée au fond de moi. Il n’y avait pas de raison, son discours
était très bon, il s’exprimait clairement et poliment. J’ai essayé de
faire taire cette sensation désagréable que je sentais bouillonner pour
me concentrer sur ses paroles. J’écoutais. J’écoutais et j’observais
cette photo ultra-cliché affichée au-dessus de son bureau, qui le
représentait entouré de son équipe, riant tous aux éclats. Il me
parlait du succès de son entreprise et de la façon dont il avait réussi à
la développer de manière exponentielle sur une très courte période.
Je dois dire qu’à ce moment de la conversation, j’ai commencé à
m’intéresser vraiment à ce qu’il racontait. Sa réussite était vraiment
étonnante. Avec un plan d’affaires similaire au nôtre, son chiffre
d’affaires était supérieur de 20%. Waouh! J’étais réellement
impressionnée.
C’est là que j’ai posé la question que je pose toujours dans ce genre
de rendez-vous: «Alors, pourquoi suis-je ici?» Nouvelle surprise: il
m’a expliqué que pour son séminaire annuel qui avait lieu bientôt, il
y avait deux ou trois timides; ils refusaient de reconnaître qu’ils
l’étaient, mais devaient prendre la parole en public. Il souhaitait faire
quelque chose pour eux, sans leur montrer qu’il avait conscience de
cette timidité mais plutôt pour les aider à progresser et leur donner
confiance en eux.
J’ai carrément eu honte de moi et de mes préjugés envers cet
homme. J’avais été aveuglée par les signes extérieurs ostentatoires
qui avaient faussé mon jugement. J’avais bâclé mon audit, regardé
Jean-François sans l’écouter ni le comprendre. Son discours était
honnête et sincère. Les membres de son équipe comptaient vraiment
pour lui, leur bien-être, leur épanouissement étaient sa priorité. Il
souhaitait sincèrement aider ses employés à mieux communiquer, à
renforcer leurs présentations, etc.
Nos deux sociétés, diamétralement opposées sur papier, étaient
fondées sur les mêmes motivations: la réussite – même si la sienne
passait aussi par la bimbo qui apporte le café sur des stilettos Jimmy
Choo – et un dirigeant à l’écoute et dévoué envers ses équipes.
Il est indispensable d’arrêter de penser à soi quand on souhaite
communiquer avec l’autre ou qu’on fait une tentative de veste, et
d’essayer de se mettre vraiment à la place de son interlocuteur, de
penser comme lui. C’est pour ça que la personnal win est si
personnelle. Mais attention, hors de question de dire à Jean-
François: «Je vois que ce qui vous motive vraiment ce sont vos
chemises hors de prix et votre secrétaire à forte poitrine, votre BMW
flambant neuve et le chiffre d’affaires que vous comptez faire l’année
prochaine. Mais bravo, vous semblez vous soucier quand même de
vos employés et vous avez l’air d’être un patron attentionné et
apprécié.» Jamais de la vie! La personnal win de votre interlocuteur,
c’est ce que vous savez de lui, ce que vous comprenez de ses attentes.
C’est votre arme secrète. Vous pouvez y faire allusion mais jamais, au
grand jamais vous ne devez en parler ouvertement.
L’étude la plus représentative concernant cette personnal win a été
réalisée en 2012 par l’Institut français d’opinion publique5. Elle est
fascinante – et un peu vache, il faut bien le dire. Ce sondage
interrogeait les Français sur ce qu’ils ont l’habitude de regarder à la
télévision. Et devinez ce qu’ont répondu ces héritiers de Voltaire et
de Berlioz? Quelle chaîne regardent les Français, à votre avis? Arte,
bien sûr, et ses documentaires sophistiqués et intello. Pour être
honnête avec vous, si on me demandait ce que j’écoute à la radio, je
répondrais probablement France Culture ou Radio-Canada…
Mais ce qui est drôle, c’est ce qu’ont démontré les données sur ce
que regardent réellement les Français: TF1, une chaîne commerciale
au contenu diamétralement opposé à celui d’Arte. Et ce n’est pas
grave! Les émissions de téléréalité ne passent pas à la télévision par
hasard. Ce sont des émissions appréciées, qui nous donnent tout
simplement confiance en nous. Ça fait du bien de voir que des
personnes sont capables de dépenser tout leur argent pour des nains
de jardin ou de passer le plus clair de leur temps à vérifier que leur
copine ne les trompe pas, non? Moi aussi, je regarde certaines
téléréalités en cachette!
Imaginez un peu si les intervieweurs de ce sondage avaient
clairement émis un doute au moment de la réponse des personnes
interrogées, l’enquête aurait pu se terminer en pugilat:
«Alors, dites-moi, chère madame, quelle chaîne de télé regardez-
vous le plus souvent?
— Oh, vous savez, je ne regarde pas très souvent la télé. Je préfère
lire. Mais si je devais la regarder, ce serait probablement Arte.
— Ah bon? Vous êtes sûre? Admettez que vous regardez plutôt TF1,
et Secret Story en particulier, non?
— Mais non! Vous vous trompez, jeune homme! Je ne remplis pas
ma tête avec ce genre d’émissions et je n’apprécie pas du tout vos
insinuations, d’ailleurs!»
Et elle aurait raison de se sentir insultée, cette femme! Elle est
touchée dans ce qu’il y a de plus intime en elle. Ces personnal wins
sont absolument personnelles, on n’est pas obligés de les exposer: on
peut – on doit – en avoir, mais elles doivent rester secrètes. Ce sont
nos petits péchés mignons!
Moi, par exemple, j’écris ce livre pour permettre à un grand
nombre de personnes de pratiquer LTDLV. Mais c’est beaucoup de
temps, beaucoup de travail et un gros investissement personnel,
alors j’aimerais aussi qu’il fasse un succès en librairie, et dans toutes
les langues, pour que la notoriété de mon agence prenne de
l’ampleur. Évidemment. Mais ce n’est pas très élégant d’en parler,
parce que ça ne se dit pas même si c’est vrai. C’est gênant. Mais c’est
ma personnal win, l’une de mes motivations secrètes.
Bref, gardez bien ça en tête quand vous faites votre audit du public.
Jean-François, avec son costume de luxe et sa chemise haute
couture, sa montre spectaculaire, son assurance et son assistante,
m’avait donné plein d’indices sur sa personnal win, de façon presque
animale, mais ça devait rester absolument secret et je ne l’aurais
jamais évoqué devant lui. Cette information, je devais juste l’avoir à
l’esprit et l’utiliser pour que mon travail et la prestation que j’allais
lui proposer soient le plus adapté possible aux besoins de ses salariés
tout en résonnant avec ses attentes personnelles profondes.
CHAPITRE QUATRE

Comment choisir
son quota de vestes

Pour définir son quota de vestes, il faut répondre à une question à la


fois simple et complexe: qu’est-ce que vous voulez obtenir? La bonne
nouvelle, c’est que vous n’avez pas besoin de savoir exactement ce
que vous souhaitez, une réponse approximative peut suffire pour
vous aider à établir le quota de vestes adapté à vos ambitions et à vos
envies. Ceux qui savent exactement ce qu’ils veulent parce qu’ils ont
précisément défini leur objectif vont pouvoir définir leur quota. Pour
les autres, dont l’ambition existe mais dont l’objectif n’est pas
déterminé, ça marche aussi.

Qu’est-ce que tu veux faire quand tu seras grand?


Vous vous souvenez sûrement de la fameuse question qu’on vous
posait souvent quand vous étiez petits: «Tu veux faire quoi quand tu
seras grand?» Si certains d’entre vous avaient déjà une idée précise
de leur futur parcours professionnel – c’est d’ailleurs adorable,
comme ma fille qui veut devenir chef du monde et ballerine –,
d’autres n’en avaient aucune idée.
Petite, je ne savais pas très bien ce que je voulais faire plus tard.
Mais je savais que je pouvais faire plein de choses: comédienne?
pourquoi pas, attachée de presse? ça avait l’air sympa, productrice ou
journaliste? peut-être. Bref, la liste des métiers qui m’intéressaient
était longue. En revanche, je savais déjà que je ne serais jamais
statisticienne, spécialiste nucléaire ou ingénieure structure, par
exemple. Ça, jamais. Je savais de façon intuitive que je choisirais ma
carrière en fonction de mon destin, de mon chemin de vie, mais aussi
des choix que je ferais adolescente, puis jeune adulte. C’est d’ailleurs
pour cela que j’ai toujours été une bonne élève.
Ma carrière se présentait donc comme une sorte d’entonnoir de
possibles: à force d’éliminations, j’allais arriver à un résultat, mais
initialement je n’étais pas déterminée dans un choix précis. C’est un
peu comme vouloir partir en vacances au soleil avec son amoureux
mais hésiter entre plusieurs destinations exotiques: ce sont les prix et
les billets disponibles qui guident le choix définitif, pas la
destination; n’importe quelle plage de cocotiers et une mer à 30 °C
feront l’affaire. Nous appellerons ce type de profil «les ambitieux».
Ma meilleure amie en sixième année, Jennifer, avec qui je faisais
de la luge au milieu des pins de son immense jardin – on habitait en
Alberta, ne l’oubliez pas –, avait, elle, une idée très précise de sa
future carrière: elle voulait devenir médecin. Je n’ai pas vu Jennifer
depuis 25 ans, mais par curiosité, en écrivant ce chapitre, je l’ai
googlée: non seulement elle est devenue docteure en médecine, mais
elle est carrément neurologue spécialisée en pédiatrie. Elle sauve des
enfants en faisant des trucs incroyables avec leur cerveau. En plus,
elle est sublime sur toutes ses photos. Waouh! J’ai eu une petite
sensation d’échec avec mes PowerPoint pour des marques de rouge à
lèvres… Mais le monde a aussi besoin de glamour, non?
Pour Jennifer, donc, pas d’hésitation. Elle connaissait précisément
son ambition: ce serait médecin ou rien. Sa carrière, ce qu’elle voulait
devenir, tout était tracé. Pour reprendre la métaphore des vacances,
je dirais qu’elle, quand elle voulait partir avec son chéri, elle
connaissait non seulement le pays dans lequel elle voulait aller, mais
aussi l’île, le village et même l’hôtel où séjourner! Nous appellerons
ces personnes qui, comme Jennifer, ont un objectif précis, «les
stratégiques». Attention, ça ne veut pas dire qu’ils n’ont pas
d’ambition, mais seulement qu’ils concentrent leur ambition sur un
objectif précis, et souvent à long terme.
Ces deux profils de personnes, les ambitieux et les stratégiques,
vont pratiquer un peu différemment LTDLV, car c’est justement la
précision de leur ambition qui va déterminer leur façon de faire. Si
vous avez un objectif défini, vous aurez un choix plus restreint de
tentatives de vestes qu’un ambitieux. Vous devrez vous montrer plus
stratégique.

Les tentatives de vestes des ambitieux


Prenons l’exemple d’Élise qui en a ras-le-bol de sa job et rêve d’en
changer. C’est une salariée exemplaire, elle fait très bien son boulot,
mais elle ne progresse pas; elle a le sentiment que son patron pense
qu’elle restera à son poste quoi qu’il arrive… Pas très stimulant. Elle
souhaite aller voir ce qui se passe ailleurs. Travaillant dans le
marketing digital, elle voudrait postuler dans une société bien cotée
dans le domaine ou un pure player, afin de pouvoir progresser, mais
elle n’a pas de nom précis en tête. Elle décide de fixer son quota à
trois vestes par jour, mais comment cibler ces vestes? Pour cela, elle
doit se poser trois questions: qui + quoi + comment?
Elle va d’abord faire une liste de QUI pourrait être un contact
intéressant à démarcher. Attention, souvenez- vous des critères
d’une veste: vous devez être quasiment sûr de vous prendre un
râteau. Envoyer des CV à des copines qui travaillent dans les
ressources humaines chez LVMH, ça ne compte pas… Élise doit donc
lister les personnes à contacter dont elle est assez sûre qu’elles vont
l’envoyer balader: la chasseuse de têtes qui a recruté le responsable
de la direction marketing de Disney, les directeurs de la stratégie
digitale de tous les grands acteurs de la technologie et du luxe dans
les zones géographiques où elle aimerait travailler… Élise a
seulement 29 ans, et chercher à joindre en direct le directeur de la
stratégie digitale est une vraie tentative de veste car un poste au
milieu de l’organigramme serait une stratégie plus habituelle. Mais
elle connaît les critères d’une bonne tentative de veste: elle doit être
quasiment sûre qu’on lui dira non, car dans le cas contraire, cela fera
réellement avancer sa recherche de boulot. Bien sûr, elle ne doit pas
écorner sa réputation, mais elle respecte toutes les règles en faisant
ça. Le directeur ne prendra sans doute pas en compte sa candidature
– elle est trop jeune – mais il est possible qu’il transmette son CV au
RH en se disant qu’elle est audacieuse: c’est gonflé d’envoyer
directement son CV au boss!
Utiliser le paramètre mignon peut sembler étonnant, car lorsqu’on
postule pour une job, on souhaite avant tout être perçu comme
professionnel plutôt que comme «mignon». Mais cela signifie
seulement que l’on intègre une pointe d’émotion à sa demande. Ainsi
est-il plus difficile d’être ignoré. Pas question de parler de votre
enfance, mais plutôt d’assumer votre audace en disant quelque chose
comme: «Je sais que c’est un peu osé de vous contacter directement,
mais j’ai suivi le conseil de Jack Ma, le fondateur et PDG du site
Internet Alibaba, qui dit “avant 30 ans, il faut choisir un patron
plutôt qu’une société”. Pour moi, ce serait un honneur de travailler
avec vous.»
Difficile de ne pas vous aimer si vous êtes sincère!
Voilà donc comment faire pour toucher des personnes placées très
haut dans la stratosphère des organigrammes et que vous n’auriez
jamais imaginé contacter si vous ne pratiquiez pas LTDLV.
Lorsque la question «qui» n’est pas adaptée à votre objectif, c’est la
question «QUOI» qu’il faut retenir. En effet, si vous avez un objectif
précis plutôt qu’une ambition large et ouverte comme Élise, vous
allez essayer de prendre une veste en faisant quelque chose qui
retiendra l’attention de votre interlocuteur, quel qu’il soit. Je
m’explique.
Imaginez que vous ayez reçu une lettre de refus d’un client
potentiel. Au lieu de la garder dans votre pile de «non», je vous
propose d’adresser une réponse par retour de courrier, sur du joli
papier à lettres et dans une enveloppe rouge à paillettes, par
exemple, qui pourrait ressembler à ça:
«MERCI POUR LA VESTE! Se faire rejeter rend plus fort. Bien sûr
j’aurais préféré recevoir une réponse positive de votre part, mais je
vous remercie d’avoir contribué à remplir mon quota de vestes. Je
reste à votre disposition si vous changez d’avis.»
C’est ce que j’avais choisi de faire en adressant un cactus à Chanel
après avoir essuyé plusieurs échecs par téléphone. C’était une
tentative de veste en «quoi». Je savais qu’en agissant ainsi j’allais
attirer l’attention de mon interlocutrice. Impossible de recevoir un
cactus sans se dire, perplexe: «Mais qu’est-ce que c’est que ça?» et
sourire ou au moins se souvenir de vous!
Cet exemple nous amène à nous interroger sur le troisième point:
«COMMENT». Comment trouver la meilleure veste? La veste la plus
adaptée à votre projet. En quoi adresser une carte de remerciement
ou un cactus après avoir essuyé un refus est une bonne tentative de
veste? Tout simplement parce que c’est différent. Same but different,
dirait-on en anglais.
Noah Askin est professeur à l’Institut européen d’administration
des affaires (INSEAD). Il consacre une partie de ses recherches à
comprendre pourquoi certaines chansons, contrairement à d’autres,
ont le pouvoir de devenir des hits. Quelle est la recette d’un hit? Car
oui, il y a bien une recette, ce qui est aussi fascinant que déprimant…
Selon ce professeur, la recette pour qu’un titre se démarque dans le
top 100 des chansons à la mode est simple: ces titres sont comme les
autres mais ils ont un petit quelque chose de différent. Same but
different (ça sonne mieux en anglais, non?). C’est-à-dire qu’ils sont
suffisamment proches des sons que nous avons l’habitude d’entendre
à la radio pour qu’on ne perde pas nos repères du moment, mais
assez différents pour qu’on trouve qu’ils apportent un petit air de
fraîcheur et de nouveauté. Si une chanson est trop loin de nos
habitudes ou trop nouvelle, elle ne nous plaira pas.
C’est exactement ce que vous devez faire avec LTDLV: chercher à
vous démarquer juste ce qu’il faut en étant same but different! Une
petite pointe de nouveauté et d’audace suffira. Et n’oubliez pas que le
paramètre mignon va de pair avec ce conseil; gardez-le toujours en
tête pour savoir jusqu’où pousser le curseur de l’audace. Parce qu’il
n’y a rien de mieux, au fond, qu’une veste que vous avez menée
jusqu’au bout.
Les tentatives de vestes des stratégiques
Si vous n’êtes pas comme Élise-l’ambitieuse, vous êtes peut-être
plutôt comme Shellye-la-stratégique, Shellye Archambeau, qui a
occupé des postes importants très haut placés chez IBM et dans pas
mal d’entreprises tech aux États-Unis. Quand Shellye parle de son
parcours, elle explique qu’elle a pris des «risques intelligents»; moi
je crois qu’elle a surtout pratiqué LTDLV avec brio!
À 14 ans, cette femme d’affaires a compris ce que voulait dire être
PDG et elle a décidé qu’elle deviendrait PDG d’une grande société
avant ses 40 ans. Mais pour atteindre son objectif, elle savait qu’en
tant que femme afro-américaine elle ne pouvait pas suivre le
parcours habituel que prennent la plupart des hommes blancs de
bonne famille. Non seulement elle avait un objectif très précis, mais
le chemin vers le sommet s’annonçait encore plus raide et dangereux
que pour la plupart d’entre nous. Si elle avait choisi un parcours
traditionnel pour atteindre son but, elle n’y aurait probablement
jamais réussi. Puisqu’elle ne pouvait pas casser le plafond de verre,
elle a choisi de le contourner.
Quand elle est sortie de son école de commerce, elle a accepté chez
IBM une job dans la vente. Ça aurait pu être un échec monumental:
en sortant d’une grande école avec un MBA, on choisit un boulot
dans la stratégie, dans le management ou l’audit. On ne choisit
surtout pas la vente.
Shellye, donc, en choisissant de travailler dans la vente, a fait une
belle tentative de veste: ça passe ou ça casse – mais quand vous avez
un objectif précis, vous avez moins d’opportunités de vestes que si
vous avez une ambition plus ouverte, alors ces tentatives sont plus
risquées. En outre, elle est partie travailler au Japon, un choix
surprenant quand on veut devenir dirigeante d’une grosse société.
Nouvelle tentative de veste. Quand elle a rencontré pour la première
fois le boss de l’entreprise, elle est arrivée avec un gros bouquet de
fleurs. Pour marquer les esprits. Encore une belle tentative de veste:
son geste a été très bien accueilli et le patron a adoré. Elle prenait un
gros risque, ce succès aurait pu être une catastrophe, mais en
appliquant le paramètre mignon, elle était quasi assurée de se faire
apprécier…
Plus tard, alors qu’elle travaillait chez Blockbuster, le géant
américain de la location vidéo VHS, elle a proposé au big boss l’idée
totalement révolutionnaire de remplacer les clubs vidéos par du
contenu en streaming… Aujourd’hui, c’est LE système qui remporte
un grand succès, mais son idée a fait un flop total à l’époque, elle
s’est pris une des plus grosses vestes de sa carrière. Toutefois, cet
échec lui a permis de gagner beaucoup de temps parce qu’elle s’est
rendu compte que ses valeurs et ses compétences n’étaient pas du
tout alignées avec celles de cette entreprise. Souvenez-vous de Mick
Jagger: les vestes nous offrent des satisfactions, des opportunités
idéales pour nous révéler notre véritable «destin» – pardonnez cette
petite pointe mystique.
Pratiquer LTDLV pour atteindre un but précis réduit votre quota
de vestes par rapport à une personne qui n’a pas de projet spécifique
mais souhaite juste évoluer dans sa carrière ou obtenir «mieux» dans
telle ou telle situation. Dans ce cas, deux ou trois vestes par mois
suffisent, si elles sont bien réfléchies comme celles de Shellye. Si
vous comprenez bien l’anglais, je vous recommande d’écouter son
histoire, et comment elle a choisi ses tentatives de vestes, sur le
balado Masters of Scale6, c’est vraiment édifiant.
Pour résumer, les ambitieux, ceux qui partent en vacances avec
une idée approximative de leur séjour, peuvent multiplier leurs
tentatives de vestes et s’adresser à une ribambelle de gens. C’est le
cas des représentants commerciaux qui veulent plus de rendez- vous,
ou des hommes qui veulent draguer le plus de femmes possible. Les
stratégiques, eux, qui savent exactement où ils veulent aller, doivent
se contenter de moins de tentatives de vestes mais plus ciblées. Ça
concerne par exemple une recruteuse qui a un plan de carrière très
défini et veut devenir DRH avant 35 ans, ou un parent qui donnerait
tout pour que son ado entre à Harvard.
Mais quelles que soient vos aspirations, précises ou
approximatives, le plus important est de vous fixer un quota de
vestes comme défi, de partager vos échecs avec votre famille et vos
amis, et d’être créatif et mignon dans vos tentatives.

Remplir son quota de vestes


pour accroître ses performances
À cette étape de notre parcours, vous vous dites peut-être qu’elles
sont bien mignonnes, mes idées, mais que tout ça, vous le faites déjà.
C’est votre job, quoi. Eh bien, c’est fantastique! Vous êtes brillant et
votre carrière est florissante, tant mieux, vous faites partie de ceux
qui pratiquent la Théorie de la veste sans le savoir.
Maintenant, ce dont vous avez besoin, c’est de considérer toutes
ces choses que vous faites déjà du point de vue de celui qui cherche à
se prendre des vestes. Jusqu’ici, vous avez fait tout ça pour réussir;
désormais vous allez le faire pour remplir votre quota de vestes. Vous
n’allez choisir que les défis impossibles, les tentatives de vestes quasi
certaines d’aboutir. En toute mignonnerie, évidemment, pour ne pas
ternir votre réputation. Et si vous essuyez des refus, si vous prenez
des vestes en tentant ces défis, bravo! Si vous ne prenez aucune
veste, chapeau, c’est que vous avez converti en succès tout ce que
vous pensiez ne pas réussir. Mais dans ce cas, je vous suggère
d’augmenter le curseur «audace» de vos tentatives de vestes, parce
qu’un taux de réussite de 100% est la preuve que vous n’avez pas osé
suffisamment…
À l’inverse, peut-être n’avez-vous aucune idée de ce que vous
pourriez aller chercher comme veste… C’est super: aider les autres à
trouver des idées de tentatives de vestes est l’une de mes activités
préférées!
Lorsque j’anime un atelier et que je présente la Théorie de la veste,
j’adore – et je déteste – entendre les gens dire: «Je me demande bien
ce que je pourrais tenter comme prise de veste, je ne vois pas du
tout…»
Si j’adore ce type de commentaires, c’est parce que je peux
pratiquer le brainstorming avec ces personnes: les aider à briser les
règles qu’ils se sont fixées – seuls ou avec l’aide de leurs parents, du
système d’éducation ou de leur patron. Peu importe d’où viennent
leurs limites, cette question me permet de leur montrer que c’est
possible.
Voilà le genre d’échanges auxquels cela peut donner lieu:
«Je ne peux quand même pas contacter le meilleur élément d’une
société concurrente!
— Pourquoi pas?
— Mais ça ne se fait pas, madame, enfin.
— Ah bon? Moi, je le fais tout le temps. Au pire, qu’est-ce qui peut
vous arriver?
— Il va me répondre qu’il n’est pas intéressé… Et il va aller dire au
RH que le cabinet pour lequel je travaille essaie de le débaucher.
— C’est ça, le pire? De vous faire rejeter par cette personne et donc
de commencer à remplir votre quota de vestes? C’est génial, au
contraire, bravo! Et de renforcer l’ego de ce candidat chassé par un
cabinet concurrent? Il sera ravi, non? Sans compter que s’il en parle
au RH, qu’il s’en sert pour obtenir une augmentation, il pourra
même vous remercier! Par ailleurs, ce candidat idéal qui serait
parfait dans votre équipe connaît désormais votre nom et votre
numéro de téléphone: le jour où il souhaitera quitter son poste, il y a
de fortes chances pour qu’il vous appelle! Et comme vous êtes
prudent, que vous avez été «mignon» dans votre demande, que vous
n’avez pas terni votre réputation, ce candidat aura probablement
gardé un bon souvenir de vous… C’est donc ça le pire qui risque de
vous arriver?
— Oui, vu comme ça, ce n’est pas le pire…»
Dans ces échanges, ma valeur ajoutée, c’est que je suis détachée
d’un principe qui est absolument contre-productif: «Ce n’est pas
comme ça que nous avons l’habitude de procéder.» Cette phrase
m’horripile. Si vous faites ce que vous avez toujours fait, vous aurez
ce que vous avez toujours eu. Si ça vous fait perdre des parts de
marché, des clients, continuez à faire ce que vous avez toujours fait,
continuez à ne pas faire des choses «qui ne se font pas», mais ne
venez pas vous plaindre!
La raison pour laquelle je déteste ces commentaires, c’est parce
que, après une conférence où je détaille point par point ma méthode,
il y a toujours une ou deux personnes pour me dire, justement, que
«ça ne fonctionne pas comme ça chez nous». Ces commentaires qui
persistent un peu partout, au même titre que les gens qui disent
systématiquement «non mais…», c’est ce qu’il y a de pire dans le
monde de l’entreprise. Ces personnes, qui ont un esprit étriqué et
borné, sont comme des champignons vénéneux résistants et sournois
qui continuent à s’insinuer dans les équipes.
J’ai l’impression que l’ambition et le désir de mener une carrière
aussi brillante et lucrative que possible, c’est assez mal vu par
certains. Pourquoi ne pourrait-on pas réussir sa vie professionnelle
tout en continuant à être «quelqu’un de bien»? Avoir de l’ambition
permet de réaliser de grandes choses, c’est même une qualité
indispensable, non?

L’ambition, ce n’est pas un gros mot


L’ambition, parlons-en. Je me souviendrai longtemps de la première
fois que j’ai entendu l’expression: «elle a les dents longues»… Mais
qu’est-ce que ça pouvait bien vouloir dire? Cette phrase, tout droit
sortie de la bouche de mon chef d’équipe, caractérisait l’une de mes
collègues; je lui ai demandé ce qu’il voulait dire par là. «Elle fera tout
et n’importe quoi pour avancer», m’a-t-il répondu. Dans ma tête, j’ai
trouvé ça génial. «C’est super qu’elle fasse tout pour y arriver, non?»
ai-je ajouté. «Eh bien non, pour une femme, a rétorqué mon chef
d’équipe, ce n’est pas très digne.» Je vous jure que j’ai eu envie de
vomir – pour de vrai – en entendant cette réponse. J’ai enchaîné
immédiatement, je voulais comprendre ce raisonnement odieux:
«Pourquoi un homme aurait-il le droit de vouloir réussir et pas une
femme?» «C’est dans la nature de l’homme d’avoir envie de
performer. Une femme le fait quand la société le lui impose, ce n’est
pas dans sa nature. Pourquoi lutter contre la nature?» Fin de la
conversation. Goût amer dans ma bouche. À l’ère de l’égalité
homme-femme, comment pouvait-on entendre des choses pareilles?
Je n’en croyais pas mes oreilles. Personne n’aurait osé faire un
commentaire aussi abject au Canada, le pays du politiquement
correct. Nous sommes polis jusqu’au bout des ongles, là-bas. Par
exemple, aucune photo n’apparaît jamais sur un CV, c’est insultant
pour tout le monde: pour le candidat (qui n’est pas une call-girl) et
pour le recruteur. Comment votre physique peut-il avoir un
quelconque impact sur la qualité de votre travail? Au Québec,
pratiquement personne ne vous siffle dans la rue. Personne ne se
permet non plus de faire de commentaires sur votre tenue ou la
couleur de vos cheveux sur votre lieu de travail. Et JAMAIS personne
ne vous dirait: «Mademoiselle, faites attention. Vous ne devriez pas
vous battre pour cette promotion, les femmes ambitieuses, c’est
contre-nature.»
Chers amis lecteurs, arrêtez de faire un blocage à propos de
l’ambition! Ce n’est ni un gros mot ni un odieux concept. Ce n’est pas
sale. L’ambition n’est pas synonyme de cruauté. L’une peut très bien
aller sans l’autre, je vous le promets. C’est comme croire que tous les
hommes qui roulent en Audi sont des abrutis. Il y en a beaucoup,
certes. Et celui qui roule en Audi noir mat a 90% de chances d’en être
un. Mais comment pouvez-vous savoir que ce type, dans son Audi,
est un trou de c** si vous ne l’avez pas vu conduire? Jugez-le par ses
actions. S’il vous fait une queue de poisson et qu’il est à deux doigts
de renverser une famille de touristes sur un passage piéton, d’accord,
c’est un trou de c**. Mais ce n’est pas parce que quelqu’un se montre
ambitieux que c’est un abruti. Ce n’est pas parce que vous avez de
l’ambition que vous êtes prêt à écraser tout le monde sur votre route,
à tuer des chiots tout mignons et des petits chatons pour faire
avancer votre carrière!
Les ambitieux peuvent être des personnes normales et gentilles. Et
ils le sont de plus en plus parce que les entreprises commencent à
comprendre que la sécurité psychologique est à la base de leurs
performances. Les ambitieux-trou de c**, je suis d’accord, il faut les
éviter, mais je vous assure que j’ai rencontré autant d’ambitieux-
gentils que d’ambitieux-trou de c**. C’est une coïncidence qui relie
ces deux termes, et non une corrélation ni une fatalité.
L’ambition est l’une des plus belles caractéristiques de la nature
humaine. Marie Curie était ambitieuse, Sally Ride était ambitieuse,
Eva Loveless était ambitieuse, Simone Veil était ambitieuse, Barack
Obama est ambitieux. Ellen DeGeneres est ambitieuse, mon associée
Alexandra est ambitieuse, Oprah Winfrey est ambitieuse, Christine
Lagarde est ambitieuse… La liste est longue de toutes ces personnes à
l’ambition immense qui ne sont pas des trous de c**. Il est vrai que je
ne connais pas Barack Obama personnellement – tiens, voilà une
tentative de veste intéressante –, mais j’ai entendu et lu
suffisamment de choses sur lui qui me laissent penser que c’est tout
sauf un trou de c**.
Pourquoi vouloir détériorer à tout prix et systématiquement
l’ambition? Vous imaginez ce que serait une société sans ambition?
Rien n’avancerait, rien de grand ne serait accompli, si personne
n’avait d’ambition, si personne ne se donnait à fond pour tenter de
dépasser ses limites!
Voilà, c’est dit.
Mais revenons à nos moutons. Si vous n’avez pas d’idées pour vos
tentatives de veste, contactez-moi. Évidemment, j’adorerais
brainstormer avec vous tous, mais si je n’ai pas le temps et que je ne
vous réponds pas, bingo, c’est votre première veste! Si j’ai le temps
de vous répondre, disons que c’est moi qui me suis pris une veste
monumentale avec ce livre… Ironique, non?

Le chiffre magique: 30%


La personne qui commence à adopter la Théorie de la veste est
«vierge», conditionnée par des années et des années d’obéissance et
de dépendance à une hiérarchie pyramidale (en famille, à l’école et
au bureau), où il faut systématiquement demander la permission de
faire quoi que ce soit. Elle n’a tellement pas l’habitude d’agir de son
propre chef qu’au tout début de la méthode elle va multiplier les
tentatives de vestes anecdotiques. Ajouter une personne sur
LinkedIn, par exemple, ou demander un rendez-vous à quelqu’un
que l’on souhaite rencontrer, c’est tentant pour commencer, c’est
bien, mais ce n’est pas vraiment une tentative de veste. Un débutant
prend confiance en lui avec ce type de vestes parce qu’il va
rapidement se rendre compte que 50 à 80% de ce qu’il croyait être
une veste vont se transformer en opportunités. Transformer un
échec en opportunité rassure et montre que la méthode fonctionne et
que ce n’est pas si difficile, finalement, de la mettre en route. Parfait.
Mais il faut donc augmenter la difficulté de la tentative de veste.
Rapidement, en pratiquant cette méthode, vous allez constater que
vous ne réussissez pas à remplir votre quota: ces journées que vous
imaginiez remplies d’échecs sont finalement pleines d’opportunités.
Allez, on va mettre la barre plus haut, prendre son courage à deux
mains et passer à l’étape suivante: joindre un nouveau contact sur
LinkedIn ou envoyer un courriel à une personne qui n’a jamais
entendu parler de vous et que vous désirez rencontrer. Et ainsi
jusqu’à descendre à un taux de 30%: si 30% de ce que vous pensiez
être des vestes se transforment en opportunités, c’est que vous êtes
au bon niveau de rejet. Vous n’êtes pas trop lourd et vous choisissez
bien vos tentatives de vestes. En dessous de ce chiffre, vous risquez
de nuire à votre réputation; au-dessus, vous n’osez pas assez et vous
n’utilisez pas la méthode au maximum de son potentiel. Sachez une
chose: c’est en choisissant des tentatives de vestes qui vous font peur
que vous pourrez sortir de votre zone de confort et avancer.
Si tout cela vous semble un peu compliqué, les vestes «qui» et les
vestes «quoi», les quotas, les 30%, laissez-moi vous donner un
conseil: la meilleure façon d’accomplir quelque chose, c’est de s’y
mettre; la meilleure façon d’avancer vers un objectif, c’est d’arrêter
de réfléchir et de se lancer. Choisissez votre quota de vestes, pensez à
ce qui peut vous arriver de pire en cas de réussite – il faut que vous
puissiez vivre avec ça, même si ça fait un peu mal, c’est le risque –,
soyez le plus gentil possible – n’oubliez pas le paramètre «mignon» –
et, pour citer Nike: «Just do it»!
Franchement, les risques de vous faire rejeter lors de votre
première tentative de veste sont quasiment nuls. Je me souviens qu’il
m’a fallu du temps et pas mal de tentatives, dans ma buanderie,
avant de prendre quelques vraies belles vestes. Lancez-vous, allez!
Go, go, go! Et pour vous aider et vous entourer, je vous propose de
trouver votre copain, votre copine ou votre famille du flop.
CHAPITRE CINQ

La famille du flop

Soyons honnêtes, LTDLV c’est une idée géniale, et c’est aussi une
jolie façon d’évoquer des situations qui peuvent vraiment être
désagréables, voire douloureuses… «Essayez! Échouez!
Recommencez! Remplissez votre quota de vestes!»: c’est très bien
pour aller de l’avant, pour se motiver, et je vous assure que ça
fonctionne vraiment. LTDLV vous donne de la force pour avoir
confiance en vous, elle vous fait avancer dans votre job et dans votre
vie privée. Tout ça c’est vrai et c’est très bien. Mais se faire rejeter, se
prendre des vestes, ça fait mal, il faut bien le dire.
J’ai pris l’une de mes plus douloureuses vestes lorsque l’un de mes
rêves les plus chers s’est brisé. Un rêve que j’avais depuis le tout
début de ma carrière. Je vais partager cette histoire avec vous
maintenant, parce que même si en parler reste très douloureux après
tout ce temps, je tiens à vous montrer que même la reine de la veste
que je suis a toujours besoin de pratiquer LTDLV en suivant pas à
pas chaque étape. En l’occurrence, ici, trouver sa famille du flop.

Ma plus grosse veste


Present Perfect est une agence qui pratique la prise de parole en
public. On forme des gens à être géniaux sur scène, des start-ups à
pitcher leurs projets, des PDG à devenir des orateurs hors pair. C’est
ce que nous faisons chaque jour et nous aimons le faire. J’ai
personnellement entraîné des centaines, peut-être des milliers de
start-upeurs. Alors quand la chaîne française M6 a annoncé le
développement d’une émission en prime time sur le pitch
entrepreneurial, mon cœur s’est tout simplement arrêté.
Shark Tank – le bassin des requins – est une émission américaine
(sooo américaine!) où des entrepreneurs montent sur scène devant
une poignée de milliardaires pour présenter leur société et proposer
aux investisseurs de prendre des parts dans leur entreprise. C’est un
programme ultrapopulaire et extrêmement suivi, diffusé à une heure
de grande écoute et dont il existe des franchises partout dans le
monde; une sorte de The Voice de l’entrepreneuriat. Les pitchs de ce
programme se doivent d’être tout simplement amazing! J’ai vu tous
les épisodes de la version américaine, analysé chaque détail des
présentations… Et j’ai pris un plaisir fou à observer mon idole, Sara
Blakely, transformée pour l’occasion en reine des sharks!
Il y a encore quelques années, cette émission – programmée dans
vingt-six pays – n’aurait sans doute eu aucun succès en France: trop
politiquement incorrect de mettre ainsi en avant l’ambition et la
réussite en prime time… Mais les choses changent, et la France, elle
aussi, est en train de devenir un pays de start-ups, l’entrepreneuriat
attire de plus en plus de monde, et c’est plutôt cool, aujourd’hui,
d’être un entrepreneur ambitieux. C’est pour ça que Shark Tank
pouvait enfin se faire une place dans les programmes français, et il
n’y avait pas moyen que ce soit une autre agence que la mienne qui
entraîne les candidats à convaincre leurs investisseurs dans cette
émission.
Dès que j’ai su que l’émission débarquait en France, j’ai contacté la
personne en charge de la production. Intéressée par notre agence,
elle a accepté de me rencontrer. Ce rendez-vous, c’était LE rendez-
vous. Franchement, et en toute transparence, mon quota de vestes
pour cette réunion était de zéro! Ce n’était pas là-dessus que j’allais
essayer de me planter; je voulais gagner. Gagner absolument. Je le
voulais tellement, ce contrat! Je voyais déjà le logo de Present Perfect
sur l’écran du générique de fin de l’émission quand j’ai reçu ce
courriel: «Nous ne sommes plus intéressés par vos services. Nous
avons choisi une proposition différente.» Bim. Ce courriel m’a fait
l’effet d’un coup de pied dans l’estomac. J’ai renvoyé un message
pour demander quelques explications, savoir pourquoi la production
avait changé d’avis. «Après avoir pris des renseignements sur votre
entreprise, nous pensons que vous n’êtes pas le bon partenaire.»
Rebim. Re-coup de pied dans l’estomac. Et rien qu’en écrivant ces
mots, j’ai toujours aussi mal.
Est-ce que j’aurais préféré réussir plutôt que de me prendre cette
veste monumentale pour un contrat dont je rêvais depuis dix ans?
Évidemment! Mais lorsque la vie vous offre une veste pareille,
LTDLV, heureusement, propose plusieurs solutions pour vous
réconforter.
La première, c’est qu’en étant allée jusqu’au bout de mon échec, je
savais, lorsque je me suis couchée le soir, qu’il n’y avait plus rien à
faire.

Tout donner pour ne pas se sentir frustré


Lorsque j’ai reçu le deuxième courriel de la production, j’ai annoncé
à toute mon équipe, au beau milieu de l’open space: «On vient de se
faire jeter comme des malpropres par l’équipe de production de
Shark Tank, donc, on se met immédiatement en mode veste. Vous
connaissez le mode avion? C’est le même concept: vous arrêtez tout
ce que vous êtes en train de faire, on va tourner notre propre épisode
de Shark Tank et l’envoyer à cette dame pour la convaincre que nous
sommes faits pour ce projet incroyable.»
Mettant en stand-by nos dossiers en cours pour nous concentrer
uniquement sur ce projet, nous avons sorti notre matériel vidéo,
caméras, lumières, etc., et le graphiste a commencé à réfléchir à un
générique «Shark Tank version 10e arrondissement de Paris». En
une poignée d’heures, nous avons tourné et monté un épisode de
l’émission en expliquant les raisons pour lesquelles nous devions être
choisis pour coacher ces entrepreneurs. J’ai adressé la vidéo par
texto à la responsable de la production. Elle l’a lu. J’ai vu qu’elle
commençait à répondre – les petits points gris dansaient sur mon
téléphone. Puis plus rien. Vingt-quatre heures plus tard, toujours
rien.
C’était donc officiel, une vraie veste… Mais je me sentais tellement
mieux que la veille! Et toute mon équipe aussi. Nous avions mis
notre cœur et nos tripes dans cette vidéo; tout y était dans ce travail:
notre sens de l’humour, nos personnalités, notre ADN, tout. Ça nous
ressemblait vraiment. Si après avoir visionné cette vidéo, cette
femme n’était pas tentée par notre travail, si ce n’était pas en phase
avec ce qu’elle recherchait, cela voulait dire qu’il n’y avait plus rien à
faire. Nous ne ressentions pas de frustration parce que nous avions
tout donné. Nous n’étions pas en train de nous dire «et si nous
avions fait ci ou ça…». Par ailleurs, cela nous a permis de savoir que
nos valeurs n’étaient peut-être pas alignées. Il ne s’agissait pas d’un
bon match entre son projet et notre agence; après avoir vu cette
vidéo, si elle ne souhaitait pas travailler avec nous, c’est que nous
n’aurions rien fait de bien ensemble. Être convaincus de cela était
notre réconfort au milieu de ce grand moment d’échec, une véritable
consolation.
Être rejeté ne veut pas dire que vous êtes mauvais. Parfois, il s’agit
seulement de feeling ou de timing. Vous ne correspondez pas à la
demande à cet instant, parce que vous n’êtes pas en phase avec le
client.
Ma deuxième consolation, après cet échec, est d’avoir pu le vivre
avec l’ensemble de mon équipe, d’avoir trouvé du réconfort auprès
de ma famille du flop.

Le réconfort de la famille du flop


Le copain ou la copine du flop, la famille du flop (quand vous êtes
nombreux à échouer en même temps) ce sont ceux qui vous font la
promesse solennelle de vous encourager et de vous épauler chaque
fois que vous prenez une veste. Et cette partie de LTDLV est
tellement importante que nous avons créé le Manifeste de la veste,
un engagement contractuel à la hauteur de l’importance que revêt ce
rôle.
Vous vous demandez certainement pourquoi il est nécessaire de
célébrer vos vestes. Il y a trois raisons essentielles.
→ Donner la permission d’échouer à sa famille,
à ses enfants ou à son équipe
Pourquoi l’échec est-il à ce point stigmatisé? Je crois que c’est avant
tout parce qu’on préfère cacher les échecs, on ne les voit pas.
Souvenez-vous de Sheryl Sandberg qui disait «vous ne pouvez pas
être ce que vous ne pouvez pas voir»: avec les échecs, c’est la même
chose, ne pas les voir, c’est ne pas pouvoir parler de leurs vertus. Ray
Dalio, le plus riche et talentueux banquier d’affaires du monde,
explique dans son best-seller, Les principes du succès7 – je vous le
recommande vivement –, que s’il a aussi bien réussi c’est grâce à la
pratique de la transparence radicale dans son entreprise
Bridgewater. Selon lui, il est indispensable de dire la vérité, d’être
transparent dans toutes les situations. Quand une erreur est
commise, qu’un boulot est mal fait, que ce soit par un stagiaire
comme par le PDG, il faut le dire, parce que la douleur et la réflexion
qui en découlent engendrent le progrès. Le rejet et l’échec sont des
éléments fondamentaux de la construction du progrès.
Si en tant que dirigeant ou que parent vous ne parlez pas de
l’échec, vous refusez la possibilité d’échouer à votre équipe ou à vos
enfants, vous ne leur permettez pas de progresser. Parler
ouvertement de vos échecs à votre copine/copain ou famille du flop,
c’est leur montrer que vous – leur chef d’équipe, leur père, leur
mère… – n’êtes pas parfait mais que vous faites tout pour l’être. Les
actes sont bien plus efficaces que toutes les belles phrases, et vos
enfants ou vos collègues verront ainsi que le chemin de la réussite est
pavé d’échecs. Ce type de comportement engendre des salariés ou
des enfants qui ont confiance dans leur management, dans leur
famille, et qui savent que quoi qu’il arrive ils seront soutenus dans
leurs vestes, et que le plus important c’est d’avoir essayé. En outre,
plus les gens ont confiance plus ils sont capables de faire de grandes
choses – souvenez- vous de l’étude de Google sur la sécurité
psychologique dont nous avons parlé.

→ Se sentir mieux dans son travail


et dans sa vie en général
Le yoga du rire est devenu un élément fondamental de mon travail.
Pour être honnête, ce type d’activité n’est pas caractéristique de ma
personnalité ni de ce que j’aime en général. Je ne suis pas fan de
câlins, de peluches et d’arcs-en-ciel, je ne suis pas une maman
Calinours et je déteste emmener mes enfants à Disneyland. Mais
j’adore ce yoga parce qu’il incarne parfaitement l’un des mantras clés
de LTDLV: «agissez comme la personne que vous souhaitez
devenir».
Prendre des postures yogiques en riant sans raison et en ayant l’air
vraiment stupide fait un bien fou! Malgré ce que veulent bien croire
beaucoup de gens, c’est le corps qui influence l’esprit, et non
l’inverse. Alors si vous voulez changer de façon de penser, changez la
manière de vous comporter! Votre posture, votre façon d’être, c’est
fondamental dans LTDLV et dans votre confiance en vous. Pour
avoir le courage d’aller jusqu’au bout de vos rêves, c’est la même
chose. Si vous attendez que votre cerveau dise à votre corps que vous
avez confiance en vous, vous risquez d’attendre très longtemps et de
dépenser des fortunes en thérapies diverses et variées… En revanche,
agir comme si vous aviez confiance en vous, même si vous avez un
sentiment d’imposture, vous aidera automatiquement à vous sentir
plus confiant.
Pour Amy Cuddy, enseignante à Harvard, vos rêves peuvent
devenir réalité rien qu’en modifiant votre attitude corporelle. Elle
appelle ce concept le power posture: si vous prétendez être puissant,
il y a des chances pour que vous vous sentiez vraiment puissant. En
d’autres termes, faites semblant d’être fort pour le devenir!
Même si sa théorie a été remise en question à plusieurs reprises,
Amy Cuddy n’a pas cessé de revendiquer, étude après étude, ce que
LTDLV prouve aussi depuis longtemps: faire, c’est être, ou plutôt,
faire, c’est devenir. Des chercheurs ont même découvert que, dans un
groupe où il était demandé aux gens de résoudre des problèmes de
mathématiques, la personne qui se comportait avec le plus de
confiance était celle dont on accordait le plus de crédit aux réponses.
Et quand les scientifiques ont annoncé à leurs équipes que les
réponses de leur patron étaient fausses, ils ont continué à se fier à
cette personne tant elle continuait à agir avec confiance.
Si vous voulez être plus positif, comportez-vous de manière plus
positive. Si vous voulez être plus confiant, agissez de façon plus
confiante. Si vous voulez être moins affecté par le rejet et par ce que
les gens pensent de vous, agissez comme si ça ne vous faisait pas
grand-chose d’être rejeté. Et le principe du copain ou de la copine du
flop, de la famille du flop, c’est de le faire en groupe. Plus on est
nombreux dans l’équipe du flop, plus on peut rire de soi en toute
sécurité.
Le yoga du rire, c’est une pratique du «rire sans raison». Comme le
corps ne sait pas faire la différence entre le vrai rire et le rire factice,
il libère dans les deux cas de la sérotonine (un des
neurotransmetteurs qui influent sur votre humeur), qui vous fait
vous sentir bien. Donc, quand vous échouez, si vous riez, si vous vous
encouragez et que vous célébrez cette veste, vous agissez comme si
cela ne vous faisait pas mal. Si vous agissez comme quelqu’un de
résilient, vous deviendrez résilient: faites comme si cela ne vous
affectait pas – «même pas mal». Quelque chose qui fait si mal à tout
le monde que personne n’essaiera de le faire – se faire rejeter – est
quelque chose qui vous fait rire. Au bureau, nous avons même une
chanson pour célébrer nos vestes: «Very Good, Very Good, Yeah8!»

→ Pratiquer LTDLV plus longtemps


et avec de meilleurs résultats
Les équipes ou les familles qui pratiquent LTDLV le font mieux que
ceux qui la pratiquent en solitaire. Ils se soutiennent et s’encouragent
mutuellement quand ils vivent un rejet douloureux, ils parlent de
leurs échecs et de ce qu’ils en ont appris. Cela les soude et les
renforce dans leurs liens car la vulnérabilité rapproche les gens.
Selon Brené Brown, que j’ai déjà citée, «la vulnérabilité est au
cœur de la honte, de la peur et de la lutte pour notre dignité, mais
elle semble être également le berceau de la joie, de la créativité, de
l’amour et d’un sentiment d’appartenance». N’est-ce pas exactement
ce que nous souhaitons dans nos équipes et dans nos familles? De la
joie, de l’appartenance et de la créativité? Et de l’amour, aussi. Oui,
j’ose le dire: de l’amour au sein de nos équipes de travail et entre
collègues, c’est possible aussi! Pourtant, j’ai encore l’impression qu’il
y a trop de monde qui font un blocage quand il s’agit de mélanger vie
personnelle et vie professionnelle. Comme si ce n’était pas très «pro»
d’évoquer sa vie privée au bureau… Je vais faire ici une petite
parenthèse à ce propos, si vous le permettez.

De la vulnérabilité naît la confiance


À l’occasion d’une formation que j’ai suivie récemment, le coach nous
a décrit une discussion qu’il avait eue avec un jeune collègue. C’était
son premier jour dans son nouvel emploi et ils prenaient un café
ensemble. Le jeune lui posait des questions: «Quel est ton travail,
ici? Dans quel service es-tu? depuis quand? etc.» Le coach lui
répondait avec plaisir jusqu’au moment où il a demandé:
«Tu es marié? Tu as des enfants?
— Pourquoi tu me demandes ça?
— Oh, juste par curiosité. J’aime bien savoir des choses sur les gens
avec qui je travaille, et j’ai hâte de rencontrer tout le monde dans
l’équipe et d’en apprendre un peu plus sur chacun.
— Eh bien, pas moi. Ma vie personnelle, c’est ma vie personnelle.
— Oh, pardon, a répondu l’autre, légèrement surpris, je me
demandais simplement si tu avais une compagne et si elle travaillait
dans le même domaine que nous.
— Eh bien, plus tu m’en demanderas, moins je t’en dirai.»
Cette anecdote m’a réellement surprise. Pourquoi élever la Grande
Muraille de Chine entre sphère professionnelle et vie privée? Tout le
monde met une sorte de masque chaque matin pour aller au boulot,
bien sûr, et il n’est pas question de remettre ça en cause. Je n’arrive
pas en open space en bobettes et je n’étale pas les détails de ma vie
privée, mais je suis toujours la mère de mes trois enfants quand je
franchis la porte de mon bureau! Vous n’arrêtez pas d’être fan des
Canadiens ou collectionneur de BD quand vous êtes sur votre lieu de
travail. Et vous continuez d’être gentil ou empathique si vous êtes
comme ça chez vous. Plus une équipe connaît les situations
personnelles des uns et des autres, plus elle est performante, car
chacun se fait confiance mutuellement. Souvenez-vous de notre
étude Google – je l’aime vraiment, cette étude –, qui dit que la
confiance et la sécurité psychologique dans une équipe, la possibilité
d’être soi-même au travail, sont l’un des indicateurs les plus
importants d’une équipe performante.
Malene Rydahl est l’une de mes autrices et oratrices préférées. Elle
est une femme brillante qui a écrit plusieurs livres remarquables
dans lesquels elle donne sa recette du bonheur9. Elle nous enseigne
que les sociétés les plus heureuses du monde sont celles où les gens
ont la possibilité d’être eux-mêmes. C’est l’un des ingrédients
indispensables pour être heureux dans sa vie. N’est-ce pas logique de
pouvoir être vraiment soi-même sur son lieu de travail?
Je suis extravertie, autoritaire, bruyante, je lance des idées folles
toutes les cinq minutes et je chante lorsque je suis heureuse. Lorsque
je travaillais dans un petit cabinet tristounet où tout était beige du
sol au plafond les gens trouvaient que je riais trop fort… On me disait
régulièrement: «Vous ne pouvez pas arrêter de rigoler pendant vos
formations et lorsque nous sommes en réunion, Annabelle, s’il vous
plaît? Quand des clients viennent ici, ne parlez pas avec eux, c’est le
rôle de la responsable clientèle, vous, vous devez rester dans votre
bureau.» Je ne comprenais pas comment on pouvait me reprocher
d’être moi-même. C’est moi qui avais passé l’entretien d’embauche et
qui avais été engagée, pas une autre personne. Je n’allais pas me
transformer en quelqu’un d’autre, devenir «beige» sur commande.
On m’avait engagée pour ma créativité et ma personnalité, mon
aptitude à m’exprimer. Faire l’inverse, cacher ce qui fait de moi celle
que je suis n’allait pas rendre service à la société. Sans compter que
ça me rendait très malheureuse.
Je suis une meilleure patronne et entrepreneuse parce que je
connais les situations personnelles de chacun de mes employés.
Savoir que mon associée Alexandra, par exemple, est mère de trois
enfants et qu’elle est en train de faire rénover entièrement son
appartement me permet de comprendre pourquoi elle quitte le
bureau en pleine journée et pourquoi elle se reconnecte sur sa boîte
courriel chaque soir après 23 heures. Savoir que Kelly est très
engagée dans la protection de l’environnement et que ça la rend folle
quand je ne recycle pas mes papiers et mes bouteilles en plastique
fait de moi une meilleure collègue. Quand ma stagiaire se sent
suffisamment à l’aise pour m’avouer qu’elle a des petits soucis de
confiance en elle et qu’elle est intimidée à l’idée de devoir faire une
formation chez Dior la semaine prochaine, ça me permet d’être une
meilleure dirigeante parce que je vais lui faire la surprise de
demander à mon maquilleur et à mon coiffeur de venir au bureau la
rendre encore plus belle avant son rendez-vous; je vais même lui
prêter un carré Hermès qui lui servira à booster sa confiance en elle
pour son baptême du feu chez notre client.
Être soi-même au travail, à 100% soi-même, rend plus heureux et
plus performant en équipe. Montrez votre vulnérabilité et trouvez
toutes les raisons d’être gentil! Je ne comprends pas pourquoi
certaines entreprises résistent autant sur ce point. Et si, comme je
l’ai souvent entendu dire par mes collègues et mes amis, vous avez
peur de dévoiler votre vulnérabilité parce que «vos collègues
risquent de l’utiliser contre vous», dites-vous que ceux-là ne méritent
pas d’avoir une place dans votre vie.
Vous n’allez tout de même pas renoncer à faire confiance aux gens,
à être généreux et gentil, à être vous-même au bureau parce que vous
avez des collègues cons? C’est pareil avec votre cousin con, votre
belle-mère conne ou votre beau-frère con: ce que vous avez de mieux
à faire, c’est de fuir ces gens toxiques qui peuvent vous détruire à
petit feu comme s’ils étaient d’affreux cancers. J’ai bien conscience
de la violence de mes mots, mais ce que je dis n’est autre que la
vérité. S’il n’existe pas encore de vaccins contre le cancer, il existe des
traitements pour en venir à bout ou essayer d’en venir à bout. Les
personnes touchées par ce fléau le savent bien, il n’y a que deux
solutions pour venir à bout des cancers: ignorer la tumeur ou
l’éliminer. Parfois, il faut les deux.
Avec les cons, c’est pareil. La première solution, c’est de les ignorer
par le biais de la gentillesse: vous ne le savez peut-être pas, mais
pour eux, la gentillesse a un effet radioactif. Quand ils sont
méchants, soyez gentil, quand ils ont des attitudes odieuses ou qu’ils
vous font des coups pendables, répondez par la gentillesse, enfilez
votre costume de monseigneur Bienvenu, ce juste dépeint par Victor
Hugo. Vous vous souvenez de la scène des chandeliers dans Les
Misérables? Pour protéger Jean Valjean, qu’il a hébergé à sa sortie
du bagne et qui lui a volé des couverts en argent, monseigneur
Bienvenu fait mine, devant les gendarmes, de lui avoir donné les
couverts mais aussi les chandeliers, que Jean Valjean aurait oubliés…
Si le prêtre agit ainsi, c’est parce qu’il sait que si le voleur a
transgressé les règles, c’est qu’il avait vraiment besoin de ces
couverts. C’est la même chose pour tous ces cons qui vous gâchent le
paysage: s’ils ont besoin d’être si méchants avec vous, c’est parce
qu’ils souffrent d’un manque de joie dans leur vie professionnelle ou
personnelle. Ou dans les deux. Alors, offrez-leur des chandeliers!
Soyez gentil avec eux, souriez en leur présence, dites-leur merci.
Faites-leur des compliments – s’il y en a un sincère qui vous vient à
l’esprit.
Montrez-vous vulnérable, même si vous savez que certains ne
respecteront pas cette vulnérabilité et qu’ils essaieront de l’utiliser
contre vous. Ayez toujours en tête que ce comportement en dit plus
sur eux que sur vous. Avec ceux qui respectent votre vulnérabilité et
qui font la même chose vis-à-vis de vous, vous allez pouvoir créer des
liens qui vous rendront plus productif et plus heureux dans votre vie.
Que ce soit au sein de votre famille, de vos amis ou de vos collègues,
soyez vous-même à 100% et vous serez plus heureux.
Si vous agissez ainsi pendant plusieurs semaines et que la tumeur
ne se résorbe pas, il faudra passer à la deuxième forme de
traitement: la supprimer.
Fin de la parenthèse.

Se soutenir dans l’adversité,


une vraie dynamique de réussite
Maintenant que vous savez pourquoi il est si important d’avoir un
copain ou une copine du flop, que vous savez que ça aide à prendre
confiance en soi et que ça permet de meilleures relations entre
collègues comme en famille quand il est question d’échec ou de rejet,
voici concrètement comment s’appuyer sur sa famille du flop.
Alexandra, mon associée, est ma workwife. Ce mot inventé de
toutes pièces peut se traduire littéralement par «conjointe de
bureau» et désigne la personne avec qui vous êtes tellement en
osmose sur le plan professionnel, avec qui vous adorez partager des
projets, avec qui tout fonctionne si bien que vous pourriez être
«marié professionnellement» avec elle. Parce que nous nous
entendons très bien, que nous aimons travailler ensemble et que
nous avons de l’admiration l’une pour l’autre, nous nous sommes
engagées à nous soutenir et à nous encourager dans nos carrières
respectives pour avancer ensemble. Comme dans le cadre d’un vrai
mariage, nous nous sommes fait la promesse d’être fidèles et loyales,
de ne jamais nous trahir mutuellement quelles que soient nos
situations professionnelles. Pour le meilleur et pour le pire.
Comme un vrai couple, nous dînons ensemble – le souper est
quand même réservé à nos vrais conjoints – et nous nous donnons
régulièrement des rencards. Nous avons même organisé une sorte de
lune de miel professionnelle! Une fois par an, nous partons toutes les
deux en learning expedition. Il y a deux ans, nous sommes allées en
Chine, l’année dernière, au Rwanda. Ces séjours sont pour nous
l’occasion de suivre plein de formations et de rencontrer des
personnes inspirantes qui nous apprennent de nouveaux trucs
incroyables que nous n’aurions jamais pu découvrir en restant dans
nos vies «normales». Apprendre des choses avec votre workwife,
c’est l’équivalent de faire l’amour avec votre partenaire: le sexe, dans
le mariage professionnel, est remplacé par l’apprentissage.
Bref, Alexandra est l’une des personnes les plus importantes de ma
famille du flop. Quand j’essaie de démarcher pour la trente-
cinquième fois tel ou tel client, en m’adressant chaque fois à un
nouvel interlocuteur, de la formation au développement en passant
par la communication, que je lui envoie un gif animé – hyper-sympa
– pour lui dire à quel point on aimerait l’avoir pour client et que cette
personne me répond qu’elle n’est pas intéressée – ou, pire, ne me
répond pas –, Alexandra est toujours la première à partager cette
veste avec moi. Malgré son tempérament réservé, elle va quand
même me féliciter chaleureusement pour cette merveilleuse veste.
Elle va même m’appeler pour me dire de vive voix: «Bravo, tu es
vraiment la reine de la veste. Continue à te planter, tu es parfaite.»
Si c’est une veste qui m’a fait particulièrement mal et qui m’a
découragée, je vais ensuite la partager avec toute mon équipe de
vente, Thomas, Kelly et Louis. Thomas sera le premier à répondre –
parce qu’il est toujours le premier à répondre – sur WhatsApp par
des petits mots d’encouragement, Kelly va m’envoyer des émojis qui
applaudissent, et Louis juste un mot parce qu’il est timide (regardez
ce que ça donne page 119!).
Puis ce sera au tour de l’équipe création de m’encourager. Joanne
va répondre par des émojis mais ce sera toujours la dernière parce
qu’elle passe des heures à se prendre la tête pour savoir quel émoji
envoyer: celui qui rit avec les larmes ou sans les larmes? Comment
choisir? Et Camille va trouver une citation incroyable ou une vidéo
inédite de Beyoncé qui danse; ses messages girl power et pleins
d’humour sont de plus en plus drôles au fil des vestes que je prends!
Avec une telle famille du flop, comment voulez-vous avoir
l’impression d’être une ratée? Comment se sentir mauvais, nul,
honteux, avec des meneuses de claques qui vous fêtent avec autant
d’affection et de force? C’est simple, vous ne pouvez pas. C’est
impossible.
Vous êtes prêts maintenant à découvrir la dernière étape de
LTDLV, la plus drôle de cette méthode. Je vous préviens, c’est aussi
la plus gênante et la plus bizarre: vous allez devoir accepter de vous
ridiculiser.
Chapitre six

Le ridicule ne tue pas

Si vous lisez ces lignes, c’est que je ne vous ai pas perdus en route.
Génial! Ça veut dire que vous avez compris, comme tous ceux qui
pratiquent LTDLV, que rien d’intéressant ne se passe dans sa zone de
confort. Ça veut dire aussi que vous voulez savoir comment pratiquer
la troisième et dernière étape de LTDLV. Vous allez voir, c’est très
simple: il suffit de faire n’importe quoi, de vous ridiculiser. Et en
public, s’il vous plaît. C’est ce que j’appelle pratiquer «l’auto-
embarras», dernière étape pour adopter pleinement les
superpouvoirs du rejet afin d’aller au bout de vos ambitions.
Cette étape de LTDLV est importante car si votre quota de vestes
vous fait sortir de votre grotte (ou canapé, version moderne), l’auto-
embarras vous assure de ne plus y retourner. Grâce à cette étape,
personne ne pourra plus «vous faire sentir inférieur sans votre
consentement». Et ce n’est pas moi, Annabelle Roberts, qui vous le
dis, c’est Eleonor Roosevelt. Cette fameuse citation nous rappelle que
la gêne, le doute, l’embarras, l’hésitation ou la peur qui peuvent
freiner notre ambition ou nous empêcher d’accomplir nos objectifs
ne sont que des limites que nous nous fixons à nous-mêmes. Si nous
entraînons notre muscle de la veste en nous ridiculisant, nous
supprimons aux autres tout pouvoir de nous nuire.

Rougir est l’expression la plus humaine


Se fixer un quota de vestes à remplir, c’est allumer un feu sous nos
fesses. Trouver sa copine du flop, c’est s’assurer d’avoir moins mal
aux fesses quand on se brûle. Pratiquer l’auto-embarras, c’est
s’entraîner à avoir des fesses qui résistent au feu.
Car l’embarras, qu’est-ce que c’est? Pour moi, c’est Charles Darwin
qui l’explique le mieux. Selon lui, «rougir est l’expression la plus
étrange et la plus humaine» devant le sourire et même le rire.
L’humain est en effet le seul être du règne animal à rougir sous le
coup d’une émotion. (Du visage, en tout cas, parce qu’il paraît que
certains singes rougissent du postérieur… mais je ne suis pas là pour
vous livrer les secrets étonnants des babouins!) Ce réflexe provient
d’une propension à nous soucier de ce que les autres pensent de
nous…
Mais rougir peut être une opportunité si vous décidez d’inviter les
autres, de votre plein gré, à rire de vous. C’est un peu étrange, je
l’avoue, de vous forcer à vous ridiculiser, mais je vous promets que ça
va vous aider à sortir de votre zone de confort. Parce que c’est votre
propre avis qui compte avant tout, pas celui des autres. Et pour ça,
vous allez devoir vous entraîner.
Alors comment créer des situations pour s’autoridiculiser? Une
étude très sérieuse menée en Californie explique que l’embarras
prend sa source dans un espace bien défini du cerveau humain et que
«des émotions conscientes telles que la gêne se produisent lorsque
les actions entreprises ne répondent pas aux attentes sociales
essentielles10». Pour apprendre à dépasser cette gêne, les chercheurs
proposent comme exercice aux participants qui se sont soumis à
cette expérience de chanter des hits devant des caméras puis de se
regarder (et surtout de s’entendre) sur la vidéo.
Je ne connaissais pas cette étude en 2016 quand j’ai ajouté l’étape
de l’auto-embarras à LTDLV, mais je cherchais comment entraîner
notre «muscle de la veste». C’est en entendant la déesse de
l’entrepreneuriat, Sara Blakely, s’exprimer sur le sujet que j’ai
compris que l’auto- embarras était la clé de cette troisième étape.
Elle dit à ce propos: «Il m’arrive de me mettre à chanter dans
l’ascenseur, comme ça, sans aucune raison, au milieu d’une foule de
gens. Mon cœur se met alors à battre à tout rompre et tout le monde
est gêné. C’est vraiment embarrassant de se donner en spectacle!
Mais s’autoriser à faire tout et n’importe quoi, à se ridiculiser
gratuitement, c’est la clé du succès de votre entreprise. Si trop de
temps s’écoule sans que je m’auto-embarrasse, je me dis “je dois faire
quelque chose de gênant” pour que les autres perdent leur pouvoir
sur moi11.»
J’ai donc réfléchi, avec mon équipe, à toutes les façons possibles de
se ridiculiser. Mais pas n’importe comment. Pour que nous soyons
pris au sérieux dans notre façon de nous ridiculiser, pour que LTDLV
ne se décrédibilise pas, il nous fallait une «méthode sérieuse» – c’est
paradoxal, je vous l’accorde. Un peu comme ce mouvement new-
yorkais surprenant lancé en 2002, le «No Pants Subway Ride», qui
invite à sortir sans pantalon, en plein mois de janvier, en gardant
bien sûr son sérieux et sa dignité: si vous sortez en bobettes un autre
jour de l’année, sans être encadré par ce mouvement, on va vous
prendre pour un fou et vous arrêter sans doute pour attentat à la
pudeur! Alors j’ai immédiatement pensé à une vidéo qu’on nous avait
montrée à l’université et qui était ce que j’avais vu de plus ridicule de
toute ma vie. Regardez sur Youtube cet homme qui pratique le yoga
du rire12, vous allez comprendre. En repensant à cette vidéo, je me
suis dit que c’était exactement ce que nous allions faire pour
développer notre capacité d’encaisser la gêne et l’embarras.

Le yoga du rire, la preuve


que le ridicule ne tue pas
Quand j’ai trouvé ce concept, je dois vous avouer que je traversais
une période compliquée de ma vie professionnelle. À l’agence, nous
étions en plein divorce avec l’une de nos associées. Et, croyez-moi, je
n’utilise pas ce terme à la légère, j’ai vécu personnellement un «vrai»
divorce, la fin d’un mariage romantique, et je sais de quoi je parle.
Dans les deux cas, il s’agit de séparations pénibles et violentes qui
vous font perdre confiance et vous laissent exsangue.
Une fois cette ex-associée définitivement partie et alors qu’elle
tentait de nous laminer sur le plan juridique, nous étions tous à bout
de force. Comme trois rescapés d’un naufrage éprouvant, nous
avions vraiment besoin de rire…
Le yoga du rire tombait donc à point nommé. Ni une ni deux, nous
avons pris trois billets d’avion pour l’Inde, nous avons bouclé nos
valises et nous sommes partis à Bangalore, pour nous plonger dans le
ridicule pendant une semaine en immersion totale dans une «école
de la sagesse ancienne», The School of Ancient Wisdom, afin d’y
obtenir notre certificat de «yogis du rire».
Enceinte de près de huit mois à l’époque, il m’a fallu obtenir une
autorisation spéciale d’Air France pour voyager. Mais la dérogation
la plus compliquée à obtenir fut celle de mon mari… Je vais vous
raconter comment je l’ai convaincu de l’urgence absolue de partir
pour ce pays en voie de développement à six semaines de mon
accouchement – si, si, je vous promets, c’est pertinent dans ce livre!
Pas de bébé à Bombay!
Je suis donc enceinte de trente-quatre semaines. Mon adorable mari
sait très bien que ma société traverse une tempête avec le départ de
notre associée. Il sait à quel point LTDLV me tient à cœur et que je
ne cesse de chercher de nouveaux moyens de développer mon
entreprise. Mais il sait aussi que ma troisième grossesse est difficile
et qu’elle m’épuise. Certains jours, je ne suis même pas capable de
monter les six marches qui mènent chez nous et il est obligé de venir
me chercher pour m’aider à les gravir péniblement. Nina est le plus
gros bébé que j’aie jamais porté (née trois semaines avant terme, elle
pesait 4 kg…) et comme elle appuie sur mon nerf sciatique, je ne
peux pas marcher plus de vingt mètres.
Ce soir d’avril 2017, alors qu’il vient gentiment m’aider à monter
jusqu’à notre appartement, je lui annonce que j’ai quelque chose à lui
demander. Il connaît ce ton, il sait déjà que ce sera complètement
fou. Il fronce les sourcils, sa bouche grimace, et il me scrute en
attendant que je dévoile mon projet: «J’ai trouvé le moyen de
ressouder mon équipe, de retrouver la confiance et la fidélité qui
nous caractérisait avant cette histoire, et d’aider nos clients, par la
même occasion, à pratiquer l’étape la plus importante de LTDLV.
Mais pour ça, il faut que j’aille à Bangalore, en Inde.»
Il a trouvé ça drôle. Il s’attendait à un truc bien pire de ma part…
C’est quand je lui ai dit que je partais six jours plus tard qu’il a
compris la folie de ma demande. Son sourire a disparu et son visage
a changé de couleur.
Depuis que nous sommes mariés, mon mari n’a essayé que deux
fois de «m’interdire» quelque chose. La première, c’était de conduire
ma mobylette alors que j’étais enceinte; j’ai accepté après moult
discussions de me déplacer en Uber les deux derniers mois de
grossesse. La deuxième, c’était donc de me rendre à l’autre bout du
monde juste avant d’accoucher. «Non, m’a-t-il dit, là, tu dépasses les
bornes.» Il ne m’avait jamais parlé comme ça! Il faut dire que mon
bébé précédent était quasiment né chez l’un de mes clients… À
quelques heures près, Daphné aurait pu naître au 26e étage d’une
tour à bureaux. J’avais dû partir à l’hôpital sous une escorte de
policiers à moto. Il avait gardé un mauvais souvenir de cette
expérience…
«Je t’interdis de partir à l’autre bout du monde à huit mois de
grossesse! Il n’y a aucune urgence dans cette affaire, Annabelle. Tu
restes ici.» Cédric sait bien que tout est une urgence pour moi. C’est
même l’une de mes marques de fabrique: dès que je décide de faire
quelque chose, chaque seconde qui n’y est pas consacrée est un échec
total.
J’étais absolument convaincue que l’auto-embarras était la clef de
voûte de toutes mes recherches. Je savais que si je réussissais à
comprendre comment m’auto- embarrasser régulièrement, de
manière méthodique et encadrée, je développerais une force me
permettant de ne plus souffrir face à des gens qui souhaiteraient me
faire me sentir ridicule ou inférieure. En devenant une championne
du ridicule, j’annulerais du même coup la possibilité de qui que ce
soit de me faire souffrir de mon propre embarras. À moi les vestes
indolores!
Cette douleur extrême que j’avais ressentie des années auparavant
dans ma buanderie, lorsque Chanel m’avait claqué la porte au nez, je
la ressentais presque chaque fois que je prenais une veste, même si
elle était un peu moins violente au fil du temps et que ma copine du
flop m’aidait à la surmonter.
Comme j’avais enfin la preuve que notre cerveau anticipait ou
ressentait les vestes exactement comme une douleur physique, je
comprenais pourquoi mes équipes ne pratiquaient toujours pas
LTDLV jusqu’au bout et de manière vraiment efficace. Et comme
j’allais m’absenter trois mois pour profiter de mon nouveau-né – je
ne m’étais pas accordé de congé pour les deux premiers –, j’avais
besoin de savoir que mon équipe allait continuer à développer les
ventes, à faire parler de nous dans la presse, à négocier dur et à
recruter. J’avais besoin qu’ils pratiquent LTDLV à fond, pas sur la
pointe des pieds. Et j’étais persuadée que cette troisième étape allait
tout changer!
Donc, apprendre le yoga du rire, c’était hyper- important. Et
absolument urgent. Après le divorce professionnel que nous venions
de traverser, il fallait que nous partions ensemble, que nous nous
sentions vulnérables ensemble, que nous riions ensemble pour
retrouver la confiance que nous avions perdue.
J’ai expliqué tout ça à mon mari. Après un moment de réflexion, il
a semblé comprendre ma «logique» tordue, et m’a laissée partir à
condition que je loge dans le meilleur hôtel de la ville: les conditions
rêvées!

Bienvenue à l’école de la sagesse ancienne


Nous voilà donc partis en Inde. À l’aller, j’ai passé une grande partie
du voyage en fauteuil roulant, et je ne me souviens pas m’être sentie
plus mal à l’aise de toute ma vie que dans ce siège de la classe
économique qui m’a torturée de Paris à Bangalore. Mon nerf
sciatique ressemblait à un fil électrique sous tension reliant mon dos
à ma cheville qui envoyait des décharges électriques à mon système
nerveux à tout bout de champ. Je n’ai jamais été plus impatiente de
descendre d’un avion.
Tous ceux qui ont voyagé en Inde pourront vous parler du choc
qu’ils ont vécu à leur première descente d’avion. Rien ne vous
prépare vraiment à cela. Il y a d’abord la chaleur. J’ai l’habitude de
devoir m’adapter à la chaleur, mais enceinte, j’ai ressenti de la
chaleur dans des endroits de mon corps où ce n’était encore jamais
arrivé. Saviez-vous que l’intérieur de vos oreilles pouvait transpirer?
En sortant de l’avion, la chaleur nous a frappés comme une gifle peut
vous faire exploser les tympans. Quant à la climatisation de l’hôtel,
elle nous faisait l’effet d’une avalanche en pleine jungle chaque fois
que la porte d’entrée s’ouvrait.
Mais ce qui m’a le plus marquée, ce sont les odeurs. Seules les
lectrices qui ont été enceintes peuvent comprendre ce que
représentent les odeurs pendant une grossesse. Dire qu’elles sont
décuplées n’est pas suffisant. Partout autour de nous, les rues de
Bangalore étaient imprégnées de tout et de n’importe quoi. Des
odeurs parfois agréables, parfois douteuses, et toutes amplifiées par
la chaleur et l’humidité. Les épices, les produits chimiques, la
pollution, le smog, la nourriture, la sueur, les déjections, les eaux
usées, les gaz d’échappement… je sentais tout cela comme je n’aurais
jamais cru pouvoir le faire.
Ce qui m’a surprise ensuite, c’est qu’il y avait des gens partout.
Absolument partout. En arrivant à Paris, depuis mon Canada natal,
je me souviens d’avoir déjà eu cette sensation. Après tout, ma
province au Canada est deux fois plus grande que la France et
compte 5% de sa population! C’est à Paris que j’avais vu le plus grand
nombre de personnes au même endroit. Mais en Inde, ils sont mille
fois plus nombreux. Ça grouillait de monde. Les gens faisaient la
sieste sur le trottoir, les routes étaient saturées de voitures et de
camionnettes et les minuscules espaces disponibles étaient remplis
de motos et de scooters. Les klaxons étaient assourdissants et
semblaient constituer une forme d’expression personnelle plutôt que
de signaler un danger. Partout où l’on posait les yeux, il y avait des
bâtiments, des gens, du mouvement, quelque chose ou quelqu’un à
regarder.
Les gens n’avaient pas besoin de magasins pour vendre, ils le
faisaient là où ils se trouvaient. Ils n’avaient pas besoin de cafés pour
boire un verre avec leurs amis, ils s’installaient simplement là où ils
pouvaient mettre des chaises et utiliser n’importe quoi comme table.
Au milieu de la cohue.
C’était un régal pour les yeux, les oreilles et tous les sens! La vie
nous offre si peu d’opportunités d’être étonnés que j’aurais dû
savourer ce dépaysement, mais c’était trop pour moi, j’étais comme
submergée. Quand nous sommes arrivés à l’école de la sagesse
ancienne, je commençais à me demander si mon mari n’avait pas eu
raison de vouloir me retenir. Et si j’avais eu les yeux plus gros que le
ventre? J’aurais peut-être dû rester à la maison…
Lorsque les portes se sont ouvertes sur ce qui serait notre école de
yoga du rire pour les six prochains jours, j’ai eu l’impression d’arriver
au paradis. Des cascades de fleurs couvraient les murs des bâtiments
dans un havre de paix et de nature. Des fontaines émettaient de doux
clapotis au cœur des jardins magnifiquement entretenus traversés
par des allées abritées du soleil par des manguiers et des haies en
fleurs menant à «l’école» elle-même. Fatigués de notre voyage, nous
avons été accueillis par la femme de notre yogi qui nous a mis autour
du cou un collier luxuriant de fleurs blanches parfumées qui
descendait jusqu’au nombril. C’était aussi gros qu’une guirlande de
Noël! Elle a trempé son index dans une poudre rouge vif et a dessiné
sur notre front un signe de bienvenue. Quand elle a dit Namaste,
d’une voix douce et soyeuse, en un instant je suis passée de l’univers
menaçant de Slumdog Millionaire à celui plus apaisant de Mange,
prie, aime. J’ai su que cette semaine serait magnifique.
Et ce fut encore mieux que ça. Le docteur Madan Kataria est un
médecin généraliste de Bombay qui développe le yoga du rire depuis
1995. Il nous a accueillis avec l’un des chants fondamentaux du yoga
du rire. En tapant dans ses mains, le visage traversé par un grand
sourire, il a commencé à chanter «Ho ho, ha ha ha! Ho ho, ha ha ha!
Ho ho, ha ha ha! Ho ho, ha ha ha! Very good! Very good! Yeah!» Puis
il a levé ses mains vers le ciel et il est parti dans un fou rire
hystérique. Il s’est arrêté d’un coup et nous a tous observés.
Alexandra et moi nous sommes regardées, les yeux écarquillés.
Personne autour de nous ne semblait comprendre ce qui se passait.
C’était la chose la plus ridicule que j’aie jamais vu faire un adulte. Le
docteur a regardé chaque personne dans la pièce, en silence. Il avait
l’air si calme et confiant alors que nous le regardions tous comme s’il
était fou… «Bienvenue», nous a-t-il dit, d’une voix posée qui a
résonné dans toute la pièce. Un instant auparavant, il chantait et
applaudissait comme un enfant de quatre ans, dans une sorte de
culte sectaire bizarre, puis avait éclaté de rire sans raison comme le
Joker de Batman; maintenant il nous fixait avec une puissance
absolue et une sérénité exceptionnelle. À ce moment-là, j’ai su que
j’étais exactement où je devais être.
Pendant une semaine, on a appris des chants, des exercices,
l’histoire, les bienfaits et les vertus du yoga du rire. Avec mes deux
associés, on a ri à en pleurer – heureusement que j’avais rééduqué
mon périnée avec soin lors de mes précédentes grossesses… On s’est
roulés par terre en riant, on a joué, on a chanté, on a raconté des
blagues, on a éclaté de rire, on a pleuré, mais on a surtout passé une
semaine à apprendre le savoir-faire et la méthode d’un expert en
ridicule. Cet homme a passé près de vingt-cinq ans à étudier les
effets du yoga du rire sur la créativité, la productivité et, plus
important encore, la confiance en soi. Est-ce que le yoga du rire peut
aider ceux qui pratiquent LTDLV à être meilleurs? Peut-il les aider à
surmonter leurs hésitations à remplir leurs quotas de vestes et à
enfin oser pleinement? C’est ce qu’on allait découvrir.
Jour après jour, je comprenais comment le yoga du rire allait
prendre une place importante dans la culture de notre entreprise,
mais je constatais surtout que rire tous les jours, sans me préoccuper
de ce que pensaient les autres, améliorait mon état général, ma santé
physique et mon mental.
Après quatre jours de yoga du rire, je marchais de l’hôtel à l’école,
au marché, aux temples et au restaurant chaque soir, sans avoir
besoin de fauteuil roulant ni d’aucune aide. Alexandra, James et moi
avons ri du matin au soir pendant toute une semaine. Tout était plus
drôle. La vie était plus joyeuse. Le docteur Kataria nous avait promis
que le rire et le bonheur étaient un choix, et nous pouvions déjà le
constater. Notre confiance et nos rapports guérissaient rapidement
et nous ne nous étions jamais sentis plus heureux, plus radieux ni
plus positifs.
À notre retour, nous étions pleins d’énergie et d’idées pour
développer nos titres de «yogis du rire certifiés». Notre pari de partir
en Inde allait porter ses fruits, nous en étions sûrs, car nous avions
découvert une méthode fantastique pour pratiquer pleinement
l’autodérision. Quant à moi, je rentrais sur mes deux jambes et en
pleine forme!

Rire de soi pour ne plus jamais


se sentir ridicule
Le docteur Kataria explique que c’est dans les moments les plus durs
qu’il faut rire le plus. Et il a raison. C’est pour ça que dans ma famille
du flop, en plus des petits mots, des gifs amusants et des émojis
encourageants que nous envoyons lorsque nous célébrons une veste,
nous utilisons également le yoga du rire. Pour le docteur Kataria,
«incarner une émotion permet de créer la véritable émotion dans
votre cerveau», et j’adhère à 100% à son discours.
Grâce à notre formation, j’ai retenu trois principes du yoga du rire
pour aider notre équipe et nos clients à être plus audacieux et à
développer des opportunités en pratiquant LTDLV.
1. Si le corps influence l’esprit, comme le dit le docteur Kataria (et
c’est vraiment ce que nous avons ressenti), le yoga du rire peut être
utilisé pour générer de la positivité à la place de la peur du ridicule et
du rejet.
2. Pratiquer le yoga du rire en face des gens dont vous craignez le
jugement leur enlève tout pouvoir de vous juger.
3. Le yoga du rire vous oblige à vous sentir à l’aise avec le ridicule.
Rire sans raison est si bête et vous donne l’air tellement idiot que
vous êtes obligé de l’assumer! Vous ressentez la gêne mais vous le
faites quand même. Vous allez développer votre aptitude à être
performant alors que vous vous sentez ridicule et que vous sortez de
votre zone de confort.
Avec tout ça, remplir votre quota de vestes devient tellement plus
facile!
J’ai demandé au docteur Kataria de bien vouloir participer à ce
livre en répondant à quelques questions. Il a eu la gentillesse de
prendre un peu de son temps pour le faire. Nous nous sommes donc
connectés via Skype et le yogi du rire m’a raconté son histoire. Je
l’avais déjà entendue, mais ça m’a beaucoup touchée qu’il prenne le
temps de me parler alors que ses journées sont extrêmement
chargées. Mais comme l’auto- embarras est peut-être l’étape la plus
importante de la pratique de LTDLV, j’ai pensé que vous deviez
absolument connaître cet homme incroyable et sa philosophie de
changement de vie. Voici ce qu’il dit.
«Avant de développer le yoga du rire, j’étais rédacteur en chef d’un
magazine de santé et médecin à Mumbai. Rien n’était drôle dans ce
magazine et ma vie était très stressante. Over stressante. Pour
comprendre comment se détendre, j’ai fait des recherches et
commencé à écrire des articles sur le stress. Je proposais des
méthodes dans le magazine et les testais moi-même. En mars 1995,
en préparant un article, “Le rire est la meilleure médecine”, j’ai
découvert que le rire était un déstressant instantané et formidable.
Votre stress disparaît lorsque vous riez. Ce fut comme un déclic dans
ma tête et j’ai approfondi mes recherches sur les avantages du rire et
la capacité qu’il a de faire baisser le stress.
«Prenant conscience que le rire ne faisait pas partie de notre vie
quotidienne, je me suis dit qu’il faudrait ouvrir un club du rire; plutôt
que d’écrire des articles, il fallait passer à l’action! Lorsque j’ai
commencé à parler de mes recherches et de mon idée de club du rire,
les gens pensaient que je plaisantais, que j’étais fou. J’ai dû proposer
à plus de cent personnes de rejoindre mon club, tous se moquaient
de moi. Seules quatre ont accepté de me rejoindre dans ce parc où
j’avais décidé d’ouvrir mon club. Ça fait plus de 95% de rejet, ça
[rires]!
«Tous les cinq, nous avons commencé à rire en racontant des
blagues. Après seulement dix jours, nous sommes tombés à court des
bonnes blagues, et quelqu’un a commencé à raconter des blagues
atroces. Des blagues racistes. Ce n’était plus drôle. Il fallait qu’on
arrête. Ce moment a été décisif: soit j’abandonnais – mais je n’en
avais pas envie –, soit je trouvais une idée lumineuse. J’ai dit aux
autres: “OK, laissez-moi 24 heures pour proposer une technologie de
pointe sur la façon de rire sans blagues.” Je n’avais pas la moindre
idée de ce que j’allais pouvoir proposer!
«De retour chez moi, en feuilletant des livres, je suis tombé sur une
étude qui expliquait qu’en se comportant comme si on était heureux,
on devenait heureux. Le simple fait d’incarner une émotion crée
réellement cette émotion dans l’esprit. C’est de cela qu’est né le yoga
du rire, qui n’est finalement qu’une série d’exercices pour rire,
couplés avec la respiration yogique. Ce fut une réussite immédiate.
Avec mes quatre comparses, nous avons beaucoup ri, sans aucune
raison, et c’est rapidement devenu contagieux. On se regardait, on
riait, ça se transformait en fou rire, et c’était parti!
«Quand nous avons commencé à rire comme ça dans le parc, les
gens autour nous regardaient de travers, nous prenaient pour des
imbéciles. J’étais un peu gêné, mais comme le club attirait sans cesse
de nouveaux membres, je me suis concentré là-dessus et j’ai laissé de
côté ce qu’on disait de nous. Les gens négatifs ont un pouvoir
d’attirance supérieur aux personnes positives, il ne faut surtout pas
perdre d’énergie auprès d’eux!
«Aujourd’hui, lorsque j’anime une conférence sur le yoga du rire et
que je suis sur scène, j’essaie de raconter de belles choses, de parler
de ma vie et de mes recherches. Si je vois qu’une personne n’adhère
pas ou ne me comprend pas, ma stratégie est de ne pas poser mon
regard sur elle. Je me concentre uniquement sur ceux qui
s’intéressent à ce que je raconte. Si je donne de l’énergie à ces
personnes négatives, elles vont me tirer vers le bas et réduire mes
performances. Vous savez, rien n’est parfait à 100% dans la vie. Ce
que nous appelons la perfection est une combinaison de bonnes
choses et d’incohérences, y compris de faiblesses. C’est ça, la
perfection, c’est la vie telle qu’elle est, pas ce que vous voulez qu’elle
soit. Regardez la nature, par exemple. La perfection vient des
imperfections. Pareil pour l’art. Combien de fois un artiste va-t-il
tracer des lignes imparfaites avant de créer un chef-d’œuvre?
«Finalement, rencontrer des problèmes dans la vie tient une place
très importante dans votre croissance spirituelle. Sans problème, on
ne peut pas grandir. Prenez donc les problèmes de la vie comme un
outil pour votre croissance émotionnelle ou votre croissance
spirituelle.
«Et pour finir, dites-vous que vivre dans le stress n’est pas utile. La
vie est comme elle est. Cherchez à tendre vers la perfection mais
n’oubliez pas de vous délecter des imperfections de votre chemin car
lorsque votre cœur est pur et que vous voulez quelque chose de
l’Univers, l’Univers vous écoute toujours.»

Mortified, une autre pratique ridicule


Pratiquer cette dernière étape de LTDLV, vous l’avez compris, ne
veut pas dire se balader dans la rue en sous-vêtements. Ce serait
embarrassant, certes, mais cela violerait surtout l’une des directives
essentielles de cette méthode: ne jamais mettre sa réputation en
danger.
Pour se ridiculiser sans prendre ce risque, il existe des manières de
s’auto-embarrasser bien établies, encadrées et largement acceptées
par la société. Si je me mets à rire sans raison dans l’ascenseur de
L’Oréal, par exemple, quelqu’un appellera sûrement la sécurité. Mais
si je suis la maîtresse de cérémonie d’un grand événement destiné à
guider l’ensemble des participants à travers une séance de yoga du
rire, inventé par un éminent médecin, et que j’ai mon certificat pour
mettre en pratique correctement la méthode, je vais juste démontrer
que je suis out of the box… C’est exactement ce que j’ai fait grâce à
Mortified, avec des banquiers français, des PDG des plus grandes
sociétés françaises, et même des politiciens. Ils ont tous ri. Tous.
Ce programme délicieusement embarrassant répondait exactement
à nos critères. Présenté dans le monde entier, respectant des
paramètres stricts, Mortified est un spectacle où des gens ordinaires,
comme vous et moi, montent sur la scène d’un théâtre devant des
centaines de personnes et lisent leur journal intime ou les poèmes
qu’ils ont écrits en secret quand ils étaient ados. Imaginez ce que
vous avez pu écrire d’absolument stupide, à 13 ans, dans votre
journal intime, et comme ça peut être gênant de le lire à voix haute,
sur une scène devant vos pairs, vingt ans plus tard…
Lorsque Dave Nadelburg, le fondateur de Mortified, lancé en
Californie il y a quinze ans, est venu former notre équipe à
l’organisation du spectacle, nous avons compris qu’il était
exactement sur la même longueur d’onde que nous, même s’il avait
une bonne longueur d’avance! La devise de ce programme, c’est
Share the Shame, «partage ta honte». En montant sur scène pour
dévoiler au public des écrits de jeunesse embarrassants, vous vous
apercevez que vous n’êtes pas le seul à avoir honte, et que ça peut
être très drôle de partager ces choses inavouables dont vous n’avez
jamais parlé. La honte ne tue pas, je vous le redis!
Notre premier Mortified a remporté un vrai succès: les quatre
cents places se sont vendues en quelques jours. Nous avons bénéficié
d’une couverture médiatique incroyable, presse quotidienne,
magazines, radio… c’était fou. Notre agence a explosé les scores avec
de nouveaux clients et nous avons pu recruter des gens
exceptionnels: c’était la preuve, une fois encore, que les craintes de
ce que peuvent penser les autres sont beaucoup plus irrationnelles
que nous l’imaginons.

Dévoiler sa vulnérabilité
pour se sentir plus fort
Avant de clore ce chapitre, je vous livre les paroles inspirantes de
Dave Nadelburg, qui a eu la gentillesse de se prêter pour nous à une
petite interview sur les pouvoirs du ridicule.
«On me demande souvent pourquoi autant de gens sont prêts à se
porter volontaires pour dévoiler leurs rêveries prépubères sur scène à
des inconnus… Je pense que si chaque participant a une raison
différente de vouloir le faire, le dénominateur commun est de se
reconnecter à son enfance et de rire avec des inconnus, de créer des
liens. Après cette expérience “cathartique”, comme on me le dit
souvent, on se sent plus léger et davantage connecté aux autres. Et
puis c’est valorisant de dévoiler des choses aussi intimes, c’est un bon
moyen de faire taire son ego et de se dire que finalement, montrer
ses imperfections et ses vulnérabilités, ça aide à se sentir plus fort.
«Mortified est avant tout un spectacle pour rire. Aller chercher ces
rires en permettant aux gens d’explorer leur relation à la honte est
une façon de la désacraliser. C’est l’une des principales raisons pour
lesquelles je continue à développer ce principe.»
Pratiquer l’auto-embarras encadré, se ridiculiser de son plein gré
sur scène ou rire pour rien dans un club de yoga du rire est une
partie cruciale de LTDLV parce que cette pratique n’est pas juste une
collection d’astuces pour créer plus d’opportunités, c’est aussi une
manière exceptionnelle de développer la confiance en soi. Le monde
appartient à ceux qui ont de l’audace, et c’est ce qui caractérise
LTDLV.
Finalement, c’est la seule raison pour laquelle j’écris ce livre. Je
n’en peux plus de me trouver en rendez-vous avec des femmes plus
minces que moi, plus belles ou plus instruites et qui ne croient pas en
elles-mêmes. Je n’en peux plus de rencontrer des salariés qui n’osent
pas demander de promotion ou d’augmentation, des entrepreneurs
qui perfectionnent leur produit mais n’essaient pas d’appeler leurs
contacts pour les leur vendre. Je n’en peux plus d’entendre certains
parents dire à leurs enfants de «ne pas faire de vagues».
Craindre le ridicule provoque le même sentiment d’inconfort que
la peur d’être rejeté. Si vous créez vous-mêmes ce malaise, vous
pouvez vous entraîner à le supporter de mieux en mieux; vous êtes
sur le chemin de la confiance et vous allez vous ouvrir une multitude
d’opportunités. C’est comme l’entraînement en gravité zéro des
astronautes qui sont encore sur Terre.
CHAPITRE SEPT

Se planter pour se planter,


c’est vraiment le flop total

Prenez des vestes pour grandir et renforcer votre confiance en vous.


Allez-y, faites-vous rejeter. Génial. Mais à quel moment se prendre
des vestes de son plein gré cesse d’être constructif? C’est une
question qu’on me pose systématiquement quand je parle de LTDLV.
Et ma réponse a tendance à diviser l’opinion.
Si vous avez apprécié les premiers chapitres de ce livre et
l’ensemble de ma méthode, il est possible que vous n’aimiez pas ce
que je m’apprête à vous prouver. Parce que la réponse est simple:
LTDLV sert de catalyseur pour révéler les diamants bruts, les
personnes qui ont du talent mais qui ont besoin de cette impulsion
pour oser plus, pour se surpasser, sortir de leur zone de confort et
atteindre leur objectif. Ce sont ces gens-là qui s’épanouissent dans la
pratique de LTDLV.
Si 100% de vos tentatives de vestes sont effectivement des vestes, il
y a un problème…

Le syndrome de l’imposteur
L’une de mes histoires préférées est celle d’Emily Winter. Autrice et
humoriste américaine, elle a établi un jour son quota de vestes à
cent. En tant qu’autrice, en un an, elle a essayé de se faire rejeter cent
fois parce qu’elle estimait ne pas progresser assez vite, ni comme elle
l’espérait, dans sa carrière.
Pour cela, elle a été très méthodique. Elle a fait un tableau Excel
listant toutes ses vestes et ses notes personnelles sur ses sentiments à
propos de chacune d’entre elles, «veste très difficile», «je suis
blessée», «blessure personnelle», etc. À la fin de l’année, Emily s’est
retrouvée avec cent sept tentatives de veste et finalement quarante-
trois opportunités. Ce sont les vestes, véritables moteurs de sa
pratique de LTDLV, qui l’ont aidée à continuer à foncer, à sortir de sa
zone de confort et à se démener pour trouver un éditeur!
Aux États-Unis, si vous souhaitez être publié, il existe plusieurs
titres qui se présentent comme le saint Graal: le New York Times, le
New Yorker ou The Atlantique, selon ce que vous écrivez. Si vous
signez pour ces titres, c’est le début de la gloire.
À l’occasion d’une conversation avec le psychologue
comportemental Adam Grant13, Emily a déclaré: «Je rêvais d’écrire
pour le New York Times et le New Yorker. Avant mon année de
vestes, je me disais que je n’étais pas assez intelligente pour écrire
pour ces deux publications. Alors j’avais décidé de ne pas leur
soumettre mes textes pour ne pas me ridiculiser…» Mais comme elle
s’était fixé ce quota de cent vestes en un an, Emily a finalement
décidé de se lancer en leur proposant ses textes. C’était une situation
gagnant-gagnant: soit ses textes étaient publiés dans l’un de ces
journaux mythiques et elle réalisait son rêve, soit elle se prenait une
veste et elle surmontait ainsi son syndrome de l’imposteur,
consistant à ne pas soumettre son texte parce qu’elle n’était – selon
elle – pas «assez douée».
Finalement, ça a fonctionné. Le New Yorker a adoré ce qu’elle
écrivait et elle a été publiée. Si Emily n’avait pas eu son talent et son
intelligence, elle n’aurait jamais été choisie par ce titre prestigieux
dirigé par des gens parmi les plus brillants dans leur domaine,
connus pour leurs très fortes exigences: LTDLV est souvent l’outil à
utiliser pour obtenir ce que vous savez possible au plus profond de
vous.
C’est en cela que je dis que LTDLV est faite pour ceux qui ont de
vrais talents, une certaine intelligence, des savoir-faire particuliers,
etc. Talent + ambition + LTDLV = progrès vers votre but. Si l’une de
ces trois composantes manque à l’équation, elle ne fonctionne plus.

De l’usage de la tolérance zéro


pour l’incompétence
Gary Pisano, professeur à la Harvard Business School et auteur de
plusieurs ouvrages sur l’innovation en entreprise14, explique
comment la tolérance de l’échec, au sein d’une société ou pour soi-
même, est en réalité une intolérance à l’incompétence. D’après lui,
pour qu’une entreprise soit hyper-productive, les seules vestes – ou
les échecs – acceptables sont celles émanant de personnes
compétentes.
En d’autres termes, il faut imposer la tolérance zéro à
l’incompétence. Je vais être un peu dure (je vous avais prévenus, bye
bye le pays des Calinours), mais si 100% de vos tentatives de veste se
soldent effectivement par des vestes, il est peut-être temps de vous
remettre sérieusement en question…
À l’agence, Thomas passe ses journées au téléphone et sur
LinkedIn à rechercher les contacts et les numéros de personnes qui
pourraient, selon lui, être intéressées par une collaboration avec
nous. Il les appelle et s’il parvient à les joindre au téléphone, il leur
fait son speech, absolument conforme à LTDLV. Il ne ménage pas sa
peine ni son temps pour essayer de les convaincre de rencontrer
notre équipe de vente, il prend soin d’être le plus efficace et le plus
sincère possible, et utilise toujours le paramètre mignon pour que
personne ne le prenne en grippe et que notre réputation reste
intacte. Parce que, soyons honnêtes, un représentant commercial
c’est toujours un peu intrusif. Thomas le sait bien et il est toujours
extrêmement galant, charmant, adorable et drôle au téléphone.
Au moment de la rédaction de ce chapitre, plusieurs membres de
l’équipe ont obtenu des rendez-vous incroyables avec certaines
grandes marques de luxe ou de téléphonie; nous avons même été
lauréats du 6e Trophée de l’entrepreneuriat au féminin qui
récompense les femmes à la tête d’entreprises d’un secteur dit
«masculin». Je ne dis pas ça pour me faire mousser – même si
j’adooore me faire mousser –, mais parce qu’en toute sincérité, pour
une agence de la taille de la nôtre, c’est quand même une belle
réussite.
Toutefois, si notre croissance est exponentielle et que nous
doublons notre effectif chaque année, ce n’est pas juste parce que
nous pratiquons LTDLV. C’est parce que nous sommes bons et que
tous les membres de l’équipe ont du talent, qu’ils pratiquent LTDLV
et atteignent leurs objectifs. Parce qu’il ne faut pas se mentir: la
différence entre trois échecs par jour et échouer tout court tient dans
la performance.

LTDLV décuple les talents


Pratiquée par des gens qui ont du talent et qui sont performants,
LTDLV produit immanquablement des résultats. Les personnes
talentueuses et performantes qui ne pratiquent pas LTDLV
obtiennent des résultats, mais ce qui leur manque souvent, ce sont la
confiance, la créativité et l’audace, le petit coup de pouce pour sortir
de leurs habitudes.
J’aimerais citer à nouveau le professeur Gary Pisano. Pour lui,
«explorer des idées risquées qui finissent par échouer, c’est tolérable,
mais utiliser des compétences techniques médiocres, une pensée
bâclée, avoir de mauvaises habitudes de travail et proposer un
management lamentable, c’est très grave et ce n’est pas tolérable».
Dans son ouvrage, il met l’accent sur l’innovation; comme on l’a vu
dans les recommandations que j’ai données à propos de la vente, du
recrutement ou d’un rendez-vous galant, LTDLV s’applique
parfaitement au domaine de la créativité pour développer de
nouveaux produits, des idées de campagnes marketing innovantes,
etc.
Si vous travaillez dans le domaine de l’innovation, que vous
souhaitez créer et inventer des choses inédites et que ça ne
fonctionne pas, je dirais qu’un quota de trois vestes par jour, c’est
bien. Mais si vous ne produisez rien de nouveau et que vous ne
progressez pas, si vos échecs dans ce domaine ne donnent pas lieu à
la création de nouveautés, c’est peut-être que vous n’êtes pas fait
pour ce type de job et que vous méritez de vous épanouir ailleurs.
Bien sûr, les dirigeants et les patrons ont à cœur de développer une
culture d’entreprise qui favorise l’innovation et invite les employés à
obtenir de très bons résultats, nous explique encore Pisano, en
proposant un environnement propice à la «sécurité psychologique»
qui les aide à affronter de possibles échecs. Mais le prix de ce genre
d’environnement très attirant pour les salariés, c’est une intolérance
à la médiocrité.
Pratiquée correctement, LTDLV est une petite victoire à chaque
nouvelle veste. Quand votre copine célèbre la veste que vous vous
êtes ramassée en proposant un concept marketing exceptionnel – qui
a fait chou blanc – ou en proposant enfin à votre voisine de sortir
avec vous, elle célèbre en réalité trois choses:
1. Le courage qu’il vous a fallu pour essayer.
2. La créativité que vous avez développée pour prendre une veste
sans abîmer votre réputation.
3. Ce que vous avez appris et retenu de cette expérience.
Prenons l’exemple de Camille K., une jeune responsable de la
communication, dont l’objectif est de développer son réseau afin de
multiplier les parutions dans la presse pour sa société. Elle a rédigé
un long message pour demander aux journalistes de la rencontrer
autour d’un café. Grâce à un outil sur son ordinateur qui lui permet
de vérifier si la personne à qui le courriel est adressé a lu ou non son
courrier, elle constate que de nombreux journalistes l’ont lu et…
ignoré. C’est une veste. (En ce qui me concerne, c’est le pire genre de
veste, une «veste fantôme», la plus frustrante parce qu’il est
impossible alors d’aller jusqu’au bout de l’échec.) Pourtant, Camille a
eu la bonne attitude: elle s’est interrogée sur cette absence de
réponse. Elle est venue m’en parler, nous en avons discuté et je l’ai
aidée à trouver le meilleur moyen de dépasser cet échec et de ne plus
reproduire les mêmes erreurs. Pour reprendre les termes de Ray
Dalio: douleur + réflexion = progrès.
Camille a donc continué à s’interroger sur la façon idéale de
transformer ces vestes en booster, en carburant. Elle s’est renseignée
aussi auprès de seniors en RP qui l’ont conseillée. Pour eux, son
courriel était d’une banalité à mourir: les journalistes en reçoivent
entre quatre cents et six cents par jour… Alors, elle a cherché à faire
mieux, elle a affiné sa technique, travaillé plusieurs approches, ajouté
une pointe d’humour, de créativité et d’audace. Sans oublier d’être
mignonne. Et bingo, elle a commencé à recevoir des réponses!
Mais tout le monde n’a pas le talent de Camille. Pour beaucoup, il
est plus simple d’abandonner à la première veste et de rester bloqué
dessus. Parfois même de s’y complaire.
Je vais être franche avec vous – comme toujours –, c’est aussi
simple que ça: la veste de quelqu’un aussi doué et intelligent que
Camille vaut mieux que le travail de quelqu’un d’incompétent ou de
médiocre qui fait juste son boulot pour gagner sa vie.

L’année de la veste d’Emily Winter


Emily Winter, exemple parfait de la fille brillante qui a pris LTDLV à
bras-le-corps, a bien voulu nous éclairer sur ce que ses tentatives de
veste lui ont apporté, personnellement et professionnellement, après
sa successful «année de la veste».
«Mes tentatives de veste les plus osées et les plus créatives sont des
propositions spontanées que j’ai adressées pour des postes qui
n’existaient même pas! Par exemple, une station de radio locale à
New York a récemment acheté Gothamist, un site Web d’actualités
que j’aime beaucoup. Je pensais que ce serait vraiment amusant – et
adapté à la radio publique et aux marques du site – de proposer un
article humoristique (édité par moi, bien sûr) sur des événements
strictement new-yorkais. J’ai lancé l’idée à Gothamist. Qui n’a jamais
répondu…
«Prendre plus de cent vestes en seulement un an m’a appris que
j’étais capable de bien plus que ce à quoi je m’attendais. J’avais des
idées préconçues sur mes limites intellectuelles et j’ai compris
qu’elles étaient toutes fausses. J’ai toujours cru que je n’étais pas
assez intelligente pour écrire au New Yorker et que ce n’était même
pas la peine de leur soumettre mon travail. Mon projet de vestes a été
un booster et je suis plutôt fière de mes deux articles dans The New
Yorker!
«Ces défis m’ont rendue plus résistante aux échecs et m’ont
surtout fait prendre conscience que se prendre des vestes est
inévitable! Que je ne devais pas les prendre pour moi: une veste, ce
n’est pas une appréciation de ce que je suis ou de ce que je vaux. Par
exemple, si une émission télévisée recherche un écrivain, et que le
boss a décidé que l’auteur serait un diplômé de Harvard, âgé de
23 ans, même si, sur papier, je suis une excellente candidate, je ne
suis pas la personne qu’il recherche. Un blogue inconnu pourrait
aussi refuser de me publier le jour même où le New York Times
accepte, lui, mes articles. Au cours de votre carrière comme dans
votre parcours personnel, vous serez régulièrement confronté aux
vestes et aux échecs, mais si vous prenez chaque refus
personnellement, votre confiance en vous en sera chaque fois
ébranlée. En fin de compte, mon année de vestes m’a permis de
comprendre que je ne devais pas laisser le monde extérieur me
contrôler. Le contrôle doit venir de l’intérieur, et non l’inverse.
«Grâce à tout ça, je me sens plus confiante. Et pas seulement pour
des raisons évidentes: mon aventure m’a permis d’échanger
largement sur le pouvoir de l’échec, qui est souvent un sujet tabou.
J’ai pu nouer des liens avec des intervieweurs que j’admire, des
camarades comédiens et des personnes partout dans le monde qui
m’ont envoyé des courriels pour me dire que mon histoire les avait
inspirés. Cela fait du bien de savoir que tout le monde est concerné,
que tout le monde se prend des vestes. Je me sens comme un enfant
de 2 ans à qui les parents viennent d’offrir le livre Tout le monde fait
caca, mais le mien s’appelle Tout le monde se plante! C’est vraiment
inspirant de savoir que je ne suis pas la seule à être rejetée et que le
rejet ne me définit pas.
«Si je devais donner un seul conseil à ceux qui veulent tenter cette
aventure, c’est celui-ci: “Visez la lune, mais préparez-vous bien pour
une expédition dans l’espace.” J’ai travaillé dur pour rédiger des
projets, préparer des stand-up et des castings afin d’avoir les
meilleures chances possible d’atteindre mon objectif. Vous
obtiendrez de meilleurs résultats en envoyant cinq projets très bien
écrits que cinq cents écrits n’importe comment. Vos tentatives
doivent être quantitatives, certes, mais vraiment qualitatives. C’est
pour ça que mon année de vestes a été si sportive… C’est
insoutenable de le faire tout le temps, alors fixez-vous un objectif,
réalisez-le, puis faites une pause avant de déterminer vos prochaines
étapes pour avancer.
«Pour conclure, j’ajouterai juste que si cette année m’a tant
épuisée, c’est bon signe. C’est que j’ai tout donné, que j’ai vraiment
bien bossé. Si je n’avais pas été exténuée, c’est que j’aurais passé une
année entière à chercher des objectifs sans y mettre assez d’énergie
et de travail pour les mériter. Pour moi, rien n’est pire que de penser
que le monde vous doit quelque chose, que c’est un droit.»
Je suis tout à fait d’accord avec cette conclusion d’Emily. Les
personnes les plus douées pour pratiquer LTDLV sont celles qui
savent que rien ne leur est dû et que peu importe ce qu’ils
obtiendront – plus de chiffre d’affaires, plus de candidats, plus de
réussite, plus d’argent, plus de bonus, plus de tout ce que vous voulez
–, eh bien, ça leur demandera toujours beaucoup de travail, ce sera
difficile, il faudra prendre et reprendre des vestes et continuer à se
relever, en sachant que LTDLV les rendra plus résilients. Et c’est le
but.
Mais venons-en à un point crucial de notre méthode. Tout le
monde ne pratique pas LTDLV de la même manière, et pour cause: il
y a ceux qui distribuent les vestes et ceux qui les prennent… C’est le
thème du fameux chapitre dont je vous parlais en avertissement et
que nous allons aborder maintenant. Alors, si vous êtes du genre à
boucher vos oreilles dès que la conversation devient un peu coquine,
ou que vous avez moins de 18 ans, passez directement au chapitre
neuf. Sinon, découvrons ensemble les différences, les points forts et
les faiblesses de ces deux populations qui se trouvent de chaque côté
de la veste.
CHAPITRE HUIT

Distribuer des vestes ou les prendre:


comment choisir son camp

Réservé à un public averti!


Nous voilà arrivés au fameux chapitre. On vous aura prévenus… Si
vous avez une réclamation à faire, n’hésitez pas à m’envoyer un
courriel, vous connaissez mon adresse!
On en a déjà parlé, il existe des quotas de vestes adaptés à chaque
catégorie de métier. Je vous le concède, il y a certains emplois où se
prendre des vestes permet d’avancer vraiment plus vite. Si vous êtes
bibliothécaire, inutile d’essayer de prendre trois vestes par jour. Sauf
bien sûr si vous avez pour ambition de devenir le meilleur
bibliothécaire de votre quartier ou de votre pays. Là, vous pouvez
pratiquer LTDLV. Mais si vous êtes épanoui dans votre job – ou dans
votre vie amoureuse – vous n’avez pas besoin de pratiquer LTDLV.
Ce serait un peu comme faire un régime Dukan alors que vous êtes
déjà mince…
Pour certains emplois, en revanche, LTDLV est presque
indispensable, on l’a déjà dit. Si vous êtes représentant commercial
ou chasseur de têtes, par exemple, vous ne pouvez pas y couper si
vous avez le désir de progresser.
Si vous vous interrogez sur le genre de vestes qui correspond à
votre domaine d’activité et qu’après mûre réflexion vous n’avez
toujours aucune idée de la réponse, vous vous situez peut-être «de
l’autre côté» de ceux qui trouvent facilement leurs tentatives de
veste. Mais qu’est-ce que c’est que cet «autre côté»? Laissez-moi vous
expliquer.

Les deux côtés de la veste


Dans votre vie professionnelle comme dans votre vie privée, il y a des
périodes où vous allez immanquablement vous prendre des vestes. Et
il y en a d’autres où c’est vous qui allez en distribuer. Pour citer le
très philosophique et sage Roi Lion, c’est l’histoire de la vie. Mais la
métaphore que j’aimerais utiliser dans ce chapitre n’est pas vraiment
digne de Walt Disney, elle serait plus adaptée à l’univers de Pretty
Woman. Avec tout ce que ça sous-entend… Donc, lecteurs sensibles
ou puritains, je vous conseille de vous abstenir: je vais vous parler de
gloryhole, littéralement «trou de la gloire».
Si vous n’avez jamais entendu parler de gloryhole, je vous en
conjure, ne vous précipitez pas sur Google pour trouver des images…
Surtout si vous êtes en open space #notsafeforwork ou avec vos ados
dans le salon familial. Pour faire simple, disons que dans le quartier
le plus dépravé de votre ville ou de votre région, il existe sans doute
des établissements peu recommandables qui présentent des trous
dans les murs ne relevant pas d’un problème de dégradation des
lieux mais qui sont là pour une bonne raison, placés de façon
pertinente à hauteur du bas-ventre. Sans trop entrer dans les détails,
je dirais juste que certaines personnes utilisent ces trous de manière
créative et anonyme à l’occasion de leurs ébats sexuels. Voilà, c’est
dit. Je vous laisse vous faire votre propre idée du gloryhole.
Dans votre vie quotidienne et votre parcours professionnel, vous
vous trouvez alternativement d’un côté ou de l’autre de ce gloryhole:
par moments vous êtes «récepteur» et à d’autres vous êtes
«émetteur». En langage émoji, on illustrerait ces deux termes avec
un donut et une aubergine… Pardon, je n’ai rien trouvé de plus
élégant. Dans LTDLV, j’appelle ça être «côté debout» ou «côté
genoux».
Ne soyez pas choqué et n’abandonnez pas votre lecture ici! Laissez-
moi vous expliquer pourquoi c’est important de savoir de quel côté
vous vous situez pour devenir un meilleur praticien de LTDLV.

Êtes-vous plutôt «côté genoux»


ou «côté debout»?
Les clients de notre agence de communication sont principalement
des grandes entreprises françaises, et ils sont nombreux (je me la
pète un peu mais j’assume). Toutefois, nous avons essayé pendant
quatre longues années de draguer un grand acteur mondial dans le
domaine de l’énergie sans jamais y parvenir. J’ai tenté pendant des
lustres d’entrer en contact avec quelqu’un de cette société, du
directeur recherche et développement au responsable RH, mais en
vain. J’ai tout tenté, frappé à toutes les portes, mais sans succès.
Cette société était devenue en quelque sorte ma veste privilégiée. Si à
la fin de ma journée je n’avais pas rempli mon quota de vestes, je
savais qu’il me restait toujours une option sur celle-là.
Bienvenue au club du «côté genoux»: à genoux en train de prier de
toutes vos forces (ou de faire autre chose, ça vous regarde) pour que
le client décroche son téléphone et accepte de vous rencontrer, qu’il
réponde à votre courriel ou vous propose de participer à un appel
d’offres. Vous avez compris.
De l’autre côté, «côté debout», je vous présente Cédric, mon mari.
Il est journaliste télé et pendant des années il était même à la tête de
sa propre émission. Il est au top niveau de sa job. Bien sûr, il est
aussi hyper-beau et très intelligent.
Maintenant que vous avez saisi les deux côtés du gloryhole, laissez-
moi vous raconter une anecdote. Mon mari et moi étions installés à
la table de la cuisine après le souper, comme chaque soir. C’est notre
rituel, notre espace de «coworking marital nocturne». Nous
terminons nos journées au bureau assez tôt pour profiter de nos
enfants, leur donner le bain, les faire souper puis les coucher.
Ensuite, on partage un cocktail, on débriefe la journée puis on
rallume nos portables pour travailler à nouveau jusqu’à 23 heures.
Donc, on était en train de travailler tous les deux face à face quand il
m’a dit qu’il devait contacter quelqu’un de la fameuse société après
laquelle je courais depuis des années, pour un reportage qu’il
programmait. Comme il était déjà tard, je lui ai lancé: «Pfffft, bonne
chance pour les joindre au téléphone, surtout à cette heure-ci. J’ai
jamais réussi.» «T’en fais pas, a-t-il rétorqué, j’ai eu son attaché de
presse, il répond facilement au téléphone, paraît-il.»
Il compose le numéro. Après une seule sonnerie, on décroche:
«Bonsoir, excusez-moi de vous déranger, dans le cadre d’un sujet
bla-bla-bla j’aurais besoin d’une interview de M. Untel, etc., etc.»
Déjà, je suis passablement énervée qu’on lui ait répondu
immédiatement. Et puis, ce monsieur Untel, c’est un big boss de la
boîte. J’entends Cédric développer sa demande et l’autre lui répondre
qu’il faudra attendre quelques jours. «Ah, non, mercredi, ça ne
m’arrange pas. Demain, plutôt?» propose-t-il à son interlocuteur. Je
n’entends pas la réponse mais Cédric écoute et finit par dire bonsoir
et merci. Il raccroche et reprend ses activités comme si de rien
n’était. «Alors? je lui demande intriguée et un peu jalouse, comment
ça s’est passé? — Oh! me répond mon mari, il va changer ses plans
pour qu’on puisse faire l’interview demain.»
Je vous laisse imaginer ma tête… Cette société qui n’avait jamais
daigné répondre à mes appels ou à mes courriels venait d’accepter un
entretien en quelques secondes avec Monsieur-Cédric-de-la-télé…
Belle démonstration du «côté debout», non?
Vous devez être en train de vous dire qu’entre les deux côtés du
gloryhole, le choix est vite fait entre la place de mon mari et la
mienne. Méfiez-vous des apparences! Même si j’ai passé 95% de ma
vie à genoux, je ne regrette rien de mon parcours.

Le gloryhole, gagnant des deux côtés


On dit en anglais qu’il faut être deux pour danser le tango; pour le
gloryhole, c’est la même chose, ça ne fonctionne que quand il y a
quelqu’un de chaque côté. Et quand les deux parties sont engagées,
ce n’est plus du tout le «côté debout» qui tient le pouvoir.
Notre agence a autant besoin de ses clients que l’ingénieur ou le
banquier a besoin de progresser en prise de parole. Parce que la
chose la plus importante qui va déclencher un achat, celle qui va faire
la différence, c’est souvent la présentation. La différence entre un
leader qui inspire et un dirigeant lambda est sa capacité de
convaincre, de fédérer. Et ça, chers lecteurs, ça demande d’être
vraiment fort en prise de parole. Au risque de sembler prétentieuse,
je soutiens que, quand les clients découvrent nos qualités, l’équilibre
du pouvoir s’inverse. Ils peuvent toujours essayer de se faire coacher
ailleurs, mais ils savent que ça ne sera probablement pas aussi bien
fait que chez nous!
Keanu Reeves, compatriote canadien et comédien de talent, est
mon exemple préféré de cette inversion de pouvoir. En 1994, il est
choisi pour le film Speed. Passer un casting est l’un des pires
exercices du gloryhole qui soient. Vous êtes à genoux (quand ce n’est
pas pire… #harveyweinstein) face à ce directeur de casting tellement
sollicité, qui tient tout le pouvoir et dont la décision peut changer
votre vie. Mais si vous obtenez le rôle et que vous êtes doué – comme
Keanu Reeves –, le film sera un succès et la balance du pouvoir
penchera en votre faveur. La 20th Century Fox a proposé onze
millions de dollars à Keanu Reeves pour faire Speed 2. Il a refusé,
préférant jouer Hamlet dans un théâtre local de Winnipeg, devant
une poignée de spectateurs. La société de production s’est mise à
genoux pour le supplier de signer pour son film mais il n’a pas cédé.
Il pouvait se permettre de refuser parce qu’il avait bien compris
comment faire fonctionner le gloryhole pour avancer.
J’ai toujours adoré mon côté du gloryhole, quelles qu’en soient les
difficultés. C’est vrai que c’est dur d’aller décrocher des contrats avec
Chanel ou Vuitton, que ça demande du temps et de l’énergie, mais
c’est tellement valorisant! Quand j’obtiens un rendez-vous avec ces
géants qui sont «côté debout», je suis si confiante et si résiliente
grâce à LTDLV que mes interlocuteurs sont toujours intrigués et que
l’entretien se passe généralement très bien. Et si je ne décroche rien,
eh bien tant mieux, je remplis mon quota, on célèbre ça au bureau
avec un very good, very good, yeah! et on essaie d’apprendre de cet
échec. Dans les deux cas, des deux côtés, c’est vraiment du gagnant-
gagnant.
Finalement, nos vies sont une alternance permanente et nécessaire
entre les deux côtés du gloryhole. Si vous voulez savoir où vous vous
situez à ce moment précis de votre vie, si vous êtes plutôt à genoux,
debout ou entre les deux, je vous propose de répondre à ce petit quiz
rapide.

Le quiz du gloryhole

1. Êtes-vous souvent obligé de rejeter les appels de vendeurs,


prestataires ou membres de votre équipe, car sinon vous n’auriez
jamais le temps de faire votre job?
Pas vraiment. Si un numéro inconnu m’appelle, c’est
probablement pour une bonne raison.
OMG, ça m’arrive tout le temps!
Je sais me rendre disponible quand c’est vraiment important.

2. Au bureau, est-ce que vous dites facilement ce que vous


pensez à vos collègues, à votre chef, à vos clients?
Hum, je serre les dents ou je tourne sept fois ma langue dans ma
bouche avant de parler. Si je disais tout haut ce que je pense
vraiment, je me ferais virer.
Oui, je suis plutôt libre de m’exprimer comme je veux au travail.
Je reste cordial et respectueux mais je peux toujours dire ce que je
pense vraiment.
Je choisis mes combats. Je détermine méticuleusement quand il
est nécessaire de faire entendre ma voix et quand je dois me taire
et garder mon opinion pour moi.

3. Avez-vous déjà ressenti de la colère ou de la frustration parce que


vous ne pouviez pas obtenir ce dont vous avez besoin pour être ultra-
efficace dans votre job (budget, ressources, communication, etc.)? Y
a-t-il quelqu’un ou quelque chose qui coince entre vous et ces
ressources qui vous permettraient de faire votre travail au maximum
de vos capacités?
Oui, je suis souvent frustré de ne pas pouvoir claquer des doigts
pour obtenir les ressources nécessaires à la qualité de mon travail.
Non, je contrôle assez bien ce dont j’ai besoin pour accomplir
mon travail dans les meilleures conditions.
Avec le temps, j’ai appris à contourner et à anticiper ma
frustration pour avoir tout ce dont j’ai besoin en temps et en
heure.

4. Faites-vous souvent des compliments à votre patron, à vos clients,


à votre équipe et aux gens qui vous entourent en général, pour
gagner leurs faveurs et travailler dans une bonne ambiance?
C’est l’histoire de ma vie. Et ces compliments, pour la plupart,
sont sincères.
Pas vraiment. Je ne fais des compliments que lorsqu’ils sont
parfaitement mérités. Ça peut être à des clients, à des collègues, à
des stagiaires, à tout le monde si je le pense vraiment.
Un simple merci peut vous ouvrir des portes. Je l’utilise avec
parcimonie.

5. À quelle fréquence les gens annulent-ils les rendez-vous qu’ils ont


pris avec vous?
Presque jamais.
De temps en temps mais toujours pour une raison valable.
Tout le temps; je ne suis pas une priorité dans l’agenda de
mes interlocuteurs.
6. Combien de temps mettent les gens à vous rappeler ou à répondre
à vos courriels?
J’ai toujours une réponse rapide.
Ça dépend de la personne.
C’est généralement moi qui relance.

7. Quand vous organisez un événement au sein de votre


société, quel est votre niveau de stress quant au nombre de
personnes qui vont répondre présent?
Pas stressé du tout. Nos événements remportent généralement
beaucoup de succès.
Un peu stressé. Les gens sont très sollicités, pas sûr qu’ils
viennent tous.
Énorme stress jusqu’à ce que tout le monde arrive.

8. Comment réagissez-vous quand quelqu’un est


extrêmement gentil et chaleureux avec vous dans un restaurant, un
magasin ou un hôtel, que vous bénéficiez d’une attention ultra-
classe?
C’est normal, c’est comme ça que devrait toujours être, le service
client.
Je trouve ça super. Ce n’est pas tous les jours que les gens se
donnent autant de mal pour surpasser leur dénomination de
poste. Bravo!
C’est bizarre… Pourquoi ces gens sont-ils si gentils avec moi?

9. Au travail, avez-vous déjà eu à vous excuser pour une erreur qui


n’était pas la vôtre afin de ne pas embarrasser un collègue ou même
votre patron?
Jamais! Pourquoi ferais-je une chose pareille?
Ça m’est arrivé une fois ou deux pour éviter d’embarrasser
quelqu’un.
C’est l’histoire de ma vie. Ça m’arrive tout le temps avec
des clients, des collègues ou des patrons. Histoire de ne pas
faire de vagues.

10. Est-ce qu’il vous arrive de sentir que vos collaborateurs ne vous
disent pas vraiment ce qu’ils pensent? Comme s’ils vous protégeaient
ou qu’ils filtraient ce qu’ils ont à vous dire.
Je ressens souvent cela, j’aimerais que les gens me parlent plus
franchement.
Ça arrive. Pas forcément pour me protéger, plutôt pour
d’autres raisons, j’ai l’impression.
Non, mon équipe me dit toujours la vérité. Enfin… je crois.

→ Vous êtes «côté genoux», félicitations!


Si vous obtenez une majorité de donuts, félicitations, vous êtes
officiellement à genoux! Vous travaillez peut-être dans une agence de
conseil ou de publicité, ou dans un magasin, vous gérez des clients ou
bien vous êtes dans une start-up qui recherche un financement. Vous
êtes peut-être tout simplement junior dans votre métier, vous
débutez dans votre carrière.
Quels sont vos avantages? Vous bénéficiez probablement d’une
communication franche de la part de vos collaborateurs et de vos
proches. Vous vivez dans «le monde réel», personne ne vous accorde
un traitement spécial parce que vous avez un titre qui impressionne
ou que vous êtes au service d’une boîte à la renommée internationale.
Ce que vous avez accompli dans votre job, vous ne le devez qu’à votre
mérite, à votre travail et à votre talent. Appréciez pleinement ce que
vous avez parce que vous le méritez vraiment.
Se trouver de ce côté du gloryhole, c’est faire partie de ceux qui
sont au service des autres, qui travaillent sans compter leurs heures,
se donnent du mal et acceptent beaucoup de choses. Être au service
des autres, c’est une place qui doit vous rendre fier, c’est l’une des
choses les plus honorables qu’une personne puisse apprendre au
cours de sa vie, à toutes les étapes de la chaîne du service.
Côté inconvénients, soyons honnêtes, les choses sont plus difficiles
quand on est «côté genoux». Les ventes seraient plus faciles si tout le
monde acceptait vos réunions, l’innovation serait plus efficace si tout
ce que vous tentez fonctionnait et que vous disposiez d’un budget et
de ressources illimités… Ça me fait penser à mon premier prof
d’université qui nous avait fait plancher sur une phrase en début
d’année: «Luctor et emergo» c’est-à-dire, pour ceux qui ne liraient
pas le latin dans le texte, «je lutte pour émerger». C’est un peu
comme dire qu’il faut connaître la pluie pour apprécier le soleil. Et
plus il pleut, plus ce petit rayon de soleil, quand il arrive, est…
glorieux.
Si vous êtes «côté genoux», je vous promets que pratiquer LTDLV
ouvre des opportunités multiples et variées et permet d’avoir
suffisamment de pistes pour développer votre entreprise: un bon
portfolio est toujours diversifié! N’oubliez jamais que c’est ce côté du
gloryhole que je considère le plus noble.

→ Vous êtes «côté debout», bravo!


Si votre score est principalement composé d’aubergines, vous êtes
plutôt «côté debout». Quelle que soit la taille de votre entreprise,
vous y avez probablement un bon poste, vous êtes bien placé dans la
hiérarchie, peut-être même PDG. Si vous êtes un client, vous êtes un
gros client. Si vous ne travaillez pas, vous exercez malgré tout une
certaine forme de pouvoir. Dans tous les cas, c’est vous, souvent, qui
décidez.
Les points forts de ce côté du gloryhole, inutile de vous les décrire
en long et en large. Quand on est là, tout se passe plutôt bien: les
gens répondent à vos appels, ils trouvent une place dans leur agenda
pour caler vos réunions. Vos idées sont entendues, ce qui vous
permet d’aller plus vite, de faire avancer les choses, de respecter vos
dates d’échéance. Parce que vous êtes de ce côté du gloryhole, vos
courriels et vos appels ont plus de poids que si vous étiez «côté
genoux».
Pourtant, il n’y a pas que du bon à être de ce côté. Parfois (c’est
peut-être juste la jalousie qui me fait croire ça), lorsque je rencontre
des gens qui sont clairement «debout» et depuis un certain temps,
j’ai l’impression qu’ils vivent sur une autre planète, ou, comme nous
avons parlé de Keanu Reeves plus haut, qu’ils sont «dans la
Matrice». Ils pensent que tout ce qui se passe dans leur boulot, c’est
la vraie vie. Alors que ce n’est généralement pas le cas! Il est possible
que de nombreux collaborateurs préfèrent taire la vérité plutôt que
de contrarier le patron…

→ Vous êtes polyvalent, faites les bons choix au bon moment!


Si vous obtenez une majorité de licornes, vous êtes polyvalent. Dans
votre carrière professionnelle, vous avez probablement eu des gens
sous votre responsabilité dans l’organigramme, mais sans doute
aussi au-dessus de vous. Si c’est vous qui êtes le patron, vous n’êtes
pas un patron omnipotent; vous devez rendre des comptes à des tiers
– clients ou fournisseurs, employés, syndicats – ou vous dépendez de
notations sur les réseaux sociaux. Vous bénéficiez d’un certain
confort grâce à l’influence que vous avez mais vous n’avez pas perdu
le sens des réalités et vous savez ce que veut dire être au service des
autres et quel état d’esprit cela nécessite.
Votre point fort, c’est de pouvoir choisir votre côté selon les
situations. Vous êtes un peu caméléon et c’est plutôt sain: quand
vous entrez dans la Matrice, vous savez que ce n’est pas la vraie vie,
et vous retrouver «côté genoux» de temps à autre vous permet de
rester humble et de conserver le sens du service.
Le risque, c’est de ne pas toujours savoir vous situer. À force
d’alterner entre les deux côtés du gloryhole, vous ne savez plus très
bien si vous êtes «côté debout» ou «côté genoux». Vous avez
l’impression d’être «debout» mais en fait pas du tout. Ou l’inverse.
Heureusement, votre expérience de caméléon vous aidera au fur et à
mesure à développer votre radar du gloryhole.

→ Dans tous les cas, pratiquez LTDLV!


Bref, que vous trouviez l’idée du gloryhole plutôt originale et juste,
ou qu’elle vous semble parfaitement vulgaire, une chose est sûre:
dans la vie comme au bureau, il y a ceux qui distribuent des vestes et
ceux qui les reçoivent. Si c’est vous qui distribuez des vestes mais que
vous souhaitez quand même pratiquer LTDLV, puisque vous avez
l’habitude qu’on vous dise oui, vous ne le ferez pas comme ceux qui
ont l’habitude de se prendre des vestes… Si vous êtes plutôt «à
genoux», LTDLV va vous aider à gagner en confiance et à changer de
statut en passant «côté debout».
Attention, petite précision: je parle ici de statut et non de pouvoir.
La distinction est importante. Être «à genoux» réclame une très
grande puissance, c’est ce que ma petite expérience limitée ici-bas
démontre. Une personne déterminée et ambitieuse peut avoir un
pouvoir extrême quand elle souhaite plus que tout arriver à ses fins.
Vraiment. Pensez à Keanu.
Je n’ai pas choisi de vous parler de gloryhole pour donner à mon
livre un petit côté porno chic destiné à attirer les lecteurs. Pour être
honnête, c’est plutôt pour vous montrer qu’il y a des bénéfices à vous
situer d’un côté comme de l’autre.
Si vous êtes clairement «côté debout», le danger c’est de perdre
votre pugnacité, votre niaque. Pour Angela Duckworth, une ancienne
consultante américaine reconvertie dans l’enseignement, qui a étudié
ce sujet sous toutes ses coutures et lui a même consacré un ouvrage15,
la niaque c’est ce qui permet de maintenir l’intérêt et la persévérance
pour atteindre son objectif à très long terme. Si c’est votre cas,
j’espère que ce chapitre vous aura donné envie de laisser une chance
à celui qui vous appelle ou vous envoie un courriel dans le cadre
d’une tentative de veste.
Si vous êtes «côté genoux», rassurez-vous, vous n’allez pas y rester
jusqu’à la fin de votre vie. Grâce à LTDLV vous avez le pouvoir de
passer de l’autre côté. Cependant, n’oubliez jamais que c’est grâce à
votre humilité, à votre capacité de vous mettre au service des autres
et au paramètre mignon que vous en êtes arrivé là…
LTDLV est une méthode pour vous aider à aller de l’avant, à
soutenir vos ambitions, quelles qu’elles soient. Elle vous donne le
coup de pouce nécessaire pour décrocher un entretien d’embauche
ou envoyer la lettre qui incitera le directeur de l’école à vous laisser
une chance de présenter le dossier de votre enfant. Comme je l’ai dit
dès le début de ce livre, c’est de passer de zéro à un qui est difficile, et
c’est dans cette étape que LTDLV est utile: elle vous donne une
chance. Ensuite, à vous d’aller plus loin, avec votre talent et votre
personnalité.
Quelle que soit votre position dans l’équation du gloryhole, LTDLV
vous offre une opportunité de mettre en place une relation, d’abord
très superficielle, qu’il faudra ensuite développer dans la
bienveillance et grâce au paramètre mignon. C’est ce que nous allons
développer maintenant.
CHAPITRE NEUF

Sortir du gloryhole au bénéfice de l’amour

Dans cette métaphore du gloryhole, il est question de relations


professionnelles et superficielles que nous sommes dans l’obligation
d’établir et d’entretenir pour avancer dans notre carrière. Mais le lien
entre un client et un fournisseur ou entre un parent et un directeur
d’école n’est pas la relation la plus profonde qui soit; pareil pour
votre patron, dont vous n’êtes pas particulièrement proche, pour ces
clients que vous ne reverrez peut-être jamais plus… Ce ne sont que
des rapports superficiels. J’espère qu’il n’est pas question de
gloryhole dans votre couple ou auprès de vos plus proches
collaborateurs avec lesquels vous avez noué des liens amicaux et
fidèles!

La sécurité psychologique, un prérequis pour l’innovation


Le gloryhole, c’est tout l’inverse de l’intimité, dans LTDLV comme
dans la vie. Parler de la pluie et du beau temps tue les relations
profondes. En tant que chef d’entreprise et gestionnaire, je défends
ardemment l’intégration de la sphère intime au bureau. Non pas
l’intimité qui relève de #balancetonporc, mais celle qui nous fait
nous sentir suffisamment en sécurité au sein de notre équipe de
travail pour montrer qui nous sommes vraiment.
Je sais que ce n’est pas simple pour tout le monde de mélanger
ainsi vie privée et vie professionnelle. Ce livre n’est ni un manuel de
management ni un ouvrage de psychologie comportementale, mais
ce que j’ai pu observer dans les centaines de sociétés auxquelles j’ai
été confrontée, c’est que celles qui fondent leurs relations sur
l’honnêteté, la confiance et l’interaction entre collègues sont
visiblement les plus performantes. Les sociétés dans lesquelles il vaut
mieux échanger par courriel parce qu’il faut laisser une trace en cas
de mauvaise foi du client afin de prouver ce qui s’est vraiment passé
– c’est valable aussi entre collègues – voient leurs projets prendre
beaucoup plus de temps et les tarifs augmenter en conséquence.
Tous les bénéfices pour mon agence? Non, parce que facturer plus
pour passer du temps avec des gens qui ne se font pas confiance et ne
vous font pas confiance, ça empoisonne tout le monde.
Je ne suis pas la seule à penser ainsi et les données confirment ce
sentiment. Pour Amy Edmonson, professeure à la Harvard Business
School, déjà citée dans ce livre et qui a passé des années à démontrer
que les personnes qui se sentent en «sécurité psychologique» font
moins d’erreurs, évitent les catastrophes et sont bien plus
innovantes, il s’agit de la technique la plus efficace dont disposent les
entreprises pour gagner en agilité et être plus performantes.
Quand les gens ont peur de critiquer leur supérieur direct ou tout
individu situé de l’autre côté du gloryhole, il n’y a personne avec qui
confronter les opinions, ce qui peut mener à de vrais désastres. Des
gens intelligents qui se sentent libres de contredire ce qui est en train
d’être dit dans une réunion, qui sont en mesure de proposer une
autre opinion, permettent de faire progresser l’innovation, de
repousser les limites de la créativité et de transformer le cadre
professionnel en un lieu sympa, agréable et attractif.
Les clients «coup de cœur»
C’est en ce sens que je dis que la métaphore du gloryhole ne peut
jouer que dans le cadre de relations superficielles. Avec certains de
mes clients, au fil des réunions, des échanges téléphoniques et des
formations, le mur qui nous séparait initialement s’affine jusqu’à ce
que nos relations deviennent amicales. Ce ne sont pas des amis,
puisqu’ils restent nos clients, mais je les appelle mes «clients coup de
cœur». (Coucou Frédéric et Isabelle!)
Je peux leur dire franchement ce que je pense, leur faire des
commentaires en toute transparence, sans craindre qu’ils me virent.
Parce qu’ils savent que je leur fais confiance et qu’ils sont importants
pour moi. Nous communiquons par téléphone ou par messagerie
instantanée pour gagner en efficacité et en rapidité, et parce que
nous n’avons pas besoin de garder des traces et ne craignons pas de
prendre un coup de poignard dans le dos.
Ces relations avec mes clients coup de cœur, qui ne sont rien de
plus que mes relations dans la vie en général, demandent de
l’intimité et de l’amour. Eh oui, vous avez bien lu; je viens d’écrire
AMOUR dans un ouvrage qui concerne la vie professionnelle… Selon
moi, cette confiance et cette sécurité psychologique dont Amy
Edmonson fait l’apologie ne peuvent exister dans une équipe que si
nous aimons nos collègues, notre patron et nos clients.
Vous me prenez pour une folle et vous pensez que je rêve en
couleurs parce qu’en entreprise ça ne fonctionne pas comme ça?
Pourtant, s’il existe effectivement une différence de mentalité entre
vous et moi, on a pourtant la même définition de l’amour, non?
L’amour, ce n’est rien d’autre qu’un «intérêt ou un goût très vif
manifesté par quelqu’un pour une personne ou une catégorie de
choses, une source de plaisir ou de satisfaction16». Personnellement,
je ne supporterais pas de me rendre chaque jour à mon travail si je
ne prenais pas autant de plaisir à faire ce que je fais.
Si nous n’avions pas d’affection les uns pour les autres au sein de
notre équipe, nous aurions arrêté de fêter nos anniversaires,
d’assister à nos mariages, de rigoler à nos blagues idiotes ou à nos
vidéos stupides sur Internet, de nous soutenir en cas de coup dur ou
de décès dans la famille. Partager un espace d’intimité avec son
équipe, c’est connaître la couleur préférée d’Alexandra, la date
d’anniversaire de Camille, ou retenir le sujet du mémoire de Lisa-
Marie; c’est bien de l’amour puisque c’est «de l’affection profonde
pour quelqu’un».

J’aime mes collègues…


et je n’ai pas honte de le dire!
On n’est pas dans une comédie romantique avec Julia Roberts et
Richard Gere, certes, mais si vous vous souciez de ce qui arrive à vos
collègues, si vous célébrez leurs réussites, si vous vous réjouissez de
savoir que Marion va bientôt avoir un bébé après deux ans de galère
ou que Jean-Michel a enfin trouvé l’amour de sa vie, bref, si tout ça
vous rend heureux, c’est bien la preuve d’une réelle et profonde
affection. Donc, oui, j’aime mes collègues!
Si vous vous interrogez sur l’intérêt de connaître les dates
d’anniversaire de vos collègues et que vous vous souciez encore
moins d’un éventuel choix de cadeau, si vous vous dites que vous
n’avez aucune envie de nouer des liens profonds avec vos collègues
(la famille, c’est à la maison que ça se passe, pas en open space), ce
n’est pas un problème: des gens comme vous, j’en ai rencontré
beaucoup. Mais si vous lisez ce livre, j’imagine que c’est parce que
vous souhaitez avancer, et sans doute voulez-vous aller de l’avant
dans votre vie professionnelle, parce que vous avez de l’ambition.
Alors, pourquoi se priver de quelques alliés au bureau, ensemble on
va plus loin, non?
C’est quand même étrange cette lubie autour du nombre d’amis
qu’on peut avoir et l’idée que l’on ne pourrait pas s’en faire dans son
cadre professionnel! C’est grâce à Fons Trompenaars et Charles
Hampden-Turner, spécialistes reconnus des questions
interculturelles et auteurs du best-seller Au-delà du choc des
cultures: dépasser les oppositions pour mieux travailler ensemble17,
que j’ai réussi à décrypter cette question. Si vous travaillez vous aussi
dans un pays culturellement différent du vôtre, je vous recommande
cet ouvrage: l’approche que font les auteurs est fascinante.
Pour réconcilier les différences culturelles en entreprise, ces deux
chercheurs proposent de les comparer à des fruits. Selon eux, les
Canadiens sont des pêches, comme les Brésiliens, les Américains ou
certains Japonais. Les Français, eux, sont des noix de coco… Je sais,
j’ai une passion pour les métaphores surprenantes.

Pourquoi les Canadiens pensent


que les Français n’aiment pas leurs collègues
L’une des différences fondamentales entre les cultures canadienne et
française réside donc dans le fait que les Français ressemblent plutôt
à des noix de coco et les Canadiens à des pêches…
Dans une pêche, l’accès au fruit, à la douceur, au jus se fait tout de
suite. Dans notre agence, c’est la même chose, il suffit de pousser la
porte de notre boutique (qui reste d’ailleurs ouverte le plus souvent)
pour accéder au fruit, c’est-à-dire à notre confiance, à notre affection
et à notre respect. Pour votre premier jour de travail chez Present
Perfect, vous êtes accueilli avec du parfum, on vous fait participer à
une séance de yoga du rire et on organise un lunch en équipe.
Ensuite, vous serez invité à chaque fête, à chaque sortie… En vous
engageant dans son équipe, notre agence fait le pari de vous aimer. Si
vous êtes chez nous, c’est qu’on vous aime. Mais attention, si vous
trahissez cette confiance ou si vous vous comportez mal, cette
confiance sera immédiatement supprimée – et vous avec. Pour
autant, soyons honnêtes, vous aurez beau être le meilleur collègue
qui soit, vous n’aurez jamais le même niveau d’intimité que celui que
vous avez avec votre conjoint, vos parents ou vos enfants. Et c’est là
que je reviens à mes pêches et à mes noix de coco.
Dans la pêche, vous avez accès au fruit directement, mais au milieu
se trouve un noyau auquel vous n’avez pas accès. Vous aimez peut-
être vos collègues, mais vous ne leur demanderez sûrement pas de
venir vous tenir la main pendant votre séance de chimio. C’est un
autre genre de relation. Il y a finalement un nombre fini et limité de
personnes, cinq ou six tout au plus, qui se trouvent dans ce noyau
dur de la pêche.
Pour la noix de coco, pour le Français, donc, on est dans une autre
dimension: l’accès au fruit ne se fait qu’après avoir fait exploser la
coque rugueuse et dure. Mais une fois que vous êtes dedans, vous y
êtes.
Au fond, peu importe qu’on soit pêche ou noix de coco. Que vous
soyez l’un ou l’autre de ces fruits, vous avez autant de gens proches
qui comptent vraiment autour de vous. Mais dans la culture de la
pêche, tout le monde a accès au fruit sucré et délicieux, alors qu’avec
la noix de coco, il faut d’abord se frotter à sa carapace râpeuse…
Si je suis passée du gloryhole à la salade de fruits, c’est pour vous
dire que si vous rencontrez pour la première fois quelqu’un dans
votre job, ou si vous faites la connaissance de votre future belle-mère
– vous êtes «côté genoux» dans les deux cas, hein? –, vous saurez
plus rapidement sortir de ces relations. Si vous pouvez vous en
passer, dans votre équipe, dans vos relations ou même dans votre
famille, c’est encore mieux.

Être au service des autres,


c’est mettre l’amour en action
Que se passe-t-il si vous êtes un leader? Avez-vous remarqué que
plus une société est importante, plus son PDG exige de se faire traiter
comme une reine ou un roi? Vous croyez qu’ils sont nombreux, ces
reines et ces rois, à pouvoir entendre la «vraie vérité»?
Une des raisons pour lesquelles notre agence connaît un tel succès,
c’est qu’à la manière des séries policières de Netflix, «nous jurons de
dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité» à ceux qui veulent
bien l’entendre. Et nous ne sommes pas les seuls à le proposer, alors
que dans une multitude de sociétés, les salariés sont tout simplement
incapables de dire à leur dirigeant que l’idée qu’il s’apprête à mettre
en œuvre est très mauvaise.
C’est tout le problème du gloryhole. Quand vous êtes «côté
debout», servi comme un roi ou une reine depuis trop longtemps,
vous avez tendance à oublier qu’il existe, ce trou. Michael Kimmel,
célèbre professeur de sociologie à l’université new-yorkaise de Stony
Brook, dit à ce sujet que «le privilège est invisible à ceux qui le
possèdent»: cette situation fait perdre le sens des réalités. Si vous
êtes dirigeant ou leader, si vous avez du pouvoir dans
l’organigramme de votre entreprise, et que vous êtes en train de vous
dire que peut-être vous vivez dans la Matrice, posez-vous la question:
vos employés se sentent-ils assez en sécurité pour vous dire la vérité?
Si vous n’êtes pas sûr de la réponse, voici le meilleur moyen de ne
jamais vous retrouver enfermé dans le monde virtuel de Matrix et
qui devrait vous mettre à l’abri des soucis de gloryhole pour
toujours. Il vient d’Afrique du Sud et s’appelle Ian Fuhr. Cet
entrepreneur inspirant explique comment des gens comme lui ont
débuté par un petit emploi modeste avant de devenir riches et
puissants à force d’un travail acharné, pas à pas, à la sueur de leur
front, en ne perdant jamais de vue les différents côtés du gloryhole et
en faisant le pari de finir par s’en débarrasser. Pour réussir ce
chemin, la réponse de Ian Fuhr tient en deux mots seulement qui,
associés l’un à l’autre, forment l’une des plus belles phrases qui
soient: servant leadership, que l’on pourrait traduire par «dirigeant
au service de ses équipes».
Dans son discours TED prononcé à Johannesburg en 2016, il a
déclaré une chose très simple et parfaitement imagée: «Dans vos
systèmes de hiérarchie classiques, vous avez un big boss entouré de
tout une équipe à son service et au bout de cette chaîne, votre client.
Si tous les membres du personnel se prosternent devant le patron,
quelle partie de leur anatomie se retrouve face au client?» Contre
toutes les idées reçues, le dirigeant doit être au service de ses salariés
s’il veut générer de la valeur auprès de ses clients. Même si c’est un
peu cliché de citer Gandhi dans un livre de développement
personnel, je vais le faire: «La meilleure façon de se trouver est de se
perdre au service d’autrui.» Servir les autres, c’est mettre l’amour en
action.
Je terminerai ce chapitre par une anecdote. L’un des patrons les
plus puissants avec lesquels j’ai eu la chance de travailler – même si
ce fut très bref – était PDG d’un géant de l’agro-alimentaire. C’était
un homme ultra-puissant qui n’avait pas peur de laisser son ego de
côté et de se mettre «à genoux», un grand patron reconnu pour ses
qualités de gestionnaire innovantes – qui n’avaient pourtant rien de
très révolutionnaire. Il faisait simplement le tour des entrepôts, à 6
heures du matin, et discutait sur les quais de chargement avec les
manutentionnaires. Pour lui, c’était la seule façon de savoir ce qui se
passait vraiment dans sa société. Il avait compris que s’il n’était pas
au service de ses employés, ses clients ne pouvaient pas être heureux.
J’espère que la vulgarité de la métaphore du gloryhole ne vous a
pas écœuré de LTDLV, mais il était important que je partage avec
vous cette vision du monde du travail – aussi étrange puisse-t-elle
être. Pourquoi m’autocensurer alors qu’il s’agit de mon livre, de ma
méthode? Autant aller jusqu’au bout. Là, on peut dire que je vous ai
offert un accès direct à mon cerveau!
Chapitre dix

LTDLV, un booster de confiance en soi

Je suis plus près de la quarantaine que de la trentaine, et après avoir


mis au monde trois enfants, j’ai une bonne vingtaine de kilos à
perdre. Même si j’adore les belles tenues et les accessoires coûteux, je
suis plutôt du genre à m’habiller chez Zara et H&M. J’ai fait mes
études dans une école médiocre dont personne ne connaît le nom, et
je découvre chaque jour sur mon corps des poils disgracieux là où il
ne devrait pas y en avoir.
Si je vous avoue tout ça, c’est pour vous dire que, malgré tout, je
me trouve plutôt géniale! Je suis confiante dans mes qualités de
dirigeante, d’épouse, de mère et d’entrepreneuse, je sais que j’ai
encore beaucoup à apprendre et j’ai hâte de progresser mais je suis
convaincue qu’en travaillant efficacement entourée d’une bonne
équipe, je peux accomplir tout ce que je souhaite. Pourtant, ça n’a
pas toujours été le cas.
Lorsque j’ai créé mon entreprise, je me remettais d’une agression
sexuelle. J’avais été prise pour cible par un homme très puissant de
mon précédent boulot. J’ai dû constamment repousser ses avances,
et finalement ses actes, pendant quelques mois. Ensuite, j’ai vécu des
semaines de harcèlement et de représailles. Jamais ma confiance
n’avait été autant mise à mal. Je doutais de tout, de ce que je pensais,
de ce que je faisais. Je n’étais plus sûre de rien. Je ne me suis jamais
sentie aussi peu en sécurité qu’à cette période. Croyant ne plus
jamais pouvoir réaliser quoi que ce soit, et alors que je me préparais
à rentrer penaude et honteuse au Canada, j’ai rencontré deux
hommes formidables qui m’ont convaincue de rester en France; c’est
à eux que je dédie ce livre.

Transformez l’adversité en force


À l’époque, j’étais dans une forme physique éblouissante. Je courais
entre 10 et 30 kilomètres par semaine et pesais ma nourriture au
gramme près pour m’assurer de garder la ligne. Je ne dérogeais à
aucune des six étapes de ma routine beauté – matin et soir – et
passais trois quarts d’heure à lisser mes cheveux soigneusement
devant mon miroir au saut du lit. Je n’avais pas de travail, pas
d’enfants, tout mon temps était consacré à ma petite personne. Ma
seule job consistait à être belle et en pleine forme. Pourtant, je n’ai
jamais ressenti même 5% du pouvoir que je ressens aujourd’hui, le
pouvoir de savoir que je peux faire absolument tout ce dont j’ai envie,
dès lors que je l’ai décidé. J’avais beau être la plus jolie fille de la
pièce, je me sentais systématiquement la plus laide.
Ce pouvoir, cette confiance en moi, je n’ai commencé à les ressentir
qu’après avoir pris ma toute première veste dans ma buanderie. Ce
moment décisif où j’ai pris une grande claque et où les mots d’Elton
John ont pris tout leur sens: «Tu ne le sais pas, je suis encore debout,
plus que je ne l’ai jamais été. Ressemblant à un vrai survivant, me
sentant comme un petit enfant18.» Cette chanson est devenue
l’hymne de LTDLV.
Je vous l’ai raconté dans les premières pages de ce livre, j’ai appris,
dans ma buanderie, la leçon la plus importante de toute ma vie, celle
que j’aimerais que tout le monde retienne en me lisant: le ridicule ne
tue pas, il vous rend plus fort si vous n’y cédez pas. Faites de
l’adversité une force, prenez-la à bras-le-corps, allez la chercher s’il le
faut et vous deviendrez invincible.

Développez la confiance au sein de votre entourage


La plupart de nos clients sont des entreprises du luxe et de la mode.
Quand je me rends chez ces créateurs de sacs à 40 000 euros, leurs
bureaux regorgent d’hommes et de femmes aux tenues dignes des
plus belles photos mode des magazines féminins. Ils sont aussi plus
minces et plus sportifs que moi, ils ont tous obtenu de meilleurs
diplômes dans de meilleures écoles et gagnent plus d’argent chaque
mois. Mais souvent, lorsque nous commençons à travailler ensemble,
je découvre que ce sont eux qui souffrent d’insécurité, de nombreux
doutes et d’un cruel manque de confiance en eux. Lorsque je les
coache sur leurs discours ou leurs présentations, ils m’avouent
douter de leurs qualités, avoir peur de ne pas être assez bons: «On va
me trouver nul… Ce n’est pas assez intelligent… Mon Dieu, qu’est-ce
qu’on va penser de moi? Je ferais mieux de tout arrêter…»
Ils n’ont pourtant généralement rien à craindre, c’est ce que je leur
dis pour les rassurer: on ne se retrouve pas aussi haut placé dans une
entreprise si on n’est pas intelligent et créatif. Mais ça ne les
empêche pas de perdre deux à trois nuits de sommeil à se faire des
nœuds au cerveau avant leur présentation et à se demander ce que
leurs collègues et leurs patrons vont penser d’eux… C’est normal de
se démener pour proposer une présentation PowerPoint de qualité,
car c’est sa propre réputation qui est en jeu. Mais se mettre à ce point
la pression et croire qu’on n’est pas à la hauteur ou suffisamment
talentueux, c’est totalement excessif. Surtout quand on a un CV
comme le leur!
J’ai remarqué qu’une partie de cette insécurité dépend souvent de
l’organisation même de l’entreprise pour laquelle ces personnes
travaillent. La sécurité psychologique dont parle Amy Edmondson
dans ses recherches est malheureusement souvent absente des
sociétés que nous côtoyons à l’agence. Parfois, nos clients ont réussi
à mettre en place une bulle de confiance au sein de leur équipe, une
sorte de microcosme, même si cette sécurité n’existe pas au sein de
l’entreprise elle-même. Je le vois bien parce que dès que les membres
de ces équipes quittent cet espace dans lequel leur créativité est
respectée et valorisée, ils ne se sentent plus en sécurité pour partager
leurs idées librement et en toute confiance. Peut-être vous aussi, qui
lisez ces lignes, vous convenez de ce que j’avance, pour le vivre
quotidiennement au sein de votre entreprise ou de votre famille.
Je ne suis absolument pas en train de dire du mal ni d’envoyer des
piques gratuites à nos clients auxquels nous attachons tant
d’importance. Pas du tout. Comme le déclare Gary Pisano dans son
article de la Harvard Business Review sur les entreprises
innovantes, «les cultures qui favorisent l’innovation exigent
l’intolérance envers la médiocrité, la transparence radicale et une
discipline rigoureuse. Ce sont des environnements incroyablement
difficiles à créer et à maintenir19». Ce que j’essaie de dire c’est que la
confiance en soi et l’amélioration des capacités qui en découle sont
un superpouvoir dont nous devons tous avoir conscience et que nous
devons chercher à développer et à nourrir pour nous-mêmes, nos
équipes et tous ceux qui nous sont chers. Si vous ne pouvez pas
changer toute votre organisation, vous pouvez le faire au sein de
votre équipe, de votre famille.

Le cœur des femmes


Mon exemple préféré est celui de la banque centrale d’un pays du G7.
Après avoir travaillé avec ce client et parlé avec d’autres intervenants
extérieurs qui avaient aussi collaboré avec lui, nous nous sommes
avisés que nos expériences étaient identiques. Dans une telle
organisation où des couches et des couches de validation
interviennent pour chaque tâche, où chacun doit donner son avis afin
de prouver son existence et de justifier son salaire, personne n’a le
courage de prendre des décisions radicales – même si elles sont
justifiées – au risque de se faire critiquer. Toute idée originale ou
innovante est soumise à la chaîne de validation de l’organigramme et
redéfinie à chaque étape jusqu’à ce qu’elle revienne sous une forme
qui résulte d’une décision consensuelle. Et qui ne ressemble plus à
rien… Dans cette entreprise, les gens parlent dans le dos des autres,
ils ne disent pas ce qu’ils pensent; même après vingt-cinq ans de
carrière, les diplômes restent la valeur sûre des salariés bien plus que
ce qu’ils ont réellement fait au sein de l’entreprise.
Je suis un peu dure dans mes propos parce que c’est un client que
j’apprécie vraiment et que chacune de mes expériences avec ses
salariés a été très plaisante: ils sont tous très doués, très intelligents,
et j’apprends beaucoup de nos échanges. Mais côté culture
d’entreprise, il y a réellement un problème… sauf au sein du réseau
que des femmes se sont créé.
Il y a plusieurs années, cette banque a développé une association
au sein même de son organisation pour promouvoir l’égalité homme-
femme et l’inclusion. Ces gens sont ouverts d’esprit, ils se font
confiance, les décisions sont prises rapidement et avec assurance, les
réunions se déroulent dans la joie et la bienveillance. Un changement
radical par rapport aux autres départements de la banque. C’est le
jour et nuit! Pourquoi? Tout simplement parce que les dirigeants de
cette association ont décidé, dès le début, que la confiance constituait
l’une de ses valeurs clés, et qu’ils n’ont jamais dérogé à cette règle. Ils
ont créé une bulle de sécurité psychologique et les femmes (et
quelques hommes) qui en font partie le savent. Par conséquent, ils
anéantissent les barrières et cassent les codes relatifs à l’égalité
homme-femme dans leur banque et auprès des autres organisations
financières d’une façon qu’on ne pouvait pas imaginer. Bien sûr, cela
a été possible grâce au talent des femmes qui se trouvent à la tête de
l’entreprise, mais leurs efforts pour favoriser la confiance au sein de
l’équipe ont été un catalyseur énorme.

La confiance en soi engendre la confiance en soi


Brittany Packnett est une ancienne institutrice devenue militante et
autrice. Son passage sur ted.com20 a attiré près de deux millions de
vues en moins de deux mois. Dans son discours, elle compare la
confiance à une étincelle qui allume TOUT dans la vie. C’est
tellement vrai! C’est même exactement pour cette raison que j’ai
voulu écrire un livre et proposer à tous ceux qui le veulent une
méthode pour accéder à ce que je considère comme un véritable
superpouvoir dans la vraie vie: la confiance en soi. Si vous vous
croyez capable de faire tout ce que vous voulez, vous améliorez
réellement votre capacité de le faire, vous devenez plus puissant. Si
Brittany Packnett l’a constaté dans sa salle de classe, je l’ai pour ma
part remarqué des centaines de fois à l’agence autant que dans les
équipes de nos clients. Et les données le confirment.
Nous avons tous un collègue (ou peut-être êtes-vous ce collègue)
qui a totalement perdu confiance en lui après avoir très mal vécu son
entretien annuel et s’être fait descendre par son supérieur. Depuis
cette épreuve, il lutte pour que tout soit parfait, doute de ses choix et
des orientations à suivre dans son travail, et va jusqu’à s’en prendre à
ses équipes et leur faire subir la même chose. Un gestionnaire qui n’a
pas confiance en lui fait faire et refaire des boulots à son équipe
parce qu’il ne sait plus ce qu’il doit faire, qu’il ne sait plus prendre de
décision radicale et qu’il navigue en eau trouble plutôt que de
s’engager dans une direction et de s’y tenir.
C’est mon pire cauchemar! Après une première réunion avec un
nouveau client qui montre des signes d’insécurité, une confiance
ébranlée, nous savons qu’il nous faudra facturer en conséquence,
appliquer le «tarif doute», parce qu’il a tellement peur de ce que dira
son chef ou d’être «puni» par sa hiérarchie qu’il va déplacer son
manque de confiance sur notre agence: il nous fera refaire le travail
quinze fois, même après avoir validé le brief, et passera des heures à
argumenter sur tous les points de détail, nous reprochant toujours de
ne pas avoir fait assez bien ceci ou cela.
Contrairement à ce que certains pensent, le passé ne détermine pas
notre présent: les événements qui ont eu lieu par le passé ne
définissent pas celui ou celle que vous allez devenir, bien au
contraire! Si nous ne pouvons modifier ce qui est derrière nous, nous
pouvons faire en sorte d’apprendre de nos erreurs pour grandir,
renforcer notre confiance, nous dépasser, et déclencher un cercle
vertueux. Si vous n’avez pas encore connu le succès, le simple fait
d’en créer un premier, aussi petit soit-il, en engendrera d’autres. Si
vous êtes chargé de clientèle junior, par exemple, vous avez du mal à
vous imaginer PDG. C’est normal. Mais si une première promotion
advient, c’est qu’une autre est possible, et une autre encore… La
réussite s’ouvre devant vous et avec elle des opportunités que vous
n’attendiez pas. Lorsque j’ai organisé mes premiers rendez- vous
professionnels en 2013 pour développer ce qui allait devenir Present
Perfect, j’ai connu quelques succès qui m’ont donné la confiance
nécessaire pour générer davantage de succès, car je commençais à y
croire, à me dire que j’allais vraiment réussir ce que je rêvais de
développer.
C’est pour cela que les deux premières étapes de LTDLV sont si
importantes: elles vont totalement changer votre relation à l’échec.
Vous ne vous laisserez plus jamais déstabiliser par une veste
puisqu’elle aura perdu à tout jamais son pouvoir de destruction de
confiance.
Une étude réalisée à l’université de Warwick montre que les
personnes placées dans des situations où elles ont un fort risque
d’échec échouent plus souvent que les autres; si on leur dit qu’elles
vont réussir, les résultats montent au contraire en flèche. Dans mes
recherches pour ce livre, six études indépendantes ont confirmé cette
tendance générale, mais une question revient sans cesse: on a
compris que la confiance en soi génère du succès, mais où trouver la
confiance nécessaire pour commencer à croire que l’on va réussir? Si
la confiance est un cercle vertueux, comment lui faire prendre
naissance? Comment planter la première graine?
La confiance en soi est un concept un peu délicat à définir et je n’ai
pas trouvé de définition universellement acceptée, mais celle sur
laquelle je vais m’appuyer est la suivante: votre confiance en vous est
la conviction que vous êtes assez bon pour accomplir n’importe
quelle tâche ou mission qui vous tient à cœur, et de façon calme et
efficace.
Au fond de vous, vous devez vous croire suffisamment intelligent,
créatif ou organisé pour réaliser tout ce qu’il faut en vue d’atteindre
vos objectifs et de progresser dans votre carrière. Et si ce n’est pas le
cas, si vous voulez mettre en place cette croyance profonde, j’ai le
meilleur moyen pour le faire – je crois que vous avez deviné: LTDLV,
bien sûr!
Vous avez peut-être déjà entendu le fameux mantra anglophone
«fake it till you make it», que l’on pourrait traduire par «fais
semblant jusqu’à ce que ça marche», ou la version d’Amy Cuddy qui
dit «fake it till you become it», soit «fais semblant jusqu’à devenir ce
que tu veux». Ou, plus ancienne encore, celle du philosophe Aristote:
«Les hommes acquièrent une qualité particulière en agissant
constamment d’une manière particulière.» Il avait compris que des
qualités comme la confiance en soi, la gentillesse, l’empathie,
l’altruisme et un certain nombre d’autres compétences non
techniques peuvent se cultiver simplement en agissant comme si on
les possédait déjà.
Cela ne signifie pas que vous devez agir comme quelqu’un d’autre.
C’est ce qu’explique très bien Sheryl Sandberg, directrice des
opérations de Facebook et autrice de la bible de l’égalité homme-
femme, En avant toutes21, quand elle recommande aux femmes de se
poser la question suivante: «Que feriez-vous si vous n’aviez pas
peur?» Et c’est exactement dans cette même dynamique que vous
pouvez utiliser LTDLV pour aller au bout de vos ambitions: faites
semblant jusqu’à devenir ce que vous avez toujours rêvé d’être.

Transformer les vestes en réussites:


un moteur efficace
Quand j’ai interrogé des personnes qui pratiquaient LTDLV depuis
des mois, voire des années, toutes m’ont parlé de la confiance
qu’elles avaient prise à la fois dans leur travail et dans leur vie privée.
C’est le cas de Jeanne, une jeune entrepreneuse que j’ai rencontrée
alors que son entreprise, montée depuis dix-huit mois, avait du mal à
décoller. Elle m’avait sollicitée pour que je la conseille.
À l’époque, elle avait seulement deux clients et ne savait pas
comment développer son réseau. Quand elle m’a donné les noms de
ces deux clients – prestigieux dans la mode –, je l’ai immédiatement
encouragée à leur demander de la mettre en contact avec d’autres
services pour leur proposer son aide. Pour elle, c’était inimaginable:
elle avait peur de les «déranger» ou de se montrer «envahissante».
«Mais tu es quelqu’un de gênant? Tu es envahissante?» lui avais-je
demandé. «Non, je ne crois pas», m’avait-elle répondu. «Alors vas-y,
contacte-les. Tu ne seras ni gênante, ni envahissante. Et c’est comme
ça que tu développeras ta clientèle.» Elle n’avait pas l’air de me
croire.
Alors on a réfléchi ensemble à plusieurs tentatives de vestes pour
élargir son périmètre commercial et gagner davantage de clients.
Comme Jeanne est très créative et qu’elle bénéficie d’une belle
aptitude à ce que j’appelle la «communication intelligente», on a
trouvé des idées dans lesquelles le paramètre mignon avait une place
de choix. Elle a trouvé ça facile et même très amusant.
Pour elle, le fait de se prendre des vestes n’était pas un réel
problème, et surtout ce n’était pas un but en soi. Ce qu’elle trouvait
intéressant, c’était l’audace qu’elle déployait à essayer des choses
qu’elle n’aurait jamais tentées si elle n’avait pas eu un quota de vestes
à remplir. En essayant de vous faire rejeter exprès, vous êtes obligé
d’aller au-delà de la peur du rejet et souvent vous vous apercevez que
ces peurs étaient totalement irrationnelles et que l’opportunité se
trouvait là où vous n’attendiez qu’un échec…
Je lui ai également recommandé les livres que mon mentor m’avait
conseillés pour comprendre que la vente est le moteur de toute
entreprise. Souvenez-vous: LTDLV ne peut fonctionner que sur des
gens qui ont du talent et l’intelligence nécessaire pour être
compétents dans leur domaine. Être rejeté lorsque vous avez fait tout
ce qui était en votre pouvoir pour être le meilleur dans votre job, c’est
forcément bénéfique; se faire rejeter si vous ne vous êtes pas donné à
fond pour être le meilleur, c’est une perte de temps et ça ne sert à
rien.
Grâce à ces conseils, Jeanne a commencé à obtenir quelques
victoires. Comme la plupart des gens qui pratiquent LTDLV pour la
première fois, plus de la moitié de ce qu’elle pensait être une veste
était en fait une opportunité. Elle a signé trois nouveaux clients en un
mois, c’est-à-dire plus que ce qu’elle avait signé au cours des six
derniers mois. Un effet bénéfique de ces réussites a immédiatement
émergé: la confiance. Comment ne pas avoir confiance en elle et en
ses capacités après avoir triplé littéralement son chiffre d’affaires en
une seule semaine?
Je ne dis pas qu’en pratiquant LTDLV vous connaîtrez une
augmentation de 300% de votre chiffre d’affaires, mais seulement
que vous pourriez réussir encore mieux que ce que vous faites
aujourd’hui. Vous pourriez vendre plus que vous ne vendez, vous
pourriez avoir plus de rendez-vous amoureux que vous n’en avez,
vous pourriez avoir une plus grande couverture médiatique, un
réseau plus fort… Bref, peu importe ce que vous essayez d’accomplir
dans la vie, si vous vous forcez à en faire plus que ce avec quoi vous
êtes «à l’aise», vous obtiendrez forcément des résultats. Et ces
résultats, naturellement, vous encourageront et vous donneront
confiance.
Toutes les études montrent que ceux qui croient qu’ils vont réussir
vont y arriver. Enfin… plus souvent que ceux qui pensent qu’ils vont
échouer. Penser que vous allez échouer est une «prophétie
autoréalisatrice»: ce qui n’était qu’une possibilité parmi d’autres
devient réalité.

Réveillez la Wonder Woman


ou le Superman qui sommeille en vous
La raison pour laquelle je dis que la confiance est un superpouvoir,
c’est parce que c’est un mot puissant. Pour Kate Burton et Brinley
Platts, les auteurs de Booster sa confiance en soi pour les nuls22 (je
vous jure que ça existe, j’adore!), avoir confiance en soi, ce n’est pas
seulement se dire «je vais être capable de gérer de façon calme et
décisive tout ce que la vie mettra sur mon chemin», c’est bien plus
que ça.
Selon eux, les gens qui ont confiance en eux ont d’abord un but fort
et des valeurs claires: ils savent exactement ce qu’ils veulent et
comment l’obtenir. Ils sont capables de répondre à une question
existentielle: «Que veux-tu faire de ta vie?»
Ils sont motivés et ils aiment ce qu’ils font dans la vie. Ils n’ont pas
de mal à se lever le matin parce que passer du temps à faire ce que
l’on aime ne demande pas d’effort ni de lutte acharnée. Ils n’ont pas
peur de perdre leur job parce qu’ils savent qu’ils pourront retrouver
du travail ailleurs.
Ils connaissent une stabilité émotionnelle: ils ont une approche
calme et ciblée de la façon d’aborder des difficultés et de prendre en
charge leurs projets et leurs défis. Les personnes confiantes sont
capables d’identifier les émotions qui leur nuisent (colère, anxiété) et
de travailler sur elles plutôt que d’être à leur merci. N’oubliez pas que
l’insécurité génère la peur et que la peur excite nos défenses.
Les personnes confiantes ont un état d’esprit positif: elles restent
optimistes dans toutes les situations et sont capables de voir le bon
côté des choses, même dans les pires situations. Le verre à moitié
plein… Elles ont un regard positif sur elles-mêmes et sur les autres.
Avoir confiance en soi, c’est aussi bien se connaître, savoir en quoi
on est bon, en quoi on est moins bon. Les gens qui ont confiance en
eux savent de quoi ils sont capables et comment ils réagissent face à
telle ou telle situation. Conscients de leurs imperfections – ce sont
des êtres humains –, ils s’entourent de gens qui vont compenser
leurs faiblesses afin de réussir ensemble et mieux. Ce qui ne fait que
renforcer leur confiance.
Ils sont flexibles dans leur comportement, ils l’adaptent en
fonction des circonstances. Les gens confiants sont généralement
capables de comprendre une situation dans sa globalité plutôt que de
focaliser leur attention sur des détails. L’arbre qui cache la forêt… Ils
tiennent compte des points de vue des autres lorsqu’ils prennent des
décisions.
Les personnes confiantes aiment se donner des défis, développer
leur terrain d’action. Elles considèrent chaque jour comme une
nouvelle expérience, une opportunité d’apprentissage, plutôt que de
se comporter comme si elles étaient déjà des pros et n’avaient rien de
nouveau à découvrir. Sur ce point, je voudrais attirer votre attention:
c’est pour moi un marqueur très important qui indique si quelqu’un
est confiant ou trop confiant et arrogant. Les personnes arrogantes
n’ont pas envie d’apprendre parce qu’elles pensent tout connaître,
elles croient être déjà les meilleures. Il est important de noter que la
confiance sans l’humilité est la recette même de l’arrogance. Celui
qui sait tout sur tout et qui vous explique la vie, personne ne l’aime;
alors attention à votre ego, ayez-le à l’œil…
Souvent, les personnes qui ont confiance en elles sont à l’écoute de
leur corps. Elles le respectent et ont le sentiment de savoir comment
faire en sorte que leur énergie coule à flots. Elles gèrent les situations
stressantes sans tomber malades.
Les personnes très confiantes ont la capacité de rebondir face à
l’incertitude, de se mettre en danger même quand elles n’ont pas les
réponses ou toutes les compétences nécessaires pour bien faire les
choses. Elles sont cohérentes dans leur vie et font tout dans ce sens;
elles se mettent au service de leur quête.
Dernier point, que Kate Burton et Brinley Platts ne mentionnent
pas parmi les qualités des gens confiants, mais que j’ai constaté une
multitude de fois dans mes rencontres, c’est le sens des
responsabilités: ils acceptent d’assumer un échec même s’ils n’en
sont pas responsables. Les gens confiants n’ont pas peur de dire: «Je
me suis trompé, c’est moi qui ai fait l’erreur, j’en assume la
responsabilité.» Si vous estimez que vous avez fait ce qu’il faut et que
vous êtes digne de l’affection et de l’admiration des gens, vous n’avez
pas peur de reconnaître votre erreur. Les personnes qui manquent de
confiance se cherchent toujours des excuses ou blâment les autres en
cas d’échec.
Voilà, on a fait le tour de ces qualités incroyables. C’est vrai que ça
donne le tournis et que ça paraît utopique… Vous devez être en train
de vous poser les mêmes questions que moi quand j’ai lu ce livre:
Est-ce possible d’être aussi génial? de cumuler autant de qualités? En
fait, je connais beaucoup de gens comme ça. Beaucoup sont des
entrepreneurs; ils ne se contentent pas d’avoir confiance en eux mais
ont développé des entreprises qui renforcent et cultivent cette
confiance en soi et envers les autres.

Confiance ne rime pas nécessairement avec arrogance


En français, la confiance en soi et la confiance en l’autre, dans la
société ou dans une entreprise sont un seul et même mot, alors qu’en
anglais ils sont différenciés (confidence et trust). Je trouve cela
intéressant car, comme nous l’avons vu, la confiance en l’autre est la
base sur laquelle s’appuient les équipes innovantes et performantes,
et la confiance en soi est celle sur laquelle on va construire l’individu
performant et innovant. Des étudiants à qui un professeur dit avant
un examen «je sais que vous allez très bien vous débrouiller» ont
plus de chance de réussir que si on leur dit l’inverse. Des stagiaires à
qui l’on dit «on est ravis que vous soyez là, vous allez exceller, on
attend de grandes choses de votre part» seront plus performants que
si on leur dit «taisez-vous et essayez de ne pas faire des trucs
merdiques».
Mais comment appliquer tout ça à LTDLV? C’est très simple! Pour
ceux d’entre vous qui, comme moi, ne sont pas nés confiants et
aimeraient le devenir, il est temps de «relancer» la machine de la
confiance et de mettre en place une spirale vertueuse. C’est plus
facile à dire qu’à faire… Pourquoi Jeanne n’a-t-elle pas pris son
téléphone et appelé les gens pour signer avec de nouveaux clients?
Pourquoi Emily n’a-t-elle pas envoyé ses articles au New York Times
avant son année de vestes? Pourquoi ne pouvez-vous pas demander
cette augmentation à votre patron? Parce que nous avons peur! Et
comme pour l’auto-embarras ou les régimes Dukan que nous suivons
avant la saison des maillots de bain, nous avons parfois besoin d’un
cadre, d’une méthode, d’une communauté pour nous aider à suivre la
voie et à trouver la motivation qui nous manque. Les trois étapes de
LTDLV sont un chemin pour commencer le voyage vers la confiance
en soi, elles sont les premiers jalons du cercle vertueux que vos
succès vont générer.
Attention, toutefois, la prudence est de mise en matière de
confiance en soi et de motivation. Je m’appuie dans cette mise en
garde sur l’étude de deux chercheurs brillants formés à Princeton,
Roland Bénabou et Jean Tirole23, laquelle confirme que croire que
vous pouvez faire quelque chose peut effectivement vous aider à y
parvenir, tout en vous avertissant des dangers de la confiance
excessive: «Qu’il s’agisse d’accidents de voiture, d’entreprises
dot.com en faillite, du marché boursier ou des guerres perdues, le
coût d’une confiance excessive est évident pour tous.»
J’ajoute cependant que la confiance en abondance et l’arrogance
sont deux choses distinctes. N’oubliez pas que pour faire preuve de
confiance, il faut être capable de penser avec souplesse et avoir une
appétence pour l’apprentissage, deux caractéristiques qui ne
définissent pas précisément les personnes arrogantes…

Prendre une pause de LTDLV


On me demande souvent si je continue à pratiquer LTDLV. Pas
toujours. Lorsqu’on travaille sur la quête du bonheur, on s’entend
dire que le bonheur est un voyage, pas une destination. Pour LTDLV,
c’est l’inverse. La destination, c’est l’augmentation que vous obtenez
de votre patron, c’est le chiffre d’affaires qui se développe pour que
vous puissiez embaucher. LTDLV n’est pas un mode de vie mais un
moyen de parvenir à vos fins. C’est un peu comme Mary Poppins qui,
une fois que la famille est à nouveau unie et heureuse, s’envole avec
son parapluie vers une nouvelle famille à protéger… Avec LTDLV,
vous pouvez faire une pause quand vous sentez que ça fonctionne.
Jouer avec Mary Poppins, c’est chouette, elle a mille tours dans son
sac, mais l’amour d’un parent sera toujours plus fort que celui d’une
gardienne. LTDLV c’est bien, le quota de vestes, la copine du flop et
l’auto-embarras, ça fonctionne vraiment, mais la confiance en soi et
les réussites qui en découlent, c’est encore mieux! LTDLV est un outil
pour oser plus, pour forcer la porte de l’échec et trouver la voie de la
réussite, «c’est le morceau de sucre qui aide la médecine à passer»…
pour en finir avec la métaphore.
LTDLV, c’est votre plan d’attaque pour aller au bout de votre
ambition, quelle qu’elle soit. Si vous n’avez pas d’ambition brûlante,
si vous vous trouvez à un moment de votre vie où vous vous sentez
satisfait et que vous n’avez pas besoin de vous améliorer de façon
urgente, faites une pause. Je ne dis pas cela d’une manière
sarcastique, comme votre belle-mère pourrait vous donner une
leçon, l’air de rien, sur l’alimentation de vos enfants: «Si tu penses
que tu peux les nourrir avec des plats surgelés deux fois par semaine,
fais-le. Après tout, c’est toi leur mère.» Je le dis sincèrement, le
succès n’est rien si vous ne prenez pas le temps de l’apprécier de
temps en temps. Soyez attentionné à votre égard et prenez le temps
de célébrer ce moment où vous avez atteint votre objectif.
Personnellement, je me suis reposée de LTDLV pendant quelques
mois en écrivant ce livre. Juste avant de signer mon contrat, j’avais
pour objectif d’essayer de travailler avec toutes les grandes marques
de luxe européennes. Après tout, c’est connu, les beaux clients, ça
génère de beaux clients. Plus notre chiffre d’affaires se développe,
plus je peux embaucher des gens créatifs et innovants avec lesquels
je suis heureuse de passer cinquante heures par semaine à travailler
dans une ambiance décontractée et enrichissante. Par ailleurs, j’étais
en train de mettre en place un bureau en Chine. C’est un pays qui me
fascine et dont je suis tombée amoureuse: je veux installer une
équipe là-bas. À moi les vestes exotiques en chinois!
Écrire un livre nécessite une disponibilité immense et un temps
démesuré. J’ai donc mis mes autres ambitions de côté et pris une
pause avec mes trois vestes par jour pendant sa préparation. Mais je
suis bien consciente que pendant la promotion, je vais faire grimper
mon quota à cinq vestes par jour, histoire d’obtenir des émissions de
télé et de radio auprès de tous mes contacts et des papiers dans la
presse nationale et… internationale!
Je fais aussi une pause lorsque je suis en vacances. Avec trois
enfants en bas âge et un mari que je ne vois pas assez au quotidien,
même si on partage la même adresse, LTDLV n’est absolument pas
au programme lorsque nous profitons de quelques jours en famille.
Au fond, vous savez que vous pouvez arrêter de pratiquer LTDLV
lorsque vous commencez à ressentir la confiance décrite plus haut.
Au moment d’entrer en réunion avec votre boss, vous êtes calme et
serein parce que vous savez que vous allez gérer la situation. Vous
allez à un premier rencard en toute sérénité parce que vous savez que
tout se passera bien, et que si cela ne fonctionne pas, ce n’est pas
grave, vous savez que vous êtes sympathique et assez intelligent et
qu’il y a plein de gens qui voudraient sortir avec vous. Si cette
personne avec qui vous avez rendez-vous n’est pas la bonne, eh bien,
il y en aura d’autres. Bien sûr, il y en aura d’autres parce que vous
êtes génial!
Lorsque vous commencez à ressentir cela, c’est que la confiance
s’installe. Je me souviens de la première fois où j’ai ressenti cette
force, et c’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai développé LTDLV:
je voulais comprendre comment faire pour ressentir ça tout le temps
et aider tout le monde à le faire.
Ce sentiment a changé ma vie. J’ai pris conscience que j’étais
assez… Assez intelligente, assez créative, assez belle, assez bosseuse,
assez éduquée, etc., etc. Cela voulait dire que je pouvais être moi-
même. Je continue chaque jour à lutter pour m’améliorer et
apprendre des choses, mais l’insécurité a presque disparu de ma vie;
je ne me sens plus en danger d’être trop grosse (je suis voluptueuse,
c’est tout), de ne pas être épilée impeccablement ou de ne pas avoir
obtenu de MBA.
Esther Perel est une psychologue belge captivante et inspirante,
spécialiste de la thérapie de couple depuis plus de trente ans. Dans
son livre L’intelligence érotique24, elle s’interroge sur ce qui attire les
gens vers leur partenaire même après des années de mariage.
Réponse numéro un: «Quand ils sont dans leur élément, c’est-à-dire
heureux et confiants, parce qu’ils font ce qu’ils aiment faire donc ils
le font bien.»
La confiance est attirante! Je l’ai déjà dit, les recherches montrent
que plus on se sent capable de faire quelque chose, mieux on le fait.
C’est exactement ce que je peux vous aider à faire, chers lecteurs,
c’est ce que je veux pour vous tous qui voulez progresser dans votre
job, dans votre vie. Utiliser LTDLV pour devenir plus confiant, en
finir avec l’insécurité et le doute envers soi-même, pour savourer les
succès et les encouragements et vous sentir mieux dans votre peau. À
tel point que vous pourrez faire une pause, ne plus penser à votre
quota de vestes et simplement apprécier le sentiment d’avoir tant
progressé.
Bonnes VESTEs!

Avant de vous laisser reprendre le fil de votre vie, je voudrais


terminer par quelques mots.
D’abord, merci d’avoir lu ce livre jusqu’au bout. J’ai entendu dire
que l’équation du bonheur aboutit quand la réalité dépasse les
attentes. Selon ces critères, je me sens vraiment, vraiment heureuse.
Je n’ai jamais pensé que je serais un jour une autrice publiée, que des
gens allaient prendre le temps de lire ce que j’avais envie de raconter.
En lisant mon livre, vous contribuez à mon bonheur et à ma
réussite, alors merci. Croyez-moi quand je vous dis que tout ce que
j’ai écrit dans ces pages, ce n’est pas pour moi, c’est pour vous. Je sais
que LTDLV fonctionne vraiment. À l’agence, nous l’enseignons à nos
clients depuis longtemps et nous pensions que cela resterait en
interne. Nous ne pensions pas que d’autres pourraient s’y intéresser
et l’utiliser. Si tout ce que nous avons développé peut vous aider à
aller de l’avant, alors utilisez-le.
Je trouve que beaucoup de dirigeants sont très durs. Créatifs,
expressifs, cultivés et complexes, mais durs. Intolérants à l’échec,
opposés à plein de formes de changement. En développant mon
entreprise et à force de travailler avec mon associée, brillante et
dévouée, et l’ensemble de mon équipe, j’ai appris qu’on peut tout
accomplir dans le bonheur, la bonne humeur et les good vibes,
quand les entreprises traditionnelles continuent à le faire dans
l’austérité, le sérieux et l’autorité… Nous ne sommes pas obligés
d’être sérieux pour faire un boulot sérieux. LTDLV est un outil pour
ajouter de l’audace, du bonheur et du plaisir dans votre job, dans
votre vie privée en général et même dans votre rôle de parent.
Deuxième point, j’aimerais que vous me fassiez part de votre
expérience. Si vous n’avez pas la chance d’avoir une copine du flop, je
serai la vôtre. Je ne peux pas garantir que je pourrai répondre à
chaque message que je recevrai – surtout si ce livre remporte un
grand succès –, mais je pratique LTDLV dans mon entreprise et je
suis impatiente de savoir comment vous la pratiquez. Sachez
cependant que si vous m’écrivez, je vous répondrai probablement en
anglais… Comme vous l’avez peut-être vu au début de ce livre, Olivia
m’a aidée à écrire. Malgré douze années passées dans ce pays, mon
français n’est pas aussi précis que je le souhaiterais.
Dernière chose: audace, créativité et opportunité sont les trois
points que LTDLV va vous aider à développer pour atteindre votre
objectif. Sans oublier qu’elle a pour deuxième effet bénéfique de
renforcer votre confiance en vous, ce qui est un superpouvoir dans
tous les domaines de votre vie. Tout comme une personne confiante
peut faire son travail avec moins de stress, une personne créative
peut faire son travail avec plus d’idées. N’oubliez pas que remplir
votre quota de vestes sans être créatif est dangereux pour votre
réputation ou celle de votre entreprise.
Mais ce livre a été écrit pour partager la capacité d’augmenter son
audace, sa créativité et ses chances à la fois pour soi-même, ses
équipes et sa famille. J’espère que mes réflexions un peu loufoques
vous auront été utiles, et je vous souhaite à tous une longue vie de
réussite et de bonheur. Mais je suis sûre que le chemin qui vous
mènera jusque-là est semé d’échecs et de vestes, alors fixez votre
quota de vestes, trouvez votre copain/copine du flop et commencez
dès aujourd’hui à échouer en toute connaissance de cause.
Je n’ai plus que quatre mots à vous dire, chers lecteurs: merci, et
bonnes vestes!
NOTES

1. Les intelligences multiples, Paris, Retz, 2008.


2. «La sécurité psychologique, ciment de l’équipe parfaite selon Google», Institut Français
du Leadership Positif, 5 mai 2016. www.positiveleadership.fr/la-securite-psychologique-
ciment-de-lequipe-parfaite-selon-google/
3. Françoise Lotstra, «Le cerveau émotionnel ou la neuroanatomie des émotions», Cahiers
critiques de thérapie familiale et de pratique de réseaux, no 29, 2002. Également disponible
en ligne: www.cairn.info/revue-cahiers-critiques-de-therapie-familiale-2002-2-page-
73.htm
4. Éditions De Boeck Supérieur, 2017.
5. «Pourquoi les Français adorent Arte mais regardent TF1», Atlantico, 10 août 2012.
www.atlantico.fr/decryptage/445598/pourquoi-francais-adorent-arte-mais-regardent-tf1-
television-jerome-fourquet
6. «Take bigger risks», Masters of Scale, 25 mars 2019. www.mastersofscale.com/#/shellye-
archambeau-take-bigger-risks/
7. Hendaye, VALOR Éditions, 2020.
8. Venez voir sur youtu.be/sfqFS_lVVbQ à quoi ça ressemble.
9. Parmi eux, citons Heureux comme un Danois, les 10 clés du bonheur, Paris, Grasset,
2014, et Le bonheur sans illusions, Paris, Flammarion, coll. «L’art de la vie», 2017.
10. Virginia E. Sturm et al. «Role of right pregenual anterior cingulate cortex in self-
conscious emotional reactivity», Social cognitive and affective neuroscience, vol. 8, no 4,
2013, pp. 468-74. Également disponible en ligne:
www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3624960/
11. «What I Learned From Spanx Founder Sara Blakely», The James Altucher Show, 13
juillet 2017. www.jamesaltucher.com/podcast/sara-blakely/
12. Pour accéder directement au vidéo: cutt.ly/yogadurire.
13. Son podcast, disponible au www.adamgrant.net, est formidable.
14. Je vous recommande son excellent titre Creative Construction: The DNA of Sustained
Innovation, PublicAffairs, 2019.
15. L’art de la niaque, Paris, JC Lattès, 2017.
16. «Amour», dans Larousse. Consulté en ligne sur:
www.larousse.fr/dictionnaires/francais/amour/3015
17. Trad. Larry Cohen, Paris, Éditions d’Organisation, 2003.
18. Elton John, «I’m Still Standing», Too Low for Zero, 1983.
19. «Innovation: alliez créativité et discipline», Harvard Business Review, 16 mai 2019.
www.hbrfrance.fr/magazine/2019/05/25705-innovation-alliez-creativite-et-discipline/
20. «How to build your confidence – and spark it in others», TED, avril 2019.
www.ted.com/talks/brittany_packnett_how_to_build_your_confidence_and_spark_it_in
_others
21. Paris, Le Livre de Poche, 2014.
22. Paris, Éditions First, 2018.
23. «Self-Confidence and Personal Motivation», The Quarterly Journal of Economics, vol.
117, no 3, 2001, pp. 871–915. Également disponible en ligne:
www.princeton.edu/~rbenabou/papers/papers/CONFQJE2.pdf
24. Paris, Pocket, 2013.
REMERCIEMENTS

J’aimerais remercier tout d’abord Malene Rydahl qui a suffisamment


cru en moi pour me présenter à la meilleure équipe que j’aurais pu
espérer pour cette folle aventure qu’a été LTDLV.
Ensuite, Susanna Lea, Mark Kessler et toute l’équipe de Versilio.
Ils ont cru en moi et m’ont soutenue à chaque étape.
Guillaume Robert et l’équipe de Flammarion qui ont été mes
premiers fans, depuis le début.
Alexandra Sarlieve. Ma workwife et meilleure amie (même si je
sais que je ne suis pas la tienne). Je suis tellement chanceuse d’avoir
une partenaire si talentueuse et créative! Merci d’avoir toujours été
là, à travers les hauts et les bas… allaitement… pauvreté et richesse…
échec et joie… J’espère que nous traverserons des aventures encore
plus incroyables que celle-ci.
Camille Kaddour. Merci pour les heures de travail, de coordination
et d’organisation. Tu es une mammacat en devenir et je suis
heureuse de t’avoir dans mon équipe.
Joanne Mouradian. Depuis le jour où j’ai signé pour ce livre, j’ai su
que c’était à toi de faire la couverture. Ton regard est incomparable
et je savais que si tu étais en charge de la couverture, cela ne pouvait
être que superbe. Merci pour les heures que tu as consacrées à ce
projet.
Kelly Velasquez. Pour avoir toujours été là. Pour avoir toujours
remis de l’ordre dans ma vie quand il n’y en avait aucun. Tu es un
pilier positivité et j’adore tes hugs.
Thomas Degois. Merci d’avoir été un tel champion pour LTDLV. Je
ne crois pas avoir rencontré une personne qui prend mieux les vestes
que toi. Tu es une source d’inspiration.
Gary Pisano qui a été assez gentil pour répondre à mes courriels et
m’a permis d’utiliser ses connaissances et recherches fascinantes.
J’aurais adoré avoir un professeur comme toi à l’école. Tu es brillant.
Dre Jennifer Gelinas. Merci de m’avoir aidée pour mes recherches
sur les études neurologiques et pour tes gentils courriels, 25 ans
après avoir joué ensemble dans ton jardin à Whitecourt, Alberta.
Emily Winter. Tes 100 échecs en 1 an ont été inspirants et
prouvent que seules nos propres limites nous bloquent. Merci d’avoir
répondu à mes questions et d’être devenue une ambassadrice pour le
pouvoir de l’échec.
Merci à ma chère Olivia Karam. Pour qu’une immigrante puisse
trouver «le mot juste» dans une langue qui n’est pas la sienne, il faut
une «écrivaine de l’ombre». Mais toi, tu es tellement plus. Tu es ma
coach, ma pom-pom girl et je t’adore.
À mon cher mari. Te demander en mariage a été la meilleure chose
que j’ai faite de ma vie. Je t’aime plus que jamais et ne pourrai jamais
assez te remercier de continuer à me supporter.
Et enfin à Mike VanCleave, qui m’a littéralement sortie de la plus
sombre période de ma vie. Même si tu es parti, je promets de te
porter avec moi. Tu savais que je pouvais être meilleure que ce que je
croyais, pourtant le meilleur reste à venir. Tu me manques tous les
jours et j’aimerais que tu puisses voir ce que tes enseignements
m’ont apporté. Je promets de te rendre fier à chaque occasion.

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