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LE RISQUE CONTRACTUEL

INTRODUCTION
À la fois instrument juridique et véhicule du commerce, le contrat régit les
comportements réciproques des parties. Souvent supplétif, il est créateur de normes,
de règles et source autonome de droit. C’est un outil fondamental visant à organiser
la vie économique et sociale, et créant un lien entre deux personnes qui s’engagent
volontairement à donner, faire ou ne pas faire quelque chose.
L’article 1101 du code civil français définit le contrat comme,
« Un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer,
modifier, transmettre ou éteindre des obligations »
Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter. Chacun est libre de choisir la
personne avec laquelle il contracte. Les parties sont libres de déterminer le contenu
de leur contrat. C'est le grand principe de la liberté contractuelle.
Si la liberté de contracter confère au contrat une grande souplesse en limitant le
contrôle du juge notamment, il est cependant nécessaire que certaines conditions
minimales soient réunies pour que l’accord de volonté prenne place dans l’ordre
juridique. Ainsi, quatre conditions essentielles sont nécessaires à la validité du contrat
: la capacité, le consentement qui ne doit pas être vicié, un objet certain et une cause
licite.
Le contrat génère des « obligations contractuelles », qu’on peut définir comme étant
un lien de droit en vertu duquel une personne « créancier » exige d’une autre personne
« débiteur » une prestation ou une abstention.
Le contrat s’appuie sur le fondement de la force obligatoire. L’article 230 du DOC
stipule que :
« Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui
les ont faites, et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou
dans les cas prévus par la loi »
Dès qu’il est valablement formé, soit toutes les conditions de validité des conventions
ayant été remplis, les parties sont tenues d’exécuter les obligations qui en découlent.
Le contrat est un objet vivant, parfois si vivant qu’il peut s’avérer mortel, au regard
des engagements stratégiques qui y sont souscrits.
Les contrats sont au cœur de la vie des affaires. Devant l’accélération du
développement industriel, la rapidité des échanges commerciaux, l’instabilité
financière et la crise économique mondiale, la pérennité des engagements
contractuels se trouve mise à rude épreuve. Les circonstances ayant présidé à leur
conclusion évoluent continuellement et connaissent parfois des bouleversements
tels que leur existence même est susceptible d'être remise en cause.
La règle prédit que « Là où il y a contrat, il y a risque ». En concluant un contrat, les
parties s’exposent à des risques qui peuvent être soit internes soit externes au
contrat.
Le risque peut être défini comme
Un événement imprévisible dont l’arrivée aléatoire est susceptible de causer des
préjudices aux personnes, aux biens, ou aux deux à la fois.
Malgré les controverses qui entourent la définition du risque juridique, il est d’usage
de considérer que les risques contractuels sont une composante du risque juridique,
distincte du risque légal. Il est donc intéressant de distinguer entre les deux notions.
Une définition opérationnelle pourrait être :
 Le risque contractuel est spécifiquement lié à l’imprécision, lacunes ou
autres insuffisances de la documentation contractuelle, l’amenant à ne pas traduire
de façon complète et claire la volonté des parties ou à ne pas assurer suffisamment
la protection des intérêts en place.
 Le risque légal recouvre le non-respect des dispositions légales,
réglementaires ou jurisprudentielles encadrant l’exercice des activités de l’entreprise.
Le risque contractuel n’est pas un risque stable ou linéaire sur la durée du contrat, il
est en effet évolutif dès la date de signature du contrat, et son évolution sera
influencée par l’ensemble des événements opérationnels marquant la vie de l’objet
pour lequel il a été créé. Aussi, il est affecté au contrat par les capacités des parties à
exécuter leurs obligations contractuelles.
Le risque contractuel entre ainsi dans la famille des risques dits d’exécution et
s’inscrit dans une dimension temporelle et opérationnelle forte.
Une multitude d'événements peut perturber le déroulement d'une transaction. La
prévention et la répartition des risques revêtent une importance primordiale pour
les parties au contrat. Les praticiens ont élaboré des clauses sophistiquées
permettant d'adapter la relation contractuelle aux circonstances nouvelles. Ces
techniques sont surtout utilisées dans le cadre des contrats à long terme, puisqu’ils
sont d'autant plus vulnérables aux changements de circonstances que leurs effets
s'étalent dans le temps.
Toutes ses préoccupations nous amène à s’intéresser au sujet du risque contractuel.
En premier lieu, il est nécessaire d’aborder les types de risques pouvant nuire au
déroulement d’une convention. En second lieu, il s’agit de présenter quelques clauses
insérées au contrat dont peuvent se prémunir les parties afin de prévenir et gérer au
mieux les risques éventuels.
I. LES RISQUES POUVANT RESULTER DES CONTRATS
Vu comme un outil de résolution de problèmes économiques, le contrat ressemble
beaucoup plus à un pari sur l'avenir qu'à l'agencement prédéterminé et
incontournable de ses éléments constitutifs. Ainsi, l'usure du temps pourra remettre
en cause l'utilité économique de l'opération, révéler l'inadéquation de ses
contreparties, voire engendrer des embûches qui s'avéreront impossibles à
surmonter.
L'outil contractuel devra permettre d'appréhender l'imprévisible et d'aménager
l'inimaginable.
Deux types de risques peuvent nuire au déroulement d'une opération
conventionnelle. Les risques internes sont ceux qui tiennent au comportement de
l'une des parties, alors que les risques externes qui sont perçus comme des
perturbations de la ligne idéale convenues par les parties résultant d’évènements
extérieurs à leur comportement.
A- LES RISQUES INTERNES
Les risques internes sont liés aux contrats et aux parties contractantes. Le risque
majeur qui relève du contrat reste son inexécution. Le contrat est conclu en vue
d’être exécuté suivant le principe de la force obligatoire du contrat.
En principe, les obligations sont exécutées spontanément. Mais il arrive que le
débiteur soit défaillant, c’est-à-dire qu’il n’exécute pas ou qu’il exécute mal ses
obligations.
L’inexécution du contrat comporte plusieurs formes dont les conséquences varient
selon l’action envisagée.
 Exécution tardive
Il s’agit d’un retard d’exécution. C’est le cas où l’obligation est exécutée par le
débiteur mais pas dans les délais prévus au contrat.
Le créancier dans ce cas ne peut pas demander la résolution, il n’a droit qu’à des
dommages-intérêts moratoires. Ces derniers sont destinés à réparer le préjudice
causé au créancier par le retard du débiteur à exécuter correctement son obligation.
Le créancier peut engager la responsabilité contractuelle de son contractant. Il doit
prouver que ce retard dans l’exécution lui a causé un préjudice, et le droit à des
dommages et intérêts ne lui est ouvert que s’il a adressé à son débiteur une mise en
demeure.
 Exécution défectueuse
Il s’agit d’une mauvaise exécution de l’obligation. Bien que le débiteur ait exécuté
son obligation, il ne l’a pas fait dans les termes prévus au contrat.
 Inexécution partielle ou totale
Elle est considérée comme un défaut d’exécution. En matière de responsabilité
contractuelle, le montant de la réparation varie proportionnellement à l’inexécution.
Dans le premier cas, la partie a exécuté son obligation mais pas totalement. Le
créancier ne peut demander la résolution du contrat.
Dans le deuxième cas, la partie n’a pas exécuté son obligation. Le créancier peut
demander au juge soit la résolution, soit les dommages-intérêts compensatoires.
Lorsqu’une des parties n’exécute pas ses obligations contractuelles, le créancier se
retrouve face à l’alternative suivante : il peut soit chercher à remédier à l’inexécution,
c’est-à-dire à obtenir l’exécution du contrat, soit chercher à anéantir le contrat.
Le créancier peut tout d’abord faire pression sur son cocontractant en faisant appel
au jeu de l’exception d’inexécution prévu par l’article 235 du DOC, qui suppose que
la partie ayant subi le préjudice peut s’abstenir et ne pas exécuter son obligation
jusqu’à ce que le débiteur l’exécute en premier. Il peut également demander au juge
d’ordonner l’exécution forcée du contrat. En effet, aux termes de l’article 259 du
DOC, le créancier a le droit de contraindre le débiteur à honorer ses engagements.
L’exécution forcée porte sur la personne même du débiteur ou sur ses biens.
S’il souhaite anéantir le contrat, il peut demander au juge de prononcer la
résolution du contrat.
A côté du risque d’inexécution, il existe d’autres types de risques tels que la qualité
des parties, la nature de l’acte, et la personne qui a la capacité ou la qualité de rédiger
l’acte, ou encore les clauses abusives.
B- les risques externes
Certains évènements extérieurs à la volonté des parties peuvent avoir des
conséquences sur le contrat lui-même. Le contrat peut ne plus pouvoir être exécuté
en raison de la survenance d’évènements particuliers.
Ce type de risques résulte d’un événement imprévisible au contrat. Cette imprévision
résulte d’un bouleversement inattendu, d’un déséquilibre contractuel qui peut
résulter notamment de la force majeure ou d’autres évènements futurs qui rendent
l’exécution du contrat impossible ou difficile.
A ce propos, il peut s’agir de risques sociopolitiques tels les innovations législatives
ou fiscales, les interventions réglementaires des pouvoirs publics, les interventions
d’importation ou d’exportation ou de transfert de devises. Il peut s’agit également de
risques économiques tels les fluctuations des prix, les pénuries de matières
premières, les offres concurrentielles.
Il peut aussi s’agir de la force majeure. Celle-ci est définie comme tout fait que
l’homme ne peut prévenir, et qui rend impossible l’exécution de l’obligation. C’est
une cause d'exonération de responsabilité pour le débiteur lorsque l'inexécution de
ses obligations ne lui est pas imputable.
En somme, la violation des règles édictées par la loi entraîne l’annulation du contrat.
Aussi, le manquement d’une des parties engagées à ses obligations contractuelles
conduit selon les cas à la résolution du contrat ou à des dommages-intérêts au profit
de la partie ayant subi le préjudice.
II. Les clauses permettant de lutter contre les risques
Dans une économie mondialisée, conclure un contrat recèle souvent autant
d’opportunités que de menaces. Ainsi, pour une organisation structurée telle
l’entreprise, la prise de conscience de l’impact potentiel des risques contractuels sur
sa sécurité juridique, sa pérennité, son image demeure d’une importance primordiale
pour la continuité de ses opérations.
Le contrat n’a plus seulement pour objet d’assurer un transfert de propriété sur un
bien, un service ou un transfert de risques mais s’inscrit dans une stratégie globale
d’entreprise en tant que vecteur de différenciation stratégique et de sécurisation
des risques. De ce fait et face à la complexité sans cesse croissante de
l’environnement économique et juridique, la préservation des intérêts de celle-ci
dans ses relations commerciales avec ses contractants prend une dimension
stratégique.
Pour autant, les risques contractuels comptent souvent parmi les risques d’entreprise
les moins maîtrisés, en particulier au regard de leur caractère évolutif tout au long
de la vie du contrat.
La réduction du risque juridique passe par une réduction pure et simple de
l’incertitude. Une bonne gestion du risque contractuel suppose, quant à elle,
d’appréhender l’optimum entre le niveau de risque justifiable économiquement et
la maîtrise des effets d’une incertitude acceptée.
Le souci d’insérer des clauses dans un contrat surtout de longue durée procède d’une
logique confirme à une approche plus globale, celle de la gestion des risques encourus
par les contractants dans l’exercice de leurs activités.
La gestion du risque consiste à analyser au préalable et de façon globale, l'ensemble
des risques qui pourront éventuellement affecter le contrat liant les parties. Le but
est de chercher à les supprimer, ou à les minimiser afin d'assurer la conclusion des
obligations de chacun des concernés, tout en évitant la mise en péril les intérêts en
place.
Plus prudentes, les parties préféreront ne rien laisser au hasard et doter leur relation
de mécanismes d'adaptation leur permettant d'enchâsser l'instabilité au sein même
de leur contrat.
Les clauses de gestion des risques instituent au sein de la relation contractuelle un
mécanisme qui adaptera le contrat sans en affecter la solidité puisqu'aucun nouvel
accord de volontés ne sera nécessaire à ce moment-là. Leur insertion implique la prise
en considération par les parties des risques d'ordre économique et financier.
Ces clauses portent sur des évènements qui sont par nature prévisibles puisque les
parties ont pu en manifester les effets par avance. Les situations couvertes par ces
clauses ne poseront donc pas, en principe, de difficultés d'exécution puisque les
parties auront prévu, dès la conclusion du contrat, les conséquences des
changements de circonstances sur ce dernier.
A- LES CLAUSES DE GESTION DES RISQUES INTERNES
 Clause pénale
C’est une clause par laquelle les contractants fixent préventivement et
forfaitairement un montant des dommages-intérêts qui pourraient être dus en cas
d’inexécution des obligations contractuelles.
Elle a pour objet de fixer de manière forfaitaire le montant des dommages-intérêts
susceptibles d’être versés au cas où une partie ne remplit pas son obligation.
L’essentiel de cette clause est de prévoir, à titre de réparation, une somme invariable
quel que soit l’ampleur du préjudice.
Toutefois, si la somme est très élevée, elle constitue une excellente incitation à
s’exécuter.
Mais la tendance à abuser du procédé a suscité une intervention législative, qui
dispose désormais, que le tribunal peut réduire ou augmenter le montant des
dommages-intérêts convenu, et que toute clause contraire est réputée nulle,
conformément à l’article 264 du DOC.
Cette régulation judiciaire est d’ordre public.
 Clause résolutoire
Il s’agit d’une clause prévoyant à l’avance la résiliation automatique dans le cas où
l’une des parties ne respecte pas une de ses obligations contractuelles.
Elle permet à une partie soit de réclamer l’exécution soit d’exiger la résolution du
contrat de plein droit.
 Clause de responsabilité
Il peut s’agir de la clause de non-responsabilité ou de la clause limitative de
responsabilité.
Clause de non-responsabilité
C’est une clause qui tend à exclure toute responsabilité du débiteur, donc tout droit
à des dommages-intérêts au profit du créancier, en cas de défaillance de sa part.
Cette clause est validée dans la vente conformément à l’article 544 du DOC.
Elle est parfois interdite dans certains types de contrats :
« Est déclarée nulle toute clause ayant pour objet de limiter ou d’écarter la garantie
du loueur d’ouvrage pour les défauts de son œuvre »
De plus, on admet généralement que la clause est inopérante s’il y a eu une faute
intentionnelle, ou négligence grave du débiteur.
Clause limitative de responsabilité

C’est la clause par laquelle il est prévu, par avance, que l’inexécution du contrat ou
d’une obligation du contrat ne donnera lieu qu’à une indemnité ne pouvant pas
excéder un certain montant.
Cette clause consiste, en cas d’inexécution, à ce que la réparation due par le débiteur
ne dépassera jamais la limite assignée.
Elle tend à fixer un plafond au montant des dommages-intérêts éventuellement dus.
 Clause de réserve de propriété
Elle permet de retarder le transfert de propriété jusqu’au parfait paiement du prix
par l’acheteur.
En cas de non-paiement par le débiteur, le créancier peut invoquer cette clause pour
récupérer le bien qui ne lui a pas été payé.
 Clause de suspension du contrat
Une clause suspensive est une clause qui suspend l'existence d'un droit ou
l'exécution d'un contrat jusqu'à ce que l'événement mentionné dans ledit contrat
se réalise.
Si l'événement attendu ne se produit pas, le droit ne peut être exercé ou le contrat
est annulé.
Si l'événement attendu se produit, le droit est actionné ou le contrat est conclu.
B- LES CLAUSES DE GESTION DES RISQUES EXTERNES
Clause de Hard Ship
Appelée aussi « clause de renégociation », le mot hard Ship signifie les coups durs.
C’est une clause d’imprévision, qui vise à régler les conséquences de modifications
fondamentales et profondes des conditions économiques bouleversant l’équilibre
du contrat.
Dans les contrats dont l'exécution s'étale sur un espace temporel de plusieurs années
ou sur une période d'une durée indéterminée, cette clause insérée dans une
convention, permet à l'une comme à l'autre des parties signataires d'exiger que
s'ouvre une nouvelle négociation lorsque la survenance d'un évènement de nature
économique ou technologique, bouleverse gravement l'équilibre des prestations
prévues au contrat.
Clause d’indexation
Connue aussi sur le nom de « variation automatique » ou « d’échelle mobile ».
Elle a pour rôle de modifier de plein droit l’objet de l’obligation.
Elle modifie généralement le montant de l’obligation, la somme d’argent, en
fonction des changements enregistrés sur le taux de change, ou les indices mesurant
le prix d’un produit ou d’un service déterminé ou le niveau général des prix.
Cette clause ne concerne que l’obligation pécuniaire.
Elle trouve son efficacité, dans la garantie contre les bouleversements économiques,
et en particulier contre la dépréciation de la monnaie.
Cependant, il existe d’autres types de clauses qui pourront être efficaces pour la
gestion des risques externes. Il s’agit notamment des clauses de change ou encore
des clauses d’adaptation.

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