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2011TA CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES

CROISSANCE ET
DÉVELOPPEMENT DES PLANTES
Section 2 : facteurs de la croissance et du développement
de la plante
I. GÉNÉRALITÉS propriétés héréditaires des cellules végétales au cours de
75. – La croissance et le développement sont des processus la croissance sont mal connues chez les plantes supérieu-
qui ne se font pas au hasard. Ils sont soumis à une régula- res. Elles sont sûrement faibles ;
tion. Ils sont, dans une large mesure, ordonnés à l’avance – il peut également arriver que le comportement parti-
en ce sens que connaissant la nature de la semence, on culier de certains organes résulte de la présence dans
peut prévoir les caractéristiques de la plante qui en leurs cellules de substances chimiques actives, très sta-
Liste découle. L’aptitude à une croissance rapide, la morpholo- bles et ne migrant pas ; nous verrons de telles substan-
gie, la précocité de floraison sont des propriétés prévisibles ces dans le chapitre des régulateurs (cf. n. 168).
parce qu’héréditaires.
79. – b) L’action de facteurs extérieurs à la cellule ou à
Ces propriétés sont inscrites dans la cellule de départ, l’organe sur sa croissance et son développement est
Ta b l e dans l’œuf, puis transmises à la suite des mitoses à toutes l’aspect de la physiologie végétale le plus largement étudié.
les cellules de la plante pour se retrouver finalement, en
partie, dans les gamètes. Leur transmission au cours des Cette étude, sans pouvoir, à elle seule, expliquer les méca-
générations successives de plantes est par ailleurs étudiée nismes de la régulation dont elle ne considère qu’un des
en génétique. aspects, est cependant à l’origine de nombreuses applica-
tions agricoles.
Index Cependant, sur une plante, il faut bien admettre que les
cellules d’une tige, d’une feuille ou d’une racine ne fonc- On distinguera :
tionnent pas toutes de la même manière et la question – les facteurs de l’environnement physique : tempéra-
qui se pose est de savoir pourquoi. Que sait-on de l’ori- ture, lumière ;
gine de ces différences de comportement ?
– les facteurs de l’environnement chimique : oxygène,
Glossaire 76. – Deux explications probablement complémentaires eau et aliments minéraux ;
sont possibles. – les régulateurs hormonaux, substances organiques
– Les propriétés des cellules – on dit aussi leur état de apparaissant naturellement, agissant à très faible dose
compétence – ont changé au cours de la croissance à et capables de migrer dans la plante.
laquelle elles participent.
– Les différences de comportement résultent de l’action de A ces substances naturelles nous ajouterons des substan-
facteurs extérieurs auxquels les ensembles cellulaires (no- ces synthétiques qui ont des propriétés simulant celles des
tamment les méristèmes et les bourgeons) sont soumis. substances naturelles et qui ont reçu des applications en
agriculture, notamment dans le domaine du désherbage.
77. – a) L’état de compétence des cellules se modifie au
cours de la croissance. Les rameaux de l’extrémité d’un
arbre n’ont pas les mêmes propriétés que ceux de la base. II. FACTEURS
Si on les isole pour les greffer ou les bouturer, l’arbre résul- DE L’ENVIRONNEMENT PHYSIQUE
tant du greffage ou l’enracinement de la bouture dépen-
dent du lieu de prélèvement sur la plante d’origine. Les A. Température
pépiniéristes le savent bien et en tirent le meilleur parti.
78. – La modification de l’état de compétence résulte 1. Températures létales
d’au moins deux séries de processus : 80. – On signalera tout d’abord les températures létales,
– le matériel héréditaire localisé en particulier dans le noyau températures extrêmes, froides ou chaudes, qui détruisent la
cellulaire et transmis au cours de la mitose aux cellules structure cellulaire et ne permettent pas la survie de la
filles a évolué. Cette évolution se traduirait le plus souvent plante. Le gel, par exemple, détruit de nombreuses plantes
par une perte d’aptitude comme c’est le cas de certaines sensibles (pommes de terre, maïs). D’autres plantes résistent
racines et de certaines feuilles incapables, par exemple, de à des températures plus basses (– 12 à – 17 °C pour les
régénérer une nouvelle plante par bouturage. céréales d’hiver). La résistance au froid ou à la chaleur
Des recherches récentes sur les microorganismes sem- dépend tout d’abord de l’espèce et de la variété et également
blent montrer que les cellules peuvent aussi acquérir des de l’endurcissement, aptitude à mieux résister, conférée par
aptitudes nouvelles. Cependant, les modifications des l’application progressive de températures excessives.

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2. Température et croissance : une élévation de température de 10 °C. Au voisinage de
Entre ces extrêmes, la température est un facteur de régu- 0 °C, la respiration s’annule et les sucres solubles non
lation important de la croissance des plantes. Il est utilisés peuvent s’accumuler (tubercule de pomme de
cependant assez difficile d’étudier l’action de ce facteur terre). Dès que la température s’élève au-dessus de 40 °C,
dans les conditions naturelles où il varie au cours de la la respiration, d’abord très fortement augmentée, dimi-
journée et selon les saisons, présentant une certaine alter- nue brusquement et la plante meurt (fig. 12).
Respiration
nance à laquelle d’ailleurs les plantes sont sensibles. (CO2 dégagé)
81. – Pour tracer des courbes de croissance en fonction de
la température, on caractérise la température journalière
par une seule donnée en utilisant la température moyenne
entre le minimum et le maximum journaliers. On peut
également utiliser des enceintes climatiques artificielles
dans lesquelles la température peut être maintenue cons-
tante pendant toute la durée de l’expérience. Du tracé de
telles courbes (fig. 11) se déduisent les températures
cardinales : le zéro de végétation, température minimum au- Température
dessous de laquelle la croissance est nulle, la température opti- 0 10 20 30 40 50
mum qui donne la meilleure croissance et la température
Fig. 12. – Variation de l’intensité respiratoire en fonction
maximum au-dessus de laquelle la croissance s’annule.
de la température. Liste

Croissance 3. Thermopériodisme
Zone de croissance 85. – On appelle thermopériodisme la réaction de la
"proportionnelle"
plante à des alternances de température, soit à l’échelle de Ta b l e
la journée, soit à l’échelle de l’année (thermopériodisme
annuel). On constate que le thermopériodisme journalier
est généralement favorable à la croissance de la plante,
alors que le thermopériodisme annuel permet à la plante
d’accomplir certaines phases de son développement I n dex
(levée de dormance, mise à fleur). Pour l’instant on en
Temp rature connaît mal les mécanismes.
10 20 30 40 C
to topt. tmax.
B. Lumière
Glossaire
Fig. 11. – Courbe de croissance en fonction de la température 1. Généralités
86. – La lumière constitue un facteur très complexe dont
82. – Entre le zéro de végétation (t0) et la température nous retiendrons trois aspects.
moyenne journalière des climats tempérés (tm) la crois- a) Énergie transportée
sance apparaît à peu près proportionnelle au supplément 87. – Les rayons lumineux transportent une énergie que
de température (tm – t0). Si par exemple pour le maïs, l’on peut mesurer. L’éclairement d’un objet s’exprime en
t0 = 10 °C, le supplément de température d’une journée calories reçues pendant un certain temps sur une surface
pour laquelle tm = 21 °C est de 11 °C. donnée (une feuille reçoit par temps moyen au cours de
83. – Pour des conditions climatiques pas trop excessives, la journée environ 270 cal./cm2/sec.). On peut également
en additionnant les suppléments de température dont a évaluer cette énergie d’après la sensation lumineuse
bénéficié la plante chaque jour de sa vie, on obtient un qu’elle produit sur l’œil ou sur une cellule photo-
chiffre appelé somme de température qui est assez étroite- électrique ; l’unité est alors le lux (un beau soleil donne
ment relié pour chaque sorte de plante à sa croissance un éclairement de 75 000 lux).
cumulée et à ses phases de développement. C’est ainsi que b) Nature des radiations
telle variété de maïs a besoin d’une somme de température
88. – La lumière blanche est faite d’une somme de radia-
de 500 °C durant la période semis-floraison femelle.
tions qui se chevauchent et que l’on sait séparer artificiel-
84. – Les mécanismes d’action de la température sur la lement (ultraviolet de longueur d’onde inférieure à
croissance sont simples ; elle conditionne les réactions du 400 nm1, visible compris entre 400 et 800 nm, infrarouge
métabolisme et en particulier la respiration qui fournit supérieur à 800 nm). Certaines de ces radiations sont
l’énergie nécessaire à la synthèse des constituants organi- arrêtées par les pigments végétaux (chlorophylle,
ques dont dépend la croissance. phytochrome) ; leur énergie donne à ces pigments des
L’intensité respiratoire varie avec la température entre 0 propriétés nouvelles dont dépendent directement la
et 40 °C à peu près comme la vitesse des réactions chimi- croissance et le développement des végétaux.
ques. C’est-à-dire qu’elle se trouve environ doublée par 1. nm = nanomètre = milliardième de mètre.

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c) Durée de l’éclairement lumière, comme à l’obscurité, la plante respire, ce qui


masque en partie l’effet de la photosynthèse.
89. – On appelle photopériode la durée relative de l’éclai-
rement naturel au cours d’une journée de 24 heures. 95. – La photosynthèse apparente est caractérisée par les
C’est ainsi que dans l’hémisphère nord les photopériodes échanges gazeux globaux obtenus en présence de lumière.
sont relativement longues l’été et courtes l’hiver. C’est donc une estimation qui néglige la respiration ; cepen-
Le photopériodisme est la réaction de la plante à la pho- dant, dans les conditions photosynthétiques normales, la
topériode à laquelle elle est soumise. Nous verrons qu’il respiration n’est que le 1/10e de la photosynthèse. La mesure
intervient dans les processus de croissance et de dévelop- de la photosynthèse apparente constitue une approximation
pement (mise à fleur, dormance, tubérisation). souvent suffisante de l’activité photosynthétique.
96. – La photosynthèse réelle est obtenue en ajoutant aux
2. Rôle trophique de la lumière : photosynthèse échanges globaux (photosynthèse + respiration), mesurés
en présence de lumière, ceux qui résultent de l’activité res-
90. – La lumière permet la photosynthèse, série de processus
piratoire mesurés à l’obscurité. Cela suppose l’absence
par lesquels la plante fabrique ses aliments organiques en
d’interaction entre la lumière et la respiration, ce qui n’est
utilisant l’énergie lumineuse, le CO2 de l’atmosphère et
pas le cas. On a en effet observé des changements impor-
l’eau de ses cellules. tants de l’intensité respiratoire en présence de lumière.
Les aliments organiques assurent la respiration et consti- 97. – On appelle photorespiration l’accroissement parti-
tuent plus des 9/10e de la matière sèche de la plupart des culier de l’intensité respiratoire provoqué par une illumi-
tissus végétaux. On en déduit facilement que, par son nation et réduisant ainsi la photosynthèse.
Liste rôle trophique, la lumière est le facteur essentiel de la
croissance pondérale des végétaux. La photorespiration est élevée pour les plantes des pays
tempérés et froids alors qu’elle est faible pour le maïs et la
91. – Elle rend ces plantes autotrophes, c’est-à-dire capa- canne à sucre mieux adaptés aux fortes luminosités de
bles de subsister dans un milieu entièrement minéral (eau leur zone de culture.
Ta b l e + sels minéraux + CO2) sans recourir à d’autres êtres
vivants ou aux substances organiques qu’ils fabriquent. b) Réactions de la photosynthèse
Les plantes autotrophes sont cependant capables d’absor- 98. – Le volume de CO2 assimilé étant égal à celui de O2
ber par leurs racines des substances organiques solubles dégagé, on a longtemps pensé que les hydrates de car-
dans l’eau (sucres, acides aminés, vitamines, régulateurs de
Index croissance). Dans les conditions naturelles, en raison de la bone (glucides) formés provenaient de la combinaison
compétition avec les micro-organismes du sol, cette source de l’eau avec le carbone résultant de la décomposition de
de carbone est quantitativement négligeable. CO2 selon la réaction globale :
92. – Il existe des végétaux hétérotrophes qui ne peuvent (lumière)
se contenter d’une nourriture purement minérale ;
Glossaire CO2 + H2O → GLUCIDES + O2
parmi eux : les plantes parasites (cuscutes, orobanches)
puisent à l’aide de suçoirs dans les tissus des plantes hôtes En réalité, en utilisant de l’eau renfermant l’isotope lourd
les aliments organiques dont elles ont besoin ; les plantes de l’oxygène *O, on a montré que l’oxygène émis prove-
carnivores (drosera), aux aptitudes très curieuses, peu- nait de la décomposition (ou photolyse) de l’eau ; seul
vent assimiler, grâce à des dispositifs de préhension et un l’hydrogène (H2) de l’eau est utilisé à la synthèse des glu-
équipement enzymatique particulier ( protéases ), des cides selon la réaction :
substances carbonées et notamment les acides aminés
résultant de la digestion de petits animaux. (lumière)
93. – L’assimilation s’effectue au niveau des organes chlo- CO2 + 2H2*O → (HCHO) + H2O + *O2
rophylliens (organes assimilateurs constitués par les jeu- 99. – L’incorporation du CO2 résulte d’une série de trans-
nes tiges et les feuilles) des plantes vertes, la chlorophylle
ferts d’énergie (énergie lumineuse en énergie chimique) et
étant le principal pigment responsable. Les produits qui
de réactions très complexes. Il y a d’abord des réactions
en résultent ne sont pas tous utilisés sur place. Pour
photochimiques ou lumineuses qui comportent :
l’essentiel ils migrent, servant à alimenter des tissus
momentanément (méristèmes) ou définitivement (raci- – la capture de l’énergie d’une partie des rayons lumi-
nes, tubercules souterrains) hétérotrophes. neux par deux systèmes photorécepteurs I et II
constitués en particulier des chlorophylles et d’autres
a) Échanges gazeux pigments accessoires comme les phycobilines et cer-
94. – Il est très facile de montrer que les plantes vertes tains caroténoïdes ;
éclairées absorbent du gaz carbonique (CO2) et rejettent – la décomposition de l’eau : dégagement d’O2, fixation
de l’oxygène (O2) alors qu’à l’obscurité, à cause de la respi- de H2 sur les accepteurs intermédiaires et mise en
ration, c’est le contraire qui se produit. La quantité de CO2 réserve de l’énergie chimique.
absorbée est sensiblement égalé à la quantité d’O2 rejetée.
Les réactions lumineuses se passent en des temps très
On exprime l’intensité photosynthétique par le volume courts et ne sont pas sensibles à la température. Elles sont
d’O2 émis par unité de temps et unité de masse ou de limitées par la quantité d’accepteur d’H2 disponible.
surface de l’organe placé à la lumière. Cependant, à la

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100. – Il y a ensuite les réactions sombres, réactions chi-
miques ordinaires, pouvant se passer aussi bien à l’obs- p
curité qu’à la lumière. Comme toutes les réactions chimi- A

O2 dégagé
ques, les réactions sombres sont sensibles à la eg
température, l’optimum se situant autour de 30 °C.

Elles permettent l’incorporation de CO2 grâce à l’énergie B


accumulée au cours des réactions lumineuses en utilisant
l’H2 des accepteurs. Ces derniers, libérés de l’H2, sont à 0,1 0,5
nouveau disponibles pour les réactions lumineuses. Les Lumière solaire
c
réactions sombres conditionnent donc les réactions
lumineuses et on comprend pourquoi la température Fig. 13. – Influence de l’intensité lumineuse sur les échanges
peut avoir une action sur l’activité photosynthétique glo- gazeux mesurés (Photosynthèse moins Respiration).
bale. De même une lumière intermittente, c’est-à-dire A : plante de soleil, B : plante d’ombre, C : point de
faite d’éclairs brefs séparés par de courtes périodes d’obs- compensation, la photosynthèse égale la respiration, les
échanges sont nuls, p : photosynthèse, eg : échanges gazeux.
curité (l/50e de seconde) permet une meilleure utilisation
de l’énergie lumineuse (les réactions sombres ayant le
temps de se produire). Cette constatation, qui date de – Teneur en CO2
1932, n’a pas été suivie d’application.
103. – Lorsqu’une plante soumise à un éclairement déter- Liste
c) Produits formés et migration miné reçoit une atmosphère de plus en plus riche en CO2,
101. – C’est l’amidon qui est le glucide le plus fréquem- la photosynthèse, nulle pour de très faibles concentrations,
ment élaboré au terme de la photosynthèse. Cependant s’accroît rapidement pour atteindre un palier, le plateau de
de nombreuses plantes forment d’abord du saccharose saturation en CO2, dont le niveau dépend des autres fac-
Ta b l e
ou parfois du glucose ou du fructose. Dans le cas général, teurs limitants et essentiellement de l’éclairement (fig. 14).
l’amidon formé s’accumule en une réserve temporaire
qui sera solubilisée ultérieurement, la nuit principale-
(Intensité photosynthétique)

ment, en sucres plus simples et migrera vers les lieux


d’utilisation : méristèmes, fruits, tubercules. a
I n dex
O2 dégagé

La migration s’effectue principalement sous forme de sève


élaborée, liquide sirupeux qui migre dans le phloème. b
d) Facteurs de variation
Glossaire
– Éclairement
0,034 0,1 0,2 CO2 pour cent
102. – La photosynthèse s’accroît avec l’éclairement.
Lorsque ce dernier est très faible, l’émission photosyn- Fig. 14. – Intensité de la photosynthèse
thétique d’oxygène compense l’absorption respiratoire : en fonction de la teneur de l’air en CO2,
c’est le point de compensation lumineuse. Puis la quan- et pour deux intensités lumineuses.
tité de lumière s’élevant, le dégagement d’O2 s’accroît a : éclairement 10 000 lux ; b : éclairement 2 500 lux.
régulièrement et atteint un maximum. Lorsque le maxi-
mum est atteint, si l’éclairement augmente, la photosyn-
thèse reste constante, elle a atteint le plateau de satura- La teneur de l’atmosphère en CO2, 0,03 %, ne permet
tion . Les autres facteurs sont devenus insuffisants et généralement pas d’atteindre le plateau de saturation.
limitent ainsi l’efficacité de la lumière (loi des facteurs C’est ainsi que l’on peut augmenter l’activité photosyn-
limitants). thétique en enrichissant l’atmosphère des serres en CO2.
Dans les conditions naturelles, le point de compensation On triple le rendement en multipliant par 5 le taux de
est atteint en général pour quelques centaines de lux et le CO2. On peut élever la teneur en CO2 de l’atmosphère
plateau de saturation vers 30 000 lux. Cependant les jusqu’à 1 % sans intoxiquer les plantes ; ce n’est que vers
résultats dépendent de la nature des plantes et l’on dis- 2 à 5 % que le CO2 devient toxique.
tingue les plantes de soleil pour lesquelles le maximum
de photosynthèse correspond souvent à une lumière – Température
égale, voire supérieure à la lumière solaire, et des plantes
d’ombre dont le plateau de saturation est atteint avec des 104. – L’action de la température est moindre dans les con-
éclairements beaucoup plus bas. Sur un même arbre, les ditions naturelles où les facteurs limitants sont plutôt la
feuilles poussées à l’ombre ou au soleil présentent des teneur en CO2 et la lumière. D une façon générale, l’inten-
différences analogues. A noter que des éclairements très sité croît jusque vers 30 °C pour diminuer ensuite et s’annu-
élevés peuvent réduire la photosynthèse, en particulier ler vers 45 °C. Les algues d’eau thermale font exception :
celle des plantes d’ombre (fig. 13). leur photosynthèse reste active parfois jusqu’à 75 °C.

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– Autres facteurs. également dans ce cas annuler l’effet du R.C. Cela a été
105. – La teneur en chlorophylle des tissus est susceptible montré sur la mise à fleur de différentes plantes.
de faire varier l’intensité photosynthétique. Une diminu-
tion sensible peut résulter d’une chlorose ou d’une atta- III. FACTEURS
que parasitaire et en particulier virale. Enfin, de nom- DE L’ENVIRONNEMENT CHIMIQUE
breux autres facteurs jouent également un rôle : qualité
des pigments et des enzymes, structure des organes, A. Oxygène
répartition des stomates et, comme nous le verrons pour
les plantes terrestres, l’alimentation en eau.
1. Généralités
3. Lumière et phytochrome 109. – Une des caractéristiques de la matière vivante est
la transformation perpétuelle des molécules dont elle est
106. – L’effet de la nature des radiations sur la croissance et constituée : c’est le métabolisme.
le développement des plantes, indépendamment du rôle
A partir de matériaux simples, le végétal fabrique des
trophique de la lumière, a été mis en évidence lorsque,
corps plus complexes (cellulose, protéines) utilisés à édi-
après avoir réussi à séparer les différentes radiations de la
fier de nouvelles structures ou mis en réserve : c’est la
lumière blanche, on a observé que la germination des
synthèse ou anabolisme. Parallèlement, de grosses molé-
semences de laitue qui nécessite la lumière, est activée par
cules sont dégradées en composés plus simples. C’est évi-
la lumière rouge clair (R.C. de longueur d’onde = 660 nm)
demment le cas des aliments et des réserves qui, pour
et supprimée par la lumière rouge sombre (RS = 730 nm).
Liste migrer vers les lieux d’utilisation, doivent être transfor-
107. – Une deuxième observation déterminante fut la més en composés plus simples et solubles (sorte de diges-
suivante : les radiations R.C. et R.S. sont mutuellement tion dont la plus connue est l’hydrolyse de l’amidon en
antagonistes dans leur effet, en particulier si on applique sucres solubles au cours de la germination). C’est le cas,
successivement les deux types de radiations ; c’est l’effet moins évident, de nombreux constituants de la matière
Ta b l e de la dernière que l’on observe, par exemple, pour la ger- végétale qui ont la propriété de se renouveler sans arrêt.
mination des semences sensibles. Les protéines cytoplasmiques par exemple ont une durée
Cette réversibilité résulte des propriétés d’un pigment de vie limitée à quelques jours. Elles sont inexorablement
appelé phytochrome qui a pu être isolé. Il s’agit d’une dégradées en acides aminés, ces derniers pouvant être
protéine fixée sur un groupement chimique dont la réutilisés pour de nouvelles synthèses protéiques.
Index nature l’apparente aux chlorophylles. Le phytochrome, 110. – L’ensemble de ces transformations nécessite de
grosse molécule, ne peut migrer. Son action s’exerce sur l’énergie. Elle est fournie par la dégradation plus com-
place où il existe en faible quantité sous deux formes, plète de certaines molécules (sucre et acides organiques) :
P730 forme active, et P660, forme inactive. c’est le catabolisme.
Glossaire Le R.C. transforme P660 en P730 et le R.S. a l’effet inverse Cette dégradation, accompagnée d’une consommation
comme l’indique le schéma : d’oxygène et d’un rejet de gaz carbonique, constitue la
respiration. En l’absence d’oxygène l’énergie est fournie
par une dégradation spéciale qui est la fermentation.
RC
P660 P730 2. Échanges gazeux
RS 111. – Le phénomène s’exprime extérieurement par une
absorption d’oxygène et un rejet de CO2. Chez la plante
La lumière naturelle, bien que renfermant les deux types
de radiations, déplace l’équilibre vers P730 et a donc le verte, l’étude de la respiration est compliquée du fait de la
photosynthèse qui se traduit par des échanges gazeux
même effet que le RC.
opposés.
108. – Les quantités de P730 dans les tissus végétaux sont à
L’intensité respiratoire se mesure par le volume d’oxy-
l’origine des réactions de photosensibilité. Par exemple, les gène (O2) consommé par unité de masse végétale, pen-
embryons des semences qui ne germent qu’à la lumière ont
dant une unité de temps choisie (ex. : ml d’O 2 par
besoin d’un certain taux de P730 pour démarrer leur crois-
gramme de matière fraîche et par heure).
sance. Celles qui sont capables de germer à l’obscurité dis-
posent d’un taux suffisant, même en l’absence de lumière. Le quotient respiratoire est défini par le rapport :
Alors que P66o est stable, P730 disparaît progressivement Volume de CO2 dégagé
QR = ---------------------------------------------------------------
à l’obscurité en se transformant en P66o. Son taux dimi- Volume de O2 consommé
nue d’autant plus que la période obscure ou la nuit est
longue. On entrevoit ainsi le rôle du phytochrome dans 3. Réactions chimiques de la respiration
le photopériodisme. 112. – Les réactions chimiques de la respiration s’expri-
L’interruption d’une nuit longue (alors que la plante est ment globalement par la dégradation d’un glucide comme
exposée à des jours courts) par un éclairement R.C. de le glucose, qui est d’ailleurs le plus souvent utilisé.
faible durée modifie le taux de P730 et la plante réagit L’équation s’écrit :
comme si elle était placée en jours longs. Le R.S. peut C6H12O6 + 6 O2 → 6 CO2 + 6 H2O + 688 calories

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Dans ce cas, le quotient respiratoire (Q.R.) est de 1. ture élevée peut devenir la cause indirecte d’une anoxie
Cependant la dégradation se fait progressivement, par néfaste à la plante.
étapes successives au cours desquelles apparaissent de Une anoxie passagère peut être à l’origine d’arrêts de
nombreux composés intermédiaires comme des acides croissance particuliers que sont les dormances.
organiques. La dégradation peut s’arrêter à certaines éta-
pes et le QR est alors différent de 1.
B. Eau
113. – D’autre part, les dégradations peuvent affecter
d’autres substances. Dans le cas des lipides comme 1. Généralités
l’acide stéarique, l’équation s’écrit :
C18H36O2 + 26 O2 → 18 CO2 + 18 H2O + énergie 117. – La présence d’eau dans la matière vivante est bien
connue. Elle y existe naturellement à l’état liquide, bien
Le quotient respiratoire est alors très inférieur à 1. Ce cas que de la vapeur d’eau se trouve dans la phase gazeuse des
est observé au cours de la germination des semences plantes (méats et chambres sous-stomatiques). Une partie
oléagineuses. de l’eau que contient la matière végétale peut se cristalliser
S’il s’agit au contraire d’un acide organique plus oxydé, le sous l’effet du froid (formation de glace) sans que l’organi-
Q.R. devient plus grand que 1 (1,33 avec l’acide malique) sation cellulaire en souffre, dans le cas des plantes résistan-
C4H6O5 + 3 O2 → 4 CO2 + 3 H2O + énergie. tes au gel. Ce qui n’est pas le cas des plantes sensibles.
114. – Ces dégradations fournissent de l’énergie corres- 118. – L’eau se trouve dans la plante sous trois formes
pondant à un certain nombre de calories. La majeure différentes, caractérisées globalement par les méthodes
partie de cette énergie est récupérée au cours des diffé- usuelles d’extraction : Liste
rentes étapes et sert aux réactions métaboliques qui en a) L’eau de circulation est la plus facile à extraire par simple
ont besoin. Une partie est perdue sous forme de chaleur fenaison ou séchage à l’air libre. Elle représente 75 à 80 %
très facilement dissipée, sauf dans le cas de masse végé- de l’eau totale. On considère que cette eau peut se dépla-
tale importante, stockée en milieu confiné (silos) où l’on cer librement dans la voie aqueuse (parois pecto-cellulosi-
ques, méats intercellulaires, vacuoles, vaisseaux). Ta b l e
peut assister à une augmentation sensible de température
résultant de la respiration, à laquelle s’ajoute, à cause du b) L’eau liée à la matière vivante présente des degrés de
manque d’oxygène, une fermentation. liaison variables. Il faut chauffer la matière végétale
L’équation globale de la fermentation s’écrit : pour l’extraire, par exemple plusieurs heures à plu-
sieurs jours à 105 °C. Elle constitue 20 % de l’eau
C6H12O6 → 2 C2H5OH + 2 CO2 + 33 calories totale. Cette eau imprègne le cytoplasme. I n dex
Le Q.R. devient infini ; il apparaît de l’alcool éthylique c) L’eau de constitution ne peut être séparée que par un
toxique pour la plante et l’énergie libérée est très faible. chauffage intense. Cette extraction altère profondé-
C’est un processus particulièrement néfaste que la plante ment la matière végétale. Elle représente 3 à 4 % de
ne peut pas supporter très longtemps. l’eau totale. Cette eau fait partie intégrante de certaines Glossaire
molécules organiques (protéines, cellulose…).
4. Teneur en oxygène et respiration — Teneur en eau des plantes :
115. – La teneur en oxygène conditionne la respiration : a) Mode d’expression
le manque d’O2 ou anoxie arrête la respiration. La fer-
On peut exprimer la teneur en eau, soit par rapport au
mentation se déclenche et rapidement la plante en
poids du matériel frais (poids frais), soit par rapport au
souffre ; il y a asphyxie.
poids de matière après dessiccation (poids sec) :
L’oxygène ne parvient au cytoplasme qu’après avoir tra- – teneur en eau rapportée au poids frais :
versé la pellicule d’eau qui imprègne les membranes ou
Eau Eau
qui entoure les tissus ou les organes. ------------------------- X100 = -------------------------------------- ¥ 100
Poids frais Eau + Poids sec
La disponibilité en oxygène dépend donc de la teneur en
– teneur en eau rapportée au poids sec :
O2 de l’atmosphère, de l’épaisseur de la pellicule d’eau et
Eau
de la solubilité d’O2 dans l’eau. ---------------------- X100
Poids sec
Sauf exception, comme dans le cas de racines vivant dans
un sol tassé, l’atmosphère qui entoure les tissus renferme 119. – La première méthode est plus commode, car elle
des quantités d’oxygène bien suffisantes. donne un chiffre compris entre 10 et 95. Cependant elle
est moins sensible, puisque le poids de l’eau est à la fois
116. – Cependant, si la pellicule d’eau est faible pour les au numérateur et au dénominateur, ce qui amortit
organes aériens, elle devient importante pour les racines l’influence de ses variations. Cette première méthode
dans des sols gorgés d’eau. La quantité d’oxygène peut deve- permet difficilement les comparaisons de teneur en eau
nir insuffisante ; l’asphyxie apparaît. Certaines plantes résis- entre différentes mesures, car le poids frais qui sert de
tent à l’anoxie plus ou moins poussée de leurs racines (plan- base de comparaison est essentiellement variable.
tes aquatiques, plantes de marécage, riz). D’autres, au
La seconde méthode, c’est-à-dire la teneur en eau par
contraire, sont sensibles (la plupart des plantes cultivées).
rapport au poids sec, fournit la meilleure expression ; elle
La solubilité de l’O2 dans l’eau est assez faible et diminue a toutefois l’inconvénient de donner des chiffres très éle-
rapidement avec la température, si bien qu’une tempéra- vés (200 %, 1 200 % par exemple).

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2011TA CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES

b) Méthodes de détermination de la teneur en eau L’entrée de l’eau est fortement limitée par les dimensions
120. – Elles consistent à déterminer le poids frais et des cellules et l’élasticité des parois Elle ne peut dépasser
ensuite le poids sec d’une même quantité de végétal et, une limite dite de pleine turgescence. La teneur en eau
par différence, d’en déduire le poids de l’eau. (θm) caractérise alors l’état de saturation.
• La mesure du poids frais ne pose pas de problème ; il Lorsque cet état n’est pas atteint, le végétal est en turges-
cence relative. Si q est alors sa teneur actuelle en eau :
suffit de faire l’opération rapidement afin d’éviter les
pertes d’eau. On peut également diminuer ces pertes en sa turgescence relative (TR) est : TR = l00 θ/θm
enveloppant le végétal dans un sac de matière plastique son déficit de saturation (DS) est :
ou dans une boîte d’aluminium.
θm – θ
• La mesure du poids sec peut se faire après séchage à l’air D s = 100 ----------------par définition.
θm
libre : pendant quelques jours le fanage élimine l’eau de
circulation et permet de faire passer les végétaux herba- Dans la pratique, on prend le poids frais (P) de l’organe ;
cés d’un taux d’humidité de 80 % à celui de 20 %. on le porte à la turgescence maximum en atmosphère
• Au laboratoire, on utilise l’étuve chauffée à 105 °C. Le saturée d’eau : son poids maximum est Pm. On mesure
séchage est complet lorsqu’on ne note plus de diffé- ensuite son poids sec (P). Le déficit de saturation est :
rence significative du poids sec pour deux pesées suc- Pm – P
cessives, par exemple séparées de 12 heures. Ce séchage D s = ----------------- x 100
déplace l’eau libre et l’eau d’imbibition sans toucher à Pm – P
Liste l’eau de constitution (il demande en général 2 à
3 jours). On accélère le processus en utilisant les étuves Lorsque le déficit de saturation augmente, on dit que les
ventilées ou sous pression réduite. plantes se flétrissent.
• La lyophilisation est un moyen de séchage sous très fai- 123. – Le flétrissement (ou fanaison) est une perte d’eau
Ta b l e ble pression et à basse température (par ex. –20 °C). Elle par simple évaporation dans l’atmosphère. Il intéresse
permet de conserver intacts les composés non volatils essentiellement l’eau libre. Au cours du flétrissement, les
comme les enzymes ainsi que la structure des plantes. organes herbacés s’affaissent par manque de turgescence.
• Les lampes à infrarouge sont souvent utilisées en agri- Les flétrissements peu poussés ne sont généralement pas
culture comme moyen de chauffage ; la température au préjudiciables à la plante. Elle peut recouvrer sa
Index niveau des organes végétaux n’est pas très régulière turgescence : c’est le flétrissement temporaire.
(100 à 150 °C). On risque des décompositions de la Des flétrissements plus poussés peuvent devenir létaux
matière organique. C’est une méthode approximative (entraîner la mort), c’est le flétrissement permanent. Il
mais très rapide. est obtenu pour des déficits de saturation variables (30 %
• Signalons enfin que l’on peut déterminer la teneur en pour le haricot, 70 % pour la luzerne).
Glossaire
eau par la mesure d’une conductivité électrique du maté- 124. – Certains organes ou certaines plantes peuvent
riel végétal ; la conductivité dépend évidemment du supporter un déficit de saturation poussé sans perdre la
degré d’hydratation. Cette méthode est utilisée par les vie : on parle d’anhydrobiose (vie en l’absence d’eau).
organismes de stockage pour mesurer rapidement, à C’est le cas des semences qui entrent en diapause (ou vie
l’aide d’appareils adaptés, le taux d’humidité d’échan- ralentie) en se déshydratant. C’est le cas des plantes revi-
tillons de grains de blé, lors de. la réception de la récolte. viscentes (mousse et lichens), qui peuvent subir sans
c) Valeurs obtenues et variations dommage un déficit très poussé et redeviennent actives
après réhumectation.
121. – Les végétaux ont une teneur élevée en eau, en
général de l’ordre de 80-90 % du poids frais, soit 400 à
2. Absorption et déplacement de l’eau
800 % du poids sec.
Cette teneur varie en fonction de l’organe et de la plante : 125. – La plante puise l’eau du sol par ses racines. Cepen-
dant de petites quantités d’eau liquide peuvent être
– Organes riches : feuilles, fruits, racines, méristèmes, absorbées par les feuilles lorsqu’elles sont recouvertes de
tubercules (80 à 90 % du poids frais). rosée et qu’elles présentent un déficit hydrique important
– Organes pauvres : semences sèches (6 à 20 % du poids (cas de l’olivier en zone sèche). Les plantes aquatiques
frais) et en particulier graines oléagineuses (arachide, sans racine absorbent l’eau par leurs feuilles et leurs tiges.
moutarde). Le gros de l’eau absorbée pénètre au niveau des poils
La teneur en eau dépend également de l’âge de la plante, les absorbants, c’est-à-dire par les parties jeunes des racines,
plantes jeunes étant plus aqueuses que les plantes adultes. le plus souvent, en pleine croissance.
Enfin l’environnement (humidité du sol, de l’air, etc.) a Dans la plante, l’eau suit la voie aqueuse continue consti-
une influence sur la teneur en eau des plantes. tuée des méats, des membranes celluloso-pectiques et
des vaisseaux conducteurs ou la voie discontinue des
— Notion de déficit de saturation et de flétrissement vacuoles séparées par le cytoplasme. Les transports les
122. – La turgescence des cellules résulte d’une pression plus importants s’effectuent par les vaisseaux sous forme
exercée par l’eau sur les parois, pression qui augmente au de sève : sève brute des vaisseaux du bois (ou xylème) et
fur et à mesure de l’entrée de l’eau dans les vacuoles. sève élaborée du liber (ou phloème).

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CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES
TA 2011
126. – L’eau est dirigée vers les méristèmes en croissance sif, alors que celui de la sève élaborée est probablement
où elle est utilisée sur place, ou bien vers les feuilles qui la actif.
rejettent dans l’atmosphère soit à l’état liquide soit en Alors que la guttation résulte de la poussée radiculaire au
vapeur (guttation ou transpiration). moment où les stomates sont fermés, la transpiration
La guttation est l’émission d’eau à l’état liquide que l’on présente des analogies avec l’évaporation d’une surface
observe au crépuscule à l’extrémité des nervures des physique humidifiée. Elle est cependant réglée par les
feuilles (perle de rosée des graminées qu’il ne faut pas mouvements des stomates ; maximum lorsqu’ils sont
confondre avec la rosée régulièrement répartie sur la ouverts, elle est très réduite après leur fermeture.
feuille). Les mouvements des stomates ont des origines comple-
La transpiration est l’émission d’eau à l’état de vapeur à xes et mal connues. En général, ils s’ouvrent le jour et se
partir des feuilles ou des jeunes tiges. ferment la nuit. Ils se ferment en plein jour lorsque, la
plante manquant d’eau, le déficit de saturation s’élève.
L’émission d’eau au niveau de la feuille est gouvernée par
Cette régulation permet au végétal en voie d’assèchement
la présence, à la surface, d’une couche cireuse imper-
d’économiser les faibles quantités d’eau dont il dispose
méable appelée cuticule et de petits orifices ou stoma-
encore, lui permettant de survivre.
tes aptes à s’ouvrir et se fermer (fig. 15).
— Quantités d’eau absorbées et rejetées par la plante
129. – D’une manière générale, le végétal, bien que très
hydraté, ne renferme qu’une faible proportion de l’eau
qu’il absorbe (1 à 2 %) si bien que les quantités d’eau Liste
absorbées sont approximativement celles de l’eau rejetée.
Une plante absorbe et rejette environ son poids d’eau au
cours de la journée (c’est beaucoup plus que les pertes
d’eau de l’animal). Ta b l e
Un arbre peut évaporer 500 kg d’eau par jour, ce qui cor-
respond pour une forêt à 30 t/Ha, soit pendant l’année
4 000 à 5 000 t et plus (5 000 t d’eau par ha étant fournies
par une pluviométrie de 500 mm
I n dex
— Quelques facteurs de variations
130. – Les quantités d’eau absorbées et rejetées par la
Fig. 15. – Mouvement d’un stomate. plante dépendent en premier lieu des disponibilités en
A : ostiole ouverte, B : ostiole fermée. eau du sol ; lorsque le sol s’assèche, l’absorption
diminue ; la plante perd sa turgescence ; on assiste au flé- Glossaire
De faibles quantités de vapeur d’eau traversent la trissement. On appelle point de flétrissement permanent
cuticule : c’est la transpiration cuticulaire, plus impor- le taux d’humidité du sol en-dessous duquel la plante se
tante chez les plantes de sous-bois que pour nos plantes fane définitivement.
cultivées poussant au soleil. La transpiration par les sto- Elles dépendent aussi du pouvoir évaporant de l’air,
mates, lorsqu’ils sont ouverts, représente la fraction la notion complexe qui intègre la température, l’humidité
plus importante de la transpiration totale. relative, la vitesse du vent. Le vent est un paramètre
important qui justifie l’utilisation des brise-vents.
— Mécanisme de déplacement de l’eau
Enfin, ces transferts d’eau dépendent de la nature de la
127. – Le déplacement de l’eau peut s’expliquer en partie plante et de ses propriétés de résistance à la sécheresse.
par des théories purement physiques. Le végétal pouvant C’est d’abord le développement du système radiculaire :
être considéré comme une simple mèche dont une extré- les plantes aux racines développées et profondes (vigne,
mité trempe dans l’eau, l’autre étant soumise au luzerne) résistent mieux que de nombreuses herbes aux
« pouvoir évaporant » de l’air, la vie n’ayant pas à inter- racines superficielles.
venir, c’est l’absorption passive. Cette théorie n’est pas
suffisante ; en effet, si l’on coupe une plante au niveau du 131. – C’est aussi la surface et la morphologie des feuilles
collet ou au moment de la taille des arbres, de la sève qui importent. Les plantes des sous-bois humides, et la
s’écoule. C’est la poussée radiculaire qui fait jouer à la plupart de nos plantes maraîchères, présentent une cuti-
racine un rôle différent de celui d’une mèche. De plus, en cule peu épaisse et de nombreux stomates : elles sont peu
l’absence d’oxygène et de respiration, l’absorption de résistantes à la sécheresse.
l’eau est ralentie. Au contraire les xérophytes sont adaptées à survivre dans
des conditions de sécheresse : parmi elles, les plantes
Il y a lieu de penser que l’absorption de l’eau, en partie au
grasses, riches en eau, qui ont la propriété particulière de
moins, nécessite de l’énergie fournie par la respiration :
fermer leurs stomates le jour pour les ouvrir la nuit et les
c’est l’absorption active.
sclérophytes, plantes ligneuses pauvres en eau dont les
128. – Le mécanisme de transport de la sève brute dans feuilles sont petites, souvent réduites à des épines et pré-
les vaisseaux du bois (cellules mortes) est sûrement pas- sentent peu de stomates.

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3. Rôle et relation avec la croissance 135. – Les méthodes d’analyse de plus en plus fines ont
progressivement permis de reconnaître de nombreux élé-
132. – L’eau est un véritable aliment pour la plante
ments dans les plantes.
puisqu’elle rentre dans la composition des tissus. De plus,
elle maintient l’état de turgescence des cellules et c’est égale- On peut exprimer leur teneur en g ou mg par kg de
ment dans l’eau des cellules et des tissus que se font les réac- matière fraîche ou de matière sèche, déterminée après
tions chimiques et les migrations des autres aliments. dessèchement à l’étuve à 150 °C et, également, en unités
agricoles ou kg de N, P2O5, K2O, S, CaO, MgO rappor-
Cependant l’eau a deux rôles physiques essentiels :
tées, par exemple, à la tonne de matière végétale produite
– En s’évaporant, elle refroidit la plante lui permettant de ou exportée par les récoltes.
perdre en partie les calories qu’elle reçoit, en particu-
136. – On classe les éléments en plusieurs catégories :
lier du soleil. La transpiration dissipe ainsi 45 % de
l’énergie reçue par les feuilles. On note chez la vigne un • Les macro-éléments (N, P, S, K, Ca, Mg) qui sont tou-
écart de 10 °C entre la feuille qui transpire et le grain jours présents à des teneurs élevées de 1 à 50 g par kg de
de raisin qui transpire peu. Sans transpiration, matière sèche.
l’échauffement de la plante serait souvent incompatible • Les éléments d’accompagnement (Cl, Na, Si, Al), qui
avec la croissance et même la vie.
sont souvent présents dans les plantes en quantité
– Par ailleurs, la transpiration est liée à l’ouverture des importante, mais pas d’une manière constante.
stomates. Ces derniers représentent une porte efficace
pour les échanges gazeux nécessaires à la photosyn-
• Les macro-éléments (N, P, S, K, Ca, Mg, I, F, Cl), qui
Liste thèse (CO2 et O2). La régulation stomatique est un sont toujours présents à des teneurs faibles comprises
entre 1 mg et 10 mg/kg de matière sèche.
moyen dont disposent les plantes terrestres pour avoir
des échanges avec l’extérieur (atmosphère) en fonction • Les éléments accidentels (V, St, Rb, Se, Li, Ti, etc.) dont
de leur disponibilité en eau et sans compromettre la présence n’est pas générale.
Ta b l e l’équilibre hydrique de leur organisme. 137. – Les éléments rencontrés dans la matière végétale
133. – L’alimentation en eau conditionne donc l’alimen- sont nombreux ; le problème est de savoir s’ils sont tous
tation carbonée. Une plante peut « mourir de faim » nécessaires. Un élément est nécessaire :
parce qu’elle manque d’eau, ses stomates étant continuel- – lorsqu’on a pu démontrer que la plante ne peut croître
lement fermés. normalement en son absence. On dit alors qu’il y a
Index carence. Outre une mauvaise croissance une plante
Il existe ainsi une relation assez précise, mesurée au cours
de nombreuses expériences, entre la consommation en carencée manifeste des symptômes ou maladies de
eau et la photosynthèse estimée par la production de carence (chlorose, brunissement, nécrose),
matière sèche (M.S.). – lorsque cet élément ne peut pas être remplacé entière-
Glossaire Quantité d’eau absorbée ment par un autre ; son action est spécifique,
Le rapport ------------------------------------------------------------ est appelé
Quantité de M.S. produite – lorsqu’il joue effectivement un rôle dans le métabo-
lisme de la plante.
coefficient de transpiration. Il varie de 300 à 800 (300 à
800 kg d’eau par kg de M.S. produite) selon la nature des Les éléments nécessaires sont, en plus de C, H, O, au
plantes et les conditions climatiques dans lesquelles elles nombre de 13, six macro-éléments (N, P, S, K, Ca, Mg) et
vivent. Cette donnée revêt une grande importance éco- sept micro-éléments (Fe, Zn, Cu, Mn, Mo, B, Cl).
nomique, en particulier dans le cas des cultures irriguées. 138. – Si l’on considère la composition moyenne en
macro-éléments de quelques végétaux cultivés (fig. 16),
C. Aliments minéraux on note pour toutes ces plantes des teneurs assez sembla-
bles, avec cependant pour la luzerne (légumineuse) des
teneurs plus élevées en N et Ca alors que le colza (cruci-
1. Généralités : minéraux rencontrés fère) est riche en S. Les teneurs varient pour une même
dans la plante espèce avec le milieu dans lequel elle se trouve et, sur une
134. – La matière végétale est constituée principalement même plante, elles peuvent être différentes d’un organe à
de carbone, d’hydrogène et d’oxygène provenant de l’autre, les vieilles feuilles étant plus riches en Ca et Mg et
l’assimilation chlorophyllienne et de l’alimentation en plus pauvre en N et P ; les limites de variations des
eau, et renferme également, bien qu’en quantité moin- teneurs de la matière végétale en éléments nécessaires
dre, d’autres corps chimiques minéraux fournis par l’ali- sont assez étroites ; la vie ne semble pas compatible avec
mentation minérale. une trop grande variation.

Ils sont analysés habituellement, après destruction de la 139. – La connaissance de la composition des végétaux
matière organique ou minéralisation. Cette opération peut en minéraux est à la base du calcul des exportations par
être une incinération à l’aide du four Pasteur. Les cendres les récoltes :
obtenues renferment la plupart des éléments à l’exception Exportation = teneur x rendement en matière récoltée.
de ceux qui, comme l’azote, s’échappent avec les composés Appliquer la loi de restitution à la fumure, consiste à
volatils. Pour ces éléments il faut opérer par voie humide en apporter au sol, sous forme d’engrais, l’équivalent des
attaquant la matière organique par un acide. exportations.

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CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES
TA 2011
Nature N P S K Ca Mg

Betterave 22 3,75 2,0 25 6 2,5


Fétuque 19 3,50 2,2 21,5 7 2
Luzerne 42 5,00 5,5 22 30 3
Colza 13 2,50 9,3 12 20 3

Teneurs de feuilles de choux : vieilles 39 2,9 – 33 38 1,7


jeunes 49 4,9 – 29 19 0,7

Teneurs de blé provenant de : Beauce 20 6 – 28 6 2,8


Perche 23 6 – 38 7 3,0

Fig. 16. – Teneur de quelques plantes en macro-éléments (en k/g de matière sèche)

Elle est également une donnée importante pour le calcul breuses applications pour lutter contre les carences en Fe
de l’équilibre minéral de la nourriture des hommes et des résultant d’une mauvaise solubilisation de ce corps chi-
animaux. Une teneur compatible avec la vie végétale per- mique.
mettant à la plante de croître ne convient pas forcément à
l’alimentation humaine et animale. Certaines teneurs 144. – Les éléments des composés insolubles et, d’une
sont insuffisantes : c’est le cas de l’iode des végétaux des manière générale, ceux de la phase solide de sol, ne sont
pas directement accessibles par les plantes. Ils constituent Liste
régions montagneuses continentales, du calcium et du
phosphore de ceux des zones siliceuses acides. D’autres une réserve assimilable après solubilisation. Notons que
seront excessives, potassium, molybdène, sélénium dans cette solubilisation peut être provoquée ou accélérée par
certaines conditions particulières. l’acidification du milieu résultant de l’absorption des
ions par les racines (c’est ainsi que le marbre peut être Ta b l e
attaqué par les racines des plantes).
2. Absorption et déplacement des éléments
a) Localisation et formes des éléments absorbés. 145. – La phase gazeuse du sol, outre qu’elle procure 1’O2
nécessaire à la respiration des parties souterraines, four-
140. – L’absorption, pour l’essentiel, se fait par les jeunes nit de l’azote gazeux à certaines racines, en particulier à
racines. Elle est la plus intense à l’extrémité et surtout au celles des légumineuses grâce à la symbiose bactérienne I n dex
niveau des poils absorbants, lorsqu’ils existent. Cepen- (cf. fasc. 2600).
dant les plantes aquatiques absorbent les minéraux par
les feuilles, ce que les plantes terrestres peuvent faire dans C’est au milieu du siècle dernier que l’on s’est aperçu que
une certaine mesure. Cette propriété permet la fumure les légumineuses pouvaient assimiler ou fixer l’azote de
foliaire, appliquée en cas de carences graves ou en même l’air, c’est-à-dire absorber l’azote gazeux et l’incorporer Glossaire
temps qu’un traitement pesticide. dans la matière organique Il a été établi que cette fixation
141. – La plante prélève les minéraux, lorsqu’ils sont dis- est liée à la présence sur les racines de tumeurs globuleu-
sous dans l’eau : solution du sol dans laquelle la racine se ses appelées nodules ou nodosités.
trouve, ou solution pulvérisée sur les feuilles. On a par la suite isolé de ces nodosités des bactéries qui
Ils se présentent sous forme de particules chargées, appe- appartiennent au genre rhizobium (cf. fasc. 2600), bacté-
lées ions, résultant de la dissociation des sels minéraux au ries que l’on rencontre aussi dans le sol, et dont la pré-
moment de leur dissolution. On distingue les anions sence est indispensable à la formation des nodules et à la
chargés négativement (NO 3 – , PO 4 ––– , SO 4 –– ) et les fixation de l’azote.
cations positifs (K+, Ca++, Mg++, NH4+) L’azote pouvant La légumineuse, en l’absence de nodules, utilise les ions
être présent comme cation ou comme anion. minéraux azotés du sol, mais sa croissance et sa vigueur
142. – La plante peut également absorber des composés sont souvent réduites. La bactérie trouve dans les tissus
organiques solubles contenant des aliments minéraux ; de la plante hôte les aliments organiques qui lui sont
parmi ceux-là, l’urée apporte de l’azote et constitue un nécessaires. L’association rhizobium/légumineuse per-
engrais que la plante peut absorber en cet état par ses mettant la fixation de l’azote profite à chacun des asso-
racines ou ses feuilles. Cependant, dans les sols biologi- ciés.
quement actifs, l’urée est décomposée et l’azote se 146. – Ces bactéries symbiotiques sont caractérisées par
retrouve rapidement sous forme de nitrate. leur infectivité ou capacité, pour une souche de rhizo-
143. – Les chélats sont des composés organiques sur les- bium, de provoquer l’apparition de nodules sur les raci-
quels se fixent des cations généralement peu solubles. nes d’une légumineuse et par leur spécificité ; l’associa-
Des composés organiques naturels jouent probablement tion n’étant pas toujours possible, une souche de
dans les sols le rôle de chélat. Le plus connu est cepen- rhizobium peut infecter seulement certaines légumineu-
dant synthétique : l’E.D.T.A. (acide éthylène diamine ses et pas d’autres. On classe les rhizobiums en groupes
tétra-acétique) appelé aussi versenate ou séquestrène. Ce d’inoculation croisée(fig. 17). Une souche prise par
composé est capable de maintenir le fer en solution afin exemple sur la luzerne peut infecter le mélilot, mais pas
qu’il soit accessible pour les plantes. Il a reçu de nom- les plantes des autres groupes.

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2011TA CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES

n° du groupe plantes appartenant au groupe Dans les conditions naturelles, les plantes cultivées accu-
I luzerne, mélilot, fenu-grec mulent généralement NPK et, en sol pauvre, les quantités
II trèfle
accumulées sont insuffisantes pour assurer une bonne
croissance de la plante, ce qui justifie la pratique de la
III haricot
fumure minérale.
IV pois, vesce, lentille, fève
V soja L’accumulation se produit jusqu’à une certaine valeur de la
VI lupin, serradelle
concentration de la solution ambiante ; pour des concen-
trations plus élevées, celle de la sève est au contraire infé-
VII dolique
rieure à celle du milieu. La plante résiste à l’absorption.
De nombreux autres groupes semblent être reconnus actuellement.
La résistance à l’absorption tend à augmenter la concen-
Fig. 17. – Groupe d’inoculation croisée de légumineuses
tration au niveau des racines, qui peut devenir toxique si
elle n’est pas réduite par une pluie ou un arrosage.
147. – La fixation symbiotique fournit aux légumineuses Dans les conditions naturelles, les plantes cultivées résis-
l’azote qui leur est nécessaire pour élaborer leur matière tent parfois à l’absorption pour Ca++, Mg++, SO4––, Cl–,
sèche. Il est très souvent inutile et même parfois nuisible
Na+ ; l’aptitude des plantes à résister à l’absorption de ces
de leur apporter une fumure azotée. On estime entre 60
ions en présence de fortes concentrations du milieu exté-
et 350 kg, par ha et par an, les quantités d’azote suscepti-
rieur dépend de l’espèce.
bles d’être ainsi fixées par la symbiose bactérienne.
150. – Du point de vue de la résistance au calcium, on
Liste Les rhizobiums les mieux adaptés à l’espèce ne sont pas distingue les plantes calcicoles qui résistent à l’absorption
toujours présents dans le sol. On peut avoir intérêt à pra- et peuvent vivre en sol calcaire (féverole), et les plantes
tiquer la bactérisation des semences, qui consiste à leur calcifuges, qui résistent mal à l’absorption et s’intoxi-
ajouter une poudre contenant des rhizobiums actifs, quent par excès de calcium dans leur tissus, ces plantes ne
cultivés artificiellement. pouvant vivre qu’en sol acide ou pauvre en calcaire
Ta b l e
(lupin).
b) Relations entre la composition des solutions nutritives
et celle de la sève brute 151. – La résistance au chlorure de sodium est un peu
plus complexe : on distingue les halophytes (atriplex),
148. – La composition élémentaire de la sève brute est qui sont capables d’accumuler sans en souffrir des quan-
Index différente de celle de la solution nutritive offerte à la tités très élevées de sel, leur résistance à l’absorption ne se
plante. Les différences résultent de l’accumulation, de la manifestant qu’à des taux élevés de NaCl, ; les glycophytes
sélectivité et des interférences ioniques. (luzerne), qui ne résistent à l’absorption que pour des
faibles taux de NaCl et sont intoxiquées à des taux plus
149. – Accumulation : on dit qu’il y a accumulation lors- élevés ; enfin les plantes sensibles (trèfle violet), qui résis-
Glossaire que la sève est plus concentrée que la solution nutritive. tent très peu à l’absorption et ne peuvent pas accumuler
C’est un des arguments en faveur de la théorie de de chlorure de sodium sans en souffrir.
l’absorption active. 152. – Sélectivité : la sélectivité est la propriété par
Si l’on porte, sur un graphique, la teneur de la sève en laquelle la plante absorbe certains ions préférentielle-
fonction de la concentration de la solution nutritive ment à d’autres. C’est-à-dire que la plante n’absorbe pas
(fig. 18), l’on s’aperçoit que l’accumulation se produit les ions dans les rapports dans lesquels ils se trouvent
dans le cas des faibles concentrations. Il est évident que dans la solution du sol.
l’accumulation tend à diminuer la concentration de la On a classé les ions en fonction de leur aptitude à être plus
solution nutritive, qui peut devenir très pauvre. ou moins vite absorbés (échelle de vitesse de pénétration).
Pour les anions : NO3– > Cl– > SO4– –> PO4– – –.
Teneur de la sève Pour les cations : NH4+ > K+ > Ca++ > Mg++.
Bissectrice
en azote (mg/litre) 153. – Une des principales conséquences de la sélectivité
est la modification de l’équilibre entre les anions et les
cations de la solution, c’est-à-dire la modification du pH.
En effet elle peut se traduire par une absorption préfé-
B rentielle des ions d’un certain signe par rapport à
140 A l’ensemble des ions de l’autre signe.
Si on apporte comme engrais par exemple du nitrate de
chaux (NO3)2Ca, les plantes et en particulier les grami-
42 Teneur de la solution nées absorbent NO3– en quantité plus importante que
nutritive en azote Ca ++ et l’ensemble des cations. Il y a alcalinisation
0 42 140 280 (mg/litre) « physiologique » du milieu (augmentation du pH). Au
contraire, avec le sulfate d’ammoniaque SO4 (NH4)2, les
Fig. 18. – Relation entre la concentration de la sève et celle de plantes absorbant NH4+ préférentiellement à l’ion SO4– –
la solution nutritive e t à l ’ e n s e m b l e d e s a n i o n s , i l y a a c i d i fi c a t i o n
(OA : accumulation ; AB : résistance à l’absorption) « physiologique » du milieu (diminution du pH).

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Ces modifications du pH à la suite d’un apport d’engrais les organes généralement plus jeunes (jeunes feuilles,
sont généralement minimes dans le sol, en raison de son méristèmes) où ils sont nécessaires à la reproduction ou à
grand pouvoir tampon. Au contraire, lors de la fabrica- la multiplication végétative (fruit, graine, tubercule).
tion des solutions nutritives non tamponnées, on a inté- Certaines migrations secondaires, comme celle du K +
rêt à choisir un rapport NO3/NH4 qui réduise les risques dans les racines des graminées annuelles à la fin de leur
de variations physiologiques du pH. vie, ne semblent pas utiles. Les voies suivies sont celles de
154. – Interférences ioniques : Il y a interférence ionique la sève élaborée.
lorsque, pour un ion, les relations entre la concentration 159. – On classe les éléments en deux groupes selon leurs
extérieure et celle de la sève sont modifiées par la pré- aptitudes à la migration secondaire :
sence d’un ou plusieurs autres ions dans le milieu. – Ca, Mg, S et Fe migrent très peu ou pas du tout ;
La plupart des interférences ioniques se traduisent par – N, P, K, sont des éléments très mobiles, aptes à migrer
une diminution de l’absorption ; on dit alors qu’il y a facilement.
antagonisme. 160. – La redistribution a des conséquences agronomi-
Par exemple, un excès de Ca dans le milieu peut dimi- ques très importantes : les plantes peuvent parfois accu-
nuer l’absorption du K et ainsi limiter la croissance de muler au cours de leur jeunesse des quantités suffisantes
certaines plantes (cf. fasc. 1010). On assiste ainsi à un d’éléments pour accomplir leur cycle végétatif à la condi-
déséquilibre entre Ca et K. Une fumure ou une solution tion que ces éléments puissent migrer facilement ; c’est le
nutritive équilibrée est celle qui ne se traduit pas par des cas pour NPK que l’on apporte très souvent sans incon-
interférences ioniques fâcheuses pour la plante. vénient au début de la végétation sous forme d’engrais. Liste
Il existe donc des relations précises entre la composition Les carences en éléments qui ne migrent pas se manifes-
de la sève et celle de la solution du sol. Une analyse de la tent au niveau des organes jeunes nouvellement formés,
sève permet ainsi de connaître les conditions de l’alimen- alors que c’est le contraire qui se produit pour des élé-
tation de la plante et de les améliorer par une fumure ments qui migrent. Ainsi, une carence en Fe s’observe par
lorsqu’elles sont défectueuses. C’est le principe de la fixa- le jaunissement des jeunes pousses, alors que la carence Ta b l e
tion de la fumure par analyse de la sève. en azote fait jaunir les vieilles feuilles.
c) Migration et redistribution d) Rejet par la plante
155. – Les éléments se déplacent principalement par la 161. – Une partie des substances minérales peut être reje-
voie aqueuse sensiblement comme l’eau. Ils atteignent les tée par la plante. Par analogie avec le règne animal et bien I n dex
vaisseaux conducteurs du bois et sont véhiculés dans la que beaucoup moins ample, ce phénomène a reçu le
sève brute directement de la racine vers les lieux d’utilisa- nom d’excrétion.
tion (feuilles et méristèmes) : il s’agit alors de la distribu- Les racines peuvent libérer des quantités appréciables
tion primaire. d’éléments. Par exemple, lorsqu’on les transfère dans
Glossaire
156. – Au cours de la migration primaire, une faible partie l’eau distillée, cette dernière se charge de sels. De telles
des éléments est utilisée sur place au niveau des tissus traver- excrétions semblent se produire dans les milieux natu-
sés, si bien que le contenu de la sève se modifie. Mais la rels. Notons par ailleurs que des composés sont libérés
modification la plus importante concerne la forme de cer- dans le sol à la suite de la décomposition des matières
tains éléments. Pour les macro-éléments, il faut signaler que organiques isolées de la plante (vieilles racines, poils
K, Ca, Mg se retrouvent dans la sève brute sous forme de absorbants en voie de dégénérescence).
cations n’ayant subi aucune transformation, alors que N, P, 162. – Les feuilles peuvent rejeter des sels. Au cours de la
S, au contraire, dont le rôle est d’entrer directement dans la guttation, la plante rejette des gouttes de liquide qui n’est
constitution des molécules organiques, peuvent être incor- autre que de la sève brute contenant des composés orga-
porés partiellement dans des composés organiques solubles niques et minéraux. Après évaporation de la goutte, ces
et migrer sous cette forme dans la sève brute. composés restent à la surface de la feuille jusqu’au
157. – Le soufre est relativement très peu incorporé. On moment ou la pluie les retournera au sol.
estime que 20 % du phosphore est déjà sous forme orga- Certaines plantes des terrains salés présentent en outre des
nique dans les racines. Quant à l’azote, qui est par glandes à sel leur permettant de rejeter une partie des quan-
ailleurs l’élément le plus largement absorbé, il peut subir tités importantes de sel qu’elles sont contraintes d’absorber.
des changements importants : l’azote nitrique peut être
réduit en azote ammoniacal (NH4+) et fixé sous forme e) Mécanismes du déplacement
d’acides aminés dans les racines. Cette réduction de – Mécanismes passifs.
NO3– est complète dans les racines des arbres, partielle
chez celles du blé et nulle chez celles de la tomate. 163. – Comme les éléments se déplacent dissous dans
l’eau, on peut penser qu’ils sont entraînés passivement
La sève brute apparaît donc comme un liquide complexe par le courant transpiratoire. Cela est sûrement le cas du
de composition variable selon les plantes et contenant à transport rapide dans les vaisseaux du bois et cette con-
la fois des substances minérales et organiques. ception est confirmée par certaines expériences qui mon-
158. – Les éléments ainsi distribués par le courant de sève trent que l’absorption des ions augmente avec la transpi-
brute aux différents organes peuvent par la suite migrer à ration. Les éléments dissous peuvent également se
nouveau (migration secondaire ou redistribution) vers déplacer par un mécanisme passif, indépendamment de

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l’eau, des lieux où ils sont très concentrés vers ceux où ils
sont dilués ; ce déplacement, appelé diffusion, peut avoir y Croissance
lieu lorsque les solutions du sol sont très concentrées.
– Mécanismes actifs. C D
164. – L’absorption peut se produire en l’absence de trans-
piration et, dans beaucoup de situations, la sève brute est
plus concentrée que le milieu extérieur. Il faut alors faire B
appel à des processus différents, dits actifs, pour lesquels le
déplacement des ions nécessiterait de l’énergie d’origine E
respiratoire. Cette conception est confirmée par le fait A
Teneur en élément nutritif
qu’une bonne nutrition minérale de la plante doit toujours o x
être accompagnée d’une aération suffisante des racines.
Fig. 20. – Relation entre la teneur en élément nutritif
de la plante et sa croissance
3. Relations avec la croissance AB : zone de carence, BC : zone de croissance proportionnelle,
a) Approche synthétique CD : zone de consommation de luxe, DE : zone de toxicité.

165. – Elle consiste à édifier des milieux nutritifs artifi- On y distingue trois zones : la zone de déficience dans
ciels (sable siliceux arrosé d’une solution nutritive) et à laquelle l’augmentation de la teneur s’accompagne d’une
observer la croissance des végétaux cultivés sur de tels augmentation de la croissance, la zone de consommation
Liste milieux en vase de végétation. de luxe où l’augmentation de la teneur (donc de la con-
y Croissance
sommation) n’entraîne pas une plus grande croissance et
enfin une zone de toxicité pour laquelle la croissance
Zone de Concentration Zone de toxicité diminue : il y a alors intoxication par les sels.
Ta b l e déficience optimum
Il existe donc une correspondance entre la teneur et la
croissance du végétal. Du tracé de telles courbes se déduit
la méthode de fixation de la fumure par le diagnostic
foliaire. Elle consiste à analyser une feuille déterminée de
y'
la plante, à comparer sa richesse en éléments à celle de la
Index plante ayant la meilleure croissance et à essayer de corri-
Concentration de la solution ger cette teneur par un apport d’engrais.
nutritive ou apport en éléments

o o' x IV. RÉGULATEURS HORMONAUX


Glossaire Fig. 19. – Relation entre l’apport en élément (ou
concentration du milieu nutritif) et la croissance de la plante.
A. Auxine
A droite de O’Y’ : forme d’une courbe qu’il est possible d’obtenir 168. – L’auxine est une substance rencontrée dans la
en plein champ. matière végétale, qui augmente la croissance des organes
végétaux et à laquelle on attribue un rôle régulateur. Il
Si on omet un élément nécessaire à la croissance, cette s’agit de l’acide indole-acétique (A.I.A.) identifié chimi-
dernière est pratiquement nulle. Elle dépend de la quan- quement vers 1930.
tité d’éléments apportée conformément à la courbe de la
L’auxine s’apparente de très près au tryptophane, acide
figure 19. D’une zone de déficience, pour laquelle une
aminé très répandu qui ne présente pas cependant de
augmentation de l’apport se traduit par une augmenta-
propriété auxinique. Elle a été décelée dans tous les orga-
tion de la croissance, on passe à une zone pour laquelle,
nes de la plante, et en particulier dans les méristèmes où
la croissance étant maximum, elle n’est plus sensible à
elle apparaît. De là, elle migre rapidement vers les autres
une augmentation de l’apport ; on aboutit enfin à la zone
tissus où elle exerce son action.
de toxicité où la croissance est moins élevée.
Comme elle agit à faible close (1 mg/litre) en des lieux
166. – Des courbes analogues peuvent être obtenues en plein
éloignés de son lieu de synthèse, elle a les caractéristiques
champ sur des parcelles homogènes recevant des quantités
d’une hormone et l’A.I.A. fut longtemps considéré
croissantes d’engrais. Cependant, dans ce cas, un apport nul
comme l’unique hormone végétale.
d’engrais ne se traduit pas par une croissance nulle en raison
de l’utilisation des réserves du sol par la plante. Le tracé de tel- 169. – L’action de l’auxine est très variée et on lui a attribué
les courbes (appelées courbes de Mitscherlich) est utilisé en de nombreux rôles. Au laboratoire, elle agit de façon specta-
expérimentation agricole afin de fixer, à l’aide d’une analyse culaire sur le grandissement cellulaire des tissus placés à
statistique et économique, le niveau de la fumure. l’obscurité et, à un degré moindre, sur la division cellulaire
où d’autres facteurs semblent nécessaires. Cette action
b) Approche analytique d’abord favorable à faible concentration peut devenir défa-
167. – On détermine, par analyse, la teneur de la matière vorable (ou inhibitrice) à concentration plus élevée. Cela
végétale en un élément et on met en relation le résultat permet d’attribuer à l’auxine un rôle aussi bien dans l’acti-
avec la croissance. Les courbes obtenues, lorsqu’elles sont vation de la croissance (cas des fruits) que dans l’arrêt de
complètes, présentent la forme de celle de la figure 20. croissance des bourgeons (dominance apicale), les différents

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organes ayant par ailleurs des sensibilités différentes. tefois modifier de manière significative la quantité de chlo-
L’auxine joue également un rôle dans la différenciation cel- rophylle, et par là-même, le rendement photosynthétique,
lulaire et l’organogénèse favorisant l’apparition des racines si bien qu’elle n’a pas reçu de ce point de vue les applica-
sur les boutures. tions agricoles que l’on avait cru pouvoir en attendre.
170. – Apparaissant à l’extrémité des tiges et des racines, 174. – La gibbérelline intervient aussi dans la reprise de
l’auxine est très facilement inactivée ou détruite dans la la vie active des embryons au cours de la germination.
plante ; d’abord sous l’influence de la lumière, ensuite
par l’action d’enzymes bien adaptées à cette substance Introduite dans l’eau de trempage des grains d’orge de
naturelle et rencontrées en abondance dans les tissus brasserie, elle accroît et régularise la production de malt.
végétaux, en particulier lorsqu’ils sont âgés. Enfin, GA3 peut améliorer la croissance des fruits parthé-
nocarpiques.
Cette inactivation de l’auxine explique pourquoi une
pulvérisation sur la plante entière est si peu efficace, la La gibbérelline appliquée à la plante est très rapidement
plante étant capable de réagir à des doses inhabituelles de inactivée et aux doses élevées elle ne présente pratique-
ce composé naturel en l’inactivant. ment pas de toxicité. On ne sait pas encore en faire la
171. – Il n’en est pas de même de certaines substances synthèse chimique et l’on ne connaît pas d’analogue syn-
synthétiques qui ont les propriétés physiologiques de thétique ayant les propriétés des gibbérellines.
l’auxine en raison de leurs caractères chimiques, mais 175. – Néanmoins, il existe certaines substances chimiques
que la plante est plus ou moins incapable d’inactiver. Il artificielles qui s’opposent à l’action et à la synthèse de la gib-
s’agit d’auxines de synthèse dont les principales sont : bérelline dans la plante. Il s’agit des antigibbérellines (C.C.C.
A.I.B. (acide indole butyrique) Liste
ou chlorure de chlorocholine, amo 1618, phosphon D et
A.N.A. (acide naphtyl acétique) B995), qui ont reçu des applications : obtention de plantes
A.N.O.A. (acide naphtoxyacétique) ornementales naines, lutte contre la verse des céréales.
2,4-D (acide 2,4 - dichlorophénoxyacétique) 176. – Les morphactines sont des composés chimiques de
2,4,5-T (acide 2,4,5, - trichlorophénoxyacétique) synthèse qui agissent à faible dose comme activateurs de Ta b l e
M.C.P.A. (acide 2 - méthyl, 4 - chlorophénoxyacétique) croissance et à forte dose comme antigibbérellines (flure-
Ces substances sont utilisées comme désherbants. Elles nol, chlorfluren). Elles ne présentent aucune toxicité,
migrent comme l’auxine dans toute la plante, accélérant migrent dans la plante et modifient le fonctionnement de
anormalement la croissance et désorganisant le dévelop- tous les méristèmes à la fois, donnant au végétal une
pement végétatif et reproducteur. Les légumineuses sont forme inhabituelle ; c’est de cette action morphologique I n dex
beaucoup plus sensibles que les graminées. Les auxines que les morphactines tirent leur nom.
synthétiques sont des désherbants sélectifs.
Elles sont également utilisées pour favoriser l’enracine- C. Cytokinines
ment des boutures et régulariser la chute des fruits.
177. – Les cytokinines sont des substances qui favorisent la Glossaire
division cellulaire. L’existence d’une substance chimique
B. Gibbérellines contrôlant la division cellulaire, en particulier au niveau
172. – Les gibbérellines sont des substances naturelles qui, des méristèmes secondaires, était pressentie depuis long-
lorsqu’elles sont pulvérisées sur la plante, provoquent un temps. Mais il aura fallu le développement des techniques
allongement des tiges et des feuilles (en particulier des pois de cultures de tissus au laboratoire pour montrer que
nains traités prennent l’aspect de pois à rame). l’adénine, substance entrant dans la composition des aci-
La première, gibbérelline (GA3 = acide gibbérellique) a des nucléiques, était active et ce n’est que vers 1964-1966
que l’on a isolé la zéatine et l’I.P.A. (isopentényl adénine),
été découverte et isolée avant 1939, c’est-à-dire peu de
les deux premières cytokinines naturelles connues.
temps après l’auxine, à partir d’un champignon (gibbe-
rella) qui provoquait, en infectant le riz, une croissance Les cytokinines sont très proches des acides nucléiques qui
excessive de cette plante. jouent un rôle dans la mitose. Elles semblent être synthéti-
Il ne s’agissait là que d’une substance produite par un cham- sées et agir sur place, néanmoins on en rencontre dans la
pignon et ce n’est qu’en 1957 que l’acide gibbérellique a été sève brute. Ce seraient donc également des hormones.
isolé de plantes saines et considéré alors comme un véritable 178. – Outre leur action sur la division cellulaire, pro-
régulateur naturel de la croissance, d’un grand intérêt. priété utilisée au laboratoire pour régénérer des plantes à
Depuis on a d’ailleurs isolé, à partir des végétaux supérieurs, partir de cellules ou de tissus isolés, les cytokinines ont
plus de 20 gibbérellines aux propriétés analogues. pour effet de retarder le vieillissement et le jaunissement
173. – Synthétisée dans les organes en pleine croissance, des organes. Les feuilles détachées sur lesquelles on a pul-
la gibbérelline migre facilement, se rencontre dans tous vérisé une cytokinine restent vertes beaucoup plus long-
les tissus où elle peut jouer son rôle : c’est donc aussi une temps que les autres ; cette propriété permet de conserver
hormone. l’aspect frais du végétal coupé au cours de son transport.
Son action la plus spectaculaire porte sur la croissance des On connaît des analogues synthétiques des cytokinines,
entre-nœuds permettant parfois de faire monter et fleurir en particulier la kinétine ou furfuryl adénine et la B.A.P.
certaines plantes en rosettes (utilisation en floriculture). ou benzyl adénine, qui sont extrêmement actifs et d’un
Pulvérisée sur le feuillage, elle en accroît la surface sans tou- prix de revient moins élevé.

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Signalons enfin l’acide traumatique, autre substance de les plantes a très peu d’effet sur l’abscission, la plante étant
division naturelle, chimiquement très différente des capable de l’inactiver rapidement. Pour défolier les plan-
cytokinines et qui joue un rôle au moment de la cicatri- tes, on utilise d’autres substances comme le diquat, inhibi-
sation des blessures. teur synthétique très efficace, ne présentant cependant
aucune analogie chimique avec l’acide abscissique.
D. Inhibiteurs de croissance
185. – Substances alléopathiques. Composés libérés par
179. – Les inhibiteurs de croissance sont des composés certaines plantes qui inhibent la croissance des plantes
chimiques naturels ou synthétiques qui ralentissent ou voisines. C’est le cas par exemple de la juglone contenue
empêchent la croissance des végétaux. dans les feuilles du noyer, de l’eucalyptol dans celles de
a) Inhibiteurs naturels l’eucalyptus. Ces composés, fortement inhibiteurs, expli-
180. – Les inhibiteurs naturels se rencontrent en quantité quent pourquoi au pied de ces arbres où se décomposent
parfois importante dans les tissus végétaux peu actifs les feuilles, la végétation est pauvre ou inexistante. Ils
(bourgeons dormants), y jouent probablement un rôle, seraient en partie la cause de certaines formes de compé-
mais existent également dans certains tissus en pleine crois- tition entre espèces végétales.
sance où ils doivent alors se trouver sous forme inactivée.
Les composés libérés des bruyères, du romarin, de la
Les inhibiteurs naturels sont divers et nombreux ; nous piloselle, du chiendent ne sont pas connus, ainsi que ceux
n’en citerons que quelques-uns. qui sont probablement libérés des résidus de récoltes
181. – Éthylène. Ce gaz a d’abord été détecté dans les considérés comme mauvais précédents.
Liste fruits pendant la maturation et fut longtemps considéré
comme un produit de la décomposition des organes en Les plantes peuvent également présenter dans leurs tissus
voie de dégénérescence. Cependant on l’a rencontré dans des inhibiteurs leur permettant de lutter contre l’envahis-
des tissus plus actifs, sur lesquels il a parfois les mêmes sement par des parasites (cas de l’acide chlorogénique)
Ta b l e propriétés que l’auxine. L’éthylène est considéré comme et, à l’opposé, certains micro-organismes parasites
un médiateur de l’auxine, ce qui expliquerait en partie lorsqu’ils envahissent la plante sécrètent des inhibiteurs
son effet dépressif à forte dose. Il migre rapidement à la qui l’affaiblissent (cas de la scopolétine).
manière d’une véritable hormone.
Ce gaz est actuellement utilisé pour accélérer le jaunisse- b) Inhibiteurs synthétiques
Index ment et la maturation des fruits dans les chambres de
conservation. On connaît un précurseur synthétique, 186. – Ces composés, que l’on ne rencontre pas dans la
l’étrel, qui libère l’éthylène dans les tissus végétaux qu’il matière végétale, sont obtenus par synthèse chimique.
pénètre et dont les applications agronomiques et horti- Ceux qui nous intéressent ont reçu des applications agri-
coles sont encourageantes. coles, en particulier dans le domaine du désherbage. Leur
Glossaire action porte sur les processus fondamentaux de la crois-
182. – Alcaloïdes. Substances organiques azotées, les
alcaloïdes sont parfois de puissants inhibiteurs rencon- sance et du développement du végétal : division cellulaire
trés chez les végétaux : colchicine, éphédrine, trigonelline. (carbamates), métabolisme hormonal (auxines de syn-
Ces substances sont également toxiques pour les ani- thèse), respiration (colorants nitrés), photosynthèse
maux qui répugnent à consommer les plantes qui en (dérivés de l’urée, triazines).
contiennent. Parmi eux, les herbicides totaux détruisent indifférem-
183. – Coumarine. Substance donnant à l’herbe coupée ment toutes les plantes traitées, leur qualité principale
son odeur de foin, la coumarine est présente dans le méli- étant la non rémanence dans le sol, c’est-à-dire leur apti-
lot et la flouve à des doses fortement toxiques. Dans ces tude à être rapidement dégradés par les micro-organis-
plantes, elle est combinée à un sucre qui la rend parfaite- mes (aminotriazole, acide trichloro-acétique).
ment inactive et dont elle .se libère au cours de la fenaison.
184. – Acide abscissique (ou dormine). Inhibiteur naturel, Les herbicides sélectifs, dont font partie les auxines de
caractérisé vers 1965 dans les fruits en voie d’abscission et synthèse, ont une action qui porte uniquement sur cer-
dans les bourgeons dormants, l’acide abscissique est un taines espèces végétales, épargnant les plantes cultivées.
composé apparenté aux caroténoïdes et provitamine A Cette sélectivité résulte soit de l’aptitude de certains
dont il dériverait par dégradation à la lumière. Son action végétaux à résister à la pénétration du désherbant (cas
porte sur de nombreux phénomènes de croissance et de des céréales résistantes aux colorants nitrés), soit de leur
développement (arrêt de croissance, chute des organes, métabolisme particulier (cas du maïs capable de neutra-
vieillissement). La pulvérisation de ce composé naturel sur liser rapidement la simazine).

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