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STRUCTURE
ET ÉTAT PHYSIQUE DU SOL
1ère partie
par
Gérard MONNIER
Directeur de Recherches à l’INRA – Station de Science du Sol d’AVIGNON
Pierre STENGEL
Chargé de Recherches à l’INRA – Station de Science du Sol d’AVIGNON
SOMMAIRE ANALYTIQUE
Liste I. Généralités et définitions (1 et 2)
II. Méthodes de caractérisation de l’état physique (3 à 32)
A. Méthode d’observation du profil cultural (4 à 13)
Ta b l e 1. Définition du profil cultural (4).
2. Préparation du profil et distinction des horizons (5).
3. Principales observations (6 à 13).
B. Méthodes quantitatives (14 à 31)
1. Porosité totale (15 et 17).
Index 2. Analyse des systèmes de porosité (18 à 31).
C. Relations avec le profil cultural (32)
III. Rôle de l’état physique et structural sur le fonctionnement des sols cultivés ;
Glossaire conséquences agronomiques (33 à 49)
A. Stockage et transfert de l’eau (34 à 37)
1. Le sol considéré comme un réservoir hydrique (35).
2. Le sol considéré comme un milieu de transfert (36 et 37).
B. L’aération du sol (38 à 42)
1. Importance agronomique (38).
2. Facteurs physiques et biologiques commandant l’aération en un point donné du sol (39 à 42).
C. La température du sol (43 et 44)
D. Le sol comme milieu de croissance du système racinaire (45 à 49)
Activité structurale, 56. Engrais vert, 96, 98. Phyllites, 28, 52.
Aération, 17, 34, 38 à 42. Epierrage, 86. Plasticité (limite de), 97.
Albedo, 43. Érosion (hydraulique, éolienne), 60, 94. Plâtrage, 42.
Alcool éthylique, 66. Porosité (totale, texturale, structurale, sys-
Fissuration, 6, 50 à 56.
Assemblage élémentaire, 1. tème de, micro, macro), 1, 16 à 32.
Fluage, 74, 82.
Portance, 49, 74.
Battance (croûte de), 56. Fragmentation, 50.
Prise en masse, 59, 69, 70.
Benzène, 66, 67. Fumier, 16, 98.
Proctor (test de), 75, 82.
Capacité de rétention, 29, 35, 41, 82, 97. Gley, 16, 12. Profil cultural, 1, 4 à 14, 32.
Capillarité, 2, 61, 62, 63. Gonflement (potentiel), 2, 28, 50, 52, 53, Profil pédologique, 4.
Chaulage - surchaulage, 68, 90, 91. 56.
Résidus (de récolte), 98.
Cohésion, 58, 59, 61, 62, 65, 72.
Hydromorphie, 10. Retrait (normal, résiduel) 2, 43, 50 à 54, 70.
Colmatage, 88.
Hydrophobe, 63, 66. Roulage, 11, 28, 72, 77.
Compacité, 37.
Compactage (dynamique-statique), 75 à Indice des vides, 16, 82. Sablage, 87.
83. Instabilité (indice d’), 67, 68. Saturation, 17.
Composition ionique, 90, 91, 92. Itinéraire technique, 4, 14. Self-mulching, 37.
Compost, 98. Stabilité structurale, 61 à 68, 91, 97, 98.
Limonage, 88.
Conductivité hydraulique, 72. Stockage de l’eau, 35. Liste
Liquidité (limite de), 97.
Contraintes (hydriques, mécaniques), 2, Structure (sur, sous), 7.
Lisiers, 98.
30, 54, 82. Substances humiques, 96, 97.
Marnage, 89. Substances préhumiques, 96, 97.
Densité, 20 à 25, 75 à 82.
Matières organiques, 6, 10, 12, 14, 27, 32, Substances transitoires, 96, 97.
Densitomètre (à membrane, à transmis-
35, 53, 54, 56, 63, 79, 80, 81, 93 à 99. Ta b l e
sion y), 24, 26. Tassement, 10, 39, 71 à 83.
Microstructure, 1.
Désagrégation, 2, 57 à 68, 96. Taux de saturation, 13.
Milieu poreux, 1, 2.
Diffusion, 42, 44, 72. Texture, 8, 37, 68, 85 à 89.
Mouillabilité, 63.
Diffusivité thermique, 44. Transfert de l’eau, 34 à 37, 73.
Mulch, 86, 94.
Drainage, 36, 49, 92.
Oedométrie, 75.
Électrolyte, 62, 65, 68, 91. I n dex
Glossaire
Classification
par taille :
Cendreuse
— fibreuse
SQUAMEUSE PRISMATIQUE MASSIF Poudreuse
CIMENT
Sableuse — feutrée
NUCIFORME Graveleuse
— feuilletée
Pierreuse
Liste
SCHISTEUSE COLUMNAIRE
Ta b l e GRÈS
Glossaire
POUDINGUE PLAQUETTES POLYÉDRIQUE
sur les propriétés des sols et leur fonctionnement. En l’état pluie sur sol sec, l’accumulation de l’eau sur une couche com-
actuel (cf. n. 50), on doit se borner à y voir des “ signes ” dont pacte, la circulation préférentielle dans des fissures, dans des
l’interprétation dans le sens qui vient d’être indiqué, bien que galeries de vers de terre ou le long de racines vivantes ou en
très utile, reste fragmentaire. cours de décomposition, sont des exemples d’observations
b) Évaluation de la texture des différents horizons fructueuses. Le cas échéant, les nappes d’eau libre doivent être
repérées.
8.– Il s’agit là d’une qualification globale de la constitution
granulométrique (cf. fasc. 1130), qui peut être précisée à d) Répartition et état de la matière organique ; diagnostics des
partir des résultats d’une analyse granulométrique éventuelle- phénomènes de réduction
ment complétée par un examen minéralogique.
10.– La répartition de la matière organique totale qui confère
Le résultat de cette évaluation faite au toucher est exprimé en aux couches qui en contiennent un taux suffisant une colora-
rattachant chaque matériau présent dans le profil cultural à tion plus foncée, voire grise ou noirâtre, est un bon indicateur
une classe texturale. On peut avec profit utiliser le triangle de de la profondeur moyenne de labour, d’anciens labours plus
texture du G.E.P.P.A. (Groupe d’Étude des Problèmes de profonds ou de labours de défoncement. Dans ce dernier cas,
Pédologie Appliquée) qui est la référence la plus généralement des bandes obliques plus foncées marquent souvent très net-
utilisée en France à cet égard. tement le sol et permettent de reconstituer les caractéristiques
c) Répartition de l’humidité et circulation de l’eau d’une intervention culturale parfois très ancienne.
9.– Les observations concernant la répartition de l’humidité Mais ce sont surtout les matières organiques libres (résidus
dans le profil, la localisation et les directions d’écoulement de enfouis des dernières récoltes plus ou moins reconnaissables)
l’eau dite “ libre ” permettent de se faire une idée, au moins à que l’on peut utiliser comme indicateurs de l’histoire
certaines époques, de la dynamique générale de l’eau dans le culturale : précédents culturaux ; types et profondeur des
sol étudié. L’aspect du front de pénétration après une forte interventions de travail du sol.
Les pores du sol peuvent être remplis d’air ou de gaz divers, 17.– A partir de trois évaluations portant sur le sol : volume
ou d’eau contenant des produits dissous. Il est important de total (ou volume apparent), volume de solide et teneur en
connaître les fractions d’espace poral respectivement occu- eau, on établit donc un bilan en volume des trois phases qu’il
pées par la phase gazeuse et la phase liquide : il suffit de con- comporte, qui est une caractérisation très globale de son état
naître la teneur en eau massique (gramme d’eau par gramme physique. Nous verrons par la suite (n. 33 à 48) que porosité
de sol sec) ou volumique (cm3 d’eau par cm3 de sol humide). totale, teneur en eau et teneur en air sont fortement liées aux
On en déduit aisément la teneur en air puisque (fig. 3) : Vp = propriétés du sol : propriétés hydriques, thermiques, aéra-
VL + VG tion, comportement mécanique.
On exprime souvent l’importance relative de la phase liquide
Cependant, dans la plupart des cas, la prévision de ces pro-
V
par le rapport : s = ------L- appelé taux de saturation. priétés fait intervenir d’autres caractéristiques, plus analyti-
Vp ques, de l’état physique du sol. Ce sont en particulier des
Lorsque s = 1, la porosité est entièrement occupée par la caractères de formes et de dimensions des pores : distribution
phase liquide. On dit que le sol est saturé. des diamètres, tortuosité, continuité.
}
}
VG b) Techniques de mesure
VP 20.– Dans la pratique les mesures de la porosité sont le plus
VL souvent indirectes. On mesure généralement la densité sèche
pd du sol considéré (appelée fréquemment densité appa-
VT masse de sol sec
rente). C’est le rapport : --------------------------------------
volume de sol
En mesurant également la densité des particules solides ρs ,
VS on calcule la porosité totale à partir de l’équation :
T ρ
n = 1 – -----d
ρs
VG Volume de phase gazeuse
VL Volume de la phase liquide • Mesures de la porosité texturale
VS Volume de la phase solide 21.– Le principe de la technique repose sur l’idée suivante :
les pores texturaux ont des dimensions du même ordre de
Fig. 3. – Schéma des différentes phases présentes
grandeur que les particules constitutives du sol, les pores Liste
dans un volume de sol (VT)
structuraux sont généralement de plus grande dimension.
En brisant un échantillon en morceaux suffisamment petits,
2. Analyse des systèmes de poroslté ceux-ci auront peu de chance de contenir des pores structu-
18.– Il est donc nécessaire de compléter la caractérisation de raux. On pourra considérer qu’ils ont une structure conti-
l’espace poral du sol par d’autres critères que son volume nue et ne contiennent que des pores texturaux. La figure 4 Ta b l e
total. Ceux-ci peuvent être nombreux. Il faut choisir les plus confirme la validité de cette hypothèse pour un sol limo-
adéquats en fonction de l’objectif poursuivi. Ainsi, lorsque cet neux. On a mesuré la porosité d’une couche de sol en place,
objectif est de prévoir les effets des différents facteurs d’évolu- puis séparé par rupture et tamisage des fragments de plus en
tion de l’état physique du sol, paraît-il logique de distinguer plus petits. On observe une diminution de la porosité de ces
dans l’espace poral les volumes résultant de l’action de chacun fragments quand leur volume décroît jusqu’à un palier qui I n dex
de ces facteurs. Ceci revient à s’efforcer de classer différentes correspond à la porosité texturale.
fractions de volume poral suivant leur origine. Telle est l’idée
directrice de l’analyse des systèmes de porosité.
Porosité %
a) Principe
Porosité totale de la couche de sol Glossaire
19.– Dans une première étape, on peut distinguer dans
l’espace poral du sol deux sous-ensembles :
– d’une part des pores résultant de l’assemblage des particules
solides élémentaires, telles que les définit l’analyse granulo-
40
métrique (argiles, limons, sables). Ces particules ne sont pas
indéfiniment déformables, leurs formes et leurs dimensions
sont variées, elles ne peuvent donc s’emboîter parfaitement et
ménagent entre elles un volume poral. Il a été qualifié de tex-
tural. Nous pouvons déjà noter que dans les matériaux conte-
nant des argiles gonflantes (smectites) ce volume poral sera
fonction, non seulement de la constitution minérale et orga- 35 Porosité texturale
s t
v v
p nt = p
Vp VT
t
v
p
VT t
v
n' t = p
t
Vs Vs + v
P
Liste Fig. 6. – Mesure de la densité en place technique des anneaux
10
Dispositif électronique
de comptage
Compteur
Trajectoire des
Liste photons
Source Radioactive
Ta b l e
1 2
Fig. 9. – Exemples de variation de la porosité texturale à l’état sec n’t d, suivant la constitution du matériau
Par ailleurs, l’expérience a montré que dans les couches de • Relations avec la microporosité
surface des sols cultivés, on peut considérer qu’à une
humidité correspond une seule valeur de la porosité textu- 29.– Une des méthodes les plus classiques de classifica-
rale. La relation porosité texturale-humidité étant établie tion de l’espace poral consiste à distinguer deux classes :
pour un sol donné, on peut par la suite l’utiliser pour cal- la micro et la macro porosité.
culer la porosité structurale à partir des mesures de la den-
Expérimentalement, ces deux classes sont définies en
sité en place et de l’humidité. Enfin, dans certains cas sim-
soumettant un échantillon de sol saturé d’eau à une suc-
ples (absence de travail du sol), les variations de la porosité
cion définie, correspondant à ce qu’on appelle la capacité
structurale avec l’humidité peuvent être prévues statisti-
de rétention (quantité d’eau maximale restant en réserve
quement (n. 50-56).
dans le sol après drainage).
L’analyse des systèmes de porosité, parmi les autres
moyens de caractérisation de l’espace poral, présente donc En effet, les lois de la capillarité permettent d’établir une cor-
l’avantage considérable de rendre possible des extrapola- respondance entre la succion nécessaire pour vidanger un
tions et des comparaisons pour différentes teneurs en eau. pore et un diamètre dit “ équivalent ”, car les pores du sol ne
peuvent être assimilés à des cylindres. Les pores restant pleins
11
Porosité Structurale ns 0,44 0,23 0,14 0,064 Biologique 0,014 Fissurale 0,05
Fig. 11. – Analyses de la porosité d’un sol limono-argileux dans différents états structuraux (humidité : capacité de rétention)
C. Relations avec le profil cultural est – et restera toujours – inefficace pour mettre en évi-
dence des obstacles très localisés, mais aux conséquences
32.– Si l’intérêt d’une telle méthode, strictement quantita-
souvent importantes, tels que les lissages.
tive, pour caractériser l’état physique du sol, est incontes-
table, il ne peut être envisagé de la substituer au profil Au-delà de cette différence dans les utilisations actuellement
cultural. Ses performances en tant qu’outil de diagnostic possibles des deux méthodes, leur complémentarité apparaît
sont insuffisantes. Les relations entre un niveau de porosité de façon très fondamentale. L’analyse de la porosité n’est, au
structurale donné et le comportement d’une culture sont moins dans son principe, qu’un bilan en volume strictement
inconnues, alors que l’expérience a permis d’établir des aveugle par rapport à la morphologie structurale. Or, c’est le
relations de ce type, même si elles restent grossières, dans plus souvent la forme des pores structuraux, ou des éléments
le cas du profil cultural. Par ailleurs, l’analyse de la porosité structuraux eux-mêmes (mottes, agrégats) qui renseigne sur
12
l’origine des variations de la porosité. C’est le cas par exemple Cette fonction de stockage est assurée dans la fraction la plus
des pores biologiques que leur forme arrondie permet de dis- fine de l’espace poral dans laquelle les forces gravitaires qui
tinguer des fissures dues au retrait. Le profil cultural, étant s’exercent sur l’eau deviennent négligeables vis-à-vis des for-
une méthode rapide et opérationnelle de description de ces ces capillaires ; c’est pourquoi elle est fréquemment désignée
pores, concourt à l’objectif propre de l’analyse de la porosité. par le vocable : microporosité.
De même, le profil cultural permet de distinguer dans la cou- En termes de systèmes de porosité, la microporosité ou capa-
che arable d’une parcelle les différents types de structure pré- cité de rétention volumique est très généralement incluse
sents et de les relier à l’histoire culturale : passages de roues, dans la porosité texturale dont elle constitue, sauf dans le cas
enfouissements de matières organiques, etc. Il constitue, de ce des sols à texture très grossière, l’essentiel.
fait, un guide irremplaçable quant aux emplacements et pro- D’une façon plus générale, l’humidité pondérale H à la capa-
fondeurs où doivent être pratiquées les analyses de la porosité. cité de rétention est statistiquement liée étroitement à la pro-
Enfin, l’analyse de la porosité contient implicitement une infor- portion de constituants granulométriques les plus fins : argile
mation morphologique. Une porosité structurale nulle corres- A (et matières organiques) et limons fins I selon un modèle
pond le plus souvent à ce que l’on qualifie de structure conti- additif tel que celui proposé par R. Gras :
nue, et l’accroissement de la porosité structurale est lié au degré H = 0.59 A + 0,16 1 + 5.47 (A > 20 %)
de fragmentation de la structure. Le développement des tra- H = 0.51 A + 0,14 1 + 7.35 (A < 20 %)
vaux permettant de quantifier ces relations devrait conférer à la La disponibilité de cette réserve d’eau pour les végétaux est
description du profil cultural une plus grande sécurité quanti- limitée lorsque le sol se dessèche. On considère généralement
tative et à l’analyse de la porosité des possibilités d’interpréta- qu’au-delà d’une succion de 16 bar (pF = 4.2) le sol est au
Liste tion agronomique beaucoup plus vaste. point de flétrissement permanent (cf. fasc. 1165). L’eau est
alors énergiquement retenue dans les pores d’un diamètre
III. RÔLE DE L’ÉTAT PHYSIQUE ET STRUCTURAL équivalent inférieur au 1/10 de µm présents dans la phase
SUR LE FONCTIONNEMENT DES SOLS argilo-humique du sol.
Ta b l e CULTIVÉS ; CONSÉQUENCES AGRONOMIQUES Dans la réalité, la disponibilité décroît avec l’humidité pour
des raisons qui, comme nous le verrons plus loin, sont liées
33.– Nous nous bornerons ici, pour chacun des princi- aux conditions de transferts d’eau dans le sol.
paux groupes de fonctions physiques du sol, à situer leur
importance agronomique et à exposer brièvement quel- Enfin, si la réserve disponible totale – qui correspond à la
les sont les caractéristiques d’état et de comportement gamme des teneurs en eau allant de la capacité de rétention au
Index point de flétrissement Hr – dépend, lorsqu’on la rapporte à
qui les commandent.
l’unité de volume de sol en place, des caractéristiques de cons-
titution du sol, elle dépend, au niveau du terrain, de la pro-
A. Stockage et transfert de l’eau fondeur de sol utile P, c’est-à-dire de la profondeur d’enraci-
et des éléments dissous) nement. En définitive, la réserve disponible totale R(mm)
Glossaire
peut être exprimée par la relation :
34.– Il s’agit là d’un ensemble de fonctions dont l’impor-
tance physique et agronomique directe ou indirecte est R(mm) = P(dm) (Hr % – Hf %).ρd. 10
déterminante. La teneur en eau du sol et ses variations dans laquelle ρd est la densité du sol en place, supposé de cons-
commandent en effet, non seulement la mise à disposition titution et d’état physique homogènes sur la profondeur P.
au niveau des racines de la culture de l’eau et des éléments
nutritifs solubles, mais aussi les conditions d’aération et de 2. Le sol considéré comme un milieu de transfert
température, de l’activité biologique.
36.– La fonction de transfert hydrique a une grande impor-
Enfin, elle est, nous le verrons, l’un des moteurs de l’évolution tance agronomique à plusieurs égards :
de l’état physique lui-même, que ce soit dans le sens d’une
dégradation ou dans le sens d’une amélioration. • elle assure d’abord par infiltration et redistribution la
reconstitution des réserves du sol au cours des périodes de
l’année à excédent pluviométrique ou lors de chaque applica-
1. Le sol considéré comme un réservoir hydrique tion d’eau d’irrigation.
35.– La capacité de stockage d’un sol peut être très impor- • par drainage interne, et par transfert vers les exutoires, elle
tante par rapport aux termes du bilan d’eau annuel. C’est assure l’évacuation des excès d’eau. Lorsque cette fonction est
ainsi qu’un sol de limon moyen d’une profondeur utile de mal remplie, ceux-ci se prolongent ou deviennent perma-
1 m 50 peut emmagasiner 600 mm d’eau, soit presque autant nents. Les conséquences agronomiques en sont graves ; elles
que la hauteur normale des précipitations dans le Bassin Pari- portent sur la croissance et le fonctionnement racinaires et de
sien, et en stocker après drainage 4 à 500 mm. La part de cette façon plus générale sur l’activité biologique du sol qui peut
réserve disponible pour les végétaux atteint 250 mm environ, être perturbée ou arrêtée ; sur la dégradation de l’état physi-
soit une quantité équivalente au déficit climatique cumulé que et sur les conditions pratiques d’utilisation agricole des
moyen au cours des mois d’été dans la même région. terrains (diminution de la traficabilité).
Sous les climats où le déficit climatique dépasse de beaucoup • la fonction de transfert permet, ensuite, l’utilisation par
la capacité de réserve du sol, on a recours à l’irrigation ; la la culture des réserves hydriques. La densité d’implanta-
réserve du sol est alors un élément déterminant des doses tion du système racinaire définit la distance moyenne que
d’irrigation par les techniques classiques. doit parcourir l’eau stockée en un point quelconque du sol
13
14
B. L’aération du sol
{O : 20,97 %
2
Atmosphère CO2 : 0,03 %
Surface du sol
1. Importance agronomique
Echanges
38.– Si l’on perçoit assez facilement la notion globale CO2 par diffusion
d’aération dans le sol, il est beaucoup plus difficile d’éva- P O2 avec l'atmosphère
luer avec précision l’état d’aération par rapport aux acti-
vités biologiques diverses qui interviennent dans le sol. air
Cela tient d’abord au fait que toutes ces activités n’ont air v eau
Grossissement solide
pas le même niveau de besoin. Ensuite, on ne sait pas CO2
O2
clairement quelles sont les variables les plus importantes Respiration racinaire Volume d'air
pour définir « l’état d’aération » en un point donné du Activité microbiologique
(surtout cycle de carbone)
sol et ses possibilités d’évolution.
Globalement, l’aération a d’importantes conséquences Fig. 14. – Représentation schématique de l’aération du sol
agronomiques. Lorsqu’elle est insuffisante :
– elle inhibe le processus de germination ce qui peut, l’état structural mais aussi la texture, interviennent de façon
secondairement, entraîner la destruction des semences déterminante ;
par les microorganismes du sol ; – des conditions climatiques : en période à forts excédents
– elle limite la croissance des racines de la plupart des pluviométriques, les risques de saturation, intermittente ou
Liste espèces cultivées ; lorsqu’elle intervient après installa- permanente, sont sensiblement plus élevés pour une qualité
tion du système racinaire, elle entraîne des nécroses et donnée du drainage propre au terrain.
la destruction partielle, voire totale, des racines ; b) Composition de l’air
– elle perturbe le fonctionnement des racines. Celles-ci 41.– Elle dépend d’une part des échanges entre phases au sein
Ta b l e respirent et doivent donc trouver de l’oxygène dans leur du volume V et d’autre part des échanges entre le volume V et
environnement immédiat à une concentration suffi- l’atmosphère extérieure.
sante. Un manchon d’eau autour des racines peut suf-
fire s’il est épais (sol saturé ou quasi saturé), à ralentir La consommation d’oxygène et le dégagement correspondant
les échanges gazeux de façon. dommageable pour l’acti- de CO2 au sein de ce volume de référence sont liés à l’activité
vité racinaire : absorption d’eau et d’éléments miné- biologique : respiration racinaire mais, surtout, décomposi-
Index
raux tels que l’ion phosphorique. tion biologique des matières organiques apportées au sol.
Un exemple peut fournir un ordre de grandeur à cet égard :
Par ailleurs, des phénomènes comme la chlorose des La production de CO2 entraînée par l’incorporation de 5 t de
arbres fruitiers ou de la vigne apparaissent lorsque deux pailles correspond à une consommation moyenne en oxy-
conditions sont remplies simultanément : gène de 10 m3/ha/jour avec des pointes dépassant 100 m3/ha/
Glossaire
• la présence de calcaire fin dit « actif » dans le sol ; jour. Cet ordre de grandeur peut être rapproché des volumes
• une mauvaise aération (concentration excessive en CO2 d’espace poral libre à l’air dans la couche arable d’un sol en
bon état cultural et à une humidité voisine de la capacité de
à proximité immédiate des racines) le plus souvent liée
rétention, soit : 50 à 150 m3/ha correspondant à un maxi-
à des excès d’eau :
mum de 10 à 30 m3 d’oxygène par ha. On voit que la stabilité
– enfin les conditions d’aération commandent l’activité de de la composition de l’atmosphère du sol ne peut être obte-
la faune et de la microflore du sol, et notamment celle qui nue que par une bonne qualité des échanges entre le sol et
intervient dans les cycles de l’azote et du carbone. l’atmosphère extérieure.
c) Mécanismes d’échange avec l’atmosphère
2. Facteurs physiques et biologiques commandant
l’aération en un point donné du sol 42.– Ceux-ci se font par diffusion des gaz commandés par le
gradient de concentration entre le volume de sol considéré et
39.– Soit un petit volume de sol en place V situé à une profon- l’atmosphère extérieure.
deur p.
Son intensité dépend alors :
Le schéma de la figure 14 présente les principaux mécanismes
– de la profondeur p, d’où le danger d’une incorporation pro-
intervenant dans les modifications quantitatives (teneur en
fonde de matières organiques aisément biodégradables ;
air) et qualitative (composition de l’air) au sein de ce volume
élémentaire. – de la porosité des couches situées entre le volume V et la
surface ainsi que de la conformation des pores et de la
a) Teneur en air tortuosité (qui accroît la distance réelle à parcourir par
40.– Elle est égale à la part de porosité qui à chaque instant les molécules gazeuses).
n’est pas occupée par de l’eau. Elle dépend donc : La présence d’une porosité structurale ouverte est une
– de la qualité du drainage de la couche de sol considérée ; on garantie de bon fonctionnement des échanges ; à l’opposé,
a vu la part prise par la porosité d’origine structurale sur la la présence d’une barrière à la diffusion, même limitée à
rapidité de ce drainage. Le sol étant supposé ressuyé (capa- une couche lissée de faible épaisseur (fond de pseudo-
cité de rétention), la proportion de phase gazeuse est liée à la labour par exemple) peut avoir des conséquences considé-
proportion de pores de grandes dimensions et, là encore, rables.
15
16
sèche, ce qui est un risque très fréquent dans les couches de Un terrain cultivé doit être non seulement un bon support
surface des cultures de printemps et d’été. pour la plante mais aussi pour les matériels de culture :
Le mécanisme par déformation du sol au cours de la crois- matériel de préparation du sol, d’entretien et de protection
sance racinaire intervient plus spécifiquement dans des cou- phytosanitaire de cultures, enfin de récolte.
ches profondes souvent plus humides et ne présentant que D’où l’importance, accrue avec la multiplication des
rarement un réseau de pores structuraux développé. interventions mécaniques, avec l’augmentation du poids
des matériels et celle des contraintes du calendrier cultu-
Les accidents d’enracinement : limitation de profondeur, fai- ral, de l’amélioration de la portance (cf. n. 69 à 83) et de
blesse de la densité des racines, mauvaise exploitation des la prise en compte de cet objectif dans les techniques de
mottes, racines déformées sont presque toujours explicables drainage et de travail du sol.
dans le cadre de ces deux mécanismes principaux.
49.– Nous soulignerons, pour conclure sur le rôle agronomi-
que des fonctions physiques du sol, l’importance du sol consi-
déré comme support de techniques.
Liste
Ta b l e
Index
Glossaire
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