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1140TA

STRUCTURE
ET ÉTAT PHYSIQUE DU SOL
1ère partie
par
Gérard MONNIER
Directeur de Recherches à l’INRA – Station de Science du Sol d’AVIGNON
Pierre STENGEL
Chargé de Recherches à l’INRA – Station de Science du Sol d’AVIGNON

SOMMAIRE ANALYTIQUE
Liste I. Généralités et définitions (1 et 2)
II. Méthodes de caractérisation de l’état physique (3 à 32)
A. Méthode d’observation du profil cultural (4 à 13)
Ta b l e 1. Définition du profil cultural (4).
2. Préparation du profil et distinction des horizons (5).
3. Principales observations (6 à 13).
B. Méthodes quantitatives (14 à 31)
1. Porosité totale (15 et 17).
Index 2. Analyse des systèmes de porosité (18 à 31).
C. Relations avec le profil cultural (32)

III. Rôle de l’état physique et structural sur le fonctionnement des sols cultivés ;
Glossaire conséquences agronomiques (33 à 49)
A. Stockage et transfert de l’eau (34 à 37)
1. Le sol considéré comme un réservoir hydrique (35).
2. Le sol considéré comme un milieu de transfert (36 et 37).
B. L’aération du sol (38 à 42)
1. Importance agronomique (38).
2. Facteurs physiques et biologiques commandant l’aération en un point donné du sol (39 à 42).
C. La température du sol (43 et 44)
D. Le sol comme milieu de croissance du système racinaire (45 à 49)

©Techniques Agricoles 1140

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STRUCTURE ET ÉTAT PHYSIQUE DU SOL
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INDEX ALPHABÉTIQUE

Activité structurale, 56. Engrais vert, 96, 98. Phyllites, 28, 52.
Aération, 17, 34, 38 à 42. Epierrage, 86. Plasticité (limite de), 97.
Albedo, 43. Érosion (hydraulique, éolienne), 60, 94. Plâtrage, 42.
Alcool éthylique, 66. Porosité (totale, texturale, structurale, sys-
Fissuration, 6, 50 à 56.
Assemblage élémentaire, 1. tème de, micro, macro), 1, 16 à 32.
Fluage, 74, 82.
Portance, 49, 74.
Battance (croûte de), 56. Fragmentation, 50.
Prise en masse, 59, 69, 70.
Benzène, 66, 67. Fumier, 16, 98.
Proctor (test de), 75, 82.
Capacité de rétention, 29, 35, 41, 82, 97. Gley, 16, 12. Profil cultural, 1, 4 à 14, 32.
Capillarité, 2, 61, 62, 63. Gonflement (potentiel), 2, 28, 50, 52, 53, Profil pédologique, 4.
Chaulage - surchaulage, 68, 90, 91. 56.
Résidus (de récolte), 98.
Cohésion, 58, 59, 61, 62, 65, 72.
Hydromorphie, 10. Retrait (normal, résiduel) 2, 43, 50 à 54, 70.
Colmatage, 88.
Hydrophobe, 63, 66. Roulage, 11, 28, 72, 77.
Compacité, 37.
Compactage (dynamique-statique), 75 à Indice des vides, 16, 82. Sablage, 87.
83. Instabilité (indice d’), 67, 68. Saturation, 17.
Composition ionique, 90, 91, 92. Itinéraire technique, 4, 14. Self-mulching, 37.
Compost, 98. Stabilité structurale, 61 à 68, 91, 97, 98.
Limonage, 88.
Conductivité hydraulique, 72. Stockage de l’eau, 35. Liste
Liquidité (limite de), 97.
Contraintes (hydriques, mécaniques), 2, Structure (sur, sous), 7.
Lisiers, 98.
30, 54, 82. Substances humiques, 96, 97.
Marnage, 89. Substances préhumiques, 96, 97.
Densité, 20 à 25, 75 à 82.
Matières organiques, 6, 10, 12, 14, 27, 32, Substances transitoires, 96, 97.
Densitomètre (à membrane, à transmis-
35, 53, 54, 56, 63, 79, 80, 81, 93 à 99. Ta b l e
sion y), 24, 26. Tassement, 10, 39, 71 à 83.
Microstructure, 1.
Désagrégation, 2, 57 à 68, 96. Taux de saturation, 13.
Milieu poreux, 1, 2.
Diffusion, 42, 44, 72. Texture, 8, 37, 68, 85 à 89.
Mouillabilité, 63.
Diffusivité thermique, 44. Transfert de l’eau, 34 à 37, 73.
Mulch, 86, 94.
Drainage, 36, 49, 92.
Oedométrie, 75.
Électrolyte, 62, 65, 68, 91. I n dex

Glossaire

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I. GÉNÉRALITÉS ET DÉFINITIONS 2.– Considéré à ces différents niveaux d’organisation, le


sol-milieu poreux présente des caractéristiques dont
1.– Du point de vue de ses propriétés physiques, hydri- l’importance physique et agronomique est considérable :
ques et mécaniques, le sol peut être considéré comme un
Le sol est un milieu très divisé ; le matériau terreux qui
milieu poreux :
constitue les différents horizons résulte de la juxtaposi-
– dans le cas général, à trois phases : solide, liquide, gazeuse ; tion et de l’agrégation de particules solides dont certaines
sont très fines (ordre de grandeur < 10-3 mm).
– exceptionnellement, à deux phases : solide, liquide
lorsqu’il est saturé par l’eau ; solide, gazeuse lorsqu’il Une première conséquence de cette division est une
est totalement sec. grande surface de contact entre la phase solide et l’eau et
(ou) l’air : quelques dizaines de km2 pour un mètre cube
Ce caractère poreux résulte de l’organisation des consti- de sol de limon moyen. De plus, la majeure partie de
tuants du sol à différents niveaux. C’est ainsi qu’on est cette surface est chargée électriquement, ce qui fait du sol
amené à distinguer : un réacteur physicochimique très actif vis-à-vis de l’eau,
– l’assemblage des particules élémentaires : argile, matières des ions minéraux et des molécules organiques.
organiques libres et liées, limons, sables. La description des En second lieu, l’espace poral du sol qui résulte pour une
différents types d’assemblages élémentaires rencontrés dans grande part de l’organisation au niveau textural est un
les sols, leur classification, l’étude de leur genèse et de leurs assemblage de vides de très petites dimensions dans les-
conséquences sur les propriétés des sols s’appuyent sur des quels les transferts et le stockage de l’eau sont fortement
techniques d’observations micro-morphologiques dont la dépendants des phénomènes capillaires.
Liste mise en œuvre est longue et délicate. Le sol n’est pas un milieu poreux rigide ; à des degrés divers
La connaissance de ces « microstructures » et de leur signi- selon sa constitution, il change de volume au cours des
fication est de plus en plus considérée comme essentielle à phases d’humectation (gonflement) et de dessiccation
l’explication et à la prévision du fonctionnement des sols ; (retrait) ; il se déforme et (ou) se rompt sous l’influence
Ta b l e elle est toutefois encore incomplète et imprécise. Nous des contraintes mécaniques qui lui sont appliquées. Il se
nous bornerons ici à indiquer que ce niveau d’organisa- désagrège ou se prend en masse.
tion définit un premier système de porosité dit « textural » Sa description à un instant donné doit, de ce fait, être com-
en raison de l’importance déterminante qu’y prend la plétée par l’évaluation des propriétés et des contraintes
constitution granulométrique et minéralogique du sol hydriques et mécaniques susceptibles de provoquer sa
Index modification.
– l’agrégation des assemblages élémentaires en ensembles
cohérents, la fragmentation de ces derniers, définissent
II. MÉTHODES DE CARACTÉRISATION
un autre niveau d’organisation, à morphologie macros-
copique celui-ci, que nous qualifierons de « structural ». DE L’ÉTAT PHYSIQUE
Glossaire 3.– Nous nous bornerons à présenter un petit nombre de
Son origine tient à l’action sur le sol d’un ensemble com-
méthodes parmi celles qui sont disponibles, en choisis-
plexe de facteurs climatiques, mécaniques et biologiques,
sant celles qui malgré quelques limitations sont les plus
dont les modalités et les conséquences seront étudiées
simples et les plus opérationnelles.
plus loin.
Elles porteront, de ce fait, essentiellement sur la caracté-
Globalement, un état structural peut être caractérisé en risation physique aux niveaux d’organisation correspon-
utilisant deux approches complémentaires : d’un point dant au profil cultural et à l’état structural.
de vue qualitatif, on dispose de classifications de structu-
res basées sur la forme et la dimension des éléments A. Méthode d’observation du profil cultural
structuraux ; d’un point de vue quantitatif, ce niveau
d’organisation donne naissance à un deuxième système
de porosité dit “ structural ” constitué par l’ensemble des 1. Définition du profil cultural
fissures, vides ménagés par l’arrangement des mottes 4.– On entend par profil cultural « l’ensemble constitué
dans la couche travaillée, galeries d’origine biologique, par la superposition des couches de terre individualisées
qui viennent se superposer à l’espace poral textural. par l’intervention des instruments de culture, les racines
des végétaux et les facteurs naturels réagissant à ces
Enfin, le sol est constitué par un ensemble de couches
actions ». Tel quel, ce concept ne s’oppose pas à celui de
physiquement différenciées, chacune d’entre elles pou-
profil pédologique (cf. fasc. 1110 ), principalement
vant être caractérisée aux deux niveaux d’organisation
orienté vers l’analyse des conditions de genèse et de
textural et structural décrits ci-dessus. Cette différencia-
variabilité spatiale des sols, mais il le complète.
tion principalement verticale tient pour l’ensemble du
profil aux conditions de mise en place et d’évolution Du point de vue de l’Agronome, l’observation et l’inter-
pédologique du matériau originel : dans le cas des cou- prétation du profil cultural constituent une méthode de
ches de surface des sols cultivés, elle résulte également diagnostic permettant :
des techniques culturales (travail du sol notamment). Le – d’une part, de porter un jugement agronomique tel que
concept de « profil cultural » est destiné à appréhender et l’évaluation des causes physiques d’un accident de
à caractériser à des fins agronomiques cet objet complexe végétation ou la critique d’un itinéraire technique de
qu’est un terrain cultivé. travail du sol ;

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– d’autre part, de choisir les méthodes quantitatives ture particulaire peut être caractérisée par la nature des
d’investigation complémentaire qui apparaîtraient débris organiques qui le constituent.
nécessaires et de préparer le prélèvement raisonné des • Les structures continues : toute la couche de sol forme alors
échantillons sur lesquels elles doivent être mises en œuvre. un ensemble cimenté, sans fissures ni éléments structuraux.
Trois sous-classes permettent de préciser l’aspect des structu-
2. Préparation du profil et distinction des horizons res continues :
5.– Une fosse rectangulaire est ouverte dans chaque partie que – type ciment : tous les éléments constitutifs sont fins (ex.
l’on peut considérer comme homogène du terrain à sous-sol limoneux) ;
examiner ; l’une des grandes faces doit être orientée de façon à – type grès : sables soudés par un ciment argileux ou ferrugi-
être bien éclairée. Les dimensions de la fosse dépendent du neux (matériaux sablo-argileux) ;
type de sol et du type de culture. Sa largeur doit tenir compte – type poudingue : graviers ou cailloux noyés dans un ciment
de la largeur de travail des outils et de la densité de plantation. continu à texture fine (ex. horizons d’argile à silex suffisam-
Sa profondeur dépend surtout de l’enracinement et peut ainsi ment humides).
dépasser 1 m 50 pour des arbres fruitiers de plein vent.
• Les structures fragmentaires : dans ces types de structures, les
Les parois de la fosse sont d’abord auscultées en les heurtant à constituants du sol sont associés entre eux comme dans le cas
l’aide, par exemple, du manche d’un fort couteau. Les varia- précédent mais l’ensemble de la couche est divisé, en éléments
tions de tonalité et d’intensité enregistrées, qui traduisent des structuraux naturels ou en mottes résultant du travail du sol.
variations de compacité et (ou) d’humidité, sont utilisées
On peut distinguer quatre groupes principaux de structures
pour une première distinction des couches différentes selon
fragmentaires : Liste
ces critères. La préparation du profil est alors poursuivie en
arrachant, à l’aide d’un couteau, les zones lissées par l’outil – le groupe phylliteux à éléments subhorizontaux aplatis
(bêche ou pelle mécanique) qui a servi à ouvrir la tranchée ; (croûtes de battance, dépôts alluviaux ou colluviaux) ;
on fait ainsi apparaître le réseau de fissures délimitant les élé- – le groupe anguleux à types prismatiques, cubiques ou poly-
ments structuraux ; dans les couches travaillées apparaissent édriques qui résultent la plupart du temps de phénomènes Ta b l e
les lissages par les instruments culturaux, ainsi que le mélange de fissuration liés à l’action du gel ou aux alternances de
de mottes et de terre fine résultant de leur action. dessiccation et d’humectation ;
Cette opération pratiquée convenablement permet également – le groupe des structures sphéroïdales ou arrondies rassem-
de distinguer les couches selon leur compacité et leur degré blant les types grumeleux, nuciforme et massif selon la
d’ameublissement. taille ; I n dex
Les couches les plus compactes, plus difficiles à attaquer au – le groupe des structures anthropiques caractéristiques des
couteau, restent en relief alors que les couches meubles ou couches travaillées, qui présentent fréquemment une
“ creuses ” apparaissent en retrait. Dans le cas des sols fraîche- grande hétérogénéité morphologique et ne peuvent le plus
ment travaillés, l’on relève fréquemment une succession de souvent être précisées qu’en indiquant l’intervalle de varia-
tion de la taille des mottes et la proportion de terre fine. Glossaire
couches de moins en moins meubles au fur et à mesure que
l’on descend dans le profil. On peut ainsi faire apparaître sous 7.– Notion de sur-structure et de sous-structure. Il arrive que
forme de surfaces subhorizontales les interfaces entre couches des éléments structuraux de grande taille soient eux-mêmes
dont nous verrons plus loin l’importance vis-à-vis du fonc- constitués par un assemblage d’éléments structuraux ; par
tionnement physique du sol et vis-à-vis de l’enracinement. exemple chacun des éléments d’une structure prismatique
grossière peut être constitué par de petits polyèdres. On parle
3. Principales observations alors de structure prismatique à sous-structure polyédrique.
On pourrait aussi parler de structure polyédrique à surstruc-
a) Forme et dimension des éléments structuraux et des mot- ture prismatique. La logique voudrait que la terminologie soit
tes résultant du travail du sol choisie en fonction du déroulement réel du processus d’orga-
6.– Couche par couche, on note la fissuration du sol, la nisation de ces ensembles complexes ; c’est en vérité rarement
forme des éléments structuraux, leur dimension, et, dans le le cas.
cas des couches travaillées, la proportion de mottes et de terre L’interprétation physique et agronomique de telles observa-
fine. Il existe pour cela de nombreuses classifications mor- tions sur la morphologie structurale peut être envisagée dans
phologiques plus ou moins complexes et d’un emploi deux directions :
d’autant plus délicat qu’elles sont plus détaillées. Aussi peut- – d’abord l’état structural à un moment donné commande,
on se limiter à des classifications simples du type de celle pré- selon des modalités connues de façon plus ou moins sûres
sentée schématiquement ci-après. et précises, de nombreuses fonctions du sol (circulation de
Cette classification distingue trois principaux groupes de l’eau, aération, capacité d’accueil du système racinaire) ;
structures (fig. 1) : – ensuite, un état structural peut être considéré comme l’exté-
• Les structures particulaires : le sol est alors constitué en riorisation d’une série d’interactions entre la constitution
majeure partie par des éléments du squelette sableux jux- du sol et les facteurs de la structuration (physiques, mécani-
taposés les uns aux autres. Dans les horizons pauvres en ques et biologiques).
matières organiques, la structure particulaire peut être Si les processus de structuration étaient suffisamment con-
précisée d’après les caractères texturaux (sables fins ou nus, la morphologie structurale fournirait à l’observateur un
grossiers). Dans le cas des horizons humifères, la struc- ensemble cohérent particulièrement précieux d’informations

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CONTINUE FRAGMENTAIRE PARTICULAIRE

Types Phylliteuse Anguleuse Sphéroïdale Minérale Organique

Classification
par taille :

Cendreuse
— fibreuse
SQUAMEUSE PRISMATIQUE MASSIF Poudreuse
CIMENT
Sableuse — feutrée

NUCIFORME Graveleuse
— feuilletée
Pierreuse
Liste
SCHISTEUSE COLUMNAIRE

Ta b l e GRÈS

LAMINAIRE CUBIQUE GRUMEULEUSE


Note de
Index cohésion

Glossaire
POUDINGUE PLAQUETTES POLYÉDRIQUE

Fig. 1. – Classification des structures

sur les propriétés des sols et leur fonctionnement. En l’état pluie sur sol sec, l’accumulation de l’eau sur une couche com-
actuel (cf. n. 50), on doit se borner à y voir des “ signes ” dont pacte, la circulation préférentielle dans des fissures, dans des
l’interprétation dans le sens qui vient d’être indiqué, bien que galeries de vers de terre ou le long de racines vivantes ou en
très utile, reste fragmentaire. cours de décomposition, sont des exemples d’observations
b) Évaluation de la texture des différents horizons fructueuses. Le cas échéant, les nappes d’eau libre doivent être
repérées.
8.– Il s’agit là d’une qualification globale de la constitution
granulométrique (cf. fasc. 1130), qui peut être précisée à d) Répartition et état de la matière organique ; diagnostics des
partir des résultats d’une analyse granulométrique éventuelle- phénomènes de réduction
ment complétée par un examen minéralogique.
10.– La répartition de la matière organique totale qui confère
Le résultat de cette évaluation faite au toucher est exprimé en aux couches qui en contiennent un taux suffisant une colora-
rattachant chaque matériau présent dans le profil cultural à tion plus foncée, voire grise ou noirâtre, est un bon indicateur
une classe texturale. On peut avec profit utiliser le triangle de de la profondeur moyenne de labour, d’anciens labours plus
texture du G.E.P.P.A. (Groupe d’Étude des Problèmes de profonds ou de labours de défoncement. Dans ce dernier cas,
Pédologie Appliquée) qui est la référence la plus généralement des bandes obliques plus foncées marquent souvent très net-
utilisée en France à cet égard. tement le sol et permettent de reconstituer les caractéristiques
c) Répartition de l’humidité et circulation de l’eau d’une intervention culturale parfois très ancienne.
9.– Les observations concernant la répartition de l’humidité Mais ce sont surtout les matières organiques libres (résidus
dans le profil, la localisation et les directions d’écoulement de enfouis des dernières récoltes plus ou moins reconnaissables)
l’eau dite “ libre ” permettent de se faire une idée, au moins à que l’on peut utiliser comme indicateurs de l’histoire
certaines époques, de la dynamique générale de l’eau dans le culturale : précédents culturaux ; types et profondeur des
sol étudié. L’aspect du front de pénétration après une forte interventions de travail du sol.

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Par ailleurs, leur type de décomposition renseigne sur les con- ou des transformations qu’ils font subir au milieu notam-
ditions physiques (humidité, aération) qui prévalent dans le ment pour se nourrir (formation de turricules par les vers
sol : de terre, division des matières organiques libres par cer-
– En milieu trop sec et excessivement aéré (terres dites tains arthropodes endogés).
“ creuses ”), ces débris végétaux évoluent lentement et res- Nous avons vu l’intérêt d’apprécier l’importance et le rôle
tent abondants et identifiables longtemps après leur incor- d’un réseau de galeries. D’un autre point de vue, le repé-
poration. Ils sont, par places, recouverts de mycélium de rage du niveau d’activité biologique permet de porter un
champignon et dégagent une odeur de moisissure. jugement sur les caractéristiques écologiques du sol.
– Dans les conditions d’humidité, de température et d’aéra-
tion optimales, ces débris se transforment et disparaissent C’est également vrai dans le cas des racines. Celles-ci sont
en quelques mois ; leur aspect est noirâtre et leur très sensibles dans leur état sanitaire, leur abondance, leur
“ toucher ” humide plus ou moins visqueux. Leur odeur est répartition, leur forme, à l’ensemble des conditions physi-
celle d’un fumier bien décomposé. ques mais aussi physicochimiques du sol
En présence d’un sol gorgé d’eau et(ou) excessivement Certains horizons forment une barrière à la pénétration
compact, l’évolution, de type anaérobie, conduit au déga- des racines : c’est le cas de couches lissées ou compactes
gement d’acides organiques volatils et d’hydrogène sul- des horizons à gley (n. 10), etc.
furé, d’une odeur caractéristique désagréable. Cette consé- Certaines mottes ou éléments structuraux durs et com-
quence des conditions asphyxiantes les aggrave : c’est pacts sont impénétrables aux racines qui se localisent à
l’apparition de phénomènes de gley entraînant la réduc- leur périphérie dans les fissures. Elles prennent alors une
tion des oxydes de fer ; le fer ferreux qui se forme alors Liste
structure aplatie en arête de poisson.
confère aux zones réduites une couleur allant du gris sale
au bleu verdâtre tout à fait caractéristique. Lorsqu’elles ont pu pénétrer dans des zones compactes,
elles y sont peu ramifiées.
Lors des phases de réoxydation, les composés ferreux A l’opposé, en terres “ creuses ”, les poils radiculaires se Ta b l e
mobiles se concentrent et précipitent en taches ou revête- développent considérablement.
ments de rouille au niveau des points du sol les premiers
Enfin, on doit noter que la prolifération des racines dans
réaérés : parois des galeries de vers de terre, racines, certai-
une couche est souvent la conséquence du caractère défa-
nes faces d’éléments structuraux. On conçoit aisément vorable de la couche sous-jacente.
tout le profit que l’on peut en tirer, vis-à-vis du jugement I n dex
d’un état lié à des conditions actuelles ou ayant prévalu g) Interprétation synthétique du profil cultural
dans un passé récent. 13.– La démarche d’examen du profil cultural est voisine
Certains sols présentent de tels phénomènes, souvent quali- de celle d’un médecin qui établit un diagnostic.
fiés d’“ hydromorphie ”, de façon permanente ou périodique. Un diagnostic, que ce soit dans le domaine agronomique Glossaire
Leur repérage permet de porter un jugement d’aptitude cul- ou médical, exige tout d’abord le groupement et la systé-
turale et dans la plupart des cas de proposer des techniques matisation d’un certain nombre de caractères ou de faits
d’assainissement foncier. qui constituent les symptômes. Nous venons de passer en
Dans d’autres situations, l’asphyxie est plus accidentelle, liée à revue les principaux dans le cas de l’état physique du sol ;
des conditions climatiques exceptionnelles ou plus souvent, à chaque symptôme traduit l’influence d’un facteur ou d’un
des erreurs techniques (tassement excessif, incorporation groupe de facteurs.
trop profonde de résidus de récolte…). Là également, le dia-
La comparaison d’une série de symptômes permet, si elle
gnostic prépare un conseil adapté.
conduit à des conclusions convergentes, l’établissement
e) Accidents structuraux d’origine culturale d’un syndrome, c’est-à-dire l’ensemble des caractères typi-
11.– Outre les caractéristiques morphologiques des diffé- ques d’un état. Cette dernière synthèse permet de juger la
rentes couches et leur disposition relative, le sol porte sou- valeur du diagnostic tout en permettant l’explication de la
vent la trace particulière de certaines interventions situation observée et la recherche de moyens propres à la
culturales : lissage de fond de labour ou de façons superfi- reproduire ou à l’éviter dans l’avenir et, parfois, à y remé-
cielles, lissages par le versoir des charrues, alignements de dier dans l’immédiat.
mottes “gâchées” lors de roulages antérieurs ou suite à des La sûreté et l’efficacité de cette méthode de diagnostic
labours réalisés en conditions trop humides. De tels acci- dépend étroitement de la rigueur et de la systématisation
dents, outre leurs conséquences agronomiques directes, ren- des observations, qui permettent d’en atténuer le caractère
seignent l’observateur sur l’histoire culturale de la parcelle, subjectif. Un syndrome incomplet ou établi à partir de
de façon plus objective que le témoignage de l’Agriculteur. symptômes biaisés peut conduire à de graves erreurs de
f) Activité biologique diagnostic et, corrollairement, de conseil technique.
Comportement des racines Enfin, cette méthode d’examen ne doit être souvent consi-
12.– De nombreux êtres vivants, outre les microorganis- dérée que comme une première étape : elle prépare alors
mes dont l’activité n’est qu’indirectement décelable à une deuxième phase qui, concentrée sur certains niveaux,
l’observation, habitent le sol qu’ils marquent des traces de critères d’état ou de comportement, est basée sur des
leurs déplacements (galeries de vers de terre par exemple) mesures.

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B. Méthodes quantitatives couche de sol fraîchement travaillée par exemple, on ne peut


14.– La méthode du profil cultural est particulièrement bien définir précisément la forme des mottes de différentes tailles
adaptée à l’établissement d’un diagnostic de l’état physique et celles des vides ou pores qui existent entre elles. Cette archi-
actuel du sol. Mais un tel diagnostic est de peu d’intérêt s’il tecture complexe est par ailleurs très variable d’un emplace-
n’est assorti d’un pronostic : prévision de l’évolution de l’état ment à l’autre. On a de ce fait été conduit à caractériser la
physique au cours du cycle cultural et de ses conséquences structure du sol par un nombre réduit de variables très syn-
pour la végétation. La connaissance des lois qui régissent cette thétiques.
évolution est indispensable pour raisonner le choix des inter-
ventions dont la succession constitue un itinéraire techni- 1. Porosité totale
que. Leur étude est donc un des thèmes de recherche impor- 16.– Nous avons précédemment (n. 1) défini le sol comme un
tant de l’Agronomie et de la Science du sol. milieu poreux, constitué de particules solides dont l’organisa-
Or le profil cultural ne peut être l’outil exclusif de ce type tion à différentes échelles définit un réseau de cavités ou
d’étude. En effet, la plupart des données qualitatives ou semi- pores. Les volumes relatifs des particules solides et des pores
quantitatives qu’il fournit sont difficilement comparables sont les caractéristiques les plus globales d’un tel milieu.
entre elles lorsqu’elles sont obtenues à des dates éloignées
Soit (fig. 1) :
dans le temps, dans des conditions très différentes (nature du
sol, humidité), ou par des observateurs non soumis à un Vp le volume des pores ou volume poral
“ étalonnage ” périodique de leurs critères d’observation. Par Vs le volume des particules solides
exemple, la notation sur une échelle de compacité dépend,
Liste pour un observateur donné, des cas extrêmes qu’il a déjà ren- VT = Vp + Vs volume du massif poreux (volume de l’échan-
contrés. tillon de sol, souvent appelé volume apparent)
Par ailleurs, les relations entre l’état physique du sol décrit par On exprime généralement le volume relatif des pores par la
le profil cultural, et son fonctionnement (circulation de l’eau, T V V V –V V
des gaz, des racines) ne peuvent être établies que de façon très variable : n = ------p- = ------------------
p T s
- = ------------------ = 1 – ------s-
Ta b l e VT Vp + Vs VT VT
grossière.
De ce fait, le profil cultural est surtout apte à mettre en évidence nT est appelé la porosité totale : c’est le rapport entre le volume
des défauts physiques aux conséquences très marquées : fonds des pores et le volume total (ou apparent) de la couche de sol
de travail s’opposant à la croissance racinaire, localisation ina- considérée. Sa valeur est fréquemment donnée en %.
Index déquate de résidus organiques provoquant un pseudo gley… V
En l’absence de tels accidents, les conséquences des différents On utilise également la variable : e = -----p-
Vs
états observés deviennent difficiles à apprécier.
15.– Le moyen de pallier ces insuffisances est de disposer de rapport entre le volume des pores et le volume de solide,
mesures portant sur des variables caractéristiques de l’état appelée indice des vides . Elle présente l’avantage que le
Glossaire physique du sol et liées à ses propriétés de transfert, de stoc- volume poral est dans ce cas rapporté à un volume constant :
kage ou de support. Or la structure du sol, même en ne la les variations d’indice des vides d’une masse donnée de sol
considérant qu’à l’échelle macroscopique, ne peut être décrite sont donc additives. La figure 2 présente quelques exemples
géométriquement de façon simple. Si nous pensons à une des valeurs de porosité rencontrées dans les sols cultivés.

Sol sableux Sol de limon Sol travaillé depuis Sol fraîchement


très tassé à structure continue plusieurs semaines travaillé
Densité 1,8 1,6 1,4 – 1,2 0,9
Porosité Totale n T 0,32 0,40 0,47 – 0,55 0,66
Indice des vides 0,47 0,66 0,89 – 1,21 1,94
Fig. 2. – Variation de porosité observée en sol cultivé (valeurs indicatives)

Les pores du sol peuvent être remplis d’air ou de gaz divers, 17.– A partir de trois évaluations portant sur le sol : volume
ou d’eau contenant des produits dissous. Il est important de total (ou volume apparent), volume de solide et teneur en
connaître les fractions d’espace poral respectivement occu- eau, on établit donc un bilan en volume des trois phases qu’il
pées par la phase gazeuse et la phase liquide : il suffit de con- comporte, qui est une caractérisation très globale de son état
naître la teneur en eau massique (gramme d’eau par gramme physique. Nous verrons par la suite (n. 33 à 48) que porosité
de sol sec) ou volumique (cm3 d’eau par cm3 de sol humide). totale, teneur en eau et teneur en air sont fortement liées aux
On en déduit aisément la teneur en air puisque (fig. 3) : Vp = propriétés du sol : propriétés hydriques, thermiques, aéra-
VL + VG tion, comportement mécanique.
On exprime souvent l’importance relative de la phase liquide
Cependant, dans la plupart des cas, la prévision de ces pro-
V
par le rapport : s = ------L- appelé taux de saturation. priétés fait intervenir d’autres caractéristiques, plus analyti-
Vp ques, de l’état physique du sol. Ce sont en particulier des
Lorsque s = 1, la porosité est entièrement occupée par la caractères de formes et de dimensions des pores : distribution
phase liquide. On dit que le sol est saturé. des diamètres, tortuosité, continuité.

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TA 1140
ns = porosité structurale (rapportée au volume de sol en
place) ;
d’où : ns = n T – nt

}
}
VG b) Techniques de mesure
VP 20.– Dans la pratique les mesures de la porosité sont le plus
VL souvent indirectes. On mesure généralement la densité sèche
pd du sol considéré (appelée fréquemment densité appa-
VT masse de sol sec
rente). C’est le rapport : --------------------------------------
volume de sol
En mesurant également la densité des particules solides ρs ,
VS on calcule la porosité totale à partir de l’équation :
T ρ
n = 1 – -----d
ρs
VG Volume de phase gazeuse
VL Volume de la phase liquide • Mesures de la porosité texturale
VS Volume de la phase solide 21.– Le principe de la technique repose sur l’idée suivante :
les pores texturaux ont des dimensions du même ordre de
Fig. 3. – Schéma des différentes phases présentes
grandeur que les particules constitutives du sol, les pores Liste
dans un volume de sol (VT)
structuraux sont généralement de plus grande dimension.
En brisant un échantillon en morceaux suffisamment petits,
2. Analyse des systèmes de poroslté ceux-ci auront peu de chance de contenir des pores structu-
18.– Il est donc nécessaire de compléter la caractérisation de raux. On pourra considérer qu’ils ont une structure conti-
l’espace poral du sol par d’autres critères que son volume nue et ne contiennent que des pores texturaux. La figure 4 Ta b l e
total. Ceux-ci peuvent être nombreux. Il faut choisir les plus confirme la validité de cette hypothèse pour un sol limo-
adéquats en fonction de l’objectif poursuivi. Ainsi, lorsque cet neux. On a mesuré la porosité d’une couche de sol en place,
objectif est de prévoir les effets des différents facteurs d’évolu- puis séparé par rupture et tamisage des fragments de plus en
tion de l’état physique du sol, paraît-il logique de distinguer plus petits. On observe une diminution de la porosité de ces
dans l’espace poral les volumes résultant de l’action de chacun fragments quand leur volume décroît jusqu’à un palier qui I n dex
de ces facteurs. Ceci revient à s’efforcer de classer différentes correspond à la porosité texturale.
fractions de volume poral suivant leur origine. Telle est l’idée
directrice de l’analyse des systèmes de porosité.
Porosité %
a) Principe
Porosité totale de la couche de sol Glossaire
19.– Dans une première étape, on peut distinguer dans
l’espace poral du sol deux sous-ensembles :
– d’une part des pores résultant de l’assemblage des particules
solides élémentaires, telles que les définit l’analyse granulo-
40
métrique (argiles, limons, sables). Ces particules ne sont pas
indéfiniment déformables, leurs formes et leurs dimensions
sont variées, elles ne peuvent donc s’emboîter parfaitement et
ménagent entre elles un volume poral. Il a été qualifié de tex-
tural. Nous pouvons déjà noter que dans les matériaux conte-
nant des argiles gonflantes (smectites) ce volume poral sera
fonction, non seulement de la constitution minérale et orga- 35 Porosité texturale

nique, mais aussi de la teneur en eau du matériau ;


– d’autre part des pores résultant de l’action de facteurs
1 2 3 4 5 6
externes au matériau, ou de ce que l’on peut appeller son
Log V (V en m m3)
“histoire” : travail du sol, action du climat et des êtres
vivants. Ce second volume poral est qualifié de structural. Fig. 4. – Variation de la porosité en fonction du volume
C’est en effet ce type de pores qui sépare les éléments struc- des échantillons
turaux que l’on décrit en observant un profil cultural.
Dans la pratique, la mesure est réalisée sur un ensemble de
Du fait de la disparité de ses origines et des caractéristiques fragments ou agglomérats extraits par rupture et tamisage
des pores qui le constituent, ce second volume poral n’est pas entre 2 et 3 mm. Le volume de cette population d’agglomé-
évalué directement. Il n’est en fait défini que par différence, à rats, dont la masse totale est de l’ordre de 2 g, est mesuré de la
partir de l’équation : façon suivante : on sature l’échantillon dans du pétrole du
nT = nt + ns commerce, puis on mesure la poussée d’Archimède dans ce
où : même liquide. Ayant pesé l’échantillon humide puis après
nt = porosité texturale (rapportée au volume de sol en place) ; séchage, on calcule sa densité et son humidité.

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Cette technique a l’avantage d’être praticable dans une large


gamme d’humidité. On peut donc évaluer la densité texturale
t
du sol ρ d à son humidité de prélèvement. On en déduit la
porosité texturale du matériau :
t
,t ρ
n = 1 – ------d-
ρs
Notons que cette valeur est différente de la porosité texturale
nt de la couche de sol en place car elle n’est pas rapportée au
même volume de référence (fig. 5).

s t
v v
p nt = p
Vp VT
t
v
p
VT t
v
n' t = p
t
Vs Vs + v
P
Liste Fig. 6. – Mesure de la densité en place technique des anneaux

Le mode opératoire est résumé sur la figure 7.


s Les limitations de cette technique sont :
v : Volume des pores structuraux
p
Ta b l e t
v : Volume des pores texturaux
– elle n’est pas praticable dans des sols facilement déforma-
P bles (fraîchement travaillés ou très humides), la pression
exercée par la membrane risquant dans ce cas d’accroître le
Fig. 5. – Différentes expressions de la porosité texturale volume du trou ;
– la membrane peut s’insinuer dans des pores grossiers qui
Index • Mesures de la porosité totale
ne faisaient pas partie du volume de terre enlevé : grosses
t fissures ouvertes dans la paroi du trou par exemple. Il en
22.– Connaissant la densité texturale ρ d , la porosité structu-
rale est calculée à partir de la densité de la couche de sol consi- résulte une sous-évaluation de la densité.
s ρd 25.– On peut rapprocher de cette technique la technique “au
dérée ρ d par la relation : n = 1 – ------
t
-
Glossaire ρ d sable”. Elle consiste à évaluer le volume d’un trou creusé en
On est donc ramené au problème des techniques de mesure pesant la quantité de sable nécessaire pour le remplir. La
de la densité (ou de la porosité totale) du sol en place. densité du sable utilisé étant supposée constante, on en
déduit le volume. Son avantage est d’être praticable sur des
• Technique des anneaux (fig. 6 volumes de plusieurs litres et en sol caillouteux. Bien que
23.– Elle consiste à prélever un échantillon de sol de volume peu commode, elle permet dans ce cas (et elle est la seule si
fixe, dont on détermine la masse humide, puis la masse sèche, les cailloux sont grossiers) d’évaluer la densité de la terre fine
donc la densité. Concrètement, on enfonce précautionneuse- en tenant compte de la teneur en cailloux.
ment dans le sol un cylindre à bord tranchant jusqu’à ce qu’il
• Techniques radiométriques
soit entièrement rempli de terre. Puis, on l’extrait avec son con-
tenu et on l’arrase soigneusement aux extrémités.) 26.– Dans tous les cas, les appareils utilisent une source
Les limites de cette technique sont liées : radioactive émettant un rayonnement y (137Cs le plus sou-
– au risque de tassement ou au contraire de foisonnement, vent), dont l’intensité Io dans des conditions standard est
lors de l’enfoncement de l’anneau. On s’efforce de le connue.
réduire en augmentant le diamètre par rapport à la hauteur Un compteur permet d’évaluer l’intensité I du rayonnement
et en réduisant au maximum l’épaisseur des parois ; parvenant à travers le sol à une certaine distance de la source
– à l’impossibilité d’opérer lorsque le sol n’est pas suffisam- (fig. 8) :
ment cohérent (sol fraîchement travaillé, fissures de gran- – soit après diffusion (déviation des photons γ de leur trajec-
des dimensions) ou lorsqu’il l’est trop (sol compact et sec) ; toire par interaction avec les électrons périphériques des
– au nombre nécessairement limité de répétitions possibles atomes de la matière du sol) ;
(durée de l’opération, volume important à manipuler). – soit en transmission (quantité de photons g transmis
• Densitomère à membrane (fig. 7) directement qui n’ont pas eu d’interaction avec la
24.– L’appareil est un cylindre métallique contenant de l’eau matière du sol).
dans lequel se déplace un piston, monté sur une tige graduée. Dans les deux cas une courbe d’étalonnage de l’appareil I per-
Il est fermé à sa base par une membrane souple, capable met de passer du rapportI/Io à la densité humide ρ du sol. En
d’épouser étroitement le microrelief du sol ou de se mouler mesurant parallèlement sa teneur en eau, on connaît sa den-
sur les parois d’un trou qu’on y creuse. sité sèche ρd.

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TA 1140
La différence des performances entre les deux types d’appareils
résulte de leur géométrie. Les appareils à transmission sont par-
ticulièrement adaptés à l’étude des variations de densité avec la
profondeur (profils de densité) dans les horizons superficiels.
Ils ont une bonne résolution de l’ordre de 4 cm et permettent
1. Lecture du volume de travailler à proximité de la surface (- 5 cm), ce qui n’est pas le
initial Vo
cas des appareils à diffusion.
Dans les deux cas, la rapidité et la commodité de la mesure sont
sensiblement améliorées. Compte tenu des grandes variations
de densité, mesurées dans une parcelle cultivée par exemple,
cet avantage est très important. Enfin, les techniques radiomé-
triques sont beaucoup moins perturbatrices que les techniques
classiques, puisqu’il suffit de creuser à la tarière des trous de
quelques centimètres de diamètre.
c) Variations de la porosité texturale
• A l’état sec
27.– Lorsque la texture est suffisamment fine (teneur en
argile A > 20%, squelette limoneux), la porosité mesurée sur
petits agglomérats secs est très peu variable dans le temps Liste
pour un matériau donné. Le sol ayant subi entre les différen-
tes dates de prélèvements de ces agglomérats des « histoires »
peser climatiques et culturales variées, ce résultat confirme qu’on
mesure ainsi une porosité déterminée essentiellement par la
constitution du matériau. Ta b l e

2. Creusement du trou Ce fait se manifeste également par l’existence de liaisons sta-


tistiques étroites entre la composition de différents matériaux
et leur porosité texturale à l’état sec (fig. 9). Ainsi pour des
teneurs en argile comprises entre 5 et 50 % la porosité textu-
rale diminue avec la teneur en argile, ou ce qui revient au I n dex
même la densité texturale ptdd augmente, suivant la
régression :
ρtdd = 0,0074 A (%) + 1,603 (Fies-Stengel, 1981)
La matière organique a au contraire pour effet d’accroître la Glossaire
porosité texturale, c’est-à-dire de diminuer la densité textu-
rale. Ceci est particulièrement vrai de la matière organique
libre (débris organiques non décomposés) dont l’effet est très
intense comme le montre la relation suivante obtenue sur un
Volume du trou = V1 - V0 sol limoneux du Bassin Parisien :
3. Lecture du volume ρtdd = 0,0076 A (%) – 0,41 C1 (%) + 1,73
final V1
ou C1 : teneur en Carbone libre %
Parmi les autres constituants du sol, le calcaire est également
susceptible d’augmenter fortement la porosité texturale, s’il
est présent dans la fraction granulométrique fine (particules
de dimensions inférieures à 2 µm).
• Influence de l’humidité
28.– Les matériaux contenant des phyllites (argiles
minéralogiques : voir fasc. 1130) en quantité supérieure à
15 ou 20 % gonflent généralement de façon mesurable
quand leur teneur en eau dépasse un seuil appelé limite de
retrait (n. 51).
Leur porosité, et en particulier leur porosité texturale est donc
fonction de leur humidité. Ce phénomène est à l’origine d’une
Fig. 7. – Mesure de la densité en place : des principales difficultés méthodologiques et techniques ren-
technique du densitomètre à membrane contrées lorsqu’on cherche à caractériser l’état structural ou
l’espace poral du sol. Il implique en effet :
– qu’une caractérisation de l’espace poral n’a de sens que si
l’ensemble des mesures ou observations est réalisé sans modi-

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Dispositif électronique
de comptage

Compteur

Trajectoire des
Liste photons

Source Radioactive
Ta b l e
1 2

Fig. 8. – Schéma de principe des densimètres – 1. à diffusion – 2. à transmission


Index fier l’état de gonflement naturel du matériau. Cette condition (travail du sol, roulage) ou lorsqu’on suit l’évolution de
est réalisée dans le cas de l’analyse du système de porosité. La l’état physique au cours du temps, les résultats sont obte-
porosité texturale est en effet mesurée sur les agrégats dans nus pour des humidités donc des états de gonflement
leur état de gonflement (c’est-à-dire à leur teneur en eau) en variables. L’intérêt de l’analyse des systèmes de porosité
place, donc dans les même conditions que la porosité totale ; est de pouvoir séparer dans les variations de la porosité
Glossaire – que cette caractérisation n’a de validité que pour cet totale ce qui est dû à des différences de gonflement au
état de gonflement. Or il est évident que quand on com- niveau textural, de ce qui résulte de l’effet propre des trai-
pare les effets de traitements modifiant l’espace poral tements.

Sableux Limoneux Limono-Argileux Argileux Argile pure

Sans matière Matière Organiquelibre Riche en Kaolinite


organique libre 3 %o Calcaire fin 0,52

0.33 0,38 0,31 0,36 0,46 0,30 Montmorillonite 0,29

Fig. 9. – Exemples de variation de la porosité texturale à l’état sec n’t d, suivant la constitution du matériau

Par ailleurs, l’expérience a montré que dans les couches de • Relations avec la microporosité
surface des sols cultivés, on peut considérer qu’à une
humidité correspond une seule valeur de la porosité textu- 29.– Une des méthodes les plus classiques de classifica-
rale. La relation porosité texturale-humidité étant établie tion de l’espace poral consiste à distinguer deux classes :
pour un sol donné, on peut par la suite l’utiliser pour cal- la micro et la macro porosité.
culer la porosité structurale à partir des mesures de la den-
Expérimentalement, ces deux classes sont définies en
sité en place et de l’humidité. Enfin, dans certains cas sim-
soumettant un échantillon de sol saturé d’eau à une suc-
ples (absence de travail du sol), les variations de la porosité
cion définie, correspondant à ce qu’on appelle la capacité
structurale avec l’humidité peuvent être prévues statisti-
de rétention (quantité d’eau maximale restant en réserve
quement (n. 50-56).
dans le sol après drainage).
L’analyse des systèmes de porosité, parmi les autres
moyens de caractérisation de l’espace poral, présente donc En effet, les lois de la capillarité permettent d’établir une cor-
l’avantage considérable de rendre possible des extrapola- respondance entre la succion nécessaire pour vidanger un
tions et des comparaisons pour différentes teneurs en eau. pore et un diamètre dit “ équivalent ”, car les pores du sol ne
peuvent être assimilés à des cylindres. Les pores restant pleins

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STRUCTURE ET ÉTAT PHYSIQUE DU SOL
TA 1140
d’eau à cette succion sont donc des pores fins ou micropores, à un squelette sableux. Ceci s’explique par le fait que lors-
ceux qui se vident des pores grossiers ou macropores. que la teneur en argile s’élève, les contraintes mécaniques
Les pores texturaux ont des dimensions qui sont de qui apparaissent lors du séchage, par le simple effet du
l’ordre de grandeur de celles des particules du sol. Il en retrait, deviennent très fortes et supérieures à celles qui
résulte que pour les textures fines, la microporosité et la résultent des pratiques agricoles. Le matériau est en quel-
porosité texturale à la capacité de rétention sont peu diffé- que sorte tassé naturellement.
rentes. On constate, en effet, qu’à cette teneur en eau la Grains du squelette
porosité texturale est presque saturée (s ≥ 85 %). Mais Argile
dans le cas des sols gonflants cette coïncidence n’a plus de
sens à toute autre humidité, car la distinction entre macro
et micro porosité n’est établie que pour une teneur en eau
donnée. Son objectif n’est pas d’ailleurs la caractérisation
de l’espace poral en soi, mais l’évaluation de la réserve
hydrique du sol et de la teneur en air après ressuyage (ris-
que d’asphyxie à la capacité de rétention).
Lorsque la granulométrie est grossière, les pores textu-
Lacunes
raux ne peuvent, même approximativement, être assimi-
lés à la microporosité. Fig. 10. – Représentation schématique d’un tassement textural
• Influence des contraintes mécaniques
d) Variations de la porosité structurale Liste
30.– Les matériaux dont la teneur en argile est inférieure
à 40 % ont une porosité texturale qui peut être schémati- 31.– Si nous exceptons le phénomène que nous venons
sée par la figure 10. Les contraintes mécaniques exercées de décrire, on peut dire, en schématisant, que classer
sur le sol sont susceptibles de provoquer la fermeture l’espace poral en textural et structural revient à distin-
plus ou moins complète des lacunes, entraînant ainsi un guer un volume de pores sur lequel les possibilités Ta b l e
tassement textural. d’action humaine sont très faibles (la porosité texturale)
Un tel tassement modifie l’architecture du matériau à et celui sur lequel on peut agir (la porosité structurale).
une échelle où il est a priori très difficile d’agir ensuite Cette analyse présente donc un intérêt tout particulier
par le travail du sol. De fait, les observations au champ pour l’étude du travail du sol. La figure 11 montre claire-
indiquent qu’il peut subsister plusieurs années après ment que le travail du sol est le facteur de variation le I n dex
l’action qui l’a provoquée. plus puissant de la porosité structurale. Elle montre éga-
lement que la porosité totale exprime très mal les diffé-
Compte tenu des valeurs les plus fréquentes des con- rences entre situations, car elle n’isole pas la classe de
traintes développées par les engins agricoles, de tels tasse- pores qui est seule affectée.
ments ne sont généralement observables que pour des
teneurs en argile inférieures à 20 % approximativement. Nous reviendrons, par la suite (n. 50-56), sur les effets de Glossaire
Et ils sont surtout intenses quand cette argile est associée chacun de ses facteurs de variation.

Plusieurs mois après travail


Fraîchement Non travaillé
travaillé Non roulé Roulé

Densité pD 0,92 1,28 1,42 1,55

Porosité Totale n à voir 0,66 0,53 0,48 0,43

Porosité Structurale ns 0,44 0,23 0,14 0,064 Biologique 0,014 Fissurale 0,05

Porosité texturale nt 0,22 0,30 0,34 0,37

nt– 0,33 0,57 0,71 0,85

Fig. 11. – Analyses de la porosité d’un sol limono-argileux dans différents états structuraux (humidité : capacité de rétention)

C. Relations avec le profil cultural est – et restera toujours – inefficace pour mettre en évi-
dence des obstacles très localisés, mais aux conséquences
32.– Si l’intérêt d’une telle méthode, strictement quantita-
souvent importantes, tels que les lissages.
tive, pour caractériser l’état physique du sol, est incontes-
table, il ne peut être envisagé de la substituer au profil Au-delà de cette différence dans les utilisations actuellement
cultural. Ses performances en tant qu’outil de diagnostic possibles des deux méthodes, leur complémentarité apparaît
sont insuffisantes. Les relations entre un niveau de porosité de façon très fondamentale. L’analyse de la porosité n’est, au
structurale donné et le comportement d’une culture sont moins dans son principe, qu’un bilan en volume strictement
inconnues, alors que l’expérience a permis d’établir des aveugle par rapport à la morphologie structurale. Or, c’est le
relations de ce type, même si elles restent grossières, dans plus souvent la forme des pores structuraux, ou des éléments
le cas du profil cultural. Par ailleurs, l’analyse de la porosité structuraux eux-mêmes (mottes, agrégats) qui renseigne sur

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1140TA STRUCTURE ET ÉTAT PHYSIQUE DU SOL

l’origine des variations de la porosité. C’est le cas par exemple Cette fonction de stockage est assurée dans la fraction la plus
des pores biologiques que leur forme arrondie permet de dis- fine de l’espace poral dans laquelle les forces gravitaires qui
tinguer des fissures dues au retrait. Le profil cultural, étant s’exercent sur l’eau deviennent négligeables vis-à-vis des for-
une méthode rapide et opérationnelle de description de ces ces capillaires ; c’est pourquoi elle est fréquemment désignée
pores, concourt à l’objectif propre de l’analyse de la porosité. par le vocable : microporosité.
De même, le profil cultural permet de distinguer dans la cou- En termes de systèmes de porosité, la microporosité ou capa-
che arable d’une parcelle les différents types de structure pré- cité de rétention volumique est très généralement incluse
sents et de les relier à l’histoire culturale : passages de roues, dans la porosité texturale dont elle constitue, sauf dans le cas
enfouissements de matières organiques, etc. Il constitue, de ce des sols à texture très grossière, l’essentiel.
fait, un guide irremplaçable quant aux emplacements et pro- D’une façon plus générale, l’humidité pondérale H à la capa-
fondeurs où doivent être pratiquées les analyses de la porosité. cité de rétention est statistiquement liée étroitement à la pro-
Enfin, l’analyse de la porosité contient implicitement une infor- portion de constituants granulométriques les plus fins : argile
mation morphologique. Une porosité structurale nulle corres- A (et matières organiques) et limons fins I selon un modèle
pond le plus souvent à ce que l’on qualifie de structure conti- additif tel que celui proposé par R. Gras :
nue, et l’accroissement de la porosité structurale est lié au degré H = 0.59 A + 0,16 1 + 5.47 (A > 20 %)
de fragmentation de la structure. Le développement des tra- H = 0.51 A + 0,14 1 + 7.35 (A < 20 %)
vaux permettant de quantifier ces relations devrait conférer à la La disponibilité de cette réserve d’eau pour les végétaux est
description du profil cultural une plus grande sécurité quanti- limitée lorsque le sol se dessèche. On considère généralement
tative et à l’analyse de la porosité des possibilités d’interpréta- qu’au-delà d’une succion de 16 bar (pF = 4.2) le sol est au
Liste tion agronomique beaucoup plus vaste. point de flétrissement permanent (cf. fasc. 1165). L’eau est
alors énergiquement retenue dans les pores d’un diamètre
III. RÔLE DE L’ÉTAT PHYSIQUE ET STRUCTURAL équivalent inférieur au 1/10 de µm présents dans la phase
SUR LE FONCTIONNEMENT DES SOLS argilo-humique du sol.
Ta b l e CULTIVÉS ; CONSÉQUENCES AGRONOMIQUES Dans la réalité, la disponibilité décroît avec l’humidité pour
des raisons qui, comme nous le verrons plus loin, sont liées
33.– Nous nous bornerons ici, pour chacun des princi- aux conditions de transferts d’eau dans le sol.
paux groupes de fonctions physiques du sol, à situer leur
importance agronomique et à exposer brièvement quel- Enfin, si la réserve disponible totale – qui correspond à la
les sont les caractéristiques d’état et de comportement gamme des teneurs en eau allant de la capacité de rétention au
Index point de flétrissement Hr – dépend, lorsqu’on la rapporte à
qui les commandent.
l’unité de volume de sol en place, des caractéristiques de cons-
titution du sol, elle dépend, au niveau du terrain, de la pro-
A. Stockage et transfert de l’eau fondeur de sol utile P, c’est-à-dire de la profondeur d’enraci-
et des éléments dissous) nement. En définitive, la réserve disponible totale R(mm)
Glossaire
peut être exprimée par la relation :
34.– Il s’agit là d’un ensemble de fonctions dont l’impor-
tance physique et agronomique directe ou indirecte est R(mm) = P(dm) (Hr % – Hf %).ρd. 10
déterminante. La teneur en eau du sol et ses variations dans laquelle ρd est la densité du sol en place, supposé de cons-
commandent en effet, non seulement la mise à disposition titution et d’état physique homogènes sur la profondeur P.
au niveau des racines de la culture de l’eau et des éléments
nutritifs solubles, mais aussi les conditions d’aération et de 2. Le sol considéré comme un milieu de transfert
température, de l’activité biologique.
36.– La fonction de transfert hydrique a une grande impor-
Enfin, elle est, nous le verrons, l’un des moteurs de l’évolution tance agronomique à plusieurs égards :
de l’état physique lui-même, que ce soit dans le sens d’une
dégradation ou dans le sens d’une amélioration. • elle assure d’abord par infiltration et redistribution la
reconstitution des réserves du sol au cours des périodes de
l’année à excédent pluviométrique ou lors de chaque applica-
1. Le sol considéré comme un réservoir hydrique tion d’eau d’irrigation.
35.– La capacité de stockage d’un sol peut être très impor- • par drainage interne, et par transfert vers les exutoires, elle
tante par rapport aux termes du bilan d’eau annuel. C’est assure l’évacuation des excès d’eau. Lorsque cette fonction est
ainsi qu’un sol de limon moyen d’une profondeur utile de mal remplie, ceux-ci se prolongent ou deviennent perma-
1 m 50 peut emmagasiner 600 mm d’eau, soit presque autant nents. Les conséquences agronomiques en sont graves ; elles
que la hauteur normale des précipitations dans le Bassin Pari- portent sur la croissance et le fonctionnement racinaires et de
sien, et en stocker après drainage 4 à 500 mm. La part de cette façon plus générale sur l’activité biologique du sol qui peut
réserve disponible pour les végétaux atteint 250 mm environ, être perturbée ou arrêtée ; sur la dégradation de l’état physi-
soit une quantité équivalente au déficit climatique cumulé que et sur les conditions pratiques d’utilisation agricole des
moyen au cours des mois d’été dans la même région. terrains (diminution de la traficabilité).
Sous les climats où le déficit climatique dépasse de beaucoup • la fonction de transfert permet, ensuite, l’utilisation par
la capacité de réserve du sol, on a recours à l’irrigation ; la la culture des réserves hydriques. La densité d’implanta-
réserve du sol est alors un élément déterminant des doses tion du système racinaire définit la distance moyenne que
d’irrigation par les techniques classiques. doit parcourir l’eau stockée en un point quelconque du sol

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STRUCTURE ET ÉTAT PHYSIQUE DU SOL
TA 1140
pour parvenir à la racine active la plus proche. Si on voit hcm
clairement l’importance de cette densité racinaire sur la
disponibilité de l’eau, on conçoit aussi que cette dernière 600
dépende fortement de la diffusivité du milieu pour l’eau.
C’est par un mécanisme analogue qu’intervient l’imbibi-
tion, préalable à la germination, d’une graine placée dans
500
un lit de semences ; d’autre part, lors de l’application des
techniques nouvelles d’irrigation localisée, c’est par
transfert mixte, gravitaire et diffusif, que s’effectue l’ali-
mentation en eau, plus ou moins continue, des racines 400
présentes au sein ou à la périphérie du bulbe humide.
• enfin, c’est principalement par transfert d’eau qu’est
assurée la distribution dans le sol des éléments minéraux 300
solubles apportés sous forme d’engrais à la surface du sol
ou en localisation souterraine.
37.– Cet ensemble de fonctions peut, selon les cas, intervenir 200
en milieu saturé (tout l’espace poral est rempli d’eau), ou, le
plus souvent, en milieu non saturé.
Dans le premier cas, le flux d’écoulement vertical, par exem- 100 Liste
ple, est proportionnel au gradient de charge hydraulique
(épaisseur de la lame d’eau). Le coefficient de proportionna- Ø
lité constant, qui représente la conductivité en saturé du sol,
est d’autant plus élevé qu’il existe dans le sol un réseau con- 10 20 30
tinu de pores de grandes dimensions : fissures dans le cas Ta b l e
Fig. 12. – Exemple de relation entre le potentiel exprimé en
des structures fragmentaires et(ou) pores d’origine biologi-
hauteur d’eau et la teneur en eau volumique θ (cm3/cm3) établie
que. Dans le cas des structures continues, la conductivité sur un sol de limon en place (d’après B. Cabibel)
dépend des caractéristiques de l’espace poral textural, le seul
existant dans ces conditions et, donc, de la texture et de l’état
de compacité à ce niveau d’organisation. I n dex
En milieu non saturé, le flux d’écoulement dans une kmmh-1
direction quelconque est proportionnel au gradient de
potentiel (cf. fasc. 1160) qui a pour origine les forces 1
capillaires et à une valeur de la conductivité hydraulique Glossaire
variable avec la teneur en eau du sol. ks
Les différences de potentiels induites par des différences de
teneurs en eau dépendent d’une part de la texture, d’autre
part du sens dans lequel se fait le transfert : humectation ou 10-1
dessiccation (fig. 12).
Quant à la conductivité en non saturé, elle décroît plus que
proportionnellement à la teneur en eau (fig. 13).
Ces deux fonctions complexes qui commandent les phéno- 10-2
mènes de transferts dépendent essentiellement des caractéris-
tiques de la porosité texturale ; ces relations sont toutefois
théoriquement mal connues.
Par ailleurs, la présence de fissures ouvertes dans des plans 10-3
perpendiculaires au sens du flux représentent des obstacles
qui peuvent devenir quasi-absolus. Aussi doit-on établir ces
fonctions pour chaque situation par voie expérimentale.
On se bornera à noter ici que les transferts en eau dans les
Ø
milieux non saturés deviennent extrêmement lents et ne peu- 10-4
vent intéresser que de très courtes distances dans les sols à 10 20 30 40
humidité sensiblement inférieure à la capacité de rétention.
Fig. 13. – Exemple de variation de la conductivité hydraulique
On trouve ici l’influence de la densité de l’enracinement vis-à-
d’un sol de limon en place en fonction de sa teneur en eau
vis de la disponibilité de l’eau du sol aux très faibles humidi- volumique (d’après B. Cabibel)
tés, et l’origine du phénomène bien connu du self mulching
une couche de sol sec et fragmenté à la surface d’un terrain,
ralentit jusqu’à pratiquement la stopper, l’évaporation directe
de l’eau (rôle du binage).

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1140TA STRUCTURE ET ÉTAT PHYSIQUE DU SOL

B. L’aération du sol
{O : 20,97 %
2
Atmosphère CO2 : 0,03 %
Surface du sol
1. Importance agronomique
Echanges
38.– Si l’on perçoit assez facilement la notion globale CO2 par diffusion
d’aération dans le sol, il est beaucoup plus difficile d’éva- P O2 avec l'atmosphère
luer avec précision l’état d’aération par rapport aux acti-
vités biologiques diverses qui interviennent dans le sol. air
Cela tient d’abord au fait que toutes ces activités n’ont air v eau
Grossissement solide
pas le même niveau de besoin. Ensuite, on ne sait pas CO2
O2
clairement quelles sont les variables les plus importantes Respiration racinaire Volume d'air
pour définir « l’état d’aération » en un point donné du Activité microbiologique
(surtout cycle de carbone)
sol et ses possibilités d’évolution.
Globalement, l’aération a d’importantes conséquences Fig. 14. – Représentation schématique de l’aération du sol
agronomiques. Lorsqu’elle est insuffisante :
– elle inhibe le processus de germination ce qui peut, l’état structural mais aussi la texture, interviennent de façon
secondairement, entraîner la destruction des semences déterminante ;
par les microorganismes du sol ; – des conditions climatiques : en période à forts excédents
– elle limite la croissance des racines de la plupart des pluviométriques, les risques de saturation, intermittente ou
Liste espèces cultivées ; lorsqu’elle intervient après installa- permanente, sont sensiblement plus élevés pour une qualité
tion du système racinaire, elle entraîne des nécroses et donnée du drainage propre au terrain.
la destruction partielle, voire totale, des racines ; b) Composition de l’air
– elle perturbe le fonctionnement des racines. Celles-ci 41.– Elle dépend d’une part des échanges entre phases au sein
Ta b l e respirent et doivent donc trouver de l’oxygène dans leur du volume V et d’autre part des échanges entre le volume V et
environnement immédiat à une concentration suffi- l’atmosphère extérieure.
sante. Un manchon d’eau autour des racines peut suf-
fire s’il est épais (sol saturé ou quasi saturé), à ralentir La consommation d’oxygène et le dégagement correspondant
les échanges gazeux de façon. dommageable pour l’acti- de CO2 au sein de ce volume de référence sont liés à l’activité
vité racinaire : absorption d’eau et d’éléments miné- biologique : respiration racinaire mais, surtout, décomposi-
Index
raux tels que l’ion phosphorique. tion biologique des matières organiques apportées au sol.
Un exemple peut fournir un ordre de grandeur à cet égard :
Par ailleurs, des phénomènes comme la chlorose des La production de CO2 entraînée par l’incorporation de 5 t de
arbres fruitiers ou de la vigne apparaissent lorsque deux pailles correspond à une consommation moyenne en oxy-
conditions sont remplies simultanément : gène de 10 m3/ha/jour avec des pointes dépassant 100 m3/ha/
Glossaire
• la présence de calcaire fin dit « actif » dans le sol ; jour. Cet ordre de grandeur peut être rapproché des volumes
• une mauvaise aération (concentration excessive en CO2 d’espace poral libre à l’air dans la couche arable d’un sol en
bon état cultural et à une humidité voisine de la capacité de
à proximité immédiate des racines) le plus souvent liée
rétention, soit : 50 à 150 m3/ha correspondant à un maxi-
à des excès d’eau :
mum de 10 à 30 m3 d’oxygène par ha. On voit que la stabilité
– enfin les conditions d’aération commandent l’activité de de la composition de l’atmosphère du sol ne peut être obte-
la faune et de la microflore du sol, et notamment celle qui nue que par une bonne qualité des échanges entre le sol et
intervient dans les cycles de l’azote et du carbone. l’atmosphère extérieure.
c) Mécanismes d’échange avec l’atmosphère
2. Facteurs physiques et biologiques commandant
l’aération en un point donné du sol 42.– Ceux-ci se font par diffusion des gaz commandés par le
gradient de concentration entre le volume de sol considéré et
39.– Soit un petit volume de sol en place V situé à une profon- l’atmosphère extérieure.
deur p.
Son intensité dépend alors :
Le schéma de la figure 14 présente les principaux mécanismes
– de la profondeur p, d’où le danger d’une incorporation pro-
intervenant dans les modifications quantitatives (teneur en
fonde de matières organiques aisément biodégradables ;
air) et qualitative (composition de l’air) au sein de ce volume
élémentaire. – de la porosité des couches situées entre le volume V et la
surface ainsi que de la conformation des pores et de la
a) Teneur en air tortuosité (qui accroît la distance réelle à parcourir par
40.– Elle est égale à la part de porosité qui à chaque instant les molécules gazeuses).
n’est pas occupée par de l’eau. Elle dépend donc : La présence d’une porosité structurale ouverte est une
– de la qualité du drainage de la couche de sol considérée ; on garantie de bon fonctionnement des échanges ; à l’opposé,
a vu la part prise par la porosité d’origine structurale sur la la présence d’une barrière à la diffusion, même limitée à
rapidité de ce drainage. Le sol étant supposé ressuyé (capa- une couche lissée de faible épaisseur (fond de pseudo-
cité de rétention), la proportion de phase gazeuse est liée à la labour par exemple) peut avoir des conséquences considé-
proportion de pores de grandes dimensions et, là encore, rables.

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STRUCTURE ET ÉTAT PHYSIQUE DU SOL
TA 1140
– de la présence d’eau (saturation ou manchons discontinus) phérique diffus. En sol compact, à diffusivité thermique éle-
dans la porosité de diffusion. En effet, bien que la diffusion vée, le refroidissement qui en résulte est compensé par diffu-
des gaz dissous dans l’eau intervienne dans le processus, elle sion vers la surface du sol des calories stockées dans les
est près de 10 000 fois plus lente qu’en phase gazeuse conti- couches sous-jacentes.
nue. En définitive, les risques les plus importants de mau- En sol très meuble, à la suite d’un binage par exemple, la diffu-
vaise aération existent surtout dans les sols compacts et(ou) sion trop lente ne parvient pas à limiter ce refroidissement. La
mal drainés. Ils sont considérablement accrus lorsqu’une température de la surface du sol peut alors descendre à des
activité biologique intense consomme, loin de la surface, niveaux très bas. A son contact, l’air ambiant se refroidit, ce qui
l’oxygène initialement disponible et produit en retour du peut entraîner la destruction par le gel des organes végétaux
CO2 voire, en conditions très défavorables, certains gaz aériens (cas du gel, après binage, des pommes de terre) à des
réducteurs toxiques. températures de l’air positives à 1 m de hauteur.
C. La température du sol D. Le sol comme milieu de croissance
43.– Elle a des conséquences agronomiques d’ordre biologi- du système racinaire
que et physique.
45.– Nous avons déjà évoqué le rôle de l’aération et de la tem-
Du point de vue biologique, des phénomènes comme la pérature sur la croissance et le fonctionnement des racines.
germination, la croissance des racines, les processus Influencés par ces facteurs, deux mécanismes peuvent com-
microbiologiques intervenant dans le cycle du carbone et mander simultanément ou séparément la croissance d’une
de l’azote obéissent à des lois à maximum en fonction de la racine dans ce milieu poreux plus ou moins déformable que
température. On doit donc éviter des températures trop Liste
constitue le sol.
basses ou excessives. Si les minima et les maxima accepta-
bles dépendent beaucoup de l’espèce voire de la variété 46.– Au cours de son élongation, une racine peut cheminer
biologique et du phénomène considéré, la gamme des dans le sol en utilisant des systèmes continus de pores d’une
températures optimales est plus étroite et située dans dimension égale ou supérieure à la sienne. Si le sol est rigide Ta b l e
beaucoup de cas entre 20 °C et 25 °C. c’est-à-dire non déformable sous l’influence de la force déve-
loppée par la racine en croissance, ces pores doivent être tout au
Du point de vue physique, nous verrons plus loin (n. 55)
long d’un trajet possible d’une dimension minimale relative-
l’effet sur la structure du gel, intervenant soit par action
ment importante au moins de l’ordre du mm. Sauf dans le cas
mécanique des cristaux de glace, soit par les alternances de
d’un matériau sableux grossier (1 à 2 mm), de tels pores n’exis-
dessiccation et d’humectation, donc de gonflement et de I n dex
tent pas au niveau de l’assemblage textural. Ce sont donc néces-
retrait, consécutives aux phases de gel et de dégel.
sairement des pores structuraux naturels (fissures, anciens tra-
Si le climat (cf. fasc. 1030) joue d’évidence un rôle essen- jets de racines décomposées des cultures antérieures, galeries
tiel, le bilan thermique et les transferts de chaleur dans le creusées par la faune du sol) ou résultant, dans les couches de
sol dépendent également des caractéristiques physiques surface, du travail du sol.
d’état du sol. Glossaire
Ce premier mécanisme est le seul qui puisse intervenir dans
C’est ainsi que l’albedo, pourcentage de l’énergie solaire inci- les sols très sableux à toutes humidités, et pour les autres tex-
dente qui est directement réfléchie par la surface du sol, dépend tures, en conditions sèches.
de l’angle d’incidence : saison, heure et orientation du terrain,
mais aussi des caractéristiques de la surface du sol : 47.– L’extrémité de la racine peut, en déformant le sol par la
poussée qu’elle exerce, se frayer un passage dans des massifs
– la couleur du sol (constitution minérale et organique) ; de terre ne contenant aucun pore d’une dimension suffisante
– la rugosité de la surface (état structural, battance) ; – son pour l’accueillir.
humidité : un sable sec réfléchit environ deux fois plus de
Encore faut-il que le sol soit déformable, c’est-à-dire qu’il con-
rayonnement incident qu’un sable humide.
tienne simultanément suffisamment d’eau et d’argile ; encore
44.– La diffusivité thermique qui, à travers la conductivité et faut-il aussi que la poussée exercée par la racine soit suffisante et
la chaleur spécifique, commande l’ampleur et l’intensité des effectivement appliquée au sol, et pour cela que la racine soit
transferts thermiques dans le sol, dépend essentiellement de suffisamment ancrée dans la couche de sol sus-jacente à celle
l’état physique et hydrique. qu’elle doit pénétrer. Cette dernière raison explique de façon
Nous nous bornerons ici, pour illustrer le résultat global plausible la difficulté qu’ont les racines de passer d’une couche
du jeu complexe de ces différents facteurs, à commenter poreuse et meuble à une couche plus compacte, alors qu’elles
deux exemples. parviendraient à s’implanter dans un profil homogène de com-
pacité analogue.
• La notion de “ terre froide ”. Elle s’applique aux sols se réchauf-
fant lentement au printemps (mais dont on doit noter qu’ils se Ce deuxième mécanisme d’enracinement se superpose fré-
refroidissent également plus lentement en automne). L’arché- quemment au premier lors du grossissement diamétral des
type en est une terre “ blanche ” dont la surface est lissée parce racines ; il semble de loin le plus général pour la colonisation
que battue par les pluies d’hiver (augmentation des pertes par des couches profondes non travaillées.
réflexion), compacte et humide. 48.– En définitive, une porosité structurale, résultant ou non
• L’influence de l’état structural sur le risque de gelée au prin- du travail du sol, suffisamment importante et bien répartie
temps. Par nuit claire, la surface du sol rayonne, sans que la (structure fragmentaire fine) est une assurance indispensable
perte de calories soit compensée par le rayonnement atmos- de la colonisation d’une couche de sol placée en condition

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1140TA STRUCTURE ET ÉTAT PHYSIQUE DU SOL

sèche, ce qui est un risque très fréquent dans les couches de Un terrain cultivé doit être non seulement un bon support
surface des cultures de printemps et d’été. pour la plante mais aussi pour les matériels de culture :
Le mécanisme par déformation du sol au cours de la crois- matériel de préparation du sol, d’entretien et de protection
sance racinaire intervient plus spécifiquement dans des cou- phytosanitaire de cultures, enfin de récolte.
ches profondes souvent plus humides et ne présentant que D’où l’importance, accrue avec la multiplication des
rarement un réseau de pores structuraux développé. interventions mécaniques, avec l’augmentation du poids
des matériels et celle des contraintes du calendrier cultu-
Les accidents d’enracinement : limitation de profondeur, fai- ral, de l’amélioration de la portance (cf. n. 69 à 83) et de
blesse de la densité des racines, mauvaise exploitation des la prise en compte de cet objectif dans les techniques de
mottes, racines déformées sont presque toujours explicables drainage et de travail du sol.
dans le cadre de ces deux mécanismes principaux.
49.– Nous soulignerons, pour conclure sur le rôle agronomi-
que des fonctions physiques du sol, l’importance du sol consi-
déré comme support de techniques.

Liste

Ta b l e

Index

Glossaire

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