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Comment évaluer la performance des

lycées ? Un point sur la méthodologie des


IVAL (Indicateurs de valeur ajoutée des lycées)
Marc Duclos, Fabrice Murat1
Bureau des études sur les établissements et l’éducation prioritaire
Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance

E
Depuis vingt ans, les indicateurs n juin 1994, les premiers ticulier en étudiant le parcours entre
de valeur ajoutée des lycées indicateurs de valeur la seconde et la terminale. De plus,
(IVAL) cherchent à mesurer les ajoutée des lycées (IVAL), ils prennent en compte les disparités
performances des établissements
sur la session 1993, ont importantes de recrutement entre les
du second cycle. Ils présentent
non seulement la réussite finale été diffusés dans une lycées, en termes de milieu social et
au baccalauréat, mais aussi la publication de 1 250 pages [5]. Claude de réussite scolaire passée.
capacité de l’établissement à Thélot, directeur du service statistique Pour répondre au mieux à cette
accompagner les élèves de la du ministère de l’éducation nationale à problématique, la méthodologie des
seconde jusqu’à l’examen. Par l’époque, introduisait ainsi ces indica- IVAL a sensiblement évolué au fil du
ailleurs, ils tiennent compte de
teurs : « En publiant ce dossier établi temps, pour s’adapter aux évolutions
la grande diversité des publics
accueillis dans les lycées, par la Direction de l’évaluation et de du système éducatif, comme la mise
que cette diversité reflète les la prospective, le ministère de l’édu- en place du baccalauréat professionnel
disparités territoriales ou la cation nationale poursuit une double en trois ans, ou pour suivre les évolu-
politique de sélection des ambition : il s’agit, d’une part, de don- tions des systèmes d’information, don-
établissements. En effet, le calcul
ner à tous ceux qui s’y intéressent des nant accès à des données plus fines.
d’une « valeur ajoutée » vise à
éléments d’appréciation des perfor- L’utilisation de ces indicateurs et les
contrôler les facteurs sur lesquels
l’établissement n’a pas prise, pour mances des lycées allant au-delà de critiques, généralement suscitées par
mesurer son efficacité propre. l’affichage des résultats des candidats leur reprise sous forme de palmarès
Longtemps limitée à la prise en qu’ils ont présentés au baccalauréat ; dans les médias, ont aussi été des
compte du milieu social et du il s’agit, d’autre part, de donner aux moteurs pour améliorer les procédures
retard scolaire, la méthodologie
lycées eux-mêmes, à leurs équipes de de calcul. Cet article a pour objectif de
s’est affinée à partir de la session
direction, aux enseignants, des outils faire un point sur la méthodologie, son
2008 : le niveau à l’entrée en
seconde, par les résultats au pour apprécier l’efficacité de leur histoire et les perspectives actuelles.
diplôme national du brevet, est action et les aider à l’améliorer ». On NOTE
en effet un facteur important de retrouvera la formulation de ce double
1. De nombreuses personnes, à la DEPP
la réussite des élèves. Cet article objectif au début du Guide de lecture, et en académie, ont contribué au fil des
fait un point sur la méthodologie et
qui a accompagné la mise en ligne des ans à l’amélioration des IVAL. En ne
envisage des pistes d’amélioration. retenant que les personnes passées par
indicateurs de la session 2013 sur le
le bureau des études sur les établisse-
site du ministère [7]. De même que ments et l’éducation prioritaire, ayant
ces deux objectifs généraux, les grands participé à la refonte de la méthodolo-
principes des IVAL n’ont pas changé. gie en 2008, citons Dominique Alain,
Camille Debra, Alain Larmat, Clotilde Lixi,
Ces indicateurs fournissent une vision
Damien Megherbi, Claudie Pascal,
plus précise de l’activité des établis- Michèle Thaurel-Richard. Citons aussi
sements que ce que montre le taux Jean-Claude Emin et Claude Sauvageot
de réussite au baccalauréat, en par- qui ont lancé les IVAL en 1994.

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Concepts, enjeux Cela peut être le signe d’une politique La réussite d’un
et définitions sélective de l’établissement en cours élève dépend de ses
de second cycle, mais cet indicateur caractéristiques et de
Quels indicateurs dépend aussi de l’offre de forma- celles des élèves qui
pour mesurer les tion du lycée ou de la mobilité rési- l’entourent
performances des dentielle des ménages dans la zone
lycées ? d’implantation ; Il faut donc s’efforcer d’éliminer
- la proportion de bacheliers parmi l’incidence des facteurs de réussite
Réduire la performance d’un lycée les sortants donne, parmi les élèves scolaire extérieurs au lycée pour
à un seul indicateur, ce qui reste le qui ont quitté l’établissement, quelles essayer de conserver ce qui est dû à
principe des palmarès diffusés dans qu’en soient les raisons, la proportion son action propre.
les médias, donne une vision très de ceux qui l’ont quitté avec le bacca- Une partie des facteurs de
partielle de l’activité de l’établisse- lauréat. Lorsqu’il ne porte que sur la réussite est propre à l’élève. Les
ment. La réussite au baccalauréat est seule année de terminale, il permet facteurs individuels extérieurs que
bien sûr un objectif évident pour un d’apprécier si un lycée accepte volon- sont l’âge, le milieu social, le sexe et
établissement, mais le parcours des tiers ou non de garder en son sein les le niveau scolaire à l’entrée au lycée
élèves est tout aussi important. C’est élèves qui ne réussissent pas le bac- (apprécié par la moyenne des notes
pourquoi les IVAL proposent trois indi- calauréat à l’issue de leur première aux épreuves écrites du diplôme natio-
cateurs pour décrire les performances terminale, et d’évaluer l’efficacité nal du brevet [DNB]) de chaque élève
des lycées : de la politique de redoublement qu’il ont été retenus car ils donnent une
- le taux de réussite au baccalau- pratique. première approximation des chances
réat est l’indicateur le plus tradition- Dans l’absolu, bien d’autres (au sens statistique du terme) d’accès
nel, le plus connu et le plus facile à résultats pourraient être étudiés : et de réussite au baccalauréat d’un
établir. Il rapporte le nombre d’élèves les compétences des lycéens, le par- élève (figure 1). La réussite dépend
du lycée reçus au baccalauréat au cours dans l’enseignement supérieur, plus des caractéristiques scolaires de
nombre d’élèves qui se sont présen- le bien-être des élèves… Du fait de l’élève, en particulier son niveau ini-
tés à l’examen ; leur méthodologie assez complexe, on tial, que des caractéristiques sociales.
- le taux d’accès au baccalauréat va le voir, les IVAL ne peuvent actuel- Ainsi, le taux de réussite au baccalau-
évalue, pour un élève de seconde lement couvrir un champ aussi large. réat général et technologique varie de
(ou de première), la probabilité qu’il 20 points entre les élèves ayant moins
obtienne le baccalauréat à l’issue Qu’est-ce que la valeur de 10 aux épreuves écrites du DNB et
d’une scolarité entièrement effec- ajoutée ? ceux ayant plus de 14. L’écart est de
tuée dans le lycée, quel que soit 19 points entre les élèves « à l’heure »
le nombre d’années nécessaire2. La question est de savoir com- et ceux ayant deux ans de retard ou
Il permet de distinguer les établis- ment évaluer l’action propre du plus en terminale. Il est moins impor-
sements qui gardent leurs élèves de lycée, ce qu’il a « ajouté » au niveau tant selon le milieu social (10 points
ceux où il y a plus de mouvements. initial des élèves qu’il a reçus. En entre les enfants de cadres supérieurs
d’autres termes, si un lycée présente et d’enseignants et ceux d’ouvriers et
NOTE
une valeur élevée pour un indicateur, d’inactifs) et selon le sexe (2 points
est-ce dû au fait qu’il a reçu des entre les filles et les garçons). On
2. Rappelons la différence entre un taux
d’accès et un taux de passage : un taux de élèves ayant de meilleures chances retrouve des écarts similaires pour le
passage est le rapport du nombre d’élèves de succès, ou bien parce qu’il a su, baccalauréat professionnel.
qui passent au niveau supérieur sur le stock tout au long d’une scolarité, déve- L’autre partie des facteurs de
d’élèves ; le taux d’accès retire au dénomi-
nateur le nombre d’élèves redoublants dans
lopper chez des élèves peut-être réussite est liée aux caractéris-
l’établissement en supposant que ceux-ci moins bien dotés au départ, les tiques de l’établissement que
auront les mêmes chances d’accéder au connaissances et les capacités qui fréquente l’élève en termes de
niveau supérieur l’année suivante.
ont permis leur succès ? population accueillie. En moyenne,

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la réussite des élèves comparables en où ils sont scolarisés (âge, milieu site dans un établissement fréquenté
termes sociodémographiques et sco- social et sexe des élèves) : quelle que par une population socialement favori-
laires est très sensible à la composi- soit la profession de ses parents, un sée. À titre d’exemple, 91 % des enfants
tion sociodémographique des lycées élève a de meilleures chances de réus- d’ouvriers ou d’inactifs scolarisés dans
Figure 1 – Taux de réussite nationaux au baccalauréat général et technologique
le quart des lycées ayant la plus forte
(session 2012) selon l'âge, le milieu social, le sexe ou le niveau scolaire part d’enfants de cadres supérieurs ou
des élèves d’enseignants, obtiennent le baccalau-
réat général et technologique, alors
100
que seuls 80 % d’entre eux réussissent
DNB > 14
à l’examen lorsque leur lycée est dans
95
≤ 18 ans Cadres supérieurs,
enseignants
le quart accueillant le moins d’enfants
90 Filles
de cadres supérieurs ou d’enseignants
Cadres moyens 10 ≤ DNB ≤ 14
Taux de réussite Employés, Garçons
(figure 2). Pour les enfants de cadres,
global artisans…
85 l’écart est à peu près du même ordre
Ouvriers, inactifs
19 ans (97 % contre 87 %). Il existe un effet
80 du contexte social dans lequel se trouve
DNB < 10 l’élève, indépendamment de ses carac-
75
≥ 20 ans téristiques propres. Cela peut être le
Moyenne aux épeuves
Âge Origine sociale Sexe écrites du DNB
signe d’un effet d’entraînement positif
70
quand les élèves favorisés se trouvent
Lecture : les élèves ayant obtenu plus de 14 de moyenne aux épreuves écrites du DNB ont un taux de réussite réunis, ou d’une baisse des exigences
au baccalauréat de 97,3 % en 2012. Ce taux est de 89,4 % pour les élèves ayant eu entre 10 et 14 et de 77,2 %
pour ceux qui ont eu moins de 10.
dans les établissements défavorisés.
Champ : France métropolitaine + DOM, public et privé sous contrat. Il est possible aussi que les enfants de
Source : MENESR-DEPP - Fichiers du baccalauréat et du DNB
milieu défavorisé dans les établisse-
Figure 2 – Taux de réussite nationaux au baccalauréat général et technologique ments favorisés se distinguent par des
(session 2012) selon le milieu social de l’élève et la tonalité sociale du lycée caractéristiques plus favorables (plus
% souvent enfants d’ouvriers qualifiés que
100
d’inactifs, issus d’une famille ayant plus
d’attente vis-à-vis de l’école).
95
Pour juger de l’efficacité d’un lycée,
il faut donc comparer la réussite de
90 chacun de ses élèves à celle des élèves
comparables scolarisés dans des lycées
85 comparables, en termes d’âge, de milieu
social, de sexe et de niveau scolaire à
80
l’entrée au lycée. Un taux attendu va
être calculé à l’aide d’une méthodolo-
gie présentée plus loin. Ce taux attendu
75
Enfants d'employés, Enfants de cadres ne constitue pas un objectif, mais une
Enfants d'ouvriers et Enfants de cadres artisans, commerçants supérieurs et
d'inactifs moyens
et agriculteurs d'enseignants simulation de ce que serait le taux de
réussite ou d’accès de chaque lycée si
Part d'enfants de cadres supérieurs et d'enseignants dans le lycée comprise entre : ses élèves étaient scolarisés dans un
0 % et 17,7 % 17,7 % et 29,7 % 29,7 % et 44,5 % 44,5 % et 100 %
établissement ne contribuant ni plus
Lecture : les enfants d’ouvriers et d’inactifs dans un lycée « favorisé » (accueillant plus de 44,5 % d’enfants ni moins à la réussite scolaire de ses
de cadres et d’enseignants) ont un taux de réussite au baccalauréat de 91 % ; il est de 80 % dans les lycées
« défavorisés » (accueillant moins de 17,7 % d’enfants de cadres et d’enseignants). Pour les enfants de cadres élèves que la moyenne des établis-
et d’enseignants, les taux de réussite selon le milieu social du lycée sont respectivement de 97 % et 87 %.
Champ : France métropolitaine + DOM, public et privé sous contrat. sements considérés. Si l’écart entre
Sources : MENESR-DEPP - Fichiers du baccalauréat et du DNB le taux constaté et le taux attendu

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(taux constaté - taux attendu), appelé Dans une optique descriptive, on peut est pertinent d’en tenir compte. Si
« valeur ajoutée », est positif, on a tout être tenté de « tout mettre » et d’étudier c’est une baisse des exigences des
lieu de penser que le lycée a apporté les écarts ainsi mis en évidence, pour équipes pédagogiques dans ce type
aux élèves qu’il a accueillis plus que ce comprendre quels sont les déterminants d’établissement, cela paraît moins
que ceux-ci auraient reçu s’ils avaient de la réussite au baccalauréat. Dans le justifié. Dans l’impossibilité de tran-
fréquenté un établissement situé dans cas des IVAL, il s’agit de donner une cher, nous avons simplement consi-
la moyenne. Cette mesure est l’indice image de l’activité de l’établissement, déré que cette dépendance entre le
d’une bonne efficacité relative. Si l’écart en contrôlant les facteurs dont il n’est contexte global et la performance
est négatif, la présomption inverse pré- pas responsable. On considère assez individuelle était un fait sociologique
vaudra. Cette approche de la valeur naturellement que le sexe des élèves, constaté. En d’autres termes, on va
ajoutée est relative. Elle permet une leur âge, leur milieu social, leur niveau donc comparer (à caractéristiques
comparaison avec l’efficacité moyenne. à l’entrée en seconde ne dépendent pas individuelles fixées) la performance
Deux taux attendus sont proposés : de l’établissement où ils se trouvent d’un établissement populaire avec
l’un avec des références nationales, (même si l’établissement a pu sélection- les autres établissements populaires.
l’autre avec des références acadé- ner les élèves répondant à certains cri- Le choix de mettre les « effets
miques. Cela permet de tenir compte tères). En revanche, il serait sans doute collectifs » est aussi cohérent avec
d’éventuelles spécificités académiques peu judicieux de prendre en compte la volonté de diffuser aux acteurs et
dans le lien entre les caractéristiques des variables qui décrivent l’action de aux usagers du système éducatif des
des élèves et la réussite au baccalau- l’établissement. Ainsi, un lycée a pu indicateurs sur l’efficacité relative
réat. L’idée est de permettre aux établis- obtenir des moyens supplémentaires, des établissements. En revanche, il
sements de se comparer entre eux selon et atteindre ainsi un plus haut niveau se comprendrait moins si l’on privi-
leurs caractéristiques, notamment géo- de réussite qu’un autre lycée en tout légiait une utilisation qui est parfois
graphiques. À l’extrême, on peut imagi- point comparable, sauf sur l’aspect des évoquée pour les IVAL : la mise à
ner le cas d’une académie où les inégali- moyens. Il n’est pas pertinent de cher- disposition d’indicateurs auprès des
tés sociales de réussite au baccalauréat cher à contrôler l’effet de ces moyens familles pour choisir le meilleur éta-
seraient nulles. Il ne serait pas forcé- supplémentaires pour annuler cet écart blissement pour leur enfant.
ment opportun d’attribuer une valeur de performance entre les deux lycées, Utiliser le taux de réussite brut
ajoutée positive aux établissements car cet effet fait partie de la valeur ajou- ne serait cependant pas non plus la
avec beaucoup d’enfants d’ouvriers, si tée de l’établissement. bonne stratégie. Prenons d’abord un
cela ne semble pas un facteur important exemple dans un système scolaire
dans l’académie. Cependant, la situa- Faut-il prendre en très simplifié, où l’on n’a pas constaté
tion réelle n’est pas aussi extrême et si compte le contexte d’« effets collectifs ». Supposons que
l’on constate quelques spécificités mar- scolaire ? les élèves se distinguent en deux
quées dans certaines académies, dans groupes : les « favorisés » dont le taux
les plus petites, le fait de travailler sur En revanche, nous avons fait le de réussite au niveau national est de
des populations d’élèves et de lycées choix de retenir les « effets col- 90 % et les « défavorisés » qui ont un
restreintes fragilise de façon sensible lectifs » des variables. Pourtant, taux de 60 %. Si l’on préfère les éta-
le modèle. il serait normalement nécessaire blissements ayant le taux de réussite
de bien comprendre d’où vient la le plus élevé, on peut parfois faire le
Les facteurs dont performance moins bonne des éta- « mauvais choix » pour son enfant. En
l’établissement n’est blissements populaires, même à effet, considérons ces deux lycées :
pas responsable milieu social individuel donné. S’il - le lycée A avec 83 % d’élèves
s’agit d’une baisse de motivation favorisés et 17 % d’élèves défavori-
Le choix des variables à intégrer collective des élèves, du fait de la sés, ces élèves ayant respectivement
dans le modèle dépend bien sûr de leur concentration des difficultés, c’est des taux de réussite de 85 % et 55 % ;
disponibilité, mais aussi de l’objectif une donnée exogène par rapport - le lycée B avec 17 % d’élèves
de l’indicateur que l’on veut construire. à l’action de l’établissement et il favorisés et 83 % d’élèves défavori-

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sés, ces élèves ayant respectivement ces élèves ayant res pectivement des « rationnel » des familles. C’est pour-
des taux de réussite de 95 % et 65 %. taux de réussite de 92,5 % et 62,5 % ; quoi les « effets collectifs » ont été
On peut vérifier que le taux de - le lycée B avec 17 % d’élèves pris en compte, plus cohérents avec le
réussite du lycée A est de 80 %, soit favorisés et 83 % d’élèves défavorisés, premier objectif qu’avec le deuxième.
10 points de plus que celui du lycée B. ces élèves ayant respectivement des Par ailleurs, le choix d’un établisse-
Pourtant, une famille favorisée a tout taux de réussite de 87,5 % et 57,5 %. ment est le résultat d’une prise de
intérêt à envoyer son enfant dans le La prise en compte de l’« effet col- décision bien plus complexe que dans
deuxième établissement, car pour lectif » conduit à comparer, à milieu les exemples qui viennent d’être pré-
les familles du même milieu social, social donné, le lycée A aux autres sentés et s’appuie dans doute sur des
le taux de réussite est de 95 %, soit lycées favorisés et c’est à son détri- informations plus larges que les IVAL.
10 points de plus que dans l’autre. ment : les élèves favorisés ont un taux
Il en va de même pour une famille de réussite de 92,5 % contre 95 % De l’ancienne
défavorisée. Dans un calcul des taux dans ce type de lycée. L’écart est le méthodologie utilisée
attendus avec uniquement des don- même pour les élèves défavorisés, jusqu’en 2008 à
nées individuelles, ces 10 points se conduisant à une valeur ajoutée de la méthodologie
retrouveraient dans le fait que le pre- - 2,5 points. Le même raisonnement
actuelle
mier lycée a un taux attendu de 85 %, dans le lycée B, par comparaison aux
soit une valeur ajoutée de – 5 points, autres lycées défavorisés, conduit Prise en compte du
alors que le taux attendu est de 65 %, au contraire à une valeur ajoutée milieu social et du
soit une valeur ajoutée de + 5 points de + 2,5 points. Faut-il choisir le retard scolaire
pour le second. La valeur ajoutée per- lycée B ? Ce n’est pas sûr. En effet,
met de faire un choix plus rationnel la comparaison des deux lycées fait Jusqu’en 2008, la méthodolo-
que le taux brut. apparaître à milieu social individuel gie des IVAL pour le calcul du taux
Plaçons-nous maintenant dans donné un taux de réussite supérieur attendu était assez simple et ne pre-
un système scolaire et un calcul des dans le lycée A que dans le lycée B nait en compte que le milieu social
valeurs ajoutées intégrant des « effets (92,5 % contre 87,5 % pour les élèves des élèves (en distinguant 4 groupes
collectifs ». L’intérêt de la valeur ajou- favorisés), ce qui suggèrerait plutôt aux plus ou moins favorisés) et l’âge en
tée est alors moins évident pour ce familles de choisir le premier lycée. On terminale (distinguant les élèves « à
type de décision. En effet, supposons vérifiera que le calcul des valeurs ajou- l’heure », « ayant un an de retard »
qu’il existe un « effet collectif » tel tées sans prise en compte de l’« effet ou « deux ans de retard et plus »).
que, en moyenne, dans les établisse- collectif » confirme cette façon de voir. Pour chaque établissement, on cal-
ments où il y a 83 % d’élèves favo- D’une façon plus globale, ceci vient du culait la répartition des élèves du
risés, le taux de réussite des élèves fait que l’on ne peut choisir indépen- lycée dans les 12 cases résultant du
favorisés est par exemple de 95 % damment la valeur ajoutée du lycée et croisement de ces deux critères. On
(contre 90 % en général) et celui des l’effet de composition dû à sa tonalité affectait ensuite à chaque case le
élèves défavorisés de 65 % (contre sociale. Un lycée populaire peut obtenir taux de réussite observé au niveau
60 % en général) : il y a un effet de meilleurs résultats que les autres national (ou académique) pour cette
d’entraînement positif de la tonalité lycées populaires et se voir attribuer catégorie d’élèves. La moyenne de
sociale favorisée pour tous les élèves. une valeur ajoutée positive ; il risque ces taux de référence pondérés par la
Posons aussi que, en moyenne, dans cependant d’avoir des résultats à répartition dans les 12 cases donnait
les établissements où il y a 17 % milieu social individuel donné moins le taux attendu.
d’élèves favorisés, les taux sont plu- bons qu’un établissement favorisé sans L’ancienne méthodologie des
tôt de 85 % et 55 % pour les élèves valeur ajoutée, mais bénéficiant d’un IVAL reposait donc sur le modèle sui-
favorisés et défavorisés. Considérons effet de composition important. Ri = α x PAi + ei qui explique
vant :qui
maintenant les deux lycées suivants : Les IVAL ont pour principal objec- la réussite au baccalauréat Ri de
- le lycée A avec 83 % d’élèves tif de mesurer l’efficacité des établis- l’élève i par les 12 variables indica-
favorisés et 17 % d’élèves défavorisés, sements et non de guider un choix trices PAi (croisement de la PCS des

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parents de l’élève en 4 groupes et taux observé encore plus bas et une l’entourent.
de l’âge en 3 tranches), auquel est valeur ajoutée négative. Cela peut • Concernant la « forme » de
ajouté un terme résiduel ei supposé être mis en relation avec les « effets l’équation :
être indépendant de ces variables collectifs », un effet d’entraînement - implicitement, cette équation
indicatrices. α est le vecteur des coef- négatif dans les établissements défa- se fonde sur une régression linéaire.
ficients associés à la variable PAi : vorisés, qui a été présenté plus haut Or la variable étudiée est une indi-
ils correspondent en fait aux 12 taux et qui n’était pas pris en compte dans catrice ne pouvant avoir que deux
de réussite moyens des populations l’ancienne méthodologie. valeurs (0 ou 1) qui se prête mal à ce
définies par le croisement de la PCS Outre l’étude de Félouzis déjà type de modélisation ;
et de l’âge.ei mesure l’impact sur la citée, de nombreux travaux ont été - l’estimation repose aussi sur
réussite de l’élève des autres facteurs menés à la DEPP et dans les ser- l’hypothèse d’une indépendance de
pertinents, dont l’efficacité propre de vices académiques pour améliorer ei d’un élève à l’autre. En d’autres
l’établissement. La valeur ajoutée est la méthodologie des IVAL, en tenant termes, on suppose que les facteurs
donc estimée en faisant la moyenne compte de l’enrichissement des sys- qui ont bénéficié à tel élève n’ont pas
sur un établissement de ei. tèmes d’information et des progrès d’impact sur un autre. C’est bien sûr
de la modélisation statistique. La une hypothèse forte et en particulier,
Les critiques de DEPP avait testé dès 1996 la prise elle écarte la possibilité d’un effet
l’ancienne méthodologie en compte des résultats au DNB [6] établissement. Or, il est probable
et des travaux similaires ont aussi été qu’il y a des établissements plus
La diffusion des IVAL dans les entrepris dans certaines académies [8]. performants où la variable ei aura
médias, souvent sous la forme de La transformation du DNB en un exa- tendance à être positive pour tous
palmarès, a provoqué de nombreuses men national en 2003 (auparavant, les les élèves et d’autres lycées moins
réactions, parfois assez critiques, épreuves étaient académiques) et la performants, où elle sera plus sou-
de la part de chefs d’établissement, remontée de données exhaustives au vent négative.
d’enseignants ou de chercheurs, niveau national à partir de la session
comme Félouzis [3] ou d’institutions 2004 ont ouvert des possibilités inté-
comme le Haut conseil de l’évaluation ressantes, permettant l’organisation
de l’école [2]. L’absence de prise en d’un groupe de travail assez large pour
compte de niveau initial a souvent été proposer une nouvelle méthodologie
évoquée3. L’étude des valeurs ajou- des IVAL. Ce groupe de travail a mis à
tées a aussi révélé un phénomène un plat les principales critiques faites au
peu inattendu : les valeurs ajoutées modèle des anciens IVAL [4] :
étaient plus faibles et souvent néga- • Concernant le « contenu » de
tives quand le taux attendu était bas. l’équation :
Or, on aurait pu anticiper un résultat -  il manque un certain nombre d’in-
inverse : si le taux attendu est élevé, formations importantes permettant NOTE
proche de 100 %, du fait d’un public de prédire la réussite à l’examen et 3. Les expériences internationales dans le
très favorisé, le taux observé risque selon lesquelles les établissements domaine ont aussi été examinées, en par-
d’être plus bas, indiquant une valeur se distinguent. C’est le cas du sexe et ticulier dans le cadre de groupes de travail
organisés par l’OCDE. D’autres pays ont
ajoutée négative. Pour les établisse- surtout du niveau scolaire des élèves
développé des méthodologies similaires à
ments défavorisés, au contraire, un à l’entrée au lycée ; la nôtre, mais il existe aussi des approches
taux attendu bas laisserait une forte - seules sont prises en compte plus directes, comparant le niveau à l’en-
marge de manœuvre de « progres- des données individuelles, alors trée des élèves au niveau en sortie, pour
caractériser la valeur ajoutée (c’est le cas
sion » en termes de valeur ajoutée. qu’il existe aussi des « effets collec-
notamment de l’Angleterre). Cela nécessite
Ce n’est pas ce que l’on observait : tifs ». La réussite d’un élève dépend toutefois de disposer de deux mesures bien
les établissements ayant un taux de ses caractéristiques, mais aussi comparables à ces deux moments de la sco-
attendu bas avaient en moyenne un des caractéristiques de ceux qui larité, ce qui n’est pas le cas pour la France.

78 Éducation & formations n° 85 [novembre 2014  ]


La méthodologie utilisée depuis 2008

Pour répondre à ces critiques, un nouveau modèle a été proposé, où l’on introduit l’indice j pour prendre en compte
l’établissement d’appartenance :
3 2
Ri j = λ0 + λP × Pi + λ A × Ai + λS × S i + ∑ λPg × Pjg + ∑ λ gA × A jg + λ1S × S 1j + λDNB × DNB + l j + ei j
g =1 g =1

Les variables vorisée) parmi les élèves de l’établis- qui distingue les établissements les
individuelles : sement j passant la même série que uns des autres) et une valeur par
λP1, λP2, λP3
milieu social, l’élève i. On peut faire le même calcul élève eij (qui distingue les élèves au
retard scolaire, sexe pour les trois autres catégories de PCS. sein des établissements).
Seules trois de ces proportions sont uti- Par ailleurs, l’estimation des coef-
La première ligne de ce modèle lisées, car la somme totale des quatre ficients de ce modèle est effectuée en
décrit les variables individuelles : faisant 100 %, la dernière apporte une utilisant une régression logistique et
λ 0 correspond à la situation de information redondante. non une régression linéaire, pour tenir
référence (pour chaque variable compte de la nature dichotomique de
qualitative, on choisit une modalité Le niveau initial des la variable expliquée. D’une certaine
de référence et pour les variables élèves façon, cela revient à interpréter Ri
quantitatives, c’est la valeur 0 qui comme la probabilité de l’élève de
est la référence). Pi est la PCS des Le niveau initial, mesuré par la note réussir au baccalauréat et à effectuer
parents de l’élève, qui distingue aux épreuves écrites du DNB, a été isolé une transformation logistique, du type
ici trois groupes différents de la dans la troisième ligne, non seulement R
f ( x) = ln( i ) , pour avoir une
modalité de référence (PCS très parce qu’il s’agit d’une information 1 − Ri
favorisée). Ai est l’âge de l’élève en fondamentale, surtout par rapport à valeur qui n’est plus contrainte entre
terminale, qui distingue les élèves l’ancienne méthodologie, mais aussi 0 et 1, ce qui provoque des effets de
ayant un an de retard ou deux ans parce que sa prise en compte pose bornes. Une autre façon de voir les
et plus de l’âge normal pris comme quelques difficultés techniques. En choses est de supposer que la réussite
situation de référence. Si est une effet, l’idéal serait de prendre en compte (ou l’accès) au baccalauréat est en fait
indicatrice repérant les filles. λ P, cette donnée au niveau individuel, mais le résultat d’une « propension à réus-
λA et λS sont les vecteurs des coef- cela nécessite un appariement complet sir » (une variable latente, non obser-
ficients à estimer associés à ces entre les fichiers de résultats et ceux du vée, que l’on peut assimiler à l’en-
variables, qui comportent chacun DNB. Or, même si cet appariement est semble des compétences des élèves),
un nombre de coefficients égal au bon et en voie d’amélioration, il existe la réussite étant atteinte quand cette
nombre total de modalités moins encore un taux d’échec d’environ 5 %. propension est supérieure à un certain
celle de référence (λlP1P1,, λlP2P2,, λlP3P3 par En 2008, il a donc été décidé de travail- seuil. On va chercher à effectuer une
exemple pour la PCS). ler au niveau de l’établissement (en dis- régression linéaire sur cette propen-
tinguant cependant les élèves par série) sion, en utilisant une fonction de lien
Les variables de pour calculer cette variable. entre la probabilité de réussir et cette
contexte scolaire propension (voir [1] pour une présen-
La spécification tation plus détaillée de la théorie).
La deuxième ligne présente les économétrique
variables au niveau établissement. Pour Le calcul de la valeur
chacune des trois variables de niveau Enfin, la dernière ligne présente la ajoutée
individuel, on a calculé les proportions forme particulière du terme résiduel,
d’élèves dans chaque modalité. Pour la qui se décompose en une valeur par Une fois les coefficients de ce
PCS, par exemple, Pj1 est la proportion établissement lj (donc identique pour modèle estimé, les trois premières
d’élèves de PCS = 1 (c’est-à-dire défa- tous les élèves de cet établissement, lignes de l’équation permettent de

Éducation & formations n° 85 [novembre 2014  ] 79


prédire pour chaque élève une pro- des attendus à chaque étape (de la d’accès de la seconde professionnelle
babilité de réussir le baccalauréat seconde à la première, de la première au baccalauréat a été développé à
compte tenu de ses caractéristiques à la terminale et de la terminale au partir de la session 2011, la première
individuelles et des caractéristiques baccalauréat). En effet, le calcul de où une cohorte significative d’élèves
de son établissement. On fait la cet indicateur s’appuie sur le principe entrés dans le nouveau cursus a
moyenne de ces probabilités par des « cohortes fictives ». Il est trop atteint la terminale. Pour la session
établissement pour calculer son taux compliqué d’étudier le parcours d’une 2012, une convergence plus grande a
attendu. Signalons que l’on pourrait cohorte réelle d’élèves entrés une été faite avec les séries générales et
aussi utiliser directement le terme lj année donnée dans le lycée jusqu’à technologiques, en intégrant les résul-
pour mesurer l’efficacité de l’éta- l’obtention de leur baccalauréat, tats au DNB dans le modèle. Jusqu’à
blissement, mais on a préféré une qu’ils peuvent avoir après un nombre présent, la complexité des cursus
méthodologie dans la continuité des d’années très variable. On étudie donc après la troisième, passant par le BEP,
anciens IVAL4. les taux d’accès une année donnée avait empêché cette prise en compte.
Le modèle pour le taux de réussite de seconde en première, de première
est appliqué à toutes les séries, le en terminale et de terminale au bac- Le travail sur les
taux attendu global de l’établissement calauréat (donc sur trois cohortes données et résultats
étant obtenu en faisant la moyenne d’élèves différentes).
des taux par série en pondérant par De plus, pour les lycées généraux Les fichiers utilisés
le poids de la série dans l’établisse- et technologiques, il est nécessaire
ment. Il aurait été possible de faire un de tenir compte de l’offre de for- La mise en œuvre du modèle est
modèle sur la réussite globale, toutes mation : un lycée n’offrant que des contrainte par les données utilisées.
séries confondues, mais la valeur séries générales après la seconde Le choix des variables ne peut se
obtenue risquait d’être incohérente aura du mal à garder tous ses élèves faire que parmi celles disponibles.
par rapport aux résultats par série. jusqu’au baccalauréat. C’est pour- Un important travail d’appariement
La méthodologie pour le taux d’ac- quoi on effectue 5 modélisations de fichiers est par ailleurs néces-
cès est similaire à celle pour le taux de séparées selon l’offre de formation, saire pour combiner les principales
réussite, à ceci près qu’il faut calculer en distinguant : sources :
-  lycée d’enseignement général ; - le fichier sur les candidats au
NOTE - lycée polyvalent à dominante baccalauréat ;
4. Pour être un peu plus précis, l’estimation tertiaire ; -  le fichier sur les candidats au
du terme lj se fait dans le cadre d’un modèle - lycée polyvalent à dominante DNB ;
multi-niveaux, qui suppose que ce terme est
industrielle ; - la Base centrale des éta-
aléatoire. Il aurait été possible de traiter
l’« effet établissement » dans le cadre d’un -  lycée technologique à dominante blissements qui donne les infor-
modèle à « effets fixes » : cela aurait conduit tertiaire ; mations administratives sur les
à mettre dans le modèle toutes les variables -  lycée technologique à dominante établissements ;
de niveau individuel et à ajouter des indi-
catrices repérant chaque établissement.
industrielle. -  les Bases élèves académiques,
Le coefficient associé à chaque indicatrice qui décrivent chaque année la situa-
aurait pu être interprété comme la valeur Prise en compte de tion des élèves (formation suivie et
ajoutée de l’établissement correspondant.
la réforme de la voie établissement fréquenté l’année en
L’un des problèmes de ce type de modé-
lisation est que l’effet de l’établissement professionnelle cours et l’année précédente, sexe,
étant fixé, il n’est pas possible de chercher âge, milieu social notamment). Ces
à l’expliquer à partir de variables de niveau Les principales évolutions depuis bases remontent au niveau national,
établissement, comme les « effets collec-
2008, liées à la mise en place et à la mais sans identifiant permettant de
tifs ». C’est par contre possible avec les
modèles multi-niveaux utilisés ici, au prix généralisation du baccalauréat pro- les apparier entre elles : les apparie-
d’une plus grande complexité dans l’esti- fessionnel en trois ans, ont concerné ments doivent actuellement être faits
mation des paramètres, en particulier dans les indicateurs consacrés à l’ensei- en académie.
le cas des modèles logistiques.
gnement professionnel. Un indicateur L’appariement avec le DNB est

80 Éducation & formations n° 85 [novembre 2014  ]


un point particulièrement important écrites du DNB n’ont pas été retrouvées Quelques résultats sur
et nous avons indiqué que le niveau pour plus de la moitié des élèves, les un exemple
imparfait en 2008 a obligé à une prise taux attendus ne sont pas publiés ;
en compte seulement agrégée. Parmi - si les notes sont retrouvées pour Afin de mieux appréhender les
les autres problèmes qui doivent être moins de deux élèves sur trois (mais apports de la nouvelle méthodologie,
réglés, celui des PCS non renseignées plus d’un élève sur deux), la précision nous prenons pour exemple un éta-
fait l’objet d’un traitement élaboré. On du taux attendu calculé s’en trouve blissement et étudions les variations
le corrige en imputant des valeurs à affectée sans être aussi détériorée de sa valeur ajoutée en fonction de la
partir de l’âge de l’élève pour main- que dans le cas précédent. Dans ce méthode utilisée. Cette comparaison
tenir une certaine cohérence dans les cas, les taux attendus sont annotés sera limitée à la valeur ajoutée en réfé-
données. d’un (*) lors de la diffusion ; rence nationale obtenue pour la série S
- la précision dépend de l’impor- à la session 2012 du baccalauréat.
Les conditions de tance de la population de référence.
publication Ainsi, pour les séries où l’on trouve Calcul avec l’ancienne méthodologie
peu d’élèves dans certaines acadé-
Les conditions de publications ont mies, les taux attendus de réussite Cet établissement présente 15 élèves
fait l’objet, au moment de la rénovation au baccalauréat, en référence aca- de PCS défavorisés sur 53 élèves candi-
de la méthodologie, d’une discussion démique, ne peuvent être calcu- dats à la série S, soit 28 % (figure 3). Les
approfondie pour trouver un arbitrage lés. Dans ce cas, le taux moyen de élèves « à l’heure » sont nettement majo-
entre la qualité des données et une dif- réussite de la série dans l’académie ritaires (45 sur 53, soit 85 %) et, comme
fusion assez large. Le nombre d’élèves considérée est publié à la place, attendu, ils réussissent mieux l’examen
d’une série donnée peut parfois être et il est annoté d’un (1) lors de la que les élèves en retard (98 % contre
bas. Cela n’entache pas la valeur du diffusion. 57 %). Sur l’ensemble des élèves,
taux brut (il y a un sens à donner un taux
de réussite même sur 10 élèves), c’est Figure 3 – Répartition de la population et résultat au baccalauréat
d’un lycée fictif selon le milieu social et le retard scolaire (en %)
pourquoi nous diffusons l’information.
PCS PCS PCS PCS
Cependant, il faut être conscient défavorisée moyenne favorisée très favorisée Total
qu’il y a un risque d’instabilité impor- Nombre de présents
Pas de retard 12 9 5 19 45
tant (il suffit d’un lauréat sur dix en plus
Un an de retard 3 2 1 1 7
ou en moins pour faire varier le taux de Deux ans de
retard ou plus 0 0 0 1 1
10 points).
Total 15 11 6 21 53
Concernant les taux attendus, les % de réussite
règles appliquées ont aussi été assez Pas de retard 91,7 100,0 100,0 100,0 97,8
souples : Un an de retard 33,3 100,0 0,0 100,0 57,1
Deux ans de
- aucun indicateur n’est publié dès retard ou plus 0,0 0,0
lors que les effectifs de présents au Total 80,0 100,0 83,3 95,2 90,6
Lecture : dans cet établissement, pour la série S, il y a 12 élèves sans retard scolaire et de PCS défavorisée
baccalauréat général et technologique parmi les présents au baccalauréat ; 91,7 % ont réussi le baccalauréat.
sont inférieurs à 20 élèves, ou que ceux Sources : MENESR-DEPP - Fichiers du baccalauréat et du DNB

du baccalauréat professionnel sont infé-


Figure 4 – Taux de réussite au baccalauréat 2012, série S, selon le milieu
rieurs à 10. Par ailleurs, si un lycée offre social et le retard scolaire
un cycle incomplet (un ou deux niveaux),
PCS PCS PCS PCS
les taux d’accès au baccalauréat et les défavorisée moyenne favorisée très favorisée
Pas de retard 90,5 93,3 94,6 96,9
proportions de bacheliers parmi les
Un an de retard 75,7 78,6 81,3 85,7
sortants ne peuvent être calculés. Dans Deux ans de retard ou plus 67,5 72,2 73,0 77,1
ce cas, la totalité de la fiche n’est pas Lecture : au niveau national, le taux de réussite à la série S des élèves sans retard scolaire et de PCS
défavorisée est de 90,5 %.
renseignée ; Champ : France métropolitaine + DOM, public et privé sous contrat.
Sources : MENESR-DEPP - Fichiers du baccalauréat
- quand les notes aux épreuves

Éducation & formations n° 85 [novembre 2014  ] 81


son taux de réussite brut au bacca- sissent mieux que les élèves ayant fique (figure 5). Le milieu social et le
lauréat est de 91 %. deux ans de retard de PCS défavo- retard scolaire au niveau individuel
Pour calculer son taux attendu risée (67,5 %). Le calcul du taux conservent un fort pouvoir prédictif
avec l’ancienne méthode, nous attendu va être obtenu en appli- de la réussite au baccalauréat : le
utilisons une table contenant les quant ces taux à la répartition de fait d’avoir deux ans de retard ou
taux de réussite de la population la population sur ces deux critères : plus diminue de 23 points la probabi-
française des élèves inscrits en (12 x 90,5 + 9 x 93,3 + 5 x 94,6 lité de réussir par rapport aux élèves
terminale scientifique répartis + 19 x 96,9 +… 1 x 77,1)/53 = 92 % « à l’heure », en contrôlant les autres
suivant leur âge et la catégorie La valeur ajoutée de l’établissement variables du modèle ; l’écart est de
socioprofessionnelle auxquels ils est donc de - 1 (91 - 92). 7 points entre les élèves de PCS
appartiennent (figure 4). L’influence défavorisée et les élèves de PCS
des deux variables est très nette : Calcul avec la nouvelle très favorisée. Pour les filles, la pro-
les élèves « à l’heure » de PCS très méthodologie babilité de réussite est supérieure
favorisée ont un taux de réussite de 2 points à celle des garçons.
de 96,9 % ; les élèves « à l’heure » La nouvelle méthode utilise une L’intérêt de prendre en compte le
de PCS défavorisée ont un taux un représentation plus détaillée de la niveau initial des élèves apparaît
peu plus bas (90,0 %), mais réus- réussite au baccalauréat scienti- clairement : une note moyenne à
l’entrée en seconde supérieure de
Figure 5 – Modélisation de la réussite au baccalauréat 2012, série S 1 point implique une hausse de
Coefficient estimé Effet marginal
4 points du taux de réussite au bac-
Constante l0 - 4,92 *** 90,9 calauréat. Les « effets collectifs »
PCS de la personne responsable concernant le milieu social ou le
PCS très favorisée (réf.)
sexe, sans être déterminants, ont
PCS défavorisée l P1 - 0,67 *** - 7,2
PCS moyenne l P2 - 0,48 *** - 4,9
un impact non négligeable sur la
PCS favorisée l P3 - 0,30 *** - 2,8 réussite à la série S : 10 points de
Retard scolaire plus pour la proportion de PCS défa-
Pas de retard (réf.) vorisées font baisser de 0,6 point le
Un an de retard l A1 -1,26 *** - 17,1
l A2 taux de réussite. En revanche, pour
Deux ans de retard et plus -1,55 *** - 22,9
Sexe de l'èlève le fait d’être entouré d’élèves en
Garçon (réf.) retard, en terminale S, les coeffi-
Fille lS1 0,27 *** 2,0 cients sont non significatifs.
DNB lDNB 0,67 *** 4,2
l P1
À partir de ce modèle, il est pos-
% de PCS défavorisées - 0,75 *** - 0,6
% de PCS moyennes l P2 - 0,63 *** - 0,5 sible d’estimer pour chaque élève
% de PCS favorisées l P3 - 2,05 *** - 1,8 de l’établissement sa probabilité de
% de retards d'un an l A1 0,18 ns 0,1 réussir au baccalauréat, compte tenu
% de retards de deux ans et plus l A2 0,51 ns 0,4
l S1
de ses caractéristiques et de celles
% de filles - 0,71 *** - 0,6
Lecture : une situation de référence a été choisie (garçon de PCS très favorisée, sans retard scolaire, avec une de l’établissement. La moyenne de
valeur à 0 pour les variables quantitatives). Les coefficients donnent l’impact d’un changement par rapport à ces probabilités pour l’ensemble
cette situation sur la propension à réussir au baccalauréat : les élèves de milieu défavorisé ont moins de chances
de réussir, les filles davantage, etc. Pour les variables quantitatives, les coefficients donnent l’impact d’une des élèves présents aux épreuves
augmentation d’une unité (soit 100 % pour les proportions). Pour calculer les effets marginaux, nous avons un
peu modifié la situation de référence, qui était peu réaliste (avec 0 de moyenne au DNB, la probabilité prédite de la série S donne le taux attendu.
pour les élèves de réussir le baccalauréat était très faible) : nous avons fixé la note au DNB à 11,2 et une Il est de 94 %, soit une valeur ajou-
proportion de filles de 45 %.
La probabilité de réussite des élèves se trouvant dans cette situation de référence est estimée à 90,9 %, ce qui tée de - 3 pour la série S de cet éta-
est proche du taux de réussite observé à la série S de la session 2012. Les effets marginaux sur les coefficients
donnent l’impact (en points) sur le taux de réussite ; pour les proportions, cela donne l’impact d’une augmentation
blissement. Le taux attendu avec la
de 10 points de pourcentage de la variable considérée. nouvelle méthode est de 2 points
Tous les coefficients sont significatifs au seuil de 1 % (***) sauf les coefficients associés aux proportions de
retards dans l’établissement (ns).
supérieur à celui avec l’ancienne
Champ : France métropolitaine + DOM, public et privé sous contrat. méthode. Cette augmentation est en
Sources : MENESR-DEPP - Fichiers du baccalauréat
partie due au fait que la moyenne des

82 Éducation & formations n° 85 [novembre 2014  ]


notes à l’écrit du diplôme national du Historique des travaux Améliorer la qualité des
brevet des élèves de terminale S de et perspectives variables
cet établissement est particulière-
ment élevée avec une valeur globale Calculer les indicateurs Le taux d’accès de la seconde
de 13,52, ce qui fait espérer une sur plusieurs années générale et technologique au bacca-
meilleure réussite de ces élèves. Ce lauréat fait depuis longtemps l’objet
phénomène n’était pas mesuré par Malgré les améliorations appor- d’une forte contestation de la part
l’ancienne méthode. tées en 2008, les IVAL sont encore des chefs d’établissement offrant
perfectibles et l’étude transversale une offre de formation réduite. Ils se
Resserrement de la ou longitudinale des indicateurs sentent défavorisés par les valeurs
distribution avec la a permis de repérer des sujets brutes, même si les taux attendus et
nouvelle méthodologie d’interrogation et des pistes de donc la valeur ajoutée contrôlent ce
progrès. La fiabilité des taux paramètre. De plus, le taux d’accès de
En prenant en compte plus de facteurs attendus calculés sur des petits la première au baccalauréat permet
externes à l’action de l’établissement, la effectifs, ainsi que la robustesse d’avoir une vision complémentaire.
nouvelle méthodologie a diminué l’am- des modèles académiques, esti- Ceci dit, du fait que les établisse-
pleur de la valeur ajoutée. Cela provoque més parfois sur de petites popu- ments sont encouragés à fonctionner
un resserrement de la distribution des lations, seront analysées plus en en réseau et à coordonner leur offre
valeurs ajoutées (figure 6). Avec la nou- détail, conduisant sans doute à res- de formation, le taux d’accès de la
velle méthodologie, les établissements se treindre la diffusion. Pour résoudre seconde au baccalauréat risque de
concentrent beaucoup plus sur les valeurs ce problème, on pourrait envisager perdre un peu plus de son intérêt.
autour de 0, alors qu’avec l’ancienne, les de calculer les IVAL sur plusieurs Il convient donc de réfléchir à des
valeurs en deçà de - 5 ou au-dessus de années, ce qui permettrait d’avoir alternatives. Un indicateur portant sur
5 sont beaucoup plus nombreuses. Cela des modèles plus robustes et des l’accès de la seconde au baccalauréat
montre que les établissements tendent valeurs par établissement plus quel que soit l’établissement serait
finalement à obtenir généralement des fiables. Cependant, cela complique une possibilité. Cependant, outre la
résultats assez conformes aux attentes que l’étude de l’évolution des IVAL et difficulté à suivre ces élèves mobiles,
suscitent les élèves accueillis. Cependant, oblige à travailler sur des bases de cela peut conduire à attribuer au lycée
certains établissements s’éloignent encore données très volumineuses. où l’élève se trouvait en seconde la
significativement de ces attentes. réussite ou l’échec du lycée où l’élève
Figure 6 – Répartition des valeurs ajoutées des établissements pour la série S
est allé ensuite.
avec l’ancienne et la nouvelle méthode En ce qui concerne les variables
utilisées dans le modèle, il est sans
250
Nouvelle méthode doute possible d’affiner celles qui
200
Ancienne méthode existent. La mesure du milieu social en
4 catégories est fortement contestée,
150 en particulier parce qu’elle regroupe
dans un groupe d’élèves « défavori-
100 sés » les enfants des ouvriers qualifiés
et des chômeurs, qui ont pourtant des
50 réussites très différentes, en faveur
des premiers. L’utilisation de l’âge en
0
-25 -23 -21 -19 -17 -15 -13 -11 -9 -7 -5 -3 -1 1 3 5 7 9 11 13 15 17 19 20 terminale peut aussi être discutée,
Valeurs ajoutées du fait qu’il dépend des pratiques de
Lecture : avec l’ancienne méthodologie des IVAL, 130 établissements avaient une valeur ajoutée de 0. Ils sont l’établissement en matière de redou-
170 avec la nouvelle méthodologie.
Champ : France métropolitaine + DOM, public et privé sous contrat. blement. Il serait sans doute plus
Sources : MENESR-DEPP - Fichiers du baccalauréat
pertinent d’utiliser l’âge à l’entrée en

Éducation & formations n° 85 [novembre 2014  ] 83


seconde. Enfin, l’amélioration des peuvent être cherchées dans la du milieu social de la population
taux d’appariements avec le fichier rationalisation des traitements accueillie dans un lycée. Un indi-
DNB permettra sans doute de tenir et l’enrichissement des données. cateur sur la mobilité résidentielle
compte des compétences à l’entrée L’appariement entre les sources permettrait sans doute de mieux
au lycée au niveau individuel et est compliqué par le fait qu’elles comprendre le taux d’accès, qui
plus seulement de façon agrégée. ne comportent pas d’identifiant dépend entre autres de l’ampleur
commun au niveau national. Une des déménagements.
Faire évoluer la mesure procédure de remontée de don-
de la réussite nées anonymisées avec un iden- C onclusion
tifiant technique a été mise en
Afin de mieux discriminer les place afin de résoudre ce pro- Ces perspectives d’améliora-
écarts entre les établissements les blème. L’objectif de cette procé- tion devront être examinées avec
plus performants, il serait envisa- dure est principalement de per- soin. En effet, ces évolutions
geable de travailler directement sur mettre des études sur le parcours demanderont un temps de déve-
les notes au baccalauréat. L’utilisation des élèves, à un niveau individuel. loppement plus ou moins long
d’une variable quantitative permet- Cet identifiant ne servira qu’aux suivant leur complexité. Mais
trait aussi d’améliorer la qualité de travaux d’études et de recherche surtout, des changements dans
la modélisation. Les taux de pas- et permettra d’améliorer les appa- les IVAL doivent être accompagnés
sage dans l’enseignement supérieur riements que nécessitent les IVAL. auprès des nombreux utilisateurs,
seraient aussi des indicateurs très Parmi les données que l’on peut parents d’élèves, gestionnaires en
pertinents pour étudier le fonctionne- être tenté de relier avec les IVAL, rectorat ou chefs d’établissement.
ment d’un établissement. la caractérisation de la commune Les IVAL sont des outils très inté-
ou du quartier à partir des données ressants pour les études et pour
Chercher de nouvelles du recensement de l’Insee est une le pilotage. L’amélioration de leur
sources piste intéressante. Le taux de chô- qualité est donc cruciale, comme
mage dans le voisinage peut four- l’est la possibilité d’étudier leur
D’autres pistes d’amélioration nir une mesure complémentaire évolution dans le temps.

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