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Le groupe verbal (GV)

Structures et propriétés

Le groupe verbal est le second constituant obligatoire de la phrase canonique


française: P=GN+GV. Comme tout syntagme, le GV est constitué autour d’un
noyau, le verbe (ou membre verbal) dont dépendent d’autres éléments, en
particulier son complément. Un GV peut être représenté par le sous-arbre :

GV

V Compl.

mange du pain

Stuctures du GV

Le GV peut se réduire à un seul membre verbal: Pierre dort/mange/écrit.

La structure du GV est conditionnée par les traits syntactico-sémantiques du


membre verbal. Outre le verbe, le GV admet parmi ses constituants :

1. Le GN (dans toutes ses formes): Marie invite/accueille des amis. Marie


invite/accueille les amis avec lesquels elle a passé les vacances.
2. Les équivalents du GN (les équivalents pronominaux): Marie les
invite/accueille. Marie invite/accueille ceux-ci.
3. L’adjectif ou le Gadj. : Marie est gaie. Marie est fière de ses amis.
4. Le groupe prépositionnel (Gprép.): Marie obéit à ses parents. Marie leur
obéit.
5. L’adverbe ou le G. adv. : Marie va bien. J’ai actionné conformément à mes
principes.
Le tableau1 ci-desous présente les principales constructions du verbe dans la phrase
de base (tr.=transitive ; int.=intransitive ;dir.=directe ; ind.=indirecte ;
adc.=transitive à deux compléments ; atc.=trensitive à trois compléments ;
attr.=attributive).

1
M. Riegel, J.Ch. Pellat, R. Rioul, Grammaire méthodique du français, PUF, p. 219.
1
J’ai lu le livre de ma sœur.

GV Construction Complémentation
Il reviendra. Int. Pas de complément
+GN Il écrit une lettre. Tr.dir. Compl. direct
+GP. Elle ressemble à sa Tr.ind. Compl. indirect
mère.

+GN+GP Adc. Compl. direct, Compl. indirect


Il donne le livre à son ami.
+ GP1+GP2 Adc. Compl. indirect, Compl. indirect
Il a parlé de ses recherches
devant l’auditoire.
GN1+ GP1+ GN2 / GP2 Compl. direct+ Compl.
La ville lui a acheté son indirect+Compl. dir.
terrain avec 20000 E Atc.
Il a traduit ce livre du Compl. direct+ Compl.
français en roumain. indirect+Compl. indir.

+ Attribut Attribut du sujet


La ville est calme. ATTR
+GN+Attribut Compl. direct + attribut du compl.
Il trouve cette explication
étrange.

Comme constituant de la phrase, le GV a les propriétés suivantes:


a) on peut lui substituer un seul élément: Il rend le contenu du récit./ Il raconte
le récit.
b) il peut être remplacé par une proforme verbale dans les interrogations
partielles: Que fait Pierre? → Il rend le contenu du récit.
c) il peut être déplacé : 1. (par le procédé de la dislocation): Rendre le contenu
du récit, il le fait bien. 2. (par le procédé d’extraction): Ce que fait Pierre en
ce moment, c’est rendre le contenu du récit.
d) Du point de vue communicatif, le GV assure souvent la fonction globale de
propos (rhème) par rapport au thème de l’énoncé: Marie lit une lettre.

2
Le verbe: définition notionnelle et formelle
Pour bien délimiter les classes lexico-grammaticales, il faut doubler la définition
notionnelle, qui assure une description sémantique des parties du discours, d’une
définition formelle qui prend en considération les propriétés morphologiques et
combinatoires.
Le verbe est l’unité lexico-grammaticale qui désigne le procès, qui comporte des
flexions de nombre, personne, temps et mode et qui, aux formes fléchies implique
la présence (en surface ou en profondeur) d’un nominal, centre ou substitut du GN
sujet, avec lequel il contracte une relation syntaxique par l’intermédiaire d’une co-
occurrence de marques2.
Le verbe: classes grammaticales et lexicales
Le statut morphosémantique du verbe intervient dans deux types de classements.
1. Un classement grammatical basé sur les oppositions de type [plein] / [abstrait]
ou présence absence du trait lexical «limite» qui divise les verbes en:
significatifs / copules
significatifs / auxiliaires ou semiauxiliaires
et les verbes significatifs à leur tour en perfectifs / imperfectifs.
2. À ce classement grammatical l’on ajoute un classement lexical qui concerne
uniquement les verbes significatifs et qui ne prend en compte que leurs traits
inhérents sémantiques: verbes d’action / de devenir / d’état.
Classes grammaticales significatif / copule
Le verbe significatif est celui qui a son plein sens lexical, sens qui évoque le procès
sous quelque aspect que ce soit.
Le verbe copule est un verbe d’état qui, à force de servir d’intermédiaire entre sujet
ou objet et attribut (en roumain, nume predicativ), a acquis progressivement un
sens plus ou moins général et une fonction de simple outil (auxiliaire) syntaxique,
se démarquant ainsi du verbe significatif.
On3 a relevé un premier groupe de dix verbes copulatifs (cinq paires de lexèmes)
qui peuvent être visualisés par le schéma suivant :
être avoir

rester devenir
demeurer se faire

sembler avoir l’air

2
T. Cristea, Grammaire structurale du français contemporain, EDP, Bucureşti, 1984, p.
3
M. Riegel, J.Ch. Pellat, R. Rioul, Grammaire méthodique du français, PUF.
3
paraître passer pour

Etre et avoir signifient l’état tout court.


Ses cheveux sont blonds. Elle a des cheveux blonds.
Sembler et paraître signifient l’état apparence.
Il semble heureux. Ses joues paraissent deux boutons de rose.
Avoir l’air et passer pour sont des synonymes partiels de sembler et de paraître.
Tu as l’air hagard aujourd’hui.
Il passe pour un bon peintre.
Rester et demeurer signifient la persistance dans un état.
Elle restait l’amie de Marie.
Elle demeura quelques instants là où elle était.
Devenir et se faire signifient le changement d’état ou le devenir.
Marie est devenue suspicieuse.
On se fait belle pour le bal.
Par la flèche horizontale, le schéma indique que rester et demeurer peuvent
acquérir dans certains contextes un sens lexical qui les fasse passer du côté de
devenir et de se faire:
L’ayant aperçue, il resta bouche bée.
La flèche verticale indique qu’il y a certains liens syntagmatiques entre les verbes
d’en haut et ceux d’en bas.
Remarques :
- Dans cette liste il y a cinq verbes qui ne s’emploient pas à l’état absolu. Ils
sont auxiliaires syntaxiques: être, avoir, sembler, devenir, avoir l’air dont les
deux derniers seulement sont des verbes copulatifs. Sembler, quand il n’est
pas copulatif, est semiauxiliaire modal: Il semble rêver.
- Sept verbes connaissent aussi un emploi significatif: être, avoir, paraitre,
rester, demeurer, se faire, passer pour, mais ils changent alors de sens et de
construction.
- Une douzaine de verbes: appeler, considérer (comme), croire, juger, laisser,
qualifier de, prendre pour, rendre, savoir, tenir pour, traiter de, trouver, sortir
peuvent avoir un emploi copulatif (sont occasionnellement attributifs) ou
non copulatif, mais ils changent alors la combinatoire syntaxique et la
signification :
emploi copulatif emploi non copulatif
Ses parents l’ont appelée Hélène. Ses parents l’ont appelé d’urgence.
On le considère comme coupable. On le considère attentivement.
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Je croyais ces gens heureux. Je croyais ces gens sur parole.
Ce geste nous a laissés bouche bée. Il nous a laissé un mot.
Tu l’as pris pour un autre. Tu l’as pris dans tes bras.
Je le trouve changé. Je l’ai trouvé dans un café.

Comme verbes significatifs, ils peuvent souvent se passer de déterminant et


s’employer à l’état absolu (ils appellent, je crois, laisse, tu sais, ça tient, j’ai
trouvé). Comme verbes copulatifs, ils ne peuvent pas se dispenser de l’objet
direct ou de l’attribut.
Significatif / auxiliaire
Quand le processus d’abstraction sémantique est poussé jusqu’au bout et le verbe
est complètement vidé de son sens lexical, on a affaire à un auxiliaire (outil)
morphologique qui sert à la formation des temps composés (être, avoir) ou de la
voix passive (être). Ces verbes se caractérisent par un certain nombre de propriétés
formelles:
- être et avoir ont le statut d’auxiliaires temporels
- ni être, ni avoir n’ont de forme passive
- être et avoir servent l’un et l’autre d’auxiliaires temporels aux mêmes
verbes, selon que ceux-ci sont ou non pronominaux: Il a réveillé sa sœur. Il
s’est réveillé. Il a acheté un pantalon. Il s’est acheté un pantalon.
- ils ont le même effectif des formes et les mêmes constructions; dans un cas
comme dans l’autre, l’accord du participe passé se fait chez les verbes
transitifs (actifs ou pronominaux) avec l’objet direct qui précède (Elle l’a
vue dans la glace. Elle s’est vue dans la glace.).
- Cette symétrie d’emploi entre les deux auxiliaires diffère fortement de leurs
comportement syntaxique à l’état libre: hors de la fonction d’auxiliaire
morphologique, la construction de être est intransitive (qu’il s’agisse de la
copule ou du verbe significatif), tandis que la construction de avoir est
transitive (la preuve en sont les tests: de pronominalisation, de relativisation,
d’interrogation, de l’objet direct / mais non celui de passivisation).
Il a une maison. – Il l’a. La maison qu’il a me plait. Es-ce qu’il a une
maison? Oui, il l’a déjà.
- une autre caractéristique des deux verbes est la cohésion de leurs parties
constituantes dans les formes composées. Le français contemporain n’admet
entre les auxiliaires être et avoir et les participes passés auxquels ils sont liés
que la négation (pas, point, guère, jamais, rien) ou certains adverbes modaux

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(certainement, peut-être, sans doute, sûrement, simplement, évidemment,
probablement, etc.)

Conclusion partielle

La phrase binaire et la phrase ternaire

En fonction de la présence dans le GV d’un verbe de type avoir ou de type être,


on distingue deux catégories de phrases : la phrase binaire et la phrase ternaire.

La phrase binaire se caractérise par la présence, dans sa structure, d’un verbe


de type avoir, c’est-à-dire un verbe capable de former à lui seul la prédication.

À l’intérieur de cette classe de verbes on distingue :

-les verbes transitifs qui se construisent avec un complément d’objet direct

(COD) ou avec un complément d’objet indirect, explicite ou implicite (suivant


le contexte) : La fille mange. (du pain). (COD) / La fille obéit à sa mère.
P→GN1+V [+trans. / - dir.] +CO2

- les verbes intransitifs, définis par leur incapacité de se construire avec un


complément d’objet : La fille dort/ marche. P→GN1+V [-trans.]

Les deux constituants obligatoires de la phrase binaire, sujet+verbe prédicat,


contractent entre eux une relation d’interdépendance, rendue sur le plan
morphologique par une continuité de marques (de nombre, de personne et dans
certains cas de genre) que le premier constituant, le sujet, impose au second
constituant, le prédicat. Ce fait linguistique est nommé accord.

La phrase ternaire comprend un verbe de type être, un verbe incapable de


former à lui seul la prédication. Un troisième constituant s’impose : le prédicatif
(attribut), défini par sa double fonction :

a. déterminant auprès d’un verbe de type être (verbe copule) avec lequel il
réalise la prédication ;
b. déterminant (attribut) auprès du sujet qu’il caractérise.

Dans ce type de phrase à trois constituants sujet+vb.copule+prédicatif , où


chacun des constituants contracte avec les deux autres des relations
d’interdépendance , l’accord est dicté également par le sujet qui communique

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au verbe copule les marques de nombre et de personne et au prédicatif les
marques de genre et de nombre :

Le jeune homme est beau. Il est beau.

La jeune fille est belle. Ils sont beaux.

Le système verbal français est constitué de deux sous-systèmes :


a) le sous-système fondamental (il dessine, il a dessiné, il dessinera etc.) ;
b) Le sous-système périphrastique (de suppléance) (il est en train de dessiner, il va
dessiner, il vient de dessiner etc.)
Le sous-système fondamental est constitué de formes verbales organisées en
modes et temps. Les modes sont organisés en deux catégories, en fonction de leur
combinaison avec la catégorie grammaticale de la personne :
modes personnels (caractérisés par une organisation différenciée selon l’indication
temporelle et aspectuelle). L’indicatif étant le mode le plus analytique, ce mode
connaît une opposition tripartite : passé-présent-futur;
modes non personnels: l’infinitif, le participe, le gérondif.
Le sous-système fondamental oppose les temps simples aux temps composés
(avoir / être +participe passé).
L’organisation du sous –système verbal fondamental du français

Modes Temps
simples composés surcomposés
Modes personnels Indicatif Présent Passé composé Passé surcomposé
Imparfait Plus-que-parfait PQP surcomposé
Passé simple Passé antérieur Futur surcomposé
Futur simple Futur antérieur

Conditionnel Présent Passé Passé surcomposé


Passé deuxième
forme
Subjonctif Présent Passé (parfait) Passé surcomposé
parfait Plus-que-parfait

Impératif présent Passé (parfait)


Modes non Infinitif Présent parfait parfait
personnels surcomposé

Gérondif Présent Passé (parfait) parfait


surcomposé

Participe Présent ou passé

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Les formes surcomposées se conjuguent avec l’auxiliaire et deux participes passés
(de l’auxiliaire et du verbe à conjuguer). Elles expriment l’antériorité par rapport à
une forme composée : Quand il avait eu repris le souffle, il avait parlé. Quand il
aura eu compris la situation, il sera sorti.

Exercices :

A. Dans les phrases données, soulignez les GV er marquez leurs parties


constitutives. (Pour aide, suivez le tableau page 2 !)
1. Il interdit l’entrée aux curieux.
2. Maman a hérité ce meuble de sa grand-mère paternelle.
3. Il a tout perdu, mais n’a rien dit.
4. Ma fille joue avec la poupée et mon fils joue à cache-cache avec ses copains.
5. Le journal lumineux annonçait à intervalles réguliers la nouvelle année.
6. […] parfois elle tirait de sa ceinture un minuscule miroir à glissant couvercle
d’argent. (A. Gide)
7. Il a légué toute sa fortune à ses enfants.
8. Je lui trouve un drôle de goût.
9. Pierre a traduit mon livre de français en alsacien.
10.Jean nous a donné l’autorisation de partir.

B. Les constructions attributives du verbe obéissent aux règles suivantes :


1. GV→V+X (dont le verbe introducteur est le verbe être ou un verbe d’état
susceptible de lui être substitué comme devenir, rester sembler, etc (voir
tableau page 3) et X est l’attribut du sujet (a.s.), deuxième constituant du GV
où X exprime une propriété/état du sujet. Pierre est gentil/ en colère. Pierre
est devenu/restera/demeurera/a semblé/paraîtra/furieux.
Pierre est sorti furieux de chez soi=Pierre était furieux. (où le verbe sortir
est occasionnellement attributif).
2. GV→V+N1+X où N1 représente le complément d’objet direct et X un
troisième constituant nommé attribut du complément d’objet (a.c.o.)
Je trouve Pierre gentil.
Tenant compte des considérations ci-dessus, analyser les GV et leurs parties
constitutives dans les phrases suivantes et marquez les fonctions de l’attribut.
Rangez dans deux colonnes les a.s et les a.c.o.
1. Pierre est commissaire aux comptes.
2. Il est entreprenant.
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3. On naît cuisinier, on devient rôtisseur (Brillat-Savarin).
4. Partir, c’est mourir un peu.
5. Ils sont plusieurs.
6. J’ai trouvé le déjeuner appétissant.
7. Le voleur n’était pas qui tu croyais.
8. Aujourd’hui il est de bonne humeur.
9. Si perspicace que soit cet homme, il ne trouvera pas la solution.
10.Oh, Triste, triste était mon âme. (Verlaine)
11.Je pense partir le plus vite possible.
12.Il a faim et il a peur. L’hiver s’annonce froid.
13.Vous vous prenez pour des gens intelligents.
14.Ce couturier a coupé mon veston trop court.
15.Giton a le teint frais, le visage plein et les joues pendantes, l’œil fixe et
assuré, les épaules larges, l’estomac haut, la démarche assurée et délibérée.
(La Bruyère ), in Riegel, Pellat, Rioul, 1997
16.Elle a l’air heureuse. La voici enfin libre.

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