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Module 4 – Séquence 1 : Introduction

Maintenant, nous allons aborder la dernière étape d’une séance de simulation : le débriefing.
Il est important de savoir qu’un débriefing ça ne s’improvise pas !
De nombreuses études se sont penchées sur cette étape clé afin de maximiser l’efficacité de
la simulation. Bien que différents types et structures de débriefings existent, nous vous
présenterons une technique de débriefing reconnue dans la littérature : la méthode PEARLS.
Nous vous apprendrons aussi à débriefer avec bon jugement et à utiliser l’Advocacy-Inquiry.

Mais qu'est-ce qu'un débriefing ?


Voici une définition du debriefing donnée par la Ligue nationale américaine des Infirmiers et
le Centre des Ressources innovantes en Simulation. Le débriefing peut être défini comme "
une activité qui fait suite à une expérience de simulation et qui est dirigée par un facilitateur.
Les participants sont encouragés à réfléchir et à faire part de leurs commentaires sur leurs
performances tout en discutant de divers aspects du déroulement de la simulation. Ils sont
encouragés à explorer leurs émotions et à se questionner, à réfléchir et à partager leurs
commentaires. Le but du débriefing est d'évoluer vers une assimilation et une intégration pour
transférer l'apprentissage sur le terrain dans des situations ultérieures ".
Le debriefing n’est pas un cours magistral exposant uniquement des aspects théoriques. Il a
pour but de discuter les objectifs d’apprentissage, de réfléchir sur les pratiques, de renforcer
les bonnes pratiques, d’apprendre des erreurs et de créer un esprit d’équipe. Le but ultime
étant de renforcer les compétences et les performances.

Et en pratique, comment procède-t-on ?


Le debriefing doit avoir lieu dans une pièce différente de celle de la simulation, mais si possible
pas trop éloignée. On risque en effet une perte d’informations si les participants commencent
à débriefer entre eux et une déperdition du ressenti à chaud. L’environnement doit être
sécurisant pour les apprenants afin qu’ils puissent s’exprimer librement.
La durée d’un débriefing n’est pas fixée par des règles spécifiques mais elle doit être adaptée
à la longueur de la séance de simulation et aux objectifs préalablement définis. Il existe une
grande variété de pratiques mais rien n’est encore prouvé scientifiquement.
La ou les personnes qui vont réaliser le débriefing sont des facilitateurs. Leur rôle est très
important, n’importe qui ne peut donc pas débriefer sans une formation préalable. Ils doivent
avoir les compétences pour guider, supporter et assister les apprenants. Il n’est pas obligatoire
d’être un expert dans le domaine médical étudié, mais dans ce cas, il faut être un expert en
débriefing et avant tout d’être capable d’une écoute authentique et de curiosité.

Il faut également faire la différence entre un débriefing et un feedback. Le feedback permet


de donner une information de manière unidirectionnelle. Que l’information provienne d’une
discussion avec un facilitateur, un participant ou même provienne directement du simulateur.
A la différence du feedback, le débriefing permet les échanges entre tous les intervenants.

Concernant le débriefing, retenons donc :


▪ Qu’il n’existe pas de preuve qu’une méthode soit meilleure qu’une autre.
▪ Que chaque formateur fait un choix personnel pour la méthode avec laquelle il est le
plus à l’aise.
▪ Le debriefing doit se faire dans une approche bienveillante, qui permet de favoriser le
dialogue.
▪ Il doit être réalisé de manière structurée.

Nous allons donc à présent vous présenter une technique de débriefing appelé la méthode
PEARLS.
Module 4 – Séquence 2 : La méthode PEARLS

Comme nous l’avons introduit dans la séquence précédente, la méthode PEARLS est basée sur
la réflexivité, c’est-à-dire qu’elle permet de réfléchir sur soi-même et sur ses actions et cela
dans un but d’amélioration. Elle décrit différentes phases, mais comme une image vaut plus
que mille mots, regardons ensemble cet exemple pour mieux comprendre comment se
déroule un débriefing.

Instructeur : Voilà, maintenant que la simulation est terminée, je vous propose de prendre
une vingtaine de minutes pour débriefer tout ce qui vient de se passer.
Tout d'abord, j'aimerais commencer par recueillir un peu votre ressenti, votre sentiment
maintenant, au terme de la simulation.
Léa, on commence par toi ?
Participant 1 : Moi, ça va, je me sens bien, je me sens assez détendue, pour moi, c'est bon.

Arrêtons-nous ici. Cette première étape consiste à introduire le débriefing et à créer un cadre
sécuritaire propice à l'apprentissage. Ce cadre sécuritaire reprend notamment les principes
de l'assomption de base, introduits lors du prébriefing.

La seconde étape correspond au recueil des émotions. Cette étape a pour but d'explorer les
différentes émotions découlant de la simulation. Elle permet aussi d'identifier les participants
pour lesquels le débriefing pourrait être difficile.
Instructeur : Donc maintenant, pour être sûrs que nous soyons tous sur la même longueur
d'onde avant de commencer la phase d'analyse, Jonathan, est-ce que tu pourrais nous dire
face à quel diagnostic nous nous trouvions dans cette simulation ?
Participant 2: La patiente a présenté un arrêt cardiaque, elle avait une hyperkaliémie.

Formateur : Est-ce que tout le monde est d'accord avec ce diagnostic ?


Participant 1 : Oui.

Afin de vérifier la compréhension de la situation de tous les participants, l'un des instructeurs
demande à un participant de résumer rapidement les faits. Les autres participants doivent
ensuite confirmer ou infirmer ce résumé. Cette technique permet de s'assurer rapidement
que tous les participants sont sur la même longueur d'onde et d'éviter de se lancer dans
l'analyse sans un modèle mental commun (Eppich et Cheng, 2015).

Formateur : Ici nous allons débriefer deux objectifs non-techniques pour ce scénario. Je
propose le leadership et la communication entre vous. Est-ce que vous êtes d'accord avec ces
deux objectifs ?
Participant 1 : Oui.
Participant 2 : Oui.
Formateur : Je vous propose de commencer par le leardership.
Participant 1: OK.

Une fois la phase descriptive terminée les instructeurs rappellent les objectifs d'apprentissage
et énoncent les points sur lesquels ils vont s'attarder. Ces points sont relatifs aux objectifs
spécifiques au scénario, mais peuvent aussi être des faits nouveaux, soulevés par les
instructeurs durant la séance de simulation. Il est préférable que les instructeurs se mettent
d'accord sur ces points avant le début du débriefing.
Ce procédé permet de se focaliser davantage sur les points pertinents, et de s'assurer que les
objectifs annoncés soient bien débriefés. Il peut être intéressant à ce stade de valider ces
objectifs avec les participants, et de les interroger sur d'éventuels objectifs supplémentaires.
La méthode PEARLS propose trois méthodes d'analyse.
La première utilise l'auto-évaluation des étudiants. Ce sont les étudiants eux-mêmes qui
s'expriment directement sur le sujet.
La deuxième méthode est un feedback directif. Ici, l'instructeur prend la parole et dit ce qui a
été et ce qui n'a pas été.
La troisième méthode utilise une discussion facilitée. Par exemple en utilisant la technique de
l'Advocacy-Inquiry. Cette technique sera présentée un peu plus loin dans ce module.

Instructeur: Après avoir débriefé ces deux grands objectifs, est-ce qu'il y a des éléments que
vous voudriez ajouter, ou des points que l'on n'a pas abordés et que vous souhaiteriez
analyser ?
Participant 2 : Non, pas vraiment.
Instructeur : Nadège non plus ? OK.
Pour synthétiser, on a vu l'importance des techniques de communication notamment le SBAR
lorsqu'on appelle à l'aide, mais aussi la boucle fermée. On a aussi jugé l'importance du leader,
et notamment le fait de nommer un leader lorsque la situation est peu claire et lorsque aucun
leader ne se désigne. Ce sont les deux grands objectifs dont on a discuté.
Instructeur : Et donc pour clôturer cette séance quel serait votre Take Home Message, donc
qu'est-ce que vous allez reprendre de cette séance dans votre pratique quotidienne ?

A la fin de l'analyse, une synthèse est réalisée par les instructeurs. Ces derniers demandent
également si des questions subsistent.

Avant le Take Home Message, les instructeurs reviennent vers les participants pour lesquels
les émotions n'étaient pas positives. Cette démarche est réalisée pour s'assurer que les
émotions négatives aient été dissipées par le débriefing.
Ensuite, un dernier tour et réalisé pour savoir quel point les participants garderont pour leur
pratique future, ou ce qu'ils emmèneront sur leur lieu de travail.

La séance se clôture par un remerciement des instructeurs.


Instructeur : Voilà, parfait ! Merci à tous pour ces échanges. Je propose que l'on fasse dix
minutes de pause, et après on commencera une nouvelle séance de simulation, si vous êtes
d'accord.
Participant 1 : OK.

Participant 2 : OK, ça marche.


Instructeur : Parfait, merci.

Bibliographie
Tarea O, Sample F, Phrases E, Mettre E. L ’outil PEARLS de débriefing en soins de santé. 2017.
Bajaj K, Meguerdichian M, Thoma B, Huang S, Eppich W, Cheng A. The PEARLS Healthcare
Debriefing Tool. Vol. 93, Academic Medicine. Lippincott Williams and Wilkins; 2018. p. 336.
Eppich W, Cheng A. Promoting excellence and reflective learning in simulation (PEARLS):
Development and rationale for a blended approach to health care simulation debriefing. Simul
Healthc. 2015;10(2):106–15.
Module 4 – Séquence 3 : Débriefing avec bon jugement

Dans cette troisième séquence, nous allons aborder le processus d’apprentissage durant le
débriefing, et plus particulièrement dans les cas de débriefings avec discussion facilitée. Dans
ces conditions, la méthode utilisée est centrée sur l’apprenant et non sur l’instructeur.
En effet, d’autres techniques de débriefing sont centrées sur l’instructeur. C’est par exemple
le cas du feedback directif, qui s’apparente plus à un apprentissage de l’instructeur vers
l’apprenant plutôt qu’à une discussion.

Penchons-nous maintenant sur l’importance du debriefing dans le processus d’apprentissage.


Prenons par exemple le modèle du cycle d'apprentissage expérientiel. Dans ce cycle, une
expérience concrète est à la base d’un processus de réflexion. Les évènements sont ensuite
confrontés avec le savoir préalable, c’est la phase de compréhension. Après cela, on peut
étendre les nouvelles connaissances acquises à de nouvelles expériences concrètes, c’est la
phase d’extension.
Dans le cas de la simulation médicale, l’expérience concrète est la séance de simulation vécue,
et la phase de compréhension est le débriefing qui permet l’acquisition de nouvelles
connaissances. Le débriefing est donc essentiel à l’apprentissage.
Voyons maintenant un concept important à comprendre pour mener un débriefing
efficacement. Il s’agit du concept des "frames" ou "modèles mentaux".
Ces derniers comprennent les connaissances, les hypothèses ou encore les sentiments de
l’apprenant. Dans ce modèle, on comprend que le débriefing ne doit pas s’intéresser qu’aux
résultats obtenus par les apprenants lors de la séance de simulation. En effet, ces résultats
sont le produit des actions qui ont été réalisées, et ces actions sont l’aboutissement des
frames ou modèles mentaux des apprenants.
Même une erreur lors du scénario peut être le résultat de pensées rationnelles. En effet, à un
moment donné, dans une certaine situation, l’action réalisée semblait tout à fait cohérente
avec le schéma de pensée de l’apprenant. C’est donc le rôle du débriefeur, lors du débriefing,
d’essayer de comprendre ces frames, ou modèles mentaux. Il faut donc guider l’apprenant à
identifier ces frames, en posant des questions pour qu’il nous révèle ce qui l’a conduit à faire
telle ou telle chose. Cela permettra à l’ensemble du groupe de comprendre l’impact de ces
frames sur les actions posées. Plus important encore, cela permettra de créer de nouvelles
frames.
Ce modèle s’appelle la pratique réflexive et est à la base du débriefing avec "bon jugement".
En effet, cette approche de bon jugement comprend 3 éléments.
Le premier est le modèle de pratique réflexive, que nous venons de présenter.
Ensuite, le débriefeur doit faire preuve de curiosité envers les apprenants. Il doit investiguer
leurs modèles mentaux.
Et finalement, il faut utiliser une technique conversationnelle qui permet de mettre l’opinion
de l’instructeur et les schémas de pensée de l’apprenant en lumière.

Il s’agit de l’Advocacy-Inquiry, que l’on pourrait traduire par "plaidoyer-interrogation".


L’advocacy permet d’apporter une observation objective d’une action qui a amené un résultat
observé ou entendu. Alors, l’instructeur donnera son appréciation personnelle, son jugement,
quant à cette action, selon son propre modèle mental, et il interrogera alors les participants
en se montrant curieux des éléments qui ont motivé telle ou telle action.
Concrètement, comment construire un Advocacy-Inquiry ? Il existe un acronyme permettant
de structurer son Advocacy-Inquiry : le PAAIL.

Décomposons chaque lettre.


Premièrement le P pour Preview ou contexte : il s’agit de nommer le sujet ou le thème que
l’on veut analyser. Par exemple : « J’aimerais discuter de… ».
Ensuite, le A pour Advocacy 1 ou plaidoyer. Cette étape consiste à préciser les actions sur
bases de faits concrets. Par exemple : « J’ai vu que, j’ai entendu que...»
Le deuxième A, Advocacy 2, consiste à se positionner quant au fait observé ou entendu. En
effet, l’Advocacy-Inquiry fait partie du débriefing avec bon jugement. Un jugement est donc
émis par le débriefeur. Par exemple : « Je pense, je crains, je suis surpris…»
Par après vient le I d’Inquiry ou investigation : le débriefeur va chercher à comprendre les
actions posées, par une question ouverte. Par exemple : « Je me demande pour quelles
raisons... ? Comment perçois-tu ... ? »
Enfin, le L de Listen, ou écouter. Il correspond au moment d’écoute active du débriefeur.
Par exemple : « J’aimerais parler de la communication entre vous (preview). J’ai perçu une
difficulté de communication lors de la dégradation hémodynamique du patient (advocacy 1).
J’ai eu le sentiment que cette dégradation vous a déstabilisé et que cela aurait pu être
dangereux pour le patient (advocacy 2). Comment l’avez-vous vécu ? (inquiry) »
Ces cinq phases sont à répéter pour chaque Advocacy-Inquiry à réaliser. Elles permettent
également de passer d’un objectif à l’autre de manière fluide.
Cette technique permet de mener un débriefing transparent et bienveillant grâce à la prise de
position et une véritable curiosité de la part du débriefeur.

Bibliographie

Kolb D. Experiential Learning Experience as the Source of Learning and Development. .


Englewood Cliffs, NJ Prentice Hall. 1984;
Rudolph JW, Simon R, Dufresne RL, Raemer DB. There’s no such thing as "nonjudgmental"
debriefing: a theory and method for debriefing with good judgment. Simul Healthc.
2006;1(1):49–55.
Module 4 – Séquence 4 : Conclusion

Au terme de ce module, nous pouvons retenir que :

Le débriefing ne s’improvise pas ! De l’environnement à la structure, en passant par la


formulation employée par le débriefeur, il est nécessaire de réfléchir à tous ces aspects pour
garantir un débriefing de qualité.

Il existe trois grands processus d’analyse qui peuvent être utilisés durant le débriefing : l’auto-
évaluation par les étudiants, le feedback directif ou encore la discussion facilitée. Cette
dernière technique permet de de se centrer sur l’apprenant et non sur l’instructeur.

Ensuite, nous avons parlé de l’Advocacy-Inquiry, qui est une technique clé d’observation
objective. Elle permet d’envisager le modèle mental de l’apprenant en le confrontant à celui
de l’instructeur, de manière bienveillante.

Enfin, retenons que la sécurité psychologique instaurée lors du pré-briefing reste un élément
primordial lors du débriefing.

Si vous êtes curieux et souhaitez en apprendre davantage sur le débriefing, nous vous invitons
à visionner la vidéo facultative de l’interview de Demian Szyld, co-directeur du centre de
simulation médicale de Boston. Durant cette interview, il aborde la formation des débriefeurs
au débriefing, mais aussi le débriefing de situations cliniques sur le terrain.

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