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L
ors de la conception de programmes de formation, les enseignants ont coutume d’opposer
cours général en français langue étrangère et cours sur objectifs spécifiques (FOS). Cette
opposition de définition de contenus a été depuis longtemps mise en cause, en particulier par
l’article de Louis Porcher (1975), « Monsieur Thibaut et le Bec Bunsen ». Je vous propose de
réinterroger la notion de « FOS » en faisant d’abord le point à partir d’éléments historiques tirés de
la didactique du FLE et de l’anglais langue étrangère. Je me concentrerai ensuite de manière plus
détaillée sur les apports des travaux du Conseil de l’Europe, qui ont, dès les années 70, largement
influencé la conception de programme d’enseignement / apprentissage en proposant d’abord une
approche systémique avec l’analyse de besoins opérationnels (Richterich, 1975) comme clé de
voûte, et aujourd’hui une approche actionnelle basée sur les compétences cognitives et sociales. Le
Cadre européen apporte ainsi de nouveaux éléments pour la définition des politiques éducatives, de
plans de formation et la conception de nouveaux programmes. Ce qui est au cœur de cette réflexion
me semble être la notion même d’activité d’apprentissage et non pas la spécification des contenus.
Les TIC, et en particulier le knowledge management et les communautés numériques
professionnelles, me permettront de donner quelques pistes sur le potentiel d’internet pour
développer une approche actionnelle dans le cadre de la société de l’information et de la
communication.
Mots clés : français fondamental ; langue de spécialité ; français sur objectifs spécifiques ; niveau-
seuil ; conception de programme ; compétences ; Cadre européen ; compétences en TIC ;
communauté d’apprentissage
Key words : français fondamental ; language for specialists ; language for specific purposes ;
threshold level ; syllabus design ; competences ; European framework ; ICT competences ; learning
community
Ce simple rappel montre qu’il est important d’envisager la dynamique plutôt que de figer la
réflexion autour d’une idéalisation du FOS. Basic English et Français fondamental constituent les
fondements de ce qui va devenir le FOS. Les idées de départ, qui remontent donc à plus de 50
années, restent très vivaces dans certains lieux de la formation aux adultes. L’idée du Basic
English est de proposer, pour un enseignement efficace et rapide, une base simplifiée de 850
mots. Ogden estimait à cette époque que l’on pouvait ainsi apprendre cet anglais simplifié en 7
semaines ! La démarche du Français fondamental est différente car plus scientifique. Il s’agissait
grâce à des enquêtes de terrain de déterminer un inventaire minimal de quelques 1500 unités
statistiquement valides. C’est à cette époque que l’on a imaginé une démarche de conception de
programme de formation fondée sur une gradation stricte des contenus linguistiques, du plus
simple au plus complexe, à partir de ce qu’on estimait reorésenter le noyau dur de la langue. Le
fameux Globish est l’héritier de ces principes, on propose d’apprendre en un temps record un
anglais international épuré et a-culturel.
D’après Lehman, la notion de « langue de spécialité » apparaît dans les années 60, dans la
mouvance du Français Fondamental, avec la conception de cursus suivant la progression
suivante :
- niveau 1, général, FF1 ;
- niveau 2, vocabulaire général d’orientation scientifique et technique (VGOST), FF2 ;
- niveau perfectionnement, vocabulaire spécialisé.
La langue de spécialité met l’accent, quel que soit le niveau, sur des spécificités lexicales et sur
une sélection syntaxique que l’on va strictement graduer. On peut schématiser cette première
étape dans la conception de programme de formation de la manière suivante :
Corpus
linguistique Sélection des
spécialisé contenus
enquête Gradation selon les
fréquence niveaux
Le Threshold Level / Niveau Seuil fournit une démarche qui prend comme point de départ la
définition des situations d’usage d’un public particulier (en l’occurrence les touristes) pour en
déduire des besoins opérationnels. Les méthodes d’analyse de besoins se développent autour de
l’idée d’enquêtes permettant de recueillir des données personnelles, sociologiques et
professionnelles pour la formation. Lehman définit l’enseignement fonctionnel de la manière
suivante : un public donné apprend DU français, et non pas LE français, POUR des usages
déterminés.
Le terme « français fonctionnel » aurait été lancé, fin des années 70, par le Ministère des affaires
étrangères pour étiqueter une politique plus pertinente de la formation en langues. L’expression
« enseignement fonctionnel du français » met l’accent sur
- les spécificités des publics,
- leurs besoins professionnels et sociaux,
- une pédagogie adéquate et une adaptation méthodologique, plus que sur les problèmes
de langue. Le schéma suivant synthétise cette nouvelle optique de conception de programmes de
formation :
Référentiel
Public : contextes fonctionnel Programme
communicatifs Situations de fonctionnel
Données communication Situations simulées
personnelles et Fonctions Approche
professionnelles langagières communicative
Prenons pour exemple les manuels de français des affaires : on peut constater la présence
systématique de ces principes :
• découpage par secteurs d’activité de l’entreprise,
• situations de communication cibles identifiées et associées à des actes de parole,
• jeux de rôles crédibles / simulations authentiques ;
• ressources : documents écrits authentiques (articles, internet, …), documents sonores ;
• le lexique spécialisé est intégré et travaillé à travers les ressources ;
• la progression grammaticale est intégrée et rattachée aux besoins de communication orale
/ écrite avec une approche inductive.
Il apparaît clairement que la distinction introduite par le Français fondamental entre la langue
générale et la langue de spécialité n’a plus de sens : par définition, tout public est spécifique.
Public : contexte
communicatif Référentiel de Programme actionnel
Données personnelles compétences Activités
et professionnelles Famille de situations collaboratives
Activités de communication Ressources
collaboratives Résolution de langagières et
Plurilinguisme/culturel problèmes plurilingues
Portfolio
Cette troisième évolution est clairement à venir et pour l’instant purement prospective. Mais, il
me semble que les mots-clés qui détermineront les changements d’optique sont : co-action,
collaboratif, portfolio, ressources plurilingues. À suivre donc.
Bibliographie
Cadre européen commun de référence pour les langues : apprendre, enseigner, évaluer, 2001,
Didier, Paris.
Coste, D. et al., 1976. Un Niveau-Seuil, Conseil de l’Europe, Strasbourg.
Hutchinson, T, Waters, A., 1987. English for specific purposes, Cambridge University Press.
Munby, J., 1978. Communicative syllabus design, Cambridge University Press.
Lehman, D., 1993. Objectifs spécifiques en langue étrangère, Hachette, Paris.
Porcher, L., 1976. « Monsieur Thibault et le bec bunsen », Études de linguistique appliquées, 23,
Didier Érudition, Paris, 6-13.
Richterich, R., 1985. Besoins langagiers et objectifs d’apprentissage, Hachette, Paris.
Springer, C., 1996. La didactique des langues face aux défis de la formation des adultes, Ophrys,
Gap.
Van Ek, J.A., 1975. The Threshold level, Conseil de l’Europe, Strasbourg.
Sitographie
CIEP (DELF/DALF) : http://www.ciep.fr/
CLES : http://webcles.u-strasbg.fr
Conseil de l’Europe (Manuel) : http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Manuel1_FR.asp
DCL : http://www.d-c-l.net
Spip : http://www.spip.net
Tuning project : http://www.tuning.unideusto.org/tuningeu/index.php
Wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Accueil
Webquest : http://www.webquest.org/