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OEUVRES COMPLETES S. JEAN CHRYSOSTOME TRADUCTION NOUVELLE PAR M. L'ABBE J. BAREILLE haunt bvaeraice de Tenlose a de Lye AUTEUR DE L'HISTOIRE DE SAINT THOMAS, D'EMILIA PAULA, ETC. COURONNEE PAR L'ACADEMIE FRANGAISE. TOME SEPTIEME PARIS LIBRAIRIE DE LOUIS VIVES, EDITEUR RUE DELAMBRE, 13 1869 OEUVRES COMPLETES DE ‘S. JEAN CHRYSOSTOME HOMELIES SUR SAINT MATTHIEU (sos) HOMELIE LXXI. 7 86 réunirent, deux, doctenr de a loi, Vinterrogea de la sorto pour le tenter ? Matire, quel est fe grand commandement dans Ia lol? » 4, L’Evangéliste indique de nouveau la rei- son pour laquelle il edt fallu se taire ; il signale en méme temps par Ja Y’'audace de ces hommes. Comment et pourquoi? Parce qu'ils provoquent Je Sauveur, quand les autres avaient été réduits au silence, Ils renouvellent done le combat, au lieu de s'abstenir comme ils l'auraient dd, et est un docteur de la Joi quills mettent en avant, non certes pour s‘instruire, mais pour dresser un piége ; ils demandent done a Jésus quel est le premier commandement. Ils savent bien que c'est celui-ci : « Vous aimerez le Seigneur votre Dieu ; » mais ils espérent qu'il donnera prise a leurs accusations en changeant eet ordre, dans le but de prouver qu'il est Diew Inj aussi ; de 1a cette insidieuse question. Que Npond le Christ? Leur montrant qu’il n'ignore pas leur mobile, quills sont venus parce qu'lls Wont aucune espéce de charité, poussés par Tou. vu. Yenvie, le coeur plein de fiel, il s‘exprime de la sorte : « Vous aimerez le Seigneur votre Dieu. ‘Voila le premier et le plus grand des comman- dements. Le second est semblable a celui-la : ‘Yous aimerez le prochain comme vous-méme.» Pourquoi, « semblable & celui-la? » Parce que Yun sert de préparation A l'autre, qui le cor- robore a son tour. En effet, « quiconque fait le mal hait la lumidre, se garde bien de se pré- senter au jour. » Joan., 11, 20, Il est éerit en- core : « L’insensé a dit dans son cceur : Il n'y a pas de Dieu. » Psalm. uu, 4. Qu’en est-il ré- sulté? « Ils se sont corrompus, ils sont devenus abominables dans leurs voies. » Psalm., x11, 2. 11 est dit ailleurs : « La racine de tous les maux, est avarice : entrainés par ses appétits, quel- ques-uns ont abandonné la foi.» I Tim., v1, 10. Le Sauveur dit aussi : « Celui qui m'aime gar- dera mes commandements.» Joan., xiv, 45. Et tous ses commandements se résument dans cette formule : « Vous simerez le Seigneur votre Dieu, et votre prochain comme vous- méme, » Or, Yamour de Dieu implique l'amour du prochain, puisqu'll a dit: « Si ta m’aimes, 4 Ea quoi lo ‘se2ond oom ‘mandement extsemblablo au proaier, 2 5 HOMELIES SUR SAINT MATTHIEU. Pierre, pais mes brebis;» Joan., xx1,46; et Yamour du prochain garantit observation de la loi. Crest done & bon droit qu'il ajoute : «En cela consistent 1a loi et les prophétes. » Aussi renouvelle-t-il en cette occasion ce dont i avait déja donné exemple. Interrogé sur le mode et essence de la résurrection, il en avait enseigné plus qu’on n’en demandait : on lui demande également ici quel est le premier commandement, et voila qu'il énonce de plus le second, qui n’est pas de beaucoup inférieur au premier, étant de méme nature et venant immédiatement aprés. Cette réponse fait en- tendre du reste quel est le mobile de 1a ques- tion, I'hostilité. « La charité n'est pas jalouse. » 1 Cor., x1, 4. Le Sauveur montre de plus par la quill respecte la loi et les prophétes. Mais comment se fait-il que Matthieu nous montre dans ce docteur qui Y'interroge I'intention de le tenter, tandis que Marc affirme le contraire? « Jésus voyant qu'il avait sagement répondu, lui dit : Vous n’étes pas éloigné du royaume de Dien. » Mare., x11, 34. Et ecpendant il n'y a pas la de divergence, mais plutdt un accord parfait.-Cet homme interroge d'abord dans le but de tenter; mais, la réponse ayant changé ses dispositions, il mérite I’éloge qui lui est donné. Ce n'est pas au début que le Christ le loua ; cest quand il eut déclaré que l'amour du prochain Yemportait sur les holocaustes, qu'il recueillit ce témoignage : « Vous n’étes pas Gloigné du royaume de Dieu. » Il s'était élevé éja, il avait foulé les premiers degrés de la vertu. Les observances légales, en effet, les sab- bats et tout le reste, n’avaient pas d’autre fin, Et méme avec cela V'éloge n’estil pas encore sans restriction et sans réserve, En disant : « Yous n’étes pas éloigné, » on déclare qu'il reste un intervalle & parcourir, c'est une exhor- tation a franchir cet espace, Si Jésus le loue de ce quila dit : «Hl n'y a qu'un Dien, il n’en est pas d’autre en dehors de lui, » Jbid., 32, n’en soyez pas étonné ; remarquez plutdt com- ment cette réponse s'accommode & l'opinion des auditeurs, Us ont beau dire du Christ mille choses in- dignes de sa gloire, ils n’oseront pas cependant affirmer d'une maniére absolue qu’il n'est pas Dieu. Pourquoi done le loue+t-il d’avoir dit quil n'est pas d’autre Dieu que le Pare. Ce n'est pas que le Christ avoue qu'il n’est pas lui- méme Dieu; non certes; mais le moment n’é- tait pas venu de manifester sa divinité : il laisse done Je Pharisien a ses premiéres idées, il le loue méme de posséder si bien les anciens dogmes, afin de mieux le disposer aux ensei- gnements de la nouvelle loi quand le temps sera venu de I'introduire. Cette sentence, d’ail- leurs : «Il n’y a qu'un Dieu, il n’en est pas dautre en dehors de lui, » ne doit s'entendre ni dans les livres de l’Ancien Testament, ni dans aucun autre, comme excluant le Fils; Yexclusion n'est donnée qu’aux idoles. Voila done le sens des éloges qui sont ici décernés, Aprés avoir répondu , Jésus interroge : « Que pensez-vous du Christ ? De qui est-il le fils? Ils Ini disent : De David. » Voyez aprés combien de miracles et de questions, aprés quelle démons- tration éclatante, et par la parole et par les ceuvres, de son accord avec le Pare, apris quelles louanges données & celui qui proclame Tunité de Diew, il interroge a son tour, afin qu’on ne puisse pas dire que, s'il a fait des mi- racles, il n’en est pas moins V'adversaire de la loi et Yennemi de Dieu. Crest done pour cela qu'il interroge ensuite ses auditeurs, voulant ainsi les conduire sans quiils s'en apergoivent & confesser qu’il est Dien. Il demande d’abord & ses disciples ce que les autres disent de Jui, puis ce qu’ils en disent eux-mémes. Il pro- céde autrement ici; car V'impudence de ses interlocuteurs leur aurait fait déclarer qu’il était un homme trompeur et pervers. Aussi ne eraint-il pas de provoquer Pexpression de leur sentiment. 2. Comme il est sur le point d'aller & la Pas- sion, il rappelle la prophétie qui le proclame hautement Seigneur, non sans but, ni seule- ment dans cclui d'en venir A ce témoignage, mais pour un motif que la raison comprend, Les ayant d'abord interrogés sans avoir obtenu deux une réponse vraie sur sa nature ct sa mission, puisqu'lls avaient déclaré qu'il n’était qu'un homme, il ne saurait mieux détruire cette

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