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Article de recherche

S
echeresse 2011 ; 22 : 49-56

Contraintes et perspectives des retenues


collinaires dans le Nord-Ouest algerien
Mohammed Habi1 sume
Re 
Boutkhill Morsli2 L’Alg erie est un pays aride a  semi-aride. Cette aridite est le r
esultat d’une pluviom etrie
faible et variable et d’une forte e vapotranspiration. Aussi, une strat egie de
1
Universit e de Tlemcen developpement et de gestion des ressources en eau a-t-elle d^ ue ^tre mise en place.
Faculte des sciences de l’ingenieur Les retenues collinaires sont un des moyens de mobilisation des eaux de surface et
Departement d’hydraulique l’utilisation de l’eau de ces retenues a  des fins agricoles est l’un de leurs objectifs
BP 230
13000 Tlemcen
prioritaires. L’Alg erie n’a connu de v eritable politique de construction de retenues
Algerie collinaires qu’apr es l’independance, lorsque le gouvernement a envisag e un grand
<moha.habi@gmx.de> programme de r ealisation de ce type d’am enagement. La premi ere retenue collinaire
2
INRF d’un programme e tatique date de 1976. Elle fut suivie par plusieurs autres
Institut national de la recherche foresti
ere r
ealisations. Les r esultats de cette op eration ont e te d ecevants en raison de
BP 88 Mansourah l’envasement rapide des retenues, d’utilisation inappropri ee des eaux stock ees et du
13 000 Tlemcen co^ ut relativement e leve de la construction des ouvrages. Aussi, une analyse des
Algerie facteurs biophysiques et socio- economiques en relation avec l’implantation des
<morsli_boutkhil@yahoo.fr> retenues collinaires, d’une part, et les modes de gestion, le degr e d’appropriation et
l’impact environnemental de ces retenues, d’autre part, a e t
e realis
ee sur un
chantillon d’une quarantaine de retenues de deux zones tr
e es repr esentatives du
Nord-Ouest alg erien : le bassin-versant de l’oued Tafna (Tlemcen) et celui de l’oued El
Hammam (Mascara), caract eris
es par un climat de type m editerraneen semi-aride
avec une irr egularit
e spatio-temporelle des pluies (300 a  600 mm) et un r egime
pluviom etrique de courte dur ee et de forte intensit e, un relief tr es escarp e, une
lithologie souvent tendre et un couvert v egetal tr
es d
egrad e.
Mots cl
es : Algerie, barrage, eau de surface, envasement, gestion de l’eau, lac collinaire.

Abstract
Constraints and perspectives of hillside restraints in North-Western Algeria
Algeria is a dry to semi-dry country. This dryness is the result of weak and variable
annual rainfall and very high evaporation. A strategy of development and
management of water resources was organized. Hill reservoirs represent a way of
mobilizing surface water .Use of their water for agricultural purposes is one of the most
important objectives of the different programs which have been implemented by the
Algerian Government since the seventies. The policy in Algeria has been that small
hydraulic works started only after independence, when the government envisaged a
large program of construction of hill reservoirs. The construction of the first small
dam of a state program dates back to 1976. It was followed by several other
achievements. The results of this operation were discouraging owing to fast silting of
the hill reservoirs, the low use of stored water and the relatively high cost of the
doi: 10.1684/sec.2011.0293

constructions. Therefore, to identify to the best of our knowledge the main questions
raised about these hill reservoirs and learn from this immense experimental field
available in Algeria, an analysis of a sample of forty reservoirs is being carried out on

Pour citer cet article : Habi M, Morsli B, 2011. Contraintes et perspectives des retenues collinaires
dans le Nord-Ouest alg erien. S
e cheresse 22 : 49-56. doi : 10.1684/sec.2011.0293
Tir  part : M. Habi
es a

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two very representative zones of the north-west of Algeria. The watersheds in question,
the Wadi Tafna (Tlemcen) and the Wadi El Hammam (Mascara), are characterized by
a semi-dry climate of the Mediterranean type with a space-timed irregularity of rain (300
to 600 mm annually) and a short duration mode of strong intensity, a very steep relief,
an often soft lithology and a very degraded vegetable landscape.
Key words: Algeria, dam, hill reservoir, silting, surface water, water management.

E
n Alg erie, l’eau constitue une l’ensemble du territoire alg erien, 1 237 la conception et la gestion des am ena-
contrainte majeure et un facteur petites retenues collinaires ont e t
e cons- gements futurs, une analyse d’un e chan-
limitant la production agricole. Les truites depuis les ann ees 1980. Les tillon d’une quarantaine de retenues a e t
e
causes sont essentiellement d’ordre natu- opinions restent partag ees sur la reussite r
ealisee sur deux zones repr esentatives
rel : irregularite et faiblesse des pluies le ou l’echec de ces am enagements qui du Nord-Ouest alg erien : le bassin-
plus souvent orageuses et e rosion du jouent ind eniablement un r^ ole important versant de l’oued Tafna (Tlemcen) et celui
sol. La raret e de l’eau est accentu ee par dans le d eveloppement rural. La plupart de l’oued El Hammam (Mascara). Ces
une demande sans cesse croissante. Les sont envas ees ou degrad ees. Cette situa- deux grands bassins-versants pr esentent
caract eristiques climatiques de l’Alg erie tion revient a  poser le probl eme de la un grand inter^
et r
egional et constituent un
ont impos e des l’
epoque coloniale une selection rigoureuse des sites potentiels ch^ ateau d’eau avec 9 barrages hydrau-
politique de construction de grands am enageables tout comme celui de liques (figure 1).
barrages r eservoirs. La periode postcolo- l’int
egration de l’am enagement dans Cette recherche a donc pour objectif,
niale a vu la poursuite de cette politique. son milieu. D’autres probl emes se sont l’analyse des facteurs biophysiques et
Les eaux provenant des pr ecipitations pos es quant a  la gestion, a l’entretien et socio-economiques en relation avec
annuelles, sont estim  12,4 milliards
ees a au degr e d’appropriation par les popu- l’implantation des retenues collinaires,
3
de m , qui pour la plupart (8 milliards de lations. Avec des objectifs plus clairs, un d’une part, et les modes de gestion et le
m3) vont se d everser dans la mer M edi- diagnostic plus d etaill
e sur les facteurs degr e d’appropriation des am enage-
terran ee (Kettab, 2001 ; CNES, 2000) . biophysiques et socio- economiques et ments, d’autre part.
Le Tell, avec 7 % de la superficie globale l’implication des riverains, ces am enage-
du pays, reçoit 88 % des e coulements ments auraient pu avoir un impact plus
superficiels (CNES, 2000). positif. Il est donc important de faire le

Etant donn e les conditions topographi- point sur l’
etat actuel de ces retenues ainsi Methodologie
ques qui ne permettent pas toujours que sur leurs impacts et leurs e volutions
l’implantation de grands barrages, futures. Cette analyse nous a amen es a  nous
l’Algerie a adopt e un vaste programme  cet effet, pour cerner au mieux
A poser certaines questions :
de construction de retenues collinaires l’essentiel des questions soulev ees par – quelle est la justification de ces
pour la mobilisation des ressources en ces retenues collinaires et pour tirer les retenues collinaires ? Y avait-il d’autres
eau afin de combler le d eficit existant. leçons de l’immense champ exp erimental solutions ? La reponse est en rapport
Cette solution, tr es int
eressante lorsque dont dispose l’Alg erie et afin d’am eliorer avec l’analyse de la problematique ;
les conditions biophysiques et socio-
conomiques le permettent, convient
e
d’ailleurs aussi bien aux zones arides
Alger
ou semi-arides caract eris
ees par des
 r N
ruissellements a egime torrentiel qu’aux Mostaganem
r
egions humides. Mais leur efficacit e et
Oran
leur durabilit e demeurent, cependant, né
e
35° 30' N

ra Algérie
tributaires de nombreuses conditions qui it er
 la participation éd Côtiers
vont du choix du site a e rM Centre
des acteurs locaux. M
Mascara
Dans le Nord-Ouest alg erien, semi-aride, Côtiers
le probl eme du manque d’eau ne cesse Ouest oranais
35° 00' N

de s’amplifier et de retenir l’attention des


Bassin-versant qued EI Hammam
planificateurs et des am enagistes. Dans Tlemcen
cette region qui a de tout temps souffert du
manque d’eau, toutes les possibilit es de
34° 30' N

construction de grands barrages sont Bassin-versant Tafııa


Chott Ech Chergui
puis
e ees et la construction de petites
retenues a pris le pas sur celle des grands 0 30km
barrages. Cette zone a b enefici
e d’un
2° 00' W 1° 00' W 0° 00
programme de construction de 253 rete-
nues collinaires lors du plan quinquennal Retenues envasées Retenues emportées Barrage Agglomération principale
1985-1989. Ces derni eres ann ees ont vu en 1 à 4 ans après une année

la poursuite de cette politique, compte Retenues envasées Retenues fonctionnelles Réseau hydrographique Zone d'étude
tenu des besoins croissants en eau et des en 5 à 8 ans
secheresses fr equentes. Les objectifs sont
la satisfaction des besoins des popula-
tions et le d eveloppement rural. Sur Figure 1. Carte de situation de la zone d’
etude.

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– les facteurs biophysiques et socio- des forets de la willaya de Tlemcen, de digues en maçonnerie (retenues de
conomiques sont-ils favorables a
e  1985). Les deux bassins-versants (Tafna Tiout de 3 metres de hauteur, realisees il
l’implantation des retenues collinaires ? et El Hammam) sont caract erises par un y a plus d’un si
ecle) ou en beton (retenue
Cela renvoie a  l’analyse de tous les climat de type m editerraneen semi-aride de l’Arja de 2 m etres de hauteur).
facteurs qui sont en relation avec avec une irr egularit
e spatio-temporelle L’analyse nous a permis de d egager les
l’implantation des retenues ; des pluies (tableau 1) et un r egime l
e ements d etaill
es ci-apr
es.
– les retenues collinaires r ealis
ees ont- d’ecoulement de courte dur ee et a  forte
elles repondu aux objectifs ? La compa- intensit
e : les pluies ne durent jamais plus Des objectifs peu clairs
raison entre l’objectif vis e et l’objectif de quelques heures et leur intensit e peut et des priorites non hierarchisees
r
ealise ainsi qu’entre la dur ee de vie depasser les 30 mm en 24 heures ou
prevue et la dur ee de vie r eelle permet 20 mm en deux heures (Benchetrit, 1970), Lors de leur construction ces retenues
d’evaluer la r eussite ou l’ echec d’un un relief tres escarp e, ayant souvent de collinaires devaient r epondre a  une
am enagement ; fortes pentes, un r eseau de drainage tr es multitude d’objectifs parfois contradictoi-
– quels principes g en
eraux et recom- dense, une lithologie caract eris
ee par res : irrigation des petites surfaces,
mandations se d egagent pour renforcer des roches souvent tendres (marnes, gr es alimentation en eau des populations rura-
l’efficacit
e de ces interventions ? tendre. . .) et un couvert v eg etal tr
es les et du cheptel, r egulation des d ebits
L’analyse de tous les e l
ements cit es ci- degrade, avec de faibles densit es de d’oued et parfois r etention de sediments
dessus permet de tirer un certain nombre recouvrement. sur certains affluents de grands oueds
de conclusions et de faire des recom- quip
e es de grands barrages. La d efinition
mandations. de l’objectif prioritaire de la retenue
En nous focalisant sur une zone tr es n’etait pas souvent claire. Par exemple,
repr esentative du domaine Tellien occi- Resultats et discussion dans certaines retenues destin ees a 
dental, nous avons tent e de repondre a  l’irrigation, on note l’absence de terrains
ces questions. La d emarche repose sur La majorit e des retenues collinaires irrigables ou leur e loignement de la rete-
l’analyse d’une quarantaine de retenues. analysees sont des ouvrages de mobilisa- nue. D’autres, ayant ce m^ eme objectif
L’evaluation s’est fond ee essentiellement tion des eaux de surface, caract eris
es par d’irrigation, ont plus fonctionn e comme
sur des donn ees bibliographiques, des une digue en terre compacte dont la barrages a  s
ediments que comme r eser-
prospections et des mesures de terrain hauteur ne d epasse pas 7 m etres et d’une voirs d’eau (retenue de Grara). Que dire
(caract eristiques et e tat g eneral de la capacit e de stockage de quelques dizai- alors d’une retenue install ee dans une
retenue [digue, cr^ ete, e vacuateur de nes de milliers de m etres cubes. Nous zone isol ee (retenue de Bouziri) o u l’eau
crue, taux d’envasement et qualit e de avons aussi rencontr e une trentaine de n’est jamais utilis
ee ? Les eaux sont parfois
l’eau]), une analyse des facteurs biophy- petites retenues de quelques milliers de saum^ atres (retenue d’El Hammar) et ne
siques des bassins-versants et sur des cubes, appel ees encore diguettes, qui sont pas utilis ees (conductivite e lectro-
enqu^ etes effectuees aupr es des person-  la fois a
visent a  mobiliser l’eau et a retenir lytique sup erieure a 2000 m.s/cm et sols
nes concern ees et les collectivit
es locales. les sediments. Ces diguettes ont e t
e essentiellement argileux a  drainage
La region de l’Ouest de l’Alg erie qui a lancees dans le cadre d’un programme restreint).
fait l’objet d’etudes est tr es touch ee par de developpement rural et de lutte contre Sur les 667 retenues collinaires r ealisees
la s echeresse et la situation hydrique l’
erosion. D’autres types de retenues de en Alg erie entre 1985 et 1988 avec une
est devenue pr eoccupante (Direction petite capacit e de stockage, tr es ancien- capacit e de stockage global qui avoi-
d’hydraulique de l’environnement et t
nes, ont e e identifi
es. Elles sont constitu
ees sine les 90 millions de m3, 20 % des


Tableau 1. Ecart des pluies annuelles de la derniere d
ecennie par rapport aux moyennes annuelles determinees sur trois periodes de mesures
(Morsli et al., 2005).

Ann
ee Villes 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001

Pluie maximum quotidienne Tlemcen 30,6 44,7 26,1 35,1 41,9 33,8 25,1 35,7 20 26,6 -
(mm/24 h)
Mascara - - - 56,4 48,2 48,2 45,4 23,8 25,2 53,5 67,3

Pluie moyenne Tlemcen 371 243 268 256 541 260 349 260 253 413 422
annuelle (mm)
Mascara - - - 242 320 470 240 259 256 215 310

Pluie moyenne Tlemcen : 496 mm (s = 100) - 25 - 51 - 46 - 48 +9 - 48 - 30 - 48 - 49 - 17 - 15


(1913-1971)
Mascara : 511 mm (s = 143) - - - - 53 - 37 -8 - 53 - 50 - 50 - 58 - 40

(1971-2001) Tlemcen : 347 mm (s = 110) +7 - 30 - 23 - 26 + 56 - 25 +1 - 25 - 27 + 19 + 22

Mascara : 380 mm (s = 102) - - - -36 -15 +24 -26 -35 -33 -30 -18

(1990-2001) Tlemcen : 331 mm (s = 100) + 12 - 27 - 19 - 23 + 63 - 21 -5 - 21 - 24 + 25 + 27

Mascara : 294 mm (s = 85) - - - 18 +8 + 60 - 19 - 12 - 13 - 27 +5

s : ecart/moyenne (%).

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retenues ne sont pas exploit ees pour des nant alors comme un chenal d’ ecoule- l’
erosion hydrique, pente forte, sol totale-
raisons diverses : absence d’utilisateurs, ment normal) ou lorsque les e l
ements les ment nu, taux du couvert v egetal tr
es
manque de terres disponibles a  proxi- plus importants de l’ouvrage, a  savoir la r
eduit. L’
erosion anthropique, provoqu ee
mite, de structure de gestion, ou de digue, la cr^ ete, et l’
evacuateur de crue, par l’activit
e humaine, joue un r^ ole capital
mat eriel d’irrigation. . . (Loucif Seiad, ont ete endommag es soit par l’ erosion dans l’extension de la g eodynamique
2002). soit du fait de probl emes de dimension- actuelle (Sari, 1977).
t
Si l’objectif essentiel a e e l’accumulation nement, de conception ou de mat eriaux. L’
erosion la plus grave est due aux
des s ediments pour prot eger les infra- La majorit e de ces retenues collinaires se ruissellements exceptionnels qui augmen-
structures en aval, d’autres interventions sont envas ees apr es quelques ann ees tent les d ebits de pointe, creusent les
plus souples telles que des techniques seulement de fonctionnement (tableau 2). ravines, provoquent l’ erosion des berges
antierosives appropri ees auraient pu La rapidit e de l’envasement qui va a  et envasent les reservoirs artificiels (Morsli
jouer un r^ole plus efficace. l’encontre d’un d eveloppement agricole et al., 2004 ; Meddi et Morsli, 2001). Sur
durable, est la cons equence de l’ eroda- ces zones, le ruissellement provenant
bilit
e du bassin-versant alimentant la des versants peut d epasser les 30 % et
Des bassins-versants tres actifs retenue. atteindre m^ eme 80 % durant les fortes
et envasement rapide Dans la plupart des cas observ es, la dur
ee averses sur des sols tr es d
egrad es (Roose
des retenues collinaires de vie pr evue des retenues (10 a  20 ans) a et al., 1996). L’ erosion ravinante peut
t
e e consid erablement r eduite. Par exem- deplacer 90 000 t/km2/an et plus sur les
Les retenues r ealis
ees dans les ann ees ple, les deux tiers d’un e chantillon de terres tr
es e rodees (bad lands) (Roose
1980 sont pratiquement toutes hors 30 retenues, au niveau des Monts de Beni et al., 2000). Les traces d’une forte
d’usage en 2010 malgr e l’excellente Chougrane, montrent un envasement rosion lin
e eaire sont tr es r
epandues et
qualit
e geographique de certains sites. total a l’issue des deux premi eres ann ees marquent le paysage.
Une retenue n’est plus fonctionnelle de fonctionnement (Morsli, 2001). Les Les reservoirs artificiels sont dangereuse-
lorsqu’elle est totalement envas ee (niveau raisons sont li ees surtout a  l’environne- ment menac es par l’envasement, le taux
du chenal de l’ evacuateur a  quelques ment imm ediat des sites des retenues : d’erosion sp ecifique dans les bassins-
dizaines de centim etres de celui de la lithologie meuble et tr es friable (marnes et tudi
versants e es depasse les 2 000 t/km2/an
cuvette, l’
evacuateur de crue fonction- gres tendre), fortement susceptible a  (une retenue de 40 000 m3 de capacit e,

Tableau 2. Principales caracteristiques de quelques retenues collinaires etudiees.

Retenue Annee Capacit


e* Superficie Envasement* Technicit
e Cultures Nombre
collinaire de (m3) du bassin- de la de
r
ealisation* versant retenue b
en
eficiaires
(km2)

ee Evacuateur
Envasement Ann Systeme
(%) de crue de
distribution

Chaabet Tenouga 1985 80 000 07,47 100 1987 emporté mal conçu – –
Chaabet Remaimi 1985 100 000 11,40 90 1987 mal conçu inexistant arboriculture 02
Chaabet Leshoub 1985 30 000 08,91 100 1988 inexistant mal conçu – jamais utilisée
Oued Bel Adjoul 1985 100 000 13,05 100 1990 mal conçu inexistant céréale, arboriculture –
Chaabet Tadmaya 1985 100 000 09,95 100 1992 mal conçu inexistant jamais utilisée
Chabet Ghouliamas 1985 100 000 25,11 100 1993 mal conçu mal conçu céréale, cultures –
maraı̂chères
Sidi Lahcen 1985 45 000 02,20 100 1990 inexistant inexistant – jamais utilisée
Oued Taoudlala 1985 60 000 51 100 mal conçu inexistant cultures maraı̂chères –
Sidi Snouci 1984 50 000 15,50 25 2006 bien conçu bien conçu cultures maraı̂chères 13
Oued Atchane 1990 90 000 45,5 44 2006 bien conçu mal conçu cultures maraı̂chères 20
+ céréale
+ arboriculture
Sidi lakhdar 1988 60 000 03,17 100 1989 bien conçu inexistant cultures maraı̂chères 05
Sidi A. Djebbar 2002 40 000 15,72 emporté 2002 emporté inexistant – –
Bouhanifia 2002 20 000 06,93 emporté 2002 emporté inexistant – –
Sidi Droni 1988 25 000 17,68 100 1990 inexistant inexistant reboisement –
El Hammar 1988 30 000 3,13 100 1990 mal conçu inexistant cultures maraı̂chères –
Bouziri 1988 50 000 1,25 100 1996 mal conçu inexistant cultures maraı̂chères 03
+ arboriculture
Grara 1987 20 000 0,48 100 1992 inexistant inexistant reboisement –
Brame 1992 400 000 28,92 25 2007 bien conçu mal conçu cultures maraı̂chères 100

* source : direction d’Hydraulique de la willaya de Tlemcen [DHWT] (1990).

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Tableau 3. Recapitulatif des apports solides estimes par diverses formules (TECSULT, 2005).

Barrages Apport solide (hm3/an)

Fournier SOGREAH Demmak Gavrilovic Probst Touaibia Saidi Kassoul

Ouizert 0,094 2,096 – 0,673 0,385 1,218 0,417 0,481


Bou Hanifia 0,152 9,337 2,158 2,008 2,391 2,142 0,951 0,814
Fergoug 0,049 1,495 0,824 0,123 0,584 0,569 0,167 0,045

sur un bassin de 10 km2, s’envasera en moins de mat eriaux qui se d eposent chaque m^ eme emport ees d es leur mise en eau
de 2 ans). annee dans les grands barrages alg e- (tableau 2). Il s’agit la de difficult
es li
ees
En Alg erie, les taux d’ablation riens s’ el
eve a  20.106 m3 (Agence au dimensionnement de la digue ou du
generalement pris en consid eration dans nationale des barrages, 1990). A  titre deversoir de crues, a  la conception, et
tudes de retenues collinaires varient
les e d’exemple, pour le barrage de Fergoug, au choix d’implantation. Tout cela
de 130 a  2 300 t/km2/an (Pnud, 1987). situ
e en aval du bassin-versant de l’oued t
emoigne des insuffisances dans les
Au Maroc, l’ erosion specifique a atteint El Hammam qui a fait l’objet d’ etude, tudes de faisabilit
e e technique.
5 000 t/km2/an (HYDROMED, 2001) l’envasement du r eservoir a atteint 98 %. En revanche, d’autres retenues collinaires
sur des petits bassins marneux du type En effet, sa capacite actuelle est d’environ sont dot ees d’une grande capacit e de
de ceux que nous avons e tudi
es. En 0,12 hm3, alors qu’elle e tait de 18 hm3 stockage mais contr^ olent un bassin-ver-
Tunisie, des taux d’envasement de 1 500 lors de sa mise en eau en 1970. sant avec des apports liquides tr es faibles
 5 300 m3/km2/an sont observ
a es Ce ph enom ene doit constituer une partie aboutissant a  un non-remplissage de la
(Pnud, 1987). En raison du manque de prenante dans la pr eparation d’un projet cuvette. D’o u la n
ecessite de bien prendre
mesures des transports solides dans les de faisabilite d’un barrage ou d’une rete- en compte les param etres essentiels du
petits bassins-versants, on a recours a  des nue collinaire en Alg erie. Dans le cadre bassin-versant, en particulier les caract e-
formules empiriques ou abaques mis au de la protection des bassins-versants, un ristiques hydrodynamiques des sols. Cer-
point a  partir de donn ees observ ees sur programme sp ecial consistant a  traiter taines retenues ont e t
e implant ees dans
des grands bassins-versants, ce qui n’est une superficie de 1,5 million d’hectares des terrains tr es perm eables, ce qui a
pas sans poser au plan m ethodologique d’ici l’an 2014 a e t
e lanc 
e par l’Etat. affecte leur remplissage.
un probl eme d’ echelle pour la validit e Les d ecisions trop h^ atives de construc-
des formules. Le rapport de TECSULT tion qui ont souvent pris le pas sur les
(2005) a montr e que ces formules Un dimensionnement inadequat tudes de faisabilit
e e sont a  l’origine
d’estimation des apports solides, appli- et un manque d’equipements des endommagements des e l
ements les
quees a  la zone d’etude, ont donn e une accessoires plus importants de l’ouvrage, a  savoir la
large fourchette de valeurs avec de digue, la cr^ ete, et l’
evacuateur de crue.
grands e carts (tableau 3). La disproportion entre la taille du bassin- Ainsi, sur certaines digues, on a constat e
Selon Demmak (1982), le taux d’ erosion versant et le volume de la retenue est la des affaissements de cr^ ete dus a la fois
specifique des bassins-versants d’Alg erie principale anomalie qui caract erise la au choix des mat eriaux et au mauvais
(100 a  3 000 km2 de superficie) serait conception des retenues collinaires pros- compactage du remblai. Pour d’autres
parmi les plus e lev
es au monde (2 000 a  pectees. En effet, une grande partie des digues, la mauvaise exploitation des
4 000 t/km2/an). Le probl eme de l’enva- retenues collinaires est a faible capacite retenues a provoqu e une rupture du talus
sement ne se pose pas simplement pour de stockage et construite dans un bassin- amont par vidange rapide.
les retenues collinaires mais aussi pour les versant important (plus de 50 % des L’
evacuateur de crue est un autre e lement
barrages. Sur les 62.108 m3 – la capacit e bassins depassent les 10 km2 de super- pris en compte dans l’analyse : mis a  part
de 56 grands barrages alg eriens –  titre d’exemple, la superficie
ficie : a quelques rares exceptions, tous les
700 millions de m3 sont constitu es de du bassin-versant de la retenue de vacuateurs pr
e esentent des probl emes
vase. L’importance du transport solide en l’oued Taoudlala, d’une capacit e de de :
Alg erie se traduit par un comblement 60 000 m3, est de 51 km2) entraı̂nant – liaison avec la digue ;
rapide des barrages diminuant consid e- soit un envasement rapide de la cuvette, – fissuration pour non-compatibilit e de
rablement leur dur ee de vie (tableau 4), soit un d ebordement sur la digue au deformation avec la digue, destruction
ce qui fait que la majorit
e des barrages en moment des crues, ce qui a conduit dans du bassin de dissipation ;
Alg erie ont une duree de vie allant de 30 plusieurs cas a la destruction de la digue – insuffisance d’ evacuation (crues impor-
 50 ans (Hallouche, 2007). Le volume
a (Kouti et al., 1991). Certaines ont e t
e tantes).

Tableau 4. Quantification des sediments dans quelques retenues dans le Nord-Ouest algerien (oued Mina) (Touaibia et al., 1995).

Retenue 1 2 3 4

Hauteur (m) 7,00 5,30 4,50 4,00


Quantité de sédiments totaux (t) 19 0002 19 958 20 995 21 835
Durée d’envasement total (an) 14 5 11 3
Quantité de sédiments déposés en une année(t) 13 572 3 992 1 907 7 278
Taux d’envasement annuel (%) 7,14 20,00 9,08 33,33

S
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Plus graves encore : des digues ont e t
e pour l’irrigation, 4 % pour l’ elevage et riverains au projet doivent e ^tre prevues
construites sans e vacuateur de crue. De 1 % pour l’alimentation en eau potable avant toute r ealisation si on veut voir une
plus, dans certaines retenues, l’absence (Loucif Seiad, 2002). Le d eveloppement population locale prosp ere qui peut
de certains accessoires tels que les de techniques d’irrigation rationnelle et mettre en valeur les investissements de
conduites de vidange et les abreuvoirs de cultures moins exigeantes et r esistan-  et assurer leur prise en charge par
l’Etat
a encore accentu e la d egradation de tes aux stress hydriques comme l’arbori- une bonne exploitation. Malgr e l’avan-
ces ouvrages. culture fruiti ere pourrait garantir la tage de ces ouvrages et leur acceptation
Il faut cependant signaler que le « Guide perennisation de la production. par les riverains, le degr e d’appropria-
maghr ebin des retenues collinaires », qui Le taux d’utilisation des eaux est tr es tion des am enagements reste cependant
se fonde sur les resultats de recherches sur variable d’une retenue a  une autre et tr
es faible. Le co^ lev
ut e e d’entretien, les
les bassins-versants exp erimentaux et les depend de la disponibilit e des terres conflits et le manque d’organisation
transports solides entrepris dans les trois irrigables, du type de cultures pratiqu ees laissent dans beaucoup de cas la retenue
pays maghr ebins (Maroc, Alg erie, Tuni- et de la localisation de la retenue (les livr  elle-m^
ee a eme, ce qui m ene a  son
sie) avec la coordination des experts du retenues localis ees pr es des agglom era- dysfonctionnement. L’organisation et la
Programme des Nations unies pour le tions sont tr es exploit ees). La majorit e responsabilisation des exploitants quant
developpement (Pnud) (projet RAB 80/ des eaux des retenues est essentielle-  l’utilisation rationnelle et aux travaux
a
011 [Pnud, 1987]) et prescrivant les ment destin ee a l’irrigation des cultures d’entretien de m^ eme qu’un environne-
normes de r ealisation n’a e t
e publie maraı̂ch eres, cultures tr es consommatri- ment e conomique propice ne devraient
qu’en 1989 : or, a  cette date, 900 rete- ces d’eau et tr es rentables dans l’imm e- qu’encourager a  l’appropriation des
nues e taient d
eja achev ees sur les 1 237 diat, puis viennent l’arboriculture et parfois am enagements. Pourquoi ne pas s’ins-
programm ees a l’echelle du territoire les c
ereales. pirer des modes de gestion traditionnels
alg erien. Les etudes de faisabilit e tech- Dans plusieurs cas, les usagers se sont de l’eau qui existent depuis longtemps
nique qui ont e t
e r
ealis taient incom-
ees e content es d’agir en rentiers non concer- dans certains terroirs, tels que les Beni
pletes alors que les e tudes de faisabilite nes par le sort des infrastructures et Snous et qui ont fait preuve de leur
socio- economiques ont e t
e compl etement parfois l’eau est devenue l’objet de maints efficacite. L’ing eniosit
e de ces modes
negligees. La m ethodologie d’approche conflits avec de graves cons equences sur traditionnels de gestion nous interpelle.
dans la conception des retenues collinai- les ouvrages. Ainsi se trouve pos ee la Ne serait-il pas utile d’approfondir leur
res e laboree par la suite n’est qu’une question de la viabilit e des ouvrages. fonctionnement, notamment sur le plan
reproduction des principales e tapes conte- L’agriculture irrigu ee rapportant de plus organisationnel et quant a  l’efficacit
e de
nues dans le guide maghr ebin. Mais, en plus aux cultivateurs, ceux-ci ne leurs systemes de contr^ ole et de surveil-
plusieurs ann ees apr es, force est devraient pas demeurer dans l’expecta- lance. La recherche sur ces techniques
de constater que malgr e cette prise de tive a attendre tout de l’Etat. Les petits anciennes peut fournir un savoir pr ecieux.
conscience, aucune am elioration notable barrages ne sont pas des r ealisations Cette analyse, effectu ee sur une quaran-
n’a e t
e enregistree dans le respect des d’int
er^et g eneral dont l’Administration taine de retenues choisies dans le Nord-
normes de construction, surtout lorsqu’il assure la gestion. Ils servent des int er^
ets Ouest alg erien, a fait ressortir beaucoup
s’agit de petites digues, et les e tudes particuliers : c’est donc aux particuliers de d’insuffisances sur les e tudes de faisabi-
de faisabilit e socio-economique restent 
s’investir, ce qui ne veut pas dire que l’Etat lit
e et des lacunes surtout sur le plan
toujours tres sommaires. n’intervient pas en leur faveur en cas de gestion. L’objectif principal de 90 % des
catastrophe endommageant les ouvrages. retenues mises en place e tait l’ameliora-
Une utilisation inappropriee 
L’Etat est confront e a  une gestion des tion de la production agricole dans
de l’eau et l’absence de structures retenues qu’il ne peut plus assumer. Il une strat egie de d eveloppement rural.
s’agit l
a d’une r eelle difficult  qui
e. L’Etat Malheureusement, ces am enagements
de gestion
commence a  se desengager de la gestion n’ont pas permis d’atteindre les objectifs
L’am enagement des retenues collinaires de ces ouvrages, tient a  ce que les assign es. La dur ee pr evue, de 10 a 
a engendr e dans certaines zones, agriculteurs les g erent eux-m^ emes et 20ans,s’estr  moinsde5anspour
eduite a
caract eris
ees par un syst eme reposant œuvrent de plus en plus pour la mise 80 % des retenues. Les p erimetres
sur la cer
ealiculture extensive, une inten- en place de structures de gestion appro- irrigues qui devaient abriter des cultures
sification de l’agriculture sur les surfaces priees et l’
etablissement de concessions. conomiques et conservatrices ont e
e t
e
irrigu
ees proches des retenues. L’exploi- Selon la loi portant code des eaux, le occup es par des sp eculations lucratives
tation intensive et quelquefois anarchique concessionnaire est charg e de l’exploita- qui pr esentent de grands risques de
des eaux a souvent g ener
e des conflits de tion et de la maintenance et il est tenu degradation des sols. L’impact escompt e
partage des eaux. Le mode d’irrigation d’utiliser l’eau de façon rationnelle et de ces am enagements sur l’am eliora-
inappropri e (systeme d’irrigation qui conomique. L’augmentation du revenu
e tion des conditions de vie des riverains
consiste a  arroser les cultures en faisant par l’irrigation qui permet de meilleurs a e t
e faible. Ils n’ont pas permis la
ruisseler l’eau a la surface du sol, tr es rendements, ne peut qu’encourager les satisfaction des besoins d’une irrigation
consommateur d’eau avec e coulements agriculteurs a  participer a  la gestion de suffisante et permanente et le d eve-
hors de la parcelle, fuites, e vaporation, ces retenues. Des travaux sont actuelle- loppement de cultures adapt ees comme
pertes par e coulement hypodermique ment engag es pour organiser en grou- l’arboriculture. Certes, quelques avanta-
[terrain marneux] . . .) et la pratique pements d’int er^
ets les utilisateurs de ces ges ont e t
e obtenus, mais pour une
parfois de cultures exigeantes en eau retenues collinaires, de façon a  assurer courte dur ee. La reussite d’un am enage-
n’ont fait qu’augmenter les conflits et les leur prise en charge par une bonne ment suppose la r ealisation de l’objectif
risques d’ass echement de ces retenues, exploitation. Mais les agriculteurs tardent qui lui a e t
e assign e. Or ces am enage-
menaçant ainsi la viabilite des ouvrages  se constituer en associations d’exploi-
a ments n’ont pas abouti aux objectifs
et des productions agricoles. Soixante- tants pour diverses raisons. escompt es et leurs impacts socio-
quinze pour cent des eaux mobilis ees L’
etude des aspects socio- economiques et conomiques et environnementaux sont
e
par les retenues collinaires sont utilis ees la forme de gestion et d’adh esion des peu perceptibles.

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Reflexion et recommandations soit la formule la mieux adapt
dynamisation de l’activit
ee pour la
e agricole.
de surveillance et d’entretien r
necessaire. Il est donc important de
egulier est

La mauvaise corr elation entre l’apport contr^oler en permanence la bonne tenue


Les retenues collinaires se d eveloppent moyen annuel et la capacit e de la retenue de l’ouvrage et de d eceler toutes ano-
actuellement partout en Alg erie. La ten- (capacit e de stockage inf erieure a 10 % malies. Un d efaut d ecele a temps per-
dance actuelle est a  leur accroissement, de l’ ecoulement moyen annuel pour mettra un entretien moins co^ uteux et
avec des retenues principalement ali- certaines retenues) nous conduit a  pro- rapide, alors que le m^ eme d efaut, si on
ment ees par les eaux pluviales et utilis ees poser la r ealisation de petits barrages le laisse s’aggraver, conduira a  une
essentiellement pour l’irrigation des cultu- plut^
ot qu’une retenue collinaire lorsque remise en e tat tr
es co^uteuse et fera m^ eme
res. Implant ees dans des environnements les conditions le permettent et avec un courir un risque de destruction de
fragiles et a  faibles activit es economi- rapport co^ ut/efficacite avantageux. l’ouvrage. Beaucoup de retenues ont
ques, les retenues collinaires apparais- Un projet de retenues collinaires pourrait t
e e endommag ees par l’ evolution des
sent comme des am enagements tr es constituer un levier important de d evelop- petits d esordres (br eches, fissures, trous,
innovants. Mais leur efficacit e et leur pement rural et regional, comme c’est le cas fuites. . .).
durabilite demeurent, cependant, fonc- dans d’autres pays. Seulement cette solu- Dans les terrains tr es erodables ou tr es
tion de nombreuses conditions qui vont du tion n’est int
eressante que si les conditions perm eables, tel que les terrains karsti-
choix du site a  la participation des acteurs biophysiques et socio- economiques le ques, l’implantation des retenues colli-
locaux (HYDROMED, 2001). A  ce jour, permettent. naires est a  eviter. Dans les terrains
1 237 retenues ont e t
e construites a  L’analyse montre que le milieu est tr
es perm eables on peut utiliser des
travers le territoire national, la plupart favorable pour l’implantation et l’exten- mat eriaux pour l’imperm eabilisation du
sont envas ees ou d egrad ees, et ce, pour sion des retenues collinaires. Mais sol (marnage, film plastique. . .) lorsque
nombre d’entre elles, seulement une ou certains facteurs, comme la lithologie les conditions physiques et e conomiques
deux ann ees apr es leur mise en eau. Cela (pr
edominance des roches tendres) et le le permettent.
revient a poser le probl eme de la s election faible taux de couverture v egetale qui Compte tenu des techniques d’irrigation
rigoureuse des sites potentiels am ena- favorisent l’ erosion et par cons equent employ ees tr es consommatrices d’eau,
geables et de la gestion des ouvrages. l’envasement des retenues collinaires, l’exploitation des eaux peut certaine-
Cette analyse a permis de tirer un certain constituent des contraintes. Une lutte ment e ^tre am elior
ee par une politique
nombre de recommandations. anti
erosive, par des structures et des d’economie d’eau (aspersion, irrigation
La definition claire de l’objectif r eel de la pratiques culturales, doit se faire parall e- localisee lorsque la charge solide n’est
retenue doit e ^tre prioritaire : certaines lement a  la construction de la digue. pas importante). Avec les aides et le
retenues ont plus fonctionn e comme L’envasement est un probl eme majeur. La soutien de l’Etat  pour l’acquisition du
barrages a  sediment que comme r eser- construction des retenues est un sujet mat eriel d’irrigation (goutte- a-goutte et
voirs d’eau. Les difficult conomiques
es e d’inqui etude pour l’am enagiste. L’exem- aspersion), les exploitants commencent
actuelles exigent encore plus une ple des barrages et des retenues envas ees  pratiquer progressivement ces syst
a emes
definition des objectifs prioritaires. incite les r
ealisateurs a la prudence et aux d’economie d’eau. Mais la maı̂trise de
Il est urgent de prendre en compte tudes plus d
e etaill
ees. L’importance de ces syst emes d’irrigation par la majorit e
dans les e tudes de faisabilit e toutes les l’envasement doit amener a  reflechir des agriculteurs est encore faible et
variables r egissant le fonctionnement plusieurs fois sur le choix de site et sur necessite une aide, une sensibilisation et
des petits bassins-versants. Le diagnostic les am enagements a  r
ealiser sans oublier une formation. Le choix des sp eculations
ne peut s’appuyer sur une simple carte le respect de l’environnement pour un doit e^tre aussi bien r efl
echi. Les cultures
geologique au 1/50 000 qui se r evele developpement durable. Compte tenu de doivent e ^tre bien adapt ees aux conditions
insuffisante (Kouti et al., 1991). L’ etude l’envasement, ne devrait-on pas s’orienter cologiques et socio-
e economiques. La
doit comporter une cartographie d etail- vers un dimensionnement sup erieur des marge de manœuvre reste encore grande.
l
ee et la localisation des zones suscepti- ouvrages accompagn e d’une s erie de Ces ouvrages, qui mobilisent de l’eau de
bles de fournir les charges solides qui travaux d’am enagement ? La hauteur de surface, sont bien accept es par les
hypoth equeront la dur ee de vie des digue qui e tait de 2 a
 7 m etres commence riverains et leur permettent de transfor-
ouvrages. Suite a  l’ampleur de l’ erosion,  atteindre 8 a
a  23 m etres dans les mer leur disponibilit e en main-d’œuvre
les criteres de choix des sites doivent nouvelles constructions. Les programmes en investissements productifs et d’aug-
^tre e
e largis au diagnostic approfondi d’am enagement doivent e ^tre consacr es menter leurs revenus. Un appui surtout
de l’erosion au niveau du bassin et a  la particulierement aux zones actuelles technique de l’Etat  ne peut qu’encoura-
definition des risques d’envasement des d’ablation qui donnent le plus d’apports. ger les agriculteurs a  participer a  la
retenues projet ees. Avec des am enagements ad equats, on gestion de ces retenues.
Les probl emes socio- economiques ne peut reduire beaucoup l’envasement. Malgr e certaines contraintes du milieu,
sont pas moins importants que les pro- Lorsqu’un envasement important est a  les retenues collinaires ont de grandes
blemes techniques. Il faut les e tudier et craindre, ou que les conditions physi- perspectives surtout dans les milieux
savoir comment faire adh erer les rive- ques ne sont pas favorables, la retenue pauvres et d esherit
es ou la ressource en
rains au projet si on veut voir une popu- peut e^tre realisee en d erivant l’eau par eau est rare et o u ces ouvrages, en
lation locale qui peut mettre en valeur les un ouvrage de d erivation. Les ordres de permettant la mobilisation de l’eau,
investissements de l’Etat. grandeur des apports solides et les pourraient avoir des fins multiples au
Il faut imp erativement faire une envasements consid erables qui peuvent service de l’am elioration de la vie des
valuation de la rentabilit
e eeconomique en resulter incitent a r
ealiser les retenues collectivit es locales. L’impact e conomi-
de la retenue et ins erer un programme collinaires uniquement dans les bassins- que, social et e cologique de ces retenues
de retenues dans un plan d’am enage- versants stables et peu e rodables. devrait e ^tre fort. Le souci de maı̂triser le
ment global d’un bassin-versant ou d’un Pour maintenir un bon fonctionnement ruissellement et de stocker les exc edents
territoire. Il n’est pas s^ ur qu’un saupou- et assurer une grande long evite de hydriques est primordial pour une restau-
drage de retenues au niveau de l’espace l’ouvrage, l’ etablissement d’un planning ration d’ ecosyst eme particuli erement

S
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fragile et pour une augmentation du sites et les amenagements a  faire, sans Kouti A, Taabni M, Tihay JP, 1991. Aspects de
revenu des populations. D’autant que oublier le respect de l’environnement l’inventaire, l’amenagement et la gestion des
les populations concern ees par cette pour un d eveloppement durable. ouvrages de petite hydraulique dans le Tell
nouvelle ressource sont parmi les plus Avec des objectifs plus clairs, un diagnostic Occidental algerien. Bull Res Erosion 11 : 157-
63.
pauvres et qu’elles sont l egitimement en du terrain plus d etaill
e sur les facteurs
droit d’aspirer a  une r eduction des biophysiques et socio- economiques et Loucif Seiad N, 2002. Les ressources en eau et
inegalites du d
eveloppement. l’implication des riverains dans les leurs utilisations dans le secteur agricole en
checs Alge rie. Conference internationale sur les politi-
Malgr e les lacunes et les e programmes, ces am enagements hydro-
ques d’irrigation 2002, Alger, 14 avril 2002.
enregistr es, certaines retenues, m^ eme si agricoles pourraient avoir un impact tr es

Meddi M, Morsli B, 2001. Etude d’erosion et du
leur nombre est r eduit, ont bien fonc- positif sur le plan environnemental et
tionne et leur impact a et
e tres positif sur socio-economique. ruissellement sur bassins versants experimentaux
dans les monts de beni-Chograne (Ouest
diff
erents plans, surtout celui de la Les resultats de cette analyse devraient
d’Algerie). Z Gemorph N. F 45 : 443-52.
vulgarisation. Ces am enagements, tr es constituer un apport sensible pour
sollicit
es dans les milieux pauvres et l’amelioration de la conception et de la Morsli B, 2001. Analyse biophysique et socio-
desherit
es, r
epondent bien aux aspira- gestion des am enagements futurs, surtout economique pour le choix d’implantation des
retenues collinaires dans les monts de Beni
tions des riverains mais leur mode de lorsqu’on sait que la r
ehabilitation de ces
chougrane. Rapport INRF. Tlemcen : INRF.
gestion doit e ^tre bien d efini, sinon la retenues et la cr
eation d’autres ouvrages
perennit e de leurs effets positifs paraı̂t sont actuellement un objectif des services Morsli B, Mazour M, Mededjel N, Hamoudi A,
compromise concern es. & Roose E, 2004. Influence de l’utilisation des terres
sur les risques de ruissellement et d’erosion sur les
versants semi-arides du Nord ouest de l’Algerie.
S
e cheresse 15 : 96-104.
Conclusion  fe
Re rences Morsli B, Mazour M, Arabi M, Mededjel N,
Roose E, 2005. Influences of land uses, soils and
Agence nationale des barrages (ANB), 1990. cultural practices on carbon eroded and carbon
Tous les travaux effectu es sur les res- Strat
e gies de gestion des eaux - Horizon 2010. stocks in soils of Mediterranean mountains of
sources naturelles dans cette zone L’envasement des barrages. Rapport interne. northern Algeria. In : Roose E, Lal R, Feller C,
s’accordent sur la raret e de l’eau. Dans Alger : ANB. Barthes B, Stewart B, eds. Soil erosion & carbon
ce contexte, un projet de retenues colli- dynamics. Advances in soil sciences. New York :
naires pourrait constituer un levier impor- Benchetrit M, 1970. L’ e rosion actuelle et ses
CRC Taylor & Francis Publishers.
conse quences sur l’am e nagement de l’Alg e rie.
tant de d eveloppement rural et r egional. Poitiers : Presses de l’universite de Poitiers XI. Pnud/OPE, 1987. Ressources en eau dans les
La promotion de ces am enagements pays de l’Afrique du Nord. Guide maghr e bin
hydro-agricoles apparaı̂t comme une CNES (Conseil national economique et social), pour l’exe cution des etudes et des travaux de
opportunit e pour l’am elioration des bilans 2000. L’eau en Alge rie : le grand d
e fi de demain. retenues collinaires. Projet, RAB/80/011. Alger :
hydriques et la conservation du sol. Cette Rapport du conseil national economique et social ministere de l’Hydraulique, de l’environnement,
solution est interessante lorsque les condi- 15e session. Alger : CNES. et des For^ets (MHEF).
tions biophysiques et socio- economiques Demmak A, 1982. Contribution a l’ e tude de Roose E, Arabi M, Brahmia K, Chebbani R,
le permettent. L’analyse de ces derniers 
Mazour M, Morsli B, 1996. Erosion en nappe et
l’
e rosion et des transports solides en Alg e rie.
facteurs montre que certains e l
ements, tels These de doctorat, universite Paris VI. ruissellement en montagne mediterraneenne
le climat et le relief, favorisent l’implanta- algerienne. Recherche sur la reduction d’erosion
Direction d’hydraulique de l’environnement et par GCES en moyenne montagne mediter-
tion et le d eveloppement des retenues des forets de la willaya de Tlemcen (DHEFWT), raneenne algerienne. Cah Orstom P e dol 27 :
collinaires. En revanche, d’autres fac- 1985. Seminaire national sur les retenues 289-307.
teurs, tels la lithologie (pr edominance de collinaires 1985 (document interne), Tlemcen,
roche e rodable) et la couverture v egetale 14-15 decembre 1985. Roose E, Chebbani R, Bourougaa L, 2000.
(taux de couverture tr es faible), constituent Ravinement en Algerie : typologie, facteurs de
Direction d’hydraulique de la willaya de Tlemcen contr^
ole, quantification et rehabilitation. S
e cheresse
des contraintes. (DHWT), 1990. Journee d’etude sur la gestion 11 : 317-26.
L’analyse biophysique et socio- economi- des retenues collinaires 1990 (document interne),
que des retenues collinaires a montr e Tlemcen, 22 decembre 1990. Sari D, 1977. L’homme et l’ e rosion dans
que les programmes n’ont souvent pas l’Ouarsenis (Alge rie). Alger : SNED.
Hallouche W, 2007. Pr e vision du transport solide 
benefici
e de la rigueur n ecessaire quant et s
e dimentation des barrages. These de docto- TECSULT, 2005. Etude de la protection des
 leur mise en œuvre. La d
a ecision rat, universite de Biskra. bassins-versants de l’ensemble des barrages en
administrative trop h^ ative de construction etudes d’avant projet d e (lots 1 a 4) et des
e taill
HYDROMED, 2001. Rapport final du programme bassins versants des barrages en exploitation (lots
a souvent pris le pas sur les e tudes de de recherche sur les lacs collinaires dans les zones 5 et 6), identification et evaluation du degr e
faisabilit
e. Et, lorsque ces e tudes ont et
e semi-arides du pourtour m e diterrane en. Albergel d’e rosion. Rapport definitif. Alger : Agence
faites, certains e l
ements importants n’ont J, Nasri S, eds. Contrat europeen INCO DC nationale des barrages.
pas e t
e pris en consid eration : entretien, ERBIC 18CT 960091 - STD4. Tunis : IRD ;
Touaibia B, Dautrebande S, Gomer D, Moste-
structure de gestion, taux d’utilisation des INRGREF. 
faoui M, 1995. Quantification de l’erosion a
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erosion. Kettab A, 2001. Les ressources en Algerie: partir de l’implantation de quatre retenues
L’importance de l’ erosion doit nous inciter strategies, enjeux et vision. Desalination 136 : collinaires dans la zone des marnes : W.
 r
a efl
echir plusieurs fois sur le choix des 25-33. Relizane, Algerie. Bull Res Erosion 15 : 416-26.

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