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VERS UNE CONCEPTION GLOBALISÉE DES SYSTÈMES

D'INFORMATION INTÉGRANT TOUS LEURS USAGES


Claire Noy, Jacques Ruiz

Direction et Gestion (La RSG) | « La Revue des Sciences de Gestion »

2007/1 n°223 | pages 87 à 97


ISSN 1160-7742

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ISBN 9782916490076
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Pour citer cet article :


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Claire Noy, Jacques Ruiz« Vers une conception globalisée des systèmes
d'information intégrant tous leurs usages », La Revue des Sciences de Gestion
2007/1 (n°223), p. 87-97.
DOI 10.3917/rsg.223.0087
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La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 223 — Organisation 87

Vers une conception globalisée

Performances et/ou Management responsable


des systèmes d’information
intégrant tous leurs usages
par Claire Noy et Jacques Ruiz

es systèmes d’information tels qu’on les imagine dans

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les entreprises privées ou publiques, peuvent-ils être
perçus comme des systèmes de communication à part
entière ?
La question paraît saugrenue si l’on assimile information et
communication, comme c’est souvent le cas. Le fait de traiter
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de l’information, voire de la distribuer, consisterait, sui


generis, à générer de la communication.
Par contre, la question n’est pas sans objet en regard des
modifications et innovations dans le domaine à la fois des
outils et des usages dans les technologies de l’information et
Claire NOY de la communication (TIC). Les réseaux, l’e-mail, l’intranet, les
Maître de conférences, Université blogs, les wikis, on en passe et des meilleurs, existent déjà ou
de Montpellier III, Chercheuse au CERIC apparaissent et se développent à une vitesse vertigineuse.
Les organisations consacrent des sommes considérables à
(Centre Etudes et de Recherche en Information
l’acquisition de ces gages de modernité. Avatars, verrues ou
et Communication) (France) moteurs d’évolution, ils ne sont que peu pris en compte dans
le cadre professionnel de la conception des systèmes d’infor-
mation. On a souvent l’impression d’une fracture entre les
deux mondes, l’un lié à l’informatique professionnelle, l’autre
ayant trait aux sciences de l’information et de la communica-
tion (SIC). La conséquence première de cette fracture réside
dans la carence de productivité résultant de cette gadgétisa-
tion des systèmes d’information (SI). L’autre conséquence,
peut-être plus insidieuse, consiste à déstructurer les usages
des SI, c’est-à-dire à polluer les systèmes existants, sans
apporter de solutions nouvelles et globalement satisfai-
santes1. Il y a souvent loin de l’intention à l’usage comme le
Jacques RUIZ suggère W. Orlikowski Il y a souvent confusion entre données,
information, communication. Il y a souvent confusion au sein
Maître de conférences,
même du processus de communication.
Université de Montpellier II,
Ecole polytechnique universitaire,
Chercheur au CREGO (Centre de Recherche 1. On peut faire un parallèle avec l’irruption jadis de la micro-informatique dans
en Gestion des Organisations) (France) les gros systèmes centralisés (main fraime). Il y a eu une période anarchique
déstructurante avant de retrouver une logique d’informatique répar tie plus
cohérente.

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Issus nous-mêmes de ces deux mondes, a priori peu commu- donner des informations précises et normatives comme des
nicants2, nous nous proposons dans cette recherche de mettre ordres, des consignes… : il y a là un registre de pouvoir qui lui
en perspective les éléments, les concepts et les pratiques de est associée. Dans une communication, quand on désire que
ces nouveaux liens ou médias dans le simple dessein de poser l’impact de ce que l’on émet cadre parfaitement et strictement
une problématique à partir de l’état de l’art et de nos consta- le récepteur, on use de ce registre : Le cœur des lois, des règle-
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tations disjointes et conjointes. ments, des notices, des procédures… est fait de ce matériau.
Nous proposerons, dans un premier temps, une réflexion ou L’intransigeance vis-à-vis de cette partie du message, appuyée
quelques repères pour tenter de dépasser les représentations sur la coercition morale ou physique obligera le récepteur à
habituelles de ce que l’on nomme souvent de manière floue, la adopter, soit une attitude d’obéissance totale, soit de rejet
communication. Nous tenterons, dans un deuxième temps, de massif, soit de détournement. Il n’y a pas d’alternative dans ce
nous interroger sur les différents usages des systèmes d’infor- noyau et il est d’ailleurs fait pour cela. En langage systémique
mation et de communication dans les organisations. Enfin l’on dira qu’il vise à réduire la variété du système piloté jusqu’à
nous montrerons qu’il semble important de parvenir à une l’asservissement. Nous avons un besoin impératif de cette
conception globalisée des systèmes d’information pour que les réduction de variété dans les organisations, principalement les
usages des SI et la communication qu’ils pourraient générer grandes, afin que les procédures puissent se dérouler sans
s’avèrent plus complets, plus porteurs, et plus enrichissants. dérive. Ainsi, l’engagement des dépenses publiques, les
passations de marchés publics, la séparation de l’ordonnateur
et du comptable, dans les administrations, les procédures
1. La communication :

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comptables, les règles de gestion des stocks ou de lancement
repères et propositions de production dans les entreprises privées, relèvent de ce
noyau et de ce besoin d’exécution à la lettre de ce qui est
Quand on désire communiquer, on peut avoir deux ambitions instauré. En médecine encore on parlera de « protocole » pour
extrêmes : appliquer une chaîne thérapeutique précise à telle maladie. Il
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– transmettre un message sans aucune déviance ou bruit n’est, bien entendu, pas question pour le commun des mortels
possible, c’est-à-dire de façon rigoureuse et univoque ; de dévier de ce protocole imposé par les experts détenteurs du
– tenter de faire émerger des impressions et/ou sensations pouvoir médical. Le « check-up » du pilote d’avion avant le
complexes chez le(s) récepteur(s) sans que la nature, la décollage ne saurait souffrir d’aucune dérive ni de nuance. Il
quantité et la qualité de ces impressions soient, à aucun serait facile de trouver de nombreux autres exemples dans les
moment, maîtrisées ou prévisibles. domaines militaires, scientifiques, technologiques… illustrant
Dans la perspective des sciences de l’information et de la ce noyau communicationnel.
communication, on ne parlera plus d’émetteur et de récepteur On s’aperçoit, à la réflexion, qu’une grande partie de la vie
en tant que tels, mais d’acteurs en communication avec courante est « cadrée » par ce type de données, sitôt que l’on
d’autres acteurs ou/et avec des dispositifs technologiques3. vise des actes qui ne supportent pas l’approximation en
Cette notion de réciprocité entraîne une vision plus large du fonction de l’efficacité attendue ou bien ne méritent pas
message comme une confrontation et adaptation des acteurs d’observer une variété élevée : actes banalisés. La complexité
au sens émis et interprété dans les situations de communica- du monde s’avère donc réduite par l’information normée du
tion. Nous garderons pour cet article, les concepts d’émetteur, noyau communicant des messages.
de récepteur et de message, pour permettre un dialogue avec
les concepts inhérents aux systèmes d’information et pour
tenter de saisir les flux de ces dits messages. Toutefois, 1.2. La marge
retenons que le cadre dans lequel s’inscrivent ces derniers
sont évoqués dans une dynamique systémique d’interaction et Cette strate d’information, comprise dans certains messages,
donc de réciprocité. On utilisera également le terme d’usager admet une part d’ambiguïté d’interprétation. Elle accepte un
pour illustrer l’appropriation par l’acteur du dispositif commu- « jeu » autour du sens voulu par l’émetteur et que le récepteur
nicationnel mis à sa disposition. peut ou non utiliser. On peut illustrer cette strate en évoquant
Nous proposons de faire l’hypothèse que la communication, la lettre (le noyau) et l’esprit (la marge) de la loi, par exemple,
donc le message comporte trois strates d’usage.

2. Les universitaires diraient qu’il existe des frontières difficilement franchis-

1.1. Le noyau sables, dans les pratiques actuelles, entre la vingt-septième section de CNU
(informatique), la sixième (gestion) et la soixante et onzième (information et
communication).
3. par dispositifs, nous entendrons ici les « logitechnologies » c’est-à-dire des
Partie constituée de données, c’est-à-dire d’items information- assemblages complexes de logiciels, de techniques, de technologies et de
nels non équivoques, à très faible bruit, cette strate sert à modes d’emplois construits pour un usage projeté.

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le règlement et son interprétation dans une procédure adminis- un signe… provoquant la « visibilité de l’invisible ». Les poten-
trative tout comme le prix fixé d’un produit et la possibilité que tialités techniques du multimédia et la complexification crois-
s’octroie le commercial de le négocier. Cet espace d’interpré- sante des systèmes d’information et de communication
tation qui introduit une certaine liberté pour le récepteur réinterrogent la position de l’usager, son identité, son rapport
s’avère à la fois précieux et dangereux pour les deux acteurs à la fois technique et social aux outils et aux artefacts. Sont

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de la communication. En effet, le jeu communicationnel s’ins- engagés, entre autres, les rapports entre corps et dispositifs
taure via cette marge qui permet l’adaptation, la prise en techniques, entre besoins d’information et actions situées,
compte du contexte : lieu, temps, situation. On peut parler entre sujets acteurs ou spectateurs et supports médiatiques
dans une métaphore informatique de paramétrage du message aux performances techniques de plus en plus affirmées, entre
selon les caractéristiques du système récepteur : individu, acteurs et organisations dans des contextes de changement
intention, interface, contexte. Si l’information était parfaite- fonctionnel et symbolique.4 Dans cette création potentielle de
ment prévisible, on pourrait s’en passer ! En réalité, toute infor- sens, la place du pouvoir de l’émetteur s’efface puisque
mation est imparfaite puisqu’elle apparaît et est exploitée l’émergence se situe plus dans le construit que dans l’offert.
dans un contexte complexe, imprévisible et changeant, ce qui Tel message peut être du bruit pour celui-ci, et un espace
oblige l’usager à s’adapter en permanence grâce à de fabuleux pour celui-là. Ainsi, la liberté interprétative valorise le
nouvelles évaluations : c’est le principe même des régulations, récepteur puisqu’il est l’acteur premier de sa communication
des rétroactions, du recadrage ou de l’apprentissage… On et, dès lors, émerveillé par sa création. « Émerveillement qui
peut donc la définir objectivement comme improbabilité tient au fait que, passer par l’imaginaire pour solutionner un

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physique et quantitative et subjectivement comme un problème, cela permet de rendre la réalité proche et sensible,
paramètre d’appropriation. Non seulement cette information facile à saisir et à modeler. La règle pour s’exprimer ainsi ne
est imparfaite, mais nos capacités d’analyse sont limitées et se limite pas à celle de la libre association, chère à la psycha-
nos émotions ou des influences extérieures faussent notre nalyse, elle se prolonge par celle de la « libre anticipation ».
jugement : c’est notre « rationalité limitée », au sens d’Herbert Cette règle postule l’existence d’un langage de l’imaginaire,
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Simon qui s’avère une caractéristique fondamentale du monde langage duel et contradictoriel ; langage étrange pour tous ceux
de l’information. On peut préciser que cette marge va souvent qui, experts en rationalité, voient le monde à travers leur seule
se matérialiser, en informatique, dans la possibilité d’interac- discipline. Ce langage, lorsque nous nous donnons la peine de
tivité. Ainsi l’usager sera autorisé ou invité, via un feed back le solliciter, et de nous y couler, nous indique le sens à
prévu, à réagir. L’interprétation de cette réaction tendra à emprunter pour agir. Il nous montre que, au cœur des
modifier l’état du dispositif à travers un changement de systèmes du monde, il y a émergence d’un sujet irréductible à
message, de code, de langue, de configuration… Cette ouver- toute autre forme de réalité. » (G. Guelfand-95). Nous contri-
ture par rapport au noyau, au niveau de l’usage des cédéroms buons fortement, via ce halo, à la flexibilité des systèmes
fermés ou multiréférentiels, a déjà été soulignée (C. Noy-99). conçus. G.P. Huber et W.H. Glick affirment que pour survivre,
Ces deux premières strates sont intentionnelles quoique tout système doit nécessairement « être compatible avec son
certainement de prévisibilité décroissante en allant du noyau environnement, et quand l’environnement change pour un état
vers la frontière de la marge. Au contraire, la troisième s’avère devenu incompatible avec la nature antérieure de l’organisa-
largement non prévisible. Nous l’appellerons le halo pour tion, cette dernière a comme options stratégiques : de
suggérer l’improbable genèse de sens esquissée par les s’adapter au nouvel environnement, de se déplacer vers un
éléments mobilisés mais non maîtrisés de la communication environnement plus approprié à sa nature ou d’essayer d’agir
sur l’environnement. » A défaut, ce dernier se chargera de
mettre en œuvre la sélection darwinienne conduisant à la
1.3. Le halo disparition des organisations ou des parties d’organisation
incapables de s’adapter. Via ce halo, on contribue également
Autant les strates précédentes relèvent du structuré, autant à dépasser le mythe de l’utilisateur cher aux informaticiens. Il
cette troisième joue sur le déstructuré, le décalé, le diffus, n’y a pas un utilisateur, voire plusieurs catégories, il y en a une
l’informel, mais aussi sur le libre arbitre vis-à-vis du pouvoir, infinité. En déplaçant cette difficulté pour la dissoudre dans
voire des convenances. On peut assimiler cela à la flamme l’appropriation du dispositif par l’usager, nous abordons
d’une bougie qui recouvre le feu (noyau), la chaleur (marge) et l’approche configurationnelle de l’analyse organisationnelle
la lumière (halo), cette dernière dépendant fortement du que certains théoriciens adoptent en considérant une myriade
contexte (nuit, jour, soleil, vent…), de la perception et de de besoins face aux résultats qu’ils entraînent (F. Ostroff
l’usage. L’imaginaire, et donc la créativité en général, sont co- (2000)). La théorie des carrières de J.H. Holland en est une
substantiels de ce halo informationnel, mais en même temps,
dépendent fortement d’une émergence potentielle. Chacun y 4. Présentation du LIMSIC de l’université de Bourgogne. http://www.u-
trouvera du sens ou du non-sens, une suggestion, un symbole, bourgogne.fr

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typologie exemplaire. L’hypothèse de base de cette théorie Le gap sémantique qui ne cesse de s’accroître, malgré les
énonce que la satisfaction, la stabilité et la réussite profes- efforts, entre concepteurs de SI d’une part et utilisateurs
sionnelle dépendent de la congruence entre la personnalité d’autre part, les nombreux échecs constatés lors des mises
d’un individu et son environnement de travail. Le caractère en place de SI dans les entreprises, la sous-utilisation des
configurationnel de cette théorie provient de sa définition de moyens mis à la disposition des usagers, ne sont que
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congruence qui s’exprime en terme de structure multidimen- quelques critères permettant de constater ces inadéquations
sionnelle des personnalités et des environnements. De fait, entre les productions des SI et les attentes.
elle est évaluée en fonction d’une myriade d’attributs indivi- Le plus simplement possible on peut dire qu’un système
duels, incluant les rôles et les activités préférés d’un individu, d’information consiste en un système complexe qui traite les
et d’un ensemble de besoins environnementaux pour des informations depuis leur naissance, jusqu’à leurs diverses utili-
compétences, des valeurs et des traits de personnalité spéci- sations au cours du temps, par différents acteurs au sein
fiques. Ces attributs construisent de la même façon l’appro- d’une organisation. Il assure donc les processus de collecte,
priation des dispositifs d’information et de communication de saisie, de stockage, de transformation, de transmission et
selon les usages. de restitution de l’information sous des formes variées selon
Nous venons ici de décrire, ou plutôt d’évoquer, trois aspects les usages qui en sont faits, ou qui devraient en être faits.
de la communication, que nous avons appelés strates car ils Le système d’information doit donc être, à la fois, décrit par
se superposent. Cette proposition ne saurait occulter que ces des modèles (schémas abstraits traduits en flux, logigrammes,
aspects se combinent, se complètent et s’englobent mutuelle- MCD,…), par ses constituants physiques matériels (les

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ment. Cette vision complexe de la communication se machines et les logiciels), mais aussi par les hommes qui
démarque de l’acception classique qui réduit souvent le jouent un rôle essentiel dans le traitement de l’information,
concept à la première, voire à la deuxième strate, en privilé- sans oublier les outils traditionnels tels que le crayon, le
giant le rôle de l’émetteur. Nous allons maintenant nous papier, les classeurs, le téléphone, la photocopieuse et le
intéresser à la notion de Système d’Information et aux bouche à oreille… et par des usages (automatisation, commu-
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problèmes que l’on rencontre lors de sa conception et de son nication, illustration, simulation…) qu’il va initier, entraîner,
utilisation. contraindre ou permettre.
À l’idéal, dans une entreprise ou entre plusieurs entreprises,
ce système doit permettre de faire circuler rapidement une
2. Le système d’information : information de qualité entre les différents acteurs, de délivrer
repères et critiques la bonne information, au bon interlocuteur, au bon moment,
pour que la décision appropriée puisse être prise ou pour que
Le système d’information, même pour les spécialistes du l’action entreprise soit adaptée à la situation.
domaine est un concept difficile à appréhender et à décrire. Le Quels que soient les moyens utilisés (mémoire humaine ou
nombre important de tentatives de définitions que ce concept base de données, calculette ou ordinateur, téléphone ou
a suscité dans la littérature (L. Rigaud-84, J.A.Senn-87, E. Internet…) le système d’information devrait donc contribuer de
O’Brien-95, R. Stair-96, J.-C. Courbon-97, I. Benbasat et manière évidente aux performances de l’organisation ou du
R.W.Zmud-99, S. Alter-01) montre bien la difficulté de le réseau organisationnel.
positionner de manière claire et précise. Les uns parlent plutôt Les données saisies au plus près de leur émergence sont
du système des informations c’est-à-dire de l’ensemble des mémorisées une et une seule fois et restituées aux utilisateurs
informations qu’il s’agit de posséder pour fonctionner et sous la forme la mieux appropriée, après avoir subi les traite-
décider, les autres focalisant plus sur les moyens matériels ments pertinents. Ce système idéal éliminerait donc toute
(machines, connexions, logiciels) à mettre en œuvre pour rupture de forme, de sens, de support, de qualité… Cette
traiter, stocker…, les informations, d’autres encore privilégiant homogénéité générale n’a pas été, n’est toujours pas, l’apa-
les aspects organisationnels ou humains dans ces systèmes. nage majeur des systèmes d’information actuels, même si les
Le caractère à la fois diffus au sein de l’organisation et englo- divers protagonistes ont fait beaucoup d’efforts dans ce sens.
bant tout ou partie des activités de celle-ci, rend le concept de Le nouveau concept à la mode, l’urbanisation des SI, a pour
SI difficile à cerner. tâche première, après avoir cartographié les applications
Pour les non spécialistes le SI reste souvent une notion à existantes, d’établir cette homogénéité généralisée.
fortiori encore plus abstraite, sans représentation très précise, Sur le plan mangement, les SI se fondent le plus souvent sur
faute d’un minimum de formation sur ce thème. Ceci constitue une acception de l’organisation de type X, dans la typologie de
pour les utilisateurs un frein au dialogue avec les experts en D. Mac Gregor, en renforçant plutôt le conformisme et la repro-
systèmes d’information et au développement harmonieux de duction de normes impératives. Rares sont ceux qui tentent,
solutions adaptées à leurs vrais besoins et à ceux de l’entre- dans le cadre d’une acception de l’organisation de type Y, de
prise. s’appuyer sur la part créatrice, instituante, de l’imaginaire

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social en pariant sur l’ouverture et la confiance dans les poten- de solution technique. Il résulte d’une appropriation par les
tialités novatrices de l’acteur organisationnel dans son environ- utilisateurs en situation opérationnelle réelle et se développe
nement. plus ou moins selon les conditions dans lesquelles s’opère le
Plus précisément et en restant simple, on peut dire qu’aujour- processus de changement. L’usage est donc ce que les gens
d’hui quatre grandes familles de solutions « systèmes d’infor- font effectivement avec les objets et dispositifs techniques (P.

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mation » existent dans le domaine de la gestion : les PGI Breton et S. Proulx-2002). Se focaliser sur l’usage (C.
(Progiciel de gestion intégré), les assemblages de « progiciels Bachelet-2004) comme élément de conception du système
métiers » (best of breed) reliés entre eux par des solutions d’information et de ses outils peut devenir l’expression
d’interfaçage, les systèmes distribués en réseaux interactifs concrète d’une valeur ajoutée « globalisée » des systèmes
(technologies Internet et outils de travail collaboratif) et les d’information.
systèmes embarqués à forte virtualité. Comme le signale On introduit donc à la racine de la conception des SIC, soit un
J. Link-Pezet « Le changement de forme de l’information, sa paradigme centré sur la cohérence du projet de concepteur
virtualisation, induisent de nouveaux rapports à l’information, utilisant les méthodologies classiques, soit un parti pris
et un nouveau rapport à la connaissance. Mais, phénomène constructiviste privilégiant le potentiel de l’usager.
plus important encore, l’ingénierie simultanée des fonctions Dès lors, si l’on tente de répertorier les différents usages
invariantes de l’organisation d’un système d’information – observés en se plaçant du côté de « l’offre » (C. Bachelet-
mémorisation, traitement, communication…- donne lieu à la 2004), on peut décrire des catégories suffisamment typées
création d’une mémoire collective dont les caractéristiques pour qu’elles soient souvent devenues le support de métiers

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majeures sont l’hétérogénéité et la distribution ». La concep- différents – Ingénieur réseau, infographiste, webmaster, cogni-
tion et la mise en œuvre de systèmes d’information et de ticien, ergonome… – inter venant dans l’architecture, la
communication new look incluant des outils collaboratifs, conception, la réalisation de systèmes d’information. Citons
créatifs, virtualisants… reste encore balbutiantes. La frilosité les différents usages que la littérature évoque ou que notre
des pouvoirs en place peu désireux d’introduire des ferments expérience a relevés :
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de dérive potentiellement non maîtrisables, la carence de – un usage normalisant : Les systèmes informatiques tenant
formation des experts actuels en la matière, la peur du lieu de systèmes d’information servent à normer ou norma-
désordre, sont autant de freins. liser les procédures, à répertorier les flux physiques et infor-
Tentons néanmoins d’esquisser quelques voies de réflexion mationnels. Il en est ainsi pour les logiciels de comptabilité,
sur ce que pourraient être aujourd’hui ces nouveaux types de de gestion des commandes, des stocks et des clients.
systèmes d’information et de communication. – un usage structurant : En excédant la codification stricte qui
est à la base de l’usage précédent, on peut désirer impulser,
via le SI, une rigueur dans certaines conduites ou stratégies.
2.1. Système d’information Ainsi l’aide à la décision, les opérations marketing, le traite-
et de communication : ment du courrier, la gestion financière… sont souvent
sujettes à volonté de suivi de procédures explicites et maîtri-
une approche centrée sur l’usage sées. La raison en est souvent le contrôle possible à priori
Le rôle qui devrait être dévolu au SIC serait d’apporter à l’orga- et à posteriori de l’efficacité à l’aide de tableaux de bords,
nisation une valeur ajoutée maximale, tant d’un point de vue ou de variables essentielles évoquées dans l’AMS (J. Melese
économique (rentabilité, compétitivité, bench marking…), que -71).
de points de vue humains et sociaux (épanouissement, créati- – un usage communicant : Au-delà de la bureautique classique,
vité, développement humain…). La question n’est plus de les nouvelles technologies, et notamment les réseaux, ont
savoir s’il existe une solution technique répondant à un besoin, développé cet usage. Ainsi les intranets, Internet, et
mais quelle est la solution à la fois organisationnelle, autres liaisons décrivent des capacités de transmettre vite et
technique, humaine et économique, qui répondra réellement loin, des masses considérables d’information plus ou moins
aux objectifs de performance de l’organisation et qui ne en interactivité. Sans sortir totalement des critères normatifs
bridera pas le potentiel individuel et collectif des acteurs y précédents puisqu’il existe des normes de présentation, ou
contribuant. des obligations techniques limitantes, on trouve ici de
Or, il est malheureusement très fréquent d’observer que des nouvelles exigences, de nouvelles ambitions, donc de
solutions techniques retenues restent confinées dans l’espace nouveaux concepts.
traditionnel de la productivité stricto sensu, selon le modèle – un usage illustrant : L’apport du numérique au traitement du
strictement utilitariste du « transfert d’informations ». C’est ce signal et de l’image permet d’investir le champ de l’icono-
que nous appellerons un usage à minima des possibilités graphie illustrative par la manipulation des documents multi-
offertes. Or, l’usage ne se décrète pas comme une validation média intégrant le son, l’image et l’interactivité (C. Huriet,

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98). Il existe tout un travail théorique et pratique à


développer sur l’image, sa nature nouvelle, son statut, ses
2.2. Intersection des domaines
impacts… et son usage dans la communication profession- Le lecteur qui aura parcouru les lignes précédentes esquissera
nelle. de lui-même cette intersection. En effet, la fonction d’un SI
– un usage virtualisant : Nous entendons par ce terme la possi- dans l’organisation relève de deux enjeux posés par le pouvoir :
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bilité d’utiliser des micro-mondes virtuels au sens de – L’enjeu de pilotage consistant essentiellement en une réduc-
P. Queau, pour montrer ou tester : montrer des choses qui ne tion pertinente de la variété du système piloté et qui va
sont pas (anticipation) ou plus (archéologie) dans un recourir majoritairement à des outils (techniques et concep-
réalisme permettant un imaginaire partagé. Tester des tuels) de normalisation.
actions hors de la réalité afin de réduire le risque pour les – L’enjeu de développement de valeur ajoutée nécessité par la
acteurs ou l’environnement en simulant des actes à des fins compétition qui va développer plutôt des solutions ouvertes
d’apprentissage ou de recherche. et valorisantes pour les acteurs et dont pourrait profiter à
– un usage mutualisant : La minimisation des contraintes moyen terme l’organisation.
d’espace et de temps donne cours à la réalité d’un travail Sans prétendre à l’exhaustivité, nous évoquerons quelques
collaboratif mutualisant les apports d’acteurs distants. Des pistes qui sont déjà soit entamées, soit esquissées, soit
outils d’accès intelligents à l’information, à la réalité virtuelle émergentes.
en passant par la structuration spécifique de bases de En partant d’un modèle à trois processus fondamentaux (Y.F.
données à accès collectif, la modélisation, le partage et Le Coadic, 94, N.G.Dragulanescu-99) qui se succèdent cycli-

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l’échange de connaissances, le développement de plates- quement et indéfiniment et qui met en évidence :
formes logicielles pour l’intercommunication, le champ – La construction de l’information en conformité avec les
d’application est immense et seulement en début d’exploita- besoins et attentes existantes de ses usagers afin
tion. d’obtenir/générer l’information à partir des événements de
– un usage gratifiant : La mise à disposition de moyens infor- l’environnement et/ou du savoir existant et de réaliser ses
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matiques, graphiques et multimédia, ouvre la voie à la supports.


création « new look » dans laquelle chacun, à son niveau, – Le traitement de l’information par le biais des sous-
exprime ses sensations artistiques, de découverte ou d’inno- processus de transformation, organisation, représentation,
vation, d’abord pour son propre ego, puis éventuellement communication, stockage de l’information et/ou de son
pour la collectivité via la mise à disposition publique. L’art support afin d’obtenir davantage de valeur ajoutée de l’infor-
numérique est une forme d’art émergente dans laquelle mation traitée pour l’usager.
chacun s’approprie des « palettes logicielles » (iLife, – L’usage de l’information, c’est-à-dire le processus de conver-
GarageBand, Artrage…) favorisant la créativité en éliminant sion de l’information à valeur ajoutée en connaissances, afin
les obstacles des outils traditionnels (pinceau, instrument de de diffuser et d’exploiter le plus avantageusement possible
musique…). l’information traitée et la transformer en connaissances et
– usage fertilisant : L’accès à un monde numérique quasi infini en actions.
quant aux connaissances et aux savoirs donne à penser à À l’évidence, il manque, par rapport aux différents usages
des apprentissages individuels ou collectifs particulièrement évoqués ci-dessus, un usage communicant et un usage grati-
efficaces par le fait qu’ils sont souhaités, désirés et souvent fiant. Cette carence s’explique par le fait que, dans la plupart
finalisés. des modèles, l’on ne considère pas le bon vouloir de l’usager,
ou plutôt on suppose que ce dernier est toujours parfaitement
On peut imaginer tout le potentiel mis à disposition des disposé, réceptif, capable de recevoir. Ainsi on a eu, histori-
« usagers » par cette offre. A. Vitalis indique que ces derniers quement, d’abord le paradigme « le système technique de
(ré) agissent selon trois logiques : commande ». Ce courant occulte purement et simplement la
– une logique technique qui va définir pour eux le champ des dimension de l’utilisateur : ce dernier est considéré comme un
possibles. Ils estiment pouvoir ou ne pas être capables de maillon « robotisé » de la chaîne logique de traitement.
s’insérer dans le dispositif communicationnel offert. Progressivement, d’autres problématiques se sont intéressées
– une logique économique qui détermine le champ des utilisa- auxdits utilisateurs. C’est le « paradigme orienté utilisateur »
tions rentables à l’aune de leur projet personnel ou collectif. qui apparaît dans les années 80 (J. Martin-85) avec de
– une logique sociale qui détermine la position particulière de nouvelles définitions du système d’information et de l’utilisa-
l’usager selon ses besoins et désirs affectifs ou sociétaux. teur final : le système d’information est considéré comme un
C’est l’interaction entre ces trois logiques qui va donner vie système de communication entre un producteur d’information
aux usages observés dans la pratique et faire émerger du ou auteur et un utilisateur pouvant se situer à plusieurs
sens, de l’action, de l’efficacité, ou bien du rejet, du détour- niveaux de compétence ou de droits d’accès. Dans les années
nement, de la déviance… 90, émerge un nouveau « paradigme orienté usages » qui

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permet de clarifier les notions d’usage et d’usagers notam- droit à la parole, et si oui, s’ils sont capables d’analyser
ment. Pour S. Chaudiron et M. Ihadjadene, « le paradigme d’abord, d’exprimer ensuite leurs vrais désirs d’information. En
usager considère que l’attention doit être portée sur les fait, en introduisant un paramètre humain, on convoque impla-
besoins réels de l’usager et son environnement. […] ». Depuis cablement la notion d’usage (J. Perriault, 1988). Dès lors, soit
on n’a pas vraiment progressé. Même si le paradigme le concepteur décide unilatéralement et brutalement de simpli-

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« usages » permet d’envisager une convergence globale des fier ledit humain en le transformant en un robot infiniment
modèles d’accès à l’information, il laisse à désirer dans le prévisible, et le problème s’en trouve alors évacué via des
domaine professionnel. Par conséquent, nous ne pouvons « variantes » ou « versions » paramétrables, soit le concepteur
nous empêcher de penser que la construction d’un nouveau désire conserver la variété d’un être humain et il doit intégrer
paradigme « acteur », en émergence, serait une étape impor- la dialectique de l’usage dont pourra faire emploi ce dernier, du
tante pour tout ce domaine de recherche (W.Y.B.Cheuk-98). dispositif mis à sa disposition.
L’expérience et l’imaginaire sont intimement liés et s’avèrent Nous parlerons alors de technologie embarquée, c’est-à-dire
au cœur des représentations de l’acteur et de son positionne- de systèmes technologiques et logiques inclus dans le paque-
ment par rapport à l’action proposée dans la situation donnée. tage livré, mais dont l’appropriation par l’usager dépendra de
La confrontation entre un contexte et un projet va permettre de plusieurs paramètres, et du projet de ce dernier (A. Mucchielli,
comprendre le lien entre le contexte spatial, culturel et social C. Noy, 2005).
et ce que l’acteur peut penser mettre en place dans ce cadre, La troisième couche, au-delà des exigences fonctionnelles,
via une utilisation du dispositif (A. Mucchielli, C. Noy-2005). Ce stratégiques, iconographiques ou réticulaires, s’intéresse à

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n’est plus seulement la notion vague d’utilisateur qui doit être l’existentiel de l’usager. Ce qui n’est pas directement lié à
observée, mais surtout l’intentionnalité et la capacité de l’activité banale de l’organisation, ce qui n’est pas exprimable
l’acteur visé. dans le champ du métier, mais qui fait partie intégrante de la
Les relations entre sujets et objets sont d’emblée orientées et communication via ses aspects de créativité, de jeu, de colla-
significatives en raison de leur motivation. Elles s’insèrent boration, d’interactivité, de vir tualité (A. Mucchilli, J.-A.
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dans une interaction dynamique permanente entre activité, Corbalan, V. Ferrandez, 1998). Cette dimension n’apporte pas
milieu, situations et intentions, motivations et besoins directement de valeur ajoutée au processus mais contribue
(conscients et inconscients). La situation et l’intention sont les activement à une « e-transformation » (C.M. Chang, 2005). On
contextes décisifs qui déterminent le projet, la réalisation, vise ici l’émergence de sens imprévisible qui transcende le
l’interprétation et l’évaluation de l’action par les acteurs. Ce décideur, l’acteur, et, plus généralement les membres et parte-
modèle, valable pour l’action humaine en général, s’applique naires de l’entreprise. L’amélioration de la qualité de l’action
par ticulièrement bien à l’activité cognitive et à l’acte individuelle et collective résulte ici de la combinaison des trois
d’apprendre (M. Linard-2001). compétences contributives : compétences d’exper tise
(acquises et/ou par tagées), compétences gestion des
contraintes (pertinence des préactions et des actions), compé-
2.3. Communication confisquée, tences lecture des contextes (lucidité des rapports de force,
communication embarquée, empathie). On pourrait objecter qu’il s’avère difficile de prévoir
l’imprévisible. Certes l’exercice est ardu si l’on se place sur un
communication émergente plan rationnel pur. Plus pragmatiquement, nous proposons une
Lorsqu’il conçoit d’abord, construit ensuite, un SI, l’ingénieur démarche plus heuristique consistant à mettre à disposition
devrait avoir en tête les trois strates évoquées. La représenta- les outils ouverts, inscrits de façon cohérente dans un
tion, la modélisation et la matérialisation des procédures et ensemble définissant le périmètre du SIC et dont l’objectif est
processus prennent à l’origine un tour directif et fermé. de contribuer à des « best practices » favorisant le succès. On
Consciemment ou inconsciemment, l’auteur verrouille les retrouve bien la métaphore de l’urbanisation qui concerne tout
usages qui pourront être faits de « la logitechnologie » des autant les structures dures et structurantes, que les lieux
dispositifs imaginés. Non seulement il n’y a pas lieu d’inter- concrets et virtuels d’échange, et les manifestations construc-
préter, mais une conduite déviante de l’utilisateur contrarierait tivistes de sens activées par les usagers.
profondément les performances du système. Nous avons parlé
de noyau. En conception de SI, on parle plus volontiers de
cœur du système constitué par « les briques de base à partir 3. La conception globale
desquelles il sera possible de concevoir une architecture du système d’information.
globale adaptée aux besoins. (B. Bruller-2003) »
La seconde couche consiste à traiter dans une logique compa- Illustrations
tible les besoins des utilisateurs. On n’exhumera pas ici la La conception globale, c’est-à-dire tenant compte de tous les
vieille controverse consistant à savoir si les utilisateurs ont usages qui viennent d’être signalés, devient donc une néces-

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sité pour faire des choix pertinents de solutions technolo- lité », mais qui restent liés à la branche officielle. Certes le ton
giques, organisationnelles et communicationnelles intégrées et les thématiques peuvent trouver là un registre moins formel
dans le SI et favoriser ainsi son efficacité actuelle et future. ou moins contrôlé que dans la communication institutionnelle
Quels que soient l’entreprise, le secteur et la stratégie en habituelle, mais le jeu du pouvoir n’est pas complètement
place, l’impératif innovateur devient incontournable si l’on expulsé. On peut aussi trouver des blogs sur l’entreprise,
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souhaite résister à l’aspect corrosif de la mondialisation : La c’est-à-dire des blogs écrits par des membres de l’organisation
mise à disposition de systèmes de communication globalisés mais de leur propre initiative et sous leur propre contrôle, ce
devrait certainement permettre de générer une valeur ajoutée qui les rend beaucoup plus affranchis de l’emprise hiérar-
à moindre coût. chique. Selon P. Lombard, un blog d‘entreprise ou sur l’entre-
Cette conception globale du système d’information comprend prise peut répondre à quatre fonctions :
presque toujours un acquis (existant), une culture d’entreprise – Un tableau d’affichage sophistiqué. Le blog s’avère alors un
et une stratégie de changement. La refonte propose une moyen d’expression et d’information attrayant par sa
urbanisation du SI dans une acception largo sensu. Lorsque nouveauté et son interactivité. Mais dans le cadre de l’entre-
les urbanistes s’attaquent à une ville, ils doivent souvent créer prise, l’usage du blog peut largement dépasser cette
ou réhabiliter des habitats, des équipements structurants, des fonction première. Il peut servir à mesurer le climat social
réseaux de circulation, marier des données naturelles, socio- d’une entreprise en exprimant hors circuit ce que pensent les
logiques et technologiques, tout en respectant le vécu collectif salariés des évolutions de l’organisation : nouveaux équipe-
des habitants, de leur espace de vie. Il en est de même pour ments, nouvel organigramme, nouvelle conduite de projet,

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les SI. L’assemblage de logiciels parfaitement interfacés, de revendications les plus fréquentes…. Si l’on poursuit la
réseaux parfaitement sécurisés, la structuration de bases de réflexion dans cette direction, les outils performants d’ana-
données et de connaissances parfaitement agencées… en lyse et de mise en relation d’idées dont sont ou vont être
fait, tous les outils privilégiés des experts en conception de dotés les éditeurs de blogs, pourraient faire office de
systèmes d’information ne sauraient être suffisants. La vie, le délégués syndicaux virtuels dans les années à venir (B.
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travail, l’expression des acteurs restent trop souvent exogènes Stone, 2002). Évidemment cette liberté d’expression peut
à cet univers. déranger les arcanes de l’organisation veillant sur la rigueur
Au-delà du phénomène du mail qu’il faut considérer comme et traquant la déviance5.
une révolution dans l’information et la communication (N. – Un outil de transparence sociale de l’organisation. Des entre-
Boukef, M. Kalika, 2002), aujourd’hui, on voit fleurir dans les prises ont opté pour la mise à disposition de blogs auprès de
organisations, hélas la plupart du temps en verrues plus ou leurs collaborateurs de manière à ce qu’ils puissent bloguer
moins spontanées, les blogs et les wikis et demain autres librement sur leur entreprise. Microsoft, Macromedia ou
choses encore. Tentons d’en esquisser l’usage dans les SIC encore Sun6, par exemple, offrent ainsi à leurs employés la
qui pourrait aller dans le sens que nous indiquons. possibilité de tenir leur propre blog, de manière à mettre en
relation les utilisateurs des produits de l’entreprise avec
ceux qui les développent.
3.1. SIC et blogs – Un outil collaboratif à part entière. Le blog peut faciliter les
échanges entre les collaborateurs d’une entreprise en vue de
Apparu aux États-Unis à la fin des années 1990, contraction de faciliter la capitalisation et le partage de connaissances.
Web Log, un blog est un site web sur lequel une ou plusieurs Ainsi pour ceux qui travaillent sur un projet commun, l’infor-
personnes s’expriment de façon libre, sur la base d’une mation est publiée de manière centralisée sur le blog et les
certaine périodicité. Le flux d’actualités est décomposé en membres de l’équipe projet, abonnés au fil RSS
unités chronologiques, susceptibles d’être commentées par (G. Balmisse, 2005) du blog, sont alors avertis et peuvent
les lecteurs et le plus souvent enrichies de liens externes. Le réagir en publiant leurs commentaires. De plus, la publica-
blog se transforme en une sorte de chat électronique, l’ano- tion chronologique des notes se prête parfaitement aux
nymat aidant au « blogo-squat », c’est-à-dire à un bavardage qui spécificités d’une logique de suivi de projet. Le dispositif vise
s’entretient tout seul, sans rapport avec le point d’entrée d’ori-
gine. Un blog accepte souvent dans ses commentaires les
critiques de ses lecteurs, par exemple des critiques sur le non- 5. « Dans les entreprises, les services informatiques sont par fois opposés au
déploiement d’une solution de blogs car cela leur enlève du travail et de l’impor-
respect de principes de base comme la sincérité ou la tance. Pareil pour les services de communication qui ne sont plus le passage
netiquette. On assiste à une montée en force des blogs stric- obligé pour parler à l‘extérieur (passage obligé souvent par la nécessité de
formaliser en mode web ou cd ou dvd sur des outils traditionnels). Les utilisa-
tement privés, inaccessibles au public non invité spécifique- teurs/fonctionnels finaux y sont bien sûr favorables puisqu’ils peuvent ainsi
ment – ils formeraient même une majeure partie de la éviter de s’adresser à d’autres ser vices. ». Forum PointBlog. com.
http://www.pointblog.com
blogosphère. On peut donc trouver des blogs d’entreprise mis 6. http://www.microsoft.com/france/blogs/blogs.msp, http://www.markme.com,
en ligne par l’organisation pour créer un « espace de convivia- http://blogs.sun.com

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aussi les utilisateurs extérieurs (clients, propects, prescrip- 3.3. SIC et wikis
teurs…) pour sortir de la communication monolithique
classique du marketing ou du bench marking. Instrument récent, un wiki est un site web dynamique permet-
– Un outil de gestion des connaissances. Avec sa relative tant à tout individu d’en modifier les pages à volonté. Il permet,
liberté de contenu et son accès large sur Internet ou sur non seulement de communiquer et de diffuser des informa-

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intranet, le blog peut devenir un véritable outil de gestion des tions rapidement, mais de structurer cette information pour
connaissances dans l’entreprise : état de l’art, d’abord, permettre d’y naviguer commodément. En fait, ce système
concernant les acquis et veille sur tel ou tel domaine, puis permet plutôt d’améliorer la qualité des documents de manière
contribution à une culture d’entreprise illustrée et partagée particulièrement rapide : dès qu’une information est modifiée,
par des acteurs actuels et passés (retraités, replacés…). Le les contributeurs réguliers qui s’intéressent à la page en
blog peut enfin servir à représenter le savoir-faire d’un colla- question peuvent aller vérifier, corriger ou compléter l’informa-
borateur de l’entreprise, savoir-faire incluant aussi ses tion. La notion de producteur et de consommateur d’informa-
compétences excédant son travail dans l’entreprise et la tion tend à disparaître, en raison de la fluidité avec laquelle il
possibilité qu’il a de mobiliser un réseau via ses listes de est aisé de mettre en ligne ou de modifier de l’information,
contacts. Outre l’intérêt de ce réservoir gratuit de potentia- consultée ultérieurement par d’autres. La différence avec les
lités utile en matière de GRH interne et externe, le titulaire blogs tient au fait qu’un wiki soit ouvert à la modification par
du blog en retire une valorisation de son image, un élément ses visiteurs contrairement à la plupart des blogs qui restrei-
incontestable d’accomplissement de soi qui le rendra plus gnent la modification à son auteur ou un nombre limité de

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épanoui dans son activité organisationnelle stricte. personnes autorisées. La thématique plus resserrée du wiki
En résumé ce qui constitue l’apport essentiel du blog réside peut également être retenue comme différence entre ces deux
dans l’espace de communication libéré qu’il constitue. Libéré medias. Dans l’entreprise, on pourrait trouver là une ressource
des contraintes hiérarchiques, professionnelles, de forma- privilégiée pour le travail mutualisé ou collaboratif sur tel ou tel
lisme, voire de bienséance, ce lieu « marginal sécant » comme processus, tel ou tel problème. Dans les organisations prêtes
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dirait Crozier convient parfaitement à la marge jusqu’au halo à accepter la pratique collaborative hors rang, cet outil peut
communicationnel. rendre des services extraordinaires d’autant plus que la
communauté contributive est encouragée, voire valorisée.

3.2. SIC et RSS


3.4. Vers une proposition
Mis au point en 1999 par Netscape, puis amélioré par la pour les futurs SIC
société UserLand Software, le format RSS connaît à l’heure
actuelle un succès pour le moins inattendu. Initialement conçu Ces différents outils peuvent contribuer à apporter des
pour faciliter l’agrégation de contenu pour des sites portails, il éléments de marge et de halo, à générer de la variété créatrice
est aujourd’hui utilisé pour diffuser du contenu directement aux SIC. « La variété, c’est l’autre face de la redondance : en
auprès des utilisateurs, contenu généralement issu de sites affirmant que la redondance permet d’accéder au sens, L. Sfez
spécialisés, de blogs ou de sites d’actualités (G. Balmisse, nous donne une des clés du passage de la redondance à la
2005). Même s’il existe plusieurs protocoles, l’usage en est variété. C’est parce qu’il y a redondance, répétition, équipo-
simple et intuitif. L’usager n’a plus besoin de naviguer sur la tence ou totipotence, de sens et d’institutions, que le système
toile, de surfer au gré des mots-clés, il est relié en temps réel atteint au sens, le cerne et l’affine. C’est par là qu’il se donne
à la source d’information qu’il a lui-même sélectionnée. On voit de la marge, qu’il se donne un degré de liberté qui lui permet
tout l’intérêt du dispositif en termes de veille technologique ou de se maintenir, de faire face, de survivre en se transformant·.
d’actualité, de mise à jour des versions utilisées, d’informa- Il faut faire la part entre les systèmes d’adhésion et les
tions désirées. Gain de temps, facilité de mise en œuvre, on systèmes d’usage. Selon C. Argyris et D. Schön, l’adhésion
évoque ici une procédure de communication très novatrice concerne ce que nous disons sur notre manière d’agir, tandis
dans son esprit puisqu’elle suppose une information ciblée, que l’usage concerne ce que nos actes révèlent sur notre
choisie et interactivée en permanence. La seconde utilisation manière de faire. La transposition de cette distinction au
potentielle est, en termes de marketing, basé sur la proximité monde des SI permet de mettre en évidence la différence à
avec les clients ou les prospects. En effet, on peut diffuser de faire entre technologies d’adhésion et technologies d’usage.
l’information d’une manière plus personnelle et moins institu- Les premières représentent celles qui sont voulues et instal-
tionnelle dans la mesure où l’origine et la cible du flux d’infor- lées dans les bureaux, c’est-à-dire les modules intégrés de
mations peuvent être parfaitement identifiées. Une telle matériel et de logiciels comportant des caractéristiques prédé-
stratégie place les blogs dotés de RSS comme des outils privi- finies. Les secondes sont celles qui sont effectivement utili-
légiés de gestion de la relation client. sées et correspondent « aux caractéristiques spécifiques

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auxquelles nous faisons appel d’une manière particulière en apprendre à cheminer dans l’obscurité et l’incertitude » (E.
fonction de nos compétences, de nos activités, de notre atten- Morin, 2003)
tion et de nos objectifs »7. L’exemple du système Lotus Notes, Elle renvoie à une volonté affirmée de relâchement des
illustre cette situation. Conçu pour faciliter la collaboration normes et des contraintes pour redonner de la richesse aux
dans le travail, cet outil est présenté par les directions d’entre- systèmes en facilitant l’expression des acteurs qui le désirent.
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prise comme un moyen de transformer le mode, le lieu et le Acteurs internes qui font avancer les situations, les savoir-
temps de travail. L’adhésion à cette technologie, ne s’est pas faire, les usages dans un projet partagé, acteurs externes
traduite chez les utilisateurs par plus d’efficacité réelle. C’est ayant droit de regard ou d’avis sur les actes, procédures et
parce qu’elles se concentrent sur les technologies d’adhésion produits afin d’en accroître et d’en partager la valeur ajoutée.
et qu’elles n’établissent pas la distinction entre adhésion au
concept et usages effectifs que les politiques d’informatisa-
tion des entreprises échouent fréquemment ou n’apportent Conclusion
pas les résultats escomptés.
En fait, les enjeux des SIC sont pluriels selon les acteurs impli- Au terme de cet « inventaire problématique », certains seront
qués, de la direction stratégique à l’usager, en passant par les frustrés de ne pas trouver de solution, même si nous avions
fournisseurs et les responsables informatiques. En privilégiant annoncé que là n’était pas notre but. Le monde de l’entreprise
l’hégémonie de la rationalisation des SI, ce qui peut paraître et, plus particulièrement le monde de l’informatique de
cohérent dans une société de concurrence et de compétition, gestion, sont friands de ces solutions miracles qui surgissent

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on s’expose à des usages minorés, voire pervers, des de temps en temps. Des MIS (management information
systèmes mis en place. system) d’hier, à la SOA (Architecture Orientée Service) (F.
En somme, le système d’information et de communication que Marguerie, 2004) d’aujourd’hui, les livres et les articles sont
nous proposons doit être, en utilisant une métaphore, un jalonnés de ces tentatives d’intégration qui passent par des
compromis pertinent de « cathédrale et de bazar »8. acronymes prometteurs pour s’enliser dans l’impératif du
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La cathédrale correspond à la partie parfaitement structurée, R.O.I. (retour sur investissement) et l’hégémonie des
sécurisée et stabilisée du SI, constituée essentiellement d’élé- « experts » c’est-à-dire de ceux qui n’ont qu’une seule spécia-
ments de communication de type « noyau ». C’est bien, c’est lisation. Nous avons tenté de montrer que les dispositifs
référentiel, c’est traçable, c’est régulateur pour le pouvoir existent en quantité, en diversité et en qualité. La technologie
organisationnel. Mais c’est plein d’entropie et d’immobilisme, n’est pas en cause, elle est même, croyons-nous, orpheline de
c’est frustrant pour les acteurs qui doivent passer sous les pratiques innovantes qui exploiteraient mieux les nombreuses
fourches caudines de la pyramidale logique des managers. potentialités offertes et à découvrir. Ce qui fait défaut réside
Le bazar représente les différentes possibilités offertes, en une mobilisation pertinente des différentes sciences ou
récupérées ou subies par des outils conviviaux et/ou collabo- disciplines aptes à concevoir des DSOU, dispositifs systé-
ratifs générateurs de néguentropie créative et évolutive. Les miques orientés usage, pour pasticher les acronymes ci-
dispositifs (matériel, logiciel, IHM) doivent intégrer une dessus critiqués. Les concepteurs et les prescripteurs de SIC
capacité d’adaptation forte aux niveaux et aux projets indivi- doivent abandonner l’hypothèse de conformité d’usage des
duels de l’usager. Le matériau informationnel manipulé relève utilisateurs, motivée par une logique d’influence directive.
ici plutôt de la marge et du halo, en incluant un fort degré de Comme nous l’avons esquissé, il devient primordial de penser
potentialité dont l’exploitation dépend des capacités des des systèmes collaboratifs (partage voulu et désiré), des
« data mineurs », de la fertilité du contexte et du degré coercitif systèmes symboliques (créativité souhaitée et valorisée), des
de la hiérarchie. systèmes ludiques (le jeu reste une activité sociale positive),
L’exercice revient donc à un équilibre toujours à renouveler en un mot des systèmes relationnels intelligents qui fassent
entre ces deux pôles de l’ordre et du désordre que l’on sait part à la marge et au halo.
fondateur de la vraie communication, de l’adaptation et de Alors et alors seulement l’entreprise pourra accéder à l’univers
l’innovation. Cette gouvernance des SIC s’éloigne des d’une communication globale où l’acteur, l’usager et le parte-
systèmes d’information conçus comme des générateurs naire trouveront tous, les voies favorisant leur projet individuel
d’entropie et destinés à éviter les déviances trop fréquentes et collectif. « Voilà le grand paradoxe : la recherche du fonde-
ou trop fortes (taylorisme, bureaucratie). « La pensée complexe ment de l’imaginaire conduit au réel, mais la recherche des
sait qu’il existe deux sortes d’ignorance : celle de l’homme qui fondements du réel conduit à l’imaginaire » (E. Morin, 82).
ne sait pas mais veut apprendre, et l’ignorance (plus dange-
reuse) de celui qui croit que la connaissance est un procédé
linéaire, cumulatif, qui avance en faisant la lumière là où
auparavant régnait l’obscurité, ignorant que l’effet de toute 7. C. BACHELET op cit
8. L’expression est de E. S. RAYMOND dans l’article célèbre sur l’environnement
lumière est aussi de produire des ombres. […] Il faut Linux. http://www.freescape.eu.org/biblio/article.php3?id_article = 69.

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La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 223 — Organisation 97

Lombard P. « Blogs : une nouvelle mémoire d’entreprise ? » Le Journal


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Hall. New Jersey. 2001. rigueur) ». DotNetGuru. org http://dotnetguru.org/articles/dossiers/
soadouceur/soaendouceur.htm.
Argyris C., Schön D. « Organizational learning II : Theory, method and
Martin J. « Manifeste pour un système d’information ». les Editions

Performances et/ou Management responsable


practice ». Reading, Mass : Addison Wesley. 1996.
d’organisation. Paris. 1985. Notamment chapitre 3 : l’utilisateur prend
Bachelet C. « Usages des TIC dans les organisations, une notion à
les commandes.
revisiter ? ». Article téléchargeable sur : http://www.aim2004.int-
evry.fr/pdf/Aim04_Bachelet. pdf. Melese J.. « L’analyse modulaire des Systèmes ». Editions
d’Organisation. Paris. 1971.
Balmisse G. « Blogs et wikis. Il faut les utiliser ! ». L’Informatique
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janvier-février 2007
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