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REVSTO-235; No of Pages 7

Mise au point
















Reçu le :
15 janvier 2015
Accepté le :


Les augmentations osseuses mandibulaires

8 octobre 2015
antérieures. Revue de la littérature



Anterior mandibular bone augmentation techniques. Literature

review



J. Guiola,*, G. Campardb, J. Longisa, A. Hoornaertb
Disponible en ligne sur

a Clinique de chirurgie maxillo-faciale et stomatologie, CHU Hôtel-Dieu, 1, place Alexis-
ScienceDirect
Ricordeau, 44000 Nantes, France
b
www.sciencedirect.com Centre de soins dentaires, CHU Hôtel-Dieu, 44000 Nantes, France

Summary Résumé
Introduction. Mandibular edentation may lead to major symphy- Introduction. L’édentement mandibulaire peut aboutir à une
seal resorption making the placement of dental implants impossible. résorption symphysaire extrême ne permettant pas la mise en place
In this situation, bone augmentation techniques are available. The d’implants en l’état. Dans ce cas, des techniques d’augmentation
goal of our study was to make a review of the literature of the different osseuses sont disponibles. Le but de notre travail a été de faire une
techniques in use. revue de la littérature portant sur les techniques utilisées.
Method. A bibliographic research was conducted on the Medline, Méthode. Une recherche bibliographique a été effectuée dans les
Ovid and Cochrane Library databases with the following keywords: bases de données Pubmed, Ovid et Cochrane Library en utilisant les
anterior mandible, bone grafting, mandibular symphysis reconstruc- mots clés suivants : anterior mandible, bone grafting, mandibular
tion. We selected only articles written in English, published from symphysis reconstruction. Seuls les articles anglophones traitant
January 1975 to August 2014 and expressly dealing with anterior expressément des augmentations osseuses mandibulaires antérieures
mandibular bone augmentation techniques. publiées entre 1975 et août 2014 ont été retenus.
Results. Sixty-nine articles were analyzed. Eight bone augmentation Résultats. Les 69 articles correspondant à ces critères ont été
techniques were reported. Bone grafting using iliac or calvarial bone analysés. Huit méthodes ont été décrites. Les greffes osseuses
and immediate or delayed implantation was the most popular d’origine iliaque ou crânienne avec mise en place différée des
technique. The main complications were infection, exposure or implants ont été les plus fréquemment rapportées. Les principales
resorption of the graft, and chin and lip hypo- or anesthesia. The complications postopératoires ont été les infections, les expositions et
other reported techniques (osteotomies, distraction osteogenesis, les résorptions des greffons, et les troubles de la sensibilité labio-
transmandibular implants, mandibular reconstruction plates, fibula mentonnière. Les autres techniques (ostéotomies, distraction osseuse,
free flaps) were more confidential or had specific indications. There implants transmandibulaires, plaques de reconstruction mandibulai-
was no indication for biomaterials excepted if combined with auto- res, lambeaux libres de fibula) ont été moins fréquemment rapportées
logous bone. et leurs indications ont été plus restreintes. Les biomatériaux n’avaient
ß 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. pas d’indication sauf mélangés à de l’os autologue.
ß 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Keywords: Bone transplant, Alveolar ridge augmentation, Mandible,


Bone resorption, Dental implant Mots clés : Transplantation osseuse, Reconstruction de crête
alvéolaire, Mandibule, Résorption osseuse, Implant dentaire

* Auteur correspondant.
e-mail : docteurguiol@gmail.com (J. Guiol).

http://dx.doi.org/10.1016/j.revsto.2015.10.003 Rev Stomatol Chir Maxillofac Chir Orale 2015;xxx:1-7


2213-6533/ß 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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J. Guiol et al. [(Figure_1)TD$IG] Rev Stomatol Chir Maxillofac Chir Orale 2015;xxx:1-7

Introduction
Les résorptions alvéolaires du secteur symphysaire survenant
chez les patients édentés compliquent la réhabilitation
prothétique lorsqu’elles sont majeures. La mise en place
d’implants dans le secteur mandibulaire antérieur nécessite
dans ces cas d’avoir recours à des techniques d’augmentation
osseuse.
Le but de ce travail a été d’analyser, à partir d’une revue de la
littérature, les techniques chirurgicales disponibles.

Méthode
Figure 1. La technique du tent pole, d’après Korpi et al.
Les bases de données PubMed, Ovid et Cochrane Library ont été
interrogées à l’aide des mots clés suivants : anterior mandible, (fig. 1). Ces implants servaient de piquets de tente qui étaient
bone grafting, mandibular symphysis reconstruction. ensuite recouverts par une greffe osseuse iliaque.
Seuls les articles anglophones, publiés entre 1975 et 2014, Les cas de 115 patients traités selon cette technique ont été
traitant des techniques de reconstruction chez des patients publiés depuis 2002 [1,2]. L’âge moyen des patients était de
présentant des déficits osseux post-extractionels et indemnes 65 ans (44–81 ans) et la hauteur résiduelle moyenne était de
de pathologies bénignes ou malignes de la mandibule, ont été 4,8 mm. La technique utilisait de l’os iliaque parfois associé à
retenus. Cette recherche automatique a été complétée par du platelet-rich plasma (PRP). L’augmentation osseuse
une recherche manuelle à partir des références bibliographi- moyenne obtenue était de 9,35 mm.
ques des articles sélectionnés. Les résorptions osseuses ou péri-implantaires observées à
Tous les articles sélectionnés ont été lus par deux investiga- l’issue de cette technique ont été peu étudiées. Marx et al.
teurs. Pour chaque article, les données suivantes ont été [1] ne notaient aucune résorption mais ils ne définissaient
relevées lorsqu’elles existaient : nombre de patients pris en pas leurs critères. Kuoppala [2] mentionnait une résorption
charge, âge moyen des patients, hauteur mandibulaire rési- péri-implantaire moyenne de 0,78 mm à 60 mois de suivi. Une
duelle, technique de reconstruction osseuse utilisée, type d’os atteinte de la sensibilité labio-mentonnière était présente
greffé le cas échéant, moyenne d’augmentation osseuse dans 36,5 % des cas. Aucun auteur n’a décrit d’exposition
verticale obtenue, nombre total d’implants placés, nombre des greffons.
d’implants placés dans le site reconstruit, type et pourcentage Cinq cent cinquante-neuf implants ont été placés. La
de complications. moyenne d’implants par site reconstruit était de 4,8. Le taux
de survie des implants était de 100 % pour la majorité des
Résultats auteurs, de 99,5 % pour Marx et de 97 % pour Kuoppala. Le
taux de succès des reconstructions était de 100 % chez tous les
Soixante-neuf articles répondant aux critères de sélection ont auteurs avec un suivi moyen de 4,7 ans (13 mois à 10 ans).
été retenus. Quarante-huit étaient issus de la recherche auto-
matique et 21 issus de la recherche manuelle. Dix-huit articles
Greffes d’interposition ou greffes en inlay [3–7]
mentionnaient l’utilisation de greffes osseuses d’apposition,
14 mentionnaient l’utilisation d’implants transmandibulaires, Une ostéotomie horizontale de la symphyse résiduelle (ou de
13 mentionnaient l’utilisation de greffes d’interposition, l’ensemble de la mandibule) était réalisée par voie endo-
13 mentionnaient la technique d’ostéotomie en visière, 7 men- buccale en respectant les attaches périostées linguales et
tionnaient la technique de « tent pole », 2 mentionnaient la une greffe osseuse (cortico-spongieuse ou particulée) d’ori-
distraction osseuse, 1 mentionnait l’utilisation de lambeau gine autologue était placée en sandwich dans le foyer d’ostéo-
libre de fibula et 1 mentionnait l’utilisation d’une plaque de tomie (fig. 2). Une vestibuloplastie était parfois nécessaire.
reconstruction mandibulaire. Les cas de 395 patients opérés selon cette technique ont été
publiés. L’âge moyen des patients était de 52,6 ans (36 à
72 ans). Les hauteurs symphysaires résiduelles étaient de
La technique de tent pole
7 à 19 mm.
Décrite par Marx et al. en 2002 [1], cette technique consistait à La greffe osseuse était d’origine iliaque chez tous les auteurs.
aborder la symphyse mandibulaire par voie sous-mentonnière Cette greffe osseuse était associée à des particules d’hydro-
et à insérer des implants plus longs que la hauteur mandi- xyapatite chez deux auteurs [4]. L’ajout de biomatériaux ne
bulaire résiduelle, l’ancrage n’étant assuré que par leur apex semblait pas modifier les suites postopératoires. Stoelinga

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[(Figure_2)TD$IG] Les augmentations osseuses mandibulaires antérieures. Revue de la littérature

d’exposition du greffon. Les implants étaient mis en place


immédiatement ou non.
Les cas de 25 patients ayant été opérés selon cette technique
ont été publiés dans 6 articles. La moyenne d’âge était de
58 ans (20–70 ans). La hauteur d’os initiale, quand elle était
précisée, était inférieure à 8 mm et les gains osseux post-
opératoires allaient de 8 à 15 mm. Les résorptions osseuses
allaient de 1 à 2 mm et intéressaient au maximum 10 % du
volume du greffon. Deux à 6 implants par patient ont été mis
en place pour stabiliser une prothèse adjointe complète ou un
bridge sur pilotis. La grande majorité des études rapportaient
des taux de survie implantaire de 100 % avec une moyenne de
Figure 2. La technique de greffe osseuse d’interposition, d’après Pelo et al. suivi de 30 mois. Les complications péri-implantaires ou pro-
thétiques n’étaient pas détaillées.
et al. décrivaient l’expulsion des particules d’hydroxyapatite
chez 1 patient d’une série de 29, sans que cela n’ait compromis Greffe autologue iliaque [9–11]
la survie de la greffe [4]. La voie d’abord endo-buccale était la plus utilisée. Un seul
L’augmentation osseuse postopératoire moyenne était de auteur utilisait une voie cutanée sous-mentonnière. L’os était
13,1 mm. La résorption, évaluée sur des radiographies pano- utilisé sous forme de bloc ou de particules parfois associées à
ramiques ou des téléradiographies de profil, allait de 11 % à des particules d’hydroxyapatite. La mise en place des implants
3 mois à 28 % à 4 ans. était le plus souvent effectuée dans le même temps opératoire.
Les complications postopératoires comportaient des exposi- Les cas de 85 patients opérés selon cette technique ont été
tions de greffons (3 à 17 % selon les auteurs), des hypo- ou publiés dans 5 articles. La moyenne d’âge était de 54 ans (42–
anesthésies labio-mentonnières persistantes (entre 10 et 31 % 78 ans). La hauteur osseuse symphysaire résiduelle moyenne
selon les auteurs), des séquelles douloureuses au site de était de 7,7 mm. L’augmentation osseuse allait de 8,9 à
prélèvement iliaque (50 % des patients présentaient des 10,5 mm.
douleurs à la marche à 5 semaines postopératoires dans Les complications étaient des expositions osseuses (23 % [11] à
l’étude de Stoelinga et al. [4]). La durée moyenne d’hospita- 77 % des patients [9]) et des hypo- ou anesthésies labio-
lisation était de 4 jours [7]. mentonnières (11 % [10] à 100 % des patients [9]). Un patient a
présenté une fracture de l’épine iliaque antéro-supérieure
Greffes d’apposition ou greffes en onlay secondaire au prélèvement ce qui a nécessité une marche
avec canne durant 6 semaines.
Greffe autologue de calvaria [8] Cent quatre-vingt-neuf implants ont été posés chez
71 patients (2 à 3 implants par patients en moyenne). Le taux
Un fragment osseux autologue cortico-spongieux de calvaria
de survie des implants allait de 90 à 100 % en fonction des
était apposé sur la crête osseuse résiduelle et stabilisé par des
séries avec un recul allant de 30 à 60 mois. Des résorptions
vis (fig. 3).
péri-implantaires qualifiées d’« importantes » étaient parfois
La voie d’abord endo-buccale était la plus utilisée mais un
mentionnées et des péri-implantites étaient décrites dans
[(Figure_3)TD$IG]
abord sous-mentonnier était proposé pour limiter le risque
27 % des implants à 30 mois par Verhoeven [11].

Greffe autologue costale


Les greffes osseuses d’apposition d’origine costale ont été
utilisées par 6 équipes de 1975 à 1988. Dans 3 articles, cette
greffe a été appliquée sur le bord inférieur de la symphyse par
voie cutanée sous-mentonnière de manière à minimiser les
hypoesthésies labio-mentonnières et les résorptions du gref-
fon. Les articles étaient, de manière générale, peu informatifs.

L’ostéotomie en visière [12–14]


Décrite par Härle [12] en 1975, la technique consistait à réaliser
une ostéotomie horizontale au niveau symphysaire se pro-
Figure 3. Greffe osseuse iliaque d’apposition avec implantation immédiate longeant de manière sagittale sur les branches horizontales
d’après Verhoeven et al. jusqu’en regard des angles (fig. 4). Le fragment ostéotomisé

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[(Figure_4)TD$IG] Guiol et al.


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maturation du cal de distraction de 2 mois en moyenne était


respectée avant la mise en place des implants.
Les cas de 48 patients opérés selon cette technique ont été
rapportés dans les articles sélectionnés. La moyenne d’âge des
patients était de 62 ans (36–77 ans) et la hauteur osseuse
résiduelle mandibulaire allait de 6 [14] à 12 mm [15]. L’aug-
mentation osseuse moyenne était de 5 à 7 mm chez les
3 patients de la série de Raghoebar et al. [15], permettant
la mise en place de 6 implants avec un taux de survie à 6 mois
de 100 %.
Dans la série de 45 patients de Perdijk et al. [16], on notait 2 %
de fractures mandibulaires peropératoires, 17 % de fractures
mandibulaires en cours de distraction, 6 % d’infections, 2 % de
perforations cutanées, 28 % d’hypo- ou d’anesthésies labio-
Figure 4. Ostéotomie en visière, d’après Sverzut et al.
mentonnières, 13 % d’« affaissements » du menton et 18 %
d’échecs implantaires.
était ensuite élevé et ostéosynthétisé à l’aide de vis ou de fils
d’acier. Des greffes osseuses iliaques ou des particules
Reconstruction par lambeau libre de fibula
d’hydroxyapatite étaient parfois utilisées pour combler
l’interstice. Un seul article faisait état de l’utilisation de lambeaux libres
Entre 1975 et 1987, 13 articles ont été publiés sur cette tech- de fibula dans le cadre strict de la reconstruction osseuse de
nique. Peu d’articles ont pu être récupérés en raison de leur symphyses atrophiques non iatrogènes à visée pré-implan-
ancienneté et les abstracts disponibles n’étaient pas toujours taire [17] (fig. 6). Les cas de 8 patients, d’une moyenne d’âge de
informatifs. 47,5 ans (38–64) étaient rapportés. La technique consistait à
Les taux de résorptions osseuses du fragment ostéotomisé réaliser l’ostéosynthèse de la fibula conformée sur l’os basal
allaient de 11 % à 9 mois à 52 % à 30 mois. La sensibilité labio- résiduel et à laisser la face supérieure du lambeau exposée en
mentonnière était perturbée chez 61 % des patients dans la bouche pour obtenir une cicatrisation de seconde intention.
série publiée par Mercier et al. [13]. Six mois après l’intervention, le matériel d’ostéosynthèse était
retiré sous anesthésie générale, les implants mis en place puis
La distraction osseuse symphysaire [15,16] enfouis sous le tissu cicatriciel. Une troisième intervention
sous anesthésie générale était réalisée pour la mise en place
La technique consistait à réaliser une ostéotomie horizontale des piliers de cicatrisation et pour remplacer le tissu cicatriciel
de la région symphysaire par voie endo-buccale de manière à [(Figure_6)TD$IG]
obtenir un fragment crestal d’au moins 2 mm d’épaisseur,
à mettre en place un distracteur et à débuter, après une
période de cicatrisation muqueuse de 5 à 7 jours, l’ascension
du fragment crestal au rythme de 0,5 à 1 mm par jour
(fig. 5). Une fois le gain en hauteur obtenu, une période de
[(Figure_5)TD$IG]

Figure 5. Distraction osseuse symphysaire, d’après Perdijk et al. Figure 6. Lambeau libre de fibula, d’après de Santis et al.

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[(Figure_8)TD$IG]
Les augmentations osseuses mandibulaires antérieures. Revue de la littérature

crestal par une greffe de peau. En moyenne, 5,6 implants ont


été mis en place par patient. Les complications étaient mar-
quées par l’échec d’un des lambeaux et des troubles de la
marche persistant chez un patient. Deux implants ont été
perdus pour des raisons infectieuses.

Les implants transmandibulaires [18,19]


Cette technique, décrite aux Pays-Bas dans le milieu des
années 1970 [18], consistait à placer une plaque au rebord
inférieur de la symphyse mandibulaire, certains trous de vis
servant à fixer la plaque et d’autres (4 à 6) servant à insérer
des vis traversant la crête alvéolaire résiduelle pour émerger
en bouche et servir de support à une barre sur laquelle venait
Figure 8. Plaque de reconstruction mandibulaire, d’après Lopes et al.
s’appliquer une prothèse ajointe complète mandibulaire
(fig. 7). La plaque ainsi que les vis étaient en alliage métallique
(or, argent, platine, cuivre). L’intervention était réalisée sous À 29 mois postopératoires, tous les implants étaient présents,
anesthésie générale et par voie sous-mentonnière. aucune complication n’était notée et la patiente était satis-
Les cas de 2122 patients opérés selon cette technique ont été faite du résultat.
publiés dans les articles sélectionnés. La hauteur moyenne
d’os résiduel était de 12 mm. Le taux de succès était compris
Discussion
entre 56 et 100 % selon les études. Le taux de succès chutait de
façon très importante au bout de 15 ans de suivi dans certai-
Les publications portant sur les techniques chirurgicales
nes études.
d’augmentation osseuse ou de reconstruction mandibulaires
antérieures à visée pré-implantaire sont nombreuses et très
L’utilisation de plaque de reconstruction variées. Pour chaque technique d’augmentation osseuse, il
mandibulaire peut exister des protocoles différents en ce qui concerne la
Lopes et al. [20] ont décrit en 2009 le cas d’une patiente de séquence de mise en place des implants et de réalisation
61 ans qui présentait une mandibule édentée extrêmement prothétique. Cette variabilité complique l’analyse de la litté-
résorbée (hauteur résiduelle inférieure ou égale à 5 mm) rature en limitant les possibilités de comparaison.
(fig. 8). Une plaque de reconstruction mandibulaire de Certaines séries ont un faible recul ne permettant pas d’éva-
2 mm d’épaisseur allant d’un ramus à l’autre et 4 implants luer le taux de complication à long terme. Certaines techni-
symphysaires ont été mis en place en un temps opératoire ques parmi les plus anciennement publiées n’ont pas fait
sous anesthésie générale et par voie endo-buccale. La plaque l’objet de publications récentes et il n’est pas possible de
était pré-formée sur un modèle mandibulaire réalisé à déterminer si elles sont toujours d’actualité ou si leur dés-
partir du scanner pré-opératoire. Une semaine après l’inter- affection est liée à des taux de complications tardives rédhi-
vention, une prothèse implanto-portée a été réalisée. bitoires. La méthodologie employée par certains auteurs ne
[(Figure_7)TD$IG] permet pas de comparer objectivement leurs résultats. Les
informations concernant l’âge des patients, la hauteur d’os
résiduelle, le gain osseux, la résorption, le taux de survie
implantaire et le recul ne sont pas retrouvées dans tous les
articles ou ne sont pas standardisées.
Les techniques chirurgicales les plus utilisées depuis
2000 sont les greffes osseuses d’appositions d’os calvarial
(6 articles, 25 patients), les greffes osseuses d’interposition
d’os iliaque (4 articles, 41 patients) et la technique du tent pole
(sept articles, 116 patients).
Les greffes d’apposition calvariales permettent d’obtenir des
volumes osseux pérennes, indépendamment de la hauteur
osseuse résiduelle. Les résultats de Chiapasco et al. [8] mon-
trent une augmentation de 200 % du volume osseux initial,
une résorption postopératoire inférieure à 10 % et, sur le
plan histologique, une bonne vascularisation, une bonne
Figure 7. Schéma d’un implant transmandibulaire, d’après Betts et al.
cellularité du greffon et un faible taux de remodelage. Aucune

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complication liée au site de prélèvement calvarial n’est relatée une intervention lourde, à réserver en priorité aux reconstruc-
et les suites opératoires sont simples. tions post-traumatiques ou carcinologiques. Elle nous semble
En ce qui concerne les greffes osseuses d’apposition iliaques, injustifiable en chirurgie pré-implantaire de routine.
les techniques chirurgicales et les protocoles implantaires Les greffes osseuses costales d’apposition n’ont plus été
sont très variables et difficilement comparables entre eux publiées depuis 1988 dans cette indication. Le prélèvement
ou avec une autre technique. Les implants sont le plus souvent costal expose à des complications per- et postopératoires
mis en place dans le même temps opératoire. En raison du dont certaines peuvent être graves. Il laisse une cicatrice
taux important de résorption des greffons iliaques, le devenir thoracique visible. Ce type de prélèvement est actuellement
de l’os péri-implantaire est incertain. Cet aspect est mal réservé aux reconstructions complexes, notamment des arti-
étudié par les équipes concernées. L’évaluation de la fonte culations temporo-mandibulaires.
osseuse montre des résorptions fréquentes (58 cas sur 85) Les ostéotomies en visières ont été publiées entre 1975 et 1987.
qualifiées d’« importantes » (36 à 50 %) dans 3 articles sur 5 où Elles permettent des reconstructions de la symphyse ainsi
cette évaluation a été faite. L’utilisation d’os iliaque expose à que des branches horizontales mais exposent à des hypoes-
des suites opératoires difficiles (douleurs, alitement, cicatrice, thésies labio-mentonnières très fréquentes. Mercier et al. [13]
hospitalisation prolongée) et à des complications (lésions qualifient ces atteintes nerveuses de « trop importantes ».
nerveuses, fracture de l’épine iliaque antéro-supérieure, phlé- Ces mêmes auteurs rapportent des taux de résorption
bite, boiterie). « importants » et, à la lumière des 63 cas opérés, ne recom-
Les greffes osseuses en inlay ont fait l’objet de 12 publications mandent pas cette technique.
dont quatre depuis 2000. Elles permettent des augmenta- Les implants transmandibulaires permettent de fixer des
tions osseuses importantes mais parfois au prix d’exposition prothèses mandibulaires en un seul temps chirurgical. Ils
des greffons et d’hypoesthésies labio-mentonnières dont la ont été beaucoup utilisés entre 1989 et 1996 avec des taux
fréquence est élevée. Stoelinga et al. [4] estiment, dans leur de succès implantaires à court et moyen termes importants.
propre étude, que ces complications sont « inacceptables ». Les taux de succès prothétique à long terme sont cependant
Les équipes utilisant cette technique font exclusivement beaucoup moins bons et cette technique semble donc tombée
appel aux prélèvements osseux iliaques dont les complica- en désuétude.
tions alourdissent les suites opératoires. L’utilisation d’une plaque de reconstruction mandibulaire
La technique du tent pole a pour avantage principal de combinée à la mise en place d’implants symphysaires a l’avan-
permettre la mise en place immédiate des implants. Les tage de renforcer la mandibule sans apport osseux et permet
augmentations osseuses permises sont importantes mais ainsi la mise en place des implants dans le même temps
au prix d’hypoesthésies labio-mentonnières fréquentes. L’uti- opératoire. Elle expose probablement au risque d’hyperesthé-
lisation de biomatériaux en combinaison avec de l’os iliaque sie labio-mentonnière non signalé par les auteurs. Le très faible
est fréquente. Aucune preuve histologique n’est apportée par nombre de patients opérés et le caractère monocentrique de la
les promoteurs de cette technique en ce qui concerne l’ostéo- seule étude publiée doivent rendre prudent.
intégration de la partie émergée des implants. La diversité des techniques chirurgicales et des protocoles
La distraction osseuse permet à la fois la formation d’os utilisés ne permet pas de dégager précisément leurs indica-
autologue de même nature et l’expansion des tissus gingi- tions respectives. L’utilisation de ces techniques ne doit à
vaux. Il s’agit cependant d’une technique difficile à mettre en notre avis être envisagée qu’après avoir évalué les possibilités
œuvre dans la région symphysaire, grevée d’un taux élevé de de mise en place d’implants, éventuellement « courts », en
complications et pénible pour le patient. Elle n’est pas recom- l’état, après avoir informé le patient des solutions alternatives
mandée en première intention et est contre-indiquée en cas aux prothèses implanto-stabilisées ou implanto-portées et
de hauteur osseuse résiduelle inférieure à 10 mm [15,16]. après avoir recueilli son consentement éclairé en lui exposant
Dans les deux articles étudiés, l’augmentation osseuse verti- les risques liés à ces techniques.
cale est le seul paramètre analysé alors que l’épaisseur de la
crête osseuse résiduelle et du cal de distraction obtenu peut
demeurer problématique pour la mise en place des implants. Déclaration de liens d’intérêts
L’utilisation de lambeaux libres de fibula à visée pré-implan-
taire n’a été publiée que par une équipe et cette technique n’a Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
été réalisée que chez 8 patients. Le protocole mis en œuvre
par les auteurs comporte 3 interventions sous anesthésie
générale dont la première (mise en place du lambeau) Références
nécessite des soins postopératoires en réanimation. Les lam-
[1] Marx RE, Shellenberger T, Wimsatt J, Correa P. Severely resor-
beaux libres de fibula exposent à des complications parfois bed mandible: predictable reconstruction with soft tissue
majeures (échec du lambeau, cicatrices au niveau du site matrix expansion (tent pole) grafts. J Oral Maxillofac Surg
donneur et du site receveur, boiterie, phlébite. . .) qui en font 2002;60:878–88.

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Les augmentations osseuses mandibulaires antérieures. Revue de la littérature

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